Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques de la session > Compte rendu analytique de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire

Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 8 janvier 2008

1ère séance
Séance de 9 h 30
92ème séance de la session
Présidence de M. Marc Le Fur, Vice-Président

Consulter le sommaire

La séance est ouverte à neuf heures trente.

MISSIONS TEMPORAIRES DE DÉPUTÉS

M. le Président – M. le Président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre une lettre l’informant de sa décision de charger M. Etienne Pinte, député des Yvelines, d’une mission temporaire auprès de Mme la ministre du logement et de la ville et de M. le Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, et M. Yves Fromion, député du Cher, d’une mission temporaire auprès de M. le ministre de la défense.

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

L'ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

PERSPECTIVES DE LA BASE AÉRONAUTIQUE NAVALE DE NÎMES-GARONS

M. Étienne Mourrut – Monsieur le Président, en cette première séance de l’année, permettez-moi de vous présenter mes meilleurs vœux, ainsi qu’à M. le ministre, à tous les personnels de l’Assemblée et à tous ceux qui nous écoutent.

M. le Président – Soyez-en remercié !

M. Étienne Mourrut – Idéalement située dans le bassin méditerranéen, la base aéronavale de Nîmes-Garons est parfaitement intégrée dans le tissu économique gardois et participe activement à son développement. Sa situation géographique lui procure une réactivité et une disponibilité immédiates en Méditerranée, théâtre de nombreuses menaces.

Les missions opérationnelles de cette base, dont les instruments de contrôle, les hangars et les outils industriels sont particulièrement performants, sont de surveiller la Méditerranée et de servir de base de repli pour le groupe embarqué de notre porte-avion, ainsi que de base de déroutement pour la base d’Istres.

Ses atouts indéniables devraient conforter le bien-fondé de l’existence de la base de Nîmes-Garons. Les 1 500 personnels concernés sont pourtant inquiets : ils s’interrogent sur son maintien et sur l’avenir professionnel des personnels civils de défense. Il semble en effet que le plan de charge de travail de la base soit en voie de diminution notamment du fait de la réforme touchant les Nord 262 et de la suppression de la maintenance.

Dans ces conditions, ne pourrait-on envisager de nouvelles activités, telles que la maintenance des aéronefs de la sécurité civile, des autres armes ou des autres ministères ? Comment le Gouvernement entend-il répondre aux craintes grandissantes des personnels de la base aéronavale de Nîmes-Garons, qui redoutent la fermeture de cet outil nécessaire à notre appareil de défense ?

M. Hervé Morin, ministre de la défense  Permettez-moi également de vous souhaiter une très bonne année, ainsi qu’à tous vos collègues et à l’ensemble des personnels de l’Assemblée.

Nous nous sommes engagés dans un vaste mouvement de réforme de l’administration centrale du ministère, qui consiste à « interarmiser » le soutien et à supprimer des doublons afin d’obtenir un meilleur rapport entre forces opérationnelles, soutien aux forces et administration générale.

Autre chantier en cours : celui du Livre blanc, qui nous permettra de disposer à la fin du mois de mars d’une nouvelle analyse géostratégique, portant sur les enjeux, les risques et les menaces au cours des décennies à venir, ainsi que sur l’évolution de nos alliances. Il en découlera un nouveau format des armées et de nos capacités.

Dans le cadre de ces travaux, nous serons conduits à rationaliser les implantations de la défense, mais je serais bien incapable de préciser dès aujourd’hui quelles en seront les conséquences pour telle ou telle unité, qu’il s’agisse de Nîmes-Garons ou d’autres. Soyez toutefois assuré qu’il n’est pas envisagé de fermer cette base à l’heure actuelle.

Nous réfléchissons à une nouvelle organisation du ministère sur le principe des bases de défense, qui regrouperont les activités dans un même bassin de vie. Puisque vous évoquiez un renforcement de l’activité de la base par des opérations de maintenance au profit des autres armées, nous souhaitons effectivement que les fonctions de soutien et d’administration générale ne dépendent plus de la couleur de l’uniforme, mais soient désormais interarmisées. Nous ferons ainsi des économies de fonctionnement et nous gagnerons en efficacité.

C’est à l’issue de tous ces travaux que nous redessinerons le paysage territorial de nos unités ; il n’y a pas d’inquiétude à avoir, pour le moment, sur l’avenir de cette base à laquelle vous tenez tant.

DÉPOLLUTION DU SITE DE L’ANCIEN ETAMAT D’AUBIGNÉ-RACAN (SARTHE)

Mme Béatrice Pavy – Ma question porte sur le retard pris dans la procédure de dépollution de I’ancien Etamat situé a Aubigné-Racan. Hormis la procédure relative au protocole de cession du foncier, le syndicat de développement économique du Sud-Sarthe, le SDESS, qui s’est porté acquéreur de ce site, n’a eu communication d’aucun document écrit concernant le calendrier de l'opération.

Les seules informations dont nous disposons sont de nature verbale, et proviennent de l'établissement du Génie d'Angers, qui avait annoncé que la notification du marché de démolition aurait lieu en février 2007 et le début des opérations au mois de juin. Or, la date de démarrage du chantier n'a cessé de reculer : elle serait désormais fixée à janvier 2008, mais nous n’en avons eu aucune confirmation.

Ce retard serait dû aux procédures de mise en place d'un périmètre de sécurité à l'occasion de l'opération de dépollution pyrotechnique. Un tel périmètre est fort préjudiciable pour les entreprises installées dans les zones acquises en première tranche, et pourrait entraîner des perturbations dans le fonctionnement même du SDESS, dont les bureaux devraient être très prochainement installés dans les anciens bureaux de commandement.

Aussi souhaiterais-je des précisions sur le calendrier de dépollution et de démolition. Pouvez-vous également nous dire si l’accès aux bâtiments et aux terrains de la « zone de vie », dépollués en 2006, sera affecté par le périmètre de sécurité ? Le SDESS, que je préside, a besoin de ces informations pour répondre de façon formelle aux demandes d'installation des entreprises, et définir un calendrier précis d'acquisition par tranches, conformément au protocole d'accord signé avec la mission pour la réalisation des actifs immobiliers pour l'aménagement de ce site.

M. Hervé Morin, ministre de la défense  D’une superficie de 165 hectares, l’Etamat d’Aubigné-Racan fait actuellement l’objet d’une procédure d’aliénation par fractions au profit du syndicat de développement économique du Sud-Sarthe, que vous présidez. Une première fraction de l’emprise a été dépolluée en urgence par les services de la sécurité civile pour que le syndicat puisse commencer à l’occuper dès le 20 décembre 2006 grâce à une autorisation temporaire d’occupation.

En dehors des cas d’urgence, je rappelle que les chantiers de dépollution pyrotechnique sont encadrés par des règles extrêmement strictes, qui imposent une étude de sécurité pyrotechnique avant toute intervention. Le marché de dépollution de la seconde fraction a été notifié le 28 décembre 2006, mais les travaux ont été temporairement retardés en raison de l’avis négatif émis par l’inspecteur des poudres et explosifs au vu d’une première version de l’étude de sécurité pyrotechnique.

Un avis favorable a finalement été obtenu le 5 décembre 2007 et l’approbation finale de l’étude par le contrôle général des armées devrait avoir lieu très prochainement, ce qui permettra de lancer l’opération de dépollution au cours du premier trimestre 2008, et ainsi de maintenir la date de livraison du site, prévue pour le premier semestre 2009.

La fraction de l’emprise actuellement occupée par le SDESS sera affectée par le périmètre de sécurité nécessaire à la réalisation des travaux de dépollution de la seconde fraction. Le syndicat pourrait subir de façon ponctuelle des évacuations pour raisons de sécurité au cours de ces travaux. Si vous le souhaitez, je suis prêt à vous rencontrer, en compagnie des services du ministère, pour étudier avec vous la meilleure façon de concilier les impératifs de sécurité, les travaux de dépollution et le développement de votre activité sur le site.

La séance, suspendue à 9 heures 40, est reprise à 9 heures 45.

PERSPECTIVES DU FRET SNCF EN LANGUEDOC-ROUSSILLON

M. Jacques Bascou – Le dernier plan fret SNCF a de graves conséquences tant sur le plan économique que sur le plan environnemental, en particulier dans l’Aude et l’Hérault. Dans le seul secteur de Narbonne-Béziers, 19 entreprises représentant 2 000 emplois et utilisant 9 000 wagons par an ont été mises devant le fait accompli par la SNCF : fin août, celle-ci a informé ces clients en « wagons isolés » qu’à partir du 1er décembre, elle n’assurerait plus que les trafics par trains entiers. Les nouvelles conditions techniques et tarifaires proposées, que les entreprises ont dû se battre pour obtenir, mettent en péril leur avenir. La forte mobilisation régionale a permis d’obtenir un sursis d’un mois, mais en ce début d’année l’incertitude est grande. Il paraît impensable de faire circuler 27 000 camions supplémentaires dans une région où le réseau routier est déjà saturé. Au demeurant, ce mode de transport est interdit pour plusieurs des entreprises concernées, qui sont classées « Seveso ».

Depuis septembre, ces entreprises, soutenues par les CCI de Narbonne et de Béziers, demandent à la SNCF de leur accorder un moratoire de quelques mois, dans l’attente d’une solution alternative réaliste par le rail – qui pourrait être un opérateur ferroviaire de proximité. Le Gouvernement est-il bien conscient que l’abandon brutal du service de wagons isolés va s’accompagner de la suppression de plusieurs milliers d’emplois de cheminots et de 262 gares de marchandises dans l’ensemble du pays, qu’il menace la pérennité de nombreuses entreprises et qu’il ne tient aucun compte des objectifs du Grenelle de l’environnement ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – La SNCF a en effet décidé de « déréférencer » 262 gares pour le trafic de marchandises en wagons isolés, dans le cadre de son programme de modernisation et d’amélioration de son efficacité, lequel vise notamment à mieux allouer ses moyens afin de reconquérir des parts de marché sur les segments où elle est performante, c’est-à-dire sur les grands axes de fret. En effet ce trafic en wagons isolés, qui ne représente que 20 % de celui qui transite par les gares concernées et seulement 2,5 % des wagons de fret SNCF, générait des coûts trop élevés.

Nous avons néanmoins demandé que toutes les mesures soient prises pour répondre cas par cas aux besoins des clients, en étroite concertation avec les collectivités. Plusieurs pistes sont étudiées par la SNCF : massification – pour constituer des trains entiers –, reconfiguration des dessertes en termes de fréquences et de conditions tarifaires, transport combiné rail-route et desserte terminale routière. La réorganisation en cours de l’activité fret fait l’objet d’une négociation sociale approfondie. Elle pourrait entraîner des redéploiements de postes ; la SNCF ne procédera à aucun licenciement et s’attachera à proposer en priorité des solutions sur le même bassin d’emplois.

En Languedoc-Roussillon, sur les 36 gares concernées, 24 n’ont réalisé aucun trafic « wagons isolés » en 2006, 3 ont traité entre 0 et 3 wagons par mois. Les discussions entamées l’été dernier entre la SNCF et ses clients ont bien souvent permis de trouver des solutions techniques. Elles se poursuivent sur les aspects économiques et tarifaires. Par ailleurs, nous encourageons le développement d’opérateurs de proximité, dont les exemples étrangers montrent l’efficacité pour ce type de trafics, et pour lesquels les acteurs économiques du Languedoc-Roussillon ont exprimé leur intérêt en créant l’association Profer.

M. Jacques Bascou – Je me fais le porte-parole de cette association en demandant un moratoire car la réorganisation demande du temps, et la pérennité de certaines entreprises, telle les Ateliers d’Occitanie à Narbonne, qui compte 150 salariés, est en cause. J’insiste pour que l’on prenne en compte l’intérêt des entreprises, même si M. Novelli m’a déclaré que ce n’était pas de sa compétence…

LIAISON AUTOROUTIÈRE CASTRES-TOULOUSE

M. Bernard Carayon – J’appelle l’attention du Gouvernement sur le projet de mise en concession de la liaison autoroutière Castres-Toulouse, promise par les pouvoirs publics et attendue par les Tarnais du sud depuis une trentaine d’années, et soutenue tant par les élus nationaux et régionaux du département que par ceux du conseil général, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, ainsi que par l’ensemble des communautés de communes, pays et agglomérations et par les élus consulaires.

Ce projet répond à une exigence de sécurité routière, dans un département qui hélas bat des records en termes d’accidents routiers. Il répond aussi aux besoins exprimés de longue date par les entreprises d’un bassin de près de 120 000 habitants, le seul de France à ne pas être relié à la capitale régionale par une autoroute ou une voie à grande circulation. C’est donc un projet vital.

