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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du jeudi 6 décembre 2007

1ère séance
Séance de 9 heures 30
77ème séance de la session
Présidence de M. Marc Laffineur, Vice-Président

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2007 (suite)

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2007.

APRÈS L’ART. 18

M. Patrick Roy – Par l’amendement 189, nous proposons la suppression du bouclier fiscal, faute délibérée, mesure idéologique et injuste dont le Gouvernement s’est rendu coupable. Selon que vous serez puissant ou misérable, vous recevrez des cadeaux – comme les cent familles du Nord qui ont perçu quelque 100 000 euros – ou vous serez maintenus dans la France qui souffre ! Voilà votre conception de la justice fiscale !

Mme Fabienne Labrette-Ménager – Encore !

Plusieurs députés du groupe UMP – Déjà dit !

M. Patrick Roy – Vous avez beau sourire, vous impatienter ou vous énerver, c’est la réalité ! Et le fossé ne cesse de se creuser.

M. Michel Bouvard – Vous l’avez déjà dit !

M. Patrick Roy – Malgré vos promesses, vous vous refusez à améliorer les petites retraites ; vous supprimez un nombre considérable de contrats aidés, privant ainsi de travail de nombreuses personnes qui viennent me trouver pour s’en plaindre ;…

M. François Vannson – Et vous avez des solutions à leur proposer ?

M. Patrick Roy – …vous vous apprêtez à soumettre à la redevance audiovisuelle ceux qui en étaient exonérés ; vous faites peser sur le budget des plus démunis un impôt sur la maladie – les « franchises médicales » –, vous réduisez des salariés, qui aimeraient bien travailler plus, à des petits boulots ! D’un côté, le luxe, l’argent qui coule à flots (Sourires sur les bancs du groupe UMP) ; de l’autre, l’asphyxie – la France qui rit et la France qui pleure !

Vous prétendez que j’exagère, que nous ne sommes plus à l’époque de Germinal ; mais cette époque, vous l’avez ressuscitée ! Vous ne me ferez pas taire : je prendrai sans relâche le parti des victimes, aujourd’hui comme au cours des mois à venir. Si je ne doute pas que vous rejetiez cet amendement au nom d’une prétendue justice fiscale, l’opposition a le devoir de dénoncer ces injustices criantes !

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances – Avis défavorable. Nous avons déjà longuement débattu de ces questions…

M. Patrick Roy – Mais oui, bien sûr…

M. le rapporteur général – Monsieur Roy, d’après les informations transmises par le ministre, seuls 30 000 des 230 000 foyers fiscaux éligibles au bouclier fiscal sont assujettis à l’ISF. Des milliers de ménages très modestes, mais propriétaires d’un logement, et de ce fait redevables d’un impôt sur le foncier bâti et d’une taxe d’habitation d’un niveau élevé, demandent du reste à bénéficier de ce mécanisme d’écrêtement.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Même avis.

M. le Président – Monsieur Launay, vous avez la parole, mais soyez bref.

M. Patrick Roy – Une seconde pour le bouclier fiscal !

M. Jean Launay – Instauré en 2006 et renforcé par l’adoption, cet été, de la loi TEPA, le bouclier fiscal remet en cause le principe de progressivité de l’impôt et poursuit le démantèlement de l’ISF entrepris depuis 2002. Le « paquet fiscal » y a ajouté l’allégement des droits de succession pour les plus aisés. M. Roy a donc eu raison de souligner l’écart grandissant entre ceux qui peuvent accumuler les patrimoines et le plus grand nombre, qui n’accumule que difficultés quotidiennes parce que le travail n’a pas été revalorisé !

L'amendement 189, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le rapporteur général – Je laisse à M. Lamour le soin de défendre l’amendement 7 de la commission.

M. Jean-François Lamour – Par cet amendement, nous proposons d’étendre le dispositif « Borloo dans l’ancien », que la loi DALO a permis d’appliquer au parc privé social ou très social – PLAI, PLUS ou PLS –, aux logements locatifs privés de niveau intermédiaire – PLI. Ainsi pourrait-on, dans le cadre du conventionnement avec l’Agence nationale pour l’habitat, sous-louer les logements concernés à des familles reconnues prioritaires par la commission de médiation, mais aussi et surtout héberger à titre transitoire – pendant 18 mois au plus – des demandeurs qui pourraient ensuite accéder à des logements classiques à caractère social ou très social.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Avis favorable à ce bon amendement, qui renforce le caractère social du dispositif « Borloo dans l’ancien ». Je lève le gage.

L'amendement 7, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Launay – L’amendement 171 vise à porter de 4,98 à 6 euros la part maximale exonérée d’impôt et de cotisations sociales de la contribution des employeurs à l’acquisition de titres-restaurant, ce qui permettrait de porter la valeur faciale de ces titres à 10 euros : 6 de part patronale et 4 de part salariale.

M. le rapporteur général – Avis défavorable. Je rappelle que la part prise en charge par l’employeur est indexée annuellement sur la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. D’autre part, la mesure coûterait 500 millions !

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis. La valeur faciale actuelle des titres-restaurant, qui s’élève à 8,40 euros, paraît en outre suffisante.

L'amendement 171, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Vannson – On ne peut que se féliciter de l’existence d’une réduction d’impôt visant à encourager les investissements privés dans les logements touristiques ou les résidences de tourisme, mais l’application concrète de ce dispositif pose problème. En effet, la notion d’agglomération au sens de l’INSEE, sur laquelle se fondent les articles 199 decies E et decies F du code général des impôts, empêche de nombreuses communes rurales d’en bénéficier, ce qui entraîne des tensions et conduit à reporter de nombreux projets.

L’amendement 19 rectifié propose donc de supprimer, dans ces deux articles, la référence aux « agglomérations ». Cette simple modification permettrait de développer l’activité dans ces communes, donc d’y créer des emplois, de sorte que le coût de la mesure pour l’État serait compensé par les recettes de TVA. Ce dispositif fiscal, qui a fait ses preuves, bénéficierait par exemple aux communes des Vosges touchées par la crise du textile et la désindustrialisation, et l’extension que je propose est donc attendue.

M. le rapporteur général – La commission a rejeté l’amendement, parce qu’il s’agit d’une niche fiscale pour laquelle nous ne disposons d’aucune évaluation. Selon le dispositif « Voies et moyens », le dispositif coûterait environ 40 millions, mais il faudrait regarder de plus près les taux d’occupation et les coûts de production ; certains professionnels avancent que l’avantage fiscal entraînerait un renchérissement équivalent des coûts de construction… Nous avons besoin de savoir ce qu’il en est, Monsieur le ministre !

M. Éric Woerth, ministre du budget Nous manquons en effet d’informations. La liste des communes éligibles doit être examinée de plus près. Je vous propose donc de faire étudier ces questions, en concertation avec le ministre du tourisme et la Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, pour lever les ambiguïtés qui subsistent. Je demande le retrait de l’amendement ou, à défaut, son rejet.

M. Michel Bouvard – Ce dispositif, dont le président de la commission des finances et moi-même pouvons revendiquer la paternité, a permis le développement de zones touristiques. Cela étant, après la mobilisation de grands opérateurs de tourisme et d’entreprises plus locales, nous voyons aujourd’hui apparaître une nouvelle génération d’opérateurs, ce qui n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes par rapport aux investisseurs. Je souhaiterais donc, non seulement qu’on réexamine les périmètres d’éligibilité, mais aussi qu’on établisse des garde-fous pour éviter les dérives que nous avons connues l’an dernier et qui nuisent à l’image même des investissements touristiques.

M. Jean Launay – L’amendement a le mérite de poser un vrai problème. Concernant les niches fiscales, il faudra se mettre au travail, en posant la question dans sa globalité, pour revenir à un système fiscal plus lisible et prévenir, dans ce cas particulier, le renchérissement des coûts de production évoqué par le rapporteur général.

M. François Vannson – Si je suis sensible au souhait du ministre de procéder à un examen en profondeur du dispositif, je pense, pour autant, que nous pouvons voter cet amendement ; le travail législatif n’en poursuivra que mieux son cours.

L'amendement 19 rectifié, mis aux voix, n’est pas adopté.

M. Patrice Martin-Lalande – Si l’accès à l’Internet à haut débit a très fortement progressé ces dernières années, à tel point que le territoire est aujourd’hui couvert à près de 98 %, certaines zones rurales ne peuvent pas espérer en bénéficier par la voie de l’ADSL, du câble ou de la fibre. Il faut donc envisager de recourir pour elles à des technologies alternatives, comme le satellite ou le Wimax. Or, ces technologies sont très coûteuses – par exemple, l’équipement en Wimax coûte entre 300 et 500 euros –, parce que le marché n’est pas suffisamment large. Comme il ne le sera, d’ailleurs, jamais, il faut que l’État donne un coup de pouce. Par notre amendement 203, nous proposons que, pour une durée limitée – de 2007 à 2009 –, un crédit d’impôt soit consenti à toute personne abonnée à une technologie alternative en zone blanche.

M. le rapporteur général – Avis défavorable. Créer ce crédit d’impôt pour le consommateur, s’agissant d’une technologie plus ou moins monopolistique et importée, conduirait immédiatement à une hausse du prix de cette dernière, et l’argent public irait directement dans la poche du producteur. En outre, un crédit d’impôt local ne peut avoir qu’un effet marginal par rapport à la baisse des coûts qu’on peut attendre du développement de cette technologie sur le marché mondial. Enfin, qu’est-ce qui empêchera le consommateur d’acheter son équipement pour bénéficier d’un crédit d’impôt et de le revendre tout de suite après ? De grâce, cessons de multiplier les crédits d’impôt qui grèvent les finances publiques et n’ont d’autre effet que de renchérir les prix !

M. Éric Woerth, ministre du budget Les technologies internet se sont très bien développées sans crédit d’impôt. Pourquoi faire payer au contribuable une rente aux industriels ? Au Sénat, nous avons accepté de lisser la fiscalité pour la revente par les entreprises de matériel informatique à leurs salariés, car cela fait sens. Pour le reste, il vaut mieux laisser faire le marché.

