Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires sociales > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires sociales

Mardi 20 octobre 2009

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 04

Présidence de M. Pierre Méhaignerie, Président

– Suite de l’audition, ouverte à la presse, de Mmes Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, et Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010

– Examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 (M. Yves Bur, M. Jean-Pierre Door, M. Denis Jacquat, Mme Marie-Françoise Clergeau et Mme Isabelle Vasseur, rapporteurs) 12

Amendements examinés par la commission

– Présences en réunion 17

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 20 octobre 2009

La séance est ouverte à dix-huit heures dix.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)

La Commission des affaires sociales entend Mmes Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, et Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010

M. le président Pierre Méhaignerie. Nous poursuivons l’audition du Gouvernement sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, commencée la semaine dernière. Je remercie vivement Mme Bachelot-Narquin et Mme Morano d’avoir bien voulu se libérer pour poursuivre cette audition.

M. Patrick Roy. Ma question, que j’aurais voulu poser à M. Xavier Darcos, portera sur l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, (ACAATA), qui est actuellement de quelques centaines d’euros : vous conviendrez qu’il est difficile de vivre avec une telle somme. Le Gouvernement a-t-il enfin la volonté de la porter au minimum au niveau du SMIC ? Je ne doute pas que votre réponse sera positive : comment un Gouvernement qui a refusé notre proposition de limiter les hauts revenus, pourrait-il s’opposer à l’augmentation des bas revenus ?

M. Rémi Delatte. Je voudrais, madame la ministre, vous interroger sur les systèmes d’information partagés de santé. Le dossier médical personnalisé n’a pas eu le succès escompté, ce qui est regrettable du point de vue de l’offre et de la qualité de soins. De même, la diffusion de la carte professionnelle de santé n’a pas atteint l’importance qui lui aurait permis d’assurer une meilleure efficience du système d’information partagé de santé. Aujourd’hui, tous nos espoirs se portent sur l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP), dont la mise en place constitue une étape importante en cette matière. Où en est-on ? Quels sont les objectifs et les bénéfices attendus de la création de l’agence ?

M. Gérard Bapt. Ma première question portera sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui fait l’objet d’un article du projet de loi de financement de la sécurité sociale visant à améliorer la sécurité dans les PME. En outre, une réforme du système de cotisations de la branche est en cours de préparation. Si nous approuvons l’objectif de cette réforme, à savoir inciter les entreprises à faire plus de prévention, nous contestons en revanche, avec un certain nombre de constitutionnalistes, votre choix d’opérer par décret, la Constitution imposant la voie législative pour changer l’assiette d’une cotisation.

D’autre part, je voudrais vous interroger, madame la ministre, sur la pandémie grippale. Était-il pertinent de sortir de l’ONDAM les dépenses de soins générées par une épidémie, les excluant du même coup du champ de compétence du comité d’alerte ? J’aimerais également savoir selon quelles modalités ont été choisis les laboratoires pharmaceutiques chargés d’élaborer les vaccins contre la grippe A. Les contrats que vous avez passés avec eux contiennent-ils une clause permettant d’adapter l’acquisition de doses de vaccin aux besoins réels ? En effet, d’après l’OMS, une seule injection suffirait. En outre, la vaccination étant volontaire, il semblerait qu’un nombre significatif de nos compatriotes ne souhaiterait pas se faire vacciner contre le virus A (H1N1). Une telle clause permettrait de faire des économies substantielles s’agissant d’un investissement de 840 millions d’euros.

M. Maxime Gremetz. Je voudrais d’abord vous interroger sur la jurisprudence qui octroie aux salariés victimes de l’amiante une allocation de préretraite représentant 100 % de leur salaire, au lieu des 65 % qu’ils touchent actuellement. Nous demandons, avec les associations de défense des victimes de l’amiante, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale donnera à cette jurisprudence valeur législative.

Deuxièmement, alors que la part des dépenses de santé dans le PIB devrait augmenter avec le vieillissement de la population et les progrès de la médecine, celle-ci n’augmente pas, voire baisse, selon les statistiques officielles de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère du travail. À un moment où l’on réduit le montant du forfait hospitalier et où on organise le déremboursement de certains médicaments, une autre étude montre qu’une taxation, même minime, des revenus financiers rapporterait 48,2 milliards d’euros à la sécurité sociale. Est-il normal que des revenus financiers, fruit de la spéculation, ne contribuent pas à l’effort de santé ? Ne pourrait-on pas au moins étudier l’impact d’une telle réforme ?

Troisièmement, est-il juste que l’État refuse de demander le remboursement des crédits du Fonds stratégique d’investissement débloqués au bénéfice d’entreprises qui se sont ensuite délocalisées à l’étranger ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. À l’inverse de ce que vous prétendez, monsieur Gremetz, les chiffres de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) de mon ministère montrent que la part des dépenses de santé dans le PIB augmente régulièrement dans notre pays, et ces chiffres ont été validés par l’ensemble des partenaires sociaux dans le cadre de la Commission des comptes de la santé. Avec 11,2 % de son PIB consacrés aux dépenses de santé, la France est toujours vice-championne du monde en la matière. Selon les chiffres de cette commission, la part de la consommation de soins et de biens médicaux ne cesse, elle aussi, d’augmenter, jusqu’à atteindre 7 % du PIB en 2008, soit une augmentation de 3,8 % par rapport à 2007, année qui l’avait déjà vue augmenter de 4,4 % par rapport à 2006.

Il est vrai, monsieur Bapt, que certains experts jugent qu’une seule injection vaccinale suffira. Je préfère cependant attendre l’avis de l’Agence européenne du médicament, autorité indépendante chargée de délivrer l’autorisation de mise sur le marché et de définir les modalités du vaccin. Ce serait de toute façon une excellente nouvelle, tant du point de vue de la traçabilité que de la logistique et de l’acceptabilité de la vaccination. Dans un tel cas, nous annulerions, bien évidemment, le rendez-vous pour une deuxième injection prévue pour les personnes déjà vaccinés. Ceci dit, selon les informations qui nous reviennent pour l’instant, l’injection unique ne vaudrait pas pour toute la population : pour les enfants jusqu’à neuf ans, par exemple, deux injections resteraient nécessaires. Nous avons besoin de ces précisions avant de modifier les contours de la demande d’autorisation de mise sur le marché.

