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Commission des affaires économiques

Mardi 30 mars 2010

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 52

Présidence de M. Patrick Ollier Président
et de
M. Christian Jacob Président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

– Réunion commune avec la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Présentation du rapport de la mission d’information commune sur l’énergie éolienne (M. Franck Reynier, rapporteur). 2

La commission a examiné, lors d’une réunion commune avec la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, le rapport de la mission d’information commune sur l’énergie éolienne (M. Franck Reynier, rapporteur).

M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable. La commission des affaires économiques et la commission du développement durable sont réunies aujourd’hui pour examiner les conclusions de la mission d’information commune sur l’énergie éolienne. Cette mission, créée par les deux commissions, a été lancée le 7 octobre dernier. Elle a effectué un important travail et je tiens à remercier tous ceux qui y ont contribué. Elle a rencontré 40 personnes au cours de 21 auditions et il en est résulté des propositions de bon sens et équilibrées.

Deux rapporteurs avaient été nommés, l’un appartenant à la commission des affaires économiques, l’autre à la commission du développement durable. M. Philippe Plisson a démissionné, ce que j’ai regretté, car il aurait été préférable qu’il apporte sa contribution en participant au rapport. De ce fait, M. Franck Reynier est désormais le seul rapporteur.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La mission d’information que j’ai présidée a formulé cinq propositions et deux recommandations. Je remercie les membres de la mission qui ont participé régulièrement aux auditions et à ceux d’entre eux qui ont effectué le déplacement au Danemark.

Je tiens à m’inscrire en faux contre des informations diffusées dans la presse, désagréables pour moi, car je n’ai jamais voulu que le rapport porte la marque d’un parti pris ; je suis favorable au développement de l’énergie éolienne, ainsi qu’à la protection des paysages et j’estime qu’il convient de concilier ces deux impératifs. J’ai créé les ZDE et exigé le permis de construire et les enquêtes publiques pour l’installation de parcs de production, mais ces différents dispositifs ont été contournés : il en a résulté un développement anarchique donc des problèmes d’acceptation par la population que nous avons tous constaté.

Il m’est donc apparu qu’il fallait faire un état des lieux et proposer une réglementation afin de favoriser le développement de l’énergie éolienne, sans a priori. Le fait que je sois également favorable à l’énergie nucléaire ne doit pas être considéré comme un obstacle : je constate simplement que 10% de notre énergie électrique est carbonée, alors qu’au Danemark, la situation est tout autre, puisque la proportion est de 70 %.

J’avais imaginé que nous pourrions trouver un consensus. Dès la réunion de la mission du 17 mars, j’ai accepté de supprimer des passages du rapport jugés excessifs par certains de ses membres. Je me suis félicité qu’un consensus ait pu être dégagé sur quatre des propositions ; en revanche, il n’a pu l’être sur une autre et je regrette que, de ce fait, cet accord ait été remis en cause. Je remercie tous ceux qui ont souscrit à nos propositions.

M. Franck Reynier, rapporteur. Je remercie les Présidents Christian Jacob et Patrick Ollier, qui ont pris la décision de créer cette mission sur un sujet qui suscite les passions, ainsi que tous ceux qui y ont participé. Je tiens à souligner les travaux se sont déroulés dans un climat de respect mutuel.

Je ferai deux constats. Le premier est que ce sujet est clivant : les pro comme les anti éolien sont très déterminés, si bien qu’il ne s’avère pas possible de parvenir à un consensus. Le deuxième est que cette mission a été créée car ce sujet pose effectivement problème.

Je rappellerai le contexte européen et national. En décembre 2008, l’Union européenne a adopté le paquet « énergie-climat », et, en particulier, la règle des « Trois fois vingt » : réduire de 20% les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, améliorer de 20 % l’efficacité énergétique, porter à 20 % la part d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie de l’Union européenne. La loi du 3 août 2009 relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (Grenelle 1) précise en outre que la France s’engage à porter la part des énergies renouvelables à au moins 23 % de sa consommation d’énergie finale d’ici à 2020. Pour satisfaire de tels objectifs, il convient d’atteindre une puissance éolienne installée de 25 000 MW, dont 19 000 sur terre et 6 000 en mer. Actuellement, 4 700 MW ont été installés, ce qui correspond à 2 600 éoliennes terrestres ; en mer, un seul projet est en cours, celui de Veulettes, résultant d’un appel d’offres lancé en 2004.

