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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mardi 7 avril 2009

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 40

Présidence de M. Guy Teissier, président

– Examen du projet de loi (n° 1216) relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 (discussion générale et examen des articles) (MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion, rapporteurs)

Examen du projet de loi (n° 1216) relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 (discussion générale et examen des articles) (MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion, rapporteurs)

La séance est ouverte à seize heures trente.

M. le président Guy Teissier. Je me réjouis que nous examinions – enfin ! – le projet de loi de programmation militaire que le Gouvernement a déposé en novembre dernier. Nous sommes tous conscients de la nécessité de débattre de ce texte très attendu par toute la communauté militaire et de défense, surtout en cette période de profonde réorganisation du ministère. Je salue d’ailleurs la présence de monsieur le ministre.

Je vais vous redire un mot de la procédure qui sera appliquée, sachant que je vous ai déjà adressé un courrier à ce propos et informés de vive voix lors de nos séances précédentes.

Nos rapporteurs, MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion, vont nous rappeler les principales dispositions du projet et nous donner le fruit de leur réflexion, le ministre nous ayant déjà présenté le texte le 25 novembre dernier.

Nous aurons ensuite une discussion générale puis nous passerons à l’examen des articles et des amendements, sachant que ceux qui seront adoptés seront intégrés au texte qui servira de base à la discussion en séance publique. Je crois pouvoir être l’interprète de tous – et sans doute de vous-même, monsieur le ministre –, pour souhaiter un examen au plus tôt en séance publique. Or les choses semblaient compromises la semaine dernière. J’ai évoqué cette question lors de la conférence des Présidents et adressé des courriers au Président de la République et au Président de l’Assemblée pour leur faire part de notre préoccupation. Et j’ai de bonnes nouvelles à vous annoncer : sous réserve de confirmation, le projet devrait être examiné les lundi 18 et mardi 19 mai.

Pour en revenir au déroulement de la séance, je salue également la présence des rapporteurs des deux commissions saisies pour avis, M. Émile Blessig, pour la commission des lois, et M. Loïc Bouvard pour la commission des affaires étrangères.

J’ai procédé, comme le veut la nouvelle procédure, à un examen en amont de la recevabilité financière des amendements. Ceux qui ont été déclarés irrecevables ne viendront bien évidemment pas en discussion.

Je signale aussi la présence de collaborateurs de groupes, comme l’a récemment autorisé la Conférence des Présidents. Ils ne peuvent être appelés à s’exprimer et devront respecter les règles de confidentialité des travaux lorsqu’il s’agira d’informations non rendues publiques.

Enfin, monsieur le ministre, vous interviendrez bien évidemment lorsque vous le souhaiterez. Vous avez d’ailleurs des amendements à nous présenter. Dès que vous me les avez transmis je les ai adressés, comme je m’y étais engagé, aux membres de la commission.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Nous abordons l’examen du projet de loi de programmation militaire déposé il y a plus de cinq mois sur le bureau de l’Assemblée. Nous déplorons ce retard dont les inconvénients sont certains : la loi de finances pour 2009, première année de la programmation, a été votée avant que le projet n’ait été débattu. En outre, la crise économique a changé certaines données, et le Gouvernement nous présentera d’ailleurs des amendements qui actualisent certains chiffres et intègrent les effets du plan de relance.

Mais ce retard est surtout dommageable pour nos armées : le Livre blanc a été présenté à l’Assemblée il y a près d’un an et il n’est que temps que la communauté militaire trouve la traduction législative des orientations et des missions nouvelles que nous souhaitons lui donner.

Nous étions, comme vous monsieur le Président, très désireux que le texte puisse être examiné au plus tôt en séance publique et il faut donc se réjouir d’avoir maintenant une date.

Nous avons utilisé ces semaines supplémentaires pour mener un travail de fond, dans le droit fil de celui que nous avions engagé avec Mme Patricia Adam pour le bilan de la programmation 2003-2008. La commission a tenu 14 auditions, mais nous avons entendu de notre côté toutes les parties prenantes en nous focalisant sur les aspects financiers et industriels mais aussi sur les articles a priori plus éloignés de la programmation, comme ceux relatifs au secret de la défense nationale.

Comme l’indique l’introduction du rapport annexé, la loi de programmation militaire 2009-2014 constitue « la première étape de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par le Livre blanc ». Le projet décline donc, pour les armées, les orientations préconisées par le Livre blanc afin de fixer les principes de la politique de défense et les moyens qui lui seront consacrés au cours de la période 2009-2014.

Pour chacune de cinq fonctions stratégiques identifiées par le Livre blanc – « Connaissance et anticipation », « Dissuasion », « Prévention », « Protection », « Intervention » – le rapport annexé détaille les objectifs et les contrats opérationnels correspondants.

Le projet s’inscrit en outre dans une perspective à long terme puisque la traduction complète des objectifs fixés par le Livre blanc nécessitera une seconde loi de programmation, dont les grands axes et les principaux programmes sont évoqués dans le texte.

Le projet compte sept chapitres et 17 articles. Il est accompagné, comme il est de tradition, d’un rapport annexé dont nous discuterons plus précisément à l’article 2.

Si nous avons souhaité dans cette partie du texte que soient réaffirmés certains éléments, comme l’importance des programmes de cohérence opérationnelle de l’armée de terre ou la nécessité d’augmenter les crédits consacrés à l’espace et à la recherche, nous voulons souligner l’effort de sincérité et de cohérence de la démarche proposée : une évaluation régulière du Livre blanc est prévue, de même qu’une révision glissante de la programmation, ce qui devrait faciliter notre travail de contrôle et de suivi.

Les quatre articles du chapitre premier fixent les objectifs de la politique de défense et, plus particulièrement, la programmation financière. Ils traitent de l’évolution prévisionnelle des crédits de paiement de la mission défense, qui seront réactualisés par les amendements du Gouvernement. On peut d’ores et déjà observer que le texte englobe la totalité des crédits, hors charges de pensions, alors que les précédentes lois de programmation ne prévoyaient qu’une évolution des crédits d’équipement.

Le ministère bénéficiera d’un budget en croissance au cours des prochaines années, et les économies qu’il pourra réaliser du fait de la réorganisation lui resteront entièrement affectées ; c’est dire le sort favorable qui est fait à notre défense, et la priorité qui lui est attachée.

Le chapitre II et son article 5 traduisent les préconisations du Livre blanc en proposant un nouveau cadre institutionnel - avec la création d’un conseil de défense et de sécurité nationale –, et en redéfinissant les attributions des différents ministres.

Le chapitre III – article 6 – propose une mesure de validation législative de compensations accordées à certains personnels exposés à des risques particuliers d’insalubrité.

Le chapitre IV – articles 7, 8 et 9 – est relatif aux modalités de cession des installations de la défense et à la réindustrialisation des zones touchées par les restructurations.

Au sein du chapitre V, l’article 10 traite de DCNS et a déjà fait l’objet d’auditions et de débats au sein de notre commission. Nous avons complété notre information par d’autres réunions qui nous conduisent à vous présenter des aménagements répondant à certaines inquiétudes. L’article 11, qui concerne la SNPE, a déjà été évoqué par la commission.

Le chapitre VI et les articles 12, 13 et 14 ont trait au secret de la défense nationale. La commission des lois s’en est saisie et le rapporteur pour avis nous présentera les amendements qu’elle a adoptés. Nous avons de notre côté procédé à de nombreuses auditions et nous vous proposerons de modifier le texte, dans le même esprit que celui de la Commission des lois, avec le souci de conforter l’équilibre entre la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation et la nécessité de garantir les moyens d’intervention des magistrats.

Le texte se termine par diverses dispositions concernant la défense et prévoit l’application du projet dans les départements, les régions et les collectivités d’outre-mer – chapitre VII, articles 15 à 17.

Nous aurons l’occasion de présenter en détail chacun de ces articles ainsi que nos amendements. Nous souhaitons que ce projet soit adopté pour apporter à la communauté militaire, qui attend depuis trop longtemps, les réponses du Parlement sur son avenir et sur ses missions.

M. le président Guy Teissier. Nous abordons l’examen des articles.

TITRE Ier : dispositions financières

La Commission est saisie de l’amendement CD 1 de MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion, rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il s’agit de supprimer la mention d’un titre premier, le projet de loi ne comportant qu’un titre unique.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre Ier

Dispositions relatives aux objectifs de la politique de défense
et de la programmation financière

La Commission examine l’amendement CD 2 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cet amendement est destiné à distinguer la programmation financière des objectifs de la politique de défense.

La Commission adopte l’amendement.

Article 1er

Contenu de la LPM

La Commission examine l’amendement CD 3 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cet amendement met la formulation de l’article 1er en conformité avec l’amendement précédent.

La Commission adopte l’amendement CD 3 des rapporteurs.

Elle adopte ensuite l’article 1er ainsi modifié.

Article 2

Approbation du rapport annexé

La Commission est saisie de l’amendement CD 115 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Faisant pour la première fois usage des nouvelles dispositions du Règlement, je propose de supprimer cet article.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis défavorable car cela viderait le texte de sa substance et priverait le Gouvernement de la possibilité d’orienter la politique de défense.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 36 du Gouvernement.

M. Hervé Morin, ministre de la défense. Il s’agit d’intégrer le plan de relance dans la loi de programmation militaire, à hauteur de 1,080 milliard d’euros, 1,710 milliard d’euros provenant de la mission relance tandis que la mission défense est réduite de 630 millions d’euros. Au final, les crédits de la programmation passent de 184,8 milliards d’euros à 185,9 milliards d’euros.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis favorable.

M. Bernard Cazeneuve. C’est l’équation budgétaire de la LPM qui est ainsi modifiée. M. le ministre peut-il préciser comment sont financées les sommes injectées et quelles années de la LPM sont concernées ?

