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Mercredi 25 mai 2011

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 52

Présidence de M. Serge Grouard Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur le Grenelle de la mer et la stratégie nationale pour la biodiversité

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur le Grenelle de la mer et la stratégie nationale pour la biodiversité.

M. le président Serge Grouard. Nous sommes heureux d’accueillir Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. L’audition portera sur trois thèmes : le Grenelle de la mer, la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) et les décrets d’application de la loi Grenelle 2.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je commencerai si vous le permettez par le dernier point : les décrets d’application de la loi Grenelle 2.

Le chantier réglementaire qui fait suite au Grenelle 2 est particulièrement vaste. Les décrets d’application, dont beaucoup sont interministériels, constituent aujourd’hui la priorité des services de mon ministère. Sur 200 décrets, 135 doivent faire l’objet d’un examen au Conseil d’État, et près de la moitié doit être examiné par la Commission consultative d’évaluation des normes, qui émet un avis sur l’impact financier des textes concernant les collectivités territoriales. À ce volet réglementaire, s’ajoute le processus de concertation propre au Grenelle de l’environnement, avec des consultations de toute nature.

L’objectif que nous nous sommes fixé est de publier les décrets dans un délai de 18 mois à compter de la promulgation de la loi. Cet objectif sera tenu, même si certains décrets risquent de ne pas être totalement aboutis en juillet. À la date du 5 mai, 43 mesures d’application du Grenelle 2 étaient publiées ou sur le point de l’être ; 16 étaient en cours d’examen au Conseil d’État ; 81 étaient rédigées et discutées en interministériel pour arbitrage ; 49 étaient en cours d’écriture ; et 10 apparaissaient soit inutiles, soit prématurées au regard des processus engagés. Entre le 10 et le 25 mai, nous avons validé plus de 25 mesures d’application. Le même rythme de travail – soutenu – sera suivi au cours des deux premières semaines du mois de juin.

Nous essayons de faire ce travail dans la meilleure concertation possible. Votre collègue, Bertrand Pancher, pourra y revenir.

Le processus de concertation est parfois très lourd. En ce qui concerne le projet de décret sur les études d’impact, par exemple, nous avons eu besoin de consulter neuf instances, de procéder à une consultation du public pendant un mois et de tenir des réunions spécifiques. Ce processus est piloté au ministère d’une main ferme par la commissaire générale au développement durable. Nos équipes se tiennent d’ailleurs à votre disposition pour vous apporter les réponses ou les précisions dont vous auriez besoin sur le calendrier d’un décret ou le processus général.

Deuxième point : la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) et le rapport de Mme Geneviève Gaillard.

Je tiens d’abord à remercier votre Commission pour les travaux qu’elle a engagés sur la biodiversité, avec une « mission d’information relative aux enjeux et aux outils d’une politique intégrée de conservation et de reconquête de la biodiversité ». Une cinquantaine d’auditions se sont déroulées dans un temps très restreint. Ce travail est à mes yeux doublement positif, madame la députée. D’abord, parce que vous vous êtes saisie de la question sensible de l’agence de la nature dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, qui demandait la constitution « d’une mission parlementaire sur l’opportunité, la faisabilité, le périmètre, les missions, les moyens, la méthode et le calendrier de création d’une agence de la nature ». Ensuite, parce qu’il a permis dès le 6 avril d’engager une dynamique positive : les 25 propositions de votre rapport ont ainsi enrichi les dernières séances des comités de préparation de la stratégie nationale pour la biodiversité.

S’agissant de l’agence de la nature, des rapprochements sont faits entre la biodiversité et le monde de l’eau, et on rêve un peu vite à une réplication des outils de l’un dans le domaine de l’autre. Or les sujets sont différents. Je ne crois donc pas à une réplication complète. Comme vous l’avez souligné dans votre rapport, madame la députée, l’enthousiasme pour une telle agence est quasi général, mais chacun a son point de vue sur son périmètre et son contenu : pour certains, c’est une agence de connaissances, d’expertises, de recherche ; pour d’autres, une agence de gestion. Ces points de vue sont difficilement conciliables. Je souscris donc à votre conclusion en la matière : « La création de l’agence de la nature ne pourrait être vue, dès lors, que comme l’éventuel point d’aboutissement d’une nouvelle politique du vivant. Aujourd’hui, il nous suffit de prendre appui sur l’existant en le rénovant ».

C’est pourquoi, dans le cadre de la stratégie nationale de la biodiversité, l’État s’est engagé à rénover la gouvernance d’ici à 2013 afin, dans un premier temps, de la rendre plus lisible, et, dans un deuxième temps, d’approfondir la possibilité de la création d’une agence et de préparer l’avenir. Concrètement, nous avons besoin de régler aujourd’hui certains problèmes avant de pouvoir créer une agence.

Sur les 25 propositions, quelques-unes me semblent présenter un intérêt particulier.

D’abord, vous souhaitez que la reconquête de la biodiversité soit affichée comme une priorité nationale. Pour ma part, j’ai bien placé le cœur de la stratégie nationale de la biodiversité sous le signe de la reconquête. La méthode de la stratégie nationale pour la biodiversité implique tous les secteurs d’activité ; l’ambition nationale en la matière concerne non pas seulement l’État, mais toutes les composantes de la nation. Comme nous l’avions d’ailleurs constaté pour la première stratégie nationale de la biodiversité, tous les objectifs ne peuvent être atteints avec le seul engagement de l’État : ceux des collectivités, des particuliers, des associations et des entreprises sont indispensables.

Ensuite, vous souhaitez voir « accélérée la signature du protocole international sur l’accès et le partage des avantages issus de l’utilisation des ressources génétiques de la planète, défini à la Conférence de Nagoya ». Dès le 16 juin prochain, la France, l’Union européenne et d’autres États membres seront en mesure de signer ce protocole.

