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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 14 décembre 2011

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 46

Coprésidence de M. Jérôme Cahuzac, Président

– Audition, ouverte à la presse, commune avec la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, de M. Jean-Luc Hees, président-directeur général de Radio France, sur l’exécution du contrat d’objectifs et de moyens de Radio France

– Présences en réunion

et de


M. Christian Kert,
Vice-président
de la commission
des Affaires culturelles et de l’éducation

La Commission entend, en audition commune avec la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, M. Jean-Luc Hees, président-directeur général de Radio France, sur l’exécution du contrat d’objectifs et de moyens de Radio France.

M. Jérôme Cahuzac, président. Le 29 juillet 2010, Radio France a conclu avec l’État son deuxième contrat d’objectifs et de moyens (COM) couvrant la période 2010-2014. Dans ce cadre, l’entreprise a pris cinq engagements : renforcer son cœur de métier, résumé par la formule « informer, éduquer, distraire », en s’appuyant sur l’identité propre à chacune des sept antennes du groupe ; conforter son action musicale et culturelle ; développer son offre dans l’environnement multimédia ; améliorer et moderniser sa gestion ; enfin, bâtir les conditions de son équilibre financier.

Monsieur le Président Jean-Luc Hees, je souhaiterais vous poser quelques questions, en débutant par celle, traditionnelle, concernant les audiences réalisées par les antennes du groupe. Malgré la concurrence forte auquel il doit faire face, le média radiophonique reste solide avec, en 2010, une audience cumulée globale en progression de 0,4 point. Le COM assignait à Radio France une cible minimum de 25,8 % d’audience cumulée. Avec 25,5 %, votre groupe est proche de cette cible mais ne l’atteint pas. Comment expliquer ce différentiel certes mineur mais incontestable ?

Par ailleurs, Radio France est à la pointe des nouveaux modes de diffusion et de consommation des programmes : en 2009, le groupe occupait le premier rang en termes d’audience en différé, via les podcasts notamment. Avez-vous pu maintenir ce rang ? Quelles actions ont été entreprises afin d’enrichir cette offre et d’augmenter la part des heures produites effectivement disponibles en téléchargement et en audio à la demande ?

Enfin, mes dernières questions, de nature à la fois rétrospective et prospective, auront trait à la gestion et plus particulièrement aux ressources humaines.

Votre groupe s’est engagé à maîtriser ses effectifs et sa masse salariale sur la période couverte par le COM. Quelles sont les dernières données disponibles à cet égard ? Qu’en est-il au regard des années antérieures et quelles évolutions anticipez-vous pour les années à venir ?

M. Christian Kert, président. Nous retrouvons avec plaisir M. Jean-Luc Hees, président de Radio France, pour notre rendez-vous annuel consacré au bilan d’exécution du contrat d’objectifs et de moyens. Ce rendez-vous est d’autant plus important que nous avons peu d’occasions de débattre de la situation et des perspectives de la radio publique. En effet, il faut bien l’avouer, nos discussions, par exemple au moment du budget, sont le plus souvent polarisées sur la télévision.

Je voudrais saluer les éléments très positifs du bilan d’exécution du COM, qui figurent dans le document remis aux membres de nos deux Commissions. Vous allez bien évidemment nous les détailler et je me contenterai d’observer que les derniers chiffres d’audience rendent grâce à la qualité et à l’attractivité des différentes antennes du service public.

Je souhaiterais vous poser trois questions. La première porte sur les incidences de la réduction de crédits pour 2012 que nous avons votée dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’économies de l’État et qui se traduit par la contribution à l’effort commun de l’ensemble des entreprises publiques de l’audiovisuel. Ma deuxième question concerne l’avancement du chantier de la Maison de Radio France. Le calendrier est-il tenu et les budgets seront-ils respectés ? Ma troisième et dernière question est relative au Mouv’. L’année dernière, lors de cette même audition, vous aviez eu l’occasion de nous expliquer les moyens et les ambitions du repositionnement de cette antenne. Quels en sont les résultats et qu’en attendez-vous désormais ?

M. Jean-Luc Hees, président de Radio France. L’exercice auquel nous nous livrons aujourd’hui est important pour le groupe Radio France, même s’il est délicat : nous allons, en cette fin d’année 2011, étudier les résultats de l’année 2010 alors que la situation évolue rapidement, notamment en termes d’audience. Il n’en demeure pas moins que cette audition constitue un moment privilégié pour vous exposer les ambitions du groupe.

Comme l’a noté avec justesse M. le président Jérôme Cahuzac, on observe un léger écart entre nos objectifs en termes d’audience et les résultats atteints l’an dernier, mais cette situation s’est modifiée en notre faveur lors de la dernière saison, puisque l’audience de toutes les antennes du groupe a progressé en 2011, en particulier celle de France Info qui a connu la croissance la plus spectaculaire. Je rappelle que cette antenne constituait, lors de ma prise de fonctions, un vrai cas d’école : que devait-on en faire, alors que son audience régressait mécaniquement du fait de la concurrence de nouveaux modes de consommation de l’information ? Le chantier que nous avons entrepris a finalement donné des résultats : l’antenne a gagné cette année 500 000 auditeurs, ce qui est un des meilleurs résultats sur le marché de la radio.

Le marché global de la radio se porte d’ailleurs mieux que nous ne pouvions l’espérer il y a trois ans de cela, époque où l’on parlait d’une érosion inévitable de l’audience de ce média : plus de 43 millions de Français l’écoutent chaque jour. Il ne s’agit donc pas d’une industrie en crise. Cela étant, les modes de consommation évoluent et nous devons accompagner ce mouvement.

Permettez-moi de présenter les résultats du groupe par antenne.

France Inter se porte bien puisque, dans la dernière « vague » d’audiences de Médiamétrie, elle a atteint ses meilleurs résultats depuis sept à huit ans. Ceux-ci, obtenus sur un marché très compétitif, sont un motif de satisfaction.

France Culture réussit également à obtenir de bons résultats, en ayant battu deux fois son record d’audience cumulée, à 1,8 %. Ce taux peut sembler éloigné de celui des antennes généralistes, mais rappelons qu’il s’agit d’une radio très particulière, qui dispose d’un vrai socle d’auditeurs et dont l’accès devient de plus en plus aisé, ce qui me laisse à penser que les options choisies par la direction de cette antenne sont les bonnes.