M. le ministre. Ces crédits viennent de la mission relance, il s’agit donc de crédits budgétaires. Ils permettront d’anticiper un certain nombre de dépenses. Ainsi, le troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC) devrait être commandé très prochainement et non plus en fin de période. Globalement, l’enveloppe budgétaire du ministère va s’accroître en 2009 et 2010, puis se réduire jusqu’en 2014.

M. Bernard Cazeneuve. Dans le dispositif budgétaire pour 2009, vous tabliez sur 1,6 milliard de recettes exceptionnelles qui paraissent bien aléatoires puisqu’elles proviendraient des ventes de fréquences et d’actifs immobiliers. Or, si cette somme vient en déduction du 1,7 milliard d’euros engagé dans le cadre du plan de relance, le solde sera bien mince et on voit mal comment vous parviendrez à anticiper certains achats…

M. le ministre. Les recettes exceptionnelles inscrites au budget 2009 n’ont rien d’aléatoire. Nous sommes en train de monter les dossiers techniques. Ni l’équation budgétaire pour 2009 ni celle de la LPM ne sont remises en cause, il s’agit simplement d’engager une enveloppe supplémentaire de 1,080 milliard d’euros.

M. Bernard Cazeneuve. C’est le ministre du budget qui a dit, lors de son audition ici même, que ces recettes exceptionnelles risquaient d’être aléatoires, ce que confirment d’ailleurs trois articles de la presse spécialisée.

Mes questions ne traduisent aucune défiance, simplement nous devons exercer notre pouvoir de contrôle pour être certains de ce que nous votons… Or, si on n’est pas assuré d’obtenir 1,6 milliard d’euros grâce aux recettes exceptionnelles et que 1,7 milliard d’euros proviennent du plan de relance, on peut se demander si les achats anticipés seront bien financés.

M. le président Guy Teissier. Le ministre du budget nous a dit que 300 millions d’euros avaient déjà été engrangés et que la vente des fréquences n’aurait pas lieu cette année car l’armée n’est pas capable de basculer aussi vite vers un autre réseau. Il a ajouté que, contrairement à ce que nous avait dit le ministre de la défense et compte tenu du fait que le marché parisien ne s’était pas effondré comme on le pensait, il préférait avoir une gestion prudente des actifs de l’État, se refusant à confier la totalité des actifs immobiliers à une seule société de portage, émanation de la Caisse des dépôts. Il a déclaré préférer laisser une partie des actifs sur le marché, afin qu’ils soient vendus à un meilleur prix, grâce à un mécanisme de portage qui sera ultérieurement défini.

Les deux ministres se rejoignent donc dans la volonté de réaliser ces opérations dans les meilleures conditions.

M. le ministre. Voici les propos exacts du ministre du budget : « Même si les ventes de fréquences ou les ventes immobilières étaient reportées, nous mobiliserons 500 millions d’euros de report pour faire face à ces obligations. Par conséquent, même si l’immobilier s’effondre et même si nous ne parvenons pas à céder les fréquences dans les délais prévus, la défense ne connaîtra pas de difficultés de gestion en 2009. »

M. Bernard Cazeneuve. Dont acte. Je précise cependant que je posais cette question dans votre intérêt : exprimer notre méfiance à l’égard de promesses du ministre du budget visant à compenser la non-réalisation de certaines recettes permet de faire acter les décisions budgétaires.

La Commission adopte cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 153 de Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Cet amendement, que je présente au nom de l’ensemble du groupe socialiste, vise à supprimer les alinéas correspondant à la première partie du rapport annexé qui définit la nouvelle stratégie de sécurité nationale.

Celle-ci provoquera un élargissement très important des pouvoirs du Président de la République, au détriment du Premier ministre, ce qui suppose la modification de l’ordonnance de 1959. Or, d’une part, il nous semble difficile de voter cet article sans connaître les modifications qui seront apportées à l’équilibre des pouvoirs et d’autre part, nous sommes très attachés à cette ordonnance qui a toujours été appliquée, pour ce qui concerne la défense et la sécurité, dans de bonnes conditions et avec un bon équilibre des pouvoirs, même durant les périodes de cohabitation.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Le Livre blanc propose une modernisation des concepts de défense pour mieux répondre aux nouvelles menaces, qui viennent souvent de l’intérieur.

La stratégie de sécurité nationale se caractérise par la mise en œuvre d’une réponse collective et adaptée aux répercussions sur notre territoire des évolutions de notre environnement géopolitique, dont le caractère instable, imprévisible et brutal doit être souligné.

Le rapport annexé rappelle la nécessaire articulation entre cette stratégie et la politique de défense qui y concourt. La sécurité nationale requiert en particulier la possibilité de mobiliser des moyens militaires, civils, économiques, sanitaires, voire diplomatiques. À cet égard, le projet de loi ne fait que compléter les dispositions de l’ordonnance de 1959, qui font de la défense militaire une déclinaison de la politique générale, aux côtés de la défense civile et de la défense économique.

Loin de répondre à la logique du tout sécuritaire, il s’agit d’organiser la répartition des actions opérationnelles entre les départements ministériels. Au ministère de la défense échoit la politique de défense, dont le rapport annexé fixe l’orientation avec précision, en fonction du contexte international, de nos obligations internationales et de nos intérêts. L’adoption de cet amendement aboutirait à nier les fonctions stratégiques et les contrats opérationnels qui caractérisent désormais la politique de défense.

Enfin, la création du conseil de défense et de sécurité nationale vise à apporter une réponse cohérente et coordonnée à une agression armée ou une catastrophe naturelle, sous la responsabilité du Président de la République, mais aussi du Premier ministre, qui dirige l’action du Gouvernement en la matière. Il serait incohérent de nier ces implications multiples.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président Guy Teissier. J’ajoute qu’en supprimant ces alinéas, nous remettrions en cause l’esprit même du Livre blanc.

M. Patricia Adam. Telle est bien notre intention.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 177 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Je souhaiterais, avant de présenter cet amendement, souligner que l’article 40 de la Constitution semble faire parfois l’objet d’une interprétation très large. Pourquoi l’a-t-on opposé à un de mes amendements proposant de promouvoir l’enseignement des langues étrangères, en particulier orientales ?

M. le président Guy Teissier. La mise en œuvre de l’article 40 de la Constitution est tout sauf arbitraire, la jurisprudence de la Commission des finances étant établie de longue date. Je vous précise par ailleurs que l’examen de la recevabilité s’est fait en collaboration avec le président de la Commission des finances, Didier Migaud. Je me tiens à votre disposition pour expliquer mes décisions. En l’occurrence, l’amendement est irrecevable car il crée ou aggrave une charge de l’État en rendant obligatoire l’enseignement des langues orientales.

M. Philippe Folliot. L’outre-mer, les terres australes antarctiques françaises et les zones économiques exclusives qui leur sont rattachées sont absents du projet de loi, alors qu’il s’agit d’un enjeu stratégique majeur pour notre pays. Or, ces territoires sont actuellement menacés par la piraterie, les trafics de marchandises et de personnes ainsi que par le pillage des ressources naturelles. En outre, ce sont de formidables réservoirs de biodiversité ; ils révèleront peut-être demain de nouvelles ressources à exploiter : énergies de substitution, algues, nodules polymétalliques ou hydrates de méthane.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement répond à des préoccupations louables, mais son positionnement dans le texte est hasardeux : les enjeux qu’il souligne ne constituent pas à proprement parler un « infléchissement » du contexte stratégique. Il s’agit plutôt d’une particularité devant être prise en compte par les fonctions stratégiques de prévention et de protection.

M. le ministre. Même avis : cela fait des décennies que ces considérations sont intégrées dans notre réflexion stratégique. Toutefois, sur le fond, je suis d’accord avec M. Philippe Folliot.

L’amendement CD 177 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD 80 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Cet amendement vise à corriger ce qui est pour moi l’une des plus graves lacunes de ce texte : l’absence des mots « défense européenne ». Une « ambition européenne » sans défense européenne, cela ne veut rien dire !

C’est de surcroît une rupture importante, car tous les chefs d’État et de gouvernement précédents s’étaient accordés pour promouvoir une défense européenne. Par ailleurs, le traité de Lisbonne fait explicitement référence à la notion de « défense commune européenne ». Enfin, le Premier ministre avait justifié le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l’OTAN par sa volonté de faire progresser la coopération européenne en la matière. Je propose donc d’intituler le paragraphe 1.2.1 du rapport annexé : « La Défense européenne ».

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La formulation proposée par M. Daniel Garrigue mettrait certes l’accent sur la construction d’une Europe de la défense, mais elle réduirait du même coup le champ du paragraphe, dans la mesure où l’article 42.1 du traité de Lisbonne stipule clairement que la défense européenne est l’une des composantes de la politique de sécurité et de défense commune. L’expression « ambition européenne » permet au contraire d’évoquer tous les enjeux liés à la défense et à la sécurité. Avis défavorable.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 81 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Cet amendement tend à donner une définition ambitieuse de la défense européenne, sur le modèle de la défense nationale.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis défavorable : il ne faudrait pas que la politique française de défense se réduise à la construction d’une défense européenne. L’article 42.2 du traité de Lisbonne précise d’ailleurs qu’il appartient aux États « de définir progressivement une politique de défense commune ». En outre, la rédaction proposée entretient une confusion entre les responsabilités de la France et celles de l’Union. Le paragraphe du rapport annexé concerné vise à définir le champ de compétence de l’Union, non à présenter la défense française comme une partie de la défense européenne.

M. le ministre. L’Européen convaincu que je suis ne peut que partager l’ambition de M. Daniel Garrigue. Mais la France ne peut pas concevoir seule l’Europe de la défense ! Définir la défense européenne comme la défense du « territoire, des habitants et des intérêts vitaux des États-membres », ce qui sous-tend la notion de dissuasion, me semble aller très loin. Aujourd’hui, aucun État membre ne souhaite une armée européenne intégrée, pas même la France : qui serait prêt à placer une grande partie de notre défense et de notre sécurité sous une autorité supranationale ? Même moi, je ne peux souscrire à votre formulation, car je n’ai aucune envie de confier aux vingt-sept États membres la sécurité de nos concitoyens ! Nous sommes nombreux à avoir pour ambition de construire une puissance européenne, mais votre amendement va bien au-delà.

