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Commission des Finances, de l’économie générale et du Plan

Mercredi 18 juin 2008

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 95

Présidence M. Didier Migaud Président

– Examen, pour avis, du projet de loi relatif aux contrats de partenariat (n° 779) (Mme Marie-Hélène des Esgaulx, Rapporteure pour avis) 2

– Examen du rapport de la mission d’information tendant à une analyse comparative des prélèvements fiscaux et sociaux sur les produits financiers (M. Yves Censi, Rapporteur) 8

La Commission a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Marie-Hélène des Esgaulx, Rapporteure pour avis, le projet de loi relatif aux contrats de partenariat (n° 779).

Le Président Didier Migaud a rappelé que la commission des lois a été saisie au fond mais que la Rapporteure est très informée du sujet en sa qualité de présidente du groupe d’études sur les partenariats public/privé. Il a rappelé la décision du Conseil constitutionnel qui, en 2003, a considéré que les contrats de partenariat dérogeaient au droit commun de la commande publique et que leur création devait être limitée à des situations particulières répondant à des critères précis.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx, Rapporteure pour avis, a considéré que les partenariats public privé (PPP) constituaient une réponse aux besoins d’investissement public, de nature à constituer un levier de croissance, et permettant d’échapper à un certain formalisme. Elle a rappelé la décision du Conseil constitutionnel du 26 juin 2003 et la définition des contrats de partenariat comme des contrats administratifs pouvant être passés par l’État, les collectivités territoriales, et leurs établissements publics. Elle a considéré que leur démarrage était lent avec 27 contrats signés dont 20 pour les collectivités territoriales.

Le développement des PPP est freiné par l’absence de neutralité fiscale, aussi bien en matière de taxes locales que pour la TVA. Certaines incertitudes sont illustrées par le jugement récent, du 29 avril 2008, rendu par le Tribunal administratif d’Orléans. Or, les PPP permettent un meilleur respect des délais et des coûts, prennent en compte la maintenance dans le coût global des investissements et constituent un premier pas vers une commande publique durable.

Le projet de loi consacre un équilibre satisfaisant entre les impératifs d’efficacité économique et de transparence de l’action administrative. Il élargit les conditions d’ouverture du contrat de partenariat dans le respect de la décision du Conseil constitutionnel. Deux nouveaux cas d’ouverture sont créés : lorsque le rapport d’évaluation préalable met en lumière un bilan avantages-inconvénients favorable et lorsque le projet répond aux nécessités de certains secteurs de l’action publique réputés urgents jusqu’au 31 décembre 2012 (enseignement supérieur, implantations de défense, infrastructures de transport).

Le Sénat a amélioré significativement le projet de loi, notamment en matière de neutralité fiscale. Il est important d’approfondir et préciser certains points : mettre fin aux incertitudes sur le critère de l’urgence, recenser les procédures de partenariat public privé, inscrire la dette correspondant au contrat dans les engagements de la collectivité territoriale, prévoir la linéarité des loyers, organiser un débat sur le rapport annuel remis à la collectivité territoriale par le titulaire du contrat.

L’obligation d’évaluation préalable devrait être étendue à toutes les formes de contrats de partenariat et la procédure négociée introduite à l’article 4 du projet de loi faire l’objet d’aménagements de seuils pour les entités de réseaux, et notamment Réseau ferré de France. La Rapporteure pour avis a déploré qu’un amendement prévoyant l’extension des PPP aux organismes de sécurité sociale ait été déclaré irrecevable par l’application de l’article 40 de la Constitution.

Par ailleurs, il serait souhaitable d’accorder une aide aux collectivités territoriales et à leurs groupements lorsque la population est inférieure à 50 000 habitants. Il est également intéressant de faire progresser la réflexion sur une standardisation des contrats pour les PPP de petits montants. La méthodologie d’évaluation doit faire l’objet d’une définition uniforme qui pourrait être prévue par la mission d’appui à la réalisation de contrats de partenariat (MAPPP).

