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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mardi 12 janvier 2010

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 21

Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente

– Audition, ouverte à la presse, de M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au service civique (n° 2000) (Mme Claude Greff, rapporteure)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mardi 12 janvier 2010

La séance est ouverte à dix-sept heures dix..

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation entend M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au service civique (n° 2000).

Mme la présidente Michèle Tabarot. En ouvrant cette réunion, je présente mes meilleurs vœux pour la nouvelle année aux membres de la Commission, à ses collaborateurs ainsi qu’au haut-commissaire Martin Hirsch et à toute son équipe.

Monsieur le haut-commissaire, nous nous réjouissons d’organiser cette audition préalable à l’examen de la proposition de loi adoptée par le Sénat relative au service civique, texte particulièrement significatif de l’ambition à laquelle nous sommes tous attachés de réaffirmer la cohésion nationale et de renforcer les valeurs qui la fondent notamment pour les jeunes. Je rappelle que le service civique a fait l’objet d’un engagement de campagne en 2007 et que M. Luc Ferry a rendu un rapport à son sujet dans le cadre du Conseil d’analyse de la société.

Vous avez ensuite, monsieur le haut-commissaire, supervisé la rédaction du Livre vert sur les actions en faveur de la jeunesse qui a représenté un travail considérable et dont le Président de la République, dans son discours d’Avignon le 29 septembre, a repris les points importants, à commencer par le service civique.

L’objectif assigné au service civique est de mobiliser à terme chaque année 10 % d’une classe d’âge, soit 70 000 jeunes environ. Monsieur le haut-commissaire, vous nous avez proposé d’inscrire dès à présent, au budget de 2010, des crédits au profit des premiers bénéficiaires. Vous évoquerez ce point, je suppose, dans votre présentation.

Je voudrais aussi saluer pour son travail Mme Claude Greff, notre rapporteure. Plusieurs membres de notre Commission se sont aussi impliqués dans la réflexion. Je souhaite la bienvenue à nos collègues Bernard Lesterlin, qui rejoint notre Commission, et Françoise Hostalier, qui devrait être nommée rapporteure pour avis par la Commission de la défense. La Commission examinera mercredi 20 janvier, à seize heures quinze, le rapport de Mme Claude Greff sur la proposition de loi. Sous réserve de confirmation, l’examen du texte en séance publique devrait avoir lieu début février.

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Madame la présidente, je vous présente également, ainsi qu’à tous les membres de la Commission, tous mes vœux pour une très bonne année 2010. Je souhaite que nous puissions construire un beau service civique. Les attentes sont très fortes. Vous savez tous, vous qui avez été très nombreux à signer des appels en ce sens, qu’il nous faut remonter à contre-courant. Les déceptions à l’égard des possibilités d’octroi d’un espace d’engagement pour les jeunes sont nombreuses. Nous n’avons pas réussi à donner suffisamment d’élan et de force au service civil volontaire établi par la loi du 31 mars 2006. Nous devons nous efforcer de prendre des engagements ambitieux et de les tenir. Aujourd’hui, nous comptons moins de 3 000 volontaires chaque année, mais ce n’est pas faute de candidats ! Les raisons de cette situation sont, nous nous en rendons compte, l’insuffisance de l’effort budgétaire, la très grande complexité des différents statuts de volontariat, la faible information et le peu de publicité – mais comment promouvoir un dispositif qui ne se développe pas ? – et, enfin, la complexité administrative des mécanismes d’agrément.

Lorsque vous m’aviez entendu, il y a quelques mois, à l’occasion de la présentation de ce travail sur la jeunesse auquel plusieurs d’entre vous avaient participé, j’avais souhaité que le service civique soit l’un des éléments structurants de ce qui pouvait être proposé – et non pas imposé – à la jeunesse. Pour cela, nous avions considéré que ce service devrait concerner 10 % d’une classe d’âge. En effet, un dispositif qui ne concernerait chaque année que quelques milliers de jeunes, sur 700 000 à 800 000, ne pourrait être qu’un dispositif d’exception.

Le Gouvernement souhaite que ce service soit volontaire. C’est aussi ce que le Sénat a décidé par la proposition de loi qu’il a élaborée. Quelles sont les raisons de cette position ? Les arguments, tout à fait recevables, des tenants d’un service civique obligatoire sont le souhait que chacun puisse passer par une phase où il donne de soi pour l’intérêt général, pour la collectivité, et celui d’éviter que le service civique ne soit réservé aux seuls jeunes capables de l’accomplir car on abandonnerait sinon l’objectif de mixité sociale dont on pare avec nostalgie le service militaire.

Cependant, deux arguments plaident pour le volontariat.

Le premier est le niveau élevé du chômage des jeunes. Il rend paradoxalement impossible un service civique obligatoire : le signal qui leur serait donné serait que, alors que la Nation est incapable de leur donner du travail, elle leur imposerait une forme de volontariat. Le jour où les jeunes auront toute leur place, une autre solution sera peut-être envisageable.

