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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mercredi 7 décembre 2011

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 14

Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente

– Examen, ouvert à la presse, du rapport d’information en conclusion des travaux de la mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants (M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 7 décembre 2011

La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine le rapport d’information de M. Jacques Grosperrin, en conclusion des travaux de la mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants.

M. Yves Durand. Madame la présidente, mes chers collègues, je sais qu’il n’est pas de coutume de formuler expressément un rappel au règlement en ouverture d’une réunion de commission, mais notre séance de ce matin est quelque peu particulière puisque nous voyons revenir devant nous, après la période estivale, un rapport dont notre commission avait refusé la publication. Cela me semble poser la question de la nature du document qui nous est soumis aujourd’hui. Je rappelle que le 6 juillet dernier, nous avions refusé sa publication et qu’en septembre, au détour d’un compte rendu de réunion de notre commission, nous avions appris, par hasard, qu’il serait de nouveau examiné après quelques nouvelles auditions de personnalités au demeurant déjà entendues.

Ou bien ce rapport est différent du premier et, dans ce cas, il aurait fallu mettre en place une autre mission d’information et conduire d’autres auditions ; ou bien il s’agit du même rapport comportant de simples modifications de forme. Je crains que nous nous trouvions dans ce dernier cas de figure et pareille méthode m’apparaît difficilement acceptable. Je souhaiterais soulever d’emblée les problèmes de forme qu’elle induit ; je laisserai en effet à mes collègues le soin de soulever les objections de fond relatifs au contenu du rapport.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Mes chers collègues, suite au vote de notre commission en juillet dernier sur la publication du document initialement adopté par la mission d’information sur la formation initiale et le recrutement des enseignants, j’ai souhaité que la mission d’information poursuive ses travaux en conduisant quelques auditions complémentaires. Les comptes rendus de nos réunions de commission attestent de cette démarche parfaitement transparente.

Observant que la tenue des réunions de cette mission d’information avait été quelque peu « boycottée » par le groupe SRC, il m’avait en effet paru opportun, avec le président-rapporteur de la mission, de permettre aux membres de l’opposition d’entendre les personnes auditionnées en leur absence de manière à mieux éclairer la nature des travaux menés. Au total, quelque quatre-vingt-douze personnes auront ainsi été auditionnées.

De nombreux parlementaires se sont impliqués dans ce travail avec assiduité. Je pense donc sincèrement qu’il serait regrettable que le rapport qui en découle ne puisse être porté à la connaissance du public, d’autant que chaque groupe politique a été en mesure de transmettre des contributions détaillant son point de vue sur le fond et les propositions formulées.

Il appartient à présent à notre commission de se prononcer sur la publication d’un nouveau rapport, celui qui a été adopté par la mission d’information la semaine dernière. Je laisse donc au président-rapporteur de la mission le soin de présenter ses nouvelles conclusions, en indiquant les modifications qui ont été apportées pour tenir compte de nos débats du 6 juillet dernier. Ensuite, à l’issue de nos échanges, notre commission devra naturellement procéder à un vote pour déterminer si le rapport doit ou non être publié.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur de la mission d’information. Comme vient de le dire la présidente de notre commission, je vous soumets un nouveau rapport sur la formation des maîtres pour des raisons de fond et de forme.

Le 6 juillet dernier, la Commission n’a pas autorisé la publication d’un premier rapport, pourtant adopté par la mission le 29 juin. J’ai donc pris le temps de la réflexion, tout en procédant à quelques auditions supplémentaires au cours du mois d’octobre.

Cette démarche a été contestée par certains d’entre vous, qui y ont vu la volonté de recueillir des arguments destinés à revenir sur le sens du vote de rejet de la publication du rapport. J’ai voulu prendre, au contraire, un peu de hauteur par rapport à cet épisode pour décider, fin novembre, de ne pas soumettre au vote de la mission de propositions relatives à la suppression des concours. J’ai pris conscience que, dans une société attachée à la reconnaissances républicaine des mérites, et fragilisée aujourd’hui par la crise, de telles préconisations, faites au nom d’une mission parlementaire, pourraient ne pas être comprises.

Un nouveau rapport a donc été adopté, le 30 novembre dernier, par la mission. Les propositions approuvées à cette occasion visent, pour l’essentiel, à « réformer la réforme », afin de préserver l’attractivité du métier d’enseignant et la qualité des recrutements.

Dans ce but, le master devrait être protégé des effets délétères du concours. Les épreuves d’admissibilité devraient donc être organisées en fin de licence afin que les deux années de master dispensent une formation théorique et pratique alternée qui accorde toute sa place à la didactique des disciplines, aux sciences cognitives et aux stages.

Les étudiants admissibles suivraient ainsi des stages de pratique accompagnée et en responsabilité, organisés respectivement en première et en deuxième année de master. Ces stages seraient limités à un tiers du service de référence, donneraient lieu à rémunération et seraient formalisés dans le cadre d’un contrat d’enseignement.

L’admission, qui reposerait sur des épreuves professionnelles, serait donc organisée en fin de master, les flux d’entrée en première année devant être régulés en calibrant le nombre de places offertes aux étudiants.

Quant aux masters, ils devraient être spécialisés par métier d’enseignement, même si un master de l’école du socle commun devrait être mis en place pour permettre à ses titulaires d’enseigner des champs disciplinaires en fin d’école primaire et en début de collège.

Enfin, le tutorat et l’accompagnement pédagogique des étudiants stagiaires et des enseignants débutants devraient être renforcés, ce qui impliquerait de créer des maîtres formateurs dans le second degré et de mieux encadrer la procédure d’affectation des professeurs stagiaires.

J’en viens aux raisons de forme qui me conduisent à présenter ce nouveau rapport. La mission a entendu près de cent personnes et le rapport accorde une large place aux critiques qu’elles ont formulées à l’encontre du dispositif de formation et de recrutement mis en place en 2010.

Il serait dommage d’avoir invité tant de personnalités pour ne laisser ensuite aucune trace de leur propos.

