Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques de la session > Compte rendu analytique de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire

Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 28 novembre 2007

Séance unique
Séance de 15 heures
69ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

Consulter le sommaire

La séance est ouverte à quinze heures.

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

POUVOIR D’ACHAT

M. François Brottes – Monsieur le Premier ministre, lundi matin, une personne de ma circonscription qui s’est elle-même présentée comme une dame âgée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), m’a téléphoné. « Est-ce vrai que le Gouvernement veut nous faire payer la redevance ? Parce que si c’est vrai, avec le traitement de mon diabète, qui est de moins en moins remboursé, et ma toute petite retraite, je ne vais pas m’en sortir ! Dites-le leur, Monsieur le député ! » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; protestations sur les bancs du groupe UMP)

« Oui, madame », ai-je répondu, « ils ont décidé de vous faire payer la redevance dont vous étiez exonérée, comme à 800 000 autres personnes âgées ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Oui, ils ont décidé de vous faire payer le fait d’être malade, sous prétexte de vous responsabiliser ! (Même mouvement) Et, depuis plusieurs semaines, nous dénonçons ces décisions ! Puisqu’ils ont choisi de distribuer des milliards de cadeaux fiscaux aux plus riches en juillet dernier – le fameux « bouclier fiscal » (Même mouvement) –, il faut maintenant trouver l’argent ailleurs, d’autant plus que 2 milliards supplémentaires vont peser en cette fin d’année sur nos factures d’électricité et de chauffage ! » Bref, il devient de plus en plus difficile de manger, de se loger, de se soigner, de se chauffer, de se déplacer, pour les retraités, mais aussi pour les salariés, parmi lesquels 40 % perçoivent moins de 1 300 euros par mois !

Il faut le dire aux Français : d’autres choix sont possibles ! Nous avons ainsi formulé des propositions rapidement applicables, que notre Assemblée examinera dès demain matin, Monsieur le Premier ministre : il ne tient qu’à vous d’accepter le débat ! Il s’agit d’encadrer les loyers, de mieux maîtriser les tarifs de l’énergie, d’ajuster les prix du carburant, de réduire ceux des produits de première nécessité – nous avions, je le rappelle, baissé le montant de la TVA –, de revaloriser les salaires et la prime pour l’emploi – que nous avions créée –, ainsi que les petites retraites, enfin d’instaurer un chèque transports enfin efficace, à la différence – comme vous l’avez vous-même reconnu – du dispositif actuellement en vigueur.

Demander davantage de pouvoir d’achat, ce n’est pas demander la charité ou réclamer de quoi survivre, mais revendiquer le droit de vivre !

M. le Président – Posez votre question (Protestations sur les bancs du groupe SRC).

M. François Brottes – Monsieur le Premier ministre, quand en finirez-vous avec la logique du « gagner moins pour toujours payer plus » ? Quand accepterez-vous de débattre sérieusement de nos propositions, qui sont simples, justes et efficaces ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, des finances et de l’emploiEnfin, vous prenez conscience de la nécessité de défendre le pouvoir d’achat des Français (Protestations sur les bancs du groupe SRC), vous inscrivant ainsi dans la logique même du Président de la République, du Premier ministre et de l’ensemble du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Je vous rappelle que le pouvoir d’achat a augmenté de 2,7 % en 2007 et de 2,5 % en 2008 (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC), et que le SMIC a connu une hausse de 23 % en cinq ans, contre 13 % seulement sous le gouvernement Jospin !

Nous souhaitons tout d’abord encourager le travail, condition de la croissance, laquelle permettra la répartition de la richesse nationale. On constate déjà les résultats : le chômage diminue chaque mois davantage, tombant aujourd’hui à 8,1 %, pour la première fois depuis des années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Ensuite, nous encourageons les Français à travailler plus : l’exonération des heures supplémentaires (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) permettra à de nombreux salariés de constater dès la fin du mois, c’est-à-dire dans deux jours, que leur rémunération a sensiblement augmenté et que ce gain de pouvoir d’achat est exonéré d’impôts et de charges !

Je songe enfin à l’ensemble des mesures dont vous avez l’amabilité de vous faire le porte-parole (Exclamations sur les bancs du groupe SRC). Le Président de la République l’avait annoncé devant l’Association des journalistes de l’information sociale, le Gouvernement l’a confirmé à la suite de la conférence pour l’emploi : les aides publiques aux entreprises seront subordonnées à la promesse d’une négociation annuelle sur les salaires.

Enfin, la loi sur la concurrence (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), que j’ai présentée avec Luc Chatel – et qu’il a défendue devant vous la nuit dernière jusqu’à une heure avancée – permettra de réduire les coûts des télécommunications et des communications électroniques et de faire baisser les prix de revente grâce au développement de la concurrence.

C’est par toutes ces mesures que nous défendons le pouvoir d’achat des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

HAUSSE DES PRIX

M. Yves Cochet – Madame la ministre de l’économie, lors du Grenelle de l’environnement, le Président de la République – grand défenseur de l’écologie, même en Chine… – a formulé quelques propositions intéressantes en matière de transports : faire construire, d’ici à 2020, quelque 2 000 kilomètres supplémentaires de lignes TGV et 1 500 kilomètres de transports en commun en site propre dans les villes, faire passer à 25 % la part modale du fret ferroviaire, réduire la vitesse maximale autorisée sur les routes et les autoroutes. Propres à économiser le pétrole et à combattre l’émission de gaz à effet de serre, ces mesures ne visent toutefois que le long terme. Comment réagir dans l’immédiat à la hausse des prix du pétrole, mais aussi des produits alimentaires, hausse qui touche nos concitoyens les plus défavorisés ? Plusieurs ONG ont déjà formulé des propositions, sans attendre la grande conférence de Bali sur les solutions à apporter aux problèmes climatiques après 2012, et la journée mondiale du climat, le 8 décembre prochain (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR et du groupe SRC).

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économieVous avez raison : les mesures de long terme, indispensables à la maîtrise de l’énergie, doivent être complétées par des dispositions applicables plus rapidement – ainsi de celles que je viens d’évoquer et par lesquelles nous renforçons le pouvoir d’achat des Français en favorisant la baisse des prix : la mise en avant des marges arrière, dispositif complexe (Protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), permettra aux grands distributeurs de répercuter sur le prix de vente aux consommateurs les baisses que leur consentent les fournisseurs (Même mouvement).

M. le Président – Écoutez la réponse de Mme la ministre !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – En second lieu, nous avons décidé il y a quelques jours de doubler l’aide à la cuve. Les ménages les plus modestes recevront ainsi une aide de 150 euros pour acheter du fuel domestique. Enfin, un site de consultation de l’ensemble des prix pratiqués par les grands distributeurs permet de gagner jusqu’à 20 % sur le coût d’un plein d’essence. Ce sont des mesures concrètes qui permettent, à court terme, d’alléger les conséquences de l’augmentation du coût des matières premières. Il faut en prévoir ensemble qui seront efficaces à long terme. J’accepte votre soutien dans ce combat (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

SITUATION DE L’HÔPITAL PUBLIC

M. Claude Leteurtre – Ma question s’adresse à Madame la ministre de la santé. Dans un avis récent, le comité national consultatif d’éthique s’interrogeait sur les conséquences des contraintes budgétaires sur la qualité des soins à l’hôpital. Aujourd’hui, l’hôpital public connaît un déficit chronique de 500 millions – et d’un milliard si l’on tient compte des comptes épargne-temps. Ce déficit est structurel et donc reconduit chaque année sauf à supprimer des emplois, réduire la qualité des soins ou revenir sur les 35 heures.

En 2003, René Couanau avait rédigé un excellent rapport, intitulé « le désenchantement hospitalier », où il soulignait la crise morale et psychologique que traverse l’institution. Actuellement l’hôpital public est soumis à des attaques en tous genres. Il traverse aussi une crise financière sans précédent, qui va être aggravée par la mise en place de la tarification à l’activité à 100 %...

M. Roland Muzeau – Il ne fallait pas voter le PLFSS !

M. Claude Leteurtre – ...c’est-à-dire un mode de financement lié au rendement (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR). La commission Larcher rendra bientôt ses conclusions, mais la vraie question est de savoir qui l’on soignera demain à l’hôpital, et avec quels moyens. Il faudra faire des choix clairs, sans quoi l’hôpital ne pourra plus soigner tous ceux qui le demandent. Nous sommes tous conscients de cet enjeu de santé publique, mais le PLFSS n’est pas rassurant en la matière (Marques d’approbation sur les bancs du groupe GDR) et son article 42 est réellement inquiétant. Quelle réponse financière allez-vous apporter dès cette année à l’hôpital public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports En tant que ministre de la qualité des soins, je ne partage pas votre catastrophisme. L’hôpital public a ses forces et ses faiblesses. Mais, surtout, il subit une mutation complète, avec une dispensation de plus en plus précoce des soins, des diagnostics plus complexes, de nouvelles technologies, une prise en charge croissante des personnes âgées dépendantes, et un recours plus fréquent aux urgences pour des soins qui pourraient être assurés en amont. C’est pourquoi nous avons demandé à M. Larcher un rapport sur les missions de l’hôpital, un bilan d’étape sera fait en décembre, qui sera suivi de concertations dans les régions, et les préconisations seront rendues publiques avant l’été.

Mais il fallait agir sans attendre. C’est pourquoi, le PLFSS a généralisé la tarification à l’activité à 100 %. Cette mesure était demandée par les gestionnaires de l’hôpital public et en particulier la fédération hospitalière de France. Elle ne s’appliquera pas de façon brutale, mais avec des mesures transitoires jusqu’en 2012. Nous avons également inscrit au PLFSS des crédits permettant d’accompagner les établissements en difficulté, dans un cadre contractuel, ainsi que 6 milliards pour les missions d’intérêt général de l’hôpital public. Dans quelques semaines, en outre, va débuter l’examen des moyens à consacrer à la modernisation dans le cadre de « Hôpital 2012 ». En cinq ans, ce sont ainsi 10 milliards qui seront consacrés à la modernisation de l’hôpital public, qui est au cœur de nos préoccupations de santé (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

VIOLENCES URBAINES

M. François Scellier – Monsieur le Premier ministre, depuis dimanche se produisent dans le Val d’Oise des violences dont le prétexte (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) a été la mort de deux adolescents dont la mini moto a percuté une voiture de police à Villiers-le-Bel. Après les exactions qui ont suivi ce drame, 40 policiers et des pompiers ont été blessés, dont certains très gravement, comme le commissaire de police de Sarcelles, auquel le Président de la République a rendu visite de matin. 64 policiers ont également été blessés dans la nuit de lundi à mardi, lors d’affrontements dans plusieurs villes du Val-d’Oise. De nombreux véhicules ont été incendiés ainsi que des bâtiments publics – une bibliothèque, deux écoles, une trésorerie – et une concession automobile. Des interpellations ont été effectuées.

Depuis plus de dix ans, les communes touchées par ces troubles bénéficient, avec l’aide du conseil général et de l’État, d’opérations de rénovation urbaine importantes. Les maires sont très impliqués dans ces politiques. Quant à l’État, il a montré, encore cette nuit, qu’il exerçait avec détermination ses fonctions régaliennes. Monsieur le Premier ministre, quel est le message que la République adresse à tous les habitants de Villiers-le-Bel et des quartiers difficiles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC)

M. François Fillon, Premier ministre – La République, c’est d’abord la confiance dans la justice de son pays (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et du groupe NC). Aussi, la première chose à faire est d’assurer les familles des deux victimes que toute la vérité sera faite sur les conditions dans lesquelles ce drame s’est produit.

M. Pierre-Alain Muet – Très bien !

M. le Premier ministre – Dès lundi, je le leur avais promis. Le Président de la République les a reçues ce matin et a réitéré cet engagement. Le procureur de la République du Val d’Oise a décidé l’ouverture d’une instruction judiciaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC). C’est la justice, en toute indépendance, qui fera la lumière sur les circonstances de cet accident.

Mais la justice c’est aussi la sanction de tous ceux qui ont commis des exactions contre les biens et contre les personnes (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC). Avec le ministre de l’Intérieur, nous avons donné des instructions extrêmement fermes pour que tous ceux qui ont commis des atteintes physiques contre les forces de l’ordre soient recherchés, arrêtés et traduits devant la justice (Mêmes mouvements). Celui qui tire au fusil, à 15 mètres, sur les forces de l’ordre, n’est pas un casseur, il commet une tentative d’assassinat (Mêmes mouvements).

La République, c’est ensuite la sécurité. Il n’y a pas de liberté, il n’y a pas de fraternité sans sécurité. C’est la raison pour laquelle, avec le ministre de l’intérieur, nous avons veillé à mettre en place les moyens nécessaires pour la rétablir le plus vite possible dans le Val-d’Oise. La présence hier soir de 1 000 fonctionnaires de police a permis une baisse très sensible des violences ; nous allons continuer cet effort afin d’assurer la sécurité des habitants de ce département, en particulier de ceux de Villiers-le-Bel.

Une nouvelle fois, après les avoir rencontrées avec Michèle Alliot-Marie cette nuit, je voudrais rendre hommage aux forces de l’ordre (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe SRC). La police de notre pays, c’est le rempart contre les atteintes à la République. Peu d’hommes et de femmes accepteraient que leur travail quotidien soit d’aller prendre des risques parfois mortels pour faire régner la sécurité dans nos villes. Les policiers ont droit au respect de la nation et au soutien de la République (Mêmes mouvements).

La République, c’est enfin la solidarité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). C’est la raison pour laquelle, depuis plusieurs années, et en particulier grâce à l’initiative de Jean-Louis Borloo, nous avons mis en œuvre un plan extrêmement ambitieux de rénovation urbaine, qui pour les cinq prochaines années représente pour l’État un investissement de 12 milliards…

M. Henri Emmanuelli – Ce n’est pas vrai !

M. le Premier ministre – ..., dont près de 140 millions pour la commune de Villiers-le-Bel.

Enfin, parce que la rénovation urbaine ne suffit pas à régler les problèmes de nos quartiers, le Président de la République et moi-même avons demandé à Mme Fadela Amara de préparer le plan « Respect et égalité des chances » (Interruptions sur les bancs du groupe GDR). Nous y travaillons avec toutes les bonnes volontés qui ont accepté de s’associer à cet effort de réflexion. Il sera présenté comme prévu à la fin du mois de janvier, car ce ne sont pas les délinquants qui tirent sur la police qui feront l’agenda de la République ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

LOGEMENT

Mme Annick Lepetit – Madame la ministre du logement et de la ville, le logement est devenu le premier poste de dépenses des familles, qui y consacrent jusqu'à 30 %, voire 50 % de leur budget mensuel. La vie chère au quotidien, c'est d'abord le coût du logement.

Ces dernières années, cette majorité n'a cessé de nous répondre que grâce à elle, la construction se portait mieux que jamais ; or vous venez d'admettre enfin que la crise du logement est catastrophique. Mais alors, pour qui construisez-vous ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Plutôt que de privilégier, comme vous le faites depuis 2003, les cadeaux fiscaux (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), lesquels pèsent lourdement sur les finances publiques et mettent sur le marché des logements qui restent vides, vous devriez donner la priorité à la création de logements là où les besoins sont les plus criants (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC). Nous vous avons d'ailleurs proposé, lors de la discussion de la loi de finances, de supprimer le dispositif Robien ; pourquoi avez-vous refusé ?

Avec la déduction fiscale des intérêts d'emprunt votée cet été, vous favorisez encore la spéculation, vous ponctionnez les finances de l'État sans résorber la pénurie de logements. Où sont les maisons à 100 000 euros tant promises par M. Borloo ? Seulement 25 seront livrées fin 2007 à Épinay-sur-Seine !

Enfin, nos concitoyens n'en peuvent plus de la flambée des loyers et de la lourdeur des charges. Nous vous proposons pour 2008 l'encadrement des loyers, indexés sur le seul coût de la vie (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC). Nous vous demandons aussi de faire appliquer la loi qui oblige les communes à avoir au moins 20 % de logements sociaux et de faire en sorte que le préfet se substitue aux maires récalcitrants (Mêmes mouvements). Voilà des mesures justes, simples et financées. Si vous estimez que le logement est une priorité, allez-vous soutenir nos propositions, ici-même demain matin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville – Je n’aurai pas la dureté de souligner le retard que la gauche a pris quand elle était responsable de la construction de logements (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives protestations sur les bancs du groupe SRC).

De nombreux députés du groupe SRC – Vous êtes là depuis six ans !

Mme Christine Boutin, ministre du logement Les mises en chantier n’ont jamais été aussi nombreuses depuis trente ans !

Mais la crise est suffisamment grave pour que je souhaite que nous ayons des échanges apaisés (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

Pour qui construisons-nous ? Je vous répondrai d’abord que la situation est très inégale sur notre territoire. Elle est tendue dans quatre zones, en particulier l’Île-de-France, qui concentre 50 % des difficultés. Comme vous le savez, j’ai mis sur pied la conférence régionale pour le logement et l’hébergement ; sous la responsabilité du préfet Mutz, quatre groupes de travail vont m’apporter des réponses début janvier.

En ce qui concerne l’article 55 de la loi SRU, comme je l’ai déjà dit devant vous et dans la presse, nous ne pouvons pas continuer à concentrer toutes les difficultés dans les mêmes villes (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ; cet article sera donc appliqué de façon ferme (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC). Mais je veux aider les maires bâtisseurs, car nombreux sont ceux qui veulent construire et qui n’y arrivent pas parce leurs administrés ne veulent pas qu’on construise à côté de chez eux (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Quant au dispositif Robien, comme il serait simple de le supprimer ! Mais les choses sont beaucoup plus complexes (Mêmes mouvements).

Enfin, l’encadrement de l’ensemble des loyers n’est pas pertinent, tant il éloigne des logiques de fonctionnement du marché. Le risque principal serait un mouvement de retrait des propriétaires, qui ferait empirer la situation du marché locatif (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

SOMMET D’ANNAPOLIS

M. Claude Goasguen – Monsieur le ministre des affaires étrangères…

M. Paul Giacobbi – Lequel ?

M. Claude Goasguen – …vous étiez hier à la conférence internationale d’Annapolis, sur laquelle les échos de la presse étaient partagés entre l’espoir et l’inquiétude. Avec Jean-François Copé et une délégation, nous-mêmes sommes allés la semaine dernière à Ramallah et à Tel-Aviv, et constater que la situation n’était pas facile (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Aujourd’hui, nous sommes consternés par les réactions du Hamas, d’un racisme absolu, et par les propos du président iranien, dont nous commençons hélas d’avoir l’habitude. Mais que faire lorsqu’un ministre algérien tient des propos qui seraient condamnés dans n’importe quel tribunal français, accusant la France d’être aux mains d’un lobby et n’hésitant pas à mettre en cause les origines de certains dirigeants français ?

Plusieurs députés UMP – Scandaleux !

M. Claude Goasguen – Dans un tel climat, va-t-on parvenir à installer une paix durable dans cette région ? Pour nous Français, elle est essentielle car nous avons une grande communauté juive et une grande communauté musulmane.

