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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du jeudi 11 octobre 2007

1ère séance
Séance de 9 heures 30
8ème séance de la session
Présidence de M. Jean-Marie Le Guen, Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

RECHERCHE DES BÉNÉFICIAIRES DES CONTRATS D’ASSURANCE VIE
NON RÉCLAMÉS ET EN DÉSHÉRENCE

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à permettre la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance vie non réclamés et en déshérence.

M. Éric Straumann, rapporteur de la commission des lois Associé au votum mortis, le contrat d’assurance sur la vie a longtemps joui d’une réputation d’immoralité : Portalis y voyait une loterie funèbre, estimant que « la cupidité qui spécule sur les jours d’un citoyen est souvent bien voisine du crime qui peut les abréger ». Aujourd’hui, cette réputation n’est plus aussi sulfureuse : instrument principal de placement des Français, l’assurance vie, encadrée de manière stricte, est reconnue pour sa souplesse et sa rentabilité.

Pour autant, tout n’est pas satisfaisant. De nombreux contrats ne sont pas réclamés, faute pour l’assureur d’avoir connaissance du décès de l’assuré, ou faute pour le bénéficiaire de savoir qu’il possède cette qualité. Ces contrats risquent alors de se trouver en situation de déshérence – depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, les sommes non réclamées abondent après trente ans le Fonds de réserve des retraites.

La loi du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance a renforcé les obligations des assureurs et amélioré l’information du souscripteur. Ainsi l’assureur, lorsqu’il a connaissance du décès de l’assuré, est-il tenu d’avertir le bénéficiaire, si les coordonnées de ce dernier sont portées au contrat. Cela n’étant pas toujours le cas, cette même loi dispose que le souscripteur doit être informé des conséquences de la désignation des bénéficiaires. La désignation doit être faite de la façon la plus précise et la plus complète possible, l’assureur étant informé par la suite de tout changement de coordonnées. De son côté, l’assureur s’engage dans le contrat à avertir le bénéficiaire au moment du décès. Enfin, il avertit le souscripteur que, si le bénéficiaire a connaissance de sa qualité, la clause peut devenir irrévocable et interdire tout rachat ultérieur.

Aujourd’hui, toute personne peut demander par lettre à un organisme professionnel représentatif si elle est bénéficiaire d’un contrat souscrit par une personne dont elle apporte la preuve du décès. L’organisme représentatif dispose de quinze jours pour transmettre la demande aux entreprises agréées, lesquelles disposent d’un mois pour avertir la personne de l’existence d’une stipulation à son bénéfice. Pour ce faire, les professionnels se sont regroupés dans une association, l’Agira. Depuis le 1er mai 2006, celle-ci a permis de « solder » 700 contrats sur 10 500 demandes, pour un montant de 12 millions d’euros environ.

Mais ce n’est pas assez. Le bénéficiaire ne sachant pas nécessairement qu’il a été « couché » sur un contrat, et l’assureur n’étant pas forcément informé du décès de l’assuré, la présente proposition permet une action plus volontariste. Les organismes qui gèrent les contrats d’assurance vie, pour savoir si l’assuré dont ils n’ont plus de nouvelles est décédé, doivent être autorisés à accéder au répertoire national d’identification des personnes physiques géré par l’Insee. Afin de respecter la finalité de ce fichier, un filtre pourrait être constitué par les organismes professionnels, et la mission confiée à l’Agira.

La commission des lois a souhaité étendre ce dispositif aux mutuelles, ainsi que leur imposer l’obligation de recherche du bénéficiaire, qui pèse sur les seules compagnies d’assurance depuis la loi de 2005. Elle a considéré que la consultation du fichier de l’Insee pouvait également être autorisée pour la recherche des bénéficiaires décédés. En outre, elle a accepté tous les amendements qui allaient dans le sens du renforcement des droits de l’assuré et des bénéficiaires. Par ailleurs, afin de limiter la loi à la seule énonciation d’une norme, elle propose de supprimer, parce que superfétatoire, le renvoi au décret simple.

Enfin, compte tenu des délais dans lesquels les fonds sont mis à disposition du bénéficiaire après la mort de l’assuré, il ne paraît pas de bonne méthode d’arrêter de faire courir les intérêts au jour du décès. Je vous proposerai donc, à titre personnel, un amendement.

Je vous invite à adopter cette proposition de loi à l’unanimité, comme l’a fait la commission des lois (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Permettez-moi d’abord de rendre hommage à MM. Fourgous et Censi, auteurs de cette proposition de loi, ainsi qu’aux membres de la commission des lois et de la commission des affaires économiques, qui ont travaillé en concertation sur ce texte, rapporté par M. Straumann.

L'assurance vie est le produit d'épargne préféré de nos concitoyens. On dénombre 22 millions de contrats, qui représentent 38 % du patrimoine financier des français. Une fraction des 20 % de contrats qui se dénouent par décès n'est pas réclamée : la Fédération française des sociétés d'assurance estime qu'il en existe aujourd'hui entre 150 000 et 170 000, pour une somme d'environ un milliard d'euros.

