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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 19 mai 2010

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 70

Présidence de M. Jérôme Cahuzac, Président

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Jacques Attali sur la reprise des travaux de la commission pour la libération de la croissance française

–  Présences en réunion

La Commission entend M. Jacques Attali sur la reprise des travaux de la commission pour la libération de la croissance française

M. le président Jérôme Cahuzac. Je suis très heureux d’accueillir M. Jacques Attali, ainsi que les personnes qui l’accompagnent, pour faire le point sur les suites données à son premier rapport sur la libération de la croissance, qui contenait 321 décisions et objectifs. Certaines de ces propositions ont déjà été appliquées : quelle est, monsieur le président, votre évaluation de leur mise en œuvre ?

Votre commission a été réactivée, à la demande du chef de l’État. Cependant, la crise financière intervenue depuis votre premier rapport a considérablement fragilisé l’Europe, ses États et ses institutions. Vos premières propositions, conçues dans un contexte plus propice, sont-elles bien adaptées à des réalités économiques plus cruelles ? Celles-ci ne sont-elles pas de nature à modifier les objectifs, même si le Président de la République affirme vouloir approfondir les réformes engagées ? En bref, dans quel état d’esprit la commission reprend-elle ses travaux alors que l’Union européenne, et particulièrement la zone euro, est dans l’œil du cyclone, et quelles sont les pistes que vous explorez ?

M. Jacques Attali. Je suis très honoré d’être parmi vous aujourd’hui. Les personnes qui m’accompagnent sont les deux rapporteurs généraux, MM. Quinet et Heilbronn, trois membres de la commission, Mme Lemoine et MM. Labaye et Combes, et plusieurs des rapporteurs qui participent à nos travaux depuis deux ans. Je vous remercie infiniment d’avoir organisé cette audition : il est très important pour nous de pouvoir dialoguer avec vous, qui êtes responsables de la conduite des affaires de la nation. Peut-être nos réflexions pourront-elles vous être utiles.

J’évoquerai d’abord le contexte dans lequel nous reprenons nos travaux, puis j’analyserai la mise en œuvre de nos propositions, travail pour lequel votre comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques nous a beaucoup aidés ; enfin, je tenterai un diagnostic de la situation économique aujourd’hui, pour déterminer si les réformes que nous avons proposées restent d’actualité et quelles nouvelles pistes nous pourrions emprunter.

Dans le cadre de notre nouveau mandat, je remettrai dans les prochains jours au Président de la République un pré-rapport contenant le bilan – forcément en demi-teinte – de cette mise en œuvre, une analyse de la situation actuelle et une étude des perspectives qui s’offriraient à la France en 2020, à politique inchangée – 2020 étant l’horizon qui nous semble raisonnable pour jouer pleinement notre rôle de conseil de l’exécutif et du législatif. Ce pré-rapport ouvrira également cinq débats qui nous semblent prioritaires et qui seront approfondis dans les deux mois qui viennent, leurs conclusions devant figurer dans le rapport définitif.

La situation actuelle est extrêmement grave et assez différente de celle qui prévalait lorsque a œuvré la première commission, même si j’avais estimé dès décembre 2008 que la crise qui s’annonçait serait plus grave que celle de 1929 – ce qui à l’époque n’avait pas été jugé crédible. Les perspectives qui s’offriraient à la France pour 2020 en l’absence de mesures nouvelles sont peu acceptables. Notre pays a certains problèmes communs avec ses partenaires européens – une productivité et une compétitivité très faibles, une société vieillissante – et d’autres qui lui sont spécifiques. Le premier de ceux-ci touche l’éducation, en particulier l’enseignement primaire dont l’étude PISA et le récent rapport de la Cour des comptes démontrent qu’il connaît une régression extrêmement inquiétante. Les perspectives en matière d’emploi ne sont pas merveilleuses non plus puisque nous avons « le pire des deux mondes » avec à la fois un marché de l’emploi rigide et un sentiment d’insécurité. Enfin, et c’est peut-être le plus inquiétant, toutes les études font apparaître un manque de confiance de nos concitoyens dans leur communauté de destin. Selon des sondages, que je livre pour ce qu’ils valent, 78 % des Français estiment que l’on n’est jamais assez prudent lorsqu’on a affaire aux autres, 81 % comptent avant tout sur eux-mêmes pour défendre leurs intérêts, 76 % n’ont pas confiance dans les partis politiques et 72 % dans les médias. Surtout, il existe une peur du déclassement, répandue en particulier dans la classe moyenne : 56 % des Français ont peur de devenir SDF et 73 % estiment que leurs enfants vivront moins bien qu’eux.

Depuis deux ans, notre situation s’est dégradée à plusieurs égards. L’équation démographique a continué à évoluer dans le mauvais sens, même si c’est plutôt dans une moindre mesure qu’ailleurs : nous comptons aujourd’hui un retraité pour 1,8 actif seulement, et nous en serons à 1,5 cotisant pour un retraité en 2020. La croissance potentielle – notion au demeurant assez floue –, qui était estimée à 2 % il y a deux ans, a été ramenée à 1 ou 1,5 %. Et la dette publique, qui atteint environ 83 % du PIB aujourd’hui, dépassera, sans mesures nouvelles, les 100 % en 2020. Cela dit, j’ai toujours pensé que ce ratio ne signifiait rien et je vous invite à en préférer d’autres, en particulier le ratio entre dette publique et recettes publiques, qui frise 600 % aujourd’hui, et le ratio entre service de la dette et recettes publiques, qui devient dangereux au-delà de 30 %, taux dont nous nous approchons comme la quasi-totalité des grands pays – au Japon, on en est, respectivement, à 800 % et à 50 % des recettes fiscales.

Pour ce qui est des premières propositions que nous avions formulées, je persiste et je signe sur l’ensemble. Leur mise en œuvre est même particulièrement urgente. Au bout de deux ans, aucune ne s’est avérée nuisible ou inutile. Parmi ces 316 propositions, dont 45 à peu près concernent directement votre Commission, 60 % ont été suivies d’effets, partiellement ou totalement, même si l’opinion publique a tendance à considérer que le rapport a été jeté aux oubliettes aussitôt après sa publication, en raison du mouvement des chauffeurs de taxi. Plus précisément, 23 % ont été totalement appliquées dans l’esprit du rapport et 37 % sont entrées en vigueur partiellement – je précise que nous ne prétendons pas être à l’origine de chacune : le rapport a aussi fait la synthèse de propositions antérieures. Votre comité d’évaluation et de contrôle, qui a procédé différemment, arrive à un bilan très comparable : d’après lui, 60 % des propositions ont fait l’objet d’une mesure législative ou réglementaire et vingt-cinq missions de réflexion ont été lancées.

Beaucoup de choses ont donc été faites, d’autres non. Je vais énumérer les unes et les autres, mais n’y voyez aucun jugement : la majorité politique est maîtresse de ses décisions.

Nos propositions ont été particulièrement suivies d’effets dans trois domaines : l’innovation et la compétitivité des secteurs d’avenir, la concurrence et le soutien aux PME-PMI ou aux TPE. Cela correspond à la première partie du rapport, qui en comportait trois, traitant successivement de la compétitivité, de la mobilité sociale et économique et de la gouvernance.

