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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du vendredi 26 octobre 2007

2ème séance
Séance de 15 heures
28ème séance de la session
Présidence de M. Jean-Marie Le Guen, Vice-Président

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La séance est ouverte à quinze heures.

PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2008 (SUITE)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

ART. 30

M. Jean-Luc Préel – Anodin au premier abord, cet article est important puisqu’il permet de conclure des contrats individuels autorisant les rémunérations complémentaires. Il peut donc conduire, demain, à une rémunération des professionnels liée au respect d’engagements économiques décidés par la seule assurance maladie. Or notre priorité est d’améliorer la qualité des soins et de mettre en œuvre une gestion efficace de l’ensemble du système. Cela implique l’engagement de tous dans l’application des bonnes pratiques, qui passe par une formation continue des professionnels de santé, financée et évaluée. Quant à l’État, il doit développer la prévention et l’éducation à la santé.

Il me semble dangereux d’inciter les professionnels de santé à prendre des engagements individuels en échange d’une rémunération complémentaire. Certes, le contrat devra être conforme à un contrat type ; mais le texte prévoit que ce contrat est élaboré par la seule UNCAM. Il est indispensable que ce contrat type soit négocié avec l’union des complémentaires et les représentants des professions de santé, ne serait-ce que pour veiller à ce qu’il ne déroge pas à l’éthique. Toutes les actions prévues doivent être rémunérées dans les conditions prévues dans la convention nationale, en particulier pour ce qui concerne la participation à la permanence des soins, à la coordination et à la formation continue.

L’idée d’une rémunération complémentaire décidée à l’échelon local permettra à la CPAM d’avoir ses bons praticiens, ayant vocation à être montrés en exemples. L’objectif est d’améliorer la qualité et d’amener tous les médecins à respecter les bonnes pratiques. D’aspect sympathique en ce qu’il récompense le mérite individuel, cet article me semble néanmoins dangereux.

Son deuxième paragraphe a trait aux génériques, que le Gouvernement souhaite encore développer. Après avoir accumulé un certain retard, notre pays est désormais en bonne voie, mais encore faut-il rappeler que les génériques ont pour seul mérite d’être moins chers que les princeps. Ce ne sont pas les génériqueurs qui découvriront les molécules innovantes que nous attendons tous !

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour les recettes et l’équilibre général – Oh, là, là !

M. Jean-Luc Préel – Et je souhaite attirer l’attention sur le problème, passé sous silence, de l’efficacité et de la biodisponibilité. Deux études publiées cet été ont montré qu’il convenait d’être très prudents dans plusieurs cas, notamment pour les malades présentant une épilepsie équilibrée, certains ayant refait des crises sous génériques. Les taux sanguins de la molécule étaient fort différents selon la molécule utilisée. Et le même problème a été constaté pour les anti-arythmiques. Oui, il faut faire des économies, mais pas au détriment des malades.

Mme Génisson remplace M. Le Guen au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de Mme Catherine GÉNISSON
vice-présidente

M. Jérôme Cahuzac – On se demande, Madame la ministre, ce que cet article peut vraiment apporter en termes de bonnes pratiques et de maîtrise de la dépense au regard du SMR. Qui élaborera le contrat type ? Le ministère et le directeur général de l’UNCAM participeront-ils à sa mise au point ? Quel rôle joueront les syndicats médicaux, alors qu’aucun d’entre eux n’a à ce jour accepté de contribuer au travail collectif qui devrait être mené pour élaborer ce modèle de contrat ? Je ne doute pas que vous soyez animée des meilleures intentions, mais l’on voit mal comment le dispositif pourrait fonctionner si vous ne parvenez pas à y associer les syndicats médicaux représentatifs.

S’agissant des génériques, nous avons désormais un ONDAM en nette réduction par rapport à l’année dernière. Toutefois, plusieurs mesures adoptées hier vont favoriser une augmentation de la dépense pharmaceutique. Vous avez notamment indiqué que l’augmentation du taux K à 1,4 % était conforme avec les « sous-jacents » de l’ONDAM. Cependant, l’ONDAM diminuant globalement, comment chacun de ses éléments pourrait-il augmenter ? Mais peut-être cela implique-t-il que certains augmenteraient, tandis que d’autres – comme la rémunération des médecins ou les transports sanitaires – diminueraient considérablement par rapport à l’évolution constatée cette année – mais de quels éléments dispose-t-on pour valider cette hypothèse ?

Madame la ministre, ne jugez-vous pas opportun de revenir sur les dispositions qui reviennent à accorder une marge de manœuvre supplémentaire de 200 millions à l’industrie pharmaceutique, soit par un volume supplémentaire – et le taux K représente déjà 80 millions –, soir par une diminution de la taxe sur la promotion médicale, que vous avez fait adopter par l’Assemblée. Vous placez l’assurance maladie dans une contradiction, puisque vous souhaitez, via les objectifs conventionnels, que les médecins prescrivent moins, tout en donnant aux laboratoires pharmaceutiques les moyens d’obtenir des prescriptions supplémentaires.

M. Jean-Marie Le Guen – Avec cet article et les suivants, nous sortons, de manière pragmatique, de la dynamique de la convention. Est-ce la convention, particulièrement mauvaise, de 2005 ou bien l’ensemble du processus conventionnel qui est incapable de fournir les résultats attendus ? Il est difficile de le dire. Il reste que vous tendez à introduire un conventionnement individuel pour essayer de transformer les pratiques et les résultats des médecins. Vous faites en sorte d’introduire un conventionnement particulier sur la prévention, le bon usage ou l’efficacité des soins : ce sont des questions légitimes. Pourtant, votre majorité les a combattues pendant cinq ans au nom du « paquet conventionnel », et rien n’a été fait dans cette période. Alors que la loi du 4 mars 2002 prévoyait des dispositifs que vous vous êtes empressés de supprimer, vous introduisez aujourd’hui des mesures analogues, en voulant généraliser les discussions individuelles avec les praticiens les plus motivés. Avec cinq ans de retard, vous reprenez des idées que vous aviez combattues pour des motifs idéologiques, dans un contexte d’ensemble profondément dégradé. C’est un aveu d’échec plus qu’un nouveau départ. Si l’on voulait refonder l’exercice de la médecine, c’est une véritable nouvelle donne politique qu’il faudrait susciter, pour réformer la médecine ambulatoire, combattre la désertification médicale ou améliorer la qualité des soins de manière significative. Il faut aussi libérer la prescription de la pression des laboratoires pharmaceutiques et soutenir les génériques.

Ce qui n’est malheureusement pas encore assimilé par tous, c’est que l’efficacité économique est un choix éthique non un choix d’opportunité. La bonne allocation des moyens, nous la devons aux Français pour garantir l’efficacité de notre système. Et c’est à ce titre qu’il ne faut pas laisser la Haute autorité de santé introduire de la confusion entre qualité et efficacité des soins.

Face à tous ces enjeux, nous prenons acte de votre constat d’échec de la réforme de 2004. Et nous savons que les articles 30 et suivants ne sont que des petits signaux dans la nuit. Ils ne permettront en rien d’opérer la refondation dont le pays a besoin. Les années perdues s’accumulent, et chacune se compte en dizaines de milliards d’euros.

M. Jérôme Cahuzac – Très bien !

M. Philippe Vitel – Monsieur Le Guen, je suis souvent d’accord avec vous, mais là, absolument pas ! Cet article 30, c’est, au contraire, une énorme chance de pouvoir expérimenter de nouveaux modes de rémunération en prenant en considération l’individu professionnel de santé (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). Au moment où nous cherchons des solutions aux problèmes de démographie médicale, nous saluons l’occasion qui nous est donnée de nouer de nouvelles relations conventionnelles avec les médecins et de développer, à titre individuel, les politiques de santé publique – prévention, dépistage, etc. – que nous appelons tous de nos vœux. Je suis donc extrêmement favorable au contenu de cet article.

Mme Jacqueline Fraysse – Je me félicite que la droite salue aujourd’hui ce qu’elle avait supprimé hier, en dépit de nos vives protestations, sous la pression de quelques syndicats ! Plus d’un siècle après l’obtention, pour les couturières, du paiement à la journée en lieu et place du paiement à la pièce, il faut se réjouir qu’on parle à nouveau de rémunération au forfait. Le paiement exclusif à l’acte a en effet plusieurs inconvénients : il incite les médecins à multiplier les actes, et ne prend pas du tout en considération les problématiques extrêmement importantes de la prévention, de l’éducation à la santé et de la prise en charge globale des patients.

Le système du médecin référent était cependant meilleur que celui qu’on nous propose aujourd’hui.

M. Philippe Vitel – Ah non !

Mme Jacqueline Fraysse – Optionnel, il avait été choisi par 8 000 médecins généralistes, soit 15 % de la profession. Il s’engageaient à ne pas dépasser un certain seuil d’actes par an, à ne pas pratiquer de dépassements d’honoraires et à accepter le tiers payant, à tenir pour chaque patient un dossier médical informatisé, à prescrire des médicaments génériques, à participer à des campagnes de prévention et de dépistage et à continuer à se former ; en contrepartie, ils recevaient 46 euros par an pour chaque patient inscrit.

M. Philippe Vitel – Nous, nous sommes dans le qualitatif, pas dans le quantitatif !

Mme Jacqueline Fraysse – Nous avions vivement soutenu ce mode de rémunération, qui était aussi un mode d’organisation moderne de la médecine. D’autres ont considéré que ce système fonctionnarisait les médecins et qu’il coûtait trop cher à la sécurité sociale – tout en se gardant bien de le prouver. La Cour des comptes a ainsi écrit dans son rapport de 2004 sur la sécurité sociale : « La décision de supprimer le dispositif en 2004 a eu pour but de geler toutes les études de son impact sur les comportements. Certaines ont néanmoins montré que ces médecins se formaient davantage, accordaient plus d’attention à la prévention, respectaient mieux la permanence des soins et prescrivaient moins de médicaments ». Quant à la CNAM, elle écrivait en octobre 2004 : « Le forfait référent représente en moyenne 7 070 euros par an et par médecin, pour une économie sur le seul poste des prescriptions médicamenteuses de 18 960 euros ».

Il n’y a pas de honte à reconnaître ses erreurs, bien au contraire, mais nous vous invitons, Madame la ministre, plutôt que de construire une nouvelle usine à gaz, à ressortir des cartons ce système du médecin référent. Cela redonnerait confiance aux médecins qui avaient choisi cette option et qui, aujourd’hui, sont sceptiques devant vos projets.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Le contrat d’adhésion individuelle que je propose vise à associer qualité des soins et maîtrise des dépenses, qu’il est absurde d’opposer. Nous ne cassons pas la mécanique conventionnelle, qui reste au contraire la base, mais pourquoi ne pas donner aux médecins qui le souhaitent la possibilité de faire plus et mieux ?

S’agissant du taux K, Monsieur Cahuzac, vous confondez la dérivée première et la dérivée seconde, le taux de progression et le différentiel de taux ; l’ONDAM est rebasé de 4,5 %, et l’ONDAM des soins de ville est passé de 1,1 % à 3,2 % !

Le discours de Mme Fraysse et de M. Le Guen est un peu étrange. Si vous considérez que la mécanique conventionnelle est à bout de souffle, Monsieur Le Guen, pourquoi refusez-vous de lui donner de l’air ?

M. Jean-Marie Le Guen – Je ne le refuse pas, c’est vous qui avez condamné le médecin référent !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – C’était une option qui liait le médecin et son patient et valorisait le comportement individuel du médecin, non la coordination des soins et l’organisation du système. C’est la raison pour laquelle la réforme de 2004 a substitué à la notion de médecin référent celle bien plus riche de médecin traitant.

M. Jérôme Cahuzac – On peut dire que ça marche bien ! 15 milliards de déficit !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Le système a réussi : alors que seulement 6 300 médecins avaient adhéré à l’option du médecin référent, 85 % des malades sont couverts par celle du médecin traitant. Réintroduire le médecin référent dans ce contexte n’aurait pas de sens.

En revanche, la contractualisation individuelle volontaire autour de la qualité des pratiques et d’objectifs de santé publique complète le dispositif du médecin traitant.

Le Gouvernement est très ouvert à la discussion, et j’accepterai de nombreux amendements, entre autres celui qui a été déposé par Mme Fraysse et M. Le Guen, relatif aux centres de santé.

Mme la Présidente – Avant de passer à l’examen des amendements à cet article, je vous informe que ceux qui ont été déposés par le Gouvernement à l’article 32, après l’article 32 et à l’article 33 vont être distribués.

Mme Marisol Touraine – Rappel au Règlement, fondé sur l’article 58, alinéa premier.

Nous sommes étonnés d’avoir appris par la presse que le Gouvernement s’apprêtait à retirer ces articles, puis par des indiscrétions de couloir qu’il allait nous proposer une nouvelle rédaction. Le sujet est si important qu’il a mis les internes dans la rue…

M. Philippe Vitel – Le Gouvernement les a écoutés !

Mme Marisol Touraine – …et on nous appelle à débattre d’amendements distribués à l’instant même. C’est ubuesque !

Bien que nous souhaitions faire preuve de responsabilité et éviter de faire durer exagérément nos débats, nous pourrions légitimement demander une suspension de séance afin d’examiner ces amendements et de définir une position commune, et c’est ce que nous ferons si leur rédaction nous semble trop complexe ou trop timide. Sinon, comment pourrions-nous, Madame la présidente, sous-amender les amendements du Gouvernement ?

Un député du groupe UMP – Par la démocratie directe ?

M. Jean-Marie Le Guen – Vous voulez dire la démocratie participative ?

Mme Marisol Touraine – Voter votre texte sans discuter, c’est ce que vous appelez la démocratie ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Vitel – Nous avons bien recouru à la démocratie participative dans nos discussions avec les internes en médecine !