Le réseau France Bleu constitue un axe de développement essentiel du groupe. Son audience s’est stabilisée à environ 7 % et se caractérise par une durée d’écoute longue, ce qui est évidemment une bonne nouvelle. Ce réseau couvre actuellement les trois quarts du territoire national ; nous comptons le développer, ce qui est un exercice ambitieux et difficile car les ressources en fréquences sont devenues rares. Nous ne baissons pas pour autant les bras car nous considérons que cette antenne assure un service de proximité indispensable, contrepartie de la redevance acquittée par nos concitoyens. Les taux d’audience démontrent d’ailleurs ce caractère de radio de proximité. Ils ne se limitent plus à être importants lorsque surviennent des intempéries ou des catastrophes naturelles. France Bleu est devenue une radio écoutée quotidiennement, quelles que soient les circonstances.

J’ai deux petits soucis sur deux antennes, mais lorsque les choses évoluent, de tels soucis peuvent devenir des points d’intérêt. La première antenne concernée est France Musique, dont j’étudie la situation avec attention. Elle doit relever un pari difficile en raison de son cahier des charges qui diffère de celui des autres radios spécialisées dans la musique classique. Il nous faut respecter l’intégrité culturelle de cette antenne. Il ne s’agit donc pas de diffuser les « 500 meilleurs titres classiques » pour gagner de l’audience. Les missions de l’antenne sont plus larges : il lui faut satisfaire et respecter les mélomanes, mais aussi mener des actions de pédagogie en matière musicale, ce qui est plus compliqué que de diffuser les premiers mouvements des symphonies les plus connues... Nous ne dérogerons pas à cette obligation. J’estime que malgré cette difficulté, l’audience peut être améliorée. Nous avons longtemps cherché la solution, jusqu’au printemps dernier où nous avons discuté avec les équipes et les producteurs de France Musique. Mon mot d’ordre a été le suivant : « il ne suffit pas d’aimer la musique pour être producteur à France Musique, il faut aussi aimer la radio ». Cela a certes un peu choqué, mais nous en avons débattu avec les producteurs de l’antenne, qui sont extrêmement compétents mais qui ont un « tropisme » musical plus que radiophonique. J’estime possible de conserver la qualité des programmes et de concilier ceux-ci avec l’amour de la radio. Nous avons obtenu de premiers résultats d’audience encourageants ; notre travail sur ce point est constant.

Nous avons d’ailleurs institué un comité éditorial hebdomadaire du groupe Radio France qui réunit les patrons des différentes antennes et permet d’harmoniser les positions, de dégager un esprit de groupe et ainsi d’éviter que la vision de chacun se limite à sa propre antenne. Au final, s’agissant de France Musique, je suis plus optimiste qu’il y a un an et je constate que les choses semblent évoluer favorablement.

Le second point qui me tient à coeur est la situation du Mouv’, qui aura bientôt quinze ans. Cette antenne est « mal née » : créée à Toulouse, elle n’y bénéficiait d’un taux de notoriété que de 60 % avant son transfert à Paris, alors que ce taux aurait dû être de 100 %. Des choix devaient être opérés car à l’évidence, l’audience de cette antenne n’était pas satisfaisante. Pour autant, s’agissant d’un public d’auditeurs jeunes, l’audience doit-elle constituer le seul critère d’appréciation des résultats ? Il est aussi possible de doter cette antenne de véritables ambitions dépassant la seule activité radiophonique. On constate aujourd’hui que les jeunes ne votent pas et qu’ils manifestent un faible intérêt pour les sujets d’actualité. Nous devons avoir pour ambition de ne pas abandonner ce terrain : il nous faut offrir un contenu réellement intéressant et varié aux post-adolescents et jeunes adultes.

Nous avons donc beaucoup investi sur cette antenne, notamment financièrement. Elle avait été constituée « de bric et de broc ». Il nous a fallu engager sa « remise en état » et la transférer à Paris, ce qui n’a pas été simple sur un plan social, de nombreuses personnes ayant été recrutées à Toulouse. Nous avons dû lui faire de la place dans la Maison de la Radio, en plein chantier. Nous avons également dû financer sa grille de programmes et lui donner les moyens d’une existence éditoriale. Cette antenne est désormais dotée d’un jeune directeur, M. Patrice Blanc-Francard, qui, fort de sa longue expérience dans le domaine de la radio, a su « rediscipliner » l’antenne, dans le sens positif du terme, trouver les bons formats et respecter le projet que nous avions engagé. Nous avons pour Le Mouv’ une vraie ambition, celle de diffuser une culture qui ne soit pas au rabais, alliant actualités, informations et débats politiques auxquels les personnels politiques se livrent d’ailleurs avec gentillesse et entrain, ce qui me semble très positif. Je vous invite ainsi à écouter la matinale du Mouv’, qui est de grande qualité. Tous ces points sont encourageants, même si les choses n’avancent pas aussi vite que je le souhaiterais, car il est plus facile de lancer une radio que de relancer une antenne qui a déjà quinze ans. L’audience n’est certes pas au rendez-vous, mais les résultats ne sont pas choquants. Nous avons pris des risques et je compte respecter nos engagements en termes d’audience pour Le Mouv’ au terme fixé par le COM.

Je souhaite par ailleurs évoquer les formations musicales du groupe, constituées de plus de quatre cents musiciens professionnels. Dotées d’un budget important, elles répondent à une vraie ambition. Nous voulons à tout prix les soutenir et les aider, même si cela peut, parfois, être compliqué car il s’agit d’un monde très particulier. Lors de ma prise de fonctions, les deux formations tendaient à être en compétition, ce qui n’était pas forcément malsain mais ne pouvait être satisfaisant au regard du cahier des missions et des charges qui prévoyait deux formations aux répertoires et aux vocations différentes. Il nous a fallu restaurer une vraie relation de confiance avec leurs chefs, s’expliquer sur le projet artistique de chaque formation et faire comprendre que leur employeur étant Radio France, celui-ci pouvait à bon droit exercer ses responsabilités et un certain contrôle. Nous avons aujourd’hui de très bonnes relations avec les directeurs musicaux de Radio France.