Deux autres faits sont à considérer. Premièrement, nous avons décidé, au titre de la solidarité internationale, de consacrer 10 % de notre dotation à une vocation humanitaire, par l’intermédiaire de l’OMS – sur le budget, faut-il le préciser, du ministère des affaires étrangères. Deuxièmement, nous devons prévoir un taux de perte d’environ 10 % de la matière pharmaceutique du fait du conditionnement des vaccins en flacons multidoses, tout en sachant que cette perte est limitée par la vaccination collective. Ce ne sont finalement pas 94 millions de doses qui seront effectivement utilisables, mais 74 millions. Il est encore trop tôt pour dire que ce chiffre sera forcément supérieur à nos besoins.

Nous le devons d’autant moins, qu’en la matière l’opinion évolue très vite et que le désir de se faire vacciner peut croître au fur et à mesure de l’apparition de nouveaux cas. Il n’est que de voir ce qui s’est passé aux États-Unis, où l’annonce de décès d’enfants a provoqué des fils d’attente devant les centres de vaccination. Je vous fais remarquer, en outre, que nous ne sommes pas encore entrés dans la période des grands froids, qui va accélérer l’épidémie.

De toute façon, toutes les doses seront utilisées, d’abord pour assurer la meilleure couverture vaccinale possible dès cette année, et l’année prochaine pour une autre campagne de vaccination, puisque le vaccin est composé d’un adjuvant réutilisable, qui représente 80 % du prix du vaccin, et dont la durée de validité est de cinq ans.

Enfin, nous pourrons toujours céder nos doses superflues aux pays qui se sont montrés beaucoup moins prudents que nous, puisque nous avons, avec le Royaume-Uni, les États-Unis, les Pays-Bas, « asséché » le marché mondial de vaccins contre la pandémie.

Alors, de grâce, ne cédons pas aux délices de la lucidité a posteriori. Notre objectif était de pouvoir vacciner l’ensemble de la population, afin de n’avoir pas à faire des choix contraires à l’éthique. Car s’il faut, comme certains le demandent, réserver le vaccin à un tiers de la population, comment choisir ce tiers ? Par tirage au sort ?

Il n’y aura, je le répète, aucune difficulté ni aucun gaspillage : nous avons tout ce qu’il faut pour respecter les intérêts, à la fois éthiques et économiques, de notre pays.

M. Yves Bur. Au cas où les injections seraient moins nombreuses que prévues, comptez-vous réduire la contribution de solidarité de 300 millions d’euros demandée aux assurances complémentaires ?

Mme la ministre. Encore une fois, dans l’attente de nouveaux éléments d’information, je vous appelle à la plus grande prudence. Si nous avons calculé un taux d’attrition du vaccin, nous ne savons pas quelle tournure prendra l’épidémie : à l’heure actuelle, les épidémiologistes n’écartent aucun scénario. Pour l’instant, nous disposons du nombre de doses nécessaires pour vacciner l’ensemble de la population, surtout dans l’hypothèse où deux injections seraient nécessaires. Je ne comprends vraiment pas certaines déclarations…

M. Maxime Gremetz. Celles du professeur Debré, par exemple ?

Mme la ministre. Je ne veux citer personne, mais j’appelle chacun à faire preuve de responsabilité.

S’agissant enfin du comité d’alerte, monsieur Bapt, il n’a pas à être sollicité à propos de dépenses par nature exceptionnelles : ce ne serait pas conforme à la philosophie qui a présidé à sa création, ni aux objectifs que la loi lui assigne.

Monsieur Delatte, je ne partage absolument pas votre pessimisme en ce qui concerne le dossier médical personnel (DMP) en dépit des quelques vicissitudes qu’il a traversées. Dès avril, nous avons lancé un plan de relance de ce projet. Dans une première phase, qui courra de 2010 à 2013, celui-ci doit permettre de déployer, à l’échelle nationale, des services initiaux de partage de documents entre les professionnels de santé suivant des règles d’habilitation contrôlées par le patient, et de fournir une première gamme d’informations à valeur médicale (antécédents et allergies, prescriptions médicamenteuses, résultats d’examens de biologie et de radiologie, comptes rendus d’hospitalisation et de consultations) ; d’expérimenter, sur la base de ces services initiaux, des services spécialisés à valeur médicale supplémentaire, tels que le dossier communiquant de cancérologie, le suivi du diabète, le dossier médical de l’enfant, la prescription électronique, le partage de l’imagerie médicale, le partage d’une synthèse médicale, et tout service répondant aux attentes des bénéficiaires et conforme aux finalités du DMP ; de mettre en œuvre de nouveaux services aux patients, qu’il s’agisse de mettre à leur disposition l’information qui les concerne ou de les aider dans leur prise en charge.

Le calendrier annoncé a été respecté.

Sur le plan institutionnel, j’ai mené à bien la création de l’Agence des systèmes d’information partagés de santé par la fusion du GIP DMP, du GIP Carte de professionnel de santé et du Groupement pour la modernisation du système hospitalier.

Le plan opérationnel a connu cinq avancées notables : l’appel d’offres a été lancé, permettant la mise en œuvre d’une nouvelle version dès la fin de l’année 2010 ; le cadre d’interopérabilité a été publié, après une large concertation avec les industriels ; sept projets régionaux ont été lancés afin de tester les infrastructures et les services appelés à converger vers la version nationale du DMP ; les travaux relatifs à l’identifiant national de santé, menés en concertation avec la CNIL et l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information, seront publiés en novembre et la mise en œuvre de cet identifiant démarrera dès janvier prochain ; enfin, un guide des bonnes pratiques du recueil du consentement du patient, qui fait consensus chez toutes les parties prenantes, sera diffusé dans quelques jours.