M. Charles de Courson – L’amendement pose un vrai problème, mais n’apporte pas la bonne solution. Pour les zones blanches, il existe d’autres technologies que le wimax. Ainsi, dans ma communauté de communes, nous avons équipé une commune en wi-fi, avec l’aide de l’État, d’ailleurs. C’est quelque chose de possible, en vue d’assurer la couverture des 2 ou 3 % restants du territoire.

M. Patrice Martin-Lalande – Notre amendement ne concerne pas une seule technologie alternative, mais toutes. En outre, il ne s’agit que d’un dispositif temporaire. Certes, le développement du marché conduira, à terme, à une baisse des prix, mais en attendant, un certain nombre de nos concitoyens sont privés d’Internet haut débit, alors que c’est souvent, en zone rurale, un outil précieux pour trouver un emploi.

Nous ne prétendons pas proposer la solution idéale, mais le problème existe et il convient d’y répondre autrement que par les dispositions actuelles, inadaptées.

L'amendement 203, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – Dans la droite ligne du Grenelle de l’Environnement, et dans un contexte de flambée des prix de l’énergie, l’amendement 184 majore de dix points les taux du crédit d’impôt consenti à raison des travaux visant à économiser l’énergie dans l’habitation principale.

L'amendement 184, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Lionel Tardy – Je me range aux arguments développés par M. Carrez contre l’amendement 203, et je retirerai donc mon amendement 212, similaire. Néanmoins, il est important d’accélérer le développement du réseau Wimax, pour lequel les licences accordées sont loin d’être honorées. En outre, il existe, d’autres technologies, telle celle développée grâce à l’amplificateur multiport – MPA – pour les zones d’ombres. L’objectif est de couvrir l’ensemble du territoire d’ici à la fin de l’année 2008. Monsieur de Courson, le wi-fi n’est pas adapté, dans la mesure où il ne couvre que des zones de 150 mètres de diamètre environ, alors que Wimax va jusqu’à 15 kilomètres, ce qui présente un grand intérêt, notamment dans les zones de montagne.

L’amendement 212 est retiré.

M. Jean Launay – La prime pour l’emploi constitue un instrument puissant pour améliorer le pouvoir d’achat des 9 millions de salariés modestes. Certes, vous l’avez augmentée, mais nous proposons, par l’amendement 179, de la majorer de 50 %, et de poursuivre dans ce sens les années suivantes. Cette mesure, dont le coût serait six fois inférieur à celui du paquet fiscal, permettrait de concentrer l’action en faveur du pouvoir d’achat là où elle s’impose le plus.

M. le rapporteur général – Avis défavorable. Cette mesure est, à l’évidence, hors de notre portée.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Nous avons déjà augmenté la PPE de manière considérable, puisque son montant est passé de 550 à 960 euros. Je ne peux qu’être défavorable à cet amendement.

L'amendement 179, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – M. Roy l’a dit : la progressivité de notre système fiscal est en danger et vous vous attachez à démanteler l’ISF. C’est la raison pour laquelle l’amendement 190 vise à abroger l’article 1649-0 A du code général des impôts, qui définit les modalités d’application du « bouclier fiscal ».

M. le rapporteur général – Rejet.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Rejet.

M. Henri Emmanuelli – Certes, vous ne reculerez pas. Mais je l’affirme avec gravité : lorsqu’un pays est en difficulté – c’est le cas de la France, comme le prouvent l’état de la dette, ce projet de loi de finances rectificative ou la future loi de finances – et qu’il faut demander des sacrifices – et non pas des « réformes », terme dévoyé puisqu’il laisse entendre une amélioration – , il convient de commencer par les plus riches. Or vous avez fait l’inverse, et c’est là votre péché originel.

Vous avez commencé par rendre de l’argent aux mieux lotis – avec quelques difficultés, d’ailleurs, si j’en juge par vos relances –, puis vous avez demandé aux « privilégiés » – ceux dont les revenus bruts ne dépassent pas les 1 700 euros – de faire des efforts. Je ne puis croire que vous ne l’ayez pas fait en connaissance de cause, et cette démarche suppose donc une certaine dose de cynisme.

M. Richard Mallié – Le cynisme, vous connaissez !

M. Henri Emmanuelli – J’ai toujours assumé mes responsabilités, ce qui n’est pas le cas de tout le monde !

M. Richard Mallié – C’est vrai.

M. Henri Emmanuelli – Alors, je l’affirme : votre politique est totalement cynique ! Et c’est un mensonge que de répéter que la France est rétive à la réforme.

Plusieurs députés du groupe UMP – C’est vous qui le dites !

M. Henri Emmanuelli – Les Français ne sont pas masochistes. Si vous n’aviez pas inversé les priorités, ils vous auraient suivis. Je trouve ahurissant que des personnes aussi intelligentes que vous ne l’aient pas compris.

L'amendement 190, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – L’amendement 169, cher à M. Garot, vise à instituer un crédit d’impôt égal à 50 % des frais d’inscription engagés – dans la limite de 10 000 euros – par un salarié afin de compléter sa formation professionnelle. Destiné à encourager la formation qualifiante et diplômante entreprise à l’initiative du salarié, ce dispositif serait encadré par un décret fixant la liste des établissements d’enseignement supérieur concernés afin d’éviter la tentation d’ajuster les frais d’inscription au crédit d’impôt. Je suis certain que le ministre aura à cœur de donner un avis favorable à cet amendement !

M. le rapporteur général – L’idée est intéressante, mais 20 milliards sont déjà consacrés à la formation professionnelle. D’ailleurs, il conviendrait d’améliorer l’utilisation de ces crédits publics.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Les frais engagés pour une formation sont assimilables à des frais professionnels : ils peuvent donc entraîner une réduction du barème ou une déduction, au titre des frais réels, de l’impôt sur le revenu. Avis défavorable.

L'amendement 169, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 19

L'article 19, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART. 19

M. Dominique Baert – Vous avez modifié en 2004 le mode de recouvrement de la redevance, ce qui peut se comprendre. Mais cette année, vous décidez de mettre fin à l’exonération de redevance dont bénéficiaient les personnes âgées. Alors qu’elles doivent se contenter d’une revalorisation de 1,1 % de leurs retraites en 2008 et qu’elles devront acquitter les franchises médicales, il faudra en plus qu’elles payent 116 euros pour accéder, pour certaines, au seul plaisir ou à la seule compagnie qu’elles connaissent. Cela est indigne !

Nous vous demandons de revenir à la raison en acceptant de maintenir l’exonération de redevance au profit des personnes modestes âgées de plus de 65 ans. Ce ne serait que justice, et ce serait un vrai moyen de soutenir le pouvoir d’achat.

Mme Arlette Grosskost – Je retire l’amendement 90.

M. Dominique Baert – L’amendement 194 est également défendu.

M. Patrice Martin-Lalande – Avant de défendre l’amendement 209, je voudrais rappeler à nos collègues socialistes que la réforme que nous avons faite en 2004 a permis d’économiser 100 millions chaque année sur la collecte de la redevance. De plus, elle a conduit à exonérer de redevance le million de foyers qui n’en étaient pas exonérés auparavant mais étaient exonérés de taxe d’habitation : elle n’a donc rien eu de socialement indigne !

C’est vrai que l’alignement des critères d’exonération de la redevance sur ceux de la taxe d’habitation a aussi pour effet de faire payer la redevance à ceux qui en étaient exonérés mais acquittaient la taxe d’habitation ; on ne peut cependant pas considérer cet alignement comme une régression sociale car les critères retenus pour la taxe d’habitation prennent en compte la situation sociale de manière plus complète que ne le faisaient ceux qui avaient été établis pour la redevance. En outre, ceux qui gagnent à la réforme – un million de foyers – sont plus nombreux que ceux qui peuvent y perdre – 750 000.

L’amendement 209, que j’ai cosigné avec mes collègues Censi, Raison, Apparu et Giscard d’Estaing, vise à appliquer la réforme de manière plus progressive, en faisant bénéficier en 2008 d’un dégrèvement de 50 % les personnes qui étaient précédemment exonérées de redevance.

Si le président et le rapporteur général de la commission des finances le voulaient bien, il serait également utile de procéder à un examen détaillé des situations sociales recouvertes par les actuelles exonérations temporaires, afin de faire le tri entre celles qui méritent d’être intégrées dans les exonérations de taxe d’habitation et redevance et les autres.

M. Charles de Courson – Dans son principe, la réforme du mode de perception de la redevance audiovisuelle a été votée à l’unanimité. Elle permet d’économiser plus de 1200 emplois et une centaine de millions chaque année. Je reconnais, et j’en prends ma part de responsabilité, que nous n’avions pas prévu de système transitoire pour les foyers qui jusque là ne payaient pas la redevance.

M. Henri Emmanuelli – Ce n’est pas le fond du problème !

M. Charles de Courson – La question est de savoir si les critères d’exonération désormais retenus pour la redevance, qui sont ceux applicables à la taxe d’habitation, sont plus justes ou moins justes que les précédents critères. La réponse est qu’ils sont plus justes.

On peut évidemment tomber dans la démagogie…

M. Henri Emmanuelli – Comme pour le bouclier fiscal !

M. Charles de Courson – …en proposant de cumuler les anciens et les nouveaux critères ; mais c’est anéantir en partie l’intérêt de la réforme. Si nos collègues socialistes souhaitent une modification des critères d’exonération de la taxe d’habitation, qu’ils fassent des propositions !

En revanche, et comme nous aurions dû le faire d’entrée de jeu, je propose une sortie progressive de l’ancien système : une sortie en deux ans dans l’amendement 237, en trois ans dans l’amendement 238.

M. le rapporteur général – La commission a rejeté l’amendement du groupe socialiste, mais elle a accepté celui de M. Martin-Lalande et celui de M. de Courson qui est similaire.

Nous devons être fiers de la réforme de la redevance, qui permet en effet d’économiser 100 millions par an. Ce n’est pas sans raison que la redevance n’est pas plus élevée en 2008 qu’en 2004, au bénéfice du pouvoir d’achat des Français. Il ne faut pas oublier non plus que dès 2005, un million de ménages qui payaient la redevance en ont été exonérés, à commencer par des centaines de milliers de érémistes.

