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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 7 mars 2012

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 68

Présidence de M. Jérôme Cahuzac,
Président,
puis de M. Dominique Baert,
Secrétaire

–  Examen d’un rapport d’information sur la situation financière et les perspectives d’Électricité de France et d’Areva (MM. Marc Goua et Camille de Rocca Serra, rapporteurs spéciaux)

–  Examen d’un rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) relatif aux suites données aux propositions de la MEC au cours de la XIIIème législature (MM. Olivier Carré et David Habib, rapporteurs)

–  Présences en réunion

La Commission examine un rapport d’information sur la situation financière et les perspectives d’Électricité de France et d’Areva (MM. Marc Goua et Camille de Rocca Serra, rapporteurs spéciaux).

M. Marc Goua, rapporteur spécial. Le bureau de la commission des Finances nous a chargé, le 21 juin 2011, d’une mission d’information sur la situation financière et les perspectives d’Électricité de France et d’Areva.

Tout d'abord, je voudrais revenir sur les difficultés que nous avons rencontrées pour collecter certains éléments, notamment auprès de l'Agence des Participations de l'État et d'Areva. Ces éléments nous ont finalement été communiqués au prix de fortes pressions. Je tenais à le signaler.

Je tenterai de faire une courte présentation globale du rapport, avant les compléments de Camille de Rocca Serra, afin de laisser place à un échange qui ne manquera pas d'avoir lieu.

Le rapport d’information sur la situation financière et les perspectives d’Électricité de France et d’Areva, dont nous vous proposons l’examen aujourd’hui, se présente en trois parties : la première synthétise les données contenues dans le rapport de la Cour des comptes sur les coûts de la filière électronucléaire française rendu public en janvier dernier. EDF et Areva étant les deux exploitants les plus importants de cette filière, ce rapport a été pour nous un solide support pour identifier les enjeux financiers auxquels ces entreprises vont être confrontées à l’avenir compte tenu de leur environnement industriel particulier ; les deux autres parties traitent de l’analyse économique et financière proprement dite de chacun des deux groupes, successivement EDF puis Areva.

En tant qu’entreprises représentant la filière nucléaire de notre pays, EDF et Areva sont soumises à des contraintes de gestion particulières ayant un impact direct sur leur structure financière.

La production d’électricité nucléaire a en effet pour particularité d’engendrer des coûts extrêmement importants à l’issue de la période de production. Les entreprises examinées doivent donc être en mesure de faire face aux charges futures concernant le démantèlement des installations à la fin de leur exploitation, la gestion des combustibles usés et celle des déchets radioactifs.

Le rapport de la Cour des Comptes sur les coûts de la filière électronucléaire nous a grandement aidés dans notre tâche. Elle établit les constants suivants : tout d’abord, l’estimation des charges futures incombant aux entreprises exploitantes se caractérise par un niveau d’incertitude assez élevé, compte tenu des nombreux paramètres à prendre en compte.

Fin 2010, le total de ces charges futures est estimé, pour l’ensemble des opérateurs, à 79,4 milliards d’euros. La part que devront supporter EDF et Areva représente respectivement 78 % et 13 % de ce montant.

La loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire prévoit que les exploitants intègrent dans leurs bilans les provisions nécessaires pour couvrir l’ensemble des coûts futurs. Ces charges futures sont bien provisionnées dans les comptes des deux entreprises examinées, pour un total de 33,9 milliards d’euros fin 2010, dont 28,3 milliards pour EDF et 5,6 milliards pour Areva.

La loi prévoit également qu’une partie de ces provisions soit constituée d’actifs dédiés, à hauteur de 46 % pour EDF et de 54 % pour Areva. La situation est actuellement plus satisfaisante pour Areva dont le portefeuille d’actifs couvre à 102 % les provisions nécessaires. Le taux n’est que de 88 % pour EDF.

Cependant, la probabilité que l’estimation actuelle de ces charges futures soit revue à la hausse est forte.

Les dépenses futures pour le démantèlement des 58 réacteurs du parc actuel géré par EDF sont évaluées par l'entreprise à 18,4 milliards d’euros, une estimation considérée comme basse par la Cour des comptes, qui valide la méthode de calcul mais souligne que les devis ont souvent tendance à être corrigés à la hausse au moment de l’exécution des travaux.

Un autre coût futur important est lié à la gestion à long terme des déchets radioactifs, pour un montant total estimé à 28,4 milliards d’euros. Cette estimation est très incertaine car dépendante des décisions à venir sur la poursuite du projet de centre industriel de stockage réversible géologique profond.

Enfin, la Cour des comptes note que la donnée apparaissant comme la plus déterminante est liée à la durée de fonctionnement de nos centrales, prévues initialement pour fonctionner 30 ans. Un horizon de 40 ans a cependant été rapidement admis par l’ensemble des acteurs de la filière. Or, nos centrales sont vieillissantes : en 2012, la moyenne d’âge du parc est de quasiment 27 ans ; 22 réacteurs sur 58 auront atteint 40 ans d’ici 2022 ; et la totalité des 58 réacteurs aura plus de 40 ans en 2050.

Cela signifie que pour conserver le niveau de production d’électricité actuel, la France devrait construire 11 EPR d’ici la fin de l’année 2022, une performance qui ne paraît pas réalisable, tant sur le plan financier qu’industriel.

Ce contexte pousse à la décision de tout mettre en œuvre pour que la durée de vie des centrales en France soit prolongée au-delà de 40 ans. D’ailleurs, sous réserve des autorisations délivrées par l’Autorité de sûreté nucléaire – l’ASN –, EDF travaille déjà sur une hypothèse de durée de vie des centrales portée à 60 ans.

Cette décision est doublement stratégique dans le sens où elle conditionne le nombre d’années durant lesquelles les investissements initiaux sont amortis et repousse à plus long terme les dépenses de démantèlement et le besoin d’investissement dans de nouvelles installations de production.

Elle n’interdit pas de préparer l’évolution vers un mix énergétique différent. La stratégie énergétique nationale à venir reste encore à définir et mériterait un débat public, explicite et transparent sur les coûts économiques et sociétaux des différentes options.

Néanmoins, la perspective de l’arrêt de 22 réacteurs sur les 58 que compte la France, dans à peine dix ans, impose le prolongement du fonctionnement des centrales nucléaires comme une solution transitoire qui apparaît inévitable faute d’une préparation suffisante aux besoins à venir.

La Cour des comptes relève notamment la faiblesse des investissements menés en ce domaine depuis une vingtaine d’années. Nos travaux nous ont amenés à penser que cette situation n’est pas sans lien avec les choix stratégiques opérés, jusqu’à récemment, par EDF - en particulier son évolution à l’international.

S’agissant d’EDF, nous avons, notamment, constaté que depuis son introduction en bourse en 2005, l’entreprise a nettement privilégié son développement international. Il s’agissait pour elle de prendre sa place dans le « renouveau nucléaire » qui s’affirmait à travers le monde, afin, en particulier, de faire face au nouveau contexte concurrentiel européen, mondial et même national.

Cette stratégie de conquêtes externes est sans nul doute vitale pour l’entreprise. Mais elle l’a engagée dans de lourds investissements, au Royaume-Uni et aux États-Unis par exemple, lesquels ont pesé, et pèsent toujours, sur les capacités de l’entreprise à faire face à ses engagements nationaux. Pour mener à bien ces opérations de croissance externe, le groupe recourt en effet massivement à des emprunts obligataires, d’où le doublement de son endettement financier net depuis 2007.

