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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mardi 10 juin 2008

2ème séance
Séance de 15 heures
189ème séance de la session
Présidence de M. Bernard Accoyer

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La séance est ouverte à quinze heures.

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION ÉTRANGÈRE

M. le Président – Je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du Parlement de la République d’Islande, conduite par son président, M. Sturla Bödvarsson (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent).

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

POUVOIR D’ACHAT

M. Jean-Jacques Candelier – Monsieur le Premier ministre, ne voyez-vous rien venir ? Entendez-vous dans les campagnes mugir ces salariés si férocement saignés par vos douze mois de gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Ces millions de citoyens n'acceptent pas les décisions iniques de la majorité depuis le début de la législature – le paquet fiscal, les modifications du code du travail, les réformes des retraites, de la santé, de l'éducation ou de la carte judiciaire, le recul du pouvoir d'achat, la casse des services publics !

Au nom de la réduction du déficit imposée par la Communauté européenne, le Président de le République et son Gouvernement, à la solde du MEDEF (Protestations sur les bancs du groupe UMP), ont entrepris de détruire tous les acquis obtenus en 1936, en 1945, en 1968 et au terme de plusieurs autres rapports de force. Mais il ne se passe pas une journée sans qu’ils se heurtent à des mouvements de protestation : après les enseignants et les étudiants, les pêcheurs, les ouvriers portuaires, les agriculteurs, les buralistes, les routiers, les personnels médicaux hier, ce sont aujourd'hui, de nouveau, les fonctionnaires et les cheminots qui expriment leur mécontentement, avant des centaines de milliers d’autres personnes le 17 juin. Mais vous maintenez le cap : le revers électoral de mars 2008 ne vous aura pas suffi !

Pourtant, des moyens existent qui permettraient de répondre aux besoins de la population : l’augmentation des salaires et la relance du pouvoir d'achat sont indispensables, car 7 millions de nos concitoyens vivent sous le seuil de pauvreté. En outre, les exonérations de cotisations patronales représentent 27 milliards par an, les entreprises du CAC 40 ne se sont jamais aussi bien portées et les revenus de leurs patrons ont augmenté de 58 % en 2007 ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Veuillez poser votre question.

M. Jean-Jacques Candelier – Qu'attendez-vous, Monsieur le Premier ministre, pour être à la hauteur des attentes de notre peuple ? Au bout d’un an, votre bilan politique ne mérite qu'un carton rouge ! (Les députés du groupe GDR brandissent un carton rouge et M. Candelier donne un coup de sifflet ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploiIl est dommage que vous entonniez toujours le même refrain (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe GDR) : celui du verre à moitié vide ! Pourtant, dans un contexte économique international délicat – dont nous sommes collectivement responsables –, nous nous efforçons d’apporter aux Français davantage de pouvoir d’achat, davantage de bien-être, davantage de travail !

Faut-il vous rappeler que la loi du 21 août 2007 a permis d’améliorer la rémunération des heures supplémentaires… (Exclamations sur les bancs du groupe GDR)

M. Maxime Gremetz – Arrêtez !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – …d’étendre l’accès à la propriété grâce à la réduction des intérêts d’emprunt et de réduire les droits de succession ? Vous passez également sous silence la revalorisation de la prime à la cuve pour les ménages les plus modestes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP), à laquelle le groupe Total a décidé d’accroître sa participation ; l’indexation des loyers sur l’indice des prix à la consommation afin d’en enrayer la hausse (Exclamations sur les bancs du groupe GDR) ; la pression que nous exerçons sur les prix en faisant jouer la concurrence (Même mouvement).

M. le Président – Monsieur Gremetz, je vous en prie.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – En outre, loin d’augmenter les prélèvements obligatoires, nous les réduisons (Même mouvement), car il est trop facile de faire fonctionner la machine à déficit en ne proposant que des solutions archaïques !

Voici notre stratégie : la rigueur budgétaire (Même mouvement), pour la vigueur de la croissance ! C’est le seul moyen dont dispose la France pour conserver son rang dans la situation économique actuelle (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe GDR).

M. le Président – Monsieur Gremetz, de grâce, un peu de calme !

NICHES FISCALES

M. Charles de Courson – Madame la ministre de l’économie (« Et des riches ! » sur les bancs du groupe GDR), lors de l’examen du PLF pour 2008, le groupe Nouveau Centre avait demandé au Gouvernement de prendre deux mesures nécessaires à la justice fiscale et au redressement de nos finances publiques : d’une part, le plafonnement des niches pour chaque contribuable ; de l’autre, le plafonnement du coût global des niches pour l’État.

M. Patrick Roy – C’est raté !

M. Charles de Courson – Le Gouvernement a retenu ces deux suggestions et s'est engagé à les étudier avec une mission d'information pluraliste, composée de six députés, qui a rendu public, jeudi dernier, des conclusions explosives. D’une part, le coût des niches est passé, en cinq ans, de 50 à 73 milliards…

M. Maxime Gremetz – Et pour qui ?

M. Charles de Courson – …, contribuant ainsi à creuser les déficits publics. D’autre part, les niches non plafonnées entraînent des injustices fiscales inacceptables : les mille premiers bénéficiaires, dont le revenu annuel moyen atteint 1,2 million d'euros, ne payent chacun que 100 000 euros d’impôt en moyenne au lieu de 400 000, et 150 d'entre eux n’acquittent aucun impôt ! (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Madame la ministre, êtes-vous favorable à l’intégration au projet de loi de finances pour 2009 des propositions de la mission : plafonner les cinq niches qui ne le sont pas encore et instaurer un dispositif global de plafonnement par foyer fiscal ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe GDR) En outre, êtes-vous favorable à un plafonnement global spécifique du coût des niches fiscales pour l’État, condition sine qua non du retour à l'équilibre des finances publiques ? (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. le Président – Je rappelle que les chiffres que vous venez d’évoquer sont détaillés dans un important rapport de la commission des finances, l’un des nombreux documents que publie notre Assemblée.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi – Ce remarquable rapport ne m’a naturellement pas échappé (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC). Vous avez raison, Monsieur le député, de poser plusieurs questions précises sur ce sujet.

M. Maxime Gremetz – À qui profitent les niches fiscales ?

M. le Président – Monsieur Gremetz, je vous en prie !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Je rappelle que le Gouvernement avait auparavant soumis à la commission des finances un autre rapport identifiant quelque 400 niches fiscales, qui représentent – vous l’avez dit – environ 73 milliards, dont 200, relatives à l’impôt sur le revenu, atteignent environ 39 milliards. L’inventaire avait donc été dressé.

Ces niches, qui se sont accumulées législature après législature, ont pour seul défaut d’avoir été instaurées sans durée déterminée et sans que l’on en ait évalué l’efficacité.

Je voudrais, cependant, qu’on ne fasse pas d’amalgame. Quand on pense aux niches fiscales, on pense immédiatement à la fraude, ou aux riches. Non, ce n’est pas cela, en tout cas ce n’est pas que cela (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Je veux dire par là qu’une des principales niches fiscales, c’est la TVA à taux réduit sur les travaux d’aménagement et d’embellissement. Elle permet de lutter contre le travail au noir, de même que celle qui favorise l’embauche de personnel à domicile, et permet ainsi de créer des emplois, qui ne l’auraient pas été sinon. Dans ces deux cas, la politique fiscale satisfait une demande sociale et s’inscrit en même temps dans une politique économique tournée vers la croissance, l’emploi et la lutte contre les activités clandestines.

Je le répète, il nous faut travailler ensemble à plafonner les niches qui ne le sont pas ; mais la solution ne réside pas dans un plafonnement global. En effet, lorsqu’en 2005 Jean-François Copé, ministre délégué au budget, avait proposé ce principe, des parlementaires avaient saisi le Conseil constitutionnel, qui avait conclu que le mécanisme était trop complexe. Nous devons donc travailler avec la commission des finances et avec la majorité, qui est très sensible à ce sujet, à trouver des mécanismes acceptables sur le plan constitutionnel et s’inscrivant dans notre politique fiscale et économique. Si certains n’avaient pas, malheureusement, déféré au Conseil constitutionnel la proposition de Jean-François Copé, nous n’en serions pas là ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe SRC)

BAISSE DU TAUX DE CHÔMAGE

Mme Valérie Rosso-Debord – Face aux défaitistes, toujours tentés par la sinistrose, qui nous prédisaient une apocalypse économique, notamment pour l'emploi, le Gouvernement, avec conviction et détermination, tient haut et fort ses engagements dans ce domaine.

Selon les dernières statistiques de l'INSEE, dont personne ne conteste l'indépendance, le taux de chômage, en passant à 7,2 % de la population active au premier trimestre 2008, est au niveau le plus bas depuis 1984. L’embellie concerne aussi le taux d'emploi. Ainsi, au premier trimestre, dans les secteurs marchands, ce sont déjà 39 400 nouveaux postes de travail qui ont été créés.

Néanmoins, nombreux sont encore nos compatriotes à la recherche d'un emploi stable.

M. Patrick Roy – Précarité !

Mme Valérie Rosso-Debord – Nous devons tous, M. Roy y compris, nous réjouir de ces chiffres. Mais nous devons surtout amplifier cette dynamique créatrice d'emploi.

La politique de lutte contre le chômage menée par le Gouvernement depuis un an va dans le bon sens. Comment comptez-vous la poursuivre et surtout la démultiplier ? Vous pourrez compter sur notre soutien actif (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi – Je vous remercie de me poser cette question. Les chiffres sont trop réconfortants pour que la gauche le fasse…

À 7,2 %, le chômage atteint son taux le plus bas depuis 25 ans, et a baissé pour le huitième semestre consécutif. Et ce bon chiffre repose sur une croissance de 2,2 %.

M. Patrick Roy – Et la précarité ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie On a prétendu ici ou là qu’il s’agissait de sous-emplois, d’emplois de mauvaise qualité. Mais selon l’INSEE, il y a 86 % de CDI parmi les 352 000 créations nettes.

On a parlé aussi de manipulations des chiffres. Mais ils sont corroborés par la diminution régulière, mois après mois, du nombre de demandeurs d’emploi.

Donc, le chômage baisse, l’emploi s’améliore, la croissance a été plus forte que celle qu’on nous prédisait. Mais vous nous demandez, légitimement, ce que nous allons faire de plus. Nous voulons, avec Laurent Wauquiez, faire un effort particulier dans deux domaines. Il s’agit d’abord de l’emploi des seniors. Ces gens qui ont dépassé l’âge canonique – jugez-en –  de 50 ans, il faut les ramener à l’emploi. En second lieu, il faut impérativement améliorer la formation professionnelle pour faciliter le retour à l’emploi (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

PRIX DE L’ÉNERGIE ET PROFITS DE TOTAL

M. Dominique Raimbourg – Vendredi dernier, le baril de pétrole a atteint 139 dollars. Depuis le 1er janvier, le prix des carburants a augmenté d’environ 40 % ; dans le même temps, les profits de Total atteignaient 12,2 milliards. On ne peut que s’en féliciter, mais cela soulève quand même quelques questions. En effet, ces profits, loin d’être utilisés en priorité pour investir, le sont pour racheter des actions à l’intérieur du groupe et pour augmenter le dividende de 11 %.

Face à cela, la contribution d’un peu plus de 100 millions que Total verse pour financer l’aide à la cuve, et qui devrait passer à 200 millions si cette aide augmente comme prévu, peut apparaître comme une aumône. Mais la charité n’est pas de mise envers nos compatriotes qui souffrent de l’augmentation du prix des carburants et veulent plus de justice. Comment entendez-vous satisfaire cette demande, de sorte que l’augmentation des prix affecte moins nos compatriotes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi Comme vous l’avez observé, nous avons négocié avec Total, qui renouvelle son engagement de participer au financement de la prime à la cuve, et même à tenir compte du passage de cette prime de 150 à 200 euros pour 700 000 foyers modestes.

Ce n’est pas suffisant, dites-vous. C’est vrai. Mais il serait maladroit de vouloir régler le problème en s’attaquant au groupe Total, c’est-à-dire en exerçant une discrimination à l’égard d’un producteur, raffineur et distributeur au motif qu’il est sur notre territoire. Le problème est mondial, et nous devons tenter d’y apporter des réponses mondiales.

S’agissant des profits de Total, qui seraient exceptionnels, reportez-vous à ceux du groupe sur les exercices antérieurs. Malgré des prix du pétrole bien inférieurs, le cours de bourse et le résultat étaient les mêmes. Donc ce n’est pas à la hausse des prix que Total doit ses résultats.

Par ailleurs, le groupe investit un montant identique à celui de ses profits dans la recherche et le développement, en particulier dans les pays susceptibles de produire du pétrole.

Un député du groupe SRC – C’est faux !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Non, vérifiez vos chiffres.

Puisque c’est au niveau mondial que le problème se pose, j’ai demandé, dans le cadre de l’Union européenne, qu’un bilan de nos réserves soit publié chaque semaine, comme cela se fait aux États-Unis et au Japon, afin de lutter contre la spéculation. Le Président de la République a par ailleurs demandé au directeur général du Fonds monétaire international de proposer des solutions pour gérer ces profits exceptionnels, profits dont l’origine est souvent à chercher du côté des pays producteurs (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

VISITE DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE AU LIBAN

M. Axel Poniatowski – Samedi, le Président de la République, accompagné par le Premier ministre, a été le premier chef d’État occidental à se rendre dans un Liban meurtri et fragile pour saluer le nouveau président de la République, Michel Sleimane. Les chefs des partis politiques représentés au Parlement étaient également présents, témoignant de la solidarité unanime du peuple français avec le peuple libanais. Notre intérêt pour le Liban, qu'illustrent les liens tissés entre les deux parlements, n'a jamais été démenti.

Le Président de la République s'est exprimé en faveur de la reprise du dialogue franco-syrien, évolution utile tant il est vrai que la Syrie, pays incontournable dans la région, peut jouer un rôle essentiel dans sa stabilisation. Pour autant, il ne faut pas oublier les spécificités du régime syrien et les raisons qui nous ont conduits à suspendre nos relations avec la Syrie : le pays doit encore faire la preuve de sa bonne volonté, et collaborer avec le tribunal chargé d'enquêter sur l'assassinat de Rafic Hariri.

L'élection de Michel Sleimane est une excellente nouvelle, mais son premier ministre, Fouad Siniora, doit encore constituer un gouvernement d'unité nationale répondant aux critères posés par l'accord de Doha. Monsieur le ministre des affaires étrangères, quel est votre sentiment sur les négociations en cours ? Comment la France, qui n'a pas ménagé ses efforts au cours des derniers mois, peut-elle contribuer au succès de ces discussions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes  En effet, le Président de la République, le Premier ministre, le ministre de la défense et votre serviteur, accompagnés des responsables des partis politiques représentés au Parlement, se sont rendus samedi auprès du nouveau président de la République, Michel Sleimane, et ont reçu, de la part de la population et des élus libanais, un accueil exceptionnel.

Des événements graves et quasi quotidiens retardent la composition du gouvernement, composition définie dans l’accord de Doha sous la présidence qatarie et avec la participation de la Ligue arabe. Permettez-moi de rappeler que c’est sur ces mêmes bases que l’initiative française avait échoué. N’oublions pas non plus que c’est un coup de force du Hezbollah qui a rendu possible l’élection d’un président de consensus.

Les relations dans la région se détendent : par l’intermédiaire des Égyptiens, Israël et la Syrie ont entamé des pourparlers. Dans ce cadre, le Président de la République a promis que le Premier ministre et Mme la ministre de l’économie visiteraient le Liban afin que les investissements français y soient plus nombreux ; le système éducatif et l’armée recevront également une aide française.

Par ailleurs, Nicolas Sarkozy a repris contact avec le président syrien et l’a invité à participer le 13 janvier à la réunion de l’Union pour la Méditerranée (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC).

ACCORD SUR LA REPRÉSENTATIVITÉ DES SYNDICATS

M. Bruno Le Maire – Nous avons eu ce matin, au sein du groupe UMP, une réunion que le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, n’a pas hésité à qualifier d’historique (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Maxime Gremetz – Arrêtez !

M. Bruno Le Maire – Pour la première fois dans l’histoire du Parlement, l’ensemble des partenaires sociaux se sont retrouvés autour du groupe de la majorité présidentielle pour discuter des questions sociales qui se posent au pays. Je tiens à en remercier son président, Jean-François Copé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Depuis un an, nous construisons avec le Président de la République, le Premier ministre et vous-même, Monsieur le ministre du travail, une démocratie sociale, fondée sur la loi de janvier 2007 sur le dialogue social. Désormais, les partenaires sociaux ont l’initiative du dialogue et de la négociation. Ainsi, nous avons réussi à définir un nouveau contrat de travail, de manière sereine et constructive, et à trouver une position commune sur la représentativité syndicale, qui fera évoluer les règles pour la première fois en soixante ans.

Reste à régler une question majeure, au cœur des préoccupations des entreprises et des salariés : le temps de travail (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Nous savons qu’il n’existe pas d’accords entre les partenaires sociaux sur ce point. Nous souhaiterions savoir, Monsieur le ministre, comment vous entendez concilier la nécessaire simplification du droit en matière de durée de travail et le dialogue auquel nous vous savons attaché ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité – Depuis maintenant un an, les partenaires sociaux ont retrouvé le chemin des pouvoirs publics, qu’il s’agisse de l’Élysée, de Matignon ou des ministères, et le dialogue social fonctionne, n’en déplaise à certains responsables syndicaux.

