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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 10 octobre 2007

Séance unique
Séance de 15 heures
7ème séance de la session
2ème partie
Présidence de M. Marc Laffineur, Vice-Président

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La séance est reprise à seize heures vingt.

LUTTE CONTRE LA CORRUPTION

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la lutte contre la corruption.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice  Dans une économie mondialisée, la lutte contre la corruption exige une action concertée, dans laquelle s’impliquent non seulement les États mais aussi les acteurs de la société civile. M. Hunault retrace parfaitement dans son rapport tant les progrès de la mobilisation internationale que ceux de la législation française, et je l'en remercie.

Outre ses aspects moraux, la corruption a un coût financier, politique et humain.

Elle a tout d’abord un coût financier important, puisqu’elle représenterait près de 3 % des échanges mondiaux : mille milliards de dollars seraient détournés chaque année. Sévère entrave à la croissance dans certains pays, elle nuit au bon fonctionnement de l'économie de marché, fausse la concurrence, favorise le clientélisme, décourage les investisseurs.

Elle a aussi un coût politique. Bafouant les principes de l'État de droit en faussant l'application des règles, elle est un déni de justice car dans un système corrompu, il n’y a plus d’égalité devant la loi. Il s’ensuit une défiance des citoyens à l’égard de leur classe politique et de leur administration. Au niveau international, le développement de la corruption déséquilibre l'ordre mondial.

Enfin, la corruption a un coût humain. Dans les pays les moins avancés, elle ampute les moyens qui auraient dû être alloués à la santé, à l'éducation et aux infrastructures. Elle conduit la population, privée d'équipements élémentaires, à vivre dans la précarité. Le coût de la vie dans les pays corrompus est élevé. Par ailleurs, la corruption favorise la criminalité organisée.

Les gouvernements des pays où la corruption sévit le plus fortement sont bien sûr les premiers à devoir agir. Mais les pays développés ont aussi un rôle essentiel à jouer en réprimant les activités de corruption dans leur secteur privé et dans les échanges internationaux.

Comme vous le rappelez dans votre rapport, Monsieur Hunault, la corruption a trop longtemps été considérée comme un mal nécessaire. Penser que l'on peut en tirer un intérêt quelconque est une illusion. Dans la lutte contre la corruption, il n'y a de place ni pour le cynisme ni pour le fatalisme ; la corruption reculera si nous y mettons les moyens – politiques, législatifs et financiers.

C'est l'intérêt de tous. Nos entreprises n'ont rien à redouter d'une compétition loyale. L’engagement international contre la corruption produit d’ailleurs déjà ses effets, et les entreprises qui se livrent encore à la corruption entachent irrémédiablement leur notoriété, au risque de compromettre leur avenir.

Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter transpose la convention pénale de l'Europe et son protocole additionnel, qui date de 1999, et la convention des Nations Unies contre la corruption, dite Convention de Mérida, qui date de janvier 2003. La France est sur le point de ratifier la première de ces conventions car vous l'y avez autorisée ; elle a été le premier pays du G8 à ratifier la seconde.

La transposition nous conduit à introduire de nouvelles dispositions dans notre droit pénal. Naturellement, nous l'avons fait avec un souci légitime de réciprocité : les États doivent se donner des règles de transparence communes, et non soumettre leurs citoyens à des exigences que leurs partenaires n'imposeraient pas à leurs propres ressortissants.

Les dispositions que le Gouvernement vous propose d'adopter poursuivent trois objectifs majeurs.

En premier lieu, ce projet élargit le délit de corruption des agents publics étrangers.

Il punit la corruption active ou passive des agents publics et des élus d'autres pays, ainsi que des agents des organisations internationales.

Aujourd'hui, la loi française réprime déjà la corruption d'agents publics étrangers, mais seulement dans le champ des transactions commerciales internationales - par exemple, corruption d’un fonctionnaire ou d’un élu étranger pour obtenir un marché public. Nous vous proposons de faire en sorte que tous les actes de corruption soient punissables, quelle que soit leur finalité – par exemple, obtenir une autorisation pour construire sur un site protégé, ou obtenir indûment la nationalité d'un pays afin d'échapper à une extradition.

Désormais le corrupteur et le corrompu seront l'un et l'autre passibles de poursuites en France, alors que jusqu'à présent, seul le corrupteur français ou celui qui agissait en France pouvait être poursuivi. Nous aurions pu faire le choix de ne pas poursuivre l'agent public étranger ou international, en laissant à son pays le soin de s'en charger ; mais nous avons souhaité suivre la position de nos principaux partenaires, qui ont choisi de poursuivre les deux parties – ce qui signifie qu'un agent public français qui aurait été corrompu par un Danois peut être jugé au Danemark.

La réciprocité garantit par ailleurs un jugement plus équitable, puisque le corrupteur et le corrompu répondront de leurs actes devant la même juridiction.

En deuxième lieu, ce projet vise les trafics d'influence impliquant des agents publics internationaux. En vue d’obtenir une décision favorable, une première personne en paie une deuxième afin qu'elle exerce son influence, réelle ou non, sur un décideur public, qui n’a pas toujours conscience d’être manipulé. Le droit français punit le trafic d'influence afin de préserver la légalité, la liberté, et l'impartialité des décisions prises par les agents publics et les élus français, mais une telle infraction ne figure pas dans la législation de tous nos partenaires. Je pense notamment au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, à la Suède, à la Finlande, au Danemark, à la Suisse ou encore à Monaco.

Si la France a choisi de réprimer le trafic d'influence visant les agents publics internationaux, elle n'incriminera pas cette infraction lorsqu'elle vise les agents d'États étrangers, puisqu’elle n'est pas punie partout.

C’est en revanche une nécessité pour les agents des organisations internationales, auxquelles les États membres confient des responsabilités très importantes. Il est normal que ces États puissent exercer un contrôle sur ces agents. Les organisations internationales jouant un rôle déterminant dans l'ordre public international, elles doivent être au-dessus de tout soupçon. Les agents publics internationaux seront donc traités comme des agents publics français en matière de trafic d'influence.

Comme pour la corruption des agents étrangers, seul le ministère public pourra enclencher les poursuites, cette faculté n'étant pas ouverte aux parties civiles. Les infractions en matière de probité lèsent en effet l'intérêt général, et il revient à l'État d'y veiller.

M. Jacques Myard – Très bien !

Mme la Garde des Sceaux  Ce n'est pas une affaire d'intérêts privés. Par cette disposition, nous éviterons également toute manœuvre de déstabilisation de la part d’entreprises concurrentes : notre détermination ne doit pas desservir la compétitivité des entreprises françaises dans des conditions de marché normales et légales.

Ce texte vise enfin à protéger la justice de toute influence et à renforcer les moyens de lutte contre la corruption. Le projet de loi prévoit ainsi de punir les entraves au bon fonctionnement de la justice dans un État étranger ou dans une enceinte de justice internationale. La loi pénale incriminera non seulement la corruption visant les acteurs du monde judiciaire, mais aussi tous les actes d'intimidation ou de subornation dont ils pourraient être victimes.

La notion d'acteur du monde judiciaire est par ailleurs définie avec précision : les greffiers, les experts, les conciliateurs, les médiateurs et les arbitres de commerce entrent désormais explicitement dans cette catégorie.

Nous savons tous que la corruption emprunte souvent des voies occultes. C’est pourquoi nous devons donner aux enquêteurs les moyens de lutter à armes égales contre ce fléau. Conformément aux dispositions de la convention de Mérida, le recours à des techniques spéciales d'enquête sera ainsi autorisé en matière de lutte contre la corruption et le trafic d'influence - sonorisation, surveillance, mais aussi infiltrations en cas de nécessité. Je sais que la commission des lois, notamment son président, Jean-Luc Warsmann, est particulièrement sensible à l’impératif d’efficacité dans la lutte contre la corruption. Ses propositions d'amendement en témoignent.

Au moment où elle s’apprête à présider l'Union européenne, la France doit être exemplaire. N’oublions pas que le « groupe d'États contre la corruption » évaluera en 2008 la conformité de la législation française à la convention de l'OCDE. Ce texte doit permettre à la France de tenir son rang, en figurant honorablement dans le classement qui sera publié.

Comme vous le savez, le groupe de travail présidé par le Premier président Coulon est chargé de réfléchir à la dépénalisation de la vie des affaires. Loin d'être en contradiction avec cette démarche, ce texte la complète.

M. Arnaud Montebourg – C’est à voir !

Mme la Garde des Sceaux  Le Gouvernement a fixé des limites à l'indispensable mouvement de dépénalisation : la dépénalisation de la vie des affaires aura lieu dans le strict respect des engagements de la France, qui comprennent notamment la lutte contre la corruption internationale.

Dans ce domaine, la tolérance n'est plus de mise. Une France qui fermerait les yeux sur les actions de ses ressortissants à l'étranger ne serait pas digne de son histoire, ni des valeurs qu'elle porte sur la scène internationale. Notre pays a l'ambition de contribuer à faire régner partout dans le monde l'équilibre démocratique, la probité des affaires et l'égalité devant la loi. Cette France que vous représentez se reconnaîtra dans les dispositions protectrices et rigoureuses de ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

M. Michel Hunault, rapporteur de la commission des loisJe me réjouis que l’un des premiers textes inscrits à l’ordre du jour de cette législature concerne la lutte contre la corruption. S’exprimant devant l'Assemblée générale des Nations Unies, le Président de la République a appelé au renforcement de la lutte internationale contre la corruption qui mine les pays pauvres. Contribution de la France à cet effort international, ce projet de loi illustre notre volonté de placer l’éthique au centre de la vie économique, financière et politique à un moment où l’actualité judiciaire est particulièrement chargée.

Par son ampleur, mais aussi ses effets néfastes, la corruption est un phénomène inquiétant. Elle est évaluée par le FMI à près de 2 % du PIB mondial. L'OCDE estime d'autre part que les pots-de-vin versés à l’occasion des transactions internationales représentent entre 5 % et 25 % du montant des contrats, voire plus.

La corruption sévit dans de nombreuses régions du globe, particulièrement dans les pays en développement, où elle constitue un frein au développement économique, mais les pays développés n’en sont pas indemnes : dans la récente affaire « British Aerospace », le Premier ministre britannique a en effet demandé à la justice de suspendre ses investigations au nom de l'intérêt supérieur du pays.

M. Jacques Myard – Perfide Albion !

M. le Rapporteur - Une telle violation de la convention de l'OCDE doit rappeler combien la tentation de « couvrir » des faits de corruption peut être grande dans les démocraties modernes.

M. Arnaud Montebourg – C’est inacceptable !

M. le Rapporteur - La corruption fausse la concurrence et freine le progrès économique. Grâce à la conclusion de plusieurs conventions, en faveur desquelles la France a joué un rôle moteur, la lutte contre la corruption internationale a franchi un pas décisif au cours de la dernière décennie. Notre pays est ainsi à l'initiative de la Convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, signée à Paris le 17 décembre 1997.

Nous avons également joué un rôle notable, au cours de l’année 1999, dans l'adoption des conventions civile et pénale du Conseil de l'Europe contre la corruption. La France s'est ainsi opposée à l'extension des possibilités de réserve à la convention pénale, afin que celle-ci ne soit pas vidée de sa substance, et a œuvré en faveur d’une véritable équivalence entre les incriminations prévues par chaque État. J’ajoute que nous avons participé activement à la négociation de la convention civile en présidant, à partir de février 1998, le groupe de travail qui portait sur le droit civil.