M. Christian Paul – On a vu le résultat !

M. Jean-Marie Le Guen – Plus d’internes dans la rue que de députés UMP dans l’hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Mme la Présidente – Mes chers collègues, l’article 99, alinéas 6 et 7, de notre Règlement vous permet de déposer des amendements ou des sous-amendements en séance.

M. Jean-Luc Préel – L’amendement 269 permet aux conventions médicales de proposer aux médecins conventionnés un contrat-type. L’article 30 réserve en effet cette possibilité aux seules caisses d’assurance maladie, puisque c’est l’UNCAM qui prépare le contrat-type et que ce sont les caisses qui les proposent aux médecins. Or la politique conventionnelle que le Gouvernement privilégie officiellement, et à laquelle Mme la ministre s’est déclarée personnellement attachée, exigerait que le contrat soit rédigé en concertation avec les représentants des professionnels de santé.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l’assurance maladie et les accidents du travail – Avis défavorable. Le principe de la convention n’est pas en cause, mais, comme l’a souligné M. Vitel, les caisses doivent pouvoir expérimenter un nouveau dispositif. Le système du médecin référent a vécu : cessons d’invoquer le passé ! Mais il est en effet nécessaire de mieux associer les partenaires conventionnels à la mise en œuvre des nouvelles mesures, et je défendrai tout à l’heure un amendement en ce sens.

Mme la Ministre – Même avis.

M. Philippe Vitel – J’ai attentivement écouté Mme Fraysse, que j’invite à consulter les débats passés de notre Assemblée : lorsque nous avons institué le médecin traitant, la lisibilité du système exigeait de mettre fin au médecin référent…

M. Jean-Marie Le Guen – Vous avez tout cassé, oui ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Vitel – Monsieur Le Guen, restez respectueux, comme je le suis lorsque vous vous exprimez.

Nous n’avons toutefois pas voulu laisser de côté les partisans de l’ancien système – peu nombreux, il est vrai, puisque toutes les organisations syndicales sauf une…

M. Jean-Marie Le Guen – Aujourd’hui majoritaire !

M. Philippe Vitel – …aspiraient à une autre forme de maîtrise comptable.

Mme Jacqueline Fraysse – En effet, de nombreux syndicats étaient opposés au système du médecin référent lorsque vous l’avez supprimé…

M. Philippe Vitel – Cela s’appelle la démocratie !

Mme Jacqueline Fraysse – Non : le syndicat dont vous parlez est devenu majoritaire, mais vous l’avez écarté des négociations !

M. Philippe Vitel – Mais non !

Mme Jacqueline Fraysse – Votre conception de la démocratie est à géométrie variable : vous ne négociez qu’avec les syndicats qui sont d’accord avec vous !

D’autre part, Madame la ministre, je ne suis pas opposée aux modes de rémunération au forfait ; c’est au contraire parce que je les défends depuis des années que j’étais favorable au système du médecin référent, qui préservait la liberté de choix des médecins alors que le vôtre a le désavantage de donner l’initiative aux caisses. En outre, si 80 % de patients ont déclaré un médecin traitant, c’est qu’ils n’avaient pas le choix s’ils ne voulaient pas payer davantage ! Regardez la réalité en face et écoutez les professionnels…

M. Philippe Vitel – C’est ce que nous avons fait !

Mme Jacqueline Fraysse – …qui connaissent l’efficacité d’un système que vous avez démoli et que vous vous apprêtez à réintroduire sous une autre forme !

M. Jean-Marie Le Guen – Le dispositif proposé est manifestement extra-conventionnel.

M. Philippe Vitel – Non, supra-conventionnel !

M. Jean-Marie Le Guen – En effet, la convention n’a eu d’autre effet que de permettre aux médecins spécialistes extérieurs au parcours de soin de pratiquer des honoraires libres. L’extension des tarifs non opposables était d’ailleurs revendiquée par l’UMP comme par une fraction des syndicats de médecins.

Comment vous croire lorsque vous prétendez aujourd’hui réintroduire subrepticement, et sans véritable volonté politique, un système que vous aviez supprimé – démotivant ainsi les médecins qui avaient contribué à sa mise en place ? La logique de dialogue avec les praticiens n’était pourtant pas l’apanage de la gauche : la réforme Juppé, en 1996, allait dans le même sens, ce qui exclut toute inspiration idéologique. C’est vous qui, à partir de 2002, avez instauré un monopole idéologique destructeur ! À la différence des franchises, qui pénalisent le patient alors que c’est du médecin qu’émane la prescription, le système du médecin référent favorisait véritablement la responsabilisation du patient que vous ne cessez d’invoquer.

Nous voterons néanmoins pour l’article afin de ne pas entraver le rétablissement d’un système que nous réclamons depuis des années.

M. Philippe Vitel – Il y a trop de différences idéologiques entre nous !

Mme Catherine Lemorton – Il est navrant d’avoir ainsi perdu cinq ans. Avec les médecins référents, la politique du générique aurait connu de bien meilleurs succès. En 2004, le syndicat dont Mme Fraysse a parlé s’est senti floué : « Nous sommes devenus des médecins sous-traitants », disent-ils. Et je comprends votre volonté d’y revenir, car cette politique marchait.

M. Philippe Vitel – Elle ne marchait pas, et ce que nous faisons est différent !

Mme Catherine Lemorton – Avec le médecin référent, les patients ne payaient plus d’avances. La réforme de 2004 a rendu le système des plus opaques ; les dépassements d’honoraires ont été favorisés, et je passe sur les dessous de table… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Philippe Vitel – Vous ne savez pas de quoi vous parlez !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Loin d’être la solution idéale, le médecin référent a été un échec, sinon au niveau de la qualité, à tout le moins à celui de la quantité : 6 880 médecins référents pour 910 000 patients seulement. Cependant, nous n’avons pas supprimé le dispositif brutalement : la convention de janvier 2005, qui a fait l’objet d’un avenant au début de 2007, avait prévu une période de transition, qui sera achevé fin 2009 pour le passage au médecin traitant. Et nous avons continué à payer les médecins référents. Leur association, que nous avons reçue, trouve notre proposition de contrats individuels extrêmement intéressante.

M. Jean-Marie Le Guen – Madame la ministre, vous avez mis en cause les résultats quantitatifs du dispositif du médecin référent. Sur quel nombre de médecins traitants et de contrats vous engagez-vous en 2008 ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Il s’agit d’une démarche volontaire et expérimentale, qui veut donner un supplément d’âme à la politique contractuelle. Il ne sert à rien de me demander des engagements chiffrés, car nous n’allons pas forcer les médecins.

M. Philippe Vitel – C’est le principe de la liberté !

L'amendement 269, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 56 est rédactionnel.

L'amendement 56, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau – Malgré votre revirement concernant les mesures que vous aviez vous-même adoptées, vous restez très en deçà de ce qu’il faudrait faire. Cependant, nous ne sommes pas des partisans du « tout ou rien », et l’amendement 365 a pour objet de permettre aux centres de santé de conclure des contrats-types avec les caisses d’assurance maladie. Je me réjouis donc de votre accord, Madame la ministre.

M. Jean-Marie Le Guen – L’amendement 419 est semblable.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Les contrats-types sont des engagements individuels entre un médecin et une caisse, alors que les centres de santé sont des regroupements de médecins. La commission a donc repoussé l’amendement mais j’ai bien entendu, tout à l’heure, Mme la ministre annoncer son accord…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je le confirme.

L'amendement 365, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 419 tombe.

M. Jean-Luc Préel – Sur mon précédent amendement, tout le monde a parlé du médecin référent, et personne de l’amendement lui-même. Le dispositif de l’article 30 est un « bouclage » entre la caisse primaire et la caisse nationale ; on est donc hors convention. Si nous voulons rester dans le processus conventionnel, il est alors logique que le contrat-type soit élaboré avec les partenaires de la convention. Par ailleurs, comment appliquer la procédure d’un contrat individuel à la collectivité que constituent les centres de santé ?

J’ai, par là même, défendu l’amendement 270.

M. Yves Bur, rapporteur – Le contrat-type, qui vise à renforcer la maîtrise médicalisée, est une avancée et, comme toutes les avancées, il bouscule certaines idées, en particulier celles de quelques syndicats médicaux. Il faut donner à ces acteurs la possibilité de contribuer positivement à cette évolution et donc de discuter avec l’UNCAM. L’amendement 417 propose aux partenaires conventionnels de débattre en vue de parvenir à un accord sur le contrat-type, tout en enserrant cette négociation dans un délai de trois mois. S’ils ne parviennent à aucun résultat dans ce délai, l’UNCAM retrouve alors toute sa liberté d’action.

Le monde syndical médical est très éclaté et représente peu de médecins. Quand un ou deux syndicats ont signé, ils représentent tout au plus un quart des médecins. Le moins que l’on puisse dire est que, par le passé, ces syndicats n’ont pas fait beaucoup d’efforts pour promouvoir la convention médicale auprès des non-adhérents, et n’ont donc pas suffisamment épaulé l’assurance maladie, de sorte que la maîtrise médicalisée n’a pas porté les fruits que l’on en attendait, ainsi que l’a relevé la Cour des comptes. Je soutiens l’idée que cette maîtrise médicalisée, justement parce qu’il ne s’agit pas d’une maîtrise comptable, soit évaluée en volume ; nous ne demandons pas aux médecins de faire des économies, mais de bien prescrire.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Si la commission souhaite, elle aussi, réunir les partenaires conventionnels autour d’une table pour établir ces contrats-types, la position de M. Bur lui paraît un peu rigide. Elle a donc repoussé les deux amendements, en demandant à leurs auteurs de rallier la position qu’elle exposera à l’amendement 57.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé S’il convient d’associer les partenaires de la convention à la discussion, il ne faut pas pour autant replacer les contrats dans le cadre conventionnel. Autant les partenaires conventionnels doivent être consultés, autant il faut éviter de nous engager dans un mécanisme lourd, avec risques de blocage à la clé. Avis défavorable aux amendements, qui confondent la démarche volontaire et la démarche conventionnelle.

L'amendement 270, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 417.

M. Jean-Marie Le Guen – L’amendement 418 est défendu.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis favorable. L’UNOCAM a sa place dans la consultation sur les contrats-types.

L'amendement 418, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 57, que j’évoquais tout à l’heure, rend une place aux partenaires conventionnels dans la procédure d’élaboration des contrats-types.

L'amendement 57, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen – Les médecins qui avaient choisi de devenir médecins référents ont, pour cela, modifié l’organisation de leur cabinet et souvent engagé du personnel administratif. L’État n’ayant par la suite pas respecté sa parole et cette modalité d’exercice étant abandonnée, il est logique que les contrats soient proposés en priorité aux médecins qui avaient choisi l’option du médecin référent. C’est le sens de l’amendement 445.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Ce mode d’exercice n’est pas abandonné ; les médecins référents peuvent avoir une politique en sifflet jusqu’à la fin 2009. D’autre part, il n’y a pas des médecins de première catégorie et de médecins de seconde zone ! Tous, qu’ils soient ou non médecins référents, pourront souscrire ces contrats volontaires.

L'amendement 445, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel – Le but premier de tels contrats étant d’améliorer la qualité des soins, je propose par l’amendement 58 de préciser que les engagements de prescription devront être conformes aux bonnes pratiques médicales définies par la Haute autorité de santé.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé J’imagine mal que les contrats puissent contenir des dispositions contraires aux bonnes pratiques médicales définies par la Haute autorité de santé. Avis défavorable.

L'amendement 58, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 59 est rédactionnel.

L'amendement 59, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen – L’amendement 529 est défendu.

L'amendement 529, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 30, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 30

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – La commission, se rangeant à l’avis de Mme Hostalier, de Mme Gallez et de M. Bernier, propose, par l’amendement 60, que les pharmaciens d’officine soient eux aussi habilités à conclure avec l’assurance maladie des accords de bon usage des médicaments, des contrats de bonne pratique ou des contrats de santé publique.

M. Jean-Luc Préel – L’amendement 275 est identique.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je souscris volontiers à l’idée qui sous-tend l’amendement…

M. Roland Muzeau – Mais… (Sourires)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé …mais je rappelle que les relations entre les pharmaciens et l’assurance maladie sont définies par une convention nationale, modifiée par avenant le 30 janvier dernier. Des accords supplémentaires ne peuvent se concevoir sans discussions préalables. De plus, les modalités de la rémunération complémentaire restent à imaginer, puisque les pharmaciens ne sont pas payés à l’acte. En somme, l’idée est bonne mais, en l’état, elle est inapplicable.

M. Jean-Marie Le Guen – Nous approuvons sans réserve l’esprit de l’amendement. Notre pays connaît une crise sanitaire majeure qui va s’approfondir encore. Cela impose un redéploiement des tâches et des compétences de tous les professionnels de santé, qui ne peut être que global. Or le Gouvernement, qui refuse d’admettre la gravité de la situation, n’a pas de plan d’ensemble. Pire : au lieu de rassembler les professionnels de santé, de les organiser sur l’ensemble du territoire et de définir des priorités, il a multiplié les corporatismes en créant de nouveaux ordres, traitant infirmières, kinésithérapeutes, voire podologues, comme autant de clientèles à flatter. De cette politique de Gribouille, il résulte que nous n’avons plus de système de soins. Pendant un temps, une pléthore relative a masqué la réalité, mais la pénurie actuelle ainsi que le vieillissement de la population, qui renforce continûment la demande, font apparaître que notre système de soins, parce qu’il est morcelé, segmenté, qu’il subit la pression de l’industrie pharmaceutique et les effets néfastes d’exigences insuffisantes en matière de formation et de bonnes pratiques, est exsangue.