Le chœur de Radio France constitue une « belle machine », mais à surveiller : certains chanteurs vieillissent, ce qui nécessite un accompagnement aussi bien artistique que social. Le groupe est en outre doté de deux maîtrises dont l’une, située à Bondy, résulte d’un projet de mon prédécesseur. Elle fonctionne très bien. Elle représente certes une charge supplémentaire, mais elle mérite qu’on consente des efforts pour la pérenniser.

J’ai été interrogé sur la « révolution numérique ». Elle a évidemment des conséquences importantes pour le groupe. Cela m’a pris un certain temps de savoir jusqu’où nous devions aller en termes d’investissements financier et en personnel pour accompagner les changements ; la visibilité n’est pas évidente dans ce domaine. Je suis aujourd’hui accompagné de M. Joël Ronez, directeur des nouveaux médias, que vous pourrez interroger sur ces questions. C’est un homme imaginatif et réaliste, très au fait des nouveaux médias. Depuis son arrivée au sein du groupe, nous assistons à une « révolution des esprits », ce qui compte au moins autant que les moyens financiers.

S’agissant de la gestion financière du groupe, qui constitue le « nerf de la guerre », je pense pouvoir dire que la maison est bien tenue, les indicateurs établis par le COM étant respectés. Nous avons subi un « coup de rabot » à hauteur de deux millions d’euros, mais cet effort ne me paraît pas choquant dans la période que nous traversons. Nous en avons tiré les conséquences et les économies nécessaires seront faites. Cette somme est évidemment importante au regard du budget de Radio France qui dispose de marges de manœuvre limitées : la masse salariale en représente 60 %, auxquels il convient d’ajouter les frais de diffusion, droits d’auteurs et autres charges communes qui sont importants. Néanmoins, nous ferons face. Notre actionnaire nous a donné les moyens de vivre et de nous développer et j’ai déjà eu l’occasion de dire combien j’étais sensible à cette compréhension à notre égard.

Le maillage territorial du réseau France Bleu, auquel nous nous sommes consacrés à marche forcée, doit être poursuivi. De nouvelles stations ont récemment été créées au Mans et à Toulouse ; la création d’une station à Saint-Étienne est quasiment engagée. Ces opérations représentent des investissements importants mais nous bénéficions de la compréhension des élus locaux, quelle que soit leur appartenance politique. Chacun est en effet conscient du relais que constitue cette radio pour diffuser la « parole des territoires ». France Bleu est un grand pourvoyeur d’informations locales sur l’ensemble du territoire français, comme le démontre le traitement des informations provenant du Mans par France Info et France Inter.

Madame Lucie Muniesa, directrice financière du groupe, est à votre disposition, si vous le souhaitez pour répondre à d’autres questions entrant dans son champ de compétences.

Concernant les effectifs du groupe, le COM prévoit 4 619 équivalents temps plein. Ce plafond sera respecté. Radio France devant se développer, que ce soit pour renforcer le réseau France Bleu ou sur les nouveaux médias, le groupe devra donc trouver ses ressources en interne, ce qui suppose que nous communiquions sur ce point avec nos équipes, qui doivent aussi faire face à l’évolution des métiers avec la montée en puissance du numérique. Nous menons également un effort important de formation, notamment grâce à notre Campus Radio France qui permet l’intégration des personnels dans le groupe et dont les formations sont tout autant reconnues que certains diplômes.

J’évoquerai enfin le chantier de réhabilitation de la Maison de la Radio qui répond à des exigences de sécurité contre les risques d’incendie. Nous n’avions pas le choix ; il m’a fallu signer les ordres de chantier dix jours après mon arrivée à la présidence du groupe. Il s’agit d’un chantier important, alors que nos équipes continuent de travailler intra-muros, ce qui n’est pas sans poser de grandes difficultés, notamment sociales, liées à des déménagements multiples. La première phase des travaux est achevée, avec deux mois de retard liés à des intempéries et deux autres mois de retard en raison d’aléas de chantier. La deuxième phase qui concerne notamment la façade est désormais entamée. La tour a été entièrement rénovée. Certains ajustements ont dû être opérés en fin de chantier, ce qui a pu « faire grogner », mais les équipes sont désormais installées dans des locaux modernes.

M. Jérôme Cahuzac, président. Je vais maintenant donner la parole aux rapporteurs de nos deux Commissions pour les crédits de l’audiovisuel public.

M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le Président Hees, ma première question sera la même que celle que j’ai soumise au président Pflimlin il y a quelques semaines. Radio France a entrepris la renégociation des conventions collectives et accords d’entreprise applicables à ses personnels. Où en est cette négociation ? Ses conséquences financières ont-elles été évaluées ?

En ce qui concerne la réhabilitation de la Maison de Radio France, je rappelle qu’elle a été lancée en 2009 et qu’elle doit s’achever en 2016. Pourriez-vous dresser un état de l’avancement des travaux ? L’enveloppe financière et le calendrier des opérations seront-ils respectés ?

Radio France mène une action résolue dans le domaine des nouveaux médias. Où en est donc la refonte des sites internet des différentes antennes et quels sont les premiers résultats enregistrés en termes d’audience ? Enfin, quid de la radio numérique terrestre (RNT) ? Le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) affirme que ce dossier est le plus difficile de ceux que le Conseil a eu à traiter. Par ailleurs, les rapports se succèdent, rapport Tessier, rapport Kessler notamment, et soulignent les contraintes qui pèsent sur un déploiement de ce nouveau média à moyen terme : coût élevé pour les éditeurs, charge que représente la double diffusion numérique et analogique, renouvellement des terminaux radio, très nombreux, car très présents chez nos concitoyens. Quel est le point de vue du professionnel de la radio que vous êtes à ce sujet ? Les pouvoirs publics doivent-ils maintenir leur effort, notamment financier ? Quelles sommes ont d’ailleurs été consacrées par Radio France au développement de la RNT ?

Enfin, une ultime question, un peu plus générale, à l’heure de la convergence numérique, qui peut être observée dans de nombreux domaines, la distinction entre radio et télévision est-elle encore justifiée dans l’organisation du service public ?

Mme Martine Martinel. Vous avez souligné les excellents résultats de certaines antennes – France Inter et France Info – , ce dont nous pouvons tous nous féliciter. Les résultats du Mouv’ – vous le l’avez pas caché – connaissent en revanche un certain « flottement ». Je regrette d’ailleurs que cette radio ait quitté Toulouse, ce déménagement n’ayant pas amélioré son audience. Je me réjouis, en revanche, de l’arrivée dans cette ville de France Bleu, une belle radio de proximité et de service public.

