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N° 2134

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 décembre 2009.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200),

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Gérard VOISIN,

Député

——

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Michel Herbillon, Jérôme Lambert, Thierry Mariani, Didier Quentin, vice-présidents ; M. Jacques Desallangre, Mme Marietta Karamanli, MM. Francis Vercamer, Gérard Voisin secrétaires ; M. Alfred Almont, Mme Monique Boulestin, MM. Pierre Bourguignon, Yves Bur, François Calvet, Christophe Caresche, Philippe Cochet, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Delebarre, Michel Diefenbacher, Jean Dionis du Séjour, Marc Dolez, Daniel Fasquelle, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Jean-Claude Fruteau, Jean Gaubert, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Mmes Annick Girardin, Anne Grommerch, Elisabeth Guigou, Danièle Hoffman-Rispal, MM. Régis Juanico, Marc Laffineur, Robert Lecou, Michel Lefait, Lionnel Luca, Philippe Armand Martin, Jean-Claude Mignon, Jacques Myard, Michel Piron, Franck Riester, Mmes Chantal Robin-Rodrigo, Valérie Rosso-Debord, Odile Saugues, MM. André Schneider, Philippe Tourtelier.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

CHAPITRE I : LE DÉVELOPPEMENT DES STI : UNE IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ 9

A. LES STI AU SERVICE DE LA VILLE 9

1. Des outils existent déjà. 10

2. La généralisation de ces outils favorisera de nouveaux comportements et une nouvelle gestion des déplacements. 11

B. LES STI AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 12

1. Un rôle important en matière de recherche scientifique 14

2. Une nouvelle gestion des flux 15

C. LES STI AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE 17

CHAPITRE II : L’ACTION DES POUVOIRS PUBLICS 21

D. LES EXEMPLES ÉTRANGERS 21

1. L’exemple canadien 21

a) Partenariats du savoir : la composante de base 22

b) Développement d’une architecture canadienne pour les STI 22

c) Plan multimodal de R et D pour les STI : encourager l’innovation 22

d) Déploiement et intégration des STI au Canada 22

e) Renforcement de l’industrie canadienne des STI : Leadership mondial 22

2. L’exemple japonais 23

a) Les plans gouvernementaux 24

(1) 1998 : Plan d’amélioration des routes 24

(2) La mise en œuvre dès 2001 d’un « Schéma de routes intelligentes » 25

b) La mise en place dès 2002 de structures dédiées aux STI 26

E. L’ACTION DES POUVOIRS PUBLICS FRANÇAIS 27

CHAPITRE III : L’ACTION DE L’UNION EUROPEENNE 31

F. LE PLAN D’ACTION DE L’UNION EUROPÉENNE 31

G. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE 33

1. La directive, une démarche adaptée ? 33

a) Les objectifs 33

b) La procédure proposée 34

c) Le recours à la procédure de comitologie doit être encadré et contrôlé 34

2. Le caractère obligatoire du recours aux STI est en passe d’être abandonné 36

3. Réglementation ou normalisation ? 36

4. La définition d’une plateforme embarquée ouverte ne doit pas relever de l’Union européenne 37

5. L’intégration dans le champ de la directive de l’appel d’urgence ne doit pas conduire au transfert à l’Union européenne de l’organisation des secours d’urgence. 39

CONCLUSION 41

TRAVAUX DE LA COMMISSION 43

1. Examen de la communication de M. Gérard Voisin sur le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200), mercredi 4 mars 2009 43

2. Examen de la communication de M. Gérard Voisin sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200), mardi 29 septembre 2009 45

3. Examen du rapport d’information de M. Gérard Voisin sur les systèmes de transport intelligents (E 4200), mercredi 2 décembre 2009 49

PROPOSITION DE RESOLUTION 55

ANNEXES 57

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 59

ANNEXE 2 : LETTRE D’ATEC-ITS FRANCE A M. GÉRARD VOISIN 63

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

« Les systèmes de transport intelligents (STI) (en anglais : Intelligent Transportation Systems-ITS) désignent les applications des nouvelles technologies de l’information et de la communication au domaine des transports. Elles reposent sur des fonctions généralement associées à « l’intelligence » : capacités sensorielles, mémoire, communication, traitement de l’information et comportement adaptatif » (wikipedia).

Les STI sont amenés à jouer un rôle essentiel dans cinq domaines :

- l’amélioration de la sécurité (notamment de la sécurité routière) ;

- l’optimisation de l’utilisation des infrastructures de transport ;

- la limitation des consommations d’énergie, des pollutions et des nuisances ;

- la promotion des transferts vers les modes les plus respectueux de l’environnement ;

- le développement des services.

Les systèmes de transports intelligents (STI) vont constituer, à l’évidence, un des outils majeurs d’une croissance économique respectueuse de l’environnement, que nous appelons tous de nos vœux, car ils concourent à la maîtrise de la mobilité, en favorisant entre autres le report de la voiture vers des modes de transport moins polluants. Ils font l’objet d’une compétition économique serrée au niveau mondial, car les plus-values et les marges de demain se situeront dans les services permettant l’optimisation des déplacements, par une évolution similaire à celle qu’a connu l’informatique avec le développement des concepteurs de logiciels.

C’est pourquoi la Commission chargée de réfléchir sur le grand emprunt, présidée par MM. Michel Rocard et Alain Juppé, a proposé, dans son rapport « Priorités stratégiques d’investissement et emprunt national », de consacrer 3 milliards d’euros à la mobilité du futur car les « engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’un facteur quatre d’ici à 2050 et le souci de garantir la sécurité des approvisionnements énergétiques rendent nécessaire le développement de nouvelles solutions de mobilité, moins consommatrices d’énergies fossiles ».

L’importance des systèmes de transport intelligents est donc considérable et il n’est pas excessif de considérer que la proposition de directive « établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport » est le texte fondateur d’une nouvelle politique des transports.

Cette proposition de directive peut entraîner à terme une révolution de notre conception du transport, en rendant effective l’intermodalité ou efficace la gestion des flux routiers. Comme toute révolution, elle s’accompagne de crispations et de craintes qui conduisent à un certain blocage sur lequel ce rapport se penchera.

1. Les STI seront intégrés dans les transports de demain.

La Commission avait demandé, le 8 juillet 2008, suite à la communication du rapporteur sur le Livre vert de la Commission « Vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine », que la présidence française de l’Union européenne obtienne du Conseil la création d’un Observatoire de la mobilité urbaine portant en outre sur l’exploitation des travaux sur l’interopérabilité des systèmes de transport intelligents.

En effet, jugeant pertinente la démarche de la Commission qui visait à adopter une stratégie globale en matière de transports urbains, le rapporteur avait souligné, à travers les recommandations de la Délégation, notre intérêt pour : « la promotion du développement économique des villes, à laquelle pourraient concourir les systèmes de transport intelligents qui, à l’aide des technologies de l’information, visent à améliorer la mobilité et l’accessibilité ».

Aujourd’hui, il nous est proposé d’examiner la première directive de mise en œuvre de la politique définie par ce document prospectif.

Il est clair que la plupart des engagements du Grenelle de l’environnement, particulièrement dans le domaine des transports, ne pourront être atteints que par un recours accru aux nouvelles technologies. Leur mise en œuvre devrait se traduire par le développement de la part de marché des modes de transport de fret alternatifs à la route, l’augmentation de la part des transports publics dans les déplacements urbains et le développement de véhicules plus efficaces en matière de consommation d’énergie et d’émissions de gaz à effet de serre.

Enfin la mise en œuvre des réglementations, notamment en matière de sécurité, s’appuiera de plus en plus sur des systèmes de collecte et de traitement de l’information automatisés. Elle impliquera également une meilleure coopération entre les différents niveaux d’institutions (l’Etat, les collectivités locales et l’Europe) pour identifier les bonnes pratiques et normaliser des produits répondant aux besoins des usagers, afin qu’ils puissent être diffusés à un moindre coût.

Dans ce domaine l’Europe est en retard. Le Gouvernement canadien a, par exemple, mis en place un programme visant à développer les STI depuis dix ans.

2. Le retard européen

Aujourd’hui, les STI ne jouent pas dans l’Union européenne le rôle qui devrait être le leur pour aider à remédier aux difficultés croissantes du secteur du transport routier.

Le développement des systèmes de transport intelligents (STI) est donc une question extrêmement importante qui va toucher, dans leur vie quotidienne, tous les Européens. Or l’Union européenne n’arrive pas à déployer pour le moment de manière coordonnée ces systèmes. L’harmonisation des systèmes de péage automatique, qui n’est pas encore entrée dans les faits, a par exemple pris huit ans. Il serait commode d’attribuer ce retard à la lourdeur des procédures de l’Union européenne, mais cela serait excessif et peut-être injuste.

Un fait demeure, l’absence de déploiement cohérent de ces outils à l’échelle européenne constitue, pour la Commission européenne, la principale cause de la lenteur de la pénétration des STI en Europe. Ce diagnostic peut être partagé, ainsi que la conviction de l’importance de ces dispositifs dans la gestion de l’espace urbain ou la lutte contre l’effet de serre, objectifs politiques majeurs de l’Union européenne.