M. Christian Paul – Tout le problème est là.

M. Jean-Luc Préel – L’amendement 275 vise à réparer ce que les pharmaciens considéraient comme un oubli mais dont je constate que ce n’en était pas un. C’est d’autant plus regrettable qu’ils s’impliquent déjà fortement dans l’éducation à la santé et qu’ils souhaitent le faire davantage. Vous ne l’ignorez pas, Madame la ministre, vous qui connaissez parfaitement cette profession.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Certes…

M. Jean-Luc Préel – Ce serait pour eux un signal encourageant que de les inclure dans le nouveau dispositif.

Mme Catherine Lemorton – Je tiens à préciser que si la première convention entre les pharmaciens et l’assurance maladie a été signée il y a un an, c’est le gouvernement Jospin qui les a, le premier, aidés à se recentrer sur leur cœur de métier, la pharmacologie.

Les amendements 60 et 275, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

ART. 31

M. Jean-Luc Préel – Je déplore le sort fait à ces amendements.

L’article 31 institue, sur le mode expérimental, de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé. Même si le paiement à l’acte fonde la médecine libérale, tout le monde convient que ce système doit être revu car il est inflationniste. Des rémunérations forfaitaires existent déjà, pour les ADL et pour les astreintes mais elles sont en nombre très limité. Dans la plupart des pays, la rémunération des médecins est mixte et l’on peut fort bien envisager une rémunération forfaitaire pour les tâches administratives qui leur sont dévolues ou pour le suivi des maladies chroniques. Une telle évolution – progressive, comme le précise l’article – devrait concerner aussi les pharmaciens d’officine, qui veulent être reconnus comme des acteurs à part entière de la santé et qui souhaitent jouer un rôle accru dans la prévention et dans l’éducation à la santé. Toutefois, pour qu’elle soit acceptée ou, mieux, demandée par tous les professionnels de la santé, elle doit être précédée de discussions approfondies.

Mme Jacqueline Fraysse – Désormais la rémunération au forfait ne sera plus expérimentée par les caisses pour les seuls médecins conventionnés, mais par les missions régionales de santé pour tous les professionnels de santé. Les missions la leur proposeront sur le fondement d’une évaluation quantitative et qualitative. Le médecin référent était volontaire ; dans le nouveau système on le proposera au professionnel, mais en fonction de quels critères ? Si c’est par exemple de prescrire peu de médicaments, des médecins pourraient être tentés de ne pas accepter certains patients aux pathologies lourdes. Le système antérieur était bien meilleur : le médecin référent choisissait ; il sera choisi. Il ne prenait que des engagements de forme ; ne va-t-on pas, en quelque sorte, lire par-dessus son épaule lorsqu’il rédige son ordonnance, en fonction de considérations financières ? Le nouveau dispositif module le paiement à l’acte, ce qui est une bonne chose ; mais il est très en deça de celui qui existait.

Par ailleurs, nous avions déposé un amendement pour corriger une discrimination envers certains médecins étrangers qui souhaitent exercer en France. En effet, les titulaires du diplôme interuniversitaire de spécialité doivent passer des épreuves de connaissance du français avant de se présenter devant une commission de professionnels, alors que les médecins étrangers titulaires du certificat de spécialité clinique et thérapeutique vont directement devant la commission. Pourtant, le DIS est passé en France. Il serait donc légitime de supprimer cette discrimination, qui a d’ailleurs été qualifiée par la HALDE de discrimination fondée sur l’origine, elle est prohibée dans la fonction publique et les professions libérales. Je ne vois pas pourquoi cet amendement est tombé sous le coup de l’article 40 alors qu’il ne crée aucune dépense publique. Vous vous honoreriez à régler cette question, d’autant que ces médecins travaillent déjà dans nos hôpitaux, depuis très longtemps pour certains.

Mme Martine Billard – On veut, avec cet article, expérimenter des modes de rémunération novateurs. Mais il existait le médecin référent ; ce dispositif était utile et les patients étaient contents. Or on l’a supprimé sans donner de raison sérieuse.

Qu’on veuille de nouveau aller vers d’autres modes de rémunération que le strict paiement à l’acte, les députés Verts y ont toujours été favorables. Cela permet par exemple de renforcer la relation de confiance et le parcours de soins pour les malades en ALD. Pour les médecins, ce serait un moyen de s’assurer d’une rémunération constante. Cependant, le contenu de l’article reste relativement flou – ce paiement peut par exemple être un complément. Il nous faudra des précisions.

M. Jean-Marie Le Guen – Finalement, un certain nombre de nos collègues se sont bien amusés entre 2002 et 2004 à supprimer tous les systèmes innovants mis en place – par le gouvernement Jospin comme par la réforme Juppé – pour mieux contrôler les dépenses. Et voilà que vous essayez de remettre tout cela sur pied – avec une différence certes, pour l’assuré : c’est lui qui sera sanctionné si son médecin ne se conduit pas bien aux yeux de l’assurance maladie. Sinon, vous essayez de nouveau de freiner des comportements déviants, de façon modeste d’ailleurs. Mais s’il y a eu explosion des dépenses en 2004, c’est que vous aviez mis à bas tout ce qui avait été expérimenté auparavant, notamment avec la loi du 4 mars 2002.

M. Christian Paul – Nous abordons la question du désert médical. Cet article porte d’une part sur de nouveaux modes de rémunération des professionnels de santé – il faudra nous dire jusqu’où vous voulez aller – et d’autre part sur la permanence des soins.

Qu’entendez-vous par « modes alternatifs de rémunération » ? Nous pourrions voter cet article si vous nous convainquiez que ces mesures s’insèrent réellement dans une approche visant à mobiliser complètement l’offre de soins pour répondre aux inquiétudes des usagers, dans des zones rurales ou des quartiers périphériques. La mission que nous avions menée avec M. Colombier sur les urgences médicales posait ces questions, et une cinquantaine de propositions avaient été adoptées – à l’unanimité – début 2007. Ce matin, M. Copé nous reprochait, avec quelque véhémence, de ne pas avoir de propositions. Mais, nous en avons tout un catalogue – qu’il faudra hiérarchiser. Le mouvement des internes nous a d’ailleurs aidés. Puisque vous êtes conduite à proposer des états généraux de la santé sous la pression de la rue,…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé C’est moi qui ait fait la proposition !

M. Christian Paul – …sous la pression de la rue et en reculant sur les mesures maladroites prévues à l’article 33, examinez ces propositions, elles existent. Dans quel cadre envisagez-vous ces nouveaux modes de rémunération ? Des centres de santé, des associations, celui d’un hôpital local, comme Delphine Batho souhaite le faire dans les Deux-Sèvres ?

Pour ce qui est de la permanence des soins, en 2003, M. Mattei l’a rendue facultative sans contrepartie. Ce fut le point de départ de grandes difficultés.

Aucun système de régulation n’a été mis en place en contrepartie. Vous nous proposez aujourd’hui d’expérimenter de nouvelles formes d’organisation et de financement de la permanence des soins. Mais de quels outils disposez-vous pour cela ? Les bonnes intentions ne suffisent pas ! Nous attendons du Gouvernement de la France une vision claire et une volonté politique !

Mme Delphine Batho – Très bien !

Mme la Présidente – Je confirme l’excellence du rapport Colombier, qui a été voté à l’unanimité des membres de la mission.

M. Philippe Vitel – Merci, Monsieur Le Guen, de m’avoir permis de revivre la « belle époque » où je me partageais entre mon cabinet médical et mes responsabilités syndicales. Je me souviens avec émotion des neuf années où grâce à vous, les médecins n’ont pas vu leurs honoraires augmenter d’un centime. Ils vous en remercient encore !

M. Jean-Marie Le Guen – Juppé ! On voit en tout cas pourquoi vous avez été élu !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Il est touchant de voir M. Le Guen défendre avec ardeur la réforme d’Alain Juppé. Tout vient à point à qui sait attendre !

Revenons sur la philosophie de cet article. Nous voulons expérimenter de nouveaux modes de rémunération – et je note que cela fait l’unanimité sur vos bancs – qui viendront remplacer ou compléter le paiement à l’acte. Cette expérimentation pourra donc déroger aux dispositions en vigueur relatives aux tarifs, honoraires, rémunérations et frais accessoires. Nous voulons aussi conduire des expérimentations sur la permanence des soins, en fixant le montant et les modalités des financements des forfaits attribués aux médecins qui l’assurent. Les modalités de mise en œuvre sont renvoyées à un décret. Les expérimentations pourraient commencer à la mi-2008.

Chacun reconnaît l’intérêt de cette démarche. Les professionnels de santé libéraux sont aujourd’hui intégralement rémunérés à l’acte ou presque – le forfait pour les ALD représente moins de 5 % de la rémunération des généralistes. L’inadéquation du paiement à l’acte à certaines formes de prise en charge est dénoncée depuis longtemps. Les jeunes générations sont d’ailleurs en attente d’un autre type de rémunération. Tant mieux, car cette évolution des mentalités conditionne la réussite de notre démarche.

Les objectifs sont nombreux : libérer du temps médical, maîtriser les coûts, valoriser les démarches qualité, développer de nouvelles pratiques, la prévention et l’éducation thérapeutique, améliorer l’accès aux soins et la coordination.

Les expérimentations concerneront les soins primaires et seront conduites dans le cadre de l’organisation actuelle de notre système de soins. Elles concerneront en priorité les médecins généralistes, mais aussi quelques spécialistes et les professions paramédicales. Elle se dérouleront dans les cabinets de groupe et les centres de santé, sans exclure les cabinets d’exercice isolé. Nous veillerons particulièrement à éviter les effets pervers. Les expérimentations ne concerneront d’autre part que les médecins volontaires dans quatre ou cinq régions, et l’assurance maladie en sera partie prenante.

J’en viens aux expérimentations qui concernent la permanence des soins. Les rapports parlementaires, mais aussi ceux de l’IGAS et de l’IGA ou celui du Dr Grall, rédigé dans le cadre du Conseil général des établissements de santé, dressent un bilan contrasté de la permanence des soins. Malgré le triplement du montant de l’astreinte, la participation des médecins reste souvent aléatoire. L’enveloppe dédiée à la permanence des soins s’élevait pourtant à 370 millions d’euros en 2006. Bref, le dispositif est à la fois insuffisant et coûteux. Il nous faut donc améliorer la gouvernance du pilotage et du dispositif. L’expérimentation pourrait être conduite dans une douzaine de régions. Elle ne préjuge pas de la réforme de la permanence des soins.

Ces nouveaux modes de rémunération combineront ceux que vous connaissez : capitation, forfaits par pathologie, paiement à l’acte, objectifs individuels, voire une part de salariat.

Nous aurons évidemment des difficultés à vaincre : acceptation par les professionnels, calcul des forfaits, compréhension des patients. Cela exigera, au moins au départ, un pilotage local.

Mme Martine Billard – Je crains qu’avec cet article, il ne se passe pas grand-chose. L’amendement 189 propose donc de conduire l’expérimentation sur la seule substitution de nouveaux modes de rémunération au paiement à l’acte.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – La commission a repoussé cet amendement qui restreint par trop le champ de l’expérimentation. Je rappelle par ailleurs à M. Paul qu’un précédent PLFSS a fait de la permanence des soins une mission de service public.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Même avis. Mais la substitution n’est pas exclue du champ de l’expérimentation !

L'amendement 189, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 61 est rédactionnel.

L'amendement 61, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Martine Billard – Il est important de s’assurer que ces expérimentations ne conduiront pas à une réduction des remboursements et ne porteront pas atteinte au tiers payant. Tel est l’objet de l’amendement 190.

M. Philippe Vitel – Ayez confiance !

Mme Martine Billard – Sur ces sujets, la confiance ne va pas de soi !

M. Philippe Vitel – C’est ce qui nous sépare.

Mme Martine Billard – Nous avons bien vu ce matin, lorsque j’ai évoqué le problème des mammographies, que la confiance ne suffit pas toujours.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis défavorable. L’objectif de cet article n’est pas de modifier le remboursement des prestations, mais de répondre à certaines attentes des professionnels de santé.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Même avis.

M. Jean-Marie Le Guen – La question posée par cet amendement est parfaitement légitime. Comment cela se passera-t-il pour l’assuré lorsque le médecin ne sera plus payé à l’acte ?

Si les modes de rémunération évoluent, ce n’est pas simplement pour satisfaire aux desiderata du corps médical, mais aussi parce que cela présente des avantages du point de vue de la santé publique. Le paiement à l’acte pousse en effet à la prescription médicamenteuse, qui a des conséquences sur la santé publique. Cette évolution ne doit cependant pas se faire au détriment de l’assurance maladie et des patients.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Aucun souci : dans le cadre de cette expérimentation, le mode de rémunération autre que le paiement à l’acte est à la charge de la caisse.

M. Jean-Marie Le Guen – Et le malade, que paiera-t-il ?

M. Yves Bur, rapporteur – Rien ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Jean-Marie Le Guen – Le rapporteur nous dit qu’on ne payera rien ! Il vient de faire disparaître le ticket modérateur !

M. Jean-Marie Le Guen – Voilà une révélation !

Mme la Présidente – Le rapporteur devient de plus en plus révolutionnaire ! (Sourires)

Mme Martine Billard – Mme la ministre vient de dire que la rémunération supplémentaire serait prise en charge par les caisses. Ce qu’il est important de préciser, c’est la part qui restera à la charge du patient et comment les choses se passeront en pratique.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Il y a, dans cette démarche expérimentale – qui ne concernera à ce stade que quelques régions –, plusieurs possibilités de panachage des rémunérations. La part forfaitaire – relative, par exemple, à des soins de prévention – pourra être payée directement par les caisses aux praticiens ; les actes habituels resteront sous le régime du paiement à l’acte. Il s’agit, j’y insiste, d’une expérimentation dans laquelle tout ne doit pas être figé, et nous ferons en sorte qu’il n’y ait aucun risque pour le patient d’être moins bien remboursé.