En outre, le Parlement n’a pas produit, à ce jour, de rapport sur la mastérisation alors que plusieurs experts l’on fait, tout comme le Conseil économique, social et environnemental. Je pense pourtant que nous avons notre mot à dire sur une réforme aussi importante.

Enfin, un rapport d’information est un document collectif, qui retrace toutes les opinions : celles du rapporteur bien entendu mais aussi celles des autres membres de la mission, par le biais de leurs contributions, et celles de la Commission, grâce au compte rendu de la réunion, annexé au rapport.

Sa publication est à mes yeux indispensable pour assurer une expression démocratique des parlementaires sur un sujet capital.

Mme Martine Faure. Lors de l’examen du rapport de la mission d’information sur la formation initiale et le recrutement des enseignants en juillet dernier, j’avais déjà déploré les modalités dans lesquelles s’étaient déroulés nos travaux. Il semble désormais que la procédure accélérée s’applique également aux travaux des missions d’information et cela nous apparaît regrettable, comme M. Yves Durand vient de le souligner.

Le rythme frénétique imposé par le président-rapporteur – une centaine d’auditions ont été conduites dans un laps de temps très court – nous a privé d’une véritable concertation et de l’analyse approfondie que méritait ce sujet d’importance. Le résultat de cette précipitation a été le vote de notre commission, refusant la publication du rapport, le 6 juillet dernier. Contre toute attente, la mission d’information a néanmoins été réactivée, sans concertation ni information préalables, ses membres étant simplement avisés par une convocation du 14 octobre qu’une série d’auditions aurait lieu le 20 octobre suivant. La reprise des cadences folles et l’engrenage habituel de la procédure ont conduit à une communication du projet de rapport aux membres de la mission d’information la veille de son adoption mercredi dernier.

Nos désaccords subsistent pourtant sur trois points : suppression du concours externe de l’agrégation, remplacement du concours par le master, recrutement des enseignants par les établissements sur la base d’un entretien professionnel.

L’agrégation a encore toute sa pertinence à la charnière du lycée et de l’enseignement supérieur. Elle certifie un haut niveau disciplinaire et, en cas de suppression du concours externe, plus aucune régulation n’interviendrait a priori. Les difficultés de recrutement, notamment dans les zones défavorisées, s’aggraveraient, les meilleurs enseignants se trouvant aspirés dans les établissements les plus cotés des académies les plus demandées.

Le master, quant à lui, ne permettra pas de garantir le même niveau de formation professionnelle des enseignants sur tout le territoire et dans toutes les académies car les universités, nous le savons bien, ne sont pas égales entre elles et aussi parce que d’un master à l’autre les différences peuvent être très importantes. Or, les concours nationaux ont précisément pour but de garantir l’égal accès de tous aux charges et emplois publics. Leur suppression n’empêchera pas la nécessaire sélection des candidats au métier d’enseignant : elle la rendra plus opaque et beaucoup plus injuste, avec le risque de renforcer les inégalités territoriales.

Certes, la nouvelle rédaction du rapport escamote dans le rappel final des préconisations les deux propositions les plus contestables présentées en juillet. Elles n’en sont pas moins maintenues et abondamment développées dans le corps du rapport par le président-rapporteur, qui « récidive » en affichant nettement sa préférence pour la suppression du concours externe de l’agrégation, le remplacement du concours par le master d’ici dix-quinze ans et le recrutement des enseignants par les établissements ; autrement dit, tout ce que nous avions rejeté en juillet dernier.

Nous ne contestons pas que le système puisse et doive être amélioré. Si nous approuvons en grande partie l’orientation des propositions relatives à la formation des enseignants, les positions du président-rapporteur en faveur d’un recrutement nouvelle manière qui ne respecte pas les principes fondamentaux de l’accès à la fonction publique ne nous apparaissent pas recevables. C’est de l’avenir de nos enfants, des enseignants et de tout notre système éducatif qu’il s’agit !

Dans ces conditions, quoi qu’il lui en coûte – car ses membres appartenant à la mission d’information ont aussi beaucoup travaillé –, le groupe SRC s’opposera à la publication de ce rapport en l’état. Nous invitons d’ailleurs nos collègues de la majorité à faire de même.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je rappelle que la mission d’information a débuté ses travaux au début du mois d’avril 2011. Son premier rapport a été présenté en juillet dernier : adopté par la mission d’information, notre commission n’a pas souhaité qu’il soit publié en l’état.

Mais c’est lors d’une réunion de notre commission que j’ai précisé que la mission d’information devait en conséquence reprendre ses travaux, en menant de nouvelles auditions. Je peux comprendre que vous restiez en désaccord avec le président-rapporteur, mais il n’en demeure pas moins qu’un important travail a été conduit depuis avril et que la mission d’information en a validé par deux fois les conclusions. Et aujourd’hui, notre commission n’a pas à se prononcer sur le fond du rapport mais simplement sur sa publication.

Mme Marie-Hélène Amiable. En tant que membre de la mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants, j’ai eu l’occasion d’exprimer à plusieurs reprises le point de vue des député-e-s communistes et républicains, citoyens et du parti de gauche sur le rapport dont il est question aujourd’hui. Je ne pourrai naturellement donner un avis différent de celui que j’avais déjà formulé le 6 juillet dernier lors de la présentation par le président-rapporteur de la mission d’information du rapport « n° 1 », si je puis dire.

En effet, comme nous l’avons souligné dans notre contribution au rapport qui nous est soumis aujourd’hui, le nouveau texte présenté par la mission n’a visiblement été modifié qu’à la marge, ce qui maintient toute leur pertinence aux remarques que nous avions d’ores et déjà formulées. Comment en serait-il autrement ?

Après les trente-sept auditions et tables rondes réalisées, qui auront permis d’entendre, dans un premier temps, quelque quatre-vingt-six personnes, la mission décidait d’organiser, au mois d’octobre et en pleine session budgétaire, cinq malheureuses auditions supplémentaires de personnes déjà entendues ! Au final, les quelques modifications émaillant les 126 pages du nouveau rapport sont pour l’essentiel mineures et n’en modifient absolument pas l’économie.