Deuxième argument, le contenu et les missions du service civique doivent être à la hauteur des attentes. Même si nous arrivions à dégager les moyens financiers nécessaires à un service civique universel, nous ne pourrions pas, dans les toutes prochaines années, proposer suffisamment de missions au contenu intéressant pour 700 000 ou 800 000 jeunes. Un service civique volontaire permet de proposer aux jeunes une opportunité, au lieu de leur imposer une contrainte, tout en obligeant les promoteurs de ce service à lui assurer un contenu intéressant, le rendant ainsi utile à la collectivité nationale et aux jeunes qui l’accomplissent. L’un des principaux défis qui s’impose à nous et aux partenaires qui accueilleront les volontaires – associations, fondations non lucratives, organismes publics – est bien de définir pour le service civique des missions qui en fassent un dispositif qui suscite l’intérêt.

Nous vous proposons donc de partir de la proposition de loi – un texte d’origine parlementaire – adoptée à une large majorité en première lecture au Sénat le 27 octobre dernier. Elle simplifie les diverses formes de volontariat et définit les missions ainsi que leurs liens avec les formations données aux jeunes. Elle prévoit aussi que ceux-ci seront indemnisés pendant la période d’accomplissement du service. Sur ces bases, nous avons travaillé avec votre rapporteure, Mme Claude Greff, ainsi qu’avec la Commission de la défense.

Il est proposé un service civique standard de six mois à un an, auprès d’un organisme public ou non lucratif, donnant droit à indemnisation ainsi qu’à l’assurance maladie et à la retraite. Il sera composé d’un module de formation citoyenne et d’une mission, choisie par les jeunes en fonction de la nature des organismes d’accueil capables de les recevoir.

Nous proposons d’ouvrir ce service civique aux jeunes de seize à vingt-cinq ans. Nous avons préféré l’âge de seize ans à celui de dix-huit ans pour faire la jonction avec la fin de la scolarité obligatoire. Le service civique doit contribuer à assurer la continuité de l’offre entre seize et dix-huit ans pour l’ensemble des jeunes. Si, à cet âge, l’offre prioritaire doit être bien sûr la formation, elle doit aussi pouvoir être, le cas échéant, une période de service civique. Votre rapporteure vous proposera, pour les jeunes de seize à dix-huit ans, une adaptation du service comportant des garanties adaptées au statut de mineur. De seize à vingt-cinq ans, le coût du service civique sera pris en charge par l’État. Le service civique sera également ouvert aux jeunes âgés de plus de vingt-cinq ans, mais alors l’État ne l’indemnisera pas.

Les travaux préparatoires effectués par votre rapporteure conduisent à préférer un financement intégral du service civique par l’État à un cofinancement par l’État et l’organisme qui recevra le volontaire. Dès lors que c’est la Nation qui décide d’instaurer un service civique, cette position est logique. Un tel financement revêt plus de signification pour l’engagement entre le volontaire et l’organisme concerné : cet engagement ne devra être lié, non pas à l’indemnité, mais à la définition de la mission, à l’encadrement et à la prise en charge de la formation.

Nous avons aussi souhaité faire le lien entre le service civique et les différentes formes de volontariat international – notamment le volontariat de solidarité internationale (VSI) et le volontariat international en administration (VIA) – sans bousculer leur organisation propre. Les jeunes volontaires pourront ainsi valider ces volontariats, effectués selon les normes actuellement fixées par le ministère des affaires étrangères – un volontariat dans une organisation non gouvernementale en Afrique, par exemple – au titre du service civique. Nous pensons qu’il est aussi utile de valider dans les mêmes conditions les diverses formes de volontariat européen, financées par l’Union européenne, dès lors que les accords signés avec les pays membres le permettront.

Nous approuvons également, et c’est un point de désaccord avec votre rapporteure, la disposition selon laquelle une attestation de service civique pourra être délivrée à un jeune qui aura accompli bénévolement dans un organisme agréé une tâche éligible au service civique, mais dans des conditions fractionnées : non pas six mois à plein temps, mais pendant les week-ends, durant quatre ans, par exemple. Il s’agit de prendre en compte les jeunes bénévoles engagés dans la durée, notamment pour accompagner des personnes handicapées, pour encadrer des scouts ou effectuer des tâches de soutien scolaire. Dès lors que ces jeunes auront accompli le nombre d’heures requis et reçu la même formation citoyenne que celles et ceux qui auront effectué six mois de service indemnisé, leur engagement ne saurait être dévalorisé, qu’il s’agisse de retraite où des équivalences universitaires et de formation instaurées par la proposition de loi. Une telle disposition nous paraît utile pour favoriser l’engagement le plus large des jeunes au service de l’intérêt général.

La proposition de loi prévoit à la fois une large définition du champ des missions du service civique – elles doivent pouvoir être notamment sociales, culturelles ou environnementales –, mais aussi, en liaison avec les jeunes, l’instauration de trois ou quatre priorités. Ainsi, les jeunes pourront voir dans le service civique un instrument qui leur permette de lutter contre ce qu’ils considèrent comme injuste dans la société, ou en faveur de causes justifiant à leurs yeux un effort spécifique : préservation de l’environnement, lutte contre l’isolement des personnes âgées, accompagnement des handicapés par exemple. Un effort spécifique devra alors être fait pour inciter les jeunes en service civique à se tourner vers ces missions. L’impact du service sur les besoins de la Nation devra aussi pouvoir être mesuré.