M. Maxime Gremetz – Et l’État palestinien ?

M. Claude Goasguen – La France ne peut rester indifférente à ce qui se passe au Moyen-Orient. Monsieur le ministre des affaires étrangères, quelle sera l’attitude du Gouvernement français à la suite d’Annapolis ? Comment allez-vous faire en sorte que la Conférence de Paris constitue une étape essentielle dans la marche vers la paix ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes  Il y a eu bien des conférences : Madrid – il y a douze ans –, Oslo, l’initiative de Genève, Camp David,… Qu’y a-t-il aujourd’hui de nouveau avec Annapolis ? D’abord, le dialogue entre Ehoud Olmert et Abou Mazen était – passez-moi l’expression – ce qu’on peut faire de mieux en ce moment. Faibles l’un et l’autre dans leur propre camp, ils se sont découverts et ont bâti une forme de connivence.

M. Jacques Desallangre – Quelle vision stratégique ! (Rires sur les bancs du groupe GDR)

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères Autour de cette découverte, ils ont rassemblé l’ensemble des pays du monde…

Plusieurs députés du groupe SRC – Quelle belle histoire ! (Rires sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères Vous pouvez ne pas y croire. Mais vous pouvez aussi donner au moins une petite chance aux représentants des peuples palestinien et israélien. Après tout, et si cela réussissait ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) Le document est très mince : il tient dans la main. Il dit simplement que la négociation pour la création d’un État palestinien viable est ouverte et doit se prolonger jusqu’à la fin 2008, avec des groupes de travail au sein desquels Israéliens et Palestiniens – et eux seuls – vont traiter toutes les questions difficiles : statut de Jérusalem, frontières, sécurité, eau, etc.

M. Pascal Terrasse – Et les implantations ?

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères À la veille d’Annapolis, le Premier ministre israélien a décidé de geler toutes les implantations et de démanteler celles qui n’étaient pas légales. Il convient à présent d’accompagner le développement économique car, convenez que s’il y avait demain un État palestinien à côté de l’État israélien, ce ne serait pas un mince évènement !

À la demande des Palestiniens, une conférence des donateurs sera organisée à Paris le 17 décembre prochain, sous l’égide de Tony Blair, de l’Union européenne et du ministre des affaires étrangères norvégien. Nous allons essayer de réunir des fonds pour que la vie quotidienne des Palestiniens change, dans les domaines de l’administration, de la construction, de la circulation et de la sécurité. Saisissons cette chance et ne soyons pas plus Palestiniens que les Palestiniens ni plus Israéliens que les Israéliens : eux, en tout cas, sont contents ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

BILAN DU VOYAGE PRÉSIDENTIEL EN CHINE

M. Richard Mallié – Madame Lagarde, je souhaite vous interroger sur le voyage en Chine du Président de la République, dont vous faisiez partie (« Et Rama Yade ? » sur les bancs du groupe SRC). Ce voyage s'est déroulé sous les auspices d'un triptyque d'avenir : un socle économique, une portée écologique et une volonté démocratique. De fait, c’est un succès sans précédent, marqué par des contrats records, notamment dans le nucléaire (« Allô ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). La France a contracté plus de 20 milliards d'euros de contrats : c’est du jamais vu ! Mieux, ce socle économique s’accompagne d’une volonté écologique, avec la création de deux réacteurs de troisième génération et la signature d'une déclaration commune sur la lutte contre le réchauffement climatique. Le Président de la République a également invité la Chine à être un exemple de développement durable.

Il convient cependant de lier la réussite économique à la situation des droits de l'homme dans ce pays. Même si la Chine a encore des progrès à réaliser, notamment sur la question du Tibet – permettez au membre du groupe d'études sur le Tibet de le dire, il faut continuer à discuter avec elle. Depuis les années 1970, la situation a changé, et elle a encore évolué depuis que la Chine sait qu'elle accueillera les Jeux olympiques de 2008. Il est donc manifeste que les changements doivent être impulsés dès maintenant et au cours des mois qui viennent. Les relations entre des États modernes doivent se construire sur la base d'un dialogue franc et objectif, dans le respect des engagements pris et la volonté de construire une communauté mondiale soucieuse des intérêts de la planète.

Plusieurs députés du groupe SRC et du groupe GDR – La question !

M. Richard Mallié – Qu'on le veuille ou non, le temps n'est plus à l'exportation simple de la démocratie, mais à l'accompagnement des pays émergents vers une prise de conscience planétaire des enjeux relatifs à l'environnement. Et cela est plus vrai encore lorsque ces pays représentent un cinquième des habitants de la planète et détiennent un potentiel de croissance phénoménal. Tout doit être fait pour que l’ensemble de leurs habitants accèdent à un niveau de vie comparable au nôtre.

Signer des contrats est bon pour l'écologie, bon pour la démocratie et bon pour la France : Madame la ministre, quelles vont être les conséquences de ces contrats pour nos entreprises en général et nos PME en particulier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Vous avez raison, ce fut un beau voyage… (Rires et exclamations prolongés sur les bancs du groupe SRC) Toute la représentation nationale peut être fière du rôle de la France et du Gouvernement. Tous les sujets que vous avez évoqués ont été abordés dans la transparence, dans un esprit de responsabilité et de réciprocité… (Bruit persistant sur les bancs du groupe SRC) Vous avez eu raison de présenter la Chine comme un pays émergent : forte chaque année de 15 millions de nouveaux habitants, elle crée 25 millions d’emplois tous les ans. Le voyage du Président de la République comportait un volet économique et un volet politique, essentiellement consacré aux enjeux universels du moment.

Le volet économique a été couronné de succès, puisque 20 milliards de contrats ont été signés, un an à peine après que la filière électronique française eut été écartée au profit de l’américaine.

Plusieurs députés du groupe SRC – Donnez plutôt la parole à Rama ! (Rires)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie – Avec deux EPR vendus, pour 8 milliards d’euros, c’est toute l’équipe de France du nucléaire qui a marqué des points ! (Interruptions sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) Qu’il s’agisse d’Areva, d’EDF ou des 250 PME qui participeront aux travaux. Au moins 10 000 emplois seront ainsi créés : ça c’est un succès ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

Quant à Airbus, il a conclu la vente de 160 appareils : cent A 310 et cinquante A 340. Cela contribue au développement de notre filière aéronautique, laquelle représente 40 % de la valeur ajoutée produite en France.

S’agissant des principes, nous avons prôné un esprit de responsabilité et de réciprocité. Le Président de la République a rappelé la Chine à ses trois engagements : monétaire, environnemental et économique. Mesdames et messieurs les députés, vous pouvez être fiers de ce voyage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; huées sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

POUVOIR D’ACHAT

Mme Sylvie Andrieux – Monsieur le Premier ministre, les Français sont extrêmement inquiets car ils éprouvent des difficultés grandissantes à joindre les deux bouts, du fait de la baisse continue de leur pouvoir d’achat. Tout augmente, hormis les salaires ! Le Gouvernement a refusé de donner un coup de pouce au SMIC et de garantir le pouvoir d’achat des fonctionnaires. Telle qu’elle est prévue, la revalorisation des retraites va pénaliser l’ensemble des retraités. Bien entendu, les retraites les plus modestes seront les plus touchées, puisque l’augmentation des pensions restera inférieure à l’inflation.

Le groupe socialiste fait inscrire à l’ordre du jour de demain une proposition de loi comportant des mesures simples, justes et financées : augmentation des salaires dans le cadre d’une conférence nationale sur le pouvoir d’achat ; hausse de 50 % de la prime pour l’emploi, qui bénéficierait à 9 millions de nos concitoyens contrairement à votre paquet fiscal de 15 millions d’euros, réservés à une minorité ; conditionnement des aides publiques à l’augmentation des salaires.

Le Gouvernement sera-t-il demain au rendez-vous du pouvoir d’achat, Monsieur le Premier ministre ? C’est une préoccupation essentielle pour nos concitoyens (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC).

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi Je suis heureuse, Madame la députée, que vous vous fassiez la porte-parole du Gouvernement (Sourires).

Nous avons précisément ouvert une conférence nationale sur l’emploi et le pouvoir d’achat pour discuter avec les partenaires sociaux de l’impact du SMIC, des trappes à bas salaires et de l’ensemble des mesures permettant de relever les rémunérations. Le Gouvernement a d’ailleurs repris une proposition à laquelle les partenaires sociaux étaient particulièrement sensibles : le conditionnement des allégements de charges à un engagement annuel de renégociation des salaires. Je suis heureuse que vous souscriviez, vous aussi, à cette mesure… (Interruptions sur les bancs du groupe SRC)

Il faut également tordre le cou à une contrevérité assenée de séance en séance : plus de 80 % du paquet fiscal, qui s’élève non à 15 millions d’euros, mais à 15 milliards, concerneront l’ensemble de nos concitoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; vives protestations sur les bancs du groupe SRC) – heures supplémentaires, crédit d’impôt pour les intérêts d’emprunt, abattement sur les droits de succession, tout cela profitera à l’ensemble des Français, contrairement à ce que vous persistez à affirmer (Mêmes mouvements).

M. le Président – Vous savez que nous devons lutter contre le bruit, Monsieur Roy (Sourires). Pour la santé de vos voisins de séance, que vous allez finir par rendre sourds, je vous demande donc de cesser de crier…

RÉTENTION DE SÛRETÉ

M. Georges Fenech – Madame la garde des Sceaux, les Français ont été particulièrement choqués d’apprendre, au cours du mois d’août, qu’un délinquant sexuel récidiviste avait enlevé un enfant dès sa sortie de prison et lui avait fait subir des violences sexuelles. Ce drame a démontré, une fois pour toutes, que nous devons écarter de la société les délinquants les plus dangereux.

Le Président de la République vous a chargée de rédiger un projet de loi destiné à améliorer la lutte contre ces agresseurs d’enfants, Madame la ministre. Ce matin même, vous avez ainsi présenté en conseil des ministres un texte qui comporte notamment une mesure appelée « rétention de sûreté ». Pouvez-vous nous expliquer à qui cette disposition s’appliquera, quelle sera sa durée et dans quel type d’établissements elle sera appliquée ? Quel traitement réserverez-vous également aux pédophiles en cours de détention ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice De nombreux enfants ont été assassinés ou martyrisés par des criminels dont on connaissait la dangerosité et le risque de récidive. C’est que nous ne disposons pas des outils législatifs nécessaires : il faut que nous puissions traiter ces criminels, notamment les pédophiles, à l’issue de leur peine s’ils sont toujours considérés comme potentiellement dangereux.

Ces personnes seront ainsi placées dans des centres fermés où ils seront pris en charge médicalement. Ces centres de nature sociale, médicale et judiciaire, placés sous le contrôle d’un juge, verront le jour dès septembre 2008 à Fresnes – j’y travaille actuellement avec Mme Bachelot. Nous ne pouvons plus rester impuissants à ces drames humains et accepter que des familles perdent des enfants dans des conditions aussi atroces (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

ÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

Mme Marie-Jo Zimmermann – Ma question s’adresse au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Depuis 1946, le principe d’égalité entre les hommes et les femmes figure dans la Constitution et les lois relatives à l’égalité salariale votées en 1972, 1983, 2001 et enfin 2006 ont permis d’amorcer un changement des comportements, qui s’est notamment traduit par l’accord national interprofessionnel de 2004. Ce problème a également fait l’objet d’un engagement fort du Président de la République au cours de la campagne électorale.

À votre initiative, Monsieur le ministre, une conférence réunissant le Gouvernement, le patronat et les syndicats s’est tenue le 26 novembre dernier en vue de relancer la négociation. En effet, plus de 35 ans après le vote de la première loi sur ce sujet, l’écart salarial s’élève encore à 19 % en moyenne et davantage pour les cadres ; 78 % des emplois précaires sont en outre occupés par des femmes. Aucun arsenal législatif n’est parvenu à réduire les inégalités, et j’observe que seuls 112 accords d’entreprise ont été signés depuis 2002.

L’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes est pourtant essentielle pour assurer l’équité sociale et le dynamisme de notre économie ; c’est aussi une question de vitalité démographique. Quelles mesures comptez-vous donc adopter à l’issue de cette conférence pour que l’objectif d’égalité professionnelle et salariale devienne enfin une réalité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – Un principe est inscrit dans la loi depuis 1972 : à travail égal, salaire égal ; mais le compte n’y est pas. Fini le temps des grands discours et des bonnes intentions ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

La conférence qui s’est tenue lundi en votre présence, Madame le député, et celle de Valérie Létard, a marqué un changement de registre. Si cette conférence a vu le jour, c’est d’ailleurs grâce au travail de nombreux parlementaires, en particulier Mme Génisson et Mme Zimmermann, mais aussi grâce à celui réalisé par Mme Ameline dans ses anciennes fonctions ministérielles. Nous sommes plus efficaces quand nous œuvrons les uns avec les autres ! (Applaudissements sur divers bancs)

Pour ce qui est de l’égalité salariale, nous allons négocier plus efficacement, fournir des documents plus simples aux entreprises, et imposer des sanctions financières à compter de 2009. Nous laissons encore deux ans à la négociation avant d’agir plus fermement à l’encontre de ceux qui ne jouent pas le jeu – faut-il rappeler que 3 % seulement des entreprises ont lancé des négociations sur ce sujet ? S’il le faut, nous sommes prêts à appliquer des sanctions financières plus lourdes.

Nous n’oublions pas non plus les questions structurelles, notamment la place des femmes dans notre société. Avec Mme Létard, Mme Pecresse et M. Darcos, nous nous efforcerons ainsi d’offrir des formations plus qualifiantes et plus rémunératrices aux femmes.

C’est aussi la question du temps partiel subi, sur lequel nous voulons des résultats : pour cela, nous signerons prochainement une convention avec les enseignes de la grande distribution. C’est, enfin, la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale, avec le droit opposable à la garde d’enfant, voulu par le Président de la République.

Cela fait longtemps que l’on parle de l’égalité salariale. Nous sommes à présent en mesure de la réussir. C’était un engagement pris devant les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

CHÈQUE TRANSPORT

Mme Catherine Coutelle – Pourquoi vous est-il si difficile de dire « Madame la députée », Monsieur Bertrand ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC ; protestations nombreuses sur les bancs du groupe UMP)

Monsieur le Premier ministre, le pouvoir d’achat est le problème majeur des Français. À ceux qui habitent à 30 kilomètres de leur travail – et ils sont nombreux –, les transports coûtent 500 euros par mois ; sur un SMIC, c’est considérable !

Hier, vous avez annoncé, ici-même, l’abandon du chèque transport, que l’actuelle majorité avait elle-même instauré début 2007, en osant dire qu’il ne fonctionnait pas. Il peut parfaitement fonctionner, comme le chèque restaurant ; c’est vous qui avez refusé de l’appliquer !

Les députés socialistes souhaitent débattre demain d’une proposition de loi en faveur du pouvoir d’achat. Nous proposerons un chèque transport obligatoire, et non plus facultatif, facile à délivrer pour l’employeur et facile à toucher pour le salarié, financé par les super-profits des compagnies pétrolières. Un chèque transport juste et utile, contrairement aux 15 milliards que vous avez dilapidés cet été ! Les députés de la majorité ont refusé, hier, de débattre de cette proposition en commission des finances. Accepterez-vous d’en débattre ? Accepterez-vous d’écouter et de mettre en place ce que proposent les députés socialistes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR)

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Madame Coutelle, vous connaissez particulièrement bien ce domaine, puisque vous avez fait partie des députés responsables du Groupement des autorités responsables de transports, et vous savez bien qu’une politique publique, locale ou nationale, ne peut se bâtir sur un instrument qui n’a pas fonctionné, mais qu’elle a besoin d’investissements (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Le chèque transport n’a pas bien fonctionné, car il était fondé sur l’usage de l’automobile, alors que nous souhaitons favoriser les transports en commun, et sur un système de matérialité dans le transport collectif, alors que nous développons des outils complètement différents.

Le Grenelle de l’environnement a décidé, à l’unanimité, de développer les transports urbains, de donner des moyens à ces infrastructures, de développer le tramway et les réseaux en site propre, et de revenir sur un certain nombre de choix passés. C’est ainsi que nous aiderons les Français en matière de transport : non avec des mesures démagogiques (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), mais par des investissements !

Lorsqu’il se produit un mouvement social comme celui que nous venons de vivre, ce sont les plus humbles, ceux qui habitent le plus loin de leur lieu de travail, qui souffrent le plus. C’est la raison pour laquelle nous devons mettre en place, au 1er janvier, le service minimum dans les transport (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Patrick Roy – Hors sujet !

RÉFORME DES UNIVERSITÉS

Mme Henriette Martinez – Ma question s’adresse à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Patrick Roy – Et de la grève !

Mme Henriette Martinez – Madame la ministre, la loi relative aux responsabilités et aux libertés des universités est le socle des réformes à venir pour préparer les universités aux grands enjeux de demain. Son application suscite toutefois, chez les étudiants, des questions et des craintes, qui se sont exprimées dans des mouvements de contestation et par des blocages, parfois émaillés de violences. Tout en condamnant celles-ci, vous avez reconnu qu’elles étaient le fait d’une minorité.

Pour répondre à ces inquiétudes, vous avez reçu hier les délégués des cinq organisations étudiantes représentatives. Pouvez-vous nous faire le point sur cette rencontre ? Quelles garanties avez-vous apporté aux étudiants ? Pouvez-vous nous dire, également, quelles seront les prochaines étapes de votre travail pour réformer nos universités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

Mme Valérie Pecresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche – J’ai en effet reçu les organisations représentatives étudiantes et j’ai écouté leurs interrogations et préoccupations quant à la loi sur l’autonomie des universités. Je leur ai répondu qu’il n’y aurait pas de sélection à l’entrée des universités. Une circulaire précisera les conditions de l’orientation active des lycéens vers les chemins de la réussite ; mais il ne s’agit en aucun cas de sélection, et les lycées seront les premiers bénéficiaires de ces dispositions.

Je les ai rassurées aussi quant au caractère national des diplômes. Une mission sera chargée de rendre ceux-ci plus lisibles, ainsi que les conditions d’évaluation des étudiants, afin de garantir l’égalité de tous devant les examens.

L’engagement de l’État est historique, et il sera durable. C’est l’objet du protocole cadre que le Premier ministre et moi-même allons signer dans une heure avec les présidents d’université : le budget de l’enseignement supérieur augmentera de 50 % en cinq ans ; alors que nous dépensons aujourd’hui 7 000 euros par étudiant et par an, nous en dépenserons 10 500 en 2012.

Les étudiants m’ont dit aussi qu’il fallait que les changements concernant leurs conditions de vie et d’études aillent plus vite. J’ai donc décidé de passer à la vitesse supérieure sur les deux chantiers de la réussite en licence et des bourses. Le plan réussite en licence débutera dès janvier ; il s’agira d’un plan pluriannuel très ambitieux. Quant à la réforme des bourses, elle sera lancée, de manière anticipée, au 1er janvier 2008 : les 100 000 étudiants les plus défavorisés verront leurs bourses augmenter de 7,2 % en 2008. Nous donnerons davantage à ceux qui en ont le plus besoin.

Enfin, nous appelons solennellement au déblocage des universités et au retour à la normale (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance est suspendue à 16 heures.

La séance est reprise à 16 heures 25.