Vous souhaitez également des avancées dans les compensations sur les atteintes aux écosystèmes. C’est en effet un principe important qui demande à être décliné de manière opérationnelle sur la base d’expertises non discutables. Nous avons lancé à l’automne 2010 un groupe de travail dont j’attends les résultats pour l’automne 2011. À ce sujet, vous proposez la création d’un marché de la compensation en cas d’atteinte aux écosystèmes. En complément de l’initiative de la Caisse des dépôts et consignations sur la plaine de Crau, que nous soutenons, je lancerai très prochainement un appel à candidatures d’opérateurs sur d’autres régions pour progresser en la matière.

D’autres propositions trouvent un écho dans les engagements de l’État sur la SNB. Ainsi, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes va se traduire, dès 2011, par des appels à projets, notamment dans les départements et collectivités d’outre-mer où la question se pose de manière plus critique. La lutte contre la surexploitation des espèces devrait trouver à s’appliquer, avant la fin de l’année, à travers un appel à projets pour l’expérimentation d’unités d’exploitation et de gestion concertée des pêcheries ; un projet de loi sera élaboré pour permettre la mise en place de réserves halieutiques. Et d’ici à 2014, la reconnaissance du rôle moteur des collectivités territoriales pour la biodiversité se traduira par une élaboration conjointe avec les régions d’une stratégie nationale de la biodiversité.

J’en viens aux engagements de l’État. J’appelle votre attention sur le lancement, dès 2011, d’une cartographie nationale des habitats à l’échelle 1/25 000e et sur la poursuite de la cartographie des enjeux de biodiversité dite « remarquable » – faune, flore, habitats. Nous avons besoin de ces outils qui, aujourd’hui, nous font défaut pour avancer. S’agissant des enjeux ultramarins, j’ai répondu en début d’après-midi à une question au Gouvernement sur les fonds marins. Une proposition de votre rapport appelle à un approfondissement de la connaissance des espèces et des écosystèmes ultramarins : elle pourra trouver sa concrétisation dans l’appel à projet de la recherche opérationnelle en outre-mer, que je lancerai prochainement.

Troisième point : le Grenelle de la mer.

En 2009, la France s’est dotée d’une véritable politique maritime intégrée. Autrement dit, elle intègre les enjeux de la biodiversité, l’ensemble des acteurs, les dimensions de développement économique, la problématique de création d’emplois, les énergies marines nouvelles, etc. Ainsi, le Grenelle de la mer peut être un exemple de développement de la stratégie nationale de la biodiversité.

Notre pays est très bien placé en matière maritime – il est le deuxième espace maritime au monde, essentiellement grâce à l’outre-mer – et possède des fleurons de l’industrie maritime, avec la construction navale, le nautisme et les énergies marines renouvelables.

À présent, nous disposons d’une stratégie, dans la ligne du discours du Président de la République de 2009, et d’outils de gouvernance, avec le comité interministériel de la mer, le Livre bleu de décembre 2009 et la mobilisation des acteurs à travers le Grenelle de la mer. Cette stratégie se veut intégrée, c’est-à-dire que les différents regards sur la mer – biodiversité, exploitation des ressources marines, développement de la recherche – ont vocation à se faire écho. Le développement économique touche à la fois à l’industrie traditionnelle et aux énergies marines renouvelables ; il est soutenu par des moyens qui ont été investis dans la formation et la recherche, par exemple à travers les intérêts d’emprunt. Ainsi, l’éolien off shore intègre, en plus de la dimension financière et de celle relative à la création d’emplois, une composante biodiversité : les critères de sélection des entreprises qui auront répondu à l’appel d’offres qui sera lancé début juin en la matière prévoient une prise en compte de l’intégration dans le milieu. De la même manière, les autoroutes de la mer revêtent une dimension environnement, une dimension transports et une composante compétitivité. En outre, le Conseil d’orientation de la recherche et de l’innovation pour la construction et les activités navales (CORICAN), que j’ai mis en place le 17 mai dernier, a pour objet structurer le monde maritime, de l’aider à organiser ses projets, notamment dans le cadre des investissements d’avenir, et de financer des programmes de recherche pour le navire du futur, qui devra être à la fois plus sûr et moins consommateur d’énergie ; ce programme est d’ores et déjà doté d’une centaine de millions d’euros.

Sur l’exploration des fonds marins, un programme en cours à Wallis-et-Futuna sera développé à partir de 2011 pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Le prochain comité interministériel de la mer, qui devrait se tenir le 10 juin, sera l’occasion de mettre en avant une stratégie nationale de mise en valeur des fonds marins – en abordant des sujets aussi divers que les nodules métalliques ou les terres rares.

En 2008, la protection des parcs marins était très en retard sur celle des parcs terrestres. En trois ans, nous avons réussi à créer deux parcs naturels marins. En plus des trois créés en 2011 – Côte Vermeille, estuaires picards, archipel des Glorieuses –, trois seront créés en 2012.

Dernier axe de notre politique : une gouvernance renouvelée. Nous organisons une gouvernance à l’échelle des façades maritimes, en métropole et dans les bassins outre-mer. Concrètement, nous réorganisons l’administration de l’État et créons des conseils maritimes de façade où nous organisons une gestion intégrée de la mer et du littoral.

Au niveau national, le Conseil national de la mer et des littoraux poursuivra les travaux du comité national de suivi du Grenelle de la mer, et assurera le suivi de la politique maritime. Il comprendra 70 membres, dont 35 membres élus et des représentants des mondes professionnel, syndical, associatif. Cet équilibre a été extrêmement difficile à trouver, mais je vous prie de croire qu’il est bon.

J’aurais pu parler du paquet Erika 3 sur la sécurité maritime, qui touche également aux domaines économique et environnemental ; de l’encadrement de la pêche de loisir ; de l’introduction de l’environnement dans la formation de navigant ; du renforcement des conditions réglementaires en matière de rejet en mer des boues de dragage. Mais nous pourrons y revenir dans le cadre des questions.

M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la ministre, je n’ai pas trouvé les informations relatives à la stratégie nationale pour la biodiversité sur le site de votre ministère. Autrement dit, nous ne la connaissons pas ! La SNB devrait pourtant être débattue par le Parlement.

Madame la ministre. Elle figure sur le site depuis vendredi.