Il est important de définir un cadre afin d’éviter le mitage du territoire et d’obtenir une meilleure acceptation par la population, ce qui est difficile, comme l’ont montré les auditions. Il convient donc de planifier le développement de l’énergie éolienne et de renforcer l’intervention de l’État : celui-ci est toujours présent dans le secteur de l’énergie, sauf pour l’éolien, où la situation est floue : il lui revient de réaffirmer ses objectifs et les planifier. Il faut également répondre aux inquiétudes des riverains en instaurant une distance minimale entre les parcs éoliens et les habitations et en prévoyant le démantèlement des installations à la fin de leur vie.

La mission a adopté cinq propositions.

La première vise à mettre en place des schémas régionaux permettant de décliner des objectifs nationaux au sein des territoires. Ces documents ne seront pas un vœu pieux, car ils seront opposables. Cette planification donnera plus de lisibilité à l’éolien : les engagements pris par l’État seront relayés par les conseils régionaux, les conseils généraux et les différents acteurs des territoires.

La deuxième consiste à éviter le mitage en créant la notion d’unité de production au sein des ZDE avec un seuil de puissance installée que la mission souhaite fixer à 15 ou 20 MW. Afin de tenir compte de l’évolution technologique qui conduira à la création de machines de plus en plus puissantes, il a également été prévu que un nombre minimal de 5 mâts par unité de production.

La troisième prévoit l’instauration d’une distance minimale de 500 m entre les parcs éoliens et les habitations ou les locaux d’activité préexistants.

La quatrième proposition a fait débat au sein de la mission. Actuellement, il n’existe plus aucun contrôle après que le permis de construire et les différentes autorisations aient été accordées : il est nécessaire qu’un suivi soit réalisé tout au long de la vie d’un parc, et même au-delà, jusqu’à son démantèlement. La mission a choisi le dispositif qui lui paraissait le plus adapté et a proposé d’appliquer le régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), au niveau le plus bas de l’autorisation. Ce régime a été retenu par la mission car il est connu, robuste, a fait ses preuves. Il faut souligner toutefois que, sur les quelque 500 000 installations actuellement régies par ce dispositif, moins de 2 % relèvent de la directive « Seveso » : il est évident qu’un régime d’autorisation intégrant les dispositions de cette directive ne serait pas adapté aux équipements éoliens.

La cinquième proposition porte sur l’obligation pour les opérateurs de constituer des provisions dès le début de l’exploitation afin de procéder au démantèlement des installations en fin de vie.

La mission a également formulé deux recommandations. Elle a souhaité une forte présence de la recherche et de l’industrie dans le domaine des ressources marines et notamment l’éolien off shore : au Danemark, le développement de l’éolien en mer est important, car la population n’accepte plus vraiment la croissance ou la multiplication de parcs éoliens terrestres ; en France, les profondeurs marines étant plus importantes qu’au large du Danemark, il faudra étudier de nouvelles technologies et, notamment, les éoliennes flottantes par des systèmes de ballastes. La France doit donc investir dans la recherche, ainsi que l’ont souligné les industriels auditionnés par la mission. Cette voie est d’autant plus importante à explorer que les éoliennes terrestres sont en général produites par des constructeurs étrangers.

La deuxième recommandation porte sur la nécessité de constituer une filière française compétitive, d’un poids significatif dans le secteur des énergies renouvelables et créatrice d’emplois.

M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable. Je remercie le rapporteur de ce travail de qualité qu’il a de surcroît su exprimer en une remarquable synthèse. Avant que les députés qui ont demandé la parole ne s’expriment, M. François Brottes souhaite faire un rappel au règlement.