Beaucoup a été fait en matière d’enseignement supérieur et de recherche, qu’il s’agisse de son organisation et de son financement, de la création des pôles d’excellence, de la réforme du statut de chercheur, de la stratégie nationale de recherche ou encore de la modification du crédit impôt-recherche… Il en est de même pour les secteurs d’avenir : couverture numérique, quatrième licence, création d’un ministère en charge de l’économie numérique, dispositions en faveur des secteurs de pointe dans l’emprunt national – c’est un copier-coller du rapport –, écocités – treize ont été décidées, alors que nous n’en avions proposé que dix, reste à savoir si elles vont être financées –, fiscalité environnementale… Dans ce dernier domaine, l’écoprêt à taux zéro pour la rénovation thermique des logements a été repris mais pas deux mesures importantes : la contribution poids lourds et la taxe carbone. Ont également été prises en compte les propositions relatives aux nanotechnologies, au fonds spécial pour la biotechnologie, aux énergies d’avenir et au fonds stratégique d’investissement. Enfin, nous avions insisté, pour améliorer l’attractivité de la France, sur la mise en place d’infrastructures critiques et nos suggestions concernant les ports du Havre et de Marseille, le grand Paris et la région Normandie ainsi que le développement du tourisme ont été reprises.

Dans le domaine de la concurrence, la loi de modernisation de l’économie est très proche de certaines de nos propositions, notamment pour ce qui est de la création d’une Autorité de la concurrence ou de la négociabilité tarifaire. À ce propos, je ne peux manquer d’évoquer avec émotion le député Jean-Paul Charié, qui a énormément travaillé avec nous et nous a beaucoup aidés, acceptant parfois de changer d’avis, ce qui témoigne d’une forme de grandeur. Toutefois, le seuil des lois Royer-Raffarin a été maintenu à mille mètres carrés, ce qui nous paraît trop bas. Il n’y a pratiquement eu aucun progrès s’agissant de l’ouverture des professions réglementées – taxis, pharmaciens, huissiers, notaires, avoués. L’effet sur le petit commerce et les petites entreprises de la modification de l’urbanisme commercial n’a pas été compensé, ce à quoi nous tenions énormément. Enfin, l’action de groupe, que nous avions proposée dans une version extrêmement équilibrée, n’a toujours pas été autorisée. En revanche, le soutien aux TPE a été largement transcrit, ainsi que le statut d’auto-entrepreneur, le dispositif Nacre – Nouveau dispositif d'accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise –, la réduction des délais de paiement, qui ont été ramenés à onze jours en moyenne, la facilitation de l’accès des TPE au conseil et aux marchés boursiers ou encore la possibilité pour les acheteurs publics de réserver une partie de leurs marchés aux TPE innovantes. L’impact de ces mesures, qui viennent pourtant à peine d’être décidées, a déjà été estimé à 0,3 point de croissance mais cela ne veut pas dire grand-chose. En revanche, je suis persuadé qu’elles auront à long terme un impact tout à fait considérable sur la compétitivité de notre économie.

Dans le domaine de l’emploi, certaines propositions ont été reprises : modification des règles de représentativité syndicale, nouveau mode de rupture de contrat à l’amiable, RSA, soutien à l’emploi des seniors… Mais des mesures extrêmement importantes ne l’ont pas été : la flexisécurité à la française, que nous appelons le contrat d’évolution, c’est-à-dire la généralisation du contrat de transition professionnelle – c’est absolument fondamental pour modifier radicalement les conditions de l’emploi –, la réforme du financement de la protection sociale, celle du système de formation professionnelle, la gouvernance du dialogue social… Tout cela n’a même pas été sérieusement étudié par l’appareil public.

J’appelle votre attention sur l’importance d’un certain nombre de chantiers qui n’ont pas été lancés. Le premier concerne l’éducation. Rien de ce que nous avions proposé pour la petite enfance n’a été suivi d’effet – orientation vers les métiers de la petite enfance, pilotage des établissements, accompagnement individualisé des élèves, autonomie des établissements primaires… Le bilan est identique s’agissant de l’augmentation du montant des bourses, de l’évolution de la formation professionnelle, de la validation des acquis de l’expérience, de l’ouverture de cours du soir dans les universités, de la généralisation des formations en alternance, de la validation d’une année de stage dans le cursus universitaire ou de la création d’une université des métiers.

En matière de mobilité géographique, nous avions émis des propositions concernant l’aménagement urbain : relèvement des normes de densité, levée des freins réglementaires à la construction de logements, bourse Internet des logements, réduction des droits de mutation et des frais d’agence… Nous avions également avancé de nombreuses mesures en faveur de l’accueil des étrangers, en particulier des étrangers formés, la commission considérant unanimement que l’immigration est utile à la croissance française. Très peu de choses ont été faites dans ce sens.

Dans le secteur de la santé, qui pour nous est vecteur de croissance et non un frein, on a, comme nous l’avions suggéré, développé l’hospitalisation à domicile et mis en place des maisons de santé. Mais beaucoup d’autres propositions, très importantes, n’ont pas été suivies d’effets : elles concernaient par exemple le dossier médical personnalisé, l’externalisation de certains services périphériques à l’offre de soins ou le développement de l’offre d’accueil de clients étrangers. Et l’application de celles qui avaient trait à la dépendance a été pour une bonne part reportée après la réforme des retraites.

Mais c’est sur la réforme de la gouvernance publique que nous avons le moins été suivis. La revue générale des politiques publiques et la gestion du processus normatif ont le mérite d’exister, et le secteur parapublic a commencé d’évoluer avec les réformes des offices HLM et du 1 % logement ou avec celle des tribunaux et des chambres de commerce. Pour ce qui est de l’administration des systèmes de santé, les agences régionales de santé ont été mises en place. Mais rien n’a été fait pour donner à l’hôpital public la faculté de gérer son personnel sous convention collective ni pour réformer l’organisation et de la gouvernance des CHU. Quant à l’appareil d’État, nous nous étions prononcés pour l’externalisation de certaines fonctions régaliennes vers des agences qui resteraient publiques mais feraient gagner en efficacité, pour la simplification de l’organisation territoriale – la réforme des collectivités territoriales en cours est très loin de ce que nous avions proposé –, ou encore pour une meilleure maîtrise des dépenses de sécurité sociale et des collectivités locales et pour l’évaluation des performances des services publics locaux et des agences générales : toutes mesures particulièrement urgentes au moment où le déficit public est passé de 3 à 7 % du PIB, et la dette publique de 67 à plus de 80 %.

Enfin, d’autres mesures sont restées en suspens comme la modification de la fiscalité de l’épargne ou la réécriture dans la Constitution du principe de précaution, la rédaction actuelle, très complexe, constituant un frein à la prise de risque sans rien apporter à la protection écologique.