Pourquoi ces contrats ne sont-ils pas réclamés ? Il arrive souvent que l'assureur ne soit pas informé du décès de l'assuré. Il est surtout fréquent que les assurés n'informent pas le bénéficiaire de l'existence d’un contrat, la législation actuelle les incitant au secret. En effet, si le bénéficiaire accepte le contrat auprès de l'assureur, la décision est irrévocable.

Pour régler cette question, nous devons travailler à la fois sur l’information et sur l’incitation.

Aujourd’hui, l'assureur n'a pas les moyens de vérifier si un assuré est décédé. Cette proposition de loi apporte une réponse aussi simple qu'efficace à ce problème en ouvrant l'accès du fichier Insee des décès aux assureurs.

Les assurés, de leur côté, ne doivent plus être incités à cacher aux bénéficiaires l'existence d'un contrat d'assurance vie. Un amendement d'Yves Censi vise donc à réformer la clause d'acceptation des contrats d'assurance vie, afin que cette acceptation par le bénéficiaire n'empêche plus l'assuré de récupérer les sommes dont il pourrait avoir besoin pour faire face à des imprévus ou pour aménager une situation de dépendance. Le Gouvernement y est favorable : quand on a travaillé dur toute une vie pour réunir un capital, il ne faut pas qu'on puisse se le voir retiré.

Par ailleurs, pourquoi un assureur s'empresserait-il de verser le capital d'un contrat d'assurance vie aux bénéficiaires si la réglementation l'incite à ne pas se presser ? Un amendement de Mme de La Raudière propose donc de renforcer l'obligation de moyens qui pèse sur les assureurs pour identifier les bénéficiaires et leur verser les sommes dues et, au nom du Gouvernement, je présenterai moi-même un amendement qui fixera aux assureurs un délai d'un mois pour verser le capital aux bénéficiaires à compter de la réception des pièces permettant d'effectuer ce versement, il s'agira d'une avancée importante puisque la loi ne fixe aujourd'hui aucun délai.

Votre rapporteur vous proposera également d'imposer aux assureurs d’inclure dans leurs contrats d'assurance vie une clause de revalorisation du capital durant la période qui court entre le décès de l'assuré et le versement au bénéficiaire. Le temps que l'assureur passe à chercher les bénéficiaires sera ainsi de l'argent gagné pour ces derniers.

Voilà une série de mesures cohérentes qui aura un impact décisif. Je remercie l'Assemblée nationale pour le travail de qualité qu’elle a fourni sur cette question, et me félicite qu’elle ait su à cette occasion dépasser les clivages partisans, comme en témoigne le vote à l’unanimité de la commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Yves Censi – Avec plus de 22 millions de contrats souscrits pour un montant qui dépasse les 1 100 milliards d'euros, l'assurance vie est le placement préféré de nos compatriotes. Or l'encours de ces 22 millions de contrats n'est pas toujours redistribué comme il devrait l’être aux bénéficiaires. Ces capitaux non réclamés sont en quelque sorte gelés, et leurs attributaires lésés. Le principe qui prévaut dans ce type de contrat – à savoir qu'à la mort de l'assuré, les fonds reviennent de plein droit aux bénéficiaires dans des conditions fiscales très avantageuses – est alors bafoué.

L'imprécision juridique explique en grande partie cette situation : aucune mesure n'existe en effet pour encourager les compagnies d'assurance à rechercher de manière effective les bénéficiaires de ces contrats. Dans un souci d'équité, la présente proposition vise à mettre fin à ces dysfonctionnements.

Tout d'abord, la règle de l’irrévocabilité de la stipulation pour autrui incite le souscripteur à ne pas informer le bénéficiaire de la stipulation, ce qui conduit à des situations absurdes puisque certains bénéficiaires font « arbitrairement » valoir cette clause en acceptant la stipulation de manière à empêcher l'exercice du droit de rachat par le souscripteur.

Ensuite, l'assureur n'est pas toujours informé du décès du souscripteur, et rien ne l'incite aujourd’hui à s'enquérir de son sort. Tout au contraire le pousse à l’attentisme et, en tout cas, aucune règle n'impose d'accéder à la volonté du défunt. La seule contrainte en la matière résulte de la loi du 15 décembre 2005, qui, en cas de décès du souscripteur et quand l'assureur en a connaissance, oblige ce dernier à informer le bénéficiaire à la condition que les coordonnées de celui-ci soient portées au contrat. Mais cette disposition n’est pas suffisante pour rétablir le juste équilibre entre la volonté du souscripteur et la réalité de l'exécution de la clause bénéficiaire. Si les coordonnées ont changé, si l'identité du bénéficiaire n'est pas formellement exprimée – la mention traditionnelle inscrite dans les contrats étant celle de la stipulation faite au conjoint et aux enfants –, l'assureur est exempté de toute recherche, et encore je ne vous parle pas des contrats anciens qui ne permettent en général même pas d'être informé du décès du souscripteur.

Le dispositif Agira institué par la loi du 15 décembre 2005, qui permet à toute personne de s'informer de l'éventuelle existence d'une stipulation faite à son profit, n'a pas permis de résoudre la principale difficulté, celle de la connaissance du décès par l'assureur ou par le bénéficiaire. Même s’il va dans le bon sens, il reste unilatéral : il oblige le bénéficiaire potentiel à faire la démarche d'aller jusqu'à l'information. Il faut aujourd'hui que l'information aille vers l'usager.