Aussi, paraît-il légitime que l’Union européenne assume de plus grandes responsabilités dans la coordination de la mise en œuvre de ces systèmes, en particulier en matière d’interopérabilité, condition préalable au déploiement européen des STI, pour éviter qu’une multiplicité de solutions nationales, régionales et locales ne mette en péril l’intégrité du marché unique.

Les coûts de l’engorgement des routes représentent en moyenne 1 % du PIB de l’Union européenne.

Le secteur du transport routier est responsable de 72 % du total des émissions de CO2 liées aux transports, qui ont connu une hausse de 32 % (1990-2005).

Le nombre des victimes de la route s’élevait encore, pour l’ensemble de l’Union, à 42 953 en 2006, soit 6 000 de plus que l’objectif intermédiaire fixé pour parvenir à 25 000 en 2010 (réduction de 50 % par rapport à 1990).

Source : Commission européenne.

CHAPITRE I :
LE DÉVELOPPEMENT DES STI : UNE IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ

La division par quatre du volume des émissions de gaz à effet de serre, d’ici à 2050 et le souci de garantir la sécurité des approvisionnements énergétiques rendent nécessaires le développement de nouvelles solutions de mobilité, moins consommatrices en énergies fossiles.

Cette évolution est d’autant plus indispensable et urgente que le secteur des transports est le premier émetteur de CO2 en France (33 % des émissions totales), et que ses émissions ont crû de 8 % entre 1990 et 2008.

Au-delà des émissions de CO2, le secteur des transports représente, en France, 26 % des émissions totales de gaz à effet de serre, en augmentation de 20 % par rapport à 1990. L’objectif national d’une réduction de 20 % des émissions à l’horizon 2020 ne pourra donc pas être tenu sans l’apport des STI.

Les transports sont un secteur où les investissements sont lourds et s’amortissent lentement. Le remplacement d’un parc automobile nécessite plusieurs années, il ne faut donc pas perdre de temps pour déployer des systèmes qui existent déjà.

A. Les STI au service de la ville

Les technologies utilisées dans les systèmes de transport intelligents sont déjà présentes. Elles vont des dispositifs utilisés depuis de longues années, tels que les systèmes de gestion des carrefours à feux, les panneaux à messages variables, les radars automatiques ou la télésurveillance, jusqu’à des applications plus avancées intégrant le retour des données en temps réel d’informations reposant sur de nombreuses sources (météo, GPS, surveillance vidéo…).

A partir du moment où existe un consensus sur le fait qu’il n’est plus possible de développer l’emprise de l’automobile dans l’espace urbain, il convient, si nous ne voulons pas recourir à des solutions autoritaires, d’améliorer la gestion de cet espace par le recours à l’informatique, la télématique et la mise en réseau de cet ensemble.

Il y a aujourd’hui une tentation de régulation de la circulation automobile par la voie réglementaire, par exemple l’interdiction des centres villes aux voitures (en Italie) ou le péage urbain (Londres) où, pour les municipalités qui ne veulent pas assumer de telles politiques, par la réduction de la part de la voirie dédiée au véhicule individuel pour créer des embouteillages décourageant les automobilistes (tel que des couloirs de bus surdimensionnés).

La gestion « intelligente » des flux de circulation permet de réduire le recours à ces procédés plus contraignants pour l’automobiliste, mais elle implique une gestion fine de l’espace qui va bien au-delà de la circulation et doit intégrer l’urbanisme, dans une vision globale. Les outils de transports intelligents peuvent occuper une place essentielle dans cette politique, ils ne sauraient la résumer.

Le rapporteur a été très impressionné par les outils de gestion des flux de circulation mis en place à Tokyo, dans le cadre d’une politique globale qui limite également par exemple le stationnement des véhicules.

1. Des outils existent déjà.

Les systèmes de transport intelligents se sont diffusés lentement depuis quelques années mais, même si nous n’en avons pas toujours conscience, ils existent aujourd’hui dans notre quotidien et nous pouvons citer quelques exemples :

- les autoroutes et les voies rapides urbaines ont été progressivement équipées au cours des trente dernières années de dispositifs de recueil de données qui alimentent le réseau des centres d’ingénierie et de gestion de trafic et des centres d’information routière. Ils permettent de mesurer l’état du trafic en temps réel et de proposer par divers moyens (panneaux, radio, Internet…) des itinéraires évitant les bouchons et de gérant les feux rouges pour réduire leur formation ;

- le contrôle des temps de conduite et de repos des conducteurs professionnels par l’introduction du chronotachygraphe électronique sur les camions et les autocars au niveau européen ;

- le suivi par satellite du fret améliore l’efficacité et la coordination des transports routier et ferroviaire de marchandises ;

- Sur les 18 000 km de routes à péage, près de 3 millions de véhicules légers et 600 000 poids lourds circulent avec un badge interopérable, valable quelle que soit la société concessionnaire.

Cette liste n’est bien sûr pas limitative, d’autres outils sont en cours de développement tels que le téléphone portable qui, couplé au GPS, pourrait devenir l’outil permettant de gérer l’emploi successif de plusieurs modes de transport (l’intermodalité).

Il est important de relever l’existence aujourd’hui dans le commerce de tous les outils nécessaires au développement des transports intelligents. Leur faible diffusion explique un coût souvent prohibitif, en tous cas très supérieur aux sommes que l’usager est prêt à débourser pour l’usage attendu, en outre leur efficacité est limitée par le manque de connections entre ces divers systèmes.

C’est pourquoi une des questions essentielles posées par la proposition de directive réside dans le caractère obligatoire ou non du déploiement des STI, gage d’une réduction des coûts et d’une efficacité accrue, par le biais d’une diffusion massive.

2. La généralisation de ces outils favorisera de nouveaux comportements et une nouvelle gestion des déplacements.

Comme le souligne le Secrétariat d’Etat aux transports dans sa présentation des STI, « L’évolution prévisible des STI conduira à privilégier l’objectif de mobilité durable en généralisant des procédés qui existent déjà ».

La comparaison des informations disponibles avec une base regroupant des données historiques de référence, permet de développer des techniques efficaces de prédiction du trafic et des besoins des usagers. Aussi, sommes-nous en train de passer de la diffusion d’une information brute à une information traitée, permettant au conducteur d’anticiper et de prendre la bonne décision, ce qui rend beaucoup plus efficace le recours aux STI.

Nous pouvons en trouver deux exemples avec les limiteurs de vitesse « intelligents », développés par certains constructeurs automobiles, qui tiennent compte non seulement de la réglementation applicable au lieu où se trouve le véhicule, mais également de la synchronisation des feux rouges. L’« écoconduite » peut apporter des gains sensibles mais elle nécessite une coopération entre le véhicule et l’infrastructure du fait de la nécessité d’une continuité de l’information sur tout le trajet.

Ces systèmes coopératifs, font l’objet de tests en grandeur réelle dans plusieurs pays, dont l’Allemagne qui met en œuvre un projet s’étalant de 2008 à 2012, destiné à recueillir des informations en milieu ouvert avec des véhicules conduits par des personnes non formées. Le rapporteur avoue que les informations que lui a communiquées Mercedes-Benz sur la taille et les financements consacrés à ce projet sont impressionnants.

La diffusion de téléphones portables dotés de systèmes de GPS va voir apparaître le voyageur « intelligent » qui pourra préparer ses déplacements, puis être aidé pendant sa mobilité par des équipements lui permettant de recevoir toutes les informations concernant le territoire où il se trouve, et d’effectuer les transactions nécessaires (achat de billets, location de voiture…). Il existe déjà des expériences permettant des achats par le téléphone portable. A ce niveau nous nous situons plus sur un problème de généralisation de techniques déjà disponibles que d’innovation.

Ces techniques permettront une gestion du trafic élargie à la mobilité, les responsables de tous les modes de transport (y compris les responsables de la location de vélo en libre-service ...) disposeront des outils nécessaires pour gérer de manière très fine le réseau.

Toutefois, même si l’amélioration de la fluidité de la circulation pourrait être sensible, les STI ne pourront pas remédier à eux seuls au sous-dimensionnement de la voirie et leur pleine efficacité implique également une éducation du conducteur, nécessaire au bon usage de ces outils.

B. Les STI au service du développement économique

Comme le note la Commission Rocard-Juppé, cet « enjeu environnemental dans les transports se double d’un défi économique et technologique :

- économique, d’abord, en raison du poids dans la production française et dans l’emploi des secteurs des transports et des industries automobile, ferroviaire et aérospatiale et en raison de leur potentiel de développement à l’échelle mondiale autour de solutions innovantes, plus sobres en énergies fossiles dans un contexte de compétition commerciale toujours plus intense ;

- technologique, également, du fait des ruptures techniques qui sont nécessaires aujourd’hui pour parvenir à atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les transports et accompagner ainsi le changement de nos modes de mobilité. Le développement de nouvelles technologies dans le secteur des transports a pour préalable la démonstration de leur intérêt technique et industriel, étape qui présente des coûts et des risques importants, que les financements privés ne peuvent prendre en charge seuls. Pour permettre la réalisation de ces ruptures techniques et le décollage de ces nouvelles solutions, un accompagnement public, national et européen est donc justifié, d’autant plus qu’il est porteur d’externalités importantes (gains environnementaux, croissance économique, emploi).