Mme Patricia Adam. Je comprends votre position monsieur le ministre, mais elle ne me semble pas en contradiction avec l’amendement proposé. Le Livre blanc était très attendu par nos partenaires européens qui souhaitaient connaître l’ambition de la France en matière de défense. Il me semble important de la décrire en ces termes. Certes, la défense européenne doit être une construction commune, mais qu’un pays soit en avance et affirme sa volonté ne me choque pas, bien au contraire.

M. Daniel Garrigue. La construction d’une défense européenne ne suppose nullement, monsieur le ministre, la création d’une armée européenne : elle peut très bien s’appuyer sur des unités mises à disposition par les États membres.

M. le ministre. Ce que prévoit le traité de Lisbonne, c’est une « politique européenne de sécurité et de défense ». Si l’on a utilisé ces termes-là, c’est parce que les Européens veulent avant tout se doter de capacités militaires communes.

M. Bernard Cazeneuve. Le présent débat est une sorte de résurgence de celui sur le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Une grande partie de ceux qui doutaient de la nécessité de cette décision craignaient qu’elle ne signe la fin de la volonté des États membres de construire ensemble une politique européenne de sécurité et de défense, détachée du parapluie américain. Dès lors que le Gouvernement nous assure du contraire, il n’y a aucune raison de refuser toute mention du concept d’Europe de la défense dans ce texte ! Au contraire, cela permettrait de reconstruire le consensus qui a été brisé.

M. Yves Fromion, rapporteur. Je rappelle que si les Irlandais et les Tchèques finissent par adopter le traité de Lisbonne, le mécanisme de l’Europe de la défense se mettra de facto en route. Les États membres qui le souhaiteront auront tout loisir de le conforter, en particulier grâce à la coopération structurée permanente.

M. le ministre. L’ambition européenne affichée n’est pas médiocre : il est question d’une capacité globale d’intervention de 60 000 hommes déployés pendant un an sur un théâtre éloigné, d’un accent mis sur l’industrie de la défense et sur l’agence européenne de défense. Les coopérations recherchées ne sont pas seulement industrielles, mais aussi culturelles et opérationnelles et l’Europe doit être un acteur efficace de protection contre les risques.

M. Bernard Cazeneuve. Loin de faire aucun procès au ministre, nous cherchons à proposer des éléments de consensus. La proposition de M. Daniel Garrigue va dans ce sens, en ce qu’elle vise à affirmer que nous sommes tous convaincus de la nécessité de faire l’Europe de la défense. Il n’est pas sans risque toutefois d’associer au débat sur l’Europe de la défense les pays qui n’appartiennent pas à l’Union : il n’y a dès lors rien d’étonnant à ce que le Président des États-Unis évoque sans nous avoir préalablement consultés l’entrée dans l’Union européenne de tel ou tel pays.

M. Daniel Garrigue. À vous entendre, monsieur le ministre, il semblerait que la réintégration des structures intégrées de l’OTAN prévaut et que la défense européenne se limite à la participation à des opérations extérieures. Il est inquiétant que la défense de l’Europe n’apparaisse pas comme telle dans le texte.

M. Serge Grouard. En matière de défense et de construction européenne, les mots ont un sens précis. Gardons-nous d’un débat strictement national qui oublierait nos partenaires européens. Évoquer dans le texte, à une ligne d’intervalle, la « défense européenne » et l’« intérêt vital » d’un pays peut exposer la France au reproche de vouloir insidieusement étendre sa dissuasion nucléaire sur tout ou partie du territoire européen, ce qui serait précisément préjudiciable à l’Europe de la défense.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 82 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Pour faire droit au souci du ministre d’envisager la défense européenne en tenant compte de nos partenaires, l’amendement propose de reprendre les termes employés dans l’article 28 A du Traité de Lisbonne.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Le Traité de Lisbonne précise que la politique de sécurité et de défense commune inclut la définition progressive d’une politique de défense commune de l’Union. L’amendement, qui s’inspire en effet des termes du traité, s’en écarte toutefois en omettant notamment la notion de sécurité, ce qui pourrait produire une certaine ambiguïté. Évoquant la participation de la France à l’Europe de la défense, cet amendement s’insère mal, en outre, dans le paragraphe du rapport annexé relatif aux moyens européens de défense. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 83 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. L’amendement tend à souligner la volonté de la France de s’acheminer vers une défense commune de l’Union par des coopérations structurées ou renforcées. Ce serait, là encore, s’inscrire dans l’esprit du Traité de Lisbonne ; mais je crains que tel ne soit pas votre souhait.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’amendement laisse à penser que le processus envisagé ne serait qu’une première étape. Il renvoie par ailleurs à « une » coopération structurée permanente alors qu’il n’en existe précisément qu’une seule, conformément aux stipulations de l’article 42 du Traité. Il évoque enfin une coopération renforcée, laquelle est impossible dans le domaine de la défense. L’amendement est donc inapplicable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 84 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. L’amendement tend à réintégrer dans le projet de loi la mention de la clause de défense mutuelle prévue par le Traité de Lisbonne. Il s’agit de mentionner les moyens « militaires et autres » qui figuraient à l’article 5 du Traité de Bruxelles sur l’Union de l’Europe occidentale, lequel n’a plus d’objet depuis la mise en place de la politique européenne de sécurité et de défense.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Le paragraphe 7 de l’article 42 du Traité de Lisbonne précise qu’« au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir ». Cette modification est très positive, mais elle ne saurait conduire un État à imposer aux autres de lui porter effectivement aide et assistance. M. Garrigue, qui estime nécessaire d’indiquer que la France veillera à ce que ses partenaires respectent leurs engagements, douterait-il ab initio de leur sincérité ? Enfin, je rappelle que les missions de Petersberg prévoient déjà que les États membres participent à des missions humanitaires ou d’évacuation des ressortissants de l’Union, quelle que soit la nationalité de ces derniers. De même, il est prévu que les États s’engagent dans des missions de maintien de la paix ou de combat pour la gestion des crises, y compris des missions de rétablissement de la paix. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 85 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Cet amendement tend à relancer le débat sur la notion de dissuasion concertée. Le terme, employé par Alain Juppé, fait suite à l’idée de « dissuasion élargie » avancée dès la fin des années 1970 par le général Guy Méry, puis reprise par le président Valéry Giscard d’Estaing, avant que le président François Mitterrand n’évoque une défense nucléaire commune.

La sanctuarisation du territoire national ne suffit pas et une concertation avec nos partenaires est nécessaire sur les conditions d’emploi de la dissuasion nucléaire.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Le Président de la République a rappelé que la dissuasion reste le pivot central de notre indépendance nationale et contribue à la sécurité de nos alliés. Dans son discours de Cherbourg, il a proposé d’engager avec ceux de nos partenaires européens qui le souhaiteraient un dialogue ouvert sur le rôle de la dissuasion et sa contribution à notre sécurité commune. Cet engagement rend inutile l’ajout de cet objectif au projet de loi, et cela d’autant moins que les différences de terminologie pourraient entraîner d’inutiles divergences d’interprétation. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 86 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je pose ici le problème de la défense antimissile, totalement évacué du projet de loi qui nous est soumis. La dissuasion traditionnelle, celle du faible au fort, ne correspond plus à la menace actuelle, les agresseurs n’étant pas toujours identifiables ou pouvant obéir à une rationalité différente de la nôtre.

La défense antimissile n’est pas incompatible avec la dissuasion nucléaire et le fait d’aborder la question permettrait d’approfondir la complémentarité éventuelle de ces deux concepts. Cela permettrait également d’aborder les problèmes que posent, notamment vis-à-vis de la Russie, les initiatives prises en la matière par les États-Unis avec la Pologne et la République tchèque. Cela permettrait enfin d’examiner les enjeux technologiques d’un tel programme.

M. Jean-Claude Viollet. Ce débat récurrent comporte plusieurs aspects. Tout d’abord, le développement d’un tel système de défense revient à reconnaître l’insuffisance de la dissuasion. La question n’a, au demeurant, rien à voir avec le dispositif d’alerte avancée. Cela serait propre, en outre, à relancer la course à l’armement nucléaire au moment même où les États, y compris les États-Unis, manifestent leur volonté de contenir ce phénomène. En troisième lieu, malgré les demandes des industriels pour ouvrir un tel marché, il n’est pas certain que nous soyons en mesure de supporter l’effort financier que représenterait le développement d’un tel programme.

M. Garrigue pose des questions fortes, mais la dissuasion doit rester nationale, car notre pays, à la différence de certains de ses partenaires, en possède encore les clés.

M. le ministre. Dans le cadre de l’Alliance atlantique, la France a toujours eu une position très réservée quant à une défense antimissile. Je souscris aux arguments de M. Viollet : ce système induit le risque d’une nouvelle course à l’armement et son coût, 15 à 30 milliards d’euros au moins, pose, dans un contexte budgétaire très contraint, la question de savoir quelles en seraient les conséquences pour nos capacités militaires conventionnelles et classiques. Nous avons plus besoin de VBCI ou de Barracuda que de défense antimissile.

On estime aujourd’hui que cinq scenarii sont possibles, qui vont de l’interconnexion des systèmes de défense antimissile existants à un système global.

Plusieurs problèmes se posent, dont le premier est celui de l’analyse de la menace. En tout état de cause, la défense antimissile est inopérante face à une puissance nucléaire de premier rang et on ignore quelle serait son efficacité face à une puissance balistique rustique. Par ailleurs, qui aurait la clé du dispositif ? Enfin se pose le problème de la construction technique appropriée.

La question n’en est pas moins intéressante et elle mériterait un rapport parlementaire.