La Rapporteure pour avis a ajouté qu’elle souhaitait rétablir le caractère facultatif de l’assurance dommages ouvrage supprimé par le Sénat afin d’éviter un coût supplémentaire, prévoir l’attribution d’une prime aux candidats, rétablir le critère d’« offre économiquement la plus avantageuse » pour l’attribution du marché, préciser la définition du coût global en tant que critère de choix, et améliorer le dispositif de cession de créances, notamment pour les contrats inférieurs à 2 millions d’euros du secteur énergétique.

En conclusion, la Rapporteure pour avis a considéré qu’il est impératif d’engager une réflexion à plus long terme sur une refonte globale de la commande publique, de s’engager vers une généralisation de l’évaluation préalable et de s’orienter vers la constitution d’un véritable code de la commande publique. Les contrats de partenariat constituent potentiellement un facteur de progrès et cette potentialité doit se réaliser. Actuellement, les règles de la comptabilité publique ne freinent pas la dépense et ne s’intéressent pas aux coûts de fonctionnement. Les mentalités doivent évoluer et les partenariats public privé contribuent à cette évolution car ils portent sur la totalité de l’investissement et de son exploitation. Les PPP sont un moteur de la commande publique durable même s’ils ne pourraient constituer qu’une faible part de l’investissement public total, comme en Angleterre.

M. François Goulard a estimé que la saisine pour avis de la commission des Finances sur ce texte était essentielle, étant donné ses enjeux économiques et financiers. Les contrats de partenariats rencontrent des oppositions, notamment au sein de certaines hautes juridictions ainsi qu’à Bercy où certains considèrent que la France a déjà suffisamment d’équipements publics. Pourtant, certains investissements collectifs sont nécessaires et peuvent être un facteur de croissance. Mais le cadre juridique de l’investissement public est obsolète.

Les contrats de partenariat présentent l’avantage de confier à une seule entreprise la conception, la réalisation et la maintenance d’un équipement, ce qui favorise leur efficacité économique. C’est ainsi que, grâce à la législation étrangère applicable à un projet international, l’on a pu faire 25 % d’économie sur la liaison ferroviaire Perpignan-Figueras.

Par ailleurs, il ne faut pas être inhibé par la décision du Conseil constitutionnel du 26 juin 2003, qui apporte une réserve interprétative à la loi d’habilitation. La jurisprudence peut évoluer.

M. François Goulard a souhaité que les investissements soient éligibles au fond de compensation de la TVA (FCTVA). À la différence de la Rapporteure pour avis, il a estimé que la linéarité des loyers ne s’impose pas. Par exemple, dans le domaine des transports, l’utilité d’un équipement peut augmenter avec le temps ; il faut pouvoir augmenter les loyers en conséquence.

Il n’est pas souhaitable d’inscrire le montant total de l’engagement public sur un contrat de partenariat en hors-bilan. S’agissant des cessions de créances, il n’y a aucune raison de les restreindre, elles sont en effet vitales pour les PME. Enfin, le texte est trop restrictif s’agissant de l’évaluation par des organismes agréés, ce qui risque de freiner le développement des contrats de partenariat.

M. Gérard Bapt a exprimé une inquiétude face à la fuite en avant que constitue l’élargissement des PPP. Le Conseil constitutionnel a souligné « qu’aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle n’impose de confier à des personnes distincte la conception, la réalisation, la transformation, l’exploitation et le financement d’équipements publics, ou la gestion et le financement de services ». Néanmoins, il a précisé que « la généralisation de telles dérogations au droit commun de la commande publique ou de la domanialité publique serait susceptible de priver de garanties légales les exigences constitutionnelles inhérentes à l’égalité devant la commande publique, à la protection des propriétés publiques et au bon usage des deniers publics. ». Par conséquent, le Conseil constitutionnel a décidé que « les ordonnances prises devront réserver de semblables dérogations à des situations répondant à des motifs d’intérêt général tels que l’urgence ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d’un équipement. »

La Cour des comptes a exprimé ses réserves quant à ces contrats qui permettent de reporter des engagements financiers sur les générations futures. De surcroît, les collectivités territoriales n’ont pas toujours les moyens d’évaluer le coût de certaines opérations.