M. Maxime Gremetz – Vous avez trahi !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Ce sont les mêmes qui disaient que le dialogue social n’aboutirait pas sur la réforme des régimes spéciaux, un mois avant la signature de l’accord historique sur le marché du travail.

M. Maxime Gremetz – Traître !

M. le Président – Monsieur Gremetz, pourriez-vous vous calmer et cesser de perturber cette séance ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – S’agissant de la représentativité et du financement des syndicats, nous respecterons l’esprit et la lettre des accords.

Sur le temps de travail, nous avons toujours dit que nous voulions aller plus loin. Le Président de la République a joué cartes sur table en proposant de maintenir la durée légale du travail à 35 heures, tout en ouvrant la possibilité de sortir du carcan des 35 heures imposées par la négociation dans les entreprises ou par des accords majoritaires. Le Premier ministre l’a écrit noir sur blanc aux partenaires sociaux le 26 décembre : chacun connaissait donc les intentions du Gouvernement, et personne ne peut aujourd’hui invoquer un effet de surprise. Il y a la responsabilité sociale, mais il y a aussi la responsabilité politique que vous incarnez ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP) Nous ne pouvons pas dire aux Français que nous renonçons à sortir du carcan des 35 heures imposées parce que certains syndicats ne le veulent pas ! Nous voulons libérer le travail, et pour cela il faut permettre aux entreprises et aux salariés – avec des libertés et des garanties – de travailler plus. Les propos qu’a tenus le président du groupe UMP à la sortie de la réunion de ce matin ont montré que chacun prenait clairement ses responsabilités. La négociation collective prendra davantage de place dans les entreprises. Personne ne pourra décider seul de la durée du travail, puisqu’il faudra des accords majoritaires…

M. le Président – Je vous remercie.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité – …signés par des organisations représentant 30 % des salariés, sans qu’il y ait plus de 50 % d’opposition. C’est la meilleure des garanties ! Cette position commune n’a certes été signée que par deux des cinq syndicats de salariés, mais ce qui est certain, c’est que vous assumez clairement les responsabilités politiques qui sont les vôtres et que la concertation est une réalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président – Le temps de parole est limité, Monsieur le ministre.

REPRÉSENTATIVITÉ SYNDICALE

M. Jean Mallot – Je n’ai pas tout à fait la même version que vous de la réunion de ce matin, Monsieur Le Maire. Les représentants des salariés s’estiment en effet trahis ; ils disent qu’ils ont été écoutés, mais pas entendus. Nous en reparlerons (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

Répondant la semaine dernière à Alain Vidalies sur la démocratie sociale et les 35 heures, votre ami M. Bertrand, ministre du travail, s’en est tiré par quelques formules politiciennes et par l’esquive – comme quelqu’un qui prépare un mauvais coup. Le sujet est pourtant grave. Les partenaires sociaux ont conclu une position commune sur la représentativité syndicale, et le projet de loi que vous préparez pour la transcrire trahit cet accord. Votre texte entend détruire des pans entiers de nos règles sociales et de notre droit du travail (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) et organise un véritable dumping social entre les entreprises (Même mouvement).

En renvoyant au niveau de l’entreprise la réglementation du temps de travail, il laisse les salariés sans autre protection que la durée maximale hebdomadaire, fixée à 48 heures – pour le moment – par les règles européennes. En modifiant 60 articles du code du travail, il remet en cause le principe du repos compensateur, généralise le forfait jour et laisse entendre que les entreprises pourraient négocier la rémunération des heures supplémentaires (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Les syndicats de salariés – CGT et CFDT – se sentent trahis. Ils se demandent s’ils n’ont pas été manipulés (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Quelle était votre véritable intention en encourageant les négociations sur la représentativité syndicale ? Même le MEDEF – c’est dire – considère que vous allez au-delà de la position commune et juge que votre attitude est une faute qui va instaurer un climat de défiance (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

M. le Président – Calmez-vous, Monsieur Soisson !

M. Jean Mallot – Allez-vous cesser de jouer les apprentis sorciers ? Allez-vous dissocier les deux parties de votre projet de loi et vous en tenir à l’accord conclu par les partenaires sociaux ? Quelle est votre conception de la démocratie sociale ? Le dialogue social suppose de la loyauté, et je m’interroge : que vaut votre parole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité – Vous venez de faire la preuve que pour rencontrer les partenaires sociaux, mieux vaut appartenir au groupe UMP qu’au groupe socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC) Pour parler de dialogue social, encore faut-il avoir des références – et la gauche n’en a guère. Je ne vous renverrai pas à Mme Aubry ; ce serait trop facile ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC) Vous êtes pour le statu quo ; vous voulez que rien ne change ; le problème, c’est que cela commence à se voir : les Français ne vous font plus confiance ; ils ont compris que pour gagner davantage, il fallait travailler davantage, et qu’il fallait libérer le travail – avec des garanties. Dites tout ! Rien ne change sur la durée hebdomadaire du travail, ni sur les repos quotidiens et hebdomadaires. La meilleure des garanties, ce sont les accords majoritaires signés dans les entreprises. Nous voulons qu’à partir de la 35e heure, les heures supplémentaires soient payées 25 % de plus. Nous voulons simplifier notre droit du travail – toujours avec des garanties. Le droit du travail a une histoire, mais il a aussi un avenir !

Il y a toujours le choix entre l’agitation et l’explication, entre l’idéologie et le pragmatisme. Il y a même le choix entre la démagogie et la pédagogie : pour les socialistes, il est toujours temps de changer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; protestations sur les bancs du groupe SRC)

PACTE EUROPÉEN D’IMMIGRATION

M. Thierry Mariani – Le 1er juillet s’ouvrira la présidence française de l’Union européenne. Ce grand rendez-vous sera pour notre pays l’occasion d’afficher ses priorités dans quatre domaines : la politique de l’énergie et du développement durable, la défense, la politique agricole commune et enfin la gestion de nos flux migratoires. S’agissant de ce dernier, nous nous réjouissons de voir que la nouvelle politique d’immigration de la France pourrait être déclinée à l’échelle européenne. Une meilleure maîtrise des flux migratoires, un renforcement de la lutte contre l’immigration clandestine, une nouvelle organisation de la migration légale et une aide renforcée au développement solidaire, autant de priorités qui nous paraissent susceptibles d’être étendues à l’Europe. Vous parcourez ainsi l’Europe depuis plusieurs mois, Monsieur le ministre de l’immigration, pour présenter votre projet de pacte européen sur l’immigration et l’asile. Mardi dernier, la délégation pour l’Union européenne de notre Assemblée a adopté une proposition de résolution soutenant cette démarche. Pouvez-vous nous préciser les grands axes et le calendrier de ce projet ? S’il est mené à son terme, il contribuera largement au succès de la présidence française de l’Union européenne (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire  Pourquoi avons-nous pris cette initiative ? D’abord, parce qu’aujourd’hui, chacun des 27 pays de l’Union décide de sa politique migratoire, ce qui est normal, mais sans concertation avec ses voisins, ce qui l’est moins : dans un espace de libre circulation, la décision d’un État a cependant des conséquences immédiates sur ses partenaires. D’autre part, si 80 % des flux migratoires sont concentrés sur l’Italie, l’Espagne, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France, chacun des 27 se sent concerné par le défi de la gestion des flux migratoires.

Que proposons-nous ? En premier lieu, d’organiser l’immigration légale à l’échelon européen, en coordonnant les politiques nationales, pour favoriser l’intégration. Ensuite, de lutter contre l’immigration illégale, ce que souhaitent tous les chefs d’Etat et de gouvernements, à commencer par M. Zapatero, et de refuser toute régularisation massive (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. Thierry Mariani – Très bien !

M. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration  Nous entendons aussi renforcer la capacité d’action de Frontex, l’agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures. Nous voulons encore mettre au point une définition commune des critères d’obtention du statut de réfugié politique, mais nous savons qu’il y faudra du temps car en cette matière comme en d’autres les cultures sont diverses. Nous voulons enfin aider les pays d’origine à se développer, car il n’est pas de maîtrise possible des flux migratoires s’ils ne se développent pas.

Pour m’être rendu depuis un an dans chacun des pays de l’Union, je puis témoigner que l’accord est entier sur les principes : notre projet commun n’est pas de nous satisfaire d’une Europe forteresse ou d’une Europe passoire, mais de proposer, enfin, des solutions (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP).

HANDICAP

M. Bernard Perrut – Aujourd'hui se tient à Paris la première Conférence nationale du handicap. Nous souhaitons tous construire une société riche de ses différences, humaine et solidaire, comme en témoigne l’adoption, en février 2005, de la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Les progrès sont significatifs et la détermination du Gouvernement et de la majorité toute entière. Pour autant, le texte ne se traduira dans les faits qu'avec la mobilisation de tous – pouvoirs publics, élus, entreprises, associations et citoyens. Les attentes sont encore nombreuses et notre choix du « vivre ensemble » dans la République a ses exigences : des maisons départementales assumant correctement leurs missions ; une compensation du handicap qui permette à chacun de vivre dignement ; un droit à l'éducation permettant à tous les enfants handicapés d'accéder à une scolarité adaptée à leurs besoins ; une cité ainsi conçue que l’accès à l'emploi, à la culture, aux loisirs soient des droits réels ; des aidants familiaux reconnus à leur juste place ; des établissements plus nombreux pour ne laisser personne en attente d'un accompagnement et d'un accueil adapté.

En ouvrant la Conférence nationale du handicap, préparée en concertation avec les associations dont nous connaissons le dévouement, le Président de la République a annoncé un nouvel effort de solidarité nationale, avec la création de 50 000 places en établissements, confirmant par ailleurs son engagement de revaloriser de 25 % l'allocation pour adulte handicapé. Quand et comment appliquerez-vous ce plan pluriannuel, qui suppose aussi de mieux mobiliser les employeurs ? Vous nous proposez une feuille de route incontestablement ambitieuse. Les députés du groupe UMP sont à vos côtés (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. le Président – Je vous demande, chers collègues, de respecter le temps de parole qui vous est imparti.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – La Conférence nationale du handicap nous a donné l’occasion de faire le point sur l’application de la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, trois ans après sa promulgation, et d’ouvrir de nouvelles perspectives en améliorant ce qui doit l’être. Ainsi, dans le cadre de la création du cinquième risque, le statut des maisons départementales du handicap, qui connaissent des difficultés de fonctionnement, sera modifié. En concertation avec les départements, la prestation mensuelle de compensation du handicap pourra être portée à 8 000 euros pour les personnes les plus lourdement handicapées, celles qui ont besoin d’une aide 24 heures sur 24. Le Président de la République a aussi annoncé la création, en cinq ans, de 50 000 nouvelles places. Nous allons par ailleurs, en collaboration avec le ministère de l’éducation nationale, encourager l’accès de 10 000 enfants handicapés supplémentaires à la scolarité « ordinaire ». Cent cinquante mille le sont déjà, soit 20 000 de plus qu’en 2005. M. Sarkozy a confirmé que le montant de l’AAH serait revalorisé de 25 %, ce qui représente un effort de 1,4 milliard. Au total, trois milliards supplémentaires seront consacrés, en cinq ans, à la prise en charge des personnes handicapées (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

HANDICAP

Mme Françoise Vallet – Ma question concerne également le handicap. J’aimerais donc que l’attention de tous soit à la mesure de l’enjeu (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). La Conférence nationale du handicap s’est ouverte ce matin, et toutes les associations seront très attentives aux suites données au plan d’action annoncé, qui n’est pas exempt d’ambiguïtés. De combien de places nouvelles parle-t-on précisément ? Cinquante mille places seront-elles effectivement créées d’ici la fin de la législature, ou 30 00  places seulement ? D’autre part, bien trop nombreuses sont les entreprises qui, plutôt que de remplir leurs obligations légales en embauchant des personnes handicapées, se dédouanent en versant une cotisation à l’AGEFIPH. Comment les incite-t-on à agir autrement ? Et que penser, dans ces conditions, des beaux discours du Président de la République, auxquels on ne peut que souscrire, selon lesquels « la solidarité est nécessaire », ou encore : « les personnes handicapées nous offrent un exemple de courage ». Le candidat Sarkozy disait aussi vouloir que « nos enfants soient scolarisés dans les mêmes écoles que les enfants handicapés ». Faut-il entendre par là que seuls les enfants des autres seraient handicapés ? (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP) Eh oui, mes chers collègues, les mots ont un sens !

Au moment où les moyens de l’école subissent tant de restrictions et où les emplois d’auxiliaires de vie scolaire sont menacés, on peut légitimement douter de la sincérité de tels discours (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Mesdames et messieurs les ministres, dites-nous clairement ce qui sera fait pour la bonne insertion de tous les enfants au cursus scolaire, de sorte que tous – y compris ceux qu’un accident a mis en situation de handicap – puissent accéder à l’emploi à l’issue de leur formation (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. le Président – La parole est à Mme Létard pour une réponse condensée, de manière à ce que chacun puisse poser sa question.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité – Je n’ai aucune différence d’appréciation avec vous sur les besoins de la population en situation de handicap dans notre pays : 5 millions de personnes concernées, 3 milliards supplémentaires pour les cinq années qui viennent.

M. Patrick Lemasle – Et vous les prenez où, les 3 milliards ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État – L’effort global de la nation atteint, tous crédits confondus, 34 milliards, pour aider à la création de places et financer les différentes prestations. Pour considérable qu’il soit, l’effort est loin d’être suffisant et c’est pour cela qu’a lieu la Conférence d’aujourd’hui.

Vous parlez de l’école ? En présence des associations, Xavier Darcos s’est engagé ce matin à permettre à 10 000 enfants de plus d’accéder à l’école ordinaire et à former mieux encore les assistants de vie scolaire et les enseignants.

M. Jean-Paul Lecoq – Avec quels moyens ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État – Le ministre de l’éducation nationale s’est aussi engagé à créer 200 unités pédagogiques d’intégration supplémentaires, conformément au programme de financement des établissements scolaires (Interruptions sur les bancs du groupe GDR).

En outre, ce sont bien 50 000 places qui seront mises en œuvre dans les cinq prochaines années. Le Président de la République ayant précisé que 30 000 seront réalisées avant 2012, l’échéancier est désormais connu de tous.

La priorité est telle que tous les ministres se sont déplacés (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : après ceux qui se sont exprimés ce matin, il y en aura d’autres cet après-midi, dont Laurent Wauquiez. Autant dire que, plus que jamais, le handicap est l’affaire de tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

PÉTROLE

M. Manuel Aeschlimann – Madame la ministre de l’économie, le prix du baril de pétrole continue de s’envoler et semble s’installer durablement au-delà des 130 dollars. Cette situation crée de vives tensions économiques et atteint directement le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Les plus fragiles d’entre eux sont frappés de plein fouet dans leur vie quotidienne. Heureusement, le Gouvernement a su prendre les mesures catégorielles qui s’imposaient pour soutenir les secteurs d’activité les plus sensibles à l’envolée des cours.

Toutes les forces de la nation doivent se mobiliser pour faire face à la situation car chacun en est désormais affecté. Dans ces conditions, les idées sont les leviers d’action les plus efficaces. L’un de nos collègues socialistes vous a posé tout à l’heure une question très négative au sujet du groupe Total (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Je considère pour ma part qu’il faut se montrer constructif, car ce n’est pas en désignant des boucs émissaires que l’on trouvera des solutions valables.

Dans ce contexte difficile, la France a la chance de pouvoir compter, parmi ses forces vives, sur une entreprise comme Total, capable de tenir un rang mondial. Madame la ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur les conditions dans lesquelles le Gouvernement entend travailler avec ce leader de l’énergie, notamment pour aider nos concitoyens les plus modestes à faire face à la hausse durable des prix du carburant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi De votre question, c’est le mot « durable » que je retiens en premier lieu. Oui, nous sommes entrés dans une ère où le pétrole sera durablement cher : depuis le 1er janvier, il a pris 30 % et, au cours des seules journées de jeudi et vendredi, près de 13 % ! Cela signifie, comme le Grenelle du Gouvernement nous y a du reste incités, que nous devons agir sur les comportements et changer nos habitudes de consommation. Ce serait la fierté de votre Assemblée de nous engager à nous comporter différemment ! (Interruptions sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Au milieu des années 1970, on « chassait le gaspi ». Aujourd’hui, nous devons aussi nous orienter vers des consommations différentes, pour le court et le moyen terme. C’est ainsi que nous avons créé la prime à la cuve, d’un montant de 150 euros ; l’an prochain, 700 000 ménages parmi les plus modestes en profiteront à nouveau, pour un montant porté à 200 euros. Le groupe Total concourt à son financement et engage ses concurrents non implantés en France à l’imiter. Parallèlement, EDF et Gaz de France ont mis en place leurs tarifs sociaux pour les ménages les moins favorisés.