Deux propositions qui avaient cristallisé l’opposition de notre commission semblent avoir disparu de la synthèse finale. Il s’agit là d’un faux-semblant puisqu’elles figurent toujours dans le corps du rapport.

À la page 93, le rapporteur continue ainsi de considérer « que l’agrégation devrait être exclusivement conçue comme un concours de promotion professionnelle, dans le cadre de concours internes », c'est-à-dire qu’il s’agirait en réalité de supprimer le concours externe de l’agrégation alors même que M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master, a fini par trouver des raisons à son existence dans son rapport définitif publié en octobre 2011.

À la page 116, le rapporteur continue de vouloir « remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans », en confiant à des jurys le soin « d’établir, sur la base d’épreuves, d’entretiens ou de tests, des listes d’aptitude dans lesquelles pourraient puiser les académies ou les établissements » : cette proposition inacceptable remettrait en cause le statut de la fonction publique et l’égalité de traitement des candidats sur tout le territoire.

Ceci dit, je ne conteste pas la cohérence du rapporteur avec les positions de son parti politique, exposées dans une récente convention consacrée au projet éducatif du Président-candidat pour 2012.

Vous entendez aussi renforcer « l’autonomie » des établissements scolaires avec la possibilité pour le principal et le proviseur, « mais aussi, à terme, le directeur d’école », de « recruter librement son équipe enseignante et d’administration » et, par là, de renforcer inévitablement les inégalités territoriales.

Le reste est à l’avenant. Si le rapport liste les problèmes résultant de la mastérisation improvisée en juin 2008 (traduction budgétaire délicate, mise en place d’une offre de formation insatisfaisante, accès diminué des étudiants d’origine modeste au master, déconnexion du diplôme et du concours, désorganisation de l’année de stage des professeurs recrutés et affaiblissement du vivier des candidats, démissions en nombre plus élevé dans le second degré, etc.), il n’apporte toujours pas de solutions pertinentes.

Nous avions pourtant identifié les propositions, très nombreuses, de tous ceux qui avaient mis quelques espoirs dans les conclusions de cette mission d’information, et notamment l’organisation d’un prérecrutement visant à garantir la démocratisation dans l’accès au métier d’enseignant, la conservation des concours de haut niveau disciplinaire, l’organisation d’une véritable formation alternée avec des allers-retours entre l’université et des stages pratiques, accompagnée et en responsabilité, ou encore la relance des programmes de recherche pour évaluer les effets des pratiques et des formations.

Dans ces conditions, je ne vois pas bien ce qui pourrait conduire la commission à adopter aujourd’hui un rapport qui a été repoussé en juillet dernier. Et ce, d’autant qu’une telle éventualité friserait le ridicule à l’aune de la récente décision du Conseil d’État en date du 28 novembre dernier qui annule, d’une part, en partie, l’arrêté du 12 mai 2010 fixant les compétences à acquérir par les enseignants et les conseillers principaux d’éducation stagiaires et, d’autre part, les modalités d’évaluation et de titularisation des professeurs agrégés telles qu’elles apparaissaient dans un second arrêté de la même date.

Les député-e-s communistes et républicains, citoyens et du parti de gauche repousseront donc une nouvelle fois les conclusions de cette mission d’information. Non seulement il s’agit d’une nouvelle remise en cause du service public de l’éducation, mais le rapport est désormais en décalage total avec les exigences du terrain.

M. Xavier Breton. Le seul point qui doit nous préoccuper ce matin est le suivant : les conditions à la publication de ce rapport sont-elles réunies ou non ?

Pour y répondre, plusieurs questions sont à soulever. Premièrement, ce rapport est-il opportun ? Nous nous accordons tous sur le caractère prioritaire du sujet de la formation et du recrutement des enseignants. Il s’agit du paramètre qui conditionne le plus l’efficacité de notre système éducatif. Il était donc important que notre commission apprécie les nouvelles modalités du recrutement et de la formation des enseignants, d’autant que, sans parler des 60 000 postes que certains proposent de rétablir, l’Éducation nationale est un recruteur de premier plan. Je rappelle que les personnes recrutées aujourd’hui resteront en poste jusqu’aux années 2060.

De plus, comme la réforme qui est actuellement mise en place a suscité des inquiétudes et polémiques, il était de la mission de l’Assemblée nationale d’apporter l’éclairage des élus et de sortir la réflexion des seuls couloirs du ministère de l’Éducation nationale.

Par ailleurs, ce rapport nous aurait été très utile à plusieurs reprises depuis juillet 2011 : au moment de la discussion budgétaire, lorsque nous avons abordé la question de la formation des enseignants, et même hier, lors de l’audition par le groupe de travail sur les manuels scolaires de différents éditeurs. Pour l’ensemble de ces raisons, il est opportun de publier de rapport.

La deuxième question concerne les modalités de la préparation de ce rapport. Dans cette mission d’information, comme dans toutes les autres, le rythme soutenu des auditions a mis le président-rapporteur en première ligne, tandis que les autres membres on fait de leur mieux pour y assister. Je salue, d’ailleurs, le travail de la mission d’information qui a entendu plus de quatre-vingt-dix personnes dans un climat serein et constructif. Depuis la rentrée, la deuxième série d’auditions de la mission d’information a permis d’actualiser le rapport. Je regrette toutefois que nos collègues de l’opposition l’aient boycottée. Ils ont préféré la crispation plutôt qu’une démarche constructive.

Troisième point, le contenu du rapport est-il honnête intellectuellement ? Il me semble que c’est le cas. En effet, ce rapport ne défend pas la réforme à tout prix et ne rassemble pas non plus des arguments la contestant. Il formule plutôt un bilan contrasté et objectif. Il formule à l’encontre du nouveau dispositif des réserves qui ne sont pas minces : le manque de professionnalisation du master, l’organisation très lourde de la deuxième année du master, qualifiée par le président-rapporteur de « course d’obstacles », la connexion problématique entre le master et le concours, et enfin le caractère discriminant de l’accès au concours au détriment des plus modestes en raison du rallongement de la durée des études. Le rapport a également le mérite de proposer plusieurs améliorations.