Parallèlement, si la contribution du périmètre international au chiffre d’affaires du groupe a beaucoup progressé, ses marges opérationnelles n’ont pas suivi au même rythme. EDF a même été contrainte de passer d’importantes provisions au titre de ces opérations internationales en 2010 (à hauteur de 2,4 milliards d’euros). Le fait est que cette stratégie, ainsi qu’une tendance à privilégier la rentabilité à court terme, a conduit l’entreprise à maintenir, jusqu’à récemment, un relatif sous-investissement dans l’outil de production d’électricité français.

Ces retards ne remettent pas en cause la sûreté des structures ; mais ils ont été à l’origine d’une moindre productivité et n’ont, surtout, pas permis de préparer la suite d’un parc de centrales nucléaires vieillissantes.

EDF doit désormais assurer un programme d’investissements de maintenance lourde (pour le prolongement de la durée de vie des centrales) estimé au minimum à 55 milliards d’euros, avec, vraisemblablement, une accélération de leur mise en œuvre pour répondre aux préconisations de l’ASN.

Mon collègue Camille de Rocca Serra, vous exposera comment le groupe envisage d’affronter financièrement ces enjeux nationaux, tout en menant à bien ses projets externes dont la rentabilité devrait s’affirmer à terme.

En tout état de cause, les mesures à prendre pour assurer une sûreté nucléaire optimale et sécuriser l’approvisionnement électrique de la France ont été rappelées comme les priorités absolues de l’entreprise.

Pour soutenir EDF dans son rôle national, nous soulignons la nécessité de ramener la contribution au service public de l’électricité (CSPE) à un niveau qui annule le solde déficitaire supporté par l’entreprise au titre de cette compensation depuis deux ans. Un aménagement a été adopté en loi de finances pour 2011 afin de résorber progressivement un déficit qui représente déjà plusieurs milliards d’euros en cumul. Pour rectifier, à un rythme soutenable pour le groupe EDF, ce que nous considérons comme une anomalie économique illégitime, il est important que cette taxe progresse dans les années à venir au moins dans les proportions préconisées par la Commission de régulation de l’énergie.

Quant à Areva, l’entreprise a enregistré une nette dégradation de ses performances économiques entre 2007 et 2011.

Plusieurs raisons clairement identifiées expliquent ce constat : d’abord, le surcoût généré par le chantier de l'EPR finlandais commandé par l'électricien TVO. Ce projet, évalué initialement à 3 milliards d'euros, atteindrait aujourd'hui un coût global de 6 milliards d'euros. Plusieurs raisons expliquent ce doublement, notamment une vision optimiste de la construction et des difficultés constantes avec le client. Par ailleurs, le manque d'expérience d'Areva en tant que maître d'œuvre a souvent été mis en avant. Néanmoins, EDF semble connaître les mêmes difficultés pour l'EPR de Flamanville.

Deuxième raison : l'acquisition d'UraMin, pour un coût global de 2,8 milliards d'euros en comptant les investissements réalisés par la suite (de l’ordre de 900 millions). Je reviendrai plus en détail sur ce sujet en fin de présentation.

J’y insiste : l'industrie nucléaire est une industrie à forte intensité capitalistique. Les investissements sont énormes et les retours sur investissement se déroulent selon des cycles très longs. Dans ce cadre, Areva, par la voix de son ancienne direction, avait demandé à maintes reprises une augmentation substantielle de capital (jusqu’à 3 milliards d’euros) à son actionnaire, l'État. Au lieu de cela, elle a dû accepter de céder la filiale T&D et l'augmentation de capital n'a été que de 900 millions d'euros.

Enfin, s’agissant plus précisément de l'acquisition de la société UraMin, pour qu’elle soit comprise et analysée, elle doit tout d'abord être replacée dans son contexte.

Cette acquisition est intervenue en 2007 dans un contexte d'envolée du cours des matières premières dans leur ensemble. L'uranium n’a pas été épargné ; il avait triplé en un an pour atteindre 120 USD la livre au moment de l'acquisition. Des analyses de l'époque faisaient par ailleurs mention d'un risque de pénurie.

La stratégie d'Areva était claire, cohérente et volontariste. Son objectif était à la fois de sécuriser ses approvisionnements de combustibles, tout en diversifiant ses sources d'extraction : sa mine de Cigar Lake au Canada était en effet fermée suite à une inondation et l'entreprise considérait être trop dépendante du Niger où elle rencontrait des difficultés croissantes pour l'obtention de nouveaux permis d'exploitation.

Cela avait d’ailleurs conduit l’entreprise à examiner d’autres projets d’acquisition dans le passé, dont certains (tels que l’australien Olympic Dam qui aurait possédé 25 % des réserves mondiales) n’ont pu être mis à exécution car, aux dires de l’APE, « insuffisamment instruits, du point de vue de l’APE, et pénalisés par un questionnement excessif de l’actionnaire, du point de vue de l’entreprise. »

Une étude sur les sociétés minières juniors susceptibles d'intéresser Areva a donc été entreprise ; et au vu des capacités financières relativement limitées du groupe, seule UraMin rentrait dans ce cadre.

De nombreuses discussions entourent l'envolée de la valeur du titre UraMin à la bourse de Toronto. Cette dernière est explicable par plusieurs facteurs : d'une part, la hausse vertigineuse du cours de l'uranium, d'autre part, l'intérêt manifesté par Areva en acquérant 5,5 % du capital d'UraMin, et enfin, une communication « habile » des dirigeants d'UraMin. Je signale qu’une sénatrice canadienne s’intéresse aujourd’hui au parcours boursier de cette société.

L'acquisition s'est faite sur la base de plusieurs rapports : le rapport SRK (un cabinet qui fait autorité dans le milieu) mandaté par UraMin ; un rapport de la banque d'affaires Rothschild, plus financier, qui concluait que le prix proposé était « conservateur ». Enfin, dans le rapport d'étape figurant en octobre dans mon rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2012, je m’interrogeais sur le manque de contre-expertise d'Areva. Or, des géologues de l'entreprise se sont penchés sur ce dossier et ont émis quelques réserves.

En ce qui concerne la présentation à l’Agence des participations de l’État et aux organes sociaux d’Areva, il faut prendre en compte l’asymétrie d’information qui intervient inévitablement entre contrôleur et contrôlé. La présentation par Areva de cette future opération a été très complète, comme le reconnaît d'ailleurs l'ancien directeur général de l'APE. Il considère bien « être allé très loin dans l’analyse », évoquant « l’intensité du dialogue » et « le nombre des assurances données ». Néanmoins, il semble bien que les commentaires des géologues d'Areva aient été présentés sous un angle favorable, très technique et gommant quelques aspérités.

Cependant, ces réserves n'étaient pas suffisantes pour refuser l'opération au vu de la masse de documents transmis par l'entreprise. L’opération a été validée par l'APE et le ministre de l'époque. En effet, si aucun arrêté ministériel n'est obligatoire pour la réalisation d'une telle opération, en l'absence de réserve du ministère, nous pouvons considérer que « qui ne dit mot consent ».

Le contexte de 2007, indiqué précédemment, la volonté de l'entreprise de sécuriser ses approvisionnements, la pression des clients et l'habileté des actionnaires d'UraMin ont engendré une hausse, sans doute spéculative, des cours de la société cible.