M. Jean-Marie Le Guen – Soyez sûre, Madame la ministre, que nous ne vous faisons aucun procès d’intention. Nous voulons simplement comprendre comment cela va se passer et ce que les patients auront à sortir de leur poche. Manifestement, ni vous ni vos services n’y ont pensé et nous ne pouvons pas nous empêcher de trouver cela un peu préoccupant (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Dans un geste radical, MM. les rapporteurs suggèrent que le malade ne paie plus rien : bravo, c’est la médecine gratuite pour tous ! (Rires) Il est impératif que la LFSS précise les choses.

M. Jean-Luc Préel – Manifestement, nous manquons d’explications sur le fonctionnement du dispositif. Tout à l’heure – mais peut-être n’ai-je pas été écouté très attentivement (Rires sur les bancs du groupe UMP), j’ai expliqué qu’il serait sans doute possible d’envisager une rémunération forfaitaire pour les actes administratifs – comme le suivi du dossier médical – sous réserve que le patient soit inscrit chez le médecin (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Jean-Marie Le Guen – Allons bon, la capitation maintenant. Encore deux heures et c’est le kolkhoze médical ! (Rires)

M. Jean-Luc Préel – M. Le Guen est un peu schizophrène : lorsqu’il préside, rien ne va jamais assez vite ; lorsqu’il siège sur les bancs de son groupe, il ralentit les débats !

Mme la Présidente - C’est un nouveau Janus ! (Sourires)

M. Jean-Luc Préel – La constatation que nous faisons tous, c’est que le système de rémunération exclusivement fondé sur le paiement à l’acte n’est pas satisfaisant. Au reste, nombre de pays européens ont déjà adopté des systèmes mixtes et l’on sait bien que la capitation exclusive n’est pas un gage de disponibilité du praticien…

La rémunération mixte existe déjà pour les ALD et pourrait être instaurée sans difficulté pour les maladies chroniques. Mais il faut être bien conscient qu’aller plus loin dans l’expérimentation d’un système mixte va profondément bouleverser le système actuel. Il convient notamment de réfléchir au rôle des complémentaires dans cette nouvelle organisation.

En tout état de cause, le sujet mérite d’être approfondi, et cet article pourrait être un peu prématuré.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santéPrécisons les choses : cet article ouvre une possibilité de déroger aux règles relatives aux honoraires des professionnels de santé, et le dispositif afférent est extrêmement complexe à organiser…

Mme Marisol Touraine – Nous nous en apercevons.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Nous en sommes parfaitement conscients, et nous sommes tout aussi convaincus de la nécessité de consulter l’ensemble de nos partenaires habituels – organismes complémentaires, syndicats de médecins, partenaires conventionnels – pour que les choses démarrent sur de bonnes bases, avec des médecins volontaires. Une fois le dispositif lancé dans quelques régions pilotes, nous approfondirons la concertation pour l’améliorer au jour le jour, en fonction des difficultés rencontrées. Je m’efforce de vous apporter la réponse la plus pragmatique possible. Admettez que tout ne soit pas bouclé d’avance (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

L'amendement 190, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur, rapporteur L’amendement 62 vise à ce que les expérimentations sur de nouveaux modes de rémunération ne puissent être lancées qu’après avoir recueilli l’avis des partenaires conventionnels.

J’en profite pour demander une précision à Mme la ministre : ne craignez-vous pas que l’initiative de M. Darcos de supprimer l’école le samedi matin ne pose le problème de la permanence des soins le samedi matin – alors que la question du samedi après-midi est à peine tranchée –, voire dès le vendredi soir, à la veille des nouveaux longs week-ends ? (Rires sur les bancs du groupe SRC)

M. Jean-Marie Rolland – Mon amendement 232 a le même objectif que le précédent, puisqu’il oblige à consulter les partenaires conventionnels.

M. Jean-Luc Préel – Mon amendement 272, va un peu plus loin, il exige l’accord des partenaires conventionnels pour lancer les expérimentations.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – La commission a adopté l’amendement 62 – au profit duquel elle a repoussé les amendements 232 et 272 –, mais l’amendement 64 rectifié, à venir, traite du même problème.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Avis défavorable sur les amendements 62, 232 et 272.

Mme Marisol Touraine – Le débat se prolonge, et, à force de siéger de ce côté-ci de l’hémicycle au banc des rapporteurs, M. Bur prend de bons réflexes… (Sourires)

M. Yves Bur, rapporteur – Rassurez-vous, je n’ai pas de problème pour me situer !

Mme Marisol Touraine – Votre réponse, Madame la ministre, ne peut nous satisfaire. Ce qu’il nous paraît légitime de préciser, c’est ce que le malade aura à sortir de sa poche et vous ne pouvez pas nous dire : « on verra bien, puisque nous sommes dans le cadre d’une expérimentation ». Nous sommes dans un domaine qui relève, sans ambiguïté possible, de la loi, et les règles doivent être les mêmes partout sur le territoire…

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Le propre d’une expérimentation n’est-il pas de permettre d’appliquer un régime différencié dans quelques régions pilotes ?

Mme Marisol Touraine – La loi doit dire de la manière la plus explicite ce qui restera à la charge de l’assuré dans les différentes hypothèses et ce que cela change concrètement pour lui. Il faut apporter une réponse claire à cette question centrale, sinon le dispositif sera invalidé, car inapplicable.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Une solution serait pour moi de vous indiquer très précisément et autoritairement comment les choses doivent se passer. J’ai évidemment quelques idées sur la question.

M. Christian Paul – Livrez-les nous !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Non, je ne le veux pas ! Ce que je veux, c’est une démarche associant les différents partenaires ; nous n’avons pas la vérité révélée.

La loi va ouvrir la possibilité d’expérimentations, les modalités seront définies par décret. Celui-ci sera bien entendu soumis à la concertation, en particulier avec les partenaires conventionnels. J’indique d’ailleurs dès à présent mon avis favorable à l’amendement 64 rectifié, qui précise ce point. En revanche, soumettre l’ensemble des expérimentations à l’avis des partenaires conventionnels alourdirait à l’excès la procédure, et j’invite la commission à retirer son amendement à ce sujet.

L'amendement 62 est retiré.

L'amendement 232, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 272.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission  Je n’ai pas très bien compris la position de Mme Touraine : nous avons adopté et constitutionnalisé le principe d’expérimentation ; nous savons très bien les limites de la loi uniforme et la nécessité d’une adaptation progressive.

M. Christian Paul – Nous soutenons le droit à l’expérimentation – que nous avons constitutionnalisé pour les collectivités locales, non pour l’assurance maladie. Depuis quatre ans, il aurait été souhaitable d’y recourir en matière de permanence des soins, alors qu’on a supprimé celle-ci sans le remplacer, si ce n’est par un palliatif.

Le groupe socialiste était plutôt disposé à voter cet article, mais quand on lance une expérimentation, il faut dire sur quels principes, sauf à ouvrir la boîte de Pandore. Or, vous avez seulement distingué, Madame la ministre, m’a-t-il semblé, entre les actes préventifs, qui seraient forfaitisés, et la médecine curative, pour laquelle il y aurait un paiement à l’acte. Vraiment, ce débat sur la nouvelle organisation du système de santé se déroule dans l’improvisation la plus totale ! Venant d’une majorité qui a déjà eu le pouvoir pendant cinq ans, et d’un gouvernement qui prétend avoir des idées, ce vide sidéral est grave.

Mme Marisol Touraine – Nous ne remettons pas en cause le principe du droit à l’expérimentation, mais l’article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ». Tant le Conseil d’État que le Conseil constitutionnel interprètent cette disposition comme signifiant que tout ce qui a trait aux cotisations et aux actes de rémunération liés à la sécurité sociale sont du ressort de la loi.

L’expérimentation, c’est le refus de la loi uniforme, et nous acceptons que la loi permette des pratiques différenciées ; en revanche, dans le cadre de ces pratiques différenciées, il va de soi que le principe régissant la rémunération et le paiement doit être le même pour tous.

M. Jean-Marie Le Guen – Sans vouloir aucunement retarder le débat, j’appelle l’attention sur le fait que ces dispositions pourraient être censurées par le Conseil constitutionnel. Si le mode de rémunération des médecins ne relève pas forcément de la loi et peut faire l’objet d’expérimentations, le mode de paiement en relève et doit être identique pour tous les assurés : la loi ne permet pas qu’ici les actes soient gratuits, et que là ils soient payants (Quelques exclamations sur les bancs du groupe UMP).

Vous vous focalisez sur les discussions avec les organisations professionnelles, alors qu’il faut avant tout remettre sur ses pieds la sécurité sociale, qui est d’abord là pour servir les assurés ! Ce qui est constitutionnel, c’est le droit des assurés, ce n’est pas le droit des professions, aussi respectables soient-elles.

M. Christian Paul – Très bien.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – La jurisprudence constante du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel admet justement que la démarche expérimentale vise à légitimer des différences.

Mme Martine Billard – Vous vous placez du point de vue des personnels de santé, mais les malades et leurs associations auraient également besoin de savoir ce qui les attend ! Est-ce que, par exemple, le tiers-payant sera possible ?

Mme Jacqueline Fraysse – L’amendement 366 est défendu.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – La commission avait donné un avis défavorable, mais je suivrai l’avis du Gouvernement.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Favorable.

M. Jean-Pierre Door , rapporteur Je demande à la majorité de suivre Mme la ministre.

L'amendement 366, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur L’amendement 63 précise que les projets d’expérimentation des missions régionales de santé sont transmis au collège des directeurs de l’UNCAM, lequel doit veiller à ce que les rémunérations soient compatibles avec le respect des objectifs de dépenses votés par le Parlement.

Mme la Ministre - Avis défavorable car cela ralentirait le processus.

M. Jean-Marie Le Guen – Monsieur Vitel, les syndicats médicaux ne vont pas être contents !

L'amendement 63, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur L’amendement 64 rectifié a déjà été présenté.

L'amendement 64 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Marisol Touraine – L’amendement 421 est défendu.

L'amendement 421, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 65 est rédactionnel.

L'amendement 65, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Marie Le Guen – L’amendement 422 rectifié est défendu.

L'amendement 422 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Je retire l’amendement 66 au bénéfice du 70.

M. Jean-Marie Rolland – L’amendement 233 est défendu.

L'amendement 233, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel – L’amendement 273 est défendu.

L'amendement 273, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jérôme Cahuzac – Les syndicats vont être contents !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Afin d’éviter des disparités trop importantes et de préserver les conditions d’accès des patients à la permanence des soins, nous proposons par l’amendement 67 d’inscrire, dans un cadre défini au niveau national par les partenaires conventionnels, le transfert au FIQCS des crédits destinés à la rémunération des professionnels de santé libéraux participant à la permanence des soins.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Avis défavorable. Mais la consultation du Conseil national de l’Ordre des médecins et des organisations syndicales sur le décret qui encadrera les expérimentations – en modulant éventuellement la rémunération des médecins afin de préserver, comme vous le souhaitez, l’accès aux soins – répondra en partie à votre préoccupation. Nous y reviendrons à propos de l’amendement 70. Néanmoins, les expérimentations doivent permettre de s’affranchir partiellement de la rigidité de la démarche conventionnelle et d’évaluer la pertinence d’une gestion locale avant d’instituer les agences régionales de santé.

M. Jean-Marie Le Guen – Mme la ministre a fait l’apologie du rapport Grall sur la permanence des soins ; en la matière, l’expérimentation régionale est une bonne idée, mais doit préparer une égalisation nationale.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Cela viendra !

M. Jean-Marie Le Guen – En attendant, le risque d’inégalités selon les praticiens et selon les régions est grand. Sans vision politique claire, comment s’orienter dans le maquis inextricable des modes de financement ?

L'amendement 67, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 68 est défendu.

L'amendement 68, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 69 est défendu.

L'amendement 69, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 70 vise à permettre de déterminer par décret, après avis des organisations syndicales représentant les médecins et du Conseil national de l’Ordre des médecins, les modalités de mise en œuvre des expérimentations.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Le sous-amendement 663 du Gouvernement vise à remplacer les mots « représentant les médecins » par les mots « représentatives des médecins ». À cette réserve près, le Gouvernement est favorable à l’amendement 70.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis favorable au sous-amendement 663.

M. Jean-Marie Le Guen – Je dépose un sous-amendement 674 visant à supprimer du texte de l’amendement 70 les mots « et du Conseil national de l’Ordre des médecins », car le Conseil de l’Ordre a renoncé à la responsabilité morale de la permanence des soins après la défaite aux élections internes de son ancien président, partisan, au nom de la déontologie médicale, d’une participation au dispositif. Étant donné ce retrait, qui explique en grande partie le désordre actuel, il serait scandaleux de consulter le Conseil de l’Ordre.

M. Yves Bur, rapporteur – Il a raison.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis défavorable. On ne saurait exclure le Conseil national de l’Ordre dès lors que l’on sollicite l’avis des organisations syndicales sur le décret.

M. Jean-Marie Le Guen – Il s’est lui-même exclu !

M. Jean-Pierre Door – En outre, la permanence des soins est une mission de service public.

M. Christian Paul – Que M. Mattéi a rendu facultative…

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – On ne peut pas ne pas tenir compte de l’existence du Conseil de l’Ordre !

Mme Marisol Touraine – Ce n’est pas un argument !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Nous en reparlerons quand vous le supprimerez…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Sur le sous-amendement 674, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC).

Le sous-amendement 674, mis aux voix, est adopté.

Le sous-amendement 663, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 70 sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – L’amendement 71 est défendu.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je vous suggère de le retirer. L’amendement 70 fournit un moyen bien plus approprié d’associer les professionnels au dispositif.

L'amendement 71 est retiré.

M. Jean-Marie Le Guen – L’amendement 423 est défendu.

L'amendement 423, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur, rapporteur – Afin de permettre aux médecins appartenant à des groupes de pairs de bénéficier des rémunérations fondées sur le respect d’objectifs spécifiques et négociés que prévoient les contrats individuels, l’amendement 72 propose de les intégrer également aux contrats unissant les réseaux professionnels de santé et les Unions régionales des caisses d’assurance maladie.

