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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mission d’évaluation et de contrôle

Recettes budgétaires exceptionnelles de la Défense

Mardi 9 mars 2010

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 12

Présidence de M. Georges Tron, Président

– Audition de M. le général de corps aérien Jean-Marc Denuel, sous-chef Plans à l'état-major des armées

M. Georges Tron, Président. Je remercie le général de corps aérien Jean-Marc Denuel, sous-chef Plans à l’état-major des armées, d’avoir répondu à l’invitation de la MEC, qui s’intéresse à la politique de défense de notre pays, compte tenu de son poids spécifique au sein des politiques publiques. Cette année, le bureau de la Commission des finances a choisi de se pencher sur les recettes budgétaires exceptionnelles du ministère de la Défense.

Pour 2010, 1,3 milliard d’euros sont prévus, provenant de la vente de biens immobiliers, de l’aliénation d’ondes hertziennes et, enfin, de la cession de l’usufruit de satellites militaires de télécommunications. Plusieurs incertitudes pèsent sur le calendrier des recettes, dont certaines étaient attendues dès 2009, ce qui pose la question du pilotage d’ensemble du budget, voire de sa sincérité, et conduit à s’interroger sur la façon dont le ministère de la défense – et plus généralement l’État – entend valoriser son patrimoine – sujet sur lequel il y a beaucoup à dire.

Notre objectif, dans le cadre des auditions d’aujourd’hui, est d’obtenir une vision d’ensemble sur ces recettes.

La MEC se devant de dégager des propositions consensuelles, elle est coprésidée par deux parlementaires, provenant l’un de l’opposition – en l’occurrence, David Habib – et l’autre de la majorité, moi-même. C’est aussi le cas de nos deux rapporteurs : Françoise Olivier-Coupeau, membre de la Commission de la défense, appartient au groupe socialiste, et Louis Giscard d’Estaing, rapporteur spécial de la Commission des finances pour le budget opérationnel de la défense, fait partie, lui, du groupe UMP.

Nous avons la chance d’être assistés dans nos travaux par la Cour des comptes, et plus particulièrement par M. Alain Hespel, président de la deuxième chambre, Mme Françoise Saliou, conseiller maître, M. Antony Marchand, conseiller référendaire, et M. Laurent Jannin, rapporteur, que je remercie vivement pour leur participation fidèle.

M. le général Jean-Marc Denuel, sous-chef Plans de l’état-major des armées. En tant que sous-chef Plans de l’état-major, je suis responsable de la construction capacitaire et de l’entretien des capacités opérationnelles des armées. Pour cela, je dispose de la division de la cohérence capacitaire et de la division des plans, programmes et évaluation, laquelle est commandée par le général Bruno Le Ray, notre spécialiste financier, à qui j’ai demandé de venir pour répondre plus précisément aux questions les plus techniques.

Lors de la rédaction du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, il a été décidé d’adosser la construction du système de défense à un référentiel de programmation. La trajectoire de besoins, qui a été élaborée et évaluée à 377 milliards d’euros pour la période 2009-2020, excédait d’environ 3,5 milliards d’euros le montant des ressources initiales anticipées par le ministère du Budget, la « bosse » de besoins se concentrant sur les années 2009-2011. Au départ, il était convenu que les ressources budgétaires seraient stabilisées en valeur – en euros 2008 – jusqu’en 2011, avant de connaître ensuite une augmentation de l’ordre de 1 % par an. Aussi, pour « couvrir » cette bosse, il a été décidé de mobiliser des recettes exceptionnelles pour un montant équivalent, recettes issues du produit des cessions des actifs libérés dans le cadre des restructurations et de la contraction des formats programmées dans le Livre blanc. Pour autant, il était prévisible que le produit des cessions ne suffirait pas.

Dans le même temps, il a été question de céder les fréquences Félin et Rubis – convoitées par les opérateurs civils parce qu’elles étaient plus rentables pour eux que celles qu’ils utilisaient – et demandé à la défense de migrer vers d’autres parties du spectre des fréquences. D’autres types d’opérations ont également été envisagés pour faciliter l’acquisition des capacités de la défense en évitant des pics de dépense pour des achats patrimoniaux et en recourant, comme nos voisins d’outre-Manche pour les communications satellitaires, à la location de services – la location de nos satellites permet de limiter la dépense annuelle et de rationaliser leur utilisation.

