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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 7 novembre 2007

3ème séance
Séance de 21 heures 30
42ème séance de la session
Présidence de Mme Catherine Génisson, Vice-Présidente

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2008 – SECONDE PARTIE – (SUITE)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008.

TRAVAIL ET EMPLOI (SUITE)

QUESTIONS (SUITE)

M. Roland Muzeau – « À quand le Grenelle de la santé au travail ? » demande le professeur de médecine Paul Frimat. Or, c’est l’inertie, le Gouvernement manquant de tout volontarisme pour donner aux acteurs de la prévention les moyens qui leur sont nécessaires. Un rapport de l’IGAS de 2003 dénonçait déjà l’inadéquation du certificat d’aptitude et de l’examen périodique au regard des impératifs de santé publique, et un nouveau rapport – le rapport Gosselin – vient de vous être rendu sur l’aptitude. Allez-vous enfin en finir avec celle-ci et réinscrire l’activité spécifique de la médecine professionnelle dans le champ de la prévention ? Garantirez-vous l’indépendance et la transparence du financement de la médecine du travail ? S’il est vrai que, ces cinq prochaines années, entre 1 600 et 1 800 médecins cesseront leur activité, nous ne pensons pas que la solution soit la généralisation d’expérimentations en cours qui permettent aux infirmières de prendre en charge les tâches des médecins. En bref, quelles sont vos intentions sur le sujet ? Allez-vous enterrer le rapport Frimat-Conso ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Oui, je poursuivrai la réforme de la santé au travail. Non, je n’ai pas l’intention d’enterrer le rapport Conso-Frimat. Tout l’enjeu est de trouver une solution durable au problème de la démographie des médecins du travail.

J’ai transmis, il y a deux jours, le rapport Conso-Frimat aux partenaires sociaux, et je le transmettrai également aux parlementaires. Un audit doit me parvenir dans les semaines à venir concernant la pluridisciplinarité et faisant le bilan des expériences en cours. Sur la base de ces contributions et du rapport Gosselin, j’entamerai une concertation avec les partenaires sociaux et les acteurs de la médecine du travail. L’idée est de pouvoir soumettre une proposition aux partenaires au cours du premier trimestre 2008, pour lancer la nouvelle phase de la réforme au deuxième trimestre.

Par ailleurs, je tiens à vous rassurer : il ne s’agit pas de remplacer les médecins par des infirmières, mais de renforcer leurs moyens humains et matériels, pour qu’ils puissent se concentrer sur la partie la plus médicale de leur activité, notamment sur la prévention dans l’entreprise, comme cela a d’ailleurs été préconisé par la conférence sur les conditions de travail qui s’est réunie le 4 octobre. La prévention est une priorité.

Mme Huguette Bello – Ma question porte sur le transfert au ministère de l’économie, à compter du 1er janvier 2008, des crédits consacrés aux contrats aidés jusqu’ici affectés au ministère de l’outre-mer.

En vue de remédier au chômage massif dans les départements d’outre-mer, la loi Perben de 1994 avait créé des dispositifs et des structures dont la spécificité justifiait la tutelle du ministère de l’outre-mer. En 2005, les crédits destinés à compenser les exonérations de charges patronales prévues par les lois de programmation pour l’outre-mer, jusque-là inscrits au budget du ministère de l’emploi, ont été transférés au ministère de l’outre-mer, dans le souci, là aussi, de mieux coordonner la politique de l’emploi dans ces territoires.

Or, on nous annonce aujourd’hui que les contrats aidés, y compris ceux qui n’existent qu’en outre-mer, seront désormais gérés par le ministère de l’emploi. Cela signifie-t-il que l’emploi solidaire outre-mer est à présent considéré comme relevant du droit commun ? Et la diminution d’un quart des contrats aidés annoncée au niveau national s’applique-t-elle également à l’outre-mer ? Je souhaiterais savoir précisément combien de contrats aidés sont prévus pour l’outre-mer en 2008. Ne risquent-ils pas, par ailleurs, de subir des gels budgétaires en cours d’année, comme en septembre dernier ?

Mme la Présidente – Veuillez conclure, s’il vous plaît.

Mme Huguette Bello – Madame la Présidente, j’ai posé la même question, hier soir, au ministre de l’outre-mer, sans recevoir de réponse. L’outre-mer ne doit pas être important seulement en période électorale ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Jérôme Chartier – Qui oserait penser une telle chose ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur – La politique de l’emploi outre-mer s’inscrit dans un contexte particulier, marqué par un taux de chômage très élevé, en particulier chez les jeunes et les personnes les plus éloignées du marché du travail. On relève cependant une amélioration de la situation depuis quelques années, grâce à des efforts importants de l’État.

Ces efforts doivent être poursuivis, en renforçant les réformes structurelles du marché du travail ainsi que les mesures conjoncturelles en direction des publics prioritaires. Le projet de loi de finances pour 2008 transfère la quasi-totalité des dispositifs propres à l’outre-mer vers le ministère de l’emploi. Comme cela s’est réalisé dans des délais très courts, Mme Lagarde a décidé de ne modifier ni le cadre de gestion, ni les enveloppes de crédits.

Certes, l’enveloppe budgétaire associée au transfert des dispositifs baisse, et je ne cherche pas à le dissimuler.

M. François Rochebloine – Très bien !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État  Cependant, l’outre-mer ne bénéficie pas seulement de ces dispositifs spécifiques, puisque l’ensemble des contrats aidés en vigueur en métropole ont vocation à consolider l’emploi en outre-mer également.

Ce transfert nous permettra d’avoir une vision globale de la politique de l’emploi sur l’ensemble du territoire, sans que cela nous fasse méconnaître en rien les spécificités locales.

Ce transfert crée des responsabilités pour le ministère de l’économie, et il n’est pas question pour celui-ci de se désengager.

M. Roland Muzeau – Un texte concernant la fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC a été adressé aux partenaires sociaux et ce projet sera soumis au Comité supérieur de l’emploi avant de venir en discussion au Parlement. Dans un contexte d’« ouverture du marché du placement », votre Gouvernement, main dans la main avec le MEDEF, s'oriente vers une remise en cause des missions respectives de ces organismes, avec de graves conséquences pour les personnels et les demandeurs d'emploi.

Il ne s'agit pas seulement de renforcer le partenariat entre l’ANPE et l’UNEDIC, mais de réaliser des économies. Pour les fonctionnaires concernés, cela se traduira par une remise en cause de leur statut et par des réductions drastiques des effectifs – une fusion similaire en Grande Bretagne a abouti en 2003 à la suppression de 13 000 emplois ! Pour les chômeurs, ce nouvel organisme risque de n'être plus qu'un organe de contrôle, qui les contraindra à reprendre n'importe quel emploi, sous peine de sanctions, les privant ainsi de tout choix sur leur avenir.

Nous refusons la privatisation de la politique de l'emploi. Quelles mesures comptez- vous prendre pour que le service public de l'emploi et le régime d'assurance chômage continuent de relever de missions clairement dissociées, au service des usagers ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – Un réseau unique est le meilleur moyen d’accompagner les chômeurs : plus cet accompagnement est proche et régulier dans le temps, comme au Danemark, plus la reprise est rapide. C’est pourquoi nous avons, sous l’impulsion du Président de la République, engagé cette fusion.

Celle-ci ne procède certainement pas de la volonté de réaliser des économies ! Le redéploiement des effectifs se fera vers des postes proches des demandeurs et des entreprises. Au reste, cette réforme, qui implique de nombreux acteurs, n’est pas simple. Les difficultés sont même si importantes que nous ne l’aurions pas engagée si nous n’étions convaincus de sa nécessité.

M. François Rochebloine – Parmi les griefs les plus souvent formulés par les entreprises et les citoyens des pays de l'OCDE figure l'accroissement des formalités administratives. Dans ce domaine, la France n’est pas un modèle. La « paperasserie », qui pèse lourdement sur l'esprit d'entreprise et le sens de l'innovation, doit être combattue. Les ordonnances Raffarin de 2004 ou encore la simplification de l'environnement des entreprises que vous avez entreprise, Monsieur le ministre, marquent un louable effort en faveur de la modernisation de l’économie.

En effet, les PME et les PMI n'en peuvent plus. Dans nos circonscriptions, on nous demande de cesser de concevoir des dispositifs lourds et de plus en plus complexes, très coûteux en termes économiques. Mais ne devrait-on pas commencer par la suppression des 35 heures ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail  Ce sont les 35 heures imposées, uniformes quels que soient la taille et le secteur d’activité de l’entreprise qui posent question. La loi du 31 janvier 2007 a édicté les règles : tout projet de modification du code du travail devra être préalablement transmis aux partenaires sociaux.

Les 35 heures ne doivent pas être un maximum. C’est la raison d’être des nouveaux dispositifs concernant les heures supplémentaires. Cinq millions de Français effectuent 900 millions d’heures supplémentaires chaque année et ils ont pu constater, ce mois-ci, la différence sur leur fiche de paye, puisqu’elles ne sont plus payées 10 %, mais 25 % de plus.

M. François Rochebloine – Encore une fois, c’est complexe !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Lorsque les logiciels de paye seront installés, on n’en parlera plus ! De plus, ces heures supplémentaires sont exonérées des charges sociales – tout en donnant droit à la retraite et à la sécurité sociale – et ne seront pas imposables. Pour un salarié au SMIC effectuant 4 heures supplémentaires par mois, la différence est de 70 euros !

Les 35 heures ont cassé le lien privilégié qui existe entre les cadres et l’entreprise. S’agissant du forfait cadre, nous n’avons pas pu aller aussi loin que nous l’avions souhaité dans la loi TEPA, pour des raisons constitutionnelles. Mais nous avancerons aussi sur cette question. Par ailleurs, de nombreuses entreprises ne savent pas ou ne souhaitent pas solliciter une évolution du contingent d’heures supplémentaires. Nous engagerons un dialogue avec les organisations syndicales sur ce sujet. Croyez bien que nous ne nous en tiendrons pas au statu quo, synonyme de déclin pour la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP)

M. Georges Colombier – Si le chômage est en baisse depuis de nombreux mois, il nous faut poursuivre nos efforts en faveur des publics les plus en difficulté. Dans ce cadre, les groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification méritent une attention toute particulière. Les GEIQ regroupent des entreprises qui, pour résoudre leurs problèmes structurels de recrutement, parient sur le potentiel des jeunes sans qualification, des demandeurs d'emploi de longue durée ou encore des RMIstes pour les mener, par un tutorat, vers un poste stable.

La loi de finances pour 2007 leur a accordé le maintien d'une exonération de charges sociales patronales relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles. Mais l’article 53 du présent projet de loi de finances prévoit la levée de ces exonérations ainsi que l'alignement de la fiscalisation des contrats de professionnalisation « jeune » sur l'ensemble des contrats de travail. Cette suppression entraînera une charge supplémentaire importante par contrat et risque de compromettre l’efficacité de ces structures. Quelles garanties pouvez-vous donner aux GEIQ pour la poursuite de leur activité et quelles mesures entendez-vous prendre en faveur de l'apprentissage et de la professionnalisation ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – La montée en puissance des exonérations générales de cotisations sociales modifie la donne puisqu’elle rend moins attractives les exonérations spécifiques. Toutefois, vous avez raison de soulever le problème des GEIQ : le Gouvernement déposera un amendement à l’article 53 pour maintenir l’exonération de charges sociales patronales relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.

M. Alain Ferry – Je me réjouis du lancement du revenu de solidarité active, qui permet de ne plus pénaliser les personnes à faibles revenus reprenant une activité. Toutefois, cette bonne volonté gouvernementale contraste avec la réduction des crédits destinés aux contrats aidés, qui sont des outils précieux pour remettre au travail les plus fragiles. Même en période de forte croissance, les contrats aidés ont toujours dû être relancés !

Le plan de cohésion sociale a démontré son efficacité. Aussi, comme le disait la présidente de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, « ne faisons pas mine d’oublier les vertus des contrats aidés pour faire des économies à court terme qui auront un coût social inestimable à long terme. »

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Les contrats aidés jouent un rôle utile dans les périodes où l’activité économique ralentit. Aujourd’hui, le chômage décroît dans le secteur marchand, ce qui nous permet de procéder à des adaptations. Pour autant, le PLF pour 2008 permet la conclusion de 305 000 contrats aidés, soit 230 000 dans le secteur non marchand et 75 000 contrats initiative emploi dans le secteur marchand, contre 300 000 dans le PLF pour 2007, se décomposant en 260 000 dans le secteur non marchand et 40 000 contrats initiative emploi. Il n’y a donc pas de diminution, à ce stade.

De juin 2006 à juin 2007, le nombre de demandeurs d’emploi a baissé de 9,6 % – de 11,9 % pour les chômeurs de très longue durée et de 20 % pour les jeunes en chômage de très longue durée. Les besoins de contrats aidés dans le secteur non marchand sont donc plus faibles. L’allocation d’une enveloppe supplémentaire de 40 000 à 50 000 contrats aidés dans ce secteur au dernier trimestre de cette année permet de maintenir un effort considérable d’insertion.

Au-delà de l’aspect quantitatif, l’ANPE va accroître son effort pour accompagner le retour vers l’emploi durable de ceux qui terminent un contrat aidé. À la demande du Président de la République, le Gouvernement conduit une réflexion sur l’ensemble des contrats aidés pour en simplifier et en améliorer l’usage.

M. François Loos – Pourquoi supprimer les exonérations de charges sur les contrats de professionnalisation ? On nous dit que c’est pour simplifier le dispositif et que, au niveau du SMIC auquel on se situe en général, passer de l’exonération spécifique à l’exonération générale Fillon reviendrait au même pour les entreprises. Reste que cela devrait rapporter 140 millions ! C’est donc que ne sont pas concernés seulement des salariés au SMIC, et ce sont ces autres salariés que je veux défendre.

Dans la compétition internationale, la différence se fait sur la compétence. Pour qu’une entreprise ne délocalise pas, il faut que ses employés en France aient le niveau de compétence le plus élevé dans leur domaine. Cela exige des formations coûteuses pour des personnels bien payés. Il faut donc soutenir les entreprises dans cette démarche, et en particulier les patrons français de filiales de groupes internationaux. Plus il y a de contrats de professionnalisation de ce type, moins il y a de risques de délocalisation industrielle. Vous avez déjà décidé d’assouplir l’article 53 sur le point soulevé par M. Colombier ; j’aimerais que vous alliez plus loin en le supprimant totalement.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État  Il y a actuellement une montée en puissance des exonérations générales et ces dispositifs sont aussi avantageux pour les entreprises de moins de 20 salariés que les dispositions spécifiques.

M. Jean-Pierre Dufau – Ce n’est pas vérifié.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État  Nous allons y revenir à propos de l’article 53 et j’aurai des propositions à faire. Mais le Gouvernement ne nie pas du tout l’intérêt de ces contrats.

M. Régis Juanico – Ma question s’adresse à M. Bertrand. Les négociations entre partenaires sociaux sur la pénibilité au travail s’enlisent ; la conférence du 4 octobre sur les conditions de travail est passée plutôt inaperçue et s’est déroulée dans une relative indifférence.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Merci pour les partenaires sociaux !

M. Régis Juanico – Je voudrais vous interroger sur les moyens financiers et humains destinés au service public de l’Emploi chargé de l’amélioration des conditions de travail. Aujourd’hui, celles-ci se dégradent. Un quart des salariés européens se plaignent d’un stress professionnel ; cinq millions de salariés en France déclarent souffrir d’une inaptitude au travail et, chaque année, on recense 50 000 nouveaux cas de maladies professionnelles, soit quatre fois plus qu’il y a dix ans ; 75 % de ces maladies sont des troubles musculo-squelettiques, fruit d’un travail répétitif. Les contraintes de l’organisation du travail, l’exposition au bruit, aux produits toxiques s’aggravent. Il faut mobiliser tous les acteurs et prévenir plutôt que guérir ! Au-delà du renforcement des moyens pour l’inspection du travail et du développement de la médecine du travail, je pense aux CHSCT dans les entreprises de plus de 50 salariés. Que comptez-vous faire pour les autres ? Serait-il possible d’autoriser les représentants du personnel à saisir directement le réseau pour l’amélioration des conditions de travail du service public de l’emploi lorsqu’il y a des problèmes et qu’il faut intervenir ? Donc, êtes-vous d’accord pour donner des droits nouveaux aux CHSCT ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail D’abord, qu’entendez- vous par « service public de l’emploi sur les conditions de travail » ?