M. Philippe Vitel – Très bien.

L'amendement 72, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Cahuzac – L’amendement 447 est défendu.

L'amendement 447, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marisol Touraine – Au terme de ce long débat, de graves incertitudes subsistent quant au mode de rémunération des professionnels et de paiement des soins par les patients. Le groupe SRC ne saurait donc voter l’article 31, comme il en avait initialement l’intention. Il nous semble qu’un fort risque d’inconstitutionnalité entache à présent cet article, et nous nous abstiendrons.

L'article 31 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 31

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Environ 20 % des feuilles de soins ne sont pas télétransmises aujourd’hui, et le traitement des feuilles papier occasionne des frais auxquels il serait normal que participent ceux qui en sont la cause. L’amendement 608 propose que les partenaires conventionnels déterminent la contribution forfaitaire à la charge des praticiens utilisant encore la feuille de soins papier. Il dispose que les partenaires ont un délai de douze mois pour prendre toutes dispositions nécessaires afin que la télétransmission soit effective sur tout le territoire et pour tout le monde.

M. Yves Bur, rapporteur – J’avais présenté en commission un amendement presque identique, qui avait été d’abord adopté, mais qui a pu être mal compris. Il ne s’agit pas de faire payer aux médecins les cas où la télétransmission est impossible, soit parce que le patient a oublié sa carte Vitale, soit parce que le médecin consulte à domicile.

On constate, depuis plusieurs années, que la télétransmission ne progresse plus, et cela n’est pas admissible car la feuille papier a un coût pour l’assurance maladie. Il est donc opportun de confier aux partenaires sociaux la responsabilité de trouver les moyens propres à encourager les praticiens qui ne télétransmettent pas encore, à le faire. Il va de soi qu’on ne sommera pas un praticien proche de la retraite, mais il appartiendra aux partenaires de rappeler que le conventionnement implique aussi des devoirs, et que la télétransmission en fait partie. L’informatique doit être un outil au service d’une bonne médecine.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Excellent amendement.

L'amendement 608, mis aux voix, est adopté et devient article additionnel.

M. Jean-Marie Le Guen – Aujourd’hui, 20 % des assurés engendrent 60 % des dépenses d’assurance maladie, 12 à 13 % étant atteints d’affections de longue durée. Des travaux ont été réalisés dans de nombreux pays et, en France, l’IGAS a récemment publié un rapport sur l’accompagnement du malade, domaine dans lequel nous sommes très en retard.

À rebours d’une approche culpabilisatrice et punitive, nous devons aider les malades à évoluer dans leurs parcours de soins et de prévention ; par exemple, il faut renforcer la prévention tertiaire, qui empêche l’aggravation de la maladie. Cette réflexion doit être menée par la Haute autorité de santé, qui commence seulement à le faire. Il faut un véritable parcours de soins pour les maladies chroniques. Tel est l’objet de l’amendement 448.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Le protocole de soins établi entre le médecin conseil et le médecin traitant s’appuie sur les recommandations de la Haute autorité de santé. Il est clair que des progrès restent à faire en vue d’améliorer les soins et la coordination pour les affections de longue durée, mais je ne crois pas que le dispositif prévu par l’amendement soit le meilleur. Avis défavorable.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je partage le souci de M. Le Guen d’assurer une meilleure prise en charge des patients atteints de maladies chroniques, qu’ils soient en ALD ou non, d’ailleurs. C’était une priorité du plan de mon prédécesseur pour l’amélioration de la qualité de vie de ces patients. Des expérimentations vont être menées par les caisses d’assurance maladie dans le cadre des nouvelles missions qui leur ont été confiées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. La Mutualité sociale agricole a généralisé son expérimentation d’éducation thérapeutique pour les malades atteints de maladies cardio-vasculaires. La CNAVTS expérimentera, début 2008, des programmes d’accompagnement des malades diabétiques. Enfin, la Haute autorité de santé et l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé publieront conjointement des recommandations concernant l’éducation thérapeutique. Le Gouvernement appuiera toutes ces actions. Mais l’amendement me paraît prématuré ; laissons ces expérimentations se dérouler pour que nous puissions les évaluer, avant de songer à les généraliser.

L'amendement 448, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Christian Paul – Rappel au Règlement sur le fondement de l’article 58-1. Dans quelques instants, nous allons débattre des articles 32 et 33, concernant la démographie médicale, qui est au cœur du débat social depuis plusieurs semaines, avec la grève de dizaines de milliers d’étudiants en médecine et d’internes.

Or, nous n’avons reçu les amendements à ces articles qu’il y a une heure à peine. Monsieur le rapporteur, si vous aviez à cœur les droits du Parlement, c’est vous qui auriez d’ailleurs dû faire ce rappel au Règlement. Pour que nous puissions examiner les amendements, je demande, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance d’une demi-heure. Le Gouvernement, reculant sur ces articles, et en particulier sur le déconventionnement des médecins en zone excédentaire, les réécrit complètement ; c’est l’improvisation la plus totale !

M. Roland Muzeau – Rappel au Règlement, pour m’associer à la demande du groupe socialiste, et ajouter qu’il serait souhaitable que le président de la commission et les rapporteurs nous disent quelle tournure prendra la suite de nos travaux. Plusieurs articles à venir donneront lieu à des échanges fournis, et il serait inadmissible que nos travaux soient précipités jusqu’à leur fin pour cause de lassitude, à une heure tardive de la nuit. J’aimerais savoir sur quel article nous allons reprendre la séance de ce soir, afin que nous puissions nous organiser.

La séance, suspendue à 17 heures 45, est reprise à 18 heures 15.

ART. 32

M. Jean-Luc Préel – En prévoyant des modalités de conventionnement en fonction de la densité de la zone d’exercice, cet article et l’article suivant remettent en cause la liberté d’installation des professionnels de santé. L’avenir professionnel d’un médecin ou d’une infirmière qui, lors de son installation, ne pourra être conventionné, paraît bien sombre, sauf notoriété exceptionnelle. Il est vrai que l’inégalité de la répartition des professionnels de santé sur le territoire pose un problème de fond, que de nombreux médecins ne parviennent pas à trouver de remplaçant et que de très nombreux malades ne trouvent plus dans leur canton de médecins installés en secteur 1.

Les causes de cette situation sont multiples et bien connues. On citera le changement de mentalité des professionnels de santé, qui veulent vivre une vie de famille et dont l’exercice n’est plus celui de leurs prédécesseurs, d’autant que la profession s’est largement féminisée. Par ailleurs, les jeunes médecins préfèrent exercer en cabinet de groupe. Ces évolutions n’ont pas été anticipées, et les étudiants en médecine ne choisissent pas spontanément de devenir généralistes. Il en résulte un déficit d’environ 500 généralistes, alors que la réforme de 2004 avait donné au médecin traitant un rôle pivot.

Dans ce contexte, il importe au premier chef de ne pas décourager les installations. Des mesures incitatives ont été adoptées récemment, qui n’ont pas encore été évaluées. Qu’elles le soient avant que l’on en vienne à la coercition !

Pour sa part, le groupe Nouveau centre propose un numerus clausus régional par spécialité ; la mise en œuvre effective du stage dans un cabinet de médecine générale ; l’attribution de bourses dont la contrepartie sera l’engagement de s’installer dans une zone sous-médicalisée ; la création de maisons de santé cantonales ; à terme, une rémunération différente selon le lieu d’installation, un bonus étant accordé aux professionnels de santé qui s’installent dans une zone sous-médicalisée, un éventuel malus imposé à ceux qui posent leur plaque dans un canton en sureffectif. Ces mesures sont de nature à régler le grave problème que nous connaissons. Elles devraient être appliquées et évaluées pendant une période suffisante avant que l’on passe à un dispositif coercitif.

Mme Delphine Batho – Le Gouvernement mesure-t-il exactement la gravité de la crise ? Nous n’en sommes pas persuadés. Je suis élue d’une circonscription rurale qui compte, en moyenne, 0,9 médecin pour mille habitants, et la situation est encore pire dans certains cantons où deux médecins venant de déposer leurs plaques, on ne compte plus qu’un praticien libéral à mi-temps. De surcroît, la moyenne d’âge des médecins en exercice dépasse les 55 ans. Ces chiffres traduisent un problème majeur de santé publique, d’autant plus dramatique que la population vieillissant, ses besoins évoluent.

« On va voir ce qu’on va voir », avait dit en substance le candidat Sarkozy. On a vu : à cette crise, vous avez apporté les plus mauvaises réponses possibles. Tout l’enjeu est de revaloriser la médecine générale, certainement pas de désigner les internes comme boucs émissaires, dans une situation dont ils ne sont pas responsables. La pénurie actuelle entraîne, de plus, un surcoût considérable pour l’assurance maladie, car l’absence de médecins de garde, la nuit principalement, conduit à la multiplication des interventions des services d’urgence et des pompiers.

La solution que vous aviez choisie était mauvaise. Certes, la mobilisation des internes vous a conduite, Madame la ministre, à proposer des amendements et à annoncer la convocation d’états généraux de la santé – mais c’est par là qu’il aurait fallu commencer. Le groupe socialiste est disposé à accompagner certains projets, et nous avons proposé l’ouverture de centres de première urgence et de centres pluridisciplinaires. Mais nous insistons pour que ces états généraux ne soient pas réservés aux seuls professionnels de la santé : il faut les ouvrir à tous les usagers du service de santé et aux élus locaux. Parce que cette carte doit être jouée, nous maintiendrons nos amendements de suppression des articles 32 et 33.

M. Christian Paul – L’organisation de l’offre de soins est, avec le défi écologique, le grand sujet politique de la législature. Alors que nous avons, parfois dans l’indifférence, tiré plusieurs fois la sonnette d’alarme, l’angoisse monte dans le pays. C’est que la désertification n’épargne aucune région – même pas l’Ile-de-France –, ni la médecine générale, ni les spécialités, ni la médecine ambulatoire, ni les centres hospitaliers. À ce sujet, votre politique hasardeuse de fermeture de services contribue à aggraver la crise, car chaque fois qu’un service hospitalier ferme, c’est le désert sanitaire qui gagne, de nouveaux médecins ne venant plus s’installer dans les villes concernées. Ce réformisme maladroit traduit l’impuissance publique, et la solution retenue – le refus de conventionnement – est une erreur stratégique. C’est pourquoi nous proposerons la suppression des articles 32 et 33.

La création des maisons de santé est généralement due à l’initiative locale, de professionnels ou d’élus. Dans le désert médical où nous sommes désormais, il faut qu’elle devienne l’objet d’une politique nationale. Et savez-vous qu’une commune qui finance une maison de santé paye la TVA à 19,6 % et ne peut la récupérer, comme s’il s’agissait de locaux commerciaux ? Il y a peut-être quelque chose à faire sur ce point dans le cadre du budget.

Rappelons enfin que, si la liberté d’installation est un élément important dans l’organisation de l’offre de soins, le principe qui a valeur constitutionnelle, c’est le droit à la santé. Dans les années à venir, il faudra donc, après avoir discuté longuement avec les professionnels, oser reconnaître que la liberté d’installation ne peut plus avoir le même sens que celui qu’elle avait avant que ne se forme ce désert médical. Pour cela, il faudra du courage politique.

Mme Marisol Touraine – Madame la ministre, vous avez donné le sentiment de découvrir une situation qui pourtant ne fait que s’aggraver au fil du temps. C’est du moins la seule explication plausible de votre décision de légiférer d’un coup d’un seul, de façon autoritaire et arbitraire, en proposant le type même de la fausse bonne solution. Pour lutter contre le désert médical, il faudrait encourager les médecins à s’installer ici, les dissuader de s’installer là. En réalité, les expériences étrangères montrent bien que ce qui est en jeu, c’est l’avenir de la médecine ambulatoire. Nous ne nous retrouvons donc pas dans votre projet. Il faut de vraies réformes de structures une évolution profonde des pratiques médicales, et non de simples ajustements à la marge.

Différentes pistes sont envisagées. En particulier, vous préparez des états généraux de la santé. Ceux-ci ne doivent pas réunir seulement les professionnels, mais tous les acteurs locaux et les forces vives du pays, car ce qui est en jeu est la capacité de tous à accéder aux soins. Cela suppose aussi des propositions sur les études médicales ou sur la création de maisons de santé pluridisciplinaires. S’agissant de ces dernières par exemple, si vous voulez vraiment en doter les territoires ruraux mais aussi les quartiers où l’accès à la santé pose problème, n’en laissez pas la charge aux collectivités locales, faites la assumer à 50 % par l’État.

Nous regrettons que, face à un des défis les plus urgents de notre société, vous ayez d’abord tardé à réagir, puis que vous l’ayez fait dans la précipitation, et qu’enfin vous ayez biaisé.

M. Jérôme Cahuzac – Autant que les franchises, vos articles 32 et 33 ont soulevé l’émotion, avec ce projet de réglementer l’installation de professionnels dont la liberté de s’installer était à peu près tout ce qui leur restait de « libéral ». Cette liberté était une tradition, elle faisait consensus ici même. Vous avez décidé de rompre avec cette tradition et ce consensus d’une façon à la fois prématurée, car aucun débat préalable n’a eu lieu, de façon surprenante aussi car aucun candidat n’avait évoqué la mesure, et de façon injuste enfin, car tout le poids de la réforme porterait sur les jeunes tandis que les anciens bénéficieraient d’une sorte de rente de situation. C’est cette injustice qui a poussé les plus jeunes à réagir, et ils la vivent de façon d’autant plus douloureuse qu’ils constatent que les promesses qui ont été faites, sur les stock options ou les retraites dorées par exemple, on s’est empressé cet été de ne pas les tenir. Ils ont aussi le sentiment d’être la génération sacrifiée par rapport à celle qui précède et à celle qui suit, puisqu’ils ont subi le numerus clausus à son plus fort, en 1996 – nous avons eu tort de ne commencer à le desserrer qu’en 1998 –, époque où l’on fermait aussi des écoles d’infirmières pour limiter le nombre de professionnels. Et voilà qu’après avoir eu à franchir des obstacles à l’entrée, on leur en oppose de nouveaux à la sortie !