Le montant des ressources estimées excédait légèrement la « bosse » de 3,5 milliards, mais les recettes exceptionnelles n’ont pas été au rendez-vous, ni en volume, ni dans le temps. Nous attendions 1 637 millions d’euros en 2009, dont 972 millions de cessions immobilières et 600 millions de cessions de fréquences.

Le retard constaté dans les encaissements a été compensé par des mesures de trésorerie. Nous avons ainsi été autorisés à consommer une partie des reports de crédits du ministère, à hauteur de 400 millions d’euros, qui sont venus s’ajouter aux 500 millions d’euros dont la consommation a été autorisée au titre du plan de relance. Ces sommes ont libéré des marges de manœuvre pour engager des dépenses d’investissement.

Le compte d’affectation spéciale dédié à l’immobilier a été abondé par un redéploiement de crédits internes en provenance du budget général dans un premier temps, couvert par une partie des reports de crédits. Une autre partie des reports – 205 millions d’euros pour le programme 146 Équipement des forces et 40 millions pour le programme 178 Préparation et emploi des forces – a été consacrée aux dépenses immobilières.

Par ailleurs, une baisse des besoins a été constatée en fin d’année, consécutive à une baisse du coût des facteurs. La crise a pesé à la fois sur les salaires et le coût des matières premières.

Globalement, ces mesures ont permis de respecter le volet capacitaire de la programmation. Dans le rapport annexé de la loi de programmation militaire, la priorité donnée à l’investissement se traduisait en 2009 par une enveloppe de 17,55 milliards d’euros valeur 2008 – soit 17,9 milliards en euros 2009 – pour les crédits d’équipement, y compris le plan de relance. L’estimation actuelle de la dépense d’investissement sur le même périmètre est de 17,5 milliards, l’écart étant constitué par des reports de crédits. La programmation a donc été globalement respectée.

Dans l’ensemble, l’infrastructure opérationnelle a été préservée, la contrainte se reportant plutôt sur les crédits d’entretien. À terme, l’exécution de la loi de programmation s’en ressentirait si les recettes exceptionnelles n’étaient pas au rendez-vous.

Pour qu’il n’en soit pas ainsi, il faudra que les cessions se concrétisent à hauteur des estimations initiales pour couvrir la « bosse » initiale de besoins. Compte tenu de la conjoncture actuelle marquée par une dépréciation des actifs immobiliers, le ministère est incité à élargir les plages du calendrier pour négocier et attendre une période plus propice, ce qui implique de nouvelles mesures de trésorerie pour couvrir les dépenses. Il est envisagé de mobiliser cette année de nouveaux reports de crédits, autour de 300 millions d’euros.

Les cessions de fréquences aussi prennent du retard. Le montant attendu reste de 600 millions d’euros mais les négociations avec les opérateurs ne sont pas terminées.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. En tant que rapporteur spécial du budget opérationnel de la défense, je me réjouis que la MEC travaille sur les recettes exceptionnelles du ministère de la Défense, qui constituent un enjeu majeur pour la période 2009-2010.

S’agissant des montants en cause, la loi de finances initiale pour 2009 prévoyait 972 millions d’euros de produit de cessions d’emprises immobilières. D’après nos informations, le chiffre serait tombé à 540 millions d’euros auxquels se sont ajoutés les 170 millions de mesures du plan de relance et 105 millions obtenus par un décret d’avance. Il manquait encore 138 millions d’euros pour atteindre le chiffre inscrit dans la loi de finances initiale. Comment se présentera la loi de règlement que nous voterons en juin ?

En ce qui concerne 2010, il est prévu des cessions immobilières et des cessions hertziennes – 600 millions – pour un total d’environ 1,3 milliard d’euros. Qu’en sera-t-il exactement ?

M. Georges Tron, Président. Pourriez-vous faire le point précisément sur les prévisions et les réalisations pour 2009 et 2010 ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Je me préoccupe surtout de savoir si les crédits prévus pour réaliser les projets de l’année sont au rendez-vous ; or s’agissant de la construction capacitaire, c’était bien le cas.