M. Régis Juanico – L’ANACT, Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je ne suis pas sûr que les acteurs de l’ANACT apprécieraient votre définition.

Pour ce qui est des conditions de travail, il a quand même fallu attendre le 4 octobre 2007 pour organiser la grande conférence à laquelle vous faisiez allusion, en termes peu délicats pour les partenaires sociaux. Tous se sont exprimés après cette conférence et, patronat comme syndicats, ont parlé d’avancées à partir de propositions précises que j’ai faites. Celles-ci portaient sur le passage de la durée du mandat dans les CHSCT de deux à quatre ans ; sur les modalités possibles de représentation des 8 millions de salariés dans les très petites entreprises, où il n’y en a pas du tout et sur une formation des membres des CHSCT à cette question des conditions de travail – j’ai en effet constaté qu’une telle formation changeait beaucoup de choses dans l’entreprise !

J’ai transmis ces trois propositions aux partenaires en vue d’une négociation. La question du droit d’alerte sur les conditions de travail a été posée également, dans le même cadre. S’agissant des troubles musculo-squelettiques, une campagne va être lancée sur une durée de trois ans. Nous ne nous sommes donc pas contentés de parler, nous nous sommes donné la possibilité d’avancer. Sur de tels sujets, on peut sans doute dépasser les clivages politiques !

M. Victorin Lurel – Je reviens sur les contrats de travail aidés en outre-mer. En 2002, ils bénéficiaient de 502 millions de crédits. Aujourd’hui, ce sont seulement 142 millions qui sont inscrits dans la mission « Travail et emploi ». Le secrétaire d’État à l’outre-mer nous a assuré qu’il vous avait transféré 158 millions. Où sont les 16 millions de différence ?

Vous mettez en avant la dignité du travail dans le secteur marchand. Mais celui-ci n’a jamais créé les emplois suffisants pour absorber les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Dans les quatre régions d’outre-mer, le taux de chômage est en moyenne de 27 %. Depuis le gouvernement Raffarin, vous avez développé les contrats précaires, et outre-mer, les contrats nouvelle embauche, qui sont une forme de CPE, pour les entreprises de moins de 20 salariés – ce qui représente 98 % des entreprises en Guadeloupe. Or le chômage a augmenté de 1,3 % dans les quatre régions d’outre-mer en 2006, ce qui démontre que notre précarité n’est certainement pas source de dynamisme sur le marché du travail !

Comment allez-vous faire plus et mieux avec beaucoup moins de crédits ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État La quasi-totalité des crédits a été transférée au ministère de l’économie, en passant du programme 138, « emploi outre-mer », aux programmes 102 et 103 ; n’ayez donc pas de crainte sur ce point.

Quant à ce que vous avez dit sur les CNE, je peux le comprendre ; nous devrons mettre au point avec les partenaires sociaux des contrats alliant la flexibilité et la sécurité.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Pour compléter ma réponse à M. Juanico, je veux indiquer que, sur la question du stress au travail, j’ai confié aujourd’hui une mission à deux experts, qui auront jusqu’en février 2008 pour définir des indicateurs sur les troubles psychosociaux dans les entreprises et pour nous proposer un plan d’action.

M. Guénhaël Huet – Le manque de mobilité, qui touche également les jeunes, est un obstacle important à l’entrée sur le marché du travail. L’action des missions locales et des PAIO, par ailleurs très efficace, s’y heurte malheureusement trop souvent. Quelles mesures concrètes envisagez-vous pour favoriser la mobilité des jeunes ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État C’est un réel problème, notamment en zone rurale, mais les pouvoirs publics n’ont pas à prendre une décision nationale à ce sujet ; il revient aux structures que vous avez citées d’agir. À titre d’exemple, certaines maisons de l’emploi se sont dotées d’un parc de véhicules deux-roues qui facilitent la mobilité à proximité.

Mme la Présidente - Nous en avons terminé avec les questions.

TRAVAIL ET EMPLOI

ART. 33 ET ÉTAT B

M. Michel Liebgott – Notre amendement 141 rectifié pourrait faire l’unanimité ; certains collègues qui sont intervenus dans la discussion générale et qui ne sont pas là ce soir, comme Denis Jacquat et Pierre Cardo, l’auraient voté.

Le redémarrage de l’emploi, nous dit-on, rendrait moins nécessaires qu’auparavant les emplois aidés ; en fait, il profite d’abord et surtout aux personnes qui ont une qualification et sont immédiatement opérationnelles. Les emplois aidés sont destinées à des personnes qui, souvent, habitent dans des quartiers défavorisés et cumulent les handicaps ; et les structures qui les abritent, souvent associatives, n’ont parfois pas les moyens de fonctionner autrement. Certes on en a peut-être abusé, notamment dans les établissements hospitaliers, mais ils sont utiles, voire indispensables – sauf à demander aux collectivités locales de prendre le relais.

Nous proposons donc un transfert de crédits de 171 millions en direction des emplois aidés.

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial de la commission des finances pour les politiques du travail et de l’emploi – Ces 171 millions sont pris sur l’aide à l’emploi dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants… Or certes les crédits alloués aux contrats aidés dans le secteur non marchand sont en diminution, le nombre d’entrées programmées passant de 260 000 à 230 000, mais cette évolution est justifiée par l’amélioration de la situation de l’emploi : le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à l’ANPE a diminué de 9 %, et cette baisse bénéficie à toutes les catégories de demandeurs. De plus, il y a eu une forte augmentation des entrées en contrat aidé en fin d’année 2007. Enfin, si par hasard il y avait un retournement de conjoncture, le Gouvernement prendrait les décisions qui s’imposent.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Même position : il n’y a pas lieu de prévoir plus que ce qui est inscrit. Il y aura eu 230 000 entrées en contrat aidé dans le secteur non marchand, contre 260 000 prévues en loi de finances initiale. De plus, nous pourrons toujours ajuster l’enveloppe en cours d’année, en fonction de la situation du marché du travail. Avis défavorable donc.

M. Patrick Roy – Messieurs les ministres, vous répétez à l’envi que le chômage baisse, mais vous savez bien que la situation n’est pas uniforme. Cet après-midi, vous avez vous-même admis que les contrats aidés étaient très utiles pour les franges de la population les plus éloignées de l’emploi. Dès lors, on ne peut comprendre que vous repoussiez le traitement des situations les plus urgentes à une date ultérieure. Je ne peux pas rentrer dans ma circonscription et dire à mes administrés : « Le Gouvernement mesure votre souffrance mais il estime que son traitement n’est pas prioritaire. »

M. Jean-Patrick Gille – Ce qui est essentiel, c’est d’éviter les effets de stop-and-go(Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

M. Jérôme Chartier – Qu’est-ce que cela veut dire ?

M. Jean-Patrick Gille – À partir du moment où l’on annonce d’en haut que le nombre de contrats va diminuer, la mécanique se grippe et tout s’arrête sur le terrain. Il faut éviter de renouveler cette erreur, précédemment commise – je l’admets – par tous les gouvernements. Au reste, vous l’avez bien vu cette année : la situation s’améliore dès que l’on annonce que des contrats seront remis en circulation. Nous plaidons par conséquent pour le maintien de l’engagement financier à son niveau antérieur, quitte à adapter les volumes financiers en cours d’année en fonction des besoins. Il faut, à titre conservatoire, maintenir les dotations, pour permettre notamment aux chantiers d’insertion de continuer à travailler sereinement.

L'amendement 141 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Victorin Lurel – Mon amendement 161 vise à abonder de 29 millions le dispositif du congé de solidarité outre-mer. Tout à l’heure, le Gouvernement m’a répondu que la totalité des crédits avaient été transférés mais le compte n’y est pas. Du fait de la contraction des dotations, le fonds pour l’emploi dans les DOM va disparaître, de même que le congé de solidarité créé par la loi d’orientation de 2000. Or ce dernier dispositif qui s’adresse au secteur marchand et se voit cofinancé par l’État, par les collectivités et par les entreprises elles-mêmes, a créé beaucoup d’emplois, en permettant à des salariés de plus de 55 ans de prendre leur retraite sous réserve que leur départ soit compensé par le recrutement de jeunes de moins de 30 ans. Nous demandons la prorogation pour un an d’un outil qui a permis de créer ou de préserver 700 emplois dans notre île, ce qui n’est pas rien dans un bassin d’emploi aussi restreint. Outre-mer, ce n’est pas le taux d’activité des seniors qui pose problème mais l’emploi des jeunes. Il ne faut pas se priver d’un instrument efficace par pur a priori idéologique.

M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial – On a toujours envie d’être favorable à un amendement lorsque c’est M. Lurel qui le présente… (Sourires) Cependant, le dispositif du congé de solidarité outre-mer est en voie d’extinction et le fonds ne gère plus que le stock existant.

Mme Huguette Bello – C’est bien dommage !

M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial – C’est pour cela qu’il est inutile d’abonder les crédits comme le propose M. Lurel. Avis défavorable.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Même avis. Ce dispositif de préretraites publiques est en train de s’éteindre, puisqu’il était prévu que les entrées cessent au 31 décembre 2006. La mesure a été prorogée pour une seule année dans le PLF pour 2007, en réduisant de surcroît la part financée par l’État. Au reste, l’abondement que vous proposez n’aurait aucun impact pour les principaux bénéficiaires,…

Mme Huguette Bello – Pourquoi donc ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État …dans la mesure où il n’est pas possible d’entrer dans un dispositif qui n’existe plus.

M. Victorin Lurel – Je ne suis pas du tout convaincu. On a coutume de dire que la statistique a été créée pour mentir avec précision… Ce dont je puis témoigner, c’est que chez moi, le dispositif crée des emplois…

Mme Huguette Bello – Chez moi aussi !

M. Victorin Lurel – En outre, il ne s’agit pas, Monsieur le ministre, d’un instrument destiné au secteur public – lequel est couvert par la CPA. Nous parlons de l’emploi des jeunes dans le secteur marchand. Vous devriez être sensible à ce dernier argument plutôt que de vous laisser guider par l’idéologie.

L'amendement 161, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Dufau – Notre amendement 142 vise à abonder de 15 millions le fonds d’insertion professionnelle pour les jeunes – auquel le ministre se prétend attentif –, en vue de maintenir sa dotation au niveau atteint en 2007, soit 50 millions. Destiné aux jeunes en difficulté, ce fonds vise à financer des actions d’accompagnement personnalisé qui constituent un préalable indispensable au retour à l’emploi. Nous proposons de dégager ce montant relativement modeste en le prélevant sur les crédits d’aide à l’emploi dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants. Tendons la main aux jeunes en difficulté.

M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial – Décidément, vous en voulez aux restaurateurs et aux hôteliers !

M. Jean-Pierre Dufau – Allons ! Est-ce que je vous dis que vous en voulez aux jeunes ?

M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial – Si les crédits du FIPJ ne sont pas reconduits à leur niveau antérieur, c’est tout simplement parce qu’ils n’ont pas été entièrement consommés. Peut-on renoncer aux politiques d’affichage qui consiste à sur-doter des lignes en sachant très bien que l’on n’arrivera pas à les épuiser ? Avis défavorable, dans la mesure où la décision du Gouvernement de prendre en compte les besoins réels nous semble sage.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Même analyse et même avis que votre rapporteur spécial : le FIPJ est un bon dispositif mais il faut le gérer selon de bons principes. Dans la mesure où les crédits 2007 ne seront pas consommés à la hauteur de ce qui était prévu, il est sain d’ajuster le volume de la dotation.

M. Thierry Mariani – Décidément, comme vient de le dire Frédéric Lefebvre, nos collègues socialistes en veulent aux cafetiers, hôteliers et restaurateurs. Si leurs trois premiers amendements avaient été adoptés, les crédits d’aide à l’emploi dans la restauration auraient été amputés de 215 millions ! Pourquoi tant de haine à l’encontre d’un secteur qui a créé 30 000 emplois dans les deux dernières années ? Que vous ont-ils fait ?

M. Yves Bur – Allons, tout cela, c’est du vent ! On sait bien que l’aide profite surtout aux patrons et que les salariés ne sont pas mieux payés !

M. Patrick Roy – Peut-être faut-il se demander pourquoi tous les crédits du FIPJ ne sont pas consommés ? Sans doute l’information ne circule-t-elle pas de façon satisfaisante car des besoins existent. Les jeunes en grande difficulté doivent être accompagnés – cela permet du reste de prévenir des dérives autrement coûteuses.

L'amendement 142, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l’accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques – La création d’un fonds national de revitalisation des territoires comblerait une lacune certaine. C’est ce que je propose par mon amendement 132, car si de très nombreux dispositifs de revitalisation territoriale existent, aucun ne concerne les très petits bassins d’emplois, où les besoins sont pourtant importants. Je compte donc sur l’attention bienveillante du Gouvernement.

M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial – La commission, qui n’a pas examiné l’amendement, entendra avec intérêt l’opinion du Gouvernement.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Votre préoccupation est aussi la nôtre, vous le savez. Cependant, la question demande une réflexion de fond car, comme vous l’avez souligné, plusieurs dispositifs existent déjà, les crédits destinés à la revitalisation territoriale sont dispersés dans différentes missions, 260 conventions de revitalisation et plus d’une trentaine de contrats de site ont été signés. Cet ensemble doit être recensé, examiné et harmonisé sans polémique Je propose donc la constitution d’un groupe de travail – auquel vous pourriez naturellement participer, Monsieur Gorce – chargé de recenser tous les crédits destinés à la revitalisation des territoires et de faire des propositions tendant à améliorer l’efficacité du dispositif global. Dans l’intervalle, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – J’aimerais, avant de prendre une décision, entendre le ministre du travail, qui brûle de s’exprimer ! (Sourires)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail Votre commission n’a pas examiné cet amendement et, pour ma part, j’y suis défavorable. Je ne remets pas en cause le principe que vous défendez, car je sais les besoins, mais vous gagez votre proposition en réduisant de 5 millions les crédits de l’action « Soutien du programme Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi », soit un tiers des crédits d’évaluation, alors que je vous ai dit être prêt à suivre M. Lefebvre, qui propose de les augmenter. La cohérence doit pousser au retrait de l’amendement d’autant qu’en trois ans, les efforts de productivité ont été considérables au ministère, où le coût de fonctionnement, rapporté au nombre d’agents, a diminué de 23 % ; on ne peut faire davantage.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Ma surprise est grande d’avoir entendu s’exprimer au sein du Gouvernement des opinions qu’il me faut bien qualifier de contradictoires, ce que je ne peux croire (Sourires). M. Novelli n’a-t-il pas estimé ma proposition prématurée mais nécessaire ? Vous considérez, Monsieur le ministre du travail, que le gage n’est pas bien choisi. Cela se peut, et j’aurais pu en choisir un autre, moins modeste, mais je ne l’ai pas souhaité. Quoi qu’il en soit, je retiens l’attention portée à cette question importante ainsi que l’engagement pris par M. Novelli et je retire l’amendement, en souhaitant que l’Assemblée, parfaitement éclairée, puisse se prononcer lors de l’examen du prochain budget.

L'amendement 132 est retiré.

M. Jérôme Chartier – Avec votre autorisation, Madame la présidente, je présenterai en même temps les amendements 84 et 85, qui sont complémentaires, et qui tiennent compte de la suppression, par l’article 54, des aides au remplacement de salariés partis en formation ou en congé de maternité ou d’adoption, dispositif, qui avait, plus qu’autre chose, créé un effet d’aubaine. Cette suppression permet une économie de quelque quatre millions. Nous proposons donc, et la commission nous a suivis, d’augmenter de 3,4 millions la subvention de l’ANPE pour lui donner la possibilité de favoriser plus énergiquement la reprise d’activité des femmes en fin de congé de maternité. La compensation choisie consiste à réduire, à due concurrence, les dépenses de communication prévues à l’action 5 du programme « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi », mais il s’agit en vérité d’un amendement d’appel.

