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M. David Habib, Président. Le travail pour lequel nous sommes réunis donnera lieu à un rapport de M. Louis Giscard d’Estaing, membre de la commission des finances et du groupe UMP et de Mme Françoise Olivier-Coupeau, membre de la Commission de la Défense et du groupe SRC.
Je salue la présence des trois représentants de la Cour des comptes qui suivent nos travaux, Mme Françoise Saliou, conseiller-maître, M. Antony Marchand, conseiller référendaire, et M. Laurent Jannin, rapporteur.
Nous accueillons M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière, officier de cohérence opérationnelle (OCO) du système de forces « Commandement et maîtrise de l'information ». Commandant, quelle analyse portez-vous sur les cessions déjà effectuées ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière, officier de cohérence opérationnelle du système de forces « commandement et maîtrise de l’information ». J’appartiens à la division « cohérence capacitaire » de l’état-major des armées (EMA), et je fais partie d’un collège de seize officiers de toutes armes et armées, le collège des officiers de cohérence opérationnelle (OCO), répartis selon les systèmes de forces. Nous avons pour fonction de vérifier que chaque « brique » de l’ensemble des capacités des armées soit aussi en cohérence que possible avec les autres. Nous sommes à la tête d’un réseau d’experts des différentes armées – certains sont par exemple affectés à la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'informations de la défense (DIRISI) – et nous vérifions que l’ensemble des éléments que nous montons, en application du Livre Blanc, pour la conduite des programmes d’armement et des matériels livrés aux forces soit le plus cohérent possible.
En tant qu’officier de cohérence opérationnelle, je ne suis intervenu en matière des cessions de fréquences que pour les fréquences de l’équipement Félin (Fantassin à équipement et liaisons intégrées), avec l’Armée de terre, pour vérifier si les perturbations opérationnelles causées par l’abandon de ces fréquences étaient acceptables, où étaient les enjeux de capacités et vers quelles nouvelles gammes de fréquences nous devions aller. Nous avons vécu la migration comme quelque chose d’imposé, dû à la pression sur le spectre global des fréquences – qui n’est propre ni à la France ni à l’Europe – qui fait que les anciens occupants historiques des fréquences sont poussés à faire de la place à l’économie numérique.
Cette pression a principalement concerné le petit équipement de transmission dénommé RIF (Réseau d'information du fantassin), équipement d’une portée assez courte – quelques centaines de mètres – qui permet aux membres d’un groupe de combat – un sergent et ses hommes, soit quelques personnes, puis une section d’environ trente soldats – d’échanger entre eux. Il nous fallait vérifier que la migration de la bande de 800 mégahertz, choisie initialement en 2001, vers la bande de 2 gigahertz, ne posait pas trop de difficultés opérationnelles.
La cession de Syracuse, elle, n’est pas une cession de gamme de fréquences mais une opération de cession de l’usufruit d’un satellite en espace contre un loyer qui sera payé à un repreneur. La problématique est totalement différente, le seul point de rencontre des deux projets étant l’outil budgétaire qui permet d’injecter des ressources extrabudgétaires dans le budget de la Défense.
Dans mes fonctions d’OCO, j’ai eu, avec l’officier de programme Syracuse et nos camarades de la Direction générale de l’Armement (DGA), la responsabilité, d’une part, de vérifier que ce qui sera mis à la disposition des industriels et ce qui sera immédiatement reloué sera compatible avec les besoins opérationnels de nos forces en cas de déploiement, d’autre part, de définir le socle que l’opérateur ne pourra pas ensuite relouer à des tiers.