Quant à la mécanique financière, elle relève de la direction des Affaires financières, dont vous entendrez le directeur tout à l’heure.

Je vous confirme que 972 millions d’euros étaient attendus en 2009, et que les 600 millions au titre des cessions de fréquences ont été reportés.

Par rapport à votre chiffre de 540 millions d’euros, j’affiche 561 millions qui correspondent, outre au produit de cessions pour 65 millions d’euros, à 136 millions d’euros provenant d’un transfert du budget général, à 221 millions d’euros de soulte de la SNI, et à un report de crédits de 139 millions au sein du CAS Immobilier.

M. le général Bruno Le Ray. En ce qui concerne ces chiffres, la difficulté tient au fait que certains d’entre eux sont relatifs à des crédits qui sont transférés sur le périmètre du programme 212 tandis que d’autres sont venus abonder directement le compte d’affectation spéciale, lequel a vocation à recevoir les recettes exceptionnelles.

Si l’on se limite au périmètre du CAS Immobilier, pour lequel on attendait 972 millions, ce sont en fait 561 millions d’euros qui sont « arrivés » en 2009, qui se décomposent de la façon suivante : 65 millions d’euros pour les cessions réalisées dans l’année ; 139 millions d’euros en reports de crédits de 2008 à 2009 au sein du CAS Immobilier ; 221 millions d’euros correspondant à la soulte versée par la SNI dans le cadre du renouvellement du contrat pour la gestion du patrimoine domanial de la défense ; et 136 millions d’euros provenant de la mission Défense du budget général.

M. Charles de Courson. À quoi correspondent ces 136 millions ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Ils proviennent d’autres programmes, notamment des programmes 146 et 178, et ont servi à abonder le CAS Immobilier au fur et à mesure des besoins, et les transferts ont été compensés par les reports de crédits.

M. Charles de Courson. La loi organique permet-elle d’abonder un CAS de cette façon ? N’a-t-elle pas, en l’espèce, été détournée ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Je ne suis pas en mesure de vous répondre et il vaudrait mieux interroger le directeur des Affaires financières.

M. Charles de Courson. Et à quoi correspond la soulte versée par la SNI ?

M. Bruno Le Ray. La soulte a été versée à l’occasion du renouvellement de la convention de longue période passée avec la SNI qui gérait déjà le parc de logements.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Compte tenu de la durée du bail – environ une quinzaine d’années –, il s’agit d’une sorte d’opération de lease back pour se procurer de la trésorerie.

M. Charles de Courson. Qui est le propriétaire des logements ? Si c’est une anticipation de loyers, c’est de la cavalerie.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Les 972 millions d’euros correspondent-ils à l’évaluation par le ministère de ses biens cessibles, dont 65 millions seulement ont été réalisés ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Oui, à ceci près que c’est France Domaine qui a procédé à l’évaluation.

M. Georges Tron, Président. De mémoire, pour l’ensemble du budget pour 2009, 1,4 milliard de cessions étaient programmées – dont 1 milliard pour le ministère de la défense – et 400 millions environ ont été réalisés. Je m’étonne moi aussi du chiffre de 65 millions.

M. Charles de Courson. La soulte de 221 millions était-elle programmée ?

M. Georges Tron, Président. Nous poserons la question au directeur des Affaires financières.

M. le général Jean-Marc Denuel. Pour en terminer avec les questions financières, je sais, même si je n’étais pas membre de la commission du Livre blanc, qu’elle avait abordé le problème de la soulte de la SNI.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Vous avez invoqué, général, la crise immobilière, mais elle ne date pas de 2009.

Je m’interroge surtout sur la cause des retards. L’armée libère-t-elle les emprises à céder dans les délais impartis ? Le coût et le temps des opérations de remise en état et de dépollution ont-ils été correctement estimés ? Les cessions pour un euro symbolique ont-elles pénalisé le ministère de la Défense et à quelle hauteur ?

Est-il vrai que certains bâtiments seront vendus puis reloués par le ministère ? Si oui, de telles opérations ont-elles été chiffrées ? Combien vont-elles coûter ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Je vous répondrai autant que mes compétences me le permettent.