Ce bilan s’explique par les décisions politiques de l’exécutif et du Parlement, mais aussi par certains blocages administratifs et par une situation économique assez noire. En dépit de celle-ci, beaucoup de choses ont été faites, je le répète, même si l’effort a porté surtout sur les facteurs de compétitivité. Mais je veux surtout souligner que notre pays dispose d’un grand nombre d’atouts qui ne sont pas assez mis en valeur. Les secteurs d’excellence d’abord : la France est numéro un mondial, ou deuxième ou troisième, dans un très grand nombre de secteurs de pointe, ce qui est absolument stupéfiant pour un pays qui ne rassemble pas 1 % de la population mondiale. C’est particulièrement vrai dans les grands secteurs d’avenir que sont les infrastructures, les transports, les technologies de pointe ou la santé. Nous avons la meilleure démographie d’Europe. Notre système éducatif, s’il est extrêmement faible dans le primaire, reste ensuite un des meilleurs d’Europe et la part des diplômés de l’enseignement supérieur dans notre population active dépasse de loin celle de l’Allemagne, de l’Italie ou du Royaume-Uni. La création d’entreprises a été plus élevée que jamais en 2009. Nous restons le cinquième pays exportateur de marchandises et le quatrième de services et nous sommes – c’est un critère qui ne trompe pas – le troisième destinataire d’investissements directs étrangers. Nous sommes enfin, et ce n’est pas anecdotique, la première destination touristique mondiale.

Les réformes qui restent à faire sont très difficiles donc, mais réalisables. Il n’est qu’à voir le Canada, qui est passé entre 1994 et 1998 d’un déficit de 5 % à un excédent et a éliminé la dynamique de la dette, la Suède, qui a également obtenu un excédent, comme la Nouvelle-Zélande, après des réformes radicales, ou encore, plus récemment, l’Irlande. Le même résultat est à notre portée si l’on fait preuve du courage nécessaire. Mais il y faut trois chocs : un choc de vérité, un choc de justice et un choc de légitimité – et ce dès maintenant. C’est pourquoi nous voulons travailler avec vous en débattant de cinq sujets qui nous paraissent capitaux : la restauration des finances publiques ; la stimulation de l’innovation et de l’économie du savoir – je pense surtout à l’enseignement primaire et, plus généralement, à l’enseignement obligatoire – ; l’emploi – flexisécurité, maîtrise du coût du travail – ; l’équilibre entre les générations – un jeu à somme non nulle entre les retraites, la dépendance et l’insertion des jeunes – et la nécessité de renforcer l’euro et l’Union européenne, condition indispensable de la croissance française – sans stabilisation, tout discours sur cette croissance serait vain !

M. le président Jérôme Cahuzac. Puisque vous venez de mentionner la nécessité de restaurer les finances publiques, je dirai que la progression de la dette compromet en effet la croissance, ne serait-ce qu’en détournant des capitaux qui sinon s’investiraient dans l’économie concurrentielle. Mais réduire les dépenses publiques amène aussi à prendre des mesures de rigueur ou d’austérité – de quelque nom qu’on les baptise – qui compromettent la reprise de la croissance en faisant baisser la consommation des ménages. Comment sortir de cette contradiction, dans laquelle se débattent nombre de dirigeants européens aujourd’hui ?

M. Louis Giscard d’Estaing. Le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, créé après la réforme constitutionnelle de 2008, a souhaité procéder à une première évaluation du rapport de la commission Attali et nous a nommés, Jean Gaubert et moi, co-rapporteurs. Nous avons ainsi répertorié les suites législatives ou réglementaires qui y ont été données. Par ailleurs, les commissions permanentes mènent aussi des travaux d’évaluation des dispositifs législatifs, dont notamment le rapport sur la loi de modernisation de l’économie cosigné à titre posthume par Jean-Paul Charié. Nos résultats concordent avec ceux de la commission quant au pourcentage des propositions qui ont été appliquées. Certaines étaient d’ailleurs antérieures au rapport et des orientations avaient déjà été prises, ce qui nous permet aujourd’hui d’avoir une première idée de l’efficacité de ces traductions législatives.

Le contexte économique et la régulation mondiale ont connu des évolutions considérables depuis la publication de votre premier rapport. Cela vous amène-t-il à modifier vos propositions ? Envisagez-vous d’amender votre rapport ?

Certaines de vos préconisations portaient sur l’urbanisme commercial. Votre objectif était de relancer la croissance et d’augmenter la concurrence entre les enseignes de la grande distribution. Êtes-vous aujourd’hui convaincu que cette démarche était la bonne ? La loi de modernisation de l’économie a-t-elle produit les résultats que vous escomptiez ?

Enfin, toutes vos propositions concernant l’éducation et la recherche n’ont pas été suivies. Lesquelles doivent être remises en avant ?

M. Michel Bouvard. Merci au président Attali d’être parmi nous : c’est toujours un plaisir de l’entendre. Un certain nombre des propositions de la première commission étaient financées par des dépenses fiscales ou par des allégements de charges. Avant de s’engager dans une deuxième série de propositions, a-t-on évalué le coût de ces mesures, en dépenses budgétaires et en dépenses fiscales ? Et a-t-on chiffré le retour de recettes procuré par les suppressions de dépenses que vous aviez proposées ? Nous ne pouvons pas faire abstraction d’une situation qui nous oblige à réduire les dépenses fiscales !

M. Pierre-Alain Muet. On a le sentiment que les 316 propositions du rapport, du moins telles qu’elles ont été mises en œuvre, sont profondément décalées par rapport à la situation actuelle. Alors qu’on a besoin aujourd’hui de régulation, le Gouvernement n’en a retenu que ce qui allait dans le sens d’une plus grande libéralisation du marché – développement de la concurrence, autorisation du travail dominical, création d’un statut de l’auto-entrepreneur ou liberté d’installation –, en négligeant vos autres préconisations. Ainsi celles qui avaient trait à la réduction du déficit ou à la fiscalité environnementale n’ont pas eu de suites, pas plus que celles relatives à l’éducation, à la santé, voire à la révision générale des politiques publiques, qui ne doit pas se réduire, comme c’est le cas actuellement, au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Je pense également à vos propositions en matière d’emploi : d’une certaine façon, c’est la flexisécurité que vous préconisiez qui permet à l’Allemagne d’échapper, en dépit de la crise, à une augmentation de son chômage, alors qu’il explose dans notre pays.

L’ère de la dérégulation, qui a marqué près de trois décennies de mondialisation, est aujourd’hui derrière nous ; la situation actuelle de notre économie exige au contraire de réguler le système financier, comme l’Europe s’y efforce actuellement : au cœur de la tourmente, celle-ci s’est montrée capable de mettre en place les instruments d’intervention dont elle avait jusqu’ici été incapable d’assortir l’union monétaire. C’est donc peut-être un tout autre rapport qui s’imposerait aujourd’hui.