À plus long terme, les pôles de compétitivité dédiés aux énergies renouvelables mobilisent des moyens d’État considérable dans la recherche sur les renouvelables, qu’il s’agisse de l’éolien, du photovoltaïque, de la biomasse ou de l’hydrogène…

Plusieurs députés du groupe SRC – Et le vélo ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Là encore, il est de la responsabilité du secteur privé d’intervenir et le groupe Total s’est engagé – après avoir investi 500 millions sur cinq ans dans des énergies renouvelables – à concurrence de 100 millions aux côtés de l’ADEME et de 100 millions dans un fonds pour les entreprises innovantes. Il participe par conséquent à un effort louable de solidarité et nous pouvons l’en remercier (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

FONCTION PUBLIQUE

M. Michel Issindou – Si cette fin de printemps est socialement agitée, c’est que vous avez l’art de mettre les Français dans la rue ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Aujourd’hui, ce sont les fonctionnaires qui manifestent leur ras-le-bol face à votre accumulation de « réformes ». Il faut dire que vous les avez gâtés, avec le non-remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite, une trop maigre revalorisation des traitements et le service minimum ; cerise sur un gâteau déjà passablement indigeste, voilà votre funeste projet de loi sur la mobilité professionnelle ! Avec ce dernier texte, vous avez réussi le tour de force de ressouder la totalité des organisations syndicales. Il est vrai que ce projet apparaît à tous comme un premier pas vers le démantèlement du statut de la fonction publique.

Dans ce texte, sous le vocable séduisant de « mobilité », on trouve le recours à l’intérim – une nouveauté ! –, l’énigmatique « réorientation professionnelle » et l’étranger possibilité de cumuler des temps partiels. Tout cela n’augure rien de bon ! Et que dire de la méthode ? Après avoir vanté – beaucoup, et réussi – rarement, la négociation avec les partenaires sociaux, vous retombez dans le travers du passage à la hussarde !

M. Jean-Pierre Soisson – Et le passage aux 35 heures, il a été négocié ?

M. Michel Issindou – Vous avez tort de croire que les Français vont vous suivre car ils sont très attachés au maintien de services publics proches et de qualité.

Quant aux fonctionnaires, ils ne sont pas hostiles à la réforme dans un environnement qui bouge. Ils ont simplement besoin d’un peu de temps, d’écoute et de la considération que vous êtes incapables de leur manifester.

Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous prendre le temps de débattre sérieusement avec les fonctionnaires sur les vraies réformes dont a besoin la fonction publique, sans subir les oukases d’une majorité qui vous pousse à la casse sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique – Monsieur le député, votre question est posée d’une manière très excessive… (Interruptions sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) La grève d’aujourd’hui – et je note au passage qu’il y a pratiquement une grève chaque mois depuis quelque temps – est très peu suivie puisque moins de 3 % de fonctionnaires étaient déclarés grévistes à 12 heures 30, ce dont on ne peut que se réjouir. C’est la preuve que le dialogue social fonctionne. Nous avons en effet signé avec quasiment toutes les organisations syndicales un accord, ce qui n’avait jamais été fait depuis 1946, sur ce dialogue social, que nous souhaitons enrichir.

Nous voulons que les fonctionnaires, certes moins nombreux car nous devons réduire leurs effectifs, puissent avoir des carrières plus riches, des parcours plus intéressants et une mobilité au sein de la fonction publique, aujourd’hui souvent entravée par le statut. Nous avons donc décidé de faire évoluer celui-ci. À partir du travail approfondi que nous avons demandé à M. Silicani, nous avons engagé hier même la concertation sur ce sujet ainsi que sur les contrats, les modes de rémunération, ou encore la fonction publique de métiers.

Vous le voyez, les choses bougent, et il le faut, dans l’intérêt même des fonctionnaires et du service public. Lors de l’examen qui aura lieu ici prochainement du projet de loi relatif à la mobilité, déjà adopté par le Sénat, nous débattrons des règles permettant d’assurer aux fonctionnaires une meilleure mobilité. Aujourd’hui, 5 % seulement d’entre eux sont mobiles, ce qui n’est pas normal dans le monde d’aujourd’hui. C’est le signe que les outils à leur disposition ne sont pas les bons. La mobilité sera au contraire une grande chance pour une fonction publique, que nous respectons et que nous aimons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. le Président – Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20 sous la présidence de M. Salles.

PRÉSIDENCE de M. Rudy SALLES
vice-président

RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Pierre Gosnat – Rappel au Règlement sur le fondement de l’article 58, alinéa 1, de notre Règlement. Un événement grave s’est produit cette nuit, en fin de séance, lors du vote sur les amendements de suppression de l’article 32, article très sensible qui avait fait l’objet d’une importante discussion. Alors que les députés de droite n’étaient manifestement pas majoritaires, nous avons constaté que la gauche avait été dessaisie de ses délégations de vote, ce que les services de l’Assemblée nous ont confirmé ce matin.

Cet acte délictueux, dont plusieurs collègues m’ont assuré qu’il était extrêmement rare, est inadmissible ; nous contestons le résultat du scrutin et exigeons qu’il soit de nouveau procédé au vote. En outre, le président de séance concerné, auquel plusieurs d’entre nous ont fait part de leur indignation, doit s’expliquer sur les conditions dans lesquelles il l’a validé.

M. François Brottes – Sans mettre en cause la présidence, force est de constater que les délégations dont disposait notre groupe n’ont pas été activées, pour des raisons inconnues – sur lesquelles M. le président pourra peut-être nous éclairer –, ce qui remet en cause le résultat du scrutin. Or si nous avions demandé un scrutin public, c’était afin que chacun puisse s’exprimer sur un article relatif aux impatriés qui opposait frontalement la gauche et la droite. Cette situation est donc inacceptable.

Nous avons alerté nos présidents de groupe pour que la conférence des présidents se saisisse de cette question. En outre, afin que cet incident ne puisse se reproduire, nous demandons des explications et l’organisation d’un nouveau vote propre à garantir l’objectivité démocratique.

M. le Président – Les amendements de suppression de l’article 32 ont été repoussés par quarante voix contre dix-neuf : l’écart était donc sans équivoque (Protestations sur les bancs du groupe GDR).

M. André Chassaigne – Justement !

M. le Président – Laissez-moi m’exprimer ! Je ne présidais pas la séance d’hier soir, mais ces éléments ont été enregistrés par le secrétariat général et dûment vérifiés ; il n’y a donc pas là matière à soupçon.

En revanche, vous auriez dû déposer et faire enregistrer vos délégations de vote avant la séance…

Plusieurs députés du groupe GDR – C’est ce que nous avons fait !

M. le Président – …ce qui n’a pas été fait.

Plusieurs députés du groupe GDR – Si !

M. le Président – Non, mes chers collègues, pas par tous les groupes. Et je tiens à votre disposition la liste détaillée des présents et des votants (Protestations sur les bancs du groupe GDR).

M. André Chassaigne – Cela ne va pas ! Un peu d’honnêteté, voyons !

M. François de Rugy – Monsieur le président, j’étais là hier soir, de même que MM. Chassaigne, Gosnat et Lecoq. Au moment du scrutin, dix-neuf députés des groupes GDR et SRC étaient présents, mais les députés des groupes UMP et NC n’étaient manifestement pas quarante ! Le résultat du scrutin nous a donc beaucoup surpris.

Les services de notre groupe et ceux de l'Assemblée nationale nous ont expliqué que nos délégations de vote avaient été effacées à la suite d’un problème informatique ; quoi qu’il en soit, la confirmation que nous avions envoyée hier après-midi par télécopie n’a pas été prise en compte. Pourtant, les délégations sont normalement enregistrées pour sept jours glissants ! Sans mettre en cause ni la présidence ni les services de l'Assemblée nationale, pourquoi ne pas reconnaître ce dysfonctionnement ? Et pourquoi celui-ci n’a-t-il pénalisé que les députés de gauche ?

M. André Chassaigne – À droite, ils étaient vingt !

M. François de Rugy – En attendant de disposer d’explications dignes de ce nom, nous demandons une suspension de séance.

M. le Président – En premier lieu, les délégations de vote ne sont pas valables pour sept jours, mais déposées entre deux séances pour la séance suivante. Il y a effectivement eu un problème informatique pour les votes de la séance de l’après-midi, mais pas pour celle du soir. Donc les délégations de vote n’ont pas été transmises et enregistrées comme vous l’affirmez. Les services sont à votre disposition pour vous communiquer le relevé qui a été fait de tous ceux qui ont voté.

Dans ces conditions, l’incident est clos, de mon point de vue du moins.

Monsieur de Rugy, vous demandez une suspension de séance. Avez-vous délégation pour votre groupe ?

M. Daniel Paul – J’ai la délégation et je demande une suspension.

M. le Président – Elle est de droit.

La séance, suspendue à 16 heures 30, est reprise à 16 heures 40.

M. François Brottes – Rappel au Règlement. Cette suspension a été utile. Nous avons pu constater que le résultat du vote d’hier, avec ou sans délégations, aurait été le même. Nous en prenons acte. Néanmoins, nous avons appris qu’il y a eu une petite modification de procédure dont nos groupes n’ont pas été avertis. De ce fait, ils n’ont pas fait ce qui devait l’être. Sans entrer plus dans les détails, cet incident est quand même dommageable pour la sérénité de nos travaux. Mais nous sommes vaccinés désormais.

M. François de Rugy – Nous n’accusions personne de malhonnêteté et nous prenons acte de ces résultats. Nous souhaitons aussi qu’il soit pris acte du fait qu’il y a eu un déséquilibre manifeste dans la saisie des procurations des différents groupes, afin que toutes les mesures soient prises, s’il s’agit d’une panne informatique, pour que ce type de déséquilibre, dont les conséquences politiques auraient pu être importantes, ne se reproduise pas. Sinon, il y aura suspicion sur chaque scrutin public, alors que c’est justement le mode de scrutin qui doit assurer le plus de transparence.

Encore une fois, au compte rendu du vote on indique la présence de quatre députés du groupe GDR. Nous étions bien quatre, mais nous avions saisi chacun une délégation. Il est nécessaire que toutes les mesures soient prises pour que cela ne se reproduise pas. Faute de quoi, il faudrait en revenir à la saisie papier des délégations de vote, afin que nous puissions les contrôler. On ne peut nous accuser de mensonge en ce qui concerne la saisie de nos procurations : nous les avons saisies, elles n’ont pas été enregistrées.

M. le Président – Il nous faut effectivement être très vigilants sur toutes les questions relatives au vote, et ce dans toutes les circonstances. Ainsi, il y a quelques semaines, une motion de procédure a été adoptée par l’opposition, alors même qu’il y avait plus de députés de la majorité présents dans l’hémicycle – ce sont des problèmes de couplage qui ont fait que l’opposition l’a emporté d’une voix – et qu’il y avait de nombreux députés dans les locaux de l’assemblée. Seulement, dans les salles de commission, on n’a aucune information sur ce qui se passe en séance. J’ai d’ailleurs demandé, lors de la dernière réunion du bureau, que l’on place des écrans de télévision dans les salles de commission, de façon à ce que, pour les votes importants, les députés puissent rejoindre l’hémicycle. Cette mesure a été adoptée. D’autre part, en tant que président délégué à l’informatique et aux nouvelles technologies, je mène une réflexion avec les services pour rendre le système de vote infaillible, et pour éviter aussi que certains députés soient tentés d’appuyer sur le bouton situé sur le pupitre du voisin, ce que, depuis le perchoir où j’ai une vue panoramique, j’ai vu faire de temps à autre. Nous réfléchissons à la possibilité de voter avec les empreintes digitales.

Je vous remercie en tout cas de la tonalité de cette discussion. Nul n’est accusé de mensonge, nul ne met en cause la bonne foi de qui que ce soit, et surtout pas du service de la séance qui fait son travail très consciencieusement.

MODERNISATION DE L’ÉCONOMIE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi de modernisation de l’économie.

ART. 33

M. le Président – Sur cet article, c’est le rapporteur de la commission des lois qui donnera l’avis de la commission.

M. Alain Rousset – La réussite de l’autorité de gestion des fonds européens par la région Alsace devrait autoriser la généralisation à l’ensemble des régions, dans un objectif de simplification et de réduction des délais de gestion. Je regrette que la commission des finances ait opposé l’article 40 à un certain nombre de mes amendements, alors même que les crédits d’ingénierie des fonds européens n’ont pas d’impact sur les crédits d’État.

Madame la ministre, pourriez-vous nous expliquer la teneur de cet article ? Il me semble que nous devrions en finir une fois pour toutes avec le centralisme de la gestion des fonds européens, quand la nécessité de l’innovation et de la proximité plaident pour une responsabilité des régions et que l’Europe se plaint de ne pas voir les processus de Lisbonne et de Göteborg se concrétiser.

Je n’ai pas eu l’occasion de prendre part à la discussion générale pour dire combien je regrette que ce texte fasse si peu de cas des régions, compétentes en matière de développement économique. Les présidents de région auraient aimé, pour le moins, être consultés lors de l’élaboration du projet de loi.

Même si elles ont moins de moyens que leurs homologues européennes, ces collectivités portent une part de l’innovation, du transfert technologique et de la modernisation économique. Chez nos voisins, le point de croissance que vous recherchez est obtenu grâce à l’autorisation des Länder ou des régions. La France devrait, à son tour, moderniser son dispositif de développement économique.

M. Daniel Paul – En période de pénurie budgétaire et de baisse drastique de la dépense publique, les fonds européens constituent des aides précieuses pour les politiques de formation, d'insertion et d'emploi. Les collectivités tentent ainsi de pallier le désengagement de l'État, qui se traduit par une suppression emblématique des outils de politique publique – baisses des crédits destinés à la politique de la ville, suppression des stages d’insertion et de formation professionnelle à l’emploi, suppression du FASILD au détriment des personnes immigrées soucieuses de suivre des cours de français.

La poursuite du transfert de la gestion des fonds communautaires aux régions va dans le bon sens. L’article 33, en cohérence avec la politique de décentralisation menée par le gouvernement Raffarin, autorise les régions à passer outre la décision du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires de mars 2006, qui avait confirmé le choix d'une gestion étatique des crédits européens.

Cependant, seules les régions sont concernées, alors que la compétence en matière d’insertion, volet concerné par le FSE, revient aux départements. D’ailleurs, la loi du 13 août 2004 ne permettait-elle pas aux conseils généraux de se porter candidat à l’expérimentation pour la gestion des crédits du FSE ? Chefs de file de l'action sociale, les départements souhaitent légitimement se voir confier la mission de gestion, lorsque les actions relèvent du FSE.

Leur implication s'est accrue de 2004 à 2006 dans la gestion directe des crédits du FSE : plus de 53 départements y prennent part aujourd’hui, et ont renforcé leurs services et leurs équipes pour appliquer les règles de gestion propres au FSE.

Votre politique demeure incohérente : d'un côté, vous décentralisez vers les départements une politique coûteuse, de l’autre, vous remettez en cause l’esprit de la décentralisation. Après être apparu comme un gestionnaire impartial, force est de constater que l’État choisit désormais de préempter les crédits du FSE pour abonder ses propres politiques.

Les départements se trouvent doublement pénalisés : ils doivent assumer à une décentralisation des compétences en matière d'insertion sans dotation globale de fonctionnement suffisante et ils se voient privés de la gestion du FSE pour abonder leurs politiques d'insertion. Nous souhaiterions que cette incohérence soit explicitée. Par ailleurs, les départements regrettent à l'unanimité que les dispositions votées lors de l'Acte II de la Décentralisation aient disparu dans le nouveau projet de loi.

M. Jean-Louis Gagnaire – L’article premier de la Constitution est absent de ce texte, au point que l’on se demande si l’organisation de ce pays est bien décentralisée.

La gestion des fonds européens n’est pas une lubie de quelques députés-conseillers régionaux. Le Conseil d’État, dans son rapport de 2007, a noté que la gestion déconcentrée des fonds structurels, confiée aux préfets de région, aboutit à un délai de deux ans entre le moment où la commission décide de l’octroi des fonds et celui où les collectivités territoriales les perçoivent. Le délai moyen, chez nos voisins, est de six mois. Madame la ministre, si vous voulez mettre la France au standard européen, il vous faut réformer en profondeur le système actuel.

Pourquoi les fonds européens, octroyés par l’Europe, devraient-ils servir de financements à un État impécunieux qui n’a pas les moyens de financer ses propres politiques ?

L’amendement 603 propose d’inverser la logique. La gestion doit être accordée aux collectivités qui le demandent : il en va de l’efficacité des politiques européennes et de la fiabilité des décisions. En effet, j’ai vu trop souvent des préfets changer la règle du jeu et finalement priver des collectivités territoriales ou des entreprises d’un financement qu’elles espéraient depuis longtemps. Nous attendons, Madame la ministre, que vous mettiez fin à ce mode de fonctionnement.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis de la commission des loisJe ne peux que partager les objectifs visés par MM. Gagnaire et Rousset. Mais il y a eu une négociation pour l’attribution des fonds européens sur la période 2007-2013 et il est difficile de changer aujourd’hui la règle du jeu. Nous approuvons les principes inscrits dans la loi de 2004 et nous les maintenons dans ce texte. Un bilan de l’expérimentation sera dressé en 2011. Avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi L’article 33 vise à donner une base légale à une disposition qui vient à échéance, l’expérimentation destinée à déléguer à la région Alsace la gestion des fonds Feder. Un premier rapport a été remis en 2006, qui n’était pas concluant. Nous proposons donc de poursuivre cette expérimentation en élargissant son champ d’application. Un bilan est prévu en 2011 qui permettra d’envisager sa généralisation éventuelle. Je rappelle qu’il ne s’agit pas ici de se conformer au modèle des Länder allemands, notre pays ayant ses particularités en matière de décentralisation. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Gagnaire – Les explications ne sont pas satisfaisantes. Comme l’a démontré le Conseil d’État, il existe des dysfonctionnements. Faute de réactivité – le délai de deux ans est inacceptable – des crédits européens sont perdus.