L'expérience nous enseigne qu'il n'est pas de progrès durable sans justice. C'est ce souci d'équité qui a conduit le Médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, à qui je rends hommage, à dénoncer dans son rapport de 2007 « une situation inacceptable sur le plan de l'éthique ». C'est le même souci qui nous anime aujourd’hui.

J’ai déposé avec mes collègues deux amendements visant à accélérer la réduction du stock des contrats non réclamés et à réviser la clause d'acceptation pour éviter l’absence d’informations concernant les bénéficiaires. Le dispositif sera renforcé par l'amendement de ma collègue Laure de la Raudière qui étend la recherche aux bénéficiaires même en l’absence d’adresse dûment spécifiée.

Nos amendements visant à obliger les assureurs à s'enquérir, deux ans après le terme du contrat, du sort du souscripteur et, si celui-ci est décédé, du bénéficiaire. L'un réforme les modalités de l'acceptation du bénéfice d'une assurance vie en subordonnant cette acceptation à l'accord du souscripteur, de manière à ce que celui-ci ne soit pas privé de la libre disposition des sommes placées. L’autre vise à encadrer la recherche de la situation des assurés et des bénéficiaires : il s'agit d’appuyer les efforts de la profession en vue d’une résorption totale des contrats non réclamés grâce à une modification de la Charte de déontologie.

Nous devons consacrer toute notre énergie à faire appliquer ce texte dans les meilleurs délais, dans un souci de transparence et de vraie cohérence. Il s'agit de faire d'un principe fondamental, celui de l'équité, une règle d'usage.

Je remercie le Gouvernement qui, par la voix de Luc Chatel, a marqué sa volonté de mener à bien ce combat et de donner un cadre législatif à cette réforme dans un souci constant de concertation. Je rends aussi hommage au président du groupe UMP, Jean- François Copé, qui a compris tout l'enjeu de ce texte et sa dimension républicaine, au-delà des approches partisanes. Cette démarche nous permettra, je l’espère, d'aboutir à la même unanimité qu’en commission, dans l'intérêt des citoyens et de l'industrie financière française (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Vidalies – Cette proposition de loi est une initiative intéressante. Ce n’est pas la première fois que notre Assemblée évoque cette question : nous en avions longuement discuté lors de l’examen du projet de loi sur la réforme des droits de succession, sans toutefois aboutir – j’avais plaidé à l’époque pour la création d’un fichier central. C’est un débat important, car le montant des avoirs en cause est élevé, même s’il reste incertain s’agissant des contrats non réclamés. Les compagnies d’assurances avancent en effet toujours le même chiffre d’un milliard d’euros, alors que le montant des avoirs déposés, lui, est passé de 500 à 1 000 milliards ! Il semble qu’en réalité, les sommes en cause se situent plutôt aujourd’hui entre 2 et 4 milliards – c’est en tout cas l’estimation du Médiateur. L’absence de réclamations tient à la fois, comme cela a été rappelé, aux aléas de la vie et aux règles spécifiques des contrats d’assurance. En l’état actuel du droit, l’assureur n’est pas toujours informé du décès ou du déménagement du souscripteur ; et tant que ce décès n’est pas avéré, il a l’interdiction d’informer les bénéficiaires de la stipulation faite à leur profit. D’autre part, la règle de l’irrévocabilité de la stipulation pour autrui incite le souscripteur à ne pas informer le bénéficiaire de l’existence de cette stipulation.

Le législateur a déjà tenté d’améliorer l’information du souscripteur et du bénéficiaire. La loi de sécurité financière du 1er août 2003 a obligé les assureurs à envoyer chaque année aux souscripteurs une information relative à l’existence du contrat. La loi du 15 décembre 2005 a quant à elle imposé de faire figurer dans le contrat une information sur les conséquences de la désignation du bénéficiaire. Elle a également précisé à l’article L. 132-8 du code des assurances que, lorsque l’assureur est informé du décès d’un assuré, il est tenu d’aviser les bénéficiaires de la stipulation effectuée à leur profit si leurs coordonnées sont portées au contrat, condition qui limite évidemment la portée de cette disposition. C’est cette limitation de la charge imposée aux assureurs qui est aujourd’hui au centre du débat.

En application de la loi du 15 décembre 2005, les fédérations professionnelles ont mis en place le Dispositif pour la gestion des informations relatives aux risques en assurance – Agira – qui peut être interrogé par toute personne pensant être bénéficiaire d’un contrat souscrit par une personne décédée. Mais ce dispositif porte en lui-même ses limites. La nature même des contrats implique que nombre de bénéficiaires ignorent qu’ils le sont, et ils ne se manifestent donc pas. Dès lors il n’est pas surprenant que sur les 6 000 demandes étudiées par l’Agira – ce qui est déjà peu –, seulement 625 aient eu un résultat positif. De son côté, un grand groupe d’assurances, allant au-delà de ses obligations légales, a entrepris de rechercher les souscripteurs ou les bénéficiaires de contrats non réclamés. Sur un premier échantillon de 200 dossiers, il a été constaté que les deux tiers des assurés étaient toujours en vie, pour la plupart en maison de retraite et souvent sous tutelle, ce qui explique qu’ils ne se manifestaient plus. Une nouvelle recherche sur 500 dossiers a permis de retrouver 90 % des souscripteurs.