M. Daniel Garrigue. Face à la dissuasion nucléaire, qui est celle du fort au faible, la défense antimissile est la dissuasion du sage au fou. Mais il importe de « ré-européaniser » le débat sur la défense antimissile, alors qu’il semble nous échapper actuellement. J’ajoute que cette question dépasse même le cadre de l’OTAN, ce qui prouve bien que les rapports entre les États membres de l’Alliance sont inégaux.

Ce serait aussi une manière de rouvrir le dialogue avec la Russie. C’est, enfin, un enjeu technologique qui concerne l’Union européenne entière. À défaut de tout résoudre, il importe au moins d’ouvrir le débat.

M. le président Guy Teissier. Je suis très favorable à une réflexion parlementaire sur cette intéressante question.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Une réflexion sur ces questions serait assurément bien venue. J’émets toutefois un avis défavorable sur l’amendement, car il serait dangereux de mentionner explicitement certains pays, notamment la Russie, comme partenaires à cette discussion. Une telle rédaction constituerait un véritable carcan diplomatique et militaire et nuirait, au bout du compte, à la liberté et à la qualité du dialogue.

M. Jean-Claude Viollet. Les négociations en cours entre les États-Unis et certains pays sur la mise en place d’un bouclier antimissile ne doivent pas conditionner notre positionnement sur cet outil. En revanche, la France, puisqu’elle vient de rejoindre le commandement intégré de l’OTAN, doit y faire entendre sa voix. Le secrétaire général de l’OTAN, auditionné par notre commission, a d’ailleurs jugé inacceptable que de telles décisions se prennent en dehors de l’OTAN. L’une des manières de faire entendre un message à nos amis russes consiste à dire clairement qu’il n’est pas question qu’un partenaire de l’OTAN s’arroge le droit d’implanter de telles armes sur le territoire d’un pays de l’Alliance sans qu’il y ait eu débat au sein de celle-ci.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de deux amendements en discussion commune : l’amendement CD 87 de M. Daniel Garrigue et l’amendement CD 111 de MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion, rapporteurs.

M. Daniel Garrigue. L’amendement CD 87 est en quelque sorte un amendement de coordination, qui supposait que nous ayons préalablement défini la défense européenne, comme le proposaient mes amendements précédents. La défense européenne ayant été repoussée avec eux, il est à craindre que ce soit aussi le sort qui attend celui-ci. Je le présenterai de nouveau lors de l’examen du texte en séance publique.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’amendement CD 111 est rédactionnel ; il permet d’insister sur les progrès que doit accomplir l’Union européenne en matière de gestion des crises et de sécurité internationale.

M. Jean-Pierre Soisson. En entendant M. Daniel Garrigue annoncer qu’il reprendra en séance publique son amendement si nous le rejetons en commission, je me demande quel est l’intérêt de la nouvelle procédure d’examen des textes que nous inaugurons.

M. le président Guy Teissier. Mon cher collègue, le texte examiné en séance publique sera celui qu’aura élaboré notre Commission. Les amendements rejetés n’y seront donc pas pris en compte. Rien n’interdira, en revanche, à M. Daniel Garrigue de proposer des amendements qui porteront sur le nouveau texte.

La Commission rejette l’amendement CD 87, puis adopte l’amendement CD 111.

La Commission est saisie d’un amendement CD 88 de M. Daniel Garrigue.

M. le président Guy Teissier. Je propose que cet amendement soit discuté ultérieurement, en même temps que l’amendement CD 170.

M. Daniel Garrigue. Je suis d’accord.

L’amendement est réservé.

La Commission examine l’amendement CD 89 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. La défense européenne, c’est-à-dire la défense du territoire des États membres et de leur population, n’est traitée que de façon secondaire dans le texte alors qu’elle devrait être une ambition prioritaire. Je retire néanmoins cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie ensuite de l’amendement CD 90 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Étant hostile au retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN et attaché à la constitution d’une défense européenne, je voudrais que l’Union européenne forme le pilier européen de l’Alliance atlantique. Je regrette que vous ayez fait un choix différent.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La rédaction actuelle du projet affirme que l’OTAN et l’Union européenne sont complémentaires et que le renforcement de cette dernière et la rénovation de l’OTAN constituent les deux volets d’une même démarche. L’amendement de M. Garrigue tend au contraire à opposer les deux institutions et fragiliserait la cohérence de la politique française de coopération globale en matière de défense. Avis défavorable.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD 91 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Il s’agit de remplacer le terme « OTAN » par les termes « Alliance atlantique ».

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cela n’apporte rien, et risque même de créer une confusion. Avis défavorable.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine l’amendement CD 92 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Cet amendement supprime deux phrases illustrant une tendance gravissime, que l’on retrouve jusque dans la déclaration commune de Mme Angela Merkel et de M. Nicolas Sarkozy et qui consiste à mettre l’OTAN et l’Union européenne sur le même plan et à évoquer des « valeurs communes ». Mais l’OTAN et l’Union n’ont ni la même finalité, ni les mêmes valeurs. Le mélange des genres est tout à fait déplorable et conduit à terme à l’abdication par les Européens de leur souveraineté et de leur liberté. Une autre confusion est entretenue entre la sécurité intérieure et extérieure, c'est-à-dire entre le domaine de la défense proprement dit et celui de la sécurité, ce qui me paraît masquer un arrière-plan sécuritaire quelque peu préoccupant.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cet amendement fait perdre son sens au texte. Il rejette la complémentarité et la cohérence qui existent entre l’OTAN et l’Union européenne.

Mme Patricia Adam. C’est au contraire un excellent amendement. La nouvelle relation transatlantique qui nous est proposée présente l’Union européenne et l’OTAN comme deux organes ayant le même objectif, mais l’Union est une construction beaucoup plus vaste qu’une alliance de défense. Le projet de loi est peut-être conforme à ce qu’est l’OTAN aujourd’hui, mais assurément pas à ce qu’est l’Europe.

M. Serge Grouard. Au lieu de supprimer ces deux phrases, ne pourrait-on remplacer « l’Union européenne » par « la politique de sécurité et de défense commune » ou par la mention de la politique européenne de sécurité et de défense?

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La dernière phrase de l’alinéa 26 pourrait alors se lire ainsi : « Le renforcement de la politique de sécurité et de défense commune et la rénovation de l’OTAN constituent donc les deux volets d’une même démarche ». J’y suis favorable.

La Commission adopte l’amendement oral (CD 194) de M. Serge Grouard. En conséquence, l’amendement CD 92 de M. Daniel Garrigue tombe.

Elle est saisie de l’amendement CD 93 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Inscrire dans la loi que le rapprochement de la structure de commandement de l’OTAN « devrait s’effectuer » dans le respect de certains principes ne plaide guère pour le respect réel de ces principes ! Je propose de remplacer cette expression par « ne peut se faire que ».

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il est vrai que le respect de ces principes ne saurait être hypothétique, mais la rédaction proposée me paraît quelque peu péremptoire. Je propose une formulation plus simple : « Un nouveau rapprochement avec la structure de commandement de l’OTAN s’effectue dans le respect des principes suivants… ».

M. le Ministre. Cela serait encore mieux en substituant aux mots « Un nouveau rapprochement » les mots « Le rapprochement ».

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Je suis d’accord.

M. Daniel Garrigue. Pour ma part, je maintiens mon amendement.

La Commission adopte l’amendement oral (CD 195) proposé par le rapporteur. En conséquence, l’amendement CD 93 de M. Daniel Garrigue tombe.

La Commission examine ensuite l’amendement CD 94 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Je propose de mentionner parmi les principes à défendre la libre détermination de nos concepts stratégiques et de nos scénarios de crise ; autrement dit, d’une part, la doctrine d’emploi de nos forces et, d’autre part, les hypothèses dans lesquelles nous les engageons. Si nous perdons cette libre détermination, nous aurons tout abandonné.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Les principes cités à cet alinéa me semblent déjà assurer cette liberté mais étant donné que l’amendement ne modifie pas l’esprit du texte, je veux bien lui donner un avis favorable.

M. le ministre. Les principes qui figurent dans le texte, à savoir l’indépendance complète de nos forces nucléaires, la liberté d’appréciation des autorités françaises, l’absence d’automaticité, le maintien des moyens de l’autonomie stratégique, la liberté permanente de décision, sont nettement plus larges ! Cet ajout serait pure redondance.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD 95 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Il s’agit de préciser qu’une force française ne peut être placée sous commandement de l’OTAN qu’à titre exceptionnel et en raison de circonstances très particulières.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La rédaction actuelle indique clairement qu’aucune force française ne saurait être placée en permanence sous le commandement de l’OTAN en temps de paix. L’amendement se montre beaucoup plus restrictif. Il n’y a pas d’intérêt à se rapprocher de l’OTAN pour ne jamais y participer ! Par ailleurs, il n’est guère acceptable de dicter au Gouvernement la doctrine de l’emploi des forces françaises. Avis défavorable.

M. le ministre. À chaque fois que nous menons des opérations avec l’OTAN, c’est sous son commandement et Daniel Garrigue ne s’en est jamais ému ! C’est d’ailleurs normal puisque, même dans ce cas, nos forces relèvent à chaque instant de l’autorité nationale et que le chef des armées peut toujours refuser une intervention.