La question de son opportunité ne se pose plus et nous ne pouvons plus attendre. Nous ne saurions accepter qu’il soit encore différé, voire annulé, sous la pression d’associations dont la maigreur des effectifs contraste avec l’activisme. Loin d’être en contradiction avec les conclusions du Grenelle de l’environnement, il s’inscrit bien au contraire dans une perspective de développement durable et de développement harmonieux du territoire.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – Les conclusions de la première phase du Grenelle de l’environnement ont vocation à être concrétisées et déclinées, notamment en matière d’infrastructures. Dans le secteur routier, une nouvelle politique de développement va être définie ; les projets les plus importants seront donc réévalués dans les mois qui viennent, afin de vérifier leur adéquation aux objectifs fixés.

Le projet de liaison autoroutière entre Castres et Toulouse fera vraisemblablement l’objet de cette réévaluation. Actuellement, il est dans la phase de concertation publique. Un dossier est d’ailleurs à la disposition du public dans les mairies concernées jusqu’à la fin du mois et des réunions publiques sont prévues. Les résultats de cette concertation ainsi que les considérations de sécurité routière et de développement économique éclaireront les décisions du Gouvernement.

M. Bernard Carayon – Je suis persuadé que cet éclairage confortera ce projet auquel, je le répète, ne s’opposent que des associations activistes aux maigres effectifs. Nous ne laisserons pas passer cette chance pour l’avenir de la région.

POLLUTIONS CAUSÉES PAR LES NAVIRES

M. Éric Ciotti – La pollution de plus en plus importante due aux navires, dans les ports et en mer, est la cause de dommages considérables à l'environnement et de désagréments importants pour les riverains et les commerces de proximité. Elle résulte de pratiques telles que le dégazage ou le déballastage, mais aussi de l’augmentation du nombre des moteurs anciens et des navires poubelles. Il est donc urgent d’améliorer notre réglementation, ainsi que de transposer la directive du 7 août 2005 qui permet d’infliger des sanctions à toute personne – capitaine, propriétaire, affréteur, société de classification – reconnue comme étant à l’origine d’une pollution. La Commission européenne nous a d’ailleurs déjà adressé un avis motivé à ce sujet.

Les navires, surtout ceux de grande taille, sont des sources importantes de pollution atmosphérique. Le port de Nice, qui accueille de nombreux navires de croisière, en souffre beaucoup et les riverains de ce port historique, situé en plein cœur de la ville, ne supportent plus ses effets. Les navires y rejettent des gaz très polluants qui provoquent, entre autres, des pluies acides, la diminution de l'oxygène dans les eaux côtières, une dégradation de la couche d'ozone et une accumulation de métaux lourds et entraînent des problèmes de santé lourds pour la population. Malgré l’entrée en vigueur de l'annexe VI de la convention MARPOL, la situation reste préoccupante. Par quelles mesures comptez-vous renforcer notre réglementation contre la pollution de l'air par les navires ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – Je sais que vous êtes très sensible à la pollution du port de Nice. Je tiens d’abord à vous rassurer à propos de la transposition de la directive de 2005 : de nombreuses dispositions de notre code de l’environnement, issues en particulier de la loi du 9 mars 2004, répondent déjà à une grande partie de ses exigences, s’agissant par exemple du dispositif répressif ou des prescriptions concernant la surveillance des rejets illicites des navires et l’inspection des navires soupçonnés, qui sont précisées par un arrêté du 27 avril 2007. Un groupe de travail interministériel a été chargé de préparer le projet de loi concernant les dispositions restant à transposer, mais ce travail s’est révélé très complexe, ce qui explique en partie le retard qui a été pris. Quoi qu’il en soit, les aménagements nécessaires interviendront dans les tous prochains mois.

En ce qui concerne la pollution de l’air, l’annexe VI à la convention MARPOL a été complétée par une directive de 2005, en vigueur depuis le 11 août 2006, qui impose des limitations de la teneur en soufre des combustibles marins et durcit la convention MARPOL pour les navires à passagers effectuant des liaisons régulières. Mais des progrès restent à accomplir. La France participe aux travaux engagés dans ce but au sein de l’Organisation maritime internationale, qui devraient aboutir courant 2008. Il est envisagé d’interdire aux navires d’utiliser leur moteur lors de leurs escales, ce qui les obligerait à avoir recours au réseau électrique des ports. Les normes techniques restent à établir mais la France est favorable à cette disposition, sachant qu’il appartiendra à chaque port de se doter des équipements nécessaires. Enfin, deux règlements européens de 2000 et de 2006 limitent l’emploi de gaz dans les installations frigorigènes ou d’incendie. Des efforts considérables ont donc été engagés pour réduire les pollutions atmosphériques des navires et la France est très active sur ce sujet, au niveau national comme international.

M. Éric Ciotti – Merci de cette réponse très intéressante, qui démontre la volonté du Gouvernement de renforcer les dispositifs existants. L’éventualité de l’interdiction de l’utilisation des moteurs dans les ports est particulièrement bienvenue, et j’espère, dans l’intérêt des riverains, que cette disposition sera prise dans les meilleurs délais.

RÉFORME DU CODE DE L’UBANISME

M. Frédéric Reiss – Après quelques semaines de mise en application de la réforme du code de l'urbanisme, les maires sont confrontés à de sérieuses difficultés. Dans ma circonscription, je suis saisi par de nombreux élus locaux, mais aussi par des concitoyens excédés par les complications administratives. La double transmission au préfet qui est imposée après le dépôt de la demande et à son terme, les frais postaux et de gestion induits, la multiplication des pièces à fournir, le manque de lisibilité du formulaire de déclaration préalable ne semblent pas s’imposer dans le cas de projets d'aménagement simples. Ainsi, outre un nouveau formulaire de neuf pages, pas moins de cinq pièces sont nécessaires pour une demande de modification d'une terrasse existante – et deux pièces supplémentaires en périmètre « Architecte des bâtiments de France ». Les documents exigés excèdent de beaucoup les compétences moyennes en matière de droit de l'urbanisme et de connaissances techniques. Les interruptions de procédure, motivées par des dossiers incomplets, se multiplient donc, ce qui va à l'encontre de l'esprit de la réforme. Pour garantir un service public de qualité, les maires sont donc conduits à prendre des mesures en matière de conseil aux pétitionnaires, en mobilisant les moyens correspondants. Le risque de voir se réaliser des projets sans demande préalable augmente, et avec lui la nécessité de multiplier les contrôles. N’est-il pas possible de parvenir à une réelle simplification des procédures ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – La réforme des autorisations d‘urbanisme ne constitue qu’une première étape dans la clarification du code de l’urbanisme. Elle vise pour l’essentiel à renforcer la sécurité juridique des procédures. Elle n’introduit aucune transmission supplémentaire au préfet, même si l’on peut regretter qu’elle n’aille pas assez loin dans la simplification. Elle évite surtout que de nombreuses pièces complémentaires puissent être demandées, ce qui prolongeait indéfiniment l’instruction des permis de construire.

Lorsque le maire est compétent au nom de la commune pour délivrer des autorisations d’urbanisme, celles-ci doivent, comme auparavant, être transmises au préfet pour être exécutoires. Toutes les autorisations sont soumises à cette formalité. Les demandes d’autorisation et les déclarations doivent aussi être transmises au préfet, tout comme les décisions expresses prises à leur sujet, ce qui était également le cas avant la réforme. Quant aux frais postaux, l’envoi en lettre simple suffit entre administrations. Surtout, la réforme précise la liste exhaustive des pièces qui peuvent être demandées et sécurise les délais. Le contenu même des pièces a fait l’objet de précisions et d’explications qui faisaient auparavant défaut – c’est la raison pour laquelle la notice peut paraître un peu longue. La constitution du dossier par les particuliers en est plutôt facilitée. Les effets de sécurisation et de simplification de cette réforme seront prolongés plus tard. Sa mise en place est certes un peu compliquée du fait des changements des pratiques administratives qu’elle induit, mais l’objectif est légitime.

M. Frédéric Reiss – Il fallait certes réduire les risques de contestation juridique, et cet objectif n’est pas remis en cause, mais il suffit d’assister à une séance d‘information en direction des responsables des communes pour comprendre que la DDE a le chic pour complexifier les choses ! Certes, selon la formule consacrée, simplifier est chose complexe, mais nous avons besoin d’instructions claires. Or, un citoyen ordinaire est tout à fait incapable de fournir les pièces qui lui sont demandées.

NUISANCES SONORES DES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES

M. François de Rugy – Ce début d’année me permet de formuler des vœux pour chacun, et surtout celui que les promesses du Grenelle de l'environnement ne restent pas des vœux pieux.

Ma question porte sur le bruit, induit par le trafic routier, que subissent un très grand nombre de nos concitoyens, en ville bien sûr, mais aussi à la campagne. C’est notamment le cas dans ma commune, Orvault, cernée par de grandes infrastructures routières appartenant au réseau national et dont l’État est donc l’unique responsable. Les Orvaltais et de nombreux Nantais souffrent de ce bruit continu. Il faut préciser que, comme c’est souvent le cas, les habitations ont été construites bien avant ces routes à deux fois deux voies. Il est scandaleux que des dispositifs anti-bruit n’aient pas été conçus dès la planification de ces infrastructures, et l’on peut même regretter qu’au contraire de ce qui a été fait pour la ligne de chemin de fer qui traverse Nantes, ces voies routières à grande circulation n’aient pas été enterrées dans les quartiers les plus densément peuplés. Pour le bruit routier, le seuil de gêne est fixé à 65 décibels, mais le calcul est fait sur la moyenne des niveaux de bruit mesurés pendant 24 heures, jour et nuit confondus. Il en résulte que les pics sonores ne sont pas pris en compte. De plus, il est très difficile d’obtenir des DDE qu’ils procèdent à des mesures de bruit et, quand on l’obtient, de se les faire communiquer. Voilà qui me semble en contradiction flagrante avec les conclusions du Grenelle de l’environnement et avec les déclarations du Président de la République qui disait appeler de ses vœux un droit à la parfaite transparence des informations en matière environnementale.

À Orvault, de nouveaux murs anti-bruit ont été construits récemment dans le quartier du Bois-Raguenet mais, à notre grande surprise, ils sont à peine plus hauts que les précédents et, surtout, ils sont bien trop courts pour être efficaces – et les autres sites ont été oubliés. L’argument, classique, qui nous est opposé est celui du coût de telles réalisations ; c’est ignorer les dommages pour la santé des conséquences de l’exposition continue au bruit, maintenant reconnus comme considérables. Pour mieux protéger nos concitoyens de cette souffrance, la législation devrait donc changer. Il conviendrait de modifier les seuils de gêne en tenant compte des pics sonores et de leur durée ; d’obliger l’État, les départements et les concessionnaires autoroutiers à réaliser des protections phoniques avant de procéder à tout nouvel aménagement routier ; de financer ces travaux par un prélèvement sur le produit de la taxe sur les poids lourds dont le principe a été retenu au terme du Grenelle de l’environnement. Êtes-vous prête, Madame la ministre, à aller dans cette direction ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de l’écologie – Le bruit est en effet à l’origine de graves problèmes de santé, plusieurs études le montrent et, en ma qualité d’élue d’une circonscription située au bout des pistes de l’aéroport d’Orly et où passent trois autoroutes, je n’ai, Monsieur le député, aucun mal à vous comprendre. Cela étant la réglementation en vigueur pour les nouvelles infrastructures est déjà consistante, puisque la loi du 31 décembre 1992 a été complétée par le décret du 5 mai 1995 qui indique les niveaux supérieurs de bruit admissibles – en distinguant d’ailleurs ce qui l’est de jour et ce qui l’est de nuit. Mais il est vrai qu’en matière de nuisance sonore, les pics sont les plus anxiogènes. Le décret du 9 janvier 1995 relatif à la limitation du bruit des aménagements et infrastructures de transports terrestres précise par ailleurs que « le respect des niveaux sonores maximaux autorisés est obtenu par un traitement direct de l'infrastructure » et que « si cette action à la source ne permet pas d'atteindre les objectifs de la réglementation dans des conditions satisfaisantes d'insertion dans l'environnement ou à des coûts de travaux raisonnables, tout ou partie des obligations est assuré par un traitement sur le bâti ».

Voilà ce qu’il en est pour les infrastructures nouvelles. Pour les infrastructures existantes, l’État s’attache à un rattrapage des « points noirs », mais il ne peut tout faire immédiatement, car les coûts exposés seraient incompatibles avec son budget et avec celui des collectivités concernées. Le décret du 24 mars 2006 a prévu la définition de « cartes du bruit » visant à la réalisation d’un programme d’action assorti d’un calendrier précis. L’élaboration de ces cartes fait l’objet d’une consultation publique obligatoire.