« Alors que la compétition économique mondiale se fait de plus en plus pressante dans le secteur des transports et que la nécessité d’une transformation de nos modes de mobilité n’a jamais été aussi patente, l’emprunt national peut servir de catalyseur et d’accélérateur pour la réalisation de ces ruptures ».

Le mot « rupture » employé par cette Commission est important car la généralisation des STI est un moteur de la croissance économique.

La demande et les débouchés existent. Le thème des transports intelligents ne peut que monter en puissance dans la recherche publique et privée. Les filières industrielles émergentes dans le secteur de la mobilité durable ne sont pas encore dominées par des acteurs majeurs à l’échelle internationale. La France peut donc espérer se positionner dans les toutes premières places, à condition de valoriser sa recherche d’excellence et de faire émerger des acteurs industriels susceptibles d’occuper une place de choix en Europe.

1. Un rôle important en matière de recherche scientifique

En se rendant au CEA, au Japon et en Allemagne, le rapporteur a pu mesurer l’importance du thème des transports intelligents pour les laboratoires de recherche, qui se mobilisent pour lutter contre les effets néfastes des congestions, sources de pollution de l’air, de consommation de carburant et donc d’émissions de gaz à effet de serre, ainsi que de temps perdu par les usagers dans les transports.

Ce thème transversal irrigue de nombreuses études et offre des débouchés intéressants aux chercheurs en matière de recherche appliquée : les démonstrateurs d’outils capables de localiser une coupure de faisceau électrique ou les GPS reproduisant le véritable paysage vu par le conducteur qui ont été montrés au rapporteur dans les laboratoires du CEA lui semblent promis à un bel avenir industriel.

Nous pouvons distinguer trois grandes périodes dans le développement des STI :

- années 1980-1995 : investissement dans l’information routière embarquée ;

- années 1995-2000 : interopérabilité, billettique et autoroute automatisée ;

- années 2000-2005 : mobilité durable, multimodalité et sécurité routière.

Aujourd’hui, les chercheurs essaient d’envisager le développement des véhicules du futur dans une logique globale, portant aussi bien sur la technologie que sur la conception des équipements et leur intégration dans les véhicules, afin de repenser la mobilité dans une perspective d’intermodalité faisant une place plus importante aux véhicules électriques.

Pour permettre le décollage de ces nouvelles solutions, il est essentiel de prouver l’intérêt technique et économique des STI par des démonstrateurs convaincants. Cette étape présente des coûts et des risques importants qui seront sensiblement moindres si nous sommes capables d’utiliser les moyens communautaires disponibles.

Un cofinancement public national et européen de démonstrateurs et de plateformes expérimentales associant centres de recherche publics, grands industriels et PME est nécessaire. Les constructeurs automobiles français que le rapporteur a rencontrés, ont engagé des investissements importants pour le développement de la voiture du futur (électrique ou hybride), qui intègrera les STI.

Le rapporteur souhaite, dans ce combat industriel majeur qui se prépare une meilleure coordination des politiques nationales, au niveau communautaire, mais également entre la France et l’Allemagne. Il a rencontré à Bruxelles les responsables de l’association européenne ERTICO qui réunit une centaine de structures publiques et privées cherchant à promouvoir les systèmes de transport intelligents, tant vis-à-vis des institutions européennes que des responsables des administrations et autres utilisateurs publics et privés dans les Etats membres et des coopérations bilatérales actives avec plusieurs pays et régions : Allemagne (DEUFRAKO), Californie, Japon, Chine.

Il est fondamental que la France puisse par l’ampleur de sa recherche peser de tout son poids au sein de ces structures car la définition des standards sera essentiel comme nous le verrons en examinant le texte de la proposition de directive.

Au-delà des questions de pure technique, la constitution et le traitement de bases de données, indispensable au fonctionnement des STI, sont un aspect méconnu des recherches. Pour connaître les caractéristiques des réseaux, de la demande de trafic et des problèmes récurrents, il est indispensable de disposer de bases de données très volumineuses que permettent de stocker les nouvelles technologies. La gestion de ces données qui, le plus souvent, proviennent de différents exploitants et permettent d’analyser et comprendre les situations de trafic, est un enjeu essentiel. Cette action doit être conduite par les pouvoirs publics. C’est d’ailleurs un des problèmes les plus épineux de la proposition de directive que la Commission propose. Elle vise à faire assumer par les Etats la responsabilité juridique des informations transmises.

Un deuxième aspect très important des recherches qui a été exposé au rapporteur à l’université de Tokyo par le professeur Suzuki porte sur l’adaptation des messages au conducteur et à son comportement qu’il convient d’analyser en permanence. Cette dimension nouvelle des STI permettra sans doute de décupler leur efficacité, elle doit donc être privilégiée dans des recherches qui ne peuvent plus reposer uniquement sur la création d’outils techniques.

2. Une nouvelle gestion des flux

Une des contraintes importantes de l’économie moderne est la gestion en flux tendus, destinée à éviter le financement des stocks. Il est évident que les STI sont amenés à jouer un rôle majeur dans ce domaine.

Ceci explique que les STI se soient rapidement développés dans le domaine du transport de marchandises. Le fait qu’il s’agisse de flottes de véhicules en facilite bien sûr le déploiement.

Aujourd’hui, de nombreuses entreprises équipent les véhicules de systèmes de navigation embarqués, mais également le fret (conteneurs, palettes, colis...) qui peut voyager muni de systèmes de localisation destinés à suivre l’avancement et à éviter les pertes. Cet équipement en GPS, permettant le suivi de toutes les marchandises, constitue d’ailleurs un investissement prioritaire pour la branche fret de la SNCF.

Aujourd’hui l’apport des STI est essentiel dans trois domaines :

- le transport combiné de marchandises sur lequel repose la multimodalité et l’intermodalité. Il implique des échanges d’informations entre les gestionnaires d’infrastructures, les entreprises de transport et les autorités publiques qui interviennent dans la régulation de ces systèmes pour informer les usagers des offres de transport correspondant à leurs besoins. Les affréteurs peuvent également mesurer les conséquences de leurs choix, non seulement en matière de coût et de temps passé, mais aussi en matière de pollution locale et d’émissions de gaz à effet de serre ;

- l’intégration de la chaîne de transport et de la logistique (suivi des véhicules, des marchandises) ;

- l’application de la réglementation dans le domaine social (temps de travail) et dans celui de la protection de l’environnement, notamment dans le cas du transport de matières dangereuses pour lequel un suivi particulier est obligatoire.

Comme les transports de marchandises s’effectuent au plan international, l’interopérabilité des systèmes implantés au sein d’un même pays et entre les différents pays est un enjeu considérable, en particulier pour le développement du fret ferroviaire et de la voie d’eau.

Le rôle de l’Union européenne est donc tout à fait essentiel.

Les bénéfices économiques des STI au Japon

Sur le plan économique, en 2004 le marché des STI représentait 12 trillions de yens (87 milliards d’euros) dont 6 trillions (43,4 milliards d’euros) pour les services d’information tels que GPS, VICS et ETC, 5 trillions (36,2 milliards d’euros) pour la construction des infrastructures (fibres optiques, caméras CCTV2) et 1 trillion (7,2 milliards d’euros) pour les services (cartes, logiciels…).

Des effets sont également déjà perceptibles au niveau de la société et des utilisateurs.

Ainsi, selon des enquêtes réalisées par le ministère des transports, grâce à l’utilisation de VICS, les personnes âgées ont à présent moins peur de conduire. Dans certaines zones-tests les embouteillages ont été réduits de 50 % malgré l’augmentation simultanée du trafic total. L’instauration de péages à tarifs variables selon les horaires, le type de véhicule et l’itinéraire emprunté a entraîné 20 % de trafic de plus la nuit sur les voies express avec, pour conséquence, une réduction sur les voies ordinaires, ce qui offre des conditions de conduite nocturne plus sûres sur ce type de routes.

Source : Ambassade de France au Japon.

C. Les STI au service de la sécurité routière

Répondre à une politique des transports dotée d’objectifs ambitieux en matière de sécurité implique de se doter des outils les plus adaptés car l’éducation des populations, indispensable, ne permettra pas seule d’atteindre les objectifs fixés ; des dispositifs comme l’appel d’urgence ont leur utilité.

Dans la proposition de directive en cours de négociation que la Commission examine, la Commission européenne propose d’intégrer les systèmes d’appel d’urgence dans le champ des STI rendus obligatoires. Elle estime que la généralisation de ce système éviterait la mort de 2 500 personnes sur les routes européennes. Même si le rapporteur considère que ce chiffre est surestimé, l’efficacité de ces dispositifs n’est pas contestable.

La gestion d’urgence, en cas d’accident de la route, utilise au maximum des systèmes automatisés de recueil de l’information et des transmissions performantes. Les principaux enjeux sont la rapidité d’intervention, l’évitement d’accidents en chaîne et le rétablissement de la circulation.

Les principaux dispositifs d’aide en cas de situation d’urgence sont :

- la Détection automatique d’incidents (DAI) par les capteurs routiers installés sur l’infrastructure et qui préviennent l’exploitant du réseau (Image de DAI par capteur vidéo) ;

- les services d’assistance à l’automobiliste (exemple : appel automatique des secours en cas de collision, envoi automatique de la localisation précise du lieu d’accident) qui, malgré les efforts de Renault et de PSA, ne sont pas encore démocratisés.