La France, qui assurait la présidence du G8, a également veillé au bon déroulement des négociations de la convention dite « Mérida ». Nous sommes à l’origine d’une des principales avancées de ce texte, le principe de restitution des produits du détournement et du blanchiment des fonds publics.

Quant à la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union, signée à Bruxelles le 26 mai 1997, elle impose une incrimination identique de la corruption des fonctionnaires communautaires ou d’un État membre de l'Union d’une part, et de la corruption des fonctionnaires nationaux d’autre part. C'est sans conteste le dispositif conventionnel qui pousse le plus loin l'assimilation entre la corruption commise dans le cadre national et la corruption internationale.

La plupart de ces conventions ne sont toutefois que des instruments imparfaits à cause de leur absence d'universalité. Comme l’a rappelé la Garde des sceaux, la défense de nos industries nationales impose que les mêmes règles s’appliquent à leurs concurrents.

M. Jacques Myard – Ce n’est pas demain la veille !

M. le Rapporteur – La convention de l'OCDE n'a été ratifiée que par trente-six États, celle de l'Union européenne ne concerne que les États-membres et les conventions du Conseil de l'Europe sont également de portée régionale. À l’inverse, la convention adoptée dans le cadre des Nations unies est le premier instrument mondial véritablement contraignant. Il s’agit en outre d’un instrument global, tous les aspects de la lutte contre la corruption sont visés – la prévention, les diverses incriminations, les règles de droit pénal et de procédure pénale, la coopération internationale, le recouvrement d'avoirs, l'assistance technique et les échanges d'informations...

Afin de permettre la ratification par la France de la convention de l'OCDE et de la convention de l'Union européenne, la loi du 30 juin 2000 a complété le code pénal par de nouvelles incriminations de corruption, qui concernent les agents publics d'États étrangers ou bien d'organisations internationales. Sans avoir donné lieu – pour le moment – à des condamnations définitives, ces nouvelles incriminations sont à l'origine d'une vingtaine de procédures en cours devant les juridictions françaises.

Dans le prolongement de la loi adoptée le 30 juin 2000, ce texte a pour objet principal d'élargir le champ des incriminations de corruption d'agents publics étrangers ou internationaux, afin de permettre la ratification par la France de la convention pénale du Conseil de l'Europe et de son protocole additionnel, ainsi que de la convention des Nations Unies.

Les principales modifications de l’état actuel du droit, rendues nécessaires par ces deux conventions, concernent l'élargissement des incriminations en matière de corruption des agents publics ; l'incrimination du trafic d'influence visant à influencer les agents des organisations internationales publiques et les magistrats des cours internationales ; et enfin l'incrimination des entraves au fonctionnement de la justice dans un État étranger ou devant une cour internationale.

On ne peut que se féliciter que les textes relatifs à la corruption internationale soient ainsi complétés, mais encore faudrait-il, Madame la Garde des sceaux, que cela ne soit pas un handicap pour nos entreprises nationales, qui se trouvent en concurrence avec des grands groupes étrangers dont les comportements sont contraires aux dispositions des conventions et pourtant tolérés par leurs gouvernements. J’ai cité tout à l’heure la Grande-Bretagne, mais les États-Unis protègent également leurs entreprises sous prétexte de leurs « intérêts nationaux stratégiques ».

M. Jacques Myard – Il faut en finir avec la naïveté !

M. le Rapporteur - La lutte contre la corruption n'a de sens que si elle est appliquée par tous les pays. Mais il faut aussi s’interroger sur les moyens accordés à la justice : seront-ils à la hauteur des objectifs ? La justice a en effet la rude tâche de remonter à la source de la corruption et d'identifier les mouvements de capitaux suspects. Nous devons soutenir son action dont une large part dépend du bon vouloir des pays par lesquels les flux financiers transitent. D'autre part, dès lors qu'une affaire de corruption implique des agents publics d'un État étranger, la question de la souveraineté de cet État et des relations diplomatiques complique le travail des magistrats.

M. Jacques Myard – C’est une évidence, mon cher Watson

M. le Rapporteur – C’est ce qui rend indispensable la création d'un véritable espace judiciaire européen : trop de commissions rogatoires restent sans suite...

M. Arnaud Montebourg – Très bien !

M. le Rapporteur - Ce projet de loi donne de nouveaux instruments à la justice pour réunir les éléments de preuve : le parquet pourra désormais disposer de moyens semblables à ceux mobilisés en matière de lutte contre la criminalité organisée – infiltration, surveillance, et sonorisations. Afin de tenir compte des difficultés inhérentes aux faits de corruption impliquant des agents publics d'États étrangers, le projet de loi prévoit un monopole du ministère public pour les poursuites dans ce cas.

Avec ce texte, la France poursuit donc son action en faveur d'une lutte internationale contre les différentes formes de corruption. Est-ce à dire que l'application des dispositions conventionnelles relatives à la lutte contre la corruption suffira à éradiquer ce phénomène ? Si les dispositions des conventions internationales sont progressivement transposées dans le droit interne d’un plus grand nombre d'États, puis appliquées avec efficacité, un pas significatif sera certes franchi. Mais la lutte contre la corruption passe également par des dispositifs de prévention sans cesse améliorés et renouvelés.

L’examen de ce texte devrait être l’occasion de réfléchir à d’autres formes de lutte contre la corruption : imposer une plus grande transparence en matière de marchés publics, ou encore encadrer la délégation de service public.

M. Arnaud Montebourg – Très bien !

M. le Rapporteur – S’agissant du blanchiment d’argent, j’espère que l’Assemblée, qui adopta la loi de 1996 à l’unanimité, aura bientôt l’occasion de transposer la troisième directive dans notre droit. Il faut aussi renforcer le service central de prévention de la corruption. Les progrès accomplis en matière de blanchiment devraient inspirer notre combat contre la corruption.

Quoi qu’il en soit, ce texte illustre la volonté politique du Gouvernement de lutter contre la corruption et le blanchiment. J’invite le Parlement à l’adopter à l’unanimité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

QUESTION PRÉALABLE

M. le Président – J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une question préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. Arnaud Montebourg – Au nom de mon groupe, je me réjouis des avancées contenues dans ce texte, inspiré d’un mouvement international de lutte contre la corruption. La définition des délits et la coordination entre les pays progressent. La France y participe depuis plusieurs années, notamment grâce aux initiatives de deux Gardes des sceaux auxquelles je tiens à rendre hommage : Mmes Guigou et Lebranchu. Pour avoir souvent travaillé sur la lutte contre la corruption et le blanchiment, y compris avec notre rapporteur – dont je salue le travail et les propositions convaincantes –, je sais que nous avons très souvent abouti à un consensus. Faute de le faire dans d’autres domaines, j’encourage donc Mme la Garde des sceaux à poursuivre son effort en la matière.

Pourtant, si je pose cette question préalable, c’est parce que les infractions dont nous parlons sont au fond très rarement sanctionnées en tant que telles, elles sont quasi théoriques. L’amélioration de notre code pénal n’a que peu d’effet sur la vie de nos tribunaux. Partout en Europe, d’ailleurs, l’affichage de lois convaincantes coexiste avec l’inquiétante faiblesse de la répression, souvent par le biais d’infractions périphériques. Le GAFI ne s’y est pas trompé qui, au fil des rapports, encense une législation remarquable et déplore une répression indigente. Or, la répression est un préalable nécessaire pour que la France prenne sa part de l’effort international de lutte contre la corruption.

Le Président de la République a parlé de dépénalisation de la vie des affaires. Y aurait-il des infractions superflues dans notre code pénal ? Ce n’est pas impossible, et il faudra donc procéder à un tri – tâche ô combien politique ! Daniel Lebègue, président de la section française de Transparency International, nous en avertit lorsqu’il s’inquiète de la dépénalisation d’infractions telles que l’abus de biens sociaux ou le recel. Chacun sait, en effet, que ce sont là les détours le plus souvent empruntés pour réprimer le pacte de corruption. J’aimerais obtenir des engagements précis quant à votre intention de ne remettre en cause le droit applicable ni à l’abus de bien sociaux, ni à la prescription de ce délit, ni à la jurisprudence relative au recel d’abus de biens sociaux. N’est-il pas croustillant que le Président de la République ait choisi le tribunal de commerce de Paris, ce nid à infractions économiques, pour parler de dépénalisation de la vie des affaires ? Cette juridiction, sur l’ensemble du territoire, est loin d’être un temple du droit (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)… À Nancy, son président mis en cause pour d’importantes infractions a démissionné la semaine dernière. Dans mon département – que vous connaissez bien, Madame la ministre – un mandataire liquidateur compte encore les jours de détention qui lui restent à passer à la prison de Varennes-le-Grand pour avoir détourné des dizaines de millions d’euros ! Le tribunal de commerce n’était donc pas le lieu le plus indiqué pour annoncer, sous les applaudissements du Medef, de la CGPME et des Rotary Clubs de France, la dépénalisation de la vie des affaires. S’ajoute à cette maladresse le mouvement de caporalisation du parquet que vous avez engagé depuis votre arrivée place Vendôme.

M. Jacques Myard – Tout ce qui est excessif est insignifiant !

M. Guy Geoffroy – C’est inacceptable !

M. Arnaud Montebourg – Soit. Je retire le mot. Mais l’accepterez-vous lorsqu’il est prononcé par les syndicats de magistrats ?

M. Guy Geoffroy – Est-ce une bonne référence ?

M. Arnaud Montebourg – Ils déplorent en effet que les procureurs soient traités comme des « préfets judiciaires » et que l’on tente de neutraliser la magistrature.

M. Jacques Myard – Mais non !

M. Arnaud Montebourg – Le Conseil supérieur de la magistrature vous a même adressé une remontrance – une première – pour envisager le limogeage du procureur général d’Agen, alors que vous avez déjà convoqué celui de Nancy pour des propos qu’il n’a d’ailleurs pas tenus tels quels en audience.

MM. Jacques Myard et François Rochebloine – Hors sujet !

M. Arnaud Montebourg – Non : de tels précédents déstabilisent les magistrats au point qu’ils doivent saisir le Conseil supérieur de la magistrature, puisqu’on ne peut plus compter sur la Garde des sceaux – et encore moins sur le Président de la République – pour le faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Guy Geoffroy – Vous feriez mieux de retirer cela aussi !

M. Arnaud Montebourg – Comment voulez-vous lutter contre la corruption si les procureurs, inertes et bâillonnés, obéissent à vos ordres et représentent des intérêts particuliers, plutôt que l’intérêt général ?

M. Jacques Myard – C’est le Gouvernement qui est élu et responsable !

M. Arnaud Montebourg – Ce ne sont pas les procureurs du Gouvernement, mais ceux de la République tout entière (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) !

M. Jacques Myard – Vous défendez le corporatisme !

M. Arnaud Montebourg – Comment voulez-vous lutter contre la corruption en infantilisant des procureurs et en les traitant comme ils n’ont plus été traités depuis l’époque du général de Gaulle ?

De même, vous dépeuplez les brigades financières des SRPJ, pourtant véritables bras armés des magistrats en matière économique et financière. Les syndicats, encore eux, le disent : agir sur ces effectifs spécialisés est bien le meilleur moyen de ne pas faire aboutir une enquête. Je le répète : comment, dans ces conditions, lutter contre la corruption ?