PROTECTION DES PERSONNES CONTRE LES CHIENS DANGEREUX

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales Ce projet de loi est le dernier d’une longue série de mesures visant à lutter contre les risques que présente la détention de certains types de chiens. La loi de 1996 a d’abord permis de sanctionner l’utilisation, dans les quartiers sensibles, de chiens dangereux – le plus souvent des pitbulls – comme arme par destination. Les agressions persistant, notamment du fait de bandes, la loi de 1999 a permis d’encadrer la propriété et la garde des chiens de première et deuxième catégorie. Leur nombre a sensiblement diminué, de même que la délinquance liée à leur utilisation sur la voie publique. Pour autant, les accidents n’ont pas cessé. La loi du 5 mars 2007 a donc confié des pouvoirs supplémentaires à l’autorité administrative : on aurait pu croire le problème réglé. Hélas, une série de faits divers dramatiques, cet été notamment, lorsque plusieurs enfants ont trouvé la mort, ont révélé la nécessité pour le législateur de ne pas s’en tenir aux accidents qui ont lieu sur la voie publique pour se saisir de ceux qui arrivent au sein même du cercle familial.

Avoir un chien, c'est un plaisir, dont jouissent plus d'un quart des familles françaises, mais c’est aussi une responsabilité – celle des propriétaires et des détenteurs de chiens, qui constitue l’axe principal du texte.

M. Lionnel Luca – Très bien.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Je serai très attentive aux amendements que vous déposerez pour tenter d’améliorer encore un projet déjà abondamment enrichi par une large concertation avec l’ensemble des acteurs et par notre collaboration fructueuse avec le Parlement, dans le cadre des travaux préparatoires, puis de l’examen du texte par le Sénat.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques – Très bien.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Le texte a pour but d’améliorer la prévention, sans exclure la répression lorsqu’elle est nécessaire et juste. Parce que le maître joue un rôle essentiel dans la prévention des accidents, toute vente ou cession d'un chien par un professionnel ou par un particulier sera désormais subordonnée à la production d'un certificat vétérinaire au moment de la livraison à l'acquéreur. Ce certificat contiendra des recommandations relatives aux modalités de garde dans les espaces publics et privés et rappellera les règles de sécurité qui encadrent la détention de chaque type de chien.

En outre, devront obligatoirement suivre une formation préalable les futurs détenteurs de chiens d'attaque et de défense, mais aussi de tous les chiens ayant déjà mordu – c’est une nouveauté.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économiques – Une nouveauté importante.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur En étendant ainsi l’obligation de formation, nous tenons compte de la dangerosité réelle, irréductible à la dangerosité prévisible des chiens de telle ou telle catégorie.

Cette formation, qui portera sur les règles d'éducation canine et les règles de sécurité auxquelles les maîtres sont soumis dans les espaces publics et privés, sera sanctionnée par une attestation d'aptitude à la détention de ces chiens.

De plus, la détention légale et l’accès à la formation dépendront de l'évaluation comportementale obligatoire et périodique par un vétérinaire des chiens de première et deuxième catégorie mais aussi, en vertu d'un amendement sénatorial, de ceux qui dépassent un certain poids.

Quant à la répression des comportements dangereux, en particulier des faits d'imprudence graves pouvant entraîner la mort – comme en témoignent plusieurs accidents récents, notamment à Bobigny, le 23 octobre dernier –, le projet renforce de manière graduée la répression des faits d'homicide et de blessures involontaires par imprudence. De plus, dès qu'un chien dangereux ne sera plus jugé utile à l’enquête, il sera remis par le procureur à l'autorité administrative afin d’être placé et, le cas échéant, euthanasié. Enfin, afin de rendre plus efficace la chaîne de sécurité, les délits liés à la garde et à la circulation des animaux seront désormais jugés par un seul magistrat, à l'instar des nombreuses infractions pénales qui doivent être traitées rapidement.

Grâce à ce projet équilibré, que j’ai voulu pragmatique et réaliste, les accidents dramatiques que la législation en vigueur ne permettait pas encore de prévenir seront évités, et les familles pourront profiter en toute sécurité du plaisir et des vertus éducatives dont leur animal est porteur (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Catherine Vautrin, rapporteure Les accidents dramatiques survenus à la fin de l'été ont de nouveau attiré l’attention sur le danger que représentent certains chiens. Les morsures de chien ont entraîné depuis 1989 trente décès et blessé, souvent gravement, des milliers de personnes – pour ne mentionner que les accidents recensés, nos informations restant très lacunaires en la matière, comme sur l’organisation de la filière canine dans son ensemble. Les victimes sont le plus souvent des enfants et des personnes âgées, particulièrement vulnérables face à des animaux généralement massifs, puissants et aux réactions imprévisibles. En outre, plus des deux tiers de ces accidents surviennent dans un milieu familier et du fait d’un chien connu de la victime et réputé inoffensif – circonstances que le législateur n’avait jusqu’alors pas prévues.

Certes, face au « phénomène pitbull » des années 1990 et au sentiment d'insécurité que les chiens dangereux inspiraient en 1999, selon la revue 30 Millions d'amis, à 79 % des Français interrogés, la loi de janvier 1999 a tenté de réduire la dangerosité de certaines races de chiens. Mais, comme les autres textes en vigueur, loi de mars 2007 comprise, cette loi s’attaquait surtout, si j’ose dire, aux chiens eux-mêmes, oubliant qu’au bout de la laisse, il y a un maître, responsable de l’éducation de son chien, lequel peut, quelle que soit sa race, devenir dangereux si on le provoque ou si son dressage ou les traitements qu’il a subis l’ont rendu agressif.

Il était donc urgent de recourir à de nouvelles mesures ; du reste, plus de six parlementaires, dont je fais partie, ont déposé des propositions de loi en ce sens, décidés à résoudre les problèmes qui se posaient dans leurs circonscriptions. Mais, irréductible à un élément supplémentaire de l’arsenal législatif en vigueur, ce projet de loi relève d'une démarche nouvelle, plus globale, qui passe de la prévention à la protection, puis à la répression. Vous l’avez rappelé, Madame la ministre, il vise à prévenir les accidents et à responsabiliser les propriétaires et les détenteurs de chiens ; enfin, il renforce les sanctions en cas d'accident grave lié à une imprudence.

Au-delà de la prévention des accidents, objet principal du texte, l’organisation de la filière canine, qui concerne de nombreux acteurs, notamment les éleveurs, demeure particulièrement lacunaire alors que la France compte près de 10 millions de chiens et qu’une famille sur trois possède un animal. Je me félicite donc que le président Ollier ait décidé de lui consacrer une mission parlementaire d'information.

M. Patrick Beaudouin – Très bien !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Mesure phare de la politique de prévention, l'évaluation comportementale par des professionnels constitue une première étape essentielle, car elle s’étend à tous les chiens mordeurs, et non aux seuls chiens de première et deuxième catégorie, qui ne sont pas les seuls à mordre !

Mme Muriel Marland-Militello – C’est vrai !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – À cet égard, j’attire votre attention, Madame la ministre, sur l’importance des décrets d’application de la loi, notamment pour déterminer les modalités de cette évaluation.

Les sénateurs ont prévu que les propriétaires déclarent les morsures faites par leur chien. Mais beaucoup de faits survenant dans le cadre familial, j’ai souhaité que tout professionnel ayant connaissance de morsures dans l’exercice de ses fonctions ait à les déclarer.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Très bien !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Ces renseignements seront recueillis dans un fichier central canin qui permettra de savoir si un chien a déjà mordu.

Les sénateurs ont également institué un seuil de 30 kilos. Mais des chiens plus légers peuvent être dangereux. Avec le président de la commission, nous avons donc déposé un amendement supprimant ce critère.

Mme Brigitte Barèges – Très bien.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure - Il faut aller vers une information systématique de tout acheteur de chien pour le responsabiliser. Une famille sur trois possède un chien. Il y a donc là un enjeu de sécurité publique. L’école – à laquelle, je le sais bien, on demande déjà beaucoup – pourrait sensibiliser les enfants, avec l’aide de certains spécialistes.

Le second aspect de ce texte est de responsabiliser les propriétaires. Grâce à un amendement de M. Ciotti, nous pouvons aller vers la création d’un permis de posséder un chien dangereux. Le troisième axe est le renforcement des sanctions, sur le modèle des accidents de la circulation. L’imprudence et l’illégalité doivent être sanctionnées. Il ne faut pas relâcher la pression sur ceux qui se servent du chien comme d’une arme par destination. Certaines bandes sèment la terreur dans un quartier avec quelques chiens.

Chaque propriétaire doit être conscient qu’un chien est un être vivant, et qu’il faut toujours être prudent. Le chien est avant tout un animal de compagnie de la famille, des personnes seules, une aide pour les personnes handicapées. C’est quand il est éduqué par un maître conscient de sa responsabilité que le chien, notre ami, peut rester à sa juste place (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Patrick Ollier, président de la commission – Le chien, plus encore que le cheval, est l’ami de l’homme. Une famille sur quatre en possède un. Dans certains cas, cet ami peut être dangereux. Mais 60 % des propriétaires de chiens les considèrent comme des membres de la famille et les trois-quarts pensent qu’un chien favorise le développement des enfants. Pourtant, ceux-ci peuvent en être victimes, dans un environnement familier.

Ce projet répond à notre attente. Madame Vautrin a fait un excellent travail de synthèse et nos travaux en commission ont été consensuels, dans le seul souci d’améliorer le texte. Il s’agit de responsabiliser et former les maîtres. Dans le Périgord, où le chien occupe une place essentielle dans les fermes et les villages, on dit : A bon maître, bon chien. Nous devons donc faire que les propriétaires soient responsables, car on ne peut décréter que c’est le chien qui est coupable. Il faut éduquer et encadrer ceux qui détiennent des animaux potentiellement dangereux.

Il y a trop de chiens objets, achetés sur un coup de cœur. Chaque année, à partir de juin, la mairie de Rueil-Malmaison doit faire récupérer des dizaines de chiens attachés dans les bois et abandonnés dans des conditions inacceptables par des gens qui partent en vacances. Le chien peut être un instrument dangereux quand des maîtres irresponsables l’y ont entraîné. Se posent aussi les problèmes des élevages clandestins, des importations, des croisements.

La commission a été guidée par un souci de pragmatisme. Elle a voulu que les règles soient claires et faciles à appliquer. C’est pourquoi elle a supprimé l’article 4 bis qui introduisait un critère de poids, non pertinent quant au danger. Des mesures sont prévues pour les chiens de catégorie 1 et 2, les chiens ayant mordu, les chiens présentant un danger de manière générale. Mais cela suffit-il ? Je m’interroge sur cette catégorisation des chiens : correspond-elle à la réalité des problèmes ? Je souhaite que nous puissions réfléchir à tous les problèmes que j’ai évoqués, importations, élevages clandestins et aussi combats de chiens.

Mme Geneviève Gaillard – Très bien.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Précisément parce que je souhaite cette ample réflexion, j’ai demandé à M. Herth et à M. Raison de cosigner un amendement qui supprime la création de l’observatoire des comportements canins. Une telle mesure ne suffit pas. Je propose que l’Assemblée crée une mission sur l’ensemble de la filière canine…

M. Lionnel Luca – Très bien.

M. Patrick Ollier, président de la commission – …et je souhaite que nous travaillions avec le Gouvernement afin de prendre ensuite des mesures d’ensemble. Il n’est donc pas utile de créer maintenant cet observatoire. J’espère, Madame la ministre, que vous accueillerez cette suggestion. Nous vous faisons confiance pour résoudre ces problèmes et la commission soutient ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Nous passons à la discussion générale.

M. Dino Cinieri – Ces derniers mois, des accidents graves ont provoqué plusieurs décès par morsures. Il fallait donc modifier les dispositions législatives concernant les animaux potentiellement dangereux. Je souscris à la démarche de ce projet, qui insiste avant tout sur la prévention. Il introduit une formation du propriétaire de chien de catégorie 1 et 2 et une évaluation du comportement de l’animal. On ne dresse pas un chien, on l’éduque, et cela passe d’abord par une familiarisation entre le chien et son maître. Parfois, c’est ce dernier qu’il faut éduquer en premier.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Tout à fait.

M. Dino Cinieri – Car il y a plus de mauvais maîtres que de mauvais chiens. Éduquer un chien de garde demande certaines aptitudes. N’importe qui ne peut éduquer un animal de 7 à 8 mois. Aucun professionnel ne recommanderait de commencer par l’éducation d’un rottweiler ou d’un pitbull, mais plutôt par un chien plus malléable, comme le berger allemand, le bouvier ou le boxer, pour acquérir une certaine maîtrise. Sous réserve d’un encadrement strict, une formation permet d’inculquer au maître des principes d’éducation et les règles de sécurité applicables. Un décret déterminera le contenu et les modalités de la formation. Pourquoi ne pas s’inspirer du certificat d’aptitude de l’éducation sociale du chien, délivré aujourd’hui par les clubs sous le contrôle d’un moniteur en éducation canine du deuxième degré ?

Instituer de bonnes pratiques ne fera pas disparaître tous les accidents mais permettra d’éviter des erreurs qui rendent les animaux peureux ou agressifs. D’autre part, dans le cas des accidents qui surviennent dans le cercle familial, les chiens ont souvent été maltraités. Mais l’agressivité peut aussi se développer en raison de certaines pratiques de dressage dans les cercles cynophiles.

L'évaluation comportementale à laquelle vous proposez de soumettre les chiens de garde ou de défense permettra de déceler les signes de dangerosité ; mais j’approuve pleinement notre rapporteure de nous inviter à revenir sur les dispositions votées par nos collègues sénateurs, soumettant à cette évaluation tous les chiens à partir d’un certain poids : un pitbull de 25 kilos peut être aussi dangereux, sinon plus, qu'un chien plus lourd ! De plus, il ne faudrait pas stigmatiser tous les propriétaires de chiens qui élèvent correctement leur animal ; n'oublions pas que le chien est le meilleur ami de l'homme.

En revanche il est indispensable, comme le prévoit le projet, de renforcer le signalement des morsures car les plus graves sont souvent précédées d'incidents bénins. Parallèlement, le texte renforce les sanctions pénales contre les propriétaires de chiens agressifs ; elles sont à rapprocher de celles applicables en matière de délits routiers.

Mais la question des chiens dangereux rejoint celle, plus vaste, de l'encadrement de la filière canine. Il importe de sanctionner fermement les abus, malheureusement nombreux, et de contrôler davantage ceux qui se présentent comme des professionnels : je pense à ces éleveurs amateurs qui pratiquent dans leurs prétendus élevages des naissances tous les six mois dans un objectif de rentabilité, ou encore les ventes ou importations de chiots, parfois âgés de moins de trois mois, qui ne sont soumises à aucun contrôle. L'amendement de nos collègues sénateurs visant à rendre obligatoire l'intervention d'un vétérinaire lors de la vente d'un chien par une personne publique ou privée va dans le bon sens, mais ce n'est qu'un début.

Quand certains se montrent irresponsables au point, par exemple, d’apprendre à un dogue allemand de plus de 80 kilos à attaquer, il apparaît urgent de prévoir des agréments pour les moniteurs cynophiles et pour les particuliers qui éduquent des chiens potentiellement dangereux. Pour cela, nous devons travailler en étroite collaboration avec les centres cynophiles et les éleveurs affiliés à la société centrale canine, qui effectuent un travail remarquable.

Quant aux agents de sécurité, accompagnés de chiens, qui sont employés par des entreprises de gardiennage ou de surveillance et sont souvent des professionnels de qualité, il faudrait leur dispenser une formation adaptée. Force est de constater le manque d'encadrement dans les centres de formation, dont certains proposent des formations de maîtres-chiens à des chômeurs et leur délivrent des attestations sans aucune valeur.

Le groupe UMP votera ce texte, qui va dans le sens d'une meilleure prévention des accidents et réprime plus sévèrement les comportements délictueux ou criminels des maîtres. Cependant nous ne pourrons pas faire l'économie d'une réflexion d'ensemble sur l'organisation de la filière canine, animée par des professionnels de très grande qualité mais qui souffre du comportement de certains acteurs peu scrupuleux (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Je demande à chacun de respecter son temps de parole, ce qui nous permettra peut-être d’éviter une séance de nuit.

Mme Geneviève Gaillard – Avant d’entrer dans le détail de ce texte écrit dans l'urgence, je voudrais faire quelques observations préliminaires.

Première remarque : le temps médiatique et le temps législatif ne sont pas les mêmes, et il est insupportable de les confondre. J’approuve, Madame la rapporteure, votre idée de créer une mission d’information, mais le bon sens aurait voulu de le faire avant de légiférer…

M. Patrick Ollier, président de la commission Ce n’est qu’une étape !

Mme Geneviève Gaillard – Il ne faut pas non plus confondre action et réaction à un événement – si dramatique soit-il. On l'a déjà constaté en 1999, quand le phénomène « pitbulls » a provoqué la catégorisation des chiens, au motif que leurs propriétaires les utilisaient comme des armes par destination : cette loi a diminué le nombre de chiens de première catégorie qui sont recensés, mais je suis certaine que beaucoup ne le sont pas ; et elle n’a pas diminué le nombre de chiens de deuxième catégorie. Elle a provoqué des euthanasies, et rempli les refuges de chiens pourtant fort sympathiques. En revanche, elle n’a pas traité le problème des propriétaires inconscients ou délinquants.

Avec les dispositions successives adoptées depuis, on a assisté à un incroyable glissement d'objet : si le premier texte visait à endiguer l'utilisation de chiens comme armes, on en est arrivé à une discrimination entre les races de chiens, qui est malheureusement ancrée maintenant dans les esprits. Il aurait fallu s’intéresser aux maîtres plutôt qu’aux chiens, car ce sont toujours les mauvais maîtres qui font les mauvais chiens ! On a même déresponsabilisé les propriétaires de gros chiens hors catégories.

À légiférer dans l'émotion, on peut commettre l'irréparable. Heureusement, le Sénat a supprimé les articles 5 et 7 du projet, qui organisaient l'abattage systématique des chiens en fonction de leur race et de leur date de naissance. Il n’empêche : avec ce texte, on continue de stigmatiser des races de chien et de conditionner les esprits. N’oublions pas, en effet, que tous les chiens, petits ou gros, peuvent mordre. C’est pourquoi, Monsieur le président de la commission, j’approuve votre suggestion que l’on supprime un les catégories de chiens. Avant-hier dans mon département, les gendarmes ont tiré sur un chien de deuxième catégorie : comme ils ont peur, les gens approuvent ; et devant un gros chien, même muselé, ils se détournent. J’aimerais qu’on leur fasse comprendre que tous les chiens qui ne sont pas bien traités peuvent être mordeurs, mais que les autres sont des compagnons très sûrs.

Un autre aspect de ce texte qui ne me plaît pas, Madame la ministre, est le volet répressif de l'article 8 bis, qui m’apparaît comme une hyper-réaction aux derniers accidents impliquant des chiens de première ou deuxième catégorie. Les peines me semblent en effet excessivement lourdes par rapport à celles encourues par les personnes qui utilisent les chiens comme armes par destination – et qui, je crois, mais il faut le vérifier, n’encourent qu’une peine de trois ans d’emprisonnement. Il n’y a plus de cohérence dans l’échelle des peines si une faute d’imprudence peut être punie plus lourdement qu’un acte de violence volontaire.