M. François Brottes. Je laisserai mon collègue Philippe Plisson analyser les limites d’une mission d‘information vouée à la recherche d’un consensus introuvable. Mon rappel au règlement porte sur la modification de l’ordre du jour de la commission des affaires économiques dont nous avons été informés cet après-midi pour ce soir. Ce n’est guère commode pour l’opposition. J’aurais souhaité que nous auditionnions, comme prévu, le président de La Poste avant le renouvellement de son mandat qui devrait intervenir, paraît-il, au cours du conseil des ministres de demain. Pourquoi sommes-nous ainsi privés de sa venue ? Anticipe-t-on sur une privatisation à venir ? Le président de La Poste n’a-t-il aucun bilan à présenter à la représentation nationale ? Est-ce dans la droite succession de la loi portant modification du statut de La Poste ? Quelle que soit la raison avancée, je m’insurge de voir l’Assemblée nationale ainsi bafouer le devoir de contrôle des députés sur une grande entreprise publique.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. J’assume cette décision de report qui est de mon fait. Je l’ai prise pour que nous puissions achever notre examen du projet de loi Grenelle II dans des conditions satisfaisantes, car nous ne disposerons que d’une heure dans la journée de demain. Or notre calendrier est contraint par celui de la commission du développement durable, qui est saisie au fond. J’ai fait le choix de donner la priorité à l’examen de ce projet de loi par rapport à l’audition de M. Jean-Paul Bailly dans la mesure où cette audition ne devait pas être suivie d’un vote. Dans le cas contraire, ma position aurait été différente.

M. François Brottes. Quand appliquerons-nous finalement la Constitution qui nous ordonne de voter sur les nominations à la présidence des entreprises publiques ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous attendons que le Sénat ait procédé à l’adoption des textes d’application de la disposition en question.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est faire peu de cas des parlementaires que de les informer si tardivement d’un changement d’ordre du jour. Nous ne pouvons pas travailler correctement en commission et nous nous trouvons de surcroît amenés à modifier dans l’urgence nos propres agendas tout aussi légitimes.

M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable. Chacun a bien compris le sens du rappel au règlement et la réponse qui lui a été apportée. Nous pouvons passer à la discussion des conclusions de la mission d’information commune.

M. Philippe Plisson. Notre participation à cette mission d'information sur l'énergie éolienne s'inscrivait dans le cadre de l'examen du Grenelle II. Nous sommes entrés dans cette mission avec la volonté de participer à la définition consensuelle d’un cadre législatif et réglementaire précis, durable et conforme au respect des engagements européens de la France. Les objectifs de la mission définis au cours de sa première réunion visaient à établir un état des lieux des activités éoliennes, étudier leurs perspectives de développement et engager une analyse des conditions de leur acceptation par la population.

Six mois de travail et les auditions auxquelles nous avons procédé nous avaient laissé espérer la possibilité de trouver une synthèse pour considérer que le vent comme le soleil était une véritable énergie renouvelable ayant sa place dans notre bouquet énergétique. Malheureusement, nous constatons que tous les objectifs de la mission ne sont pas remplis. Si l'état des lieux est réalisé, les perspectives de développement de la filière n'apparaissent nulle part. En outre, la mission analyse les conditions de leur acceptation par la population en se limitant aux citations des opposants à l'éolien auditionnés.

Il en résulte un rapport déséquilibré et lacunaire, rédigé à charge, qui ne répond pas aux objectifs initiaux et qui prône l’addition de contraintes : on signe ainsi l’arrêt de mort de l’éolien en France.

M. Serge Poignant. Je peux attester du souci constant de la mission d’information d’écouter toutes les opinions. Ses préconisations ne visent pas à tuer l’éolien mais à l’encadrer. Il est capital d’informer les citoyens des implantations futures, de les assortir de règles précises afin précisément de permettre un développement harmonieux et sans blocage.

J’apporte un soutien plein et entier à ce rapport. Je suggérerai d’ailleurs que nous convertissions en un amendement au Grenelle II, la proposition relative à des schémas régionaux opposables. Certaines de nos auditions ont fait apparaître des positions restrictives, d’autres des positions permissives, entre les deux nous avons choisi la pondération.