Mme la Présidente – Quelle est l’opinion du Gouvernement sur cette mesure, qui favoriserait l’égalité professionnelle ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Les aides au remplacement de salariés partis en formation ou en congé de maternité ou d’adoption supprimées par l’article 54 sont en effet sous-utilisées. Loin de nous l’idée de ne pas favoriser l’emploi des femmes, sujet auquel nous attachons comme vous, Madame la présidente, une grande importance, mais pour cela, plutôt que le dispositif suggéré, nous préférons développer l’aide à la reprise d’activité des femmes – l’ARAF, dispositif co-financé par le Fonds social européen. En 2007, 18 000 femmes en ont bénéficié, pour un coût total de 6 millions, et nous entendons en faire bénéficier 36 000 femmes en année pleine, pour un coût de 12 millions. Je demande donc le retrait des amendements.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Je rappelle que la conférence sur l’égalité salariale et professionnelle se tiendra à la fin du mois de novembre. Je suis loin d’être hostile à cet amendement, du moins au plan des principes, mais il n’est absolument pas certain que les crédits prévus seront effectivement consommés. Nous en resterions alors à un simple effet d’annonce…

Cet amendement propose en outre de réduire de 3,4 millions d’euros les moyens de communication du ministère, déjà ramenés de 10 à 6 millions du fait du transfert de la compétence en matière d’emploi à Bercy. Les 6 millions d’euros restants doivent servir à honorer les marchés déjà passés, en particulier la plateforme de renseignements téléphoniques, dont certains orateurs ont critiqué les insuffisances. Nous ne pouvons donc les amputer.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

M. Jérôme Chartier – J’entends bien les arguments du Gouvernement. Avec l’autorisation du rapporteur, je retire ces deux amendements. Le gage ne convient pas, et il serait effectivement dommage de voter des crédits qui ne seraient pas consommés.

J’aimerais toutefois que le Gouvernement accepte de s’engager à financer les frais de garde exposés par les femmes sortant d’un congé de maternité. Il ne serait pas mauvais que le nombre des bénéficiaires de ce dispositif dépasse 18 000 personnes… Puisqu’il est question de crédits de communication, je souhaite également que le Gouvernement veille à informer les intéressées des avantages offerts par ce dispositif (« Très bien ! » sur divers bancs).

Les amendements 84 et 85 sont retirés.

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – L’amendement 77 rectifié est le fruit des auditions menées par la commission. Nous avons besoin d’une évaluation des politiques de l’emploi. La commission a été effarée par l’incertitude qui entoure les politiques de l’emploi, qu’il s’agisse du nombre de contrats signés, de l’utilisation des crédits ou des solutions proposées aux demandeurs d’emploi par les agents de l’ANPE. Personne n’est plus capable de s’y retrouver dans le millefeuille adopté au fil du temps.

M. Roland Muzeau – Mais si ! Nicolas Sarkozy sait tout (Sourires).

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – Cet amendement a pour objet d’augmenter de 200 000 euros le montant de la subvention versée par l’État au centre d’étude de l’emploi. Ce serait envoyer un message très utile.

Nous souhaitons en effet que les commissions des finances et des affaires sociales puissent travailler sur une architecture nouvelle des dispositifs en matière d’emploi. J’espère que la révision générale des politiques publiques nous permettra de revenir sur ce sujet, et surtout de disposer enfin de données chiffrées. N’oublions pas que la Cour des comptes et le Conseil pour l’emploi ont maintes fois critiqué l’insuffisante évaluation de ces politiques.

J’ajoute que la commission sur la réforme des institutions, présidée par Édouard Balladur, a demandé un renforcement de l’évaluation des politiques publiques au sein du Parlement. Le Gouvernement ne doit plus être le seul à pouvoir demander que des évaluations soient menées. Cette compétence doit également être reconnue au Parlement et au Conseil économique et social, dont nous souhaitons renforcer les pouvoirs.

Chacun sait bien, en matière d’emploi, que certains dispositifs passent à côté des publics visés, et que les solutions proposées aux chômeurs ne sont pas les mêmes partout sur le territoire. Pour toutes ces raisons, j’espère que le Gouvernement approuvera cet amendement, qui tend à améliorer le travail parlementaire et à envoyer un signal utile.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Cet amendement, que j’ai présente conjointement avec M. Lefebvre, a été adopté à l’unanimité par la commission. Il s’agit d’éviter les polémiques stériles sur l’impact des politiques menées et ainsi de faire porter les débats sur le fond. Cessons de nous demander si les 35 heures ont permis, ou non, de créer entre 350 000 et 500 000 emplois, et si les exonérations de charges auront le même effet.

Pour cela, nous devons nous appuyer sur des mesures chiffrées, conformément à ce que prévoit la LOLF. On peut d’ailleurs envisager qu’un droit à l’évaluation et au contrôle soit désormais inscrit dans la Constitution – dans l’hypothèse où elle serait révisée.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Puisque le rapporteur a demandé un engagement du Gouvernement, j’aimerais en souscrire également un. Je crois beaucoup au service « après vote » : il faut que les crédits prévus par cet amendement – 200 000 euros – soient effectivement consommés.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – Comme l’a indiqué M. Lefebvre, il est temps d’évaluer ce que le Parlement vote. M. Gorce ayant mentionné les 35 heures, ce que je m’interdisais de faire jusqu’à présent, permettez-moi d’en dire un mot : je doute qu’il y aurait eu un parlementaire pour voter ce dispositif si une évaluation avait été menée sur la généralisation autoritaire des 35 heures.

Mme Martine Billard – Vous faites erreur !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – Nous avons besoin d’instaurer une véritable culture de l’évaluation, ce qui exige des moyens et des compétences.

L'amendement 77 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Les crédits de la mission « travail et emploi », mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Présidente – J’appelle les articles du projet de loi de finances rattachés à cette mission.

ART. 52

M. Jean-Pierre Dufau – Toujours dans un souci d’évaluation, l’amendement 143 rectifié demande la réalisation d’un bilan de l’insertion dans l’emploi des jeunes ayant conclu un contrat initiative-emploi.

L’article 52 appelle, en effet, trois remarques. Tout d’abord, c’est aller un peu vite en besogne que de prétendre que le dispositif SEJE, « soutien à l’emploi des jeunes en entreprise », s’adresse au même public que le CIE ; nous avons, quant à nous, des doutes sur la concordance des deux publics et, donc, sur les résultats d’une fusion des deux dispositifs. Ensuite, il est assez paradoxal de diminuer de 30 % les crédits consacrés aux CIE au moment même où on leur ajoute les SEJE. Enfin, alors que l’on compte aujourd’hui 50 000 SEJE et 40 000 CIE, vous ne prévoyez plus que 75 000 contrats !

Plus grave encore, l’exposé des motifs du projet se lit ainsi : « La possibilité de moduler, par arrêté préfectoral, l’aide attribuée à certains publics dans le cadre d’un CIE, qui n’est pas prévue dans le cadre du SEJE, permet d’améliorer l’impact du dispositif en ciblant les aides les plus élevées sur les publics prioritaires tout en diminuant le coût du dispositif pour d’autres bénéficiaires ». Vous allez donc laisser aux préfets le soin de moduler ces aides, en fonction des circonstances ou des enveloppes, et le Parlement ne votera pas l’attribution de ces crédits. Que faites-vous de la péréquation nationale ?

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – Nous sommes d’accord avec les auteurs de l’amendement sur une chose : c’est que le SEJE est un mauvais dispositif, qui présente de trop importants effets d’aubaine.

M. Jean-Pierre Dufau – Ce n’est pas nous qui l’avons créé !

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – Le Parlement doit savoir revenir sur des dispositifs qui ne fonctionnent pas.

M. Jean-Pierre Dufau – Nous vous avions prévenus !

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – Et vous continuerez à avoir raison si vous supprimez le SEJE, en votant l’article 52.

S’agissant de l’amendement, je pars du principe que le Gouvernement a la volonté de cibler le CIE sur les jeunes. Le ministre le confirmera certainement. Nous aurons l’occasion, dans le cadre de l’évaluation globale, l’année prochaine, de vérifier que le ciblage a bien lieu. Je demande le retrait de l’amendement.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État L’article 52 fusionne le SEJE, dispositif en direction des jeunes, avec le CIE, principal contrat aidé dans le secteur marchand. Comme le dit M. Lefebvre dans son rapport, la moitié des jeunes qui bénéficient d’un SEJE sont déjà salariés, alors même que la mission de ce dispositif était le retour à l’emploi. La fusion permettra d’éviter les effets d’aubaine et de mieux cibler les publics.

Je m’engage à ce que les 75 000 CIE programmés soient ciblés sur les jeunes et les seniors, ces derniers ne devant pas être oubliés, dans une politique de retour au plein emploi. Je demande le retrait de l’amendement.

M. Jean-Pierre Dufau – Je le retirerai à condition de recevoir l’engagement clair du Gouvernement…

M. Roland Muzeau – Ça va être dur !

M. Jean-Pierre Dufau – …qu’il y aura un ciblage précis des publics bénéficiaires – on découvre à présent qu’il englobe les seniors ; dont acte, je n’ai rien contre ces derniers ! – ainsi qu’une évaluation annuelle du dispositif, et en particulier l’engagement que les parlementaires seront informés de la façon dont les préfets, dans chaque département, l’appliqueront.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Je m’y engage.

L'amendement 143 est retiré.

L'article 52, mis aux voix, est adopté.

ART. 53

M. Francis Vercamer – L’amendement 127 supprime cet article. Le contrat de professionnalisation, concernant un public qui n’est pas ou que peu qualifié, est un dispositif qui fonctionne bien et qui progresse dans les entreprises. La suppression de l’exonération spécifique de charges pour ce contrat donnera un signal très négatif, qui portera un coup d’arrêt au dispositif. En outre, on nous dit que cette mesure permettra de réaliser une économie de 140 millions et, en même temps, qu’elle n’aura guère d’influence sur le coût du travail pour les entreprises. Comment est-ce possible ?

M. Roland Muzeau – Avec Harry Potter ! (Sourires)

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Mon amendement 133 vise aussi à supprimer l’article.

M. Jean-Patrick Gille – De même que l’amendement 144. Nous posons la même question que M. Vercamer : comment ce dispositif peut-il permettre de réaliser 140 millions d’économies ? Par ailleurs, modifier sans cesse les dispositifs ne simplifie pas les choses pour les entreprises.

M. Gérard Cherpion, rapporteur pour avis – La commission des affaires culturelles a adopté les amendements de suppression, étant sensible aux inconvénients liés à des modifications brusques. À titre personnel, je souhaiterais connaître l’amendement que présentera le Gouvernement.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – La commission des finances a donné un avis favorable à la suppression. Le sujet appelle quelques explications. L’argument avancé pour abroger les exonérations de charges sur les contrats de professionnalisation tient à l’harmonisation et à la simplification des régimes d’exonération issus du système Fillon. Mais la suppression de dispositifs spécifiques ciblant des publics spécifiques ne risque-t-elle pas, dans un système plus général, de réduire l’efficacité de l’action de l’État par rapport à ces publics ?

Le contrat de professionnalisation, qui a mis du temps à décoller, est fragile. S’il intéresse beaucoup les petites entreprises de moins de vingt salariés, il intéresse aussi les autres, et notamment celles de plus de 250 salariés, que le Gouvernement a invitées, en 2006, à augmenter le nombre de jeunes qu’elles embauchent en alternance, en contrat d’apprentissage et en contrat de professionnalisation. Alors que l’on se demande comment favoriser l’emploi des seniors, on va modifier un régime d’exonérations qui favorise l’embauche en contrat de professionnalisation des salariés de plus de 45 ans.

Cette mesure est donc prématurée, et comporte des risques. De plus, si nous ne votons pas les amendements de suppression, nous allons devoir trouver des correctifs, ce qui ira à l’inverse de la simplification souhaitée.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – L’article 53 est avant tout une mesure de simplification administrative. Les exonérations de droit commun sont identiques aux exonérations spécifiques pour les entreprises de moins de 20 salariés ; pour les entreprises de plus de 20 salariés, la différence moyenne est de 20 euros. Le Gouvernement a donc choisi de supprimer ces exonérations spécifiques, en donnant la priorité à la simplification.

Par ailleurs, tout employeur ayant conclu un contrat de professionnalisation à durée indéterminée avec un jeune touche une prime de 200 euros par mois la première année et de 100 euros l’année suivante. Une aide forfaitaire de l’Assedic, de 200 euros par mois est allouée. Enfin, les organismes gestionnaires de la formation professionnelle financent ces contrats. Ces leviers sont autrement plus efficaces que les exonérations.

Pour autant, le Gouvernement a souhaité apporter une réponse aux deux problèmes soulevés par le rapporteur spécial. D’une part, 1,8 % des bénéficiaires de contrats de professionnalisation sont âgés de plus de 45 ans ; pour prendre en compte leur situation, l’amendement 173 rectifié vise à diminuer la taxe d’apprentissage pour les entreprises qui embauchent des personnes de plus de 26 ans en alternance. Par ailleurs, comme je l’ai indiqué à M. Colombier, le même amendement vise à maintenir les exonérations de charges sociales patronales relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles réservées aux groupements d’employeurs.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Je demeure perplexe. Le changement permanent des règles n’est pas sain et les entreprises nous le reprochent souvent. En outre, l’alternance est un élément clé de la politique de l’emploi. Enfin, Monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu à la question de M. Vercamer. D’où proviennent ces 140 millions d’économies ? Cela tient du miracle ! (Approbations et sourires sur plusieurs bancs)

M. Jérôme Chartier – M. Méhaignerie, lorsqu’il présidait la commission des finances, m’a appris à faire une « confiance avérée » au Gouvernement, c’est-à-dire une confiance éclairée par des évaluations. Cet excellent article de simplification doit être voté, si possible à l’unanimité !

M. Yves Bur – S’il faut encourager tout ce qui va dans le sens de la simplification, je regrette que l’amendement 173 rectifié maintienne des exonérations des charges sociales patronales au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles. La semaine dernière, nous avons décidé de supprimer ces exonérations, en raison de la nature assurancielle de la cotisation. Nous devons en effet inciter toutes les entreprises à préserver et protéger la santé de leurs salariés. Ce serait un mauvais signal que de voter cet amendement, qui, en outre, accroîtra la complexité du système.

M. Jean-Patrick Gille – Je ne vois pas où est la simplification, si elle consiste à créer une nouvelle exonération ! Par ailleurs, le contrat de professionnalisation est issu d’un accord des partenaires sociaux. L’article 53 revient à le modifier de manière unilatérale.

Les amendements de suppression, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État – J’ai défendu l’amendement 173 rectifié.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Ce que je redoutais arrive : nous sommes maintenant amenés à corriger les effets négatifs de ce dispositif. Il s’agit de maintenir les exonérations des charges sociales patronales au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les groupements d’employeurs, afin de ne pas décourager les contrats de professionnalisation. Avis défavorable.

Le sous-amendement 180 rectifié, de repli, vise à corriger une deuxième dérive de ce dispositif qui concerne les salariés de plus de 45 ans. Le Gouvernement a indiqué que l’application du nouveau dispositif entraînerait une perte moyenne de 20 euros. Mais dans le régime actuel, la franchise des cotisations sociales dues au niveau d’un SMIC s’applique quel que soit le niveau de rémunération, tandis que le régime proposé sera dégressif à partir de 1,1 fois le SMIC. Je vous renvoie à la page 46 de mon rapport : les montants de perte pour les entreprises recrutant des seniors au-delà du SMIC en contrats de professionnalisation sont supérieurs à ceux qu’a présentés M. le secrétaire d’État, et plus réalistes.

M. Benoist Apparu – Le dispositif de l’article 53 est neutre pour les entreprises de moins de 20 salariés et l’amendement 172 du Gouvernement va assouplir le dispositif pour les entreprises de plus de 250 salariés. Rien n’est prévu pour celles qui ont entre 20 et 250 salariés. Le sous-amendement 182 vise donc à étendre l’exonération des charges sociales patronales dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles à toutes les entreprises.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – La commission n’a pas examiné ce sous-amendement, qui en rajoute encore dans la correction du dispositif de l’article 53 – cette démarche était prévisible, mais je ne peux aller dans le sens d’une extension des exonérations de cotisations ATMP, alors qu’il faut faire aujourd’hui des efforts en matière de sécurité au travail. Avis défavorable.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Le Gouvernement proposera par amendement un dispositif spécifique pour les groupements d’employeurs en ce qui concerne les contrats d’insertion et de qualification. Je demande donc le retrait ou le rejet du sous-amendement 182. S’agissant du 180 rectifié, ses trois pages cadrent mal avec l’objectif de simplification que nous partageons tous… Mais pour être agréable à M. Gorce, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. Roland Muzeau – Je partage l’avis de M. Bur. Décider des exonérations sur les cotisations d’accidents du travail et de maladie professionnelle, c’est prendre une responsabilité énorme, celle de mettre en cause la prévention, dont M. Bertrand a rappelé qu’elle est essentielle. Je suis donc opposé à cet amendement et aux sous-amendements.