Enfin, savez-vous qu’il existe des paradis fiscaux, bancaires et judiciaires qui sont de véritables sanctuaires pour l’argent sale ? De nombreuses offensives ont été lancées contre ces territoires non coopératifs. Avec MM. Hunault, d’Aubert et Peillon, nous avons souvent travaillé à faire pression sur eux : Monaco, le Liechtenstein, le Luxembourg, une partie de la City de Londres…

M. Jacques Myard – Et Jersey ! Toujours la perfide Albion !

M. Arnaud Montebourg – Et même Gibraltar. L’offensive diplomatique de la France, qui se prétend pourtant un modèle de lutte contre la corruption, est au point mort. Il serait temps de faire le ménage devant nos propres portes et de mener des actions diplomatiques, y compris dans la principauté de Monaco ou auprès de nos voisins luxembourgeois et suisses. Le rapporteur a évoqué tout à l’heure le comportement de la Grande-Bretagne : la France a-t-elle protesté auprès du gouvernement de Gordon Brown ? Nous manquons donc de volontarisme. Pouvez-vous, Madame la ministre, rassurer la représentation nationale ?

M. Jacques Myard – Oui !

M. Arnaud Montebourg – Les belles et grandes déclarations faites à cette tribune, qui sont à l’inverse des pratiques que vous tolérez et même que vous organisez, ne vont-elles pas rester des proclamations ? Vous faites de si beaux discours que nous avons failli applaudir, mais pendant ce temps, les affaires économiques et financières du pays connaissent des enterrements de première classe ! Vous souhaitez que notre pays soit exemplaire. Nous savons qu’il ne l’est pas. Nous attendons vos réponses (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

M. le Rapporteur – Au nom du groupe socialiste, M. Montebourg a dit son accord avec l’essentiel du projet de loi sur la corruption et s’est attaché à mettre en cause la volonté du Gouvernement. Je salue avec lui Mmes Guigou et Lebranchu, mais je dois rappeler que la loi sur le blanchiment fut adoptée du temps de Jacques Toubon et que tous les gouvernements depuis quinze ans, de quelque bord qu’ils soient, ont fait de la lutte contre la corruption une obligation. Quant à la commission sur la dépénalisation, il a été clairement dit qu’elle ne devait en aucun cas être une entrave à l’application du présent projet de loi.

M. Montebourg a mis en cause à la tribune les tribunaux de commerce. Il avait d’ailleurs été à l’origine d’une commission d’enquête parlementaire. Mais les juges consulaires en France font un travail remarquable, et il ne faudrait pas que quelques affaires jettent le discrédit sur cette institution vieille de plusieurs siècles et à laquelle je veux rendre hommage.

M. Arnaud Montebourg – On attend toujours la réforme !

M. le Rapporteur – Vous vous êtes aussi interrogé sur l’efficacité du GAFI, puisque des centres off-shore et des paradis fiscaux permettent encore à certains États de contourner la réglementation. Mais est-ce la faute de la France ? C’est le président Mitterrand qui, en 1989, a été à l’origine de la création du GAFI. La France n’a cessé de lui donner des moyens, son secrétaire général est français et de nombreux pays font d’importants efforts de ratification et d’application des normes qu’il édicte.

Au nom de la commission, j’appelle donc mes collègues à rejeter cette question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

Mme la Garde des Sceaux  Monsieur Montebourg, il y a environ 120 condamnations en matière de corruption par an, un chiffre stable depuis dix ans. Quinze dossiers de corruption internationale sont en cours d’instruction, dont un va être jugé fin novembre : pour des infractions entrées en vigueur fin 2000, le bilan n’est pas mauvais ! Quant à la dépénalisation… la désinformation, ça suffit ! L’abus de bien social n’entre pas dans le champ de la dépénalisation, je l’ai dit et répété.

M. Arnaud Montebourg – Très bien ! Mais la prescription ?

Mme la Garde des Sceaux  La prescription n’entre pas dans le champ du groupe de travail, comme vous le savez parfaitement. Relisez mes allocutions, et il n’y aura plus de place pour le doute.

La corruption dans la vie des affaires est une autre infraction dont la dépénalisation n’est absolument pas envisagée. Le Gouvernement l’a dit dès le début. Je vous rappelle que le groupe de travail installé par Rober Badinter en 1985 appelait à une dépénalisation maximale et que Lionel Jospin lui-même a supprimé les infractions pénales au profit de sanctions civiles. Quant aux effectifs d’enquêteurs spécialisés, ils sont constants depuis cinq ans : soixante à Paris, dont seize pour la brigade centrale contre la corruption, et cent cinquante en province pour les seuls services spécialisés dans la corruption et le trafic d’influence.

Vous détournez le débat parlementaire, Monsieur Montebourg. Ce n’est pas la première fois, nous sommes habitués. Mais puisque vous parlez de caporalisation des magistrats, je dois tout de même vous rappeler quelques principes fondamentaux de notre État de droit : les magistrats du Parquet sont sous l’autorité du Garde des sceaux.

M. Jacques Myard – Bravo !

Mme la Garde des Sceaux  Ils sont chargés de faire appliquer la loi, donc la politique pénale du Gouvernement. Les magistrats du Parquet ne sont pas inamovibles, comme vous le savez très bien et comme la loi de 2001 et le statut des magistrats le montrent des plus clairement.

M. Jacques Myard – Sinon, il n’y a pas de démocratie !

Mme la Garde des Sceaux  Au risque de vous surprendre, Monsieur Montebourg, j’exerce mes responsabilités dans le respect des institutions (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

M. le Président - Nous en venons aux explications de vote.

M. Émile Blessig – Il est légitime, pour l’opposition, de s’opposer : c’est sa mission. Mais on ne peut certainement pas considérer que M. Montebourg se soit opposé à ce texte. Mme la Garde des sceaux vient de répondre avec précision à tous ses arguments, y compris ceux qui illustrent les excès de sa personnalité. Mais je ne suis pas sûr que cette outrance serve sa cause – et en tout cas pas celle du Parlement, car l’on vient de passer du débat au procès d’intention caractérisé. Je suis convaincu, pour ma part, qu’il y a bien des choses à débattre dans ce texte et j’appelle donc à voter contre cette question préalable, pour faire œuvre plus efficace et plus sereine (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

Mme Marylise Lebranchu – Il s’agit d’un texte extrêmement important et si Arnaud Montebourg est monté au créneau, c’est qu’il ne peut être dissocié de l’ambiance globale qu’a créée votre annonce de dépénalisation du droit des affaires. Vous ne pouvez pas nier l’impact qu’a eu cette annonce, y compris dans certaines organisations patronales. Le contexte général est assez lourd et nous devons tous nous interroger sur ces questions, au-delà même du présent texte que nous soutenons d’ailleurs.

Lorsque je défendais la position de la France à la convention de Palerme, j’avais pris acte du retard de la France dans la lutte contre la corruption. Nous avons mis beaucoup de temps à en faire un sujet important. Je me souviens aussi avoir subi des pressions pour qu’il y ait davantage de policiers dans les quartiers et moins affectés à la « délinquance astucieuse », parce que le blanchiment ou les « affaires » étaient perçus comme moins graves que des agressions dans la rue. Mais je me souviens de ces délégations de petits États, à Palerme, qui nous disaient, à nous pays riches, qu’ils comptaient sur nous pour lutter contre la corruption, parce que leurs économies étaient à genoux et que 80 % de ce qui aurait pu être consacré à leur développement était absorbé par la corruption et le blanchiment. J’avais l’impression, en 2001, de ne pas avoir assez de moyens au service de cette cause favorable au développement économique de tous, mais aussi garante de la démocratie. Vous pouvez dire, comme le font les syndicats de magistrats ou de policiers, que vous n’avez pas assez de moyens pour aller au bout de certaines affaires : il faut que cela se sache. Je suis intimement convaincue qu’il s’agit d’un bon texte, mais aussi que les pays les plus riches et les plus développés doivent être les plus efficaces dans la lutte contre la corruption et que ce n’est pas encore tout à fait le cas (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. François Rochebloine – Ainsi que je l’ai déjà dit dans la discussion du projet de loi autorisant la ratification du protocole additionnel à la Convention du Conseil de l'Europe contre la corruption, fin juillet, la corruption est une drogue dangereuse. Je me réjouis donc de la part que prend la France dans la lutte contre ce fléau et salue un projet de loi qui transpose dans notre droit interne des engagements internationaux de la France, parmi lesquels figure ce protocole additionnel.

Dans notre démocratie, la vertu, pour parler comme Montesquieu, a toujours été considérée comme le ressort de la vie politique et sociale. C'est sans doute pourquoi la législation française a toujours été à l'avant-garde de la lutte contre la corruption, publique ou privée ; c'est aussi pourquoi les actes de corruption des personnes investies d'une fonction publique sont sanctionnés par des peines particulièrement lourdes, allant jusqu'à dix ans d'emprisonnement. Mais cette préoccupation de toujours connaît une actualité nouvelle : il est essentiel que les citoyens de notre pays soient convaincus, et vérifient dans les faits, que les comportements de corruption, quels qu'en soient les auteurs, sont effectivement poursuivis et punis.

À cet égard, je souscris entièrement aux propos du Président de la République et – au niveau de responsabilité qui lui est propre –de la présidente du Medef.

Notre détermination à adapter notre droit aux exigences nouvelles de la répression de la corruption renforce la crédibilité de l'action internationale de la France en la matière, qui a été pionnière : premier des membres du G8 à avoir ratifié la convention dite de Merida, notre pays a introduit en droit interne, par la loi du 30 juin 2000, le délit de corruption d'agent public international et souscrit, sous l’égide non seulement des Nations unies, mais aussi du Conseil de l’Europe, à plusieurs engagements internationaux, déjà évoqués lors des débats que j’ai rappelés. Le texte témoigne donc d’une grande continuité politique.

La corruption, phénomène extrêmement ancien, épouse désormais la complexité croissante des mécanismes économiques et profite de l'ouverture – en elle-même bénéfique - des échanges internationaux de biens et de services pour se répandre largement et s'organiser efficacement. Si ce phénomène national et international appelle une riposte coordonnée des États, par le biais des conventions que je viens d'évoquer, chaque législateur national demeure en partie responsable de sa prévention et de sa répression, ne serait-ce que parce que la compétence pénale, fût-elle exercée en concertation avec d'autres États, demeure un attribut de la souveraineté nationale. Ainsi l'Union européenne articule-t-elle selon un usage éprouvé la définition de principes communs et l'adaptation des législations et des pratiques juridictionnelles, laquelle doit prendre en considération les droits nationaux comme les spécificités nationales des pratiques visées. Dans le cadre plus traditionnel de la coopération internationale, l’existence des lois de transposition répond aux mêmes exigences.

Ce projet de loi tend précisément à mettre les dispositions du code pénal et du code de procédure pénale en conformité avec nos engagements internationaux. C’est pourquoi le groupe Nouveau centre y est favorable, car il partage la volonté du Gouvernement d’adapter une législation certes récente – puisqu’elle date de 2000 – à l'évolution particulièrement rapide de la coopération internationale en matière de droit pénal.

Le texte propose d'étendre le délit de corruption active ou passive aux agents publics étrangers et aux agents publics internationaux au-delà du champ du commerce international, auquel il était jusqu’à présent circonscrit. Des poursuites pourront ainsi être exercées quel que soit le pays ou l'organisation internationale en cause et quelle que soit la contrepartie attendue – extension tout à fait opportune, de même que les dispositions visant à sanctionner le trafic d'influence exercé sur les agents des organisations internationales ou sur un magistrat d'une cour internationale. Mais l'avancée la plus remarquable est à nos yeux l'introduction d'une incrimination spéciale visant les atteintes à l'action de la justice hors des frontières de la souveraineté française, c'est-à-dire les actes d'intimidation et de subornation de témoin qui entravent le bon fonctionnement de la justice dans un État étranger ou devant une cour internationale.