M. Jean-Paul Chanteguet. La grande consultation pour la SNB a abouti à l’adhésion des collectivités territoriales, des entreprises et de l’État.

Le ministre de l’agriculture adhère-t-il à cette stratégie ? Dans l’affirmative, quels engagements prendra-t-il dans le délai de 18 mois prévu pour l’adhésion ? Vous avez expliqué la non-adhésion de la FNSEA à la SNB par la grande angoisse de la profession agricole face à la sécheresse. La Fédération, elle, évoque « trop d’incertitudes sur la portée des mesures que le Gouvernement mettra en œuvre et sur leur financement, trop de doutes sur la volonté de tous les acteurs de porter ensemble la conviction qu’une croissance durable est possible pour l’agriculture, que la performance économique peut se conjuguer avec la performance environnementale » !

Les associations, qui évoquaient la nécessité de la mise en place de nouveaux flux financiers, n’ont pas manqué de marquer leur déception : « On est passé à côté de l’exercice », « l’État ne joue pas son rôle », « sans volonté politique, sans signaux clairs, nous sommes inquiets pour l’avenir », « l’incantation sans moyens, cela ne sert à rien ». En effet, les crédits complémentaires sur la période 2011-2013 s’élèveraient, pour financer en particulier les appels à projet, à seulement 50 millions d’euros. La procédure des appels à projet, souvent utilisée par le Gouvernement, présente un double avantage : elle permet à l’État, d’une part, de faire croire qu’il agit au travers d’une bonne politique de communication et, d’autre part, de faire payer les projets par d’autres – collectivités locales, établissements publics et entreprises.

Les politiques eux-mêmes sont déçus, plusieurs engagements concernant les textes Grenelle 1 et 2 n’ayant pas été tenus à ce jour. Ainsi, l’objectif de finalisation intégrale de la trame verte et bleue fin 2012 ne sera malheureusement pas atteint. L’article 26 de la loi Grenelle 1 prévoyant l’engagement par l’État d’une négociation pour développer des solutions nouvelles de financement en faveur de la biodiversité se fait toujours attendre. Et l’audit des mesures fiscales défavorables à la biodiversité n’a pas été communiqué par le Gouvernement à Philippe Tourtelier et Stéphane Demilly, dans le cadre de leur suivi de la mise en application de cette même loi.

Madame la ministre, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité semble devoir tirer un trait sur une dotation de 1 million d’euros, soit plus de la moitié de son budget de 2011. Vous avez évoqué la création d’un département biodiversité au sein de la Fondation du patrimoine. Quel est le budget de cette dernière et quels crédits seraient consacrés au département biodiversité ? Enfin, qu’en est-il du parc national zones humides de Brouage ?

M. Yanick Paternotte. Le groupe UMP se félicite de l’existence de la stratégie nationale pour la biodiversité.

Madame la ministre, quid de l’échelle supranationale ? Les animaux migrateurs ne peuvent en effet être protégés dans les seules limites territoriales.

S’agissant des parcs marins, certains ont évoqué le risque de l’impossibilité de déployer des fermes éoliennes off shore dans la mesure où le rapatriement de l’énergie produite nécessite le passage de câbles. Ne faudrait-il pas installer les fermes avant de créer les parcs ? Sinon, cela ne revient-il pas à verrouiller l’implantation de parcs éoliens off shore ?

Enfin, l’impact du réchauffement climatique et des espèces invasives est-il pris en compte ?

M. Bertrand Pancher. Madame la ministre, je tiens à féliciter votre administration pour le bon rythme de parution des décrets d’application. Je me réjouis des efforts significatifs réalisés en matière de concertation, tout en observant cependant que la multiplicité en la matière conduit certains acteurs à s’y perdre.

Vous avez évoqué la mobilisation de 50 millions d’euros pour les projets lancés par le ministère. La fiscalité du patrimoine naturel, sur laquelle vous menez une réflexion, peut-elle suffire au financement de l’ensemble des mesures nécessaires à la préservation de la biodiversité ?

De quelle manière pouvons-nous avancer avec la FNSEA, non-signataire de la SNB ?

Seuls deux décrets portant sur la biodiversité, sur une quarantaine, ont été pris. Ce retard est-il dû à la complexité du sujet ?

Quand le Conseil national de la mer et des littoraux sera-t-il mis en place ? Qu’en est-il de la mise en place d’un observatoire de la mer ?

Vous mettez en avant le modèle de gouvernance à cinq. Pouvez-vous nous apporter davantage de précisions sur les grandes catégories d’instance qui siégeront et les modalités de concertation avec le grand public ? Le Conseil national de la mer et des littoraux sera-t-il consulté pour les éoliennes off shore ?

Quels moyens seront engagés par l’État pour la recherche, la connaissance et la protection de la biodiversité marine dans les années à venir ? Le budget pour 2011 ne répond pas aux espoirs et l’IFREMER ne semble pas avoir les moyens spécifiques. Le Livre bleu mentionne des moyens lourds, comme les flottes océanographiques : la France a-t-elle prévu d’investir, et à quelle hauteur, dans les programmes de recherche océanographique ? Verra-t-on la création d’un fonds dévolu à l’évaluation environnementale qui prenne en compte les services rendus par les écosystèmes, ce qui constitue également une priorité du Livre bleu ? Ce fonds pourra-t-il être financé par les activités marines – extraction de granulats, exploitation de pétrole off shore – afin que la mer finance la mer ? Est-il envisageable de réévaluer à la hausse les redevances liées aux extractions, actuellement très peu élevées, et de les attribuer à ce fonds, à la faveur de la refonte actuelle du code minier ?

Enfin, la connaissance et la sensibilisation du public à la biodiversité du milieu marin devaient être des grandes priorités du Grenelle de la mer. Quelles mesures concrètes sont engagées aujourd’hui à la suite de la mission présidée par Catherine Chabaud ?