De tels chiffres justifient le dépôt de cette proposition. Le Médiateur de la République, saisi de nombreuses réclamations, a d’ailleurs appelé l’attention, dans son rapport pour 2006, sur la nécessité d’une initiative législative dans ce domaine. MM. Fourgous et Censi ne reprennent que l’une de ses propositions, qui est de permettre aux sociétés d’assurance de consulter les données figurant au répertoire national d’identification des personnes physiques et relatives au décès. Les amendements du rapporteur complètent le dispositif en faveur des bénéficiaires de contrat, ce que nous approuvons. Mais en l’état, les sociétés d’assurance auront une possibilité, non une obligation, de faire des recherches. Elles auront un accès au fichier ; nous voulons qu’elles s’en servent ! J’avais donc déposé au nom du groupe socialiste un amendement créant une obligation de moyens à charge des sociétés d’assurances. C’est, par une certaine utilisation de la procédure parlementaire, un autre amendement allant dans le même sens que nous examinerons. Cependant je ne revendique pas de droit d’auteur, et cette proposition nous satisfait.

Mais d’autres questions restent en suspens. Il s’agit d’abord de la réglementation relative aux intérêts, qui continuent à courir au seul bénéfice des compagnies d’assurances après le décès de l’assuré ou le terme du contrat, et qu’on évalue à 250 millions. Il n’y a aucune raison que ces compagnies en soient les seules bénéficiaires. Cela permet de diminuer les primes payées par les autres, fait-on valoir, dans une perspective en quelque sorte mutualiste. Mais nos concitoyens ignorent ce mécanisme et si un amendement mettait fin à cette situation injuste, nous le soutiendrions.

Un autre problème – qu’un amendement aborde – tient au fait que l’acceptation par le bénéficiaire rend la stipulation à son profit irrévocable. De ce fait, un certain nombre de souscripteurs, préférant garder leur liberté, ne préviennent pas les bénéficiaires. Toute initiative permettant de leur laisser une faculté de rachat à titre personnel serait la bienvenue, d’autant que le nombre de personnes très âgées et dépendantes augmente. Nous souhaitons que le Gouvernement et la majorité aillent dans ce sens.

J’avais indiqué en commission dans quelles conditions nous pourrions soutenir ce texte. Les amendements qui reprennent ceux que nous avions déposés nous satisfont. Le vote devrait donc être unanime. Cela contribuera peut-être à ce que le texte ne s’enlise pas ensuite dans la procédure parlementaire comme cela se produit parfois (Applaudissements sur tous les bancs).

M. Michel Hunault – Véritable outil d’épargne, l’assurance vie s’est imposée comme le placement préféré des Français, qui ont souscrit 22 millions de contrats pour un encours dépassant 1 000 milliards. Pourtant, une partie non négligeable n’est pas redistribuée car les bénéficiaires ne la réclament pas. Selon la Fédération française des assurances, il y a ainsi chaque année entre 150 000 et 170 000 contrats en déshérence pour un montant supérieur à un milliard.

Dénonçant cette situation dans son rapport pour 2006, le Médiateur de la République a proposé d’instaurer une obligation générale d’information et de recherche des bénéficiaires, à la charge des assureurs. Je salue donc le travail et l’initiative de nos deux collègues Censi et Fourgous.

Si l’article L. 132-25 du code des assurances impose au professionnel une obligation générale d’information, il n’a pas obligation de rechercher d’éventuels bénéficiaires d’une assurance vie dont le souscripteur serait décédé. Peut-être même n’a-t-il pas eu connaissance de la désignation d’un bénéficiaire et, dans l’état de la législation, il n’a pas les moyens de savoir si un assuré est décédé. La Fédération française des sociétés d’assurances a d’ailleurs demandé qu’on modifie la loi pour donner aux professionnels les moyens de connaître les bénéficiaires de ces contrats ou leurs ayants droit.

La loi du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le secteur de l’assurance prévoyait d’instituer une obligation légale pour les assureurs de rechercher les bénéficiaires en cas de décès d’un assuré. Malheureusement, elle n’a pu être mise en œuvre.

Depuis le 1er mai 2006, chacun peut s’adresser à un organisme spécialisé, l’Agira, pour savoir s’il ne serait pas bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie d’une personne décédée. Mais cette faculté n’est pas ouverte aux assureurs. Le Médiateur de la République a souligné combien ce dispositif est insuffisant. D’ailleurs, sur les quelques milliers de demandes traitées par l’Agira, les réponses positives n’excéderaient pas quelques centaines. Il existe, on le comprend, un frein psychologique à engager une telle démarche. Pour résoudre le problème, on a suggéré que les compagnies d’assurances recherchent les contrats potentiellement en déshérence, en raison de l’âge du souscripteur ou de l’absence de communication avec lui au cours des années précédentes. Si le souscripteur est décédé, la compagnie devrait informer les bénéficiaires. Si ces derniers n’étaient pas dénommés, joignables ou encore en vie, il serait procédé à une recherche d’héritiers. Ce n’est qu’au terme de celle-ci qu’un contrat pourrait être proclamé en déshérence.