Toutefois, ces dispositifs ne constituent que le premier maillon d’une chaîne et sont tributaires de l’efficacité globale des services de secours.

Les STI vont au-delà de l’appel d’urgence et peuvent contribuer grandement à éviter les accidents de la route :

- certains sont largement diffusés tels que l’aide électronique au freinage, la boîte de vitesses automatique « intelligente » (qui gère les rapports en fonction de la nature du sol ou du type de conduite) qui sont des systèmes bien connus ;

- les limitateurs de vitesse pour ne pas dépasser la vitesse réglementaire et limiter la consommation de carburant ;

- les systèmes anti-collision trop peu diffusés ;

- les systèmes d’aide à la navigation (GPS, GSM et systèmes informatiques embarqués).

A cela s’ajoutent les moyens de contrôle du respect de la réglementation que sont les radars automatiques pour le contrôle de la vitesse et le contrôle automatisé du franchissement de feux rouges qui font appel à des technologies telles les flash infrarouges utilisés de nuit pour lire les plaques minéralogiques sans éblouir les conducteurs ou des capteurs précis pour déterminer la vitesse des véhicules(2).

Au-delà de la sécurité routière, il convient de noter que de récentes actions gouvernementales dans le domaine des STI – spécifiquement aux Etats-Unis – sont motivées par des besoins en matière de sécurité du territoire car ils peuvent jouer un rôle important dans une évacuation de masse rapide des centres-villes en cas d’évènements causant un nombre important de victimes comme des catastrophes naturelles ou d’autres menaces.

Une donnée essentielle pour l’intégration des STI dans la politique de sécurité routière réside dans la diminution du prix de ces systèmes. Aujourd’hui les options GPS des constructeurs automobiles sont affichées à des tarifs supérieurs à 2 000 euros, à l’exception de Renault pour certains modèles. C’est excessif et entrave l’utilisation de ces outils qui, bien utilisés, pourraient contribuer grandement à l’amélioration de la fluidité et de la sécurité sur nos routes. Cet aspect monétaire est particulièrement important pour les jeunes qui sont plus accidentogènes et roulent dans des véhicules plus âgés ne disposant pas des outils d’aide à la conduite.

15ème Congrès mondial sur les transports intelligents

(New York, 16-20 novembre 2008)

Extrait du compte-rendu

Les communications véhicule–véhicule et véhicule infrastructures ouvrent un vaste champ d’applications nouvelles concernant la sécurité et la gestion de trafic du futur.

L’intégration du véhicule et de l’infrastructure, V2I selon l’appellation anglo-saxonne, repose sur le déploiement de normes internationales de communications courtes, moyennes et longues portées.

Le 5,9 Ghz ou DSRC permet aux véhicules de dialoguer entre eux et avec l’infrastructure à des endroits spécifiques tandis que les moyens classiques comme le GPRS ou la 3 G assurent une communication continue sur des vastes zones. Des solutions intermédiaires comme le WiFi ou le Wimax semblent très prometteuses en termes de coûts et de quantités de données échangées.

Les démonstrations qui se déroulaient à proximité du congrès sur la 11e avenue (dont une partie était fermée à la circulation quelques heures par jour) ont montré la faisabilité technique d’applications comme l’avertisseur de présence d’un véhicule dans l’angle mort lors d’un changement de direction ou d’un véhicule arrêté sur la chaussée hors du champ de visibilité du conducteur et même le rappel de l’interdiction de doubler dans des circonstances dangereuses, véhicule venant en sens inverse par exemple. Lorsque la communication devient plus complexe en faisant intervenir l’infrastructure, elle permet de sécuriser les mouvements aux intersections en arrêtant automatiquement un véhicule dont le conducteur n’aurait pas vu le feu rouge par exemple.

Avec une communication continue, le véhicule peut se transformer en capteur mobile d’information et avertir en temps réel d’une modification dangereuse des conditions de circulation : pluie intense, neige, vent obstacle verglas ou inondation. Le projet SARI du PREDIT, présenté par le LCPC dans une session interactive, s’inscrit dans cette logique.

Si l’on généralise ces dispositifs avec 30 % des véhicules équipés d’un grand nombre de capteurs (environ 200), on peut imaginer le centre de gestion du trafic du futur. Les organisateurs ont eu la bonne idée de mettre en scène avec des acteurs professionnels de Broadway ce que pourrait être la vie quotidienne d’un centre de gestion du trafic en 2020. Le flux continu de données en provenance des véhicules permet de faire une gestion dynamique du trafic sur un réseau étendu qui va au-delà des artères principales déjà pourvues de capteurs fixes. En intervenant très rapidement et efficacement sur les perturbations et en gérant de façon interactive les possibilités de stationnement autour des centres générateurs de trafic, on élimine la congestion. Le spectacle, d’une grande qualité et empreint d’un certain réalisme, était présenté sous forme d’une piécette d’une demi-heure répétée pendant toute la durée du congrès.

Des objets nomades « bon marché » aux possibilités infinies

Les objets nomades aux possibilités décuplées, deviennent de véritables « prothèses » dont le professionnel moderne ne peut plus se passer. Ils sont maintenant munis d’interfaces de communication multiples : une communication ultra courte de l’ordre de 10 cm du type NFC (Near Field Communication) pour faciliter le paiement sans contact, une interface Blue Tooth pour assurer la connectivité à l’intérieur du véhicule, une liaison WiFi pour la communication locale haut débit entre mobile et réseau, enfin Wimax, GPRS pour les connexions plus éloignées. Avec les cartes micro SD de 4, 6 ou 8 Giga, leur capacité interne de traitement et de stockage d’information s’amplifie. Le nomade apparaît de plus en plus comme l’objet à tout faire. Il sert bien sûr encore à téléphoner mais il peut servir de porte-monnaie, de systèmes de navigation, de système de guidage vers les parkings, de moyen de réservation, de connexion avec l’Internet….

CHAPITRE II :
L’ACTION DES POUVOIRS PUBLICS

L’Union européenne est plutôt en retard dans le développement des systèmes de transport intelligents des pays comme le Canada, le Japon ont pris dans certains domaines de l’avance dont l’Union européenne devrait s’inspirer. C’est pourquoi nous décrirons ces exemples avant d’examiner les projets de l’Union.

D. Les exemples étrangers

Deux exemples étrangers paraissent particulièrement intéressants pour illustrer l’action que pourrait conduire l’Union européenne, ceux du Canada et du Japon.

1. L’exemple canadien

Le rapporteur a choisi d’évoquer l’approche canadienne car, du fait du fédéralisme, elle est largement transposable à l’Union européenne, elle est également en avance et surtout présente un caractère global.

Le gouvernement canadien est parti de l’idée que des transports plus productifs et plus intelligents permettraient d’utiliser le plus efficacement possible son infrastructure de transport terrestre existante.

Le gouvernement fédéral considère qu’«il peut servir l’intérêt public en créant les cadres de travail et l’environnement propices au développement et au déploiement des STI pour tous les modes. En favorisant l’avancement de ces systèmes, le gouvernement fédéral remplit son mandat d’assurer des transports sécuritaires, efficaces, abordables, intégrés et respectueux de l’environnement pour tous les Canadiens. Le gouvernement fédéral répond aussi à l’appel des provinces et du secteur privé en assumant un rôle de chef de file stratégique par un programme national sur les STI et l’élaboration d’une stratégie globale de technologies des transports destinée à être mise en oeuvre équitablement dans tout le pays. Aucun autre gouvernement ou organisme n’est aussi bien placé pour mettre au point un plan des STI pour le Canada qui encourage l’innovation et l’intégration sur la route vers la mobilité intelligente ».

Ces propos pourraient quasiment être repris tels quels par l’Union européenne, si ce n’est que le plan canadien a été mis en œuvre dès 1999. Il souligne les cinq volets suivants :

a) Partenariats du savoir : la composante de base

Un partenariat avec tous les partenaires du Gouvernement, le secteur privé, la Société des systèmes de transport intelligents du Canada (STI Canada), les universités et les clients est essentiel pour déployer des STI au Canada et accumuler des connaissances dont tous tireront profit.

b) Développement d’une architecture canadienne pour les STI

Des fondations solides : une architecture globale des STI permettra de veiller à ce que les produits et services de STI soient parfaitement intégrés. Elle constitue le noyau de communication et d’information rassemblant les technologies de STI fondamentales pour partager des informations. Elle permet également de déterminer les normes requises pour garantir l’interopérabilité des systèmes sur le plan des technologies, des modes de transport et des diverses juridictions.

c) Plan multimodal de R et D pour les STI : encourager l’innovation

Transports Canada, en collaboration avec les secteurs privé et public, va dresser et mettre en oeuvre un plan quinquennal de Recherche et Développement pour encourager l’innovation et le développement technologique dans le secteur privé.

d) Déploiement et intégration des STI au Canada

Le gouvernement fédéral offrira le soutien nécessaire au déploiement et à l’intégration stratégiques des STI pour aller chercher, auprès des secteurs public et privé, les fonds nécessaires à l’élaboration de modèles d’application.

e) Renforcement de l’industrie canadienne des STI : Leadership mondial

Dans le but de permettre à l’industrie canadienne des STI de tirer profit des débouchés sur le marché mondial, le gouvernement fédéral travaillera de concert avec les provinces et le secteur privé pour créer des possibilités d’exportations pour les sociétés canadiennes de STI. Une stratégie de plan des STI pour le développement des exportations sera mise sur pied en collaboration avec STI Canada en vue de promouvoir l’expertise du Canada à l’échelle internationale.