Certains points avaient cristallisé en juillet dernier les interrogations, tels la place de l’agrégation dans notre système éducatif et le remplacement du concours par un master. Des réserves avaient été émises sur tous les bancs, ce qui reflète la capacité de notre commission à exprimer des opinions différentes. Si ce rapport avait laissé indifférent, il n’aurait été d’aucune utilité. Il me semble au contraire qu’il sera un outil utile pour le ministère tout comme pour notre commission.

Le rapport a fait l’objet d’une nouvelle rédaction. Elle reprend les préférences du rapporteur, ce qui est compréhensible, sans qu’elles apparaissent pour autant toutes dans les propositions de la mission. L’intégration au rapport des contributions et du compte rendu des débats d’aujourd’hui permettra aux différentes sensibilités de notre commission de s’exprimer.

Le rapport permet au rapporteur d’alimenter la réflexion, sans céder à la pensée unique, tout en tenant compte des points de crispation relatifs à reconnaissance républicaine des mérites. En effet, dans un souci d’apaisement, les deux propositions qui avaient fait débat en juillet dernier ont été retirées.

Ce n’est pas parce que nous sommes favorables à pour la publication de ce rapport que nous sommes favorables à la suppression de l’agrégation, par exemple. S’inscrivant dans la réflexion en cours, ce rapport, à la suite de ceux qui ont été précédemment publiés par notre commission, apporte une pierre à l’édifice. Le groupe UMP votera par conséquent en faveur de sa publication.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur. Premièrement, un rapport d’information retrace toutes les opinions : celles des membres de la mission, dans les contributions, celles des membres de la commission dans le compte rendu annexé, et naturellement les points de vue des nombreuses personnes auditionnées.

Deuxièmement, pour lever toute ambiguïté, nous ne proposons ici ni la suppression de l’agrégation, car il faut conserver ce concours d’excellence, ni celle des concours nationaux, par attachement au respect des principes fondamentaux d’accès à la fonction publique, tel le caractère national de la procédure de qualification et l’existence de jurys. Certains éléments ont certes été conservés par respect envers les personnes auditionnées. Néanmoins, les deux propositions qui avaient suscité des polémiques ont été retirées, qu’il s’agisse de l’ancienne proposition n° 5 de suppression de l’agrégation ou de la proposition n° 20 de donner aux concours, d’ici dix ou quinze ans, un caractère plus professionnel et moins académique. Elles ont été retirées dans une volonté d’apaisement mais également par souci de défendre la reconnaissance républicaine des mérites. Les dix-huit autres propositions illustrent le formidable travail de la mission d’information. Il serait donc dommage de ne pas publier ce rapport.

M. Alain Marc. Être favorable à la publication du rapport ne signifie pas nécessairement approuver son contenu. Or, la question qui nous est posée est bien d’autoriser ou non la publication du rapport. Nous nous torturons donc l’esprit pour rien.

Je me réjouis de la disparition de la proposition de supprimer le concours de l’agrégation. La proposition liminaire du rapporteur en faveur d’un « prérecrutement » est proche d’une proposition soutenue il y a deux ans sur tous les bancs de cette commission. En effet, la formation délivrée sur le terrain fait aujourd’hui l’objet de beaucoup de critiques. Un tel « prérecrutement » serait souhaitable. Je souhaite également que les deux dernières années de la formation laissent davantage la place à la professionnalisation, les stages faisant aujourd’hui largement défaut.

M. Yves Durand. Je ne conteste pas l’honnêteté du travail des membres de la commission et du président-rapporteur. Rappelez-vous néanmoins pourquoi nous nous étions opposés en juillet dernier à la publication de ce rapport : en raison notamment de la proposition n° 20, qui prévoyait le remplacement du concours par un recrutement effectué par l’autorité académique ou le chef d’établissement parmi les titulaires d’un master. Il m’est difficile de qualifier le rapport qui nous est soumis aujourd’hui de « nouveau », car j’y lis quasiment les mêmes formulations. Si des propositions en ont été retirées, les éléments correspondant dans le rapport ont été maintenus. Autoriser la publication de ce rapport reviendrait donc à autoriser la publication de celui que qui nous a été soumis le 6 juillet dernier.

La proposition n° 20 était loin d’être sans importance, puisqu’elle mettait en question le socle même du recrutement tel qu’il est organisé dans la fonction publique, ce qui donne aux enseignants leur caractère de fonctionnaires de l’État. Il s’agit d’un élément du socle républicain. Le remettre en cause revient à remettre en cause ce que l’Éducation nationale a de « national ».

Certes certaines dispositions du rapport sont très intéressantes et méritent d’être publiées. Toutefois, le rapport ne tire pas les conséquences des désaccords du 6 juillet dernier. Il n’affirme pas clairement que le concours doit rester le seul mode de recrutement possible pour l’Éducation nationale. Même si le rapporteur a défendu cette idée tout à l’heure oralement, elle ne figure pas au rapport. Il ne s’agit donc pas pour moi d’un nouveau rapport. En conséquence, notre groupe votera contre sa publication.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Monsieur Yves Durand, je pense que ce débat est disproportionné. Je rappellerai deux points. Vous aviez tout à fait la possibilité d’intervenir sur le fond en tant que membre de la mission, et les uns et les autres pourront transmettre des contributions ou préciser leurs positions, puisque certains sont très investis sur le sujet. Mais notre commission doit se prononcer aujourd’hui sur la publication du rapport, et vous vous livrez sur le sujet à un jeu qui ne me paraît pas acceptable. En effet, si nous suivions votre logique, le fait majoritaire empêcherait toute publication des avis budgétaires présentés par les députés de l’opposition. Or, cela ne correspond pas à l’esprit du travail parlementaire.

