Monsieur le Premier ministre,
Madame la Présidente,
Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux d’accueillir ici, à la Présidence de l’Assemblée nationale, cette conférence-débat franco-allemande.
Je sais que le temps est aussi rare que précieux. Aussi serai-je aussi bref que possible dans mes propos introductifs.
D’abord, c’est très sincèrement que je veux remercier chacune et chacun d’entre vous d’avoir répondu à mon invitation.
Je tiens à saluer tout particulièrement Hans-Gert PÖTTERING, ancien Président du Parlement européen ; Président de la Fondation Konrad ADENAUER, je le remercie d’être venu spécialement de Berlin. Je lui laisserai la parole dans quelques minutes.
Mes remerciements chaleureux s’adressent également à Simone VEIL, ancienne Présidente du Parlement européen, au Premier ministre Edouard BALLADUR, à S.E. Reinhard SCHÄFERS, Ambassadeur d’Allemagne à Paris, ainsi qu’aux nombreux Parlementaires et Ambassadeurs présents ici ce soir. Votre présence, Messieurs, parmi nous aujourd’hui nous honore. Elle donne tout son sens à notre rencontre.
Merci également, et bien sûr, à Jean-Pierre JOUYET, ancien Ministre et Président de l’AMF, d’avoir accepté de nous exposer sa vision personnelle des défis auxquels est aujourd’hui confrontée l’Union européenne. L’Europe économique et financière est mise en ce moment sous pression du fait des conséquences de la crise des liquidités interbancaires, des marchés financiers et des dettes souveraines.
La réalité est grave car c’est la construction européenne qui est en cause.
Pourquoi avoir pris l’initiative d’organiser une conférence-débat franco-allemande aujourd’hui?
Ø D’abord, parce que la crise financière, économique, sociale, et donc politique, que nous traversons impose en ce moment des décisions de politique économique et budgétaire rapides et coordonnées dans tous les pays de l’Union européenne.
L’adoption de ces décisions ne va naturellement pas sans discussion de fond, ni sans certaines tensions. Mais elle peut aussi constituer une opportunité.
L’Europe, en effet, a toujours progressé sous l’effet des crises qu’elle traversait. Cette crise doit nous conduire à réfléchir au sens profond de la construction européenne et des valeurs prônées depuis longtemps par l’Union. A titre d’exemple, les valeurs européennes de régulation, de solidarité et de responsabilité sont sorties considérablement renforcées de la crise mondiale. Elles tendent désormais à s’imposer au plan mondial dans le cadre du G20, sous l’impulsion notamment de la France et de l’Allemagne. Si nous prenons conscience de cela, alors je pense que les discussions de fond actuelles peuvent favoriser un nouveau départ de l’Union.
Ø La seconde raison pour laquelle cette conférence franco-allemande se tient aujourd’hui -et je forme le vœu qu’elle soit la première d’une longue série- , est qu’au cœur de l’Europe, et notamment de sa construction communautaire la plus achevée qu’est l’Union économique et monétaire, il y a la relation franco-allemande.
Historiquement, il n’y a pas, ou peu, d’exemples de progrès de l’Union européenne qui n’aient été précédés d’une démarche du couple franco-allemand.
Or, au fil des années, cette relation franco-allemande a parfois donné le sentiment de s’essouffler.
Je laisserai la parole à Antoine VEIL dans un instant afin qu’il vous fasse part des réflexions que je partage avec lui sur ce sujet. C’est dans cet esprit que j’ai rencontré le 29 mai à Essen le Président du Bundestag Norbert LAMMERT. De cette rencontre est née l’idée de cette conférence franco-allemande. Je veux ici en remercier très sincèrement Antoine VEIL.
Compte tenu de son appartenance à une génération qui a vu naître la CECA et le marché commun, c’est-à-dire l’Europe des pères fondateurs, Antoine VEIL nous dira pourquoi il attache tant d’importance à la relation franco-allemande.
Je crois, pour ma part, que la France et l’Allemagne sont, en réalité, d’accord sur l’essentiel. J’en veux pour preuve les conclusions de la rencontre du Président Nicolas SARKOZY et de la Chancelière Angela MERKEL, le 14 juin dernier. Le mot de « gouvernement économique », qui était encore il y a quelques mois inenvisageable dans un communiqué conjoint, est désormais devenu un objectif commun.
Mais il est vrai aussi que subsistent des nuances, parfois fortes, dans nos appréciations. Quand la France insiste sur la solidarité, l’Allemagne insiste sur la responsabilité. Qui ne saurait reconnaître, pourtant, que les deux approches sont indissociables l’une de l’autre, et que nous avons besoin des deux, aujourd’hui plus que jamais ? Que certains points de tension soient montés en épingle par les
observateurs ne rend service ni à l’Europe, ni à l’euro, ni à la croissance européenne.
Ø Il y a, enfin, une troisième raison à l’organisation de cette conférence-débat. Face à l’émergence rapide de pays comme la Chine, mais aussi de pays tels que l’Inde ou le Brésil, il nous faut relever ensemble, au niveau européen, plusieurs grands défis.
Sans vouloir être alarmiste, je crois que l’avenir du modèle économique, industriel et social européen est en jeu en ce moment. Pour tenir son rang dans la mondialisation, l’Europe doit surtout relever ses propres défis.
Des défis d’organisation de sa gouvernance économique tout d’abord. Je crois, à cet égard, qu’il ne faut pas tomber dans le piège qui consisterait à mettre uniquement l’accent, vis-à-vis de nos concitoyens, sur une Europe qui punit les Etats et qui les sanctionne. Des sanctions proportionnées sont évidemment nécessaires. Mais le vrai message est que l’Europe est une chance pour constituer un cadre fort et protecteur dans la mondialisation. Il en va de l’intérêt de chacun des Etats européens et de leurs citoyens.
L’Europe doit relever également des défis de compétitivité. Ils touchent à la fois à la croissance, à l’emploi, à la politique industrielle, à l’innovation et à la recherche.
Ce n’est pas de moins d’Europe dont nous avons besoin dans ces domaines, mais de plus d’Europe, et vite.
Car ce qui se joue à cet égard, c’est le choix entre la pérennité de l’Europe dans un monde multipolaire et son déclin. Des réponses que nous apporterons ensemble à ces défis, dépendra la place que l’Europe tiendra, ou non, dans la mondialisation au cours des trente prochaines années.
Enfin, je veux souligner que l’aventure européenne est, aujourd’hui comme hier, avant tout un défi politique. Les initiatives dans ces domaines relèvent certes des exécutifs nationaux. Et nous avons besoin de volontarisme politique pour lancer de nouveaux projets concrets et de nouvelles initiatives ambitieuses.
Les Parlements, l’opinion publique, doivent accompagner ce débat pour se l’approprier, se convaincre.
Je souhaite que le débat d’aujourd’hui contribue à cette prise de conscience politique.
Non pas en vue d’intérêts électoralistes. De multiples sensibilités sont d’ailleurs représentées ici ce soir et je m’en félicite. Mais au sens noble de la politique qui doit poser les vraies questions au moment où l’Europe est à la croisée des chemins. Il en va désormais, et c’est ma profonde conviction, de l’avenir de notre modèle économique, social et industriel européen.