Le détail du plan canadien se trouve à l’annexe n° III de ce rapport. Son caractère global le différencie des propositions d’action de l’Union européenne qui se limitent très largement aux points 1 et 2 de ce programme. Il apparaît au rapporteur que l’Union européenne pourrait reprendre à son compte l’idée de promouvoir une expertise européenne en matière de STI, de mettre en place une politique visant à promouvoir la mobilisation des fonds publics et privés et l’aide à l’exportation.

2. L’exemple japonais

Le rapporteur s’est rendu au Japon pour examiner les effets concrets d’une politique de promotion des STI. Dès 1994 le Dr Toyoda, Président honoraire de Toyota, a été chargé par le gouvernement japonais d’une analyse des besoins en STI de la société japonaise. Aujourd’hui le Japon dispose d’une stratégie jusqu’à l’horizon 2025, et son système de navigation « intelligent » VICS (cf. infra) est mis en œuvre depuis 13 ans.

Le gouvernement nippon considère que, de par son rôle d’acteur majeur du secteur des nouvelles technologies, le Japon se doit d’être précurseur dans ce domaine encore embryonnaire, c’est pourquoi de nombreuses actions gouvernementales tentent depuis plusieurs années déjà de développer les STI avec des conséquences d’ores et déjà visibles dans la société actuelle. Les partenaires académiques et industriels développent simultanément de nombreux projets divers et variés qui dessinent l’avenir des STI.

a) Les plans gouvernementaux

Le Japon a élaboré depuis plus de dix ans des plans gouvernementaux visant à faire progresser la recherche, construire les infrastructures nécessaires et promouvoir les équipements.

Pour unifier ses efforts, il a créé une association entre l’agence nationale de police, le ministère du commerce international et de l’industrie, le ministère des transports, le ministère des postes et télécommunications et le ministère du terrain et de la construction.

Neuf domaines ont été définis comme constitutifs de l’ITS :

- les avancées dans les systèmes de navigation ;

- les systèmes de paiement de péage automatiques ou ETC (Electronic Toll Collection) ;

- l’assistance à la conduite sécurisée ;

- l’optimisation du trafic ;

- l’augmentation du rendement de la gestion des routes ;

- la promotion des transports en commun ;

- l’amélioration de la productivité pour les entreprises ;

- l’aide aux piétons ;

- l’aide aux opérations d’urgence.

(1) 1998 : Plan d’amélioration des routes

Le 29 mai 1998, cette date permet de mesurer le retard européen, le cabinet a approuvé un programme d’amélioration des routes sur cinq ans, dans lequel une importance particulière était donnée aux installations STI, qui comporte quatre grandes lignes :

- installer un système de paiement électronique (ETC) dans plus de 700 guichets sur les routes principales (objectif atteint) ;

- offrir des services d’informations dans les zones importantes de chaque préfecture en utilisant le système VICS (Vehicle Information and Communication System) qui délivre des informations en temps réel sur le trafic routier en particulier et établir une station routière (« Michi no eki ») qui doit fonctionner comme centre d’information local ;

- le ministère des constructions (MOC) doit favoriser les efforts de recherche et développement pour les systèmes d’assistance à la conduite sur autoroute (AHS : Advance Cruise-Assist Highway System) et ceux permettant l’amélioration du rendement du fret et de la gestion des routes grâce à l’information. Le MOC doit prendre des décisions fermes pour préparer les standards qui doivent garantir la sécurité et la compatibilité entre les différents systèmes et mener des activités de standardisations internationales.

(2) La mise en œuvre dès 2001 d’un « Schéma de routes intelligentes »

Afin de mettre en pratique les « routes intelligentes », ce plan insiste sur le fait que les parties concernées doivent non seulement promouvoir la recherche et développement mais aussi préparer des institutions et des standards pour les routes équipées des dernières technologies STI.

Ce plan conçu par le MOC a quatre objectifs principaux :

- définir un plan d’action en formant des comités et réunissant le plus de partenaires industriels, académiques et gouvernementaux possibles ;

- promouvoir les efforts de recherche et développement suite aux premières expériences de AHS effectuées en 2000 ;

- préparer les spécifications et standards pour des routes spécialement conçues pour les STI pour 2001 ;

- en se basant sur les institutions et standards créés, réaliser Smartway en 2002 (cf. infra).

b) La mise en place dès 2002 de structures dédiées aux STI

En décembre 2002 a été créé le « ITS Strategy Committee » avec le support de quinze acteurs du domaine. Ce comité a étudié le secteur des transports intelligents et son avenir en réfléchissant sur trois grands thèmes : le planning, les futurs projets et les comparaisons internationales.

A cette époque le mot d’ordre de la politique japonaise en terme de STI était « les STI pour une société où il fait bon vivre » avec trois étapes préliminaires requises pour atteindre cet objectif :

1. Créer une zone sans accident ;

2. Créer une zone sans embouteillages ;

3. Créer une zone où la conduite est agréable.

Au final l’objectif est de réduire d’ici 2010 le nombre d’accidents de 50 % et d’améliorer suffisamment le trafic routier pour revenir à un taux d’émission de CO2 équivalent à celui de 1995.

Afin d’atteindre les objectifs fixés par ce plan le Smartway Project Advisory Committee a été créé. C’est une alliance entre le gouvernement, les industriels et le monde académique. Son rôle est le suivi de la promotion de Smartway et l’émission de nouvelles propositions basées sur les tendances technologiques et sociales.

Plusieurs services essentiels sont à développer dans cette seconde phase des STI :

- permettre le passage fluide à travers n’importe quel type de portail en utilisant des paiements sans argent liquide et des annonces vocales aux entrées et sorties des bâtiments, que ce soit au péage, dans un parking, dans les stations service ou un « drive-in » ;

- offrir des systèmes de guides régionaux suivant la localisation et les besoins qui donneraient des informations sur les routes de la région ou des informations touristiques ;

- améliorer la sécurité en fournissant de nombreuses informations en temps réel aux conducteurs grâce au développement des services VICS, dont le rapporteur a pu mesurer l’efficacité, en établissant des infrastructures telles que des unités de base le long des routes ou des applications multimodales dans les unités embarquées ;

- donner des informations adaptées en cas de catastrophe.

Les contacts que le rapporteur a eus, par exemple à la Keio University avec le professeur Kawashima, qui pilote un programme sur « co-mobility research society » qui fédère trente et une entreprises réfléchissant à l’évolution des normes et des standards dans un pays où les STI sont beaucoup plus développés qu’en Europe et qui participe surtout à un effort de standardisation international, font douter de la pertinence de la démarche de l’Union européenne axée sur l’élaboration de normes dans un environnement extrêmement fluctuant.

Si l’action que peut conduire un Etat centralisé n’est pas de même nature que celle que peut réaliser une fédération d’Etats nations, nous pouvons noter dans les deux cas que l’élaboration d’une politique industrielle digne de ce nom dans des secteurs d’avenir est nécessaire. Culturellement l’Union européenne a du mal à s’engager dans une démarche de ce type, ce que nous ne pouvons que regretter.

E. L’action des pouvoirs publics français

L’action des pouvoirs publics français est déjà ancienne. Par exemple, les schémas de services collectifs de transport de voyageurs et de marchandises adoptés le 9 juillet 2001, retiennent les objectifs suivants qui impliquent un recours important aux STI :

- optimiser l’utilisation des infrastructures ;

- limiter les nuisances ;

- favoriser les transferts vers les modes les plus respectueux de l’environnement ;

- améliorer la sécurité.

Le ministère de l’environnement note qu’ « il y a aujourd’hui un écart important entre le monde des transports et celui des nouvelles technologies, lié pour partie aux questions d’infrastructures et de réglementation. Les acteurs des transports sont beaucoup plus cloisonnés par mode, par territoire, par métier, que ne le sont les télécommunications et l’informatique. Il faut surmonter ces obstacles et travailler de façon intermodale. La mise en réseau qui va résulter des nouvelles technologies ouvre de nouvelles marges de manoeuvre et réclame, de la part des pouvoirs publics, l’instauration de nouvelles règles du jeu. Une stratégie collective est donc nécessaire pour réussir. »

Dans les domaines qui sont apparus comme prioritaires, l’Etat essaie de favoriser :

- l’échange d’information et d’expérience ;

- le développement et l’intégration de nouvelles applications ou de nouveaux produits dans les systèmes existants ;

- l’expérimentation de nouveaux services issus de la recherche dans un environnement et sur une durée permettant leur évaluation ;

- la mise en place des conditions juridiques assurant la pérennité des services ;

- la création de référentiels communs et la normalisation des interfaces entre les systèmes ;

- la diffusion des méthodes et des moyens propres à faciliter la conception des projets et à les intégrer dans un ensemble cohérent pour les usagers ;

- la coopération des acteurs du monde des transports entre eux et avec les acteurs de l’informatique et des télécommunications.

Son rôle est d’abord celui d’un catalyseur, qui doit montrer l’exemple en ayant recours le plus possible aux STI dans son domaine de compétence et en fédérant des partenariats.