Le coût total de la préparation du DMP depuis 2007 est d’environ 80 millions d’euros. Cette somme couvre les subventions versées dans le cadre des appels à projet dans treize régions, pour sa plus grande part, les charges de personnels et l’assistance à maîtrise d’ouvrage. Ce montant est faible au regard des sommes investis par nos homologues européens. Le budget du DMP sera de 90 millions d’euros en 2010 : autant dire que nous resterons dans l’épure financière, bien loin des chiffres extravagants que j’entends ici ou là. Quant aux dépenses engagées lors des vicissitudes qui ont précédé ce plan, elles ne l’ont pas été en vain puisqu’elles ont servi à la mise en place du projet.

Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité. Le décret de revalorisation de l’ACAATA est en cours de concertation au sein de la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles : il prévoit une revalorisation de 10 % de la rente minimale. Quant à la tarification de la branche accidents du travail – maladies professionnelles, nous sommes en train de discuter des principes de sa réforme, et la commission se prononcera sur ces principes le 22 octobre prochain. L’objectif est double : mieux valoriser la prévention, notamment des petits sinistres répétés ; élargir le champ des entreprises tarifées sur la base de la sinistralité réelle.

M. Maxime Gremetz. Et qu’en sera-t-il de la jurisprudence relative à l’allocation de retraite des salariés victimes de l’amiante ?

Mme Dominique Orliac. La hausse du forfait hospitalier – qui conduira à une augmentation du reste à charge pour les patients, alors même que les mutuelles vont augmenter leurs cotisations de 4 % à 5 % –, la fiscalisation des indemnités journalières d’accident du travail, le déremboursement partiel de plusieurs médicaments, tout cela pèsera inévitablement sur les assurés les plus modestes. Dans le contexte actuel, beaucoup de mesures pourraient pourtant être prises qui iraient dans l’intérêt des patients, tout en contribuant à réduire les coûts. Je pense notamment au développement de la chimiothérapie par voie orale. Le traitement de certains cancers pourrait ainsi s’effectuer à domicile, alternative intéressante qui permettrait de réduire les dépenses d’hospitalisation. Le développement de la chimiothérapie orale offrirait un meilleur confort au patient, rendant son traitement plus humain et plus supportable, y compris sur le plan psychologique, une médication orale étant beaucoup moins traumatisante qu’une injection, tout en permettant des économies substantielles. Cette possibilité a-t-elle été envisagée ?

M. Dominique Dord. Madame la ministre, lors de son audition par notre commission il y a deux semaines, votre collègue, M. Hortefeux, nous a indiqué que l’on dénombrait alors quelque 250 cas de grippe A pour 100 000 habitants. Où en est-on aujourd’hui ?

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte un article intéressant sur les retraites chapeau. Pourrions-nous – ce souhait s’adresse plutôt aux services de M. Darcos – avoir une vue d’ensemble des dispositifs visant à lutter contre les rémunérations excessives, notamment dans le monde de la finance, et disposer d’une étude comparative des pratiques dans les différents pays ? Il faut en effet être à la pointe du combat en faveur d’une moralisation des rémunérations, sans pour autant se déconnecter de ce que font les autres pays.

Mme Catherine Génisson. Alors même que la convergence tarifaire public-privé a été reportée à 2018, voilà que le sujet est remis à l’ordre du jour pour la chirurgie ambulatoire. Or, s’il est bien un domaine où il existe un écart considérable entre secteur public et secteur privé, c’est bien celui-là, peut-être parce que le secteur privé est plus réceptif à ce mode de prise en charge, mais surtout parce que les patients des deux secteurs ne bénéficient pas du tout du même environnement social. Beaucoup de patients du public ne peuvent pas sortir le soir même d’une intervention, faute de garantie d’accompagnement et de surveillance suffisante. L’environnement familial et social sera-t-il pris en compte ?

Ma deuxième question concerne le contrôle des arrêts de travail. Nul d’entre nous ne conteste que la fraude compromet l’égalité d’accès de nos concitoyens à leurs droits fondamentaux. Mais s’il y a des fraudeurs, il faut aussi savoir que beaucoup de nos concitoyens refusent l’arrêt qui leur serait pourtant nécessaire, par peur de rétorsions dans leur entreprise ou par peur de perdre leur emploi lorsqu’ils sont en contrat précaire. Or, chacun le sait, les conditions de travail se dégradent et une pression croissante s’exerce sur les salariés, ce qui a des conséquences psycho-somatiques importantes : il faudrait en tenir compte. Par ailleurs, s’il est normal que les contrôles soient effectués par des médecins des caisses de sécurité sociale, il est inconcevable qu’ils le soient par les médecins du travail ou par des médecins généralistes mandatés par les employeurs. Qui donc effectuera ces contrôles ?

M. Philippe Boënnec. Le report de 2012 à 2018 de la convergence tarifaire entre public et privé mériterait, me semble-t-il, une réflexion plus approfondie. Des éclaircissements demeurent nécessaires. Qui prend en compte les missions d’intérêt général de santé publique et comment ? La question se pose aujourd’hui au niveau national et se posera demain au niveau des agences régionales de santé.