Madame la ministre, je m’attendais à ce que, pour le moins, vous vous engagiez à intervenir auprès des préfets de région pour que ces délais soient réduits et qu’ils ne renégocient pas ce qui a été négocié en 2006. Nous ne comprenons pas cette attitude des services de l’État : recevraient-ils des consignes pour ne pas honorer les contrats conclus en 2006 ?

La décentralisation de la gestion des fonds fonctionne chez nos voisins, et pas seulement en Allemagne. Il est dommage de se fixer un horizon à 2012 car je crains qu’alors, il ne soit plus utile de réfléchir à une nouvelle organisation de l’utilisation des fonds européens.

M. Alain Rousset – Permettez-moi de poursuivre la réflexion. La loi n’interdit pas de nous donner la totalité de la fonction d’autorité de gestion, Monsieur le rapporteur. Il fallait en effet donner une base légale à l’autorité de gestion de la région Alsace – et c’est ce que vous faites. Mais il est difficile d’analyser une expérimentation qui n’a été menée que dans une région sur 26 ! Quelle expérimentation souhaitez-vous donc proposer aux régions, Madame la ministre ? Je rappelle que l’expérimentation de la région Alsace se déroule sur deux fois deux ans, et que cette région dépense entre une et deux fois moins que ce que dépensait l’État pour la gestion des fonds européens.

Les régions ayant une délégation globale, la région et l’État doublonnent pour répondre aux demandes de subventions. Or vous souhaitez au contraire simplifier les formalités et réduire le nombre des agents publics. Il y a là une occasion manquée de simplification !

Les fonds de compétitivité sont-ils concernés par les expérimentations ? Nous étions la semaine dernière à Bruxelles avec le président Barroso et Mme Hübner pour nous interroger sur l’avenir des fonds européens de cohésion, de compétitivité et de développement. Il n’est pas sûr que nous ayons encore ces fonds à notre disposition après la période 2011-2013. Et nous ne sommes pas capables de présenter à Bruxelles une expérimentation concluante ! Engagez-vous au moins à étendre l’expérimentation, Madame la ministre !

La région Aquitaine est frontalière du Pays basque espagnol, de la Navarre ou de l’Aragon. Elle est autorité de gestion sur des fonds INTERREG : je peux vous dire que les régions espagnoles nous donnent des leçons de rapidité, de simplicité, d’efficacité et de contrôle dans la gestion des fonds européens. Nous aurions beaucoup à gagner à nous en inspirer.

L'amendement 603, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alain Rousset – L’amendement 602 visait à lever toute ambiguïté quant à la fonction d’autorité nationale. Je souhaitais en fait obtenir des précisions sur les responsabilités respectives des autorités de gestion et des autorités nationales : que se passe-t-il, par exemple, si l’autorité de gestion de fonds interrégionaux siège de l’autre côté de la frontière ? Le Premier ministre a répondu à cette question. Si les explications de Mme la ministre peuvent elles aussi rassurer les autorités nationales ou les autorités de gestion, je retirerai donc l’amendement.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie La notion d’autorité nationale « correspondante de l’autorité de gestion » permet de préciser que l’autorité de gestion du programme de coopération territoriale, qu’elle soit française ou étrangère, doit s’appuyer sur un répondant national, garant de la bonne mise en œuvre des réglementations nationales et communautaires pour la partie française du programme. Autorité de gestion et autorité nationale sont donc deux fonctions distinctes mais complémentaires. Même lorsqu’une région assure la fonction d’autorité de gestion, elle doit séparer en son sein la fonction d’autorité nationale et celle d’autorité de gestion. Il est donc nécessaire de maintenir le texte de l’article sur ce point. J’espère que ces observations confortent celles du Premier ministre et vous permettront de retirer cet amendement…

L'amendement 602 est retiré.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Les amendements 111, 112 et 113 sont rédactionnels.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Favorable.

L'amendement 111, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 112 et 113.

L'article 33 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ARTICLE 33

M. Christian Jacob – Le transfert de nombreuses unités consécutif aux restructurations du ministère de la défense est une réforme légitime et nécessaire, à la fois pour une bonne gestion de nos finances publiques et pour l’efficacité de notre défense. En termes d’aménagement du territoire, les conséquences en sont cependant importantes. Or la modernisation de l’économie, c’est aussi une répartition harmonieuse de l’activité sur le territoire.

L’amendement 524 tend donc à mettre en place un dispositif de compensation et d’accompagnement pour maintenir de l’activité dans ces zones. Quand une entreprise privée ferme ses portes, la loi l’oblige à présenter un plan social. Pourquoi l’État ne s’appliquerait-il pas les mêmes exigences en s’obligeant à accompagner les collectivités pour créer de l’attractivité ? L’amendement est ciblé sur les secteurs classés en zone de revitalisation rurale ou en AFR, donc sur les zones particulièrement fragiles.

On me répondra que le déplacement d’un régiment n’a rien à voir avec des licenciements. Certes, mais un régiment de 1 000 militaires qui s’en va, ce sont 2 000 consommateurs de moins, et on a vite fait d’entrer dans une spirale infernale. L’aménagement du territoire n’est pas une charge : c’est un investissement.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – L’avis de la commission est hélas défavorable. Nous partageons la philosophie de cet amendement, mais sa portée est trop générale. Mieux vaut que l’État puisse agir au cas par cas.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Le Gouvernement partage votre préoccupation, Monsieur Jacob. Mais la situation de nos finances publiques ne nous permet pas d’augmenter les dotations existantes ni d’en créer de nouvelles. Il existe d’ailleurs déjà des outils à la disposition des collectivités affectées par ces transferts. Le ministère de la défense cofinance ainsi, avec le préfet et la DIACT, les projets susceptibles de recréer de la richesse. L’Agence française pour les investissements internationaux intervient régulièrement pour essayer de faire venir des investisseurs étrangers sur les sites libérés par nos militaires. Le Fonds pour les restructurations de la défense – FRED – finance les études nécessaires aux projets du type de ceux que vous évoquez. Ses crédits vont être doublés en trois ans. Au bénéfice de ces explications, je vous serais donc reconnaissante de retirer votre amendement.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – M. Jacob pose un problème qui dépasse le cadre de ce texte, et je veux que l’on sache que la commission chargée de l’aménagement du territoire s’y intéresse aussi. Une politique doit pouvoir être lue en termes d’aménagement du territoire, Madame la ministre. Notre commission n’a pas encore le sentiment de pouvoir le faire.

M. Jean Gaubert – Bravo !

M. Patrick Ollier, président de la commission – L’équilibre du territoire oblige à mettre en place un système de vigilance et un certain nombre d’instruments, surtout à l’heure où l’Europe réduit ses crédits. Je me suis réjoui de la désignation d’un secrétaire d’État à l’aménagement du territoire, mais elle ne remonte qu’à quelques semaines. Cet amendement est important : je soutiens le Gouvernement dans sa volonté de maîtriser nos finances publiques, mais il doit nous apporter rapidement des réponses en matière d’aménagement du territoire.

Nous examinerons tout à l’heure un autre amendement de M. Jacob, le 521, dans lequel nous nous reconnaissons pleinement et qui pose le principe d’une étude d’impact avant tout départ. Nous soutenons les restructurations – qui sont nécessaires – mais il faut mettre en œuvre une politique de compensations. Ne pas le faire, c’est aller au devant de difficultés avec la population. Je vous remercie de transmettre ce message à M. le Premier ministre, Madame la ministre (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP).

M. François Brottes – Nous avons eu un long débat à ce sujet en commission. Y eût-il assisté, le rapporteur de la commission des lois aurait peut-être exprimé un avis moins lapidaire. Sans doute, effectivement, l’incidence de la fermeture d’une caserne dans une petite ville est-elle plus forte que dans une agglomération plus grande et plus active.

Mme Catherine Vautrin – Et encore… C’est à voir.

M. François Brottes – En effet. Pour toute agglomération, c’est un fort traumatisme de voir des dizaines de salariés s’en aller, fussent-ils fonctionnaires… Aussi voterons-nous l’amendement si M. Jacob le maintient. Quant aux études d’impact… Non seulement M. de Villepin nous avait déjà fait le coup pour les fermetures de classes et de postes, avec le résultat que l’on sait, mais dans le cas qui nous occupe, le processus est déjà en cours. Dans ces conditions, vous voudrez bien admettre qu’une étude d’impact dont les résultats seront connus quand l’impact réel sera mesuré depuis un an ou deux n’est pas passionnante… Votez cet amendement, collègues de la majorité ! Vous ne mettrez pas le Gouvernement en péril, puisque l’on renvoie à un décret sur lequel il aura la dernière main !

M. Jean Gaubert – Je comprends parfaitement le désarroi des collègues élus d’une ville de 10 000 habitants qui va perdre 500 militaires. Lorsque l’établissement est la seule activité d’ampleur dans la commune, c’est un drame. Pour l’avoir vécu en 2000, je puis en parler savamment – j’ai failli, pour cela, perdre les élections législatives ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP) Eh oui, chers collègues, c’est que vous êtes plus malins : alors que la gauche annonce ce qu’elle fera avant les élections, vous ne le faites qu’après…

S’agissant des compensations financières, le Gouvernement doit absolument faire des efforts, et il le peut. Vous avez, Madame la ministre, évoqué le Fonds de restructuration de la défense ; ce faisant, soit vous avez commis un lapsus soit vous avez réduit vos ambitions car, initialement, le FRED finançait des études mais aussi des projets. Vous allez l’abonder, avez-vous précisé ; soit, mais l’ampleur des besoins est supérieure à ce que vous prévoyez, et sur des secteurs plus concentrés qu’ils ne l’étaient en 2000, époque à laquelle on disposait de surcroît des fonds FEDER, grâce auxquels nous avons pu financer à plus de 80 % les restructurations nécessaires à Dinan. De grands moyens seront nécessaires, sans lesquels la situation sera très difficile à gérer.

M. Christian Jacob – Le Gouvernement doit prendre conscience que le sujet est de la plus haute importance. Il en va de l’aménagement du territoire et de la répartition de l’activité économique sur notre sol. Il ressort des propos de M. Brottes et de M. Gaubert que si je maintenais l’amendement, il serait adopté. Le Gouvernement doit prendre acte que les attentes sont très fortes sur tous les bancs. À M. le rapporteur de la commission des lois, je tiens à faire observer qu’il ne s’agit pas, comme quand on ferme un tribunal d’instance, un tribunal de commerce ou une trésorerie – toutes fermetures qui ont eu lieu dans ma ville – de trois ou quatre emplois, mais de cinquante au minimum. De plus, l’amendement, loin d’être général, est très précis puisqu’il est prévu pour s’appliquer aux zones de revitalisation rurales ou aux zones d’aides à finalité régionale. Des mesures de compensation sont nécessaires, que l’on ne peut renvoyer aux calendes grecques – elles devront figurer dans le projet de loi de finances. Ayant pris acte de votre réponse, madame la ministre, je retire l’amendement (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. François Brottes – Il est repris.

M. Patrick Roy – M. Jacob a raison, mais il manque de courage…

L'amendement 524, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président – Nous en venons à la discussion commune des amendements identiques 446 et 658, des sous-amendements 1499 et 1556, et de l’amendement 45.

M. Charles de Courson – La question est importante. Le code général de la propriété des personnes publiques dispose que, préalablement à leur cession, les terrains doivent être dépollués. Mais qu’advient-il lorsque le coût de la dépollution excède celui du terrain ?

M. François Brottes – Nous avons abordé la question en commission.

M. Charles de Courson – Sans doute, mais cela ne transparaît pas dans le projet et il doit être précisé que l’État versera une somme à cette fin. D’autre part, des situations ubuesques se produisent, car l’État a parfois autorisé le transfert d’immeubles situés sur des terrains qui n’ont pu être transférés, et les communes de s’étonner : ces biens ne sont pas soumis à l’impôt local, au motif que le terrain est exonéré. D’évidence, le Gouvernement doit dire clairement quelle est sa doctrine à ce sujet.

Mme Catherine Vautrin – Il arrive que des communes soient soumises à une sorte de double peine : non seulement la dépollution, coûteuse, n’est pas prévue, mais les extensions d’immeubles souhaitables sont, de ce fait, impossibles. Il est temps de transformer cette gifle en caresse (Sourires) et d’inscrire dans le texte que l’acquéreur peut se charger de la dépollution, dont le coût serait imputé sur le prix de vente. C’est l’objet de l’amendement 658, identique au 446 de la commission. Mais il serait bon de savoir si le Gouvernement est prêt à aller plus loin si le prix de cession du terrain est moindre que le coût de la dépollution. Un engagement en ce sens serait la marque d’une forte volonté d’aménagement du territoire.

M. Michel Piron – Forte mais tendre… (Sourires)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Je suis favorable aux amendements identiques 446 et 658 qui tendent à faciliter la cession des terrains pollués du ministère de la défense mais à concurrence de zéro. Autrement dit, le coût de la dépollution peut s’imputer sur le prix de vente mais l’État n’ira pas au-delà si ce coût excède le prix de cession. Pour autant, il convient de ne pas créer d'obligation systématique de recours à un organisme tiers car l'administration dispose de compétences internes qu'elle pourra mobiliser. C’est le sens du sous-amendement 1499.

M. Charles de Courson – En 1992, après que le conseil général de la Marne a négocié avec l’État la cession de la plateforme de Vatry au terme d’une évaluation conduite par les Domaines, les actes ont été signés. Dix-huit années se sont écoulées, et nous n’avons jamais pu payer notre acquisition !

C’est quand même bizarre comme situation ! Alors, pourquoi ? Parce qu’on découvre que, du temps des militaires, il y a eu une fuite dans le pipeline qui amenait l’essence aux pistes, d’où une poche de pollution assez profonde, à sept ou huit mètres. L’État refuse de s’en occuper mais nous a autorisés à continuer de construire la piste. On achève les travaux – zones de fret comprises – mais, en 2008, nous sommes toujours dans la même situation !

L’amendement de Mme Vautrin et de la commission résout le problème. Mais pas celui des communes d’implantation qui s’étonnent de ne pas toucher de taxe professionnelle sur le foncier bâti pour ce qui concerne la partie commerciale de ce qui est sorti de terre. Comme on a construit sur un bien toujours pas transféré, il demeure exonéré. Et je gage que le cas de Vatry n’est pas unique en France.

Mon sous-amendement 1556 – que je retirerai si Mme la ministre prend des engagements en séance ou si elle le juge superflu – dit que lorsqu’on a construit sur un terrain qui n’a pu être transféré, l’administration fiscale établit les bases, de façon à ce que les tiers puissent payer normalement leurs impôts.

M. Guy Teissier – Mon amendement 45 est voisin de celui de Catherine Vautrin. Il tend à faciliter la vente des implantations foncières détenues par le ministère de la défense. Avec les restructurations qui se préparent, nombre de sites vont être libérés, parfois sur des emplacements très recherchés, notamment en centre-ville. Plusieurs devront être dépollués et mon amendement vise à exonérer le ministère de la défense de ces opérations longues et coûteuses, aujourd’hui à la charge du vendeur.

Compte tenu du budget restreint du ministère de la défense, il lui est difficile de mener à bien la dépollution des sites et cela retarde d’autant les opérations de vente, au détriment de sa trésorerie. Mon amendement demande par conséquent que l’acquéreur prenne à sa charge la dépollution, sous le contrôle des services de l’État. Le coût de ce transfert serait neutre, le ministère déduisant le coût de la dépollution du prix de vente. L’État n’y perd donc pas et, surtout, il peut vendre beaucoup plus rapidement ses emprises.

Enfin, l’amendement simplifie les procédures de fixation du prix, en évitant de soumettre la totalité des opérations à l’expertise de France Domaine. L’idée est d’accélérer la cession du foncier et de créer de l’activité partout où cela sera possible, pour éviter que certaines bases ne servent que quelques fois par an… à des rave parties !

Mme Catherine Vautrin – Je me permets de revenir sur les commentaires de Mme la ministre, dont je salue l’ouverture et la volonté de satisfaire nos demandes. Ce qui me gêne, Madame, c’est de vous entendre dire que l’État n’ira pas plus loin que le zéro. Chacun sait que les friches militaires n’ont pas la même valeur en centre-ville et dans une zone rurale. Dans une grande ville, l’enveloppe de dépollution sera forcément plus élevée. Par contre, en milieu rural, le foncier disponible est souvent meilleur marché car plus important…

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Sauf en Champagne !