Une mission chargée d’apporter un appui aux projets, de mobiliser les compétences disponibles dans les services et de les mettre en réseau, dont le responsable a été auditionné par le rapporteur, a été mise en place. Elle travaille en étroite liaison avec les acteurs du monde des transports et les industriels fournisseurs d’équipements et de services dont un certain nombre ont décidé de se constituer en force d’étude et de proposition au sein de l’Association Transport Environnement Circulation (ATEC) qui nous a fait parvenir une analyse structurée de la proposition de directive que nous examinons (cf. annexe n° 1).

Quatre grands domaines sont apparus comme particulièrement importants pour les pouvoirs publics français :

- l’information multimodale ;

- la gestion du fret ;

- les moyens de paiement ;

- l’application de la réglementation.

L’action des pouvoirs publics varie bien entendu selon ces secteurs, essentielle dans l’application de la réglementation, plus incitative pour la gestion du fret.

Le respect des limitations de vitesse, des normes de pollution, de la législation du travail pour les transporteurs tout comme l’internalisation des coûts externes dans les transports sont d’abord de la compétence de l’Etat. Leur déploiement suppose un équipement homogène du parc et un déploiement coordonné des installations sur les infrastructures. Dans le cadre européen l’efficacité de ces systèmes dépend de la question essentielle de l’interopérabilité des services, de la compatibilité des matériels et des normes. Elle est fondamentale pour un pays de transit comme la France.

L’action conduite sur le réseau autoroutier ne se limite pas à l’implantation des radars. Les STI sont aujourd’hui largement déployés sur les 8 498 km du réseau concédé. Les sociétés ont installé sur leur réseau de multiples dispositifs de veille pour fluidifier la circulation, détecter rapidement toute anomalie et en informer les clients en temps réel.

Les pouvoirs publics encouragent également des projets de recherche importants, accompagnés d’essais en vraie grandeur, menés avec l’ensemble des partenaires européens sur nos autoroutes.

Exemples de projets expérimentés sur les autoroutes françaises

1. ROSATTE, plateforme de recueil d’information commune aux sociétés pour la mise au point de services d’information sur les vitesses limites, permanentes, temporaires ou dynamiques (régulation du trafic, intempéries, pollution).

2. Le projet CVIS vise à concevoir et à tester les technologies nécessaires pour permettre aux véhicules de communiquer :

- entre eux et avec les infrastructures routières situées à proximité ;
- via un accès continu à Internet ;
- et d’avoir accès à de multiples technologies (radio numérique, communication micro-onde, infrarouge, GPRS …).

Le projet CVIS couvre des applications urbaines, interurbaines ainsi que celles liées au transport de marchandises et à la gestion des flottes, qui seront testées sur différents sites en Europe.

3. Le projet COOPERS vise à développer les applications pour les opérateurs routiers : les véhicules peuvent échanger des données et des informations pertinentes concernant la section d’autoroute empruntée et ainsi améliorer la sécurité et permettre une gestion coopérative du trafic. Les applications sont orientées vers le recueil de données, la diffusion d’information trafic et l’aide à la navigation autoroutière.

Ainsi, un « paquet » de services porte sur la sécurité et concerne :

- l’alerte accident/incident ;
- l’alerte sur les conditions météo ;
- l’information sur les travaux en cours ;
- l’information sur l’utilisation des voies ;
- l’information à bord des véhicules sur les limitations de vitesses temporaires ;
- l’alerte sur les bouchons ;
- l’ISA (Intelligent Speed Adaptation), limitation intelligente de la vitesse.

4. Le projet SAFESPOT se focalise sur les situations de sécurité limites (à quelques secondes de l’incident possible). En combinant les informations provenant des capteurs embarqués dans les véhicules et déployés sur l’infrastructure, il permet d’améliorer le délai de détection des risques d’incidents potentiels et donc d’étendre la « marge de sécurité » du conducteur ».

CHAPITRE III :
L’ACTION DE L’UNION EUROPEENNE

Le Livre blanc sur les transports de la Commission européenne indiquait en 2001 (!) que : « L’Union européenne a une responsabilité considérable, voire exclusive, pour favoriser le déploiement des technologies innovantes qui devraient conduire à la mise sur le marché de nouveaux véhicules sûrs. Les systèmes de transports intelligents constituent une opportunité à cet égard et le plan « Europe » adopté par le Conseil européen de Feira en juin 2000 et confirmé par le Conseil européen de Stockholm en mars 2001 leur accorde une priorité ».

L’Union européenne n’a pas une compétence exclusive dans ce domaine, les Etats membres ont d’ores et déjà conduit beaucoup d’actions qui, malheureusement, ne se sont pas encore intégrées dans une stratégie globale de l’Union européenne.

Elle n’a que trop tardé, c’est pourquoi nous devons nous féliciter des deux propositions de la Commission européenne dans le but de renforcer les systèmes de transport intelligents (STI) en Europe : un plan d’action qui énonce six priorités visant à accélérer et à coordonner le déploiement des STI, et d’autre part une proposition de directive qui délimite le cadre de ce plan d’action.

F. Le plan d’action de l’Union européenne

Le plan d’action proposé en matière de STI par la Commission européenne concerne le domaine du transport routier, ainsi que les interfaces avec d’autres moyens de transport. Le but est d’arriver à coordonner les ressources et les instruments disponibles existants, en mettant en œuvre les actions suivantes(3) :

l’optimisation des données relatives aux routes, au trafic et aux voyages grâce à un service d’informations sur le trafic et les voyages en temps réel au niveau européen. Il s’agit de fluidifier le trafic routier et de rendre accessibles les mêmes informations à tous les citoyens européens. Un problème difficile se pose, celui de l’hétérogénéité des sources de données et de l’identification des responsables en cas d’erreur ;

la continuité des services STI de gestion du trafic et des marchandises dans les corridors de transport européens et dans les agglomérations urbaines grâce à un cadre commun ;

- la promotion de bonnes pratiques en matière de sûreté et de sécurité routière, notamment grâce à la promotion du déploiement de systèmes avancés d’assistance au conducteur et de systèmes STI de sécurité et de sûreté ;

- l’intégration des véhicules dans l’infrastructure des transports, par exemple par le biais d’une plateforme de services et d’applications STI ;

- la protection de la sécurité des données à caractère personnel.

La coopération et la coordination efficace de toutes les parties concernées devraient être effectuées au niveau européen au travers du cadre juridique issu d’une directive.

Exemples d’application des STI

a) Une plateforme unique avec une interface unique, certifiée et correctement placée, devrait permettre au conducteur d’être moins distrait. Les synergies permettront de réduire sensiblement les coûts, d’où une commercialisation plus rapide des applications renforçant la sécurité. Le système «eCall», qui vise à réduire le nombre des victimes d’accidents grâce à l’arrivée plus rapide des secours, profiterait de ce déploiement complémentaire, qui se traduirait par une diminution importante du nombre des tués (de 5 % à 15 %) et des blessés graves (de 10 % à 15 %) dans l’ensemble de l’Union européenne d’ici à 2020.

b) Les stratégies de gestion de la circulation pourront être étendues plus facilement aux réseaux d’interconnexion, par exemple aux réseaux routiers urbains ou interurbains, dans l’ensemble des modes de transport complémentaires.

c) Une meilleure fiabilité des informations en temps réel sur les déplacements et la circulation augmentera l’efficacité et la flexibilité du guidage routier, fera gagner du temps et améliorera la lutte contre la pollution sur des points sensibles du réseau routier.

d) Une application élargie de mesures sur le «fret en ligne» devrait se traduire par un gain de temps de 10 % et par des économies financières de 8 %, tandis que les taux de productivité devraient augmenter de 3 à 10 % et les coûts de logistique diminuer de 2 à 3 %.

e) La mise en œuvre d’autres applications du secteur public pourra être facilitée, par exemple le respect du droit social (temps de repos), le transport d’animaux vivants, l’internalisation des coûts externes, le suivi des marchandises dangereuses, le péage électronique, les tachygraphes numériques et le service électronique d’appel d’urgence «eCall».

Selon les simulations du modèle TRANSTOOLS, l’engorgement des routes diminuerait d’environ 2,5 % et les coûts liés aux accidents de 7 %, tandis qu’un renforcement de la coopération et des synergies permettrait de réduire encore de 1 % le total des coûts externes.

Source : Commission européenne.

G. La proposition de directive

La proposition de directive a pour objectif de définir un cadre juridique permettant d’atteindre les objectifs précédents.

Dans son texte initial elle prévoit que les Etats membres sont tenus de rendre accessible et interopérables l’utilisation et l’application de services STI qui comprennent :

- des données relatives au transport routier ;

- des données de circulation ;

- des systèmes de sûreté et de sécurité dans les véhicules et l’infrastructure routière ;

- des informations entre véhicules et infrastructures routières.

Il s’agit d’une directive qui donne un large mandat à la commission pour décliner les dispositifs juridiques contraignant destinés à mettre en œuvre le plan d’action.

1. La directive, une démarche adaptée ?

a) Les objectifs

Au regard des règles de subsidiarité, la proposition de directive ne soulève pas d’objections. La politique commune des transports et la politique des réseaux transeuropéens confèrent une responsabilité d’action à l’Union européenne (article 71, paragraphe 1, article 80, paragraphe 1, et articles 154 et 155 du traité CE).