M. Jean-Claude Sandrier. Mon propos va dans le sens de ce que vient de dire M. Muet : vos propositions ne me semblent pas à la hauteur des enjeux actuels. Elles ne permettront sans doute pas d’atteindre les objectifs que vous avez vous-même fixés pour 2012 – quatre millions de pauvres en moins ; un taux de chômage ramené à 5 % et un taux d’endettement public de 55 %. On m’opposera la crise, mais celle-ci avait été prévue par certains économistes. Cela pose surtout la question de la fiabilité de ce type de prospective économique : il paraît complètement farfelu de se fier, dans ces conditions, à des projections sur dix ans, voire sur quarante ans, comme celles qui fondent notre débat autour des retraites.

Ce qui plombe l’économie, c’est ce que certains appellent la dictature des marchés financiers, dont on éprouve aujourd’hui les dégâts. Il s’agit donc de trouver les moyens de s’attaquer à la spéculation financière. Une revue générale des politiques publiques ne suffira pas à réduire la dette publique, le problème principal n’étant pas l’utilisation de l’argent public, mais celle de l’argent privé. C’est, je le répète, aux marchés financiers qu’il faut s’attaquer, comme l’économiste Patrick Artus le recommande, parce qu’ils ne font rien d’utile des liquidités dont ils se gavent jusqu’à l’overdose.

Vous avez parlé de courage : aujourd’hui, le courage serait de sortir d’une logique qui ne fonctionne plus, et plutôt que d’appeler à développer encore la concurrence, de reconnaître, avec Joseph Stiglitz, que celle-ci devient délirante.

M. Jacques Attali. La situation économique actuelle ne rend pas nos propositions caduques. Notre rapport fait état de la grande inquiétude qui était déjà la nôtre, notamment à l’égard des dangers de la spéculation financière. Nous avions également souligné la nécessité d’accélérer les réformes en cas d’intensification de la crise. J’avais alors exprimé de la façon la plus claire ma conviction que la crise allait s’aggraver et souligné dès cette date l’urgence de réduire la dette publique. Si ces mesures n’ont pas été prises, la responsabilité n’en revient pas à notre commission.

Il est vrai que la crise actuelle est une crise de l’absence de régulation globale : personne ne peut être favorable à un marché qui ne soit pas soumis à une règle de droit. Or la globalisation du marché ne s’est pas accompagnée d’une globalisation de la règle de droit et nous sommes aujourd’hui, à l’échelle mondiale, confrontés à un marché sans règles. L’exigence fondamentale est de créer les conditions d’existence d’une règle de droit véritablement globale, sans laquelle la globalisation elle-même ne saurait fonctionner, et même n’aurait pas de sens.

De ce point de vue, toutes les mesures prises, notamment par le G 20, depuis l’explosion qui a rendu la crise visible ne constituent qu’un embryon, certes nécessaire, de ce qu’il faudrait faire, d’autant qu’il s’agit surtout d’annonces et de mesures locales et partielles. Une règle de droit européenne, dans l’instauration de laquelle la France jouerait un rôle plus significatif, serait un minimum.

Cette absence d’une règle de droit n’infirme pas les conclusions de notre commission : le monde est emporté par une vague de croissance d’une ampleur sans précédent dans l’histoire humaine. Le problème, c’est que, depuis les années quatre-vingt, les pays de l’OCDE ne participent à la croissance mondiale que par la dette, soit privée, soit publique. C’est cette réalité, longtemps occultée, qui commence à se révéler aujourd’hui : la dette privée commençant à exploser, on l’a transférée sur la dette publique, certains, aux États-Unis, au Royaume-Uni ou ailleurs, transférant aujourd’hui cette dernière sur la planche à billets. Ces solutions ne règlent rien. La crise n’est pas derrière nous : on s’est contenté de se livrer à une opération globale de cavalerie. Pendant ce temps, les dettes continuent à augmenter, les alarmes qui se déclenchent de temps à autre révélant que tout va mal.

De ce point de vue, monsieur le président, votre question est essentielle : la réduction, évidemment nécessaire, de la dette, ne risque-t-elle pas de tuer la croissance ? Sur ce sujet, je répondrai en mon nom propre, car la réflexion de la commission n’est pas encore achevée sur ce point, et je demanderai à Mme Lemoine d’apporter son point de vue d’économiste.

Si tous les pays d’Europe mènent au même moment une politique de rigueur, nous allons droit au désastre et à la dépression collective. C’est pourquoi, comme nous devons tous remettre de l’ordre dans nos systèmes, il est fondamental de se doter d’une politique européenne de relance. Tout ce que l’Europe a fait jusqu’à présent est très loin de suffire, même si la gouvernance européenne a fait davantage de progrès en dix jours qu’en dix ans : nous n’avons fait que mener la bataille qui aurait dû être menée il y a six mois. Il faut aujourd’hui que nous nous dotions d’un véritable gouvernement européen, d’un vrai ministère des finances européen et de la capacité d’émettre des bons du Trésor européens. l’Europe bénéficie en effet d’une capacité d’emprunt lui permettant de mener, à travers des investissements publics européens, une politique de relance qu’on ne peut plus mener à l’échelle nationale.

Au niveau national, il est primordial de réduire l’extraordinaire confusion que recouvre le terme de « dette » : notre commission va y travailler, mais en la matière votre rôle est essentiel. Notre comptabilité publique est d’un archaïsme incroyable : elle ne permet pas de distinguer les dépenses de fonctionnement des dépenses d’investissement ; elle ne comptabilise pas les actifs et les passifs ; elle met sur le même plan les choux et les carottes. Certes, elle est l’œuvre d’un des plus grands ministres des finances de la République, M. Ramel, mais elle n’a pratiquement pas évolué depuis 1797.

Une réforme de la comptabilité publique n’aurait certes pas d’incidence immédiate. Je me permets pourtant d’insister sur l’importance de pouvoir distinguer la mauvaise dette de la bonne, celle qui sert aux dépenses d’investissement – et je ne classe pas sous ce chapitre les seules infrastructures, mais aussi les dépenses immatérielles : la dette qui finance les dépenses d’éducation nationale est à mes yeux de la bonne dette.

Si la situation économique ne remet pas en cause la pertinence de nos propositions, elle met en exergue la nécessité de prendre beaucoup d’autres mesures. J’ai souligné, en revanche, combien la mise en œuvre de ces propositions me semblait incomplète ; on m’a d’ailleurs assez reproché d’avoir dit que nos propositions formaient un tout, et que faire fonctionner l’« hémisphère droit » sans « l’hémisphère gauche » du rapport en faussait la pertinence !

Ainsi, nos préconisations en matière d’urbanisme commercial nous semblent avoir été mises en œuvre d’une façon incomplète : le seuil des 1 000 mètres carrés est trop bas et les mesures de protection que nous proposions, via, en particulier, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, n’ont pas été retenues. Il est en tout état de cause très difficile de dresser le bilan d’une réforme seulement quelques mois après son adoption : il faut lui laisser produire tous ses effets.

De même, beaucoup de propositions dans le domaine de la recherche et de l’enseignement supérieur n’ont pas été suivies d’effet, en matière de formation professionnelle intégrée au cursus universitaire et de validation des acquis professionnels notamment.