Les mesures décidées au terme du Grenelle de l’environnement seront scrupuleusement suivies d’effet – le président de la République le souhaite, M. Borloo et moi-même nous y attachons avec ardeur. La question du bruit a été traitée dans le cadre de l’atelier « santé et environnement », ce qui n’est pas anodin. La décision a été prise d’accroître significativement les moyens alloués à la lutte contre le bruit ; cela sera fait, mais pas forcément en affectant une partie du produit de l’écotaxe, comme vous le suggérez, car cette ressource est destinée à financer les alternatives au transport routier.

M. François de Rugy – Je vous remercie, Madame la ministre, mais je constate que votre réponse porte principalement sur les infrastructures nouvelles. Outre que mieux vaudrait arrêter d’en construire, le plus urgent est d’agir sur l’existant. Je souhaite donc que le Gouvernement soit beaucoup plus offensif en ce domaine, en particulier dans l’allocation des ressources. L’argument de l’incapacité supposée de l’État à assumer cette dépense est irrecevable : il suffit, pour s’en convaincre, de mettre en regard le coût d’infrastructures anti-bruit et celui des infrastructures nouvelles que l’on s’apprête à bâtir ! Je continuerai donc de me battre sur ce terrain, et je souhaite en particulier que la définition des cartes de bruit se fasse dans la plus grande transparence.

CONDITIONS DE TRAVAIL DES PILOTES D’HÉLICOPTÈRE
RATTACHÉS AUX CENTRES HOSPITALIERS

Mme Sylvie Andrieux – Madame la ministre de la santé, les pilotes d'hélicoptères rattachés aux centres hospitaliers constatent l'absence de négociations sur leurs conditions de travail, qui reflète la non-reconnaissance de leurs tâches et la dégradation du service offert aux usagers potentiels. L'inspection du travail constate elle-même que cette « forte dégradation des conditions de travail, tant des pilotes que des personnels au sol, conduit à des situations susceptibles de mettre en jeu la santé et la sécurité des pilotes ».

Un accord national sur les conditions de travail a été signé en 2003, mais aucun décret d'application n'a encore été publié. L’accord prévoyait pourtant une planification stricte des missions, notamment pour les transports sanitaires d'urgence tels les transports d'organes. Face à cette situation, les pilotes d'hélicoptère ont observé un premier mouvement de grève en août 2007. Fin octobre, leurs représentants ont été reçus au ministère de l'écologie ; à l'issue de cette réunion, ils ont été assurés de l'entière coopération du ministère, qui s’est dit décidé à faire paraître rapidement un décret qui les protégerait des abus des sociétés affiliées au Syndicat national des exploitants d'hélicoptères – le SNEH. En octobre toujours, le ministère de la santé a annoncé la nomination prochaine de deux conseillers généraux des établissements de santé, chargés d'une mission sur le transport sanitaire. Depuis lors, les pilotes n'ont eu aucun contact avec ces deux chargés de missions. À la mi-décembre, les syndicats de pilotes ont reçu un projet de décret expurgé de toute mesure défavorable au SNEH et ne s'appuyant en rien sur l'accord national. Sans doute l'intervention du SNEH auprès du ministère aura-t-elle eu raison de l'intérêt public… Les pilotes n'ont eu d'autre possibilité que de déposer un nouveau préavis de grève, cette fois reconductible, du 24 décembre au 2 janvier.

Je souhaite, Madame la ministre, que vous précisiez quelles mesures vous comptez prendre pour accélérer la publication du décret d'application qui permettrait d'imposer le respect de l'accord signé en 2003.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Les 150 pilotes d’hélicoptères du SAMU, salariés de sociétés d’exploitation des hélicoptères, ne relèvent ni de la fonction publique d’État ni de la fonction publique hospitalière, mais leurs conditions de travail et de rémunération dépendent partiellement de la réglementation. De plus, des mesures d’organisation de leur travail sont précisées en annexe de la convention collective signée en 2003. Le décret d’application est en cours de finalisation au ministère de l’écologie – et non au ministère de la santé. Il concernera notamment l’encadrement des réquisitions, comme l’ont demandé les organisations syndicales.

Quant aux conditions de travail et de rémunération des pilotes, elles résultent en partie de conventions signées entre les établissements et les sociétés exploitant des hélicoptères. Mais le directeur de l’établissement est seul responsable de la signature de ces contrats, ce qui limite l’action de l’administration centrale. Y sont notamment précisées ces tranches horaires couvertes, dont dépend le nombre de pilotes recrutés. J’ai demandé à mes services de réaliser une enquête sur ces marchés, et nous avons rappelé à tous les établissements concernés les règles concernant les réquisitions. J’ai aussi demandé à la directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins de confier dans les plus brefs délais une mission d’expertise sur le transport sanitaire à un conseiller général des établissements de santé. Sur cette base, nous entamerons la réflexion avec le ministère de l’Intérieur sur un meilleur usage des hélicoptères consacrés aux secours et aux urgences médicales.

Mme Sylvie Andrieux – Je vous remercie et compte sur vous, car il y va de la crédibilité du politique, après avoir légiféré, de faire paraître les décrets d’application. Bien entendu, chacun a ses compétences, mais le problème est très ancien et je compte sur votre vigilance pour que les justes revendications des pilotes soient enfin satisfaites.

SITUATION DE LA GREFFE ET DU DON DE MOELLE OSSEUSE

M. Jean-Jacques Gaultier – Pour les malades atteints de leucémie ou de graves maladies du sang, la greffe est souvent l’ultime espoir. Actuellement, on en réalise 1 200 par an en France, à partir de donneurs membres de la famille ou de volontaires compatibles inscrits sur le fichier national ou l’un des 56 fichiers étrangers qui regroupent 11 millions de donneurs potentiels.

La France était pionnière dans ce domaine dans les années 1980. Aujourd’hui la liste d’attente est longue et il n’y a que 150 000 inscrits au fichier national, soit deux fois moins qu’en Italie, quatre fois moins qu’en Grande-Bretagne et vingt fois moins qu’en Allemagne. C’est pourquoi l’Agence de biomédecine, sous l’impulsion de M. Douste-Blazy, mène un plan d’action sur dix ans afin de recruter 100 000 nouveaux volontaires, soit 10 000 par an. C’est louable, mais insuffisant : l’Allemagne recrute en quatre mois ces 100 000 donneurs potentiels ! Comme il n’y a qu’une chance sur un million que deux personnes soient compatibles, il faut absolument augmenter le nombre et la diversité des donneurs.

En raison de ces carences, en France peu de greffes à partir de donneurs non apparentés sont réalisées grâce à des donneurs du pays, alors que c’est le cas pour 80 % des greffés en Allemagne. Comment améliorer cette situation et quels sont les crédits alloués à l’agence de biomédecine ?

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports Avant de répondre à cette question, je prie M. Jacques le Guen de m’excuser, car je suis attendue pour présider le jubilé des CHU et c’est M. Hirsch qui lui répondra.

Le registre français des donneurs de greffe compte 150 000 donneurs, et l’objectif est de parvenir à 240 000 afin d’assurer la greffe d’un patient français sur deux. La proximité est en effet un atout, qui relativise la portée d’une directive européenne sur ce sujet.

L’agence mène donc une campagne afin de recruter 10 000 nouveaux donneurs par an. Mais l’objectif est aussi qualitatif, afin de rééquilibrer la composition du fichier national dans lequel certaines catégories sont sous-représentées et de rectifier certaines idées fausses sur les greffes dans le grand public. L’Agence a diffusé à plusieurs millions d’exemplaires un document qu’on peut aussi se procurer sur son site Internet ou en appelant son numéro vert.

Au 28 décembre 2007, 17 082 nouveaux donneurs étaient inscrits sur le registre français, grâce à l’effort soutenu de tous les partenaires, notamment de l’Établissement français du sang. En décembre 2007, l’Agence a obtenu, comme d’autres registres internationaux, d’alléger les examens biologiques requis et de procéder à un typage histologique afin de mieux sélectionner les donneurs compatibles.

En Allemagne, certes, le recrutement est massif. Cependant, il ne résulte pas d’une stratégie nationale, mais de celle, isolée, d’un centre privé regroupant 2 500 000 donneurs. Ce fichier comprend cependant des populations moins diverses que le fichier français ; il est donc de moindre qualité. De plus, 20 % des donneurs sont finalement impossibles à joindre, alors qu’en France il y a moins de 5 % de défections. Enfin, s’il y a en Allemagne 75 % de greffés à partir de donneurs inscrit au registre national contre 25 % en France, c’est que les greffeurs allemands sont les seuls à être aussi peu sélectifs dans les critères de compatibilité.

Par ailleurs, le nombre d’allogreffes augmente en France. On en a réalisé 1 300 en 2007, dont plus de la moitié à partir d’un donneur non apparenté. Désormais les greffes de sang de cordon ombilical représentent 20 % des greffes allogéniques, et la France est pionnière en la matière, avec plus de 800 greffes depuis 1988.

L’Agence de biomédecine bénéficiait en 2005 de 2,5 millions d’euros pour développer le fichier des donneurs de moelle et les dons d’unité de sang placentaire. En 2007, elle a disposé de 3,5 millions, ce qui illustre la volonté du Gouvernement d’accroître au plus vite le nombre de donneurs inscrits.

M. Jean-Jacques Gaultier – Je me félicite de cette volonté, et souligne que les Français sont aussi généreux que les autres Européens. Je ne manquerai pas de faire part de ces informations à un ami qui vient de subir une greffe grâce à un don en provenance d’Israël.

ACTIVITÉS SPÉCIFIQUES DU CHU DE BREST

M. Jacques Le Guen – Dans le cadre du futur schéma interrégional de l’organisation sanitaire qui couvrira la Bretagne, les Pays de la Loire, le Centre et le Poitou-Charentes, un certain nombre d’activités spécifiques seront regroupées dans des centres spécialisés. Ainsi, les activités d’allogreffes et de neurochirurgie pédiatrique du CHU de Brest risquent d’être transférées à Rennes ou à Nantes. Le conseil d’administration de l’établissement et les élus souhaitent leur maintien, en raison de la distance, et alors que la proximité avec les familles est essentielle dans le traitement d’enfants atteints de leucémie ainsi que dans le succès des opérations d’urgence. Le CHU de Brest a réalisé 32 allogreffes en 2006, dont six pour des moins de 18 ans, alors que le seuil d’efficacité est de cinq interventions. Il a réalisé 1 962 interventions de neurochirurgie, dont 57 pour des enfants, ainsi que de la recherche clinique et des téléconsultations avec tous les centres hospitaliers de Bretagne occidentale. Ces dernières années, le CHU a fortement investi pour moderniser les services d’hématologie et de neurochirurgie. L’hôpital Morvan compte 14 chambres stériles offrant des conditions optimales pour les greffés.

Il serait plus opportun de coordonner les activités dans le cadre d’une fédération interhospitalière et de réseaux de soins et dans la perspective du développement de la télémédecine. La décision finale sera prise par les directeurs des quatre agences régionales de l’hospitalisation, avec l’aval du ministère de la santé. Quelle est la position de celui-ci ?

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – Je vous renouvelle les excuses de Mme Bachelot, qui a dû quitter l’hémicycle et m’a chargé de vous répondre. Le projet de schéma de l’interrégion Ouest – régions Bretagne, Centre, Pays de la Loire et Poitou-Charentes – concerne notamment la neurochirurgie pédiatrique et les activités de greffe. Arrêté par les directeurs des ARH après avis des comités régionaux de l’organisation sanitaire, il a en effet pour objectif de recentrer la neurochirurgie sur un nombre limité de sites, dans un souci de qualité des soins et d’efficience médico-économique. Une coopération entre les sites de Brest et de Rennes apparaît nécessaire, via un regroupement de l’activité programmée au CHU de Rennes, qui réalise le plus grand nombre d’actes. En revanche, les interventions de neurochirurgie pédiatrique en urgence pourront toujours être pratiquées au CHU de Brest.

S’agissant des greffes d’organes et de cellules hématopoïétiques, l’Agence de biomédecine confirme l’avis de l’ARH de Bretagne en faveur du maintien d’un seul site dans la région pour l’allogreffe de moëlle osseuse pédiatrique. Il est en effet recommandé que les médecins exerçant dans ces services possèdent une double formation d’hématologue greffeur et de pédiatre, ce qui n’est pas le cas de tous au CHU de Brest, où l’activité de greffe est en outre trop faible. L’Agence de biomédecine considère donc la proposition de regroupement des activités d’allogreffe pédiatrique sur le site de Rennes comme la plus pertinente. Cette solution présente certes l’inconvénient de contraindre les jeunes patients et leurs familles à des déplacements plus importants, mais si elle était retenue, Mme Bachelot demanderait bien évidemment à l’ARH de les faciliter au maximum.