M. Jérôme Chartier – Il fallait le rappeler !

M. le rapporteur général – Par ailleurs, les critères d’exonération de la taxe d’habitation sont beaucoup plus justes. Pour être exonéré de la redevance, il fallait avoir plus de 65 ans et ne pas être imposé sur le revenu ; mais on peut avoir un revenu important et, grâce aux réductions d’impôt, ne pas être imposable !

Je suis notre collègue Martin-Lalande dans sa proposition de regarder les choses de plus près, mais je peux d’ores et déjà vous dire que parmi les personnes qui étaient exonérées de redevance et qui vont désormais la payer, certaines ont des revenus très confortables. D’autres, je suis le premier à le reconnaître, ont des revenus modestes ; c’est pourquoi une réduction de moitié en 2008 me paraît une bonne solution.

Par ailleurs, je complète la proposition de M. Martin-Lalande par une autre, relative aux dépenses : je souhaite que l’audiovisuel public soit intégré dans le champ de la révision générale des politiques publiques : je suis sûr qu’on peut trouver des économies à faire là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Éric Woerth, ministre du budget Je regrette que des mots déplacés aient été utilisés, et je rappelle que les critères retenus pour la taxe d’habitation ont été votés en 2000 par les socialistes. Ils permettent d’exonérer 4,4 millions de personnes en situation de faiblesse financière, sociale ou physique.

En outre, du fait du dégrèvement de la redevance et de son adossement à la taxe d’habitation, voulus par la majorité actuelle, environ un million de personnes qui l’acquittaient auparavant sont sorties du dispositif…

M. Patrice Martin-Lalande – C’est un véritable progrès social !

M. Éric Woerth, ministre du budget– De qui s’agit-il ? De personnes veuves – environ 135 000 –, de 300 000 titulaires de l’AAH, d’allocataires d’autres minima sociaux et de 550 000 érémistes. Je ne puis croire, Mesdames et messieurs les députés du groupe socialiste, que, par esprit partisan ou calcul politicien, vous laissiez penser que l’horrible majorité actuelle va subitement taxer les populations les plus fragiles !

Nous avons analysé en détail la répartition par revenu des 750 000 foyers qui réintègreront progressivement le dispositif de droit commun : j’affirme qu’il est faux de prétendre que les revenus les plus faibles y sont surreprésentés. La répartition par déciles de revenu est parfaitement homogène et il peut même y avoir, Gilles Carrez l’a dit, des revenus importants, du fait notamment des niches fiscales et autres crédits d’impôt.

Il ne faut donc pas raconter n’importe quoi. Toutefois, le Gouvernement souhaite prendre en compte l’émotion qui s’est exprimée sur tous vos bancs, et c’est pourquoi il acceptera l’amendement 209 de M. Martin-Lalande qui propose une réintégration progressive des personnes concernées dans le droit commun, en leur accordant, en 2008, un dégrèvement de 50 % du montant de la redevance. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP) C’est cette progressivité et cette pédagogie qui ont manqué lorsque le dispositif a été voté, il y a trois ans : nous y remédions désormais et c’est une bonne chose. Bien entendu, je lève le gage sur l’amendement 209 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean Launay – Ce débat de fond, nous l’avons engagé dès l’adoption de la réforme du recouvrement de la redevance. Hier encore, en défendant la dernière motion de procédure, j’ai observé que la majorité s’était mise elle-même dans l’embarras. Au reste, nous ne nous sommes jamais opposés à la démarche de simplification des modalités de recouvrement et j’observe, Monsieur le ministre, que si certains érémistes en ont bénéficié – bien que ce point puisse être discuté –, les propriétaires de résidence secondaire – qui ne sont pas a priori les contribuables les plus défavorisés – en ont aussi profité. Quoi qu’il en soit, le problème persiste aujourd’hui pour 780 000 foyers, et nous ne sommes pas les seuls à le dire puisque, par l’amendement 90 – hélas non défendu en séance – nombre de collègues de la majorité le dénonçaient aussi. La vérité, c’est que le débat de fond n’est pas tranché. D’accord pour avancer dans la voie de la simplification administrative et de l’évaluation via la RGPP, mais, en l’espèce, les enjeux sont autres.

M. Jean-Marc Ayrault – Très bien !

M. Dominique Baert – Notre rapporteur général a tenu un propos très intéressant puisqu’il a admis que l’on pouvait, en France, en 2007, disposer de revenus très importants et être totalement exonéré d’impôt sur le revenu !

M. Henri Emmanuelli – Quel aveu !

M. Jérôme Chartier – Arrêtez ! Tout le monde le sait !

M. Dominique Baert – Hélas, la majorité des personnes exonérées d’impôt sur le revenu que nous rencontrons dans nos permanences ne sont pas des rentiers du CAC 40 : érémistes, titulaires de minima sociaux, retraités modestes… Ce sont ceux-là auxquels notre amendement faisait droit car ce sont eux qui seront touchés par cette nouvelle injustice. Au reste, Monsieur le ministre, si vous étiez si sûr de la justesse de votre décision, pourquoi accepteriez-vous un amendement mi-chèvre mi-chou visant à l’édulcorer ? Je maintiens que la mesure est indigne et que l’amendement 209, en se bornant à diviser par deux l’addition, servira de feuille de vigne à une véritable régression sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ; murmures sur les bancs du groupe UMP).

M. Éric Woerth, ministre du budget – Un mot pour répéter que si nous acceptons l’amendement de M. Martin-Lalande, c’est pour introduire plus de progressivité dans la sortie du dispositif, cet aspect des choses ayant été négligé il y a trois ans.

M. Jean-Marc Ayrault – Monsieur le ministre, en acceptant cet amendement, vous reconnaissez que vous aviez commis une erreur et vous prétendez atténuer la nouvelle injustice que vous vous apprêtiez à créer. Alors, de grâce, ne nous faites pas de procès en démagogie lorsque nous proposons que ces 800 000 foyers continuent de bénéficier de l’exonération. La vérité, c’est que les Français en général et les retraités en particulier sont très inquiets quant à l’évolution de leur pouvoir d’achat et que les mesures envisagées par le Gouvernement, si elles voient le jour, ne concerneront de toute façon pas les retraités les plus modestes !

Quant à M. de Courson, je l’ai connu plus ouvert sur la nécessité d’évaluer l’efficacité des réformes adoptées et je n’accepte pas davantage son accusation de démagogie ! Ce n’est pas parce qu’une mesure a été adoptée qu’elle est bonne et que l’on doit se priver de l’évaluer.

En définitive, aucun argument convaincant n’est opposé à notre proposition et je ne puis m’empêcher de remarquer à mon tour que le rapporteur général a admis très sereinement que l’effet des niches fiscales était tel, qu’elles pouvaient conduire à exonérer totalement d’impôt sur le revenu des revenus importants. Or que fait la majorité contre les niches ?

M. Gérard Bapt – Rien du tout !

M. Jean-Marc Ayrault – On nous accuse de démagogie lorsque nous proposons de maintenir une exonération parfaitement légitime : lorsqu’il s’est agi de dégager 15 milliards pour le paquet fiscal, vous n’avez pas eu les mêmes pudeurs ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) Rétablir cette exonération, c’est consentir enfin le geste de justice et de solidarité que les Français attendent (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jérôme Chartier – Je récuse avec force le procès d’intention qu’instruit M. Ayrault. Nous sommes dans un débat extrêmement précis et le ministre a eu raison de dire que la proposition des socialistes frisait la démagogie. Hier soir, vous n’étiez pas là, Monsieur Ayrault, lorsque vos collègues ont défendu une proposition de baisse de la TVA représentant une perte de recettes de 5 milliards !

M. Henri Emmanuelli – La loi TEPA, c’est 15 milliards !

M. Jérôme Chartier – Comme toujours, les socialistes ne proposent que des augmentations de dépenses non compensées et aucune mesure d’économie ! (Interruptions sur les bancs du groupe SRC) François Hollande se répand en grandes déclarations dans la presse mais où est-il lorsqu’il s’agit de débattre de propositions concrètes ? (Même mouvement)

M. Henri Emmanuelli – Et Copé ?

M. Jérôme Chartier – Que M. Hollande vienne donc dans l’hémicycle et que le débat ait lieu ! Soyez sérieux si vous voulez que l’on vous prenne au sérieux !

M. Henri Emmanuelli – Allez plutôt chercher Copé !

Les amendements 195 et 194, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 209, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 237 et 238 tombent.

M. Jean Launay – Notre amendement 191 institue un dégrèvement de redevance audiovisuelle pour les titulaires de l’allocation spécifique de solidarité. Notre amendement 193 fait de même pour les étudiants.

M. le rapporteur général – Avis défavorable. De telles exonérations ne sont pas rattachées à la taxe d’habitation.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis défavorable.

M. Frédéric Lefebvre – S’ils déposent des amendements instituant des exonérations qui ne sont pas liées à la taxe d’habitation, les socialistes devraient reconnaître que le vrai sujet est celui de la taxe d’habitation. Adosser la redevance à cette taxe est le moyen le plus juste pour que les personnes modestes ne la payent pas. Si l’on en est d’accord, on suit le Gouvernement, sans remettre en cause la réforme. Mais si l’on remet en cause ce lien, il faut aller au bout de cette logique en proposant une réforme de la taxe d’habitation, et dire par exemple que ceux qui la payent sont des riches. Vous faites de la démagogie sur la redevance alors que la question de fond est de savoir si les exonérations de taxe d’habitation sont adaptées.

Les amendements 191 et 193, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Gérard Bapt – Si démagogie il y a, c’est de la part de cette majorité qui crée le bouclier fiscal, mesure inefficace selon le Figaro, mais grâce à laquelle le seul Johnny Hallyday rentre en France. Il coûte cher, le retour du rocker !

