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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mardi 20 février 2008

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 65

Présidence de M. Didier Migaud, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Charles Milhaud, président du directoire de la Caisse nationale des caisses d’épargne, sur la distribution du Livret A et le financement du logement social

Le Président Didier Migaud a souhaité la bienvenue à M. Charles Milhaud, Président du directoire de la Caisse nationale des caisses d’épargne, et à M. Nicolas Mérindol, directeur général.

Le dispositif de distribution du livret A a fait l’objet d’une contestation devant la Commission européenne en septembre et décembre 2005 par plusieurs banques françaises. Dans une décision du 10 mai 2007, la Commission a donné neuf mois au gouvernement français pour modifier sa législation afin de supprimer ce qu’elle estime être une entrave aux règles du marché intérieur, résultant des droits spéciaux de distribution de ces livrets par trois réseaux : ceux de La Poste, des Caisses d’épargne et, pour le livret bleu, du Crédit mutuel.

La commission des Finances a entendu M. Michel Camdessus, qui a remis au Premier ministre un rapport dont les préconisations tendent à une réforme d’ensemble du circuit du financement du logement social pour accompagner la généralisation de la distribution du livret A.

Beaucoup de parties prenantes à ce dossier, et quelques membres de la commission, ont estimé que les préconisations de ce rapport reposaient sur un certain nombre d’hypothèses optimistes, notamment en comptant sur la mobilisation des banques pour remplir la mission de service public d’accessibilité bancaire. Beaucoup se sont également interrogés sur les conséquences que pourraient avoir les modifications proposées sur le financement du logement social ainsi que sur le rôle de la Caisse des dépôts et consignations. La Commission a entendu les dirigeants de La Poste, ceux de la Caisse des dépôts, l’intersyndicale du secteur semi-public économique et financier, l’Union sociale pour l’habitat et les deux ministres concernées : Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, et Mme Christine Lagarde, ministre de l’Économie et des finances.

Dans son audition du 6 février, Mme Christine Lagarde a tracé les grandes lignes de la réforme que le Gouvernement envisage – après, d’ailleurs, qu’il en aura testé certains points auprès de la Commission européenne. Ce projet reprend quelques préconisations du rapport Camdessus – banalisation de la distribution, réduction de la rémunération des encours, inscription par les banques d’une partie de la collecte dans leur bilan – mais s’en éloigne à certains égards, notamment en ce qui concerne la question de l’accessibilité bancaire : les livrets A ouverts après l’entrée en vigueur de la réforme seraient des produits d’épargne privés des attributs d’un compte courant ; parallèlement, il serait créé un nouveau type de livret A d’accessibilité bancaire, distribué par la Banque postale et accessible aux personnes connaissant des difficultés d’insertion. La Banque postale bénéficierait, au titre de ces livrets, d’une rémunération supplémentaire.

Le Président Charles Milhaud a émis le souhait d’être entendu par la commission des Finances. Celle-ci souhaiterait qu’il lui fasse part de la position de son groupe sur ce dossier, de son analyse de la situation, de ses réactions quant à la réforme envisagée, et enfin des chances de succès du recours qu’il a déposé devant les instances européennes pour contester la décision de la Commission.

M. Charles Milhaud, Président du directoire de la Caisse nationale des caisses d'épargne, a rappelé qu’en effet la banalisation de la distribution du livret A a été exigée en mai 2007 par la Commission européenne à la suite d’un recours de plusieurs banques françaises. La France a marqué sa réticence aux exigences de la Commission en déposant à son tour un recours devant la justice européenne. Dans le même temps, le Gouvernement a choisi d’étendre le sujet au financement du logement social et à l’accessibilité bancaire et a commandé un rapport à M. Camdessus sur la réforme du système de distribution du livret A. Ce rapport constitue à la fois un problème pour le groupe Caisse d’épargne, qui est directement concerné, et un problème pour le financement du logement social.