Le sous-amendement 182 est retiré.

Le sous-amendement 180 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 173 rectifié, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article 53, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 53

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État L’amendement 172 est défendu.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Cet amendement vise à limiter l’impact des dispositifs de l’article 53 sur les contrats de professionnalisation. Intégrer dans les 3 % de jeunes de moins de 26 ans en contrat d‘alternance que les entreprises de plus de 250 salariés doivent embaucher, les contrats de professionnalisation des plus de 45 ans, cela relève un peu de la contorsion. Mais je ne peux être opposé à ce dispositif, quant au fond.

L'amendement 172, mis aux voix, est adopté.

ART. 54

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Cet article supprime les aides au remplacement des femmes en congé de maternité ou d’adoption. Or, ce dispositif n’est entré en vigueur qu’avec le décret du 23 mars 2007 : on ne peut donc en mesurer déjà l’impact, et procéder ainsi n’est pas de bonne gestion. Le Gouvernement n’avait-il pas une claire conscience de ce qu’il proposait ? L’amendement 134 demande un rapport d’évaluation sur la disposition qu’on veut supprimer.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Avis défavorable. Le dispositif correspond à une véritable attente des PME, mais il est mal mis en œuvre et c’est pourquoi nous le supprimons. Le Gouvernement aidera mieux les femmes en doublant le nombre de bénéficiaires de l’aide au retour à l’activité accordée par l’ANPE sur subvention de l’État. Nous étudions un dispositif capable de répondre aux besoins des PME. Je souhaite associer à la réflexion Mme Zimmermann qui a signalé ce point important.

L'amendement 134, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 54, mis aux voix, est adopté.

ART. 55

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – La commission a adopté l’amendement 86 rectifié sur la proposition de M. Chartier.

M. Jérôme Chartier – Il est défendu.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Sagesse.

L'amendement 86 rectifié, mis aux voix, est adopté. L’article 55 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 55

M. Jean-Patrick Gille – Notre amendement 145 a pour objet d’obtenir une évaluation de l’efficacité des aides consenties à l’hôtellerie-restauration. Ont-elles permis de créer des emplois, d’augmenter les salaires, de développer l’activité ? On y consacre 800 millions. Quant aux emplois créés, les chiffres varient beaucoup, mais dans le cas le plus favorable, chaque emploi revient encore à 50 000 euros. Ces aides sont le prix à payer pour les promesses faites à plusieurs reprises d’obtenir le taux de TVA à 5,5 %, mais il faudrait dire rapidement si ce taux sera obtenu, car la profession attend. Et tant que la question n’est pas tranchée, on ne parvient pas à faire une vraie politique de l’emploi dans ce secteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Dans le même esprit, je propose par l’amendement 136 rectifié après l’article 56 de proroger les aides pour un an afin de faire une évaluation. On engage près de 800 millions. Le Parlement devrait avoir tous les éléments avant de les pérenniser. Les partenaires sociaux devraient aussi pouvoir donner leur sentiment. La commission n’a pas examiné l’amendement 145. À titre personnel, avis favorable.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur – Avis défavorable sur les deux amendements. Nous souhaitons pérenniser ces aides, en les plafonnant, afin que la Commission européenne ne demande pas ensuite leur remboursement.

L'amendement 145, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 56

M. Roland Muzeau – L’amendement 139 supprime cet article. La promesse sur la TVA à 5,5 % étant impossible à tenir, vous avez procédé à une surenchère avec ce type de mesures d’aide à l’emploi pour l’hôtellerie-restauration qui coûtent très cher, puisque l’on parle de 800 millions, sans qu’on en connaisse les effets. À M. Mariani, fervent défenseur des hôtels-cafés- restaurants…

M. Richard Mallié – Vous êtes jaloux ?

M. François Rochebloine – Ils emploient beaucoup de gens.

M. Roland Muzeau – …je voudrais citer M. Dassault, qui a dit l‘an dernier au Sénat que ce budget énorme devait permettre la création de 22 000 emplois en 2005 et 26 000 en 2006, mais qu’en réalité, il y avait eu 15 700 créations en 2005 et 16 000 en 2006. Et M. Dassault parlait d’un coût de 31 000 euros ; aujourd’hui, on serait à 50 000 euros.

Par ailleurs, le Conseil d’État ayant annulé l’accord de 2004 dérogeant aux 35 heures et condamné les employeurs à verser l’équivalent de 18 mois d’heures supplémentaires à leurs salariés, le Gouvernement est passé en force en faisant valider l’accord dans le PLFSS pour 2007.

Nous refusons cette fuite en avant coûteuse pour l’État et inefficace pour l’emploi et les conditions de travail des salariés.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je pense que ce dispositif ne devra être maintenu que sous condition d’évaluation. Avis défavorable.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Défavorable.

M. Thierry Mariani – Le dispositif a été mis en place en 2004 dans l’attente du passage au taux réduit de TVA. En termes de créations d’emplois et d’augmentation des salaires, les objectifs ont été tenus, comme le montre le rapport Cherpion. Les représentants disent ne pas avoir été consultés sur la restriction du périmètre des aides ; est-ce bien le cas ? La modification des règles est contraire à nos engagements ; et les établissements de 30 salariés ont souvent joué un rôle moteur dans les progrès salariaux !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Comme je vous l’ai indiqué tout à l’heure, nous sécurisons le dispositif d’aide puisque nous évitons le couperet de Bruxelles, qui demande une notification au-delà d’un certain montant.

L'amendement 139, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 136 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 56, mis aux voix, est adopté.

ART. 57

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État Pour faire gagner du temps à l’Assemblée, j’indique que je suis défavorable aux cinq amendements de suppression, mais favorable à l’amendement 137 rectifié de M. Lefebvre, qui tend à reporter d’un an la disposition.

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – La commission ayant adopté l’article, elle aurait certainement repoussé les amendements de suppression. Quant à mon amendement 137 rectifié, il reporte en effet au 1er janvier 2009, après un exercice d’évaluation, l’application de la réforme. Cela permettra, Monsieur Gille, de mieux examiner le cas des personnes fragiles.

Mme la Présidente – Je demande à ceux qui souhaitent défendre les amendements de suppression d’être brefs.

M. Jean-Pierre Dufau – Nous nous rangeons à la proposition de M. Lefebvre de reporter la décision à l’année prochaine, à la condition que l’année 2008 soit mise à profit pour faire une étude précise.

L'amendement 146 est retiré.

M. Roland Muzeau – Pour ma part, je maintiens l’amendement 138 : si ce n’est pas applicable maintenant, attendons pour légiférer ! Cet article est extrêmement dangereux pour les personnes fragiles.

M. Francis Vercamer – Je me rallie moi aussi à l’amendement du rapporteur spécial.

L'amendement 128 est retiré.

L'amendement 138, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur – Je vais retirer l’amendement 24 – qui tendait, plutôt que de supprimer intégralement l’allocation, à en restreindre l’accès – au profit de celui de M. Lefebvre, mais il faudra trouver une solution l’année prochaine.

L'amendement 24 est retiré.

L'amendement 137 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 57 ainsi amendé, mis aux voix, est adopté.

ART. 58

M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial – Mon amendement 135 est défendu.

L'amendement 135, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 58, mis aux voix, est adopté.

ART. 59

M. Jean-Patrick Gille – Notre amendement 147 tend à supprimer le prélèvement de 200 millions sur le fonds de péréquation des sommes dédiées à la professionnalisation et au congé individuel de formation. Ce fonds géré par les partenaires sociaux doit servir à la formation, mais non être utilisé pour financer l’allocation de fin de formation, qui est à la charge de l’État – d’autant que ce mode de financement de l’AFF ne pourra pas être renouvelé, sous peine d’inconstitutionnalité.

M. Fréderic Lefebvre, rapporteur spécial – Ce fonds finançant de la formation, il paraît de bonne politique qu’il serve à financer l’AFF.

M. Jean-Patrick Gille – L’AFF, ce n’est pas de la formation, c’est de l’indemnisation !

M. Hervé Novelli, secrétaire d’Etat Même position que le rapporteur.

L'amendement 147, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 59, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente – Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs au travail et à l’emploi.

La séance, suspendue à 0 heure 15 le jeudi 8 novembre, est reprise à 0 heure 20.

SÉCURITÉ SANITAIRE

Mme la Présidente – Nous abordons l’examen des crédits relatifs à la sécurité sanitaire. Je ne sais pas s’il n’est pas sans danger de travailler aussi tard dans la nuit, mais nous y sommes contraints !

M. François Rochebloine – Rappel au Règlement. Il est assez regrettable que nous abordions un sujet de cette importance à une heure aussi avancée. Je souhaite, Madame la présidente, que vous en fassiez part à la Conférence des présidents. Lundi après-midi, nous n’avons pas siégé, et nous nous voyons donc contraints de débattre de ces enjeux essentiels au cœur de la nuit, avec seulement une quinzaine de députés en séance. Ce n’est certainement pas en procédant ainsi que l’on revalorisera le Parlement !

M. Jean Gaubert – Bien dit !

Mme la Présidente – Monsieur Rochebloine, je sors un instant de mon devoir de réserve pour approuver vos propos.

M. Gérard Bapt – Je partage tout à fait l’indignation de M. Rochebloine. Il n’est vraiment pas sérieux de nous imposer un tel ordre du jour et de faire venir deux ministres de plein exercice devant une dizaine de députés…

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Et quels ministres ! (Sourires)

M. Gérard Bapt – Ne croyez pas que nous ne voulions pas travailler, mais je vous prie, Madame la présidente, de transmettre au Bureau de notre assemblée que nous avons auditionné cet après-midi, pendant plus de quatre heures, dans le cadre du comité de suite sur le chlordécone, le professeur Belpomme et plusieurs experts de l’InVS, de l’AFSSA et de l’INSERM. Alors que sévissent la dengue et le chikungunya, et que la menace de la grippe aviaire reste en suspens, il n’est pas sérieux d’appeler ce sujet à minuit 25.

Mme la Présidente – Je transmettrai vos observations. Cela prouve, s’il en était encore besoin, que la réforme des institutions est nécessaire.

M. François Rochebloine – On peut aussi mieux s’organiser dans le cadre des institutions actuelles !

Mme la Présidente – Je vous rappelle que l’ordre du jour de nos travaux est fixé par le Gouvernement.

La parole est à M. le Rapporteur spécial.

M. Bruno Le Maire, rapporteur spécial de la commission des finances – Permettez-moi à mon tour de regretter d’avoir à traiter ce qui me semble être l’un des deux ou trois sujets d’intérêt prioritaire du moment devant une Assemblée certes de très grande qualité, mais malgré tout peu nombreuse.

En matière de sécurité sanitaire, la question n’est pas de savoir si nous aurons à faire face à de nouvelles pandémies, mais où, quand et comment. La sécurité sanitaire représente un enjeu de santé publique majeur. C’est aussi un enjeu économique, comme l’ont montré les épisodes de chikungunya à la Réunion et de fièvre catarrhale en métropole. Enfin, c’est un enjeu de justice sociale, car tous les Français doivent bénéficier du même degré de protection face au risque sanitaire.

Le premier volet de la politique de sécurité sanitaire concerne la sécurité alimentaire. Dans le projet de budget pour 2008, les crédits afférents représentent 546 millions, ce qui traduit une baisse de 1,3 % par rapport à 2007.

Cette baisse, il y a selon moi tout lieu de s’en féliciter. D’abord, elle témoigne de l’efficacité de la politique de déstockage des farines animales, le coût induit s’établissant à 38 millions, ce qui correspond à une baisse de 28 % par rapport à l’an dernier. Elle reflète ensuite un effort de réduction des effectifs du ministère de l’agriculture, puisqu’un départ à la retraite sur deux n’y sera pas remplacé dès 2008. Enfin, elle traduit la rationalisation du réseau des laboratoires nationaux. La construction d’un nouveau laboratoire à Angers permettra notamment de ramener de treize à dix le nombre des antennes de laboratoires. Tous ces efforts sont à mettre au crédit du ministère de l’agriculture. Ils permettront de redéployer les dotations vers de nouvelles actions prioritaires comme la biovigilance ou la surveillance des OGM, qui sont – le Grenelle de l’environnement l’a montré – les grands enjeux des années à venir.

Le deuxième volet de la politique de sécurité sanitaire concerne la veille sanitaire et la réaction aux situations de crise. Fort de 166 millions, le budget de cette politique connaît une augmentation de près de 60 %. La raison principale de cette progression est à rechercher dans la création de l’établissement public de réponse aux urgences sanitaires – l’EPRUS -, en application de la loi du 5 mars 2007 sur la préparation du système de santé à des menaces de grande ampleur. Pour 2008, cet établissement sera doté de 75 millions.

Au titre des priorités, il me semble essentiel de poursuivre l’effort de rationalisation des agences, établissements publics et instituts de recherche spécialisés. En créant des agences au gré des crises qu’il a eu à surmonter, notre pays s’est doté de cinq institutions : l’institut de veille sanitaire, l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’agence française de biomédecine et l’agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail.

Une telle accumulation pose plusieurs problèmes. Il y a d’abord un risque de recoupement des compétences des différents organismes. On l’a vu récemment, lors de la crise des biotoxines marines dans le bassin d’Arcachon, avec des évaluations qui ont pu diverger ou être rendues dans des délais très différents. Ensuite, nous disposons de structures de tailles très dissemblables, certaines comptant plus de 1 000 agents alors que d’autres – comme l’AFSSET, avec sa centaine d’agents – n’atteignent pas la taille critique. Enfin, si certaines agences disposent de réels moyens d’intervention, avec des instituts de recherche à disposition, d’autres n’ont pas cette chance.

Ayant pris connaissance du rapport des directeurs d’agences, je propose de faire de l'AFSSET une véritable agence de moyens ; à terme, de la rapprocher de l'AFSSA ; enfin, de constituer l'EPRUS en centre de la gestion de crise en cas de crise sanitaire avérée, sous la tutelle du ministère de la santé. Il s’agit donc de renforcer la coopération entre les différents établissements pour garantir la continuité de l’action.

Je propose par ailleurs de renforcer les moyens déconcentrés. Nous devons tenir compte de l’exemple que nous a donné M. Houssin : à l’aéroport de Roissy, deux ou trois agents doivent, seuls, contrôler des dizaines de milliers d’arrivées quotidiennes, et leurs risques sanitaires potentiels….

Je propose enfin de faire de la sécurité sanitaire une priorité européenne car, actuellement, les délais de réaction de l'Europe sont trop longs. Il conviendra donc de faire de la sécurité sanitaire un axe fort de la future présidence française de l'Union, et de renforcer la coopération avec les pays d’Asie du Sud-est pour tenter de prévenir la mutation éventuelle de certains virus.

Il faudra enfin réfléchir à de nouveaux modes de financement des conséquences des crises sanitaires. En effet, les risques financiers, notamment dans les secteurs touristique et agricole, représentent des montants très élevés. Il serait donc judicieux d’étudier une meilleure articulation entre financement par l'État et système assuranciel. C’est ce qui a été fait lors de la création du Fonds pour le financement de l'indemnisation des éleveurs victimes de la fièvre catarrhale.

La sécurité sanitaire est une menace grave pour notre pays, qui est en pointe dans ce domaine. Les crédits inscrits à ce titre dans le budget pour 2008 témoignent de la volonté de poursuivre l’effort engagé. Je vous demande donc de les adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Martine Billard, rapporteure pour avis de la commission des affaires – Je concentrerai mon propos sur la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine. L'eau est réputée être un produit particulièrement surveillé et, de fait, la France n'a pas connu depuis longtemps de crise sanitaire majeure en ce domaine. Toutefois, certaines crises sanitaires récentes ont profondément ébranlé la confiance des citoyens dans la qualité des produits qui leur sont distribués. De plus, des signes inquiétants de dégradation de la qualité des nappes d'eau souterraines et des rivières se sont fait jour, avec la mise en évidence de pollutions diffuses par des nitrates, des pesticides, des médicaments ou des hormones dont les effets sur la santé en cas d'ingestion prolongée à faibles doses ne sont pas encore parfaitement établis.