Le rapport sur l’exécution du COM met en avant les actions destinées au jeune public, notamment scolaire. Or l’émission « La tribune des critiques de disques », qui fait partie du patrimoine génétique de France Musique et à laquelle, trois fois par an, des groupes d’élèves ou d’étudiants étaient invités à des enregistrements publics, dans les lycées ou universités, vient encore de changer de format – elle s’intitule désormais le Jardin des critiques. Celle-ci, en proposant une programmation « dans le vent » et en invitant des personnalités politiques à s’exprimer, me semble conduire à un traitement un tantinet superficiel de l’éducation musicale. C’est un peu dommage au regard du rôle de « formateur » que jouait cette émission auprès des élèves.

J’observe par ailleurs que l’indicateur 8.1 de gestion du COM, relatif à la place des femmes, n’évolue pas, tandis que l’indicateur 8.5, concernant le nombre de contrats signés par des jeunes issus des publics défavorisés ou de la diversité, est en stagnation, voire en baisse. Que pouvez-vous nous dire sur ces deux points ?

Sur un tout autre sujet, que pensez-vous du sort réservé à RFI ? En 2007, cette radio devait emménager dans de nouveaux locaux, lorsque les travaux de rénovation de la Maison de Radio France ont débuté. J’aimerais savoir si c’est Radio France qui l’a faite partir. Seriez–vous prêt, si les tutelles vous le suggéraient, à l’accueillir dans les locaux rénovés de la Maison de la Radio ?

Enfin, la fusion de la radio et de la télévision constitue-t-elle une piste intéressante et pouvez-vous nous dire quelles seront les incidences sur Radio France de la baisse prévue des crédits destinés à l’audiovisuel public ?

M. Jean-Luc Hees. Les questions posées ont trait à des aspects vitaux de notre fonctionnement.

En ce qui concerne la convention collective, il est vrai que nous avons pris du retard. La précédente convention est devenue caduque un mois après mon arrivée, ce qui a suscité de l’anxiété, un sentiment que je peux comprendre car j’ai longtemps travaillé dans cette maison, qui ignore l’emploi précaire. Or cette négociation est complexe, car elle concerne différentes catégories de personnels : les personnels techniques et administratifs ou PTA, les journalistes et les musiciens. Son rythme d’avancement n’est donc pas rapide, mais en disant cela je ne fais qu’exprimer ma position de gestionnaire d’une grande maison qui souhaite, naturellement, que les choses aillent plus vite. Comme vous le savez, nous sommes parvenus à un accord avec les journalistes. Pour faire œuvre de transparence, nous l’avons soumis à un référendum interne, qui a été positif, puisque les deux plus grandes organisations syndicales l’ont signé. Au bout de huit jours, trois autres organisations, moins représentatives, ne syndiquant pas des journalistes, ont fait valoir leur droit d’opposition, le texte devenant alors « nul et non écrit ». Depuis lors, nous avons essayé de relancer cette mécanique complexe et, pour aboutir à un compromis, je n’hésite pas à faire valoir, auprès de mes interlocuteurs, la situation – difficile – du contexte économique d’ensemble et de nos finances publiques. Comme il vaut mieux tenir la proie plutôt que l’ombre, il faudrait, à mon avis, revenir sur ce texte, quitte à l’amender à la marge ; j’espère, à cet égard, que la porte n’est pas fermée. S’agissant plus particulièrement des PTA, la négociation continue, étant précisé que nous devons respecter une date butoir, fixée à octobre 2012.

En ce qui concerne les conséquences financières de cette négociation, elles ont été intégrées dans le COM. Je tiens d’ailleurs à saluer l’attitude de notre actionnaire, qui a bien compris les enjeux de ce chantier.

La rénovation des sites internet de l’ensemble des antennes a été accélérée. Pour France Bleu, la situation est plus difficile car il y a 43 antennes. Il convient donc de mutualiser les moyens.

S’agissant de la RNT, ce sujet est, à mes yeux, fondamental. En effet, cette question concerne bien autre chose que la forme ou la dimension des « tuyaux » de diffusion. Elle recèle des enjeux de service public, voire philosophiques, tout à fait importants. Or trop souvent on se perd, en abordant cette problématique sous un angle excessivement technologique ou « technophile » alors que l’essentiel est que la RNT permettrait de garantir l’accès gratuit et anonyme de 100 % des auditeurs à toutes les radios. En outre, ce nouveau média permettrait de réduire de moitié les coûts actuels de diffusion. Mais l’investissement de départ dans un tel domaine représente un réel effort. En outre, la coexistence, inévitable au départ, de deux modes de diffusion a un coût. Enfin, il faut nous assurer de l’adhésion du public, ce qui suppose l’installation de centaines de récepteurs numériques, une exigence que la France est loin de satisfaire.

Force est de constater que nous n’avançons pas sur ce dossier, contrairement aux Allemands, qui ont lancé la RNT en août dernier, aux Anglais ou aux Belges. Il est tout de même surprenant que l’automobiliste français qui franchit une frontière ne puisse plus entendre la radio qu’il aime écouter.

Je sors sans doute de mon rôle en affirmant qu’il nous faut prendre rapidement des décisions dans ce domaine, à l’heure où tous les responsables soulignent l’importance des enjeux numériques et industriels pour notre pays. Je sais aussi qu’il s’agit d’un dossier complexe, où le choix de la norme suscite des débats techniques et les intérêts économiques ne convergent pas nécessairement. Sur ce dernier point, certains essaient d’éviter l’ouverture du marché à de plus petits éditeurs. Tout ceci m’incite à dire qu’il faut prendre, dans les plus bref délais, de la hauteur sur ce sujet essentiel.

S’agissant de la fusion éventuelle de la radio et de la télévision, c’est une question à laquelle je ne pense pas pouvoir vous répondre avec tout le recul nécessaire. J’ai en effet de grandes difficultés à concevoir la fin de la radio : je l’ai dit, en France, ce média rassemble, chaque jour, 43 millions de clients. À chaque fois que radio et télévision se sont mêlées, je n’y ai, en tant qu’auditeur et téléspectateur, jamais trouvé mon compte et j’ai des exemples assez précis. J’observe, à cet égard, un certain désenchantement chez mes confères de la Radio Suisse – où j’ai travaillé pendant de nombreuses années –, un service d’une qualité exceptionnelle qui a été absorbé par la télévision, média qui a des « tentacules ».