Nous estimons que l’organe de gouvernance du service civique doit être capable de faire émerger ces priorités et d’animer les réseaux des différents acteurs qui y seront impliqués. La question de sa nature a été laissée ouverte par la proposition de loi dans sa rédaction issue du Sénat. Lors des débats du Sénat, la transformation en une agence de service civique d’un établissement public, l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) a été privilégiée. Nous proposons quant à nous, en accord, je crois, avec votre rapporteure, la constitution d’un groupement d’intérêt public (GIP), qui pourrait s’appeler « Agence du service civique », rassemblant l’État, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé) – aujourd’hui organe opérationnel du service civique – et l’INJEP, ainsi que l’association France Volontaires, qui anime le volontariat international. Dans ces conditions, on créerait un lien entre ces différents organismes et un organe national de pilotage de l’ensemble du service civique, qui disposerait, pour animer celui-ci, des relais de l’État que sont sur les territoires les directions de la cohésion sociale et, sans doute aussi, de réseaux de correspondants dans le monde associatif et la société civile.

Telle est l’architecture qui vous est proposée.

J’ajoute que, à nos yeux, les critères de réussite du service civique sont l’envie des jeunes de l’accomplir, une montée en charge conforme aux objectifs qui seront fixés, une participation non seulement de jeunes souhaitant s’engager et ne trouvant pas aujourd’hui d’espace à cette fin, mais également de jeunes qui se trouvent sans projet de vie. Le service civique doit être pour eux l’occasion de reprendre ensuite des études qu’ils auraient arrêtées, de retrouver un travail, ou encore de poursuivre un engagement parallèle significatif.

À cette fin, un équilibre dans l’origine et le niveau de formation des jeunes volontaires du service public est nécessaire. Ce service ne doit être ni réservé à des jeunes très diplômés, ni fermés à de jeunes non-diplômés qui pourraient penser qu’il n’a rien à leur apporter. La diversité des jeunes bénéficiant du service civique et des missions qui leur seront proposées doit d’ailleurs être l’un des éléments d’agrément des structures qui le proposeront.

La charge de chaque volontaire en service civique pour le budget de l’État sera constituée de l’indemnité, des droits sociaux qui y seront liés, d’éventuelles allocations spécifiques pour le logement et, enfin, d’une part, qui reste à déterminer, du coût de l’accompagnement, de l’encadrement et de la formation, qui sera versée à l’organisme d’accueil. Nous estimons son coût à 800 euros environ par mois.

Financer en 2010 le service civique de 10 000 jeunes pendant six mois requerra donc un montant de 40 millions d’euros. C’est le budget inscrit à ce titre dans la loi de finances pour 2010. Ce calcul permet aussi de donner des éléments sur l’effort budgétaire nécessaire pour faire entrer 10 % d’une classe d’âge dans le dispositif, en répondant aux attentes des jeunes et en offrant des missions de bonne qualité. Nous pensons atteindre cet objectif d’ici à cinq ans.

Mme Claude Greff, rapporteure. Nous sommes aujourd’hui à un moment essentiel de l’examen d’une proposition de loi dont l’Assemblée nationale est saisie après son adoption par le Sénat.

Je suis heureuse d’être à côté de Martin Hirsch. J’ai déposé en 2003 une proposition de loi visant à créer un « temps citoyen ». Par ces termes, j’entendais alors déjà l’engagement civique au service de la collectivité. Aujourd’hui, bien que notre société soit pourvue d’instruments nécessaires à cette fin – le bénévolat, accessible à chacun d’entre nous, ou encore le volontariat, notamment associatif, dont j’ai rapporté le projet de loi –, nous devons constater l’individualisme et le repli sur soi d’une partie de la population. Il était donc nécessaire de proposer aux jeunes un nouveau dispositif qui leur donne envie de s’investir. Tel est l’objet du service civique.

L’engagement que ce service représentera insufflera une nouvelle dynamique à la geste républicaine et donnera envie à chaque jeune de s’investir dans la société. Il lui offrira aussi un apprentissage en milieu sociétal. En découleront une véritable recomposition de la cohésion sociétale et, pour les jeunes, le désir d’œuvrer pour la collectivité. Il constituera pour ceux-ci une entrée en citoyenneté : dans l’accomplissement même du service civique, ils accéderont à une formation civique.

Avec vous, monsieur le haut-commissaire, nous voulons que ce service soit volontaire. Chaque jeune doit pouvoir se demander ce qu’il peut apporter, à un moment de sa vie, à la société.

J’ai proposé une adaptation du dispositif pour les jeunes de seize à dix-huit ans. Par ailleurs, le message doit être compréhensible par tous. À cette fin, nous avons souhaité que la proposition de loi soit simple et claire. Nous avons aussi voulu garantir l’unité nationale.

Je remercie très sincèrement notre collègue Bernard Lesterlin. Avec lui, nous avons travaillé pour faire en sorte que la proposition de loi soit vraiment l’émanation de l’ensemble du Parlement.