M. Jacques Le Guen – Votre réponse nous rassure sur les activités de neurochirurgie, mais nous inquiète pour les activités d’allogreffe. Ces dernières années, les interventions effectuées à Brest ont été nettement plus nombreuses que celles effectuées à Rennes. La logique voudrait donc que l’on maintienne à la pointe occidentale de la Bretagne le service de qualité qui existe aujourd’hui. Les parents, le corps médical et la population du Finistère et des Côtes-d’Armor accepteront difficilement la mesure proposée. Prenons donc le temps d’y réfléchir.

APPLICATION DE LA LOI SUR LE SURENDETTEMENT

M. Michel Zumkeller – Le surendettement est un phénomène qui a pris beaucoup d’ampleur ces dernières années. La loi Borloo a cependant permis de redonner de l’espoir à nos compatriotes concernés. Ma question porte sur le délai maximum de dix ans qu’elle prévoit pour apurer la dette, disposition qui porte ses fruits mais n’en laisse pas moins subsister des interrogations. J’évoquerai donc plusieurs cas précis. Tout d'abord, en cas de révision du plan de surendettement, ce délai de dix ans court-il à partir de la date initiale du premier plan ou de celle de la révision ? Ensuite, je souhaite connaître le traitement réservé aux personnes âgées qui sont prises dans la spirale du surendettement depuis de nombreuses années, mais ne peuvent bénéficier d'une procédure de faillite personnelle malgré leurs faibles revenus. Je puis citer le cas d’une personne de 75 ans qui rembourse depuis quinze ans des prêts qu’elle n’avait pas contractés elle-même et ne voit pas le bout de ses difficultés. Ne peut-on envisager des solutions spécifiques pour ces cas-là ? Il y a aussi le cas des personnes qui se sont retrouvées en difficulté après s'être portées caution d'une association ; j’ai, là encore, connaissance de cas précis.

Au-delà du traitement du surendettement, il importe de développer la prévention du phénomène. À cet égard, la mise en place d’un fichier me semble être une bonne solution, et je suis prêt à m’associer à toutes les initiatives qui seront lancées dans ce domaine.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – Ce phénomène du surendettement n’a hélas pas été complètement endigué par la loi Borloo, qui a mis en place des procédures nouvelles.

Votre question porte d’abord sur la durée des plans conventionnels de redressement. Que celui-ci soit conventionnel ou issu des recommandations du juge, sa durée totale ne peut excéder dix ans, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement. Le délai de dix ans s'applique donc à compter de la date initiale du premier plan. Le législateur a cependant ménagé une exception à cette règle : « les mesures du plan peuvent excéder ces délais lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale et dont le plan permet d'éviter la cession par le débiteur. »

Il est en outre toujours possible à un débiteur dont la situation se serait dégradée pendant le déroulement du plan de déposer un nouveau dossier de surendettement, qui fera l'objet d'un examen par la commission. Celle-ci se demandera alors si ce nouveau dépôt ne traduit pas « une situation irrémédiablement compromise » justifiant une orientation vers une procédure de rétablissement personnel, ou une situation grave justifiant un effacement partiel de créance avant même l'écoulement de la période de dix ans.

Cette limitation dans le temps du plan conventionnel ou des mesures recommandées par la commission est une innovation de la loi de 2003, qui permet d'offrir une vraie perspective de sortie du surendettement aux débiteurs surendettés.

S’agissant du bénéfice de la procédure de rétablissement personnel pour les personnes âgées remboursant depuis plus de quinze ans, la loi ne soumet l'accès à cette procédure à aucune règle concernant l'âge, le statut d'activité, le montant des ressources ou la durée des prêts contractés. Il n'y a donc aucun obstacle de principe à ce que la personne retraitée que vous citez ne puisse prétendre à cette procédure.

Le seul critère posé par le législateur est lié à l'appréciation de la situation objective de l'individu au regard des dettes contractées : le débiteur doit être dans une situation « irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en œuvre les mesures de traitement prescrites devant la commission de surendettement des particuliers ». Cette procédure constitue en effet un dernier recours.

Dès lors, les personnes honorant leurs engagements liés au déroulement d'un plan conventionnel ne sont pas concernées. Toutefois, il est possible de recourir à la procédure de rétablissement en cours d'exécution du plan de redressement. La loi essaie de maintenir un équilibre entre les différents intérêts en jeu. Rappelons tout de même que la mise en œuvre d'une procédure de rétablissement personnel entraîne le prononcé par le juge de la liquidation des biens du débiteur, dont la vente est confiée à un mandataire. Sont exclus de la vente les meubles nécessaires à la vie courante et les biens non professionnels indispensables à l'exercice de l'activité professionnelle. La vente du bien immobilier est de la compétence du tribunal de grande instance, la mise à prix et les conditions de vente étant fixées par le juge de l'exécution. Dans sa conception actuelle, la procédure de rétablissement entraîne donc automatiquement la vente des biens immobiliers. C'est donc une décision très grave, et il est souvent préférable d'exécuter scrupuleusement les prescriptions du plan de redressement : les personnes propriétaires de leur résidence principale, en particulier, n'ont pas intérêt à bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel. C'est sans doute la situation de la personne que vous citez. La durée de son plan – plus de quinze ans – suggère que le passif inclut le remboursement d'un crédit immobilier lié à l'achat d'une résidence principale. Il s'agit ici d’éviter la perte du logement.

Vous m’interrogez enfin sur les particuliers qui se sont portés caution, cas en effet répandu. Seules les dettes non professionnelles des particuliers peuvent être prises en compte par la commission de surendettement. La caution consentie à un débiteur principal, fût-ce à raison de son activité professionnelle, demeure cependant un acte civil : le débiteur-caution d'un débiteur principal peut donc saisir la commission de surendettement. Rien n’empêche que cette dette soit incluse dans le plan et que le débiteur bénéficie d'un effacement de cette dette sur décision du juge dans le cadre d'une recommandation de la commission ou à l'occasion de la clôture de la procédure de rétablissement personnel.

L'effacement partiel des dettes ne peut cependant être recommandé par la commission que lorsque celle-ci constate l'insolvabilité du débiteur.

Les pratiques varient certainement d’une commission départementale de surendettement à l’autre, et il serait utile d’identifier les bonnes pratiques afin de les répandre. Quoi qu’il en soit, le phénomène ne pourra être endigué qu’à la source, c’est-à-dire en faisant œuvre de prévention et en responsabilisant la profession bancaire. Des initiatives pourront sans doute être prises en ce sens cette année, et je vous remercie de votre soutien.

EPIZOOTIE DE FIÈVRE CATARRHALE EN MOSELLE

M. Alain Marty – M. le ministre de l’agriculture et de la pêche m’a indiqué qu’il ne pourrait être parmi nous ce matin, se trouvant en Bretagne à la suite du drame survenu en mer il y a quelques jours. Je le comprends fort bien.

Comme ailleurs dans le Nord et l’Est de la France, la Moselle est frappée par une dramatique épizootie de fièvre catarrhale ovine. Son développement au cours de l’automne a suscité la panique des agriculteurs. Son éradication repose sur deux méthodes : la désinsectisation, massive mais, faute de protocole commun, inégale selon les élevages, et la vaccination, dont on attend beaucoup et qui sera disponible dans le courant de l’année, à une échelle sans doute insuffisante, hélas. Certains éleveurs craignent une forme de double peine : l’exposition à la maladie et l’inéligibilité au vaccin. Qu’en sera-t-il ?

Par ailleurs, l’indemnisation forfaitaire de 45 euros par ovin, 91 euros par ovin reproducteur et 228 euros par bovin est vivement critiquée. Certains éleveurs renoncent même à y prétendre : ce n’est pas l’aumône qu’ils demandent, mais une indemnité correspondant à la valeur réelle des bêtes.

S’agissant du Fonds d’allégement des charges, la part de la Moselle, aujourd’hui inférieure à celle des départements voisins, sera-t-elle revalorisée ? En outre, la surmortalité provoquée par l’épizootie fera perdre à certains éleveurs le bénéfice de la prime à la brebis. Ne pourrait-on pas calculer la prime pour 2008 sur la base des effectifs de 2007 ?

Enfin, parce que la fièvre catarrhale ovine affecte aussi nos voisins septentrionaux, il faut envisager une action cohérente à l’échelle européenne.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – M. Barnier ne peut en effet vous répondre lui-même, s’étant rendu en Bretagne en urgence après le naufrage du chalutier Petite Julie. Je suis moi-même très sensible à la question que vous lui posez, ayant longtemps dirigé l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, notamment lorsque la fièvre catarrhale ovine est apparue en France. Je rappelle que cette affection virale, qui ne concerne pas l’homme, est transmise aux ovins et aux bovins par un petit moustique que l’on croyait propre au Sud de l’Europe, jusqu’à ce que le sérotype 8 soit identifié dans le Nord-est de la France en août 2006. Depuis, la disparition des moustiques en hiver n’a pas empêché la résurgence de l’épizootie pendant l’été, au point que plus de 13 500 cas étaient répertoriés en France à la fin 2007. Pour juguler cette crise dramatique, le Gouvernement a consacré dix millions à l’indemnisation des éleveurs ayant perdu des bêtes, et son montant forfaitaire sera réévalué en 2008 pour les bovins et les ovins adultes. En outre, deux millions ont été attribués aux éleveurs les plus touchés au titre du fonds d’allégement des charges, et je vous confirme que la part de la Moselle sera réévaluée en 2008.

La vaccination reste le moyen le plus efficace de lutter contre la fièvre catarrhale ovine. Hélas, comme pour les maladies orphelines, les laboratoires ne sont pas toujours en mesure de produire rapidement un vaccin. En l’occurrence, les premiers vaccins seront disponibles dès la fin du mois d’avril, et les laboratoires en fourniront d’importantes quantités dans les trois mois qui suivent. Le ministère de l’agriculture, en partenariat avec l’AFSSA et les partenaires professionnels, est sur le point d’achever le protocole vaccinal, qui fera l’objet d’une réunion de concertation aujourd’hui même. Il va de soi que les départements les plus touchés depuis deux ans, dont la Moselle, seront servis en priorité. Enfin, le ministère finance également l’élaboration d’un protocole harmonisé de désinsectisation.

M. Alain Marty – Je vous remercie pour ces avancées importantes.

FINANCEMENT DU SPECTACLE VIVANT EN PICARDIE

M. Olivier Jardé – Le spectacle vivant est dans une situation préoccupante en Picardie. Les professionnels demandent une augmentation du budget consacré aux politiques culturelles afin que l’État remplisse son rôle dans cette région très défavorisée en la matière. En attendant un véritable plan de rattrapage, 370 000 euros sont nécessaires à la réalisation des projets en cours. En mai dernier, le directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles annonçait 240 000 euros de mesures nouvelles pour la Picardie où, hélas, la faiblesse du revenu moyen s’ajoute à un taux d’illettrisme élevé – plus de 8 % chez les jeunes. Dans ces conditions, et malgré le travail des artistes pour diffuser leurs œuvres en coopération avec les équipes enseignantes, la Picardie est la dernière région de France pour le spectacle vivant. De surcroît, le projet de centre dramatique régional n’est toujours pas lancé.

Il faut augmenter les aides aux compagnies dramatiques et chorégraphiques pour accompagner leurs projets en région, mieux subventionner les scènes picardes, aider les projets en réseaux et augmenter les aides à l’éducation artistique pour développer l’action culturelle dans nos établissements scolaires. Le Gouvernement peut-il s’y engager pour favoriser l’accès des jeunes Picards à la culture et le renouveau du spectacle vivant dans leur région ?

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – Mme Albanel, qui vous prie d’excuser son absence, m’a chargé de vous transmettre sa réponse. Les contraintes budgétaires de son ministère n’entraîneront en aucun cas un désengagement de l’État du champ culturel en région. Elle a d’ailleurs obtenu un desserrement de cette contrainte en matière de création, qui profitera au monde du spectacle vivant dans son ensemble.

En Picardie, le nombre de scènes conventionnées a été doublé en 2005, et les crédits augmentés en conséquence, pour atteindre 765 000 euros aujourd’hui. Ces moyens seront reconduits en 2008.

L’État consacre par ailleurs 47 000 euros à la réalisation d’une étude préalable à la création d’une scène nationale dans l’Oise. Mme Albanel a toutefois décidé de suspendre en 2008 l’attribution de tout nouveau label, jugeant qu’il est temps de dresser le bilan d’un demi-siècle de décentralisation culturelle. Pour autant, la scène nationale d’Amiens, avec son budget de plus d’un million et demi, continue de bénéficier d’un niveau exceptionnel de subventionnement.

