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M. David Habib, Président. Nous accueillons maintenant M. David Appia,
président de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII),
ambassadeur délégué aux investissements internationaux.
Monsieur l’ambassadeur, merci d’avoir répondu à notre invitation. Nous vous avions déjà entendu l’an dernier dans le cadre de nos travaux sur les pôles de compétitivité. Nous souhaitons cette fois aborder avec vous le thème du crédit d’impôt recherche, qui est cette année l’un des sujets de réflexion de la Mission d’évaluation et de contrôle. Nous le ferons avec deux de nos trois rapporteurs, MM. Pierre Lasbordes et Alain Claeys, notre collègue Jean-Pierre Gorges n’ayant pas pu être des nôtres, et en présence d’un représentant de la Cour des comptes, M. Cossin, conseiller-maître, ainsi que de M. Olivier Velter, conseiller au cabinet de Mme la ministre de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi.
M. David Appia, président de l’Agence française pour les investissements internationaux. Votre invitation, dont je vous remercie, est l’occasion de vous donner quelques informations sur l’action de l’Agence française pour les investissements internationaux, dont la mission première est la prospection et l’accompagnement des investisseurs étrangers sur les territoires français.
Dans la valorisation de l’image de la France à l’étranger, le crédit d’impôt recherche et, plus largement, la politique française de soutien à l’innovation constituent des arguments forts. C’est un véritable atout pour convaincre les investisseurs étrangers de choisir la France plutôt que d’autres destinations.
Chaque année, nous rencontrons plus de 7 000 entreprises étrangères et nous identifions plus de 1 000 projets nouveaux. Le bilan annuel pour 2009 fait état de 639 nouveaux projets d’investissement étranger en France. Les activités de recherche et développement en constituent une part modeste : 42 projets en 2009, ce qui représente néanmoins une croissance importante par rapport aux années précédentes, puisque, depuis 2003, on dénombrait en moyenne une trentaine de projets chaque année.
C’est dire que nous sommes attentifs à la venue sur le territoire français de sociétés étrangères désireuses d’y développer des activités de recherche et développement. Nous en faisons d’ailleurs un axe important de notre prospection, en cherchant également à attirer sur notre territoire les centres de décision de groupes étrangers.
D’une manière générale, l’un des objectifs de notre action est de différencier le « site France » des sites concurrents en Europe, afin de mettre en évidence son caractère attractif ; et nous le faisons très volontiers sur le thème de l’innovation. Nous parlons à la fois du crédit d’impôt recherche et des pôles de compétitivité, éléments indissociables pour caractériser l’« offre France ».
Les pôles de compétitivité sont incontestablement ouverts : les informations que nous avons rassemblées en 2009 auprès des différents acteurs concernés font clairement apparaître que la présence étrangère y est croissante. On y dénombre 528 entreprises étrangères, dont certaines ont des implantations dans plusieurs pôles, soit au total plus de 750 établissements contrôlés par des sociétés étrangères, ce qui représente un peu plus de 10 % des acteurs des pôles.
Sans que nous puissions quantifier le phénomène, nous avons la conviction que les entreprises étrangères qui choisissent de s’implanter en France au sein d’un pôle de compétitivité pour développer des activités de recherche sont des candidates naturelles au crédit d’impôt recherche.
Nous ne sommes pas en mesure de répondre à votre question sur le nombre d’entreprises étrangères qui bénéficient du CIR ; nous avons interrogé le ministère de la Recherche, mais cette information ne semble pas disponible. En revanche, nous avons une connaissance précise des flux, c’est-à-dire des nouveaux projets d’implantation dans les activités de recherche et développement, grâce au recensement annuel des nouveaux projets d’investissement. Ainsi, de 2003 à 2009, nous avons recensé 237 projets d’investissement étranger dans des activités de R&D, lesquels sont à l’origine de 8 750 emplois. Il s’agissait dans la majorité des cas d’activités nouvelles, mais aussi d’extensions de capacités existantes ; ainsi par exemple, une petite société britannique qui travaille sur les clés 3G et 4G à Sophia Antipolis projette d’y employer une cinquantaine de nouveaux chercheurs dans les trois ans qui viennent.
M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. Le crédit d’impôt recherche est un atout de la France, dites-vous, mais avez-vous connaissance de systèmes équivalents ?