En préalable à la discussion des amendements la semaine prochaine, je souhaiterais avoir quelques éclaircissements supplémentaires.

Monsieur le haut-commissaire, ne pensez-vous pas qu’il faudrait focaliser de façon plus claire le service civique sur les plus jeunes, un champ trop large risquant de rendre le message moins audible ?

Le texte issu du Sénat permet un fractionnement du service civique. Cependant, ne faudrait-il pas faire de cette période une véritable césure pour les jeunes de seize à vingt-cinq ans, de façon à leur permettre un véritable investissement.

Vous nous l’avez dit, 40 millions d’euros seront consacrés au service civique en 2010. Mais comment se déroulera la montée en charge du dispositif ? Nos collègues ont besoin d’informations.

En matière de formation citoyenne, comment pensez-vous articuler le rôle des organismes d’accueil des volontaires et celui de l’Agence nationale ? Au niveau local, une mutualisation de certaines formations ne pourrait-elle pas être envisagée ? Le brassage et la mixité sociale, qui nous importent à tous ici, en seraient améliorés.

Monsieur le haut-commissaire, je suis réservée face à votre souhait d’intégrer le bénévolat dans le service civique. Pour privilégier la clarté du message, je préfère que celui-ci tende clairement à intéresser la jeunesse à un engagement auquel elle n’a pas forcément été sensibilisée jusqu’à présent.

Quelle sera la structure de gouvernance du GIP qui gérera le dispositif ? Comment les associations et les organismes d’accueil seront-ils associés à son fonctionnement ?

Mme Françoise Hostalier. Nous avons tous la nostalgie du service militaire, aujourd’hui supprimé ; c’était un creuset de la République et, pour la jeunesse, un temps fort de brassage social.

Monsieur le haut-commissaire, les membres de la Commission de la défense sont prêts à vous appuyer dans le soutien que vous apportez à une proposition de loi qui va donner de la lisibilité à un temps fort de la vie des jeunes : comme l’a dit ma collègue Claude Greff, à leur majorité, le service civique sera pour eux l’occasion d’accéder à l’engagement au profit de notre société, de notre pays et des valeurs de notre République.

Cependant, nous ne nous départons pas de nos craintes relatives à l’effacement, voire à la suppression de certains principes. Quelle place envisagez-vous dans le dispositif que vous proposez pour la sécurité, la défense et la prévention ? Ces notions nous paraissent former une composante essentielle de l’engagement civique et citoyen des jeunes.

Enfin, le Sénat a remplacé la « Journée d’appel de préparation à la défense » par une « Journée d’appel de préparation au service national ». Il y a prévu un module clé, un temps très fort, d’information des jeunes – filles et garçons – sur le service civique et ses modalités. Ces modifications nous laissent un peu inquiets. Pour le bon fonctionnement de notre défense, il faut que 30 000 jeunes s’y engagent chaque année. Beaucoup de jeunes engagés dans l’armée la quittent après cinq ans. Nous ne voudrions donc pas que ce qui est encore dénommé « JAPD » suscite chez eux un trouble. Si, pour reprendre les propos de Claude Greff, le service civique ne s’apparente pas à un temps de bénévolat et que, en conséquence, l’obligation marquée d’un service et d’un engagement doit bénéficier d’une forte lisibilité, le choix par les jeunes du service civique ne risque-t-il pas d’occulter tout engagement militaire, pourtant l’un des éléments clés de la JAPD ? Comment allez-vous vous traiter cette ambiguïté ?

M. Frédéric Reiss. Le service civique, enfin ! Dans le contexte préoccupant du chômage des jeunes, promouvoir et renforcer la cohésion et la mixité sociales est un programme certes difficile, mais ô combien exaltant ! En ce début d’année, donner, avec le service civique, des signes d’espoir à notre jeunesse sera l’honneur du Gouvernement et de notre Assemblée.

Monsieur le haut-commissaire, je voudrais vous féliciter pour le travail accompli depuis votre entrée en fonctions – je n’oublierai pas non plus Mme Claude Greff. Vous avez su consulter largement et trouver les mots justes pour réussir à faire attribuer à votre action les moyens budgétaires permettant d’aller de l’avant. Grâce aux 40 millions d’euros qui lui sont affectés, le service civique devrait connaître un réel démarrage en 2010. Je ne doute pas un seul instant de son utilité pour la Nation.

Aujourd’hui, le malaise de nos jeunes, qu’ils soient diplômés ou non, est grand. Le délai est long avant qu’ils ne trouvent un emploi et leur place dans la société.

L’engagement doit être volontaire. Sur ce point, je suis d’accord avec Claude Greff. Les jeunes d’aujourd’hui doivent être non pas les bénéficiaires passifs d’un nouveau dispositif, mais des acteurs de leur propre réussite : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles. » Les jeunes doivent oser ! Ce dispositif sera pour eux l’occasion d’une première expérience. Elle les préparera à la « vraie vie » et leur permettra de trouver leur place dans la société.