Le 11 décembre 2007, le Président de la République s’est prononcé en faveur de la banalisation de la distribution du livret A mais il a assorti cet accord de trois conditions : que cette réforme ne mette pas en danger la collecte, qu’elle ne déstabilise pas les réseaux distributeurs historiques et qu’elle réduise le coût du financement du logement social. Le groupe Caisse d’épargne a pris acte de ces conditions, qui fixent le cadre de cette réforme voulue par les pouvoirs publics. Toutefois, le rapport Camdessus semble une bien mauvaise source d’inspiration et est en outre peu opportun dans le contexte actuel de crise des systèmes financiers.

Il met notamment en danger la collecte en proposant un taux de commissionnement peu incitatif : 0,40 %, alors que les banques qui réclament un taux à 0,80 %, ne manqueront pas de réorienter rapidement la collecte vers des produits plus rémunérateurs pour elles. À titre de comparaison, la collecte du livret d’épargne populaire, qui peut concerner plus de 70 % des Français, représente 58 milliards d’euros et est centralisée à 85 %, mais est rémunérée à 0,50 %, tandis que le livret de développement durable est rémunéré à 0,80 % pour une collecte de 60 milliards d’euros centralisée à 9 %.

S’agissant du LEP, les Caisses d’épargne détiennent 30 % de parts de marché, la Banque postale 20 % et le Crédit mutuel 10 %, soit un total de 60 % ; s’agissant du LDD, les Caisses d’épargne détiennent 12 % de parts de marché, la Banque postale 5 %, le Crédit mutuel 7 %, le Crédit agricole – qui détient le réseau le plus étendu – 40 % et les autres réseaux 36 %. Cet exemple illustre l’appétit très limité des banques pour un produit faiblement rémunéré et fortement centralisé. Il montre bien qu’il existe un risque de décollecte massive si l’on rémunère le livret A à un niveau inférieur encore aux taux du LEP. À ce risque s’ajoute le peu de chances de voir augmenter le nombre de livrets A, dont 51 millions sont déjà en circulation.

De plus, le rapport Camdessus est fondé sur le constat erroné que le coût du financement du logement social serait moindre en faisant appel au marché. Cela est faux car, dans la formule actuelle, le coût de la ressource issue du livret A est inférieur au coût des émissions obligataires à vingt ans.

Sur les dernières années, le taux du livret A permettant de financer le logement social a été inférieur de 2,5 points, en moyenne, au coût de ressources sur le marché obligataire, ce qui a permis tout à la fois de rémunérer les établissements collecteurs, de bonifier les prêts à l’habitat et d’abonder le budget de l’État. Le rapport Camdessus semble ignorer le fait que la Caisse des dépôts, pour s’assurer contre le risque de transformation d’une ressource liquide, remboursable immédiatement au détenteur de livret A, en des prêts à très long terme, se couvre simplement grâce à un portefeuille d’actifs, et non pas en achetant un swap. Dans le rapport, le coût du swap est intégré, ce qui invalide la conclusion.

Par ailleurs, la mise en place, proposée par le ministre des finances, d’un « livret A bis » baptisé livret d’accessibilité bancaire ne paraît nullement correspondre à quelque besoin que ce soit. Cette proposition peu compréhensible est contraire à l’esprit de solidarité qui a conduit à la création du livret A et au caractère populaire de ce produit. Elle équivaudrait à créer ce que d’aucuns ont appelé une « banque des pauvres ». Il est hors de question, pour les Caisses d’épargne, de commencer à trier les clients pour mettre les plus pauvres à part et les renvoyer à la Banque postale, alors que c’est précisément contre cela qu’elles luttent âprement depuis des années. Une telle chose ne ferait que renforcer l’isolement des populations déjà fragiles et accentuerait leur exclusion.

À l’évidence, les préconisations du rapport Camdessus déstabiliseraient les distributeurs historiques. Leur application se traduirait, pour les Caisses d’épargne, par une perte d’environ 500 millions d’euros de PNB – produit net bancaire –, soit un impact négatif de près de 4 points du coefficient d’exploitation. Cela affectera les fonds propres et fera peser un risque tant sur le maintien de la notation du groupe Caisse d’épargne et ses conditions de refinancement que sur les transformations déjà mises en œuvre par les Caisses d’épargne. Ces dernières seront rapidement conduites à compenser ces pertes par un nombre de fermetures d’agences que l’on peut estimer à près de mille, essentiellement dans les zones urbaines sensibles où 212 d’entre elles sont actuellement implantées, contre 120 pour le Crédit agricole, 280 pour La Poste et un nombre infinitésimal pour les autres banques.