Il faut le dire : la radio rend un service unique et ce média, contrairement à certaines idées reçues, a un « avenir fou ». Je rappelle d’ailleurs que nous avions tenu à célébrer en 2010, sur nos antennes, l’anniversaire de l’appel du 18 juin, car il s’agit d’un événement de radio.

M. Patrick Bloche. Je voudrais revenir sur le sujet de la radio numérique terrestre (RNT) dont dépend l’avenir du service public de la radio comme nous l’aimons. Le principal argument que l’on oppose au lancement de la RNT est son coût, en particulier pour l’usager, puisqu’il y aurait en moyenne six postes de radio dans chaque foyer et que 50 % de l’écoute se fait dans la voiture par le biais des autoradios. Ne faudrait-il pas dépasser cet argument ? Après tout, la télévision est passée à la diffusion numérique. Ne serait-il pas logique d’agir de même avec la radio ? Ce que vous pourrez dire au nom de Radio France et du service public est essentiel.

En effet, les grands réseaux nationaux, qui ont des positions et des parts de recettes publicitaires à défendre, bloquent la RNT comme TF1, jadis, faisait tout pour empêcher le lancement de la TNT. D’un autre côté, les radios commerciales privées, les radios associatives et les radios locales souhaitent le passage à la RNT. Radio France se situe entre ces deux camps et la position de son président sera déterminante. Il convient d’éviter d’aller de moratoires en moratoires, de rapports en rapports, souvent contradictoires entre eux. N’est-il pas temps de lancer de la RNT ? Est-ce que la norme DAB + (Digital audio broadcasting) ne peut pas constituer un argument décisif en termes de coût et de pérennité technologique ?

Mme Marie-Georges Buffet. Le Mouv’ a fait l’objet d’un renouvellement de ses grilles mais l’audience n’est pas au rendez-vous. C’est un problème sérieux car je partage votre objectif d’avoir une radio de service public qui fasse référence pour les jeunes. Mais y a-t-il suffisamment d’initiatives citoyennes, de contacts directs avec les jeunes ? Il me semble que les problèmes réels des jeunes ne sont pas au centre des informations de cette radio.

Je souhaiterais également vous interroger sur les rapports entre Radio France et RFI. J’ai noté votre position sur les coopérations possibles entre radios et télévisions. Elle pourra alimenter la mission d’information commune aux commissions des Affaires culturelles et des Affaires étrangères relative à l’audiovisuel extérieur de la France sur l’argumentation qui vise à maintenir l’indépendance de RFI par rapport à France 24.

Pouvez-vous faire le point sur les négociations des accords collectifs ? Je souhaiterais notamment connaître votre appréciation sur l’évaluation individualisée, qui inquiète beaucoup les organisations syndicales, sur le passage de 120 à 150 métiers au sein de Radio France ainsi que sur la question du paritarisme, s’agissant notamment des questions disciplinaires.

Pouvez-vous nous faire part des résultats du plan de détection des risques psychosociaux ainsi que de l’évolution des effectifs ? Enfin, vous avez évoqué la nécessité d’une évolution politique pour l’ouverture de nouvelles radios mais vous avez aussi indiqué que Radio France devait trouver ses effectifs par elle-même. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce sujet ?

M. Michel Bouvard. En 2008, les travaux de la Milolf avaient mis en évidence la problématique générale de l’absence de pilotage global de l’État sur ses opérateurs et sur la coordination des politiques publiques. La question de la diffusion de la musique et des grandes salles destinées à accueillir des orchestres est réelle puisqu’on s’aperçoit que le public n’est pas extensible à l’infini. Le nombre d’orchestres étant limité, on assiste, avec la multiplication des salles, à une surenchère pour faire venir les meilleurs ensembles. Cela conduit à un accroissement des coûts de la programmation et à une multiplication des déficits portés par des entités différentes mais tous à la charge des contribuables, directement ou indirectement. L’auditorium de Radio France vient s’ajouter à la liste de ces salles.

La situation de Radio France est particulière puisqu’elle dispose d’orchestres résidents, l’un d’entre eux résidant actuellement au théâtre des Champs-Élysées, qui lui-même bénéficie de subventions de sa structure de rattachement. Comment Radio France envisage-t-elle de faire vivre cet auditorium une fois que les coûteux travaux entrepris auront été achevés ? Disposez-vous aujourd’hui d’un budget de fonctionnement permettant de s’assurer que la fréquentation et la programmation dans l’auditorium ne vont pas accroître les coûts et les déficits pour Radio France et, par la même, contribuer à une politique culturelle qui ne serait pas suffisamment coordonnée dans le secteur de la musique ?

M. Marcel Rogemont. La radio numérique vous tient à cœur et c’est tant mieux, car nous avons besoin de personnes qui croient en la radio numérique. Vous-même, quelle norme aurait votre préférence, entre la DVB (Digital video broadcasting), la DRM (Digital radio mondiale) et la DAB + (Digital audio broadcasting) ?

Le Sénat a – fort heureusement – restitué à Radio France les 2 millions d’euros qui lui avaient été supprimés au cours de la première lecture du projet de loi de finances pour 2012. Nul doute que l’Assemblée nationale aura à cœur de prolonger cette initiative, mais dans l’hypothèse où cela ne serait pas le cas, cette restriction risque de concerner au premier chef les investissements. Les travaux de la Maison de la Radio seront-ils concernés ? L’auditorium sera-t-il disponible pour la rentrée 2013 ?

Vous avez indiqué ne pas être « fou » d’un rapprochement entre la radio et la télévision. Seriez-vous « fou » d’un rapprochement entre RFI et Radio France ?

On constate une légère amélioration en ce qui concerne les ressources propres de Radio France. Quels sont les efforts que vous entendez consentir dans ce domaine ?

Il apparaît que Radio France est très bien placée en matière de radio de rattrapage, particulièrement France Culture qui a fait l’objet de 2,7 millions de téléchargements en octobre 2011, ce qui est énorme en comparaison de son audience. Quels sont les efforts que vous comptez mettre en place pour développer la radio de rattrapage ?