De nombreux secteurs peuvent être bénéficiaires du service civique : vous avez mentionné des missions d’intérêt général, telles que la solidarité, l’environnement durable, les services à la personne, la culture. J’y ajouterai le secteur économique, notamment à l’international. Le service volontaire européen (SVE), sur lequel je vous avais interrogé – vous m’aviez répondu de façon assez complète – comme le volontariat international en entreprise, doivent continuer de vivre. Ce dernier, qui concerne aujourd’hui non pas seulement les grands groupes mais aussi les PME – pour les deux tiers, semble-t-il – doit pouvoir trouver sa place dans le service civique. Ces formes de service doivent pouvoir être validées convenablement, notamment au regard des droits sociaux.

Il faut aussi que les volontaires puissent être accompagnés par des dispositifs de tutorat. Malgré les coûts que vous avez évoqués, cette solution nouvelle me semble porteuse de résultats probants.

À mes yeux, le service civique crée les bonnes conditions d’un contrat républicain en faveur de notre jeunesse.

M. Bernard Lesterlin. Madame la présidente, merci de m’accueillir dans cette Commission.

Le groupe SRC se réjouit d’examiner un texte d’origine parlementaire, dont l’auteur est le président, radical de gauche, du groupe du rassemblement démocratique et social européen (RDSE) du Sénat. Même si M. le haut-commissaire et ses services lui ont apporté leur appui dans l’élaboration d’un texte éminemment technique, nous l’avons accompagné.

Certes, il ne s’agit pas là d’une grande loi d’orientation mobilisant la société entière, et nous n’attendons pas de miracle de son adoption. Néanmoins, nous y voyons de nombreux avantages. Au Sénat, ce texte a recueilli un très grand nombre de suffrages, une quasi-unanimité. Il est très attendu par les grandes associations, que Mme la rapporteure et moi-même avons consultées.

La position des socialistes est connue : nous sommes favorables au service civique universel et obligatoire. Cette proposition figurait dans notre programme. Notre candidate, comme le Président Nicolas Sarkozy, alors également candidat, l’avaient formulée.

Pour autant, nous considérons que ce texte constitue un progrès.

Nous sommes cependant quelque peu troublés par les propos tenus hier soir lors d’un débat télévisé par le président du groupe majoritaire. Dans la mesure où celui-ci a pris l’initiative – qui n’a pas été suscitée par François Hollande – d’exposer son attachement profond à l’avènement d’un service civique universel et obligatoire, je suis tenté de vous interroger, monsieur le haut-commissaire, sur la position du Gouvernement à l’égard de cette unanimité des groupes les plus importants de la majorité et de l’opposition en faveur du service civique obligatoire et universel. Plus que le volontariat, un tel service est de nature à garantir l’égalité de l’engagement en faveur de la Nation.

Le consensus en faveur du service civique qui s’exprime au sein non seulement du monde des associations, mais aussi de celui des collectivités locales impliquées dans l’expérimentation permise par la loi du 31 mars 2006 – qu’elles soient dirigées par la droite ou par la gauche – devrait permettre une montée en charge du dispositif. Celle-ci me paraît nécessaire pour en apprécier en toute connaissance de cause, sur une base démographique plus significative que les quelque 3 000 jeunes aujourd’hui impliqués dans l’actuel service civil volontaire, l’intérêt pour la Nation et évaluer l’effort qu’il nécessite de sa part, dans un contexte aujourd’hui difficile.

Sur ce point, dès lors qu’une telle proposition a été envisagée par des personnalités aussi bien de droite, comme M. Luc Ferry, que de gauche, et dès lors que, pour toucher la totalité d’une classe d’âge, aucune action ne semble pouvoir être conduite pour un coût inférieur à 3 milliards d’euros, pourquoi ne pas rendre un tel investissement dans la jeunesse éligible au « grand emprunt » ?

En tout état de cause, la réussite du dispositif suppose que soient réunies plusieurs conditions.

La première est l’engagement de l’État. Si nous sommes heureux que les moyens mis à votre disposition soient plus abondants que ceux accordés antérieurement à l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé), nous savons aussi que les 40 millions d’euros dont vous disposez ne vous permettront pas de réaliser des miracles.

La deuxième est la création d’une attractivité. Dans une logique de volontariat, il faut que des volontaires se présentent ! La clarification juridique du dispositif, le développement de campagnes de mobilisation, l’effort pour rendre positive l’image du jeune volontaire du service civique peuvent contribuer à gagner ce pari.

Nous sommes aussi très attachés au pilotage du dispositif par l’État. Loin d’un étatisme forcené, nous souhaitons qu’il s’accompagne d’un effort clair de partenariat avec tous les acteurs, collectivités territoriales, leurs établissements publics, le monde associatif. Ce partenariat doit se nouer au plus près possible du terrain. Pour réussir, le service civique doit être bien piloté, c’est-à-dire par l’État, en application de la loi, mais dans la proximité.

Comme Mme la rapporteure, nous avons travaillé à l’élaboration d’amendements pour améliorer le texte. Nous découvrons mutuellement le fruit de nos exercices et nous nous réjouissons du temps supplémentaire qui nous est accordé, jusqu’à samedi pour déposer des amendements.