Qu'en est-il aujourd'hui de l’évaluation des potentialités des trois gisements d'UraMin ?

Ils avaient été présentés par le vendeur et le rapport du cabinet SRK pour une capacité d'extraction de 90 000 tonnes, et acquis sur la base d'une potentialité de 60 000 tonnes retenue par le plan d’affaires, par ailleurs basé sur un cours à 75 dollars la livre. À ce jour, les 60 000 tonnes sont confirmées, mais la répartition par site est différente : moins riche à Trekkopje ; plus généreuse à Bakouma ; très faible, pour ne pas dire inexploitable, en Afrique du Sud. De plus, la qualité et la densité du minerai est faible, voire médiocre, et les coûts d'exploitation supérieurs aux estimations. L'un des sites est difficilement accessible, obérant les coûts de mise en œuvre et d'extraction.

Ces éléments endogènes et, évidemment, la chute des cours de l'uranium qui a notamment suivi l'accident au Japon (le cours actuel se situe aux environs de 50 dollars) rendent l'opération UraMin périlleuse, d'autant plus que le goodwill versé lors de l'acquisition tenait compte d'une mise en exploitation et d'une production rapides. Or, compte tenu des éléments précités, le coût d'extraction comparé aux cours actuels du minerai ne permet plus
–  pour l'instant, espérons-le – de réaliser les investissements nécessaires pour assurer la production dans des conditions économiques viables.

Selon les dirigeants d’Areva, la dégradation des actifs d'UraMin opérée depuis deux exercices se rapporte pour 40 % aux gisements et pour 60 % à l’impact et aux conséquences de la chute des cours. Ces provisions, conjuguées aux décaissements nécessaires pour faire face au surcoût de l'EPR finlandais dont le coût est passé de 3 à 6 milliards d'euros, rendent la situation financière d'Areva difficile.

Cela aboutit à la révision du plan stratégique du groupe et suppose des économies substantielles sur les frais de fonctionnement et des choix dans les investissements.

Que conclure, à la date d'aujourd'hui, sur cette acquisition avec les éléments dont nous disposons ? Une acquisition payée chère. Trop chère ? L’avenir le dira. Pas assez de vigilance en interne et en externe. Pourquoi l'APE ne s'est-elle pas entourée de conseils d'experts, tels que le Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM ? Et pourquoi l'APE n'a-t-elle pas vérifié les affirmations de l'entreprise sur la revente imminente de 49 % des parts d'UraMin à un consortium chinois ?

De plus, en dehors de cette étude factuelle sur l'acquisition d'UraMin, l'APE devrait pouvoir analyser les conséquences pour l'entreprise d'une stratégie qui comprenait à la fois ses acquisitions et des risques industriels pris à travers la mise au point et la construction d'une centrale de nouvelle génération : le prototype de l’EPR.

Pour mener à bien cette stratégie, il eût fallu renforcer les fonds propres du groupe avec une augmentation substantielle du capital ; précisons que la présidente avait sollicité de 1,5 à 3 milliards d’euros.

Tout cela pose globalement la question du rôle de l'APE et de la gouvernance des entreprises publiques.

Il n'en reste pas moins que la stratégie intégrée d'Areva présente des avantages et que les perspectives du groupe sont intéressantes, nonobstant un renforcement des fonds propres qui devra se réaliser car l'intensité capitalistique du secteur ne peut être ignorée.

M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial. Monsieur le Président, avant de compléter la présentation du rapport, je souhaiterais insister sur la qualité du travail réalisé en commun avec Marc Goua. Le sujet était sensible, techniquement difficile, et, malgré cela, nous avons abouti à une analyse partagée et à des conclusions communes. Je crois que ce rapport qui nous a réunis pourrait être signé par toute personne raisonnable qui s’intéresse à la filière nucléaire. Jusqu’au bout de la législature, la commission des Finances aura donc conservé sa tradition d’analyse objective et de consensus.

Si nous avons dégagé de grandes lignes de consensus, je souhaiterais toutefois apporter quelques nuances sur certains points évoqués par Marc Goua.

En premier lieu, j’estime que les travaux de l’Autorité de sûreté nucléaire et le récent rapport de la Cour des comptes remis à la demande du Premier ministre apportent l’ensemble des éléments nécessaires à un débat éclairé.

En deuxième lieu, je crois qu’il faut relativiser l’avis de la Cour des comptes sur le fait que la prorogation de la durée de vie des centrales s’imposerait à nous sans qu’aucune décision explicite n’ait été prise. L’abandon de Superphénix à la fin des années 1990 et la décision d’EDF, en 2003, de rallonger de dix ans la durée d’amortissement de ses installations nucléaires ont donné une claire orientation à la politique nucléaire française et ne peuvent être considérés comme des décisions implicites.

Enfin, en ce qui concerne le mix énergétique, je pense que tout le monde s’accordera à dire que, compte tenu de la prorogation de la durée de vie des centrales, il ne pourra évoluer avant 2050 et que toute modification antérieure à cette date sera particulièrement coûteuse pour les consommateurs.

Notre tâche consiste donc à donner une visibilité de long terme aux exploitants qui doivent investir sur très longue période – près de cent ans s’écoulant entre la pose de la première pierre d’une centrale nucléaire et son démantèlement.

Ces précisions étant faites, je souhaiterais, pour ma part, insister sur la question de la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire et sur les exigences de sûreté qui y sont associées. À cet égard, il y a deux certitudes étayées par le rapport :

– d’une part, la prolongation de la durée de vie des centrales actuelles est la solution la moins onéreuse tant pour EDF que pour les consommateurs ;

– d’autre part, aucun compromis ne saurait être fait sur le niveau de sûreté des centrales ainsi prolongées.

Tous les travaux nécessaires seront donc déterminés par l’Autorité de sûreté nucléaire sur des critères techniques. En aucun cas, le critère financier ne devra entrer en ligne de compte pour déterminer le niveau de sûreté.

Ce postulat étant posé, se pose immédiatement la question de la capacité d’EDF à supporter la charge financière associée à ces investissements tout en poursuivant son développement à l’étranger et en continuant à verser un dividende substantiel. Sur ce point, le rapport montre que, sur la période 2012-2015, EDF sera en mesure de faire face sur ces trois fronts à une double condition :

– que la croissance de son résultat soit conforme à ses prévisions (croissance annuelle de l’excédent brut d’exploitation de 5% en moyenne) ;

– que le déficit lié à la CSPE soit résorbé, comme prévu, à horizon 2015.

Si ces conditions ne sont pas remplies, EDF devra savoir que la sûreté du parc nucléaire français est une priorité absolue et que des arbitrages devront être faits sur les autres investissements, notamment sur le développement à l’international.

L’autre point central du rapport est l’affaire « UraMin ». Les conclusions que nous avons tirées de notre travail d’investigation sont dans la ligne des premiers rapports publiés à l’automne. Plusieurs points méritent d’être soulignés.

En premier lieu, au moment de sa réalisation, une telle opération faisait sens, dans la mesure où l’on anticipait une hausse durable du cours de l’uranium et où Areva connaissait divers problèmes sur ses mines nigériennes et canadiennes.

En deuxième lieu, l’opération avait été conditionnée par l’APE à l’entrée au capital de la future filiale de partenaires – un partenaire chinois ayant été pressenti. Areva n’a pas respecté cette condition.