Par ailleurs, les petites entreprises risquent d’être exclues de ce type d’opérations. Le syndicat national des entreprises de second œuvre a, à ce sujet, manifesté sa vive préoccupation. Enfin, ces contrats présentent des risques d’entente et de corruption. Au Royaume-Uni, le Trésor considère que les opérations inférieures à 50 millions d’euros ne présentent pas un bilan coûts/avantages satisfaisant.

M. Dominique Baert a rappelé que la Cour des comptes a montré que le recours aux PPP n’était pas moins coûteux que d’autres types de contrats publics. Certains contrats peuvent avoir des clauses financières inflationnistes. En tout état de cause, les agences de notation intégreront les engagements sur des PPP dans la dette des collectivités.

Il a souhaité savoir la raison de la fixation du plafond de cessions de créances à 70 %  et connaître le sort des contrats actuellement en cours de négociation qui prévoiraient un taux de cession de créances supérieur à ce pourcentage, compte tenu du calendrier d’adoption et d’entrée en vigueur de la loi.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx, Rapporteure pour avis, a affirmé que les PPP permettraient de gagner au moins 0,6 point de PIB. Ils améliorent l’efficacité économique des projets, dans la mesure où l’entreprise conçoit et réalise mieux un équipement si elle sait qu’elle en assurera l’entretien.

En réponse à M. François Goulard, elle a estimé que la décision du Conseil constitutionnel est très importante et qu’il n’est pas question d’en méconnaître la portée.

Le Sénat a voté un amendement qui rend les baux emphytéotiques administratifs (BEA) également éligibles au FCTVA au même titre que les contrats de partenariat. Or, cette catégorie de PPP étant plus facile à mettre en œuvre que celle des contrats de partenariat, les BEA risquent d’opérer un effet d’éviction sur ces derniers.

La linéarité des loyers ne doit pas constituer une règle impérative, mais il faut fixer des limites à l’évolution possible des charges afin d’éviter des reports trop importants.

La Rapporteure pour avis a souligné qu’elle était attachée à l’inscription au bilan de la collectivité des engagements financiers souscrits dans le cadre d’un PPP.

Il faut fixer une limite aux cessions de créances dans la mesure où il s’agit d’un transfert de risques qui allège la responsabilité du co-contractant. On peut envisager des cas de cessions de 100 % de la créance, dans le cadre de petits contrats.

S’agissant des remarques soulevées par M. Gérard Bapt, il faut indiquer que le PPP ne conduit pas à un contournement des procédures encadrant le code des marchés publics. Il permet au contraire d’atteindre une véritable efficacité économique : alors que les délais sont très difficiles à faire respecter s’agissant d’un marché public ; avec la mise en œuvre des PPP, le paiement du contractant n’a lieu qu’à partir du moment où le service est effectué.

Il semble tout aussi difficile d’affirmer que c’est un procédé coûteux. Par exemple, la construction d’une piscine, à l’heure actuelle, est inscrite au budget d’investissement, le recours à l’emprunt permettant d’équilibrer l’opération. Un PPP au contraire conduira à intégrer dans le financement prévu toute la conception et la gestion de l’infrastructure sur de nombreuses années, ce qui lui donne en effet l’apparence d’être plus coûteux. Mais cette simple apparence tient aux règles de la comptabilité publique qui distingue la section d’investissement de la section de fonctionnement. Il y aurait d’ailleurs intérêt à revoir ces règles.

Le risque d’exclusion des PME des PPP ne semble pas réaliste et ce serait d’ailleurs une erreur de prévoir un seuil supérieur à certaines limites pour le recours à un PPP. Ces partenariats ne sont pas seulement utilisés dans le secteur du BTP, ils s’avèrent également être une réelle opportunité par exemple dans les domaines de l’éclairage public ou de l’imagerie médicale.