En effet, sans Syracuse, noyau dur des communications militaires, il n’est plus possible de projeter des forces de façon autonome – par exemple d’intervenir en toute autonomie en Afghanistan ou au Tchad - ni d’évacuer des ressortissants. Aujourd’hui, sans liaison à haut débit entre la métropole et les forces projetées, il n’est plus possible de commander. C’est pour assurer la sécurité de ces liaisons que, en complément de capacités civiles que nous pouvons louer à des opérateurs civils comme Inmarsat, Eutelsat ou Intelsat, nous nous sommes dotés depuis les années 85 du système militarisé Syracuse. En effet, lorsque nous louons de la capacité sur des systèmes civils en zone de crise, nous sommes en concurrence avec des opérateurs américains de tous types, CNN par exemple et, à un endroit donné, il n’y a pas forcément d’espace libre dans une bande de fréquences. Ainsi, afin de pouvoir déployer des drones en Afghanistan nous avons été amenés à louer un répéteur complet sur un satellite, qui plus est pour une année complète, condition pour que l’opérateur accepte de déplacer l’engin sur la zone qui nous intéressait.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Vous avez été obligés – nous avez-vous dit – de rendre des fréquences du fait de pressions internationales. Cependant, les Allemands, sur qui s’exercent sans doute les mêmes pressions, ont refusé cette démarche. Selon l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, le moment n’est sans doute pas le bon pour céder ces fréquences. Pouvez-vous nous éclairer plus précisément ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Vous avez reçu la direction générale des systèmes d’information et de communication, la DGSIC, dont dépendent les fréquences militaires, ainsi que le général Pierre Puget, qui est l’interlocuteur de l’ARCEP et des ministères dans ce domaine. Ce sont eux les premiers impliqués dans ces négociations. Les pressions s’exercent sur l’ensemble des nations, mais, outre que chaque pays répartit souverainement ses fréquences, les services chargés d’étudier la façon de répondre à cette pression – qui est peut-être moindre en Allemagne qu’en France – peuvent proposer des scénarios différents.
Depuis une vingtaine d’années que je travaille dans le domaine des télécommunications, j’ai pu constater cette pression, avec de fréquentes migrations de fréquences sur des faisceaux hertziens. La question a été mise sur la table en 2007-2008 dans le cadre de la loi de programmation militaire : il a semblé opportun, au moment où le débat sur la vente de la quatrième licence de téléphonie mobile était vif et où l’on pouvait envisager que les opérateurs se livrent une vraie bataille pour acheter des fréquences, de chercher à se procurer de la sorte des ressources extrabudgétaires.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Vous avez donc été amenés à travailler sur la conciliation entre impératifs financiers – le financement de la « bosse » du ministère de la Défense – et opérationnels ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. La question ne se pose pas exactement dans ces termes. La migration d’une bande de fréquence vers une autre a pour origine la pression de l’économie numérique. L’idée est de dégager des fréquences dans les bandes qui intéressent les opérateurs. Les bandes les plus convoitées sont comprises entre 500 MHz et 2 à 3 GHz. La bataille se déroule depuis une vingtaine d’années. En général, quand un organisme quitte une bande de fréquences, les coûts de migration sont compensés par un fonds spécifique, le Fonds de réaménagement du spectre (FRS). La nouveauté est que, avec la loi de programmation militaire, les montants récupérés par la libération de fréquences peuvent être désormais réaffectés au budget de la Défense, ce qui, à ma connaissance, est sans précédent.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Vous a-t-on demandé s’il était opérationnellement possible d’abandonner des fréquences, dans l’intérêt du budget, ou a-t-on exigé que vous trouviez des solutions opérationnelles en conséquence d’une décision autoritaire de céder des fréquences ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. La question ne se pose pas dans des termes aussi clairs. La pression sur les fréquences est un mouvement de fond. Aujourd’hui, le général Pierre Puget et le bureau militaire national des fréquences ont pour mission de faire valoir la position des forces armées, en lien avec d’autres services de l’État.
Les fréquences abandonnées dans le programme Félin sont situées dans les mêmes types de bandes que celles dont va avoir besoin l’infrastructure nationale partageable des télécommunications (INPT), qui va desservir l’ensemble des forces de police et de gendarmerie, mais aussi les SAMU, dans les départements. En région parisienne, l’État manque déjà de fréquences pour permettre à la préfecture de police de déployer tous ses réseaux.