Nous sommes favorables à une réforme de la taxe d’habitation, et nous l’avons engagée en liant les exonérations de taxe d’habitation à l’impôt sur le revenu. Aujourd’hui, nous proposons de faire dépendre la taxe elle-même du revenu. Nous voulons aussi que la fiscalité locale soit plus lisible. Lier la redevance à la taxe d’habitation brouille les choses. Le contribuable local, j’ai pu le constater, ne comprend plus qui en fixe le montant. Il faut que j’explique à certains que ce n’est pas le conseil municipal. Notre amendement 192 propose que l’avis d’imposition de la redevance audiovisuelle soit émis avec celui de l’impôt sur le revenu.

M. le rapporteur général – La commission a repoussé cet amendement. Il est logique de rattacher la redevance à la taxe d’habitation, parce que la télévision est un élément de l’habitation (Exclamations sur les bancs du groupe SRC). Et auprès des contribuables locaux, vous pouvez faire valoir que la redevance a baissé depuis quatre ans !

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis défavorable. Les exonérations de la taxe d’habitation, qui ont fait l’objet de débats au début des années 2000 mais sont maintenant bien installées, sont justes. Y rattacher les exonérations de redevance est donc juste également.

M. Charles de Courson – Je ne comprends vraiment pas la démarche de nos collègues socialistes. L’adossement de la redevance à la taxe d’habitation est ancien. À l’époque, l’actuel président de la commission des finances n’a rien dit. C’est qu’il y était favorable. Et voilà que maintenant, vous proposez de choisir plutôt l’ancien dispositif de dégrèvement. C’est conforter les inégalités ! Est-il normal que 89 000 personnes qui sont parmi les 10 % les plus riches de la population bénéficient d’un dégrèvement ? Si c’est cela la justice sociale, vous êtes tombés sur la tête ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Et vous allez encore plus loin dans la démagogie avec cet amendement qui adosse la redevance à l’impôt sur le revenu. Est-ce à dire que vous voulez exonérer les 49 % de Français qui ne payent pas cet impôt ? Je ne vous comprends plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Une mise au point s’impose. Lorsqu’il y a eu débat pour savoir si l’on devait supprimer la vignette ou la redevance, j’étais favorable à la suppression de cette dernière.

M. Michel Bouvard – C’est vrai.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – En second lieu, j’ai toujours été partisan de la réforme de la collecte de la redevance, quitte à assumer les conséquences qu’elle avait pour le personnel. Mais je n’ai jamais été favorable à l’adossement de la redevance à la taxe d’habitation, car cela entretient une confusion entre les responsabilités de l’État et celles des collectivités territoriales. Enfin, il ne faudrait pas qu’on conclue de ce débat que la taxe d’habitation est un impôt juste. Il ne l’est pas, et il est nécessaire de le réformer. Cela relève du chantier plus global de la réforme de la fiscalité locale, pour lequel je demande à chacun de faire des propositions.

L'amendement 192, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 20

M. Charles de Courson – Mon amendement 224 est de suppression. Il s’agit de souligner que la partie de l’article qui étend le dispositif du « Pass foncier » aux logements collectifs pose d’énormes difficultés juridiques pour l’accédant comme pour le prêteur. Plutôt que de voter en faveur d’un dispositif dont on sait déjà qu’il ne fonctionnera pas, notre responsabilité est de mettre en garde contre les conséquences qu’aurait son adoption. Mon amendement a donc pour objet d’inciter à la réflexion.

Le dispositif mis en place pour le logement individuel est lourd mais fonctionne, de façon modeste. Il consiste à distinguer le bâti du foncier. Mais distinguer l’usufruit de la nue-propriété d’un logement collectif pose d’énormes problèmes. Que se passe-t-il en cas de décès ou de divorce ? Comment revendre seulement l’usufruit ? Comment régler la question de l’hypothèque ? Pour l’instant, en commission on ne nous a pas donné de réponse.

M. le rapporteur général – La commission n’a pas adopté cet amendement. A titre personnel, je souscris aux arguments de M. de Courson. Avec ce système, dans le cas d’une maison individuelle, l’acquéreur est propriétaire des murs, et a, pour le foncier, un bail à construction pendant tout le temps où il n’a pas remboursé son prêt principal. Pendant cette vingtaine d’années, il peut se passer bien des choses. Or, on sait bien que seuls les propriétaires du foncier peuvent obtenir une hypothèque. Pis encore : si l’acquéreur, pour une raison ou pour une autre, n’est pas en état de payer le foncier au bout de vingt ans, il n’aura plus rien !

Or, pour ce qui est des appartements en immeubles collectifs, le problème est encore plus compliqué : l’acquéreur n’achète que l’usufruit du bâti et, nous dit le texte, la nue-propriété sera détenue pendant vingt ans par un organisme encore inconnu que financera le 1 % logement. C’est un dispositif trop peu sûr. On pourrait faire beaucoup plus simple ! Pourquoi par exemple ne pas affecter une fraction du prêt à taux zéro au foncier, voire à la nue-propriété, et en permettre le remboursement différé, une fois la première partie acquittée ? Cela permettrait à l’acquéreur d’être immédiatement propriétaire du bâti comme du foncier. J’ajoute que ce serait moins coûteux qu’un « Pass foncier », sur lequel s’accumulent jusqu’à 70 000 euros d’aides et exonérations diverses !

M. Éric Woerth, ministre du budget J’entends vos arguments, mais je rappelle que l’objectif du Gouvernement est ici d’encourager l’accession à la propriété des plus modestes, comme le Président de la République s’y est engagé. Le « Pass foncier », en dissociant le bâti du terrain, est un outil adapté. Certes, il est compliqué, notamment pour les immeubles collectifs, mais il permettra à nos compatriotes les moins fortunés d’acheter un appartement ou un maison en assortissant d’avantages fiscaux le paiement du terrain et en le dissociant de celui du bâti. Je vous propose donc d’adopter ce dispositif, quitte à le rectifier plus tard, car c’est une avancée majeure en faveur de l’accession très sociale !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales  Je suis très attaché à l’accession sociale et très sociale. Nous disposons déjà d’un très bon produit : le prêt à taux zéro, renforcé par M. Borloo. D’autres produits s’y sont ajoutés, dont le « Pass foncier », qui est en fait un PTZ majoré, soumis à l’obtention d’une aide de 4 000 euros de la collectivité et permettant de différer de vingt ans le paiement du terrain à hauteur de 40 000 euros. C’est donc une aide importante. Hélas, en 2007, il n’en a pas été signé plus d’une centaine, et ce pour plusieurs raisons : le dispositif est trop complexe, de nombreuses collectivités n’ont pas apporté la contribution de 4 000 euros nécessaire, les accédants veulent généralement posséder d’emblée le bâti et le foncier, et enfin les notaires et les banquiers n’ont pas été impliqués, puisque la mesure est financée par le 1 % logement.

C’est donc une aide considérable – jusqu’à 70 000 euros – à l’accession sociale. Toutefois, que faire si l’intéressé en profite pour vendre sa maison après cinq ans ? Ce n’est pas en ajoutant des moyens que vous simplifierez le dispositif. Le Gouvernement devrait, dans les jours qui viennent, réfléchir à un meilleur système. Votre intention est louable, mais le coût de la mesure est trop élevé pour un résultat incertain : croyez-vous, à ce prix, que nous pourrons gérer 20 000 « Pass fonciers » l’an prochain ?

M. Éric Woerth, ministre du budget Encore une fois, je comprends vos arguments, mais je reste persuadé qu’il faut adopter ce dispositif, d’autant qu’il ne présente aucun risque. Il sera toujours possible de l’améliorer ultérieurement, en lui faisant plus de publicité, par exemple. Le montant de 70 000 euros que cite M. Méhaignerie est extrême. C’est une mesure compliquée, mais elle a été élaborée dans les meilleures conditions par Mme Boutin. Je vous propose d’en évaluer régulièrement l’application pour en vérifier le bon fonctionnement, quitte à le rectifier plus tard ! (Applaudissements sur certains bancs du groupe UMP)

M. Charles de Courson – Je m’occupe du crédit immobilier depuis vingt ans, et le président Méhaignerie depuis trente environ. Pourquoi ne pas écouter les gens de terrain et améliorer, comme le propose le rapporteur général, le prêt à taux zéro ? Je vous parie une bouteille de champagne que vous ne dépasserez pas les 500 « Pass fonciers » l’an prochain. Cela étant, ne voulant pas empêcher la Terre de tourner, je retire mon amendement.

L'article 20, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 20

M. Antoine Herth – La loi du 21 août dernier alourdit la fiscalité des donations aux fondations au point de supprimer tout effet incitatif, la taxation étant parfois supérieure à la donation elle-même. L’amendement 225 vise à supprimer cette disposition et, à défaut, l’amendement 226 à l’alléger.

M. le rapporteur général Avis défavorable. Si l’on supprime les droits de mutation à l’occasion d’une donation, il faut au moins assujettir la plus-value ! Je l’avais déjà expliqué en présentant un amendement à ce sujet lors de l’examen de la loi TEPA.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis.

Les amendements 225 et 226, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrick Ollier – En 2005, nous avons exonéré la plus-value sur les biens cédés par des particuliers aux organismes HLM, puis avons étendu l’année suivante la mesure aux biens cédés aux collectivités locales, à condition que celles-ci les vendent à leur tour à un organisme HLM. Or, nous avons oublié les établissements publics fonciers, qui participent pourtant à la création de logements sociaux. L’amendement 199 vise à réparer cette erreur. L’enjeu est de taille : dans les Hauts-de-Seine, une grande partie des 3 000 logements sociaux que nous avons prévu de créer seront menacés si le dispositif n’est pas étendu aux EPF.

M. le rapporteur général – Bien qu’elle en approuve le principe, la commission n’a pas adopté l’amendement, et ce pour trois raisons : le délai de revente ne saurait être porté à trois ans ; l’amendement est en partie satisfait par un amendement de M. Lefebvre à la première partie du projet de loi de finances ; enfin, le Sénat vient d’adopter un autre amendement qui étend aux EPF le bénéfice de l’exonération. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

M. Patrick Ollier – Si l’amendement du Sénat concerne bien l’exonération des plus-values résultant de la cession de biens à un office HLM par les EPF, je vous fais confiance et je retire mon amendement.

L'amendement 199 est retiré.