Quant aux circonstances aggravantes, l’une d’entre elles est l’absence de muselière ; mais de fait, si le chien a mordu, c’est qu’il n’avait pas de muselière ! Ce n’en est donc pas une. Par ailleurs, on n’est pas obligé de museler son chien chez soi – ce qui risquerait précisément de le rendre dangereux… On le voit : à légiférer à chaud, on risque d’introduire dans la loi des détails incongrus et qui peuvent créer de la confusion.

S’agissant des évaluations comportementales pour les chiens ayant déjà mordu et de l’éducation des maîtres, le texte va dans le bon sens. Le groupe socialiste s’abstiendra cependant, car il désapprouve la méthode qui consiste à légiférer dans l’urgence, en réaction à des faits divers, si terribles soient-ils.

Il semble que les actions de formation des propriétaires incomberont aux vétérinaires. Peut-être faudrait-il prévoir un agrément d’État, pour éviter que ne fleurissent de faux comportementalistes, par ailleurs vrais charlatans ?

Le président Ollier plaide pour la suppression de l’observatoire du comportement canin, dont le champ de recherche me semble effectivement trop vaste. Cependant, pour avoir interrogé l’hôpital de Niort, dans ma circonscription, je puis témoigner que la statistique sur le nombre et la nature des morsures, leur caractère « délabrant » ou non, les séquelles des personnes mordues, la race des chiens en cause et les circonstances des accidents reste très lacunaire. Je suis donc pour ma part favorable à la création d’un observatoire des morsures canines, plus directement consacré aux sujets qui nous intéressent.

En définitive, ma principale réserve porte sur la possibilité réelle qui sera donnée d’appliquer ce texte. Depuis une dizaine d’années, les textes s’empilent et la situation n’a pas radicalement changé : combien de chiens muselés croise-t-on sur la voie publique ?

Autre interrogation, combien de cas d’abandons l’introduction de ces nouvelles dispositions risque-t-elle d’entraîner ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – C’est une vraie question !

Mme Geneviève Gaillard – Enfin, je tiens à rendre hommage au travail passionné et compétent de milliers d’éleveurs, de propriétaires et d’associations. Quelques accidents dramatiques ne doivent pas faire oublier que la majorité des gens parviennent à vivre en parfaite harmonie avec leur animal.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – C’est vrai.

Mme Geneviève Gaillard – Et que du chien secouriste au chien assistant de vie d’un enfant autiste, du chien compagnon d’une personne isolée au chien d’aveugle, du chien thérapeute au chien démineur, du chien sujet d’expérience médicale au chien d’agrément, l’humanité doit beaucoup au meilleur ami de l’homme !

Mme Brigitte Barèges et Mme Arlette Franco – Très bien !

Mme Geneviève Gaillard – Le chien ne mérite pas d’être sacrifié sur l’autel d’une société violente et sans repère. En tout cas, nul ne parviendra à me convaincre qu’il soit subitement devenu notre pire ennemi (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; applaudissement sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. André Chassaigne – Le regard que je porte sur la question qui nous occupe est celui d’un élu rural et d’un citoyen concerné, non propriétaire de chien lui-même, mais qui mesure l’attachement profond que les maîtres portent à leurs bêtes. Je participe chaque année à la remise à des personnes malvoyantes de chiens issus d’un élevage de ma circonscription et c’est un moment fort de ma vie de parlementaire.

Après la mort d’une enfant à Épernay en août dernier, vous avez, Madame la ministre, immédiatement annoncé un projet de loi visant à protéger les personnes des chiens dangereux. L’émotion que suscite ce type de drame est légitime. Mais elle ne doit pas faire oublier que le cas est malheureusement assez fréquent, 28 décès – dont j’ai ici la liste – étant intervenus depuis 1989.

Le présent texte comporte une série de mesures non sans intérêt. Au reste, nous ne partons pas de rien : la loi de 1999 a fixé le cadre général de lutte contre le phénomène, en établissant deux catégories de chiens dangereux, auxquelles s’appliquent de strictes obligations que chacun, ici, connaît. Depuis lors, de nouvelles mesures sont venues aggraver les sanctions encourues par les propriétaires qui manquent à ces prescriptions. Les parlementaires communistes les ont soutenues, et ils se sont félicités qu’elles permettent d’enregistrer une baisse du nombre d’actes délictueux faisant intervenir des chiens.

Las, depuis quelques années, on note une augmentation sensible du nombre de chiens dangereux relevant des deux catégories, et je comprends l’esprit de la proposition de loi de notre collègue Tron, qui souhaite dépasser ce clivage artificiel et faire en sorte que le régime de la première catégorie soit appliqué à la seconde. Tout ne sera pas réglé pour autant, dans la mesure où il arrive que des chiens hors catégorie – comme les bergers allemands – soient à l’origine de blessures mortelles.

Vous aviez, Madame la ministre, annoncé des mesures contre le croisement. Le texte n’en reprend aucune…

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur C’est infaisable.

M. André Chassaigne – Cela pose en effet le problème des critères selon lesquels autoriser ou prohiber un croisement de races. Au fond, il n’y a pas de race foncièrement dangereuse et ce sont les individualités qu’il faut considérer. Naturellement, lorsqu’un molossoïde attaque, les séquelles risquent d’être plus graves que s’il s’agit d’un caniche. Mais il serait vain de prétendre qu’un croisé issu d’un boxer et d’un labrador sera forcément dangereux du fait même du croisement ! Ce qui prime, c’est la stabilité de l’environnement et la qualité du travail de l’éleveur.

Il est temps d’aborder le problème globalement et de s’attaquer à ses causes plutôt qu’à ses seuls effets. L’acquisition de dogues est souvent le fait de populations socialement fragilisées, qui entretiennent parfois des relations conflictuelles avec le voisinage. La présence d’un tel animal est alors perçue comme un moyen de se protéger d’un environnement hostile. Bien entendu, je me garderai bien de toute généralité. Mais il n’est pas rare qu’aux prises avec des difficultés quotidiennes qui leur semblent insurmontables, ces personnes laissent leur animal seul au foyer, parfois en présence d’un jeune enfant ou d’une personne âgée. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que la plupart des morsures graves surviennent dans la sphère familiale, à l’encontre de personnes vulnérables.

Le nombre de chiens mal maîtrisés croît avec la misère et la précarité. La meilleure manière de lutter contre le phénomène, c’est de résoudre les problèmes sociaux des maîtres, en augmentant le pouvoir d’achat des plus modestes et en luttant contre le chômage.

Mme Valérie Rosso-Debord – Au moins, vous n’avez pas peur de passer du coq à l’âne !

M. André Chassaigne – Je m’en tiendrai aux chiens. Plutôt que s’attaquer aux racines du mal, le Gouvernement préfère surfer sur l’émotion et légiférer dans l’urgence. Après le passage du texte au Sénat, le volet répressif s’est encore accentué, avec l’adoption d’un article 8 bis qui pénalise de manière disproportionnée le propriétaire d’un chien dangereux ayant commis un acte de morsure. En effet, la loi de 1999 prévoyait déjà des peines de prison ferme, cependant que les mesures préventives qu’elle contenait n’ont jamais été appliquées. S’agissant de la moralisation du commerce ou du transport des animaux, les décrets d’application n’ont jamais vu le jour. Ces questions sont pourtant décisives. Ainsi, le commerce clandestin des chiens dangereux porte aujourd’hui sur 100 000 chiots illégalement importés chaque année. Las, peu est fait pour régler le problème.

Mme Arlette Franco – Tout à fait.

M. André Chassaigne – En dehors du dispositif de formation des détenteurs – qui vise de manière un peu illusoire à « corriger » les maîtres alors que les problèmes sociaux auxquels ils s’affrontent généralement sont loin de l’être ! –, le texte passe à côté de l’enjeu majeur que constitue la prévention. La répression ne peut pas tout. Il faut aussi prévoir de vastes campagnes de sensibilisation dans les médias, dans les écoles et dans les lieux publics. Quant aux enfants, ils doivent être particulièrement sensibilisés au respect du chien.

Mais le plus important, c’est d’améliorer l’élevage. N’importe qui peut aujourd’hui élever des chiens, car on n’exige ni déclaration préalable ni compétences en matière de psychologie canine. Il n’existe donc aucune garantie alors que bien des problèmes rencontrés par les propriétaires résultent de la vente d’animaux non « stabilisés » et de l’absence de tout conseil d’éducation. C’est là que le législateur doit intervenir.

Je sais bien que libéralisme veut dire « liberté d’entreprendre »…

M. Patrick Ollier, président de la commission – Il est heureux que vous l’ayez compris !

M. André Chassaigne – …mais ma liberté s’arrête où commence celle de mon voisin. Les gouvernements successifs semblent avoir oublié qu’être éleveur est un métier qui exige compétence et professionnalisme. Il est grand temps que le législateur encadre ces pratiques.

Ce projet de loi ne manque pas d’intérêt, mais on peut craindre que le manque de moyens réduise son efficacité, et il est regrettable que nos amendements à ce sujet se soient heurtés à l’inique article 40.

C’est une bonne idée d’exiger une attestation d’aptitude sanctionnant une formation pour les détenteurs de chiens dangereux, mais il faut penser aux conséquences. Ceux qui possèdent des chiens de 1ere et de 2e catégorie sont nombreux, plus encore que nous l’imaginons si l’on prend en considération l’ensemble des chiens mordeurs. Cette mesure restera lettre morte si des moyens notables ne sont pas affectés à la mise en place d’un véritable réseau de formateurs.

Je regrette d’ailleurs que l’on ne précise pas qui assurera cette formation. Les vétérinaires n’ayant pas toujours reçu une formation sur les comportements canins, ils ne savent pas nécessairement repérer les comportements déviants.

Mme Geneviève Gaillard – N’exagérons pas !

M. André Chassaigne – Mais non ! Un habitant de ma circonscription a eu en sa possession un chien dont l’hyperactivité et l’hypersensibilité avait échappé à son vétérinaire ; il a fallu consulter un comportementaliste pour élaborer une thérapie efficace afin de limiter le report affectif du chien sur son maître qui s’expliquait par une séparation trop brutale entre le chiot et sa mère.

Il reste que même les éducateurs canins et les comportementalistes ne connaissent pas toujours les particularités de chaque race. Mieux vaudrait donc encadrer ces professions en instaurant un diplôme d’État au terme d’un travail de fond sur le référentiel retenu. La formation, principale mesure de ce texte, resterait une coquille vide sans engagement en ce sens.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Vous avez gardé tout votre mordant ! (Sourires)

M. André Chassaigne – Par ailleurs, les chiens dangereux sont souvent détenus par des populations fragiles, qui risquent d’éprouver des difficultés à assumer le coût de la formation et celui de la consultation comportementale chez le vétérinaire. Le risque est grand que cette mesure entraîne des passages à la clandestinité, des abandons d’animaux ou bien des euthanasies. Ce serait le contraire de notre objectif !

Au surplus, la formation n’est pas une solution miracle. Inculquer les règles de la psychologie canine ne saurait être une garantie absolue. En matière de conduite, par exemple, on progresse jusqu’à l’obtention du permis, mais une certaine régression suit bien souvent.

J’en viens aux formations qui pourront être prescrites par les maires aux détenteurs de chiens présentant un danger même s’ils n’appartiennent ni à la 1ere catégorie ni à la 2e catégorie : comment un élu local évaluera-t-il la dangerosité des animaux ? Je proposerai plutôt d’imposer des formations aux détenteurs plus aisément repérables de chiens divaguant sur la voie publique ou dans les propriétés voisines. Tel est l’objet d’un amendement que je défendrai.

S’agissant des agents de sécurité, l’objectif de formation est également louable, car certains maîtrisent mal leurs chiens faute d’apprentissage.

M. Dino Cinieri – Pas tous !

M. André Chassaigne – Mais il ne faudrait pas oublier que bien souvent les agents de sécurité ne disposent pas d’un lieu de garde pour les chiens, si bien qu’ils rentrent avec eux le soir. Ne négligeons pas les conditions de travail de ces personnels.

M. le Président – Il faut conclure…

M. André Chassaigne – Pour ce qui est du rôle des maires, placé au centre des mesures prévues, il est également regrettable que les moyens ne correspondent pas à vos ambitions. Avez-vous bien conscience, Madame la ministre, de ce que toutes ces dispositions impliquent ? Les maires ne disposent souvent d’aucun moyen pour obtenir la production de toutes les pièces exigées – certificats de stérilisation, de vaccination antirabique, attestation d’assurance en matière de responsabilité civile – et encore moins pour faire respecter les interdictions en vigueur.

Une fois encore, les élus risquent d’être bien seuls face à leurs responsabilités faute d’un soutien efficace de l’État. Je défendrai tout à l’heure trois amendements à ce sujet.

M. le Président – Monsieur Chassaigne….

M. André Chassaigne – Ce texte ne manque pas d’intérêt, mais je regrette qu’il soit présenté dans l’urgence et il reste à améliorer certaines dispositions, notamment l’article 8 bis. Le groupe GDR ne s’opposera pas à ce texte, mais notre vote dépendra des amendements retenus. (Applaudissements sur divers bancs)

M. Stéphane Demilly – À écouter certains d’entre nous, je me demande si nous vivons bien sur la même planète… Faut-il rappeler les nombreux drames causés par des chiens dangereux au cours des derniers mois ?

Le 19 août dernier, un bébé de 18 mois était ainsi tué par un American Staffordshire Terrier, chien de combat issu du croisement d'un bouledogue et d'un terrier, alors qu’un drame identique s’était déjà produit en juin 2006 à cause d’un chien de la même race. Peu de temps avant, un garçon de 8 ans avait été égorgé par un bullmastiff. Je ne le rappelle pas pour que l’on légifère sous le coup de l’émotion, Madame Gaillard, mais pour que l’on prenne conscience de la réalité : depuis 1989, 30 personnes ont été tuées par des chiens !

Il est vrai que le législateur n'est pas resté insensible au danger. L’apparition du phénomène pitbull au début des années 1990, ainsi que la concentration de ces animaux dans les quartiers sensibles, ont conduit le législateur à considérer le chien comme une arme lorsqu'il est utilisé volontairement par son maître pour menacer, blesser ou tuer - c’était en 1996.

En janvier 1999, la loi relative aux animaux dangereux et errants a ensuite classé les chiens dangereux en deux catégories : les chiens d'attaque, communément appelés pit-bulls; les chiens de défense, assimilables par leurs caractéristiques morphologiques aux Rottweiler. Les premiers seraient au nombre de 270 000, et les seconds de 410 000 d’après les estimations disponibles, mais ces données ne tiennent pas compte du nombre élevé de chiens dangereux non déclarés…

M. François Rochebloine – C’est malheureusement vrai !

M. Stéphane Demilly – Deux lois ont enfin été votées en 2001 et 2007 afin d’encadrer la détention et l'utilisation des chiens potentiellement dangereux, et de fixer des règles de sécurité applicables à la circulation des animaux. La législation est donc devenue de plus en plus stricte, et c’est tant mieux ! Il faut parfois savoir faire preuve de fermeté, même si c’est au risque de déplaire à certains…

En effet, ce qui me tient à cœur, ce ne sont pas les propriétaires des chiens, mais la mamie qui sort de chez elle avec la peur au ventre parce que son voisin laisse son pitbull en liberté dans la cage d'escalier, et ce sont les gamins qui jouent au football alors que des rottweiller rôdent dans les parages…

Mme Geneviève Gaillard – C’est de la démagogie !

M. Stéphane Demilly – Non ! C’est seulement la vérité ! Ce qui me préoccupe, c’est également les enfants que des parents complètement inconscients laissent seuls à la maison en compagnie du mastiff familial, ou encore ces badauds qui doivent s’écarter devant des zozos frimeurs qui se promènent avec un tosa non muselé. Ce n’est pas aux propriétaires de chiens dangereux que je suis sensible…

Mme Geneviève Gaillard – Ce ne sont pas les chiens qui sont dangereux, mais leurs propriétaires !

M. Stéphane Demilly – Evitons la langue de bois… Près de 79 % des Français sont convaincus que les chiens classés comme dangereux sont une menace pour leur sécurité.

M. François Rochebloine – Leurs propriétaires aussi !

M. Stéphane Demilly – Le nombre de ces chiens a certes diminué grâce aux différentes lois que nous avons adoptées, mais les accidents graves enregistrés au cours des derniers mois démontrent tragiquement les insuffisances de la législation actuelle. Aussi, je vous sais gré, Madame la ministre, de vous être emparée de ce dossier éminemment important aux yeux de nos concitoyens.

Le problème, c'est que votre texte manque de simplicité et que son efficacité est donc douteuse. Vous proposez un renforcement de la prévention reposant, d'une part, sur l'obligation pour les détenteurs de chiens d'attaque et de défense de suivre une formation sanctionnée par la délivrance d'une attestation d'aptitude, et, d'autre part, sur l'intervention d'un vétérinaire lors de toute cession de chien, lequel délivrera aux acquéreurs les conseils de sécurité appropriés. On est en train de monter une usine à gaz !

Ce texte est trop technocratique. Vous proposez, par exemple, des évaluations, mais je me demande, parfois, si ce ne sont pas certains maîtres qui en auraient besoin.

M. François Rochebloine – Absolument !

M. Stéphane Demilly – La place des chiens potentiellement tueurs n'est pas sur le divan d’un psychanalyste canin ; elle est à la fourrière ! De même, qui va définir les modalités de la déclaration d’aptitude ? Que c’est compliqué ! Un amendement sénatorial va même jusqu'à instaurer un Observatoire national du comportement canin. Comment n’y avons-nous pas pensé plus tôt ? Comment avons-nous fait pour vivre sans ? Madame la ministre, vous savez qu’un tel sujet mérite une action rapide, claire et volontariste. Nos compatriotes attendent autre chose que des missions d'information, des observatoires ou des analyses comportementales, car rien de tout cela n’empêchera les chiens dangereux de continuer à provoquer des drames.

La sécurité immédiate de nos concitoyens doit prévaloir sur toute autre considération. La loi interdit déjà l'acquisition, la cession, l'importation ou l'introduction sur le territoire des chiens de première catégorie, les plus dangereux, comptant sur leur extinction progressive, puisque les chiens existants doivent être stérilisés. Nos collègues sénateurs ne semblent plus partager plus cet objectif : ils ont retiré de votre texte l'interdiction de détention des chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000, c’est-à-dire l’article 5 du projet.

Mme Geneviève Gaillard – Heureusement !

M. Stéphane Demilly – Ils en ont ainsi supprimé, avec l'accord tacite de notre commission, la colonne vertébrale du projet, sa seule proposition claire, directe et véritablement à la hauteur du problème. C'est un véritable recul par rapport à la loi de 1999.

Je présenterai, en cohérence avec la proposition de loi que j'avais élaborée fin septembre, des amendements visant…

Mme Geneviève Gaillard – À tuer tous les chiens !

M. Stéphane Demilly – …à interdire la détention de chiens de première catégorie, sauf dans le cadre d'activités de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds.