Mme Edwige Antier. Mon expérience de pédiatre m’a appris que le calendrier des vaccinations, notamment le nombre de rappels, peut être amené à varier en fonction des concentrations d’anticorps induites. Il ne m’étonne donc pas du tout que l’on ne sache pas encore combien il faudra d’injections pour la grippe A. Nous avons connu ce problème avec les vaccins contre la rougeole et contre le pneumocoque, où le nombre d’injections a évolué dans le temps

Les médicaments à service médical rendu faible ou insuffisant sont moins remboursés, voire ne le sont plus du tout. Or, il ne faut pas négliger l’aspect symbolique de la prescription de certains produits, qui relèvent davantage du placebo que du médicament. Prescrire un sirop à un enfant, en même temps que cela satisfait ses parents, évite bien souvent de recourir à un antibiotique. S’il est normal que certains médicaments à service médical faible ou inexistant ne soient plus remboursés, notamment pour que l’on puisse continuer de rembourser intégralement les anti-cancéreux et d’autres traitements très onéreux, le problème est que les médicaments déremboursés disparaissent des pharmacies. Cela pousse les médecins à prescrire des médicaments remboursés, au détriment d’autres, moins chers et qui, en l’espèce, seraient aussi efficaces, ayant plutôt un effet d’accompagnement. Il faudrait obtenir des laboratoires pharmaceutiques et des officines que les médicaments non remboursés continuent d’être distribués.

En matière de politique de la petite enfance, je salue l’effort considérable consenti par le Gouvernement en matière de crèches. Je regrette que le versement des allocations familiales ne soit plus subordonné à la production des certificats de suivi périodique des enfants. Il semble que l’on se moque aujourd’hui de ces certificats, qui ne sont plus systématiquement établis ou demeurent dans les carnets de santé sans que nul ne les consulte. Ce laisser-aller est d’autant plus regrettable, que bien des cas de maltraitance auraient pu être repérés par ce simple biais.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Personne n’a jusqu’à présent évoqué le secteur médico-social. On nous dit que le budget au profit des personnes âgées augmente. On apprend à l’article 37 du texte que la contribution de l’assurance-maladie aux dépenses des établissements s’élève à 7 milliards d’euros, alors que Mme Berra évoquait, elle, l’autre jour, 7,912 milliards d’euros. Qu’en est-il ? Par ailleurs, à quoi correspondent exactement les 533 millions d’euros de mesures nouvelles ?

On parle aussi de plusieurs centaines de millions d’euros non consommés sur les crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ; or, tous les acteurs se plaignent que la nouvelle tarification au GIR moyen pondéré « soins » – aboutisse à une sous-dotation des établissements et à une diminution de leurs moyens en personnel. Il faut traiter la question, et avant de créer de nouveaux établissements, s’assurer que les existants disposent de moyens suffisants.

M. Jean Mallot. Ma question s’adresserait plutôt à M. Woerth. Je trouve assez inquiétante l’annexe B du projet de loi, dont nous n’avions pas eu connaissance assez tôt pour que je puisse l’interroger mercredi dernier. Y figurent les hypothèses de recettes et de dépenses jusqu’à l’horizon 2013. Ainsi, 70 % des recettes du régime général reposent sur les salaires ; or, les évolutions prévues de la masse salariale sont pour le moins surprenantes. À une diminution de 0,4 % prévue en 2010, fait suite une augmentation de 5 % en 2011, qui se poursuit les deux années suivantes. Sur quoi se fondent ces hypothèses ? Visent-elles seulement à étayer la stabilisation du déficit de la sécurité sociale en dessous de 30 milliards d’euros pour les années 2010 à 2013, comme indiqué un peu plus loin dans cette annexe ? Prévision pour le moins fragile.

M. Bernard Perrut. Les indicateurs de la branche famille font apparaître un bilan satisfaisant, qu’il s’agisse de l’évolution du nombre de places d’accueil, de l’aide apportée aux familles, ou bien encore des prêts accordés aux assistants maternels pour l’amélioration de l’habitat. L’une de mes préoccupations, partagée par nombre de nos concitoyens, concerne le reste à charge des familles, qui diffère selon le mode d’accueil des enfants. Pour les familles modestes, il revient plus cher de faire garder son enfant par un assistant maternel qu’en crèche, alors même que le recours aux assistants maternels est moins coûteux pour les finances publiques. La réflexion évoluera-t-elle sur ce point ?

Mme Michèle Delaunay. Je m’inquiète de la volonté d’exclure du bénéfice du dispositif des affections de longue durée (ALD) certains patients qui ont été atteints de cancer. Une très grave confusion semble avoir été faite entre le temps et le taux de guérison. Sont donnés en exemple le mélanome et le cancer du sein, le plus fréquent de tous, pour lequel le mot de guérison ne peut jamais être prononcé. En effet, le risque de récidive ne diminue pas davantage de 34 à 35 ans après le diagnostic de la maladie que de 4 à 5 ans après. Soit on considère ces patients comme « guéris », comme il est dit dans le texte, mais dès lors pourquoi prévoir une surveillance, qui suppose un risque de récidive ? Soit ils ne sont pas « guéris », et les exclure du dispositif des ALD ne les incitera pas à réaliser ces examens de surveillance. Il est prévu de ne maintenir en ALD au-delà de cinq ans que les personnes « poursuivant une thérapeutique lourde ». Mais ALD ou maladie chronique ne signifie pas nécessairement chimiothérapie ou thérapeutique de même lourdeur. Qui suivrait continûment durant cinq ans ces « thérapeutiques lourdes » serait d’ailleurs bien fatigué… Si nous ne sommes pas totalement opposés à ce qui sous-tend cette disposition, il faut en revoir très méticuleusement la rédaction.

Mme la ministre. Madame Orliac, le dernier rapport de la Commission des comptes de la santé indique que le reste à charge des ménages, de 9,4 %, a été inférieur en 2008 à ce qu’il était en 1995. Si la part de l’assurance maladie a quelque peu diminué, cette baisse a été compensée par l’augmentation du remboursement des organismes complémentaires, lesquels bénéficient d’aides fiscales, d’un montant estimé entre 5 et 7 milliards d’euros par la Cour des comptes, sans parler de l’aide directe accordée aux ménages pour leur faciliter l’accès à une complémentaire santé, aide d’ailleurs fortement augmentée par la loi Hôpital, patients, santé et territoire, conformément au souhait du président Méhaignerie.