Nous nous félicitons également que la répression soit étendue aux cas dans lesquels l'avantage indu que procure l'acte de corruption ne bénéficie pas directement à l'agent public destinataire de cet acte mais à un tiers, ainsi que des nouvelles facilités techniques ouvertes aux enquêteurs – surveillance des biens et des personnes, sonorisation, voire infiltration.

Le groupe Nouveau centre espère que l’efficacité de la lutte contre la corruption sortira renforcée de ce projet. Voilà pourquoi nous attendons quelques précisions sur les motivations, la pérennité et la portée de la réserve d'interprétation introduite par la France en matière de trafic d'influence passif visant un agent public d'un État étranger. Sous le bénéfice de cette seule observation, le groupe Nouveau Centre votera le texte (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau centre et du groupe UMP).

M. Émile Blessig – La corruption, si ancienne et connue – voire ouvertement reconnue – soit-elle, est désormais un véritable fléau, lourd de conséquences non seulement sur l’économie, mais aussi sur la vie politique démocratique. Or ses dérives n’ont été pleinement mesurées, au niveau national comme international, que depuis une vingtaine d’années. Inutile de revenir sur les chiffres fournis par l’OCDE, très clairement rappelés dans le rapport, ou sur un coût dont Mme la Garde des sceaux a rappelé qu’il pouvait atteindre 1 000 milliards de dollars par an, soit, dans certains pays, 1 point de croissance. Les conséquences politiques, tout aussi importantes, sont plus pernicieuses encore : la corruption sape en effet la confiance de nos concitoyens envers les institutions – fondement de la démocratie –, en menaçant par là même la stabilité. En outre, à l’instar des discriminations et des inégalités, la corruption peut porter atteinte aux droits de l’homme.

De plus, dans un pays qui tolère la corruption s’installe peu à peu une culture néfaste selon laquelle tout s’achète à condition d’y mettre le prix – ce qui explique, au niveau international, les dérives des rétrocessions de commissions, la constitution de caisses noires et la délinquance – financière ou de droit commun – qu’elle entraîne.

Nous devons lutter contre l’idée selon laquelle la fin justifierait les moyens, en prenant appui sur ce texte extrêmement important et sur nos valeurs démocratiques de transparence, d’évaluation et de responsabilité, dont dépend la confiance qu’inspirent nos institutions. Sans faire preuve d’angélisme, nous espérons que la dimension internationale du projet – qui résulte de fait en grande partie de la transposition d’accords internationaux – permettra d’œuvrer, à l’ère de la globalisation, à une meilleure organisation de l’économie. Car, si ce texte ne saurait résoudre tous les problèmes, il constitue indéniablement une étape supplémentaire, non négligeable, dans une démarche entreprise depuis peu – c’est la loi de finances rectificative du 29 décembre 1997 qui a interdit de déduire du bénéfice imposable des sociétés les pots-de-vin versés à un agent public étranger pour l'attribution d'un marché, à la suite de l'entrée en vigueur de la convention de l'OCDE.

M. le Rapporteur – C’est exact.

M. Émile Blessig – Le travail législatif s’est ensuite accéléré – loi du 13 mai 1996 relative à la lutte contre le blanchiment, loi du 30 juin 2000 sur la corruption, loi du 4 juillet 2005 adaptant nos textes au droit communautaire en matière de corruption.

Quant au présent projet, il tend à renforcer et à étendre les incriminations de corruption active et passive ainsi que de trafic d'influence, les personnes visées pouvant désormais être agents publics d'un État étranger ou d'une organisation Internationale, dépositaires de l'autorité publique dans un État étranger, chargées d'une mission de service public ou investies d'un mandat électif ; en outre, les faits de corruption pourront dorénavant être poursuivis en dehors du champ du commerce international, auquel restait limitée la loi de 2000. Enfin, les peines encourues, simplifiées, sont aussi aggravées.

Les outils de lutte contre la corruption sont également améliorés. Or une intention politique se mesure aussi aux moyens qui lui sont alloués, que le projet ne pourra que renforcer, notamment en matière de procédure pénale, grâce à l’extension de la compétence des juridictions françaises et des mesures d'enquête dans l'élaboration de la preuve telles que la surveillance sur l'ensemble du territoire, les infiltrations, ou la sonorisation. Toutefois, les moyens techniques nécessaires à l'enquête peuvent menacer nos libertés individuelles, notamment le respect de la vie privée. Voilà pourquoi le Conseil Constitutionnel a rappelé que les atteintes aux libertés individuelles devaient être limitées aux mesures indispensables au rapport de la preuve. Les services d’instruction ont pour mission de maintenir cet équilibre instable et délicat ; le Parlement, conformément à sa fonction d’évaluation et de contrôle, devra également y veiller.

Par ailleurs, je ne reviens pas sur la nécessité d’une collaboration européenne et internationale en matière de corruption, soulignée à juste titre par plusieurs orateurs.

Enfin, s’agissant d’un phénomène aussi complexe et aussi grave, on ne peut se contenter de moyens juridiques et d’enquêtes. L’opinion publique a également un rôle à jouer dans la lutte contre la corruption : mal informée, elle restera indifférente au problème et la loi perdra en efficacité ; informée, elle fera valoir des exigences qui contribueront à la prévention du phénomène. Au sein de la société de l’information dans laquelle nous vivons, menons cette lutte indispensable non seulement au moyen d’enquêtes, mais aussi dans le cadre de notre contrat social.

Sensibiliser l'opinion publique est absolument nécessaire, et il convient, plus que jamais, de développer les valeurs de transparence, d'évaluation et de responsabilité. Or, c’est aussi le rôle du Parlement, courroie de transmission entre le gouvernement et la société, de veiller à ce que la transparence et la responsabilité règnent à tous les niveaux.

M. le Rapporteur – Très bien !

M. Émile Blessig – Nous avons la légitimité de l’élection pour cela. En adoptant des textes efficaces aux niveaux national et international, en protégeant les libertés civiles et la liberté de la presse, le Parlement contribue à créer un environnement dans lequel la corruption devient de plus en plus difficile.

Dans la revue Finances publiques, le président d'honneur de l'ONG Transparency International France, M. Dommel, écrit : « La corruption n'est pas un crime passionnel, c'est une faute préméditée, dont l'auteur, avant de s'y livrer, a pesé les profits qu'il espère en tirer et les dangers qu'il court s'il se fait prendre. Autrement dit, pour y faire obstacle, il faut en diminuer les chances de profit et en augmenter les risques. » Le projet de loi allant dans ce sens, le groupe UMP le votera (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Jacques Urvoas – La corruption est un phénomène multiforme et complexe. Elle mine la confiance dans l'action publique, fausse la concurrence entre les entreprises, décourage l'esprit de compétition. Elle agit toujours en corrodant le pacte social. C'est pourquoi toutes les initiatives pour la prévenir et la réprimer sont les bienvenues.

Notre pays a en la matière une tradition ancienne. Au plan international, toutefois, il en a longtemps été différemment, et c’est la mondialisation, avec ses défis, qui a contraint la communauté internationale à se doter d’instruments pour combattre la corruption. Par le biais de notre assemblée, la France en a déjà ratifié plusieurs.

Kofi Annan, alors secrétaire général de l’ONU, déclarait, à la Conférence de Mérida : « En cette fin de XXe siècle, il est peu de problèmes plus globaux que la corruption ». Touchant les pays pauvres de manière disproportionnée, elle détourne les maigres ressources destinées à des besoins essentiels, comme l’alimentation, la santé ou l’éducation, et « constitue un obstacle majeur à la stabilité politique, ainsi qu’à un développement économique et social réussi. »

Mais le mal ne concerne pas que ces pays. L'indice de perception de la corruption établi par l’ONG Transparency International confirme, cette année encore, que la France est toujours perçue dans les milieux d’affaires internationaux comme l’un des pays où l’administration et la classe politique sont particulièrement perméables à la corruption. L’ONG témoigne cependant des progrès de la France en matière de répression de la corruption d’agents publics étrangers par des entreprises françaises. La France fait un peu mieux que les États-Unis – maigre consolation ! – ; cependant, l’affaire Clearstream, poursuit l’ONG, ne contribuera pas à restaurer notre réputation !

Le rapport de suivi de la convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers révèle, quant à lui, nos excellents résultats dans l’application de cette convention. Il est vrai que nous partions de loin ! Longtemps, les pots-de-vin versés à des agents publics étrangers ont été tolérés en France, ils étaient parfois même déductibles fiscalement. La loi du 30 juin 2000 marqua un premier tournant, en autorisant, sous certaines conditions, l'incrimination d'agents publics étrangers.

Depuis lors, la nécessité de l’internationalisation de la lutte contre la corruption n’a cessé de s’affirmer ; non seulement pour des raisons d'efficacité, mais aussi parce que les États craignent d’agir seuls, en raison des distorsions de concurrence susceptibles d’en résulter, au détriment de leurs ressortissants.

Le projet de loi transpose deux conventions des Nations Unies et du Conseil de l'Europe adoptées en 1999 et 2003. Cohérents avec nous-mêmes, nous le voterons, car il facilitera la tâche des juges. C’est une étape nécessaire dans l’harmonisation du droit au niveau international, seule susceptible d'éradiquer un fléau qui fait fi des frontières étatiques. Mais ce n’est qu’une étape, et non un aboutissement. L'harmonisation est encore largement insuffisante, au sein même de l'Europe, les États ne transposant pas les conventions internationales au même rythme.

Madame la Garde des sceaux, vous avez cosigné, dans le Figaro du 15 septembre, une tribune intitulée : « Maintenant, il faut un vrai espace judiciaire européen », dans laquelle il est écrit : « La construction de l'espace judiciaire européen devient une nécessité impérieuse ; il est impossible de répondre isolément à des faits de délinquance. Comment peut-on accepter, dans une Europe où règne la libre circulation des personnes et des capitaux, que des frontières continuent à entraver une réponse pénale efficace de la part des États ? » Cette ambition est aussi la nôtre ! Son succès dépendra de la capacité des États membres à surmonter leurs divisions sur des sujets qui mettent en jeu des cultures juridiques différentes.

La promulgation d'une loi, aussi pertinente soit-elle, n’a d’effets que si elle est accompagnée des moyens pour l’appliquer. Mme Prévost-Desprez, vice-présidente de la quinzième chambre de Nanterre en charge des affaires économiques, a souligné, le 12 juin, le manque de moyens persistant de la justice financière française. Nous espérons que la promesse de campagne du Président de la République concernant le renforcement des moyens d'action du pôle financier parisien et des huit juridictions interrégionales spéciales sera suivie d'effet.

Notre intérêt de pays riche, inscrit dans l’économie de marché, est de lutter contre la corruption, car celle-ci engendre des distorsions de concurrence inacceptables. Mais il s’agit aussi d’une question d’éthique, car ce poison compromet l’accès à la santé et à l’éducation des plus démunis. L’issue de ce combat dépend de notre volonté d’y consacrer les ressources nécessaires (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

M. Dominique Tian – La lutte contre la corruption est une priorité absolue. Le présent projet met en conformité notre droit avec les nouvelles normes internationales, et je m’en réjouis. Il complète la loi du 30 juin 2000, en vue de garantir la probité de tous les agents publics, élus et juges, nationaux et internationaux.