À votre première question, je répondrai oui : le plan de restructuration des armées est suivi. En revanche, les terrains libérés doivent être dépollués ou faire l’objet d’opérations de valorisation comme la mise aux normes de sécurité des bâtiments ; dans un cas comme dans l’autre, cela demande du temps. Ainsi, lorsque j’étais commandant de base, j’ai vu un ancien hôpital libéré par les armées depuis des années rester vide parce que sa mise aux normes coûtait trop cher au regard de la rentabilité espérée. Toute immobilisation est coûteuse. S’il faut engager des dépenses pour dépolluer ou valoriser avant de vendre dans le but de financer la réalisation d’équipements nouveaux, il est extrêmement compliqué de s’en tenir au plan fixé : c’est pourquoi a été conçu un système pour transférer à l’acquéreur la charge de la dépollution.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Il est surprenant de ne pas avoir anticipé ce type de problème.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Il serait judicieux, monsieur le président, d’auditionner France Domaine dans la mesure où la valorisation ou la dépollution ne sont pas de la responsabilité exclusive de l’état-major des armées.

Dans le cadre de la réforme de la carte militaire, les emprises sont libérées dans les délais, sachant qu’en 2009, elles devaient être assez peu nombreuses.

M. le général Bruno Le Ray. Vingt-trois exactement devaient être abandonnées en 2009.

M. le général Jean-Marc Denuel. …dont seize devaient être cédées pour un euro symbolique aux communes ayant conclu un contrat de redynamisation de site. La perte a été estimée par France Domaine à 13,5 millions. En outre, le site du 2ème régiment de hussards de Sourdun a été cédé pour un euro au ministère de l’Éducation nationale et à la SOVAFIM pour réaliser un internat d’excellence : l’emprise était évaluée à 22 millions d’euros. Les six dernières emprises – hors contrat de redynamisation de site – ont été cédées pour une somme totale de 15 millions d’euros mais, en raison de l’échelonnement des paiements, seuls 4 millions d’euros ont été récupérés jusqu’à présent.

M. le général Bruno Le Ray. Le contrat de redynamisation de site de défense – le CRSD – est proposé aux collectivités locales, qui sont libres de l’accepter ou non. Les démarches administratives expliquent que les cessions aient pris du retard en 2009.

Pour certaines emprises parisiennes, une opération du type de celle que vous avez décrite, madame la Rapporteure, a été imaginée, avec le versement de loyers intercalaires dans l’attente de la disponibilité des locaux de Balard.

M. Georges Tron, Président. En toute sincérité, qui, de France Domaine ou du ministère de la Défense, décide ?

M. le général Bruno Le Ray. À ma connaissance, la décision est collégiale mais France Domaine a un rôle leader. Les cessions sont réalisées tantôt par la Mission pour la réalisation des actifs immobiliers, tantôt par France Domaine, selon un partage décidé conjointement par les différents partenaires.

M. Georges Tron, Président. En théorie, vous avez raison, mais nous avons l’impression d’une certaine opacité, au moins quand il s’agit de comprendre qui propose et qui décide. Et le financement des recettes exceptionnelles du ministère de la Défense pose en définitive la question du pilotage de la fonction immobilière de l’État. Nous avons du mal à comprendre le rôle particulier de la MRAI.

M. Charles de Courson. De nombreux terrains militaires sont pollués, et cela a constitué pendant longtemps un obstacle aux cessions. On peut se demander si en modifiant la loi afin d’autoriser la vente de biens à condition que leur valeur tienne compte du coût de la dépollution, cela a permis de réaliser un certain nombre d’opérations pour des valeurs positives…

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Le produit de l’aliénation des ondes hertziennes alimentera le CAS créé pour financer l’amélioration de l’utilisation du spectre hertzien ainsi que l’interception et le traitement des émissions électromagnétiques à des fins de surveillance et de renseignement. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ?

S’agissant des cessions d’usufruit de satellites de télécommunication, de quelles garanties l’état-major s’est-il entouré pour pouvoir, en cas de crise, utiliser toutes les capacités nécessaires ? Existe-t-il des cas d’externalisation similaires à l’étranger ? Les avez-vous étudiés ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Votre curiosité a été aiguisée par la dénomination du CAS, laquelle a en fait été choisie pour être la plus large possible.