Je tiens à rappeler quelques idées-force : d’abord, le service civique ne doit pas être conçu comme un emploi, nécessairement dégradé, ni même un emploi partiel, ou se substituer à une bourse, car s’engager sur le plan civique, c’est faire le choix de consacrer une période de sa vie à la Nation ; ensuite, les conditions de travail des volontaires devront être sécurisées, tout en n’étant pas soumises au code de travail ; les volontaires devront également disposer des moyens de leur mission. Vous avez, monsieur le haut-commissaire, évoqué le logement, qui est un poste important en cas de mission effectuée loin du domicile, mais il ne faut pas oublier la nourriture, ou encore le transport – nous sommes en effet favorables à une logique de rupture avec l’environnement habituel. Du reste, en cas de mission délocalisée, pourquoi ne pas impliquer les familles elles-mêmes ? Sans tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, il conviendrait de réfléchir, avec M. le ministre du budget, à d’éventuelles compensations dans le cadre de la loi de finances pour des familles hébergeant les volontaires les plus jeunes.

Il convient en outre de maintenir le volontariat associatif, qui n’est pas la même chose que le service civique – de nombreuses associations le demandent.

Enfin, le service civique doit d’autant plus acquérir une véritable dimension européenne que les Italiens, les Allemands et les Polonais, notamment, y réfléchissent en même temps que nous.

Certes, une politique plus volontariste de l’État permettra sans doute de donner une plus grande ampleur au service civique. Celui-ci devra toutefois être perçu par tous nos concitoyens comme une période valorisante. Sortir d’une situation difficile en accomplissant son service civique devra devenir un jour pour les jeunes un motif de fierté, comme l’est déjà, pour ceux des départements et collectivités d’outre-mer, le service militaire adapté (SMA).

Tel est l’état d’esprit du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, avant l’examen de la proposition de loi.

M. Régis Juanico. M. Frédéric Reiss s’est exclamé : « Le service civique, enfin ! » Je suis heureux, comme lui, de participer à la concrétisation de cette idée, qui remonte à plus de vingt ans. Alors même que le service national existait encore, au début des années quatre-vingt-dix, un débat secouait déjà les organisations de jeunesse du pays, dont certaines proposaient l’instauration du libre choix entre la forme militaire du service national et une forme civile, qui n’existait que de manière marginale – j’ai moi-même effectué une forme civile du service national en 1994.

Sortons de la nostalgie ! Même s’il est vrai que le recensement général d’une classe d’âge persiste, en vue de permettre la mobilisation en cas de conflit, et que tout jeune participe à une journée d’appel de préparation à la défense, M. Chirac a eu raison d’engager la professionnalisation de nos armées et de mettre un terme, à la fin de 2001, au service militaire, car celui-ci n’était plus universel, puisque 30 % d’une classe d’âge, alors uniquement masculine, en était exemptée ou dispensée. Faut-il rappeler qu’en 2001 le cabinet du ministre de la défense – à l’époque Alain Richard – recevait, de la part des seuls parlementaires, 25 000 demandes de reports ou de rapprochements géographiques ? Il nous appartient de prévoir aujourd’hui une nouvelle forme d’engagement civique à travers ce dispositif.

L’objectif de 10 000 volontaires l’an prochain reste évidemment trop limité et tendre vers 10 % d’une classe d’âge ne saurait satisfaire ceux qui, comme nous, sont favorables à une formule universelle et obligatoire. Il faut toutefois être réaliste et rester pragmatique : cette formule exigerait des moyens financiers dont nous ne saurions immédiatement disposer.

En tant que rapporteur de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », je suis satisfait de l’augmentation spectaculaire des crédits du programme « Jeunesse et vie associative », lesquels, fait rarissime, ont quasiment doublé en passant d’un peu plus de 100 millions d’euros à presque 200 millions, en vue de financer le fonds d’expérimentation, la dotation d’autonomie et le service civique.

Monsieur le haut-commissaire, pouvez-vous nous assurer aujourd’hui que vous aurez les moyens financiers de permettre, comme le prévoit la feuille de route, d’ici quatre à cinq ans, à 10 % d’une classe d’âge, c’est-à-dire à 70 000 ou 80 000 jeunes, d’effectuer un service civique ?

Mme Michèle Delaunay. Je suis d’accord avec Mme Greff, qui souhaite garantir la lisibilité du service civique : c’est pourquoi je ne suis pas favorable à sa fragmentation, notamment en dimanches successifs, car un service effectué dans de telles conditions n’aurait pas la même signification qu’une période d’engagement déterminée. Il convient évidemment de valoriser le service civique. Je regrette que le service militaire n’ait pas été considéré comme un acquis dans le cadre de la valorisation professionnelle ou universitaire, ce qui, certainement, eût limité le nombre de demandes d’exemption. Il ne faut pas commettre la même erreur avec le service civique qui, je le répète, devra être valorisé dans le cursus professionnel ou universitaire. De même, comme l’a souligné Bernard Lesterlin, il devra permettre au jeune volontaire d’opérer une véritable rupture, condition nécessaire pour qu’il puisse le vivre comme une aventure. C’est pourquoi il serait souhaitable que le jeune concerné puisse l’effectuer en dehors de son cadre de vie habituel.