M. Daniel Paul. Les représentants du groupe GDR au sein de la mission se sont abstenus après avoir hésité à voter contre ses conclusions. On ne peut livrer un rapport d’information sur l’énergie éolienne sans lier cette réflexion à la politique énergétique nationale et à sa libéralisation récente. On ne peut expliquer autrement le déferlement de projets d’implantations, plus ou moins sérieux, plus ou moins sauvages, par des sociétés ou groupes plus ou moins connus, ce que nous ne pouvons accepter.

Le développement des énergies renouvelable doit veiller à demeurer acceptable par les populations des territoires concernés. Les urbains ne peuvent prendre seuls une décision dont ils ne supporteront guère les conséquences.

Enfin, je suis attaché à la production d’une énergie à un coût abordable autant qu’au respect des droits et libertés des gens de mer car les espaces maritimes doivent, avant tout, être quotidiennement à la disposition des travailleurs des transports et de la pêche. Le nombre impressionnant de parcs maritimes actuellement en projet confine à l’aberration.

M. Jean Dionis du Séjour. Je tiens à dire que je trouve le rapport excellent, d’une lecture tout à fait passionnante. Le groupe Nouveau Centre, qui est attaché à la poursuite d’un vrai débat sur le Grenelle de l’environnement, a particulièrement à cœur de sauvegarder l’objectif, à savoir sortir le plus vite possible d’une économie carbonée. Pour cela, il faudra faire preuve de détermination, si l’on souhaite que la France respecte son engagement d’intégrer 23 % d’énergies renouvelables à sa consommation d’énergie finale. En considérant le « mix électrique » français qui se compose de plus de 75 % d’énergie d’origine nucléaire, de 12 % de ressources hydrauliques et de 11 % de ressources carbonées, on s’aperçoit que l’éolien ne représente aujourd’hui que 1,5 %, soit 7 TwH sur 518. J’ajoute qu’au regard des contraintes rencontrées par le développement de l’énergie solaire et de l’hydraulique, il est très important de ne pas freiner l’éolien. C’est pourquoi en dépit d’une appréciation favorable aux quatre premières propositions de la mission d’information commune, je reste sceptique concernant l’assujettissement des activités éoliennes au régime des ICPE qui pourrait entraver leur développement ; ce qui amène le groupe Nouveau Centre à s’abstenir.

M. Philippe Tourtelier. Il apparaît important de rappeler le contexte au regard des engagements de la France de porter à 23 % de sa consommation énergétique finale, la part des énergies renouvelables. Or, la France pourra-t-elle tenir sa parole ? On constate que pour respecter l’objectif qu’elle s’est assigné, il faudrait augmenter la puissance éolienne de 1 300 MW par an au minimum, alors, qu’en 2009, 1 000 MW seulement on été installés.

Toutes les propositions de la mission aboutiront à freiner le développement de l’éolien. De plus, les évolutions du rapport à partir d’une première version très orientée n’apportent pas d’avancées significatives, d’autant qu’il reprend sans esprit critique les positions de la Commission de régulation de l’énergie qui devait donner son avis sur des tarifs et a, en fait, exprimé une opinion sur l’opportunité de l’énergie éolienne. Ce document maintient, par ailleurs, l’idée fausse que toute production éolienne doit être adossée à des capacités de production thermiques complémentaires du fait de son intermittence, alors qu’en 2006, par exemple, l’éolien s’est même partiellement substitué à de la production d’origine nucléaire, ce dont le rapport se garde de parler.

De même, ne sont pas repris les propos de la directrice de la législation fiscale qui, au cours de son audition, a bien indiqué qu’il n’y avait pas d’effet d’aubaine, ce que confirme d’ailleurs un récent article de la Revue de l’Énergie qui souligne que la rentabilité moyenne des investissements est de 12 %. À mon avis, la France perdra en crédibilité si elle ne peut pas tenir ses engagements, ce que laisse augurer un rapport bien trop peu prospectif qui, par exemple, ne s’est pas intéressé à des efforts de recherche actuellement conduits pour mettre au point des éoliennes de plus petite dimension et pourtant capables de gagner en puissance.