On comprend donc leur révolte et leur volonté de vous faire abandonner ce projet. Mais l’abandonnez-vous vraiment ? Si le produit de l’accord que vous avez passé avec eux, ce sont ces amendements à l’article 33, dont nous avons eu connaissance il y a deux heures, j’en doute. Ce n’est ni loyal ni honnête à leur égard. Vous ne reculez pas, vous biaisez et, derrière d’autres mots, subsiste la même réalité.

Sur les états généraux, nous vous suivrons. Mais si vous introduisez bien le mot « incitatif », prévoir des mesures « notamment incitatives » n’exclut pas qu’il y en ait aussi de coercitives, et écrire que ces mesures seront « définies après concertation » n’est pas la même chose que s’obliger à une négociation débouchant sur un accord. Vous n’abandonnez donc pas la philosophie coercitive de votre premier projet, vous la masquez simplement derrière des mots qui ne vous contraignent en rien. Les engagements que vous prenez seront donc sans conséquence (Mouvements d’impatience sur les bancs du groupe UMP).

Mme la Présidente - Il faut conclure.

M. Jérôme Cahuzac – Si vous voulez vraiment prouver votre honnêteté envers les jeunes générations, vous devez retirer ces articles et vous engager à en soumettre une nouvelle version au Parlement après les états généraux, auxquels doivent naturellement être conviés ces jeunes professionnels.

Mme la Présidente – Je considère que cette intervention vaut également pour l’article 33.

Mme Jacqueline Fraysse – J’évoquerai pour ma part la crise de la profession infirmière, qui résulte de plusieurs facteurs. D’abord, ce métier exige une vraie formation et un fort investissement personnel. Il devrait donc être reconnu et rémunéré comme tel. Ce n'est pas le cas, puisqu’une infirmière hospitalière de 1er échelon gagne 1 363,32 euros à la sortie de ses études et 2 105,15 euros en fin de carrière. Par ailleurs, le diplôme, obtenu après trois ans et demi de formation post-bac, n'est pas reconnu comme un diplôme bac + 3, ce que les infirmières réclament pourtant depuis 1988. Elles demandent également – sans succès jusqu’à présent – l’intégration de leurs études dans le cursus européen Licence-Master-Doctorat.

Nous avons eu l’occasion de discuter de cette intégration des études d'infirmière et de sage-femme dans le cursus LMD en juillet, lors de l'examen du projet de loi relatif aux libertés des universités. Aucun des deux amendements qui avaient été déposés en ce sens n’a malheureusement été adopté. Les députés de la majorité se sont contentés de la création d'une commission d’enquête sur le sujet et de la promesse que vous viendriez dès le lendemain, Madame la ministre, prendre des engagements solennels sur cette intégration devant l'Assemblée nationale. Mais c’est finalement Mme Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui nous a transmis de votre part un message promettant l'organisation d'une concertation dès septembre. Où en est-on ?

La mise en place de ce cursus LMD pour les filières paramédicales et les sages-femmes est en fait engagée depuis le 1er décembre 2006. En février dernier, votre prédécesseur m’assurait, en réponse à une question écrite, qu'un comité de pilotage avait été créé pour travailler « à la rénovation des programmes de formation des différents professionnels de santé et permettre leur reconnaissance dans le dispositif européen LMD ». Le refus du Gouvernement a donc fait l’effet d’une douche froide pour ces professions.

Je vous pose donc à nouveau deux questions. L’intégration des infirmières et des sages-femmes dans le cursus LMD est-elle toujours d'actualité ? Si oui, quel en est le calendrier précis ? Et ne me parlez pas d’horizon : le propre de celui-ci est de s’éloigner à mesure qu’on avance !

M. Jean-Claude Viollet – Notre pays manque de médecins dans les territoires ruraux, et en manquera d’ici peu dans les zones urbaines. Le départ à la retraite des médecins aujourd’hui en exercice et la faiblesse des effectifs de jeunes médecins conduiront en effet inévitablement à une amputation de l'offre de soins. Nous sommes tous d’accord sur ce constat. Vous avez vous-même revu votre texte, comprenant que votre proposition initiale ne répondait pas à l’enjeu. Il faut ouvrir d’urgence une réflexion d’ensemble pour définir et appliquer, dans le cadre d’une politique d’aménagement et de développement durable de nos territoires, une politique globale de santé publique et pour organiser de véritables réseaux de soins sur des territoires de santé pertinents. Cela passe par un diagnostic partagé par l’État, les organismes en charge de la protection sociale, les collectivités territoriales, les professionnels de santé et les usagers, et cela suppose la recherche en commun de solutions, en s’aidant d'un recueil des bonnes pratiques.

Il est essentiel que les jeunes praticiens soient associés à ces travaux, car ce sont eux qui auront à faire vivre ces réseaux de soins. Mais l’État doit aussi assumer ses responsabilités en adaptant le numerus clausus, en prévoyant des stages de médecine générale chez des praticiens libéraux, dès l’externat, c'est-à-dire avant le choix de la spécialité, et en créant une vraie filière de médecine générale. Il doit aussi garantir la présence de services publics, notamment de santé, sur l'ensemble du territoire. Un certain nombre de parlementaires ont engagé une réflexion sur les hôpitaux de proximité. Il nous faut l’approfondir, en maintenant au cœur de notre projet le développement humain. Cette démarche pourrait être facilitée par l'inscription des professionnels libéraux dans la cartographie des SROS, afin de vérifier la pertinence des réseaux de soins sur chacun des territoires de santé, en redéfinissant le rôle de chacun des acteurs de soins, en réorganisant le transport médical, en développant la télémédecine ou en soutenant la création de maisons de santé de proximité. Cette démarche s'enrichirait encore d'une gestion prévisionnelle des carrières médicales, avec un guichet régional de gestion et la création dans chaque région de contrats formation installation – avec l’attribution de bourses à ceux qui accepteraient d’exercer quelques temps dans les zones déficitaires. Nombre de régions et de départements – dont le mien – se sont déjà engagés dans cette démarche avec le Conseil de l’Ordre.

Cette réflexion appelle des états généraux de la santé. Ce n’est qu’après leur réunion que nous pourrons adopter les mesures utiles pour garantir l’égalité d’accès aux soins et donner à nouveau à nos praticiens l’envie d’exercer sur l’ensemble de notre territoire. Dans cette attente, la sagesse voudrait que vous retiriez ces articles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Jean-Marie Le Guen – Je ne suis pas sûr que nous ayons tous pris la mesure de la crise à laquelle nous allons être confrontés. Nous savons qu’il y a un problème de démographie médicale et un problème de répartition sur le territoire. Mais cela va bien au-delà. C’est la médecine générale qui est en crise. Cette médecine de premier recours est dévalorisée, surtout depuis la dernière convention. Son exercice est confronté à de nouvelles difficultés : exigences des patients, évolution des maladies avec une part croissante des maladies chroniques… Longtemps, nous avons considéré que nous avions le meilleur système de santé au monde. Nous avons en effet un bon système d’assurance maladie et des professionnels bien formés. Mais aujourd’hui, tous les clignotants sont au rouge. Le Gouvernement s’est alors tout naturellement tourné vers les jeunes. Mais les jeunes générations n’acceptent pas d’être les boucs émissaires d’un système qui ne fonctionne plus. La médecine libérale traditionnelle, celle de la charte de 1924, est remise en cause. Certains de ses principes sont toujours actuels : indépendance du médecin, libre choix du malade. D’autres principes, comme le paiement à l’acte, méritent par contre d’être revus.

Une prise de conscience s’impose d’autant plus que la campagne présidentielle est – tous candidats confondus – passée à côté du problème de la santé, pourtant majeur pour le prochain quinquennat. Que de temps et d’argent perdus ! Alors, de grâce, ne reprenez pas les vieilles recettes pour tenter de refonder le système.

Comme l’a suggéré Mme Fraysse en évoquant le problème de la reconnaissance universitaire de leur diplôme, il est temps d’explorer de nouvelles pistes en faisant de nos infirmiers des infirmiers cliniques, aptes à prodiguer les premiers soins. C’est cette évolution-là que la profession infirmière attendait, pas la création d’un ordre professionnel. Quant aux aides-soignants, ils ont aussi vocation à voir leurs responsabilités s’étoffer.

Cela fait cinq ans que vous êtes dans l’erreur !

Mme Valérie Rosso-Debord – Ce n’est pas l’avis des Français !

M. Philippe Vitel – Vous, vous vous êtes trompés pendant dix-huit ans ! Parlez-nous du numerus clausus !

Mme Valérie Rosso-Debord – Eh oui, il faut dix ans pour faire un médecin.

M. Jean-Marie Le Guen – Ressaisissez-vous en prenant enfin les mesures qui pourront inverser la tendance.

M. Jean-Marie Le Guen remplace Mme Génisson au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Jean-Marie LE GUEN
vice-président

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour l’assurance vieillesse – Pouvez-vous m’expliquer, cher Jean-Marie Le Guen, comment on gagne les élections après cinq années d’erreur ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

Comme cela a été dit, notre pays souffre de grands déséquilibres dans la démographie de ses professionnels de santé et nous ne pouvons nous résoudre à voir progresser les déserts médicaux et paramédicaux, dans les zones rurales, rurbaines ou urbaines. Nous savons par ailleurs que nous ne pouvons imposer aux jeunes de s’installer dans des territoires où ils n’ont pas envie de vivre ou de travailler, la qualité de vie devant désormais être envisagée – sans doute légitimement – comme une variable qui ne peut être ignorée. Pour avoir reçu une délégation de la coordination de Lorraine, je puis témoigner que j’ai été impressionné par le sérieux et le professionnalisme de nos étudiants. L’ambiance n’est plus la même qu’en mai 68 !

M. Christian Paul – Liquidons l’héritage !

M. Denis Jacquat, rapporteur Les aspirations des jeunes générations sont dignes de respect, et c’est en étroite concertation avec eux qu’il faut prendre les décisions d’avenir. Merci, Madame la ministre, de leur avoir dit « banco » lorsqu’ils vous ont demandé d’envisager le futur avec eux.

Mme Catherine Génisson – Le problème qu’aborde cet article est particulièrement lourd, notamment pour ce qui concerne les soins primaires. Toutefois, nous verrons ultérieurement que l’hôpital est lui aussi affecté par une crise démographique sans précédent.

Comme l’ont rappelé les orateurs précédents, la crise n’est pas nouvelle. Las, depuis cinq ans, vous n’avez avancé aucune mesure structurante pour la résoudre. Le constat est connu et je n’y reviens pas, sauf pour évoquer, comme nous l’avons fait dans notre rapport avec M. Colombier, nos difficultés à garantir la permanence des soins le soir après 20 heures, en fin de semaine et les jours fériés.

Les jeunes professionnels d’aujourd’hui sont légitimement attentifs à leur qualité d’exercice et de vie, dans un contexte qui évolue de plus en plus vite. Mme la ministre a fait la proposition intéressante de réunir des états généraux de la santé et nous approuvons cette volonté de traiter ces enjeux éminemment citoyens avec l’ensemble de la population, en ne laissant pas les professionnels confisquer le débat. Nous souhaitons que ces travaux débouchent sur une loi-cadre pour fixer les grandes échéances des années à venir.

Contrairement à ce que prétendent certains, nous avons des propositions à faire : développer les maisons de santé pluridisciplinaires, inciter l’État à accompagner les collectivités dans leurs efforts pour accueillir et fidéliser des professionnels de santé, organiser la mise en réseau avec les hôpitaux de proximité, développer la médecine pré-hospitalière, garantir la permanence des soins après minuit, les jours fériés et les fins de semaine… Des solutions existent : il faut désormais avoir le courage de les mettre en œuvre.

M. Viollet a eu raison d’évoquer la réforme médicale. La médecine générale doit être reconnue comme une spécialité à part entière.

Enfin, je dois dire que la rédaction des amendements gouvernementaux me laisse perplexe. Vous parlez, Madame la ministre, de mesures « notamment » incitatives : quelles seront les autres catégories de mesures ? Pourquoi n’envisager qu’une concertation alors qu’il faudrait une consultation organisée ? Qu’entendez-vous par « organisations les plus représentatives » ?

Nous refusons d’être taxés de passéistes et les nombreuses initiatives qui émergent dans les régions dont nous avons la charge, notamment dans le Nord-Pas-de-Calais viennent démontrer que nous sommes capables d’avancer des solutions d’avenir.

M. Philippe Vitel – Rappel au Règlement. Nous venons d’entendre à la suite cinq orateurs socialistes, dont trois ont largement dépassé leur temps de parole (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP). Quant au jeu de chaises musicales auquel se livrent Mme Génisson et M. Le Guen avec le fauteuil présidentiel, il est tout simplement ridicule ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Monsieur Vitel, je m’efforce de présider dans l’intérêt de tous et j’avais cru comprendre que certains orateurs, en s’exprimant un peu plus longuement sur cet article, pourraient être plus brefs ultérieurement. Nous avons vécu une journée fatigante et inégale : faisons preuve, à cette heure, de tolérance les uns vis-à-vis des autres. Prenez, chers collègues de la majorité, votre mal en patience car j’ai encore cinq orateurs inscrits sur l’article.

M. Claude Leteurtre – On ne peut pas, Madame la ministre, vous reprocher d’avoir traîné ! Alors que la santé avait été la grande absente de la campagne présidentielle, vous avez le courage de faire des propositions audacieuses qui montrent que vous mesurez bien l’ampleur des problèmes. Il reste que vous proposez aujourd’hui un électrochoc, vieille méthode de psychiatrie…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé – Encore bien utile en cardiologie !