Mme Catherine Vautrin – En effet ! Mais dans les territoires où le foncier est moins tendu, on risque de toucher aux limites de l’aménagement du territoire. Or l’objectif premier de notre amendement est, dans une perspective d’aménagement du territoire, de redonner du pouvoir d’attraction à certains sites. Si l’enveloppe de dépollution accordée est trop faible, nous ne remplissons pas notre objectif d’aménagement.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis Tous ces amendements poursuivent un objectif de bon sens. Des garanties figuraient dans le texte du Gouvernement mais les initiatives de nos collègues prévoient que le prix de vente sera fixé par un organisme expert, choisi par les parties d’un commun accord. Le Gouvernement souhaite restreindre cette intervention extérieure à la seule détermination du coût de la dépollution et la rendre facultative.

Je suis favorable au sous-amendement de M. de Courson car il apporte une précision utile. Lors de ses travaux préparatoires, la commission des affaires économiques a également souhaité que l’expert choisi par les parties soit indépendant.

Avis favorable aux sous-amendements 1556 et 1499, l’amendement 45 de M. Teissier se trouvant ainsi satisfait.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Le Gouvernement est favorable aux amendements 446 et 658, sous réserve de l’adoption du sous-amendement 1499 que j’ai défendu tout à l’heure. Je lève le gage et je donne un avis favorable au sous-amendement 1556 de Charles de Courson. Je tiens cependant à préciser que comme nous avons reçu ce sous-amendement très tardivement, je n’ai pas fait procéder à l’expertise fiscale qui s’imposait. J’accepte cependant cette proposition car j’en reconnais le bien-fondé.

M. François Brottes – Nous avons voté les amendements 446 et 658 en commission et il n’y aucune raison que nous ne le fassions pas en séance !

Une fois n’est pas coutume, je trouve que le sous-amendement de M. de Courson est très utile et qu’il n’y a donc aucune raison qu’il le retire. Par contre, le sous-amendement 1499 du Gouvernement me semble d’une grande perversité ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) D’un coup d’un seul, vous évacuez l’expert indépendant, auquel notre commission était pourtant légitimement attachée : lorsque l’État est juge et partie, force est d’admettre qu’il prend généralement parti pour lui ! C’est humain et cela se produit quelle que soit la couleur politique de la majorité. Forts de notre expérience d’élus locaux, nous émettons les plus grands doutes quant à la capacité d’expertise indépendante de l’État.

Vous évacuez, disais-je, l’expert indépendant…

M. Jean-Paul Charié, rapporteur de la commission des affaires économiques – Mais non !

M. François Brottes – Mais si ! Et, du même coup, vous évacuez la question du prix de vente ! On ne traite plus du prix de vente mais seulement du coût de la dépollution. C’est un changement de fond par rapport à l’amendement de Mme Vautrin tel que la commission l’a adopté. On en vient à considérer que le prix de vente n’est plus lié aux prix du marché, puisque la nécessité de procéder à une dépollution justifie un prix inférieur. Cependant, il est à craindre que l’État peine à admettre un autre prix, compte tenu de la charge de la dépollution. Mme Vautrin avait repéré le problème…

Mme Catherine Vautrin – Ce n’est pas faux…

M. François Brottes – Las, le sous-amendement du Gouvernement annule une bonne part de l’effet de son amendement. C’est pourquoi nous ne voterons pas le sous-amendement 1499.

Le sous-amendement 1499, mis aux voix, est adopté.

Le sous-amendement 1556, mis aux voix, est adopté.

Les amendements 446 et 658 ainsi modifiés, mis aux voix, sont adoptés.

M. François Brottes – Adoptés, mais privés de leur sens !

M. le Président – L’amendement 45 de M. Teissier est satisfait.

M. Charles de Courson – Un mot pour prévenir tout contentieux sur l’interprétation du vote auquel nous venons de procéder : Mme la ministre a expliqué qu’elle était défavorable à un coût de dépollution supérieur au prix de vente. Ce n’était pas la position initiale de Mme Vautrin. Il convient donc de comprendre que l’État pourra payer une somme pour transférer un terrain, si d’aventure le coût de la dépollution excède le prix de vente. Telle est bien l’intention du Parlement.

Mme Catherine Vautrin – Tout à fait !

M. Philippe Gosselin – Mon amendement 642 fait suite à l’amendement que j’avais fait adopter à l’article 15 de la loi de simplification du droit du 20 décembre 2007. Il y a aujourd’hui une incertitude sur l’identité des syndicats mixtes pouvant bénéficier de cette disposition. Pour préciser les choses, il est proposé de confirmer le droit d’un syndicat mixte ouvert de gérer un schéma de cohérence territoriale – SCOT -, quelle que soit la date de création du syndicat mixte. Aujourd’hui, les procédures de gestion des SCOT ne sont pas ouvertes à l’ensemble des syndicats mixtes et il convient d’y remédier. Dans certains cas, il était nécessaire de créer deux syndicats mixtes, au risque d’affaiblir l’ensemble du système et d’alourdir la gestion. L’adoption de mon amendement favoriserait la coopération entre les collectivités en général et les EPCI en particulier. Bien entendu, cet amendement maintient la disposition vertueuse qui veut que lorsqu’un syndicat mixte exerce d’autres compétences que celle du SCOT, seuls les communes et les EPCI compétents participent aux décisions relatives au schéma et prennent part aux délibérations. Il s’agit d’apporter un éclaircissement indispensable à l’ensemble du dispositif.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Avis favorable. En effet, la loi du 20 décembre 2007, qui avait pourtant fait l’objet d’un large consensus, se heurte aujourd’hui à des restrictions d’application injustifiables. Cet amendement permettrait d’y remédier.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Bien que je partage votre souci de simplification, je ne suis pas certaine qu’une telle disposition ait vraiment sa place dans un projet de loi relatif à la modernisation de l’économie. Elle l’aurait plus sûrement dans un texte relatif à l’urbanisme. Je m’en remets toutefois à la sagesse de l’Assemblée.

M. François Brottes – Il ne me choque pas personnellement qu’un tel amendement soit proposé dans le présent texte car il arrive que les SCOT élaborent des schémas d’organisation commerciale. Là n’est pas le problème.

La question s’est déjà posée dans certains territoires où il a fallu faire des choix. Revenir en arrière, comme il est proposé dans cet amendement, ne risque-t-il pas de créer des problèmes ? Les territoires concernés n’auront-ils pas des regrets ou ne formuleront-ils pas des revendications ? Le sujet mériterait en tout cas expertise.

Notre collègue soulève un vrai problème mais, c’est en tout cas mon opinion personnelle que j’exprime ici sans engager mon groupe, le mélange des genres s’agissant des SCOT n’est sans doute pas souhaitable.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Je précise que je m’exprime ici à titre personnel et non en tant que rapporteur. Il ne s’agit pas de contraindre qui que ce soit à quoi que ce soit, mais simplement de permettre à un syndicat mixte ouvert d’être à la fois un syndicat de développement et de gérer un SCOT s’il le souhaite. Je remercie la ministre de s’en être remise à la sagesse de l’Assemblée, sagesse très favorable si j’ai bien compris, sur cet amendement très pertinent (Sourires).

M. Jean Gaubert – Tout en comprenant les motivations de cet amendement, je m’interroge. Un syndicat mixte ouvert peut par exemple associer les chambres consulaires. Ne risque-t-on pas demain d’enfreindre la réglementation communautaire s’il peut aussi gérer un SCOT ? Il existe d’ores et déjà une solution qui est de créer un syndicat mixte « à la carte » où ne votent sur le SCOT que les élus concernés. Nous l’avons fait dans mon secteur, sans que cela ne pose aucun problème. En revanche, que des conseillers généraux, membres d’un syndicat mixte de pays par exemple, qui n’ont pas de compétence en matière d’urbanisme puissent voter, risque de conduire à des vices de forme.

M. Philippe Gosselin – Il ne s’agit nullement de modifier les règles de fonctionnement des SCOT mais seulement d’éviter aux collectivités de devoir créer un deuxième syndicat mixte, alors même que le premier pourrait parfaitement assumer cette charge. S’agissant des droits de vote, je voudrais vous rassurer. Seules les communes et communautés de communes adhérentes au titre de la compétence SCOT auront droit de vote. Les conseils généraux, qui peuvent être membres desdits syndicats, ne participeraient bien sûr pas au vote concernant les SCOT.

Cette disposition avait d’ailleurs été votée à l’unanimité dans la loi de simplification du droit. Mais on se heurte sur le terrain à des difficultés d’interprétation administrative que cet amendement propose de lever.

L'amendement 642, mis aux voix, est adopté.

M. Christian Jacob – L’amendement 521 vise à demander que lorsqu’un projet de réorganisation d’un service ou d’un établissement public dépendant de l’État peut affecter l’équilibre économique d’un bassin d’emploi, une étude d’impact soit systématiquement réalisée. Celle-ci devrait évaluer non seulement les conséquences économiques de la décision en matière de logements, d’équipements publics, de commerces, de finances locales mais aussi, et surtout, tracer des pistes de solutions afin d’atténuer les effets pour le territoire concerné, notamment en imaginant les activités de substitution possibles. Cet amendement a reçu un avis très favorable de la commission des affaires économiques.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Avis favorable. Cette étude d’impact, réalisée sous l’autorité conjointe du préfet et de la DIACT, devra non seulement dresser l’état des lieux, que les élus, hélas, ne connaissent souvent que trop bien, mais aussi tracer des pistes de solution pour les territoires confrontés à de telles restructurations.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Je crains de défendre une cause perdue en vous invitant à retirer votre amendement. Je le ferai néanmoins en apportant plusieurs exemples à l’appui de ma démonstration. Ainsi, le ministère de la défense a-t-il déjà fait la preuve par le passé de sa capacité à se réformer tout en aidant à la reconversion des bassins d’emploi concernés. Le ministre Hervé Morin a d’ores et déjà présenté au Premier ministre une série de mesures destinées à accompagner les restructurations envisagées et rencontre actuellement tous les élus sur le terrain. Une étude d’impact est d’ores et déjà systématiquement réalisée avec la DIACT et le secrétariat d’État à l’aménagement du territoire. Une fois les mesures prises, une étude des potentialités économiques et sociales, voire immobilières, sera proposée aux comités territoriaux réunis autour du préfet. Nous ne sommes donc pas très loin de vos propositions.

Autre exemple : la réforme des services de la direction générale des finances publiques, Mon collègue Éric Woerth a eu l’occasion de rappeler que la fusion des deux administrations concernées se ferait dans le respect du principe de proximité. Une étude d’impact a, là aussi, d’ores et déjà été menée à l’échelon local pour évaluer les conséquences de chaque restructuration. Ces études d’impact peuvent d’ailleurs, à la demande du préfet, être présentées à la commission départementale de modernisation et d’organisation des services publics, qui a pour objet de favoriser la concertation locale en cas de réorganisation. Les préfets ont de toute façon pour mission générale de veiller à ce que les réorganisations se passent au mieux sur le plan local.

Cela étant, je ne me fais aucune illusion sur la suite que vous réserverez à ma demande de retrait de cet amendement.

M. Christian Jacob – Je vous ai bien entendue, Madame la ministre, mais vous aussi m’avez bien compris. Mon amendement va plus loin en demandant que ces études évoquent les possibilités d’activités nouvelles. Or, aujourd’hui, le ministère de la défense par exemple nous invite à utiliser les outils existants comme le FNADT et autres fonds spécifiques. Simplement, ces fonds, déjà utilisés pour ces territoires en déprise économique, ne peuvent absorber un choc supplémentaire. Les études d’impact que nous souhaitons, menées sous l’autorité conjointe du préfet et de la DIACT, ne doivent pas se contenter de donner une photographie de l’existant à un instant donné, mais apporter des réponses pour le futur. C’est pourquoi, Madame la ministre, vous m’en demandez trop. Je ne peux retirer cet amendement.

M. Patrick Ollier, président de la commission – Notre souci est de disposer des outils permettant de rassurer, psychologiquement et concrètement, les populations et les élus devant le traumatisme que constituent les fermetures d’établissements publics, quels qu’ils soient – il n’y a pas que ceux de la défense. Pour avoir été député de Briançon, j’ai encore en mémoire le traumatisme qu’a constitué le projet de suppression du régime dit Quinze/neuf. J’avais obtenu du Premier ministre à l’époque qu’il soit transformé en centre d’aguerrissement des troupes de montagne, mais je viens, hélas, d’apprendre qu’il va être définitivement supprimé. Je me demande bien ce que l’on pourra faire dans une zone de montagne comme celle-là, à 1 200 mètres d’altitude, loin de tout, à trois heures de route de Marseille, pour compenser le départ des centaines de cadres qui contribuaient largement au soutien de l’économie locale. En procédant à des études d’impact, comme le propose l’amendement de M. Jacob – approuvé par le rapporteur et par la commission –, on serait en mesure de lancer plus tôt les projets permettant de créer des emplois…

M. Yves Censi – Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission – …car c’est à cette fin que les élus sollicitent des subventions, et non par principe !

Mme Catherine Vautrin – Exactement !

M. Patrick Ollier, président de la commission – Ayant proposé de créer il y a quinze ans les ZRR pour remédier aux difficultés – et au risque de désertification – auxquelles les territoires ruraux, notamment de montagne, étaient et demeurent confrontés, je suis favorable à cet amendement, qui permettra d’aider, outre les zones en difficulté, les territoires que nous mettons en difficulté en supprimant des activités…

Mme Catherine Vautrin – Tout à fait !

M. Patrick Ollier, président de la commission – Sans doute faudra-t-il cependant s’efforcer, avec les rapporteurs du Sénat, d’en réduire la portée, un peu trop générale.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Comme pour l’amendement précédent.

M. Patrick Ollier, président de la commission – En effet. À cette réserve près, je souhaite qu’il soit voté à l’unanimité.

M. François Brottes – Comme Mme la ministre, je doute de l’efficacité de cet amendement, mais je ne nourris guère d’illusions quant à son retrait. Nous ne nous y opposerons pas, mais nous nous abstiendrons – nous aurions préféré voter tout à l’heure, sur le même sujet, un amendement de portée normative dont les effets étaient aisés à évaluer.

L’on croirait examiner le PLFSS : après les amendements « traumatisme », les amendements de pied dans la porte – selon lesquels le sport professionnel ne financera plus le sport amateur –, et avant les amendements génériques relatifs à la télévision et à la radio – la privatisation de RFI semble annoncée –, voici donc un amendement placebo (Rires), à l’instar de celui que nous avons adopté hier soir sur les tarifs « sociaux » de téléphonie mobile. En d’autres termes, on passe la pommade aux territoires meurtris par le départ des casernes en leur faisant croire que l’on va s’occuper d’eux !

L'amendement 521, mis aux voix, est adopté.

M. François Brottes – L’amendement 851 vise à remédier à une lacune de notre droit : les associations représentatives des collectivités territoriales ne peuvent actuellement être membres d’un groupement européen de coopération territoriale. Si on peut le leur permettre sans passer par la loi, je pourrai retirer l’amendement.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Même avis. L’amendement est inutile puisque le règlement européen du 5 juillet 2006 instaurant les GECT, au demeurant d’application directe, a été transposé en avril dernier par une proposition de loi de M. Daubresse.

L'amendement 851 est retiré.

Mme Frédérique Massat – Je défends les amendements 1108, 1109, 1115, 1111 et 1116, qui tendent à favoriser l’aménagement du territoire, conformément à une préoccupation dont nos débats ont montré qu’elle était unanimement partagée. Alors que moderniser l’économie, c’est aussi moderniser l’économie rurale, le texte néglige les zones rurales et prétend appliquer de manière autoritaire et simpliste des règles identiques à l’ensemble du territoire. Au contraire, le périmètre d’aménagement rural incitatif – PARI – que nous proposons permettra un développement équilibré du territoire.

En effet, l'État, garant de l'unité nationale, doit non seulement corriger les inégalités naturelles entre territoires, mais aussi limiter les différences construites. À cette fin, il doit réformer profondément les systèmes de péréquation afin de favoriser l'égalité des chances plus que l'égalité des situations.

Or, l'égalité des chances, c'est d’abord l'égalité d'accès aux services : en quelque endroit qu’il se situe, le citoyen doit pouvoir bénéficier rapidement des mêmes services publics, commerciaux, culturels et technologiques. Mais les territoires défavorisés, surtout ruraux, peinent à les fournir à leur population, alors même que leur attractivité, donc leur développement économique et leur compétitivité, en dépendent.

Ce déclin s’expliquant par la faible densité de population et le chômage, aggravé par la fermeture d'établissements, ces zones doivent bénéficier d'une politique de discrimination positive. Il ne s'agit pas là d'opposer les territoires, mais de souligner leur complémentarité et de développer leur solidarité mutuelle. En effet, l’aggravation des inégalités entre territoires montre que le dispositif de péréquation ne suffit pas à permettre aux zones en difficulté d’exploiter leurs atouts.

Afin de contribuer à améliorer l’attractivité et la compétitivité des territoires ruraux, nous proposons de faire bénéficier de dispositions incitatives spécifiques les zones rurales en grande difficulté. Il y a urgence : dans ma circonscription, nul ne déplore plus – comme l’un de nos collègues tout à l’heure, à juste titre – la désorganisation et les carences résultant de la fermeture de casernes, car celles-ci ont disparu depuis longtemps !