M. Christophe Priou. Je considère, pour ma part, que la mission a accompli un travail de fond dont il convient de souligner l’esprit consensuel, notamment parce qu’il aboutit à des propositions concrètes. J’approuve son pragmatisme, en rappelant que s’agissant de l’éolien off shore que je préfère appeler éolien en mer, il me paraît important que l’on ne tourne pas le dos à d’autres ressources marines et notamment la force houlomotrice qui fait actuellement l’objet d’études intéressantes. Les activités liées aux énergies marines constituent une opportunité pour les chantiers navals et les autres activités marines comme celles des bateaux qui seront nécessaires à la pose d’éoliennes en mer. Je m’interroge, par ailleurs, sur l’éolien des particuliers qui concerne des machines de moins de 12 m et dont on nous dit qu’il ne serait plus soumis à un régime d’autorisation d’urbanisme.

Mme Frédérique Massat. Le travail de la mission auquel j’ai participé a été intéressant, notamment par les auditions, qui toutefois n’ont pas été toutes reprises dans le rapport. Nous ne nions pas qu’il existe parfois des difficultés d’acceptation des éoliennes par la population, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous n’étions pas hostiles à l’idée d’un schéma sous réserve qu’il soit élaboré avec les élus. Nous constatons, en revanche, que les propositions de la mission aboutissent à un empilement de contraintes et à la soumission à la procédure des ICPE qui n’est pas acceptable. Le rapport fait l’impasse sur les conditions dans lesquelles l’énergie éolienne peut se substituer à d’autres sources d’énergie, il est partial sur la question du tarif de rachat, voire même sur le démantèlement. En fait, ce rapport se focalise sur les nuisances supposées et s’est ainsi détourné des objectifs initiaux de la mission qui étaient de faire un bilan sans a priori.

M. Daniel Fidelin. Après six mois de travail, la mission a rendu un rapport équilibré et objectif. Il s’agit d’un bon diagnostic qui traite effectivement des questions relatives à l’énergie éolienne, et non des avantages comparatifs avec l’énergie nucléaire ou thermique. Il s’avérait effectivement urgent de mettre en place un cadre de programmation au moyen des schémas éoliens et les propositions de la mission ne constituent pas « un mauvais coup porté aux éoliennes » comme je l’ai entendu dire, ce matin, sur une radio. J’ajoute que la procédure des ICPE présente l’avantage de prévoir une enquête publique puis des contrôles au cours de l’exploitation.

S’agissant des projets de production éolienne en mer, les procédures qui devront être mises en œuvre pour aboutir à l’autorisation de certains projets requièrent de la souplesse, ce que ne permet pas la réglementation des ICPE qui correspond mieux aux projets terrestres, pas plus que le régime des permis de construire totalement inadapté concernant des installations en mer. On doit, en revanche, se féliciter que le Gouvernement envoie un message fort en délimitant des zones propices aux activités éoliennes off shore, ce que soutient le rapport. Enfin, il est important de souligner les perspectives ouvertes aux zones portuaires par le développement de l’éolien en mer qui devrait permettre de créer des emplois.

Mme Catherine Coutelle. D’abord, je tiens à dire qu’il est difficile de travailler en commission, si l’agenda change de thème de travail, le jour même d’une réunion. Pour revenir à la mission d’information, j’ai tenu à aborder la question de l’éolien sans a priori. La production d’électricité d’origine éolienne est une nécessité dans notre « mix énergétique » au regard des engagements de la France. Je constate n’avoir pas rencontré au cours de nos travaux de pro-éoliens ayant affirmé devant la mission que l’on ne pourrait vivre qu’avec la seule production des éoliennes. En revanche, en instituant des barrières supplémentaires et des freins à la création de sites de production, la mission d’information n’envoie pas un signal positif, même s’il existe parfois des problèmes d’acceptation des éoliennes dans certaines régions. En prenant l’exemple de l’autoroute A83 entre Niort et Nantes, on peut toutefois considérer que des éoliennes dont l’installation a été bien réalisée participent à l’embellissement de parties du paysage qui par elles-mêmes ne présentent pas un caractère exceptionnel. Enfin, il est nécessaire d’insister plus fortement que ne le fait le rapport sur le développement d’une filière qui serait partie prenante d’une nouvelle « économie verte ».