Pour répondre aux interrogations de M. Dominique Baert, qui a évoqué un risque juridique, il faut plutôt convenir que le projet de loi apporte une véritable clarification et permet une meilleure neutralité fiscale. Par exemple, les subventions rétrocédées aux co-contractants sont assujetties à la TVA et conduisent à une perte de ce fait, parce qu’elles sont considérées comme une avance de loyer. La neutralité fiscale n’est pas assurée, et la réforme proposée permet bien d’améliorer cette neutralité fiscale.

Par ailleurs, le Rapporteur de la commission des Lois, M. Claude Goasguen, a fait adopter un amendement qui répond à l’autre préoccupation dont il a été fait part : en effet, il propose de limiter la rétroactivité aux dispositions fiscales, les autres dispositions ne s’appliquant pour leur part qu’aux contrats dont l’avis d’appel public à la concurrence est publié après publication de la loi.

Le Président Didier Migaud a ensuite rappelé que sa décision d’irrecevabilité sur l’extension des PPP aux organismes de sécurité sociale s’expliquait par l’application d’une jurisprudence constante. L’objectif du texte étant d’accroître la commande publique, il implique un engagement de crédits. Dans ces conditions, l’irrecevabilité qui a été opposée d’une manière générale à l’aggravation des charges publiques à un amendement de la Rapporteure pour avis ne saurait constituer une surprise.

Chapitre Ier

Dispositions modifiant l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004
sur les contrats de partenariat

La Commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 1er sans modification.

Article 2 (art. 2 de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004) : Extension du recours aux contrats de partenariat :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis visant à encadrer l’élaboration de l’évaluation par l’emploi d’une méthodologie commune aux différentes catégories de personnes contractantes, afin de favoriser la qualité et la sécurité juridique de l’évaluation préalable, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 2 ainsi modifié.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 2 bis, 3, 4, 5 et 6 sans modification.

Article 7 (art. 8 de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004) : Critères d’attribution d’un contrat de partenariat :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis, destiné à préciser la notion de coût global de l’offre, qui doit inclure non seulement la part « investissement », mais également la part « maintenance » du projet, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 7 ainsi modifié.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 8, 8 bis, 9, 10, 10 bis, 11, et 12 sans modification.

Article 13 (art. 25 de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juillet 2004) : Contrats de partenariat conclus par des groupements d’intérêt public, des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis visant à supprimer la condition de seuil pour le recours à la procédure négociée des entités adjudicatrices non soumises au code des marchés publics, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 13 ainsi modifié.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption de l’article 14 sans modification.

Chapitre II

Dispositions modifiant le code général des collectivités territoriales

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption de l’article 15 sans modification.

Article 16 (art. L. 1414-2 du code général des collectivités territoriales) : Extension du recours aux contrats de partenariat :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis, symétrique de celui adopté à l’article 2 pour les collectivités territoriales, et visant à unifier la méthodologie de l’évaluation préalable, quelle que soit la personne publique contractante, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 16 ainsi modifié.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 17, 18, 19, 20, et 21, sans modification.

Article 22 (art. L. 1414-9 du code général des collectivités territoriales) : Conditions d’attribution d’un contrat de partenariat :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis, symétrique de l’amendement adopté à l’article 7, et visant à préciser la notion de coût global de l’offre, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 22 ainsi modifié.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 22 bis, 22 ter, 23, 24 et 25 sans modification.

Chapitre III

Dispositions diverses

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 26, 27, 28, 28 bis, 28 ter, 28 quater, 28 quinquies, 29 et 30, sans modification.

Article 31 (art. L. 242-1 du code des assurances) : Dispense d’assurance pour les personnes morales assurant la maîtrise d’ouvrage d’un contrat de partenariat :

La Commission a ensuite examiné un amendement de la Rapporteure pour avis, visant à rétablir une disposition initiale du projet de loi, supprimée par le Sénat et qui rend facultative la souscription d’une assurance dommages ouvrage.