L’aide de l’État aux compagnies de création et de production n’a certes pas évolué ces dernières années, mais l’aide aux compagnies en résidence a augmenté de près de 300 000 euros. C’est à ce titre qu’un budget de 192 000 euros est alloué à la compagnie de Marcel Bozonnet, pour un travail qui se poursuivra pendant trois ans à la maison de la culture d’Amiens, ainsi qu’une action d’éducation artistique dans les collèges. Ce dernier volet est en effet un axe majeur de la politique culturelle conduite par la DRAC de Picardie. Le budget qui y est consacré est d’ailleurs passé de 752 000 euros en 2005 à plus d’un million en 2008. Enfin, l’aide exceptionnelle de 25 000 euros accordée en 2007 au secteur des arts du cirque et de la rue sera reconduite en 2008 pour favoriser l’émergence d’un pôle régional. Vous le voyez, Monsieur Jardé : il n’est pas question d’oublier la Picardie dans notre schéma culturel national !

FINANCEMENT DE LA POLITIQUE CULTURELLE À LYON

M. Pierre-Alain Muet – Les institutions culturelles lyonnaises et les structures culturelles régionales sont très préoccupées par le retrait historique de l'État dans le financement de la culture. L'impact de son désengagement affecte toutes les grandes institutions comme l'opéra national de Lyon, mais aussi les bibliothèques, la conservation du patrimoine ou encore les festivals, tels que la biennale de la danse.

Ma première interrogation concerne l’opéra : le 23 novembre dernier, le représentant de l'État s'était abstenu de voter son budget pour 2008, invoquant l'insuffisance des moyens financiers dont il disposait. Début décembre, les services de la DRAC laissaient entendre que la subvention de l'État pourrait diminuer d’environ 6 %, dont 2 % de gel. Dans le même temps, tous les autres partenaires financiers de l'opéra – la ville de Lyon, la région et le conseil général – avaient confirmé leur engagement d'indexer leur subvention sur un taux d'inflation de 2 %.

Depuis lors, il semble que les choses se soient en partie améliorées : lors de l'assemblée générale de l'opéra, le 23 décembre, le directeur de la DRAC a voté le budget en indiquant qu'il pourrait assurer un financement au moins égal à la subvention de l'année 2007, ce qui, faute d’indexation, représente tout de même une perte de 111 600 euros par rapport à la subvention sur le fondement de laquelle la programmation 2008 a été établie.

Or, chacun sait que la programmation d'une institution comme l'Opéra ne peut se concevoir qu'avec des engagements financiers durables des différents partenaires. De leur côté, les collectivités locales respectent leurs engagements, et il est regrettable que l’État ne fasse pas de même.

Nous nous inquiétons également de la suppression éventuelle du financement des postes de conservateurs de bibliothèques par l'État, mesure qui représenterait une charge supplémentaire pour la ville de plus d'un million d'euros. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

J’en viens aux retards de paiement de l’État dans sa contribution aux investissements de la ville de Lyon, notamment ceux réalisés dans le cadre de la convention « patrimoine » signée pour 2003-2008. Comme dans d’autres domaines, hélas, l’État laisse les collectivités locales financer seules des opérations en dépit des conventions qu’il a signées. Les retards de paiements dans le domaine du patrimoine excédaient à Lyon trois millions d'euros au 31 décembre 2007, dont 2,3 millions dans le cadre de la convention « patrimoine ». Pouvez-vous confirmer que les subventions de l'État prévues au titre de ces conventions seront bien versées, et nous préciser à quelle date ?

Un mot également sur le théâtre de la Croix-Rousse, auquel le prédécesseur de Mme Albanel, M. Donnedieu de Vabres, s'était engagé à octroyer le label de scène nationale avant la fin de l'année 2007. Une convention a été rédigée à cet effet avec l'accord de tous les partenaires, et nous attendons la confirmation de cet engagement, très important pour ce théâtre qui connaît un grand succès.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté – Bien que je réponde à nouveau sur une question culturelle, dont je ne suis pas un spécialiste, ne croyez pas que les crédits concernés soient prélevés au profit du RSA (Sourires).

Comme celle de M. Jardé, votre question fait écho aux interrogations d’un certain nombre de professionnels, alarmés par les remous qui ont entouré le budget de la culture pour 2008. L'application de la réserve de précaution a suscité de nombreuses inquiétudes chez les élus et au sein des structures culturelles, mais la ministre a obtenu que la contrainte soit desserrée de près de 35 millions d'euros, qui seront disponibles sur les crédits « création ». L'engagement de l'État auprès des institutions du spectacle vivant dans la région Rhône-Alpes, comme dans les autres régions d’ailleurs, se fera donc dans des conditions comparable à celles de 2007.

Permettez-moi également de rappeler l’ampleur du soutien dont bénéficie la ville de Lyon de la part de l’État. En 2007, 24 millions d'euros de crédits ont été engagés par le ministère à Lyon, soit 32 % des dépenses culturelles de l'État en Rhône-Alpes. Un grand nombre d'institutions et de manifestations sont soutenues chaque année, comme l'opéra national de Lyon, l'orchestre national, le Théâtre « Nouvelle génération », la maison de la danse, l'institut Lumière, l'école nationale d'arts plastiques, la biennale de la danse et celle d'art contemporain, le GRAME, le théâtre du Point du jour, ou le théâtre « les Ateliers ». Une convention pour le patrimoine historique, signée entre la ville et l'État en 2003, a en outre permis de restaurer plusieurs monuments importants, comme l'Hôtel de ville ou l'église de Saint-Martin d'Ainay.

Enfin, le ministère soutient l'effort des institutions culturelles lyonnaises pour développer l'accès à la culture de tous les publics, et accompagne un grand nombre d'initiatives en milieu carcéral, à l'hôpital, en faveur des handicapés et dans le cadre de la politique de la ville.

Comme vous l’avez indiqué, il est exact que l'insuffisance de crédits de paiement dont souffre le ministère au plan national a suscité un retard dans les versements au profit de la ville de Lyon au titre de la convention pour le patrimoine historique, de la rénovation du musée Gadagne et de l'installation aux Subsistances de l'école nationale d'arts plastiques. Mme Albanel a demandé que tout soit fait pour y remédier, et la DRAC s’y emploie, comme en témoignent les versements de crédits à la fin de 2007.

S’agissant du financement des emplois de conservateurs de bibliothèques actuellement assuré par l'État au bénéfice des communes, il s'agit d'une question nationale qui fait l'objet d'une évaluation confiée aux inspections compétentes : vous comprendrez que je ne puisse vous en dire davantage pour le moment.

Pour ce qui est du théâtre de la Croix-rousse, la subvention de l’État a augmenté de façon considérable et sans équivalent dans la région, puisqu’elle a été portée de 370 000 à 470 000 euros depuis 2007. Le ministère continuera à soutenir cette institution sur la base d’une convention en cours de négociation, qui comprend notamment l’obligation pour le théâtre de réduire son déficit.

L’attribution du label reste à l’étude : comme en Picardie, il a en effet été décidé de suspendre en 2008 l’attribution de tout nouveau label dans l’attente d’une réflexion sur ce sujet. La ministre souhaite consulter l’ensemble des partenaires, élus et professionnels, sur les perspectives du spectacle vivant et faire en sorte que les labels « collent » bien avec la réalité.

M. Pierre-Alain Muet – Le début de votre intervention, Monsieur le Haut commissaire, n’était guère rassurant : quand on commence par rappeler tout ce qui a été déjà fait, c’est qu’on ne souhaite pas répondre aux questions précises… J’espère que l’État tiendra ses engagements, en particulier s’agissant des retards de paiement : le seul acteur qui se permette de tels retards, c’est l’État. Je suis partisan d’une saine gestion des finances publiques, mais cela signifie aussi que l’État doit tenir ses engagements.

S’agissant plus précisément de la culture, j’avais cru comprendre au cours de la dernière campagne électorale qu’elle serait une priorité. Or, les financements prévus montrent que ce n’est pas le cas. L’inquiétude des acteurs culturels est malheureusement fondée…

MODE DE CALCUL DE L’ALLOCATION AUX ADULTES HANDICAPÉS

M. Yvan Lachaud – Je dois me faire le porte parole des nombreuses institutions et associations de personnes handicapées, qui sont particulièrement inquiètes des conséquences du nouveau mode de calcul de l'allocation adulte handicapé.

Je tiens en effet à votre disposition les résultats d’une enquête réalisée par certaines associations : depuis le mois de juillet 2007, 71 % des familles interrogées constatent une baisse de leur allocation qui varie de 0,24 % à 75,07 %.

La baisse de l'AAH a pour conséquence une baisse des revenus nets mensuels qui atteint des proportions insoutenables pour certaines personnes, et l’on observe que le montant de l'AAH n'est pas proportionnel au montant des revenus, alors que les situations de handicap sont identiques.

Lorsque vous siégiez au Sénat, Mme la secrétaire d’État, vous comptiez parmi les plus fervents défenseurs de la loi de 2005. Aussi, je vous demande de bien vouloir vous pencher sur ce problème, qui risque d’augmenter la précarisation de certaines personnes handicapées.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Vous faites référence à une étude réalisée par l’APAJH du Gard auprès de 205 personnes handicapées admises au sein de quatre établissements et services d'aide par le travail – ESAT : il semblerait qu'une vingtaine de ces personnes aient récemment subi une baisse plus ou moins sensible de leurs ressources globales, mais je ne crois pas que l'on puisse s’appuyer sur un échantillon aussi restreint pour tirer des conclusions générales sur le nouveau régime de l'AAH.

Je m'étonne même que l'on puisse imputer à l'entrée en vigueur de ce dispositif les baisses de revenus constatées lors de cette enquête : le nouveau dispositif de rémunération des personnes handicapées accueillies en ESAT, entré en vigueur au 1er janvier 2007, a été précisément conçu pour inciter ces personnes à progresser sur le plan professionnel et pour leur permettre d'améliorer leurs ressources globales, composées d'une part par la rémunération garantie versée par l'ESAT, et d'autre part par une AAH différentielle.

Le nouveau dispositif tend à améliorer ces ressources globales en incitant les gestionnaires d'ESAT à améliorer la rémunération garantie qu'ils versent aux personnes qu'ils accueillent et en garantissant, grâce à un mécanisme de neutralisation et d'abattement sur les revenus d'activité, que cette augmentation ne provoquera pas une diminution à due concurrence de l'AAH différentielle.

Au total, la réforme s'est traduite pour chaque personne accueillie par un gain minimal de 13 euros par mois et d'autant plus élevé que l'effort consenti par l'ESAT en matière de rémunération directe a été important. Pour toutes ces raisons, la baisse des ressources constatées par l'enquête de l’APAJH nécessite une analyse au cas par cas. J'ai demandé à la caisse d'allocations familiales du Gard de vérifier s’il existe effectivement des anomalies ou bien si les situations dénoncées sont imputables à d'autres facteurs.

Soyez assuré que je ne manquerai pas de vous faire part des conclusions de cette enquête dès qu'elles me seront parvenues, et que je prendrai toutes les mesures nécessaires. J’ajoute que des groupes de travail ont été créés pour évaluer l’application de la loi de 2005, dont nous aurons un bilan exhaustif à mi-parcours, vers juin 2008. Un de ces groupes a pour objectif de réfléchir aux ressources des personnes handicapées, à leur emploi et à l’articulation entre ces deux sujets.

Nous savons en effet qu’une partie des bénéficiaires de l’AAH qui accèdent à des emplois à temps partiel subissent aujourd’hui des effets désincitatifs. Notre objectif est de remédier à ces difficultés en lien avec le travail mené par M. Hirsch dans le cadre du Grenelle de l’insertion.

TARIFICATION DES FOYERS- LOGEMENTS POUR PERSONNES AGEES

Mme Cécile Gallez – Présidente du foyer-logement « La Châteigneraie » à Saint-Saulve depuis 1978, j’ai pu suivre de près les différents dispositifs mis en place. La tarification actuelle me semble totalement inadaptée à la plupart de ces structures : le conventionnement partiel, avec obligation de concentrer les personnes dépendantes dans une aile, un étage ou un couloir, est une solution tout à fait inappropriée. En foyer-logement, le résident est chez lui, et il est très dur psychologiquement de déménager les plus dépendants dans un secteur qui serait inévitablement appelé « le couloir de la mort ».

Il est urgent de sortir de l’alternative établissement d’hébergement pour personnes âgées et établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les personnes dépendantes étant exclues des premières et « ghettoïsées » dans les secondes, en développant des structures où les personnes âgées peuvent être admises quand elles sont encore autonomes et rester si elles deviennent dépendantes.

Tel est le principe de fonctionnement, à Saint-Saulve, de la Châtaigneraie, dont le succès est tel que la liste d’attente est extrêmement longue. Le prix est très raisonnable, 927 euros par mois en 2007, restauration comprise, l’APL venant en déduction de cette somme. De ce fait, seules deux personnes sur soixante-dix-neuf sont prises partiellement en charge par l’aide sociale départementale. Le groupe iso-ressources – GIR – moyen pondéré étant inférieur à 300, la Châtaigneraie bénéficie d’un forfait soins, qui ne couvre que le coût de 3 équivalents temps plein. Le reste de l’équipe – aides-soignantes, auxiliaires de vie, veilleuses de nuit – soit 8 équivalents temps plein, est financé sur le prix de journée hébergement. Actuellement fixé à 3,87 euros par jour et par résident, ce forfait soins, qu’il n’est pas prévu de revaloriser dans les années qui viennent, est à comparer aux 600 euros que coûte une journée d’hôpital en médecine générale.

