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M. Georges Tron, Président. Nous accueillons maintenant M. Hugues Bied-Charreton, qui est directeur des Affaires financières au ministère de la Défense.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le directeur.
Vous connaissez nos deux rapporteurs, Mme Françoise Olivier-Coupeau, membre de la commission de la Défense, et M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur spécial pour le budget opérationnel de la défense : ils sont issus de la majorité et de l’opposition, car la MEC a vocation à établir un rapport consensuel. Vous connaissez également M. Charles de Courson.
Par ailleurs, vous le savez, la Cour des comptes nous accompagne dans nos travaux.
Monsieur le directeur, je souhaiterais, avec l’accord des rapporteurs, revenir sur des questions qui ont été posées au cours des deux précédentes auditions car j’ai le sentiment que nous nous trouvons en plein flou artistique : je ne mets pas en cause la compétence des personnes, mais les chiffres, qu’il convient à nos yeux de préciser.
M. Hugues Bied-Charreton, directeur des Affaires financières au ministère de la Défense. Je souhaite vous apporter le plus grand nombre possible de précisions, dans la limite de mes compétences, sur un sujet complexe qui mobilise de nombreux services au sein du ministère de la Défense.
La question des recettes exceptionnelles est très importante pour le ministère de la Défense puisque l’équilibre budgétaire de la loi de programmation militaire repose sur l’encaissement effectif de ces recettes, dont les deux principaux chapitres sont les cessions immobilières et les cessions de fréquences. Le caractère complexe de ces opérations explique sans aucun doute les incertitudes actuelles.
Il convient en effet de distinguer le très court terme du moyen terme.
Dans le court terme, il s’agit pour le ministère de la Défense de faire face à des difficultés de calendrier d’encaissement de ces recettes, difficultés qui nous obligent à trouver des solutions de trésorerie afin de couvrir les opérations prévues : nous nous y employons avec l’aide du ministère du Budget et du cabinet du Premier ministre. Nous ne sommes pas inquiets puisque nous avons dégagé des solutions nous permettant de faire face aux aléas inévitables.
En ce qui concerne la LPM, au regard du bilan qu’il faudra bien tirer de la perception effective, ou non, des recettes exceptionnelles, notre préoccupation est de nous assurer que les comptes seront équilibrés à moyen terme, compte tenu des vicissitudes rencontrées. Nous serons très vigilants, au cours des prochaines discussions, sur le financement de la LPM afin de pouvoir maintenir, en moyenne période, les équilibres prévus par le législateur.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Alors même que nous sommes en phase préparatoire du projet de loi de règlement du budget de 2009, nous souhaiterions connaître la ventilation et l’articulation des différents chiffres. Pouvez-vous notamment nous donner le montant des cessions immobilières réalisées au titre de l’année 2009, afin que nous puissions le comparer avec les chiffres que nous ont fournis le général Jean-Marc Denuel et M. Éric Querenet de Breville ? Je tiens à rappeler que sur les 972 millions d’euros prévus par la loi de finances initiale au titre des cessions d’emprises immobilières, mon rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2010 faisait déjà apparaître un manque à gagner de quelque 138 millions d’euros, et ce alors que je tenais compte des 170 millions d’euros apportés par le plan de relance, des 105 millions d’euros obtenus par un décret d’avance et des 19 millions destinés à augmenter le pourcentage versé par avance aux entreprises – ce qui fait un total de 294 millions d’euros. Le ministère du Budget fait également apparaître dans les comptes des gains de désinflation.
Pouvez-vous nous indiquer avec exactitude dans quelle mesure les 972 millions de recettes exceptionnelles au titre des cessions immobilières ont été réalisés ?
Par ailleurs, quelles sont les mesures palliatives permettant d’atténuer l’effet des cessions non-réalisées ?
Enfin, quel est le montant résiduel non couvert en 2009 ?
M. Georges Tron, Président. Monsieur le directeur, ces questions très précises appellent des réponses tout aussi précises.
M. Hugues Bied-Charreton. En ce qui concerne la situation comptable du CAS, il est vrai que la prévision de recettes s’élevait à 972 millions. Nous en avons effectivement perçu 561 millions, qui se répartissent comme suit : 65 millions de recettes de cessions effectives,…
M. Charles de Courson. Le ministère du Budget a évoqué le chiffre de 80 millions d’euros.
M. Hugues Bied-Charreton. Ce sont bien 65 millions d’euros qui ont été encaissés en 2009. Il convient toutefois de tenir compte des échéanciers négociés, notamment avec les collectivités locales. C’est le cas d’Issy-les-Moulineaux où nous encaisserons le produit de la cession sur trois ans. Il est possible que Bercy raisonne en termes non de trésorerie mais de volume de cession – les paiements ultérieurs à valoir – et que ce soit la raison de la différence entre les deux chiffres : je m’en assurerai.