M. Daniel Fasquelle. L’opinion a beaucoup évolué sur l’éolien et ce rapport en tient compte, ce qui est louable. Comme mes collègues, je tiens à féliciter les rapporteurs pour la qualité de leur travail.

Oui à l’éolien, évidemment, mais à un éolien maîtrisé. L’institution de schémas régionaux, que préconise le rapport, va dans le bon sens ; j’avais d’ailleurs déposé des amendements à ce sujet lors de l’examen du projet de loi Grenelle I avec mon collège Alain Gest. Le rapport tient aussi compte de la question du démantèlement des éoliennes, jusqu’ici trop souvent oublié.

J’ai noté quelques manques dans les recommandations. Le rapport relève, par exemple, l’existence d’effets d’aubaine mais n’en tire pas de conséquences.

Concernant la protection du paysage, ensuite, son importance n’a peut-être pas été suffisamment prise en compte s’agissant notamment d’éventuels effets sur le tourisme qui représente 6 % de notre PIB et la France est la première destination : attention à ne pas abîmer le paysage !

J’attire votre attention aussi sur l’éolien offshore. Je ne crois pas que les touristes souhaiteront fréquenter des plages au large desquelles sont installées des éoliennes. Les activités de pêche ne doivent pas non plus être pénalisées par ce type d’installations ; j’en ai discuté récemment avec le président du comité national des pêches et je regrette qu’il n’ait pas été auditionné.

Je souhaite aussi signaler, pour conclure, que l’installation d’éoliennes peut modifier les voies de passages des oiseaux migrateurs et perturber les activités de chasse.

M. Jean-Yves Besselat. Je tiens moi aussi à féliciter les rapporteurs. Je salue particulièrement le fait que le rapport souligne la nécessité d’une organisation du territoire par l’État sur terre comme en mer. Le développement des activités éoliennes a, à mon sens, été fortement pénalisé par l’absence de pilotage préfectoral, surtout au niveau régional qui est, à mon avis, le bon échelon. Je veux dire en outre au Président Ollier que je partage entièrement la philosophie qu’il a exprimé dans son propos liminaire : en matière d’éolienne, il faut raison garder.

Je me contenterai de deux remarques. Premièrement, je suis stupéfait par l’installation de 7 éoliennes sur un site aussi exceptionnel que celui de l'aber Benoît, en Bretagne, et je vous ferai parvenir un courrier, monsieur le président, à ce sujet. Il me semble également que l’installation d’éoliennes en mer présente de vrais risques pour la sécurité maritime : l’État doit avoir une vision globale des activités en mer pour gérer correctement le trafic.

M. Alain Gest. Je voudrais d’abord remercier notre rapporteur, M. Franck Reynier, pour la qualité de son rapport, qui a le grand mérite de ne pas nous faire croire que nous vivons en matière d’éolienne au milieu des « bisounours ». Nous avons raté le lancement de l’éolien en France.

La proposition de la mission relative à l’ICPE mérite une mention spéciale. Contrairement à ce que pensent certains, il vaut mieux une procédure connue, même si elle a quelques lenteurs, plutôt qu’une procédure qui, de fait, empêche la prise en compte de tous les éléments au titre des permis de construire.

Par ailleurs, je ne peux que souscrire à la proposition de créer des schémas régionaux. J’avais d’ailleurs déposé une proposition allant dans ce sens lors de l’examen du projet de loi du Grenelle 1. La date limite du 31 décembre 2011 pour établir ces schémas m’apparaît toutefois trop éloignée et c’est la raison pour laquelle il me semble souhaitable d’instaurer un moratoire jusqu’à ce que les schémas puissent jouer leur rôle.

M. Francis Saint-Léger. Ce rapport va dans le bon sens et les propositions me paraissent tout à fait équilibrées et pragmatiques. Je reste dubitatif sur la distance prescrite des 500 mètres. Cette distance ne tient ni compte de la puissance et des nuisances sonores qui en résultent ni des spécificités tenant localement à l’habitat. Comme je l’ai déjà dit dans le cadre de la mission, inscrire cette distance dans la loi risquerait de conduire à accepter tous les projets respectant ce critère alors que dans bien des cas, 500 mètres ne sont pas suffisants pour atténuer les nuisances sonores et l’impact visuel. La distance doit donc, à mon sens, rester indicative. À cette réserve près, je suis évidemment favorable au rapport.