M. André Chassaigne. Madame la ministre, je tiens à vous décerner deux bons points. D’une part, pour le document de présentation de la SNB, dont les très belles couleurs me font penser aux dégradés que l’on peut voir sur les manches des couteaux de la belle ville de Thiers. D’autre part, le vocabulaire que vous utilisez – « l’implication », « la volonté », « l’engagement », « l’ambition », « l’adhésion », « la démarche d’engagement volontaire de tous les acteurs » est particulièrement séduisant. Malheureusement, je n’ai pas trouvé les chiffres !

Sur les objectifs chiffrés, madame la ministre, vous avez vous-même déclaré le 19 mai en présentant cette nouvelle stratégie : « La précédente stratégie adoptée en 2004 l’avait fait, mais cela n’a pas marché ». Autrement dit, les chiffres adoptés en 2004 n’ayant pas été respectés, vous abandonnez tout objectif chiffré, ce qui est regrettable.

Ce faisant, vous accordez une attention particulière au maintien de services sur les écosystèmes en vue de respecter la biodiversité, dans la ligne de la conférence de Nagoya et de celle de Cancún, mais par des mesures non contraignantes, ce qui est également tout à fait regrettable.

Madame la ministre, pensez-vous qu’il soit possible de stopper la perte de biodiversité, voire de restaurer la biodiversité de la majorité de nos écosystèmes, sans une véritable planification écologique impliquant des politiques publiques fortes avec des moyens humains et budgétaires ?

Concrètement, quels moyens budgétaires l’État entend-il débloquer pour mobiliser tous les acteurs – collectivités, établissements publics, agents économiques, gestionnaires d’espaces naturels, associations ?

En particulier, quels moyens prévoit-il pour la mise en place des trames verte et bleue ?

Pensez-vous que l’engagement de 50 millions d’euros pour les appels à projet en lien avec la SNB soit à même de permettre à tous les acteurs locaux de recueillir les données, de préparer les plans d’action, de contractualiser, d’édicter des règles, de suivre et de gérer les effets de leurs actions ?

Enfin, pouvez-vous nous préciser le contenu des appels à projet qui vont être lancés, et nous apporter des précisions sur les montants qui pourront être accordés pour chaque projet ?

Toutes ces questions, nous nous les posons dans nos territoires où, à travers les contrats de territoire, nous avons la volonté de répondre à cet immense enjeu qu’est la biodiversité.

Mme Geneviève Gaillard. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir lu le rapport publié par la Commission du développement durable et de considérer avec intérêt les propositions qu’il contient.

Je ne reviendrai pas sur la SNB, mes collègues ayant, à juste titre, posé des questions sur les problèmes de financement et la problématique des appels à projet.

Avec la préservation de la biodiversité, nous entamons une véritable guerre.

La première préconisation de mon rapport est la nécessité absolue d’afficher la préservation de la biodiversité comme une priorité nationale. Pour ce faire, il est indispensable que cette politique soit intégrée et que tous les ministères soient impliqués. Qu’en est-il de la participation du ministère de l’agriculture et de celle du ministère de la recherche ? Face au lobby des chercheurs, plutôt portés sur les biotechnologies, il me semble primordial de lancer des projets de recherche sur les écosystèmes !

Quid de Bercy ? La réaction du Medef à la SNB consistant à dire : « Nous y adhérons mais il faut veiller à ce qu’il n’y ait pas de contraintes économiques sinon, nous n’y parviendrons pas », m’amène à vous poser la question suivante : avez-vous étudié la possibilité de nommer un délégué interministériel à la biodiversité qui travaillerait à l’implication de l’ensemble des ministères – éventuellement sous votre responsabilité – de manière que nous soyons sûrs de bénéficier d’une politique intégrée ? Si tel n’est pas le cas, nous y serons encore dans dix ans – d’autant plus que les moyens dédiés à cette politique sont relativement faibles !

M. Maxime Bono. Est-il prévu dans le cadre du CORICAN, dont je me réjouis de l’installation suite au Grenelle de la mer, de réfléchir également aux ports du futur qui accueilleront les bateaux du futur ?

Afin de lutter contre les pollutions et d’accroître la sécurité maritime, les remorqueurs de sauvetage jouent un rôle fondamental. Or, suite à la décision britannique de cesser leur affrètement, vous avez décidé de redéployer L’Abeille Languedoc dans le détroit du Pas-de-Calais alors que son rayon d’action s’étend à tout le Golfe de Gascogne et que ce navire était jusqu’à présent basé à La Rochelle. Si nous pouvons comprendre l’urgence de la situation, le Golfe de Gascogne ne possède toutefois plus de remorqueur de sauvetage à l’exception d’un remorqueur espagnol basé à La Corogne, qui est bien loin. Je me permets, madame la ministre, de vous rappeler les naufrages du Rokia Delmas sur l’Ile de Ré, le 24 octobre 2006 et de l’Artémis, sur la plage des Sables-d’Olonne, le 20 mars 2008. Notre collègue Louis Guédon s’associerait vraisemblablement à ma question : comment envisagez-vous donc de compenser le départ de L’Abeille Languedoc ?

M. Philippe Boënnec. Le Grenelle de la mer s’inscrit dans une démarche à la fois visionnaire et vertueuse. Les océans, ne l’oublions pas, sont un monde encore largement inexploré puisque nous ne connaissons que 10 % de ce qu’ils recèlent même s’ils occupent 70 % de la surface du globe et que la France est le deuxième pays maritime en matière de zones économiques exclusives. L’avenir de la terre est en mer ! En témoignant de l’ambition maritime qui est la nôtre, notamment à travers le Livre bleu, le discours du Havre a été magnifique de ce point de vue.

En matière de gouvernance, je tiens à souligner l’importance du Conseil national de la mer et des littoraux dont je gage que la composition a donné lieu aux arbitrages qui s’imposaient. Il me semble important d’y associer l’ensemble des acteurs avec – pourquoi pas ? – les cinq collèges, notamment lors de la première réunion plénière et avant la mise en place d’une commission permanente. Quel sera donc, madame la ministre, son cahier des charges et son périmètre d’action ?