Jusqu’ici le ministère de la Défense était historiquement un très important affectataire de fréquences. Il en détenait beaucoup. Aujourd’hui, il en rend. Nous subissons la pression de l’économie numérique, du fait du besoin nouveau de fréquences, pour la quatrième licence, et parallèlement nous bénéficions d’un élément nouveau, la récupération par le budget de la Défense des sommes correspondant à la cession de ces fréquences. En tout état de cause, que la Défense récupère ou non le produit de la cession, elle aurait probablement été – tôt ou tard –poussée hors de la bande que nous cédons. Ce n’est pas le ministère de la Défense qui a pris l’initiative de vendre des fréquences pour récupérer des financements extrabudgétaires. Cette affaire est plutôt la conséquence d’une rencontre entre deux calendriers.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Nous sommes très intéressés par votre approche. Lorsque nous l’avons auditionné, le général André Helly nous a déclaré, au nom de la DIRISI, que, dans les relations entre le ministère de la Défense et les industriels sur les satellites Syracuse, la gouvernance était à l’EMA, tandis que la DGA contractualisait. Confirmez-vous ce schéma ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. C’est en effet le schéma général des relations entre l’EMA, la DGA et la DIRISI. La mission de la DGA est la définition générale des projets et du processus de négociation et de contractualisation avec l’industrie. In fine, c’est le délégué général qui signe les contrats au nom du ministre. En revanche, le besoin opérationnel et les capacités militaires sont définis par l’EMA.
Nous travaillons en général en équipes de projets intégrées. Pour la cession de Syracuse, j’ai travaillé en binôme avec un « architecte de système de force » de la DGA qui exerce des fonctions « miroirs » des miennes. Ensuite intervenaient un officier de programme de l’EMA et, en face de lui ou en binôme avec lui, le directeur du programme à la DGA. C’est bien ce dernier qui in fine endosse le cahier des charges, qui mène la négociation avec les industriels et qui, au total, porte donc la responsabilité. Pour autant, lorsqu’il recevra les industriels, il aura à ses côtés un officier de l’EMA, qui sera son officier de programme. Cette organisation vaut pour tous les projets.
La DIRISI intervient par la suite en tant qu’opérateur du ministère de la Défense, c’est elle qui met en œuvre les choix et les décisions mais elle contribue aussi en amont au dossier. Aujourd’hui, au sein de l’équipe de programme Syracuse, la DGA fournit un directeur de programme et les architectes, l’état-major des armées et la DIRISI une « équipe de marque ». Ensuite, la gestion du réseau Syracuse est effectuée exclusivement par des personnels de la DIRISI.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Quelles sont vos relations hiérarchiques avec les généraux Denuel et Le Ray, que nous avons précédemment auditionnés ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Le général Jean-Marc Denuel est le sous-chef « plans » de l’état-major des armées. J’appartiens à la division « cohérence capacitaire », qui lui est rattachée. Le général Bruno Le Ray dirige une autre division, aussi rattachée au général Denuel, la division « plans, programmes et planification », qui suit plutôt les aspects budgétaires.
Nous travaillons donc en coordination très étroite. La division du général Le Ray est un peu l’homologue de la direction de la planification de la DGA, qui travaille sous les ordres de M. Philippe Jost. Notre rôle est de mettre en avant l’aspect capacitaire, le leur l’aspect financier.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Nous vous serions reconnaissants de nous fournir l’organigramme afin que nous puissions l’intégrer dans notre rapport.
M. Jean-Michel Fourgous. Comment vivez-vous la concurrence entre les industriels français Thales et EADS sur les matériels que vous utilisez ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Un appel d’offres étant en cours, je n’ai pas le droit de vous répondre.
M. Jean-Michel Fourgous. Qu’en a-t-il été dans le passé ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Il y a en France un champion national des satellites de télécommunication militaire, Thales Alenia Space. C’est cet opérateur qui a réalisé tous les satellites Syracuse – sous le nom, auparavant, d’Alcatel. Aujourd’hui, c’est lui qui dispose des capacités de fabrication les plus importantes en matière de télécommunications militaires. Ses usines sont pour la plus grande part en France – à Toulouse et à Cannes. Il a face à lui un challenger, Astrium, qui ne dispose que d’une petite entité en France. En revanche, dans le domaine des télécommunications par satellite, Astrium travaille beaucoup en Angleterre. En matière de satellites militaires, les deux opérateurs sont en situation de forte concurrence.