Il convient de rappeler les missions d’intérêt général du groupe Caisse d’épargne.

Les Caisses d’épargne ont consacré en 2007 près de 56 millions d’euros au financement de 3 000 projets d’économie locale et sociale, 39 % de ce montant étant consacré à l’emploi, 46 % à l’autonomie et 15 % au lien social. Le groupe a créé, via des organismes d’accompagnement comme l’ADIE ou France active, près de 10 000 emplois. La Fondation Caisses d’épargne pour la solidarité, fondation reconnue d’utilité publique créée en 2001, emploie aujourd'hui 3 360 collaborateurs, gère 82 établissements et services et 5 000 places d’accueil, avec un objectif de 10 000 places en 2010. Elle reçoit des Caisses d’épargne environ 7,8 millions d’euros de dons. À ce jour, ont été mis en place 17 centres « Savoir pour réussir », dont le but est de sortir les jeunes de l’illettrisme. Par ailleurs, le Parcours confiance, destiné à aider les accidentés de la vie, a permis d’octroyer 1 213 microcrédits en 2007, pour un montant total d’environ 9 millions d’euros.

Enfin, si le livret A a pu être utilisé pour recevoir des virements ou pour effectuer certains prélèvements, c’est que, dans les années 1970, l’administration des finances se battait pour empêcher les Caisses d’épargne de remplir une fonction bancaire : elle avait donc imaginé, par manière de compensation, que le livret A puisse servir d’instrument de bancarisation. Cet élément a été rappelé par M. Camdessus lui-même.

Si la banalisation de la distribution devait avoir lieu, le groupe Caisse d’épargne propose que la commission pour l’ensemble des livrets défiscalisés soit à 0,60 % et que les établissements distributeurs actuels bénéficient d’une période transitoire de cinq ans pour passer à cette rémunération. De même, la nouvelle répartition entre 70 % de collecte centralisée et 30 % portée au bilan serait atteinte à l’issue de cette période destinée à lisser l’opération. Si réforme il doit y avoir – ce que l’on peut regretter –, le mieux serait de permettre aux autres établissements de distribuer un produit défiscalisé, lequel ne peut porter le nom de livret A puisque le groupe en est propriétaire et en a accordé l’usage à La Poste, avec une rémunération à 0,60 %. Il n’y aurait ainsi pas de changements pour les clients, qui pourraient continuer à effectuer leurs virements et leurs prélèvements sur leur livret, sans être obligés, le cas échéant, de s’adresser à La Poste. De la sorte, l’encours du livret A sera maintenu. Un système qui a permis pendant près de cinquante ans de financer le logement social ne peut être transformé du jour au lendemain.

Le Président Didier Migaud a remercié M. Charles Milhaud pour cette introduction claire et directe et a souhaité connaître les arguments apportés par le groupe Caisse d’épargne dans le cadre de son recours contre la décision de la Commission européenne.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a remarqué que la banalisation de la distribution pourrait se traduire, non par une rétraction de la collecte comme le suggère M. Milhaud, mais par une extension. Malgré le nombre de livrets A déjà ouverts, l’accès à ce produit est limité par le fait qu’il n’est pas distribué partout. Le nombre d’ouvertures pourrait donc encore augmenter, d’autant que les crises financières et bancaires récentes créent un climat de forte incertitude et rendent ce produit très attractif. C’est seulement dans un second temps que l’on peut envisager un effet d’éviction si le taux de commissionnement est trop faible, comme c’est probablement le cas à 0,40 %.

Mme Christine Lagarde s’est prononcée en faveur d’un taux de centralisation de 70 %, avec une période de transition de deux ans pour les organismes collecteurs actuels. Pourquoi le groupe Caisse d’épargne souhaite-t-il porter cette durée à cinq ans ?