M. Patrick Ollier, président de la commission – C’est excessif !

M. Stéphane Demilly – Par ailleurs, je propose de durcir le régime applicable aux chiens de seconde catégorie en leur imposant celui actuellement applicable aux chiens de première catégorie, c'est-à-dire la stérilisation et l'extinction à terme.

Seules de telles mesures nous permettront d'en finir avec les accidents dramatiques qui, régulièrement, font la une des journaux. Madame la ministre, je vous ai dit le fond de ma pensée ; j’espère être entendu (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP).

M. Patrick Beaudouin – De récents et tragiques incidents ont montré que la législation actuelle en matière d'animaux dangereux était insuffisante et, de plus, rarement appliquée. Difficulté du classement des animaux, manque de contrôle et de formation des propriétaires, non-responsabilité des éleveurs, insuffisance des sanctions, autorités locales dépourvues de pouvoir : les questions non résolues étaient nombreuses.

Devant l'ampleur du problème, un certain nombre de collègues et moi-même avons déposé des propositions de loi. En tant qu’élu local, je reçois de nombreuses plaintes de promeneurs du bois de Vincennes, qui souhaiteraient pouvoir jouir paisiblement du lieu sans y croiser des chiens que l’irresponsabilité de leurs maîtres transforme en dangers permanents. Je me réjouis donc, Madame la ministre, que vous ayez déposé ce projet de loi reprenant un certain nombre de propositions parlementaires.

Trois points me paraissent particulièrement importants. Le premier est l'identification des chiens potentiellement dangereux. J'aurais souhaité que la classification des chiens d'attaque et de défense soit renforcée, voire élargie. Cependant, les mesures proposées – évaluation individuelle, identification des incidents, création d'un organisme centralisant les informations – me semblent positives.

Plus importante encore est l'élaboration d'un véritable statut des détenteurs de chiens potentiellement dangereux ainsi que des éleveurs d'animaux. La loi instaure une obligation d’attestation d'aptitude, sanctionnée par un certificat. Cela répond en partie à mon souhait de créer un permis canin, ce qui sera fait, j’espère, par amendement. Les expressions utilisées par le législateur pour définir ces deux catégories de chiens dangereux – de combat ou d'attaque, de garde ou de défense – ne sont certainement pas le symbole d'une bonne et douce compagnie. Le maître d’un tel chien, c’est-à-dire d’un animal considéré comme une « arme » par destination, doit apprendre à maîtriser le comportement de son animal. Il est important que ce soient les responsables de terrain, maires et préfets, qui appliquent ce dispositif.

La loi place également l’élevage sous la direction des autorités préfectorales ; il faut mettre fin aux élevages clandestins et au commerce illégal des animaux. Nous devons en outre veiller à empêcher l'utilisation abusive, voire inhumaine, des chiens par de prétendus maîtres-chiens de sécurité, dont témoigne un article du Figaro de ce jour.

Le texte, dans l’ensemble, me satisfait, par sa vision réaliste du problème de la détention des chiens – les meilleurs compagnons pour beaucoup de nos concitoyens –, ainsi que par la juste position qu’il maintient entre l’angélisme, qui voudrait que l'animal soit bon par nature et ne puisse être soupçonné de violence, et la réalité des faits.

Je souhaiterais qu'une large campagne de communication, mobilisant tous les acteurs potentiels, soit lancée en direction des propriétaires d'animaux de compagnie, sur leur responsabilité propre. Il faut mettre fin à l'inconscience coupable dont font preuve de nombreux propriétaires de chiens. Je rappellerai, à ce sujet, l'excellente initiative de l'ancien ministre de l'agriculture, Hervé Gaymard, qui, en 2004, avec l'ensemble des professionnels canins, avait réalisé un « Livre de responsabilisation pour le propriétaire d'un animal de compagnie ».

Il sera nécessaire d'aller plus loin. De mon expérience du forum de l'animal de compagnie, que j'organise chaque année à Saint-Mandé, je peux témoigner que beaucoup de nos concitoyens pèchent par défaut vis-à-vis du monde animal.

M. Patrick Ollier, président de la commission – C’est vrai !

M. Patrick Beaudouin – D'autres, mal intentionnés, exploitent les failles de la législation et causent des torts considérables tant aux animaux qu'aux professionnels sérieux. C'est pourquoi je me réjouis de l'initiative prise par le président Ollier de créer une mission d'information. Je souhaiterais qu’elle devienne une mission d'information élargie, afin que ses conclusions aient le plus de poids possible.

« On est responsable pour toujours de ce que l'on a apprivoisé », disait Saint-Exupéry. Votre texte nous en rappelle la forte obligation ; je le voterai donc (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC).

Mme Corinne Erhel – La place accordée à l’animal dans notre société constitue un fait social. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 9 millions de chiens, présents dans un foyer sur trois. Le chien est un compagnon fidèle, facteur de lien social, favorisant la lutte contre l'isolement, participant à l'accompagnement des personnes handicapées ou à des actions de secours.

Cependant, l'actualité récente a montré que, malheureusement, surviennent parfois des accidents mortels impliquant des chiens. Face à cette actualité dramatique, le projet de loi tente de répondre à une crainte collective en proposant des « mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux ». Ces sujets réclament de notre part de la sérénité, et il me semble toujours difficile de légiférer sous le coup de l'émotion. Nous avons au contraire besoin de recul et, pour cela, de disposer d'un bilan de l'application des lois de 1999 et 2007. D'ailleurs, la loi pour la prévention de la délinquance de 2007 pose le principe d'un rapport triennal sur la mise en oeuvre des dispositions contre les chiens dangereux.

Ce texte appelle plusieurs remarques de ma part. La catégorisation des chiens est-elle légitime ? Le comportement d'un chien n'est pas seulement fonction de sa race, mais aussi de son mode d'élevage, de son éducation, de son mode de vie et de la place qu'il occupe auprès de ses maîtres. Le chien est un animal vivant qui n’est ni un enfant, ni un objet. À ignorer cet équilibre, trop de familles laissent le chien prendre une place excessive, au risque de provoquer un accident. L’éducation canine doit être une obligation, quelle que soit le chien ! Elle doit échoir à des professionnels formés pour un coût accessible. Les formations étant gratuites en association mais payantes en club privé, quels moyens envisagez-vous pour remédier à cette inégalité d’accès ?

De même, comment lutterez-vous contre la commercialisation anarchique des chiens ? Songez que n’importe qui peut vendre un chiot sans se préoccuper des capacités de l’acheteur ; on trouve des centaines d’annonces de vente dans les journaux locaux ou gratuits !

Trois remarques, pour finir : la hiérarchie des peines pour homicide involontaire est à revoir, de même que la responsabilité excessive des maires. Enfin j’espère que ce texte sera facilement applicable sur le terrain. J’ai apprécié le travail de la commission qui a notamment repoussé un amendement relatif aux chiens de plus de trente kilos, qui ne réglait rien. Et je me réjouis de la création d’une mission d’information sur la question, même si, comme Mme Gaillard, j’aurais préféré que nous légiférions une fois ses conclusions rendues (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

Mme Brigitte Barèges – En tant que députée, je me réjouis que ce texte renonce à l’approche catégorielle – destinée à résorber le phénomène des pitbulls – adoptée en 1999, qui n’a pas fait diminuer le nombre d’accidents, bien au contraire. L’amalgame entre délinquance et accident domestique était à proscrire. Songez que plus de neuf morsures sur dix ont lieu dans la sphère familiale ! De même, la taille et le poids de l’animal n’affectent pas forcément sa dangerosité. Vous avez heureusement choisi de vous intéresser aux maîtres autant qu’aux chiens. Tel maître, tel chien ! Le propriétaire, en effet, est en grande partie responsable du comportement de son animal. À ce titre, votre projet met en place une forme de permis de détention – comme on parlerait de permis de conduire – et renforce la formation des professionnels.

En tant que maire, je me réjouis que la loi du 5 mars 2007 ait renforcé nos pouvoirs en matière de prévention de la délinquance. Nous pouvons aujourd’hui contrôler le muselage obligatoire, assurer le retrait ou l’euthanasie d’un animal en cas de danger grave et veiller à l’obligation de déclaration. Avec ce texte, les maires devront en outre recueillir les déclarations de morsure et ce sous réserve qu’il leur soit présenté un certificat d’aptitude à la détention, à défaut de quoi ils pourront exiger le retrait ou l’euthanasie. Les maires, jusqu’ici, ne disposaient pas toujours des moyens pour remédier aux problèmes. Il leur faudra désormais organiser leurs services de manière à répondre aux nouvelles exigences de sécurité et de sensibilisation qui s’imposent. Une famille sur trois est concernée, et plusieurs centaines de blessures ont été constatées depuis 1989, dont une trentaine mortelles ! Face à cela, ce texte nous donne les moyens de renforcer la sécurité, première de nos libertés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Dupré – À vouloir légiférer au gré de l’émotion populaire, le Gouvernement devient inconséquent. Nous pensons aux familles si cruellement éprouvées par l’agression de l’un des leurs. Fallait-il pour autant produire un texte dans la précipitation ? Huit millions de maîtres sont concernés : une meilleure concertation n’était-elle pas nécessaire ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Elle a eu lieu !

M. Jean-Paul Dupré – Non : la société centrale canine n’a même pas été consultée !

Mme Catherine Vautrin, rapporteur – Je l’ai auditionnée !

M. Patrick Ollier, président de la commission Il fallait venir en commission !

M. Jean-Paul Dupré – Les élus locaux avaient aussi leur mot à dire. Et pourquoi ne s’être pas soucié de l’application des lois existantes, dont celle de 1999 qui aurait vraiment pu contribuer à prévenir les morsures ? Hélas, ses décrets d’application ne sont toujours pas publiés…

Mme Brigitte Barèges – En 1999, vous étiez au pouvoir…

M. Jean-Paul Dupré – Chacun sait aussi que le type racial ne détermine pas la dangerosité. L’écrasante majorité des morsures est d’ailleurs imputée à des chiens réputés non dangereux, dans la sphère familiale. C’est plutôt l’éducation qui est au cœur du problème. À ce titre, la responsabilité de l’éleveur est en cause autant que celle du propriétaire, car les premières semaines de vie sont cruciales pour la socialisation de l’animal. En matière de prévention d’abord, il faut sensibiliser les éleveurs et les propriétaires. D’autre part, il faut renforcer les sanctions pour éviter tout dérapage, en améliorant notamment l’information des maires.

Hélas, je me demande si cette loi ne rejoindra pas la cohorte de celles dont la mise en œuvre est restée toute théorique. Songez qu’il est plus facile aujourd’hui de placer d’office un maître pour comportement indigne que de soustraire un chien dangereux ! Au moins faudrait-il considérer les infractions à la loi comme des délits, afin qu’elles ne soient plus classées sans suite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Éric Ciotti – Voici de nombreuses années que l’on lutte contre les dangers que posent certains chiens. L'augmentation inquiétante, au cours de ces derniers mois, du nombre des accidents graves – dont les victimes étaient souvent des enfants – en témoigne : les lois successives n’ont malheureusement pas suffi à réduire à néant les risques que présentent ces chiens, notamment ceux de première catégorie, que, trop souvent, leurs propriétaires utilisent comme de véritables armes pour menacer ou racketter nos concitoyens, ou pour protéger leurs propres trafics.

M. Lionnel Luca – C’est bien le problème !

M. Éric Ciotti – Dans certains quartiers, la peur s'est installée, chez les mères de famille et les passants comme chez les forces de l’ordre – et je n’oublie pas les policiers violemment agressés à Villiers-le-Bel au cours de la nuit dernière et des nuits précédentes.

Il était donc indispensable de renforcer la législation afin de prévenir plus efficacement les risques d'attaque, de morsures et de blessures ; merci, Madame la ministre, d'avoir pris en considération ce grave problème, non pour légiférer en fonction de circonstances dramatiques, mais bien pour maîtriser durablement un problème de société incontrôlé qui nourrit le sentiment d'insécurité des Français.

Un faux débat sur les rapports entre l'homme et l'animal ne doit donc pas nous détourner de notre objectif principal : renforcer la sécurité des personnes.

Mme Arlette Franco – Absolument !

M. Stéphane Demilly – Merci de le dire !

M. Éric Ciotti – À cette fin, il est temps de responsabiliser les maîtres, qui doivent posséder les aptitudes et les connaissances indispensables à l’éducation et à la détention des chiens de ce type, car leur attitude est déterminante.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Bien sûr !

M. Éric Ciotti – Une partie des accidents graves que j’ai mentionnés auraient pu être évités si les maîtres avaient été correctement formés.

Je me félicite donc que le texte prenne enfin en considération les maîtres en conditionnant la détention des chiens des première et deuxième catégories à l'obtention d'une attestation d'aptitude sanctionnant le suivi d'une formation sur l'éducation et les comportements canins et sur la prévention des accidents. Mais la responsabilisation des maîtres, condition nécessaire, n’est pas suffisante : les caractéristiques psychologiques et morphologiques des chiens dangereux, surtout de première catégorie – force, poids, résistance à la douleur et puissance de la mâchoire – les rendent potentiellement plus dangereux que les autres. Ces chiens n’ont plus leur place sur notre territoire !

M. Stéphane Demilly – Très bien !

M. Éric Ciotti – Or, malgré la loi de 1999, qui en prévoyait l’extinction progressive, il en resterait encore 22 000 selon le rapport de Mme Vautrin – qui évalue à 160 000 le nombre de chiens de catégorie 2.

J’ai donc déposé un amendement visant à instaurer un permis de détention que le propriétaire devra être en mesure de produire lorsqu’il est accompagné de son chien sur la voie publique, et dont la délivrance par les maires sera subordonnée à l’obtention du certificat d'aptitude, à l'évaluation comportementale du chien, au respect des prescriptions instaurées par les lois de 1999 et de 2007, enfin à l’inscription au fichier national des chiens dangereux qu’un amendement de la rapporteure propose de créer. En renforçant l’efficacité du texte, ce dispositif cohérent et rigoureux adresserait un signal fort aux mauvais propriétaires et aux propriétaires délinquants.

Au-delà de la gestion et du contrôle des chiens dangereux, la disparition des chiens de première catégorie, objectif prioritaire, suppose de lutter contre la multiplication des trafics, notamment en provenance des pays de l'Est, et qui alimentent l’agressivité de chiens trop tôt séparés de leur mère, élevés, sociabilisés et transportés dans de mauvaises conditions. J’ai donc déposé plusieurs amendements visant à alourdir les peines encourues par ces trafiquants, dont les comportements inadmissibles sont catastrophiques pour les bêtes comme pour les hommes.

Je voterai ce texte utile, qui, en complétant notre législation, améliore la sécurité de nos concitoyens en les protégeant de menaces devenues insupportables (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et du groupe NC).

M. Lionnel Luca – Le chien est, dit-on, le meilleur ami de l’homme. Si certains événements tragiques, impliquant plusieurs races de chiens au-delà des catégories définies par la loi de 1999, permettent d’en douter, ils demeurent relativement peu nombreux malgré l’écho médiatique dont ils ont fait l’objet et l’insupportable souffrance des victimes.

Mme Geneviève Gaillard – Très bien !

M. Lionnel Luca – Trente-quatre accidents mortels ont ainsi été recensés en France depuis 1989, soit, en près de vingt ans, dans le premier pays canin d’Europe, riche de 8 millions de chiens, autant que de décès par noyade d'enfants de moins de cinq ans chaque année, dans des piscines pourtant sécurisées désormais. Préparée dans l’urgence, la loi de 1999 a criminalisé l'animal en oubliant le maître ; la nécessité d’examiner un nouveau texte, une fois encore dans l’urgence, en démontre l’inefficacité.

Heureusement modifié par nos collègues du Sénat et par les députés eux-mêmes, votre projet de loi, Madame la ministre, répond enfin au problème sécuritaire, fût-ce en s’attaquant à ses conséquences plutôt qu’à ses causes. J’en suis d’autant plus heureux que, lors du débat sur la prévention de la délinquance, il y a un an, j’avais déposé avec une quinzaine de mes collègues, dont M. Benisti, un amendement instaurant un certificat de sociabilité et d'aptitude à l'utilisation, établi auprès d'éleveurs agréés. L’amendement fut adopté en première lecture, mais curieusement escamoté en seconde… J’espère que mes amendements d’aujourd’hui connaîtront un sort plus favorable !

Mais cette loi ne peut résoudre le problème de la place de l’animal de compagnie dans notre société, qui ne relève pas de votre ministère. Ainsi, il faut réformer le statut juridique de l’animal de compagnie, que le code rural continue de considérer comme un objet, l’exposant à la commercialisation, au trafic et à la maltraitance, et interdire la vente dans les animaleries de bêtes réduites au statut de jouets –car après Noël viennent les lendemains de fête, avec leur lot d’abandons et de mauvais traitements ! Soustraite à tout contrôle, la vente directe entre particuliers, par petites annonces ou sur Internet, favorise la prolifération des races les plus problématiques ; elle doit elle aussi être interdite.

Enfin, comme M. Ciotti vient de le souligner, les contrôles aux frontières et la lutte contre les trafics, surtout en provenance des pays de l'Est, doivent être renforcés. Ainsi, dans les Alpes-Maritimes, le travail exemplaire de nos douaniers a permis de découvrir 148 chiots hongrois non vaccinés acheminés vers l’Espagne. Je voterai donc les amendements visant à alourdir les sanctions pesant sur les trafiquants.

D’autre part, plusieurs de mes amendements visent à éviter que les maires, auquel votre texte en transfère la responsabilité, recourent trop aisément à l’euthanasie sous l’effet de la psychose médiatique et populaire. A contrario, trop souvent, les maires se défaussent de leurs responsabilités en matière de divagation et de prolifération des animaux sur les associations, dont il faut saluer les efforts, car ce sont elles qui organisent, avec les vétérinaires, des campagnes de stérilisation rarement financées par les municipalités. C’est pourtant à ces dernières qu’il appartient de mener, avec le soutien des conseils généraux, une action volontariste de prévention, d'éducation, d'information. Ainsi la ville de Grenoble a-t-elle intégré à la police municipale douze éducateurs canins et nommé un technicien animalier chargé d’informer et de conseiller la population et de faire l’intermédiaire entre les associations et la municipalité. Voilà mes propositions au ministre de l’agriculture pour un futur texte ; de votre côté, Madame la ministre, je vous remercie d’avoir résisté à la psychose médiatique et de présenter un texte équilibré, de progrès, permettant aux maîtres de prendre leurs responsabilités et à nos compagnons de rester nos meilleurs amis ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Marie-Line Reynaud – Votre texte, Madame la ministre, vise à compléter et à renforcer les dispositifs législatifs existants, en réponse aux accidents graves survenus depuis l’été dernier et dont les médias se sont abondamment fait l’écho. Présenter un projet de loi en réaction à un événement d’actualité dramatique : cette pratique gouvernementale ancienne est regrettable, car, privée du temps de la réflexion et d’un recul indispensable, balayée à chaque nouvelle manifestation légitime d’émotion, la législation d’émotion est vouée à l’échec. La révision de la législation opérée en 2007 n'a pas encore eu le temps de porter ses fruits qu’elle est déjà jugée obsolète et inefficace ! Le Parlement ne peut légiférer en permanence dans une telle précipitation, sous peine de produire des lois souvent imprécises, réduites à un effet d'annonce.