M. Lionel Tardy – Le droit d’enregistrement pour les cessions d’actions est fixé à 1,1 % et soumis à un plafonnement de 4 000 euros, contre 5 %, sans plafonnement, pour les cessions de parts de SARL. Afin de favoriser la transmission des entreprises constituées en SARL – ce qui est le cas de nombreuses PME –, l’amendement 218 propose d’étendre à toutes les cessions de parts sociales les droits d’enregistrement qui s’appliquent aux actions. Il s’inscrit ainsi dans la démarche gouvernementale de réduction des charges pesant sur les PME.

M. le rapporteur général – Avis défavorable à cet amendement, dont le coût s’élèverait à plusieurs centaines de millions d’euros. La commission lui a préféré l’amendement 8 que M. Chartier défendra tout à l’heure et qui propose de résoudre le problème, dont nous sommes bien conscients, en apportant à l’État une recette supplémentaire.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Avant de m’exprimer sur ce problème à propos de l’amendement 8, qui propose lui aussi une harmonisation – mais par le haut – je vous demande de retirer l’amendement 218 en raison de son coût.

M. Lionel Tardy – D’accord.

L'amendement 218 est retiré.

M. Jérôme Chartier – Je défendrai en même temps l’amendement 8 de la commission et le sous-amendement 153. En proposant de remédier à l’inégalité de traitement fiscal, qui s’explique par des raisons historiques, entre les SARL et les SA ou les SAS, l’amendement 218 va dans le bon sens. Mais, comme l’a souligné le rapporteur général, notre proposition d’harmonisation a l’avantage d’accroître les ressources financières de l’État.

Après en avoir discuté avec le rapporteur général et avec le ministre, et malgré les conséquences économiques positives dont ils sont porteurs, je vais retirer l’amendement et le sous-amendement, à condition que le Gouvernement s’engage à réfléchir à une solution qui ne compromette pas les finances publiques, c’est-à-dire à compenser le cas échéant le plafonnement des droits d’enregistrement des cessions de part de SARL, à due concurrence, par l’augmentation d’une autre recette publique, fût-ce au détriment des SA et des SAS.

M. le rapporteur général – Même si la commission ne l’a pas adopté, ce sous-amendement souligne à juste titre la nécessité d’une harmonisation. Nous faisons confiance au Gouvernement pour nous accompagner dans cette démarche.

M. Éric Woerth, ministre du budget – L’harmonisation est en effet nécessaire ; du point de vue des finances publiques, l’harmonisation par le haut suggérée par M. Chartier est préférable, même si, du point de vue des sociétés concernées, la solution de M. Tardy est plus avantageuse. Quoi qu’il en soit, je vous promets de réfléchir à une solution concertée qui ne mette pas en péril les transferts de parts sociales, ce qui serait contraire à la politique menée par le Gouvernement, et je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement et le sous-amendement.

Le sous-amendement 153 et l’amendement 8 sont retirés.

M. Antoine Herth – L’amendement 227 est défendu.

M. le rapporteur général – Cet amendement est satisfait par un amendement que M. Alain Lambert vient de présenter au Sénat et que le Gouvernement a accepté.

L'amendement 227 est retiré.

M. Michel Bouvard – Après que la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances sur la gouvernance des universités avait préconisé, à l’unanimité, l’amélioration du financement des universités grâce à la contribution de fondations, il revient à la loi de finances de déterminer le traitement fiscal des fondations universitaires et des structures de partenariat créées par la loi Pecresse. Tel est l’objet de l’amendement 96, qui propose de leur étendre l’exonération de droits de mutation dont bénéficient les dons et legs aux associations d’enseignement supérieur reconnues d’utilité publique aux termes de l’ancienne loi du 18 mars 1880 et aux sociétés d’éducation populaire gratuite reconnues d’utilité publique et subventionnées par l’État. Ainsi éviterait-on que les droits de mutation n’absorbent près de la moitié des legs.

M. le rapporteur général – Avis favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis ; je lève le gage.

L'amendement 96, mis aux voix, est adopté.

M. Lionel Tardy – L’amendement 41 propose de dispenser de déclaration de succession le conjoint survivant et les frères et sœurs vivant sous le même toit depuis plus de cinq ans, exonérés de droits de succession au titre de la loi TEPA.

L'amendement 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – À l’encontre de la volonté du Gouvernement et de la majorité de démanteler peu à peu l’ISF, l’amendement 174 propose d’intégrer les œuvres d’art dans l’assiette de cet impôt, l’exonération étant toutefois maintenue dès lors que les œuvres sont présentées au public ou que leur acquisition bénéfice aux créateurs vivants. La taxation serait établie forfaitairement à 3 % de la valeur de l’actif net du contribuable, ce dernier conservant la possibilité d’apporter la preuve d’une valeur inférieure.

L'amendement 174, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Fourgous – Par l’amendement 266, nous proposons de faire en sorte que les gros aident les petits, car il est notoire que nos petites entreprises manquent de fonds propres, en particulier par rapport à leurs concurrentes anglaises, allemandes ou américaines. La consommation de capital des jeunes entreprises en amorçage est telle que l’apport de capitaux provoque aussitôt des entrées de TVA de nouvelles recettes sociales pour l’État ; l’exonération d’ISF pour les investissements dans ces entreprises ne grève donc pas les finances publiques. Enfin, un emploi créé dans une jeune pousse coûte deux fois moins à l’État qu’un emploi créé dans une grosse entreprise.

M. Charles de Courson – Cosignataire de l’amendement de notre collègue, je souhaite le sous-amender, en complétant la référence aux lignes directrices communautaires en matière de capital-investissement et en supprimant la référence au règlement relatif aux aides de minimis. Le montant des versements susceptibles d’être reçus par les entreprises bénéficiaires et les fonds d’investissement seraient soumis à un plafond fixé par décret, toujours après la validation du dispositif par la Commission européenne, dans la limite de 1,5 million par période de douze mois.

M. le rapporteur général – L’exonération pour investissement figure dans la loi TEPA : tout investissement direct en PME ouvre droit à une réduction d’ISF de 75 %, dans la limite de 50 000 euros. De nombreux collègues ont fait remarquer, en juillet, que, les personnes assujetties à l’ISF ne connaissant pas toutes des PME, il convenait d’ouvrir le dispositif aux structures d’intermédiation. On a fait remarquer également qu’il ne fallait pas ainsi créer un énième produit financier, générant des commissions bancaires et manquant sa cible. M. Fourgous avait alors à la fois insisté sur la cible – les petites entreprises en développement et en amorçage – et plaidé pour une ouverture plus large des fonds intermédiés.

Dans la mesure où l’amendement est bien ciblé sur l’amorçage, où il fait passer le taux de réduction d’impôt de 75 à 50 % – davantage compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel –, où il propose de porter le sous-plafond de 10 000 euros, un peu étroit, à 25 000 euros, et où il exige des fonds d’intermédiation un sous-quota d’investissement minimum dans les entreprises de moins de cinq ans de 40 %, la Commission a approuvé l’amendement.

Le sous-amendement est également intéressant. En juillet, le Gouvernement a placé le dispositif de réduction d’ISF sous le système de minimis, faute d’avoir eu le temps de le notifier à la Commission européenne. Il s’agit aujourd’hui de sortir d’un système qui plafonne l’investissement à 200 000 euros sur trois ans, et de se placer à l’intérieur de lignes directrices qui favorisent réellement l’investissement. Le sous-amendement propose une sortie à partir de l’accord de la Commission au dispositif.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis favorable. L’amendement étend dans de bonnes conditions la capacité du dispositif de la loi TEPA en faveur de l’investissement. En ce qui concerne la sortie préalable du de minimis, mes contacts avec la Commission me laissent penser que les choses pourraient évoluer de façon à ce que la mesure soit appliquée rapidement. Le Gouvernement est également favorable au sous-amendement, et lève les gages.

Le sous-amendement 290, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 266, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Richard Mallié – En 2005, on comptait 394 000 assujettis à l’ISF ; en 2006, 460 000 ; et en 2007, on en annonce 520 000. Ce nombre augmente, d’année en année, de manière exponentielle. Avec la flambée des prix de l’immobilier, qui ont plus que doublé en une décennie, l’acquisition d’une résidence principale devient presque inévitablement une cause d’assujettissement à l’ISF. De nombreux contribuables ne savent même pas qu’ils sont redevables : un pavillon en banlieue parisienne, un studio à la mer et quelques assurances-vie suffisent.

La loi TEPA a fait passer l’abattement sur la résidence principale de 20 à 30 %, ce qui profite à ceux qui ont une résidence dont la valeur est très élevée, c’est-à-dire à ceux qui ont les plus grands moyens. C’est pourquoi l’amendement 86, cosigné par 115 députés, vise à retirer la résidence principale de l’assiette de l’ISF, mais dans la limite de 400 000 euros. Ceux dont la résidence possède une valeur supérieure à 1,3 million y perdraient, les autres y gagneraient : ainsi, entre 80 et 100 000 foyers ne seraient plus assujettis à l’ISF.

M. le rapporteur général – Je reconnais que la proportionnalité fait problème. Mais, dans la loi TEPA, l’abattement pour la résidence principale est passé de 20 à 30 % : il faut s’en tenir à ce geste.

M. Éric Woerth, ministre du budget –Le Gouvernement a déjà accepté de relever à 30 % l’abattement pour la résidence principale. Cela constitue déjà une avancée. Je demande à M. Mallié, dont je salue au demeurant la constance, de retirer son amendement.

M. Richard Mallié – Je demande la parole.

M. le Président – Je ne puis vous l’accorder que pour annoncer le retrait de votre amendement.

M. Charles de Courson – Je demande la parole également.

M. le Président – Le sujet a déjà été largement évoqué.

M. Richard Mallié – Je souhaite m’exprimer !

M. le Président – Vous avez la parole.

M. Richard Mallié – Cet amendement ne propose pas un geste supplémentaire, bien au contraire… Mais comme M. le ministre appartient à mon parti, que nous siégions côte à côte à la commission des finances, et qu’il est un ami, j’accède à sa demande (Sourires).

L’amendement 86 est retiré.