De la même façon, quels seront les objectifs des conseils maritimes de façade ? En tout cas, nous avons intérêt à promouvoir une véritable gestion intégrée de ces territoires afin d’en examiner l’ensemble des problématiques : parcs marins, aires marines, zones Natura 2000 en mer, énergies – sur ce plan-là, une déconcentration serait bienvenue –, ressources halieutiques et pêche.

J’insiste, également, sur la question de l’articulation entre l’extension des grands ports maritimes – 600 000 emplois dépendent directement ou indirectement de la mer – et les réserves nationales naturelles dans certains estuaires dont, notamment, celui de la Loire.

S’agissant de la pêche de loisirs, il convient bien entendu de se réjouir des diverses chartes qui ont été publiées et de la politique de marquages. La promotion d’une véritable pédagogie serait néanmoins nécessaire, puisque certaines espèces sont marquées sans nécessité véritable – ce qui ne constitue pas la meilleure façon de soutenir une politique.

Enfin, s’agissant de l’estran, nous devons commencer par mettre en place un observatoire avant de promouvoir et d’évaluer telle ou telle politique à laquelle les acteurs locaux – maires, élus, offices de tourisme – doivent être associés.

M. Daniel Fidelin. La politique de préservation des réserves halieutiques est particulièrement importante, mais elle entraîne une diminution des surfaces et des volumes de pêche, ce qui ne manque pas d’avoir des conséquences négatives. Une accélération de la reconstitution des ressources halieutiques grâce à l’immersion de récifs artificiels n’est-elle pas envisageable ? Certains d’entre eux ont été immergés au large d’Etretat et de Fécamp ; le Portugal en possède quant à lui un grand nombre ; j’ajoute que d’ici à 2015, ce sont environ 350 éoliennes qui devraient voir le jour au large de Dieppe, Fécamp et Courseulles-sur-Mer, et que des récifs pourraient être immergés à leur pied, comme me l’ont confirmé des industriels. En facilitant la concertation avec les pêcheurs, un tel procédé serait particulièrement intéressant – d’autant plus qu’aucune subvention n’est nécessaire puisque les industriels le financeraient.

M. Gérard Menuel. Dans le cadre de la SNB, des chantiers prioritaires ont été définis jusqu’à la fin de 2013 – je songe, en particulier, à la restauration des continuités écologiques notamment par l’amélioration des connaissances grâce à un recensement précis des habitats naturels et à l’intégration de la biodiversité dans les politiques sectorielles. Si nombre d’acteurs de la société civile, aujourd’hui, sont invités à partager cette stratégie afin de contribuer à la préservation de la biodiversité – je crois savoir que 140 associations adhèrent à cette démarche –, tel n’est pas le cas du monde agricole. La FNSEA, en particulier, ne compte pas parmi les signataires initiaux de la charte pour la biodiversité car, selon cette organisation, trop d’incertitudes demeurent quant à la portée et au financement des mesures que le Gouvernement mettra en œuvre – l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) attendant quant à elle également des garanties. Où en sont donc les discussions, l’implication du monde agricole étant en effet indispensable pour défendre la biodiversité ?

M. Philippe Plisson. L’État a initié la mise en place d’un parc naturel marin des Pertuis charentais et de l’estuaire de la Gironde. Cette démarche, qui consiste à favoriser la protection des milieux sensibles, est l’exemple même d’une bonne idée mal appliquée. En effet, sur ce territoire, loin de simplifier les choses, elle les complexifie. Il s’agit d’une « usine à gaz » qui s’étend de la Vendée aux portes de Bordeaux alors que les problématiques sont diverses, les collectivités et les élus multiples, les départements et les régions différentes, les administrations pléthoriques. De plus, le parc marin a compétence sur deux sites dont les enjeux écologiques sont différents : les Pertuis de Bordeaux Océan et l’estuaire de la Gironde.

Plus grave, le parc est en concurrence avec le syndicat mixte pour le développement durable de l’estuaire de la Gironde (SMIDDEST) créé par la Gironde et la Charente-Maritime – lequel porte un programme leader – ainsi qu’avec le schéma de gestion et de protection des eaux de la Gironde, alors que les enjeux sont souvent identiques.

Par ailleurs, le périmètre du parc marin s’arrête arbitrairement au Bec d’Ambès, aux portes de Bordeaux, alors que celui du SAGE Estuaire englobe la zone qui s’étend de Bordeaux à Villenave d’Ornon. Quand je vous aurai dit que la région Aquitaine a voté le principe d’un parc naturel régional sur la rive gauche de l’estuaire Le Médoc, vous aurez compris que si personne ne met de l’ordre dans une telle cacophonie, l’énergie des agents, des collectivités et des élus sera inéluctablement et exclusivement consacrée à se combattre plutôt qu’à construire.

Les côtes françaises en général et l’estuaire de la Gironde en particulier ont subi trois tempêtes importantes depuis 1999. Il est donc plus que nécessaire et urgent de renforcer les digues de protection car si rien n’est fait, nous aurons à déplorer des morts lors de la prochaine tempête dont la probabilité, malheureusement, est élevée dans le contexte climatique que nous connaissons. Le préfet nous a dit que le confortement des digues passe par un plan d’aménagement pour la protection contre les inondations (PAPI). Le SMIDDEST s’est positionné pour l’appel d’offres du Gouvernement et a fait réaliser un modèle, le « référentiel inondation Gironde » - il a coûté 700 000 euros - permettant de modéliser la hauteur des digues et les zones d’expansion des crues. Or, une rumeur fantasmagorique relayée par le Net a parcouru les rives de l’estuaire selon laquelle les marais de Charente-Maritime seraient inondés pour protéger Bordeaux. Le conseil général de Charente-Maritime, présidé par Dominique Busserau, a ainsi voté contre le SAGE Estuaire, qui n’avait strictement rien à voir dans cette affaire. Sans commentaire.

Comptez-vous donc prendre les mesures urgentes qui s’imposent en faveur de la mise en conformité des digues ? Sera-ce dans le cadre de ce fameux PAPI ? Si oui, quelles dispositions envisagez-vous afin de sortir une telle démarche de l’ornière dans laquelle elle est enlisée ?