La Rapporteure pour avis a indiqué qu’il s’agissait en effet d’autoriser les titulaires de PPP à être dispensé d’assurance dommages ouvrage, au même titre que les personnes publiques, car une obligation d’assurance reviendrait à enchérir sensiblement les coûts.

M. Michel Diefenbacher s’est interrogé sur les raisons qui avaient poussé les sénateurs à revenir à l’obligation de souscription d’une assurance dommages ouvrage en supprimant l’article 31.

La Rapporteure pour avis a indiqué que le Sénat avait rétabli l’obligation d’assurance, car il a craint que cette exception à l’obligation rende plus difficile la réparation d’éventuels dommages, dans la mesure où l’assurance s’applique « en dehors de toute recherche de responsabilités ». Elle a également considéré que les co-contractants privés qui souhaiteraient souscrire une assurance facultative dans le cadre d’un contrat de partenariat pourraient rencontrer des difficultés à trouver une société les assurant dans des conditions acceptables. Enfin, la possibilité de ne pas souscrire une assurance dommages ouvrage risquerait de créer un déséquilibre économique de la branche construction, en portant atteinte à la mutualisation des risques. Elle a déclaré être en désaccord avec ces préventions.

La Commission a adopté cet amendement et a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 31 ainsi rétabli.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption des articles 31 bis, 31 ter et 31 quater sans modification.

Après l’article 31 quater :

La Commission a adopté un amendement de la Rapporteure pour avis visant à créer une obligation d’information du ministre chargé de l’économie en cas de conclusion d’un contrat de partenariat, afin d’obtenir un recensement fiable des contrats, dans le strict respect du principe de confidentialité.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l’adoption de l’article 32 sans modification.

Elle a émis un avis favorable à l’adoption de l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

* *

La Commission a ensuite examiné le rapport de la mission d’information de M. Yves Censi, rapporteur, tendant à une analyse comparative des prélèvements fiscaux et sociaux sur les produits financiers.

Le Président Didier Migaud a fait part d’un entretien qu’il a eu avec M. Gilles Carrez et M. Yves Censi à propos d’un document dont ils ont été destinataires. Compte tenu de sa présentation, il a mis en garde contre les risques de confusion. En effet, l’utilisation du logo de l’Assemblée nationale pourrait faire penser qu’il s’agit d’un document de l’Assemblée nationale alors même que la commission des Finances n’a pas encore donné son autorisation pour la publication du rapport. Il a rappelé que si rien n’interdit à un député de valoriser son travail, il ne faut pas qu’il y ait de malentendu sur la nature même de ce travail.

M. Yves Censi, Rapporteur, a remercié le Président pour sa franchise et cette précision sur les conditions d’utilisation du logo de l’Assemblée nationale. Même si le rôle du Président est de fixer la ligne jaune à ne pas dépasser, il lui fait remarquer que tous les députés utilisent le logo dans leur documentation, qu’il l’a fait dans cet esprit et que de toute façon ce document n’étant pas destiné à être distribué en plusieurs milliers d’exemplaires, ni à faire l’objet d’une couverture médiatique importante, les conséquences devraient être limitées.

Le Président Didier Migaud a souligné que le document a été réalisé avec la collaboration d’un professeur, qu’il fait le lien avec la mission d’information de la Commission et qu’il comporte un prix. Il peut donc être interprété comme étant un document de l’Assemblée nationale.

M. Yves Censi, Rapporteur, a précisé que le document a été édité par lui-même et que la mention du prix est une obligation légale.