Ne serait–il pas possible de généraliser ce troisième type d’établissements en prévoyant une tarification adéquate ? Les foyers logements peuvent-ils être assurés que leur forfait soins sera revalorisé chaque année, au moins du taux de l’inflation ? Par ailleurs, étant donné le nombre croissant de malades atteints de la maladie d’Alzheimer, ne pourrait-on envisager pour les EHPAD un forfait soins permettant d’avoir un aide-soignant par malade ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Les logements foyers ont fait l'objet de nombreuses évolutions législatives et réglementaires. Le législateur a pris en compte leurs spécificités, en particulier la mixité des modes d'accueil et de l'offre de soins, qui ont justifié un assouplissement des règles de conventionnement ainsi qu’un dispositif de pérennisation des forfaits de soins courants.

L'article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a tout d'abord, pour une catégorie particulière de logements foyers, instauré le conventionnement partiel, portant uniquement sur la partie hébergeant des résidents très dépendants. Comme il est apparu inéquitable d'exclure du dispositif les logements foyers qui disposaient déjà de quelques places médicalisées, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a généralisé le conventionnement partiel à tous les logements foyers dès lors qu'ils n'accueillent pas plus de 10 % de résidents très lourdement dépendants. Ce dispositif permet d’assurer une mixité de l'offre sur des territoires où les places en établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes sont insuffisantes.

Je partage votre volonté de ne pas stigmatiser les personnes les plus dépendantes dans les logements foyers, mais il est difficilement envisageable de ne pas leur réserver une zone adaptée, tant en termes de sécurité incendie que de prise en charge.

L'article 69 de la LFSS pour 2008 garantit le maintien du forfait global de soins au-delà du 31 décembre 2007 ; de plus, ces forfaits seront revalorisés annuellement : j'ai personnellement souhaité amender le texte en ce sens lors de son examen au Sénat.

S’agissant des personnels des EHPAD, les effectifs actuels représentent un ratio moyen d'encadrement de 60 équivalents temps plein pour 100 résidents, dont 30 soignants. L'objectif est bien d'en assurer une progression significative, dans le cadre du plan Alzheimer 2008-2012 qui sera annoncé par le Président de la République dans les prochaines semaines.

DÉCLARATION DES ACCIDENTS DU TRAVAIL À L’USINE RENAULT DE CLÉON

M. François Loncle – Au moment où le Gouvernement, le patronat et les syndicats se penchent sur les conditions de travail des salariés, un rapport de l’Inspection du travail de Seine-Maritime fait état des pressions exercées sur les salariés de l’usine Renault de Cléon pour que les victimes d’accidents du travail évitent tout arrêt de travail – et je doute que le cas de cette usine soit unique.

L’enquête, réalisée entre mai et septembre 2007, a porté sur 58 accidents ayant fait l’objet d’un transport vers une structure médicalisée extérieure à l’usine. Sur les 41 victimes auditionnées, 26 se sont vu prescrire un arrêt, et 22 d’entre elles – soit 85 % – se sont vu proposer un poste aménagé afin que l’accident n’entraîne pas d’arrêt. Cinq salariés seulement, dont trois représentants du personnel, ont refusé le poste proposé.

Il ressort de cette enquête qu’il existe un système de pressions organisé, lequel résulte directement des objectifs fixés par la direction de l’établissement tels qu’ils apparaissent dans un document du comité de direction du 25 mai 2007, et les témoignages des salariés interrogés sont éloquents. On les culpabilise notamment sur le fait que Renault perd 600 euros par jour d’arrêt de travail. Il existe même un formulaire dit RATI, ce qui signifie « refus de déclaration d’accident du travail par l’intéressé », distribué aux salariés après des accidents qualifiés de bénins : les accidents du travail dans l’usine de Cléon ne sont donc pas tous déclarés aux services compétents.

Outre le fait que l’entreprise ne respecte pas la législation du travail à divers égards, ce qui notamment conduit certains salariés à prendre des congés avant de reprendre un poste aménagé, il existe indubitablement un chantage au déroulement de carrière pour les salariés qui refuseraient de renoncer à un arrêt de travail. La réponse que le directeur de l’usine de Cléon a eu la courtoisie de me faire ne m’ayant pas convaincu, je voudrais savoir ce que le Gouvernement compte faire pour protéger les salariés.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Une enquête réalisée par l'inspection du travail de la Seine-Maritime entre janvier 2005 et le premier trimestre 2007 a en effet révélé qu’un certain nombre de salariés victimes d'accidents du travail à l'usine Renault de Cléon n'étaient pas en arrêt de travail alors qu’un arrêt leur avait été prescrit par le médecin. Ils avaient repris le travail sur des postes aménagés, sans avis préalable du médecin du travail. Ces irrégularités ont été notifiées à l'entreprise et font l'objet d'un suivi par l'inspection du travail.

De manière générale, la sous-déclaration des accidents du travail tient au fait que l'employeur a intérêt à ce que le salarié ne déclare pas l'accident et que le salarié lui-même n’y a pas toujours avantage. Elle a des conséquences tant sur la réparation des accidents –l'assurance maladie supportant indûment des charges qui relèvent normalement de la branche AT/MP – que sur leur prévention, dans la mesure où elle nuit à la connaissance des risques professionnels.

Pour assurer une meilleure prévention, la connaissance des accidents et maladies professionnelles doit dépasser le filtre de leur reconnaissance par la CNAMTS, via la constitution de réseaux de veille et de surveillance. Par ailleurs, le ministère du travail s'attache à élaborer, en collaboration avec le ministère de l'enseignement supérieur, des mesures d'information et de formation à destination du corps médical, la méconnaissance – par les médecins généralistes en particulier – de l'origine professionnelle des pathologies constituant une cause principale de sous-déclaration. La convention d'objectifs et de gestion, qui sera prochainement discutée entre l'État et la branche AT/MP constituera un levier de progrès.

L'inspection du travail a reçu des instructions de vigilance accrue, et plusieurs mesures ont été prises ou sont en préparation à l'issue de la conférence sur les conditions de travail du 4 octobre 2007 présidée par Xavier Bertrand : sensibilisation des entreprises à la politique d'évaluation a priori des risques, avec obligation faite aux employeurs de consigner, par écrit, les résultats de cette évaluation dans le « document unique », tenu à disposition des membres du CHSCT ou à défaut des délégués du personnel, des agents de contrôle, du médecin du travail et des services de prévention des CRAM ; amélioration de la formation des représentants des salariés. Le Gouvernement a la volonté d’agir sur tous les leviers.

UTILISATION DE MACHINES-OUTILS PAR DE JEUNES HANDICAPÉS

M. Yves Nicolin – Une circulaire du 1er février 2007 interdit désormais toute utilisation de machines-outils dites « dangereuses » par de jeunes handicapés de 16 à 18 ans en institut médico-éducatif ou médico-professionnel. Auparavant, ces établissements présentaient chaque année, et pour chaque jeune, une demande de dérogation à l'inspection du travail, qu'ils obtenaient systématiquement. L’interdiction de dérogation posée par la circulaire prive ces élèves d'une formation qui était pourtant parfaitement adaptée, encadrée et sécurisée et de stages en entreprises qui les préparaient à une insertion en milieu ordinaire. Ni les responsables d'établissements, ni les jeunes, ni leurs parents ne comprennent ce revirement soudain de la réglementation qui remet en cause tant le droit à l'emploi en milieu ordinaire que les missions des établissements spécialisés. Entendez-vous revenir sur cette circulaire, sachant qu’il s’agit pour ces jeunes d’apprendre à utiliser des scies, meuleuses ou perceuses qu’on trouve en vente libre dans le commerce en étant encadrés par un personnel formé et compétent ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Cette circulaire a rappelé que le code du travail ne permet l'utilisation des machines-outils dangereuses que dans les établissements d'enseignement technique dispensant une formation professionnelle. Les IME et IMPro n'entrent pas dans ce champ. Cette restriction s'explique par la dangerosité de ces machines : on ne peut prendre le risque de porter atteinte à la sécurité des élèves que si cela est indispensable à leur formation professionnelle.

Dans la perspective d'une refonte de la protection des jeunes de moins de 18 ans au travail, une instruction commune des trois directions générales du travail, de la protection judiciaire de la jeunesse et de l'action sociale a été diffusée le 28 décembre 2007. La dérogation étant liée au suivi d'une formation professionnelle, il appartient aux autorités de tutelle des établissements de définir cette notion de formation professionnelle. Afin de préparer la mise en œuvre de cette réforme, les directeurs régionaux de ces trois administrations identifieront ensemble les établissements et services sociaux et médico-sociaux délivrant des formations professionnelles. Les directeurs départementaux de la protection judiciaire de la jeunesse et des affaires sanitaires et sociales, après avoir saisi, à la demande des établissements et services, l'inspecteur du travail compétent et lui avoir communiqué les activités exercées, la liste précise des machines, appareils ou produits employés et leur lieu d'utilisation afin qu’il donne son avis et indique aux établissements les mises en conformité nécessaires, veilleront à ce que cet avis soit intégralement respecté. Dans l'attente de la réforme, ils autoriseront ou non l'ouverture des formations pré-professionnelles ou professionnelles.

Ces dispositions pragmatiques permettent d’assurer à la fois la formation et la protection des jeunes concernés.

M. Yves Nicolin – En toute amitié, Madame la ministre, vous venez de décrire une usine à gaz. Vos services ont élaboré une réponse incroyablement technique à une question très simple. Les conséquences en seront hélas dramatiques. Les jeunes qui utilisaient ces machines depuis des décennies, encadrés par des adultes formés, se trouvent du jour au lendemain privés de la moindre chance d’être intégrés en milieu professionnel ordinaire, au prétexte d’un principe de précaution qui, compte tenu du nombre d’accidents qui ont eu lieu, paraît bien exagéré : j’aimerais d’ailleurs assez en connaître la liste. Ces dispositions, imaginées par des gens qui n’ont sans doute jamais mis les pieds dans des établissements spécialisés, pénalisent ces jeunes. J’aimerais, après cette réponse si technique, Madame la ministre, que vous usiez de votre influence pour trouver une solution pragmatique. Le plus simple serait d’en revenir au système précédent, dans lequel les chefs d’établissement demandent une dérogation à l’inspecteur du travail. Sinon, j’ai bien peur que ce dispositif devienne la risée des autres pays européens.

Mme la Secrétaire d'État – Cette mesure très récente visait à renforcer la sécurité des jeunes en situation de handicap. Il ne faut évidemment pas qu’elle se retourne contre eux. Je continuerai donc à travailler avec les administrations concernées afin de concilier les deux impératifs aussi importants que sont la formation et la protection de ces jeunes, pour parvenir à un juste équilibre.

DEMANDES D’EXTRADITION DE L’ÉTAT ITALIEN

M. Patrick Braouezec – Marina Petrella, ancienne militante des années 1980 en Italie, a été arrêtée le 28 août dernier sous le prétexte d'un contrôle de véhicule. Trente ans après les faits qui lui sont reprochés, dix-neuf ans après sa sortie de prison sans avoir été jugée, quatorze ans après sa condamnation à perpétuité, alors qu'elle n'avait pas été arrêtée à l'issue de l'audience, treize ans après une demande d'extradition non exécutée, elle est traitée comme si elle était coupable de crimes imprescriptibles. Elle était pourtant partie libre d'Italie, et l’asile en France lui a été accordé en toute connaissance de cause.

Marina Petrella a fait partie des activistes d'extrême gauche italiens dont certains ont été arrêtés, jugés selon une procédure d'exception et soumis à des condamnations collectives par une justice qui ne fonctionnait pas, il faut le dire, de façon démocratique. Elle a été régularisée en France en même temps qu’une bonne centaine d'autres Italiens dans la même situation, a fondé une famille et s'est intégrée en respectant scrupuleusement les lois de la République. Elle a bénéficié d'une deuxième chance qu'elle n'a jamais trahie.