M. Daniel Garrigue. Mon amendement lie la mise sous commandement de l’OTAN à une opération. Votre texte est beaucoup plus extensif, puisqu’il l’autorise dès lors qu’on n’est plus en temps de paix. Ma définition est plus précise.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD 178 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Le retour de la France dans le commandement intégré doit s’accompagner d’une réforme en profondeur de l’Alliance et de la mise en place d’un pilier européen autonome. On peut regretter que ce travail n’ait pas été engagé en position de force, c’est-à-dire avant la décision de réintégration. Faire émerger une véritable défense européenne au sein de l’OTAN, avec son identité et sa stratégie propre, m’apparaît indispensable non seulement pour l’image de la France dans le monde mais aussi pour la construction de la politique européenne de sécurité et de défense. Cet amendement bénéficie d’un prestigieux parrainage : à la fois du Président de la République, qui souhaite une réforme en profondeur de l’OTAN, et du président John Fitzgerald Kennedy, qui fut le premier, en 1963 à Berlin, à dessiner la perspective de ce pilier européen.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Si une réforme en profondeur de l’organisation atlantique est tout à fait envisageable, la proposition concernant le pilier européen est plus délicate : si elle était acceptée, le rapport annexé s’immiscerait dans les débats internes de l’OTAN et imposerait un axe unique d’évolution. En outre, cette rédaction est difficilement compatible avec les autres dispositions qui insistent sur la complémentarité entre l’OTAN et la défense européenne. Avis défavorable.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine l’amendement CD 96 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Il s’agit d’insérer un nouvel alinéa précisant que nous ne pourrons rester dans l’OTAN et être tenus par ses règles si les Américains continuent à développer leur projet de défense antimissile sur le territoire européen en dehors de l’OTAN. La situation serait en effet par trop inégale.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Si nous conservons toute notre appréciation sur notre force nucléaire, pourquoi les autres pays ne seraient-ils pas libres de discuter avec qui ils veulent ? Nous partageons l’intérêt de M. Garrigue pour la défense antimissile, mais il serait dangereux de mentionner un seul pays, la Russie, comme partenaire de cette discussion. Un tel carcan finirait par nuire à la liberté du dialogue. Avis défavorable.

M. le ministre. Si tout devait se tenir dans l’OTAN, je serais pour le coup inquiet pour notre indépendance ! Cette proposition est en contradiction totale avec les propos antérieurs de M. Garrigue : chacun doit mener ses relations diplomatiques avec qui il souhaite, membre ou non de l’Alliance atlantique. En outre, la nouvelle administration américaine a ouvert des discussions avec la Russie sur ce sujet.

M. Daniel Garrigue. J’admets que ma rédaction n’est pas irréprochable, mais que devient la défense européenne si les Américains viennent installer des défenses antimissiles sur le territoire européen ?

M. Serge Grouard. Il me semble que cet amendement, comme beaucoup d’autres, ne relève en rien du domaine législatif.

M. le président Guy Teissier. Ils portent sur le texte du rapport annexé, dont nous sommes saisis.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD 167 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Cet amendement précise, pour répondre aux craintes qui s’expriment, que des militaires ne peuvent pas être mis à la disposition de l’OTAN au détriment de nos missions diplomatiques ou des coopérations militaires bilatérales que nous menons par ailleurs.

M. Jean-Pierre Soisson. Cet amendement est pleinement du domaine réglementaire. Vous criez à la remise en cause de la politique extérieure de la France, mais vous remettez en question le pouvoir personnel du ministre sur les forces armées !

M. le ministre. Il est vrai que le ministre doit rester maître de son administration. Par ailleurs, les réductions d’effectifs dont Daniel Garrigue a pu entendre parler n’ont rien à voir avec la réintégration du commandement militaire : elles ont été décidées il y a un an. Je voulais que les attachés d’armement et les attachés de défense arrêtent de passer leur temps à se renvoyer les dossiers. Afin que le poste diplomatique soit le plus cohérent possible, les deux fonctions ont donc été fusionnées, sauf dans les pays avec lesquels nous avons des relations militaires importantes. Ensuite, aucune réflexion n’avait été menée depuis des décennies sur notre présence dans certaines zones du globe. J’ai donc adapté nos effectifs à la situation actuelle. Je ne vois en particulier aucune raison à maintenir des attachés d’armement dans des pays avec lesquels nous n’avons pas de contrat d’armement en perspective et où notre coopération industrielle est faible. C’est de la bonne gestion.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Tout est dit. En outre, les termes « au détriment » sont trop vagues.

La Commission rejette cet amendement.

Elle est saisie de l’amendement CD 97 de M. Daniel Garrigue qu’il retire aussitôt.

La Commission en vient à l’amendement CD 179 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Cet amendement précise la définition de notre territoire : « terrestre et maritime, métropolitain et d’outre-mer ». Les espaces maritimes font l’objet de nouvelles menaces telles que la piraterie, le pillage de ressources ou le trafic de marchandises et de personnes. Il faut également prêter une attention particulière aux territoires d’outre-mer, qui sont spécialement vulnérables.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cette rédaction pour le moins surprenante laisse supposer qu’il existe différentes sortes de territoires. Elle est contraire à un principe majeur : la République française est une et indivisible.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine l’amendement CD 98 de M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Il est tout à fait regrettable que le projet de loi de programmation ne comporte pas un mot sur l’Afrique. Cet amendement répare cet oubli.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La définition de la politique étrangère de la France envers les États africains ne relève pas de la loi de programmation militaire. Par ailleurs, un paragraphe du texte est spécifiquement consacré aux accords de défense. Cet amendement est donc placé à un mauvais endroit. Je relève également qu’il semble ignorer l’existence d’organisations de coopération entre les États africains, je pense notamment à l’Union africaine, qui a des contacts réguliers avec l’Union européenne.

La Commission rejette cet amendement, ainsi que, toujours avec un avis défavorable du rapporteur, l’amendement CD 99 de M. Daniel Garrigue sur le même sujet.

Elle examine ensuite saisie deux amendements en discussion commune : l’amendement CD 155 de Mme Patricia Adam et l’amendement CD 4 des rapporteurs.

Mme François Olivier-Coupeau. Dans son souci de conférer un rôle croissant au Parlement, le Président de la République avait affirmé que celui-ci aurait à connaître des dispositions qui lient la France à des pays tiers, notamment dans le domaine de la défense et du maintien de l’ordre. Il s’agissait en fait de rendre publics les accords de défense bilatéraux. Mais le rapport annexé n’évoque plus que la communication de la conclusion d’accords à venir, s’ils contiennent des clauses d’engagement militaire. C’est très insuffisant. L’amendement CD 155 propose donc que le contenu des accords de défense présents et à venir soit communiqué sans délai à la représentation nationale. Toutefois, certaines dispositions n’ayant pas à être diffusées, seules les commissions compétentes en seraient destinataires.

M. Bernard Cazeneuve. Le Président de la République avait clairement dit vouloir rendre publics la liste et le contenu des accords de coopération et de défense. Il semble qu’on en soit revenu à la simple liste et aux accords nouveaux. Qu’en est-il donc du stock, très important, des accords qui n’ont jamais été portés à la connaissance de la représentation nationale et qui datent parfois des années 1960, comme celui qui a été évoqué pour justifier un engagement en Côte-d’Ivoire ?

M. Jean-Pierre Soisson. Que veut dire, dans une loi, l’expression « sans délai » ?

M. le ministre. La liste des accords figure dans le Livre blanc. Mais en donner le contenu précis est impossible lorsque les pays signataires y sont opposés.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Je partage l’objectif de l’amendement présenté par Mme Patricia Adam, mais la formulation retenue imposerait une procédure uniforme pour tous les textes, y compris ceux requérant un haut degré de confidentialité.

Le rapport d’information sur le contrôle parlementaire des opérations extérieures de M. François Lamy, en date du 8 mars 2000, proposait que soient transmis pour information aux assemblées les accords de coopération militaire sans caractère secret. L’intérêt diplomatique de la France impose en effet que des clauses soient parfois tenues secrètes.

Le Livre blanc sur la sécurité nationale a innové en publiant leur liste, permettant de mettre fin aux fantasmes qui y étaient liés. De plus, aux termes de l’article 53 de la Constitution, ces accords n’ont pas systématiquement nécessité d’autorisation législative pour être ratifiés.

Le projet de loi propose que le Parlement soit désormais informé de la conclusion des accords. Mais cela est insuffisant, puisque l’enjeu politique est de savoir ce qu’ils contiennent. Avec l’amendement CD 4, Yves Fromion et moi-même proposons que le Parlement soit informé de la conclusion et des orientations de ces accords, ce qui a le mérite de laisser au Gouvernement les marges de manœuvre diplomatique dont il a besoin.

Mme Patricia Adam. Le Président de la République avait évoqué la possibilité de rediscuter, voire d’annuler certains de ces accords. Où en est-on ? Le Parlement sera-t-il informé ?

M. Bernard Cazeneuve. La réforme constitutionnelle a prévu que le Parlement serait systématiquement consulté sur un engagement en opération extérieure, en vertu d’accords de coopération. Mais comment feront les parlementaires pour exercer leurs prérogatives, s’ils ne peuvent avoir une connaissance pleine et entière de ces accords ?

M. le ministre. Des discussions portant sur l’ensemble des accords sont en cours, et je m’engage à vous informer de leurs conclusions, le moment venu. S’il fallait mettre en œuvre un accord de défense, il appartiendrait en effet au Gouvernement d’indiquer à la Commission de la défense le contenu de cet accord ou d’en révéler la clause secrète.

La Commission rejette l’amendement CD 155, puis elle adopte l’amendement CD 4.

Elle examine ensuite l’amendement CD 182 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Cet amendement a pour objet de préciser que l’action de l’État dans le domaine maritime s’exerce avant tout dans les eaux territoriales françaises. Cela inclut l’océan Pacifique, qui connaît également des zones d’insécurité.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis défavorable. L’alinéa en question porte sur la fonction stratégique de prévention alors que l’amendement vise la protection. En outre, celui-ci est satisfait par l’alinéa 136 du rapport annexé.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD 183 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Cet amendement vise à ajouter à la liste des risques majeurs concernant les DOM-TOM le risque de pillage des ressources naturelles et de la biodiversité.

M. Jean-Pierre Soisson. Il conviendrait de préciser qu’il s’agit de la protection de la biodiversité.

M. Yves Fromion, rapporteur. Cet amendement peut porter à confusion : la lutte contre la dégradation de la biodiversité ne peut relever de la loi de programmation militaire. Je propose donc de le modifier en supprimant les termes « et de la biodiversité ».