M. Jérôme Bignon. Je salue moi aussi les auteurs du rapport. Je regrette toutefois que rien ne soit dit sur l’implantation d’éoliennes offshore alors qu’un certain nombre de dispositions auraient pu les concerner.

Il faut d’abord souligner un besoin de transparence dans les décisions d’implantation des parcs éoliens, condition nécessaire pour que la population s’approprie les projets. Lorsque le préfet maritime prend ces décisions dans le secret de son cabinet, cela ne me paraît pas très bon. L’exigence figurant dans le rapport d’une expertise scientifique afin de valider la décision de créer des zones maritimes propices, sous un certain délai, m’apparaît constituer une excellente idée.

Autre point : les risques que font encourir l’installation d’éoliennes à 3 miles d’un rail de trafic. Ce type d’installation est une aberration qui aboutira à un accident majeur lorsqu’en situation de tempête, un superpétrolier ira percuter de telles implantations. Je remarque, par ailleurs, que nous manquons de données sur la rentabilité des éoliennes offshore, notamment en fonction de leur distance du littoral et de la profondeur des fonds. Il faudrait, là aussi, plus de transparence sur ce sujet.

S’agissant de la fiscalité, il aurait été intéressant d’imaginer qu’une partie du produit de la fiscalité de l’éolien en mer soit transférée aux activités de pêche.

M. Claude Gatignol. Le rapport me paraît manquer de précisions, notamment sur le fait que le marché de l’énergie éolienne n’est pas encore mature. Il aurait fallu ensuite ajouter aux coûts bruts de production différents surcoûts, spécialement dus au caractère aléatoire de la production, ce qui est noté par RTE. Il faut aussi distinguer la puissance installée mesurable en MW de la puissance produite annuellement, mesurable en MWh, afin d’éviter des confusions regrettables : il faudrait connaître les coûts réels du MWh. Deux points pour conclure : d’abord, la course à la redevance est réelle ; à ce titre, je mentionnerais les aides attribuées de 20 000 euros par an et par éolienne et pour les propriétaires fonciers les quelque 8 000 euros perçus par éolienne. Ensuite, la façon dont est traité par le rapport l’éolien en mer m’apparaît insuffisante ; avec 200 éoliennes en projet au large de ma circonscription, certaines sont évoquées dans le parc du Calvados et sur les plages du débarquement, face aux plus belles côtes du Cotentin, je trouve très exagéré de citer le Danemark en exemple. D’ailleurs, des voisins comme les Norvégiens ou les Suédois apprécient peu le traitement que fait subir ce pays à leurs paysages.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vais passer la parole à M. Franck Reynier, rapporteur, avant que nous passions à un vote commun des membres de la commission des affaires économiques et de la commission du développement durable.

M. Franck Reynier. Monsieur le président, nous entrerons plus dans le détail à l’occasion de l’examen des amendements traduisant les propositions de la mission.

M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable. L’autorisation de publier le rapport est mise aux voix.

Les commissions des affaires économiques et du développement durable et de l’aménagement du territoire ont ensuite autorisé la publication du rapport de la mission d’information commune sur l’énergie éolienne, les groupes UMP et GDR votant en faveur de cette publication.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 30 mars 2010 à 17 heures

Présents. - M. Jean-Pierre Abelin, M. Jean-Paul Anciaux, M. Jean Auclair, M. Thierry Benoit, M. François Brottes, Mme Catherine Coutelle, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, Mme Pascale Got, M. Jean-Pierre Grand, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, M. Henri Jibrayel, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Michel Lefait, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. François Loos, M. Louis-Joseph Manscour, Mme Jacqueline Maquet, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Patrick Ollier, M. Daniel Paul, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. François Pupponi, M. Michel Raison, M. Franck Reynier, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Michel Villaumé

Excusés. - M. Jean-Louis Léonard, M. Jean Proriol

Assistaient également à la réunion. - M. Bernard Carayon, M. Yves Vandewalle