Actuellement, les assureurs ne sont pas soumis à une obligation générale d’informer les bénéficiaires. Aux termes de l’article L. 132-8 du code des assurances, modifié par la loi du 15 décembre 2005, ils n’y sont contraints que si les coordonnées du bénéficiaire sont portées sur le contrat. Nombreuses sont cependant les sociétés d’assurance à avoir réagi, en agissant en amont auprès de leurs clients. Il est en effet assez fréquent que des souscripteurs désignent des bénéficiaires sans veiller à mentionner les données nécessaires à leur recherche future. Le cadre juridique sera désormais précisé, et nous nous en félicitons.

Ce texte permettra d’instaurer une relation de confiance entre les compagnies d’assurance et leurs clients. Il autorise notamment les assureurs à consulter le répertoire national d’identification des personnes physiques, afin de savoir si le souscripteur est vivant : c’est l’objet du nouvel article L. 132-9-3, inséré dans le code des assurances.

Le groupe Nouveau centre se réjouit de l’examen d’une proposition de loi visant à renforcer encore le pouvoir d’attraction du placement préféré des Français et il votera ce texte sans réserve. Je rappelle d’ailleurs que Charles de Courson avait, en mars dernier, déposé une proposition de résolution à ce sujet : nous sommes donc particulièrement satisfaits que le problème soit en passe d’être résolu.

Le montant exact des contrats non réclamés est par nature difficile à évaluer. Grâce aux éclaircissements apportés par le texte, l’assurance vie, qui présente déjà de nombreux avantages du fait de sa souplesse et de son dynamisme, devrait encore gagner en audience et je fais mien le vœu de nos collègues socialistes qu’une fois définitivement adoptée, la loi soit rapidement appliquée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau centre et du groupe UMP).

M. Jean-Michel Fourgous – Le sujet que nous examinons ce matin est d’importance, car au-delà de la forte valeur symbolique de l’assurance vie, il en va de la relation de confiance entre les Français et leurs établissements financiers. En outre, si elle est adoptée, la loi touchera directement la vie quotidienne de dizaines de milliers de Français, certains pouvant espérer un beau cadeau de Noël – je pense, bien entendu, aux bénéficiaires d’un contrat d’assurance vie qui en ignoreraient l’existence. Enfin, l’adoption de ce texte permettra aussi de renforcer la confiance des Français envers ce qui constitue déjà leur placement « chouchou » et l’un des moteurs de notre économie.

La croissance, notons-le bien, dépend de trois facteurs : capital, travail et innovation, le capital étant sans doute, bien qu’on ait tendance à l’oublier en France, le levier essentiel. L’assurance vie représente un volume de 1 100 milliards – soit presque l’équivalent de la dette publique –, pour une collecte annuelle de 140 milliards. Nul doute que cette performance n’est pas pour rien dans le triple A décerné à la France par les agences de notation.

Ayant un impact direct sur la dette et la croissance, l’assurance vie apporte aussi un complément de retraite non négligeable aux Français prévoyants, notre pays persistant dans le choix éminemment contestable de refuser les fonds de pension. Permettez-moi de dire au passage, Monsieur le ministre, que j’espère que les esprits vont rapidement évoluer à ce sujet, de sorte que nos épargnants puissent se tourner vers de tels fonds.

L’assurance vie – via les placements en actions qu’elle autorise – concourt également pour une part importante au financement de nos entreprises et de nos emplois marchands. L’amendement voté il y a deux ans, à l’initiative d’Olivier Dassault et de nos collègues du groupe « Génération entreprises » dont M. Chatel faisait partie, a encore renforcé le rôle de l’assurance vie, en permettant le transfert de près de 30 milliards vers des contrats passés en actions. En matière de succession, le produit est fiscalement avantageux, dans un pays qui sur-fiscalise le capital du fait de son déficit de culture économique… (Murmures sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)

M. Alain Vidalies – Il va finir par nous faire changer d’avis !

M. Jean-Michel Fourgous – Mais non ! Nous nous félicitons, sur ce sujet aussi, de l’ouverture de nos amis socialistes ! (Sourires)

M. Alain Vidalies – N’y comptez pas sur ces fondements idéologiques !

M. Jean-Michel Fourgous – Oh, l’assurance vie a commencé à décoller au début des années 1980 : bravo et merci à nos amis socialistes !

Loin de viser à effrayer qui que ce soit, ce texte tend à rassurer pleinement les épargnants qui font vivre le pays avec ce produit. Sur les 22 millions de contrats d’assurance vie, moins d’un pour cent – soit environ 150 000 – ne sont pas réclamés : pour réel qu’il soit, le problème ne concerne donc qu’un volume relativement restreint.

Je me félicite tout particulièrement de la concertation qui a précédé l’élaboration de ce texte. Bien entendu, assureurs, assurés et associations de consommateurs ont été consultés, de même que le Médiateur de la République, qui soulevait le problème dans son rapport pour 2006. Cela montre à ceux qui affectent d’en douter encore que le Médiateur joue un rôle essentiel dans notre pays. Et je me réjouis aussi de l’accord entre la droite et la gauche sur ce dossier.