M. David Appia. Nos principaux concurrents sont en Europe – même si des pays lointains tels que Singapour développent des politiques très soutenues pour attirer des centres de recherche étrangers. La France, selon notre analyse, est parmi les pays de l’OCDE celui qui est considéré comme ayant le système le plus attractif. Je pourrai vous laisser un document chiffré qui montre qu’elle se situe clairement au premier rang en Europe en termes d’incitation. Certes les dispositifs sont différents selon les pays, mais les comparaisons auxquelles nous avons procédé en prenant un cas concret aboutissent à des conclusions sans ambiguïté.
M. Alain Claeys, Rapporteur. Parmi les facteurs qui décident une entreprise étrangère à installer en France tout ou partie de son activité de recherche-développement, quelle place le crédit d’impôt recherche occupe-t-il ?
M. David Appia. Nous avons des éléments de réponse dans des rapports internationaux et dans des études que nous avons nous-mêmes réalisées ou fait réaliser.
Selon le rapport publié chaque année par la chambre américaine de commerce en France – AmCham –, dont la réalisation est confiée à une société, 37 % des entreprises américaines interrogées en 2009 considèrent que la politique de soutien à l’innovation en France constitue un atout. Il faut ajouter que 48 %, soit une proportion encore plus grande, identifient comme atout de notre pays la qualité des formations. Je lie les deux car, à l’évidence, le crédit d’impôt recherche ne peut être isolé d’autres facteurs, parmi lesquels il faut également citer les relations avec l’administration.
Pour notre part, nous avons fait réaliser une étude par TNS Sofres en juin dernier auprès d’entreprises étrangères – et non plus seulement américaines – implantées en France : 52 % des chefs d’entreprise interrogés ont cité parmi les atouts de la France la qualité de l’environnement en matière de recherche-développement et d’innovation.
M. Alain Claeys, Rapporteur. Je vous posais la question précise du poids du CIR dans l’attractivité de notre pays. Le rapport sur le CIR remis au Parlement par le ministère de la Recherche indique que pour 80 % des entreprises interrogées, le CIR n’a pas été un élément déterminant de l’implantation en France. Comment interprétez-vous ce résultat ? Selon vous, peut-on en tirer la conclusion que le CIR est un outil anti-délocalisation plus qu’un instrument d’attractivité du territoire ?
M. David Appia. Honnêtement, le pourcentage que vous citez m’a étonné. Peut-être faut-il rechercher l’explication notamment dans le fait que le dispositif rénové du CIR est récent et parfois encore mal connu des investisseurs étrangers. Par ailleurs, le temps de maturation des projets d’investissement est long, surtout à l’international – douze à dix-huit mois en moyenne –, et l’on ne vient certes pas s’implanter dans un pays, démarche qui engage le moyen et le long terme et qui peut échouer, sans considérer un grand nombre d’éléments, parmi lesquels l’environnement de marché : j’aurais du mal à citer le cas d’une entreprise étrangère qui aurait implanté en France uniquement son unité de recherche-développement ; bien souvent au contraire, celle-ci est développée dans une deuxième phase, en soutien d’une implantation première.
Il reste que pour un grand nombre d’entreprises – la moitié de celles que nous avons interrogées –, le crédit d’impôt recherche, et plus largement la politique d’innovation et de soutien à la recherche-développement, constituent des atouts du « site France ».
M. Pierre Lasbordes, Rapporteur. Le nombre des entreprises étrangères qui bénéficient du CIR est-il connu du conseiller de Mme Lagarde ?
M. Olivier Velter, conseiller au cabinet de Mme la ministre de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi. Non, mais j’essaierai de vous donner cette information. Les données statistiques sont détenues par le ministère de la Recherche.
M. Alain Claeys, Rapporteur. On nous dit d’un côté qu’il faut s’adresser au ministère de l’Économie, de l’autre que c’est à celui de la Recherche…
M. Olivier Velter. Le ministère du Budget détient les informations sur les dépenses fiscales. Il faut en fait rassembler les données en provenance des trois ministères, et pour interroger celui de la Recherche, il faut passer par celui du Budget. Je vais essayer de vous fournir les dernières informations disponibles.
M. David Appia. Nous avons engagé un chantier assez lourd, mais nécessaire, consistant à examiner, sur les 237 projets que nous avons enregistrés depuis 2003, lesquels bénéficient du CIR. Il est évident que le nombre d’entreprises étrangères qui, parmi les 22 000 présentes en France, ont demandé à bénéficier du CIR est bien plus élevé, mais l’AFII n’a pas les moyens de le déterminer.
M. David Habib, Président. Merci à tous pour cet échange.