Dès 1999, le gouvernement Jospin a apporté une première réponse au problème des chiens dangereux : la loi relative aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux classait les chiens en catégories en fonction de leur dangerosité et imposait au maître des obligations sous peine de sanctions.

Neuf ans plus tard, cette loi est peu et mal appliquée. Elle prévoyait une fourrière au moins par groupement communal ; cela n’a pas été fait. Et, malgré des mesures très répressives, elle n’a pas permis d’éliminer tous les chiens dangereux.

Classer les chiens en fonction de la dangerosité ne résout pas tout. Tous les chiens de première catégorie ne sont pas dangereux, et la majorité des morsures sont le fait de chiens qui ne sont pas classés dangereux. C’est donc la responsabilité des maîtres et le comportement de l’ensemble des chiens qu’il faut viser. Vous ne le faites pas suffisamment.

Votre loi présente des avancées en ce qui concerne la formation des maîtres, mais reste vague en ce qui concerne le contrôle de l’application de ces mesures et les moyens qui y seront consacrés. Il est à craindre qu’elle ne soit pas vraiment appliquée.

Vous faites peser une lourde responsabilité juridique sur les maires. Quelle sera-t’elle en cas de morsure par un chien dont le maître ne possède pas le certificat d’aptitude ? Ils auront du mal à appliquer ces dispositions à moyens constants. Alors que leur responsabilité est de plus en plus engagée, et qu’on a du mal à renouveler les élus ruraux, il est dangereux de poursuivre cette voie.

Les victimes sont souvent des enfants. Les parents ont donc une responsabilité particulière. L’école ne pourrait-elle enseigner les règles de précaution dès le plus jeune âge ? Ce texte ne dit rien de l’éducation au rapport entre l’homme et l’animal.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Il faut lire le texte !

Mme Marie-Line Reynaud – La rédaction précipitée de ce texte ne peut nous satisfaire. Nous nous abstiendrons.

Mme Françoise Hostalier – À la suite de drames qui ont entraîné des décès ou des séquelles graves, vous avez pris l’initiative, Madame la ministre, de compléter la loi de 1999, modifiée en 2007.

Mais il ne faudrait pas donner l’impression de faire une loi anti-chiens.

Mme Dominique Orliac – Très bien :

Mme Françoise Hostalier – Il n’y a pas de mauvais chiens, il n’y a que de mauvais maîtres. Par le dressage, on peut obtenir le meilleur ou le pire. Le meilleur, ce sont les chiens d’aveugles, ceux qui accompagnent des handicapés, les chiens d’avalanche et de secours. Le pire, on le trouve dans les faits divers. Ainsi le 23 novembre dernier, à Montigny-en-Gohelle, près de Lens, trois rottweilers échappés ont mordu quatre personnes. C’était l’heure de la sortie des classes. Le maire a fait garder les enfants dans les écoles jusqu’à ce que les chiens soient rattrapés. Dans d’autres cas, des drames se sont produits.

C’est bien le maître, ou le propriétaire, qui est responsable de son chien et des dégâts qu’il peut causer. Certains chiens issus de croisements contre-nature ou dressés pour en faire des armes sont très dangereux. II faut protéger la société et surtout les enfants. Les chiens ont toujours mordu, mais l’acharnement mortel que l’on constate dans les accidents de ces derniers temps est un phénomène nouveau.

Les maires sont en première ligne pour recueillir les renseignements sur les animaux dangereux et pour obliger les maîtres à se conformer à la loi. Ils doivent donc être informés clairement de leurs obligations et disposer des moyens nécessaires. Il faut aussi clarifier au plus vite la situation des structures de formation des maîtres et des organismes habilités à établir le diagnostic comportemental. Celui-ci ne doit pas porter seulement sur le chien ; il faut aussi évaluer la capacité du maître à se faire obéir. Il est né, entre 2000 et 2006, quelque 133 000 chiens classés en catégorie 1 ou 2, et chaque année un millier de chiens supplémentaires sont concernés par la formation et la délivrance du certificat d’aptitude. S’y ajoutent les chiens mordeurs hors catégorie. Il ne sera donc pas facile de mettre en place cette disposition.

D’autre part, les maîtres-chiens employés par des entreprises de gardiennage doivent être considérés comme des employés, et l’entreprise est responsable de leurs conditions de travail et de leur comportement.

De façon générale, il faudrait mener une campagne d’information pour rappeler les règles de prudence mais aussi de bon traitement de l’animal.

Ce texte va dans le bon sens. J’espère qu’il remplira son rôle et qu’il ne sera pas nécessaire de le remettre en chantier (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Dominique Orliac – Avec plus de 8 millions de chiens, la France compte la première population canine d’Europe. L’immense majorité d’entre eux ne seront jamais des chiens dangereux. Le chien est l’animal le mieux inséré dans notre environnement proche, et il contribue à l’équilibre social et même psychique de bien des gens. Mais trop de faits divers dramatiques viennent nous rappeler qu’un chien est potentiellement dangereux s’il n’est pas dressé, s’il est maltraité, ou si son maître en fait une arme. S’il y a des chiens dangereux, c’est le plus souvent parce qu’il y a des maîtres dangereux ou irresponsables. Aussi faut-il éviter de faire l’amalgame entre un acte de délinquance, commis avec un animal devenu une arme par destination, et un accident domestique impliquant le chien du foyer.

Il y a eu deux décès après morsure en 2004, un en 2005, trois en 2006. On estime qu’il y a 10 000 morsures chaque année, dont l’immense majorité faites par des chiens non classés comme dangereux. Dès lors, faut-il légiférer sous le coup de l’émotion à la suite de faits divers ? L’intérêt de ce texte est au moins d’affirmer le principe d’une responsabilisation du propriétaire et de traiter le problème par la sensibilisation et la prévention. Mais aggraver les sanctions surtout pénales, est une fausse bonne réponse.

Mme Geneviève Gaillard – Très bien !

Mme Dominique Orliac – En revanche, nous approuvons l’obligation de formation par un spécialiste. Celui qui acquiert un chien doit être conscient des contraintes que cela entraîne et apprendre un certain nombre de règles. C’est aussi une forme de savoir-vivre.

C’est par cette responsabilisation des propriétaires et par l’obligation d’obtenir une attestation d’aptitude que le projet innove. Il complète aussi heureusement la loi de 1999, qui a donné des pouvoirs de contrôle au maire et au préfet ; il élargit la notion de dangerosité et améliore le traitement judiciaire des plaintes.

Mais, si nous approuvons les dispositions qui améliorent les mesures préventives d’évaluation, d’éducation et de formation pour tous les chiens, nous sommes en désaccord avec le fait d’alourdir, une fois de plus, les sanctions pénales. Ainsi l’article 8 bis, introduit au Sénat à la demande du Gouvernement, renforce à l’excès le dispositif répressif en prévoyant jusqu’à dix ans d’emprisonnement. Or il est nécessaire de prendre en compte des réalités humaines et sociales précises, sans se laisser aller à faire des effets d’annonce sous le coup de l’émotion. Dans ce domaine comme dans d’autres, la seule bonne réponse, c’est la prévention, la protection et l’éducation.

Les députés radicaux de gauche saluent les avancées réelles de ce texte. Il était en effet nécessaire de renforcer la loi de 1999. Mais nous regrettons les dispositions précipitées introduites en matière pénale. C’est pourquoi, si le texte n’était pas modifié, nous n’aurions d’autre solution que de nous abstenir (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jacques Lamblin – Les orateurs de l’opposition prétendent que ce texte est présenté dans l’urgence. Ce n’est nullement le cas, puisque nous avons eu huit ans pour constater que la loi de 1999 n’est pas une bonne loi, et que les consultations sont en cours depuis plusieurs mois. Il s’agit d’un projet réaliste et pragmatique sur un problème difficile.

Certains jugent qu’il s’agit d’un texte mineur. Ce n’est pas le cas non plus. Comment, dans un pays où vivent, dans l’intimité de nos familles, 10 millions de chiens répartis en plusieurs centaines de races et leurs croisements, prendre des dispositions préventives pour éviter les accidents, sans stigmatiser telle ou telle race – la plupart des accidents n’étant pas le fait de chiens réputés dangereux au sens de la loi de 1999 ? Comment prendre en compte le rôle des maîtres, si important dans le comportement du chien, tout en respectant la liberté individuelle ? Ce texte, élaboré en prenant des avis d'experts, répond à ces questions et donne satisfaction aux professionnels.

Premièrement, sans méconnaître la nécessaire répression des abus et des fautes, il se préoccupe surtout de prévention, en s'appuyant sur un principe clé : en cas d'accident, la responsabilité du maître du chien est toujours engagée. On ne règlera pas le problème en supprimant les mauvais chiens, Monsieur Demilly.

Deuxièmement, sans renoncer à la catégorisation, ce qui eût été impossible dans le contexte actuel, le texte introduit l'idée que tout chien est potentiellement dangereux, et dispose ensuite que tout chien dangereux, ou évalué comme tel, doit être soumis ainsi que son maître à des règles précises. Tous les cas de figure sont envisagés : un maire ou le préfet peut prescrire l'évaluation comportementale d'un chien estimé ou signalé dangereux, et si l'animal est reconnu comme tel, son maître peut se voir imposer une formation ; dans l'esprit de la loi de 1999, un chien dit dangereux au sens de l'article L. 211-12 doit subir une évaluation comportementale et son maître doit obligatoirement détenir une attestation d'aptitude ; enfin – et cette innovation est majeure – tout chien, s'il vient à mordre, passe immédiatement dans la catégorie des chiens dangereux et doit être soumis à cette évaluation comportementale. On couvre ainsi tout l'éventail des risques.

Il faudra veiller à ce que des décrets d'application précisent les conditions dans lesquelles l'évaluation comportementale devra être conduite, et par qui, la manière dont les formateurs des maîtres seront eux-mêmes formés, ainsi que celle dont les ventes et cessions de chiens seront encadrées. Comme vous le savez, Madame le ministre, même s'il ne mord pas, le diable est dans les détails...

M. Jean-Philippe Maurer – Prenons garde à la psychose et à la stigmatisation : les rottweilers, les dogues de Bordeaux ou les bergers des Pyrénées ne sont pas forcément les plus dangereux des chiens ; les chihuahuas, les caniches ou les labradors sont aussi capables de mordre.

La loi de 1999 a rempli l'essentiel de sa mission puisque les chiens visés, essentiellement ceux de la catégorie 1, sont retournés dans la confidentialité. Quant à la loi de 2007 relative à la prévention de la délinquance, elle visait à accroître les sanctions encourues en cas d'infraction aux interdictions.

Pourtant, 100 000 morsures par an sont comptabilisées dans les services de médecine, et le rapport estime à 500 000 celles qui ne sont pas référencées ; 80 % surviennent dans le cadre familial. Cela signifie que, si toute race de chien est potentiellement dangereuse, aucune ne l'est intrinsèquement.

C'est d'ailleurs le sens de ce projet de loi, qui met l'accent sur l'identification des chiens mordeurs – petits, grands ou moyens –, sur leur évaluation comportementale et sur l'attestation d'aptitude, tout en développant une approche plus systématique pour les chiens de catégorie 1 et 2. Néanmoins, le nombre de race de chiens – entre 350 et 400 – complique leur identification, et les croisements autorisés ne facilitent pas la tâche.

Les professionnels souhaitent un renforcement du dispositif législatif, notamment pour assurer le respect d’une déontologie. Il serait fort utile que les préfets s'assurent du respect par les communes de leur obligation de signer un contrat de fourrière. On pourrait aussi avoir une approche plus systématique en matière d'élevage des chiens, d’information et de prévention à l'égard des publics les plus vulnérables. Plusieurs de nos voisins européens ont systématisé l'éducation des chiens, accompagnés de leurs propriétaires ou détenteurs, et renforcé la formation des éducateurs canins.

Nul n'est à l'abri d'un accident de parcours dans le comportement de son chien, mais notre société gagnerait à une approche plus globale de la vie canine. La mise en place d'un observatoire national canin contribuerait à orienter l'action publique. Pas plus l'ignorance que la défiance ne peuvent tenir lieu de conduite ; nous voulons promouvoir la confiance, et cette loi est une étape sur ce chemin (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La discussion générale est close.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieurJe voudrais d’abord remercier tous ceux qui ont pris part à ce débat, en commençant par le président Ollier et Madame la rapporteure.

Contrairement à ce que certains ont prétendu, ce texte n’a pas été proposé dans l’urgence en « surfant » sur l’émotion. Nous sommes tous responsables de la sécurité de nos concitoyens ; ceux qui s’étonnent que nous présentions un projet destiné à protéger les personnes voudraient-ils que nous nous croisions les bras devant les accidents ? Je ne saurais non plus laisser dire que ce texte a été élaboré à la va-vite et sans aucune concertation : il a été annoncé il y a quatre mois, et j’ai réuni tout le monde autour de la table. Nous avons travaillé en liaison étroite avec les associations de protection des animaux, les vétérinaires, les différents services concernés, ainsi que les parlementaires intéressés qui, pour certains, travaillaient depuis longtemps sur le sujet. Ce projet ne prête pas à polémique : ce qui doit nous animer, c’est le désir de faire un bon texte qui évite le renouvellement d’accidents dramatiques (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Ce n’est pas non plus une usine à gaz, Monsieur Demilly. Au contraire, nous avons voulu prendre des mesures simples, fondées sur l’idée que lorsqu’on a un chien, il faut s’en occuper, et savoir comment l’on s’en occupe. Je remercie M. Luca et M. Lamblin d’avoir souligné que c’était un texte pragmatique et équilibré.

En ce qui concerne les catégories de chiens, il y a certainement besoin d’une clarification, j’en suis d’accord : les catégories 1 et 2 montrent leurs limites, mais c’est un point de départ ; et c’est la raison pour laquelle j’ai souhaité insister sur les comportements.

Quant au poids, Monsieur Cinieri, c’est un critère qui ne figurait pas dans le projet initial, mais que les sénateurs ont souhaité introduire. Si un amendement était défendu sur ce point, je m’en remettrais à la sagesse de l’Assemblée.

En revanche, je considère comme M. Chassaigne et M. Beaudouin qu’il est nécessaire de prendre en compte l’origine de l’animal.

Il est essentiel de considérer aussi les conditions de la naissance de l’animal. Chacun sait qu’il est tout à fait possible, en croisant des chiens ne relevant pas des catégories un ou deux, de produire un chiot potentiellement dangereux. Et n’oublions pas les conséquences que peuvent avoir des conditions d’élevage scandaleuses, dans des cages ou dans des réduits. Je suis parfaitement consciente, Mesdames et messieurs les députés, de la nécessité de traiter l’ensemble de ces questions.

L’une des limites de notre action, c’est l’impossibilité d’entrer dans des espaces privatifs, notamment des caves où des chiens d’attaque sont élevés en batterie ou enfermés pour se reproduire. Soyez cependant certains – et je m’adresse en particulier à Mme Erhel, à M. Ciotti et à M. Chassaigne – de notre détermination à utiliser tous les moyens pour mettre fin à ces situations inadmissibles.

J’ai regretté avec vous, Madame la rapporteure, que l’information sur les accidents reste lacunaire, et Mme Gaillard comme M. Cinieri nous ont rejointes sur ce point. J’ai cru comprendre que Mme Vautrin et M. Lamblin étaient plutôt favorables à la proposition sénatoriale de créer un observatoire des chiens dangereux. Mme Gaillard préconise plutôt un observatoire des morsures canines…

Mme Geneviève Gaillard – Tout à fait !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Quant au président Ollier, il me semble favorable à une démarche plus large, fondée sur les travaux d’une mission…

M. Patrick Ollier, président de la commission – Vous me comprenez parfaitement !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Pour ma part, je suis tout à fait favorable à la création d’une telle mission. Faut-il cependant conserver un observatoire ? Nous en débattrons en examinant les amendements.

Je constate avec satisfaction que tout le monde s’accorde sur la nécessité de former les maîtres. En effet, Monsieur Cinieri, la délivrance d’un certificat d’aptitude et de socialisation peut servir de référence. Faut-il aller jusqu’à instaurer un permis canin ? Une telle mesure aurait le mérite de bien faire comprendre les enjeux et je n’y vois pour ma part aucun inconvénient. Les difficultés que pourraient rencontrer certains publics pour accéder à ce permis n’ont pas, Monsieur Chassaigne, à être traitées dans la loi, même s’il ne saurait bien entendu être question de les ignorer.

J’ai été très intéressée, Monsieur Beaudouin, par votre proposition d’assurer des campagnes d’information régulière sur les dangers qui s’attachent à certains comportements avec certains animaux. Je vais demander au groupe de travail que j’ai mis en place d’y réfléchir. Conformément au souhait de Mme Hostalier, il me semble important d’informer en priorité les enfants, les parents de jeunes enfants, les maires, les maîtres, les policiers…

S’agissant des sanctions, j’ai bien entendu les réticences de certains d’entre vous, mais chacun sait qu’une loi dont le non-respect n’entraîne pas de sanctions n’existe pas, et que la sanction est un élément de la prévention.

Mme Arlette Franco – Absolument !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Monsieur Lamblin, j’ai apprécié votre belle formule sur la nécessité de tarir la source des mauvais maîtres : nous allons nous y employer.

Bien entendu, la sanction sera graduée en fonction de la gravité de l’infraction et du caractère répété ou non de sa commission. Nous savons tous qu’il y a des individus qui ne veulent rien savoir et qui se comportent avec leur chien comme d’autres lorsqu’ils prennent régulièrement le volant en état d’imprégnation alcoolique ! Au reste, le résultat est malheureusement le même, car s’il y a peu de morts liées aux chiens, il y en a tout de même et plusieurs d’entre-vous ont rappelé les chiffres des décès survenus ces dernières années.

Par conséquent, soyez sûrs de ma détermination à ne pas ignorer le besoin de sanctionner. Certains se sont demandés à qui confier le contrôle de ces situations. Ayant exercé cette responsabilité, je sais que le maire est celui qui connaît le mieux le terrain. Il connaît notamment ceux qui manquent régulièrement à la règle et sait comment les approcher. Toutefois, il ne saurait être question de surcharger le maire ou de le laisser seul : le préfet doit l’épauler, et, le cas échéant se substituer à lui si les circonstances le justifient.

Parmi d’autres, M. Beaudouin, Mme Barèges, Mme Hostalier et M. Ciotti ont bien compris – et je les en remercie – que notre ambition était de donner aux maires un nouvel instrument pour répondre aux attentes de leurs administrés.

Ce texte, Mesdames et messieurs les députés, vise essentiellement à combler les lacunes – aux conséquences parfois dramatiques – des textes existants. C’est donc délibérément qu’il ne s’occupe pas directement de la voie publique, dans la mesure où des dispositions existent déjà à ce sujet dans plusieurs autres textes. Nous sommes tous convaincus de la nécessité d’aller au-delà, dans la mesure où la plupart des accidents les plus graves interviennent dans la sphère privée.