Enfin, je souhaiterais apporter à cette affaire mon éclairage particulier de rapporteur spécial pour les participations de l’État. L’État actionnaire n’a pas réuni l’ensemble des moyens à sa disposition pour se faire une opinion éclairée sur l’opération car l’expertise du BRGM n’a pas été mobilisée.

Toutefois, le point important à retenir dans cette affaire est la profonde asymétrie d’information entre l’APE et les entreprises qu’elles contrôlent. L’ancienne direction d’Areva, en effet, semble n’avoir pas transmis l’ensemble de l’information pertinente sur l’acquisition, en particulier certains rapports d’experts alertant sur des incertitudes quant au bien-fondé de l’opération. EDF, pour sa part, disposait d’une analyse qui l’avait conduit à refuser l’opération mais n’a pas transmis ces informations à l’APE.

En dépit de ses efforts et de son expertise, l’APE ne pouvait donc être en mesure d’évaluer correctement l’opération. Ce problème structurel auquel l’État actionnaire est confronté pourrait, à mon sens, faire l’objet, au cours de la prochaine législature, d’un travail de la commission des Finances.

La commission des Finances avait été, en 2003, à l’origine de la création de l’APE avec le rapport de notre collègue Michel Diefenbacher réalisé après l’affaire « France Télécom ». Après l’affaire « UraMin », je crois qu’une nouvelle réflexion sur le renforcement de l’État actionnaire doit être engagée et que, dans cette perspective, l’attachement de notre Commission à l’objectivité et au consensus sera précieux pour définir les évolutions souhaitables.

M. Michel Diefenbacher. Quand l’Agence des participations de l’État a été créée en 2003, il s’agissait de remédier aux carences de la gouvernance des entreprises publiques ; on constatait que la tutelle, trop technique et beaucoup trop tatillonne, avait du mal à percevoir les grands enjeux stratégiques du développement des entreprises publiques, notamment à un moment où les activités internationales augmentaient. Nous avions en particulier pointé du doigt les investissements quelque peu aventureux d’EDF en Amérique latine, en Argentine et au Brésil, auquel il a été mis fin d’ailleurs quelques temps après. Aujourd’hui, on se demande si l’Agence est en adéquation avec les missions d’un État stratège, car l’objectif fixé à l’époque n’a été que très partiellement atteint. De quelle nature est le problème ? Les compétences juridiques, techniques (il avait été prévu la possibilité de recruter des collaborateurs non seulement dans les services ministériels, mais aussi dans le secteur industriel privé) ou les moyens financiers manquent-ils à l’Agence ? À partir de l’exemple de ce secteur de la production d’électricité, quel est votre diagnostic ? Que faire pour que l’État ait vraiment une politique industrielle par le biais de ses entreprises publiques ?

M. Christian Eckert. Le rapport évoque un accord signé entre EDF et le groupe chinois CGNPC en avril 2010. L’accord prévoit que l’entreprise d’électricité chinoise puisse participer aux nouveaux projets nucléaires d’EDF en France et dans d’autres pays comme investisseur ou fournisseur de services. Comment analysez-vous cet accord de coopération et ne va-t-il pas un peu loin dans un domaine où la sécurité et la stratégie sont importantes ?

Par ailleurs, en ce qui concerne UraMin, est-il normal que le renoncement d’EDF, comme le retrait de l’entreprise chinoise CGNPC, n’ait pas attiré l’attention de l’APE ? Le ministre de tutelle, c’est-à-dire Mme Lagarde, a-t-il été saisi, informé et consulté ? Doit-on comprendre que pour une opération aussi importante, alors qu’EDF avait renoncé, pour des raisons certes d’ordre financier et d’opportunité, mais aussi après une analyse technique du dossier, il n’y ait pas eu d’avis ou de réaction du pouvoir politique de l’époque pour une opération aussi stratégique ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Les investissements de maintenance du parc EDF se sont traduits par une augmentation de 337 % entre 2007 et 2010. C’est considérable. J’ai noté que l’on avait pourtant pris beaucoup de retard en la matière, que cela avait généré des avaries sévères dans le parc actuel. Qu’en est-il de la programmation de remise à niveau du parc ? Quelle perspective de durée pouvons-nous escompter après cette remise à niveau des équipements ? Va-t-on parvenir à des niveaux de maintenance plus acceptable et d’investissement plus soutenable ?

Le tableau du rapport portant sur les besoins d’investissement prévisibles évoque trois orientations de financement : la croissance de l’EBE (excédent brut d’exploitation), l’augmentation de la dette ou la baisse de la créance liée à la contribution pour le service public de l’électricité. Une croissance de l’EBE aux environs de 6 % est-elle envisageable et soutenable durablement ?

M. Henri Emmanuelli. Je souscris à toutes ces remarques car ce n’est pas la première fois que l’on s’interroge sur le rôle de l’APE et que l’on constate la passivité de ses représentants. On a le sentiment d’avoir des gens très dépendants des choix politiques, davantage au service du ministre que des gestionnaires d’actifs. Nous élaborons des rapports de mission très intéressants mais nous n’allons jamais jusqu’au bout pour en tirer les conséquences. Y a-t-il eu dans ce cas précis rétention d’information ou non ? Il n’y a jamais de responsable désigné et le processus n’est jamais remis en cause pour manque de transparence ou autre raison.

Quant au versement du dividende : se préoccupe-t-on du dividende de l’État ou de l’indépendance énergétique de la France ? Il est temps qu’EDF se consacre à ses investissements plutôt qu’à rémunérer ses actionnaires, car à défaut, il y aura des réveils douloureux.

M. Jean-Louis Dumont. Je souhaite attirer l’attention de la commission sur la gestion des déchets. Indépendamment des choix à venir, il y aura un jour démantèlement des centrales nucléaires. Je rappelle, comme je l’ai fait auprès des chefs d’entreprise de la filière, que deux lois sont intervenues qui doivent s’appliquer, quelle que soit l’implication de M. Proglio, président d’EDF, ou de M. Oursel à Areva, qui n’est pas venu au dernier comité de haut niveau - ce qui montre l’importance qu’il y accorde, contrairement à son prédécesseur qui a été le premier chef d’entreprise à faire des investissements dans cette perspective. Les lois dites « Bataille » et « Loos », votées à la quasi-unanimité du Parlement, imposent à ces entreprises une démarche transparente et rigoureuse, qui a un coût, estimé dans le rapport. Même si le rapport cite le projet Cigéo, tel qu’il a été défini par l’ANDRA, une précision doit être apportée dans sa rédaction : lorsque le stockage des déchets est mentionné, il convient de préciser « stockage réversible en couche géologique profonde », car ce sont les termes de la loi, que nous devons faire appliquer.

Parmi les trois voies de recherche prévues par la loi - qui ne sont jamais mentionnées il faut le souligner, voire semblent oubliées, par le CEA tout particulièrement -, une seule a reçu un début de mise à exécution par un laboratoire dans ce pays. Je crois qu’il faut être attentif, chaque fois qu’il y a un rapport, de bien s’y référer.

Enfin, ayant eu l’occasion de siéger dans un conseil d’administration ou un conseil de surveillance, je constate qu’il y a des représentants de l’État actionnaire (qui peuvent être des hauts, voire des très hauts, fonctionnaires), mais aussi des administrateurs dits indépendants désignés pour leur faculté d’intervention. Que se passe-t-il à Areva comme à EDF pour que ces membres n’interviennent pas ? La loi n’est pas un paillasson et on peut s’étonner que certaines gouvernances d’entreprises publiques ignorent totalement les obligations de sûreté et de sécurité liées aux activités nucléaires.