Je comprends parfaitement que l’on prenne position pour ou contre les propositions du président-rapporteur. Mais une fois que l’on a exprimé son point de vue, éventuellement par une contribution, il convient de prendre en compte le travail qui a été fait et les quarante-deux auditions qui ont été menées, sauf à mettre à bas le travail effectué, ce que je trouverais regrettable.

M. Patrick Bloche. Il vaudrait mieux vider l’abcès en reconnaissant le ridicule de cette situation. Depuis quatorze ans que je suis député, c’est la première fois que je constate une volonté délibérée de faire adopter un rapport coûte que coûte. C’est du « jamais vu » ! Ce que nous essayons de montrer à nos camarades – à nos collègues – de la majorité…

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous rappelle, M. Patrick Bloche, qu’on ne vous demande pas d’adopter le rapport mais d’en autoriser la publication ! Cette distinction ne peut pas échapper à un parlementaire aussi expérimenté que vous.

M. Patrick Bloche. ...c’est le ridicule de la situation ! C’est grotesque !

M. Bernard Debré. Au mois de juillet dernier, j’avais été heurté, comme nombre de mes collègues du groupe UMP, par la proposition n° 20 et nous avions demandé que le rapport soit revu. Mais nous aurions très bien pu autoriser sa publication à ce moment-là ! Un nouveau travail a été effectué. Au total quatre-vingt-douze personnes ont été entendues ; il serait tout à fait normal que le rapport fasse état de leur audition.

Ce n’est pas par dogmatisme que nous avons demandé que la proposition n° 20 soit retirée du rapport, mais afin qu’elle puisse faire l’objet de réflexions de la part des enseignants et des universitaires. À présent, on nous demande de publier le rapport adopté par la mission. Nous le ferons car il semble important de reconnaître le travail des uns et des autres ; c’est également une question de respect à l’égard de toutes les personnes auditionnées. Et je rappelle qu’il nous est arrivé d’autoriser la publication de rapports dont nous n’approuvions pas le contenu au plan politique. C’est cela, la démocratie !

M. Régis Juanico. Pourtant le groupe UMP s’est opposé à la publication du rapport d’enquête de M. Nicolas Perruchot sur les mécanismes de financement des organisations syndicales d’employeurs et de salariés !

M. Pascal Deguilhem. S’agissant de l’assiduité aux réunions de la mission, je souhaiterais que soit relevée la présence des groupes SRC et GRD lors des auditions. Nous avons effectivement boycotté les réunions au départ, mais, lorsque par la suite nous avons accepté de participer aux travaux, nous avons été très présents.

Et ce n’est pas tant les analyses des personnes auditionnées que l’avis du rapporteur que nous ne souhaitons pas publier. Nous portons le même regard sur la réforme de la formation des maîtres et la mastérisation.

Il faut replacer cette réforme dans le contexte actuel qui est celui d’une dégradation de l’école et de la situation des enseignants – baisse régulière et inquiétante des recrutements et formation pédagogique réduite à néant ; les jeunes enseignants sont devant les élèves pendant leur temps de formation, nous le constatons tous sur le terrain. Le tutorat est quasiment impossible à mettre en place ; les propositions, certes louables, que formule le rapporteur, soulignent sa nécessité, mais le tutorat n’existera pas tant qu’il n’y aura pas de recrutements. L’absence de mixité sociale nous interpelle également ; et les établissements formateurs sont aujourd’hui complètement désorientés.

Ce sont des points que depuis le mois de juillet le Conseil économique, social et environnemental a largement soulevés, et nous aurions pu reprendre in extenso dans ce nouveau rapport les propositions du conseil. Cela n’aurait été dégradant pour personne.

Je souhaiterais indiquer enfin que ce qui nous heurte, c’est la disparition du concours, qui porte en germe celle du statut de la fonction publique. Ce qui me choque, c’est qu’en regard du commentaire du recteur Alain Boissinot selon lequel comme « la bonne monnaie doit chasser la mauvaise » le master doit chasser le concours, l’avis du rapporteur est que cette évolution semble le scénario le plus cohérent. C’est pourquoi nous ne souhaitons pas la publication de ce rapport.

M. Dominique Le Mèner. Je souhaiterais remercier le président- rapporteur pour le travail accompli. On pouvait s’interroger en effet sur l’utilité de faire un rapport peu de temps après la réforme, mais cela a permis d’entendre un certain nombre de personnes qui se sont exprimées de manière objective et je suis pour ma part assez surpris, bien que je me sois abstenu lors de la réunion du 6 juillet, de l’attitude qui consiste à contester le droit de publier leurs avis. Et ce, d’autant qu’ont été retirées les propositions qui faisaient débat. Je pense qu’au contraire, c’est faire œuvre utile que de présenter ce rapport.

Je voudrais souligner – et je sais que le président partage ce point de vue – que les instituts universitaires de formation des maîtres ont besoin d’évoluer, notamment dans la mise en œuvre d’un nouveau statut, et je souhaiterais que l’on évoque cette question.

M. René Couanau. Il ne faut pas se laisser égarer loin du cœur du problème par deux débats. Celui concernant la publication du rapport a été ouvert par un premier débat provoqué par le rapporteur et concernant la suppression des concours. À partir de là tout est faussé !

Le fond de la question est que le système de formation des maîtres et des professeurs est catastrophique. Chacun le sait ; or aucune mesure n’est prise pour le redresser.

Rappelons que la réalité de la réforme est la suppression de dix-huit mille postes. Vous l’évacuez en une demi-page dans votre rapport en disant que vous n’avez pas à vous prononcer sur cette question qui relève de la stratégie économique et financière. Or, c’est le fond du problème : si nous reprenons un système de formation professionnalisé, il nous faut des postes !

La réforme devait, par ailleurs, régler le compte des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM). Elle ne l’a pas fait, les IUFM subsistent et leur rôle n’est toujours pas défini.