Enfin, envisagez-vous au cours des prochaines années de nouvelles extensions au réseau de France Bleu ?

M. Régis Juanico. Les études Médiamétrie montrent bien l’attachement des auditeurs au réseau de France Bleu. Qu’en est-il de l’évolution du maillage de ce réseau et, notamment, de l’implantation de la quarante-quatrième antenne à Saint-Étienne qui, après celles du Mans et de Toulouse est la dernière prévue par le contrat d’objectifs et de moyens 2010-2014 ? Cette station stéphanoise permettra d’accroître la couverture de France Bleu, notamment en réalisant la jonction entre l’Auvergne et la vallée du Rhône.

Vous avez vous-même annoncé l’ouverture de cette antenne locale à échéance 2012, lors de votre visite à Saint-Étienne, le 4 mai dernier, et les collectivités territoriales ont confirmé leur accord de principe pour une participation financière correspondant à 50 % du coût de l’installation. Une fréquence a été réservée. Pouvez-vous nous dévoiler le calendrier prévisionnel de l’ouverture de cette antenne locale, le premier semestre 2012 ayant été évoqué ? Quel sera le lieu du futur site d’implantation ? Quels seront les effectifs de journalistes et techniciens ?

Mme Monique Boulestin. Je souhaiterais aborder la question de la consolidation du réseau de France Bleu en tout point de notre territoire, en particulier dans des régions fortement marquées par la ruralité, avec une population vieillissante pour qui ces stations de radio sont le lien nécessaire avec le monde extérieur et qui permettent de rompre leur isolement.

Je pense bien sûr à ma région, le Limousin – mais ce n’est pas la seule – où il est sans doute plus nécessaire qu’ailleurs d’assumer des missions de continuité de service public auxquelles les opérateurs privés ne sont pas astreints. Le réseau étant par ailleurs financé par les contribuables, il est légitime que le plus grand nombre de nos concitoyens puissent écouter les stations. Pensez-vous avoir les moyens non seulement de fidéliser vos auditeurs sur l’ensemble du territoire mais également de permettre une meilleure couverture du réseau, non seulement sur le plan quantitatif, mais aussi sur le plan qualitatif ?

M. Gérard Bapt. On a évoqué le départ du Mouv’ de Toulouse, où France Bleu est arrivée. Quels étaient les éléments objectifs qui imposaient la localisation de cette radio à Paris, alors même que les travaux dans la Maison de la Radio pénalisent actuellement de manière durable le fonctionnement des diverses chaînes ?

Ma seconde question, plus délicate, concerne l’objectivité de l’information. Les chaînes de Radio France sont réputées pour leur indépendance d’esprit qui est très appréciée. Je suis pourtant frappé par la manière dont est actuellement traité un sujet qui m’inquiète notamment en raison de mes responsabilités au sein de groupes parlementaires d’amitié : il s’agit de la façon totalement unilatérale dont est présentée la situation au Proche-Orient, notamment en Syrie et au Liban. Vos confrères belges revenus de cette région ont présenté une vision totalement différente, notamment pour ce qui concerne la situation de la population et de divers groupes par rapport au régime. Une inquiétude existe notamment quant au sort des chrétiens de Syrie que nous ne voudrions pas voir subir le même sort que celui des chrétiens d’Irak.

Est-ce que, sur ces plans, des démarches permettant d’obtenir une information que nous apprécierions comme particulièrement objective venant de Radio France pourraient être entreprises ?

M. Alain Rodet. Le rapport de Radio France retrace les efforts réalisés pour diversifier la grille de France Musique. Comment peut-on expliquer le fait que cette station ait une audience moindre que Radio Classique ? Pourtant, France Musique ne démérite pas, or son audience est sensiblement moins forte que celle de Radio Classique.

Mme Françoise Imbert. Députée toulousaine, j’entends défendre le droit à promouvoir les accents dans notre pays. Le service public de l’audiovisuel, dans un souci de diversité, ne devrait pas se contenter de promouvoir le seul accent francilien. France Bleu Toulouse vient de commencer ses émissions ; cela aurait pu être l’occasion de faire connaître cet accent typique.

Autre sujet, le budget accordé aux actions de sensibilisation du personnel au handicap est passé de 24 000 euros en 2009 à près de 130 000 euros en 2010. Peut-on y voir une politique d’intégration des personnes handicapées, de leur maintien dans l’emploi ? Allez-vous continuer cet effort nécessaire ?

M. Jacques Grosperrin. Vous avez récemment évoqué dans un hebdomadaire la situation délicate de Radio France à votre arrivée, du fait d’une érosion mécanique de l’audience. Vous déclarez également ne pas être sensible seulement aux sondages mais surtout à des radios de qualité, ce dont on peut se féliciter.

Le « coup de rabot » de deux millions d’euros a déjà été évoqué. L’orchestre national de France va-t-il en subir les conséquences, comme semble l’indiquer l’annulation de sa tournée en Amérique du sud ?

On nous dit par ailleurs que le coût de la RNT serait de l’ordre de la moitié du coût de la radio analogique. Enfin, quid de la Maison de la Radio et de cet auditorium européen que nous attendons tous avec grand plaisir ?

Mme Murielle Marland-Militello. Mes questions portent sur la démocratisation culturelle. Je suis très intéressée par l’augmentation de la durée de mise à disposition de vos émissions en différé sur internet. En juillet 2010, vous avez conclu un nouvel accord avec les sociétés d’auteurs, notamment la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), afin d’accroître votre offre légale sur internet tout en garantissant une juste rémunération des auteurs pour l’exploitation de leurs œuvres. Pouvez vous nous donner des informations plus précises sur le contenu de cet accord, notamment le nombre d’œuvres rendues disponibles pour les internautes ?

Par ailleurs, je souhaiterais savoir si Radio France envisage de demander le label de promotion des usages responsables (PUR) délivré par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), afin de renforcer la visibilité de son offre légale.

Enfin, comment Radio France prévoit-elle de s’investir davantage dans l’augmentation de l’offre légale délinéarisée ?

M. Michel Pajon. S’agissant du statut des personnels, je souhaiterais connaître le nombre de stagiaires, de salariés en contrats à durée déterminée ou à temps partiel qui participent à l’activité de Radio France. Dans quel état d’esprit ces personnels sont-ils recrutés ? S’agit-il de faire face à la surcharge de travail ponctuelle liée à la suppression de postes fixes, ou Radio France se propose-t-elle de répondre de manière pérenne à la logique de formation et d’intégration professionnelle de ces catégories ?