Mme Chantal Berthelot. Pourriez-vous préciser, madame la ministre, la nature de l’appel à projets dont vous avez parlé concernant la recherche opérationnelle sur les ressources halieutiques, la Guyane pouvant être potentiellement intéressée compte tenu de sa richesse sur ce plan-là ? Comment, dans ce cadre, intégrerez-vous les conséquences éventuelles des forages off shore sur ces ressources ?

Après le Grenelle de la mer, je regrette que les propositions issues des travaux menés par M. Christophe Priou et moi-même – nous les avions soumises à votre ministère – aient été très peu déclinées.

S’agissant de la SNB, je suis un peu partagée. Je m’apprêtais à souligner que l’étude de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) n’était pas disponible 18 mois après son lancement. Mais vous avez indiqué que la France et certains États européens sont prêts à signer le 16 juin le protocole « Accès aux ressources et partage des avantages » (APA) et nous avons reçu ce matin un mail indiquant qu’une conférence aura lieu le 28 juin sur les enjeux de l’application de l’APA en outre-mer.

Précisément, la charte concernant le parc amazonien du Guyane devant être signée d’ici la fin de l’année, la signature de l’APA est urgente. Même si des mesures transitoires seront appliquées, il importe qu’un cadre juridique soit mis en place afin que ces mesures et ces orientations soient pérennes et stables. Tous les acteurs locaux guyanais, les politiques et les scientifiques en appellent à des lois afin que la Guyane puisse accéder à ces ressources génétiques. Quel est donc votre calendrier en la matière ?

M. Jacques Le Nay. Le document consacré aux dispositions appelant un décret d’application sur la loi portant engagement national pour l’environnement montre que, si certains décrets ont été publiés, d’autres sont en préparation, prématurés ou en chantier. Comme il faudra du temps avant qu’ils ne paraissent intégralement, que préconisez-vous et que recommandez-vous aux élus locaux afin d’éviter que des révisions ou des modifications répétées des SCOT et des PLU – dont on connaît la lourdeur des procédures – n’aient lieu ?

M. le président Serge Grouard. Nous savons que la biodiversité est très complexe et mal connue. La question peut être abordée du deux manières : soit nous développons des schémas globaux et abstraits comme nous aimons tant le faire dans notre pays – même si leur efficacité est parfois sujette à caution ; soit nous faisons preuve de pragmatisme en adoptant des mesures ponctuelles, mais utiles.

Depuis cinquante ans, nous avons construit un peu partout et n’importe comment. Même si la corrélation entre le mitage urbain et la perte de biodiversité n’est pas absolue, elle n’en est pas moins réelle. Comment y remédier dans le cadre d’une réforme du code de l’urbanisme ?

Il en va de même en ce qui concerne les grandes infrastructures : « balafrer » ainsi notre territoire n’est pas propice à la protection de la biodiversité. Pourquoi les plus récentes, parmi ces dernières, n’utiliseraient-elles pas des corridors déjà existants – je pense, notamment, aux nouvelles lignes LGV ?

Les cormorans, redoutables pêcheurs, comptent parmi les espèces invasives. Pourquoi les autorisations de chasse ne sont-elles pas plus nombreuses ? Dans ma circonscription, les autorités représentant l’État m’assurent que l’on ne peut pas y toucher alors qu’ils détruisent bien d’autres espèces.

J’observe enfin que les marchés, magasins de bricolage et autres jardineries vendent un nombre impressionnant d’insecticides. C’est si facile de détruire un petit nid de guêpes – qui sont d’ailleurs considérées comme nuisibles ! Et l’on s’étonne, après, de la diminution de la biodiversité ! Pourquoi trouve-t-on encore ce type de produits ?

Mme la ministre. Monsieur Chanteguet, l’organisation d’un débat parlementaire sur la SNB serait certes intéressante, mais l’ordre du jour étant surchargé, il me paraît difficile de l’envisager. Il n’a même pas été possible de débattre sur le schéma national d’infrastructures de transport (SNIT) ! J’ajoute que le comité de révision de la SNB comprenait des parlementaires : Mmes Gaillard et Blandin ainsi que MM. Soulage, Raoult et Lang.

La SNB étant publiée sous le timbre du Premier ministre, elle engage l’ensemble des ministères, même si – ce n’est un secret pour personne – certains sont plus ou moins motivés. Je vous invite à la lire de près et vous verrez qu’y figurent des engagements ministériels conséquents dans des départements qui ne sont pas les miens. Le ministère de l’agriculture, par exemple, a pris des engagements précis, même s’il est vrai – M. Menuel l’a souligné – que nous avons eu un différend avec la FNSEA. Si les négociations ont été délicates, c’est que le monde agricole est confronté à une situation difficile en raison de la sécheresse et qu’il n’est guère concevable, en l’état, de le mobiliser sur d’autres enjeux. Néanmoins, la SNB est toujours ouverte à la signature et nous avons vocation à fédérer plusieurs milliers d’engagements - la FNSEA n’a d’ailleurs pas fermé la porte. La FRB, autre exemple, résulte aussi d’un travail interministériel : même si ce dossier avance doucement, la Fondation est dotée d’un budget de 1 million et des négociations en cours avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche afin qu’il contribue à son abondement.

Les parcs maritimes, quant à eux, ne sont pas plus des sanctuaires que d’autres parcs nationaux – il existe, en effet, différents niveaux de protection. La pêche est ainsi autorisée dans le parc naturel marin d’Iroise qui, pour des raisons écologiques, comporte des zones particulièrement riches.

Oui, monsieur Paternotte, l’existence d’une « échelle supra » est indispensable. Dans le cadre des accords de Nagoya, nous travaillons en étroite collaboration avec la Commission européenne afin d’élaborer une stratégie commune de la biodiversité - la question des corridors écologiques, par exemple, dépassant évidemment les frontières – et d’œuvrer ainsi à une meilleure cohérence de l’ensemble des projets.

La loi, monsieur Pancher, impose de faire paraître les décrets sur le Comité national trame verte et bleue avant les autres textes concernant la trame. Comme il est en ce moment même à la signature, des verrous devraient être levés même si j’aurais préféré que l’on avance un peu plus sur les décrets biodiversité à l’occasion de la SNB.