M. Jean-Michel Fourgous – L’amendement 265 vise à accorder un délai plus long – douze mois – à une holding pour réinvestir dans une PME les sommes reçues au titre de la réduction d’ISF.

M. le rapporteur général – Avis favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis. Je lève le gage.

L'amendement 265, mis aux voix, est adopté.

M. Charles de Courson – Les associations reconnues d’utilité publique interviennent dans des domaines et selon des modalités similaires à celles des fondations, et font d’ailleurs l’objet de contrôles tout aussi étroits.

Afin de leur conserver un régime fiscal identique – notamment en ce qui concerne les avantages fiscaux liés aux dons qui leurs sont faits – et dans un double souci d’équité et de simplicité, l’amendement 20 vise à leur faire bénéficier des mêmes possibilités que celles ouvertes aux fondations. Ainsi les donateurs – notamment les plus favorisés – ne se tourneront-ils pas vers les fondations au détriment des associations.

M. François Vannson – L’amendement 20 est identique. Il est important que les dispositions de la loi TEPA bénéficient aussi aux associations de loi 1901 à but non lucratif. Celles-ci jouent un rôle très important, notamment dans le domaine caritatif.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Ne nous dispersons pas. Ce dispositif consiste à favoriser l’investissement dans le système de production, et plus particulièrement dans les PME. Il a été, dans un premier temps, étendu aux fondations. Si nous ajoutons les associations, son champ deviendra trop large et son efficacité s’en trouvera affaiblie.

Une association qui souhaite devenir éligible peut toujours dédier une partie de son activité à une fondation, qu’elle créera en déposant un dossier auprès du Conseil d’État.

M. le rapporteur général – La position de la commission est demeurée la même qu’il y a un mois et demi. Le dispositif a été étendu aux fondations et aux associations qui œuvrent dans le domaine de l’insertion. La logique voudrait qu’il concerne aujourd’hui les associations reconnues d’utilité publique. Toutefois, je suis sensible à l’argumentation du ministre : ce sont bien les PME qui constituent la cible prioritaire de ce dispositif.

M. Jérôme Chartier – Il faut éviter deux écueils : diluer l’efficacité du dispositif en étendant à l’excès son champ d’application, et réduire les ressources publiques. J’observe à ce propos que ces amendements sont gagés d’une manière que l’on peut qualifier d’exotique… (Sourires). Mieux vaudrait que leurs auteurs les retirent. En outre, la revue générale des prélèvements obligatoires, qui devrait avoir lieu au printemps, constituera un cadre adapté pour évoquer ce sujet.

M. Charles de Courson – Qu’est-ce qu’une fondation ? C’est une association reconnue d’utilité publique qui a déposé un dossier auprès du Conseil d’État. Alors que nous avons unifié les dispositions fiscales bénéficiant aux fondations et aux associations, il serait discriminatoire de réserver aux seules fondations ce dispositif. Si la commission présente pour la deuxième fois un tel amendement, ce n’est pas par obstination irraisonnée.

En outre, les donateurs ne sont pas animés par l’esprit de lucre. Il ne faut donc pas craindre un affaiblissement des ressources publiques, mais plutôt encourager la générosité publique.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Notre objectif est de favoriser l’investissement dans les PME. Si les fondations d’utilité publique bénéficient, par exception, de ce dispositif, c’est parce qu’elles jouent un rôle spécifique. D’autres dispositifs fiscaux favorisent les dons aux associations.

Les amendements 9 et 20, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

ART. 21

M. Lionel Tardy – Les inventions et les innovations peuvent relever du droit d’auteur et ne pas être protégées par un brevet. L’amendement 37 vise donc à étendre le champ du crédit d’impôt recherche à tous les titres de propriété intellectuelle.

M. le rapporteur général - La commission s’en tient à la définition des dépenses éligibles qui a été retenue voici quinze jours. Avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Même avis.

L’amendement 37 est retiré.

M. le rapporteur général – L’amendement 74 est de précision. Les amendements 69, 70, 71 rectifié, 73 rectifié, 72 et 68 sont rédactionnels.

Les amendements 74, 69, 70, 71 rectifié, 73 rectifié, 72 et 68, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 21, modifié, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à midi, est reprise à 12 heures 5.

APRÈS L’ART. 21

M. Lionel Tardy – S’il arrive que des dispositifs fiscaux d’incitation manquent leur but, d’autres fonctionnent très bien ; c’est le cas des trois que je propose par mon amendement 40 de prolonger de trois ans, et qui visent à favoriser les énergies renouvelables, les économies d’énergie, la lutte contre le bruit et l’épuration des eaux industrielles. Il y a urgence car ils prennent fin le 31 décembre 2007 ; on ne peut donc pas attendre le volet fiscal du Grenelle de l’environnement.

M. Michel Bouvard – M. Tardy a très bien défendu mon amendement 99 !

M. Jérôme Chartier – De même que l’amendement 150 !

M. le rapporteur général – C’est ce dernier que la commission a retenu car il prolonge le dispositif de deux ans – seulement –, ce qui paraît une durée raisonnable.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis favorable également à l’amendement 150. Il permettra de faire le point sur des dispositifs divers qui arrivent à échéance à des dates différentes. Je lève le gage.

Les amendements 40 et 99 sont retirés.

L'amendement 150, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre-Alain Muet – Notre amendement 165 vise à relever les seuils d’application du régime fiscal des micro-entreprises, qui n’on pas été révisés depuis 1998 – contrairement à ceux de l’impôt sur le revenu ou de l’ISF. Nous proposons donc une majoration de 5 %, qui reste inférieure à l’inflation.

M. le rapporteur général – La commission n’a pas adopté cet amendement, compte tenu de son coût – plusieurs centaines de millions.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis.

L'amendement 165, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances – Le régime des micro-entreprises est utile et, pour qu’il reste efficace, il faut éviter les sorties brutales. Je propose donc par mon amendement 112 d’autoriser pendant deux ans le franchissement des seuils s’appliquant à ce régime et à la franchise TVA ; cela présente le double avantage de lisser le passage des entreprises en croissance à un régime réel d’imposition et de s’assurer de la pérennité du dépassement des seuils. L’amendement tend également, pendant cette période transitoire de deux années, à appliquer les abattements représentatifs des frais au-delà des seuils de 76 300 et 27 000 euros, dans la limite des seuils de tolérance.

M. Jérôme Chartier – Voilà un excellent amendement !

M. le rapporteur général – C’est en effet un bon amendement, que la commission a adopté même s’il coûte cher – une trentaine de millions : il serait beaucoup trop coûteux de réévaluer les seuils, mais en revanche il est très utile de prévoir une transition entre les deux régimes. Pour des raisons de simplicité, les seuils sont les mêmes pour l’imposition des bénéfices et pour la TVA, mais c’est au titre de la seconde que les pertes de recettes sont les plus importantes – 25 millions.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis favorable, en dépit du coût. Je lève le gage.

M. Michel Bouvard – Très bien !

L'amendement 112, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre-Alain Muet – Notre amendement 206 ne résiste pas à l’argument du coût puisqu’il ne vaut que pour l’avenir : nous proposons que désormais, les seuils évoluent comme celui de la première tranche de l’impôt sur le revenu – soit une indexation sur les prix hors tabac.

M. le rapporteur général – C’est un amendement intéressant, mais nous avons des limites budgétaires… Avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget D’une façon générale, je suis peu favorable aux systèmes d’indexation car il vaut mieux se laisser une marge d’autonomie. Avis défavorable.

L'amendement 206, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Didier Migaud, président de la commission – L’amendement 11 concerne les sociétés coopératives d’intérêt collectif, catégorie d’entreprises coopératives créée par la loi du 17 juillet 2001. Leur activité a un caractère encore moins lucratif du fait des règles auxquelles elles sont soumises, telles l’interdiction de ristourne, l’interdiction d’incorporer des réserves au capital ou celle de créer une réserve de réévaluation. Du fait de cette spécificité, le Parlement avait adopté dans la loi de finances rectificative pour 2001 une disposition tendant à exclure du résultat imposable des SCIC la part des excédents mis en réserves impartageables. Le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition au motif qu’elle avait été introduite après l’échec de la CMP ; nous ne faisons que la reprendre.

M. le rapporteur général La commission a adopté cet amendement.

M. Éric Woerth, ministre du budget– Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, et je lève le gage.

L'amendement 11, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Chartier – Compte tenu des difficultés auxquelles elles sont confrontées, l’amendement 83 vise à renforcer le dispositif du crédit d’impôt en faveur des entreprises de production phonographiques prévu à l’article 220 octies du CGI.

M. le rapporteur général Favorable, mais je ne résiste pas à la tentation de vous présenter le chenil des niches fiscales construites pour ce secteur : la loi de finances pour 2004 a créé un crédit d’impôt pour la production d’œuvres cinématographiques ; quelques mois plus tard, celui-ci a été étendu à la production d’œuvres audiovisuelles ; en 2006, un crédit d’impôt a été créé pour la distribution, et, durant l’été, au profit des œuvres phonographiques… Enfin, dans la loi du 5 mars 2007 – ce qui montre au passage la tendance à égrener des dépenses fiscales dans les textes les plus divers -, un crédit d’impôt a été créé au titre des dépenses exposées en vue de créer des jeux vidéos ! Tout cela est toujours bien étayé, mais est-il raisonnable de multiplier ainsi les crédits d’impôt ? Quoi qu’il en soit, la commission a adopté cet amendement.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Le Gouvernement est favorable à cet amendement, car la mesure proposée s’inscrit dans le droit fil des intentions du Président de la République, lequel a demandé à Mme Albanel, dans sa lettre de mission du 1er août dernier, de lancer sans attendre un plan de sauvegarde de la filière musicale, pour relever notamment les défis de la dématérialisation des supports et de la transition dans un nouveau modèle économique. L’amendement améliore le dispositif existant : il sera notifié à la Commission européenne et je lève le gage.

L'amendement 83, mis aux voix, est adopté.

M. le rapporteur général L’amendement 10, adopté par la commission à l’initiative de M. Martin-Lalande, est important, puisqu’il vise à appliquer – via une modification rédactionnelle de cohérence – les réductions d’impôt sur les sociétés consenties au titre des investissements dans le capital des entreprises de presse, telles que nous les avons adoptées dans la LFI pour 2007.