De nombreuses auditions m'ont amenée à établir que la sécurité sanitaire de l'eau, fortement encadrée, est globalement assurée, mais que certaines difficultés persistent, cependant que l'émergence de nouveaux défis encore mal évalués requiert certaines adaptations.

L'eau destinée à la consommation humaine est susceptible d'être contaminée par des micro-organismes pathogènes qui peuvent être à l'origine de maladies infectieuses – essentiellement des gastroentérites – qui constituent le principal risque direct et immédiat pour la santé des consommateurs, et par des polluants chimiques tels que pesticides, nitrates, hydrocarbures ou métaux lourds, qui peuvent affecter la santé à long terme.

C’est le code de la santé publique qui fixe les critères de qualité pour la composition de l'eau, conformément aux directives communautaires pertinentes. Par ailleurs, la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et le plan national santé environnement – le PNSE – ont également fixé des objectifs ambitieux en matière de sécurité sanitaire de l'eau. Ainsi, le PNSE 2004-2008 a défini comme objectif prioritaire la protection de la totalité des captages à l'échéance 2010 avec un objectif intermédiaire de 80 % des captages protégés fin 2008. Or, à ce jour, 60 % seulement des captages sont protégés. Le cadre réglementaire strict et les multiples contrôles opérés font que l'eau distribuée en France est globalement conforme à la réglementation, mais la qualité de l’eau captée demande souvent des traitements coûteux qui se répercutent sur le prix à payer par les consommateurs et des interdictions de consommation sont parfois nécessaires.

Selon l'Institut français de l’environnement, les niveaux de contamination par pesticides « sont souvent significatifs » et, en 2006, la consommation de l'eau du robinet a dû être restreinte à cause de pesticides dans dix-neuf départements, plus de 100 000 personnes étant concernées. La connaissance de l'action à long terme des pesticides sur la santé humaine reste incomplète, mais certains sont suspectés d'avoir des effets toxiques et notamment de perturber les fonctions de reproduction. Leur action de perturbateurs endocriniens ayant été mise en évidence sur la faune aquatique, on peut légitimement être préoccupé pour l'homme. Par ailleurs, ces pesticides sont mutagènes et donc potentiellement cancérigènes. Je rappelle à ce sujet l’inquiétude que suscite le chlordécone. De même une étude conduite par l'équipe du professeur Seralini met en évidence « les actions délétères du Roundup », l’herbicide le plus utilisé au monde. Ce produit, tel qu'il est vendu, est beaucoup plus toxique que son principe actif homologué, le glyphosate ; or, la réglementation actuelle des AMM ne prévoit pas d'effectuer les tests sur le composé commercialisé.

Comme les pesticides, les nitrates proviennent essentiellement de pollutions d'origine agricole. L'IFEN indique que depuis le début des années 1970, la qualité des cours d'eau se détériore, même si elle semble s'être stabilisée au cours de la dernière décennie. Ces fortes teneurs en nitrates dénotent l'état d'une ressource fortement dégradée, susceptible de devenir à bref délai impropre à la consommation humaine ! La lutte contre la pollution par les nitrates est donc un enjeu majeur pour la qualité des eaux et, à cet égard, la France manque singulièrement à ses obligations européennes.

L'apparition de nouveaux risques, moins connus et plus difficiles à traiter, requiert aussi une attention particulière. Il en va ainsi des résidus de médicaments présents dans les eaux superficielles car certains scientifiques évoquent désormais le fait que des composés présents à l'état de traces dans l'eau sont susceptibles d'effets sur la santé. C’est par exemple le cas des hormones de synthèse utilisées dans les contraceptifs, qui perturbent l'activité endocrinienne. L’AFSSA a été chargée, en liaison avec l'AFSSAPS et les industriels du médicament, de réaliser une étude sur l'identification et la hiérarchisation de ces molécules et, d'autre part, de dresser l’inventaire des niveaux de contamination des eaux destinées à la consommation humaine selon les molécules.

Le cas particulier des antibiotiques et des bactéries antibiorésistantes dans les eaux doit être mentionné, car ce problème sérieux est encore mal connu en France. L'utilisation d'antibiotiques chez l'animal, à des fins thérapeutiques ou comme promoteurs de croissance, peut entraîner la réduction de l'efficacité de ces produits en médecine vétérinaire mais aussi en médecine humaine par développement de souches antibiorésistantes de micro-organismes pathogènes. L'AFSSA a conclu en 2006 que les eaux destinées à la consommation humaine en France ne peuvent être considérées comme un milieu favorisant l'augmentation de l'antibiorésistance bactérienne. Elle recommande toutefois que l'utilisation raisonnée des substances antibiotiques reste une priorité d'action, et elle incite au maintien d’une veille constante.

Dans un tout autre domaine, il ne faut pas baisser la garde en matière de risque terroriste. Des mesures ont déjà été prises en matière de sécurisation des réseaux de distribution et dans le cadre du plan Vigipirate. D’autre part, les petits services locaux de distribution éprouvent souvent des difficultés pour assurer le suivi de la qualité de l'eau distribuée. Le regroupement des structures de captage et de distribution mérite donc d'être étudiée.

Pour limiter les risques émergents, des mesures simples doivent être adoptées. L'incertitude sur les risques liés à la présence de résidus médicamenteux dans l'eau destinée à la consommation humaine milite en faveur de mesures conservatoires telles que le Danemark en a prises depuis 1995 en interdisant l'usage d'antibiotiques pour la croissance animale. Le traitement des lisiers est aussi très efficace. L’équipement de tous les hôpitaux avec une station d'épuration et l’utilisation de pastilles désinfectantes par les malades à domicile pourraient être rapidement décidées. Le développement de bonnes pratiques dans la prescription des médicaments et en particulier des antibiotiques est également de nature à réduire l’antibiorésistance.

Une évolution de la réglementation des AMM doit avoir lieu car, comme je l’ai indiqué, les conditions d'autorisation de mise sur le marché des pesticides ne sont pas satisfaisantes. Il est urgent que les AMM permettent de vérifier les effets des produits tels qu'ils sont vendus dans le commerce.

L’amélioration des ressources en eau doit être accélérée, car le bilan réalisé en 2004 montre qu'à l'échelon national, la moitié des masses d'eau souterraines risque de ne pas atteindre en 2015 le bon état fixé par la directive cadre sur l'eau. Pour cela, il convient d'aller plus loin que la seule instauration de périmètres de protection en s’inspirant de l’expérience conduite par l’agence de l’eau Loire-Bretagne.

Ce n'est pourtant qu'en protégeant globalement l’environnement que l’on protégera mieux la santé des consommateurs d'eau. L'AFSSAPS a ainsi indiqué qu'une ouverture vers l'environnement, bien au-delà des traditionnelles études épidémiologiques limitées à la santé humaine, se dessinait dans les instances européennes. L’amélioration de la sécurité sanitaire de l'eau suppose une politique en faveur d’une agriculture moins consommatrice de produits susceptibles de créer des pollutions diffuses. En cela, le développement de l'agriculture biologique est une alternative.

Il ressort enfin très nettement de toutes les auditions qu'il est primordial d'intensifier les travaux de recherche sur les sources de contamination de l'eau. Nos interlocuteurs ont déploré la diminution du nombre des laboratoires publics et des crédits qui leur sont affectés, la raréfaction des structures publiques, le morcellement de la recherche, le manque de chercheurs travaillant sur l'eau potable. Le constat d'une recherche très dispersée avec une intervention publique faible est presque unanime.

La qualité de l'eau destinée à la consommation humaine influe directement sur la santé de chacun mais aussi sur celle des générations futures. Il est d'autant plus regrettable que le résultat du « Grenelle de l'environnement » sur la question de l'eau ne soit pas à la hauteur des enjeux. N’oublions pas qu’il faudra près d’un siècle pour que l’on retrouve la qualité initiale de l’eau dans certains bassins.

Je regrette que les objectifs annoncés par le Président de la République restent en deçà du plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides – baisse de 50 % de l’emploi des pesticides les plus dangereux d'ici 2009, limitation, voire interdiction, de l'utilisation des produits contenant des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.

La commission a approuvé les crédits de cette mission, mais j’estime, à titre personnel, que les moyens prévus restent insuffisants (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR).

M. Jean-Sébastien Vialatte, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – La sécurité et la qualité sanitaires de l'alimentation doivent devenir des priorités. Nos concitoyens doivent en effet jouir d’un niveau élevé de sécurité pour les denrées et produits végétaux et animaux que nous produisons ou importons. Cela permettra également à nos filières agricoles et agroalimentaires de rester compétitives à l'échelle internationale. Il ne faut donc pas s’étonner que le Président de la République ait fait des contrôles aux frontières un impératif à l’occasion du salon international de l'élevage qui s’est tenu à Rennes.

En imposant le respect des règles de sécurité alimentaire, nous nous conformerons également à nos engagements européens. La sécurité sanitaire de l'alimentation est en effet devenue un secteur harmonisé et encadré par de nombreux règlements communautaires, notamment le paquet « Hygiène ». Avec l'adoption de ces règlements, qui imposent le respect de la sécurité alimentaire « de la fourche à la fourchette » (Sourires), les méthodes de contrôle ont profondément changé, puisque les exploitants sont devenus les premiers responsables de la qualité de leurs productions.

Le renforcement de nos obligations en matière de sécurité alimentaire exige que les producteurs participent davantage aux mesures de prévention et au partage des coûts de gestion des crises. Il faudra également que l’État veille à mieux affecter et gérer les crédits disponibles, et que l’administration améliore son encadrement et son contrôle afin d’être plus efficace et plus réactive.

Ce projet de budget démontre que le ministère a bien pris en compte ces impératifs. Il s’agit notamment de mieux répartir les crédits disponibles, l’enveloppe globale étant en baisse pour la première fois depuis que nous appliquons la LOLF.

Bien que relativement épargnés par les diminutions de crédits affectant le budget du ministère de l'agriculture, les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » seront réduits de 1,3 % en crédits de paiement : ils s’élèveront à 546 millions d'euros en 2008. Cette baisse des crédits ne doit pas être perçue comme un signal négatif, car elle correspond à la réduction de certains postes de dépenses fort coûteux dans le passé. Je pense notamment au stockage et à l'élimination des farines animales, qui touchent à leur fin. Les moyens de l’action 5, qui regroupe à la fois le service public de l'équarrissage et les farines animales, seront donc réduits d’environ 13 % en 2008.

Si l’on exclut cette évolution, le budget alloué à la sécurité alimentaire augmente en revanche d’un peu plus de 1 %. En dépit des nombreuses critiques formulées, ici et là, à l’encontre du service public de l'équarrissage, il faut par ailleurs se féliciter que le ministère ait obtenu une participation des éleveurs de ruminants au financement du dispositif. Outre la question des reports de charges, qui devraient atteindre près de 50 millions d'euros à la fin de l'année 2007, il faudra que nous envisagions de nouvelles mesures, puisque le marché public passé en 2006 expirera bientôt.

J’en viens aux actions « Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale » et « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires », toutes deux en forte hausse dans ce projet de budget – 20 % de crédits de paiement supplémentaires pour l’une, et 7,5 % pour l’autre.

Bien qu’elle représente seulement 3,5 % des moyens du programme en crédits de paiement, la première de ces actions ne manque pas d’importance, puisqu’il s’agit du suivi des risques sanitaires et phytosanitaires et du contrôle des conditions de production des végétaux. Nous pourrions d’ailleurs consentir des efforts supplémentaires en matière d’intrants. Il me semble insuffisant de ramener de 18,5 % à 15 % les cas de non-conformité aux bonnes pratiques d’utilisation des produits phytosanitaires entre 2008 et 2010.

S'agissant de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, je me réjouis naturellement que le contrat d'objectifs et de moyens, enfin signé, soit respecté dans ce budget. La subvention pour charges de service public versée par le ministère de l'agriculture augmentera de 6 % et atteindra 52,3 millions d'euros. Cette hausse des crédits servira à financer, d'une part, l'augmentation inéluctable des charges de l'agence et, d'autre part, l’acquisition d’équipements pour un montant d’un million d’euros.

Conformément au contrat d’objectifs et de moyens, l’État devra examiner le plan d'investissements de l'AFSSA afin de proposer, le cas échéant, un nouveau calibrage des investissements consentis au titre des subventions pour charges de service public. L’agence doit en effet reconstituer sa capacité d’autofinancement. Cette question n’est pas totalement réglée, mais la direction de l’agence s’est déclarée très satisfaite de la signature du contrat d’objectifs et de moyens.

L'AFSSA s'est engagée à effectuer les redéploiements nécessaires à l'évolution de ses activités et à s’adapter en interne aux besoins exceptionnels causés par les crises sanitaires, mais l'État n’est pas en reste, puisqu’il devra financer les évolutions mécaniques de la masse salariale et s’est engagé à examiner sans délai d’éventuels besoins de ressources complémentaires dans l’hypothèse où les redéploiements internes à l’agence ne suffiraient pas.

S’agissant de la surveillance des denrées alimentaires et de la lutte contre les maladies animales, il faut noter la baisse de 1,9 % des crédits de paiement affectés à l'action 2 et, celle de 12,7 % de l'action 3. Je rappelle que ces deux actions correspondent à des secteurs fortement encadrés par le droit communautaire, où les dépenses incompressibles atteignent un niveau élevé. La lutte contre les salmonelles absorbe ainsi une part toujours plus importante des crédits. L'indemnisation des éleveurs s’élèvera notamment à 10,6 millions d'euros en 2008. Toutefois, compte tenu des dépenses engagées à ce titre, l'État ne versera pas d'indemnités de dépistage.

Au sein de cette même action, les crédits affectés au financement de l'inspection sanitaire dans les abattoirs et les criées diminuent fortement. Le rythme des visites sanitaires dans les élevages porcins deviendra en effet bisannuel, mesure qu’il faudra sans doute évaluer à l’avenir. Depuis l'adoption du paquet « hygiène », de nouvelles exigences sont apparues, et deux rapports récents de l'Office alimentaire et vétérinaire européen soulignent les carences qui demeurent dans ce domaine. Espérons que les recommandations formulées à l’occasion de l’audit de modernisation seront suivies.

J’en viens à la santé animale, sujet également crucial pour lequel la Commission européenne vient de proposer une nouvelle stratégie, qui sera axée sur la prévention. Il suffit de consulter la liste des maladies animales qui ont frappé l'Europe en 2007 – grippe aviaire, peste porcine, fièvre catarrhale ovine, fièvre aphteuse – pour être convaincu de la nécessité d'une vigilance absolue dans ce domaine.

Il faut noter que la baisse des crédits affectés à l'action 2 ne dépasse pas 2 %, et fait suite à une hausse de 10 % l'année dernière. Cette évolution des moyens résulte également de l’amélioration globale de la situation sanitaire en matière d'ESB et d’influenza aviaire. On peut en revanche s'interroger sur la faible hausse des crédits consacrés à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine, puisque l’on est passé de six cas en 2006 à plus de 7 000 cas aujourd'hui.

Ce budget dépendant largement de facteurs conjoncturels, l'essentiel est toutefois de s’assurer que les redéploiements nécessaires pourront avoir lieu en cours d'année. Grâce à la fongibilité instaurée par la LOLF, mais aussi à la vigilance de notre ministre, nous savons que tel sera encore le cas l’année prochaine.

Comme l’indiquait la lettre de mission adressée par le Président de la République, un bon ministre ne se reconnaît pas à la progression de ses crédits, mais à ses résultats. Nous savons que vous avez engagé un important chantier de modernisation de votre administration, Monsieur le ministre, et que vous portez un grand projet alimentaire, agricole et rural pour la France. Tout cela mérite notre soutien, et c'est pourquoi la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Alfred Marie-Jeanne – L'épidémie de dengue qui sévit en Martinique – plus de 8 000 cas recensés – démontre bien l'intérêt d'une réflexion approfondie en matière de santé et de prévention des maladies dites émergentes.