M. François de Rugy. Le choix de prolonger la durée des équipements nucléaires à quarante ans au lieu de trente est-il déjà fait ? De même, y a-t-il eu un choix implicite, jamais débattu, de la prolongation à soixante ans, car les propos du conseil de la politique nucléaire sont ambigus sur ces perspectives ? Le coût du démantèlement, que vous évoquez dans le rapport, ne manque pas d’inquiéter sur le plan financier, sans même évoquer les autres aspects. Il est écrit que tous les exploitants ont fait le choix d’un démantèlement « immédiat » de leurs installations ; mais elles sont loin d’être démantelées. Les charges sont appelées à augmenter au fur et à mesure de l’évolution des devis. Mais s’il n’y a pas d’assurance sur les montants - ce qui fait consensus -, comment EDF financera-t-il le coût du prolongement de la durée de vie, puis du démantèlement ? Faut-il s’attendre à une ligne supplémentaire sur les factures EDF portant « contribution au démantèlement des centrales nucléaires » ?

M. Alain Rodet. Au cours des travaux des rapporteurs, la volonté d’une partie de la technostructure d’EDF de contrôler Areva et d’en faire une entité unique a-t-elle été évoquée et débattue ?

M. Louis Giscard d’Estaing. Ce sujet rappelle les feuilletons à épisodes que connaît la commission des Finances depuis deux législatures, avec par exemple la commission d’enquête dont Michel Diefenbacher a été le rapporteur, concernant des acquisitions antérieures et des prises de décision où le rôle de l’État actionnaire n’a pas été un exemple de transparence, ni d’expertise. On retrouve aussi les difficultés mises en relief lors de nos auditions consacrées à EADS et au rôle de l’Agence des participations de l’État. Le directeur de l’APE auditionné dans ce dossier est le même qu’à l’époque. Les propositions que vous faites concernant la gouvernance d’Areva sont-elles en voie d’application ? Le rôle d’expertise de l’APE s’est-il amélioré depuis nos précédentes investigations ?

M. Georges Ginesta. L’échec financier d’UraMin est souvent expliqué aujourd’hui par les fluctuations du prix de l’uranium, ce qui diminue la responsabilité des dirigeants. Mais deux phénomènes me paraissent mieux l’expliquer. Le premier est la sorte de séduction exercée par le vendeur en direction du futur acquéreur, dénoncée dans le rapport. Le second, mais le plus important car il obère l’avenir, est la faiblesse géologique inquiétante des gisements et le fait qu’on n’a pas écouté les ingénieurs géologues d’Areva, ni fait appel au BRGM. Or, en matière géologique, on sait qu’il existe toujours une part d’incertitude. C’est ce point qu’il fallait creuser. C’est là la faiblesse, pour l’avenir, de l’investissement qui a été fait, et non les futures courbes du prix de l’uranium.

Mme Sandrine Mazetier. Les rapporteurs doivent être remerciés pour leur travail mais ils doivent aussi développer l’épisode concernant le devoir d’information de l’État quand les intérêts nationaux, patrimoniaux par exemple, sont en jeu. On ne peut qu’être surpris de la décision prise par EDF de ne pas accompagner cette opération hasardeuse : elle aurait dû être justifiée auprès de sa tutelle, et appeler l’attention de celle-ci.

Vous évoquez dans le rapport les perspectives de charges d’emploi supplémentaires à venir, du fait de la démographie et de l’expertise plus grande qui devra éventuellement être exigée de personnels en matière de sûreté nucléaire. Le calendrier et le niveau d’embauche sont-ils adaptés aux orientations stratégiques prises ?

Je veux souligner aussi la disproportion inquiétante entre les importantes capacités d’autofinancement du groupe et les montants qu’il consacre à la recherche et à l’innovation. Quant on a dix milliards de capacités d’autofinancement chaque année, il n’est pas admissible de ne consacrer que 500 millions d’euros à la recherche sur trois axes énergétiques majeurs pour l’avenir que sont les énergies décarbonées, les réseaux Smart grids et la maîtrise de la demande. On peut s’interroger sur ce choix fait par le groupe alors que le développement de ces technologies est si déterminant pour le groupe, pour la filière comme pour la société en général.

M. Marc Goua, rapporteur spécial. Par rapport à la gouvernance exercée par l’APE, comment l’agence peut-elle être omnipotente et omnisciente, active et compétente sur l’ensemble du champ des entreprises publiques ? Le problème est là. On ne peut pas être excellent partout. Il faut s’attacher des compétences. Au cas présent, une des carences vient du fait qu’il n’a pas été fait appel au BRGM. Par ailleurs, si la concomitance entre l’achat et la revente d’une part du capital d’UraMin s’était réalisée, le coût pour Areva ne serait pas passé de 900 millions d’euros à 1,8 milliard. Il y a donc eu un manque de vigilance et un manque de connaissance de l’Agence. J’ai rencontré les dirigeants de l’APE et ils m’ont assuré avoir posé toutes les questions mais avaient-ils eu le temps de la faire alors que le calendrier a été très serré ? Pour répondre à M. Ginesta, voici un exemple d’habileté des vendeurs d’UraMin : il y a eu une première proposition de vente à 400 millions d’euros. Celle-ci a été brusquement retirée et la société introduite en bourse. Tout cela a sous-entendu que la mine valait beaucoup plus cher que le prix d’abord demandé. Face à ces manœuvres, l’APE n’a pas joué son rôle.

Cela dépasse le cas particulier d’UraMin, et concerne la stratégie d’Areva : quelles étaient les possibilités de l’entreprise au regard de ses capacités financières qui, entre la construction de centrales de nouvelle génération et l’acquisition d’UraMin, paraissaient manifestement insuffisantes ?

Sur l’accord entre EDF et le consortium chinois, nous avons bien posé la question, tant à l’Agence qu’à l’entreprise publique. Si, à la limite, nous pouvons penser qu’un accord est légitime pour construire et entretenir des centrales à l’étranger, il nous est apparu plus aventureux d’inclure la France dans cet accord. Les dirigeants d’EDF nous ont rassurés sur ce point.

Pour UraMin, EDF n’a pas souhaité participer à l’acquisition car l’extraction, nous a-t-on dit, ne cadrait pas avec leur stratégie et de plus, elle coûte cher. De plus, Goldman Sachs, au demeurant actionnaire d’UraMin, a conseillé à EDF de ne pas y aller. Tout cela pose question. EDF n’a pas transmis ces informations à l’APE mais ses représentants affirment que la loi ne les y oblige pas.

Nous avons pu, après maintes péripéties, consulter les documents et il apparaît évident qu’il y a eu un accord de la ministre de l’Économie, sans qui une opération d’un tel montant n’aurait pu se faire, d’autant qu’on déclarait à l’époque : « magnifique victoire de la France ».

Pour les investissements de maintenance, madame Dalloz, ils vont augmenter même si, j’en suis d’accord avec vous, ils sont insuffisants. Le taux de disponibilité des centrales était faible du fait des investissements a minima. Il est passé de 78,7 % en 2010 à 81,7 % en 2011.

Est-ce que la situation est tenable compte tenu du niveau de l’excédent brut d’exploitation ? Déjà, dans le cadre de la discussion de la loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, – la « loi NOME » – j’avais déclaré que le prix de revente de l’électricité aux concurrents d’EDF était trop faible, car on ne prenait pas en compte la valeur réelle des investissements. La Cour des comptes vient de confirmer cette analyse et porte le prix souhaitable de revente à 50 euros le kWh, loin des 36 euros proposés à l’époque.