Elle visait enfin à améliorer la formation des maîtres. Or que se passe-t-il actuellement ? Il n’y a aucune formation des maîtres ! Nous sommes revenus quarante ans en arrière, avec l’idée folle que la masterisation et le haut niveau de formation universitaire peuvent remplacer la formation professionnelle que nous avions mise en place. C’est cela, la réalité ! De ce point de vue, le rapport dit fort bien – j’ai relevé les mots – que c’est une réforme qui a été improvisée, qu’elle n’est pas cadrée et qu’elle conduit à une fausse professionnalisation.

S’agissant du point qui a fait débat, c’est-à-dire la suppression des concours, nous ne pouvons pas douter de l’honnêteté intellectuelle du rapporteur. Mais il est obstiné ! Certes, il supprime in fine la vingtième proposition, mais il la maintient dans le corps du rapport. C’est son avis. Ce n’est pas le nôtre !

Sur le fond, nous ne pouvons pas nous prononcer en faveur de ce rapport. Si vous le publiez, le ministre entendra peut-être quelque chose… Mais je ne voterai pas la publication car je pense qu’elle donnera l’impression que nous approuvons le contenu de ce rapport.

Nous n’approuvons pas l’idée que vous avez exprimée et que vous avez tue momentanément mais dont nous savons qu’elle subsiste dans les milieux gouvernementaux et majoritaire, qui est de supprimer les concours de la fonction publique et de revenir à un recrutement local. Cette position fait fi de toutes les lois républicaines que des générations ont réussi à établir dans ce pays. Il faut le dire ! En ce qui me concerne, je n’approuve pas le rapport et donc je n’approuverai pas sa publication.

M. Jean-Pierre Giran. Je voterai en faveur de la publication du rapport, car autorisation de publication ne vaut pas approbation sur le fond. S’agissant de l’agrégation, je me suis élevé, lors d’un précédent débat, contre la proposition de suppression de ce concours en droit et sciences économiques. Je pense qu’il est en effet extrêmement dangereux de supprimer les « barreaux de l’échelle », sans lesquels on ne peut monter au sommet. J’aurais donc préféré que le rapport affirme que si l’agrégation n’est pas la voie unique d’accès à l’enseignement, elle en demeure la voie d’excellence. Elle ne doit pas devenir l’exception. J’estime en outre que nous devons lutter contre la tendance à une « secondarisation » de l’université et à une « primarisation » de l’enseignement secondaire. La dimension nationale des concours et l’excellence des enseignements auraient pu tout autant être affirmés que la proposition de « dissoudre », à terme, l’agrégation dans je ne sais quel master. En effet, à l’université, les masters n’ont pas toujours la qualité que l’on veut leur prêter.

Mme Monique Boulestin. Je souhaite revenir sur trois points qui méritent toute notre attention et doivent être débattus. J’évoquerai tout d’abord, évidemment, la suppression du concours externe. On ne peut pas, s’agissant d’un concours de ce niveau, dire comme cela est écrit, pages 94 et 95 du rapport, que le concours externe de l’agrégation coûte cher. Si l’éducation a un coût, ce n’est pas celui-là. Comme la santé, l’éducation a certes un coût, mais elle n’a pas de prix. Ce sont en effet des générations d’adolescents et d’étudiants qui bénéficient de la haute qualité des enseignements qui leur sont dispensés.

J’en viens au remplacement du concours par un master. Comme nous l’avons déjà dit, les masters diffèrent d’une académie à une autre. Nous souhaitons, pour notre part, maintenir une égalité républicaine, dans le respect du statut de la fonction publique, s’agissant des compétences requises en tout point de notre territoire pour devenir enseignant.

Enfin, monsieur le rapporteur, vous évoquez dans votre rapport l’évolution nécessaire des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) sans mener la réflexion à son terme. Ces instituts doivent redevenir de véritables lieux de formation des enseignants et de véritables écoles professionnelles, comme il en existe pour d’autres professions – je pense notamment à l’École nationale de la magistrature. Nous ne trouvons pas une telle ambition dans votre rapport.

M. Michel Herbillon. Notre débat porte sur deux points totalement différents. Le premier est lié à une polémique sur la forme, lancée par nos collègues de l’opposition qui considèrent, depuis le départ, que c’est à tort que la majorité de notre commission s’est saisie du sujet très important de la formation des enseignants, qu’ils considèrent comme étant leur « chasse gardée ». Excusez-nous de déranger : ce sujet essentiel – celui de l’éducation de nos enfants – concerne tout le monde !

Je remercie M. Pascal Deguilhem d’avoir rappelé l’intermittence de l’assiduité de l’opposition aux travaux de la mission d’information – même si c’est son droit le plus strict : sa volonté initiale de « boycotter » ses travaux, puis son revirement. Un débat a ensuite traversé tous les rangs de notre commission sur la question de la publication du rapport de la mission. Nous ne pouvons que rendre hommage à Mme la présidente et au président-rapporteur d’avoir proposé une poursuite des auditions pour approfondir la réflexion.

Arrêtons donc cette polémique sur une question de forme qui n’a rien d’essentiel. Si j’ai bien compris, l’opposition propose d’instaurer une censure en interdisant la publication du rapport. Cela serait tout à fait inédit, alors qu’un travail de fond a été mené tant par le président-rapporteur que par l’ensemble des membres de la mission pendant plusieurs mois.

J’en viens au fond. Un débat anime tous les rangs de notre commission, y compris ceux de sa majorité, à propos de la suppression du concours de l’agrégation et de son remplacement par des masters. J’y suis pour ma part opposé, de même qu’un certain nombre de commissaires de la majorité et de l’opposition. Ce débat justifiait que de nouvelles auditions aient été menées. M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur de la mission, a indiqué clairement qu’à l’issue de ces auditions, il avait supprimé ses propositions initiales n° 5 et n° 20 – je l’invite d’ailleurs à le préciser de nouveau si nécessaire. Dans ces conditions, je suis personnellement favorable à la publication du rapport, qui fait suite à de très nombreuses auditions. Attaché à la reconnaissance républicaine des mérites, j’estime en effet que les concours nationaux, en reposant sur le mérite, permettent l’ascension sociale : tout jeune Français peut, en tout point du territoire, tenter d’aboutir à l’excellence.