L'amendement 10, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Benoist Apparu – L’amendement 220 aménage le régime fiscal des groupes de sociétés prévu aux articles 223 A à 223 U du CGI, en vue principalement de faciliter les opérations de restructuration effectuées sous la forme d’une scission partielle. L’assouplissement que nous proposons tend, d’une part, à permettre à la société bénéficiaire des apports de constituer un groupe avec les filiales cédées et, d’autre part, à autoriser la transmission d’une fraction des déficits d’ensemble du groupe cédant au nouveau groupe.

Mme Arlette Grosskost – Très bien !

M. le rapporteur général Favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis – et je lève le gage.

L'amendement 220, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard – L’article 43 de la LFR pour 2005 a autorisé la création d’un consortium pour l’acquisition des contrats d’approvisionnement à long terme en électricité. Or, à ce jour, les appels d’offres lancés auprès des électriciens pour assurer l’installation du consortium et répondre aux enjeux d’approvisionnement des électro-intensives n’ont pas permis d’obtenir les quantités nécessaires. Adopté par la commission, l’amendement 12 rectifié, auquel mon amendement 98 est identique, vise à reporter au 1er janvier 2009 l’échéance initialement prévue, de sorte que les électriciens nouvellement entrés sur le marché puissent répondre à de nouveaux appels d’offres. Dans la mesure où le Gouvernement a favorisé la constitution de grands groupes énergétiques, il convient de garantir la compétitivité d’un secteur très important en termes d’emploi.

M. Éric Woerth, ministre du budget Avis favorable et je lève le gage.

Les amendements 12 rectifié et 98, mis aux voix, sont adoptés.

M. Michel Bouvard – L’amendement 95 vise à rendre éligibles au crédit d’impôt export des PME les dépenses liées aux activités de conseil – technique et juridique – fournies par les opérateurs spécialisés du commerce international.

M. le rapporteur général Favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis, et je lève le gage.

L'amendement 95, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Chartier – L’amendement 149 rectifié proroge de trois ans le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique, plébiscitée par les Français !

M. le rapporteur général Favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis, et je lève le gage.

L'amendement 149 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Lionel Tardy – L’amendement 39 vise à alléger la taxe sur les véhicules de société, qui, comme l’IFA, grève la compétitivité de nos PME.

M. le rapporteur général Défavorable. Nous avons réformé la TVS il y a moins d’un an et sommes parvenus à un point d’équilibre qu’il me semble inopportun de compromettre.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même analyse.

L'amendement 39, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – En vue d’inciter les entreprises à s’équiper en véhicules de société « propres », notre amendement 183 propose d’exonérer de TVS les véhicules propres sans limitation de durée, la mesure adoptée en ce sens en 2006 n’étant valable que pour deux ans.

L'amendement 183, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay – Je défendrai ensemble les amendements 178 et 176, qui visent à conditionner les allégements de charges sociales aux augmentations de salaires obtenues dans le cadre des négociations de branche et à ajouter un allègement d’IS. Ces avantages ont vocation à remplacer les allégements de charges sur les bas salaires, accordés, eux, sans aucune contrepartie.

M. le rapporteur général – La commission a jugé l’idée intéressante, mais n’a pu retenir cet amendement, qui relève de la négociation entre les partenaires sociaux.

M. Éric Woerth, ministre du budget Le Président de la République et le Premier ministre se sont exprimés sur le sujet à plusieurs reprises, et Mme Lagarde et M. Bertrand mènent les négociations avec les partenaires sociaux. Adopter ces amendements serait en orienter les résultats. Je souhaite donc leur retrait.

M. Jean Launay – Je les maintiens, car nous voulons poser les termes du débat sur une véritable conditionnalité.

M. Charles de Courson – Je mets en garde contre les problèmes de rétroactivité que posent de tels amendements. Va-t-on soumettre les exonérations liées aux 35 heures à de nouvelles conditions ? Ce serait déstabilisant. Par ailleurs, on semble supposer que toutes les entreprises partagent une situation prospère leur permettant d’augmenter les salaires dans les mêmes conditions. Il n’en est rien : celle qui se bat avec difficulté sur un marché très compétitif a plus de mérite que celle qui, protégée sur un marché porteur, fait de gros bénéfices. Au niveau microéconomique, il faut donc être prudent avant d’imposer de nouvelles conditions pour l’accès aux aides existantes. Enfin, qui dit conditions dit contrôle de leur application, donc définition de critères objectifs. On ne va tout de même pas créer des jurys qui décideront si les entreprises se comportent bien ou mal !

L'amendement 178, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 176.

ART. 22

M. le rapporteur général – L’amendement 120 est de précision.

L'amendement 120, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 22, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 22

M. André Schneider – Le titre d’ostéopathe est désormais réglementé. Mais les professionnels « exclusifs », qui ne sont ni médecins ni kinésithérapeutes, sont toujours assujettis à la TVA. Notre amendement 43 propose de les en dispenser, comme les autres professionnels de santé en France et en Europe.

M. le rapporteur général – Avis favorable.

M. Éric Woerth, ministre du budget Favorable également.

M. Georges Tron – En tant que cosignataire de cet amendement, je vous en remercie. On touche ici au problème plus général de la reconnaissance des ostéopathes et d’autres professionnels. Leur statut en France est très en retrait sur ce qu’il est ailleurs en Europe.

M. Charles de Courson – Outre les ostéopathes, n’y a-t-il pas d’autres professions concernées, ainsi que M. Tron le suggère ? Et le Gouvernement est-il prêt à étendre le dispositif à ces autres professions pour éviter les disparités ?

M. Éric Woerth, ministre du budget Actuellement les actes d’ostéopathie sont exonérés de TVA s’ils sont pratiqués par des médecins. Il semble normal de les exonérer s’ils le sont par les ostéopathes exclusifs. Mais c’est le seul cas que nous a signalé le ministère de la santé.

M. Charles de Courson – Il y a les magnétiseurs…

M. Éric Woerth, ministre du budget Pouvez-vous témoigner de leur efficacité ? ((Sourires) Pour l’instant, nous nous en tiendrons aux ostéopathes.

L'amendement 43, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Proriol – Pâtes de fruits et fruits confits sont soumis à une TVA plus élevée que les produits alimentaires en général. Notre amendement 63 ramène cette TVA à 5,5 % pour ces produits. La perte de recettes ne serait que de 17 millions, mais la mesure serait très favorable aux petits producteurs.

M. le rapporteur général – Avis défavorable. Il y a deux ans, nous avons déjà fait une exception à la doctrine pour les chocolats, à l’initiative également de M. Giscard d’Estaing.

M. Jean-Louis Dumont – Pour certains chocolats seulement !

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis.

L'amendement 64, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson – Les dépenses funéraires sont soumises à une TVA à de 19,6 %, seuls les transports par véhicules funéraires étant assujettis à une TVA de 5,5 %.

En application de la sixième directive européenne du 17 mai 1977, qui stipule que les services et produits fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation peuvent bénéficier d'un taux réduit de TVA, la plupart des pays membres de l'Union Européenne n'appliquent pas de TVA sur le funéraire ou appliquent un taux réduit. Cette situation entraîne des distorsions de concurrence dans les zones frontalières.

Bruxelles vient d’enjoindre à la France de se mettre en conformité avec ses voisins européens en pratiquant un taux de TVA de 5,5% et non plus 19,6%, dans un délai de deux mois. Elle relève que l’absence de taux unique est contraire à la jurisprudence européenne relative à la notion de prestation complexe unique. Notre amendement 255 est nécessaire pour permettre à la France de se mettre en règle dans le délai imparti, même s’il aurait davantage trouvé sa place en loi de finances. La diminution de recettes serait de 145 millions mais se traduirait, pour chaque famille concernée, par un gain de 300 euros. Les professionnels s'engagent en effet à répercuter cette baisse de TVA sur les prix dans le cadre de leur mission de service public.

M. le rapporteur général – Année après année, la commission renonce à émettre un avis favorable, car c’est un amendement à 150 millions…

M. Éric Woerth, ministre du budget C’est même un amendement à 180 millions ! Seuls les transports des corps par des entreprises agréées sont soumis à une TVA à 5,5 %.

M. Charles de Courson – Je ne suis pas du genre à vouloir charger la barque, on le sait. Mais la Commission a donné à la France un délai de deux mois pour se mettre en règle. Va-t-on encore attendre d’être à la veille d’une condamnation ? Je veux bien retirer l’amendement si l’on m’explique comment on va régler ce contentieux.

M. Éric Woerth, ministre du budget La Commission a demandé une harmonisation pour tous les produits et services, dont une partie est taxée à 19,6 % et une autre à 5,5 %. Le Gouvernement conteste cette approche car il s’agit d’activités bien distinctes et identifiables.

L’amendement 255 est retiré.

M. Benoist Apparu – Notre amendement supprime un formalisme excessif dans les contrôles d’exonération de TVA.

M. le rapporteur général La commission est favorable à cette simplification.

M. Éric Woerth, ministre du budget Même avis. Précisons tout de même que les entreprises ne sont pas dispensées de respecter la réglementation économique : elles doivent pouvoir justifier de leur comptabilité.

L'amendement 223, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Chartier – L’amendement 158, que j’ai cosigné avec MM. Cahuzac et Diefenbacher, est consensuel. Il reprend le problème, déjà posé à plusieurs reprises, de la taxation des huiles végétales pures. Peut-on envisager une solution eurocompatible ?

M. le rapporteur général La commission aurait accepté avec plaisir un amendement aussi consensuel mais, hélas, il n’est justement pas eurocompatible. La TVA réduite ne s’applique qu’aux huiles végétales pures à usage alimentaire. Ce n’est naturellement pas le cas lorsqu’elles permettent de faire rouler un autobus…

M. Éric Woerth, ministre du budget En effet. J’ajoute que, d’une manière générale, les biocarburants sont soumis au taux de TVA normal. Je vous suggère donc de retirer l’amendement.