La législation française en matière de lutte contre la corruption est déjà particulièrement dense et efficace. Ainsi, comme l'indique, en page 14, le rapport de la commission des lois, la vie politique est depuis quelques années parfaitement encadrée dans notre pays : « Le contrôle du patrimoine des élus, la mise en place du financement public des partis politiques et l'encadrement du financement privé de ces partis contribuent à prévenir la corruption de la vie politique ».

Il est cependant un domaine où règne encore l'opacité, et c'est le financement de la vie syndicale. Tel est notamment le constat du conseiller d’État M. Hadas-Lebel, dans son rapport de mai 2006, ou de notre collègue Yves Nicolin, auteur d'une proposition de loi en 2003, jamais examinée, pour qui « les syndicats ont tout intérêt à œuvrer pour lune clarification de leur financement ; sinon, c'est la justice qui s'en occupera ».

Rien n’oblige les syndicats français à produire un état de leurs ressources financières ou de leurs mécanismes de financement. Et ce, alors que ces structures sont largement subventionnées par l’État : le projet de loi de finances pour 2008 alloue 30 millions d’euros au dialogue social. Les collectivités contribuent également au financement des syndicats. En outre, les décharges de service de fonctionnaires au profit de ces derniers représenteraient l'équivalent de 5 000 emplois à temps plein, et la pratique existe également pour les entreprises. François Chérèque estime, dans le Figaro du 8 octobre, qu’« au sens de la loi, on peut considérer que ce sont des emplois fictifs et qu'il faut revoir ces pratiques ». À l’occasion d’une affaire récente, en cours de développement, le monde syndical lui-même réclame davantage de transparence. C’est pourquoi j'ai tenu à déposer un amendement, qui étend le champ de ce projet aux représentants syndicaux.

Il ne s’agit en aucun cas de les incriminer, mais il serait regrettable que ce texte ne traite pas de la démocratie sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Patrick Gille – Alors que les affaires comme Clearstream ou EADS semblent se multiplier et que vient de s’ouvrir le procès de la SOFREMI, je salue, Madame la ministre, la présentation d'un projet de loi sur la corruption internationale, même si je me demande s’il ne s’agit pas d’un écran de fumée, d’un effet d'annonce pour tenter de faire oublier votre projet de dépénaliser le droit des affaires.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois Oh !

M. Jacques Myard – Hors sujet !

M. Jean-Patrick Gille – L’adoption de ce texte amènera sans doute un progrès juridique, mais qu'en sera-t-il en pratique ? Rarement dévoilée, la corruption ne cesse de s'étendre, tant dans la sphère politique que dans les milieux d’affaires. Selon le rapport annuel de Transparency international, elle progresse plus particulièrement dans les zones de grande pauvreté, où les corrupteurs sont souvent les pays riches. Ainsi, de nombreux rapports de la banque mondiale et des organisations onusiennes démontrent, s'il en était besoin, que la corruption fait des ravages en Afrique.

Il y a donc lieu de se féliciter que le Parlement soit saisi d’un texte qui permet d'afficher les ambitions de la France en matière de lutte contre ce fléau. Toutefois, votre projet ne va pas encore assez loin, puisqu’il se borne à satisfaire – incomplètement - les dispositions de la convention Mérida d'octobre 2003, sans reprendre le chapitre V de la convention pénale du Conseil de l'Europe de 1999 et de son protocole additionnel de 2003 relatif à la restitution des biens mal acquis et des avoirs détournés.

Ces transpositions maintiennent par conséquent un régime complexe d'incrimination de la corruption, selon que celle-ci concerne des agents nationaux, des agents européens ou des agents étrangers non communautaires. Un effort d'unification, par alignement sur la norme la plus exigeante, eût été plus satisfaisant.

Au vu des dérives croissantes que nous constatons, la France se doit d'être exemplaire et je regrette par conséquent que le texte n'insiste pas assez sur la responsabilité des hommes politiques. Ainsi, il est incompréhensible que l'absence de condamnation pour corruption ne constitue toujours pas une clause d'éligibilité et il nous semble urgent d’y remédier.

M. Arnaud Montebourg – Très bien !

M. Jean-Patrick Gille – Le projet reste également trop évasif pour ce qui concerne les entreprises, lesquelles sont le plus souvent les commanditaires et bénéficiaires de la corruption. Dans la loi du 30 juin 2000, il a été décidé que la poursuite d'un agent étranger non communautaire ne pouvait être exercée qu'à l'initiative du ministère public. Cette dérogation au droit commun a pour conséquence d'interdire à une entreprise écartée d'un marché étranger de déposer plainte avec constitution de partie civile pour corruption d'agent public étranger. Las, le présent texte maintient – en le reformulant – ce régime spécifique pour les délits de corruption et de trafic d'influence impliquant un agent étranger ou du personnel judiciaire non communautaire. Cette disposition revient à entraver les poursuites et à légitimer une forme de dumping éthique.

Je suis donc au regret de constater que le Gouvernement fait une nouvelle fois preuve de frilosité, en n'osant pas affronter directement la réalité de la corruption sous toutes ses formes. Madame la ministre, sachez que nous sommes prêts à améliorer le texte en soutenant certains amendements du rapporteur, pour éviter que le projet ne se réduise à un affichage non suivi d'effets.

Permettez-moi, par conséquent, de présenter quelques propositions simples. En les reprenant, vous manifesteriez votre volonté de vous attaquer aux racines du mal, en ne limitant pas les poursuites aux intermédiaires mais aussi aux commanditaires, qui sont le plus souvent des entreprises ou des responsables politiques.

Nous suggérons d’abord de faire de l'absence de condamnation une condition d'éligibilité, ce qui reviendrait à faire en sorte que tout agent public – soit, selon la convention pénale du 27 janvier 1999, tout fonctionnaire, officier public, maire, ministre ou juge – ne puisse exercer sa fonction qu'en l'absence de condamnation pour corruption, trafic d'influence ou blanchiment. Nous proposons aussi de reconnaître aux associations de lutte contre la corruption reconnues d’utilité publique la possibilité d'ester en justice, alors qu’en l’état présent de notre droit, la poursuite des délits de corruption commis par une entreprise française sur un sol étranger hors Union européenne ne peut relever que de l'initiative du seul Ministère public. En règle générale, celui-ci ne les engage pas, au nom du sacro-saint patriotisme économique !

M. le Rapporteur – Nous examinerons des amendements à ce sujet.

M. Jean-Patrick Gille – Nous demandons également que soit reconnu un droit d'alerte pour les salariés et les cadres ayant connaissance de malversations ou refusant d'exécuter un acte manifestement illégal, par extension de la protection prévue dans le code du travail. Nous souhaitons voir renforcés les moyens et l'autonomie du service central de prévention de la corruption et limiter l'abus de recours à l'utilisation du secret défense pour bloquer les procédures.

En raison des liens évidents entre corruption et blanchiment, nous demandons que soit rapidement déposé le projet de loi visant à achever la transposition de la troisième directive communautaire sur le blanchiment. Enfin, il convient d’allonger la durée de prescription du délit de corruption.

Nous voterons ce texte, et je voudrais saluer le travail du rapporteur, qui a d'ores et déjà repris une partie de ces propositions. Aussi me permetté-je, Madame la ministre, de vous inciter à un peu d'audace pour cette cause universelle, au regards des retards de développement et autres ravages causés par la corruption (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

Mme Sylvia Pinel – En matière de lutte contre la corruption, le droit et les outils juridiques ne peuvent pas tout, car pour nécessaires qu’ils soient, ils ne seront jamais suffisants. Pour ne pas rester lettre morte, l’arsenal juridique doit donc s’appuyer sur une volonté politique de chaque instant et l’autorité judiciaire doit disposer de moyens suffisants pour éradiquer un virus qui gangrène aussi les États démocratiques comme le nôtre.

Au surplus, le droit ne saurait dispenser les acteurs politiques, administratifs et économiques de leur devoir éthique, car il n’est pas de meilleur anticorps que l'éthique pour se prémunir de toute tentative de corruption, active ou passive. En attendant, que peuvent des outils juridiques certes perfectionnés si nos magistrats se trouvent de plus en plus démunis ?

Le présent texte adapte notre droit interne aux engagements internationaux de la France en matière de lutte contre la corruption, en intégrant dans le code pénal les exigences de deux conventions internationales, émanant respectivement du Conseil de l’Europe et des Nations Unies. Son adoption nous mettra donc en conformité avec les nouvelles normes anti-corruption.

Je pense notamment à l'élargissement des domaines de la corruption passive et du trafic d'influence commis par un agent public au bénéfice d'un tiers. Lorsque le corrompu exerce une fonction judiciaire, la corruption passive est redéfinie comme une entrave à la justice, passible de l’infraction de trafic d'influence. En outre, le texte permettra de lutter plus efficacement contre la corruption internationale. Les conventions de 1997, conclues dans le cadre de l'OCDE et de l'Union européenne, étaient du reste à l'origine des dernières évolutions législatives de 2000 et permettent déjà de disposer de moyens renforcés à l’encontre des agents publics, tant au sein de l'Union européenne qu’avec les principaux partenaires commerciaux de la France.

La corruption est redéfinie, de façon à créer un parallèle avec la corruption passive exercée à l'encontre des intérêts français, et deux nouvelles infractions de trafic d'influence actif et passif impliquant un agent public international viennent compléter le dispositif. On peut toutefois regretter qu'une réserve à la Convention de Mérida ne permette pas de l'élargir à un agent public d'une autre nationalité.

Au plan de la procédure pénale, le projet de loi ne contient qu'une seule nouveauté : l'extension du recours aux opérations de surveillance, d'infiltrations, de prises d'images et de sonorisations dans les affaires de corruption ou de trafic d'influence, qu'elles soient nationales ou internationales.

M. le Rapporteur – Ce n’est pas rien !

Mme Sylvia Pinel – Le texte prolonge ainsi la logique qui avait présidé à l’adoption de la loi Perben II de 2004 contre la grande criminalité. Il convient selon nous de faire preuve d'une grande vigilance, et d'encadrer ce type de pratiques, pour éviter toute dérive susceptible de mettre en cause les libertés publiques.

S'il est indéniable que toutes ces dispositions constituent autant de progrès puisqu'elles renforcent, sur le papier au moins, les pouvoirs d'investigation des juges, je crains toutefois que les magistrats spécialisés ne puissent en faire usage et leur donner une traduction pratique. La lutte contre la corruption exige en effet des moyens matériels, financiers et humains supplémentaires.

M. le Rapporteur – Nous en sommes d’accord.

Mme Sylvia Pinel – Comment des juges démunis pourraient-ils user de leurs pouvoirs d'investigation ? Comme l’a excellemment démontré M. Montebourg, le temps est venu d'instaurer une véritable police judiciaire mise à la disposition des seuls juges.

Les député-e-s radicaux de gauche approuveront ce texte car il renforce l’arsenal contre la corruption. Toutefois, je doute que son adoption suffise à convaincre les Français que la lutte contre la corruption constitue une priorité absolue de ce Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)

Mme Geneviève Fioraso – Les différentes interventions ont montré les avancées que permet d’espérer ce projet de loi en matière de lutte contre la corruption et nous sommes sans doute tous d'accord pour dire que c'est une bonne chose. En réalité, votre texte, Madame la ministre, prend la suite de celui proposé par Lionel Jospin le 30 juin 2000, lorsque avait été élargie la notion de corruption, ce qui constituait une première étape décisive dans la moralisation du commerce international.