M. Philippe Folliot. Je souscris à cette correction.

L’amendement CD 183, ainsi rectifié, est adopté.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD 169 des rapporteurs.

Puis elle examine l’amendement CD 5 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision. Les équipements de l’armée de terre reposent aussi sur des programmes de petite envergure financière dont la réalisation conditionne la cohérence entre petits et grands équipements.

Le rapport d’information portant sur l’exécution de la précédente loi de programmation militaire avait pointé l’insuffisante identification des programmes de cohérence opérationnelle, relevant notamment que de nombreux arbitrages défavorables avaient conduit au lissage des commandes.

L’amendement vise à identifier certains de ces programmes pour permettre aux parlementaires d’effectuer un meilleur suivi.

La Commission adopte l’amendement CD 5.

Elle examine ensuite l’amendement CD 37 du Gouvernement.

M. le ministre. Le plan de relance permettra d’acheter quinze Aravis. D’où cet amendement.

M. Jean-Claude Viollet. Pourquoi les tourelleaux ne figurent-ils pas dans le plan de relance ? Disposera-t-on d’un équipement opérationnel complet avec ces Aravis ?

M. le ministre. Les tourelleaux sont fabriqués à l’étranger et ne participent donc pas à la relance de l’économie française. Mais ils seront acquis de manière simultanée afin que les Aravis soient pleinement opérationnels.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CD 37 du Gouvernement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD 38 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit de prévoir une augmentation de la cadence de production des VBCI.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

La Commission en vient à l’amendement CD 39 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit de prévoir une augmentation de la cadence de production des PVP.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 40 du Gouvernement.

M. le ministre. Le plan de relance prévoit l’acquisition de cinq hélicoptères Caracal supplémentaires. D’où cet amendement.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

La Commission examine l’amendement CD 41 du Gouvernement et le sous-amendement CD 166 de M. Gilbert Le Bris.

M. le ministre. Cet amendement prend en compte le fait que, dans le cadre du plan de relance, un troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC) sera commandé dès 2009.

M. Gilbert Le Bris. La Jeanne d’Arc a fait son temps. Il est prévu d’utiliser comme école d’application des officiers de marine l’un des BPC disponibles lors de la campagne annuelle. Le sous-amendement CD 166 vise à affecter à ces activités le troisième BPC et ce, de manière prioritaire. Il serait ainsi conçu dès le départ pour cette polyvalence.

M. le ministre. Laissez au ministre de la défense le soin de choisir entre les différents bâtiments. Ce que vous demandez ne relève pas du domaine de la loi.

Le BPC, fût-il polyvalent, ne peut pas être qu’un bâtiment école : d’une part, parce que la campagne d’application doit se dérouler sur un bâtiment pleinement opérationnel ; d’autre part, parce que nous n’avons pas les moyens d’affecter un bâtiment à une seule mission.

Après avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette le sous-amendement. Puis elle adopte, après avis favorable du rapporteur, l’amendement CD 41.

La Commission en vient à l’amendement CD 42 du Gouvernement.

M. le ministre. Cet amendement est la conséquence de l’anticipation par le plan de relance de la commande d’un des deux BPC prévus en programmation. Il prévoit la livraison d’un quatrième BPC à l’horizon 2020.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte cet amendement.

Puis la Commission est saisie de l’amendement CD 156 de Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Conformément aux préconisations du rapport sur la précédente loi de programmation, cet amendement propose que le tableau des engagements communiqué au Parlement soit actualisé tous les trois mois, ce qui permettra aux parlementaires de suivre les commandes et d’être informés de leurs aléas éventuels.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Avis défavorable. Les opérations étant de très longue durée, le délai de trois mois paraît restrictif. En outre, les paramètres permettant le suivi des programmes figurent dans l’examen trimestriel de l’exécution des crédits.

M. Jean-Claude Viollet. Nous souhaitons que l’ensemble des membres de la Commission en soient destinataires.

M. le président. Si le ministre en est d’accord, je suis prêt à communiquer ces informations à tous les membres de la Commission.

Mme Patricia Adam. Si vous vous y engagez, je retire cet amendement.

L’amendement CD 156 est retiré.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte un amendement de conséquence du Gouvernement, CD 43.

Elle examine ensuite l’amendement CD 6 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Les forces armées comprennent les armées, les services de soutien, santé et essences, et la gendarmerie nationale. Cet amendement vise à supprimer le mot « forces » dans l’alinéa 313 du rapport annexé. En effet, l’expression « forces armées » est impropre puisque ne sont présentés que les formats des composantes terrestres, aériennes et maritimes, soit les « armées ».

La Commission adopte cet amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD 174 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. L’externalisation ne doit pas se faire au détriment des services proposés aux militaires, notamment en opérations extérieures (OPEX). Je n’imagine pas que des entreprises de restauration privées puisse se rendre en Afghanistan. Des moyens militaires minimaux de restauration, d’habillement, d’approvisionnement et de gestion des infrastructures doivent être maintenus.

Cet amendement tend également à privilégier, dans la mesure du possible, les partenariats public-privé.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Cet amendement va dans le bon sens car il rend possible l’externalisation sans pour autant l’imposer. Par ailleurs, il est crucial que la France conserve sur son sol certains savoir-faire dans le domaine militaire. Il convient également de veiller au maintien d’une capacité autonome de nos armées à gérer certaines prestations, notamment en OPEX. C’est une question d’efficacité et de sécurité. Enfin, cet amendement propose de rechercher, sans toutefois les imposer, les partenariats public-privé.

Toutefois, certaines formulations risquant de rendre le dispositif inapplicable ou inefficace, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. le ministre. Nous menons cette année une expérience d’externalisation sur la base de Creil. Nous recourrons ensuite à l’externalisation si elle est pertinente sur le plan économique à moyen terme et si elle n’obère pas les capacités opérationnelles des armées. Il n’est pas question d’envoyer les entreprises privées dans les OPEX. L’externalisation ne doit enfin pas mener à la constitution d’oligopoles, mais au contraire, doit permettre de faire vivre les PME.

Certaines formulations sont en effet inadéquates : si la loi impose le « maintien d’une capacité nationale de fabrication d’habillement militaire », il sera difficile de traiter avec les entreprises françaises qui sous-traitent à l’étranger ou de respecter les règles des appels d’offres européens.

Il serait souhaitable que M. Philippe Folliot retire son amendement et qu’il travaille à une nouvelle rédaction qui pourrait alors être examinée en séance publique.

L’amendement CD 174 est retiré.

La Commission examine l’amendement CD 158 de M. Bernard Cazeneuve.

Mme Patricia Adam. Toute opération d’externalisation et tout partenariat public-privé doivent faire l’objet d’une étude d’impact préalable, ce qui rejoint d’ailleurs une remarque précédente du ministre.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Les partenariats public-privé ainsi que l’externalisation sont des outils particulièrement utiles, mais il ne s’agit que d’outils. Il faut donc y recourir de façon pragmatique, dès lors que leur utilisation répond à l’intérêt général.

Cet amendement permettra au Gouvernement de prendre ses décisions, comme au Parlement de les contrôler, à la lumière d’informations objectives et hors de toute approche idéologique. J’émets donc un avis favorable.

La Commission adopte l’amendement CD 158.

Puis elle en vient à l’amendement CD 159 de M. Bernard Cazeneuve.

Mme Patricia Adam. Il convient d’intégrer, tant dans les budgets des programmes que dans les coûts prévisionnels de possession, les coûts de déconstruction des matériels, et ce dès leur lancement.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il semble difficile voire impossible de déterminer dès le départ le coût d’une déconstruction, les programmes d’armement ayant une durée de vie très longue.

M. le ministre. Que l’on s’interroge sur un tel coût ne me semble pourtant pas inutile, même si l’estimation peut conserver une part d’incertitude.

M. Yves Fromion, rapporteur. M. Patrick Beaudouin et moi-même défendrons par la suite un amendement CD 105 qui permet de prendre en compte la problématique du démantèlement, car on ne peut plus se contenter aujourd'hui de construire et de vendre des matériels. J’invite donc nos collègues à s’y rallier.

M. Jean-Claude Viollet. Il me semble que le terme « coûts de possession » doit être compris comme intégrant l’acquisition, l’usage et le démantèlement des matériels.

L’amendement CD 159 est retiré au profit de l’amendement CD 105.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CD 55 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Dans le souci de tendre à une plus grande efficacité dans la prise de décision, il importe que le ministre de la défense préside en personne le comité ministériel des investissements, nouvelle instance d’arbitrage pour les grands programmes d’armement.

M. le ministre. C’est ce qu’il fait !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Nous souhaitons que cela soit inscrit dans la loi.

La Commission adopte l’amendement CD 55.

Puis elle examine l’amendement CD 162 de Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Il serait utile que le comité financier informe le Parlement trois fois par an de ses conclusions pour éviter tout retard dans l’exécution de la loi de programmation militaire.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Une telle disposition est inapplicable dans la mesure où le comité financier ne rend aucune conclusion. Il ne s’agit que d’un lieu de confrontation d’analyses et de dialogue entre le ministère de la défense et celui du budget.

M. le ministre. Il s’agit du fonctionnement interne de l’exécutif.

L’amendement CD 162 est retiré.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CD 163 de M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. La Commission doit disposer d’une mission permanente de suivi des opérations d’équipement afin que le Parlement soit parfaitement informé de la conduite et de l’évolution des grands programmes d’armement.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il appartient à notre commission et à notre assemblée de décider des modalités de suivi. Il serait plus que surprenant que la loi puisse s’immiscer dans le fonctionnement interne de l’Assemblée.

Il conviendrait plutôt, afin d’assurer le suivi de certains grands programmes, que des rapports d’information soient confiés à des membres de la Commission.

L’amendement CD 163 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD 189 de M. Alain Rousset.