Alors même que nous avons en France le taux de prise en charge solidaire le plus élevé au monde, le reste à charge des patients y est parmi les plus faibles des pays de l’OCDE, le plus bas au monde avec les Pays-Bas. Certes, cette moyenne cache des disparités : il est extrêmement faible – 2,8 % – pour les soins dispensés à l’hôpital, ainsi que pour les pathologies les plus lourdes et les plus coûteuses. Le traitement des ALD, de même que des médicaments irremplaçables comme les anti-cancéreux et les anti-rétroviraux, sont remboursés à 100 %. Par choix éthique que nous sommes nombreux à partager, je souhaite conserver un niveau de remboursement élevé pour les soins essentiels et les malades les plus fragiles. Près d’un tiers du reste à charge est lié aux dépassements d’honoraires. Les mesures volontaristes que nous prenons pour limiter ces dépassements sont de nature à en réduire le montant.

S’agissant de l’administration de chimiothérapies par voie orale, nous nous appuierons sur les préconisations de la Haute autorité de santé et nos critères seront exclusivement médicaux.

Monsieur Dord, en ce qui concerne la grippe A, le bulletin épidémiologique paraissant le mercredi, je ne peux vous donner ce soir que les chiffres de la semaine dernière. La pandémie était stabilisée, avec 186 consultations pour syndrome grippal pour 100 000 habitants, contre 181 la semaine précédente. Le virus H1N1 l’a emporté sur tous les autres virus grippaux et ce surplus de consultations lui est bien lié. La pandémie semble s’être accélérée depuis le début de la semaine, comme devraient le confirmer les chiffres qui seront publiés demain, et comme nous nous y attendions après que la douceur des températures avait pu stabiliser le nombre de cas. Nous remontent également, notamment de l’Assistante Publique-Hôpitaux de Paris, des cas de sujets jeunes, sans facteur de risque particulier, gravement atteints comme cette jeune fille de 14 ans, aujourd’hui en réanimation lourde.

Mme Génisson et M. Boënnec m’ont tous deux interrogée, dans une optique différente, sur la convergence tarifaire public-privé. Le report de cette convergence à 2018 était nécessaire. Il faut, en effet, d’ici là mener à bien certaines études pour objectiver et quantifier les écarts de coûts entre les deux secteurs. Personne n’a jamais dit que convergence signifierait égalité des tarifs. Il ne saurait y avoir convergence, que dans la limite des écarts justifiés par une différence dans la nature des charges couvertes. Mais, il est normal qu’à prestations égales et environnement identique, les tarifs soient les mêmes dans les deux secteurs. Un rapport sera présenté au Parlement sur le sujet. Sur la base de l’activité du secteur public, l’écart entre public et privé est passé de 40 % en 2006 à 27 % en 2009. La convergence est d’ores et déjà effective dans certains domaines d’activité, comme l’hospitalisation à domicile ou la dialyse.

Oui, madame Génisson, il sera, bien entendu, tenu compte de l’environnement social des patients. Le MIGAC Précarité mis en place en 2009 et destiné à couvrir les coûts structurels de la précarité, qui a mobilisé 100 millions d’euros, sera pérennisé. Nous continuerons de rechercher la convergence, même si nous savons que du temps sera nécessaire.

Une approche expérimentale ciblée sera développée pour quelques dizaines de groupes homogènes de séjour (GHS), pour un montant de 150 millions d’euros. Ces expérimentations ne doivent toutefois pas retarder la réalisation d’études d’objectivation des écarts de coûts, qui constitue le socle de notre démarche. Un travail approfondi est vraiment nécessaire, que nous menons avec l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation. Pour autant, même modeste, la démarche de convergence ciblée, engagée cette année permettra de tirer d’utiles leçons.

Mme Génisson m’a également demandé qui contrôlerait les arrêts de travail. Dans la mesure où ce sont les généralistes qui en prescrivent le plus, il était logique que ce soit des généralistes qui en soient chargés. La mise sous accord préalable des prescriptions d’indemnités journalières a tout de même rapporté 45 millions d’euros en trois ans. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale simplifie la procédure et redonne toute sa place au dialogue entre les autorités administratives des caisses d’assurance maladie et le service médical, l’objectif étant davantage d’accompagner les praticiens que de les sanctionner. Devant un comportement s’écartant de la norme, il faudra rechercher si cela ne peut pas s’expliquer par une typologie particulière de la clientèle du praticien ; et ce n’est qu’après analyse approfondie, qu’une sanction pourra éventuellement être prononcée à son encontre. Le contrôle des arrêts maladie s’est révélé efficace pour limiter la croissance des dépenses d’assurance maladie. Il faut continuer de lutter contre les abus.

Pour ce qui est des missions d’intérêt général, monsieur Boënnec, j’avoue être quelque peu surprise par certain débat. On reproche parfois au privé de ne pas assurer les missions d’intérêt général. Mais quand, dans l’objectif d’assurer la meilleure couverture sanitaire possible du territoire, on donne aux agences régionales de santé la possibilité de faire remplir des mission d’intérêt général par des établissements privés, dans un cadre contractuel impliquant des droits et des devoirs, en particulier pour le respect des tarifs opposables, on s’étonne que cela soit possible ! Il faut être cohérent.

Madame Antier, le taux de remboursement des médicaments est exclusivement fixé sur critère médical d’efficacité. Hors de ce cadre, toutes les dérives seraient possibles. Nous avons décidé de ramener de 35 % à 15 % le taux de remboursement des médicaments à service médical faible dans toutes leurs indications, ainsi que des médicaments à service médical insuffisant encore remboursés à 35 %. Il y a aura donc quatre taux de remboursement : 100 % pour les médicaments irremplaçables, très coûteux, comme les anti-cancéreux et les anti-rétroviraux, 65 % pour les médicaments à service médical important, 35 % pour ceux à service médical modéré et 15 % pour ceux à service médical faible.