Le présent projet propose d'aller plus loin, sous l'impulsion des engagements internationaux intervenus depuis 2000. En améliorant et en élargissant les dispositifs en vigueur pour les adapter aux avancées du droit international, nous disposerons enfin d’un cadre juridique adapté pour mener avec efficacité le combat contre la corruption transfrontalière.

Mais le cadre ne suffit pas et il faut, Madame la ministre, au moins deux conditions pour que cette loi soit réellement appliquée. La première, c'est de donner au système judiciaire les moyens d'investigation nécessaires ; la seconde, c'est d’inscrire cette avancée juridique dans une volonté politique affirmée de répression de la corruption. Je ne reviendrai pas sur le manque de moyens de notre justice, dont l'efficacité, freinée par un manque de personnel avéré, risque d'être encore mise à mal avec la réforme de la carte judiciaire que vous préparez. En effet, compte tenu la façon dont vous l'opérez, votre réforme semble surtout viser une recherche désespérée d'économies, au détriment de la qualité de notre justice, à laquelle nos citoyens sont légitimement attachés.

M. le Président de la commission – Oh !

Mme Geneviève Fioraso – Je relève au moins trois insuffisances dans le projet de loi qui nous est soumis.

D'abord, pour prévenir les dérives les plus graves, il est indispensable de tenter de les identifier avant qu'elles ne prennent une ampleur nationale ou internationale. Rien n'est prévu dans ce sens, et je le regrette. Pourtant, le témoignage de salariés des entités économiques ou des organismes publics concernés par des pratiques de corruption pourrait permettre d’alerter la justice bien en amont. Chacun sait que les plus gros corrupteurs n’hésitent pas à menacer les personnes susceptibles de dénoncer leurs agissements et même leur entourage. C'est pourquoi j'aurais souhaité, Madame la ministre, que le texte organise expressément la protection des témoins salariés des entités concernés par la corruption, en permettant les témoignages anonymes, comme cela se pratique déjà dans certains quartiers sensibles.

M. le Rapporteur – Il y a un amendement en ce sens.

Mme Geneviève Fioraso – Il est insuffisant et un peu tardif ! Le droit d'alerte me paraît en effet essentiel et il aurait fallu prendre le temps de l’organiser, ne serait-ce que parce qu’il affecte le droit du travail. Il faut aussi prévenir les effets pervers qu’auraient de faux témoignages motivés par la malveillance économique.

Ensuite, je regrette une autre restriction à l'application effective de ce texte, laquelle réside dans la contradiction flagrante qu’a relevée M. Montebourg. Comment peut-on prendre l'engagement – devant les adhérents du Medef qui n'en demandaient pas tant ! – de moins soumettre les entreprises aux décisions de justice et aux contrôles administratifs ou fiscaux, comme l'a fait le Président de la République cet été, et proposer, dans le même temps, une loi qui prétend lutter contre la corruption d'agents publics en lien avec des acteurs économiques ?

Cela paraît tout à fait incohérent, et, en tout cas, difficile à comprendre, au moment même où les délits d'initié font scandale dans une entreprise à participation publique comme EADS. Enfin, en tant que députée de l'Isère, choisie, à Grenoble, par le suffrage universel face au seul élu national condamné à ce jour pour avoir mis en place un pacte de corruption impliquant des acteurs publics et privés, je ne peux que regretter l’insuffisance des sanctions prévues contre les élus ayant été corrompus ou corrupteurs pour des raisons d'enrichissement personnel, au détriment de l'intérêt général. Je puis attester de l’impact négatif de tels comportements, tant pour la démocratie que pour le rayonnement économique et social du territoire concerné – le pacte de corruption, soutenu par un parti que vous connaissez, ayant malheureusement bien trop duré (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

M. Jacques Myard – Et les autres partis ? Vous avez la mémoire courte !

Mme Geneviève Fioraso – Élus du suffrage universel, nous nous devons d’être exemplaires. Nos concitoyens souhaiteraient, et ils ont raison, que l'absence de condamnation pour corruption, blanchiment d'argent ou enrichissement personnel soit une condition d'éligibilité.

Ce projet m’inspire le même sentiment que les textes sur l'université et sur le service minimum dans les transports : les objectifs séduisent l'opinion publique, mais le traitement des problèmes est superficiel. Comme de nombreux collègues, y compris sur les bancs de la majorité, je déplore que la communication et les effets d’annonce l’emportent sur le travail de fond. La lutte contre la corruption méritait mieux, et nous sommes prêts à travailler avec vous pour aller plus loin que ce projet, que néanmoins je voterai (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

Mme la Garde des Sceaux – Je veux tout d’abord remercier très vivement le Président Warsmann et votre rapporteur pour leur contribution active à la préparation de cette discussion. Le rapport de M. Hunault, très riche, appréhende la question de la corruption dans toutes ses dimensions. Il montre une convergence d’analyse avec le Gouvernement – que vous avez également soulignée, Monsieur Blessig.

Monsieur Rochebloine, si nous avons choisi de ne pas incriminer le trafic d’influence d’agents publics étrangers, c’est parce que ce n’est pas une incrimination très répandue à l’étranger : nous avons privilégié la logique de réciprocité.

Monsieur Urvoas, je vous remercie de soutenir ce texte. Vous avez raison, nous devons mieux lutter contre la corruption au niveau européen ; je m’y emploierai, notamment à l’occasion de la présidence française. Quant au pôle financier parisien, je veillerai à ce qu’il soit parfaitement outillé pour fonctionner efficacement, en y affectant des magistrats d’expérience et des assistants spécialisés ; c’est prévu dans le budget 2008.

Concernant la transparence de la vie syndicale, Monsieur Tian, je partage votre préoccupation. Les textes existants permettent déjà d’assurer la probité des titulaires de mandats syndicaux.

Monsieur Gille, ce que vous avez dit est inexact : une condamnation pour corruption emporte de plein droit la déchéance des mandats et l’inéligibilité. Je vous informe également qu’une entreprise évincée d’un marché a la possibilité de se constituer partie civile pour corruption. S’agissant de faits ayant eu lieu à l’étranger, la nécessité de vérifications préalables justifie qu’on laisse au Parquet le soin d’apprécier l’opportunité de l’action publique, mais le dépôt d’une plainte est possible.

Concernant les moyens de la justice, Madame Pinel, le budget est en hausse de 4,5 % pour 2008. Il prévoit la création de 187 emplois de magistrats et d’autant d’emplois de greffiers. Les magistrats spécialisés disposeront de moyens matériels et humains renforcés.

Madame Fioraso, je vous précise que la déposition anonyme est déjà possible actuellement lorsque la sécurité du témoin est menacée. Par ailleurs, un amendement du rapporteur protège contre toute mesure de rétorsion le salarié qui dénonce des faits de corruption dans l’entreprise.

La discussion générale est close.

AVANT L'ART. PREMIER

M. Arnaud Montebourg – Mon amendement 19 tend à modifier l’article 113-5 du code pénal, relatif aux personnes qui se sont rendues complices d’un crime ou d’un délit commis à l’étranger. Il pose deux conditions pour que la loi pénale française s’applique : d’une part, le crime ou le délit doit être puni à la fois par la loi française et par la loi étrangère ; d’autre part, il doit avoir été constaté par une décision définitive de la juridiction étrangère. Cette deuxième condition est irréaliste, concernant des pays où la lutte contre la corruption laisse à désirer. Autant demander que la corruption y soit déjà éradiquée !

M. Jacques Myard – Très bien !

M. Arnaud Montebourg – Mon amendement 19 vise à la supprimer, tout au moins – comme le propose M. Hunault dans son sous-amendement 28 – en matière de corruption et de trafic d’influence. Il faut en effet empêcher que des ressortissants français puissent continuer à agir en toute impunité.

M. le Rapporteur – La commission a rejeté cet amendement, de portée trop large, mais j’avais proposé à l’issue de la discussion de rédiger un sous-amendement. Ce dernier, que la commission n’a pas pu examiner, vise à limiter l’amendement aux cas de corruption et de trafic d’influence.

Mme la Garde des Sceaux  Le Gouvernement ne peut être favorable à une telle disposition car on ne saurait juger quelqu’un pour « complicité » alors que « l’auteur » présumé des faits n’a pas encore été reconnu comme tel : il faut nécessairement que la culpabilité soit attestée par une décision définitive de la juridiction étrangère.

M. le Rapporteur – Je retire mon sous-amendement.

M. Arnaud Montebourg – Je le reprends, car dans certains pays, attendre une condamnation définitive en matière de corruption, c’est attendre Godot ! Foin d’hypocrisie. Nous demandons un scrutin public.

M. Émile Blessig – Ce débat ne manque pas d’importance. Nous sommes tous d’accord sur la difficulté de prouver les faits de corruption, le phénomène étant fort complexe. Chacun connaît également le contexte de ces infractions : un monde économique où tous les coups sont permis…

M. Jacques Myard – Exactement !

M. Émile Blessig – Ce que propose M. Montebourg est donc dangereux. Il s’agit en effet de juger par anticipation le complice de faits allégués dans un pays étranger.

J’ajoute que nous ne vaincrons pas la corruption en adoptant seulement des lois, car c’est avant tout une question de comportements et de contexte. Il faut veiller à assurer la transparence, l’évaluation et le respect des obligations de publication dans les entreprises.

N’allons donc pas trop vite, et surtout ne faisons pas fi de notre droit en adoptant une exception qui permettrait de condamner un complice sans que l’on soit sûr que l’auteur des faits soit également condamné dans le pays où l’infraction a été commise.

Le sous-amendement 28, mis aux voix, n'est pas adopté.

À la majorité de 35 voix contre 7 sur 42 votants et 42 suffrages exprimés, l’amendement 19, mis aux voix, n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. Jacques Myard – C’est une « obligation ardente » de mener la lutte contre la corruption au plan national, mais aussi international. Je me réjouis donc que nous transposions plusieurs conventions adoptées dans le cadre du Conseil de l’Europe et des Nations Unies.

Il faut toutefois être conscient qu’il s’agit d’une sorte de compétence universelle à l’égard de certains auteurs de corruption, notamment quand des fonctionnaires internationaux sont concernés. Or, ce sera une source de conflits diplomatiques. J’en veux pour preuve que le Gouvernement a laissé de côté la question du trafic d’influence…

On ne peut qu’approuver l’objectif de ce texte, mais je m’interroge sur la démarche qui a été retenue. Trop souvent, notre pays se trouve dans une position asymétrique sur la scène internationale. Nous excellons dans l’art de poursuivre les délits, mais il ne faut pas oublier que de nombreuses affaires ont en réalité été ouvertes à l’instigation de concurrents étrangers, qui savent parfaitement utiliser une certaine naïveté des juges d’instruction – et je pèse mes mots.

Il est en effet si simple de déposer plainte pour faire naître la suspicion ! Quoique proches de la diffamation, certaines plaintes ont abouti à l’ouverture de procédures très dommageables au plan commercial. Ne soyons donc pas naïfs. Nous savons tous que ce texte facilitera le dépôt de plaintes dont le seul but est de discréditer des entreprises françaises.