M. Claude Leteurtre – Il ne faut pas oublier que la cause du problème, c’est le numerus clausus, et qu’en la matière tous les politiques ont une grande responsabilité. On ne peut non plus ignorer le rôle des professionnels qui ont en charge la formation des étudiants ; celle qui est dispensée ne prépare pas à exercer la médecine générale, notamment en milieu rural…

Alors, oui aux états généraux, mais pour quoi faire et avec qui ? Il est important de bien préciser les objectifs, et d’associer l’ensemble des partenaires, y compris les universitaires – qui se sont attachés à faire fonctionner leur service mais n’appréhendent pas les problèmes de santé publique dans leur ensemble – et les élus locaux.

M. Yves Bur, rapporteur – Je remercie notre ministre de la santé, qui a compris que l’offre de soins sur l’ensemble du territoire était un problème majeur, d’avoir eu le courage d’aborder le sujet de front, sans se contenter de mesures d’incitation économique. Pour ma part, je n’ai jamais cru à l’efficacité d’une politique au coup par coup.

Les associations et les syndicats d’internes et étudiants en médecine ont cru que votre intention était de substituer aux mesures ponctuelles d’incitation « l’arme atomique » du déconventionnement. À force de dialogue, vous avez levé les incompréhensions, en renonçant à inscrire cette notion dans le texte, pour privilégier le débat dans le cadre d’états généraux. Je tiens d’ailleurs à souligner que les étudiants ont toujours été prêts à dialoguer et qu’ils ont, pendant leur grève, continué à soigner les patients.

M. Jérôme Cahuzac – C’est pour cela qu’il faut les respecter.

M. Yves Bur, rapporteur – Il y a une exigence : il faut que ces états généraux nous apportent une réponse efficace au risque de désertification médicale. Est-il normal qu’il faille faire appel à des médecins étrangers pour pallier le refus de nos futurs médecins d’exercer dans des territoires moins attractifs ? Est-il normal que certaines spécialités soient inaccessibles ? Dans le Nord, les ophtalmologues font 1 000 consultations de plus que la moyenne nationale, et pourtant le délai d’attente est inacceptable.

Nos concitoyens comprennent que l’on demande aux futurs médecins d’aller exercer là où les besoins ne sont pas satisfaits. Il appartient maintenant aux intéressés de prendre leurs responsabilités pour nous proposer un dispositif ; il faudrait aussi qu’à ces états généraux soient associés les acteurs du territoire, notamment l’Association des maires de France et l’Association des départements de France. Il appartiendra par la suite aux ARS qui seront mises en place à partir du début de 2009 de prendre en charge cette question sur le terrain.

Nos collègues de l’opposition sont en train de se refaire une virginité, mais je voudrais leur rappeler leurs positions pendant la campagne électorale. Sur le site officiel de Mme Ségolène Royal, on pouvait lire ceci.

« Moi, je crois que le problème principal, dans le domaine de la santé, ce sont les inégalités d’accès à la santé. Il y a des inégalités territoriales qui sont inadmissibles. »

Les députés socialistes – Elle a raison !

M. Yves Bur, rapporteur – Tout à fait raison. « Et moi, je suis favorable à la répartition géographique des étudiants lorsqu’ils sortent de l’université. »

M. Jérôme Cahuzac – Elle a tort ! (Rires)

M. Yves Bur, rapporteur – « Est-ce tolérable que dans un département rural, il faille attendre plus d’un an pour avoir un rendez-vous avec un ophtalmo ? »

Les députés socialistes – Non !

M. Yves Bur, rapporteur – « Je crois que ce n’est pas tolérable ». Elle a raison.

« Est-il tolérable que dans plein d’endroits du territoire, les femmes ne puissent accéder aux conseils d’un gynécologue ? »

Les députés socialistes – Non !

M. Yves Bur, rapporteur – « Ce n’est pas acceptable ».

M. Jérôme Cahuzac – Que faites-vous, Madame la ministre ?

M. Yves Bur, rapporteur – « Et donc, à partir du moment où l’État, la communauté nationale, ont pris en charge les études en médecine, il faut réfléchir et travailler à une meilleure répartition des médecins sur l’ensemble du territoire national ».

Les députés socialistes – Nous sommes d’accord.

M. Yves Bur, rapporteur – Le journaliste demande alors : « Cela veut dire par des méthodes directives ? ». « Sans doute », répond Mme Royal.

M. Jérôme Cahuzac – Elle a tort !

M. Yves Bur, rapporteur – « Peut-être pour une partie de leur carrière, mais en tout cas c’est une proposition précise que je fais ». « Cela ne va-t-il pas décourager encore plus les vocations ? », demande le journaliste. Et Mme Royal répond : « Je ne le crois pas, au contraire ».

Voilà, c’est édifiant. Ne venez pas nous donner des leçons !

 Les députés socialistes – Au contraire !

M. Yves Bur, rapporteur – Mme la ministre a posé les termes du débat et va construire avec l’ensemble des étudiants et des syndicats médicaux un dispositif qui fonctionne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Le problème de la démographie médicale est devenu crucial, mais il remonte à plus de vingt ans ; les responsabilités en incombent aussi bien à la gauche qu’à la droite. Dans la région Centre, on compte 140 médecins pour 100 000 habitants, alors que la moyenne est à 170, et des petites villes pourtant très agréables à vivre, sur les bords de la Loire, en manquent cruellement. L’immobilisme serait la pire des solutions

On nous demande ce que nous avons fait depuis cinq ans. Eh bien, nous avons développé des mesures incitatives, les aides financières, aides aux collectivités territoriales pour les maisons de garde, bourses pour les étudiants. Mais il faut être plus ambitieux.

Les états généraux qui ont été décidés devront aborder tous les sujets sans tabou. Il reviendra ensuite aux partenaires conventionnels d’agir. Nous avons écouté nos jeunes, nous devons maintenant les accompagner dans une démarche volontaire de modernisation de leurs conditions d’exercice. Merci, Madame la ministre, c’est cela, le courage politique, n’abandonnons pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Patrick Roy – Le sujet dont nous débattons est l’un des plus importants de ce PLFSS. La crise est grave, et l’angoisse est réelle chez nos concitoyens, pas seulement dans le milieu rural : chez moi, dans une région très urbanisée, il faut un an pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmo, par exemple – à moins de recourir à quelque monnaie sonnante et trébuchante…

M. Philippe Vitel – Quelle caricature ! Quelle insulte !

M. Denis Jacquat, rapporteur – Ne généralisez pas !

M. Patrick Roy – Je fais simplement état de témoignages récurrents. En outre, on oblige souvent les patients à s’adresser au secteur 2 alors que rien ne le justifie. Madame la ministre, vous avez admis vous-même ce matin que ces dérives étaient inacceptables ; j’espère que vous lancerez, comme vous vous y êtes engagée, une grande campagne d’information à destination des patients victimes de pratiques dont ils ignorent généralement l’illégalité.

Les limites de la permanence des soins posent elles aussi problème, notamment le soir et le week-end, et coûtent cher aux services d’urgence des hôpitaux comme aux services départementaux d’incendie et de secours.

Quant aux états généraux que vous prévoyez d’organiser, ils devront réunir non seulement les spécialistes, mais aussi les élus et les citoyens.

Face à la mobilisation courageuse des internes, vous avez changé de discours, mais pour vous limiter à des réponses ambiguës qui ne disent rien de la revalorisation de la médecine générale, des maisons de santé ou des hôpitaux de proximité.

Pour la sérénité de nos débats, nous vous demandons donc de retirer l’article 32.

M. Jérôme Cahuzac – Très bien !

Mme Marie-Hélène Amiable – L’abandon du déconventionnement autoritaire des médecins désirant s’installer dans des zones où le nombre de médecins est déjà élevé – principale disposition contenue dans les articles dont nous débattons – donne raison aux jeunes médecins qui se sont mobilisés, même s’il est regrettable qu’ils aient dû aller si loin pour obtenir une simple participation aux négociations ! Mais il ne règle pas le problème des régions sous-médicalisées, qui exige, plutôt qu’une solution unique, un faisceau de mesures complémentaires.

Tout d’abord, quand les premiers professeurs titulaires en médecine générale seront-ils nommés, comme le réclament depuis longtemps les généralistes préoccupés par la revalorisation de leur filière et comme vous l’a déjà demandé Mme Fraysse ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé J’ai répondu à cette question.

Mme Marie-Hélène Amiable – D’autre part, les médecins ont désormais besoin de travailler en réseau avec des laboratoires d’analyses médicales, avec des maisons médicalisées regroupant plusieurs spécialités et employant des professions paramédicales, et avec des hôpitaux de proximité – hôpitaux que vous ferez disparaître en généralisant la tarification à l’activité, mais sur la présence desquels 30 % des médecins se fondent pour choisir où s’installer.

Enfin, on ne saurait dissocier ces questions de l’aménagement du territoire : il est logique que les médecins refusent de s’installer dans des régions désertées où ils ne trouveront ni services publics, ni établissements scolaires pour leurs enfants, ni possibilités d’emploi pour leur conjoint.

Au-delà des états généraux réclamés par les internes, la formation des médecins, la démographie médicale, mais aussi le financement de la protection sociale nécessitent l’organisation du Grenelle de la santé que nous appelons de nos vœux depuis des années et qui devra réunir citoyens, professionnels et élus locaux et nationaux (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR).

Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure pour avis de la commission des finances – Je suis d’accord avec MM. Bur, Jacquat et Door : par ce texte, le Gouvernement a le courage de rompre avec les approches technocratiques pour rendre accessible à un large public la question de l’offre de soins. Je rappelle d’autre part que c’est la Cour des comptes qui, dans un rapport publié en septembre, a en quelque sorte promu l’idée de mesures contraignantes.

Avant que la démographie médicale ne revienne en moyenne à la situation de 1985, c’est-à-dire – même si les moyennes doivent être maniées avec précaution – vers 2025, il importe de remédier aux disparités entre spécialités et entre régions : en Lozère, on trouve 34 praticiens pour 100 000 habitants, contre 244 à Paris et 100, en moyenne, sur l’ensemble du territoire. La responsabilité de cette situation n’incombe pas plus à la droite qu’à la gauche, qui ont toutes deux, tour à tour, diminué ou augmenté le numerus clausus ; ne ranimons donc pas de vieilles querelles !

Pour remédier à ces difficultés, le texte propose un faisceau de mesures concourant à une organisation intelligente de l’accès aux soins, à la coopération entre professionnels de santé et à l’adaptation des modes d’exercice. Quant aux dispositions contraignantes, elles n’ont de sens que si elles sont issues d’une négociation, d’un dialogue incluant notamment les collectivités locales. De ce point de vue, Madame la ministre, vous avez réuni les conditions pour parvenir à un point d’équilibre.

Comme toute ressource humaine, la ressource médicale est fragile : merci, Madame la ministre, d’en avoir tenu compte (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission – Après avoir reçu de nombreuses délégations, la commission est parvenue à un large accord. Soyons attentifs aux conditions de travail et de vie familiale des jeunes médecins, qui sont leur préoccupation principale, sans oublier pour autant que bien des déserts ruraux se repeuplent et que rien n’empêche un médecin d’installer son cabinet à vingt kilomètres de son domicile et à son conjoint d’habiter ainsi une grande ville.

Madame la ministre, il serait bienvenu d’organiser les assises de la démographie médicale dans une ville de province plutôt qu’à Paris et de mettre en place sans tarder le FIQS - qu’attendent de nombreuses maisons de garde et maisons de santé – comme les agences régionales de santé, qui permettront de remédier à l’empilement des structures administratives, responsable de l’enchevêtrement des problèmes de l’hôpital, des soins de ville et du secteur médico-social. Nos voisins européens n’ont pas tort de dire que la France est suradministrée et sous-organisée ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Je me réjouis que tous appréhendent désormais à sa juste ampleur le problème de la démographie médicale – qui était largement méconnu, à ma grande surprise, de nos concitoyens comme de l’ensemble de la classe politique, voire de certaines organisations de médecins, au moment où j’ai pris mes fonctions.

M. Christian Paul – Méconnu de votre prédécesseur, surtout !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Or, pour prescrire le bon traitement, il faut avoir porté le bon diagnostic (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) – un diagnostic à la fois quantitatif et qualitatif.

Le taux de médecins en France est aujourd’hui le plus élevé de l’OCDE ; le numerus clausus actuel est donc d’autant moins en cause que nous avons décidé, Mme la ministre de la recherche et moi-même, de l’augmenter cette année. Mais cette augmentation ne portera pas ses fruits avant 2025, et c’est dans l’intervalle que les générations d’étudiants auxquelles s’est appliqué un numerus clausus restreint commenceront à exercer.

Je suis d’accord avec l’expression de « crise sanitaire » employée tout à l’heure par M. Le Guen. Il s’agit d’une crise sanitaire pernicieuse, lente, mais avérée. Le diagnostic est posé et maintenant largement accepté.

Confrontés au problème, les gens adoptent des attitudes très diverses. Certains bons connaisseurs du secteur, et qui n’ont pas tous leur carte à l’UMP, ont parfois tenu des propos très coercitifs, à l’instar de M. Patrick Pelloux, de M. Christian Saout, ancien président d’AIDES et président du collectif interassociatif sur la santé, de M. Claude Évin, et d’autres personnalités de la gauche… On a d’ailleurs rappelé les propos de Mme Royal. C’est vous qui préconisez la coercition ! Et vous avez le culot de vouloir pousser les internes ! Ils ne vous suivront pas dans cette manipulation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Jérôme Cahuzac – Ce sont des adultes !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé C’est nous qui sommes les garants de la liberté d’installation. Nous avons voulu mener avec eux un dialogue respectueux.

M. Jérôme Cahuzac – Il fallait le faire avant !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Jamais je n’ai pensé que ces questions pouvaient être réglées sans eux : voyez le texte initial de ce projet de loi !