Si, comme certains le soutiennent, des termes utilisés dans le rapport semblent se référer aux précédentes propositions qu’il contenait avant qu’elles n’en soient supprimées, j’invite le rapporteur à nous dire très clairement ce qu’il en est. Ces termes peuvent en effet traduire sa position personnelle. Nous sommes à l’Assemblée nationale, il est normal qu’il y ait débat. En tout état de cause, j’autoriserai la publication du rapport.

Mme Colette Langlade. Je pense que le sujet est trop grave pour qu’il y ait matière à polémique. Le rapport suggère que les étudiants stagiaires pourraient être encadrés par des enseignants « chevronnés » : selon quels critères ? Il propose également un encadrement par des enseignants « volontaires », avec une liste « à la Prévert » : professeurs des écoles, maîtres d’accueil temporaire, conseillers pédagogiques ou encore corps d’inspection. Ce rapport n’évoque jamais les moyens financiers nécessaires à l’accompagnement des nouveaux enseignants ; en revanche, il évoque encore et toujours un accroissement de la charge de travail.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je propose aux membres de la commission qui le souhaiteraient de transmettre, d’ici vendredi 9 décembre, leur contribution écrite, soit individuelle, soit de groupe, afin que celle-ci figure en annexe du rapport. Je vous rappelle que notre réunion de commission donnera en outre lieu à l’établissement d’un compte rendu qui figurera, lui aussi, dans le rapport. Celui-ci fera donc état de tous les avis exprimés sur les questions évoquées.

M. Patrick Bloche. Permettez-moi de rappeler certains faits, car certains intervenants semblent avoir oublié combien cette mission d’information avait mal commencé – ce qui peut, du reste, expliquer qu’elle s’achève également mal. Nous avions demandé que la présidence de cette mission soit assurée par un membre de l’opposition, la fonction de rapporteur devant logiquement revenir à un membre de la majorité, comme cela se pratique pour des missions créées par d’autres commissions. Cela nous a été refusé et, après de trop longues discussions, un petit geste nous a été consenti : Mme Martine Faure a été désignée vice-présidente. Ceci explique pourquoi les membres du groupe SRC ont fini par participer aux travaux de la mission d’information.

Où en est-on aujourd’hui ? Nous ne pratiquons aucune obstruction. Comme tout le monde l’a bien compris, les jeux étaient déjà faits avant que nous ne débutions cette séance : la publication du rapport sera autorisée, la majorité étant, ce matin, fort heureusement, majoritaire. En revanche, nous souhaitons rappeler notre opposition sur le fond et éviter que nous ne nous ridiculisions collectivement. Chers collègues de la majorité, vous l’avez bien compris : la mission a réentendu des personnes qu’elle avait déjà auditionnées, qui ont évidemment tenu les mêmes propos qu’au printemps car elles n’avaient pas changé d’avis en six mois. Ces nouvelles auditions ont donc donné lieu à un travail « cosmétique » sur le rapport dont on constate, en étudiant sa chair, qu’il contient toujours le même venin. Les propositions qui avaient conduit la commission à refuser majoritairement la publication du rapport figurent toujours dans le cœur de celui-ci. C’est donc en toute camaraderie que j’alerte les commissaires de la majorité : vous êtes amenés à voter exactement le même rapport que celui qui vous avait précédemment été soumis. Il sera publié, puisque tel est votre choix. Comptez sur nous, en tant que députés de l’opposition, pour assurer sa publicité ! C’est un vrai brûlot dont vous verrez qu’il vous brûlera les doigts.

Mme Martine Martinel. Je suis gênée par les propos de M. Michel Herbillon qui parle de polémique et évoque une « chasse gardée » de l’opposition. J’estime que l’éducation doit être la « chasse gardée », au sens positif du terme, de tous les députés. Je m’étonne aussi qu’une personne aussi sagace que M. Michel Herbillon sépare la forme du fond. Il ne s’agit évidemment pas de contester l’honnêteté et la rigueur des personnes, aux éminentes qualités, citées par le rapport, comme MM. François Dubet et Alain Boissinot, mais je déplore que les propos qui leur sont prêtés aient été sortis de leur contexte. Je m’interroge ainsi lorsque je constate que M. Alain Boissinot en viendrait à critiquer les concours, lui qui a été inspecteur général de l’éducation nationale et membre éminent d’un grand nombre de jurys de concours. Je suis également gênée lorsque je lis, à la toute fin du rapport, que « nombreux [sont] encore ceux qui sont attachés au modèle traditionnel du concours ». Qu’est-ce donc que ce « modèle traditionnel » ? Serait-ce un modèle « ringard » ? Je préfère, pour ma part, le « modèle traditionnel » du concours qui privilégie l’excellence républicaine au recrutement de personnes dépourvues de compétences et de formation par Pôle Emploi, comme cela est actuellement le cas dans l’académie de Toulouse en lettres classiques.

Mme Marie-Hélène Amiable. Monsieur Michel Herbillon, nous ne voulons censurer personne ! C’est vous qui voulez, à tout prix, que nous approuvions ce rapport ! Vos propos concernant la présence de membres de l’opposition aux réunions de la mission s’apparentent en outre à de la provocation. Nous n’avons pas de leçons à recevoir : si l’opposition n’avait pas été présente lors de ces réunions, M. Jacques Grosperrin aurait été bien seul… Je tiens d’ailleurs à le remercier car j’avais proposé que soient entendues certaines personnes, et il a donné suite à mes demandes. Ne nous faites donc pas de mauvais procès.

Il convient de remettre sur le métier la formation des maîtres. La situation est aujourd’hui catastrophique en raison de la réforme et de la précipitation dans laquelle celle-ci a été conduite, comme l’ont très bien montré les auditions que nous avons menées. Dans un souci d’économies nouvelles et une volonté de mise en cause, sur le fond, de la fonction publique, vous proposez, d’ici quinze à vingt ans, une suppression des concours. Nous ne pouvons pas l’accepter car nous estimons que ceux-ci sont sources d’égalité républicaine et d’égalité de traitement sur le territoire national. En outre, vous ne traitez pas le cœur du problème que nous rencontrons avec la formation des maîtres.