Je trouve d’autant plus injuste que vous nous reprochiez de financer nos propositions par de la dépense fiscale, que nous avons fait à celle-ci, en collaboration avec les plus hauts responsables de l’administration, la chasse la plus rigoureuse, précisément dans la perspective d’une baisse des dépenses publiques et d’une réduction du déficit : sur 316 propositions, je vous mets au défi d’en trouver plus de deux ou trois qui soient financées par des dépenses fiscales. En outre, nous avions proposé d’innombrables gisements d’économies qui n’ont pas été exploités : ainsi la mise en œuvre de programmes d’e-government, ou gouvernement informatique, aurait permis d’économiser quinze milliards d’euros.

La nécessité d’une régulation européenne, monsieur Muet, me paraît absolument fondamentale. Quant à notre RGPP, il suffit de la comparer à celle du Canada pour mesurer à quel point elle est en deçà des ambitions qu’on lui assignait.

Il est vrai, monsieur Sandrier, que les objectifs pour 2012 sont hors d’atteinte, mais vous avez bien fait de les rappeler pour montrer combien, non seulement la France, mais l’Europe entière, les États-Unis et le Japon sont en train de déraper, tels ces personnages de dessins animés qui continuent à courir au-delà du bord de la falaise, sans se rendre compte qu’ils courent au-dessus du vide, le vide en l’occurrence étant la dette ! Nous ne sommes pas, hélas, Tex Avery pour trouver une issue heureuse à une telle situation.

Mme Mathilde Lemoine, directrice des études économiques et de la stratégie marché d’HSBC France. Je voudrais simplement souligner la nécessité d’établir un diagnostic partagé sur deux points aujourd’hui sujets à débat.

Il faut d’abord déterminer l’impact de la crise sur l’économie et la croissance. La crise a provoqué une chute de l’investissement, qui entraîne à son tour un vieillissement du stock de capital, susceptible de diminuer le potentiel de croissance via une diminution de la productivité globale des facteurs. Or les perspectives de croissance, à court, voire à moyen terme ne font pas l’objet d’un diagnostic partagé. Il n’y a pas non plus de consensus quant à l’impact de la crise sur le marché de l’emploi et ses effets, pérennes ou non, en matière de chômage structurel. Les conséquences pour nos finances publiques varieront en fonction des réponses que l’on apportera à ces questions.

L’impact de la crise sur les dépenses publiques est tout aussi essentiel. Nous partons d’un niveau de dépenses publiques exceptionnel, dû en partie à la crise. Pour retrouver le niveau de recettes fiscales, il faudrait faire baisser ces dépenses de 25 % ! Il s’agit de savoir quelle part du déficit est liée à la crise et, à ce titre, devrait tendanciellement diminuer durant les prochaines années, et quel serait le niveau tendanciel des dépenses publiques sans modifications structurelles. De même, tant qu’on n’aura pas déterminé la part de la baisse des recettes fiscales attribuable à la crise et celle liée aux évolutions structurelles, on ne saura pas dans quelle proportion celles-ci rebondiront à partir de 2011-2012.

Cette absence de diagnostics partagés fausse les perspectives et rend aléatoires les solutions susceptibles d’être proposées pour stabiliser, au minimum, le ratio dette publique/PIB. C’est pourquoi je veux souligner, sans aborder les mesures qui feront l’objet des futures réflexions de notre commission, la nécessité de tels diagnostics.

M. Éric Labaye, directeur général associé de McKinsey au bureau de Paris. Vous nous avez interrogés sur l’enjeu économique et de compétitivité dans un monde en mutation. La croissance continue dans les pays émergents : dans certains secteurs, ceux-ci enregistrent une croissance de 5 à 10 % et certaines de leurs entreprises tendent à devenir des leaders mondiaux sur des marchés jusqu’ici dominés par des pays de l’OCDE.

Dans ce contexte, la compétitivité de notre pays reste un enjeu crucial, défini par les trois axes de proposition que nous avons déjà décrits dans notre premier rapport : renforcer notre système éducatif, les populations de ces pays étant de plus en plus formées ; développer la compétitivité sectorielle, notamment dans les services, qui ont ces dernières années été à l’origine de 80 à 90 % de l’augmentation de la valeur ajoutée et de quasiment 100 % de la croissance de l’emploi ; favoriser la mobilité, géographique et professionnelle, afin de redéployer les compétences vers les secteurs d’avenir.

M. Jacques Attali. C’est la flexisécurité.

M. Éric Labaye. En ce qui concerne nos finances publiques, je rappelle que la RGPP porte sur 140 milliards d’euros, alors que l’ensemble des dépenses publiques s’élève à 1 000 milliards d’euros. Les pistes examinées par la commission concernent donc les 800 milliards d’euros restants, qui incluent les dépenses des collectivités locales et les dépenses d’intervention. Ces dépenses doivent en outre être envisagées sous l’aspect du service qu’elles doivent permettre de rendre aux citoyens, et à quel coût. La commission s’interroge donc aujourd’hui, dépense par dépense, sur les moyens d’augmenter la qualité du service tout en améliorant sa productivité.

M. René Couanau. S’agissant de l’éducation, monsieur le président Attali, vous avez formulé la contradiction à laquelle nous sommes confrontés. Vous avez dit en effet que notre école primaire était en régression, tout en classant dans les atouts de notre pays un des systèmes éducatifs les meilleurs d’Europe, sinon du monde. En tant que facteur de croissance, notre système éducatif continue à être performant. Sur le plan de la justice sociale en revanche, notre école primaire est un de nos plus grands handicaps, et l’un des plus grands échecs de ces trente dernières années, puisque ce sont toujours les mêmes élèves, venant des mêmes milieux, qui s’y retrouvent en situation d’échec. À terme, cela constitue également un frein à la croissance, en rendant impossible l’adaptation et la mobilité professionnelles. Quelles solutions envisagez-vous ?

Il faut ajouter à cela la baisse du niveau général des compétences acquises à la fin des études secondaires, à cause, soit d’un excès de spécialisation, soit d’une dispersion dans l’acquisition des connaissances. Comment recentrer l’éducation sur des objectifs plus précis et l’inscrire dans un cycle général de formation, incluant la formation continue des adultes ?

Par ailleurs, au moment où nous examinons la loi sur les collectivités locales, dont vous nous dites qu’elle est très éloignée de vos préconisations en la matière, j’aimerais que vous nous indiquiez quelle est votre conception de l’organisation territoriale de la République. Privilégiez-vous l’efficacité par le regroupement, ou reconnaissez-vous l’importance de la proximité et du lien social ? Faudrait-il sans tarder faire une croix sur l’ensemble des communes de France, au bénéfice de métropoles et de grandes communautés urbaines, et supprimer les départements pour ne laisser subsister que les régions ? Une telle réforme contribuerait peut-être à l’efficacité économique, mais au prix de graves dégâts sociaux.

Je crois, contrairement à vous, qu’il est urgent de modifier la loi LME, les risques attachés à son application s’aggravant avec le temps, comme le montrent la multiplication des grandes surfaces et la dégradation subséquente des rapports liant producteurs et distributeurs, toujours au détriment du consommateur et de l’économie.