L'exposition croissante de l'homme aux risques causés par sa propre activité fait en outre de la sécurité sanitaire une priorité. J’en veux pour preuve les affaires qui se sont succédé au cours des dernières années – celles du sang contaminé, de la vache folle, de la listéria, de la légionellose, de la grippe aviaire, du chikungunya, mais aussi les séquelles multiformes qui résultent de l’abus de produits phytosanitaires, notamment le chlordécone, et des déjections industrielles dans l'air et l'eau. La maladie, toujours à l'affût, nous oblige à rester vigilants et à prendre les devants, et les politiques publiques doivent être menées avec un souci curatif aussi bien que préventif.

Le système de surveillance sanitaire en Martinique, pour être relativement développé et efficace, fait la part trop belle à la rétrospection, alors que celle-ci, aussi importante soit-elle pour évaluer les risques, ne permet pas une anticipation suffisante. L'amiante ou les pesticides en sont l’illustration. Or, cette approche imprègne encore fortement les études réalisées par les inspections générales, l'Institut de veille sanitaire ou l'AFSSA.

L'évaluation des risques est très utile pour apprécier l'ampleur d'une catastrophe ou, par exemple, dans le cas de la Guadeloupe et de la Martinique, établir une cartographie des sols contaminés. Elle doit aider à prendre certaines décisions de précaution, comme l'autorisation préalable de mise en culture des légumes racines ou l’interdiction de la pêche dans les rivières polluées. Pour autant, ce n'est pas seulement après avoir constaté des dégâts qu’il faut agir. La France est le premier pays européen et le troisième pays au monde pour la consommation des pesticides ; cela donne à douter de la qualité des produits consommables. Depuis plusieurs années, les alertes se succèdent ; moi-même, en 2000, j'ai interpellé le Gouvernement sur la nécessité de la traçabilité, sans, hélas, avoir été entendu. La décision du Gouvernement de réduire l'usage des produits toxiques va dans le bon sens, à condition de la faire respecter.

À la Guadeloupe et en Martinique, suite au constat de contamination, la dynamique commerciale des produits locaux a été cassée. La reconstruction de ces pays doit reposer sur une application rigoureuse du principe de précaution, ce qui passe par un plan de surveillance évaluant l'évolution des taux de contamination, par un plan de décontamination et par un projet de développement agricole respectueux de l'environnement et de la santé. Le conseil régional a ainsi financé la recherche d'un jeune doctorant sur un bio-pesticide, dont les résultats paraissent probants. Or, la commission Attali préconise, de son côté, le retrait pur et simple du principe de précaution de la Charte de l'environnement. Cette position inattendue est un déni et un défi !

Pour les Guadeloupéens et les Martiniquais, sortir de la crise est une nécessité ; ne pas répéter les erreurs passées, une obligation ; retrouver la confiance suppose d'en payer le prix.

En ce qui concerne la prévention, il faut bien être conscient que celle-ci coûte moins cher que la gestion a posteriori des crises. Il faut donc éduquer à l'écologie. Un nouveau choix de société nous est proposé, qui passe par l'amélioration des systèmes de surveillance de maladies émergentes grâce à l’introduction d’une méthode préventive et prospective. Suite à la crise du chikungunya, l'île de la Réunion a été désignée comme chef de file pour les maladies émergentes dans l'océan Indien ; faut-il attendre une crise comparable pour disposer d'un tel système dans les Antilles ?

Mme la Présidente – Veuillez conclure.

M. Alfred Marie-Jeanne – Dans le cadre de la coopération avec la Caraïbe, un tel réseau serait le bienvenu, car il n'existe pas de système de surveillance inter-îles dans la zone. Les virus n'ont pas besoin de visas pour franchir les frontières ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et du groupe SRC)

M. Claude Leteurtre – Notre pays dispose, en matière de sécurité sanitaire, d'un ensemble de dispositifs de veille, d'alerte et de traitement parfaitement cohérent. Nous avons choisi, à raison, de distinguer entre, d’une part, l'activité de veille et d'alerte, et, d’autre part, le traitement de l'urgence sanitaire. Nous avons en outre créé des agences spécialisées en fonction des catégories de risque. Il en résulte que trois ministères au moins sont concernés par la sécurité sanitaire aujourd’hui : la santé, l'agriculture et l'économie, auxquels il convient d’ajouter l'intérieur et la défense.

Une structure permanente de coordination du dispositif de veille, d'alerte et d'intervention serait utile. Certes, je connais les talents de M. Houssin, et des comités interministériels existent, mais il n'y a pas de véritable veille commune à l'ensemble des ministères et des agences. L’été 2003 a pourtant montré combien la coordination était primordiale.

Nous avons également besoin d'une évaluation des actions menées. Nous avons trop souvent tendance à chercher à atteindre le risque zéro, qui n'existe pas. Cela a un coût, et l’argent qu’on y consacre serait peut-être mieux utilisé ailleurs. De plus, l'aléatoire fait partie de notre vie, et faire croire que l'on pourrait tout prévoir serait une grave erreur ; personne ne peut affirmer que nous sommes à l'abri d'une nouvelle épidémie, comme celle du sida.

Le principe de précaution est aujourd'hui sacralisé dans notre Constitution. Chaque fois qu'il est brandi, il faut en évaluer le coût, rapporté à l'efficacité. Quel est, d’ailleurs, le bilan des mesures prises à l'occasion de la crise de la vache folle, alors que, cette année encore, 28,5 millions sont consacrés à la destruction des farines animales, sans parler des surcoûts liés à l’élimination des prions lors de la stérilisation des instruments chirurgicaux ?

De nouveaux défis nous attendent. La découverte du coronavirus, responsable du SRAS, ainsi que des virus H5N1 et H7N7 prouve que nous ne sommes pas à l’abri de nouvelles pandémies. Si ces virus sont transmis à l'homme à partir d'espèces animales, la crainte est qu’une transmission puisse un jour se produire de l’homme à l’homme. Il faut donc un réseau mondial de surveillance, pour pouvoir identifier au plus vite les souches virales émergentes.

Avec le changement climatique et le réchauffement des zones tempérées, des insectes vecteurs de maladies jusque-là contenues dans les pays chauds remontent vers le Nord. Le virus Ouest-Nil, le chikungunya, la dengue sont à nos frontières – des frontières qui en matière sanitaire, n'existent pas ! Ces risques sont d’autant plus grands que notre population vieillit, et qu'elle est donc plus sensible aux maladies.

En outre, des maladies que l'on croyait éradiquées réapparaissent, comme la tuberculose, avec des bacilles résistants à toute thérapeutique. De même, si les risques NRBC, « nucléaire, radiologique, biologique, chimique », sont assez bien identifiés, nous ne savons pas réellement, toutefois, ce qui se passerait en cas d'accident ou d'attentat.

Quant aux infections nosocomiales, elles ne sont pas acceptables, et nous avons encore des progrès à faire. En cette période où les nuages s’accumulent sur les hôpitaux de proximité, rappelons que plus un établissement est grand, plus il y a de risques d'infections nosocomiales graves.

Par ailleurs, je souhaiterais connaître le degré d’implication de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail dans la réflexion menée sur la pénibilité au travail, sujet d'actualité.

La seule question qui vaille est celle de savoir si notre système de sécurité sanitaire répond aux impératifs de santé publique. La réponse nous paraissant être positive, le Nouveau centre votera le budget de la mission (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Door – Procope raconte qu’en 542, éclata une épidémie qui détruisit presque tout le genre humain. Les épidémies n’ont cessé de bouleverser le cours de l’histoire. La peste noire conduisit les pays européens à prendre des mesures draconiennes, premiers pas de la « police médicale », du « bio-politique » évoqué par Michel Foucault, ce pouvoir qui s’exerce sur ou contre l’individu pour le bien proclamé de la société. Nous avons ainsi construit, étape après étape, une stratégie de sécurité sanitaire, dans le domaine des soins, des aliments, du travail, de l’environnement. La France dispose aujourd’hui, avec un réseau d’agences spécialisées, d’un acquis indéniable en matière d’organisation.

Si des fléaux divers, comme la syphilis, la lèpre ou la peste, ont pu disparaître, l’intervention de l’État y est pour quelque chose. Plus récemment, les épidémies du sida, de la vache folle, de la grippe aviaire, du SRAS, du chikungunya, ou encore la résurgence du bacille de la tuberculose, ont éveillé la conscience, face au risque épidémique, de l’absolue nécessité d’anticiper la survenue de dangers imparfaitement connus. Le mode de vie moderne, la rapidité des transports et l'ampleur des flux de population contribuent indéniablement à la dissémination de maladies épidémiques. Un autre risque, le bioterrorisme, est apparu et remet au goût du jour des maladies que l'on préférait oublier, telles que le charbon, la variole et la peste.

L’organisation du paysage de la sécurité sanitaire paraît complexe. Le rapport Huriet évoquait il y a deux ans la création d’un conseil national de sécurité sanitaire chargé de coordonner les actions des différents organismes. Qu’en est-il, Madame la ministre ? Aux cinq agences de sécurité sanitaire existantes s’ajoutera en 2008 un établissement public pour la préparation et la réponse aux urgences sanitaires de grande ampleur. Le risque d'une pandémie grippale planétaire nécessitait en effet de se doter de moyens pour mobiliser un corps de réserve sanitaire et pour stocker les produits indispensables à la protection de la population. Une dotation de 75 millions est prévue.

Les crédits pour 2008 augmentent de 11,8 % en AE et de 8,3 % en CP. Le budget du programme « Veille et sécurité sanitaires » ne recourt pas à des effets d'annonce, mais permet de poursuivre la politique engagée depuis plusieurs années.

Les crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » sont en hausse – modeste – de 1,1 %, les moyens consacrés à l'élimination des farines animales ayant été réduits. Sur ce sujet, Monsieur le ministre, où en sommes-nous ?

Il faut reconnaître que des efforts importants ont été déployés pour lutter contre les maladies animales, qu'il s'agisse de la tremblante ovine ou, plus récemment, de la fièvre catarrhale ovine.

S'agissant du H5N1, nous ne devons surtout pas baisser la garde ! Dans un contexte de mondialisation, les règles sanitaires doivent s'appliquer à tous. Le risque lié à la mutation commande que le nouveau règlement sanitaire international soit appliqué dès cette année, comme l’avait réclamé la mission que j’ai conduite avec M. le Guen. Ce RSI impose des organisations renforcées de tous les États et une harmonisation aux niveaux européen et international. Lors de la présidence française de l’Union, il conviendrait de veiller à ce que la Commission fasse davantage montre d’un esprit d’anticipation et de sens de la responsabilité. Une politique de coopération, alliant transparence de l'information, recherche et moyens de protection est nécessaire.

Le groupe UMP donne un avis très favorable à l’adoption des crédits de cette mission (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Guénhaël Huet – Ce n’est pas forfanterie de dire que notre système de sécurité sanitaire est l’un des meilleurs du monde. La succession des crises ces dernières années a permis de roder les procédures et, grâce au principe de précaution, notre pays s’est sorti sans trop de dommages de situations qui se sont soldées ailleurs par des catastrophes humaines, économiques et financières. Mais rien n’est jamais acquis. Votre budget, en nette augmentation, comprend deux programmes complémentaires qui visent à renforcer notre capacité de réponse aux situations d’urgence et à mieux maîtriser les risques.

Par définition, la sécurité sanitaire est une compétence régalienne. Les épizooties classiques, comme la grippe aviaire, ont montré l’efficacité des systèmes d’alerte, de prévention et d’éradication. Mais les procédures pourraient gagner en efficacité grâce à une meilleure coordination interministérielle et à une plus grande association des collectivités locales. Les maires, qui sont dotés de pouvoirs de police, peuvent sensibiliser les populations et rendre plus efficaces les dispositifs retenus : ils pourraient notamment être impliqués dans la distribution de comprimés d’iode, en cas d’accident nucléaire. Mais ce n’est qu’une remarque de forme car sur le fond, ce système a démontré son excellence. C’est pourquoi, Madame la ministre, Monsieur le ministre, nous voterons ce projet de budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Pouvoir répondre, se préparer à agir au moment opportun, ne pas se laisser surprendre, voilà ce qui définit le propre de la puissance mise au service du public. Dans un monde plus que jamais incertain, la négligence et l’impréparation seraient impardonnables : assurer la sécurité sanitaire de la population constitue bien – comme le rappelait à l’instant Guénhaël Huet – l’une des grandes missions régaliennes.

Martine Billard a insisté sur la question de la surveillance environnementale, et plus particulièrement de l’eau. Il s’agit de mettre en œuvre les recommandations du comité d’évaluation du plan national santé-environnement et les propositions qui ont été retenues dans le cadre du Grenelle de l’environnement, notamment en ce qui concerne la qualité des eaux distribuées, la protection des captages d’eau, le développement d’une stratégie de prévention des risques liés à la qualité de l’air intérieur, le renforcement de la réglementation sur l’amiante et la réhabilitation des logements insalubres. S’agissant de la qualité des eaux, le système d'information sur les données relatives à la qualité des eaux – SISE-eaux –, codéveloppé par la DGS, est réputé l’un des meilleurs d’Europe.

S’agissant de la prévention et de la gestion des crises, toute politique doit reposer sur une conscience claire et partagée du risque, excluant tout faux-fuyant. En effet, Jean-Pierre Door, la possibilité d’une pandémie grippale n’est pas pure hypothèse d’école. De même, des maladies connues sous d’autres latitudes gagnent notre continent : ainsi le chikungunya cet été. Les catastrophes survenues ces dernières années et qui restent ancrées dans nos mémoires nous obligent à prévoir un renforcement efficace des dispositifs de gestion des crises. Certains plans sont d’ores et déjà établis, comme le plan canicule ou le plan de lutte contre la pandémie grippale, mais ils doivent être actualisés en permanence. Surtout, de nouvelles menaces doivent être prises en compte.

Comme Bruno Le Maire l’a justement souligné, ces plans ne peuvent être efficaces que si les actions sont parfaitement coordonnées. C’est ainsi que depuis l’été 2003, le directeur général de la santé réunit chaque semaine les directeurs d’agence : ces réunions permettent d’échanger des informations sur les préoccupations du jour, d’esquisser les stratégies de réponse et de définir les bases de la coopération entre agences. Mes services y participent, de même que la direction de la défense et de la sécurité civile du ministère de l’intérieur, le directeur de l’Inserm et le directeur général de l’alimentation. Ces réunions permettent de porter à maturité le dispositif de sécurité sanitaire et de mieux garantir l’efficience de nos politiques.

Dans le même esprit, j’ai voulu d’emblée mettre en place une chaîne d’information et d’alerte adaptée, permettant de répondre rapidement aux situations de risque sanitaire. J’ai simplifié la remontée d’information en organisant un dispositif centralisé de réception des alertes, le centre opérationnel de réception et de régulation des urgences sanitaires et sociales.

Nous avons tiré des leçons de l’expérience. La première est que l’urgence exclut l’improvisation. Il faut unir esprit de prévision et de décision, largeur de vues et rapidité d’exécution. Par exemple, il faut organiser une gestion globale, équitable et rationnelle des stocks de produits nécessaires en cas de crise majeure sur tout le territoire. Ensuite, dans l’urgence, il faut savoir sur qui compter et donc former très en amont d’authentiques professionnels de la crise sanitaire.

L’EPRUS, que j’ai installé cet été sera doté d’un budget de 75 millions en autorisations d’engagement sur les crédits d’État et du même montant sur ceux de l’assurance maladie. Sous la tutelle du ministère de la santé, il aura d’abord comme mission de provisionner les stocks nécessaires en cas de crise pour procéder à une répartition optimale le moment venu. Il devra aussi constituer un corps de réserve de professionnels. L’essentiel est qu’il soit très opérationnel. L’exercice national de pandémie grippale qui aura lieu le 12 décembre permettra de le vérifier en ce qui concerne les stocks.