Tel est le sens du périmètre d'aménagement rural incitatif. Il inclura les zones rurales où la fermeture d'une ou plusieurs entreprises a entraîné de nombreuses suppressions d'emplois, afin d’y attirer de nouvelles entreprises au moyen d’incitations fiscales et sociales et d'aider celles qui y demeurent, mais sont menacées par la baisse du pouvoir d'achat de la population ; celles qui, confrontées à de graves difficultés économiques et sociales, ont besoin de reconstituer un réseau d'entreprises et de population ; enfin, les zones peu densément peuplées qui peinent à poursuivre des activités traditionnelles, notamment agricoles. Les entreprises qui s’y implanteront bénéficieront d’exonérations fiscales – pour l’impôt sur les sociétés, la taxe professionnelle, la taxe foncière sur les propriétés bâties – et sociales. La diminution des recettes fiscales de l’État serait compensée par l’activité économique induite, en particulier le maintien et la création d’emplois.

Plusieurs de nos amendements après l’article 38, relatifs au télétravail – également laissé de côté par le texte –, concourent au même objectif ; nous y reviendrons. Mais l’on ne saurait « mobiliser l’attractivité au service de la croissance » – comme le propose le Titre III – sans venir en aide aux territoires ruraux.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Je serais presque enclin à me déclarer favorable à cet amendement…

M. Daniel Goldberg – N’hésitez pas !

M. Patrick Roy – Un peu d’audace !

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – …en hommage au courage et à l’humour avec lesquels vous avez appelé « PARI » le dispositif que vous proposez ! (Sourires)

Plus sérieusement, malgré de louables intentions, votre amendement n’apporte rien de plus que la loi du 4 février 1995, dont le président Ollier, père des ZRR et des TRDP, était le rapporteur – sinon un luxe de détails qui risque d’être contre-productif. En outre, les nombreuses exonérations fiscales et sociales que vous proposez – sur le modèle de celles qui bénéficient aux ZFU et aux ZUS – coûteraient cher aux finances publiques, comme l’obligation de compenser les pertes de taxe professionnelle auxquelles les fermetures d’établissements situés dans un PARI exposeraient les collectivités. Vous vous dites pourtant conscients, comme nous, de la nécessité de maîtriser les dépenses publiques.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Même avis. Le Gouvernement partage votre souci, louable, de rendre plus attractives les zones rurales. Mais il n’est pas souhaitable d’ajouter des mesures comportant de nombreuses exonérations au dispositif de ZRR instauré grâce à M. Ollier en 1995 et réformé en 2005, d’autant qu’il est en cours d’évaluation.

Mme Frédérique Massat – Dans ce cas, je vous invite à venir sur le terrain. Si les propositions que nous faisons ne conviennent pas, trouvez-en d’autres. Mais nos territoires sont asphyxiés. On nous objecte les dépenses que l’amendement entraîne, mais on s’est moins ému quand vos mesures ont coûté 15 milliards au budget de l’État. Nos territoires souffrent. Les ZRR ont eu leur efficacité, mais il faut faire plus pour ne pas laisser des pans entiers de notre pays partir à la dérive.

M. François Brottes – Très bien.

L'amendement 1108, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président – Les autres amendements de Mme Massat tombent.

ART. 34

M. le Président – Sur cet article, le rapporteur de la commission des lois donnera l’avis de la commission.

M. Patrick Roy – Les Français ont de plus en plus de mal à se soigner, même si certains ici semblent ne pas le savoir. Notre médecine est à deux, voire trois vitesses (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Or, cet article 34 qui protège non plus le produit mais un usage du produit va permettre de reprendre un brevet pour un médicament tombé dans le domaine public. Il va donc à l’encontre du développement des génériques, qui était un moyen de limiter la baisse du pouvoir d’achat. J’espère que le Gouvernement, qui prétend être en faveur du développement des génériques, acceptera nos amendements à ce sujet.

Mme Catherine Lemorton – L’article 34 permettrait à l’industrie pharmaceutique de reprendre un brevet dès lors qu’une nouvelle indication thérapeutique se révélerait au cours de la vraie vie d’une molécule, c’est-à-dire lorsque l’on passe des essais cliniques à la prescription de masse. Une telle évolution est contradictoire avec le développement souhaitable des génériques en conférant une protection abusive et réitérée au même produit. La France est déjà en retard pour le développement du générique par rapport à certains voisins. L’amendement 1034 tend donc à supprimer les alinéas 4 à 8 de cet article.

M. Patrick Roy – Très bien.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis La brevetabilité de la seconde application thérapeutique est reconnue par l’article 53 C de la convention de Munich sur les brevets européens. Nous devons nous y conformer. Comme il subsistait une ambiguïté en droit interne, l’article 34 procède à une clarification à l’intention des chercheurs et des juges. Il ne remet pas en cause l’équilibre entre la protection des découvertes médicales et l’exploitation des applications tombées dans le domaine public. Il vise en effet clairement une application totalement inédite de molécules connues sous une forme totalement différente. En outre, la rédaction de l’amendement s’éloigne de celle de la convention de Munich. Mieux vaut en rester à sa traduction fidèle. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement 1034 et sur l’amendement 1093 qui lui est lié.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Même avis.

Mme Catherine Lemorton – Notre amendement 1093 vise le fait que la nouvelle rédaction est si générale qu’elle pourrait entraîner des utilisations abusives du nouveau dispositif de brevetabilité des produits à visée thérapeutique. Le rapport de la MECS du 30 avril sur le médicament signale déjà la mise sur le marché de molécules qui constituent des contournements avérés de génériques. L’article 34 ne va certainement pas nous en protéger.

M. Patrick Roy – Absolument.

L'amendement 1034, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – L’amendement 114 est de précision.

L'amendement 114, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 1093, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 34, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 34

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – L’amendement 447 permet aux exploitants sous licence d’une marque de défendre leur droit devant le tribunal même s’ils ne sont pas encore inscrits au registre national ou international des marques. Il reprend ainsi les dispositions du traité de Singapour sur le droit des marques.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis très favorable.

L'amendement 447, mis aux voix, est adopté.

ART. 35

M. le Président – Pour cet article, le rapporteur de la commission des lois donnera l’avis de la commission.

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – L’amendement 115 est rédactionnel.

L'amendement 115, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 35, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 35

M. Éric Ciotti, rapporteur pour avis – Pour lever une ambiguïté dans la loi de lutte contre la contrefaçon du 29 octobre 2007, mon amendement 327 rectifié précise que seuls les tribunaux de grande instance spécialisés à cet effet sont compétents en matière d’action civile. La contrefaçon est une négation des droits de propriété intellectuelle, un préjudice qu’on estime à 6 milliards pour la France et une source de dangers pour les consommateurs. Nous avions choisi, en 2007, de rassembler les contentieux relatifs à la propriété intellectuelle. L’amendement conforte ce choix. La commission a émis un avis favorable.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis favorable. Cette clarification est particulièrement utile.

L'amendement 327 rectifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 36

M. Lionel Tardy – Plusieurs jeunes entreprises innovantes de Haute-Savoie, et d’ailleurs à coup sûr, se heurtent au problème suivant. Pour bénéficier de ce statut, il faut consacrer 15 % de ses charges à la recherche-développement. Dans ce total, on ne peut inclure les dépenses de personnel que s’il s’agit de salaires : les jeunes entrepreneurs qui créent une SARL et en sont gérants majoritaires ne peuvent donc le faire, alors même qu’ils font le travail de recherche. C’est tout à fait contraire à l’esprit de la loi, qui vise justement à aider les jeunes entreprises dont le fondateur est seul, comme les services du ministère de la recherche en conviennent. J’espère qu’il sera possible de traiter ce problème dans les meilleurs délais.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurL’amendement 423 est rédactionnel.

L'amendement 423, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurL’amendement 424 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 424 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis Depuis la loi de finances pour 2008, l’absence de réponse de l’administration fiscale, dans un délai de trois mois, à une entreprise qui a demandé si son projet de recherche est éligible au crédit d’impôt recherche vaut accord tacite. L’amendement 235 de la commission des finances, prévoit qu’il en soit de même pour les organismes dédiés, auquel le redevable pourra s’adresser directement grâce au présent article.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie L’objet de votre amendement consiste à raccourcir et à encadrer le délai dans lequel les organismes concernés répondront à la demande des entreprises. Je propose de le sous-amender en différant l’application de cette disposition, au plus tard au 1er janvier 2010. Cela devrait permettre à Oséo et aux services du ministère de la recherche de se mettre en ordre de marche. Je lève le gage.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurAvis favorable à l’amendement ainsi sous-amendé.

M. Charles de Courson – Madame la ministre, pourquoi renvoyer à un décret la date de fixation tout en prévoyant une date limite – le 1er janvier 2010 ? Dix-huit mois, c’est beaucoup.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – On espère toujours le meilleur et on craint le pire…

Le sous-amendement 1532 mis aux voix, est adopté.

L'amendement 235, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avisL’amendement 236, de la commission des finances, a pour objet d’améliorer le dialogue entre l’entreprise et l’administration lors des contrôles a posteriori : il prévoit que l’administration adresse un avis motivé en cas de contestation de la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Si l’objet de cet amendement est légitime, les dispositions relatives aux modalités d’application du droit de contrôle relèvent du décret. Je m’engage à rédiger d’ici à l’automne, en collaboration avec le ministère de la recherche, un projet de décret visant à compléter l’article R. 45 B-1 par la mention de l’obligation pour les agents du ministère de la recherche de motiver leurs conclusions et d’un délai de réponse de 30 jours. Au bénéfice de ces explications, je vous propose de retirer cet amendement.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurCette disposition était purement réglementaire. C’est pourquoi, suite à l’engagement de Mme la ministre, nous vous engageons, M. le rapporteur pour avis, à retirer cet amendement.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avisMon objectif, en présentant cet amendement, était d’obtenir un engagement de Mme la ministre.

L’article 236 est retiré.

M. Jean-Louis Gagnaire – L’article 36 prévoit une possibilité d’expertise contradictoire pour déclarer le bénéfice du statut fiscal de jeune entreprise innovante. Cette qualification vaut droit à une exonération limitée à 200 000 euros sur trois exercices fiscaux glissants. Cela résulte du rattachement de la mesure au règlement relatif aux aides « de minimis ».

Or l’encadrement Recherche développement innovation – RDI – du 31 décembre 2006 a créé la « jeune entreprise innovante » et autorise une aide de 1 million avec majorations. L’amendement 1105 vise à rattacher le statut fiscal de la jeune entreprise à cet encadrement.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurToute jeune entreprise innovante doit avoir moins de huit ans, être une PME au sens communautaire, avoir une certification par Oséo ou 15 % des charges fiscalement déductibles consacrées à des dépenses de recherche.

Le RDI auquel votre amendement propose de soumettre la jeune entreprise innovante n’est pas un règlement d’exception de notification. Il suppose qu’avant de créer une aide, on notifie à la Commission le nouveau régime, ce qui supposerait qu’on interrompe le dispositif actuel.

En outre, les critères en vigueur pour le règlement de minimis sont plus souples que pour le règlement RDI. Enfin, le de minimis vise les entreprises qui correspondent davantage à ce que nous entendons par « jeune entreprise innovante ». Avis défavorable.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Il n’est pas souhaitable de durcir le mécanisme d’exonération fiscale appliqué aux jeunes entreprises en y ajoutant un critère d’âge plus restrictif, et de le placer sous un régime plus contraignant. Si le régime de minimis est plafonné, il présente l’avantage d’être plus simple et de ne pas avoir à être notifié auprès de la Commission. Défavorable.

L'amendement 1105, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Gagnaire – Le CIR n’étant plus assis sur l’accroissement des dépenses de recherche mais sur leur montant, les grandes entreprises bénéficient d’un effet d’aubaine. Les petites entreprises, elles, se trouvent rapidement confrontées à une stagnation de leurs dépenses de recherche.

Il convient de créer un dispositif permettant aux PME de trouver un financement de leurs dépenses de recherche, au-delà de la fraction qu’elles peuvent elle-même assurer. Il peut être proposé aux grandes entreprises souhaitant bénéficier du CIR de s’associer des PME ou des organismes de recherche dès que les dépenses excèdent 50 millions.

M. Jean-Paul Charié, rapporteurLe CIR participe grandement au développement de l’économie, et l’idée de l’étendre aux petites entreprises est tout à fait positive, mais cet amendement aurait davantage sa place en lois de finances. Avis défavorable.

M. François Brottes – Vous n’avez pas toujours été aussi rigoureux au cours de ce débat !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Même avis. Le CIR, mis en œuvre depuis le 1er janvier 2008, est une mesure déterminante qui doit s’appliquer aussi bien aux petites entreprises qu’aux grandes. Il convient de préserver un système simple au bénéfice des grandes entreprises car ce sont elles dont il faut chercher à maintenir, sur le territoire français, l’activité de recherche et développement.

M. Jean-Louis Gagnaire – Loin de nous l’idée de nous attaquer aux grandes entreprises ! Force est cependant de constater que nous sommes les vrais défenseurs des PME innovantes. Je regrette l’avis du rapporteur et de Mme la ministre.

L'amendement 1104, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Lionel Tardy – Je vous ai interpellée sur les jeunes entreprises innovantes et les gérants majoritaires, Madame la ministre. A défaut d’une réponse immédiate, j’aimerais que vous vous engagiez à traiter le sujet dans les meilleurs délais.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Je vais vous répondre maintenant. Vous me demandez si on peut inclure dans le total des sommes éligibles au bénéfice du crédit impôt recherche les rémunérations versées au gérant majoritaire d’une SARL. Ce n’est pas possible en l’état actuel du texte, mais je m’engage à effectuer la modification nécessaire dans le projet de loi de finances pour 2009. Votre préoccupation me paraît en effet légitime : un gérant majoritaire participe dans les mêmes conditions que ses salariés à l’effort de recherche de la jeune entreprise innovante.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Très bien !

M. Lionel Tardy – Merci, Madame la ministre.

L'article 36 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ARTICLE 36

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis L’amendement 28 vise à moderniser le cadre de l’accréditation et de la certification. Conformément à la réglementation communautaire, l’accréditation est confiée à un organisme unique, le Comité français d’accréditation – COFRAC – chargé d’accréditer les organismes d’évaluation de la conformité. L’amendement stabilise les conditions de la certification. Les organismes de certification devront désormais faire eux-mêmes l’objet d’une accréditation.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Je salue la réponse que vous venez de donner à M. Tardy, Madame la ministre : il avait déposé un amendement qui est tombé sous le coup de l’article 40. La commission se félicite donc de votre réponse.

Quant à l’amendement 28, nous ne pouvons qu’y être favorables au vu de la qualité et de l’élégance de M. Forissier (Sourires).

L'amendement 28, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Nous en venons au chapitre IV : « Attirer les financements privés pour des opérations d’intérêt général ».

AVANT L’ARTICLE 37

M. Benoist Apparu – La modernisation de notre économie passe par un renforcement des liens entre les universités, la recherche et les entreprises. La loi relative aux libertés des universités a donc créé deux types de fondations, les fondations partenariales et les fondations universitaires. Seules les universités peuvent à ce jour les créer. Les amendements 525 et 526 visent à ouvrir ces deux possibilités aux pôles de recherche et d’enseignement supérieur, ainsi qu’à simplifier les modalités de création de ces fondations.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis favorable. Mais les sous-amendements 1516 et 1515 lèvent le gage et suppriment les dispositions qui rendraient ces amendements irrecevables.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Cette proposition est de bon sens. Le Gouvernement l’ayant amendé pour qu’elle soit recevable, la commission peut y donner – contrairement à ce qu’elle avait fait dans un premier temps – un avis favorable.

Le sous-amendement 1516, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 525 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

Le sous-amendement 1515, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 526 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE 37

M. André Chassaigne – Le Gouvernement souhaite « attirer les financements privés ». Il crée donc les fonds de dotation, afin que les financements privés participent – je cite l'exposé des motifs – à « une part importante des budgets d'établissements publics comme les universités, musées, hôpitaux ».

Quelle est la logique de cet article ? Je ne vois que deux possibilités : soit la création des fonds de dotation annonce un maintien au niveau actuel de la participation de l’État au financement des établissements publics, soit – et c'est le plus probable – elle préfigure un désengagement massif de l'État dont nous percevons déjà les effets, ne serait-ce qu’avec la suppression de 11 000 postes à l'éducation nationale.

La création de fonds de dotation s'inscrit dans le prolongement de la loi sur la responsabilité des universités, qui a ouvert la possibilité de créer des fondations pouvant, entre autres, financer des formations technologiques et professionnelles de leur choix, plaçant ainsi les enseignements proposés à l'université sous la tutelle d'investisseurs privés. Il en va de même pour les fonds de dotation, dont l'utilisation sera soumise au bon vouloir des donateurs et de leur conseil d'administration. Ce dernier pourrait être composé de trois personnes, nommées d’abord par le fondateur du fonds, puis selon une procédure définie par les statuts de la structure. L'ingérence dans la gestion des établissements publics n'en sera que plus forte. Le Gouvernement entérine donc la privatisation partielle des universités, des hôpitaux et des musées.

Enfin, les sommes versées sur ces fonds de dotation seront automatiquement orientées vers l'investissement et la spéculation, puisque seuls les revenus financiers du capital seront versés au budget des institutions. En ces temps de crise financière, le pari est risqué ! Ces dispositions représentent donc un danger sérieux pour la pérennité et l'équilibre des établissements publics concernés. Les députés communistes s'opposeront donc à cet article.