Enfin, si le rapport Camdessus propose d’abaisser le taux de commissionnement, c’est pour augmenter les capacités de financement du logement social. Quelles seraient les suggestions du groupe Caisse d’épargne pour améliorer ce financement ? Il ressort des auditions précédentes que, de l’avis général, le système a bien fonctionné pendant des décennies et qu’il faut y regarder à deux fois avant de le démanteler.

M. Olivier Dassault a observé que, si les Caisses d’épargne portent toujours à leur fronton l’écureuil des armoiries de Nicolas Fouquet, elles se sont considérablement transformées et sont maintenant fédérées en un véritable groupe. Tout au long de son parcours, M. Charles Milhaud ne s’est jamais contenté de gérer une structure existante, mais a été l’artisan de l’expansion d’un groupe qui, aujourd'hui, nourrit de légitimes ambitions, y compris sur les marchés financiers. Se pose dès lors la question de la solidité financière de cette banque coopérative, notamment au regard des normes de la directive européenne « Bâle II », entrée en vigueur le 1er janvier 2008 et qui introduit une nouvelle méthode de comptabilisation des risques encourus par les banques.

Alors que, pour garantir la sécurité des investissements, la Commission bancaire a fixé un ratio de 8,5 % de capitaux propres, il semblerait que le groupe Caisse d’épargne soit aujourd'hui un peu en dessous de 7 %. Des commentaires multiples, en particulier dans la presse, ont évoqué un besoin de fonds propres. Qu’en est-il exactement ?

Le Président Didier Migaud a estimé que cette question dépasse quelque peu le cadre de cette audition, mais qu’elle n’en est pas moins intéressante. Il serait à cet égard utile que M. Milhaud précise à la commission quelle est l’exposition de son groupe au risque « subprime ».

M. Frédéric Lefebvre a demandé à son tour quelles sont les chances de succès du recours déposé par le groupe Caisse d’épargne. M. Charles Milhaud demande une période de transition et souligne le risque que l’on fait peser sur le logement social. Quel est le rythme de réforme qui, selon lui, permettrait de protéger le système le plus efficacement ?

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a ajouté que, même si le recours est rejeté, il reste du temps pour mettre en œuvre une réforme.

M. Charles Milhaud a répété que son groupe n’est pas favorable à la réforme du système qui n’apporterait rien, même s’il a pris acte de certaines déclarations préconisant la banalisation de la distribution du livret A. S’agissant du recours, on ne saurait préjuger de ce que sera l’appréciation du tribunal. Il faut rappeler que les attendus de la Commission européenne ne concernent que la banalisation de la distribution du livret A et invoquent des problèmes de distorsion de concurrence. Il n’est nullement question du logement social. Le groupe Caisse d’épargne considère qu’il n’y a pas distorsion de concurrence dans la mesure où la distribution est assurée par plusieurs établissements et où des contraintes y sont attachées. Il a donc de fortes chances de gagner son recours.

Reste que celui-ci n’est pas suspensif, ce qui a amené le groupe Caisse d’épargne à rendre publiques ses positions sur la question.

En ce qui concerne un éventuel accroissement des ouvertures de livret A, il faut garder à l’esprit que pratiquement tous les clients détiennent ce produit – 51 millions sur 62 millions de Français – y compris ceux qui ont tous leurs autres comptes dans une banque différente. En cas de banalisation, la banque fera tout pour que les livrets au plafond lui soit transférés, moyennant de menus avantages et en faisant valoir l’offre d’un  package complet. Elle écrèmerait ensuite en transférant les fonds sur d’autres produits plus rentables pour elle.

Le taux de 0,40 % ne permet en effet pas de couvrir les frais. Au demeurant, M. Beaudouin Prot lui-même a exigé 0,80 %. Si le système proposé est mis en place, les banquiers accepteront certes le transfert, mais ils proposeront ensuite d’autres produits. Il peut y avoir, dans un premier temps très bref, une stabilisation ou une légère augmentation des encours, mais il s’ensuivra une diminution inéluctable du stock et un déséquilibre en défaveur du livret A.