L’établissement a été mobilisé une première fois à propos de l’épidémie de dengue qui sévit aux Antilles, Monsieur Marie-Jeanne. Grâce au dispositif de veille mis en place avec les médecins sentinelles locaux et grâce à la coopération avec l’Institut national de veille sanitaire, les autorités sanitaires suivent depuis fin août la recrudescence de cette épidémie, dont la progression est favorisée cette année par les milliers de tonnes de déchets végétaux laissés par le cyclone Dean, qui sont autant de gîtes larvaires. Le nombre de cas continue d’augmenter, à raison de 1 600 par semaine en Martinique et de 1 000 en Guadeloupe, ce qui est supérieur au pic de 2005. J’ai donc débloqué des moyens pour permettre aux départements des Antilles de faire face à cette épidémie, à laquelle s’ajoutent celles de bronchiolite et de gastroentérite. Grâce à l’EPRUS et au SAMU, 18 professionnels volontaires renforceront les équipes soignantes en Martinique tant que la situation l’exigera. Sur l’envoi de renforts à la Guadeloupe, la décision sera prise dans les tout prochains jours. Je salue le courage et l’énergie des équipes soignantes sur place qui ont été très sollicitées après le passage du cyclone.

Vous avez demandé, Monsieur Marie-Jeanne, une meilleure coordination de la veille sanitaire. Après l’épidémie de chikingunya à La Réunion, nous avons installé un centre de veille pour l’océan Indien. Nous réfléchissons à l’installation d’un organisme similaire pour l’arc antillais. Je me rendrai à la Réunion, au début de décembre, assister à une réunion du centre de veille et de l’InVS. En 2008, le budget du programme « Veille et sécurité sanitaire » augmentera de 50 % pour être porté à 164 millions, notamment afin de répondre à la menace majeure qu’est la pandémie grippale. Au sommet du G 7 plus le Mexique à Washington, j’ai dit la détermination de la France à faire avancer les connaissances pour mieux lutter contre cette pandémie. La sécurité sanitaire sera d’ailleurs une des priorités de la présidence française en 2008, avec le souci d’aboutir à une coordination plus étroite entre États membres. J’ajoute que la France dispose d’un des plans de préparation les plus avancés et qui est actualisé régulièrement.

Je veillerai avec la plus grande force à ce que l’engagement de l’État soit toujours à la hauteur des espérances qu’il suscite et je m’assurerai régulièrement que les dispositifs sont opérationnels. Dans cette optique, et s’agissant toujours de la pandémie grippale, j’assisterai vendredi prochain à un exercice organisé à Bordeaux par la zone de défense Sud-Ouest et je me rendrai à la réunion du centre de veille de l’océan Indien. Garantir la sécurité sanitaire de la population est une grande obligation régalienne, et c’est une éthique de la responsabilité qui soutiendra nos efforts. Notre système de veille et de sécurité sanitaires est excellent. Soyez assurés de ma détermination sans faille pour en assurer le pilotage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche  Anticipation, prévention, veille, éthique de la responsabilité, ces notions mises en avant par Mme Bachelot inspirent également mon action dans le domaine dont j’ai la responsabilité.

Le budget du programme « Sécurité et qualité sanitaires » est de 490 millions en autorisations d’engagement et de 546 millions en crédits de paiement. La baisse provient essentiellement de celle, pour 20 millions, des crédits destinés à l’élimination des farines animales, qui devrait être menée à terme en 2012. Nous bénéficions de la baisse des loyers des entrepôts et d’une meilleure valorisation des farines par les cimentiers. Compte tenu de cette correction, les crédits augmentent en fait de 1,1 %.

Dans un contexte contraint, j’ai souhaité préserver quatre priorités. Il s’agit d’abord de la lutte cotre les maladies animales, dotée d’un budget de 106 millions. Un accent particulier sera porté sur la fièvre catarrhale ovine, qui touche 54 départements, et sur l’influenza aviaire – dans ce cas, avec des crédits en baisse puisqu’il n’y a pas de crise.

La seconde priorité concerne la sécurité sanitaire des aliments. Dans le domaine animal, les crédits sont stables, grâce à une meilleure organisation des inspections en abattoirs. Dans le domaine végétal, ils augmentent de 20 % pour atteindre 19 millions en crédits de paiement. Il s’agit de garantir la sécurité sanitaire des aliments et des conditions de production plus respectueuses de l’environnement, d’améliorer la surveillance et les analyses de résidus de pesticides et de poursuivre la construction du laboratoire national de protection des végétaux d’Angers. S’agissant des pesticides, Madame Billard, dans le prolongement du Grenelle de l’environnement, j’animerai un groupe qui s’occupera de la réduction de leur usage. Vous parlez de retrait par rapport à un plan annoncé qui était ambitieux et qui visait 47 substances les plus dangereuses. J’ai annoncé que nous avons décidé d’en retirer une trentaine l’an prochain et dix en 2010, pour achever le programme en 2012. Par ailleurs, nous allons mettre en œuvre le plan ambitieux annoncé par le Président de la République, de réduction des pesticides de 50 % en dix ans. Nous y réussirons en mobilisant davantage de moyens en faveur de la recherche.

S’agissant du respect des normes concernant les pesticides, Monsieur Vialatte, les décisions prises dans le cadre du Grenelle vont permettre d’avoir plus d’ambition. Enfin, Madame Billard, les antibiotiques utilisés comme activateurs de croissance sont interdits en France depuis 2006 – comme au Danemark.

Ma troisième priorité est de maintenir le haut niveau d’expertise de l’AFFSA. La subvention apportée par mon ministère, qui représente 88 % de la subvention totale de l’État, s’établira à 52,34 millions, soit une hausse de 6,6 %, dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens pluriannuel passé avec l’Agence.

Ma quatrième priorité porte sur les contrôles sanitaires à l’importation, conformément à la demande exprimée à Rennes par le Président de la République. La France a pris l’initiative, Monsieur Door, dans le cadre de la préparation de la présidence française, de rédiger un mémorandum sur le renforcement de ces contrôles, dans un contexte de problèmes réguliers sur les produits importés – notamment de Chine. Il s’agit d’aller vers un « paquet hygiène importations » qui serait un cadre de référence pour tous les pays européens.

Je voudrais maintenant évoquer les services déconcentrés : les directions départementales des services vétérinaires, dont le budget est en légère augmentation, et les services de la protection des végétaux. Je tiens à leur rendre hommage pour leur réactivité et leur disponibilité dans les gestions des crises, sans oublier les vétérinaires libéraux, que je veux également remercier. Nous travaillons ensemble à la mise en œuvre du principe de précaution que, Monsieur Huet, j’avais proposé le premier, en 1995, d’inscrire dans la loi française. Je veux renforcer l’implantation départementale de ces services et inscrire leurs missions dans un cadre régional réformé.

Pour conclure, j’insiste après Roselyne Bachelot sur la nécessité de nous préparer à l’apparition d’épidémies.

En ce qui concerne la fièvre catarrhale ovine, qui s’est développée de manière explosive en Europe et dont plus de 8 000 cas ont été identifiés en France, j’ai saisi la Commission européenne dès le mois de septembre pour demander une stratégie communautaire de vaccination et de financement des mesures sanitaires : la bonne réponse est européenne. L’État a déjà organisé un soutien immédiat aux éleveurs, pour 13,5 millions ; il est cependant trop tôt pour tirer les conséquences financières de cette crise. Le Gouvernement prendra les mesures qui s’imposeront, en pratiquant les redéploiements nécessaires.

Par ailleurs, la France vient de publier un appel d’offres pour l’achat de plusieurs dizaines de millions de doses de vaccin ; c’est le premier pays de l’Union européenne à avoir ainsi mis en concurrence les laboratoires internationaux, afin de disposer des premières doses disponibles.

En ce qui concerne le chlordécone, utilisé jusqu’en septembre 1993 aux Antilles pour lutter contre un insecte ravageur de la banane, l’identification des zones et sources polluées est l’une des priorités du plan d’action interministériel. Nous travaillons par ailleurs à la réalisation de « diagnostics-actions » dans chaque exploitation, permettant de proposer des solutions personnalisées aux agriculteurs.

Enfin, après les dégâts causés par le cyclone Dean, il nous faut mettre en place un mode de production agricole durable aux Antilles, en particulier pour la banane.

Dans les grands débats qui vont s’ouvrir sur la PAC, la France fera des propositions pour une meilleure gestion des risques économiques, sanitaires et climatiques. C’est un sujet qui m’intéresse depuis longtemps, je l’ai montré comme ministre de l’environnement, comme commissaire en proposant la création d’un fonds de solidarité, et il y a quelques mois en proposant celle d’une force européenne de protection civile. Nous ne disposons pas des outils qui seraient nécessaires, et nous serons dans notre rôle en promouvant au niveau européen des systèmes de prévention et de mutualisation (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

QUESTIONS

Mme Huguette Bello – On sait les ravages qu'exerce en France l'épizootie de fièvre catarrhale ovine. Elle concerne aussi le département de la Réunion, où elle est réapparue en août 2003 dans un élevage de moutons de race mérinos, y touchant vingt-six animaux sur cent ; un arrêté préfectoral de mise sous surveillance de l'élevage a alors été pris, avec interdiction de déplacement des animaux.

On peut toutefois s'étonner que les divers documents qui concernent cette épizootie, notamment l'arrêté ministériel qui précise la liste des zones réglementées, ne mentionnent pas la présence de la maladie dans le cheptel ovin réunionnais. Les éleveurs s'inquiètent du silence des autorités de l'État et se demandent si elles ont mesuré l'importance des dommages qu'ils subissent : depuis un an, en effet, le cheptel ovin de l'île a été décimé. Les éleveurs souhaiteraient que des experts du laboratoire vétérinaire de Maisons-Alfort vienne étudier la situation sur place.

J'avais également appelé l'attention du ministère de l'agriculture, en 2006, sur l'épizootie de rhino-trachéite infectieuse bovine – l'IBR – qui frappe les troupeaux de bovins réunionnais. Cette maladie, mortelle pour le bétail, est apparue également en 2003, à la suite de l'importation, par des coopératives, de vaches en provenance de la France continentale. Elle a des conséquences très graves, puisqu'elle diminue d'abord la production de lait avant de conduire à la perte du troupeau. Les éleveurs peuvent ainsi se retrouver dans une situation financière catastrophique. Ils insistent pour que soit assuré un contrôle strict de l'état sanitaire des animaux arrivant à la Réunion.

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture En ce qui concerne la FCO, votre département connaissait une situation endémique depuis longtemps, sans que des signes cliniques aient pu être observés. Une étude récente a confirmé la présence de virus. L’interdiction des mouvements de ruminants vers la métropole a maintenant une base réglementaire, sauf dérogation accordée par les services de l’État. En revanche, les mouvements de la métropole vers les DOM restent autorisés. Je ne suis pas en mesure de vous répondre ce soir sur les élevages ovins, mais je le ferai par écrit dès demain.

S’agissant de la rhino-trachéite infectieuse bovine – l’IBR, la conduite, depuis plusieurs années, par les groupements de défense sanitaire d’un programme volontaire de maîtrise de la maladie a abouti à un engagement de plus de 65 % des éleveurs de métropole concernés. En l’absence de programme volontaire similaire à la Réunion, la prophylaxie n’a pas été généralisée dans votre département. Face aux pertes économiques induites, il appartient aux exploitants de s’engager dans ce type de programme de maîtrise de l’infection, avec l’appui de leurs vétérinaires traitants. Des outils vaccinaux efficaces sont disponibles : ils permettent d’éviter les manifestations cliniques de la maladie. Enfin, un soutien technique à l’assainissement des troupeaux infectés pourrait également être apporté aux éleveurs, par le groupement de défense sanitaire local, et je vous confirme que la généralisation de mesures de prophylaxie adaptées à la situation de la Réunion pourra être décidée par arrêté préfectoral, dès lors que plus de 60 % des éleveurs réunionnais se seront engagés dans un programme volontaire de maîtrise de la maladie.

M. André Chassaigne – Madame et monsieur les ministres, vous nous avez présenté une mission à laquelle vous assignez des objectifs louables, auxquels nous ne pouvons que souscrire. Quant aux 712 millions de CP, ils sont loin d'être négligeables. Là où le bât blesse, c’est que la politique agricole commune étrangle nos zones d'élevage extensif, comme le bassin bovin allaitant ou la région PACA pour l'élevage ovin, alors qu'elles constituent le berceau de productions de grande qualité sanitaire, avec leurs labels et AOC. Comment votre objectif de promouvoir des modes de production respectueux de la santé et de l'environnement peut-il s'accommoder de la restriction du soutien public à l'élevage extensif, comme c’est le cas avec la nouvelle prime herbagère agro-environnementale ?

De même, votre volonté de contrôler les importations en provenance des pays-tiers restera un vœu pieux si une limite stricte n’est pas opposée aux importations massives de viande ovine en provenance de Nouvelle-Zélande, dont on sait que la qualité sanitaire est loin d'être irréprochable, contrairement aux productions de nos éleveurs, souvent labellisées au prix d'efforts colossaux pour assurer la traçabilité.

Il en va de même de l'entrée massive sur le marché européen du bœuf brésilien et argentin, laquelle contribue à la chute des cours et aux difficultés de nos éleveurs, comme ceux du Massif Central, ce territoire de l'excellence reconnu sur la planète entière pour la qualité de ses viandes.

Au regard de ces considérations, ma question portera sur un point précis concernant l'importation des produits alimentaires, et, plus particulièrement, ceux de l'élevage. Depuis 2006, l'agriculture européenne est en effet soumise au paquet hygiène, porteur d’exigences qui concernent aussi les produits importés, théoriquement soumis aux mêmes normes que nos productions intérieures. Pouvez-vous préciser jusqu’à quel point cette directive européenne est mise en œuvre, s’agissant des importations de viande ? Quelles garanties les consommateurs peuvent-ils avoir quant au respect d’un cahier des charges contenant des exigences similaires à celles imposées aux productions nationales et européennes, ainsi que d’un contrôle effectif aux frontières ? Tels que vous les avez rapportés, les propos du Président de la République laissent à penser que les contrôles sanitaires aux frontières ne sont pas effectués comme ils devraient l’être.

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture Monsieur Chassaigne, je veux bien engager à deux heures du matin un débat sur la future PAC, mais nous aurons de toute façon des rendez-vous à ce sujet. L’ancien élu montagnard que je suis peut vous promettre que, s’agissant de l’élevage extensif et du soutien à l’herbe, vous verrez ma détermination à leur garantir une place importante dans les évolutions futures du système.

Le paquet hygiène confirme la responsabilité première des opérateurs quant aux garanties sanitaires qu’ils doivent apporter pour les produits mis sur le marché. Il normalise également les contrôles et je vous confirme que, pour les importations, des exigences analogues doivent être respectées dans les pays tiers qui souhaitent commercer avec l’UE. C’est l’un des points sur lesquels nous avons décidé, à la demande du chef de l’État, d’être intransigeants et de faire des propositions de fermeté à nos partenaires. L’office alimentaire et vétérinaire est chargé par les États membres d’assurer la mission de contrôle. Plus de cinquante missions sont réalisées chaque année dans ce cadre. Au niveau des postes d’inspection aux frontières, l’intégralité des lots est contrôlée par les services vétérinaires, ainsi que le prévoit la réglementation communautaire. En France, ce sont près de 66 000 lots de produits animaux qui sont contrôlés chaque année, le taux de refus s’établissant à un pour 200 lots contrôlés, ce qui démontre la nécessité d’une présence vigilante. Près de 9 000 lots d’animaux vivants sont également contrôlés annuellement, avec un taux de refus de 1,5 % pour 200 lots contrôlés.

Enfin, nous serons intransigeants avec les pays d’Amérique latine que vous avez évoqués. Nous veillerons à ce que les contrôles sur les produits importés respectent les mêmes exigences que celles que nous imposons à nos producteurs.

M. André Chassaigne – Merci de votre réponse.

M. François Rochebloine – Ma question pourrait aussi bien s’adresser à Mme Bachelot ou à Mme Kosciusko-Morizet qu’à vous-même, Monsieur Barnier, étant donné l'importance des interrogations qui nous reviennent des professionnels et des apiculteurs amateurs.