L’Observatoire national de la mer et du littoral sera, quant à lui, opérationnel à la fin de 2011 et centralisera toutes les données des ministères de l’écologie et de l’agriculture afin de les mettre à la disposition du public. Il constituera, en quelque sorte, un « guichet unique ».

S’agissant du financement de la politique maritime, nous avons doublé la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les granulats en 2009, et nous réfléchissons à une nouvelle augmentation. En ce qui concerne le domaine public, une mission est en cours afin d’évaluer l’affectation des redevances vers des actions d’amélioration de la qualité du milieu marin car, d’évidence, il convient d’aller encore plus loin. Enfin, dans le secteur de la navigation de plaisance, nous travaillons au verdissement du droit de francisation des navires et à un réinvestissement en faveur de la biodiversité.

Monsieur Chassaigne regrette l’absence d’objectifs chiffrés. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une stratégie et non d’un plan d’actions, même si des critères d’évaluation des engagements en matière de biodiversité élaborés avec l’Observatoire national de la biodiversité seront publiés à la fin de 2011. Les 50 millions d’euros, quant à eux, s’ajoutent aux sommes déjà débloquées en faveur de la biodiversité – notamment dans le cadre du Grenelle de l’environnement – comme aux moyens humains qui seront affectés, lesquels s’élèvent en l’occurrence dans mon ministère à 250 équivalents temps plein (ETP).

Madame Gaillard, la présence d’un délégué interministériel à la biodiversité ne me semble pas pertinente puisque la SNB – je le rappelle – a été élaborée sous le timbre du Premier ministre et de façon largement interministérielle. Il me semble plus important de travailler à l’engagement de tous et je ne suis pas sûre qu’un tel délégué changerait sensiblement la donne. Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, par exemple, s’est engagé à soutenir la biodiversité dans tous ses appels d’offres, tant à l’agence nationale de la recherche qu’à la FRB et dans les autres organismes qui dépendent de lui. C’est de ce type d’engagements dont nous avons besoin afin de répondre aux enjeux qui sont devant nous.

Monsieur Bono, la fin du financement du remorqueur Anglian Monarch, dans la Manche, ne constitue pas en effet une bonne nouvelle – j’ai rencontré sans grand succès mon homologue britannique – et nous avons donc été contraints de transférer L’Abeille Languedoc vers le « rail », où les risques sont plus grands. Je ne crois pas que le désengagement britannique s’explique par la présence de courants qui pousseraient vers nos côtes : il relève bien plutôt, me semble-t-il, d’une politique de rigueur budgétaire. Quoi qu’il en soit, le Golfe de Gascogne n’en reste pas moins surveillé par deux remorqueurs basés à La Corogne, certes, mais aussi à Brest. De plus, un audit du ministère de la défense est en cours afin d’examiner la possibilité d’en affecter un nouveau, plus petit, à La Rochelle.

Monsieur Boënnec, le décret concernant le Conseil national est à ma signature. Ce dernier comprendra 50 % d’élus, auxquels s’ajouteront les représentants de quatre collèges du Grenelle – organisations professionnelles, syndicats, ONG, établissements publics - conformément aux engagements qui avaient été pris. Les conseils maritimes de façade en métropole et les conseils de bassins maritimes outre-mer comprendront quant à eux les représentants des quatre collèges, leur installation étant prévue au mois de septembre. La gouvernance maritime gagne donc ainsi en cohérence.

M. Philippe Boënnec. Une commission permanente sera-t-elle installée ?

Mme la ministre. Oui.

Monsieur Fidelin, l’appel d’offres qui sera publié dans les semaines à venir prévoit qu’une partie de la note attribuée aux soumissionnaires reposera sur l’intégration environnementale dans tous les sens du terme, laquelle implique une discussion avec l’ensemble des usagers de la mer – y compris les pêcheurs - ainsi que leur participation et leur adhésion aux projets. De mémoire, le prix comptera pour 40 % de la note, le projet industriel et l’emploi pour 40 % et la dimension environnementale et pêche pour 20 % – ce qui est important puisque les marges de différentiation au titre des deux premières dimensions sont faibles, alors que la dernière inclut des aspects nouveaux comme les récifs artificiels ou l’insertion des câbles. À ce propos et afin de contribuer à améliorer encore la situation, les soumissionnaires sont invités à tenir compte du fait que les éoliennes constituent en elles-mêmes des récifs artificiels. J’ajoute que la taxe sur l’éolien off shore permettra de financer d’autres actions et qu’elle bénéficiera aux pêcheurs à hauteur de 35 %.

M. Frédéric Cuvillier. A-t-on une idée de son montant ?

Mme la ministre. Environ six millions d’euros.

J’insiste à nouveau, monsieur Menuel : je souhaite que la FNSEA rejoigne la SNB. Il est d’ailleurs notable que, alors que nous attendions une implication du monde agricole, ce soit plutôt le Medef qui, deux jours avant que la SNB ne soit publiée, ait manifesté son enthousiasme en faisant état de propositions concrètes, sa présidente ayant quant à elle fait des déclarations politiques fortes. Je le répète, la sécheresse que nous connaissons explique sans doute une telle situation. Les engagements de l’État étant connus et publics, je gage que les discussions pourront redémarrer sur des bases communes.

Monsieur Plisson, le refus politique d’un dispositif jugé excellent se traduit souvent par le regret que l’on n’ait pas procédé autrement... S’agissant du parc marin des Pertuis charentais, la concertation est en cours, le périmètre n’est pas définitivement arrêté, la zone envisagée est très large mais bénéficie d’une véritable continuité écologique et elle pourrait être scindée, si cela était nécessaire, sur un plan opérationnel. Je vous invite donc à vous engager de façon positive dans cette concertation.

Madame Berthelot, un appel à projets de recherche opérationnelle sur la biodiversité a été lancé pour l’outre-mer.

Mme Chantal Berthelot. Il concerne la biodiversité ou les ressources halieutiques ?