J’ai voulu que le débat ait lieu avec eux, et nous avons passé un accord. Les états généraux de l’organisation de la santé impliqueront tous les groupements que vous avez évoqués, car ce n’est pas seulement une affaire de médecins ou de futurs médecins : toutes les organisations de professionnels médicaux, les organisations syndicales, les urgentistes, les associations de malades… y participeront. Nous voulons que ce dialogue soit territorialisé, et j’ai bien entendu M. le président Méhaignerie : si la réunion de conclusion doit naturellement se tenir au ministère de la santé, il pourra y avoir de grandes réunions décentralisées.

Nous commencerons à travailler à l’organisation des états généraux dès lundi, au ministère, avec l’ensemble des organisations d’internes, sous la présidence d’Yvon Berland, qui est unanimement reconnu par les internes – nous en avons discuté avec eux, et c’est son nom qui a été retenu –, et avec l’expertise de la direction de l’hospitalisation pour les questions de logistique. Les internes ne seront pas dupes de votre double langage (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine). Tout est ouvert ; à quoi serviraient des états généraux si les choses étaient déjà bouclées ?

Ce processus est bien sûr lié à des réformes de structure. La création des agences régionales de santé, avec la mise en synergie de la médecine de ville – la permanence des soins – et du médico-social, sera sans aucun doute la réforme administrative la plus importante de ces 25 dernières années.

Vous invitiez à réfléchir sur les mutations des métiers de la santé. Ces mutations ne concernent pas seulement les médecins, mais l’ensemble des professions médicales et paramédicales. C’est pourquoi je suis entrée résolument dans le processus LMD. J’ai rencontré, tout au long de l’été, les huit organisations syndicales représentatives pour l’hôpital public, ainsi que d’autres, et nous continuerons. Entrer dans le processus LMD n’implique pas simplement de signer un décret ; cela demande de se poser la question de l’attractivité des formations, d’organiser le versement de plusieurs milliers d’agents hospitaliers dans la catégorie A. On ne peut pas imaginer que des infirmières aient pour perspective d’avancement des emplois de gestion ; elles veulent une progression hiérarchique au sein du secteur des soins. Il nous faut, encore, imaginer les nouveaux métiers de l’hôpital ; on voit, par exemple, apparaître le besoin de dosimétristes, une profession qui n’existait pas : il faut l’encadrer, concevoir les diplômes…

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé la constitution d’une mission d’inspection conjointe aux inspections générales des affaires sociales, des finances et de l’éducation nationale et de la recherche, mission qui rendra un avis au mois de décembre et sur les conclusions de laquelle nous nous appuierons pour avancer. Avec les organisations représentatives, nous sommes convenus que ce travail nous prendrait plusieurs mois, et que tout serait mis sur la table.

Je ne supporte plus qu’une infirmière ne reste que douze ans à l’hôpital public, que sur les 30 000 postes à disposition dans les IFSI, on n’en remplisse que 22 000 et qu’on en perde encore plusieurs milliers au passage… Je veux penser la restructuration des métiers sur des bases solides.

Mme Genisson reprend place au fauteuil présidentiel

PRÉSIDENCE de Mme Catherine GÉNISSON
vice-présidente

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Le Gouvernement a bien une politique structurelle, dont nous avons voulu poser les jalons dans le présent projet de loi. Nos propositions sur la permanence des soins et sur les nouveaux modes de rémunération, les financements originaux par le biais du FIQCS : tout cela, ce sont des réformes structurelles !

Les articles 32 et 33 visent à garantir un meilleur accès aux soins ambulatoires sur l’ensemble du territoire. Si nous vous proposons d’amender le projet initial, c’est parce que le Gouvernement a engagé une négociation sur les moyens d’atteindre ces objectifs, sur un sujet que personne n’a voulu traiter depuis vingt ans.

Mme Valérie Rosso-Debord – Très bien !

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Nous avons écouté et entendu. Et nous sommes en mesure de présenter des amendements parce qu’un équilibre a été trouvé. Comme je m’y suis engagée auprès des jeunes internes, les mesures coercitives sont exclues : il n’y aura pas de déconventionnement, pas de limitation à la liberté d’installation. Les amendements nous permettent d’engager, sans tabou, les états généraux. Ils prévoient la participation de tous ces jeunes, dont j’ai pu mesurer le sens de la responsabilité et la richesse de propositions. Leur consultation sera préalable à toute négociation conventionnelle sur la régulation de la démographie médicale. L’objectif est de conjuguer l’égal accès aux soins de tous et de meilleures conditions d’exercice pour les professionnels.

Le Gouvernement souhaite mener une politique globale et ambitieuse de l’offre de soins, où les soins de premier recours retrouveront leur place, en articulation avec les soins spécialisés. Oui, le diagnostic est posé ; maintenant il faut soigner, il faut guérir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

J’en viens à l’amendement 671, qui vise à conforter les acquis de la négociation conventionnelle du 22 juin 2007 entre l’UNCAM et les syndicats d’infirmiers, les premiers à prendre ce problème à bras-le-corps, sur la démographie des professionnels. Il ouvre en outre la possibilité de mesures incitatives en fonction de l’offre de soins infirmiers dans un territoire, mesures qui feront l’objet d’une concertation avec l’ensemble de la profession, notamment avec les étudiants et les jeunes infirmiers.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis, à titre personnel, très favorable.

Mme Marisol Touraine – Mes observations vaudront pour tous les amendements du Gouvernement qui tendent à modifier les articles 32 et 33. Mais, pour commencer, je ne peux vous laisser dire que nous aurions « poussé » le mouvement des internes. C’est une bien curieuse conception des mouvements sociaux que de penser qu’ils peuvent être manipulés ! Quant à vos amendements, leur français approximatif dit assez l’urgence dans laquelle vos services ont dû les rédiger, et ils mériteraient au minimum des corrections grammaticales (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Sur le fond, la formulation que vous avez retenue laisse perplexe. Vous évoquez en effet les organisations « les plus représentatives », une imprécision qui donne beaucoup à penser. Et que dire de mesures d’adaptation « notamment incitatives », un formule savoureuse qui n’aurait vraisemblablement pas passé la barrière du Conseil d’État, mais qui laisse le champ libre à bien des choses, et surtout à des mesures éventuellement coercitives ?

M. Roland Muzeau – Les amendements du Gouvernement qui nous ont été distribués en séance ne changent rien sur le fond. Nous comprenons que vos efforts sont destinés à l’opinion publique, que vous tentez ainsi de convaincre que vous avez mis de l’eau dans votre vin. Mais la réalité, c’est que nous apprenons après des heures de débat la réunion, lundi, d’un groupe de travail destiné à préparer un Grenelle de la santé dont nous ne savons rien. Dans le même temps, vous n’hésitez pas à accuser la gauche de manipulation…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé  Non : de courir après les internes.

M. Roland Muzeau – Vous avez parlé de manipulation, Madame la ministre, vous que je me rappelle parfaitement avoir vue, dans les années 1980, défiler ceinte de l’écharpe tricolore dans les rangs du RPR pour dénoncer le danger que la gauche faisait peser, selon vous, sur la médecine libérale…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Et devrait-on aussi remonter à l’époque soviétique ?

M. Roland Muzeau – Vous parlez de concertation et, dans la presse, vous vous êtes dite prête à recueillir « l’avis » des intéressés. Voilà qui ne rassurera personne, car on sait ce qu’il advient de telles « concertations », qui n’engagent à rien. Quant à dire que l’on négociera avec les organisations « les plus représentatives », c’est annoncer par euphémisme que vous choisirez vos interlocuteurs parmi ceux qui sont les plus favorables à vos thèses, alors que tous les intéressés devraient être représentés. Vous devriez bien renoncer à ce superlatif !

Mme la Présidente - Étant donné l’importance du sujet, je donnerai encore la parole à M. Cahuzac et à M. Christian Paul, qui me l’ont demandée. Ensuite, l’Assemblée étant largement éclairée par ce très long débat, j’appliquerai strictement notre Règlement.

M. Jérôme Cahuzac – Personne n’a manipulé personne ni couru derrière qui que ce soit. Les internes sont assez grands pour se déterminer seuls…

Les eussiez-vous consultés que vous n’auriez pas dû amender votre texte dans une précipitation confinant à l’affolement qui vous fait renvoyer à des dispositions conventionnelles ce qui ressortit à la liberté d’installation. Je ne suis pas certain qu’un tel montage soit constitutionnel. Par ailleurs, c’est une manière de réintroduire le zonage. Je ne sais si les jeunes médecins s’en satisferont, ni s’ils se satisferont de la formulation que vous avez retenue et qui, comme l’a relevé Marisol Touraine, n’exclut nullement le recours à des mesures coercitives. Si c’est le cas, il faut le dire, et l’écrire, clairement.

M. Christian Paul – Si vous en êtes d’accord, Madame la présidente, je profiterai de cette intervention pour présenter l’amendement 676. Auparavant, je précise à l’intention de M. Bur que toutes les propositions dont il a fait état ne figuraient pas dans le programme du parti socialiste. J’ai souvenir, par ailleurs, d’une certaine intervention télévisée du candidat Sarkozy se limitant à proposer des incitations fiscales et financières, ce qui m’avait paru un peu juste. Sans doute, Madame la ministre, avez-vous pris la mesure de la crise, mais ce ne semble pas avoir été le cas de votre prédécesseur, qui n’a pas encombré notre ordre du jour à ce sujet. Depuis des années, élus de droite et élus de gauche sont au travail, dans les zones rurales, pour créer des maisons médicales. Dans ma circonscription nivernaise seulement, sept vont ouvrir. Nous n’avons donc pas découvert l’acuité de la crise sanitaire à la lecture du rapport de la Cour des comptes ou de votre projet !

S’agissant des états généraux, vous donnez enfin leur place aux internes et aux professionnels de santé. Mais il s’agit d’une cause d’intérêt général. Il faut y associer les représentants des territoires.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé J’ai dit oui.

M. Christian Paul – Mais cela ne figure pas dans votre amendement. Nous avons déposé l’amendement 676 qui demande une négociation globale sur l’ensemble de l’offre de soins. En effet, la crise sanitaire ne concerne pas seulement la démographie médicale, mais aussi les réseaux et les hôpitaux de proximité. Nous demandons également que ces états généraux soient accessibles aux citoyens, à leurs élus, aux usagers, aux représentants des malades. Enfin, ils doivent avoir pour objectif de préparer non une loi cadre énonçant des principes abstraits, mais une loi de programme, avec des objectifs et des moyens.

L'amendement 671, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Les amendements 234 et 280 rectifié tombent.

M. Jean-Luc Préel – Notre amendement 281 tend à substituer aux mots « pour les médecins généralistes ou spécialistes » les mots « par spécialité ».

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – La commission l’a adopté.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé Avis défavorable. Les médecins généralistes sont le pilier de l’organisation des soins primaires.

L'amendement 281, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Leteurtre – L’amendement 282, 2ème rectification, est défendu.

L'amendement 282, 2ème rectification, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 32 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 32

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’amendement 670 vise à permettre à l’ensemble des professionnels de santé de conclure des accords pour adapter des conventions afin d’équilibrer leur répartition sur le territoire. Ces adaptations devront tenir compte de l’offre de soins au niveau local et il convient de prévoir une large concertation avec les étudiants et les jeunes professionnels.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – Avis favorable à titre personnel.

L'amendement 670, mis aux voix, est adopté.

ART. 33

M. Christian Paul – L’amendement 450 est défendu.

L'amendement 450, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - L’amendement 676 a été défendu par M. Paul.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur – À titre personnel, avis défavorable. Mieux vaut l’amendement 665 du Gouvernement.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé La parole de la ministre vaut engagement auprès des différents partenaires que je souhaite associer aux états généraux.

L'amendement 676, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Présidente - Sur le vote de l’amendement 665, je suis saisie par le groupe UMP d’une demande de scrutin public.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’amendement 665 tire les conclusions de la négociation menée avec cinq organisations représentatives. On m’a interrogée sur cette représentativité. Elle ne s’entend pas au sens usuel du dialogue conventionnel. Mais je peux certifier qu’il s’agit bien des organisations les plus dynamiques représentant ces jeunes professionnels et avec lesquelles nous avons eu un dialogue approfondi.

Par cet amendement, le Gouvernement entend contribuer à résoudre le délicat problème de la répartition inégale des médecins sur le territoire dans le respect du principe fondamental de la liberté d’installation, et en concertation avec l’ensemble des professionnels de santé et acteurs concernés. Dans ce contexte, soucieux de respecter les engagements pris avec les représentants des étudiants, internes, chefs de clinique et jeunes médecins, il exclut tout déconventionnement et non-conventionnement.

L’objectif est d’inviter à une négociation globale sur l’évolution de l’organisation de l’offre de soins et de l’implantation des médecins sur le territoire. La mesure trouve donc sa place dans une réflexion structurelle sur l’organisation des soins.

Des états généraux de l’offre de soins réuniront, à compter de janvier 2008, l’ensemble des professionnels concernés. Ils seront pilotés par le professeur Yvon Berland, président de l’Observatoire national de la démographie des professionnels de santé, et par la directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins. Une attention toute particulière sera portée aux aspirations légitimes des médecins en formation et des jeunes médecins à une pratique rénovée et à une meilleure qualité de vie.

Les conclusions des états généraux, formulées et validées en concertation avec les organisations les plus représentatives des étudiants en médecine, internes, chefs de cliniques, et médecins récemment diplômés ou installés, seront transmises à l’UNCAM, à titre de cadrage pour les négociations conventionnelles nécessaires.

Les mesures incitatives devront être privilégiées.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur À titre personnel, je suis très favorable à cet amendement qui lève les inquiétudes qui ont pu exister sur le déconventionnement. Je souhaite qu’il soit adopté à l’unanimité.

À la majorité de 43 voix contre 16 sur 59 votants et 59 suffrages exprimés, l’amendement 665 est adopté.

L’article 33 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures 45.

La séance est levée à 20 heures 30.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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