Thales Alenia Space est fortement implantée dans les télécommunications militaires nationales françaises depuis des années. La partie réseaux assure une part du plan de charge de l’usine de Cholet. De l’autre côté, EADS, représenté par Astrium, est en situation de challenger, se positionne plus en prestataire de services et met en avant ses victoires – notamment en France – dans des conventions de location de capacités sur des satellites d’Eutelsat et Intelsat, ainsi que sur le fait qu’il porte, en Angleterre, le projet Paradigm en partenariat public-privé.
En matière de véhicules satellitaires, de plateformes, la situation est au contraire équilibrée. Les deux opérateurs coopèrent par exemple sur des satellites pour les Émirats arabes unis.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Une réponse commune des deux opérateurs n’est donc pas envisageable ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Sur ce sujet, je ne peux que m’exprimer à titre personnel. Il me paraîtrait sain qu’ils s’accordent sur la partie concernant les services. Dans la mesure où nous nous dirigeons vers l’externalisation d’une partie de nos réseaux militaires, une partie du métier aujourd’hui effectué par des militaires ou des civils de la défense devra être confiée à un prestataire extérieur. Il y a complémentarité entre les travaux que conduit EADS en France pour les réseaux cellulaires de l’infrastructure nationale partageable des transmissions (INPT) du ministère de l’Intérieur – au sein de laquelle le ministère de la Défense va entrer – et ce que fait Thales dans les réseaux de transport fortement résilients en fibre optique pour la défense. Le secteur comporte aussi un troisième grand acteur, Orange. Ce sont là les trois principaux acteurs de confiance avec lesquels l’État pourrait instaurer un partenariat de longue durée au profit des différents ministères. Aujourd’hui, si l’on constate un début de rapprochement en matière de réseaux, en matière de satellites la concurrence est frontale.
Cela dit, un appel à candidatures a été lancé pour le projet Nectar. Les opérateurs vont recevoir, probablement d’ici la fin du mois, le cahier des clauses techniques.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Dans la mesure où la satisfaction des besoins opérationnels des forces doit rester assurée, avez-vous été associé au chiffrage des coûts de l’abandon des fréquences initialement destinées aux programmes Rubis et, surtout, Félin ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Les armées ont été associées au chiffrage du coût du basculement de la bande de 800 MHz à celle de 2 GHz. L’Armée de terre a analysé les solutions proposées par la DGA. Passer dans ces bandes de fréquences crée une perte opérationnelle, mais elle nous paraît acceptable dans la mesure où ces fréquences sont utilisées au niveau du groupe de combat, c’est-à-dire pour de faibles distances. Dès lors, la DGA a bâti un devis, qui a servi à instruire le dossier de définition du coût du dégagement. Cependant, c’est la direction du programme Félin, et non l’EMA ou l’Armée de terre, qui a chiffré le coût.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. Comment l’EMA voit-il le calendrier prévisionnel de ces libérations de bandes ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Nous devons libérer les bandes Félin pour le 1er décembre 2011. Nous essayons de négocier le remplacement des 13 000 postes Félin qui auront été déjà livrés ; s’agissant de matériels qui peuvent valoir environ 1 000 euros pièce, le « rétrofitage » (la modernisation) ne serait pas justifié. Mais nous n’aurons pas le temps de les remplacer tous avant 2011. Nous négocions donc actuellement, sous l’égide de la DGSIC, un accord pour utiliser les anciens équipements dans les camps d’entraînement, de façon à permettre à l’armée de terre de continuer à préparer correctement ses forces. En 2014 ou 2015, l’ensemble des postes devrait avoir migré vers les nouvelles bandes de fréquences.