L’objectif général de cette initiative est de mettre en place les mécanismes nécessaires pour favoriser la généralisation de services STI dans le secteur du transport routier et leurs interconnexions avec d’autres modes de transport. Pour cela, il est prévu :

- d’accroître l’interopérabilité, ce qui assurerait un accès ininterrompu aux services et favoriserait leur continuité ;

- d’établir un mécanisme de coopération efficace entre toutes les parties concernées du domaine des STI ;

- de résoudre les questions concernant la protection de la vie privée et les responsabilités.

Les Etats membres ne pourront bien évidemment pas atteindre séparément, et de manière satisfaisante, l’objectif de déploiement transnational en vue de proposer des services transfrontaliers, européens et harmonisés d’information sur la circulation, les déplacements et la gestion de la circulation. Aussi, l’Union européenne agit-elle dans le cadre des compétences qui lui sont reconnues par les traités.

Le rapporteur est pleinement d’accord avec les objectifs affirmés par la proposition de directive, mais réticent devant l’imprécision du mandat donné à la Commission européenne, qui fait une place trop importante à la procédure de comitologie

b) La procédure proposée

En effet le texte qui nous est soumis est une directive, renvoyant à des mesures d’application, sans préciser les points qui seront réglés par des règlements du Conseil et du Parlement européen, et ceux qui le seront par des décisions de la Commission européenne, soumis à la procédure de comitologie.

Or, dans des domaines qui touchent aux libertés publiques (par exemple l’utilisation des données informatiques individuelles) ou qui peuvent avoir un impact financier considérable (équiper en STI tous le réseau routier) il est difficilement concevable que la législation européenne soit élaborée par la procédure de comitologie, qui doit être cantonnée aux questions techniques.

L’examen de cette proposition de directive, qui devait être approuvée par le Conseil au mois de juin a été repoussé, et la négociation se poursuit sur deux points essentiels : son champ d’application et la procédure suivie.

c) Le recours à la procédure de comitologie doit être encadré et contrôlé

La proposition de directive fait une large place au pouvoir d’exécution de la Commission, encadré par des comités.

La question du caractère adapté ou non de la procédure suivie par ce texte revient à poser le problème de la comitologie.

La création d’un comité européen des STI, composé de représentants des Etats membres, aidant la Commission à adopter des mesures spécifiques dans des domaines bien définis dans le cadre de la procédure de comitologie, et d’un groupe consultatif européen sur les STI, composé de représentants, par exemple de l’industrie, d’opérateurs de transport, d’utilisateurs et d’autres instances et associations, qui sera chargé de conseiller la Commission sur les aspects techniques et commerciaux constitue un volet essentiel de la proposition de directive. Le rapporteur regrette qu’il ne soit pas fait expressément mention dans ce texte du monde académique.

La Commission, assistée par ce comité européen échangerait des informations avec les Etats membres et développerait une vision d’ensemble. Elle contrôlerait l’élaboration des orientations et des procédures et déterminerait, dans le cadre de son mandat et lorsqu’il y a lieu, les actions spécifiques pour établir des exigences et des spécifications techniques et certifier des terminaux, des équipements de réseau et des applications logicielles de STI.

Il est clair que cette définition est beaucoup trop large. En clair la Commission demande aux Etats de lui confier un mandat pour légiférer dans des domaines sensibles touchant à la protection des données personnelles et la gestion des réseaux locaux de transports, dans une Union européenne où les écarts de niveaux de développement conduisent à des situations très contrastées.

Lors de sa communication du 4 mars 2009, sur cette proposition, le rapporteur concluait, en indiquant à la Commission : « j’essaierai de proposer un dispositif limitant et encadrant la procédure de comitologie. En effet, s’agissant de décisions qui auront un impact majeur sur les conditions de vie des européens, le contrôle politique doit trouver à s’affirmer ».

En constatant les difficultés que rencontrait l’adoption par le Conseil de cette proposition de directive, le rapporteur a entrepris une action de sensibilisation auprès de M. Dominique Bussereau, secrétaire d’Etat aux transports. Elle semble avoir porté quelques fruits, puisque la position française a sensiblement évolué et que les préoccupations exprimées dans ses notes au secrétaire d’Etat des 21 juillet et 8 septembre 2009 ont été relayées par les négociateurs français.

- en ce qui concerne la question des données personnelles et le recours à la comitologie, le groupe de travail du Conseil, sur la suggestion de la France, a demandé que la Commission européenne précise par écrit ses intentions, et indique si elle entendait proposer un règlement du Conseil et du Parlement européen ou promulguer une décision de la Commission par voie de comitologie ;

- le secrétaire d’Etat aux transports a également saisi la CNIL d’une demande d’avis sur cette question ;

- s’agissant d’une directive, procédé peu usité jusqu’à présent, le groupe du Conseil de travail a considéré que la réponse de la Commission, « nous appliquerons les textes », n’était pas satisfaisante et qu’il était fondamental de définir la nature des textes découlant de la directive, en précisant les champs respectifs de la codécision et de la comitologie.

2. Le caractère obligatoire du recours aux STI est en passe d’être abandonné

La nature des services qui doivent être offerts (en dehors peut-être de l’appel d’urgence), le rythme et la décision de déploiement par les autorités nationales doivent-ils relever de l’action de l’Union européenne, alors que les coûts de ces infrastructures sont considérables et les moyens des Etats et des collectivités locales de l’Union très disparates ?

La réponse à cette question ne saurait être simple. Les perspectives de mise en place d’écotaxes liées au kilométrage parcouru, ou la gestion des appels d’urgence, très utiles quand l’accidenté ne parle pas la langue du pays, imposent la définition d’outils au niveau européen.

Nous devons être plus circonspect quand il s’agit de données à usage local. Par exemple le système permettant à l’automobiliste de synchroniser sa vitesse pour éviter les feux rouges est certainement utile mais il nous semble que la décision de le déployer doit relever des autorités locales.

En l’état actuel de la directive, le rapporteur ne peut pas vous indiquer la solution retenue en matière de répartition des compétences entre les différents acteurs, car tous les aspects du déploiement des STI pourraient, en théorie, être réglementés par l’Union européenne, en l’état actuel de la proposition de directive.

Il est clair qu’il est dans la nature d’une directive de ne pas rentrer dans les détails mais que le texte qui nous est soumis doit impérativement définir plus précisément les domaines de compétence de l’Union européenne.

3. Réglementation ou normalisation ?

Les négociations conduites au sein du Conseil ont essentiellement portée sur cette question : faut-il réglementer le développement des STI en l’encadrant de dispositifs juridiques contraignants ou faire confiance aux acteurs économiques pour que l’objectif recherché soit atteint par la normalisation, tous les systèmes diffusés en Europe devant pouvoir dialoguer entre eux.

Il semblait au rapporteur que la méthode de la normalisation, par sa souplesse présentait des avantages évidents dans un domaine où il est difficile de figer l’évolution technique. Dans la contribution qui a été adressée par l’ATEC au rapporteur (cf. annexe III), il semble que les industriels français souhaitent un recours à cette méthode, de préférence à la réglementation.

Il semble se dégager aujourd’hui au sein du Conseil un consensus dans ce sens, ce qui me semble adaptée au domaine concerné.

Concernant plus spécifiquement les questions de normalisation :

Le groupe de travail souligne qu’il est indispensable de commencer par définir le projet à réaliser et évaluer les aspects opérationnels correspondants liés aux organisations en place ou à créer, ainsi que les contraintes administratives et commerciales. Ce n’est qu’à l’issue de cette phase que l’on peut s’engager dans la spécification de solutions techniques. Cette démarche implique nécessairement la sollicitation dès le début, de tous les acteurs de « l’écosystème TTS » en projet.

La mise en œuvre des idées qui viennent d’être exposées suppose donc que soient d’abord définis les acteurs, les services, et les liens entre eux (spécifications fonctionnelles). A partir de là, il conviendra :

- que soient définis les objectifs d’interopérabilité et de continuité, en tenant compte notamment de la compatibilité avec l’existant ;

- de spécifier les scénarios de déploiement ;

- puis que les nouvelles normes qui s’avéreraient nécessaires soient élaborées sur la base de mandats précis donnés au CEN, en tenant compte des résultats d’expériences pratiques.

Pour ne pas perdre de temps et tester les idées avant d’en figer la réalisation dans des spécifications et des normes, on devrait commencer par des réalisations-tests sur les secteurs où il faut d’abord clarifier la problématique.

4. La définition d’une plateforme embarquée ouverte ne doit pas relever de l’Union européenne

La directive pose le principe de l’installation dans les véhicules d’un boîtier permettant le dialogue entre l’infrastructure et les véhicules. Il n’est pas complètement évident que le téléphone portable, que nous pouvons garder sur nous quelque soit le mode de transport utilisé, ne soit pas à terme un meilleur outil, si nous utilisons plusieurs modes successifs de transport, qu’un ensemble fixé à demeure dans le véhicule. Le rapporteur n’a pas la réponse, mais prétendre trancher ce débat est peut-être prématuré.

Devant les incertitudes liées aux évolutions techniques, le rapporteur a tendance à penser qu’il ne faut pas présumer des évolutions techniques. Cette attitude pose un problème dans la définition du champ de la directive : doit-elle préciser les outils qui doivent être utilisés ou se limiter à une exigence de résultat, à savoir la compatibilité des différents outils et systèmes utilisés ?