Monsieur Emmanuelli, je suis en accord avec vous. L’investissement et les dividendes aux actionnaires sont deux choses contradictoires. Toutefois, pour l’APE, mon jugement n’est pas aussi sévère que le vôtre.

Concernant la gouvernance d’Areva, je ne suis pas sûr qu’il y a eu des dysfonctionnements importants. Je rappelle que les géologues d’Areva ont indiqué des réserves sans s’être rendus sur place.

Monsieur Dumont, la formulation que vous proposez sur le stockage réversible des déchets nucléaires en couche géologique profonde sera inscrite dans le rapport, nous en sommes tout à fait d’accord.

Pour monsieur de Rugy, oui, à l’évidence, nous serons contraints de prolonger la durée de vie des centrales à 60 ans. Faute de décisions en temps utile et d’anticipation, nous n’avons plus le choix. Construire 11 EPR sera évidemment trop cher en quelques années. De plus, nous ne sommes pas encore au point sur les énergies renouvelables. Il faudra encore investir. Mais je vous concède que cela reste implicite : cet état de fait n’a été ni annoncé, ni soumis au débat public.

Enfin, on parle de 2 300 création d’emplois.

M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial. Sur l’APE, ce n’est pas une question d’expertise. Les équipes ne pouvaient pas couvrir l’ensemble du champ qui leur est dévolu. Pour UraMin, la seule question est : comment parvenir à permettre une information optimale de la tutelle sans corseter une entreprise qui se doit d’être réactive dans un environnement mondial concurrentiel ? Areva n’a pas transmis toutes les informations utiles et EDF estime qu’elle n’avait pas à informer. La question est donc : qu’est-ce qui a manqué pour éviter ce genre de problèmes, d’autant que nous sommes dans une durée de temps contrainte. Il est vrai que la BRGM est au service de l’APE mais il l’est aussi d’Areva.

Par ailleurs, si j’ai parlé d’opacité, c’est aussi l’analyse de la direction actuelle d’Areva, qui a revu la gouvernance sous l’impulsion du nouveau président Luc Oursel.

De plus, il faut sortir de l’ère du soupçon sur les appétits d’EDF sur Areva. Aujourd’hui, nous sommes dans une relation contractualisée et stable.

Pour madame Dalloz, l’augmentation de l’excédent brut d’exploitation d’EDF dépend fortement de l’international ; l’acquisition de British Energy est une opportunité car le Royaume-Uni est certainement le pays qui va le plus développer le nucléaire dans les années à venir.

Enfin, je partage moi aussi l’avis de monsieur Emmanuelli sur le choix entre investissements et dividendes.

M. Hervé Mariton. EDF et Areva font valoir que Fukushima peut amener des opportunités nouvelles. Qu’en est-il ?

M. Marc Goua, rapporteur spécial. En effet, la catastrophe de Fukushima a changé la donne et à cet égard, Areva a plus d’atouts qu’EDF, notamment du fait de sa politique de renforcement de la maintenance dans un souci de sécurité accrue.

M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial. Cet effort sur la maintenance sera aux bénéfices d’Areva avec les exigences nouvelles de l’Autorité de sûreté nucléaire en matière de sécurité depuis Fukushima. De plus, les coûts seront réduits mécaniquement du fait de la prolongation de la durée de vie des centrales. Donc ce qui sera perdu sur la construction de nouvelles centrales sera retrouvé sur la maintenance et la régénération des anciennes.

Pour EDF, comme je l’ai dit, les opportunités se situent surtout à l’étranger, non seulement au Royaume-Uni, mais aussi en Chine ou en Inde.

La Commission autorise ensuite la publication du rapport d’information.

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* *

Puis la Commission examine le rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) relatif aux suites données aux propositions de la MEC au cours de la XIIIème législature.

M. Dominique Baert, Président. Nous allons maintenant entendre les deux Présidents de la MEC, MM. Olivier Carré et David Habib, qui ont souhaité faire pour nous le point sur les suites données aux propositions de la mission d’évaluation et de contrôle depuis le début de la législature.

Les thèmes des missions, comme les types de propositions présentées par la MEC étant très disparates, vous n’avez pas centré votre propos sur l’analyse statistique du « taux de réussite » des propositions de la mission. Sans éluder cet aspect, vous avez privilégié une présentation rendant justice aux particularités de chaque sujet.

MM. les Présidents et rapporteurs, vous avez la parole.

M. Olivier Carré, co-rapporteur. Plusieurs d’entre vous s’en souviennent, lorsque la Mission d’évaluation et de contrôle a été créée en 1999, l’intention novatrice était de faire travailler une instance parlementaire annuelle pour présenter des propositions de nature à améliorer les résultats des politiques publiques. Il s’agissait de rationaliser l’action publique plutôt que de demander – classiquement – des moyens supplémentaires.

« Contrôler réellement, pour dépenser mieux et prélever moins » : douze ans après le rapport Migaud de 1999, le mot d’ordre reste d’actualité. La mission a confirmé ses principes de fonctionnement, destinés à assurer un consensus politique sur des propositions de réforme ou d’amélioration de l’action de l’État.

Au cours de la XIIIème législature, la MEC a mené à bien quinze missions portant sur des sujets très différents, mais avec un certain nombre de points forts, tenant compte d’enjeux économiques et budgétaires. J’en citerai deux : les questions militaires, suivant la consigne de Gilles Carrez, Rapporteur général, donnée à la fin de la législature précédente ; les questions relatives à la recherche et à l’articulation entre l’entreprise et l’université.

Les quatre thèmes traités au cours de l’année 2011 ont été centrés sur les méthodes d’action de l’État : les externalisations du ministère de la défense, la soutenabilité de l’évolution de la masse salariale de la fonction publique, le financement des politiques culturelles de l’État par des ressources affectées, enfin les financements extrabudgétaires de la recherche.

On le constate en filigrane dans les sujets retenus : la commission s’est toujours inscrite dans sa démarche de contrôle des finances publiques et d’évaluation de la performance.

Le champ des sujets retenus est très inégal : les plus larges auront porté sur la gestion des ressources humaines : d’abord en 2009 au sein du ministère de l’Écologie, puisque la MEC a élargi son analyse à l’ensemble de l’organisation du ministère, en cours de réforme, et à un certain nombre de politiques publiques menées par le ministère, puis en 2011, en abordant les problématiques générales de gestion de la masse salariale de l’État.

D’autres sujets étaient plus nettement circonscrits : pour exemple, l’allocation des moyens des universités, le financement des opérations militaires extérieures, celui des SDIS, la politique des pôles de compétitivité, ou les recettes exceptionnelles de la Défense.

On peut rattacher les propositions des différentes MEC à trois catégories de préoccupations.

La première porte sur l’analyse des méthodes et les organisations. Un peu comme le feraient des commissaires aux comptes, les MEC se posent généralement la question de la qualité, de la sécurité et de la simplicité des processus de décision. Les missions ont ensuite préconisé des réformes destinées à promouvoir de « bonnes pratiques administratives ». C’est le cas pour toutes les missions, bien sûr à des degrés variables selon les sujets. Il est à noter que ces propositions suffisent parfois à dégager des économies de fonctionnement.