Mme Marie-Josée Roig. Vous consacrez un budget important à la rénovation de votre patrimoine, notamment aux auditoriums et au développement des moyens techniques. Quelle politique mettez-vous en œuvre afin de préserver votre patrimoine culturel et de favoriser son accessibilité au public ?

M. Jean-Luc Hees. Je me félicite de l’intérêt pour Radio France dont témoignent vos nombreuses questions.

En ce qui concerne RFI, nous sommes tous très attachés à cette radio. J’y ai travaillé, c’est une radio qui pendant un temps a fait partie de Radio France, j’ai beaucoup de respect pour le travail qui y est accompli dans des conditions parfois difficiles.

Pour autant, je suis tenu à un devoir de réserve et il ne m’appartient pas de commenter les décisions prises par les autorités de tutelle de RFI, notamment sur la fusion entre RFI et France 24.

Je préciserai simplement que lorsque nous avons pris en charge le chantier de la Maison de la Radio, « la messe étant dite », nous avons été obligés d’assumer les conséquences de décisions qui ne nous concernaient pas directement. Lorsque l’on nous a annoncé que RFI allait déménager, nous en avons pris acte. Dans le « phasage » du chantier, nous avons intégré cette perspective. Or le déménagement de RFI a été compliqué par de nombreux décalages, ce qui complique la gestion du calendrier de réhabilitation de la Maison de la Radio. Aux dernières nouvelles, le déménagement de RFI interviendrait à la fin du premier semestre 2012. Pour ce qui me concerne, je m’efforce de m’adapter à toutes les situations et décisions prises, comme c’est mon devoir. Je ne fais pas de politique ; c’est votre rôle, mesdames et messieurs les députés. Je ne peux envisager ce dossier qu’en tant que « déménageur », même si je ne retire rien à ce que j’ai dit sur la fusion entre la télévision et la radio.

S’agissant de la radio numérique terrestre, son déploiement est compliqué pour des raisons financières. Les Français ont en moyenne six transistors, placés partout dans leur maison, et vivent encore dans l’univers de l’analogique.

Mais les choses peuvent évoluer très vite, comme on l’a vu dans le domaine du téléphone portable. En Allemagne, un million de récepteurs numériques ont été vendus en trois mois alors que le marché était inexistant puisqu’il n’y avait pas de radio numérique. L’argument du coût de l’équipement est donc fallacieux. Si un fabricant astucieux de récepteur numérique propose un bel objet, à l’image de l’iPhone, il en vendra sans aucun doute. Il s’agit là de politique industrielle et de politique tarifaire. En Allemagne, on peut trouver des récepteurs entre 40 et 500 euros.

Les difficultés résident plutôt dans l’attitude des éditeurs de radios, qui, pour certains, défendent des positions différentes selon qu’ils se trouvent à Paris, à Bruxelles ou à Berlin.

À cela s’ajoutent des difficultés de financement : nos frais de diffusion pour la FM s’élèvent à environ 80 millions d’euros. Nous avons fait réaliser une étude qui montre que ces frais peuvent être diminués de moitié grâce à la radio numérique terrestre. Mais la double diffusion pendant plusieurs mois en numérique et en analogique occasionnerait nécessairement des surcoûts, sauf à imaginer un basculement général vers le numérique comme ce fut le cas pour la télévision numérique terrestre. Mais la TNT a toujours été associée à une offre de services supplémentaires. La RNT n’a jamais été présentée de cette façon, ce qui est d’ailleurs une erreur.

Si on se penche attentivement sur la question, et c’est le travail de M. Joël Ronez, directeur des nouveaux médias, entre la radio sur internet ou sur iP, que l’on nous vante tant et qui va se développer, et les produits et services que l’on pourrait offrir sur la RNT, il y a peut être plus de complémentarité que ce que l’on peut imaginer.

Nous avons toujours peur de la dégradation de la qualité de notre service. On le voit avec le développement des téléphones, où développement et qualité de services ne vont pas toujours de pair. Cependant, nous ne sommes pas pour ou contre la radio sur iP, cela n’aurait pas de sens ; cela vaudrait la peine de réfléchir aux opportunités que pourrait offrir l’investissement que requiert la RNT.

S’agissant de la norme, je rappellerai que Radio France est à l’origine de la norme DAB+ dans le début des années 1980. Je souhaiterais que nous puissions continuer à être pionniers. Tout le monde s’intéresse à la norme DAB+ car elle est moins coûteuse. Cela pose quelques difficultés à un groupe comme le nôtre car nous avons un multiplexe de diffusion, et nous souhaitons rester indépendants à l’intérieur de ce dernier. Accueillir d’autres opérateurs dans ce multiplexe nous apparaît problématique, même si cette considération ne fait pas partie des critères en fonction desquels le CSA a vocation à se déterminer.

En ce qui concerne Le Mouv’, nous ne sommes pas parisianistes. S’agissant d’une radio nationale, qui au demeurant manque de fréquences, il est indispensable d’être situé là où l’actualité culturelle, l’information et les débats se concentrent. Depuis l’installation du Mouv’ à Paris, nous accueillons beaucoup plus d’artistes, de personnalités politiques…

J’ai été interrogé sur la convention collective : dans les textes qui ont été présentés au personnel de Radio France, nous avons effectivement fait des choix. De mon point de vue, le paritarisme a freiné certaines carrières à Radio France. Or le mérite doit compter, et j’estime que c’est l’une des responsabilités attachées aux fonctions de direction que de pouvoir gérer la promotion des personnels. C’est d’autant plus vrai dans une maison où la réactivité et le talent revêtent une particulière importance, même si l’autogestion a sans doute des vertus. Je peux me tromper, mais j’ai l’impression qu’une bonne partie des personnels de Radio France partage cette façon de voir.

S’agissant des risques psychosociaux, des études sont en cours, et leur vertu pédagogique est indéniable et indispensable. Chacun doit être sensibilisé sur ces risques, que l’on a tendance à minimiser.