Toutefois, je vous rejoins, monsieur le haut-commissaire, sur la dimension universelle du service civique. Comme j’ai la conviction qu’il faut tout faire pour estomper, au sein de la société, les barrières dues à l’âge, il convient de prévoir un équivalent du service civique, reconnu comme tel, qui pourrait intéresser, par exemple, une femme ayant arrêté son activité professionnelle. Toutefois, ce service ne saurait donner lieu à une quelconque indemnisation.

Il faut universaliser, au-delà de vingt-cinq ans, la notion de service civique !

M. le haut-commissaire. Madame la rapporteure, monsieur Juanico, le coût unitaire d’un volontaire en service civique est composé de trois éléments.

À l’indemnité, qui, si elle s’inspire de celle du service civil volontaire, pourra osciller de 400 ou 450 euros, pour le jeune effectuant son service près de chez lui, ou à 600 ou 650 euros, pour celui qui devra se loger, il convient en effet d’ajouter les cotisations sociales, de l’ordre de 200 euros, et le forfait versé à l’organisme d’accueil – quelque 100 euros. On aboutit ainsi à un coût unitaire de 800 à 900 euros par mois. Descendre au-dessous de ce montant ne serait pas raisonnable. Verser une indemnité plus élevée présenterait, en revanche, le risque d’enrayer la montée en charge du dispositif en offrant des arguments à ses adversaires. En effet, ceux qui tiennent les cordons de la bourse ne manqueraient pas de comparer son coût à celui des dispositifs équivalents d’autres pays : lorsque plusieurs centaines de milliers de volontaires sont concernées, l’indemnité y est souvent plus faible, de l’ordre de 350 euros par mois. En revanche, le versement d’une indemnité raisonnablement élevée, prise en charge à 100 % par l’État, permettra aux associations ou aux collectivités de n’avoir d’autre souci que de concevoir des missions et de garantir aux jeunes un accompagnement adéquat et une formation utile.

Dans un tel cadre, le montant total affleurera le demi-milliard d’euros par an, que je ne souhaite pas voir financer par le grand emprunt, du fait qu’il s’agit de dépenses de fonctionnement annuelles.

Mme Michèle Delaunay. Cela peut se discuter !

M. le haut-commissaire. Je serais choqué si l’État devait emprunter pour payer des indemnités.

À ce stade du dossier, je n’ai pas la certitude absolue d’obtenir l’intégralité des moyens financiers. Toutefois, nous pouvons nous aider mutuellement : si vous inscrivez cette proposition de loi à l’ordre du jour et si vous montrez que vous y croyez fermement, alors la volonté affichée par le Président de la République, le 29 septembre dernier, d’atteindre, dans quelques années, 10 % d’une classe d’âge, se concrétisera peut-être pour 2013 ou 2014, ce qui permettra d’inscrire, dès cette année, la montée en charge du dispositif dans la programmation budgétaire triennale.

En tant que haut-commissaire chargé du dossier, j’ai la certitude que nous pouvons, si nous en avons les moyens, trouver en 2010 au moins 10 000 missions intéressantes et 10 000 jeunes intéressés, l’année suivante 25 000 missions et 25 000 jeunes, et continuer sur le même rythme, pour atteindre dans cinq ans 10 % d’une classe d’âge.

Le Président de la République a pris un engagement sur ce dossier, qui est le seul pour lequel il exige une obligation de résultat – il me l’a dit lorsqu’il m’a nommé haut-commissaire à la jeunesse. Dans ces conditions, être le plus strict possible sur le coût unitaire me permettra d’être très ambitieux sur la visibilité de la montée en charge, condition nécessaire pour que les collectivités et les associations, avec lesquelles nous travaillons et qui ont été refroidies par les expériences précédentes, adhèrent au nouveau dispositif et prévoient les investissements humains, matériels et techniques nécessaires. N’oublions jamais que la dernière étape est souvent la plus difficile !

Quant à la mutualisation des formations, j’y suis favorable, que ce soit pour des questions de coût ou pour promouvoir des rencontres. Il conviendra d’organiser des périodes de formation commune, tout d’abord à l’échelon régional, puis départemental, enfin cantonal, lorsque le nombre de jeunes sera suffisant.

S’agissant du groupement d’intérêt public (GIP), une gouvernance opérationnelle et un organe de concertation avec les collectivités territoriales, les associations et les parlementaires me paraissent effectivement nécessaires, afin de définir, dans le cadre de ce « mini-parlement », les grandes orientations du service civique.

Madame Hostalier, le Sénat a effectivement souhaité modifier l’intitulé de la « Journée d’appel de préparation à la défense ». Une réflexion est par ailleurs menée sur l’évolution de la JAPD. Il sera possible, lorsque la réflexion aura abouti, de modifier ou de conserver l’intitulé actuel.

Il est de toute façon essentiel de profiter de cette journée, à laquelle tous les jeunes participent, pour promouvoir le service civique, voire pour procéder sinon à l’inscription, du moins à la pré-inscription de ceux qui seraient intéressés. Aussi le programme de la Journée devra-t-il prévoir une présentation du service civique par des personnes habilitées. En revanche le service civique n’est pas, à mes yeux, lié aux activités concourant à la défense, d’autant que l’armée a ses propres volontaires, souvent destinés à devenir des soldats. Gardons-nous de confondre les domaines, même si, il est vrai, la sécurité ou la protection civile, par exemple, peuvent être ajoutées aux missions du service civique. Je suis toutefois favorable à ce que des engagés du service civique puissent défiler le 14 Juillet pour mettre en valeur cette forme d’engagement au service de la Nation.