Le deuxième thème de préoccupations est celui des moyens budgétaires, qui concerne l’ensemble des MEC à l’exception de l’immobilier de l’État et des pôles de compétitivité. Une seule MEC a porté sur l’analyse d’une dépense fiscale, celle relative au crédit d’impôt recherche. En 2011, la MEC a examiné la question de l’arbitrage entre les crédits budgétaires et la fiscalité affectée pour le financement d’une politique spécifique ; à propos des politiques culturelles de l’État, elle a été conduite à souligner les inconvénients de l’affectation des recettes.

Enfin la troisième catégorie de préconisations de la MEC tend à améliorer l’information du Parlement. Il est remarquable que le défaut d’information soit relevé pour les trois MEC relevant du secteur de la défense. Il est non moins significatif que les réponses du Gouvernement ne soient pas exactement en adéquation avec les demandes d’information de l’Assemblée pour plusieurs sujets intéressant la défense.

Les quinze problématiques de la XIIIème législature ont conduit à la formulation de 241 propositions.

64 d’entre elles, émises au cours de l’année 2011, ont un caractère trop récent pour autoriser un suivi de leur évaluation, à l’exception de 3 qui ont pu être reprises en loi de finances.

Sur les 177 propositions formulées au cours des quatre premières années de la législature, 129 ont été mises en œuvre, de manière complète ou partielle, ou sont en cours de mise en œuvre, soit 73 %. Symétriquement 47 propositions, soit près de 27 %, n’ont fait l’objet d’aucune application.

On constate donc que le Gouvernement a tenu compte de près des trois-quarts des différentes propositions de la MEC. Il est permis de s’en réjouir.

Je remarque que la Cour des comptes, selon une méthodologie comparable à la nôtre, aboutit pour ses propres préconisations figurant au rapport public annuel, à un taux voisin : 71 % de propositions suivies d’effet en 2011.

Cet « indicateur de résultat » de nos propositions illustre le caractère transpartisan et de bon sens de ces propositions comme la réceptivité du Gouvernement aux suggestions de la commission des Finances.

Dans certains cas, il n’a pas été donné suite aux propositions de la MEC, soit parce que les choix fondamentaux de l’exécutif s’y opposaient, soit parce que l’organisation de l’État a généré des résistances aux réformes.

Pour terminer, je voudrais ajouter quelques remarques.

Au cours de cette législature, a été créé le Comité d’évaluation et de contrôle, le CEC. Ce comité, sous l’autorité du président de l’Assemblée nationale, regroupe des parlementaires de l’ensemble des commissions et analyse les politiques publiques avec des points de vue dépassant le simple cadre budgétaire.

La question de la cohérence entre les travaux de la MEC et ceux du CEC se pose nécessairement. Les conclusions du CEC en matière d’efficacité de la dépense publique ne sont pas très différentes de celles de la MEC. Il y a un réel risque de « doublon » entre ces deux instances qui doit conduire à s’interroger sur la finalité des travaux engagés par la MEC.

La MEC a une autorité certaine auprès de l’exécutif, souvent renforcée par le travail fructueux mené par la Cour des comptes à sa demande. Ses travaux sont reconnus comme de qualité et ses préconisations ont une résonance forte tant au niveau du ministère du Budget que des autres ministères. Elle constitue à mon sens un outil de pilotage des comptes publics pas assez utilisé au regard des contrôles qu’exige la situation actuelle des finances publiques.

La MEC devrait permettre de vérifier la bonne adéquation entre les moyens et les objectifs politiques donnés à chacun des ministères et d’avoir une lecture transversale de l’usage des fonds par rapport à ces objectifs. Les objectifs des programmes comme les indicateurs pourraient être analysés de manière plus exhaustive au regard des moyens. Le contrôle budgétaire devrait s’effectuer au fil de l’eau et pas seulement au moment de l’examen des crédits de la loi de règlement. J’ai pu mesurer que la MEC a un réel potentiel pour développer ces missions.

Enfin, je tiens à rendre hommage à Georges Tron qui a présidé les travaux de la MEC pendant la première partie de la législature. Pour conclure, je dirais que la MEC constitue un très bel outil pour mieux faire vivre la LOLF comme l’élément cardinal de la rencontre entre l’exécutif et le législatif.

M. David Habib, co-rapporteur. À mon tour, je veux rendre hommage à Georges Tron, associé à nos travaux pendant les deux premières années de la législature.

Je vous propose d’évoquer de façon plus particulière le sort des préconisations des différentes MEC.

Rappelons que sur les 177 propositions formulées au cours des quatre premières années de la législature, 129 ont été mises en œuvre, de manière complète ou partielle. Pour un certain nombre de sujets, les préconisations de la commission des Finances ont été suivies d’effet très largement ou en quasi-totalité : l’enseignement, la recherche, les pôles de compétitivité, le crédit impôt recherche. Elles n’appellent donc pas de commentaire particulier.

En revanche, les propositions des trois missions consacrées au secteur de la défense nationale, qui portaient sur le financement de l’équipement naval militaire, celui des OPEX et les recettes extrabudgétaires de la défense ont rencontré d’importantes difficultés de mise en oeuvre.

Il en est de même pour le financement des Services départementaux d’incendie et de secours. La MEC s’est heurtée notamment à des résistances de la part des ministères chargés des finances pour mettre en application des préconisations simples qui auraient éclairé les contribuables et la représentation nationale.

En ce qui concerne la fonction d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale, le Comité d’évaluation et de contrôle ne remplit pas à mon sens aujourd’hui les mêmes missions que la MEC. L’un comme l’autre vont connaître des évolutions. Il conviendrait de préciser, sinon d’unifier leur rôle.

Le Conseil constitutionnel, lors de la réforme du Règlement de notre Assemblée en 2009, a rappelé que la Constitution garantissait le rôle éminent de la commission des Finances en matière de contrôle des politiques publiques. Si une nouvelle instance chargée du contrôle des politiques publiques devait être créée, il faudrait tenir compte de la décision du Conseil et veiller à placer la commission des Finances au cœur du dispositif.

Au cours de la prochaine législature, trois thématiques devraient selon moi être abordées : le financement des politiques environnementales, le logement, en particulier les préoccupations des collectivités locales au regard des financements multiples en matière de logement social, et enfin les questions liées à l’agriculture, plus précisément à la certification des produits agricoles.

La question des moyens de la MEC est posée, de ses pouvoirs d’investigation, de sa capacité à continuer à dialoguer avec la Cour des comptes. Elle assurerait son devoir de contrôle de manière plus exemplaire si elle pouvait se saisir d’un ou deux sujets qu’elle suivrait sur une durée longue en aménageant une forme de droit de suite.

Je me réjouis du travail effectué et tiens à souligner l’esprit très constructif dans lequel se sont déroulés les travaux. Des missions comme celles concernant les musées nationaux ou le crédit d’impôt recherche sont de très bons exemples d’une vision partagée entre parlementaires de sensibilité et d’horizon différents.

M. Dominique Baert, Président. Je vous remercie. Si vous le permettez, j’aimerais soulever des questions qui s’adressent tant à vous-mêmes, MM. les rapporteurs, qu’à l’ensemble de nos collègues. Estimez-vous souhaitable que la MEC reprenne ses travaux au cours de la prochaine législature ? Doit-elle, à vos yeux, évoluer, et dans quel sens ? Comment améliorer ses types de travaux, ses méthodes, la nature des relations nouées avec l’exécutif ?