Le taux de centralisation envisagé ne posera pas de problème pour les nouveaux arrivants, puisqu’ils pourront répartir tous les flux. La durée de cinq ans proposée pour les distributeurs historiques évitera de déstabiliser l’encours de la Caisse des dépôts sur les livrets A, qui gage l’ensemble des crédits accordés. Par ailleurs, un éventuel financement avec des produits obligataires mettrait fin à la mutualisation qui prévaut actuellement dans l’octroi de crédits aux organismes de logement social. Aujourd'hui, la CDC fait masse commune, ce qui permet de prêter à tous les organismes, y compris à ceux qui ne trouvent pas un financement de marché.

La réforme proposée aurait donc des conséquences majeures. On ne peut pas traiter un tel sujet aussi rapidement ! Que l’on se rappelle les effets de la suppression brutale des PAP – prêts d’accession à la propriété – du Crédit foncier.

Plusieurs articles ont en effet été publiés sur la solidité financière du groupe. Les Caisses d’épargne, qui disposent de 20 milliards de fonds propres, ne connaissent pas de difficulté. Après l’opération IXIS, la Commission bancaire a exigé un ratio de 8,5 % pour la CNCE. Pour mettre en œuvre les normes de Bâle II, le niveau de fonds propres de la Caisse nationale doit être augmenté pour atteindre les 8,5. Or, les caisses régionales présentent des ratios de plus de 10 %. Le groupe prépare d’ores et déjà l’émission d’actions de préférence de manière à ce que les caisses régionales augmentent leur participation au capital de la Caisse nationale. Il s’agit d’un pur et simple transfert des fonds propres au sein du Groupe qui ne pénalise pas les Caisses d’épargne.

M. Henri Emmanuelli a souhaité connaître le montant de ce transfert.

M. Nicolas Mérindol, directeur général, a indiqué que les caisses d’Épargne vont souscrire une augmentation de capital de la Caisse nationale à hauteur de 3 milliards d’euros, sans que cela pèse sur leur ratio ou altère leur action en matière de crédit.

S’agissant de la crise des subprimes, les Caisses d’épargnes ne sont pas exposées en tant que telles. Seule l’activité de banque d’investissement, que le groupe exerce au travers de sa participation, à hauteur de 34 % – comme les Banques populaires –, dans Natixis, et au travers d’un réassureur « monoliner » CIFG, créé en son temps par la CDC et apporté à Natixis, est affectée.

M. Henri Emmanuelli a précisé que ce réassureur est un rehausseur de crédit.

M. Nicolas Mérindol a ajouté que le groupe détient ce rehausseur à 50 % avec les Banques populaires depuis la fin de 2007.

Le résultat du groupe Caisse d’épargne s’est élevé en 2006 à 1,4 milliard d’euros en pro forma. Le résultat de 2007 qui sera présenté au conseil de surveillance le 6 mars sera un peu supérieur à 1,1 milliard et proche du résultat 2006. L’impact de la crise des subprimes se compte donc en centaines de millions d’euros et non en milliards ou dizaines de milliards, comme on a voulu le faire croire par certaines allégations parues dans la presse.

En outre, le ratio de la CNCE respectera les 8,5 % au 31 mars. Au niveau du groupe, ce sera l’un des meilleurs ratios des banques françaises. Il faut ajouter que la culture de prudence du groupe lui a évité, tout au long de son histoire, tous les accidents ou fraudes que d’autres banques ont pu connaître.

M. Henri Emmanuelli a supposé que le risque principal concernait le rehausseur de crédit et a demandé pour quel montant celui-ci était engagé.

M. Nicolas Mérindol a répondu que le rehausseur a, aux États-Unis, un encours de 90 milliards de dollars, à l’origine essentiellement avec des collectivités locales. Sur cette somme, le risque de « provisionnement » dans un scénario catastrophe s’élèverait à environ 2 à 2,5 milliards de dollars. Pour le groupe Caisse d’épargne, environ 500 millions d’euros avant impôt seront provisionnés dans les comptes 2007, compte tenu des réserves existantes au sein du CIFG.