Contrairement à ce qui a pu être dit ici ou là, les antalgiques et anti-pyrétiques du type paracétamol ou aspirine resteront remboursés à 65 %. Pour le reste, il faut juger du remboursement des médicaments, non en stock mais en flux. Certes, la diminution à 15 % du remboursement de certains d’entre eux va procurer 145 millions d’euros d’économie mais, chaque année, de nouveaux médicaments sont admis au remboursement, et ce pour un montant total d’un milliard d’euro – je pense au remboursement à 65 % d’une pilule de troisième génération, la Varnoline, conformément à un engagement que j’avais pris devant vous, et d’un nouveau traitement très coûteux du myélome multiple. Pour pouvoir rembourser ces nouveaux médicaments, il est logique que nous en déremboursions certains autres à l’efficacité vraiment limitée.

Mme Michèle Delaunay. C’est vrai.

Mme la ministre. Il ne peut pas y avoir de débat sur les médicaments classés dans la liste à 15 % !

Madame Delaunay, pour ce qui est des ALD, mon approche est strictement médicale et ma position se fonde sur un avis de la Haute autorité de santé. Nous envisageons, dans le cadre du plan Cancer, que des personnes guéries de cette maladie, selon des critères fixés sur avis médical, bénéficient moins longtemps du dispositif d’ALD, tout en continuant de bénéficier d’une prise en charge à 100% de leurs examens de surveillance.

Mme Michèle Delaunay. Si elles sont guéries, elles n’ont pas besoin de suivi. Sinon, elles doivent rester en ALD. Il y a là une contradiction majeure.

Mme la ministre. C’est la Haute autorité qui a formulé cette proposition. C’est avec elle qu’il faudra en discuter. Il ne s’agit pas de considérations économiques, mais scientifiques et médicales. Suite à son avis, nous avons entrepris d’autres démarches concernant les ALD et ainsi décidé de rembourser certaines actions de prévention primaire de l’hypertension artérielle, des facteurs de risque cardio-vasculaire, et de généraliser les expériences d’éducation et d’accompagnement thérapeutique, comme le programme Sophia de la CNAMTS et d’autres mis en place par la MSA.

Mme la secrétaire d’État. Monsieur Gremetz, vous avez fait allusion à une jurisprudence de la Cour d’appel de Paris. Cette décision d’espèce s’explique par le fait que l’employeur n’aurait pas pris toutes les mesures pour mettre fin à l’exposition à l’amiante. On ne peut donc en déduire que le juge a remis en cause les critères d’attribution de la rente à taux plein.

Monsieur Dord, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit de doubler les prélèvements sur les retraites chapeaux, ce qui rapportera 25 millions d’euros et mettra ce régime sur un pied d’égalité avec les autres régimes de retraite supplémentaire, avec des contributions taxées à 12 %. La comparaison avec l’étranger est contestable, ces régimes étant spécifiques et sans réel équivalent à l’étranger.

Madame Antier, la semaine dernière, j’ai reçu toutes les associations de protection de l’enfance. Je souhaite vous associer à la réflexion menée en la matière, notamment en ce qui concerne le contrôle de la santé des enfants en bas âge.

Monsieur Perrut, nous avons diversifié les modes de garde, notamment en signant une convention d’objectifs et de gestion, de 1,3 milliard d’euros, avec la Caisse nationale d’allocations familiales. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a imposé une augmentation de 50 euros par mois du complément mode de garde au profit des familles les plus modestes, soit un budget global de 50 millions d’euros. L’an dernier, nous avons majoré de 10 % le complément mode de garde pour les personnes travaillant en horaires atypiques. Enfin, nous avons créé une ligne budgétaire spécifique pour développer des modes de garde adaptés dans les 215 quartiers prioritaires, où le taux d’activité des femmes est de 10 % inférieur à la moyenne nationale. Je me réjouis donc de répondre à votre attente, notamment en ce qui concerne les familles les plus modestes.

Madame Hoffman-Rispal, nous mettrons en œuvre les engagements du Président de la République concernant les personnes âgées. L’ONDAM 2010 pour les personnes âgées s’élève à 7 milliards. Cette progression autorisera l’adoption de mesures nouvelles, d’un montant global de 550 millions d’euros, avec le déploiement du plan Alzheimer et la médicalisation de maisons de retraite : 7 500 places seront ainsi créées.

La Commission des affaires sociales examine, sur le rapport de M. Yves Bur, M. Jean-Pierre Door, M. Denis Jacquat, Mme Marie-Françoise Clergeau et Mme Isabelle Vasseur, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

M. le président Pierre Méhaignerie. Tout le monde ayant eu l’occasion d’intervenir, je déclare la discussion générale du projet de loi close.

En vertu de la nouvelle procédure prévue par le règlement, j’ai examiné la recevabilité financière des amendements. Le Conseil constitutionnel a insisté sur l’importance de ce contrôle, qui incombe désormais aux présidents de commission. Les amendements déclarés irrecevables ne figurent donc pas dans la liasse et ne seront pas discutés en commission. Mais, je suis allé aussi loin que le règlement l’autorise ; en cas de doute, notamment sur le caractère « cavalier » d’un amendement, j’ai préféré qu’il soit néanmoins débattu.

M. Roland Muzeau. Nous avions bien compris que la réforme constitutionnelle aboutissait à l’amputation des droits du Parlement. Mais, afin que le travail des uns et des autres soit mieux compris, il est regrettable que les amendements déclarés irrecevables ne puissent apparaître nulle part.

M. le président Pierre Méhaignerie. Le Conseil constitutionnel a décidé que ces amendements ne devaient être ni publiés ni discutés.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2008

Article 1er : Approbation des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2008

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2 : Approbation du rapport figurant en annexe A et décrivant les modalités de couverture du déficit constaté de l’exercice 2008

La Commission adopte l’article 2 sans modification, puis la première partie.