M. Georges Tron, Président. La règle des 85 % joue-t-elle ?
M. Hugues Bied-Charreton. Non, puisque nous encaissons 100 % des recettes sur le CAS.
À ces 65 millions d’euros, il convient d’ajouter 139 millions de crédits de report issus de la gestion antérieure, 221 millions de la soulte SNI et un transfert de la mission Défense vers le CAS de 136 millions, ce qui fait un total de 561 millions.
Si nous ôtons aux 972 millions d’euros d’emplois-ressources prévus à l’encaissement 136 millions de mesures de gestion, les recettes réelles s’élèvent donc bien à 425 millions d’euros, le manque se chiffrant à 547 millions d’euros.
M. Charles de Courson. Les reports n’ayant pas été budgétés dans la loi de finances initiale, vous ne devriez pas inclure dans votre calcul la somme de 139 millions d’euros.
M. Hugues Bied-Charreton. Tout dépend du point de vue dans lequel on se place. Nous raisonnons en termes d’emplois-ressources et considérons donc que nous pouvons mobiliser les 139 millions de report, ce qui, il est vrai, n’allait pas de soi dans la construction de la LPM, puisque le législateur avait raisonné hors reports.
M. Charles de Courson. Ces crédits de reports vous ont arrangé, mais ils peuvent disparaître.
M. Hugues Bied-Charreton. En effet, et c’est la raison pour laquelle ils ont été maintenus. En termes de programmation immobilière – tel est l’objectif du CAS –, la mobilisation de ces 139 millions d’euros, qui n’était pas prévue à l’origine, constitue une recette supplémentaire que nous intégrons dans notre plan de financement.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Les 221 millions d’euros de la soulte SNI étaient-ils bien inscrits dans les 972 millions ?
M. Hugues Bied-Charreton. Oui. Toutefois le montant n’était pas exactement le même : il est finalement supérieur de quelques millions d’euros.
M. Charles de Courson. Disposiez-vous, dans la négociation avec la direction du Budget sur l’élaboration du projet de loi de finances pour 2009, du détail analytique des cessions, opération par opération, vous permettant de parvenir à la somme de 972 millions d’euros ?
M. Hugues Bied-Charreton. Nous disposions d’une estimation par catégorie d’actifs, qui n’était pas analytique, emprise par emprise. Lors de l’élaboration de la LPM, les valeurs que nous avons retenues étaient tirées du tableau général des propriétés de l’État, le TGPE : nous n’avons pas affiné l’analyse par la suite. Si nous ne disposions pas de l’analyse lot par lot, nous avons toutefois procédé à des estimations forfaitaires, notamment en termes de catégorie d’actifs et calendrier des cessions, lesquelles dépendent pour beaucoup de l’état du marché.
M. Charles de Courson. Pourrez-vous nous fournir un tableau relatif aux 972 millions d’euros de recettes immobilières prévus dans la loi de finances initiale de 2009, auxquels devaient s’ajouter 600 millions de recettes en aliénation de fréquences – le total s’élevant à 1,6 milliard ?
Je tiens à rappeler que le retard pris pour la cession des fréquences n’ayant pas permis de percevoir en 2009 les 600 millions d’euros prévus à ce titre, ils ont été reportés en 2010, année où, nous venons de l’apprendre, une partie seulement sera perçue.
Pourriez-vous nous fournir un tableau équivalent pour les 650 millions d’euros de recettes immobilières prévus dans le projet de loi de finances pour 2010, auxquels il convient d’ajouter les 600 millions d’euros pour les fréquences ? Il nous semble en effet que nous assistons à un resserrement des prévisions de recettes.
En accompagnement de ces tableaux, nous souhaiterions également pouvoir disposer d’un commentaire ligne par ligne de l’exécution en 2009 et d’une prévision actualisée pour 2010 – je rappelle que la loi de finances de 2009 prévoyait 1,6 milliard d’euros de recettes exceptionnelles et le projet de loi de finances pour 2010, 1,27 milliard : nous souhaitons pouvoir expliquer à nos collègues de la représentation nationale des écarts aussi considérables entre la prévision et l’exécution.
M. Hugues Bied-Charreton. Nous disposons évidemment de ces informations.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Monsieur le directeur, selon quelle méthode avez-vous travaillé avec le ministère du Budget ?