Enfin, avez-vous rencontré soit des difficultés de nature juridique, tenant par exemple à l’insuffisance des pouvoirs d’investigation de la MEC, soit des limites de nature matérielle liées à des moyens insuffisants ? Avez-vous en conséquence le sentiment qu’il serait bon de compléter la LOLF ou le Règlement de notre Assemblée et éventuellement de renforcer les moyens dont dispose la mission ?

Mme Marie-Christine Dalloz. La nécessité pour le Parlement de disposer d’un outil de suivi et de pilotage des comptes publics me paraît évidente. Le maintien de la MEC présente donc une véritable utilité.

L’analyse des programmes devrait, à mon sens, être réalisée sous un angle politique. Le fait que 129 propositions formulées par la MEC aient été suivies d’effet est très positif, mais la MEC est-elle bien l’enceinte au sein de laquelle les propositions doivent être formulées ?

Je partage pleinement l’opinion de David Habib selon laquelle la MEC devrait, à l’avenir, s’intéresser à la politique environnementale ; j’espère que le ministère concerné collaborera pleinement.

Je souhaiterais pour finir avoir des précisions sur les moyens dont la MEC a pu bénéficier au cours de la législature écoulée.

M. Michel Diefenbacher. Il faut évidemment maintenir la MEC.

Je dois dire que le nombre de propositions non suivies d’effets me paraît important. Peut-on distinguer, au sein de ces propositions, celles qui ont été formulées pour servir d’aiguillon à des réformes de long terme tout en sachant que leur mise en œuvre ne pourrait être immédiate, de celles qui ont été tout bonnement écartées par les administrations concernées ? Le pourcentage de propositions suivies d’effet est variable selon les sujets ; les recommandations relatives aux moyens exceptionnels du ministère de la Défense ou aux services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) ont été assez largement ignorées.

M. Thierry Carcenac. La question de la cohérence entre les travaux de la MEC et ceux du CEC, précédemment évoquée, se pose en effet avec acuité. Je rappelle que nous disposons par ailleurs d’autres instruments de contrôle, comme par exemple la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF. Nous sommes donc en mesure de dresser des constats ; encore faudrait-il pouvoir en tirer les conséquences. Il pourrait être utile, en début de législature, de définir de manière cohérente les actions à conduire, en aménageant une forme de droit de suite. Je pourrais faire un parallèle avec la mise en œuvre de la LOLF : si celle-ci a permis de redynamiser l’examen du projet de loi de finances initiale, des progrès restent à faire s’agissant de la loi de règlement.

M. Jean-Louis Dumont. La poursuite des travaux de la MEC s’impose. Il serait cependant utile de se concentrer sur des sujets d’actualité plus précis, et de procéder à de véritables évaluations. À cette fin, il convient que la commission des Finances se dote de moyens appropriés. Des évaluations pourraient être menées sur la politique immobilière de l’État (pour laquelle la MEC a d’ailleurs permis des évolutions), ou sur des politiques régaliennes déconcentrées ou déléguées (par exemple les aides à la pierre en matière de logement). La question des moyens d’évaluation a été posée il y a quelques années ; elle avait soulevé des réticences, comme s’il ne pouvait exister d’autres moyens d’évaluation que ceux fournis par Bercy. J’estime pour ma part que la MEC devrait avoir les moyens de décider elle-même ; mais je ne suis pas sûr que cette préoccupation soit partagée au sein de notre Assemblée. Par ailleurs, en hiérarchisant davantage ses préconisations, la MEC gagnerait en efficacité.

M. David Habib, co-rapporteur. La MEC doit être maintenue au cours de la prochaine législature.

Je partage l’interrogation exprimée sur l’analyse des programmes. Plus largement, où notre contrôle doit-il s’arrêter ? Doit-il ou non revêtir une dimension qualitative ? Cela pose en creux la question des moyens propres de la MEC et de la force de ses préconisations.

Pour répondre à la question de Mme Dalloz, les moyens dont a disposé la MEC sont ceux que le Président de la commission des Finances a bien voulu lui donner. Nous n’avons jamais rencontré la moindre difficulté de ce point de vue.

Je serais un peu plus réservé sur le choix des thèmes opéré par le Bureau de notre Commission, qui a retenu chaque année un sujet d’ordre militaire. Il serait à mon avis souhaitable que les co-Présidents de la MEC puissent choisir eux-mêmes un thème par an.

Sur la nécessité d’un droit de suite, je constate que nous sommes tous d’accord.

À l’interrogation de M. Diefenbacher, sur les motifs pour lesquels certaines propositions de la MEC n’ont pas été suivies d’effets, je crois pouvoir répondre qu’il s’agit d’une volonté politique de ne pas partager nos options. S’agissant des SDIS, alors que tous les acteurs rencontrés étaient unanimes pour constater l’existence d’un problème de financement, Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur, a cru bon de le nier, moyennant quoi nos propositions sont demeurées sans suite.

M. Olivier Carré, co-rapporteur. Le CEC se prononce sur l’opportunité des politiques publiques qu’il examine. À la différence de la MEC, chacun des Rapporteurs exprime d’ailleurs sa position personnelle dans le rapport. À mon sens, le cœur de mission de la MEC est un peu différent, puisqu’il s’agit de vérifier l’adéquation des moyens aux objectifs, dans un souci de bonne utilisation des deniers publics. Les travaux que nous avons conduits sur le financement extrabudgétaire des opérateurs culturels ont ainsi permis de constater une utilisation à mon avis sous-optimale des ressources publiques.

Je tiens à signaler ici l’esprit très constructif dans lequel se sont déroulés les travaux de la MEC, notamment du fait de l’opposition. Ce mode de fonctionnement me paraît très sain pour la démocratie, de même que la décision de confier à un membre de l’opposition la présidence de la commission des Finances.

Plus de dix ans après sa création, la MEC produit des travaux de qualité, qui demeurent insuffisamment exploités, alors qu’ils permettraient de mieux employer les deniers publics. Un meilleur ciblage de nos travaux devrait contribuer, à l’avenir, à renforcer l’efficacité de nos propositions.

M. Dominique Baert, Président. Pour terminer, la Commission est-elle favorable à la publication de ce rapport d’information ?

La Commission autorise la publication du rapport d’information.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 7 mars 2012 à 10 h 15

Présents. - M. Dominique Baert, M. Gérard Bapt, M. Claude Bartolone,
M. Jean-Marie Binetruy, M. Pierre Bourguignon, M. Jean-Pierre Brard, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Jérôme Chartier,
M. Alain Claeys, M. Jean-Yves Cousin, Mme Marie-Christine Dalloz,
M. Richard Dell'Agnola, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont,
M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, Mme Aurélie Filippetti, M. Marc Francina, M. Georges Ginesta, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Marc Goua, M. François Goulard, Mme Pascale Gruny, M. David Habib, M. Laurent Hénart, M. Jean-François Lamour, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Jean-Claude Mathis,
Mme Sandrine Mazetier, M. Henri Nayrou, M. Jacques Pélissard, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. François de Rugy, M. Michel Sapin, M. Michel Vergnier

Excusés. - M. Jean-Pierre Balligand, M. Michel Bouvard, M. Bernard Carayon, M. Jean-Claude Flory, Mme Annick Girardin, Mme Arlette Grosskost, M. Marc Le Fur, M. Victorin Lurel, M. Richard Mallié, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Claude Sandrier