Mme Françoise Olivier-Coupeau, Rapporteure. Est-ce que vous concluez des réflexions opérationnelles que vous avez conduites sur Syracuse qu’en relouant 90 % des capacités du système à l’opérateur qui sera choisi, vous resterez en mesure de satisfaire tous les besoins opérationnels nécessaires, même en situation de crise ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Les prévisions sont toujours délicates, mais le niveau défini correspond à un juste besoin que nous avons considéré comme satisfaisant. Évoquer une proportion de 10 % est un peu réducteur. Nous avons élaboré un abaque, qui combine un nombre de répéteurs et leur durée de vie. Syracuse a été dimensionné à partir d’hypothèses d’emploi des forces. Les répéteurs installés sur un satellite en orbite tombent en panne au fil du temps. Pour pallier les insuffisances au cours du temps d’un système à deux satellites (débits, couverture…), les États en ajoutent habituellement un troisième. Nous avons plutôt choisi au contraire d’installer une partie française d’ampleur limitée sur le satellite italien Sicral.
La livraison de celui-ci en 2013/2014 nous permettra d’accroître nos capacités : nous pourrons alors mettre à la disposition de l’opérateur locataire davantage de répéteurs sur les deux autres satellites. Mais, du fait de la diminution progressive du nombre de répéteurs en fonction, nous ne devrions plus pouvoir offrir de répéteurs à la location à l’horizon 2020.
C’est dans ces conditions et par simplification que nous avons globalement annoncé le taux de 10 % pour les capacités « opérateur », mais les spécifications du cahier des charges sont précises. Selon nos calculs, le risque est acceptable. L’EMA s’est engagé. Avec la DIRISI, nous avons effectué des modélisations. Les abaques que nous avons validées correspondent, sur la durée, à cette proportion.
Cela dit, nous ne restons pas entièrement démunis. La politique satellitaire globale des armées comporte un « noyau dur », nous permettant un premier engagement autonome de nos forces. Ce noyau dur, c’est Syracuse, qui utilise la bande de fréquences X. Avec cet équipement, nous couvrons l’arc de crise. Ce sont ces liaisons que nous sommes capables de protéger contre le brouillage. En parallèle, nous louons des capacités à l’année, à des compagnies d’exploitation de satellites telles qu’Intelsat ou Eutelsat. Nous pouvons basculer nos capacités d’un système à l’autre. En troisième élément, nous louons des capacités à la communication, comme dans le système Inmarsat.
Notre architecture de satellites de communication est donc globale. Si une crise de forte intensité se déclenche à un moment donné et que nous manquons de capacité en bande X, nous pensons pouvoir basculer un certain nombre de capacités sur d’autres fréquences. Au pire, nous devrons sous-louer à l’industriel, à prix fort, le complément de capacité que nous lui aurons préalablement loué.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. La DGA nous dit qu’elle se prononcera sur le projet Nectar sur la base de son intérêt économique pour l’État. Or, les offres comportent un volet d’options, portant notamment sur les risques supportés par l’industrie et la continuité de service espérée – dans certains cas, on espère que l’industriel pourrait proposer de compenser des défaillances grâce à des services qu’il pourrait fournir lui-même. Comment ces avantages opérationnels sont-ils convertis en valeur économique pour la prise de la décision ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Je ne suis pas en mesure de vous répondre.
M. Louis Giscard d’Estaing, Rapporteur. L’état-major n’est pas associé à ce type de chiffrage ?
M. le capitaine de vaisseau Arnaud Coustillière. Ces éléments sont extrêmement difficiles à chiffrer. À mon sens, la valorisation ne pourra être effectuée qu’une fois les offres des deux industriels connues. Nous sommes associés à la négociation ; nous avons accès au dossier. Cependant, l’état-major des armées ne dispose pas d’expert en ingénierie financière. Une mission interne au SGA, le secrétariat général de l’administration, du ministère pourra apporter sa contribution. Aujourd’hui, je crois que le ministère recherche l’appui d’un cabinet en assistance à maîtrise d’ouvrage.
M. le coprésident David Habib. Merci beaucoup, commandant, pour ces précisions.