M. Jérôme Chartier – Je le retire, tout en vous demandant de défendre auprès de l’Union européenne la réduction de ce taux pour les huiles végétales pures. Je rappelle en effet que leur utilisation dans le carburant des autobus ne concerne pour l’instant qu’une seule ville en France.

L'amendement 158 est retiré.

M. Éric Woerth, ministre du budget La pêche est essentielle à notre économie, à notre alimentation, à l’identité de nos territoires. Elle est aujourd’hui confrontée à la réduction de la ressource halieutique, à la mondialisation du marché, mais aussi à un défi social : c’est une activité dangereuse qui coûte chaque année la vie à un marin pêcheur sur mille. Leur rémunération, de surcroît, est fortement affectée par la hausse des prix pétroliers.

Suite aux propositions faites par le Président de la République lors de sa visite au Guilvinec, et en concertation avec les professionnels, nous vous proposons par l’amendement 289 d’instaurer une éco-contribution pour la pêche durable. Fixée à 2,6 %, elle portera sur les mareyeurs – hors conchyliculture. Elle permettra de maintenir notre capacité de production tout en réduisant la dépendance des entreprises au gazole et en renforçant notre effort en matière de rémunération des marins pêcheurs.

M. le rapporteur général La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je crois comme le ministre qu’il faut renforcer le secteur de la pêche. Vous nous proposez pour cela une « éco-contribution ». Appelons-la par son nom : c’est une taxe.

M. Jean-Louis Dumont – Une nouvelle taxe !

M. le rapporteur général Chez nos voisins européens, c’est plus souvent le secteur de la distribution qui est mis à contribution. Il est vrai que la profession de marin pêcheur y est beaucoup plus structurée qu’en France. La commission a rejeté hier un amendement imposant une taxe reposant sur le dernier maillon de la chaîne, c’est-à-dire le poissonnier. Vous proposez désormais de l’imposer en amont, c’est-à-dire aux mareyeurs ou aux centrales d’achat. Pourquoi pas, pourvu qu’elle soit temporaire ? À terme, en effet, la seule démarche efficace sera d’organiser davantage la filière afin d’internaliser les questions de financement.

M. Antoine Herth – Comme mon collègue Gilles d’Ettore, rapporteur pour avis du budget de la pêche, je soutiens l’amendement du Gouvernement. Certes, Monsieur le rapporteur général, il faut organiser une filière sinistrée, mais il faut aussi agir au plus vite afin de réduire l’insécurité du métier en modernisant le parc de bateaux. J’ajoute qu’il ne faut pas négliger le caractère écologique de cette taxe : la profession est en effet soumise à une lourde réglementation européenne dans un contexte de réduction de la ressource halieutique. Cette mesure ne règlera pas tous les problèmes, mais elle constitue un premier élan nécessaire.

M. Charles de Courson – La commission n’ayant pas examiné l’amendement, j’ai plusieurs questions à poser au ministre. Cette mesure est-elle eurocompatible ? Le taux de 2,6 % de pose-t-il pas un risque de contentieux ? Est-elle par ailleurs compatible avec nos engagements auprès de l’OMC, en matière d’importations notamment ? Concerne-t-elle la production piscicole ? Enfin, quelle sera sa répercussion sur les prix à la consommation, déjà en hausse constante compte tenu de la raréfaction de la ressource ?

M. Jean Launay – Contrairement à ce que certains ont affirmé, nous avons déjà débattu en commission de cet amendement, puisqu’il s’apparente à l’amendement dit « Couanau » – bien que son auteur supposé ait déclaré en commission qu’on lui avait attribué à son corps défendant ce texte qu’il juge mal rédigé. Que la taxe pèse sur la première ou sur la dernière livraison, cela revient au même.

Le Gouvernement propose en fait une mesure de simple affichage, élaborée dans la précipitation à la suite du déplacement du Président de la République en Bretagne et invoque le prétexte environnemental pour masquer son incapacité à accorder aux pêcheurs - dont les difficultés sont indéniables - des aides directes, puisque les caisses sont vides !

Vous prétendez ainsi vous faire les défenseurs de la pêche, mais nous, nous défendrons le pouvoir d’achat des Français, en particulier celui des plus modestes, menacé par une « écotaxe » qui ne pourra qu’entraîner, à terme, une hausse des prix, déjà très élevés, du poisson.

Enfin, la taxe risque d’être incompatible avec une législation européenne que vous invoquez pourtant volontiers.

M. Hervé Mariton – L’excellente initiative du Gouvernement est justifiée par la mauvaise organisation de la filière, qu’a rappelée le rapporteur général, et par les problèmes sociaux qu’elle entraîne et qu’a notamment soulignés M. Herth. Mais donner à cet impôt le nom d’ « écotaxe » serait rendre un très mauvais service au beau principe de la fiscalité écologique. L’écologie ne doit pas servir de prétexte à l’augmentation de la fiscalité !

M. le Rapporteur général – Très bien !

M. Hervé Mariton – En outre, certains amendements précédemment examinés visaient à limiter la taxation des confiseries : en somme, dans une France qui doit, comme le reste du monde, lutter contre l’obésité en favorisant une alimentation équilibrée, on augmenterait le prix du poisson, mais on baisserait celui des bonbons…

M. Michel Raison – L’écotaxe proposée est-elle bien une taxe affectée, ce que la rédaction du texte ne dit pas clairement ? Quoi qu’il en soit, si noble que soit l’objectif de contribution à une pêche durable, je suis d’accord avec le rapporteur général : ne l’inscrivons pas dans le marbre. D’autre part, le partenaire figurant sur la facture n’est pas le même dans l’amendement du Gouvernement et dans celui dont la commission a débattu. Enfin, j’espère que les distributeurs ne profiteront pas de la mesure pour exiger du fournisseur qu’il baisse ses prix de 2,6 %, cela dût-il bénéficier au consommateur.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances En répondant à un problème par une taxe – quel manque d’imagination en même temps que de cohérence avec son propre discours –, le Gouvernement tombe sous le coup du reproche qu’il adresse régulièrement, comme la majorité, à ses contradicteurs. En outre, si le ministre a raison de souligner les difficultés de la filière, s’exposer au risque d’augmentation du prix du poisson permettra-t-il d’aider les marins pêcheurs ? Et pourquoi, d’ailleurs, s’arrêter aux poissons et aux mollusques ? Pourquoi ne pas taxer d’autres produits encore ?

D’autre part, je rejoins M. Mariton sur un point : comment osez-vous parler d’écotaxe ? Est-ce pour être dans l’air du temps que vous ajoutez ce préfixe, vous qui venez de décider – pour des raisons certes compréhensibles – d’exonérer de taxes les carburants ?

Le ministre prétend que cet amendement est le fruit d’un long travail, mais la commission n’y a guère été associée, comme en témoigne le mécontentement de ses membres lors de l’examen de l’amendement dit « Couanau ». Certes, ce dernier a été réécrit et l’assiette de la taxe modifiée, mais la mesure reste conjoncturelle, imposée par le plan d’urgence voulu par le Gouvernement. Par ailleurs, je partage les doutes déjà exprimés sur son eurocompatibilité. Enfin, on ne nous a rien dit du produit attendu de cette taxe.

Si ces arguments n’auront sans doute aucune influence sur le vote, puisqu’on a fait en sorte au cours de la nuit que ce qui était inacceptable hier soir le devienne ce matin, les réserves exprimées par les membres de la commission des finances demeurent.

M. Éric Woerth, ministre du budget – Le terme choisi importe peu : il s’agit d’une taxe, qui s’applique à la première livraison…

M. Antoine Herth – Tout à fait !

M. Jérôme Chartier – C’est très important !

M. Éric Woerth, ministre du budget …et qui n’est pas soumise à la directive communautaire sur la TVA, Monsieur de Courson, puisqu’elle ne s’applique qu’une fois, de même que d’autres formes de taxation limitée au moment de la transaction dans le système fiscal français. Elle n’est pas donc pas euro-incompatible. Nos engagements internationaux ne sont pas non plus en cause, puisque poissons importés et poissons français seront également taxés. D’autre part, la taxe s’applique à la pisciculture en milieu marin, mais non en eau douce.

Monsieur Launay, je doute que la mesure entraîne une augmentation du prix du poisson.

M. Jean Launay – Croyez-vous vraiment que les intermédiaires s’abstiendront de la répercuter ?

M. Éric Woerth, ministre du budget – Ils puiseront dans leurs marges ! La taxe sera absorbée par l’ensemble de la filière, c’est-à-dire par le système de distribution lui-même.

J’ajoute, Monsieur Migaud, que le terme d’ « écotaxe » ne figure pas dans le texte, mais seulement dans l’exposé sommaire…

M. Didier Migaud, président de la commission Qui n’a pas vocation à être « durable » !…

M. Éric Woerth, ministre du budget – Peu importe : l’essentiel est de préserver la durabilité non seulement des ressources, mais aussi de la filière, car sans pêcheurs, plus de poisson pour le consommateur, alors que ce produit contribue à une alimentation saine. Je souligne, à ce propos, que l’Assemblée a refusé de réduire le taux de TVA sur les pâtes de fruits !

Enfin, le produit de la taxe devrait s’élever à 70 à 80 millions.

M. Jean Launay – L’expérience le montre : à terme, les intermédiaires répercuteront bien la taxe sur le prix, dont l’augmentation pèsera sur le consommateur. Comme l’a souligné M. Raison, les conséquences de la mesure sur la filière n’ont pas été évaluées. Nous demandons une suspension de séance pour remédier à cette lacune.

M. Jérôme Chartier – Sage décision !

Les parlementaires de l’UMP sont très sensibles à la question du pouvoir d’achat des Français.

M. Jean Launay – Les parlementaires socialistes aussi !

M. Jérôme Chartier – C’est pourquoi l’amendement – de provenance inconnue (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) – qui consistait à faire payer la taxe directement par le consommateur a été repoussé en commission. Nous avons donc travaillé avec le Gouvernement pour élaborer un nouveau texte, qui fait porter la taxe sur la première livraison. Cela permet de soutenir la pêche française sans favoriser les importations ni porter atteinte au pouvoir d’achat.

L'amendement 289, mis aux voix, est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 20.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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