Les dysfonctionnements auxquels nous allons remédier sont reconnus par les professionnels. Ils découlent aussi d’une législation parfois inadaptée, comme l’a souligné M. Censi en décrivant les spécificités de l’assurance vie. En réformant la clause d’acceptation, on évitera que ne se constitue à l’avenir un tel stock de contrats non réclamés. Il n’est évidemment pas dans notre rôle de dénoncer toute une profession à la vindicte populaire : nous devons bien plutôt résoudre des problèmes concrets, marginaux mais importants pour chacun des intéressés.

Tout le monde gagnera à ces évolutions. Certaines compagnies engagent d’ores et déjà des recherches systématiques pour les contrats détenus par des personnes âgées de plus de 100 ans : elles vont être incitées, au terme des négociations que nous avons tenues, à le faire dès lors que le titulaire est âgé de plus de 90 ans et à renforcer leur engagement déontologique. Nous pouvons désormais attendre des assureurs une attitude proactive. En accédant au fichier INSEE, ils seront en mesure de connaître le sort de leurs clients et, par conséquent, de traiter les dossiers en pleine connaissance de cause. Sachant que 500 000 décès surviennent chaque année, il était essentiel de se doter de méthodes véritablement opérationnelles. Les épargnants – et je pense en particulier aux plus petits – seront ainsi rassurés sur la bonne exécution de leurs volontés. Le bon fonctionnement de notre économie dépend aussi de cette confiance.

Nous souffrons en effet d’une certaine prudence dans notre rapport au risque. Si la France est le deuxième pays d’épargne au monde, cette épargne est insuffisamment orientée vers les investissements risqués que sont les actions. Nous avons trop tendance à l’orienter vers le financement passif de la dette, plutôt que vers celui, actif, de nos entreprises.

Ce texte donne un surcroît de sécurité au placement chouchou des Français : nous le voterons d’enthousiasme (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

M. le Secrétaire d'État – Je dois vous dire toute ma satisfaction de voir un consensus se dégager sur la proposition de loi de MM. Censi et Fourgous, encore améliorée par le travail en commission des lois. Je remercie tout particulièrement votre rapporteur, Éric Straumann, car les amendements qu’il va défendre répondent pour une large part aux questions soulevées par les différents orateurs. C’est le cas pour l’obligation de moyens, évoquée par MM. Censi et Vidalies, ainsi que pour ce qui concerne la revalorisation et l’irrévocabilité.

Je partage l’avis de votre rapporteur et de M. Hunault sur l’intérêt de préserver la relation de confiance entre assureurs et assurés : il ne faut stigmatiser personne et s’attacher plutôt à dégager un accord auquel chacun gagne. M. Fourgous rappelait à l’instant que certains vont peut-être avoir une bonne surprise dans les prochaines semaines ; c’est aussi une bonne nouvelle pour les assureurs de voir enfin se résoudre des situations pendantes.

Monsieur Vidalies, vous vous êtes à juste titre interrogé sur le chiffre d’un milliard, avancé par la profession. En rapprochant le nombre annuel de successions non réclamées du taux de contrats d’assurance vie échéant à un décès, votre rapporteur arrive à une estimation de 600 millions. Le chiffre d’un milliard doit donc être perçu comme un ordre de grandeur et considéré comme tel. Nous pouvons avancer avec plus de certitude que cela concerne entre 150 000 et 170 000 contrats, d’où un nombre de bénéficiaires potentiels qui ne peut être dédaigné.

M. le Président – J’appelle les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

AVANT L'ART. 1ER

M. le Rapporteur – Mon amendement 11 oblige l’assureur à prévoir les modalités de revalorisation du capital à partir du premier anniversaire du décès de l’assuré, dans l’attente du versement des sommes.

M. le Secrétaire d'État – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Cet amendement, quel que soit son intérêt, ne suffit pas à résoudre le problème car il ne donne aucune indication sur la manière dont cette revalorisation sera assurée et il ne dit mot des intérêts.

L'amendement 11, mis aux voix, est adopté.

M. le Secrétaire d'État – Conforme aux objectifs de cette proposition de loi, l’amendement 9 du Gouvernement vise à garantir au bénéficiaire le versement rapide du capital. Il fixe un délai d’un mois à compter de la réunion des pièces, au-delà duquel le capital non versé produira intérêt au taux légal majoré.

M. le Rapporteur – Avis favorable à titre personnel.

L'amendement 9, mis aux voix, est adopté.

ART. 1ER

M. Guy Geoffroy – Dans le but de faciliter la recherche des bénéficiaires, mon amendement 3 vise à faire noter leurs noms, prénoms, dates et lieux de naissance au moment de la signature du contrat.

M. le Rapporteur – Avis défavorable car la situation peut évoluer au cours de la vie du contrat, par exemple avec la naissance d’un autre enfant. Un amendement ultérieur répondra à votre préoccupation, en imposant une obligation de rechercher tous les bénéficiaires.

M. le Secrétaire d'État – Le Gouvernement comprend très bien l’inspiration de cet amendement mais il ne faut pas, en effet, rigidifier. Souvent d’ailleurs, nos concitoyens utilisent des formules génériques telles que « mes enfants nés ou à naître ». Je suggère donc à M. Geoffroy de retirer son amendement au bénéfice de celui qu’a évoqué le rapporteur.