Si vous pouviez seulement convaincre le monde politique et le monde économique que l’effort doit principalement porter sur le premier degré d’enseignement, ce serait au bénéfice, non seulement de la croissance, mais aussi de la justice sociale.

M. Hervé Mariton. Je commencerai par deux observations.

La première rejoint le propos de René Couanau sur l’éducation. Votre analyse s’inscrit dans la logique de nombreux observateurs, tout dernièrement de la Cour des comptes, selon lesquels il faut poursuivre les nombreuses réformes déjà engagées et qui n’ont pas encore produit tous leurs effets. S’agissant de l’éducation, l’enjeu est de proposer des solutions vraiment nouvelles, qui seront nécessairement à l’opposé de l’accumulation des réformes et des moyens à laquelle on assiste depuis de nombreuses années.

Deuxièmement, vos propos sur la dette suscitent chez moi les plus grandes réserves : j’ai beaucoup de mal à faire la différence entre la bonne et la mauvaise dette. Dans les deux cas, elle doit être remboursée ! La dépense d’éducation peut, certes, être considérée comme un investissement immatériel, mais elle ne contribuera au remboursement de la dette souscrite pour la couvrir qu’une fois que les réformes intelligentes qui nous manquent aujourd’hui auront été menées à bien. On voit bien le risque que fait courir une telle distinction des différentes catégories de dettes à nos finances publiques dans le contexte actuel.

Votre mission est de nous éclairer sur les moyens de lever les obstacles à la croissance. Quel est selon vous le principal obstacle à la levée de ces obstacles? Des mesures prises à la suite de votre rapport, quelle est selon vous la plus importante ? Et je terminerai par la même question, s’agissant de celles qui n’ont pas été retenues.

M. Jean Launay. Les mesures de régulation financière qui seront demain à l’ordre du jour de nos débats vous paraissent-elles de nature à juguler la spéculation financière, qui nourrit l’économie virtuelle, et à orienter les financements des fonds et des banques vers les PME, qui représentent l’économie réelle dans nos territoires ? Avez-vous les outils pour mesurer la réalité de la demande de fonds et celle des réponses à cette demande ?

Je voudrais ensuite vous interroger sur l’orientation de la fiscalité vers la protection de l’environnement. Justifier l’abandon de la taxe carbone par la nécessité de maintenir la compétitivité de nos entreprises me semble d’autant plus discutable que cette mesure était très en deçà des propositions des experts. Quant au dispositif du bonus-malus automobile, il a eu pour conséquence de privilégier les effets immédiats de réduction de l’impact environnemental, au détriment d’un développement durable intégrant l’économie : outre que les nouveaux véhicules ne sont pas fabriqués en France, on ne tient pas compte de la consommation de CO2 au cours du processus de production et on ne s’est pas soucié d’équiper ces voitures de filtres à particules.

M. le président Jérôme Cahuzac. Si j’ai bien compris les propos de Mme Lemoine, il ne s’agit pas de distinguer entre une bonne et une mauvaise dette, mais de faire la part, dans le déficit public, notamment au titre de l’année 2009, de l’effet de la crise et de celui des politiques menées. À titre personnel, je pense que le déficit de 7,5 % est dû pour au moins la moitié à ces dernières.

M. Jacques Attali. S’agissant du déficit public, certains évaluent le montant de la réduction des dépenses ou de l’augmentation des recettes nécessaire dans les deux prochaines années pour retrouver une courbe d’équilibre à 2,5 points de PIB, soit 50 milliards d’euros.

Nous n’avons pas encore de solution aux problèmes que vous venez de soulever, puisqu’ils doivent précisément faire l’objet du travail que nous entamons maintenant. L’éducation, et en particulier l’enseignement du premier degré, sera une de nos grandes priorités. Dans l’état actuel de nos réflexions, je soulignerai l’importance de commencer par le préscolaire, avant même l’école primaire, de développer l’accompagnement individualisé et de former les maîtres à l’exercice de l’autorité. Mais ce ne sont que quelques pistes parmi beaucoup d’autres. En tout état de cause, le problème n’est pas financier : le budget consacré à l’école est considérable, mais ces moyens doivent être redéployés.

En ce qui concerne l’organisation territoriale, nous nous en tenons, sous bénéfice d’inventaire, à notre proposition initiale : la nécessité de regrouper les communes ne doit pas remettre en cause l’implantation communale, fondamentale ne serait-ce que pour la vie démocratique. En revanche, le département doit être supprimé, une partie de ses compétences, notamment l’action sociale, devant être transférée aux communes, l’autre, notamment ses attributions en matière d’infrastructures, aux régions.

Il est vrai que les conditions de mise en œuvre de la LME risquent d’aggraver certains déséquilibres, mais ce n’est pas le fait de notre commission. Le problème, c’est que le Gouvernement, puis le Parlement ont sélectionné dans nos propositions celles qui leur convenaient, faisant ainsi perdre à l’ensemble sa cohérence.

M. René Couanau. Le mieux serait de ne pas avoir de Parlement ?

M. Jacques Attali. Il me paraît au contraire tout à fait nécessaire, et vous ne faites qu’exercer vos responsabilités. Mais ne rejetez pas sur notre commission le poids d’une responsabilité que vous avez prise en ne retenant qu’une partie de nos propositions : on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Nous avions, nous, assorti nos propositions de mécanismes protecteurs, en particulier pour les petits producteurs dans leurs relations avec les distributeurs.

La liste des « obstacles à la levée de l’obstacle » est longue, monsieur Mariton ! S’il ne fallait en retenir qu’un, ce serait l’absence du courage d’être provisoirement impopulaire quand on exerce des responsabilités politiques. Quant à la réforme la plus importante, c’est, à mes yeux, celle des universités et de la gouvernance universitaire. Parmi celles qui n’ont pas été menées, la plus importante est la flexisécurité, via un « contrat d’évolution » donnant les moyens d’organiser de façon dynamique la transition professionnelle et le passage de l’inactivité à l’activité.

La régulation financière est pour l’instant très incertaine. J’insisterai seulement sur un point : le caractère extraordinairement contre-productif de l’adoption de la directive « Solvabilité 2 » me paraît sous-estimé. Personne n’en conteste plus l’existence ; on se contente de chercher les moyens d’en compenser les effets désastreux. Je continue à penser que cette directive est désastreuse en tant que telle. Elle a en effet pour conséquence d’interdire de fait, aux sociétés d’assurances, toute activité de financement du secteur concurrentiel, en particulier des PME, au bénéfice des placements les plus sûrs.

Je ne me sens pas compétent pour me prononcer sur la pertinence du bonus-malus automobile. Quant à la taxe CO2, elle reste pour nous d’actualité.

M. Patrice Martin-Lalande. Votre proposition n° 49 vise à garantir en 2011 une couverture numérique optimale, celle-ci étant définie notamment comme l’accès à un débit minimum de dix mégabits par seconde sur l’Internet. Dans beaucoup de territoires, un tel débit est difficile à atteindre via l’ADSL, qui assure actuellement l’essentiel du trafic. Il faudra donc, soit trouver des solutions alternatives, soit attendre l’arrivée du très haut débit. Comptez-vous faire évoluer cette préconisation pour tenir compte de cette arrivée ?