M. Louis Giscard d’Estaing a relevé que, selon M. Charles Milhaud, le taux de commissionnement a un rôle important dans l’orientation de la collecte vers le livret A. Dans ce paysage, quelle est la situation du plan d’épargne logement – PEL –, dont la commission des Finances avait constaté naguère qu’il n’était pas toujours utilisé conformément à son intitulé et ne débouchait pas, dans de nombreux cas, sur l’acquisition d’un logement ?

M. Charles Milhaud a indiqué que les dernières mesures relatives au plan d’épargne logement ont entraîné une réelle désaffection pour ce produit. En réalité, dès lors que les taux de crédit au logement offerts sur le marché sont tombés à un niveau beaucoup plus bas que lors de la création du PEL, les clients ont moins eu intérêt à attendre d’avoir amassé une épargne significative et ce produit est devenu une formule d’épargne parmi d’autres. Le PEL est un contrat qui lie la banque au client sur des durées longues et les prêts sont gagés sur les encours, même si le groupe Caisse d’épargne a également fait des provisions dans ce domaine.

Le système de l’épargne logement doit être mesuré à l’aune de la gestion actif-passif de chaque banque.

M. Nicolas Mérindol a ajouté que le nouveau schéma s’est traduit, dans toutes les banques, par une baisse très importante de l’encours du PEL alors que tout le monde avait annoncé que la situation resterait relativement stable. Cela ne peut qu’inciter à la prudence pour le livret A.

M. Gilles Carrez, rapporteur général, a confirmé que, sur le plan budgétaire, la prévision du versement des primes d’État liées à la sortie du PEL s’est révélée, deux ans de suite, très inférieure à la réalisation et que des décrets d’avance ont dû être pris en cours d’année.

M. Frédéric Lefebvre a souhaité aborder le sujet du compte épargne codéveloppement et du livret épargne codéveloppement, dont il a été l’initiateur.

Où en est-on sur ces produits qui sont très importants pour l’aide au développement dans la mesure où ils permettent, de la part des étrangers présents sur notre sol, des aides directes à leur pays d’origine ? Un des objectifs est également le développement de réseaux et de produits bancaires ou d’assurance dans les pays d’origine, qui sont souvent soumis à des risques agricoles et climatiques considérables.

M. Charles Milhaud a rappellé que le groupe Caisse d’épargne est présent au Maroc au travers d’un actionnariat dans le Crédit immobilier et hôtelier du Maroc, en Tunisie via la Banque tuniso-koweïtienne, dont il détient 60 %, et qu’il a déposé un dossier pour créer une banque en Algérie en partenariat avec la Banque mondiale et un industriel algérien. Si la Tunisie est relativement bancarisée, le Maroc ne l’est qu’à 25 % et l’Algérie ne l’est pratiquement pas. Le groupe est également en train de passer une convention avec des caisses d’épargne africaines en passe de se transformer en établissements bancaires.

Les développements informatiques pour la commercialisation des comptes épargne codéveloppement sont en cours. Néanmoins, ceux-ci présentent deux défauts. D’abord, ils ne sont pas accessibles aux binationaux, dont les moyens financiers sont sans doute un peu plus importants. Le prétexte invoqué est que cela coûterait cher au budget de l’État, ce qui reste à prouver dès lors qu’on ne connaît pas, par nature, ce qu’est réellement le marché. Ensuite, la pénalité de 40 % qui frappe les retraits effectués en l’absence d’investissement dans le pays d’origine – sachant que les sommes versées sur le livret sont déduites du revenu imposable jusqu’à un certain plafond – est dissuasive. Elle sera perçue comme une spoliation. Il est impossible de vendre un produit dans de telles conditions. Le calcul qui a conduit à mettre en place cette pénalité est compréhensible si l’objectif est de mettre en place un produit purement financier, mais pas s’il est de créer un produit permettant de créer une dynamique d’investissement dans les pays d’origine.

M. Frédéric Lefebvre a suggéré que les acteurs se mettent autour de la table rapidement sur ce sujet, car des initiatives pourraient être incluses dans le projet de loi de modernisation de l’économie.

Après avoir remarqué que d’autres initiatives pourraient au contraire en être retirées, le Président Didier Migaud a remercié les intervenants pour les précisions qu’ils ont apportées à la commission des Finances.

——fpfp——