Par ailleurs, j’ai été interrogé sur le label « PUR », qui est sans doute intéressant, mais ma priorité est actuellement le label « diversité ». Il s’agit d’un très gros chantier, pour lequel la bonne volonté ne suffit pas. Nous avons d’ores et déjà de bons résultats, dont je m’enorgueillis, mais nous devons poursuivre nos efforts, notamment à l’égard des femmes.

En ce qui concerne l’auditorium, c’est un chantier que j’ai trouvé à mon arrivée, mais je me suis mis à l’aimer. Nous avons quatre formations musicales et nous sommes en résidence un peu partout, d’autant que nous n’avons plus la possibilité de faire de la musique à la Maison de la Radio. Nous avons besoin de faire résonner nos formations musicales, et nous nous sommes demandés comment assurer la meilleure exploitation possible de cet auditorium, qui sera un magnifique instrument et qui donnera du prestige à nos formations. L’exploitation peut d’ailleurs aller bien au-delà de la musique, et j’ai tout de même un petit regret lié au choix d’un auditorium purement symphonique. Son ouverture est prévue le 19 décembre 2013.

S’agissant des coûts d’exploitation, je rappelle que nous avions deux studios à la Maison de la Radio, le 104, qui est en rénovation et va poursuivre son activité, et le 103 qui était un lieu de répétition. Une équipe est en train de se constituer qui va construire une programmation en fonction de cet outil, sans concurrencer la Philharmonie de Paris ou d’autres. Cela suppose une autre ambition pour la programmation de nos grands studios.

Concernant les ressources propres, la publicité représente 7 % du budget et Radio France a pu améliorer ses performances, grâce aux succès de ses antennes, ce qui nous permet de mieux négocier nos tarifs publicitaires. Nous suivons toutefois une ligne de conduite absolue, celle de « l’espace préservé » : les antennes du service public ne doivent pas devenir des réservoirs à publicité et nous n’entendons pas bouleverser l’équilibre économique des autres médias.

Les podcasts représentent le meilleur point d’entrée pour accéder à nos programmes et nos offres culturelles. Ainsi, les sites de France Culture et du Mouv’ sont des vecteurs privilégiés pour faire connaître ces radios auprès du grand public.

Concernant Le Mouv’, les audiences ne sont pas encore au rendez-vous et je l’assume, mais il s’agit d’un beau produit à l’intention d’un public qui le mérite. Je ne doute pas que le succès couronnera cette réalisation si la qualité est là. J’ai pu constater à cette occasion qu’il est plus facile de faire naître une radio que d’en faire renaître une. Il existe dans les équipes un esprit nouveau qui privilégie l’alliance de l’information et du programme. Je suis très optimiste en ce qui concerne les futures performances de cette radio.

Au sujet de la couverture offerte par France Bleu, il n’existe aucune raison pour que seuls les trois quarts du territoire national aient accès à cette radio. France Inter et France Bleu ont une mission de service public d’information de tous les Français en situation de crise grave et pour l’exercer, elles doivent avoir accès aux fréquences, même si je suis conscient que ce type de ressource est devenu un bien rare. Pour France Inter, qui couvre 95 % du territoire, le problème ne se pose pas. Tel n’est pas le cas pour France Bleu. Je compte introduire un recours devant le Conseil d’État suite à une récente décision du CSA refusant des fréquences à France Bleu. La RNT pourrait d’ailleurs permettre de remédier à cette pénurie.

Pour ce qui est du « coup de rabot » budgétaire, il m’a été reproché d’avoir pris acte de cette mesure d’économies avant même l’examen de celle-ci par le Sénat. J’ai agi avec la rapidité qui convient à un chef d’entreprise en annulant une tournée de l’orchestre national à Rio de Janeiro, dont les motivations profondes ne m’apparaissaient pas évidentes. Je n’ai aucun regret à ce sujet.

Je ne peux pas contrôler les accents régionaux des animateurs sur tout le réseau. Je suis normand, j’ignore si j’ai un accent, mais je n’ai pas la volonté d’imposer l’accent francilien sur toutes les antennes. Qu’il me suffise de dire à ce propos que j’ai couru toute ma vie après Jean-Michel Apathie pour qu’il travaille à France Inter…

Concernant Saint-Étienne, nous espérons que cette nouvelle antenne pourra ouvrir avant la fin de l’année 2012. Mais une telle création nécessite des redéploiements, en fonction des bassins d’audience. Ce mot n’est plus tabou aujourd’hui, les esprits évoluent dans la bonne direction, et tout ceci s’opère dans la concertation.

Au sujet de la négociation avec les sociétés d’auteurs, elle est quasiment achevée avec les éditeurs de musique. Avec la SACEM, nous avons obtenu de bons accords. Pour les éditeurs de musique, la négociation est conduite dans un cadre international et se révèle plus compliquée, avec de nombreux avocats spécialisés comme interlocuteurs.

Enfin, pour ce qui est de la politique du personnel, Radio France continue à embaucher tout en respectant scrupuleusement les indicateurs prévus dans le COM et, grâce à son Académie et une politique de formation particulièrement active, elle intègre mieux ses salariés. Radio France est attachée au principe de diversité et a par exemple, depuis quelques années, une convention avec un lycée de Seine-Saint-Denis axée sur l’intégration d’apprentis-techniciens.

M. Jérôme Cahuzac, président. Monsieur le Président Hees, nous vous remercions.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 14 décembre 2011 à 9 h 30

Présents. - M. Jean-Pierre Balligand, M. Gérard Bapt, M. Jean-Marie Binetruy, M. Pierre Bourguignon, M. Michel Bouvard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Bernard Carayon, M. Thierry Carcenac, M. Yves Censi, M. Jérôme Chartier, M. Alain Claeys, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Dassault, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, M. Nicolas Forissier, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. François Goulard, Mme Arlette Grosskost, Mme Pascale Gruny, M. David Habib, M. Laurent Hénart, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Patrick Lemasle, M. Hervé Mariton, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Claude Mathis, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Jacques Pélissard, M. Alain Rodet, M. François de Rugy, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Sapin, M. François Scellier, M. Michel Vergnier

Excusés. - M. Dominique Baert, M. Jean-Yves Cousin, M. Jean-Claude Flory, Mme Annick Girardin, M. Alain Joyandet, M. Marc Le Fur, M. Victorin Lurel, M. Richard Mallié, M. Jean-François Mancel, M. Gaël Yanno

Assistait également à la réunion. - M. Pascal Terrasse