Aujourd'hui, le Gouvernement envisage d’accepter la demande d'extradition formulée par l'État italien. Ce faisant, les autorités françaises renieraient un engagement solennel pris par la République française il y a 25 ans et tenu depuis par tous les gouvernements. Ce serait une trahison de la parole de l'État, ainsi que l’ont souligné par exemple Stéphane Hessel, Albert Jacquard, le pasteur Jacques Maury, Jean Lacouture ou Monseigneur Rouet dans une pétition. Ce serait le reniement de tous les principes fondamentaux de notre État de droit, dont celui du délai raisonnable. Ce serait un coup porté au droit d'asile. Nous sommes nombreux, dans cet hémicycle mais aussi dans la rue, à déplorer que l'engagement solennel d’asile pris par la République française soit rompu. Notre pays doit rester une terre d'asile. La parole donnée par l'État ne peut être bafouée. Le Gouvernement s’honorerait en ne signant pas le décret d'extradition.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Je vous demande tout d’abord d’excuser l’absence du Premier ministre, qui est retenu à la conférence de presse du Président de la République. La demande d'extradition de Mme Petrella est soumise à une procédure dont la chambre de l'instruction de Versailles a fait une application minutieuse, en demandant toutes les précisions qui lui paraissaient nécessaires. Les tribunaux ont en effet notamment la charge de vérifier les délais de prescription, afin de garantir les droits de la personne concernée. Or les faits pour lesquels Marina Petrella a été condamnée sont de nature criminelle. C’est de personnes qui ont été tuées qu’il s’agit, ou qui ont été si atteintes que leur vie et celle de leurs proches a été bouleversée à jamais. Ces victimes sont en droit de voir les sanctions exécutées.

La protection apportée par l'État français aux réfugiés italiens avait un fondement humanitaire, et non juridique, qui ne peut donc être opposé à une demande d'extradition faite dans le respect des procédures. Sa remise en cause a commencé en 2002, à l'occasion de l'extradition de Paolo Persichetti. Cette position n'a plus été démentie, l'État français assumant son choix. La France appartient à l’espace judiciaire européen. Elle doit en tirer toutes les conséquences dès lors que les procédures respectent les droits des personnes en cause, ce que le travail minutieux effectué par les magistrats français a permis d’établir. La France respectera donc ses engagements européens.

M. Patrick Braouezec – Votre réponse, Monsieur le ministre, ne me satisfait pas. Je ne remets pas en cause le travail de la Chambre de l’instruction de Versailles, je traite d’une question de principe. Si l’État italien avait été si sûr de lui, aurait-il laissé en liberté au terme de l‘audience celle qui venait d’être condamnée à perpétuité ? L’aurait-il ensuite laissée libre plusieurs mois, tout en sachant parfaitement où elle résidait, lui permettant ainsi de s’exiler en France ? La République française a pris un engagement envers Mme Petrella qui a, depuis lors, fondé une famille et qui est la mère d’une enfant de treize ans. Cet engagement ne peut, trente ans plus tard, être bafoué. Voilà ce dont il s’agit.

EFFECTIFS DU COMMISSARIAT DE POLICE DE COLOMIERS EN HAUTE-GARONNE

Mme Françoise Imbert – Ma question, qui s'adresse à Madame la ministre de l'intérieur, porte sur le commissariat de police de Colomiers qui, faute de moyens, rencontre des difficultés pour remplir ses missions de service public. Il exerce son activité à Colomiers même, mais aussi dans le quartier toulousain de Saint-Martin-du-Touch, qui compte désormais plus de 50 000 âmes et où apparaît une délinquance qu'il convient de traiter rapidement. Or, en dix ans, les effectifs de police sont passés de cinquante-et-un à cinquante-trois agents… Ils sont comparables à ceux du commissariat de Saint-Gaudens, ville de 10 000 habitants. En réalité, Colomiers est toujours considérée comme un quartier de Toulouse, alors que c’est désormais une ville moyenne. Tout le secteur ouest toulousain connaissant une explosion démographique, pour tenir compte de cette évolution, le commissariat de Colomiers mais aussi ceux de Blagnac et de Tournefeuille doivent être mieux dotés. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour rationaliser les moyens humains et matériels du commissariat de Colomiers et lui permettre de remplir ses missions dans de meilleures conditions ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Je vous prie d’excuser l’absence de Mme Alliot-Marie, retenue auprès du président de la République, et qui m’a prié de vous faire la réponse suivante. La circonscription de sécurité publique de Toulouse regroupe quatre communes, dont Colomiers. Cette circonscription a bénéficié, entre 2002 et 2007, de trente-six agents du corps d'encadrement et d'application supplémentaires. Actuellement, ce nombre est supérieur à l'effectif de référence. Compte tenu de la déflation du corps des officiers et commissaires, le solde, tous corps confondus, s'établit à dix-neuf fonctionnaires supplémentaires. Colomiers et le quartier toulousain de Saint-Martin-du-Touch disposent d'un commissariat subdivisionnaire, ouvert tous les jours, vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; le nombre des fonctionnaires est resté stable depuis 2002. Colomiers et Saint-Martin-du-Touch bénéficient également des effectifs rattachés à la circonscription : la brigade anti-criminalité, la compagnie départementale d'intervention et les CRS mis à disposition dans le cadre du plan de renforcement de lutte contre les violences urbaines. L'activité déployée a permis d'enregistrer, pour l'ensemble de la circonscription de Toulouse, des résultats positifs. La délinquance générale et celle de voie publique ont respectivement diminué de 1,8 % et de 1,9 % en 2007, le nombre de personnes mises en cause a augmenté de 8 %, celui des gardes à vue de 7,3 % et le taux d'élucidation est passé de 22,45 % à 22,87 %.

Après avoir constaté une augmentation de la délinquance à Colomiers entre 2005 et 2006, on y enregistre, pour les onze premiers mois de 2007, une diminution de un pour cent de la délinquance générale et la stabilité des infractions de voie publique. L'évolution est encore plus nette dans le quartier toulousain de Saint-Martin-du-Touch, où la délinquance générale et celle de voie publique ont baissé respectivement de 18,8 % et de 20,9 % au cours des onze premiers mois de 2007.

L’État n’est donc pas resté inactif, et s’est efforcé de déployer des moyens adaptés aux situations locales, mais je ferai part à Mme la ministre de l’Intérieur de vos observations.

Mme Françoise Imbert – Je le souhaite vivement, Monsieur le ministre, car la réponse que Mme la ministre de l’Intérieur vous a prié de me transmettre ne me convient en rien. On s’abreuve de chiffres mais on s’intéresse trop peu à la réalité. Or, les faits sont têtus : les trois commissariats dont je vous ai entretenu n’ont pas les moyens d’assurer leurs missions sur le territoire des communes où ils sont implantés car les effectifs dont ils disposent sont le plus souvent appelés en renfort à Toulouse.

PERSPECTIVES DE LA LIAISON AUTOROUTIÈRE ENTRE GANNAT ET VICHY DANS L’ALLIER

M. Gérard Charasse - Je souhaite, Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, des précisions sur l’état d'avancement du projet de désenclavement de Vichy. Entre 1998 et 2002, le ministère des transports a défini un projet qui pourrait faire que Vichy ne soit plus le seul bassin d’emploi de 80 000 habitants sans desserte autoroutière et que l'Allier ne soit plus le département du premier feu rouge lorsqu’on prend la Nationale 7 de Paris vers le sud de la France... Mais, alors que les études sont achevées, le Gouvernement va de report en report. Reportée pour cause d'élections en 2007, l'enquête publique sur la réalisation de la liaison autoroutière Gannat-Vichy le serait de nouveau en 2008 pour la même raison, alors que la déclaration d’utilité publique est signée et qu’aucun obstacle administratif ne peut plus se dresser. Notre bassin d’emploi attend l’État depuis trop longtemps, alors même que les collectivités territoriales tiennent leurs engagements. Quand l'enquête publique concernant la bretelle autoroutière de liaison entre Gannat et Vichy sera-t-elle lancée ? Quand le programme de développement et de modernisation des itinéraires – le PDMI – prendra-t-il en compte la desserte Nord de l'agglomération entre Bellerive-sur-Allier et Varennes-sur-Allier via Creuzier-le-Neuf, afin que le désenclavement routier de l’Allier devienne enfin réalité ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Nous avons souvent évoqué ces questions, Monsieur le député, car la desserte de Vichy fait l'objet de plusieurs projets routiers d’envergure mais beaucoup d’efforts sont encore nécessaires pour qu’ils aboutissent. S'agissant de l'antenne autoroutière reliant Gannat à Vichy, l'enquête publique sera lancée avant l'été ; avant cela, il est nécessaire de consulter formellement les collectivités locales et les services de l'État concernés. En ce qui concerne le contournement nord-ouest de Vichy, les études préalables à l'enquête d'utilité publique se poursuivent sur la base de la variante « C », issue de la concertation locale et approuvée par décision ministérielle du 18 décembre 2006. Ces études devraient s'achever au cours du premier semestre 2008. Le contournement nord-ouest de Vichy fait partie des opérations susceptibles d'être inscrites dans le PDMI, qui sera parachevé après que le Gouvernement aura tiré toutes les conclusions, en matière de politique routière, du Grenelle de l'environnement.

En ce qui concerne la desserte nord de Vichy, les études n'en sont qu'à un stade amont, cet aménagement ayant été jugé, vous le savez, moins prioritaire que la desserte autoroutière à partir de l'autoroute A71. Je n’ignore pas l’ampleur du retard accumulé, et je suis prêt à faire le point sur ces questions avec les élus locaux, dont je sais toute l’importance qu’ils attachent à ces questions.

M. Gérard Charasse – Je vous remercie, Monsieur le ministre, de ces précisions, mais nous resterons vigilants, car nous attendons le désenclavement de Vichy depuis quarante ans…

S’agissant de la desserte nord-ouest, les études sont en cours et je souhaite qu’elles aboutissent rapidement. La desserte nord pose plus de problèmes sans doute, mais le contournement de Billy s’impose si l’on veut avancer vers un désenclavement réel de l’agglomération de Vichy. Les riverains ont trop souffert de ces nuisances et une association a été créée pour promouvoir la liaison entre la RN7, l’A71 et l’A72 dans l’ensemble des communes concernées. Je suis donc prêt à participer à une réunion de travail avec vos services pour aller le plus loin et le plus vite possible.

FINANCEMENT DE LA COUVERTURE DE L’A15 ET DE L’A115 À SANNOIS DANS LE VAL D’OISE

M. Yanick Paternotte – Selon l’article 1er de la loi du 30 décembre 1996, chacun a droit de respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Ce n’est pas le cas des habitants de Sannois. Les autoroutes A15 et A115 se croisent en plein centre ville et le cimetière est désormais coupé de l’église. Outre les bouchons qu’engendre un trafic intense de 200 000 véhicules par jour, l’environnement et la santé des habitants sont en cause. Le conseil municipal a demandé que l’État et le Conseil régional financent la couverture de l’A15. Le Conseil général et le Conseil régional ont financé une étude technique qui a été validée par le conseil municipal, sur les crédits inscrits au contrat de plan 2000-2006. Mais il n’est pas inscrit de crédits au contrat de projet 2007-2013 sous prétexte qu’il s’agit d’un projet routier, alors qu’il s’agit vraiment d’un projet pour le développement durable.

Bien d’autres villes se retrouvent dans cette situation. En application des principes de précaution et de prévention, elles sont en droit d’attendre la couverture, même partielle, des autoroutes urbaines. Certains projets ont été financés, pour le périphérique parisien et l’A1 au Blanc-Mesnil.

Les émissions de gaz, soufre et métaux lourds font courir des risques à la santé. De plus, la décision du gouvernement d’avant 2002 de supprimer la liaison entre l’A16 et l’A86 a provoqué un report de trafic important sur l’A15.

Aussi, pour faire respecter le principe de précaution, la loi sur l’air et le principe d’égalité des citoyens, le Gouvernement devrait opérer une véritable rupture dans son attitude en ce qui concerne la couverture des autoroutes A15 et A115 dans la traversée de Sannois, afin de réduire les nuisances sonores et celles de l’air, pour protéger la santé des citoyens les plus fragiles, qui habitent souvent des logements sociaux très près des autoroutes et qui, à Sannois, existaient avant celles-ci. La couverture des voies permettrait aussi d’aménager les espaces urbains de proximité qui font défaut dans ce type d’urbanisme. Qu’entend faire le Gouvernement pour financer ces projets ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Nous avons déjà travaillé ensemble longuement et je souhaite me rendre le plus rapidement possible dans votre commune pour y constater ces nuisances. Elle n’est pas la seule, mais effectivement, les infrastructures s’y accumulent, avec leurs conséquences pour les habitants.

Des efforts ont été accomplis dans les contrats de plan précédents, mais il reste beaucoup à faire. Les derniers travaux de protection acoustique sur les autoroutes A15 et A115, engagés en 2006, ont permis la mise en place d’écrans anti-bruit en juillet 2007. On m’a confirmé que les finitions seront achevées début 2008. Nous le vérifierons et ferons en sorte que ce soit bien le cas. Nous serons alors en conformité avec la réglementation en ce qui concerne le niveau de bruit.