L'amendement 3 est retiré.

M. Guy Geoffroy – Dans le même esprit, mon amendement 4 tend à fixer aux assureurs un délai de deux ans pour informer le ou les bénéficiaires.

M. le Rapporteur – Je partage l’objectif, mais la rédaction de l’amendement 2 me paraît préférable ; avis défavorable donc.

M. le Secrétaire d'État – L’intention est bonne, bien sûr, mais il y a un risque d’effet pervers, en particulier d’un allongement des délais de recherche… Je partage donc l’avis du rapporteur et j’invite M. Geoffroy à retirer son amendement.

L'amendement 4 est retiré.

L'article 1er, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 1ER

Mme Laure de La Raudière – Notre amendement 2 tend à ne plus subordonner l’obligation d’informer le bénéficiaire à l’existence d’une mention de ses coordonnées dans le contrat. Il instaure donc, à la charge des assureurs, une obligation générale de recherche et d’information des bénéficiaires. Ceux-ci étant, dans 80 % des cas, les conjoints ou les enfants, la recherche sera souvent assez aisée. Les contrats ne seraient déclarés en déshérence qu’en cas d’échec des recherches ; après trente ans, ils tomberaient dans le fonds de réserve pour les retraites, comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Cet amendement, qui renforcera la confiance entre les consommateurs et les assureurs, constitue en outre une nouvelle mesure en faveur du pouvoir d’achat, les avoirs en cause avoisinant le milliard d’euros.

M. Alain Vidalies – Mon amendement 1, qui poursuit le même objectif, tend à imposer à l’assureur, lorsqu’il est informé du décès de l’assuré, d’aviser le bénéficiaire de la stipulation effectuée à son profit, même si ses coordonnées ne sont pas portées au contrat – c’est-à-dire à supprimer la condition qui figure actuellement à l’article 132-8. Sa rédaction me paraît plus simple que celle de l’amendement 2, lequel aboutit néanmoins au même résultat.

La question est de savoir comment l’on contrôlera que les sociétés d’assurances respectent bien l’obligation de moyens – et non de résultats – qui leur est ainsi faite. D’une part, leur responsabilité pourra être engagée si des bénéficiaires se découvrent plus tard, sans qu’elles aient pris la peine de les rechercher. D’autre part, Monsieur le ministre, on pourrait demander à l’autorité de contrôle des assurances et des mutuelles de veiller à ce que les dispositions que nous nous apprêtons à voter ne restent pas lettre morte. Par ailleurs, on peut espérer un effet d’entraînement entre compagnies.

M. le Rapporteur – Avis favorable à l’amendement 2, dont la rédaction, plus précise, impose sans ambiguïté une obligation de moyens.

M. le Secrétaire d'État – Même avis, pour les mêmes raisons. L’introduction dans la loi d’une obligation de moyens est en effet absolument nécessaire et l’absence de mention des coordonnées a trop longtemps fait obstacle aux recherches.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – L’adoption de l’amendement 2 fait tomber l’amendement 1.

M. Yves Censi – Dans le cadre général de la détermination de bonnes pratiques en matière de contrats d’assurance vie non réclamés, l’amendement 5 rectifié tend à résoudre le problème particulier du stock des avoirs de l’assurance vie : si le souscripteur ne s’est pas manifesté deux ans après le terme du contrat, l’assureur devra informer de leurs droits l’assuré ou ses bénéficiaires. En renforçant ainsi l’obligation d’information de l’assureur à l’égard du souscripteur – ou des bénéficiaires si celui-ci est décédé –, l’amendement met l’accent sur les principes de responsabilité et de confiance. Pour remédier aux faiblesses déjà évoquées de l’obligation d’information, la profession s’est en effet engagée à modifier son code de déontologie. Ainsi parviendra-t-on au juste équilibre entre obligation et incitation, car, si chaque partie doit sortir gagnante de la conclusion d’un contrat, les obligations imposées par la loi doivent être respectées.

M. le Rapporteur – À titre personnel, je suis favorable à cet amendement.

M. le Secrétaire d'État – Je me félicite de cet amendement, dans une nouvelle rédaction à laquelle M. Censi a beaucoup travaillé et qui, en s’appuyant sur le code de déontologie de la profession, permet d’éviter la stigmatisation que nous redoutions et de rendre à chacun ses responsabilités. C’est un progrès pour le consommateur.

M. Alain Vidalies – Décidément, j’ai été trop optimiste ! Non seulement cet amendement de dernière minute, que la commission n’a pas examiné, est dépourvu de la portée que tentent de lui donner M. le rapporteur et M. le secrétaire d’État, mais il est en contradiction avec le reste du projet de loi et la tonalité générale de nos débats, qui semblaient guidés par un objectif commun par-delà les différences d’approche. Ne porte-t-il pas la marque des sociétés d’assurance elles-mêmes ? Pour la première fois, la loi renverrait au code de déontologie d’une profession, donnant ainsi un statut quasi législatif – allant au-delà de la portée uniquement réglementaire de certaines références aux ordres professionnels – à un texte dont le mode d’adoption et le statut juridique font problème. En outre, il n’a jamais été question du délai de deux ans que l’amendement introduit et qui ne pourra qu’encourager les assureurs à ne rien faire ! Nous souhaitons que cette proposition soit retirée ; dans le cas contraire, nous nous y opposerons, et notre vote final sera modifié.