Je ne puis vous laisser dire, Monsieur Dupré, que nous avons travaillé sans concertation avec les associations concernées, notamment avec la société centrale canine. Il faut savoir que les dispositions que nous envisageons de prendre ne relèveront pas toutes du niveau législatif, et que nous avons bien avancé avec les associations pour tout ce qui concerne les mesures d’ordre réglementaire. Vous savez que je m’oblige à prendre les décrets d’application de tous les textes que je présente dans les meilleurs délais : le présent projet de loi ne fera pas exception, et les projets de décrets d’application vous seront communiqués avant la deuxième lecture (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP).

Vous avez eu raison, Madame Hostalier et Monsieur Chassaigne, de poser le problème du contrôle des sociétés et agents de sécurité, qui excède du reste largement la seule question des chiens. Nous prévoyons de vous soumettre des textes à ce sujet. Ils sont actuellement en cours de finalisation.

Je ne doute pas que lorsqu’ils seront prêts, d’aucuns me reprocheront à nouveau de travailler dans l’improvisation ou sous le coup de l’émotion. Sachez que ce genre de critique ne me découragera jamais d’agir lorsqu’il s’agit de mieux protéger les Français (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Le Fur remplace M. Salles au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE de M. Marc LE FUR
vice-président

M. le Président – J’appelle les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

ART. PREMIER A

M. Jean-Frédéric Poisson – 20 % des accidents domestiques liés aux chiens découlent d’agressions hiérarchiques inconscientes, lorsqu’un enfant prend involontairement la place du chien, qui ressent cela comme une forme de maltraitance. D’où l’utilité des campagnes d’information que plusieurs de mes collègues ont évoquée. À ce sujet, je préconise de s’inspirer des dernières campagnes de sécurité routière, particulièrement efficaces parce que délivrant des messages délibérément choquants. Nos connaissances en matière d’accidentologie domestique doivent aussi nous inciter à intervenir en milieu scolaire, pour sensibiliser les jeunes enfants aux comportements qu’il convient d’adopter en présence d’un chien potentiellement dangereux.

S’agissant plus précisément de l’article premier A, je préconise, pour remédier au problème de l’utilisation des chiens par des délinquants – à des fins de protection, de dissuasion ou d’attaque – de solliciter l’expertise des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, pour profiter notamment de l’intervention des élus, des policiers et des enseignants.

M. Antoine Herth – L’amendement 45 tend à supprimer cet article, introduit par le Sénat. En effet, je ne vois pas la nécessité d’instaurer un Observatoire du comportement canin. Ce n’est qu’un observatoire de plus, dira-t-on (Sourires), mais j’observe que les services du ministère réalisent déjà de telles études.

Comme l’a suggéré le président Ollier, mieux vaudrait lancer une mission parlementaire sur ce sujet. Il sera toujours temps de créer un observatoire par la suite !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Commençons en effet par une mission d’information ! Avis favorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

Mme Geneviève Gaillard – Je suis également favorable à la suppression de cet article. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs ! Par ailleurs, je m’insurge contre l’idée, sans cesse répétée par certains, que les chiens seraient systématiquement dangereux. Ce sont avant tout des êtres vivants et sensibles, dont il faut s’occuper.

Enfin, s’il fallait instaurer un observatoire, je préférerais que ce soit sur les morsures, sujet dont nous ignorons tout.

M. Patrick Ollier, président de la commission Merci à Monsieur Herth d’avoir rappelé la création prochaine d’une mission d’information en la matière. La rédaction de cet article me semble juridiquement incomplète : il n’y a nulle mention du ministère de la santé, et l’on ignore la composition et le financement de cet observatoire. Est-ce bien normal ? Evitons d’écrire des lois imprécises.

L'amendement 45, mis aux voix, est adopté, et l’article premier A est ainsi supprimé

ART. PREMIER

M. Lionnel Luca – Ne laissons pas les maires seuls face à leurs obligations : il faut également responsabiliser les propriétaires. L’amendement 106 tend à préciser qu’ils doivent transmettre aux maires l’évaluation comportementale de leurs chiens et qu’une formation ne sera exigée d’eux que dans l’hypothèse où un danger aurait été décelé. Nous éviterons ainsi certains excès.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Avis favorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Je comprends mal l’utilité de cet amendement, car le suivi de la formation dépend déjà du résultat de l’évaluation. Je demande donc le retrait de cet amendement.

L'amendement 106 est retiré.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 2 est de précision.

L'amendement 2, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. André Chassaigne – L’amendement 53 rectifié est défendu.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – J’ai bien conscience que la capture des chiens dangereux risque de créer des difficultés aux maires de communes qui ne disposeraient de personnel pour faire exécuter cette mesure. Toutefois, il me semble inopportun de prévoir l’intervention systématique des forces de l’ordre. Avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Même position. Cet amendement ne me semble pas très utile compte tenu des pratiques actuelles.

L'amendement 53 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 3 est de précision.

L'amendement 3, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article premier, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. PREMIER

M. André Chassaigne – L’amendement 52 est défendu.

L'amendement 52, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

Mme Catherine Vautrin, rapporteure L’amendement 110 tend à supprimer cet article, compte tenu du dépôt de l’amendement 83, 3e rectification, dont l’objet est de créer un permis canin rassemblant toutes les obligations aujourd’hui applicables.

L'amendement 110, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l’article 2 est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 2

Mme Geneviève Gaillard – L’amendement 41 est défendu.

L'amendement 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Éric Ciotti – Afin de renforcer la clarté et l’efficacité de ce texte, l’amendement 83, 3e rectification, a pour objet d’instaurer un permis pour la détention des chiens dangereux. Je rappelle que M. Beaudouin avait déposé une proposition de loi en ce sens.

Ce permis rassemblera toutes les prescriptions applicables d’un bout à l’autre de la laisse, du certification d’aptitude à l’évaluation comportementale. Il faudra que toute personne accompagnant ce type de chien en soit porteur sur la voie publique, ce qui permettra de simplifier les contrôles.

Les forces de l’ordre pourront ainsi vérifier immédiatement que les différentes règles en vigueur sont respectées, notamment l’obligation de stérilisation. Ce faisant, nous ne modifions en rien l’équilibre de ce texte, qui repose sur la formation et la prévention : nous facilitons seulement les contrôles afin de permettre une application plus efficace des sanctions éventuelles.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure - Avis favorable. La commission a toutefois adopté le sous-amendement 120 qui corrige une erreur matérielle au II. 3° de l’amendement.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – C’est un amendement efficace que j’approuve. Je souhaiterais néanmoins que la périodicité de l’évaluation comportementale soit fixée, non par la loi, mais par décret. Je souhaiterais donc que l’amendement soit rectifié en supprimant le 2e alinéa du 2° du II.

M. Éric Ciotti – J’y suis favorable.

M. le Président – Il s’agit donc de l’amendement 83, 4e rectification.

Mme Geneviève Gaillard – Plutôt qu’au législateur, c’est à l’homme de l’art d’apprécier la périodicité selon laquelle doit être examiné un chien. Tous les chiens d’une catégorie considérée dangereuse ne sont pas dangereux, et certains chiens de la deuxième catégorie sont très bien élevés, par des maîtres responsables. Imposer à ces derniers la délivrance d’un permis est excessif. Je ne voterai pas l’amendement.

M. Jacques Lamblin – Cet amendement aura un avantage collatéral : en compliquant les choses pour les détenteurs de ce type de chiens, il diminuera le nombre de personnes souhaitant en posséder.

M. Patrick Beaudouin – Je voterai, pour ma part, l’amendement. Ma proposition de loi visant à créer un permis canin avait été signée par une centaine de députés. Il faut séparer le bon grain de l’ivraie : le permis permettra de responsabiliser les propriétaires de chiens. En outre, une visite régulière est fort opportune, ne serait-ce que pour effectuer un vaccin contre la rage. L’amendement facilitera, enfin, les contrôles exercés par la police municipale.

Le sous-amendement 120, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Je rappelle que l’amendement 83 a été rectifié par le Gouvernement, qui a souhaité en supprimer le septième alinéa.

L'amendement 83, 4e rectification, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. André Chassaigne – L’amendement 51 rectifié est défendu.

L'amendement 51 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 2 BIS

M. Éric Ciotti – L’amendement 82 tend à supprimer l’article 2 bis, par cohérence avec le vote qui vient d’intervenir.

L'amendement 82, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l'article 2 bis est ainsi supprimé.

ART. 3

M. Éric Ciotti – L’amendement 101 est également de suppression.

L'amendement 101, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 3 est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 3

Mme Arlette Franco – Depuis plusieurs années, de nombreuses personnes possèdent chez elles des animaux exotiques – pythons, tortues, mygales, crocodiles… - plus ou moins dangereux, qu’ils achètent par caprice ou snobisme. Certains n’hésitent pas à les relâcher dans la nature lorsqu’ils deviennent encombrants. Leur présence dans le milieu naturel peut avoir des conséquences sur la sécurité des personnes et la biodiversité. Certains de ces animaux peuvent être porteurs de virus. Si l’acquisition des animaux exotiques est encadrée par les textes, il convient de préciser les règles applicables à leurs détenteurs. Tel est l’objet de l’amendement 34 (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – De nombreux élus nous font part des difficultés qu’ils rencontrent dans ce type de situations ; la commission a donc émis un avis favorable à l’amendement. Même s’il est hors contexte, il appelle l’attention du Gouvernement sur un enjeu de sécurité publique.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Il s’agit d’un vrai problème. On voit, dans nos communes, des cas aberrants, où le commissariat est appelé pour retrouver le python ou la mygale qui s’est échappée. Si le code de l’environnement prévoit déjà un certain nombre de choses, nous devons regarder les problèmes qui continuent de se poser. Je m’engage à travailler sur ce dossier, avec mon collègue concerné, pour apporter des réponses appropriées. Cela étant dit, le thème me paraît tellement éloigné de l’objet de ce texte que je demanderais le retrait de l’amendement.

Mme Geneviève Gaillard – Je suis d’accord avec la ministre. Certes, il convient de responsabiliser les propriétaires, mais si ces personnes possèdent de tels animaux, c’est que d’autres les leur ont vendues ; il existe tout un trafic dont nous ignorons les tenants et aboutissants. Peut-être faudrait-il créer une seconde mission d’information, ou bien élargir la première. Le groupe d’étude parlementaire sur la protection animale travaille actuellement sur le statut de l’animal. C’est par ce biais que nous réussirons à atténuer le phénomène.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Alors que nous avons alerté à plusieurs reprises le gouvernement précédent sur la nécessité d’aborder la question des animaux dangereux, cela n’a toujours pas été fait. Certes, la proposition est aujourd’hui mal venue, compte tenu de l’objet de ce texte. De même, il ne faut pas songer à élargir le champ de la mission sur la filière canine, car cela affaiblirait la portée de celle-ci. Nous avons souhaité appeler l’attention du Gouvernement sur ce difficile problème, qui appelle des décisions rapides.

Mme Arlette Franco – Je retire l’amendement, tout en demandant que quelque chose soit fait. Je ne souhaite pas qu’on dise, quand un accident se produira, que j’ai retiré cet amendement à la légère !

L'amendement 34 est retiré.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 8 rectifié vise à créer le fichier national canin, véritable outil de prévention qui permettra de mieux recenser les morsures.

M. Antoine Herth – Je soutiens cet amendement mais, pour que nous ne restions pas au milieu du gué, je propose de le sous-amender. Les morsures, en effet, ne sont pas seulement des agressions : elles sont aussi l’occasion de transmettre de nombreuses maladies, de la grippe aviaire à la rage. Mon sous-amendement 111 rectifié vise donc à étendre ce fichier national canin aux ovins, caprins et bovins, ainsi qu’à l’ensemble des animaux de rente, afin que nous disposions en cas de crise de toutes les données sanitaires nécessaires.

M. Éric Ciotti – Je retire mes amendements 80 et 81 rectifiés au profit de celui de Mme la rapporteure, qui satisfait mon souci de créer un fichier centralisant les données relatives aux morsures, aujourd’hui dispersées.

Les amendements 80 rectifié et 81 rectifié sont retirés.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – La commission n’a pas examiné le sous-amendement, mais j’y suis favorable à titre personnel.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Sagesse.

Mme Geneviève Gaillard – On tend déjà à considérer le chien comme un mordeur systématique. Avec ce sous-amendement, tous les animaux sont désormais concernés ! On vit pourtant avec eux depuis longtemps. Comment, pas exemple, appliquerez-vous une telle disposition aux chats, dont on sait qu’ils sont souvent nomades ? Un animal est un être sensible à manipuler avec précaution : tout est question d’éducation. De grâce, ne gravons pas dans le marbre une mesure inapplicable !

S’agissant de l’amendement de la commission, je m’interroge sur les données à « caractère personnel » qui pourront être recueillies dans ce fichier national : de quels chiens, et de quels propriétaires s’agit-il ? Je suis moi-même la propriétaire honnête d’un chien bien élevé : pourquoi mes données personnelles y figureraient-elles ?

M. Patrick Ollier, président de la commission Je comprends le souci de M. Herth, mais je crains qu’étendre le fichier canin à un ensemble qui le dépasse largement ne dilue l’efficacité du texte. Comment une telle disposition pourrait-elle s’appliquer ?

M. Antoine Herth – Les fichiers existent déjà, ils sont parfois aux mains des pouvoirs publics, mais plus souvent des organisations professionnelles. En cas de crise, évitons que ces données ne soient ainsi dispersées dans la nature. Au plan technique, l’amendement de la rapporteure prévoit du reste qu’un décret en Conseil d’État fixe la modalités d’application de l’amendement.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Un fichier canin nous permettra de disposer de la base législative nécessaire au recensement exhaustif des morsures. Sans doute la navette permettra-t-elle de préciser dans quelles conditions ce fichier peut être étendu à d’autres espèces animales.

Mme Geneviève Gaillard – Pourquoi avoir renoncé à créer un Observatoire du comportement canin, si c’est pour créer un fichier national canin ? En outre, faute d’évoquer précisément la notion de morsure, vous allez ficher le tiers des ménages français qui possèdent un chien ! C’est inacceptable.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Chacun déplore le manque de traçabilité des morsures. Peut-être faudrait-il rectifier l’amendement, mais son objectif est clair : fournir une base légale qui permettra d’identifier le chien mordeur et les circonstances de la morsure.

M. Jacques Lamblin – Un mécanisme d’identification des chiens et des morsures existe déjà. Pourquoi compliquer davantage les choses ?

Mme Frédérique Massat – S’il n’est pas retravaillé, ce texte posera de nombreux problèmes. Qui doit déclarer les morsures ? Comment faire en sorte que les propriétaires les déclarent systématiquement ? Faudra-t-il attendre le dépôt d’une plainte, improbable si la morsure a eu lieu dans le cercle familial ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – En effet, les morsures ayant surtout lieu dans le cercle familial, elles ne seront pas toujours déclarées. Des amendements à l’article 4 visent à contraindre tout professionnel en ayant connaissance à les déclarer afin qu’elles soient inscrite au fichier central canin. Il est donc essentiel de lui donner une base légale afin de mieux recenser les morsures et d’identifier leur origine.

M. Antoine Herth – Je retire mon sous-amendement, pour laisser toutes ses chances à un amendement si ardemment défendu !

Le sous-amendement 111 rectifié est retiré.

L'amendement 8 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. Lionnel Luca – L’amendement 107 est défendu.

L'amendement 107, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Patrick Beaudouin – On l’a dit : ce ne sont pas seulement les chiens de première et deuxième catégorie qui sont dangereux, mais, potentiellement, n’importe quel animal. Seules les morsures témoignent de la dangerosité, mais, les déclarations dont elles font l’objet, trop rares, ne permettent pas aux pouvoirs publics de mesurer les lacunes de la loi, donc d’y remédier. L’amendement 68 est un amendement de raison qui vise à rendre obligatoire la déclaration aux autorités publiques des morsures importantes dont sont victimes des tiers ; la déclaration pourra émaner de la victime, du propriétaire ou détenteur du chien, ou de toute personne ayant eu à connaître de l’accident – pompier, médecin ou vétérinaire, par exemple. Il s’agit notamment d’éviter la propagation de certaines maladies.

Mme Catherine Vautrin – Afin de préciser la notion de déclaration de morsure pour rendre le dispositif plus efficace, l’amendement 9 spécifie que la déclaration pourra émaner de tout professionnel ayant connaissance de l’accident dans l’exercice de ses fonctions. Il mentionne également le lieu de résidence du propriétaire ou du détenteur, ce qui permettra de mieux identifier le lieu de l’accident.

M. Éric Ciotti – Mon amendement 84 étant satisfait par l’amendement 9, je le retire.

L'amendement 84 est retiré.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur  Sous réserve de sa compatibilité avec l’exigence de secret médical, je suis favorable à l’amendement de la commission.

Mme Geneviève Gaillard – Après le fichier national canin, évoqué tout à l’heure, M. Beaudouin mentionne dans son amendement 68 le fichier central canin. Quelle confusion ! Quelle usine à gaz ! J’étais d’accord avec lui ; je regrette qu’il soutienne l’amendement de la commission !

M. Patrick Beaudouin – À la lumière de l’explication tout à fait satisfaisante de Mme la rapporteure, je retire naturellement mon amendement.

L'amendement 68 est retiré.

M. Jacques Lamblin – Un problème d’ordre technique demeure : les professionnels amenés à déclarer les morsures ne posséderont pas nécessairement les compétences leur permettant d’identifier le chien ; ainsi, si c’est un médecin qui souscrit la déclaration, celle-ci risque d’être incomplète.

M. Patrick Beaudouin – Mais il y aura le permis canin !

Mme Frédérique Massat – Il faut également rappeler le contexte et les raisons de la morsure : un chien agressé peut mordre pour se défendre.

M. Lionnel Luca – Très juste !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Vous avez raison : le contexte est important, et un chien peut réagir parce qu’il a été provoqué. Mais l’amendement vise simplement à assurer la meilleure traçabilité possible. S’il mentionne les professionnels ayant à connaître de l’accident, c’est bien que seules les morsures importantes sont concernées. En outre, la morsure justifie une évaluation comportementale qui permettra d’évaluer la dangerosité de l’animal. Ainsi le texte décline-t-il une série d’outils de prévention, de formation et, le cas échéant, de sanction.

M. Jean-Paul Dupré – Qui, du propriétaire ou du professionnel, sera tenu de déclarer la morsure ? Le texte ne le dit pas. Qui vérifiera que la déclaration a été faite ? Que se passera-t-il si le propriétaire s’engage devant le professionnel à déclarer l’accident, mais n’en fait rien ?

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Nous sommes au cœur du sujet ! Nous savons bien que les morsures survenues au sein de la cellule familiale risquent de ne pas être déclarées, mais nous voulons limiter le plus possible cette éventualité.

M. Dino Cinieri – Absolument !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – À cet égard, la mention du professionnel constitue une garantie supplémentaire de sécurité. Ainsi, l’urgentiste confronté à un cas de morsure grave pourra inciter la victime à la déclarer. Il serait techniquement difficile d’aller plus loin.

L'amendement 9, mis aux voix, est adopté.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Afin que la déclaration de morsure soit plus fiable encore, l’amendement 10 propose qu’une copie en soit adressée au fichier national canin.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Avis favorable ; c’est tout à fait logique.