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ANNÉE 2009

Section 1

Dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre financier de la sécurité sociale

Article 3 : Ratification du relèvement du plafond des avances de trésorerie au régime général

La Commission est saisie de l amendement AS 80 présenté par M. Michel Issindou.

M. Michel Issindou. Nous proposons de supprimer l’article 3, car les chiffres qu’il contient constituent un gouffre effrayant qu’il convient de combler. Le choix de ne pas transférer la dette sociale à la CADES est irresponsable, car il entraînera des découverts de trésorerie considérables pour l’ACOSS : 61 milliards fin 2010. Nous ne nions pas que la crise a un effet sur les déficits, mais la dette s’accumule et il faut l’éponger autrement que par des découverts de trésorerie. Parmi de nombreuses autres solutions, il serait courageux de transférer la CRDS et la CSG vers la CADES, de supprimer quelques allégements généraux ou de refiscaliser les heures supplémentaires que la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a exonérées. L’ensemble du système est en péril.

M. Yves Bur, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Avis défavorable.

D’abord, supprimer l’article ne supprimerait pas le plafond de trésorerie de l’Acoss, car celui-ci procède d’un décret que nous ne faisons que ratifier. L’exposé des motifs de votre amendement se concentre sur le plafond de 2010, sur lequel nous aurons largement l’occasion de revenir à l’article 27. Il est question ici du plafond 2009. Or, il n’est pas exceptionnel de revoir ce plafond en cours d’année – ce fut le cas en 1997, en 1998, en 1999 et en 2003. La dégradation de la situation financière correspond exactement au montant publié dans le décret.

Sur le fond, la situation est effectivement critique. La perte de recettes considérable touche directement les comptes de toutes les branches de la sécurité sociale. Nous assumons le choix du Président de la République et du Gouvernement : face à une crise économique, financière et sociale aussi profonde, il faut éviter toute mesure susceptible de remettre en cause la fragile amélioration constatée actuellement. Cela ne nous empêche pas d’avoir un débat sur le fond : l’année 2010 devra être consacrée à une réflexion collective sur les mesures structurelles à prendre pour résorber la dette et le déficit récurrent. Mais, les perspectives ne sont, en effet, guère réjouissantes.

M. Maxime Gremetz. Le débat de fond n’aura pas lieu, car nombre de nos amendements ne seront pas mis en discussion à cause de l’article 40. Il faudrait nous accorder quelques minutes pour les présenter.

La Commission rejette cet amendement.

La Commission adopte l’article 3 sans modification.

Article 4 : Rectification des prévisions de recettes et des tableaux d’équilibre pour 2009

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5 : Objectif d’amortissement rectifié de la Caisse d’amortissement de la dette sociale et prévisions de recettes rectifiées du Fonds de réserve pour les retraites

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Après l’article 5

La Commission est saisie de l’amendement AS 14 de M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Mon amendement est crucial, car il est relatif au financement du déficit : il tend à porter de 0,5 à 0,7 % le taux de la CRDS. Le rapporteur de la Cour des comptes, vous l’avez entendu, approuve cette proposition.

Le déficit cumulé 2009-2010 atteint au moins 55 milliards. En tout cas, il est déraisonnable que l’ACOSS puisse emprunter 60 milliards. Qu’en sera-t-il l’année prochaine, pour 2011, c’est-à-dire un an avant les échéances de 2012 ? Faudra-t-il alors autoriser l’ACOSS à emprunter 90 ou 100 milliards ?

Je ne ferai pas le bilan des impôts et taxes qui ont été créés ou alourdis depuis deux ans – certains en dénombrent dix-sept –, notamment pour financer le revenu de solidarité active. Outre qu’elle est mesurée, l’augmentation proposée du taux de la CRDS de 0,2 point serait une mesure politiquement plus acceptable que l’augmentation du forfait journalier ou que la fiscalisation des indemnités journalières des accidentés du travail.

M. Yves Bur, rapporteur. Avis défavorable.

Face à la crise actuelle et aux perspectives désastreuses des finances publiques et sociales, deux attitudes sont possibles : traiter dès maintenant les déficits budgétaires, qui se sont creusés dans tous les pays du monde, ou les maintenir à leur niveau. Le directeur général du Fonds monétaire international a clairement indiqué qu’il convenait de ne pas baisser la garde, les économies ayant encore besoin de plans de soutien.

Dans le passé, nous avons souvent partagé le souci de vérité de Jean-Luc Préel. Traiter le problème en 2009 ne le règlerait pas en 2010. Il importe de réfléchir à une solution globale, volontariste, dans une perspective assez longue. Cela impose que nous déterminions le taux de la CRDS et la nature des ressources à mobiliser pour abonder les recettes, puisque prélever pratiquement 4 % de CSG paraît impossible.

M. le président Pierre Méhaignerie. J’ai de la sympathie pour cet amendement, mais je ne le voterai pas. Il faut savoir que presque tous les autres pays ont continué d’aggraver leurs déficits. Cela étant, il est impossible d’attendre 2012 pour aborder le problème. Je souhaite que ce soit fait – et le rapporteur général du budget, Gilles Carrez, est d’accord sur ce point – quand nous serons en phase de sortie de crise, dans le courant du premier semestre 2010. Cela permettra au demeurant de faire de la pédagogie et des comparaisons entre pays européens.

M. Claude Leteurtre. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, j’apprécie la clarté de vos arguments, mais une autre vision des choses est possible. Il est préférable de pratiquer une bonne intervention chirurgicale, plutôt que des piqûres répétées. Je trouve dommage de ne pas profiter, pour soulager un peu l’ACOSS, du taux d’intérêt bas dont a bénéficié la CADES. Alors que nous risquons d’attendre très longtemps la sortie de crise, cette mesure revêtirait une valeur pédagogique et symbolique.