En venant à la présentation de son rapport, il a rappelé que son objectif a été de construire une grille d’analyse des produits financiers, conçue comme un outil d’aide à la décision. Il s’agit d’une approche inhabituelle qui n’a pas pour objet de faire un constat et des propositions, mais d’analyser directement le processus de décision pour démontrer la nécessité d’avoir des études d’impact lorsque le législateur agit sur les produits financiers. Ces derniers représentent un volume très important : plus de 3 000 milliards d’euros et pourtant les décisions sont prises sans que soient connues leurs conséquences ni verticales ni horizontales. Il ne s’agit pas ici de construire un modèle économétrique en matière de transferts de capitaux mais de donner au législateur les moyens d’anticiper l’impact des mesures envisagées et en particulier les éventuels mouvements de capitaux qu’elles entraîneraient à partir d’un outil d’aide à la décision simple et facile à mettre en œuvre. Dans le cadre ainsi délimité, les travaux, qui se sont déroulés de janvier à avril 2008 ont été menés à partir de trois approches complémentaires : une analyse sur les dix dernières années des mouvements de capitaux, une série d’auditions dont la finalité a été de cerner la perception des acteurs (les épargnants, les intermédiaires financiers et les représentants de l’administration) sur les produits, la législation et l’impact de cette dernière sur l’affectation de la ressource, la réalisation et l’étude d’un questionnaire propre à chaque famille des acteurs précités, puis étendu à un échantillon élargi ; la création enfin d’une grille d’analyse identifiant les caractéristiques des produits à l’intérieur de catégories, a priori substituables entre eux. Cette grille doit permettre une bonne visualisation des mouvements de capitaux possibles quand on intervient sur les produits financiers qui se classent en trois grandes catégories : les liquidités, les produits assuranciels et les titres. Les variables dominantes dans la perception du marché et des produits ont été déterminés en deux étapes : une phase de rencontres et d’auditions pour cerner la perception des acteurs sur les produits, la législation et l’impact de cette dernière sur l’affectation de la ressource ; une phase complémentaire de traitements réalisés à partir de questionnaires pour mesurer la perception par les intervenants, des caractéristiques des produits financiers, faire ressortir les variables déterminantes dans le choix des différents produits, recenser les problèmes soulevés par les différentes parties prenantes, analyser leur degré d’implication dans la création ou la modification d’un produit et enfin faire ressortir les perspectives d’évolution des produits. Les comptes rendus des auditions et les résultats du traitement des questionnaires sont analysés de façon à restituer les représentations des auditionnés et non l’avis du rapporteur. Les auditionnés ont été agréablement surpris par la démarche entreprise par cette mission. Ils ont tous fait ressortir la nécessité d’une stratégie claire des pouvoirs publics pour financer par l’épargne l’innovation, les retraites, les logements et même la dépendance. Les variables ayant une influence sur le marché sont, pour les auditionnés, les suivantes : en premier lieu la fiscalité et son instabilité. Plus de 85 % des personnes consultées perçoivent une forte instabilité fiscale. Il ressort des remarques recueillies dans le questionnaire que certains produits sont perçus comme ayant une fiscalisation adaptée à l’objectif recherché par les pouvoirs publics (c’est le cas de FCPI et des FIP) et que paradoxalement, la fiscalité de l’épargne ne favorise pas les produits dont la sortie se fait sous forme de rente viagère (PERCO). Par ailleurs, du fait de la fiscalité, les épargnants ayant une forte aversion au risque sont incités à surpondérer leurs liquidités défiscalisées. La seconde variable est la complexité de la législation et son incohérence : dans le cadre des auditions, l’expression qui revient systématiquement est le manque de lisibilité. L’empilage actuel des lois fiscales empêche toute vision claire. Le constat est fait qu’il manquerait une véritable loi structurante de l’épargne.

Par ailleurs, la directive MIF est perçue comme complexe par certains intermédiaires et par les épargnants interrogés qui la jugent majoritairement inefficace. Ces résultats sont sans doute à relativiser compte tenu du manque de recul des épargnants sur la mise en application de cette directive qui est très récente (fin 2007). En troisième lieu, un constat faisant l’unanimité des auditionnés est le manque de culture financière de la population française. Le niveau de formation est jugé faible et même lorsqu’un effort de formation est perçu, par les intermédiaires notamment, il est immédiatement annihilé par le développement de la sophistication des produits. En quatrième lieu, les critères de sélection des intervenants. L’objectif était de faire ressortir les critères de sélection permettant d’analyser les priorités des épargnants et des intermédiaires. La détermination de ces variables a été réalisée à partir de ces questionnaires. Dans la deuxième étape a été testée la notion de perception de risque. Pour 78 % des interviewés, la sécurité apparaît comme la variable prioritaire d’un placement financier. La sécurité se définit par la notion de garantie du capital, viennent ensuite les notions de rendement, de liquidité, puis de fiscalité.