Mme Françoise Olivier-Coupeau. S’inspirant de ce que fait Électricité de France qui, lors de la construction des centrales nucléaires, non seulement prévoit les coûts de déconstruction, mais les provisionne chaque année, cet amendement propose d’inscrire le développement technologique des équipements de la défense dans une démarche de développement durable.

À la demande de M. Patrick Beaudouin, rapporteur, l’amendement CD 189 est retiré au profit de l’amendement CD 105.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CD 164 de M. Bernard Cazeneuve.

Mme Patricia Adam. Parmi les trois cercles stratégiques définis en matière de politique d’acquisition, la France doit soutenir davantage les entreprises nationales qui souhaitent contribuer au développement des technologies du deuxième cercle, celui au sein duquel notre pays souhaite coopérer et créer des interdépendances entre États européens. En effet, le développement de la base industrielle et technologique de défense européenne est l’une des conditions du développement de la politique européenne de sécurité et de défense.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Une telle précision me semble superfétatoire et je ne saisis pas bien son apport pratique. Avec ce deuxième cercle, la France souhaite coopérer et créer des interdépendances entre États européens. Elle agit donc bien à l’intérieur du cadre de référence qu’est l’Europe.

Mme Patricia Adam. Il s’agit de souligner l’importance de s’investir dans un domaine trop longtemps sous-estimé.

La Commission rejette l’amendement CD 164.

Puis elle examine l’amendement CD 105 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Une véritable compétence industrielle en matière de démantèlement des équipements de défense, notamment des matériels fortement polluants, non seulement serait conforme aux engagements du Grenelle de l’environnement, mais permettrait également de développer une filière française d’excellence, dont les industriels soulignent eux-mêmes qu’elle constituerait un avantage pour l’export en permettant de proposer une solution globale à leurs clients.

La filière de déconstruction dont nous souhaitons ainsi l’émergence rejoint les souhaits de nos collègues du groupe SRC.

L’amendement CD 105 est adopté.

La Commission en vient à l’amendements CD 88 de M. Daniel Garrigue, qui avait été réservé et fait l’objet d’une discussion commune avec l’amendement CD 170 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’amendement CD 170 reprend l’amendement CD 88 de M. Garrigue qui insiste sur la nécessité de coordonner les efforts européens faits au profit de la recherche.

M. Daniel Garrigue. Ne conviendrait-il pas alors de faire mention, comme je l’ai fait, du programme EUREKA, qui relève d’une coopération intergouvernementale, et non pas seulement du programme communautaire qu’est le PCRD ?

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il faudrait alors mentionner tous les programmes de coopération !

Après que M. Daniel Garrigue a retiré l’amendement CD 88, la Commission adopte l’amendement CD 170.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 172 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Le développement des partenariats public-privé (PPP) ne doit pas être recherché « résolument », mais lorsque cela est opportun. Les PPP ne sont pas systématiquement la meilleure solution de gestion des projets publics.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’amendement de notre collègue va dans le bon sens car il reconnaît l’utilité des partenariats public-privé sans pour autant en faire un impératif.

M. Jean-Claude Viollet. Est-il vraiment utile de préciser dans le texte que lorsqu’un PPP est opportun il faut y recourir ? Cela ne signifierait-il pas d’ailleurs que l’on pourrait en avoir conclu d’inopportuns ?

Je reste pour autant un ardent défenseur des partenariats public-privé, qui permettent à fois d’offrir des solutions en cas d’insuffisance de moyens et d’engager avec les industriels des relations nouvelles de coproduction dont on a grand besoin.

M. Serge Grouard. Dans ces conditions, supprimons simplement le mot « résolument » du texte du projet de loi.

M. le ministre. Je suis d’accord.

Après l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement oral (CD 196) de M. Philippe Folliot qui intègre ces modifications.

En conséquence, l’amendement CD 172 rectifié tombe.

La Commission examine ensuite l’amendement CD 173 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Le développement de partenariats public-privé dans le domaine de l’immobilier, comme cela est envisagé, me semble-t-il, pour le grand projet de regroupement des sites parisiens du ministère de la défense à Balard, paraît encore plus justifié que dans d’autres domaines. D’où cet amendement qui vise à encourager le recours à ce type de gestion également pour l’immobilier.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Les partenariats public-privé ont en effet surtout fait leurs preuves en matière immobilière.

M. le ministre. L’amendement concerne un paragraphe qui a trait à « un nouveau partenariat entre l’industrie de défense et l’État ». S’agissant d’immobilier, un problème de cohérence se pose.

M. Philippe Folliot. N’en va-t-il pas alors de même pour les réseaux d’infrastructure dont il est fait état dans ce même paragraphe ?

M. le ministre. Non, car dans ce domaine il est également fait appel aux industriels.

M. Jacques Lamblin. Est-il nécessaire d’allonger la liste des PPP possibles alors que le projet de loi, en utilisant le terme « en particulier » ne donne déjà qu’une liste indicative ? Ne pourrait-on d’ailleurs pas dans ces conditions supprimer carrément cette dernière phrase ?

Je propose donc un amendement oral tendant à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 439 du rapport annexé.

M. Jean-Claude Viollet. L’alinéa en question fait état des transmissions par satellite. Qu’en est-il de la cession possible de satellites déjà lancés ? L’hypothèque a-t-elle été levée sur le plan juridique concernant la nature de la propriété ?

M. le ministre. Les satellites sont des biens patrimoniaux et à ce titre, entrent dans le champ des PPP.

M. Jean-Claude Viollet. Comment les classifier justement au sein du patrimoine ?

M. Jean Michel. Ce sont des biens meubles !

M. le ministre. Et comme tels, ils sont cessibles.

La Commission adopte l’amendement oral (CD 197) de M. Jacques Lamblin. En conséquence l’amendement CD 173 tombe.

Puis la Commission examine successivement les amendements CD 114, CD 44 rectifié, CD 46 rectifié, CD 47 et CD 48 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit d’amendements tirant les conséquences des dispositions retenues dans le cadre du plan de relance de l’économie au titre de la politique de défense.

Après avis favorables du rapporteur, la Commission adopte successivement les amendements CD 114, CD 44 rectifié, CD 46 rectifié, CD 47 et CD 48.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 165 de Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec les amendements CD 162 et CD 163 qui ont été retirés ; il ne paraît plus opportun.

L’amendement CD 165 est retiré.

La Commission examine ensuite successivement les amendements CD 49 rectifié et CD 51 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit toujours de prendre en compte les dispositions retenues dans le cadre du plan de relance de l’économie au titre de la politique de défense.

Après avis favorables du rapporteur, la Commission adopte successivement les amendements CD 49 rectifié et CD 51.

Elle en vient à l’amendement CD 160 de M. Bernard Cazeneuve.

Mme Patricia Adam. Il convient de laisser en l’état les articles du code de la défense issus de la transposition de l’ordonnance de 1959.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il s’agit à nouveau de la part de nos collègues du groupe SRC du rejet du concept de sécurité nationale. Avis défavorable, comme précédemment pour l’amendement CD 153.

La Commission rejette l’amendement CD 160.

Puis elle examine l’amendement CD 7 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Les règles relatives à la recevabilité financière des amendements ne permettant pas de sanctuariser les dépenses de recherche qui conditionnent pourtant les futures capacités de la défense, il est proposé d’isoler ces crédits dans le rapport annuel sur l’exécution de la loi, ce qui permettra de suivre l’évolution de ce poste de dépense.

La Commission adopte l’amendement CD 7.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 8 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La politique industrielle de défense est un enjeu primordial et doit faire l’objet d’un suivi particulier. Cet amendement permet de disposer d’un document de synthèse des principales orientations gouvernementales sur ce sujet à l’occasion également de la présentation du rapport annuel sur la loi de programmation militaire.

La Commission adopte l’amendement CD 8.

Elle adopte ensuite l’article 2 et le rapport annexé ainsi modifié.

Article 3

Programmation des crédits de paiement et des ressources exceptionnelles

La Commission est d’abord saisie de l’amendement CD 116 de M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Étant donné que la conjoncture économique est particulièrement difficile pour nombre de nos concitoyens, que 160 000 postes de fonctionnaires doivent être supprimés au nom de la RGPP dans les six ou sept ans à venir, l’augmentation sensible des crédits de paiement de la mission « Défense » constitue, selon le groupe GDR, une mauvaise affectation du budget de l’État. C’est ainsi que la dissuasion nucléaire, à propos de laquelle beaucoup s’interrogent, représente un coût de 3,9 milliards d’euros, soit 11 millions d’euros par jour.

M. Jean-Pierre Soisson. Vous avez présenté a contrario la meilleure justification de la loi de programmation militaire !

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’article 3, en donnant une vision à long terme, constitue un outil fondamental pour la conduite de notre politique de défense comme pour l’exercice notre pouvoir de contrôle. Il contient des orientations qui contraignent le Gouvernement face au Parlement. Le supprimer serait absurde.

Sur le fond, j’observe que l’allocation des crédits proposée par le projet de loi permettra à la défense nationale de maintenir son rang, conformément à ce que prévoit le Livre blanc.

La Commission rejette l’amendement CD 116.

Elle est ensuite saisie des amendements CD 52 du Gouvernement et CD 129 de Mme Patricia Adam, en discussion commune.

M. le ministre. L’amendement du Gouvernement tire les conséquences des dispositions retenues dans le cadre du plan de relance de l’économie au titre de la politique de défense.

Mme Patricia Adam. Notre amendement ne s’explique que par le défaut de connaissance, à l’époque, de ce plan de relance.

L’amendement CD 129 est retiré, et la Commission adopte, après l’avis favorable du rapporteur, l’amendement CD 52.