L'amendement 10, mis aux voix, est adopté.

M. Lionnel Luca – L’amendement 47 est défendu.

L'amendement 47, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L’article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 4 BIS

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Un amendement sénatorial a introduit le critère du poids du chien, les seules catégories déjà définies par la loi ne suffisant pas à déterminer la dangerosité de l’animal. Mais les nombreux professionnels que j’ai entendus m’ont confirmé que, dès 15 kilogrammes, un chien est potentiellement dangereux, ce qui complique l’application du critère.

En outre, la disposition risquerait d’entraîner des effets pervers en encourageant certains maîtres à mal nourrir leur animal pour le maintenir en deçà du poids maximal autorisé, ce qui rendrait le chien encore plus agressif. L’amendement 59 propose donc de supprimer les dispositions introduites par le Sénat, qui créeraient, pour le coup, une véritable usine à gaz !

M. Dino Cinieri – Tout à fait !

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Mieux vaut fonder l’appréciation de la dangerosité sur des faits avérés – les morsures – et développer la prévention en informant tous les propriétaires de l’influence de l’éducation sur le comportement du chien.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur L’amendement introduit par le Sénat a fait l’objet d’un long débat. N’ayant pas la compétence technique me permettant de juger de l’importance du critère du poids, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

Mme Geneviève Gaillard – Je suis tout à fait d’accord avec Mme la rapporteure, car le critère du poids introduirait une nouvelle catégorie et, avec elle, les problèmes déjà soulignés à propos des catégories existantes.

L'amendement 59, mis aux voix, est adopté.

L’article 4 bis ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. Stéphane Demilly – L’exposé des motifs du projet invoque le renforcement de la prévention des accidents grâce à la délivrance d’un certificat d’aptitude – le fameux permis canin ; l’amélioration de l’articulation entre autorités administratives et judiciaires, qui devrait être plus efficace et plus rapide ; la répression de la détention illicite de chiens de première catégorie, du défaut d’identification d’un chien ou de l’absence de déclaration des morsures à la mairie ; enfin – c’est la mesure la plus importante –, le renforcement du contrôle de la dangerosité des chiens par l’interdiction de détenir des chiens de première catégorie nés après le 7 janvier 2000.

En supprimant les articles 5, 7 et 14 du texte – qui concernent cette interdiction et les sanctions encourues par les propriétaires de chiens qui l’enfreindraient –, suppression confirmée par la commission des affaires économiques de l’Assemblée, au prétexte qu’il serait concrètement impossible de faire disparaître ces chiens, les sénateurs ont littéralement détricoté le texte, ce qui est inacceptable. Je propose donc de le « rapiécer » par les amendements 27 et 28.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur En réalité, c’est moins la catégorie à laquelle appartient le chien que la façon dont il est dressé et traité qui est en cause. Avis défavorable également.

Mme Geneviève Gaillard – Je partage l’avis de Mme la ministre. Adopter un tel amendement conduirait à faire abattre beaucoup d’animaux tout à fait ordinaires.

L'amendement 27, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 28.

L'article 5 demeure supprimé.

ART. 5 BIS

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’adoption de l’amendement 83 rend cet article sans objet. L’amendement 56 tend donc à le supprimer.

L'amendement 56, accepté par le Gouvernement , mis aux voix, est adopté, et l’article 5 bis est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 5 BIS

M. Stéphane Demilly – L’amendement 29 rectifié, je dirai simplement qu’il est de bon sens…

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur J’en comprends l’intention, mais il existe déjà des contraintes concernant les chiens de deuxième catégorie. Avis défavorable.

L'amendement 29 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Antoine Herth – L’amendement 42 interdit la présence des chiens dangereux dans les fêtes foraines.

L'amendement 42, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 5 TER

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Certaines sociétés privées de gardiennage font bien leur travail. Mais parfois, il suffit d’acheter un chien et une muselière et de répondre à une petite annonce pour se retrouver à garder un bâtiment. En l’absence d’identification entre le chien et son maître, les cas de maltraitance sont nombreux. L’amendement 14 rectifié impose donc la mention du numéro d’identification du chien sur la carte professionnelle des personnels des sociétés privées de sécurité, ainsi qu’une formation spécifique pour ces maîtres-chiens.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Le Gouvernement avait envisagé de proposer une modification rédactionnelle par le sous-amendement 113, mais y renonce, la commission n’ayant pu en être saisie à temps. Avis favorable.

L'amendement 14 rectifié, mis aux voix, est adopté, et l’article 5 ter est ainsi rédigé.

ART. 5 QUATER

L'article 5 quater, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5 QUATER

M. Antoine Herth – Actuellement, on peut vendre des chiots dangereux sans contrôle. L’amendement 46 vise à restreindre à quatre le nombre d’animaux vendus à une même personne.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Sur le fond, nous sommes d’accord. Mais c’est un sujet dont la mission d‘information se saisira dans quelques semaines. Mieux vaudrait retirer l’amendement.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur L’intention est louable, mais le contrôle serait difficile, et une telle disposition aurait des effets pervers – dons à des particuliers, abandons, euthanasie. Mieux vaudrait y revenir ultérieurement.

Mme Geneviève Gaillard – La mission d’information pourra sans doute se pencher sur le sujet. Mais, en tout état de cause, il sera bien difficile de moraliser ou de contrôler la vente. L’information, la formation sont les seules mesures efficaces – sans oublier le sens civique.

M. Antoine Herth – J’espère que la mission se penchera sur le sujet, et retire l’amendement, ainsi que le 43 qui vise le même objectif.

Les amendements 46 et 43 sont retirés.

M. Patrick Beaudouin – L’amendement 71 a pour objet d’empêcher l’existence d’élevages sauvages et clandestins. Je le retire, en espérant que la mission s’intéressera au sujet. J’espère aussi que cette mission sera élargie à l’ensemble de l’Assemblée.

L’amendement 71 est retiré.

M. Patrick Ollier, président de la commission Je peux en effet donner l’assurance que les sujets qui viennent d’être évoqués seront au programme de la mission. Quant à l’organisation de celle-ci, elle dépend des groupes politiques plus que du président de la commission. On trouvera certainement une solution convenant à tous.

ART. 6

M. Jean-Philippe Maurer – L’amendement 24 porte à dix semaines l’âge au-delà duquel est interdite la cession de chiots non sevrés.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – C’est, encore une fois, un sujet qui relève de la mission d’information.

L’amendement 24 est retiré.

L'article 6, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 8

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 8

M. Jean-Philippe Maurer – L’amendement 21, dont je suis cosignataire avec mes collègues réunionnais, prévoit que, dans les départements d’outre-mer, le préfet peut, après avis du conseil départemental de la santé et de la protection animales, interdire l’importation et l’introduction de chiens de deuxième catégorie.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Avis défavorable. Pourquoi s’en prendre seulement aux chiens de deuxième catégorie ? On met en avant dans l’exposé des motifs le problème des chiens errants. Ce ne sont pas les mêmes animaux qui sont visés.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Il existe déjà un certain nombre de dispositions à ce propos. Mais le contrôle serait difficile. Et cela poserait beaucoup de problèmes à ceux qui, après un long séjour en métropole, retournent dans un DOM.

M. Jean-Philippe Maurer – Je maintiens l’amendement, par loyauté, envers mes collègues.

L'amendement 21, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 8 BIS

M. Martial Saddier – Mon amendement 38 tend à exclure du champ de cet article les patous, chiens domestiques destinés, en montagne, à protéger les troupeaux ovins ou caprins contre les grands prédateurs – loups et ours – et autres animaux en divagation. Ce sont de réels outils de travail, dont les pouvoirs publics, soucieux de biodiversité, encouragent les éleveurs à se doter, et qui sont souvent pour ces derniers la seule compagnie.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure - C’est un sujet difficile, mais exclure les chiens de troupeaux d’une disposition qui va s’appliquer à tous les autres chiens, même ceux considérés comme les moins dangereux – et qui concerne, rappelons-le, l’atteinte à la vie humaine – serait envoyer un contre-message. Je partage donc l’avis négatif exprimé par la commission ; il reviendra au juge de déterminer la sanction au vu des circonstances, étant entendu que les peines fixées par le texte sont des plafonds.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Le but de la loi n’est pas d’interdire ni de gêner la détention de chiens, mais de se prémunir contre certains comportements ; ses dispositions ne sont pas exagérément contraignantes, et au regard des risques on ne comprendrait pas que seuls les patous en soient exonérés. Avis défavorable, donc.

Mme Frédérique Massat – Cet amendement me séduit, même si je comprends vos arguments. Peut-être la mission d’information pourrait-elle se pencher sur cette question.

Mme Geneviève Gaillard – Peut-être que bientôt, lorsque nous n’aurons plus ni ours ni loups, elle ne se posera plus… Cela dit, il s’agit là encore d’un problème d’information : il faudrait dire aux promeneurs que les patous agressent les personnes qui s’approchent des troupeaux qu’ils gardent : la mission d’information – qui va avoir beaucoup de travail ! – pourrait y réfléchir ; mais je ne suis pas d’accord pour faire cette exception.

M. Patrick Ollier, président de la commission M. Saddier pose un vrai problème. Il a raison de dire que dans ces zones de haute montagne, que je connais bien, il est nécessaire de protéger les troupeaux contre les prédateurs – dont le nombre augmente. Mais je rejoins le ministre : afficher cette exception n’est pas possible, s’agissant d’agressions mortelles. Ce texte vise à responsabiliser les maîtres, et le patou en a un : le berger est responsable de son chien. Peut-être la navette permettra-t-elle de trouver une solution ; ne renvoyons pas tous les problèmes à la mission d’information, s’il vous plaît, il y a suffisamment de compétences réunies ici !

M. Jacques Lamblin – Je pense moi aussi qu’on ne peut pas adopter cet amendement. En cas d’accident, comme l’a dit Mme la rapporteure, il convient de s’en remettre à la sagesse du juge.

M. André Chassaigne – Cet amendement révèle l’extrême sévérité de cet article introduit par le Sénat. Si l’on défend la biodiversité, et notamment la présence du loup, il faut protéger les troupeaux ; or la première protection, c’est le chien patou – et par définition même, le berger n’est pas toujours près de lui. Il a un coût pour les bergers, sur lesquels de telles dispositions risquent donc d’avoir un effet dissuasif, contraire à la politique menée jusqu’à présent.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’article L. 211-23 du code rural dispose qu’un chien n’est considéré comme en état de divagation que si, « en dehors d'une action de chasse ou de la garde ou de la protection du troupeau », il n'est plus sous la surveillance effective de son maître : c’est un élément dont le juge dispose déjà pour porter son appréciation.

M. Martial Saddier – Je remercie les collègues qui ont bien voulu reconnaître la spécificité du chien patou. Depuis une vingtaine d’années, les grands prédateurs présents dans nos montagnes ne sont pas en danger, et la population des loups est en forte croissance. En dépit d’une situation qui les pénalise – et peut même mettre en péril certaines exploitations –, les éleveurs ont accompli des efforts importants dans le sens de la biodiversité et ils font tout pour maintenir le pastoralisme, au grand bénéfice de nos paysages de montagne. Bien entendu, il n’est pas besoin de rappeler que lorsqu’un éleveur a 4 000 brebis sur 1 500 hectares, il ne peut pas être derrière chaque bête et que le patou, qui trouve alors toute son utilité, ne peut pas non plus être à proximité du berger.

En tant que président des élus de montagne, je me dois de mettre la République et la représentation nationale devant leurs responsabilités, d’autant que le groupe « loup », récemment réuni, a tenu à faire part de son attachement au respect de certains équilibres. On ne peut pas, d’un côté, encourager les éleveurs à acheter des chiens patous, et, de l’autre, les surcharger de contraintes nouvelles, au risque de compromettre l’ensemble de la filière. Je vais retirer l’amendement 38 dans le cadre de cette première lecture, mais je souhaite que chacun ait bien conscience des difficultés particulières des éleveurs des territoires de montagne.

L'amendement 38 est retiré.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 15 est rédactionnel.

L'amendement 15, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Éric Ciotti – Mon amendement 87 est de coordination avec l’amendement 83, 3e rectification, que l’Assemblée a adopté tout à l’heure.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Favorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Même avis, sous réserve que les termes soient harmonisés, comme je l’ai demandé pour l’amendement 83, 3e rectification.

L'amendement 87, mis aux voix, est adopté.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Les amendements 16, 17 et 18 sont de précision.

Les amendements 16, 17 et 18, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Je retire l’amendement 112.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 19 corrige une erreur matérielle.

L'amendement 19, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Martial Saddier – L’amendement 55 est défendu.

L'amendement 55, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 62 corrige une erreur matérielle.

L'amendement 62, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 8 bis modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 9 À 12

Les articles 9 à 12, successivement mis aux voix, sont adoptés.

ART. 13

M. Éric Ciotti – Mon amendement 88 a trait aux délais dans lesquels devront être obtenus l’attestation d’aptitude et le résultat de l’évaluation comportementale. Dans un souci de cohérence et d’efficacité, je souhaitais raccourcir et harmoniser les délais initialement prévus en les ramenant de 12 et 18 mois – selon le document et la catégorie du chien – à 6 mois. J’ai entendu les observations du Gouvernement sur la difficulté d’appliquer des dispositions nouvelles et l’opportunité de se donner un peu de temps. Cependant, un délai unique de 9 ou 12 mois me semblerait adapté, dans la mesure où le délai d’un an et demi est manifestement excessif. La proposition que retrace mon amendement n’est donc pas fermée, mais je souhaite que l’on revoie ce point.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Monsieur Ciotti, je vous propose de retirer votre amendement. Vos observations sont fondées et nous allons en tenir compte, mais l’adoption de l’amendement 88 ferait tomber un amendement ultérieur relatif aux vigiles, auquel nous tenons. Je pense comme vous qu’un délai d’un an pour se mettre en conformité serait bien adapté.

M. Éric Ciotti – Je retire l’amendement 88, si l’on retient l’idée d’un délai d’un an.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur D’accord pour réfléchir à une durée d’un an. On ne peut pas y arriver en six mois, mais il faut en effet faire un effort pour que les mesures trouvent rapidement à s’appliquer.

L'amendement 88 est retiré.

M. Patrick Beaudouin – Mon amendement 72 était de la même veine que celui de M Ciotti et je vais moi aussi le retirer. J’insiste toutefois sur la nécessité d’envoyer un signal fort à la population : des accidents tragiques ont eu lieu, nous légiférons, il ne faut pas que l’application des dispositions adoptées par le Parlement soit renvoyée aux calendes grecques.

L'amendement 72 est retiré.

M. Éric Ciotti – Mon amendement 90 traite aussi des délais : il proposait de ramener de six à trois mois le délai dans lequel est exigible la production d’un certificat d’évaluation comportementale pour les chiens de première catégorie. J’ai proposé tout à l’heure d’harmoniser tous les délais en retenant celui d’un an : soyons prudents, car cela laisse trop de temps pour vérifier qu’un chien de première catégorie n’est pas extrêmement dangereux !

L'amendement 90 est retiré.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 63 apporte une précision.

L'amendement 63, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Éric Ciotti – Les amendements 92 et 89 – toujours relatifs aux délais – sont retirés.

Les amendements 92 et 89 sont retirés.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 64 apporte une précision et l’amendement 20 est de cohérence.

Les amendements 64 et 20, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 39 est de coordination avec l’amendement de la commission proposant une nouvelle rédaction de l’article 5 ter. Il constitue un appel au Gouvernement en vue de modifier les dispositions réglementaires relatives aux cartes professionnelles des maîtres chiens.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur Le délai de six mois est trop court pour que les organisations professionnelles s’organisent. Il faut leur laisser plus de temps.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – Je vais retirer l’amendement. Je propose que nous établissions un calendrier pour l’ensemble des mesures proposées. J’ai été sensible aux arguments de M. Beaudouin selon lesquels il convient de ne pas perdre de temps, mais il faut aussi tenir compte de certaines contraintes. Il faudra notamment que les professionnels chargés de l’évaluation comportementale aient le temps de se former.

L'amendement 39 est retiré.

M. Éric Ciotti – L’amendement 91 est de cohérence.

L'amendement 91, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Éric Ciotti – Je retire mes amendements 93 et 94.

Les amendements 93 et 94 sont retirés.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – L’amendement 65 rectifié apporte une précision.

L'amendement 65 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 13 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 13 BIS

Mme Catherine Vautrin, rapporteur – L’amendement 66 tend à supprimer l’article 13 bis, par coordination avec la suppression du I de l’article 4 bis.

L'amendement 66, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté ;

l’article 13 bis est ainsi supprimé.

ART. 15

L'article 15, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 15

M. Éric Ciotti – L’amendement 96 est relatif au trafic clandestin de chiens, notamment en provenance des pays de l’Est. Chacun sait à quel point les conditions d’élevage et de transport de ces animaux sont parfois indécentes.

Il me semble donc nécessaire d’envoyer un message d’une extrême fermeté aux importateurs en aggravant les sanctions pénales, qui seraient portées de 6 mois à deux ans de prison, et de 15 000 à 30 000 euros d’amende.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure Avis défavorable. Cette aggravation des peines serait en contradiction avec l’esprit même de ce texte, qui tend à privilégier, non les dispositions pénales, mais les mesures de prévention telles que l’évaluation comportementale et le certificat d’aptitude.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Même position. Ce texte favorise la responsabilisation des propriétaires. Des sanctions pénales sont certes nécessaires, mais le Gouvernement ne souhaite pas aller aussi loin que le propose M. Ciotti.

Mme Geneviève Gaillard – Je fais miens les arguments de la rapporteure et de la ministre. Malgré l’entrée dans l’Union européenne de certains pays importateurs, je rappelle tout de même que de trop nombreux chiens continuent à être introduits en France dans des conditions intolérables.

Comme je l’avais indiqué dans mon rapport d’information, ces animaux sont trop jeunes et transportés en trop grand nombre dans les camions ! On parle de « kilos de viande » à leur sujet… Les contrôles actuels demeurant insuffisants, c’est là que devrait porter l’effort, non sur les sanctions pénales. Et pourtant, on supprime des postes de fonctionnaires…

M. André Chassaigne – Très juste !

M. Dino Cinieri – Le début était bien, mais pas la chute…

L'amendement 96 est retiré.

M. Éric Ciotti – L’amendement 97 est de cohérence. Il s’agit de prendre en compte, en matière pénale, la création d’un permis canin.

L'amendement 97, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 98 est retiré, de même que l’amendement 95.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Les amendements 114 à 119 visent à étendre aux collectivités d’outre-mer les dispositions du présent texte. Cela étant, je ne suis pas certaine que les collectivités concernées aient eu l’occasion de faire connaître leur avis comme il est requis. Je retire donc ces amendements en attendant la seconde lecture.

Mme Catherine Vautrin, rapporteure – La commission n’a pas été saisie, mais je reprends bien volontiers, avec l’accord de M. Ollier, ces amendements.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur – Dans ce cas, plus rien ne s’y oppose.

L’amendement 114, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 115, 116, 117, 118 et 119.

L’ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance demain, jeudi 29 novembre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 21 heures 10.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

© Assemblée nationale