Chacun sait déjà, en effet, que le « Balardgone » sera trop petit, ce qui entraînera des coûts supplémentaires. On sait également que le ministère de la Défense devra procéder à des locations plus ou moins temporaires à la suite de vente de biens immobiliers. Comment ces dépenses ont-elles été prises en compte ? Comment avez-vous travaillé avec France Domaine ?
M. Hugues Bied-Charreton. La LPM, en raison des contraintes budgétaires, a prévu de mobiliser des recettes extrabudgétaires, qui ont fait l’objet de négociations interministérielles. Il a finalement été décidé que le plafond global des ressources budgétaires fixé par la LPM serait complété par un volume de 3,5 milliards de recettes exceptionnelles.
Une démarche analytique, associée à cette démarche générale, a permis de dégager le premier milliard et demi de recettes exceptionnelles via la mobilisation des actifs du ministère de la Défense. Un travail relativement fin, en vue d’identifier les emprises pouvant être cédées, a été effectué sur le patrimoine immobilier du ministère, compte tenu des désengagements opérés par le ministère de la Défense dans le cadre de la RGPP, des restructurations et de la réduction du format des armées.
Ce sont évidemment les grosses emprises, notamment parisiennes, qui ont bénéficié des études les plus affinées. En effet, compte tenu du caractère gigantesque du parc immobilier du ministère de la Défense, l’étude portant sur les emprises régionales a été conduite de manière plus globale, tout en demeurant rigoureuse.
M. Georges Tron, Président. Ces études ont-elles également porté sur le patrimoine du ministère de la défense à l’étranger ?
M. Hugues Bied-Charreton. Je ne le pense pas.
Nous n’avions évidemment pas d’autre solution que de nous appuyer sur les valeurs, indiquées par France Domaine, issues du TGPE : c’est la référence en la matière.
M. Georges Tron, Président. Il y a eu également un audit de cabinet.
M. Hugues Bied-Charreton. Nous recourons à l’assistance de conseils pour la négociation en cours avec la Caisse des dépôts et consignations et la SOVAFIM sur la cession des emprises parisiennes, ce qui nous permet de corroborer, ou non, les estimations de France Domaine.
Nous avons retenu, au moment où elles ont été faites, des hypothèses relativement optimistes sur le volet immobilier : nous ne disposions en effet à l’époque d’aucune autre expertise de marché que celle de France Domaine.
Pour les fréquences, la situation est différente. Le premier bloc concerne la cession des fréquences Rubis et Félin, qui devront être cédées dans le cadre de la procédure que lance l’ARCEP sur la quatrième génération. Nous avons dû retenir des estimations forfaitaires, fondées sur l’évaluation la plus réaliste que l’ARCEP a pu nous fournir à l’époque. Nous n’avons aucun motif particulier de nous inquiéter à ce stade. Pour le second bloc, qui concerne la procédure innovante de cession d’usufruit de la constellation Syracuse, nous avons retenu une estimation forfaitaire qui correspond à ce que nous pensions devoir encaisser en termes d’usufruit compte tenu de la durée de vie résiduelle des satellites.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Je n’évoque pas les valeurs, monsieur le directeur, mais le fait que, depuis que vous avez fait ces hypothèses, nous sommes passés de quatre-vingts bases de défense à soixante-cinq, voire moins. Une telle différence aura des conséquences en termes de regroupement immobilier. Puisque le parc immobilier qui devait être vendu ne l’a été jusqu’à présent que fort peu, une procédure est-elle prévue pour analyser l’opportunité de vendre certaines emprises ?
M. Georges Tron, Président. Chacun a en effet compris que la vente d’une partie du parc immobilier de la Défense ainsi que la cession de fréquences ou de l’usufruit des satellites ont pour objet de couvrir un pic de dépenses. Si nous sortons de l’aspect financier pour entrer dans celui de la gouvernance, pourrions-nous savoir si c’est le ministère du Budget ou celui de la Défense qui a pris ces décisions ?
De plus, une fois les choix arrêtés, qui a décidé des emprises qui feraient l’objet de cessions et, parmi elles, de celles qui seraient cédées à l’euro symbolique ?
En résumé, qui a été le pilote politique de la gestion immobilière du dispositif ?
M. Hugues Bied-Charreton. Je ne saurais vous répondre sur le processus décisionnel du fait que je n’occupais pas à l’époque les fonctions que j’assume aujourd'hui. Ma connaissance des rouages politiques et administratifs me permet toutefois de supposer que la décision a été le fruit d’une discussion, à la demande de Matignon ou de l’Élysée, entre Bercy et la Défense, lorsqu’il s’est avéré que le bouclage budgétaire de la LPM impliquait de dégager des recettes extrabudgétaires, l’arbitre ultime ayant été l’Élysée. J’ignore en revanche les canaux suivis ab initio par la décision.