Au moment où l’opinion s’inquiète de plus en plus de tout ce qui peut contribuer à la dégradation de notre environnement naturel ou favoriser des atteintes irréversibles à la biodiversité de la planète, comment ne pas prendre en considération la crainte d’un déclin des populations d'abeilles, dont on sait qu'elles constituent un indicateur fiable de la qualité de notre environnement ? Il est essentiel que notre pays prenne conscience de la nécessité de maintenir des modes de production tout à la fois respectueux de l’environnement, de la qualité et des savoir-faire propres aux terroirs. Or, depuis de nombreuses années, nous savons qu'il existe de fortes interactions entre les modes de production – ou de consommation – et la diminution de la biodiversité, comme l’ont mis en évidence les affaires du Gaucho et du Régent.

Plusieurs scientifiques ont émis des hypothèses, et un certain nombre de causes peuvent expliquer le phénomène, dont l'ampleur dépasse cependant de loin tout ce qui avait pu être observé dans le passé. En France, les menaces sont désormais prises au sérieux, et il est heureux que, dans le cadre des réflexions conduites au sein des groupes de travail du Grenelle de l’environnement, le principe de précaution soit retenu pour de nombreuses thématiques.

Ma question est simple : pouvez-vous nous indiquer, en l'état actuel des connaissances, les pistes de recherche et les mesures prises par les pouvoirs publics en vue de préserver la préservation des populations d'abeilles ?

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture La question du devenir des abeilles est extrêmement importante, et je lisais l’autre jour, dans un grand journal du milieu de journée, un article tout à fait passionnant, qui montrait ce qu’il allait advenir de nombre de fruits et légumes si la pollinisation disparaissait. Sur le terrain, scientifiques et apiculteurs constatent qu’une conjonction de raisons explique la mortalité des abeilles : parasites qui fragilisent les défenses immunitaires, maladies, appauvrissement de la diversité florale qui crée des situations de malnutrition, changement climatique, intoxications, pesticides et phytosanitaires. Attention cependant à ne pas généraliser : on a pu constater de manière scientifique que dans des zones de grande culture où ni le Régent ni le Gaucho n’étaient utilisés, une forte mortalité des abeilles pouvait aussi survenir.

Afin d’étudier les multiples causes du phénomène, le ministère de l’agriculture a lancé en 2002 une étude multifactorielle des troubles des abeilles, et a chargé un comité scientifique et technique de recenser toutes les causes de mortalité. Cette enquête multifactorielle prospective est animée par l’AFSSA.

Parallèlement, une étude de terrain a été lancée et ces travaux sont toujours en cours, pour déterminer si les abeilles ne seraient pas affectées par l’utilisation de produits phytopharmaceutiques, conduisant à la diminution des surfaces dédiées au tournesol, qui est l’une des principales fleurs qu’elles butinent. Dans le cadre du programme communautaire pour l’apiculture, des projets sont en cours d’examen pour la période 2008-2010, en vue d’améliorer la connaissance et la disponibilité de ressources nectarifères et pollinifères, ainsi que la biodiversité des populations d’abeilles.

Je souhaite enfin que l’on aille plus loin, et que, dans le prolongement du Grenelle de l’environnement, une impulsion soit donnée à la défense de l’abeille et de tout ce qu’elle représente pour la biodiversité. Dans les jours qui viennent, je proposerai au Premier ministre de confier une mission parlementaire sur ce sujet.

Mme Dominique Orliac – Entre 1965 et 1995, l'amiante a été responsable dans notre pays de plus de 35 000 décès. Mais le pire est devant nous, puisque 60 000 à 100 000 morts sont attendues d'ici à 2026, par cancer broncho-pulmonaire. On peut donc parler d'une véritable catastrophe sanitaire, aux multiples conséquences, humaines, sanitaires et sociales. L'interdiction de l'amiante n’est intervenue qu’en 1997, même si les risques étaient connus depuis les années 1960. Aujourd'hui, l'enjeu se situe davantage dans la prévention des risques, laquelle doit devenir véritablement efficace. C'est pour cela que l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail a été créée en 2006 : elle est donc une conséquence directe du scandale de l'amiante.

Comme le souligne à juste titre notre rapporteur spécial, il convient désormais de préciser la place et le rôle de cette agence au sein de notre système sanitaire de prévention et d'alerte. Dans son excellent rapport, Bruno Le Maire regrette du reste que l’AFSSET peine à trouver sa place. Or, pour que cette agence puisse remplir correctement sa mission de veille sanitaire, il faut aussi lui donner des moyens humains et financiers. Las, le présent PLF se situe une fois encore en deçà du nécessaire, puisqu'il prévoit seulement une centaine d’agents et un budget de 3 millions, pour un établissement dont les missions excèdent désormais largement la seule question de l'amiante.

Madame la ministre, quelle est l'ambition du Gouvernement pour l'AFSSET ?

L'ampleur de la catastrophe sanitaire de l'amiante a conduit à créer, outre l’agence, un fonds d'indemnisation des victimes de l’amiante, lequel ne permet malheureusement pas d'assurer une juste et rapide réparation. Le contentieux ne cesse d'augmenter et les procédures demeurent trop lourdes. Madame la ministre, envisagez-vous de revoir l'organisation d'un système d'indemnisation qui se montre défaillant ? En outre, les victimes professionnelles de l'amiante sont fiscalement imposées sur l'allocation destinée à les dédommager d'un empoisonnement, ce qui est contraire à la législation sur les pensions, les indemnités et les allocations versées aux victimes d'accidents du travail : comptez-vous mettre un terme à cette injustice ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé L’actualité nous rappelle trop souvent la tragédie de l’amiante, qu’il s’agisse des professeurs de Jussieu aujourd’hui décédés ou de certains riverains du comptoir des minéraux et des matières premières d’Aulnay-sous-Bois, pour lesquels une exposition « environnementale » vient d’être établie.

La problématique de l’amiante appartient à la fois au passé, puisque son utilisation est interdite pour les flocages depuis 1977, et, globalement, depuis dix ans, mais aussi au présent, puisque les personnes exposées il y a vingt ou trente ans peuvent déclarer aujourd’hui ou demain une pathologie. Vous avez du reste rappelé les chiffres de cette catastrophe sanitaire.

Les différentes études confirment l’ampleur de l’impact sanitaire de la pollution des locaux de travail et de l’atteinte environnementale en dehors du milieu professionnel. Elles montrent également l’intérêt qui s’attache à une réflexion sur la surveillance des personnes exposées.

J’en viens aux actions en cours. La circulaire interministérielle du 14 juin 2006 charge les préfets de département d’organiser les contrôles de l’application des textes par les propriétaires, en s’appuyant sur l’ensemble des services déconcentrés. Des crédits figurent au programme « Santé publique et prévention », pour 450 000 euros. En 2008, j’ai prévu de créer un groupe « amiante et fibres », en vue de renforcer la coordination interministérielle. Le dispositif réglementaire sera renforcé pour ce qui concerne la constatation des infractions et des études de l’AFSSET porteront sur les affleurements naturels, en Haute-Corse et en Nouvelle-Calédonie, ainsi que sur les anciens sites industriels comme celui d’Aulnay.

S’agissant du volet sanitaire, j’ai à nouveau saisi la Haute autorité de santé à propos de la pertinence du dépistage des personnes potentiellement exposées et du protocole de surveillance à mettre en œuvre. Ses conclusions me seront rendues avant la fin de l’année. J’ai adressé une note à tous les médecins leur rappelant la conduite à tenir en présence d’un patient potentiellement exposé. J’ai également rappelé le mode d’intervention du FIVA. À ce sujet, je tiens à souligner que les retards dans le versement des indemnisations que vous avez mentionnés trouvent leur origine dans l’instruction des dossiers, longue parce que compliquée. Les ressources actuelles du FIVA sont suffisantes, et si elles devaient être augmentées elles le seraient. J’ai par ailleurs demandé la généralisation du plan national de surveillance du mésothéliome. Bien entendu, chaque fois que nécessaire, des actions locales sont entreprises – cela a été le cas à Aulnay-sous-bois.

Le contrat d’objectifs et de moyens de l’AFSSET, a été signé le 26 avril 2007. Il porte sur la période 2008-2011, comprend neuf orientations et prévoit le renforcement de la coopération entre l’AFSSET et les autres organismes chargés de la veille sanitaire.

Mme la Présidente – Il s’agit de sujets fondamentaux dont je déplore que nous devions les traiter à une heure si tardive.

M. Jean Gaubert – Monsieur le ministre de l’agriculture, vous avez évoqué les contrôles aux frontières. J’y reviens car, en ma qualité de rapporteur du budget de la consommation, je me suis rendu sur le terrain pour observer les modalités du contrôle des produits alimentaires à l’entrée de notre pays – et, plus largement, en Europe. J’ai rencontré à cette occasion des fonctionnaires de grande qualité, très précis et très engagés dans leur travail, ce qui est réconfortant, mais j’ai aussi fait le constat des difficultés qui sont les leurs. Ils sont en effet soumis à une forte pression en raison de l’augmentation continue des tonnages et des lots à contrôler et de l’impatience des transitaires, qui font état de contrôles plus rapides et parfois allégés dans tel ou tel autre port de l’Union européenne. D’ailleurs, des inspecteurs de la DGCCRF m’ont dit avoir récemment repéré sur le marché d’Aix-en-Provence un lot de mangues qu’ils avaient refoulé au Havre et qui avait été réintroduit en France par l’Italie… De quels moyens entendez-vous doter le contrôle sanitaire aux frontières, Monsieur le ministre ? Un seul vétérinaire au Havre, c’est notoirement insuffisant, mais le budget que vous avez décidé pour 2008 ne permettra pas qu’un autre soit recruté. Ce n’est pas à la hauteur des ambitions du port du Havre, qui entend augmenter de 20 % ses capacités d’accueil !

Je plaide par ailleurs en faveur d’une harmonisation européenne renforcée. Certes des progrès ont été faits, mais on est encore loin du compte. Or, le contrôle fait en un point d’arrivée vaut pour toute l’Union et, déjà, 70 % des produits consommés en France sont dédouanés dans d’autres États membres. J’insiste pour que la future présidence française de l’Union fasse de ce sujet une de ses priorités, et aussi pour qu’elle favorise les échanges entre autorités portuaires.

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture  Je vous remercie, Monsieur le député, de vos aimables propos à l’endroit de fonctionnaires qui y seront sensibles, car leur tâche est difficile. Sans me répéter, je vous confirme que la présidence française sera l’occasion d’agir en faveur du renforcement des contrôles sanitaires à l’importation et d’une véritable préférence communautaire. Je compléterai les chiffres que j’ai donnés tout à l’heure en réponse à M. Chassaigne pour vous dire que 30 000 contrôles de produits végétaux ont été réalisés en 2006, avec six interceptions par jour. Ces contrôles internationaux mobilisent 147 agents des services vétérinaires et soixante agents des services phytosanitaires. La France dispose de trente-et-un postes d'inspection aux frontières – les PIF –, dont trois gèrent 70 % des flux. J’ai noté vos observations sur la nécessité d’un renfort ici où là ; sachez cependant qu’au Havre sont affectés dix ETP. En 2006, 65 000 lots de produits animaux ont été contrôlés, et 327 ont été refusés. Le Gouvernement s’efforcera de parvenir à une meilleure harmonisation européenne en cette matière.

M. Gérard Bapt – Ma question porte sur les pesticides, dont vous avez affirmé vouloir réduire l’usage de moitié d’ici dix ans. Mais comment mesurerez-vous cette diminution, sachant que l’épandage varie du simple au double selon que la saison est sèche ou pluvieuse ? J’aimerais d’autre part des précisions sur ce que relève un courrier adressé au Gouvernement français par le commissaire européen Kyprianou à propos de l’utilisation du chlordécone aux Antilles. On y apprend en effet que, contrairement à ce que prévoient les directives pertinentes, l’utilisation de ce pesticide n’a pas été notifiée par la France et que, par ailleurs, cette molécule dont l’utilisation devait être strictement interdite à partir de juillet 1993 a continué d’être tolérée par dérogation jusqu’en octobre de la même année.

Enfin, comment vérifier que l’interdiction de mise sur le marché n’est pas contournée par l’organisation de filières d’importation illégales ou par l’écoulement, tout aussi illégal, des stocks, comme cela a été évoqué devant nous en commission ? Plus généralement encore, je souhaite connaître le mécanisme exact de ces dysfonctionnements, qui nous inquiètent tous.

M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture – Je m’engagerai personnellement sur le plan « pesticides » annoncé par le Président de la République et sur la suppression progressive, au cours des cinq prochaines années, des 47 substances jugées les plus dangereuses.

Dès le 15 novembre aura lieu une première réunion interministérielle, que je présiderai en personne. Nous allons nous pencher sur les produits utilisés et favoriser la recherche, condition indispensable pour réduire de 50 % l’usage des pesticides. En effet, nous ne parviendrons pas à atteindre cet objectif sans traitements alternatifs, qui ne remettent pas en cause la viabilité des exploitations.

S’agissant du chlordécone, nous ferons preuve de la plus grande transparence. Les archives de mon ministère sont ouvertes, et je suis prêt à répondre à toutes les questions, dans quelque cadre que ce soit.

Le chlordécone a fait l’objet d’une autorisation provisoire en 1972, avant d’être formellement autorisé en France en 1981. Cette substance a ensuite été interdite en 1992, mais a bénéficié de deux dérogations successives, d’une durée totale de 18 mois, en l’absence de traitement alternatif contre les charançons. En 2002, à l’occasion d’actions de contrôle ciblé des stocks, dix tonnes de chlordécone ont toutefois été retrouvées dans quinze exploitations martiniquaises, d’après les données dont je dispose.

Je répète que nous n’avons rien à cacher, et que nous mènerons des analyses individualisées des cas de contamination. Comme je l’ai indiqué, nous allons tirer toutes les conséquences de cette affaire : j’ai déjà réuni les producteurs, qui se sont engagés à réaliser un plan « bananes propres », notamment grâce aux produits « bio » en cours d’autorisation. Et pour ce qui est du passé, permettez-moi d’insister : toute la transparence sera faite.

M. Jean Gaubert – Un cas de fièvre catarrhale a d’abord été annoncé dans une commune de ma circonscription, puis infirmé. Le bruit court que les importateurs italiens ont fait pression pour que soit rapportée la décision d’aménager une zone de protection. J’aimerais savoir ce qu’il en est exactement, Monsieur le ministre. Quelle a été l’intervention de vos services et où en sommes-nous au niveau européen ?

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture – Il s’agit d’un « faux positif », c’est-à-dire un test sérologique infirmé par la suite. Si vous souhaitez plus de détails, je vous répondrai naturellement, par écrit.

Puisque vous avez évoqué l’Italie, j’ajoute que nous avons obtenu l’adoption d’un règlement sanitaire avec une rapidité qui fait honneur à la Commission européenne. Il existe désormais une réglementation sanitaire pour les mouvements des animaux, notamment des broutards, activité cruciale pour certaines zones d’élevage : plus d’un million de bovins sont en effet exportés vers ce pays chaque année.

Ces flux risquant d’être fortement perturbés en raison de l’apparition de la fièvre catarrhale en France au cours de l’année 2006, nous avons entamé des discussions bilatérales, qui ont abouti à la signature d’un premier protocole technique à la fin du mois de septembre 2007, avant la publication du règlement européen. Ce dernier texte dispose que l’on peut se dispenser d’un accord préalable du pays de destination sous réserve de mener une désinsectisation pendant une quinzaine de jours, suivie d’un contrôle des animaux.

Étant donné que l’Italie n’a pas jugé ces garanties suffisantes pour protéger son territoire contre l’introduction du sérotype 8, nous avons organisé, voilà quatre jours, une réunion de travail, qui a abouti à une solution : sous réserve de l’application en France, dès que possible, d’une vaccination des animaux identique à celle qui est pratiquée dans leur pays, les autorités italiennes ont autorisé la reprise immédiate des échanges. Les flux ayant repris il y a 48 heures, cette affaire semble désormais réglée, mais nous restons vigilants.

Mme la Présidente – Nous en avons terminé avec les questions.

SÉCURITÉ SANITAIRE

ARTICLE 33 ET ÉTAT B

Les crédits de la mission « Sécurité sanitaire », mis aux voix, sont adoptés.

Mme la Présidente – Nous en avons terminé avec l’examen des crédits de la sécurité sanitaire.

La suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, jeudi 8 novembre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 2 heures 40.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Le compte rendu analytique des questions au Gouvernement
est également disponible, sur Internet et sous la forme d’un fascicule spécial,
dès dix-huit heures

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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