M. Reiss a évoqué le service volontaire européen : nous sommes favorables à une équivalence de celui-ci avec le service civique.

M. Lesterlin souhaite que ce soit l’État qui pilote le service civique : cela me semble naturel, puisque celui-ci est organisé au profit de la Nation. Cependant, l’État devra faire preuve de souplesse en prévoyant des partenariats.

Je m’engage auprès de vous à défendre, au sein du Gouvernement, le principe d’une indemnité entièrement financée par l’État.

À mon sens, pour assurer la lisibilité du service civique, il conviendra de l’ouvrir à toutes les situations que peuvent connaître les jeunes. Le service civique, qui sera volontaire, doit être conçu comme le réceptacle de la volonté d’engagement des jeunes au service de l’intérêt général, tout en augmentant leur chance de réaliser leurs projets professionnels ou, plus largement, leurs projets de vie, notamment à travers l’attestation qui leur sera fournie et qui pourrait valoir équivalence, sinon d’un diplôme, du moins de quelques unités de valeurs.

Comme vous, je pense que la forme de droit commun du service civique devra consister, par analogie avec le service militaire, en une période de rupture de six mois à un an au service de l’intérêt général, et c’est bien cette forme-là qui devra être prise en compte dans la réalisation des objectifs quantifiés – 10 % d’une classe d’âge. Toutefois, on devra pouvoir effectuer son service civique à l’international ou en consacrant cent cinquante samedis et dimanches à accompagner des personnes handicapées. Sinon, les associations qui, aujourd’hui, attirent des jeunes, les verront partir pour le service civique car ils ne pourront pas se consacrer aux deux. Certains d’entre vous se sont battus pour que le volontariat international en entreprise soit considéré comme un service civique et vous refuseriez que le bénévolat dans la durée, au sein d’une association assurant une formation civique, puisse être considéré comme un service civique ! Écoutez l’Association de la fondation étudiante pour la ville (AFEV) qui, tout en étant favorable au service civique, se bat depuis plusieurs années pour permettre à des étudiants de faire du soutien scolaire plusieurs soirs par semaine : elle souhaite qu’un pont relie ces deux types d’engagement, ce qui ne dénaturerait en rien la notion de service civique. Le soutien scolaire ou l’aide aux personnes handicapées ou en difficulté – mon expérience d’ancien président d’Emmaüs est là pour le confirmer – sont, à mes yeux, des formes à part entière d’engagement civique. C’est pourquoi, à condition d’avoir assisté à la formation de trois semaines, la participation, le week-end, durant une période déterminée, aux activités d’associations agréées, devrait donner lieu à la remise d’une attestation de service civique puisque les critères auront été respectés : formation commune, désintéressement et service de l’intérêt général. La disposition pourra évidemment être évaluée.

Je suis favorable à l’extension du service civique après l’âge de vingt-cinq ans, mais sans financement de l’État, ce qui revient au bénévolat. Il serait dès lors discriminatoire de fermer ce même bénévolat aux moins de vingt-cinq ans.

Mme Colette Le Moal. Les établissements médico-sociaux seront-ils ouverts aux volontaires du service civique ?

M. le haut-commissaire. Oui, s’ils sont à but non lucratif.

Le service civique doit permettre aux jeunes de s’engager dans la résolution des difficultés que notre pays connaît. Du reste, les professionnels sont favorables à la participation de jeunes à leurs côtés, qu’il s’agisse de la sécurité routière – je pense notamment aux deux-roues, qu’utilisent particulièrement les jeunes –, de l’éducation sanitaire et des conduites à risques, de la biodiversité, des sans-abri ou de l’environnement. Le service civique permettra de démultiplier les projets. Tous les trois ou cinq ans, il conviendra de retourner devant le Parlement pour dresser le bilan des réalisations que le service civique aura rendues possibles.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous remercie, monsieur le haut-commissaire.

La séance est levée à dix-huit heures trente.

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Présences en réunion

Réunion du mardi 12 janvier 2010 à 16 h 15

Présents. – M. Pierre-Christophe Baguet, M. Bruno Bourg-Broc, M. Xavier Breton, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, M. Patrice Debray, M. Pascal Deguilhem, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Claude Greff, Mme Françoise Guégot, M. Christian Kert, M. Dominique Le Mèner, Mme Colette Le Moal, M. Bernard Lesterlin, M. Jean-Philippe Maurer, M. Christian Paul, M. Frédéric Reiss, M. Marcel Rogemont, Mme Michèle Tabarot

Excusés. – Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Monique Boulestin, Mme Danielle Bousquet, M. Pierre Lequiller, M. Daniel Spagnou

Assistaient également à la réunion. – Mme Michèle Delaunay, Mme Françoise Hostalier, M. Régis Juanico, M. Jean-Luc Pérat, M. Lionel Tardy