Puis elle examine l’amendement CD 130 de Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Étant donné que les recettes exceptionnelles escomptées lors des deux premières années d’application de la LPM sont largement virtuelles, il est indispensable de réallouer, à volume constant, les sommes attendues lors des autres annuités.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Je me félicite du soutien du groupe SRC au principe de mobilisation de ressources exceptionnelles au profit de la mission « Défense », mais on ne peut invoquer la sincérité budgétaire pour soutenir un amendement qui lui-même nie, par exemple, l’apport de ressources exceptionnelles pour 2009, alors que la mission « Défense » peut notamment tabler sur la soulte de la société nationale immobilière ainsi que sur certaines cessions immobilières.

La Commission rejette l’amendement CD 130.

Elle en vient à l’amendement CD 53 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit, là encore, de prendre en compte les dispositions retenues dans le cadre du plan de relance de l’économie au titre de la politique de défense.

Après avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4

Programmation des plafonds d’emplois et des réductions nettes d’effectifs

La Commission est d’abord saisie des amendements identiques CD 117 de M. Jean-Jacques Candelier et CD 131 de Mme Patricia Adam.

M. Jean-Jacques Candelier. Mon amendement de suppression de l’article 4 repose sur les mêmes fondements que mon précédent amendement à l’article 3.

Mme Patricia Adam. Dans le contexte économique difficile que nous traversons, notamment sur le plan de l’emploi, il semble difficile de mettre en œuvre une diminution aussi drastique des personnels alors que leurs possibilités de reconversion seront réduites.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Adopter ces amendements priverait le Parlement de son pouvoir de fixer des orientations en matière de défense et de veiller à leur respect. Les objectifs ambitieux posés par le projet de loi contribueront à soutenir l’emploi industriel dans notre pays.

La Commission rejette les amendements CD 117 et CD 131.

Elle examine ensuite l’amendement CD 9 des rapporteurs.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. La notion « d’équivalents temps plein » ne qualifie pas celle « d’effectifs », mais constitue un ensemble distinct. Il s’agit en effet d’une unité de mesure des effectifs. Cet amendement vise donc à clarifier le lien entre les deux notions.

La Commission adopte l’amendement CD 9.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Chapitre II

Organisation des pouvoirs publics dans les domaines de la défense et de la sécurité nationale

Article 5 

Nouveaux concepts, nouveaux organes et nouvelle répartition des pouvoirs

La Commission est d’abord saisie des amendements identiques CD 118 de M. Jean-Jacques Candelier et CD 132 de Mme Patricia Adam.

M. Jean-Jacques Candelier. La création, en cas de crise, du Conseil national du renseignement est le signe manifeste d’une hyperconcentration des pouvoirs, une présidentialisation à l’américaine alors même qu’aux États-Unis le Président n’a pas directement la haute main sur le renseignement.

Mme Patricia Adam. Si, dans leur article paru dans la revue Défense Nationale, MM. Bauer et Rocard ont plaidé pour la création d’un Conseil de sécurité nationale – et nous ne contestons pas que tout gouvernement ait besoin de prendre en compte la notion de sécurité nationale compte tenu des menaces qui peuvent exister –, il n’en reste pas moins que la mise en œuvre d’une telle notion aurait nécessité un vrai débat démocratique dans le pays, notamment au sein du Parlement.

Par ailleurs, la répartition des compétences entre le Président de la République et le Premier ministre n’a pas fait l’objet de changement lors de la modification de la Constitution. Or voilà que l’on nous propose un élargissement du champ de compétences du Président de la République en matière de sécurité nationale, cela sans qu’il ne soit jamais question d’un quelconque contrôle du Parlement, contrairement aux décisions prises concernant les OPEX et les accords de défense. Si la Constitution indique bien que le Président de la République « préside les conseils et les comités supérieurs de la défense nationale », elle ne fait aucune mention du concept de sécurité nationale. Ce que l’on nous propose n’est donc pas conforme à la Constitution.

L’apparition de ce concept nouveau, calqué sur une doctrine mise en œuvre aux États-Unis et dans d’autres pays européens sans que l’on ait réfléchi à la façon dont ce pouvoir donné au Président de la République peut être contrôlé par le Parlement, explique que nous nous opposions à l’article 5.

M. Yves Fromion, rapporteur. L’absence de point d’accroche constitutionnel du concept de sécurité nationale ne doit pas faire obstacle à la nécessaire articulation entre la stratégie et les différentes politiques publiques qui y concourent, parmi lesquelles la politique de défense. Il est temps de conformer nos institutions avec ce qui a été débattu dans le cadre du Livre blanc.

À cet égard, l’orientation envisagée ne fait que compléter les dispositions actuelles de l’ordonnance de 1959 qui font de la défense militaire une déclinaison de la politique générale au côté de la défense civile et de la défense économique.

L’article 5 tend ainsi à favoriser la complémentarité des actions afin d’apporter une réponse cohérente et coordonnée sous la responsabilité du Président de la République, mais aussi du Premier ministre dont il est rappelé qu’il dirige l’action du Gouvernement en la matière.

Loin de correspondre à la logique du « tout sécuritaire », cet article organise au contraire la répartition des actions opérationnelles entre départements ministériels. Il me paraît déraisonnable et peu convaincant de nier les implications multiples d’un seul et même événement, qu’il s’agisse d’une agression armée ou d’une catastrophe naturelle.

Donc, avis défavorable.

La Commission rejette les amendements CD 118 et CD 132.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD 176 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Cet amendement propose d’introduire dans les déclarations liminaires du code de la défense la dimension de la défense européenne.

M. Yves Fromion, rapporteur. La rédaction actuelle permet de répondre au souci de construire une Europe de la défense opérationnelle et efficace puisque l’un des objets de la politique de défense est de pourvoir au respect des alliances, des traités et des accords internationaux auxquels la France souscrit.

En outre, la définition et la participation à la politique européenne de sécurité et de défense ne relèvent pas de la seule politique de défense, mais également de l’action diplomatique. Adopter cet amendement reviendrait à introduire dans le texte une confusion regrettable.

Donc, avis défavorable même si je comprends la démarche de notre collègue.

La Commission rejette l’amendement CD 176.

Elle en vient à l’amendement CD 110 des rapporteurs.

M. Christian Ménard, co-signataire de l’amendement. Cet amendement a pour objet de conforter la fonction stratégique de l’intelligence économique, dont la mise en œuvre repose sur une forte coordination interministérielle sous l’autorité du Premier ministre. Alors que l’intelligence économique est un concept largement usité au Japon et dans les pays anglo-saxons, ce n’est pas le cas en France.

La Commission adopte l’amendement CD 110.

Puis elle est saisie de l’amendement CD 175 de M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Il n’y a pas de définition juridique de la notion de forces au sein de la partie législative du code de la défense, mais seulement des références dans la partie réglementaire tendant à faire des « forces » une simple composante des armées.

La partie législative du code de la défense emploie le terme « forces armées », décrit à l’article L. 3211-1 comme comprenant les trois armées, la gendarmerie nationale et les services de soutien interarmées. C’est donc ce terme et non celui de « forces » qui doit figurer à l’article L. 1142-1.

M. Yves Fromion, rapporteur. L’adoption de cet amendement contreviendrait aux orientations actuelles visant à placer la gendarmerie nationale sous la tutelle du ministère de l’intérieur. Et je rappelle qu’à terme, l’autorité du ministre de la défense ne s’exercera sur la gendarmerie nationale que lorsqu’elle participera à des opérations des forces armées à l’extérieur du territoire national.

En outre, la rédaction de l’alinéa 27 ne s’écarte pas de celle prévue dans le code de la défense. Du reste l’emploi du terme « forces » sans le qualificatif « armées » est fréquemment utilisé dans la partie législative du code de la défense, ce qui jusqu’à présent n’a pas posé de problème particulier.

M. Jean-Claude Viollet. Il convient au contraire de s’assurer que la gendarmerie nationale sera en mesure d’accomplir ses missions de défense sous l’autorité du ministre de la défense nationale, d’autant que, dans la dernière loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI), elle n’a bénéficié que de 80 % des crédits qu’elle aurait dû recevoir.

M. Philippe Folliot. C’est bien l’aspect militaire des fonctions de la gendarmerie auquel je faisais allusion.

M. le ministre. C’est pourquoi je ne comptais pas m’opposer à l’amendement.

M. Yves Fromion, rapporteur. Dans ces conditions, je ne m’y opposerai pas.

La Commission adopte l’amendement CD 175.

Puis elle est saisie de l’amendement CD 10 des rapporteurs.

M. Yves Fromion, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que le ministre de la défense contribue à l’élaboration et à l’application de la politique d’exportation des équipements de défense.

M. le ministre. Mieux vaudrait me semble-t-il parler de « mise en œuvre de la politique ». Je propose donc de modifier l’amendement en ce sens.

Après l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CD 10 rectifié.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD 11 des rapporteurs.

La Commission en vient à l’amendement CD 133 de M. Bernard Cazeneuve.

Mme Patricia Adam. Cet amendement tend à maintenir les ministres responsables de la production, de l’approvisionnement et de l’utilisation des ressources dans leurs prérogatives et non à les placer sous la tutelle du ministre chargé de l’économie, mesure d’autant plus inutile que le Premier ministre voire le conseil de défense lui-même ont tout loisir, en cas de divergence d’interprétation, d’établir des priorités comme bon leur semble.

M. Yves Fromion, rapporteur. La rédaction de l’alinéa 49 correspond presque à celle de l’alinéa premier de l’actuel article L. 1142-3 du code de la défense. Elle n’apporte donc aucun changement majeur par rapport à la situation législative actuelle.

J’ajoute que l’article 5 prévoit le maintien d’un droit de priorité, notamment pour la répartition générale des ressources, au profit du ministère de la défense dès la procédure de mise en garde. Et pour réaliser effectivement ce droit de priorité, il importe que le ministre chargé de l’économie « oriente » l’action des autres ministres responsables. S’il ne pouvait que « conseiller », il serait très difficile de satisfaire le droit de priorité au profit du ministère de la défense.

Donc, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CD 133.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CD 12 des rapporteurs.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq

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