Quant à la cession de l’usufruit de Syracuse, il faut savoir que Syracuse met à disposition des forces opérationnelles des répéteurs – ils servent à amplifier les signaux interceptés et à les renvoyer. Nous avons estimé nos besoins opérationnels dans les années à venir à vingt-trois répéteurs. Avec nos satellites Syracuse, nous n’en avons que dix-neuf, dont trois sont loués à l’OTAN. Il nous fallait donc des répéteurs supplémentaires, et c’est la raison pour laquelle nous avons lancé le projet de coopération franco-italien Sicral qui garantira la couverture de nos besoins militaires. Avec nos trois satellites, il y aura des capacités excédentaires, au minimum 10 %, qui pourront être louées à des opérateurs. Notre réticence, seulement apparente car l’exemple britannique était concluant, venait de ce que nous voulions nous assurer que notre besoin opérationnel maximal à un horizon de dix ans serait satisfait. C’est pratiquement chose faite.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Avons-nous trop de fréquences hertziennes ? Est-ce le progrès technique ou la réduction du format des armées qui libère les fréquences ? Ou bien les prévisions étaient-elles surdimensionnées ? En ce qui concerne plus particulièrement les fréquences Rubis, attribuées à la gendarmerie, le rattachement de cette dernière au ministère de l’Intérieur a-t-il eu une incidence ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Sur ce dernier point, la cession était prévue de longue date, bien avant le changement de tutelle.

C’est parce que les fréquences Félin intéressaient les opérateurs civils, notamment pour la télévision numérique, qu’il nous a été demandé de migrer sur une autre bande de fréquence, de façon à ne pas les gêner.

Par ailleurs, la technique permet d’utiliser des bandes plus étroites et de mieux rentabiliser l’ensemble du spectre.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Les capacités opérationnelles resteront-elles identiques ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Si différences il y a, elles concerneront la portée des ondes. Plus une onde est basse, plus loin elle se propage. Si la fréquence augmente, il faut davantage de répéteurs pour que l’onde se diffuse. Cela dit, nous sommes capables de gérer tout cela.

Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Vous ne risquez pas de regretter votre décision dans quelques années ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Non.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. La migration d’une fréquence à une autre qui obligera à augmenter la puissance des émissions ne rendra-t-elle pas le système Félin plus facilement détectable, donc plus vulnérable ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Il faudra des relais supplémentaires mais cela a été prévu et ne devrait pas générer de demandes de crédits supplémentaires. Si des conséquences opérationnelles existent, elles sont liées au fait que Félin étant utilisé au sein du groupe de combat, donc à faible distance, il existe des situations en zone urbaine notamment où cette portée plus réduite peut être un handicap, auquel il sera remédié par la mise en place de relais.

M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Du point de vue de l’état-major des armées, les retards constatés dans l’encaissement des recettes prévues ont-ils des conséquences sur vos programmes et missions, en particulier sur le plan opérationnel ?

M. le général Jean-Marc Denuel. Les dépenses d’investissement de 2009 ont été couvertes, soit 17 milliards d’euros, à 300 millions près de reports de crédits qui viennent d’être décidés.

En 2010, les recettes exceptionnelles risquent de ne pas être non plus au rendez-vous ; celles liées aux fréquences devraient rentrer fin 2010 ou début 2011. Il faudra encore recourir à des mesures de trésorerie pour couvrir le besoin opérationnel, à commencer par des reports de crédits. Ce ne sera qu’en fin de période que l’on pourra mesurer l’impact éventuel sur les capacités opérationnelles. Mais si les opérations se dénouent avec un écart de 100 millions d’euros, par rapport à 17 milliards d’investissements annuels, je ne pourrai pas dire que nos capacités opérationnelles ont souffert de retards. Les ordres de grandeur ne sont pas tels que la réalisation de la loi de programmation militaire soit mise en péril.

M. Georges Tron, Président. Je vous remercie l’un et l’autre d’avoir répondu à nos questions, dont certaines étaient un prélude à celles que nous ne manquerons pas de poser au directeur des Affaires financières.