Par ailleurs, aux questions fermées consistant à faire classer par ordre d’importance huit variables couramment utilisées dans le cadre de la définition des valeurs mobilières, les résultats obtenus sont ici conformes à ceux que l’on attend dans le cadre de la gestion de portefeuille : la relation rendement/risque est citée majoritairement, suivie de la liquidité et de la fiscalité.

A également été testée la question de la diversification temporelle. À la question : « À votre avis, le risque supporté par l’actionnaire est-il plus faible lorsque l’horizon d’investissement s’allonge », les auditionnés ont répondu à 92 % par l’affirmative percevant ainsi cette notion de diversification temporelle.

En cinquième lieu, la complexité et l’inadéquation de certains produits avec leur marché : pour les auditionnés, le marché des produits financiers est un marché d’offre et non de demande, ce qui est paradoxal. De ce fait, l’excès d’information rend l’offre sur les produits complexe et incompréhensible pour les épargnants. À la question : « Classez par ordre d’importance, les quatre freins suivants, les produits sont trop risqués, trop complexes, trop ciblés ou inadaptés », les résultats obtenus mettent l’accent, sans ambiguïté, sur la complexité croissante des produits.

Par ailleurs, le désintérêt pour les produits de retraite résulterait de l’obligation faite d’une sortie en rente, difficile à anticiper sur du très long terme (PERP et PERCO).

En sixième lieu, la difficulté de chiffrage des mesures : selon les représentants de l’administration auditionnés, ce chiffrage est difficile à réaliser, cette difficulté étant essentiellement liée, selon eux, à la collecte de données et les « hypothèses sont prises assez aléatoirement ». Selon le gouvernement, on peut appréhender les mouvements (aspects qualitatifs) mais il est très difficile d'apprécier l'ampleur de ceux-ci et les hypothèses de substitution étudiées ont un caractère « massif ». Le Rapporteur a souligné qu’il avait souhaité obtenir auprès du ministère chargé de l’économie le rendement fiscal et social des produits financiers au niveau global. La réponse n’est pas parvenue à ce jour, la raison invoquée étant la non-consolidation des données.

À ce sujet, l'ampleur des mouvements dépend aussi des comportements des distributeurs et commerciaux. On a pu constater que si les mesures sont approchées en termes de coût, l’aspect positif ou négatif économique (y compris la recette fiscale) n’est pas du tout pris en compte (voir à ce sujet la présentation de la méthode d’étude d’impact employée par la direction de la législation fiscale dans le rapport).

En septième lieu, la concertation préalable aux mesures : selon la direction de la législation fiscale, l’épargnant n’est jamais consulté par l’administration car il manque de représentation structurée. Trois questions ont été posées concernant les relations avec l’administration fiscale, portant sur son formalisme et sur son caractère systématique ou occasionnel. À la question : « La concertation en amont de la loi fiscale est-elle : peu formalisée à très formalisée », les deux tiers des réponses considèrent qu’elle n’est pas assez formalisée et pas assez systématique.

En huitième lieu, la cohérence des décisions des intervenants : l’analyse des auditions et des questionnaires a révélé, à plusieurs reprises, des incohérences sur le processus de décision des intervenants sur le marché. Concernant les retraites, les auditions et les questionnaires ont conforté les résultats de plusieurs enquêtes, en faisant ressortir que l’épargnant français pense que c’est à l’État (qui est là pour protéger) et aux entreprises de prendre en charge la gestion de ces dernières. Les auditionnés perçoivent le marché de la retraite comme un marché collectif et non individuel.