Comme l’a rappelé M. Montebourg, les pratiques de certains États étrangers font froid dans le dos, alors qu’il ne s’agit pas de pays de non-droit. Certains osent nous donner des leçons de morale sans balayer devant leur porte. Je pense notamment à ce qui s’est passé pour British Aerospace en Inde – un vrai modèle du genre ! Ne tombons pas dans tous les panneaux des Anglo-saxons.

Il faut bien sûr que nous soyons irréprochables, et nos entreprises doivent veiller à adopter des pratiques transparentes. C’est pourquoi ce texte sera sans aucun doute adopté –je le voterai d’ailleurs. Mais j’aimerais que le Gouvernement remette régulièrement un rapport sur la façon dont nos partenaires appliquent leurs obligations. Il faudra veiller à entreprendre les démarches diplomatiques nécessaires et, au besoin, dénoncer des conventions qui ne seraient pas appliquées par nos partenaires.

Mme Marylise Lebranchu – Je laisse à M. Myard la responsabilité de ses accusations à l’encontre de certains pays…

M. Jacques Myard – Voulez-vous des exemples ?

Mme Marylise Lebranchu – Mais je regrette que le sous-amendement 28 n’ait pas été adopté. Chacun se souvient de la construction, voilà quelques années, d’un complexe touristique qui avait été intégralement financé en argent liquide : aucune procédure n’avait pu être ouverte en France malgré la découverte, par l’intermédiaire d’un complice, d’un réseau de corruption. Cette affaire est restée en travers de la gorge de certains magistrats.

D’aucuns nous disent qu’à cause de la concurrence, il ne faudrait pas être plus blanc que les autres…

M. Jacques Myard – Ce n’est pas cela. Pas plus naïf, c’est tout !

Mme Marylise Lebranchu – Dans un pays comme la France, qui a les moyens de pousser très loin ses enquêtes, notamment quand il s’agit de grands réseaux de corruption implantés en France, je trouverais dommage que l’on ne prenne pas tous les risques. C’est effectivement un risque en raison des pratiques de certains grands pays, qui peuvent choquer. N’oublions pas toutefois que, si nous étions plus performants, certains pays en voie de développement en tireraient avantage. Je pense notamment à la coopération internationale : il est des magistrats, à l’étranger, qui restent l’arme au pied, parce que nous n’avons pas la possibilité d’ouvrir en France des enquêtes qui leur permettraient d’avancer.

C’est un vrai défi qui nous attend, et la France peut être la première de la classe. Sur ce sujet si important, nous rejoindrons donc la majorité : nous souhaitons, nous aussi, aller le plus loin possible dans ce domaine, même si cela implique de prendre des risques de temps en temps. Il faut l’assumer. La corruption et le blanchiment mettent en effet à genoux les économies de certains États et je connais, dans notre pays, des PME qui sont au bord du dépôt de bilan parce qu’elles ont été, elles aussi, victimes de ces comportements.

Mme la Garde des Sceaux  M. Myard et Mme Lebranchu ont tout à fait raison, et le Gouvernement entend aller plus loin en matière de coopération pour lutter contre la corruption.

S’agissant du précédent amendement, on ne peut pas condamner un complice sans qu’il existe un auteur avéré de l’infraction. Cela étant, rien n’empêche d’ouvrir une enquête dès lors que nous avons des indices d’un acte de corruption en France : s’il y a un complice dans notre pays, c’est qu’il y a un acte de corruption chez nous.

M. le Rapporteur – L’amendement 1 tend à harmoniser le régime des peines complémentaires.

Mme la Garde des Sceaux  Avis favorable.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

M. Dominique Tian – Comme je l’ai dit tout à l’heure, le financement de la vie syndicale est assez complexe, voire opaque – et je reste modéré dans mes propos. Dès lors qu’on énumère les catégories susceptibles d’être plus lourdement poursuivies, notamment les titulaires de mandats électifs publics, pourquoi ne pas viser également ceux qui sont désignés par des organisations syndicales de salariés ou d’employeurs exerçant une fonction de gestion ou de contrôle au sein d'un organisme habilité par la loi à percevoir des contributions obligatoires de toute nature ? Tel est l’objet de l’amendement 11.

Mme Marylise Lebranchu – Pensez-vous à Gautier-Sauvagnac ?

M. le Rapporteur – Avis défavorable : l’amendement est déjà satisfait puisque l’article 432-1 du code pénal inclut les personnes chargées d’une mission de service public.

Mme la Garde des Sceaux  Même avis : les personnes que vise votre amendement, qu’elles exercent dans le public ou le privé, sont déjà passibles de sanctions.

L'amendement 11 est retiré.

M. le Rapporteur – Les amendements 24, 13 et 25 sont de cohérence rédactionnelle.

Les amendements 24, 13 et 25, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Rapporteur – L’amendement 2 vise à harmoniser les peines complémentaires qui sanctionnent la corruption d’agents judiciaires français et celle d’agents étrangers.

L'amendement 2, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – L’amendement 3 étend les incriminations de corruption passive et active d’agents publics à la corruption d’agents exerçant une fonction autre que publique.

L'amendement 3, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 1er, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 1ER

M. Arnaud Montebourg – Certaines filiales de groupes faisant l’objet d’une condamnation pour corruption sont établies à l’étranger. L’amendement 20 vise à leur accorder le bénéfice d’une réparation civile – c’est la simple extension au domaine civil d’un effort que nous faisons déjà tous au plan pénal.

M. le Rapporteur – La commission a rejeté cet amendement, non pas à cause de son signataire…

M. Arnaud Montebourg – Il ne manquerait plus que cela !

M. le Rapporteur - …mais parce que la loi du 5 mars 2007 permet d’intenter une action devant une juridiction civile sans attendre l’aboutissement du procès pénal. L’amendement est donc inutile. De surcroît, il va à l’encontre de la récente modification de l’article 4 du code de procédure pénale puisqu’il subordonne la condamnation civile à une condamnation pénale. Il faut au contraire laisser toute latitude au juge civil de prononcer une condamnation, même en cas de non-lieu pénal.

L'amendement 20 est retiré.

ART. 2

M. le Rapporteur – Les amendements à l’article 2 sont tous rédactionnels.

Les amendements 26, 27, 14, 16, 17, 4 et 5 rectifié, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 2, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

L'article 3, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. le Rapporteur – L’amendement 6 corrige une erreur de référence.

L'amendement 6, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 4, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 4

M. Arnaud Montebourg – Les magistrats déplorent souvent de ne pas avoir autorité sur les officiers de police, qui dépendent du ministère de l’intérieur. En outre, celui-ci décide des enquêtes à mener. Certains de nos voisins ont résolu cette question de la double autorité en permettant aux magistrats de disposer de moyens de police judiciaire. Ce n’est pas le cas en France où, de surcroît, les brigades financières se dépeuplent. Puisque la « rupture » est nécessaire, l’amendement 21 vise à autoriser le détachement d’officiers de la police judiciaire auprès de magistrats sur la base du volontariat. C’est une proposition équilibrée et modérée qui améliorera les rapports entre justice et police. Je rappelle que la fusion entre police et gendarmerie a posé de nombreux problèmes en matière judiciaire – et la France est d’ailleurs le seul pays à confondre ainsi ses moyens. Cet amendement serait donc un signe bienvenu à l’attention des magistrats et des policiers qui veulent travailler ensemble (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

M. le Rapporteur – Avis défavorable. Cet amendement, qui pose une question de fond, bouleverse notre organisation judiciaire. Or, le présent texte concerne la lutte contre la corruption : ce n’est pas l’endroit le plus adapté pour une telle mesure.

Mme la Garde des Sceaux  Même avis. La police judiciaire relève d’une hiérarchie administrative, mais en enquête judiciaire, elle est sous l’autorité exclusive du parquet ou du juge d’instruction. L’enquêteur a toute liberté d’investigation dans les limites de cette délégation. En matière financière, vous savez bien que les gendarmes et les policiers sont exclusivement affectés à un service spécialisé.

Mme Marylise Lebranchu – J’entends votre argument, et je sais combien le ministère de la justice éprouve de difficultés à résoudre le problème de la double autorité. La spécialisation de policiers ou de gendarmes fait d’ailleurs l’unanimité depuis longtemps.

Mais nous avons tous en tête des affaires où des magistrats n’ont pas obtenu le concours de la force publique. Ces cas soulèvent la question d’une autorité unique qui permettrait de disposer des bons moyens au bon moment. Nous avons connu des moments trop difficiles pour ne pas au moins se poser la question. Je comprends bien que cela implique des arbitrages interministériels délicats, mais à force de demander, cela deviendra peut-être possible.

Mme la Garde des Sceaux  La difficulté en la matière est effectivement de faire travailler ensemble plusieurs administrations. Les GIR, groupes d’intervention régionaux, ont constitué une grande avancée en permettant, dans le domaine de la lutte contre l’économie souterraine, de faire travailler ensemble l’administration des douanes, le fisc, la police et la gendarmerie, autour du magistrat instructeur et du procureur. Il faudra sans doute aller plus loin dans la coopération sur toutes ces matières extrêmement complexes. Mais je reste défavorable à l’idée d’une autorité unique de direction et d’instruction.

L'amendement 21, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 5

M. Dominique Tian – Le texte qui nous est proposé supprime plusieurs outils d’enquête spécifiques introduits par la loi du 5 mars 2007 en matière de grandes escroqueries commises en bandes organisées, comme les escroqueries à la TVA ou aux comptes sociaux. S’agissant d’infractions particulièrement graves et difficiles à prouver, impliquant souvent de nombreux auteurs et complices, les enquêteurs se verraient contraints de revenir au même régime de garde à vue et de perquisitions que pour un simple vol à la roulotte. Je ne m’explique pas ce changement de rédaction, alors que celle de 2007 donnait toute satisfaction. C’est pourquoi je vous propose l’amendement 12.

M. le Rapporteur – Nous partageons votre souci de renforcer les moyens des enquêteurs, mais cette préoccupation est satisfaite par le texte ou par d’autres amendements qui ont été adoptés par la commission. La quasi-totalité des mesures prévues en matière de délinquance organisée seront ainsi applicables à la corruption et à l’escroquerie en bande organisée : surveillance, infiltrations, écoutes… Les deux exceptions sont la garde à vue de 96 heures et les perquisitions nocturnes. J’ajoute que le consensus a prévalu pour étendre ces dispositions issues de la loi Perben II, qui à l’époque avait pourtant fait grand bruit. Il ne paraîtrait pas logique d’appliquer des procédures différentes pour l’escroquerie et la corruption, alors que ces délits font courir des peines similaires. Au final, les outils des enquêteurs sont considérablement renforcés.

Mme la Garde des Sceaux  Cet amendement est globalement satisfait par le n° 7 de la commission. Nous avons essayé de rendre applicables aux escroqueries en bande organisée les mêmes mesures que pour d’autres infractions financières, mais de manière proportionnelle : nous avons donc exclu la garde à vue de quatre jours et les perquisitions de nuit, qui semblent disproportionnées. S’agissant de la captation des données informatiques, l’idée est extrêmement intéressante mais la Chancellerie a besoin d’y travailler de façon très approfondie, notamment pour rester dans le cadre établi par la CNIL. Avis défavorable.

L’amendement 12 est retiré.

M. le Rapporteur - L’amendement 7 rend applicables, en matière de corruption, les possibilités de saisie conservatoire des avoirs et d’écoutes téléphoniques. Il accorde également aux personnes mises en examen les mêmes droits qu’en matière de délinquance organisée. La commission, si elle a voulu renforcer les moyens mis à la disposition des enquêteurs, entend rester extrêmement vigilante sur la présomption d’innocence et les droits des personnes mises en cause.