Mais il y a bien sûr d’autres gênes et des pollutions. Comme mon prédécesseur s’y était engagé, des études de faisabilité ont été réalisées. Elles ont montré – mais c’est souvent le cas – que la couverture ne se justifiait pas. Après vous avoir rencontré, j’ai demandé à mes services de revoir la question et d’améliorer vraiment l’intégration urbaine de l’A115 dans votre commune. S’agissant des financements, nous verrons ensemble ce qu’il en est dans le cadre du PDMI. Mais Sannois est un cas très particulier, où l’on a vraiment tranché dans le vif du tissu urbain, et mérite donc un effort prioritaire. Je m’engage de nouveau à venir en parler avec les associations et le conseil municipal.

M. Yanick Paternotte – Je vous remercie de confirmer votre venue ainsi que de l’attention que vous portez à ce problème. Les habitants de Sannois méritent qu’on leur rende justice.

CALENDRIER DE LA DÉVIATION DE LUXEUIL-LES-BAINS EN HAUTE-SAÔNE

M. Michel Raison – Seul le premier tronçon de la déviation de Luxeuil-les-Bains sera officiellement inauguré ce vendredi 11 janvier. Cela pose un problème de cohérence et d’efficacité de l'action publique.

La négociation des Plans de Développement et de Modernisation d'Itinéraires qui devait succéder à celle des contrats de projets États-Régions signés pour la période 2007-2013 a été retardée par les échéances électorales, la saison estivale et le Grenelle de l'environnement. On nous renvoie maintenant aux conclusions du Comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires annoncé pour mi-2008. De ce fait, nous attendons confirmation pour la programmation de nombreux projets routiers comme la déviation de Saulx de Vesoul ou la réalisation du barreau Est de Vesoul. Plus grave, certains chantiers routiers déjà très engagés se trouvent suspendus, comme celui de la déviation de Luxeuil-les-Bains. Je vous ai écrit à ce propos le 20 novembre dernier, ainsi qu’aux présidents du Conseil régional et du Conseil général. Suite au Grenelle de l'environnement, je vous ai de même interpellé sur l'avancement du dossier de concession autoroutière entre Langres et Vesoul.

Le chantier de Luxeuil-les-Bains, soit 6,1 km, était, en Haute-Saône, le seul inscrit au volet routier du Contrat de Plan État-Région 2000-2006. Mais le montant de cet investissement a été sous-estimé en 2000 de 8 millions et il n’y a pas eu contractualisation entre les trois financeurs.

Le déboisement et tous les travaux de rétablissement des réseaux ont été réalisés sur la totalité du tracé. Le projet a dû être sectionné en deux tronçons fonctionnels. Le premier, soit 3 km, vient d’être mis en service.

Le financement du deuxième tronçon aurait dû être intégré au PDMI de la RN57. Mais la signature des PDMI ne serait pas envisageable avant mi-2008. Ces travaux ne peuvent plus attendre. Depuis six ans, toute la zone est déboisée. Les appels d'offre pour la construction des ouvrages d'art sont prêts. Un reliquat d'autorisations d'engagement peut même être mobilisé sous réserve d'obtenir un accord de principe sur le financement du solde.

Je souhaite donc qu'un accord soit rapidement trouvé pour garantir un financement complémentaire de seulement sept millions d'euros. On peut imaginer d’agir en dehors du PDMI, en faisant appel aux deux autres financeurs de l’opération que sont le Conseil régional et le Conseil général dont la participation était de 25 % chacun dans la clé de répartition du CPER 2000-2006. On peut aussi affirmer le principe général que tout chantier commencé entre 2000 et 2006 doit être prioritairement achevé et par conséquent inscrit dans les PDMI.

Ma demande se veut pragmatique et j'espère une réponse tout aussi pragmatique.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État Je répondrai effectivement de façon pragmatique à l’homme de terrain que vous êtes. Actuellement, grâce aux crédits inscrits au contrat de plan État-Région, une liaison à deux fois deux voies vient d’être ouverte entre l’échangeur de la Motte et le demi-diffuseur de Saint-Valbert : la première tranche de la déviation est réalisée.

Le restant des compléments de financement du contrat de plan État-région ne permet malheureusement pas de financer la totalité de la deuxième tranche de l’opération – entre le demi-diffuseur de Saint-Valbert et l’échangeur de la Zouzette. Il manque 7 millions d’euros. Nous devons donc nous tourner vers les PDMI. Le Préfet de région a mené une concertation auprès des élus. J’ai bien noté que cet achèvement était une priorité ; je vous promets donc de ne pas l’oublier lorsque nous mettrons la touche finale au PDMI. Compte tenu des retards qui ont été pris, c’est un devoir pour l’État.

M. Michel Raison – Je vous remercie de votre réponse. Je serais encore plus satisfait si vous pouviez me donner ne serait-ce qu’un aperçu du calendrier envisagé…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports – Je vous le donnerai avant l’été.

RÉGIME FISCAL DU GROUPE VIVENDI UNIVERSAL

Mme Catherine Lemorton – Je souhaite revenir sur le régime fiscal dérogatoire accordé au groupe Vivendi Universal le 26 août 2004, celui du bénéfice mondial consolidé. La baisse d’impôts qui en résulte pour Vivendi excède un demi-milliard d'euros par an. En contrepartie, le groupe avait pris auprès de l'administration fiscale des engagements en matière de développement de l'emploi sur le territoire national. Or sur le terrain, la réalité est bien différente des plans comptables et des stratégies financières sur papier glacé. Le groupe s’est séparé le 1er août de centres d'appels de sa filiale SFR, en cédant les activités à Infomobile, filiale du groupe Téléperformance. Il avait conscience qu'il engageait par là même un processus de délocalisation des activités. J’avais interpellé Mme Lagarde pour lui faire part de nos craintes sur les pertes d'emploi que provoquerait cette cession et sur les sociétés qui utilisent trop bien les avocats fiscalistes pour détourner les crédits fiscaux accordés par l'État pour le développement de l'emploi. Certains salariés embauchés depuis le 13 octobre dernier sur le site toulousain ne sont payés qu'avec difficulté, sous prétexte d'un bug informatique ou de défaut de relevé d’identité bancaire. C'est la logique du travailler plus pour ne rien gagner ! Vous n’avez jusqu’ici pas souhaité répondre à la représentation nationale, estimant que vous ne pouviez rien faire et vous réfugiant derrière la liberté d'entreprendre. Vous pouvez cependant agir en retirant l'agrément autorisant Vivendi Universal à adopter le régime fiscal du bénéfice mondial consolidé. Vous montreriez ainsi que l'emploi et l'activité économique doivent être préservés sur nos territoires, et vous donneriez un signe fort aux entreprises qui usent et abusent des subtilités du droit fiscal pour n'en retenir que les avantages. Le Président de la République a expliqué ce matin que les exonérations de charges seraient subordonnées à la politique salariale de l'entreprise. Comptez-vous mettre un terme à ce régime dérogatoire pour les entreprises comme Vivendi Universal qui ne respectent pas les engagements en matière de développement de l'emploi sur le territoire national ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Le régime du bénéfice mondial consolidé permet à une société française à la tête d’un groupe de calculer son résultat fiscal sur l’ensemble des résultats réalisés par ses filiales situées en France et ailleurs. L’agrément n’est accordé que si le groupe dispose d’une implantation internationale diversifiée ou est en phase de développement à l’étranger, et si les avantages devant résulter de l’application de ce régime ont des contreparties économiques suffisantes pour la collectivité nationale, notamment en matière d’exportations et de créations d’emplois. Le groupe Vivendi est présent dans les secteurs de la musique, de la télévision, de la téléphonie mobile et de l’internet. Il a pris des engagements qui concernent notamment la création d’emplois par l’implantation de centres d’appel dédiés à l’activité de téléphonie mobile de SFR. Ces engagements font l’objet d’un suivi constant. Ils ont été respectés. Je pense aux emplois créés en CDI à Belfort et à Douai – respectivement 361 et 309, au lieu des 300 prévus sur chaque site. Si le groupe procédait à des réductions importantes d’effectifs, le Gouvernement pourrait remettre en cause l’agrément. Il n’y a cependant pas lieu de le faire à la date d’aujourd’hui.

Mme Catherine Lemorton – Les engagements pris le sont trop souvent à court terme au vu des bénéfices octroyés. Au moment de faire le « sale travail », on externalise ! Ainsi, sur le site de Toulouse, il ne reste plus que 310 salariés – contre près de 800 au 1er août – qui subissent de plein fouet les effets du dumping social.

SITUATION FISCALE DES PERSONNES EN MAISON DE RETRAITE EN BELGIQUE

M. Dominique Baert – Faute de places en France, plusieurs milliers de personnes âgées résident dans des établissements d'accueil en Belgique. S'agissant de la fiscalisation de leur trop modeste pension, la convention franco-belge du 10 mars 1964 attribue à la Belgique l'imposition exclusive des pensions autres que publiques perçues par les résidents des institutions de retraite établies sur son territoire. Cette disposition n'est pas satisfaisante. Elle valide une discrimination, puisque ne sont concernées que les pensions autres que publiques, l’État d'imposition demeurant la France pour les pensions publiques. D’autre part, elle n'a pas toujours été appliquée en tous lieux sur la frontière ni en tous établissements : ce n'est que très récemment, dans la zone frontière bordant l'agglomération roubaisienne, que les contrôles de l'administration fiscale belge ont été systématisés. Bien des personnes âgées aux ressources modestes se voient donc notifier des redressements importants, qui s’ajoutent aux taxes de résidence que certaines communes limitrophes viennent de créer. Je citerai ici le cas d'une personne percevant 13 000 euros annuels, qui aurait à payer 1 130 euros en Belgique alors qu'elle ne serait pas imposable en France, et un impôt de « seconde résidence » de 450 euros par an. La charge nouvelle est lourde, et souvent presque impossible à acquitter. La situation sur notre zone frontière avec la Belgique est en train de devenir très difficile, d'autant que la sévérité de l'administration fiscale belge se double d'une position rigide dans les demandes d'assouplissement présentées. Personne ne comprend, alors que le Gouvernement se félicite pour sa part de l'accord fiscal franco-belge intervenu en 2007 qui impose la règle fiscale de l'imposition de droit dans le pays d'activité pour les salariés au 1er janvier 2008. Que peut-on donc faire ? Il semblerait que la Belgique accueillerait favorablement un avenant à la convention favorable à nos aînés. Le Gouvernement ne pourrait-il exprimer lui aussi sa volonté de traiter le problème, pour permettre aux deux administrations fiscales de modifier la convention de 1964 et d’assouplir leurs pratiques ? Pouvez-vous obtenir rapidement que les personnes résidant dans ce type d'établissements en zone frontalière se voient maintenir une imposition en France ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme – Voici les précisions que je suis en mesure de vous apporter au nom de M. Woerth. Aux termes de la convention fiscale du 10 mars 1964 liant la France et la Belgique, les pensions ne sont imposables que dans l'État de résidence du bénéficiaire. Seules les pensions publiques restent imposables dans l'État source du revenu, conformément aux règles de courtoisie internationale et de respect mutuel entre souverainetés, selon lesquelles un revenu versé par un État ne saurait être imposé par un autre. De telles dispositions sont conformes aux recommandations de la Commission européenne et au modèle de convention fiscale de l'OCDE, qui reflète le consensus international sur la répartition des droits d'imposition entre États. Elles se justifient par le fait que l'État de résidence du bénéficiaire d'une pension est mieux placé que tout autre pour apprécier la situation personnelle du contribuable.

M. Dominique Baert – Votre réponse n’est pas satisfaisante, et je souhaite que vous en fassiez part à M. Woerth. Je vous demande d’exprimer une volonté du Gouvernement, et vous me rappelez l’état du droit ! J’ai évoqué dans ma question une information que je tiens du service public fédéral des finances et de l’administration des affaires fiscales. Dans une lettre adressée le 5 novembre 2007 à un député wallon, elle a fait état de la position d’ouverture du gouvernement belge sur ce dossier. Il est en effet écrit que « comme M. le ministre Reynders l’avait déclaré, la Belgique était favorable à ce que la problématique des pensions soit également examinée dans le cadre de la négociation du nouvel avenant. Cette position n’était toutefois pas partagée par la partie française, qui n’a pas souhaité discuter d’une quelconque modification des dispositions relatives aux pensions. »

Le Gouvernement s’est félicité à juste de titre de l’avenant à la convention fiscale. Il aurait tort de renoncer au dialogue sur une question qui concerne la vie quotidienne de plusieurs milliers de personnes, alors même que les autorités belges lui ont ouvert la porte. Je vous remercie de transmettre à M. Woerth cette remarque à laquelle je vous sais sensible, Monsieur le ministre.

Prochaine séance cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 45.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

© Assemblée nationale