Par la décision n° 57, vous proposez de faire verser une contribution aux fournisseurs d’accès Internet au moyen d’un dispositif du type « licence globale ». Cette solution n’avait pas été retenue par les lois Hadopi I et II, et vient encore d’être écartée par le ministre de la culture à l’occasion de la remise du rapport Zelnik. Quelle est votre position sur ce sujet ? Y aurait-il d’autres solutions, au-delà du développement du téléchargement légal ?

L’accès aux services publics via les nouvelles technologies, notamment en zone rurale, est plus que jamais d’actualité grâce à la généralisation de l’accès à l’Internet. Comptez-vous faire des propositions en la matière ?

M. François de Rugy. Je partage ce que vous avez dit sur la dette, monsieur le président Attali. Alors que vous évoquiez l’ambition écologique dans votre rapport initial, aucune des cinq priorités que vous venez d’exposer n’a trait à l’écologie et au développement durable. Pourquoi ? Où en êtes-vous sur ce sujet ? Que pensez-vous par ailleurs du rapport Stiglitz sur les nouveaux indicateurs de la performance économique et du progrès social ?

M. Jean-Pierre Gorges. À combien estimez-vous votre contribution à la croissance ?

Le faible niveau de croissance n’est pas la seule cause du mal français, comme ce type de rapport tend à le faire accroire. En réalité, ce pays vit à crédit. On constate en effet que le pouvoir d’achat des Français augmente depuis trente ans, quelle que soit la croissance, et le taux d’épargne des Français est maximal, dépassant les 17 %. Dans le même temps, le déficit des comptes publics n’a cessé de s’accroître et la dette publique a explosé. Démonstration est faite que le pouvoir d’achat des Français est financé par le déficit de l’État. Nul besoin d’un rapport pour résoudre ce problème : les solutions simples et susceptibles d’être adoptées rapidement ne manquent pas.

M. Jacques Attali. Il faut en effet accélérer le déploiement du très haut débit et viser une couverture totale du territoire avant 2016 si on veut assurer les meilleures conditions de mise en place d’un e-government local. Ce type d’administration des collectivités fait déjà l’objet d’expérimentations avancées, notamment en Bourgogne.

Nous nous étions clairement prononcés contre la solution qui a finalement été retenue dans la loi Hadopi et en faveur d’un dispositif similaire à la licence globale, et nous n’avons pas changé d’opinion. Le contrôle instauré par la loi sera, au mieux inefficace, au pire policier. La protection du droit d’auteur sera mieux assurée par la taxation des fournisseurs d’accès. La mise en place de formules d’abonnement global est également une piste intéressante, même si ce type d’accord entre les fournisseurs de contenu et les opérateurs risque de réduire la part des artistes à la portion congrue. Il est donc crucial d’agir maintenant, afin que la gestion de ces recettes nouvelles n’échappe pas aux sociétés d’auteurs. Ce n’est malheureusement pas du tout la voie dans laquelle on s’engage aujourd’hui, certains artistes préférant, par méconnaissance de leurs propres intérêts, défendre des droits anciens plutôt que de s’attacher à la promotion de droits nouveaux.

Nous aurions dû en effet, monsieur de Rugy, inscrire plus clairement l’environnement au nombre de nos priorités : c’est une très bonne remarque et nous allons en tenir compte. C’est que pour nous cela va sans dire : tout développement doit être durable et c’est une préoccupation permanente dans notre travail. Elle est présente, au moins implicitement, dans notre cinquième priorité : assurer l’équilibre entre les générations impose de réduire, non seulement la dette publique et celle de retraites, mais aussi la dette environnementale, la dégradation de l’environnement pesant également sur les générations futures.

En ce qui concerne le rapport Stiglitz, je suis favorable à la recherche d’autres indicateurs que le PIB. Je vous renvoie à l’exemple du Bhoutan, petit pays qui distingue neuf indicateurs de développement, dont le PIB, tous très opérationnels et examinés tous les ans par le Parlement.

L’impact de notre rapport sur la croissance est très difficile à mesurer. Certains l’évaluent à 0,3 % ; j’aurais pour ma part du mal à indiquer le moindre chiffre. La croissance, je le répète, c’est d’abord une question de confiance. Or tout indique que ce pays n’a plus confiance en lui-même, dans ses institutions ni dans un projet collectif. Tant que cette confiance ne sera pas restaurée, la croissance ne reviendra pas. Nous ne pouvons que proposer des mesures techniques, qui ne sont au mieux que les conditions d’une confiance que seul un sentiment collectif de légitimité, de justice et de vérité pourra ressusciter.

On pourra toujours dire que la croissance n’est pas le sujet : sans croissance, la dette augmente mécaniquement et le pays décline. Si elle n’est pas une condition suffisante, elle est vraiment une condition nécessaire.

M. Alain Rodet. Vous avez dit que seules 60 % de vos préconisations avaient été appliquées : il faudrait, monsieur le président, regarder d’un peu plus près quels en sont les effets sur notre économie et notre compétitivité. Entre autres effets pervers, la réforme de la taxe professionnelle va bouleverser les finances des collectivités locales, alors que celles-ci réalisent 75 % des investissements civils. Le statut d’auto-entrepreneur, qu’on peut résumer par la formule « tous patrons, tous tâcherons, tous précaires » aura aussi une incidence négative sur la croissance. Quant à la réforme de l’urbanisme commercial, elle fait déjà des dégâts considérables. À moyen terme, il apparaîtra que toutes ces mesures nous ont coûté près d’un point de croissance.

M. Olivier Carré. Mon collègue Couanau vous a demandé de préciser vos propositions en matière de gouvernance locale : je m’inquiète pour ma part de vos propositions de réformes en matière de gouvernance sociale. N’est-ce pas grâce au niveau de nos dépenses de transfert que la répartition des revenus reste plus égalitaire dans notre pays qu’en Allemagne, par exemple, où les écarts se creusent depuis quelques années ? Cet accroissement des inégalités ne serait-il pas une conséquence de la flexisécurité ? Est-il acceptable ? N’est-il pas contraire à la « communauté de destin » et à la confiance qu’on dit vouloir restaurer ?

Dans le cadre de nos réflexions autour des finances publiques, des présidents de conseil général ont attiré mon attention sur l’augmentation exponentielle des normes et le risque qu’elle fait peser sur la croissance. Quelles sont vos recommandations dans ce domaine ?

Mme Aurélie Filippetti. Comment expliquez-vous la dégradation pour le moins inquiétante des performances scolaires de la France telles qu’elles sont mesurées par les enquêtes du Programme international pour le suivi des acquis des élèves de l’OCDE, le PISA ? Pis, l’école contribue désormais à creuser les inégalités, comme la Cour des comptes le relève dans un rapport récent. Comment expliquer qu’un système scolaire qui mobilise une part importante de notre budget donne d’aussi piètres résultats au regard de ce qui devrait être la première des priorités : réduire l’inégalité à la naissance par l’égalité des chances ?