L'amendement 7, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – Le projet de loi prévoit l’utilisation de techniques d’enquête spéciales en matière de trafic d’influence des agents publics étrangers, mais pas pour la corruption d’agent public étranger. L’amendement 8 vise à harmoniser ces dispositions.

L'amendement 8, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 5, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5

M. le Rapporteur - L’amendement 9 rectifié est de coordination.

L'amendement 9 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L’amendement 10 vise à rendre obligatoires, dans le code général des collectivités territoriales, des mesures de communication des comptes financiers.

M. le Président de la commission – Dans un esprit de simplification du droit, le sous-amendement 29 propose de remplacer l’obligation de communication systématique par une obligation de mise à disposition à chaque demande. L’objectif est donc rempli de la même manière, mais avec moins de paperasse.

Mme la Garde des Sceaux  Avis favorable, sous réserve de l’adoption du sous-amendement.

Le sous-amendement 29, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 10, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Je vous propose à titre personnel un amendement 18 qui a été repoussé par la commission. Il s’agit de permettre à toute association dont l’objet est de lutter contre la corruption, à la condition qu’elle soit reconnue d’utilité publique, de se constituer partie civile, mais seulement à l’audience. Je voudrais insister sur le fait qu’il ne s’agit en aucune manière de gêner l’instruction ou de porter une appréciation sur l’opportunité des poursuites ou les actes de procédure. Mon objectif est de faire en sorte que les associations, dans des cas strictement définis, puissent se porter partie civile lors de l’audience pour demander réparation, ne serait-ce que de façon symbolique. Dans le climat actuel des affaires, ce serait un geste fort de la part du Parlement.

Mme la Garde des Sceaux  Nous souhaitons que le Parquet, qui a pour rôle de protéger la société et l’intérêt général, ait seul l’opportunité des poursuites. Si les associations pouvaient se constituer partie civile à l’audience, elles pourraient demander à consulter le dossier, et cela aboutirait à des retards sans que l’intérêt général en soit mieux défendu. Avis défavorable.

M. le Président de la commission – La commission partage l’avis du Gouvernement.

M. Arnaud Montebourg – Nous soutenons l’amendement du rapporteur. Certes le Parquet représente l’intérêt général, mais lorsqu’il est, comme c’est le cas en ce moment, politiquement repris en mains, il y a des risques de conflit d’intérêts (Murmures sur les bancs du groupe UMP). C’est pour cela que les associations souhaitent l’adoption de cette mesure. Les exemples sont nombreux, sur le terrain, où des parquets reçoivent des instructions téléphoniques et où les victimes ne sont pas bien défendues dès lors que des intérêts politiques, ou des intérêts économiques qui y sont liés, sont mis en cause. Dans ces temps de confusion des intérêts privés et publics, la question se pose avec acuité. C’est pourquoi nous défendons un droit de regard de la société, dans les conditions très raisonnables établies par le rapporteur. Cela existe dans d’autres matières. Il serait temps d’ouvrir les portes et les fenêtres des parquets, qui sont en voie de caporalisation.

Mme la Garde des Sceaux  Monsieur Montebourg, nous ne sommes plus en campagne électorale et ce type de débat n’est plus de mise.

M. Arnaud Montebourg – C’est ce que demandent les syndicats !

Mme la Garde des Sceaux  Je vous parle de la procédure, du respect de la loi et de son application par les procureurs. Vous me répondez concept théorique et caporalisation : cela ne me parle pas, pas plus qu’aux magistrats. Revenons-en aux réalités : c’est ce qu’attendent les Français de la justice. On a vu à quoi peut mener l’idéologie, passons au concret (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

M. le Rapporteur – En déposant cet amendement, je ne souhaitais pas mettre en péril le consensus dont le texte fait l’objet. Devant cette inadmissible mise en cause du ministère public, je retire mon amendement (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Mme Marylise Lebranchu – Il est repris. Certaines affaires de corruption, en raison des effets en chaîne qu’elles entraînent, concernent un grand nombre d’usagers, voire de consommateurs – je songe notamment à une affaire récente de construction à des fins de blanchiment dont ont été victimes ceux qui ont dû renoncer à acquérir les biens immobiliers concernés, ou encore à des associations d’armateurs. D’autres concernent des organisations non gouvernementales qui, en intervenant auprès des magistrats, peuvent apporter une contribution précieuse, dans certains pays, à la lutte contre la corruption. Enfin, je rappelle la prudence de l’amendement, qui limitait au moment de l’audience la possibilité offerte aux associations de se constituer partie civile.

Mme la Garde des Sceaux  Les informations nécessaires peuvent être transmises au procureur pour les besoins de l’enquête ; en outre, les forces de sécurité - police et gendarmerie – peuvent, dans le cadre d’affaires financières complexes, auditionner des associations. Mais la constitution de partie civile à l’audience, disposition totalement inédite, retarderait l’audience et le jugement.

L'amendement 18, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 6

L’article 6, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART. 6

M. le Rapporteur – L’amendement 22 revêt une importance particulière puisque, au-delà de la transposition de la convention pénale du Conseil de l’Europe, il tend à mettre notre droit en conformité avec l’article 9 de sa convention civile du 4 novembre 1999 - qui obligeait les États signataires à protéger contre toute sanction injustifiée les salariés ayant signalé un cas de corruption – comme avec les recommandations du Groupe d’États contre la corruption – GRECO –, qui appartient au Conseil, et du groupe de travail permanent de l’OCDE. Je remercie Mme la Garde des sceaux de permettre, grâce à l’esprit d’ouverture dont elle a su faire preuve, cette avancée supplémentaire.

Il s’agit donc d’insérer dans le code du travail une section consacrée à la corruption et permettant à l’employé qui, de bonne foi, relate à son employeur ou aux autorités des faits de corruption dont il aurait pu avoir connaissance dans l’exercice de ses fonctions de bénéficier d’une protection légale efficace. Ceux qui, au cours de la discussion générale, ont appelé de leurs vœux ce type de dispositions pourront s’en féliciter.

En tant que membre de la délégation française au Conseil de l’Europe, je tiens à saluer la qualité des travaux de cette assemblée, véritable conscience de l’Europe, qui œuvre non seulement en faveur des droits de l’homme et des droits des personnes privées de liberté, mais aussi contre la corruption et le blanchiment, plaçant ainsi l’éthique au cœur même de l’exigence de bonne gouvernance (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe UMP).

Mme la Garde des Sceaux  Avis favorable : il s’agit là d’une heureuse initiative, qui complète très bien le texte et satisfait notamment à la requête de Mme Fioraso, puisqu’à la protection des personnes menacées grâce au témoignage anonyme s’ajoute celle des salariés d’une entreprise, qui ne pourront faire l’objet de mesures de rétorsion pour avoir dénoncé des faits de corruption.

L'amendement 22, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

M. le Rapporteur – L’amendement 23 est un amendement de coordination.

L'amendement 23, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’article 7 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

EXPLICATIONS DE VOTE

M. Arnaud Montebourg – Nous voterons ce texte, que nous soutenons sans nous départir de nos exigences – ce qui, contrairement à ce que Mme la Garde des sceaux a affirmé, ne signifie pas que nous repartons en campagne électorale, mais relève de l’exercice naturel d’une opposition vigilante, constructive, qui émet des remarques lorsqu’elle le juge nécessaire et s’inquiète des dysfonctionnements de la démocratie dans notre pays.

Si ce texte représente une avancée significative, qui doit être inscrite dans notre droit positif, nous regrettons que M. le rapporteur ait retiré certains amendements que nous aurions votés et que ceux que nous avons repris n’aient été approuvés ni par l’UMP, ni même par le Nouveau centre. Ce n’est qu’un début : tout au long de la législature, nous saurons faire preuve de vigilance en soulevant les questions qui le méritent, en saluant les progrès qui le justifieront et en dénonçant les reculs que nous désapprouverons. Initier un débat respectueux mais juste, tel est le rôle de l’opposition et du Parlement.

Quant au terme, jugé déplaisant, de « caporalisation », ce n’est pas de moi qu’il émane, mais de 80 % des magistrats dont vous avez la responsabilité, Madame la Garde des sceaux ! Permettez-moi de rappeler à ce propos le mot d’Edgar Faure à propos d’une fonction qu’il avait occupée 52 jours : « Au ministère de la justice, les fonctionnaires sont payés pour nous désobéir ! » Il n’était pas socialiste, seulement républicain ! Voilà une belle leçon pour les mois qui vous attendent (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche).

M. François Rochebloine – Je confirme que le groupe Nouveau centre votera ce texte et je me félicite de constater que tous, après avoir participé au débat, s’apprêtent à faire de même, à l’unanimité – c’est là l’essentiel. Mais la plaidoirie de M. Montebourg, si talentueuse soit-elle, est déplacée ! Je regrette le terme de « caporalisation » – même s’il émane d’abord des syndicats –, qui ne correspond pas à l’action menée par Mme la Garde des sceaux.

M. Émile Blessig – Ce texte a pour principal mérite de concrétiser des avancées décisives en matière de lutte contre la corruption, au niveau national et international.

Si, dans le cadre du jeu démocratique, chacun est responsable des positions qu’il adopte, je désapprouve en revanche les déclarations selon lesquelles certains d’entre nous ne seraient pas républicains ou le seraient moins que d’autres. Ainsi M. Montebourg a-t-il donné au débat une tonalité regrettable, au lieu de saisir l’occasion de témoigner de la détermination unanime du Parlement à lutter contre la corruption, cause extrêmement importante. Les excès affaiblissent le Parlement !

M. François Rochebloine – Absolument.

M. Arnaud Montebourg – « Caporalisation » était un euphémisme !

M. Émile Blessig – Le groupe UMP apporte sans aucun complexe son soutien à un texte qui le satisfait pleinement et dont nous pouvons tous être fiers (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L’ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – À l’unanimité ! Félicitations, Madame la Garde des sceaux.

Mme la Garde des Sceaux  Je remercie l'Assemblée nationale, qui a manifesté depuis de nombreuses années sa volonté de parfaire l’efficacité de notre dispositif de lutte contre la corruption, volonté confirmée aujourd’hui ; je remercie en particulier la commission des lois, son président et son rapporteur.

Le texte que vous avez adopté permet des avancées significatives, car il étend les possibilités de poursuites pour corruption et trafic d’influence au niveau international. Tous ici ont appelé de leurs vœux une réponse ferme à un fléau qui menace les valeurs démocratiques comme les grands équilibres économiques.

Les amendements adoptés ont grandement amélioré le projet de loi. Ceux qui harmonisent la rédaction des différentes incriminations s’inscrivent dans la démarche gouvernementale de rationalisation des dispositions applicables. Les amendements concernant les moyens procéduraux des enquêteurs renforcent l’efficacité des investigations, tout en respectant les droits de la défense ainsi que nos exigences constitutionnelles. Enfin, la protection des salariés donneurs d’alerte contre toutes formes de sanctions est mieux garantie ; l’importance du sujet n’a pas échappé au rapporteur, dont l’amendement pertinent prolonge la volonté du Gouvernement. Votre vote, sur un projet apportant une réponse efficace, déterminée et coordonnée à la corruption, témoigne de la haute exigence démocratique qui est la vôtre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre).

La prochaine séance aura lieu demain, jeudi 11 octobre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 15.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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