Mme Pascale Got – L’amendement 836 vise à « flécher » les fonds de dotation vers le soutien d’organismes d’intérêt général à caractère social, humanitaire ou culturel. L’exemple américain nous montre en effet que les financements privés bénéficient en priorité aux établissements les plus attractifs et les mieux dotés, ce qui induit des déséquilibres entre établissements et entre territoires. Ces financements peuvent en outre encourager le désengagement de l’État. De surcroît, les établissements bénéficiaires peuvent être soumis à des pressions extérieures qui risquent de peser lourd sur la gouvernance et le choix des investissements. Je pense en particulier aux hôpitaux et aux laboratoires.

Le décret du 7 avril 2008 a mis en place les fondations universitaires, qui permettent aux établissements de diversifier leurs financements tout en conservant un contrôle étroit sur la fondation. Laissons cet outil faire ses preuves avant d’en créer un nouveau ! L’introduction de ce mécanisme met d’ailleurs en cause notre modèle de financement des missions d’intérêt général, qui repose sur les ressources fiscales. La logique de capitalisation, et l’association des généreux donateurs à l’utilisation des fonds, conduiront sans doute à de nouveaux modes de détermination du bien public, avec toutes les dérives imaginables.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Peu de clivages entre la gauche et la droite se manifestent dans ce débat. Il y en a pourtant un ici, et on voit nettement où sont les conservateurs et où sont les tenants de la modernité ! Il est tout de même normal que les donateurs aient un droit de regard sur ce que l’on va faire de leur argent, Monsieur Chassaigne ! Le Gouvernement ouvre là une nouvelle voie. Et ce n’est pas parce que l’argent de donateurs privés va à des établissements publics que l’on remet en cause le caractère public de l’université ! L’immeuble du parti communiste aura beau être restauré par un fonds privé, votre parti en sera toujours propriétaire ! Avis défavorable, donc, sur cet amendement.

Je souhaite d’ailleurs savoir, Madame la ministre, si les fonds de dotation pourront avoir pour objet la restauration du patrimoine. C’est le président du groupe d’études sur les métiers d’art qui vous pose la question…

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Il existe en effet une vraie divergence sur le champ d’action des fonds de dotation. Pour l’article 37, ce sont toutes les missions d’intérêt général – et cela couvre donc la restauration d’un patrimoine, Monsieur le rapporteur.

Avis défavorable à l’amendement 836. Dans une période où nos finances publiques sont particulièrement contraintes, il serait en effet dommage de se priver de cette possibilité d’attirer les bonnes volontés dans d’autres domaines que ceux que vous citez. L’État n’en reste pas moins pleinement engagé dans ses missions régaliennes.

Mme Pascale Got – Aux États-Unis, quatre universités recueillent à elles seules le quart du montant total des fonds de dotation, le reste étant réparti entre près de 800 établissements. Comment ne pas se demander si le même phénomène ne se produira pas ici, certains établissements captant l’essentiel des financements disponibles, les autres continuant de se débattre dans des difficultés persistantes ? D’autre part, n’est-ce pas s’immiscer dans la gouvernance des hôpitaux ou des laboratoires que d’envisager, les concernant, un tel dispositif ? S’agissant d’établissements de santé, toutes les dérives sont possibles. Enfin, j’aimerais vous entendre préciser, Madame la ministre, ce que vous entendez par « missions d’intérêt général », car la portée que vous semblez donner à ce terme me paraît très vaste.

L'amendement 836, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Brottes – Pas la moindre réponse du Gouvernement ?

M. le Président – J’appelle les amendements 428, 429, 430 et 431.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Ces amendements sont rédactionnels.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis favorable.

Les amendements 428, 429, 430 et 431 sont successivement adoptés.

Mme Pascale Got – Il n’est pas nécessaire que l’argent public alimente des fonds de dotation. Par l’amendement 835, nous proposons donc de supprimer la possibilité de verser des fonds publics à un fonds de dotation. La crise financière actuelle rend cette disposition plus nécessaire que jamais, en empêchant que les deniers publics s’investissent dans des fonds hasardeux.

M. Michel Bouvard – Et c’est ainsi que l’on va faciliter les partenariats public-privé !

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Avis défavorable pour les rasons déjà dites.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis également défavorable car la possibilité de dérogation est strictement encadrée. Pour répondre à votre question de tout à l’heure, Madame Got, j’entends par missions d’intérêt général celles qui sont assignées aux universités, aux bibliothèques, aux musées et aux organismes qui concourent à la santé et à la recherche.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Tout figure dans mon rapport.

L'amendement 835, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Par l’amendement 722 rectifié, nous proposons de compléter l’alinéa 11 en précisant que les dons issus de la générosité publique peuvent être joints à la dotation en capital du fonds de dotation.

L'amendement 722 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Puis-je reprendre l’amendement 1412 de M. Morange ?

M. le Président – Son auteur n’étant pas présent, cela ne se peut.

M. François Brottes – Le Gouvernement pourrait le reprendre…

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Nous y reviendrons au cours de la navette. Par l’amendement 432, nous proposons de supprimer le conseil d’orientation, dont l’existence n’est pas utile au fonctionnement du fonds de dotation.

L'amendement 432, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur – Les amendements 433, 434 et 435 sont rédactionnels.

Les amendements 433, 434 et 435, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.

Mme Pascale Got – Avec votre autorisation, Monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements 837 et 831, qui tendent tous les deux à supprimer l’exonération de l’impôt sur les sociétés que vous consentez aux fonds de dotation. La situation des finances de l’État ne permet pas une telle perte de recettes. Ces sommes devraient être affectées à un fonds de péréquation entre les universités de prestige et les autres, ainsi qu’entre les territoires.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Avis également défavorable. Je tiens à préciser qu’en créant des fonds de dotation, nous visons à mobiliser des financements en faveur de missions d’intérêt général. Il n’est pas question, ce faisant, de créer une nouvelle exonération fiscale : le dispositif retenu est celui qui s’applique aux organismes non lucratifs.

L'amendement 837, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l’amendement 831.

M. François Brottes – Rappel au Règlement. Vous présidez avec une célérité particulière, Monsieur le Président, ce qui se conçoit fort bien quand les amendements sont rédactionnels, moins bien quand un débat de fond est nécessaire. Ce sera le cas après l’article 37, et j’espère que vous laisserez à la discussion tout le temps nécessaire.

M. le Président – N’ayez crainte, Monsieur Brottes.

L'article 37, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 37

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Je rends hommage au remarquable travail des DRIRE dont une partie des missions consiste, sous votre impulsion, Madame la ministre, à faire travailler ensemble les entreprises d’un même bassin d’emploi ou d’une même filière, pour les faire gagner en compétitivité et de la sorte en rentabilité. Il se trouve que ce travail de fond est entravé par le manque d’enthousiasme de certaines chambres de commerce et d’industrie…

M. François Brottes – Quelle sévérité !

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Aussi, par l’amendement 436, nous permettons aux chambres de commerce et de l’industrie de conclure avec l’État des contrats d’objectifs pour une durée de trois ans, auxquels elles affecteront au minimum 20 % de leur ressource fiscale.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie L’objectif est louable mais, tout en approuvant l’esprit de l’amendement, j’exprimerai un avis défavorable, car envisager la conclusion de contrats d’objectifs entre l’État et les 143 chambres de commerce et d’industrie serait enclencher un processus d’une grande lourdeur. De plus, conformément aux dispositions de l’article 1600 du CGI, les ressources fiscales des chambres de commerce et d’industrie doivent être affectées à leur dépense de fonctionnement. En affecter, comme vous le prévoyez, 20 % aux contrats d’objectifs ne serait pas de bonne pratique.

Enfin, le dispositif risquerait de nuire à la lisibilité et à la qualité des interventions économiques consulaires, en les « calibrant » sur la base d’un pourcentage unique, par définition inadapté compte tenu de l’hétérogénéité des situations.

Pour ces trois raisons, et parce que l’affectation d’une part aussi importante du produit de la taxe fragiliserait l’équilibre financier de nombre d’organes consulaires, je vous invite à retirer votre amendement.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Trois réponses aux trois réserves de Mme la ministre, tout en sachant que je vais le retirer pour une quatrième raison !

D’abord, il ne s’agit pas de conclure une convention globale entre les DRIRE et l’ensemble des chambres, mais de passer une convention chambre par chambre car cela concerne toutes les actions collectives.

Ensuite, il est normal que l’on parle de ressources de fonctionnement puisqu’il s’agit de mettre des agents à disposition. C’est donc bien de fonctionnement qu’il s’agit.

Enfin, l’absence de lisibilité ne peut être invoquée car, pour moi, le message est très clair. Si nous voulons donner une meilleure image aux partenaires indispensables que sont les CCI, il faut que celles-ci acceptent d’adopter des comportements plus positifs, y compris avec les administrations.

Parce que j’ai dit il y a quelques jours – et le président Ollier s’en souvient – que nous devions travailler en partenariat avec le réseau consulaire – rappelons-nous le grand débat que nous avons eu sur la double affiliation –, je retire mon amendement , sous réserve que le Gouvernement veille à ce que les chambres fassent tout pour se moderniser.

M. Charles de Courson – Je reprends cet amendement pour mieux le combattre ! En droit, contrairement à ce que l’on dit souvent, les chambres de commerce ne lèvent pas l’impôt : elles font des propositions au Gouvernement, qui les reprend ou non par décret. Elles n’ont donc pas du tout les mêmes prérogatives que les collectivités territoriales. S’il le souhaite, le Gouvernement a toute latitude pour demander au réseau de revoir le montant de la taxe. J’appelle donc l’Assemblée à repousser cet amendement.

M. Jean-Louis Gagnaire – Une fois n’est pas coutume, nous sommes d’accord avec Mme la ministre et en complet désaccord avec le rapporteur. Je suis extrêmement surpris, Monsieur Charié, de votre vision ultra-conservatrice – pour ne pas dire passéiste – de l’animation économique de nos territoires. En tant qu’élu de la région Rhône-Alpes, je pense avoir quelque raison de dire que ce n’est pas en décrétant depuis l'Assemblée nationale qu’il faut organiser les relations entre acteurs économiques de façon coercitive, que l’on réussira à créer des réseaux performants. Sauf à opter pour l’économie administrée – et j’ignorais que M. Charié en était un adepte ! –, les synergies ne se décrètent pas et c’est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.

Depuis le début de nos travaux sur la LME, je constate que certains de nos collègues tentent de réinventer l’eau tiède ! Regardons plutôt ce qui se passe dans chacun de nos territoires. En Rhône-Alpes, nous sommes efficaces grâce au travail collectif mené avec les collectivités, les entreprises, l’État et les universités, et si nous disposons de quinze pôles de compétitivité, cela ne doit pas être le seul fait du hasard. Respectons l’article premier de la Constitution et regardons de près ce que font les collectivités locales de notre République décentralisée.

M. le Président – Monsieur de Courson, j’ai cru comprendre que vous retiriez l’amendement que vous aviez repris…

L'amendement 436 est retiré.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 19 heures 20, est reprise à 19 heures 30.

M. le Président – Nous en arrivons à l’amendement 754.

M. Frédéric Lefebvre – La loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dispose que les chaînes de télévision dont l’audience dépasse 2,5 % de l’audience totale des services de télévision ne peuvent être détenues par un même actionnaire à hauteur de plus de 49 % de leur capital. Or, cette disposition sera très vite applicable à la plupart des chaînes de la TNT qui ont fait le pari du développement et du succès. La TNT doit son succès à la soif de diversité de nos concitoyens. Avec le club parlementaire, nous recevions ce matin les représentants de la TMP – la télévision mobile personnelle – et je ne doute pas que le Parlement, au-delà des bancs de la majorité, aura le même souci d’encadrer et de favoriser son développement que pour la TNT.

Toutes les chaînes de la TNT sont détenues par des groupes audiovisuels en plein développement. Je pense à NRJ 12 – détenue à 100 % par le groupe NRJ,… à Virgin 17, détenue à 100 % par Lagardère, à W9 détenue à 100 % par M6, à Direct 8 détenue à 100 % par Bolloré, à NT 1 détenue à 100 % par AB, à Gulli détenue à 60 % par Lagardère et 40 % par France Télévisions, à TMC, détenue à 40 % par TF1. Toutes ces chaînes atteignent aujourd’hui un seuil d’audience de 1 % à 2 %, encore inférieur au fameux seuil de 2,5 %. Mais seuls 60 % à 65 % de la population reçoivent la TNT, et ces taux d’audience doublent, voire triplent chaque année. Parmi les foyers équipés d’un adaptateur TNT, les niveaux d’audience passent à 3 %, Gulli atteignant même 3,7 %. Avec l’extension de la couverture de la TNT et l’extinction programmée de l’analogique, ces taux d’audience sont appelés à exploser.

Or, toutes ces chaînes sont fragiles sur le plan économique. La plupart d’entre elles sont déficitaires alors qu’il leur est demandé de réaliser des investissements extrêmement lourds en matière de contenus de programme et d’information pour certaines d’entre elles.

L’un des soucis du club parlementaire sur l’avenir de l’audiovisuel et du groupe d’études parlementaire sur l’audiovisuel, que j’ai l’honneur de co-présider tous les deux, est de laisser les groupes développer ces chaînes de la TNT pour qu’elles augmentent leur audience et développent leurs créations. Multiplier les canaux de diffusion de la télévision, avec la TNT, la TMP ou Internet, est une très bonne chose, mais il ne faut jamais oublier en bout de chaîne le téléspectateur qui attend des contenus de qualité.

Dans ce contexte, rien ne serait plus grave, pour les chaînes de la TNT, que d’obliger leurs actionnaires à se désengager au moment même où leur implication est vitale. D’où cet amendement, qui porte le seuil à 8 %. Il a toute sa place dans ce projet de loi puisqu’il concerne le dispositif anti-concentration et est indispensable pour permettre à la TNT de se développer dans un souci de qualité de ses programmes et de bon équilibre financier.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – La commission a, dans un premier temps, demandé des explications complémentaires à M. Lefebvre, qui les lui a apportées (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. François Brottes – Je ne les ai pas entendues. C’était sans doute lors d’une réunion du groupe UMP !

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Il travaille aussi ! Certes, cet amendement ne concerne pas des sujets qui seront abordés dans le cadre d’autres dispositions législatives, mais il est vital pour soutenir le développement de la TNT. Au tout début, seuls quelques-uns croyaient à la TNT, si bien qu’un dispositif avait été adopté…

M. François Brottes – C’est l’histoire de la télévision racontée aux enfants !

M. Jean-Paul Charié – Vous allez donc comprendre mon propos (Rires). Au moment où l’audience de la TNT augmente, il serait grave que les groupes qui détiennent ces chaînes soient obligés de céder une part de leur capital. Après avoir reçu l’assurance qu’il ne s’agissait bien que de cela, la commission a donné un avis très favorable à cet amendement.

M. François Brottes – C’est Noël pour certains !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie La TNT a connu un essor considérable ces dernières années. Le dispositif juridique retenu en 2001 prévoyait un seuil anti-concentration de 49 % dès lors que le taux d’audience de la chaîne atteignait 2,5 %. L’amendement a pour objet de maintenir ce seuil de 49 % mais en remontant le taux d’audience à 8 %. Le Gouvernement, qui a étudié avec attention cette proposition, y est favorable (Exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. Didier Mathus – On ne refuse rien à ses amis !

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie – Non, pas du tout. Ces chaînes récentes reposent sur un modèle économique fragile. En effet, elles doivent faire face à des dépenses élevées pour leur approvisionnement en programmes, leurs coûts de diffusion et leur masse salariale. Dans le même temps, leurs recettes sont subordonnées à leur capacité à capter une part du marché des recettes publicitaires, alors que la concurrence d’Internet explose. Enfin, et surtout, elles doivent consentir de lourds investissements pour la couverture quasi-complète du territoire selon un calendrier anticipé par rapport à ce qui avait été prévu.

Cette fragilité exige qu’elles soient soutenues par des groupes à l’assise financière solide. Si on leur imposait une modification de leur actionnariat, alors qu’elles sont en pleine croissance et aussi fragiles, on menacerait directement le pluralisme qui a résulté de la multiplication des chaînes numériques (Interruptions sur les bancs du groupe SRC) Mais si ! C’est pour que leur actionnariat reste stable et que le pluralisme soit garanti que le Gouvernement est favorable au relèvement du seuil d’audience de 2,5 % à 8 %.

M. Patrick Bloche – Quelle honte !

M. Didier Mathus – Aimable conte de fées ! La vérité, c’est qu’il s’agit de rendre service aux amis du pouvoir que sont les groupes Bouygues, Bolloré et Lagardère qui détiennent, entre autres, TF1 et M6. Il est d’ailleurs significatif que l’auteur de cet amendement, M. Lefebvre, soit un ancien membre du cabinet de M. Sarkozy où il travaillait aux côtés de M. Laurent Solly, aujourd’hui important dirigeant de TF1.