Enfin, un élément nouveau, et non des moindres, doit être pris en compte, à savoir la décision du Conseil d’État du 28 novembre 2011 qui vient d’annuler l’arrêté du 12 mai 2010 portant définition des compétences à acquérir par les professeurs, documentalistes et conseillers principaux d’éducation pour l’exercice de leur métier. Cette situation devrait vous conduire, monsieur le rapporteur, à formuler de nouvelles propositions.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur. Nous sommes aujourd’hui amenés à nous prononcer sur la publication d’un nouveau rapport qui porte, comme vous l’avez tous souligné, sur un sujet important, celui de l’éducation. Il fait débat, comme le démontre votre présence aujourd’hui.

Je ne m’attarderai pas sur la question du taux de présence aux réunions de la mission. Tous ont été très présents, mais il est vrai que le « boycott » initial des travaux a pu créer des difficultés : certains membres de l’opposition n’ont ainsi assisté qu’à la moitié des auditions – ce qui n’a pas été le cas de Mme Marie-Hélène Amiable qui a assisté à l’ensemble d’entre elles. Je comprends cette posture, mais elle a pu conduire à des difficultés de compréhension du rapport.

Le corps du rapport fait état, en toute sincérité, de l’avis de spécialistes de grande renommée. Pour que les choses soient bien claires, je précise que je suis attaché au concours de l’agrégation qui sanctionne un niveau d’excellence. La proposition initiale n° 5 qui faisait polémique a donc été retirée du rapport, comme vous le souhaitiez au mois de juin dernier. La proposition initiale n° 20 a également été supprimée, car nous sommes attachés à la reconnaissance des mérites par les concours de la fonction publique d’État. Vous devriez en être satisfaits.

Comme vous l’a proposé Madame la présidente, vous avez la possibilité de transmettre des contributions écrites qui seront annexées au rapport ; le compte rendu de notre actuelle réunion figurera également dans ce dernier.

Je tiens, en conclusion, à remercier les commissaires membres du groupe UMP de leur soutien en faveur de la publication du rapport. Celui-ci aborde un sujet qui fait débat et qui sera sans aucun doute discuté dans le cadre de la campagne présidentielle.

M. Michel Ménard. Comme l’a rappelé M. René Couanau, la question de fond est tout de même la situation dramatique de la formation des enseignants. Alors que l’État recrute, pour l’instant toujours par concours, des personnels pour trente ou quarante ans, il ne s’assure pas de leurs capacités pédagogiques. Il ne prend en compte que les connaissances. Or pour que des enseignants puissent transmettre des savoirs, il faut non seulement qu’ils les possèdent solidement, mais aussi qu’ils disposent de la formation pédagogique nécessaire. À défaut, ces collègues enseignants se trouvent en difficulté.

L’inquiétude est grande dans les instituts de formation des maîtres (IUFM). Je suis membre du conseil d’école de l’IUFM des Pays de la Loire, qui ne sait plus quelles sont ses perspectives. Des tensions existent avec les universités. Le statut même des IUFM est des plus flous, s’il existe encore.

La clarification de cette situation passe donc par la possibilité pour les futurs enseignants de disposer d’une formation pédagogique extrêmement solide.

Sur la forme maintenant : approuver la publication du rapport me semble, pour le moins, donner le sentiment qu’une majorité des députés valide les propositions qui y figurent. Autoriser la publication, c’est valider le contenu du rapport. Si les propositions 5 et 20 du rapport initial ont bien été retirées, elles figurent cependant toujours dans le corps du rapport, où il est noté que l’on pourrait remplacer le concours par le master d’ici à dix ans.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous rappelle que le compte rendu de la réunion d’aujourd’hui sera intégré au rapport ; vos interventions y figureront donc. En outre, vous pourrez transmettre des contributions écrites jusqu’à vendredi midi. Elles seront annexées au rapport. Il me semble que c’est faire montre d’un réel esprit d’ouverture…

Je mets maintenant aux voix l’autorisation de la publication du rapport d’information.

La commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

La séance est levée à onze heures quarante.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 7 décembre 2011 à 9 heures 30

Présents. – Mme Marie-Hélène Amiable, M. Éric Berdoati, M. Marc Bernier, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Monique Boulestin, M. Bruno Bourg-Broc, M. Xavier Breton, Mme Marie-George Buffet, Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, M. René Couanau, Mme Pascale Crozon, M. Bernard Debré, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Delong, M. Bernard Depierre, M. Yves Durand, M. Gilles d'Ettore, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, M. Gérard Gaudron, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Jean-Pierre Giran, M. Jacques Grosperrin, Mme Françoise Guégot, M. Michel Herbillon, Mme Françoise Imbert, Mme Jacqueline Irles, M. Olivier Jardé, M. Régis Juanico, M. Christian Kert, M. Raymond Lancelin, Mme Colette Langlade, M. Dominique Le Mèner, M. Pierre Lequiller, M. Alain Marc, Mme Muriel Marland-Militello, Mme Martine Martinel, M. Gilbert Mathon, M. Jean-Philippe Maurer, M. Michel Ménard, M. Michel Pajon, Mme Françoise de Panafieu, M. Franck Riester, M. Marcel Rogemont, M. Paul Salen, M. Daniel Spagnou, Mme Michèle Tabarot, Mme Marie-Hélène Thoraval, M. Jean-Louis Touraine, M. Jean Ueberschlag, M. Michel Vaxès

Excusés. – Mme Sylvia Bassot, M. Jean-François Copé, Mme Valérie Fourneyron, M. Yvan Lachaud, Mme Marie-Claude Marchand, M. Jean-Luc Pérat, M. Frédéric Reiss, Mme Marie-Josée Roig, M. Georges Tron