M. Georges Tron, Président. Ne sommes-nous donc pas en droit de penser que la décision de cession a visé à assurer, pour des raisons budgétaires, un pic de dépenses ?
Nous avons le sentiment que la gestion du patrimoine immobilier du ministère de la Défense, qui est gigantesque – 45 % du patrimoine immobilier de l’État –, est fondé uniquement sur des raisons budgétaires déconnectées de toute vue d’ensemble. En effet, au cours des auditions de cet après-midi, personne n’a fait référence à un autre pilotage que strictement budgétaire d’un patrimoine aussi professionnalisé que l’est celui du ministère de la Défense. Ces auditions semblent donc révéler que des pans entiers de notre fonctionnement administratif demeurent étrangers à la réforme de la gestion de l’immobilier à laquelle nous avons essayé de procéder il y a quatre ou cinq ans.
M. Hugues Bied-Charreton. Il n’y a pas à mes yeux contradiction entre un objectif de valorisation maximale du patrimoine immobilier du ministère de la Défense et une gestion efficace de notre patrimoine au regard des contraintes de ce même ministère. Le ministère de la Défense s’évertue au contraire à concilier ces deux approches.
M. Georges Tron, Président. Ces approches sont contradictoires en termes non pas de gestion mais de pilotage ou de gouvernance.
M. Hugues Bied-Charreton. Notre objectif est de valoriser au mieux nos emprises, notamment celles dont nous n’avons plus besoin. Jusqu’à présent nous n’avons pas sacrifié des contraintes capacitaires ou opérationnelles à des fins budgétaires, ce que d’aucuns ne manquent pas de nous reprocher. Nous n’avons pas non plus sacrifié aux contraintes de calendrier la cession du patrimoine immobilier du ministère. Si nous n’avons pas encore conclu avec la Caisse des dépôts et consignations et SOVAFIM la cession des emprises parisiennes, c’est parce que nous considérons que le prix proposé actuellement ne préserve pas les intérêts patrimoniaux de l’État.
M. Georges Tron, Président. Qui décide qu’il n’est pas opportun de réaliser actuellement cette opération : le ministère de la Défense ou Bercy ?
M. Hugues Bied-Charreton. Les cabinets et l’administration des deux ministères cogèrent le dossier au travers de comités de pilotage. Les décisions ont été prises par les ministres et par le cabinet du Premier ministre. Il ne s’agit donc pas d’une gestion au fil de l’eau : un vrai processus d’instruction donne lieu à des décisions prises sur la base de dossiers parfaitement étayés.
M. Georges Tron, président. Qui a établi la liste des terrains à céder : France Domaine pour Bercy ou la mission pour la réalisation des actifs immobiliers, la MRAI ?
M. Hugues Bied-Charreton. La liste a été établie par le ministère de la défense, qui dirige le processus au premier chef et décide si une emprise doit être cédée en priorité, au regard du plan de stationnement des armées et des négociations avec les collectivités locales, lesquelles portent notamment sur les règles d’urbanisme et les contraintes en matière de logement social. Et c’est in fine le ministère de la Défense qui propose à France Domaine de céder telle ou telle emprise, France Domaine étant, sur le plan juridique, la seule institution autorisée à procéder aux cessions. Nous sommes donc contraints d’assurer un dispositif de co-pilotage. C’est donc bien la Défense qui a l’initiative dans le processus de négociation, notamment en termes de calendrier, sous le contrôle de France Domaine qui nous appuie efficacement.
M. Georges Tron, président. Des désaccords se sont-ils déjà produits entre France Domaine et la MRAI sur l’opportunité de telle ou telle cession ?
M. Hugues Bied-Charreton. Pas à ma connaissance.
M. Georges Tron, Président. Toutefois, en cas de désaccord, France Domaine aurait-il le dernier mot ?
M. Hugues Bied-Charreton. Pas nécessairement. Nous demanderions l’arbitrage des deux cabinets ministériels et si le désaccord persistait, le dossier serait tranché à Matignon.
Le processus engagé est évidemment fonction de l’importance de l’emprise.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Notre objectif n’est pas de remettre en cause la méthode mais de prévenir tout report de « bosse ».
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Le général Denuel, que nous avons interrogé sur l’impact des non-réalisations mobilières sur le budget du ministère de la Défense, nous a répondu que la question n’était pas du ressort de l’état-major des armées et que c’était vous qui pouviez nous éclairer.