M. Yves Censi – Mon amendement devrait satisfaire vos préoccupations puisqu’il renforce l’obligation d’information imposée aux assureurs. Le retirer, ce serait renoncer à l’une des modalités d’un contrôle auquel vous êtes attaché. Du reste, le bien-fondé de cette mesure pourra être évalué au cours des mois à venir. Quant à la référence au code de déontologie de la profession, elle vise simplement à respecter le rythme et les pratiques propres à la profession. Une obligation déontologique et contractuelle vaut mieux que l’absence d’obligation !

M. Alain Vidalies – Mais introduire dans la loi cette référence au code de déontologie fera primer celui-ci, du seul fait de la hiérarchie des normes juridiques, sur les dispositions contractuelles ! Or ce sont les assureurs qui sont à l’origine de ce code, et non les clients ! Cette démarche unilatérale contredit l’intention qui anime le projet : remédier au déséquilibre dont souffrent les bénéficiaires de contrats d’assurance vie en déshérence. En outre, le délai de deux ans ne pourra qu’être interprété comme une suspension de l’obligation d’information. On voit bien que le texte a été préparé dans la précipitation !

M. Jean-Luc Warsmann, Président de la commission des lois – Je demande une suspension de séance.

M. le Président – Elle est de droit.

La séance, suspendue à 10h55, est reprise à 11h15.

M. le Secrétaire d'État – Nous comprenons bien que l’amendement vise à améliorer la protection des consommateurs en instaurant une obligation nouvelle pour les assureurs. Cependant, nous nous interrogeons sur son articulation avec les dispositions qui figurent déjà dans le code des assurances concernant l’obligation annuelle d’information du souscripteur, ainsi qu’avec l’obligation de moyens que l’Assemblée vient d’adopter. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de l’amendement, en raison des compléments d’analyse qu’il nécessite, pour nous permettre de mieux mesurer les conséquences d’une telle mesure sur l’objectif d’information et de protection des assurés.

M. Yves Censi – Il conviendra tout de même de renforcer l’obligation d’information des assureurs à l’égard des souscripteurs et des bénéficiaires, c’est ce que j’entendais en faisant référence à un code de déontologie. Sensible aux arguments du secrétaire d’État, du rapporteur et du président de la commission des lois, je retire mon amendement, mais prenons garde à ne pas être en recul par rapport à l’esprit même de cette proposition !

ART. 2

L'article 2, mis aux voix, est adopté.

ART.3

M. le Rapporteur – L’amendement 8 est de coordination.

L'amendement 8, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’article 3 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART.3

M. Yves Censi – L’acceptation par le bénéficiaire de la stipulation faite à son profit a pour effet de priver le souscripteur de la libre disposition des sommes placées, y compris pour exercer sa faculté de rachat : nous avons tous connaissance des situations très difficiles auxquelles cela peut conduire.

Afin d’encourager les souscripteurs à informer les bénéficiaires tout en préservant la libre disposition de leur épargne, l’amendement 6 vise à réformer les modalités de l’acceptation du bénéfice d’un contrat d’assurance vie. D’une part, cette acceptation est subordonnée à l’accord du souscripteur. D’autre part, l’accord du bénéficiaire acceptant est requis pour procéder au rachat, au nantissement du contrat ou à une avance. Ce dispositif préserve ainsi le mécanisme fondamental de stipulation pour autrui tout en garantissant les droits du souscripteur, conformément à l’objet de la proposition de loi. Enfin, la sécurité juridique des opérations d’épargne est confortée.

M. le Rapporteur – Les sous-amendements 10, 12 et 13 corrigent des erreurs matérielles contenues dans l’amendement de M. Censi. Sous réserve de leur adoption, la commission émet un avis favorable à l’amendement 6.

M. le secrétaire d’État.  Cet amendement très important permettra de réduire le nombre de contrats non réclamés, puisqu’il rend plus sûr et plus transparent le mécanisme d’acceptation d’un contrat d’assurance vie. En subordonnant l’acceptation du bénéfice à l’accord du souscripteur, il sécurise l’assuré qui ne pourra plus être dépossédé contre sa volonté. Le bénéficiaire, de son côté, verra ses droits confirmés grâce à l’accord du souscripteur. Enfin, l’amendement préserve la spécificité de l’assurance vie par rapport aux autres produits d’épargne. Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Cet amendement agit sur l’une des causes de non-réclamation des contrats : l’irrévocabilité de l’acceptation de la stipulation, que les souscripteurs craignent et qui les pousse à ne pas informer le bénéficiaire de leur démarche. Cet amendement, en soumettant l’acceptation par le bénéficiaire à l’accord du souscripteur, ne règle sans doute pas complètement la question et aurait mérité d’être débattu plus longuement, mais nous ne le contesterons pas.

Les sous-amendements 10, 12 et 13, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'amendement 6 sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

TITRE

M. le Rapporteur – L’amendement 7 modifié est de conséquence.

L'amendement 7 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L’ensemble de la proposition de loi, mis au voix, est adopté.

M. François Goulard – Beau travail législatif !

Prochaine séance : cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 11 heures 25.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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