M. Roland Muzeau. Il est légitime de se préoccuper du niveau de la dette et des difficultés rencontrées pour la rembourser, mais le remède préconisé par Jean-Luc Préel serait pire que le mal : cette mesure serait inacceptable, puisqu’elle frapperait ceux dont le pouvoir d’achat est déjà le plus fragilisé.

D’autres solutions existent, mais la majorité présidentielle ne veut jamais les utiliser – ou à dose homéopathique, avec des effets insignifiants, comme l’an dernier. On pourrait alimenter le remboursement de la dette sociale en apportant des retouches importantes aux avantages fiscaux ou à la fiscalité des stock-options, des bonus et des parachutes dorés, c’est-à-dire en taxant ceux qui ont déjà tout et n’ont besoin de rien.

La mesure proposée dans cet amendement ne serait pas indolore, puisque la cotisation serait accrue de 40 %. Par conséquent, nous voterons contre en promouvant d’autres solutions.

M. Maxime Gremetz. Nous avons voté contre la mécanique de la CADES. Pour notre part, nous ne faisons pas d’affaires, mais nous ne faisons pas de dettes, nous sommes pauvres mais nous vivons dignement. Nous voulons rembourser la dette, mais de quoi découle-t-elle ? Je vous invite à consulter le rapport de la Cour des comptes, ainsi que son étude globale sur la sécurité sociale : M. Séguin a clairement indiqué que les exonérations de cotisations patronales n’ont aucun effet sur l’emploi et coûtent extrêmement cher.

Quant à la CRDS, nous avons voté contre, tout comme nous avons voté contre la CSG, je le rappelle, car ces prélèvements ne sont pas progressifs. Nous avons toujours formulé des propositions pour un autre choix, mais nous nous sommes heurtés à un mur.

Enfin, nous n’avons jamais voté une loi de financement de la sécurité sociale, même lorsque la gauche était au pouvoir, car nous sommes en désaccord sur les moyens à employer pour rétablir la situation financière de la sécurité sociale, résorber les déficits et mieux répondre aux besoins.

M. Michel Issindou. Nous étions à deux doigts de suivre Jean-Luc Préel mais, avant de toucher à la CRDS, il convient effectivement de s’intéresser à quelques gisements de recettes supplémentaires, comme la fiscalisation des heures supplémentaires ou la suppression d’allégements de cotisations. La question de la CRDS se posera dans deux ou trois ans, peut-être de manière plus sauvage ; pour l’instant, prenons le temps d’explorer les autres pistes de recettes.

M. Jean-Luc Préel. Les déficits sont élevés, tout le monde en convient. Confier 60 milliards à l’ACOSS, c’est beaucoup trop, tout le monde le pense, même Yves Bur. La CADES a été créée pour recueillir les déficits et la CRDS est une taxe à base large destinée précisément à financer les déficits. Un prélèvement de 0,2 point supplémentaire correspond à environ 2,6 milliards, ce qui réglerait le problème de la dette actuelle. S’il est exclu de toucher au pouvoir d’achat, comme le dit le président Méhaignerie, il convient alors de s’opposer à toutes les augmentations de prélèvement contenues dans ce texte, et elles sont nombreuses : retraites chapeau, volet social, forfait journalier, etc.

La Commission rejette l’amendement AS 14.

Section 2

Dispositions relatives aux dépenses

Article 6 : Dotations du Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins et à l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Article 7 : Prévisions rectifiées des objectifs de dépenses par branche

La Commission adopte l’article 7 sans modification.

Article 8 : Rectification du montant et de la ventilation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM)

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Elle adopte ensuite la deuxième partie du projet de loi.

La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq

——fpfp——

Amendements examinÉs par la Commission

Amendement n° AS 14 présenté par MM. Jean-Luc Préel et Claude Leteurtre

Après l’article 5

Insérer l’article suivant :

L'article L.1600-0-L du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Le taux des contributions instituées par les articles 1600-0-G à 1600-0-K est fixé à 0,7 % . »

Amendement n° AS 80 présenté par Mme Marisol Touraine, M. Michel Issindou, Mme Catherine Lemorton, M. Jean Mallot, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Patrick Gille, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Jean-Marie Le Guen, Mmes Martine Pinville, Marie-Françoise Clergeau, M. Patrick Roy, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Michel Liebgott, Mme Michèle Delaunay, M. Christian Paul, Mme Monique Iborra, M. Simon Renucci, Mme Dominique Orliac, M. Patrick Lebreton et les commissaires socialistes, radicaux, citoyen et divers gauche

Article 3

Supprimer cet article

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires sociales

Réunion du mardi 20 octobre 2009 à 18 heures

Présents. - M. Élie Aboud, Mme Edwige Antier, Mme Valérie Boyer, M. Yves Bur, M. Pierre Cardo, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. Rémi Delatte, Mme Michèle Delaunay, M. Vincent Descoeur, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, Mme Cécile Dumoulin, Mme Cécile Gallez, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Patrick Gille, M. Maxime Gremetz, M. Michel Heinrich, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, M. Paul Jeanneteau, M. Guy Lefrand, Mme Catherine Lemorton, M. Jean-Claude Leroy, M. Claude Leteurtre, M. Céleste Lett, M. Guy Malherbe, M. Jean Mallot, M. Pierre Méhaignerie, M. Pierre Morange, M. Philippe Morenvillier, M. Roland Muzeau, Mme Dominique Orliac, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, M. Étienne Pinte, Mme Martine Pinville, M. Jean-Frédéric Poisson, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-Luc Préel, M. Simon Renucci, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Marie Rolland, Mme Valérie Rosso-Debord, M. Patrick Roy, M. Dominique Tian, Mme Isabelle Vasseur.

Excusés. - Mme Gisèle Biémouret, Mme Anne Grommerch.

Assistaient également à la réunion. - M. Gérard Bapt, M. Philippe Boënnec.