Quelles leçons avez-vous tirées, pour la poursuite de votre travail, de l’accueil réservé à votre premier rapport ? Je pense notamment aux polémiques suscitées par sa publication, au point qu’un grand nombre de vos propositions n’ont pas été appliquées. Comptez-vous faire à l’avenir une plus grande part à la concertation ?

Vous proposez – c’est votre décision n° 97 – d’harmoniser nos réglementations financière et boursière avec celles du Royaume-Uni. Ne croyez-vous pas que la crise financière a inversé les priorités, et qu’il faut désormais songer plutôt à encadrer les flux financiers et à taxer les très hauts revenus et les rémunérations excessives des traders ? Ne regrettez-vous pas que votre rapport ne contienne aucune préconisation volontariste dans ce domaine ? Quelles solutions proposez-vous ?

M. Bernard Carayon. La dimension européenne est, assez curieusement, absente de votre rapport, monsieur le président, alors que la compétitivité de notre pays et beaucoup de nos politiques publiques en sont largement tributaires – je pense en particulier à nos politiques de recherche, d’immigration ou à notre politique industrielle. De la même manière, votre réflexion semble exclure les problématiques européennes de normalisation, de certification ou de régulation, voire des aspects plus juridiques de l’action européenne, tels que la politique européenne de concurrence, qui ont une incidence sur la compétitivité, voire l’existence même de nos entreprises. À l’inverse, votre rapport consacre de longs développements à des questions purement nationales : le petit commerce, l’artisanat, le FISAC, les taxis, etc. Cette absence de la dimension européenne est-elle le fruit d’une omission volontaire, ou d’un oubli regrettable ?

Dans un récent rapport, la Cour des comptes dénonce le fait que notre pays privilégie depuis toujours une gestion quantitative de son système scolaire, comme l’indiquent le niveau élevé de nos dépenses d’éducation et l’augmentation continue des moyens affectés à l’éducation nationale. Souscrivez-vous à cette analyse ? Considérez-vous qu’il est temps de privilégier une approche qualitative ?

M. Georges Ginesta. J’aimerais sortir un instant du cadre strict du rapport de la commission pour la libération de la croissance. On a tout à fait raison de mettre en exergue la responsabilité des marchés dans la crise, mais cela n’explique pas pourquoi certains pays européens s’en sortent mieux que nous. Ne faudrait-il pas parler aussi des « partenaires sociaux », qui constituent un véritable pouvoir, à côté du pouvoir politique ? S’il y a un domaine où la France est championne, c’est dans la culture de la grève. Le comportement des syndicats français est-il un obstacle à la mise en œuvre de vos préconisations ?

M. Jean-Yves Cousin. Je voudrais à mon tour vous interroger sur l’éducation, monsieur le président. Comment expliquer les déficiences de notre enseignement primaire ?

M. Jacques Attali. J’ai dit que nombre de nos propositions n’avaient pas été totalement appliquées : nous ne pouvons pas être tenus pour responsables du caractère partiel de leur mise en œuvre.

Notre commission est tout à fait disposée à débattre avec vous de l’efficacité et de la réalité de leur mise en œuvre et à apporter son expertise, dans la mesure où elle vous semble utile, à un réexamen de la LME, par exemple, ou encore du statut d’auto-entrepreneur, qui peut d’un certain point de vue favoriser une concurrence déloyale.

Notre rapport insiste fortement sur l’importance de la simplification administrative, mais les nombreuses propositions qu’il comporte à cet effet sont restées sans suite.

Quant à expliquer les mauvaises performances du système scolaire français, je ne suis pas sûr d’y parvenir aujourd’hui, et je serais ravi que nous approfondissions ensemble cette question. Mon sentiment personnel est qu’à gauche comme à droite, on a toujours considéré que le système fonctionnait. En outre, beaucoup de réformes ont été votées sans être réellement appliquées : les zones d’éducation prioritaires n’ont pas vraiment été prioritaires ; les traitements des professeurs n’ont jamais été vraiment différenciés ; les élèves en difficulté n’ont pas vraiment bénéficié de cours adaptés, etc. Nous allons beaucoup travailler sur ces questions.

Les erreurs de communication que j’ai sans doute commises au moment de la publication du rapport doivent être replacées dans leur contexte, la grève des taxis laissant le sentiment que le rapport avait été jeté à la poubelle dans la semaine qui a suivi. Cela n’a heureusement pas été le cas. C’est pourquoi nous préférons désormais débattre avec vous de nos travaux avant, plutôt qu’après leur publication, afin d’y apporter les modifications qui se révéleraient nécessaires.

Je crois exprimer la position de la Commission en disant que nous ne regrettons aucune des mesures que nous avons proposées. On peut estimer en revanche qu’il manque certaines choses. Vous évoquez l’encadrement des bonus : si l’inégalité des revenus est en effet scandaleuse, le niveau de rémunération des traders n’a rien à voir avec la crise actuelle. Encadrer les bonus, ce serait faire comme l’ivrogne qui cherche sa clé sous un réverbère, non parce qu’il l’a perdue là, mais parce que c’est là qu’il y a de la lumière. C’est l’absence de régulation du secteur spéculatif qui est au fondement de la crise.

Plus généralement, on peut reprocher à notre rapport, en effet, de ne parler que de la France. Nous avons choisi de nous limiter aux propositions dont la mise en œuvre relevait du pouvoir politique français. Nous n’avons pas développé d’une façon suffisamment explicite la position de négociation qui doit être celle de la France, au niveau européen, comme dans le cadre des G7, G8 ou G20. Cette réflexion fera l’objet d’une des cinq priorités, et nous serons très heureux d’en débattre avec vous.

Notre commission, qui compte parmi ses membres des acteurs importants du monde syndical et de grands experts du syndicalisme, n’a évidemment pas le sentiment que le syndicalisme soit en soi un obstacle à la croissance : je pense au contraire que la faiblesse actuelle du syndicalisme français constitue un obstacle à la confiance, et donc à la croissance.

M. le Président Jérôme Cahuzac. Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous ceux qui travaillent à vos côtés d’avoir bien voulu répondre à nos questions.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 19 mai 2010 à 10 heures

Présents. - M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Gérard Bapt, M. Claude Bartolone, M. Xavier Bertrand, M. Jean-Marie Binetruy, M. Michel Bouvard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Olivier Carré, M. Yves Censi, M. Alain Claeys, M. René Couanau, M. Jean-Yves Cousin, M. Olivier Dassault, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Flory, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. François Goulard, Mme Arlette Grosskost, M. David Habib, M. Laurent Hénart, M. François Hollande, M. Marc Laffineur, M. Jean Launay, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Patrice Martin-Lalande, Mme Marie-Anne Montchamp, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Nicolas Perruchot, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. François de Rugy, M. Jean-Claude Sandrier, M. François Scellier, Mme Isabelle Vasseur, M. Michel Vergnier

Excusés. - M. Pierre Bourguignon, M. Bernard Carayon, M. Gilles Carrez, M. Patrick Lemasle, M. Victorin Lurel

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Pierre Dupont, M. Michel Ménard

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