Les 561 millions d’euros de recettes comprennent 139 millions de reports de crédits et 136 millions du budget général du ministère. Quel est l’impact des ressources manquantes sur le budget de la défense ?
M. Hugues Bied-Charreton. Nous avons mobilisé 400 millions d’euros de reports de crédits pour combler les ressources manquantes : d’une part, 136 millions ont été transférés via l’émission d’un titre de perception par France Domaine vers le CAS Immobilier afin de couvrir des factures correspondant aux opérations basculées fin 2008 ; d’autre part, 264 millions ont été reportés sur le programme 212, qui a repris à sa charge le financement des opérations nouvelles en 2009 que le CAS Immobilier aurait dû financer. Nous avons donc dégagé 400 millions sur les 547 millions manquants pour financer le programme immobilier du ministère. Le reliquat de quelque 145 millions d’euros a fait l’objet, selon Bercy, d’une marge de manœuvre dégagée par la désinflation. Nous avons également reprogrammé certaines opérations. Globalement, nous avons pu sans difficulté financer la plus grande partie du programme immobilier prévu en 2009.
M. Charles de Courson. Vous contestez donc le montant du gain de désinflation estimé par Bercy à 590 millions pour 2009 et à 100 millions pour 2010.
M. Hugues Bied-Charreton. Le ministère de la Défense conteste non pas le principe d’un tel gain mais son estimation par Bercy : ce gain est à nos yeux plus proche de 300 à 400 millions d’euros que de 590 millions. Les experts de la direction des Affaires financières du ministère de la Défense et ceux de la direction du budget de Bercy ont entrepris des travaux pour apprécier au plus juste le montant des gains de la désinflation, lequel est très difficile à établir car la seule variation d’un dixième de point sur le curseur modifie de manière importante les résultats.
M. Charles de Courson. Pour l’année 2009, il suffit de comparer les chiffres définitifs avec les hypothèses initiales. C’est un travail de bénédictin, certes, mais il est réalisable.
Pourquoi Bercy vous a-t-il donné pour 900 millions d’euros d’autorisations de consommation de reports alors que 600 millions auraient suffi d’après ses propres calculs ?
M. Hugues Bied-Charreton. Nous avons également dû gérer l’absence des recettes de cessions de fréquences : nous n’avons rien perçu alors que nous espérions 600 millions d’euros.
En raison de la structure des dépenses du ministère de la Défense, une partie non négligeable des gains de désinflation concerne les dépenses d’équipement. De fait, ces gains ont bénéficié plutôt au programme d’armement – le programme 146 – qu’au fonctionnement courant du ministère et à ses dépenses immobilières.
L’indice de la construction ne s’est pas infléchi en 2009 dans les mêmes proportions que l’inflation. C’est la raison pour laquelle, je le répète, nous contestons le montant du gain lié à la désinflation avancé par le ministère du Budget.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. En 2009, les recettes exceptionnelles ont fait l’objet de moins-values alors que les OPEX se sont traduites par des surcoûts. Il ne convient pas non plus d’oublier les surcoûts liés à la réintégration complète de la France dans l’OTAN et au financement des bases d’Abou Dhabi, lequel ne figurait pas dans la loi de finances initiale. Comment réussissez-vous à financer le tout ?
M. Hugues Bied-Charreton. Pour les moins-values, des ressources supplémentaires ont pu être dégagées grâce à la consommation des reports et aux gains de désinflation. Le décalage d’encaissement sur les fréquences et les moins-values sur l’immobilier ont donc pu être compensés sans conséquences significatives sur la programmation militaire. Cela nous a permis de traiter de manière distincte les surcoûts en gestion, qui sont de natures et de montants très différents.
En ce qui concerne les OPEX, des économies sur les carburants de l’ordre de 47 millions d’euros ont permis de dégager des marges de manœuvre. De plus, un financement extérieur au ministère, intervenu en loi de finances rectificative, a permis de couvrir, intégralement pour la première fois depuis de très nombreuses années, le surcoût des OPEX, sans amputation des crédits d’équipement.
En ce qui concerne l’OTAN, le surcoût est modeste en 2009 : en deçà de dix millions d’euros. Il a donc pu être absorbé sans difficulté en gestion. Il est toutefois appelé à monter progressivement en régime au rythme de l’armement par les forces françaises des états-majors de l’OTAN : la question se posera à compter de 2010 et surtout de 2011 et de 2012.
M. Georges Tron, Président. Je vous remercie, monsieur le directeur.
Nous en avons terminé avec l’ordre du jour.