Mme la ministre. Deux appels à projets concernant spécifiquement l’outre-mer ont en fait été lancés dans le cadre de la SNB.

La consultation des différentes parties à propos de la convention sur la diversité biologique ne se terminera que le 16 juin en raison d’un problème de traduction. Ne voyez donc aucune mauvaise volonté de notre part : c’est pour cette simple raison que nous n’avons pas pu engager le processus de ratification des accords de Nagoya avant cette date. L’étude commandée par le ministère de l’écologie sur l’APA sera remise le 29 juin et nous nous lancerons ensuite dans un processus législatif. Nous serons donc au rendez-vous, dans les délais, en 2012, notre objectif étant de jouer un rôle moteur au sein de la Commission européenne où la question de l’APA est particulièrement débattue. À la suite du comité opérationnel (COMOP) « aménagement du littoral » que vous coprésidiez, des actions concrètes ont été menées, comme l’expérimentation sur les « SCOT Grenelle de la mer » ou la stratégie nationale de gestion du trait de côte confiée à l’un de vos collègues, Alain Cousin, dont j’attends les conclusions à la fin du mois de juin. Il est donc encore temps de travailler avec lui à l’élaboration d’un guide des bonnes pratiques.

Dans le cadre des réflexions sur l’urbanisme de projets – sur lequel se tient demain et après-demain un séminaire – nous envisageons, monsieur Le Nay, une simplification des procédures non pour abaisser les exigences environnementales, mais parce qu’une trop longue attente des décisions ne constitue en rien une protection : il convient, en effet, d’être rapide et de mettre un terme à une sélection par la lassitude, même si cela ne signifie évidemment pas que les réponses positives seront plus nombreuses. Sur ces bases, le code de l’urbanisme pourrait donc être révisé afin d’être conforme au Grenelle de l’environnement. Même si nous sommes dans la dernière ligne droite, je vous invite à vous rapprocher du comité de pilotage « urbanisme de projets » afin de faire part de vos propositions. Je rappelle, enfin, que des ordonnances devraient être prises en la matière au mois de juillet et que, disposant d’un créneau législatif dans les mois qui viennent, une application de ces dispositifs est envisageable à court terme.

Monsieur le président Grouard, j’ai eu l’occasion d’évoquer la question des cormorans au cours de deux séances de nuit, l’une au Sénat, l’autre à l'Assemblée nationale. À ce jour, 40 000 autorisations de destruction ont été accordées. Le ministre Bruno Lemaire et moi-même agissons ensemble auprès de la Commission européenne afin de faire évoluer le cadre européen et de sortir du système des autorisations, s’agissant d’un animal dont chacun sait qu’il crée bien des problèmes. J’ajoute que nous avons demandé l’inscription de notre initiative au conseil « environnement » et que, en attendant, nous nous efforçons de délivrer toutes les autorisations possibles.

Oui, il est possible de mieux utiliser les infrastructures existantes, dont les corridors. Des réflexions en ce sens ont été menées, notamment s’agissant de la LGV Rhin-Rhône. Nous nous situons dans le cadre d’une stratégie de reconquête et non de préservation de ce qui existe, l’un des appels à projet de la SNB concernant la restauration des continuités écologiques. Nous réfléchirons en particulier aux secteurs qui comportent plusieurs types d’infrastructures dont le cumul brise lesdites continuités.

Les produits phytosanitaires comportent une mention « Emploi autorisé jardins » (EAJ) dont le contenu vient d’être modifié : nous avons ainsi diminué le taux de substances actives autorisées – ce qui n’obère en rien leur efficacité – et nous organisons une campagne destinée aux jardiniers amateurs dans le cadre du plan « Ecophyto 2018 ». Cela dit, certains jardiniers font n’importe quoi et il n’est pas possible de mettre un policier derrière chacun d’eux.

En ce qui concerne les PAPI, une commission mixte se réunira en juillet et en septembre afin d’analyser les projets. Les élus, dont M. Plisson, pourront donc savoir rapidement si leur projet est ou non validé.

Le rapport de M. Paternotte ayant mentionné celui de Catherine Chabaud, je vous rappelle que les Journées de la mer et des océans qui se dérouleront du 8 au 13 juin constituent un rendez-vous très important. Je me rendrai personnellement à Biarritz, Boulogne-sur-Mer et Guérande. Le lancement officiel aura lieu à Paris le 9 juin dans un cadre magnifique puisque la façade du musée de la marine, au Trocadéro, s’animera en donnant à voir le fond des océans.

M. Jean-Paul Chanteguet. Pour quelle raison les résultats de l’audit sur les mesures fiscales défavorables à la biodiversité ne sont-ils pas communicables ? Le ministère, en effet, a refusé d’en faire part à MM. Tourtelier et Demilly.

Mme la ministre. Les conclusions de l’audit font l’objet d’arbitrages interministériels.

M. Jean-Paul Chanteguet. Il y restera donc jusqu’aux élections présidentielles ?

Mme la ministre. Non. Les conclusions seront publiées.

M. le président Serge Grouard. Je vous remercie, madame la ministre, pour la précision de vos réponses.

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Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 25 mai 2011 à 16 h 15

Présents. - Mme Chantal Berthelot, M. Philippe Boënnec, M. Maxime Bono, M. Jean-Paul Chanteguet, M. André Chassaigne, M. Frédéric Cuvillier, M. Raymond Durand, M. Daniel Fidelin, Mme Geneviève Gaillard, M. Serge Grouard, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Le Nay, Mme Christine Marin, M. Gérard Menuel, M. Bertrand Pancher, M. Yanick Paternotte, M. Philippe Plisson

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Jean-Yves Besselat, M. Jérôme Bignon, M. Jean-Claude Bouchet, M. Christophe Bouillon, M. Christophe Caresche, Mme Claude Darciaux, M. François-Michel Gonnot, M. Michel Havard, M. Antoine Herth, Mme Fabienne Labrette-Ménager, M. Jean Lassalle, M. René Rouquet, M. Max Roustan, M. Jean-Marie Sermier, M. André Vézinhet