La vérité est assez loin de ce qui vient de nous être exposé. L’opposition de l’époque avait voté en 2000 contre le développement de la TNT qui, déjà, inquiétait TF1 et M6 – dont les députés de l’opposition de l’époque, devenue depuis majorité, ont toujours été de fidèles serviteurs. Il est vrai que la majorité d’aujourd’hui leur doit beaucoup et ce ne sont là que renvois d’ascenseurs – il suffit de voir ce qui s’est passé durant les différentes campagnes électorales.

La règle des 2,5 % vise précisément à protéger le pluralisme. Elle a été instituée pour permettre à de petites chaînes de la TNT de se développer face aux opérateurs historiques dominants. Le succès de la TNT, auquel TF1, M6 et consorts ne croyaient pas, les a pris par surprise. Mais W9, propriété de M6, TMC, propriété de TF1, Gulli, propriété de Lagardère et Direct 8, propriété de Bolloré, connaissent-elles une fragilité économique telle qu’elles ne pourraient pas se plier au seuil anti-concentration de 49 %, pourtant indispensable à la sauvegarde du pluralisme dans notre pays ? Le dispositif anti-concentration est pourtant particulièrement limité en France, y compris par rapport à la Grande-Bretagne ou aux États-Unis. Depuis 2002, vous n’avez d’ailleurs eu de cesse de l’affaiblir encore, à coups de cavaliers législatifs !

Enfin, la mesure proposée par M. Lefebvre intervient à l’heure où se dessine un bouleversement du paysage audiovisuel français. Ainsi, en janvier dernier, le Président de la République annonçait-il la suppression de la publicité sur France Télévisions, sans qu’aujourd’hui encore ait été trouvé le moindre dispositif de substitution – aucune des pistes évoquées n’est réaliste, qu’il s’agisse de prélever sur le montant de la redevance alloué à RFI ou à l’INA… ou bien encore sur le Fonds de réserve des retraites ! Rien donc ne remplacera les ressources publicitaires pour France Télévisions, dont l’asphyxie est bel et bien programmée. À cela s’ajoutent les cadeaux qui viennent d’être annoncés pour les grandes chaînes privées : la deuxième coupure publicitaire, à laquelle le Gouvernement s’est déclaré favorable, rapportera 300 à 500 millions d’euros de plus à TF1. Excusez du peu !

La vérité c’est que TF1 et M6 ont manqué de clairvoyance à propos de la TNT. Elles l’ont combattue avec la plus extrême énergie, aidées d’ailleurs par les députés UMP. Et lorsque celle-ci a vu le jour, malgré eux, elles ont encore refusé d’y croire et n’ont pas pris les dispositions nécessaires, avec les conséquences que l’on sait. Et voilà qu’on vient nous expliquer qu’elles se sont trompées et qu’il faut aujourd’hui les aider en leur faisant un cadeau – impératif, nous dit-on, sauf à remettre en question le développement de la TNT. C’est se moquer du monde car il ne s’agit que de faire des cadeaux aux copains du pouvoir (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. le Président – Je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public sur le vote de l’amendement 754.

M. Patrick Bloche – Cet amendement très attendu est signé Furax ! Son contexte, fort bien rappelé par M. Mathus, importe plus encore que son contenu. Au cours des derniers mois, M. Lefebvre est devenu un véritable expert en la matière – comme dans la série dont TF1 espère qu’elle accroîtra son audience… On est loin du « mieux-disant culturel », de la valorisation des créateurs, du pluralisme et de la diversité ! Comme en 2004, sous le gouvernement Raffarin, il s’agit au contraire de lever les contraintes imposées par un système anti-concentration qui, contrairement à ce que l’on entend souvent dire, est moins sévère pour les grandes chaînes analogiques que dans bien d’autres pays démocratiques, tels que la Grande-Bretagne ou les États-Unis.

Depuis que le Président de la République a annoncé la suppression de la publicité sur France Télévisions, le 8 janvier dernier, tous les moyens sont bons pour relever le cours de l’action TF1 ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Au transfert aux chaînes privées – TF1 surtout et, dans une moindre mesure, M6 – d’une partie des ressources publicitaires des chaînes publiques s’ajoutera ainsi l’instauration d’une seconde coupure publicitaire – que l’on a un temps envisagé d’intégrer à ce texte, avant de la repousser à l’automne –, avant l’augmentation du volume horaire dévolu à la publicité et la chaîne supplémentaire que la loi de 2007 a accordée aux grandes chaînes privées historiques.

En somme, étape par étape, on s’efforce de préserver sinon l’audience, du moins les ressources des grandes chaînes privées analogiques, en particulier TF1. De ce point de vue, l’amendement 754 contredit l’esprit même de la TNT, dont la création visait à accroître le pluralisme du paysage audiovisuel, à favoriser la diversité culturelle, à soutenir le service public de l’audiovisuel et à accueillir les télévisions locales et associatives. À l’époque, les dirigeants de TF1 – on l’a dit – ont tout fait pour retarder son lancement et M. Baudis, alors président du CSA, avait su se faire l’avocat éclairé de la diversité et du pluralisme. Aujourd’hui, alors que le pari de la TNT est presque gagné, on veut permettre à TF1 de continuer de diffuser TMC et à M6 de diffuser W9, voire à M. Bolloré, si Direct 8 franchit le seuil de 2,5 %, de conserver cette chaîne.

Voilà comment l’on s’efforce de mettre à bas le dispositif anti-concentration instauré en 1986 : TF1 et M6 l’ont rêvé, Sarkozy le fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Catherine Vautrin – Face aux amalgames et à l’« asphyxie » évoquée tout à l’heure, nous nous devons de préciser notre position. Tous ici, nous nous réjouissons que la diversification que visait la loi de 2001 ait satisfait de nombreux spectateurs, comme en témoigne le succès des chaînes numériques. Tous ici défendaient hier encore la nécessité de faciliter l’accès à la TNT. Or, l’amendement 754 va dans ce sens…

M. Patrick Bloche et M. Didier Mathus – Mais non ! Au contraire !

Mme Catherine Vautrin – Laissez-moi parler ! Il s’agit de prendre acte de l’intérêt et – n’ayons pas peur du mot – du succès de certains programmes en soustrayant à un seuil qui n’a plus lieu d’être des opérateurs qui ont fait un choix économique courageux… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Patrick Bloche – Ils ont tout fait pour empêcher le lancement de la TNT !

Mme Catherine Vautrin – Si le seuil de 2,5 % était légitime en 2001, ce succès justifie désormais qu’il soit porté à 8 %.

La semaine dernière, vous n’avez eu de cesse d’invoquer le progrès et une conception novatrice de l’économie ; souffrez que cette conception soit partagée par tous…

M. Patrick Bloche – Vive la consommation ! Est-ce cela, la modernité ?

Mme Catherine Vautrin – …et qu’à l’asphyxie, nous préférions la création, la diversité et l’offre ! Le groupe UMP votera cet amendement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. Frédéric Lefebvre – Je regrette que des propos caricaturaux aient été tenus, s’agissant d’une question essentielle, qui concerne la création (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Patrick Bloche – Elle a bon dos !

M. Frédéric Lefebvre – Il est inutile de vous énerver, Monsieur Bloche. Les Français jugent cette question essentielle puisqu’ils plébiscitent la TNT. Toutes les chaînes concernées, que j’ai énumérées tout à l’heure, sont aujourd’hui déficitaires (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR) ; alors que des groupes ont accepté de les soutenir, vous les mettriez en péril en votant contre cet amendement ? Décidément, Mme Vautrin a raison : il y a les Anciens et les Modernes ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

Mme Marylise Lebranchu – Pas cela, Lefebvre !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Nous ne passerons pas au vote sans avoir dénoncé ce marché de dupes. Le dispositif anti-concentration instauré en 1986, afin de préserver la liberté, interdit aujourd’hui de détenir plus de 49 % du capital des opérateurs des chaînes de la TNT qui dépassent 2,5 % d’audience. C’est là ce qui vous gêne, car vous souhaitez mettre à profit l’extraordinaire aventure de la TNT pour renforcer la concentration. Madame Vautrin, vous faites erreur : si l’amendement 754 propose de relever le seuil anti-concentration, c’est dans l’intérêt de Bouygues et de TF1 ! Ne soyez pas naïfs, mes chers collègues !

M. André Chassaigne – Ils le savent bien !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec – Après s’être méfiés de la TNT, outil de diversité télévisuelle et de développement territorial, les grands acteurs du secteur audiovisuel cherchent désormais à se l’approprier. Baissons les masques ! L’opinion doit savoir que les grandes manœuvres ont commencé : sans attendre les conclusions de la commission, on place l’audiovisuel sous la tutelle des partisans du Président de la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Patrick Ollier, président de la commission – Je ne peux laisser tenir ces propos sans réagir. Monsieur Le Bouillonnec, nous avons l’habitude de débattre calmement ; il est inadmissible que vous faisiez de cet amendement le prétexte d’un procès politique qui en subvertit le sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC ; exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. Patrick Bloche – Ce n’est pas un procès politique !

M. Patrick Ollier, président de la commission – Monsieur Bloche, ce n’est pas à vous que je parle, mais à M. Le Bouillonnec ! (« Et nous ? » sur plusieurs bancs du groupe SRC) L’examen du projet de loi relatif à la télévision du futur a révélé les réticences à investir dans la TNT et la nécessité de se battre pour lui faire place. Vingt ans après sa création, le dispositif anti-concentration doit être assoupli (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et le seuil de 2,5 %, justifié à l’époque où la TNT n’existait pas, doit être relevé à l’heure où elle s’étend à une dizaine de chaînes et continue de se développer (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Vos arguments n’ont rien de technique : ils sont purement politiques et visent à éveiller les soupçons de l’opinion publique !

Mme Catherine Vautrin – Tout à fait !

MM. Patrick Bloche et Jean-Yves Le Bouillonnec – Elle doit être avertie !

M. Patrick Ollier – Ce procès d’intentions est inacceptable ; la majorité votera l’amendement !

À la majorité de 72 voix contre 45 sur 119 votants et 117 suffrages exprimés, l’amendement 754 est adopté.

Mme Marylise Lebranchu – Et voilà ! Champagne !

M. Patrick Ollier, président de la commission – C’est scandaleux. Hier nous étions payés par les semenciers, aujourd’hui par TF1 ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)

M. François Brottes – Rappel au Règlement sur le fondement de l’article 58, alinéa 1, de notre Règlement. Monsieur le président, nous souhaitions que la discussion de plusieurs amendements importants ait lieu dans le calme…

M. le Président – Elle a eu lieu, Monsieur Brottes.

M. François Brottes – En effet, mais le sujet eût mérité qu’elle aille plus loin. Ce projet consacre en réalité la loi du plus fort, s’agissant des médias comme – nous le verrons – de la grande distribution.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – On ne peut pas dire cela !

M. François Brottes – Les grands groupes pourront désormais écraser les opérateurs entrants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie L’amendement 993 permet à l’État de détenir indirectement, et non plus directement, le capital de RFI. Il s’agit d’une modification d’ordre juridique qui permettra de mettre en œuvre la réforme de l’audiovisuel extérieur, sans changer la nature des liens avec l’État.

M. Jean-Paul Charié, rapporteur – Avis favorable sur cet amendement de portée purement juridique.

M. André Chassaigne – À propos de cet amendement de portée « purement juridique », rappelons quand même que le 1er août 2007 Nicolas Sarkozy adressait à Mme Albanel une lettre de mission sur la réorganisation et la rationalisation de la politique audiovisuelle extérieure ; que le 27 août il demandait à Bernard Kouchner de créer les conditions d’un pilotage efficace de cette même politique et de procéder aux réorganisations nécessaires ; que le 28 novembre 2007, dans leur rapport, M. Levitte et M. Benhamou, conseillers de Nicolas Sarkozy, demandaient la création d’un groupement d’intérêt économique.

Derrière cet amendement « juridique » se profile une holding, « France monde », qui chapeaute TV5 et ses 300 salariés, France 24 avec 430 salariés, RFI avec 1 000 salariés. Elle s’occupera de l’administration, des ressources humaines, des finances, de la commercialisation, de la distribution. Or, les salariés de France 24, contrairement à ceux de TV5 et de RFI, ne sont pas couverts par la convention collective de l’audiovisuel public. Ce qu’on veut, c’est faire sortir les salariés de RFI et de TV5 du cadre de cette convention pour les soumettre à une « sous-convention » comme France 24, en vue d’économiser 20 millions.

D’autre part, France 24 relève pour 50 % de TF1 et pour 50 % de France Télévisions. S’agit-il de donner à TF1 un pouvoir décisionnaire sur l’ensemble de l’audiovisuel public ? Quelle sera l’indépendance de cette holding, qu’en sera-t-il de la liberté éditoriale, quelles seront les conséquences sur les recettes publicitaires ? Bref, par un petit amendement « juridique », on conforte la mainmise de TF1 sur l’audiovisuel public. Mais sans doute va-t-on encore se récrier, alors même qu’on est pris le doigt dans le pot de confiture !

M. le Président – Sur le vote de l’amendement 993, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public.

M. Patrick Bloche – Mme la ministre présente cet amendement, introduit subrepticement dans la loi de modernisation de l’économie, comme une simple mesure technique et juridique. Ce n’est pas seulement cela. En effet les personnels de RFI sont inquiets de leur avenir, alors que le cadre de l’audiovisuel extérieur public vient d’être à nouveau bouleversé. Leur inquiétude est d’autant plus fondée qu’une des hypothèses de la commission Copé est de financer RFI sur dotation budgétaire et non plus sur la redevance, ce qui est une solution assez aléatoire. Si en plus, la détention du capital de RFI est sensiblement modifiée par cet amendement, c’est la loi de 1986 qui est remise en cause.

Cet amendement venant après l’article 37, qui porte sur les fonds de dotation, cela signifie-t-il que la future holding aura cette structure juridique ? Son nom sera-t-il « France monde » ? Enfin, comment mettre sur le même plan TV 5 Monde, qui fait l’objet d’un traité international ? Décidément, cet amendement est tout sauf technique.

M. Didier Mathus – Tout sauf technique, en effet : c’est la première déclinaison législative du grand œuvre de M. Benhamou, à savoir reconfigurer l’audiovisuel extérieur de la France – ce à quoi il s’emploie avec un succès tout relatif. L’aboutissement en est la création de cette entité regroupant RFI, France 24 et TV 5 Monde : idée pour le moins baroque ! Dans TV 5 Monde, chaîne de la francophonie, nous sommes associés aux Canadiens, aux Suisses, aux Belges, qui sont vent debout contre ce qui est en train de se passer. Au dernier conseil d’administration, le PDG, François Bonnemain, qui n’est pourtant pas de gauche, a résisté plusieurs heures aux injonctions du Gouvernement et à cette logique indéfendable.

Avec cet amendement, c’est RFI qui est visé. On peut débattre de l’avenir de cette chaîne, qui fait un travail formidable notamment en Afrique francophone. Mais peut-on ainsi, en fin de séance, toucher à son capital, alors qu’on ne sait rien de l’avenir de cette chaîne ni de celui de France 24, et que nos partenaires au sein de TV 5 Monde sont en guerre contre les décisions françaises ? Ce n’est pas raisonnable. J’ajoute que la commission Copé a envisagé de prendre la part de la redevance qui revient à RFI pour compenser le manque de recettes que subira France Télévisions. Là aussi, c’est l’incertitude. De plus, la différence entre un financement par la redevance, automatiquement affectée à l’opérateur, et des crédits budgétaires, c’est l’indépendance.

M. Michel Bouvard – La redevance est quand même soumise au contrôle du Parlement !

M. Didier Mathus – Les crédits budgétaires sont soumis au bon vouloir politique. C’est un moyen de plus pour asservir l’audiovisuel.

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie Je n’ai pas dit que c’était un amendement technique, mais un amendement juridique qui permet à l’État de détenir de façon indirecte le capital de RFI. Je vais donc donner des précisions, car vous évoquez bien inutilement des démons qui sont le fruit de votre imagination.

D’abord, le nom de la holding n’est pas « France Monde », mais « Audiovisuel extérieur de la France ». Son objet est de clarifier l’organigramme des participations de l’État. Il ne s’agit nullement de privatiser ou de diluer le capital, qui sera détenu à 100 % par l’État. Il n’est pas plus envisagé de supprimer les dispositions de la loi de 1986 relatives à RFI, notamment celles qui régissent la composition de son conseil d’administration ou les modalités de nomination de son président. Donc, n’agitez pas des épouvantails propres à effrayer les salariés de ces sociétés qui concourent à l’image de la France dans le monde, donc à son attractivité – ce qui permet d’en parler dans une loi de modernisation de l’économie.

Contrairement aux autres futures filiales de cette holding, RFI, tout en étant détenue indirectement par l’État, continuera à exercer des missions de service public et à bénéficier en compensation d’une partie de la redevance audiovisuelle. Ces obligations seront précisées par un cahier des charges et les statuts seront approuvés par décret. Il n’est donc question de remettre en cause ni les missions, ni le financement, ni la composition des organes de direction de RFI, mais simplement de prévoir un régime indirect de détention du capital, afin de clarifier l’organigramme des participations de l’État dans le secteur audiovisuel, c’est tout.

À la majorité de 67 voix contre 52 sur 119 votants et 119 suffrages exprimés, l’amendement 993 est adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures 45.

La séance est levée à 20 heures 15.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

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