Enfin, en dernier lieu, les coûts d’intermédiation : pour les épargnants ou leurs représentants, les coûts d’intermédiation sont importants et devraient augmenter dans le temps. Pour les intermédiaires, les coûts d’intermédiation sont très faibles en France notamment par rapport aux autres pays européens. Ils font ressortir une évolution dans le temps de la répartition entre les commissions et les marges : dans le passé, la rémunération était liée à la marge tandis qu’aujourd’hui l’essentiel des coûts réside dans la commission. De nombreuses études ont fait apparaître que les frais de gestion appliqués en France sont dans la moyenne mondiale.

L’objectif de ces analyses de questionnaires est d’aboutir à la création d’une grille d’aide à la décision permettant la visualisation des effets que pourrait avoir une modification de la législation sur le mouvement de capitaux. Essentiellement qualitative, bien que s’appuyant sur des données quantitatives, elle se fonde sur les variables perçues comme essentielles par les investisseurs et les intermédiaires. Une telle grille aurait été bien utile lors de la discussion du texte TEPA, car elle aurait permis la visualisation des modifications créées par l’instauration des allégements d’ISF via le financement des PME. Le même cas s’est présenté avec le vote de la suppression de l’impôt de bourse lors de l’examen du projet de loi de finances 2008. Cette dernière a en effet été gagée par le relèvement du taux de prélèvement forfaitaire libératoire de 16 à 18 % sans estimation exacte des conséquences engendrées sur les mouvements de capitaux.

Pour parvenir à l’élaboration de cette grille, les produits ont d’abord été classés par catégorie, classement important du fait même qu’une modification de la législation peut avoir pour effet de muter un produit d’une catégorie vers l’autre.

En second lieu, chaque produit des différentes catégories a fait l’objet d’une fiche de lecture. Chaque fiche répertorie les caractéristiques propres du produit, son volume, les produits que l’on peut lui substituer et éventuellement les anomalies qui y sont liées.

Cette phase permet de classer chaque produit par rapport à l’importance des variables présentées précédemment ; il a été fait une nuance entre ce que l’on a appelé la grille d’analyse de représentation et la grille d’analyse de connaissance, différence venant des variables spontanément citées par les investisseurs dans le premier cas et du classement des variables proposées dans le deuxième. Puis, pour chaque variable a été affecté un niveau d’importance (de 5, très favorable, à 1, très pénalisante). Puis, on a établi pour chaque produit une fiche de lecture et attribué le niveau d’importance des variables.

Enfin, dans une troisième approche, on a affecté chaque produit à sa catégorie en faisant ressortir au travers d’une grille d’analyse le classement des variables de chaque produit.

Pour homologuer cette grille d’analyse un test de validation a été réalisé à partir du cas du PEL. À compter du 1er janvier 2006, les intérêts des PEL de plus de 12 ans ont été fiscalisés. Ce test a permis de démontrer que si l’on rapproche la grille du PEL avant modification de la législation de celles, soit des produits d’épargne liquide non risquée mais avec frottement fiscal, soit des produits d’épargne non risqués sans frottement fiscal, on s’aperçoit qu’un investisseur rationnel dont la seule finalité est le placement devrait investir, soit sur l’assurance-vie en euros, appartenant à la même grille avec des variables au classement identiques, soit sur des produits plus liquides et mieux rémunérés, comme le livret A et le LDD. En 2005, le montant de l’encours des PEL était de 224 milliards d’euros, le mouvement de sortie de capitaux peut être estimé au montant de l’encours corrigé d’un pourcentage de maintien. Si on estime à 40 % ce taux de maintien, on peut raisonnablement évaluer entre 130 et 145 milliards d’euros les sorties possibles du PEL

L’objectif de la mission était de créer une grille d’analyse. Cet objectif a été rempli avec les moyens de la mission.

Le Président Didier Migaud a indiqué qu’à la demande du rapporteur, le titre du rapport est modifié et devient « rapport d’information sur l’impact des mesures législatives portant sur les produits financiers ».

La Commission a autorisé la publication du rapport de la mission d’information.

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