La première approche, qui est privilégiée par la Commission européenne, à deux inconvénients : elle peut figer la recherche et les évolutions technologiques, ce qui n’est pas souhaitable, et surtout elle peut impliquer la nécessité de recourir à des « systèmes propriétaires », c’est-à-dire des dispositifs impliquant le paiement d’une redevance au détenteur d’un brevet. Ce risque est dénoncé par les constructeurs automobiles français et allemands qui sont d’accord pour atteindre les objectifs de dialogue entre véhicules et entre l’infrastructure et les véhicules mais, souhaitent demeurer libre de définir les outils qu’ils installeront sur leurs véhicules pour atteindre l’objectif souhaité.

Si, comme le rapporteur l’a indiqué dans sa précédente communication, nous nous situons dans une compétence communautaire incontestable, nous pouvons nous demander si au regard du principe de subsidiarité il ne serait pas utile de limiter le champ de cette directive à la définition des normes permettant la compatibilité des différents matériels utilisés dans l’Union européenne. Aussi le rapporteur partage l’hostilité de nos constructeurs à cette proposition.

La volonté de l’Union européenne d’agir rapidement, trop peut être, est critiquable dans ce cas précis. Les responsables de la Commission que le rapporteur a rencontrés se sont avérés être dans l’incapacité de chiffrer le coût de ce dispositif. L’articulation avec d’autres dispositifs tels que les GPS et téléphones portables n’a pas fait l’objet d’analyses portées à ma connaissance. Le coût pour les Etats et les collectivités locales de l’équipement des investissements de voirie nécessaire n’a pas été chiffré.

Au final la plate forme embarquée est-elle une bonne idée ? Nous pouvons nous poser la question car de nouvelles technologies apparaissent quotidiennement et le risque est réel que l’Union européenne, en se positionnant sur une technologie entrave la recherche de solutions techniquement et économiquement meilleures.

Il est également possible que cette plateforme fasse appel à des systèmes propriétaires imposant le versement de redevances à des constructeurs automobiles qui ont développé leur propre système.

En tous cas il est totalement exclu à mes yeux qu’une directive européenne détermine les outils obligatoires de l’inter opérabilité, elle doit poser les objectifs à atteindre et laisser jouer la concurrence.

Comme le note l’ATEC ITES(4) « La rédaction actuelle du plan d’action et du projet de directive fait craindre que la Commission veuille s’engager dans la voie erronée suivie antérieurement pour le télé péage ou pour l’e-call. C’est en particulier le cas avec le projet d’« On Board Unit » universel. Sur ce point particulier, les constructeurs automobiles doutent de la faisabilité d’une seule technologie compatible avec une multitude de services. C’est par l’approche fonctionnelle, service par service, système par système, que seront définis les cahiers des charges dont découleront les technologies les plus appropriées, en fonction notamment du modèle économique de chaque nouvelle fonction. »

5. L’intégration dans le champ de la directive de l’appel d’urgence ne doit pas conduire au transfert à l’Union européenne de l’organisation des secours d’urgence.

Dans un premier temps, la Commission a invité les Etats membres à déployer le système « eCall » de leur propre initiative, d’ici à 2009 (IP/05/134, IP/06/1720), mais la réticence d’un petit nombre d’entre eux, dont la France, a provoqué des retards. Elle vient de demander une dernière fois aux Etats membres de l’Union européenne d’accélérer la mise en œuvre – non obligatoire – du nouveau système de communication embarqué « eCall », qui, selon elle, pourrait permettre de sauver 2 500 vies chaque année. En cas d’accident grave, ce système compose automatiquement le 112, le numéro d’appel d’urgence unique européen, et indique au service d’urgence le plus proche l’endroit où se trouve le véhicule. Ce service peut réduire de moitié, pour la Commission, le délai d’intervention des secours, limiter la gravitédes blessures et sauver la vie de personnes qui ignorent où elles se trouvent ou qui sont dans l’incapacité de parler.

Pour le moment, aucune obligation n’incombe aux pouvoirs publics, aux constructeurs automobiles ou aux opérateurs de téléphonie mobile en ce qui concerne son déploiement. Le système n’est encore devenu opérationnel dans aucun pays de l’Union européenne.

Dans un document adopté le 21 août 2009, la Commission indique que, si le déploiement du système n’est marqué par aucune avancée significative d’ici à la fin de 2009, elle pourrait proposer des mesures réglementaires visant à rendre opérationnelle le plus rapidement possible dans toute l’Europe cette technologie

La Commission a présenté un document dans lequel elle expose sa stratégie pour équiper à moindres frais, d’ici à 2014, tous les véhicules neufs fabriqués en Europe d’un système embarqué d’appel d’urgence. Les premiers véhicules ainsi équipés seraient mis en circulation dès l’année prochaine. Le système « eCall » se déclenche automatiquement si les passagers ne peuvent le faire eux-mêmes. Les mesures proposées par la Commission garantiraient le fonctionnement du système « eCall » dans tous les Etats membres de l’Union européenne, quels que soient la marque et le pays d’origine du véhicule. La mise en œuvre de ce système ne se fera pas sans l’entière collaboration des secteurs de l’automobile et des télécommunications, ainsi que des administrations nationales de tous les Etats membres, qui doivent veiller à ce que leurs services d’urgence possèdent l’équipement nécessaire pour traiter les appels « eCall ». Bien que la technologie soit au point et que les normes communes européennes aient été arrêtées par le secteur, six pays de l’Union européenne (le Danemark, la France, l’Irlande, la Lettonie, Malte et le Royaume-Uni) hésitent à s’engager pour des raisons financières.

Le Gouvernement français, qui, sur cette question, sera probablement mis en minorité, s’oppose à la Commission européenne, car notre pays souhaite garder son système du n° 15 qui fonctionne relativement bien et ne voit pas l’utilité du recours à un système basé sur le n° 112.

Il n’y a effectivement aucune utilité sur le plan fonctionnel mais le rapporteur a pu mesurer, lors de son déplacement à Bruxelles, l’attachement de la Commission européenne à la symbolique représenté par le 112.

Faut-il sacrifier des crédits à la symbolique européenne alors que les services d’urgence ont d’autres priorités ? Les raisons de la réticence française sont d’abord matérielles.

Le système proposé actuellement par les constructeurs français, dont le rapporteur a pu mesurer l’efficacité, implique le recours à une société privée qui filtre et oriente les appels : la généralisation en France de ce système impliquerait que son financement ne repose plus sur les constructeurs automobiles mais sur les pouvoirs publics.

En outre le système « eCall » que souhaite promouvoir Bruxelles repose sur une licence américaine mise gratuitement à disposition des européens pour la fonction d’appel d’urgence mais payante pour les services associés. Nos constructeurs automobiles ont développé leur propre système. L’action européenne est légitime pour imposer des normes destinés à rendre compatibles les systèmes entre eux, mais il n’est pas acceptable que la Commission cherche à imposer le recours à un système propriétaire.

Le rapporteur est donc favorable au développement de l’« eCall » ; mais il ne l’est pas à celui de la Silicon Valley, au travers de l’obligation, pour les constructeurs automobiles, de recourir à des licences américaines.

CONCLUSION

Au moment où le secteur automobile traverse la crise la plus grave de son histoire, il convient de se poser les questions de fond sur le nouveau rapport qui est en train de naître entre les automobilistes et leur véhicule. Les nouvelles normes que va élaborer l’Union européenne renforceront ou amoindriront la compétitivité de l’industrie automobile. Les systèmes de transport intelligents (STI) constitueront une partie essentielle des normes à venir en améliorant plus précisément la sécurité, l’efficacité et le respect de l’environnement par les véhicules.

Le très large recours aux experts et à la procédure de comitologie est inquiétant, car les décisions normatives doivent intégrer une analyse coûts-avantages qui relève d’abord de l’appréciation du pouvoir politique pour la décision d’extension et des acteurs économiques pour la mise en œuvre.

Aussi, nous pouvons nous demander si, au regard du principe de subsidiarité il ne serait pas utile de limiter le champ de cette directive à la définition des normes permettant la compatibilité des différents matériels utilisés dans l’Union européenne.

La nature des services qui doivent être offerts (en dehors peut-être de l’appel d’urgence), le rythme et la décision de déploiement par les autorités nationales doivent-ils relever de Bruxelles, alors que les coûts de ces infrastructures sont considérables et les moyens des Etats et des collectivités locales de l’union européenne très disparates ?

La réponse à cette question ne saurait être simple. Les perspectives de mise en place d’écotaxes liées au kilométrage parcouru, ou la gestion des appels d’urgence, très utiles quand l’accidenté ne parle pas la langue du pays, imposent la définition d’outils au niveau européen.

Nous devons être plus circonspect quand il s’agit de données à usage local. Par exemple le système permettant à l’automobiliste de synchroniser sa vitesse pour éviter les feux rouges est certainement utile mais il nous semble que la décision de le déployer doit relever des autorités locales.

En l’état actuel de la discussion sur la proposition de directive, le rapporteur ne peut pas vous indiquer la solution retenue en matière de répartition des compétences entre les différents acteurs, tous les aspects du déploiement des STI pouvant, en théorie, être réglementés par l’Union européenne.

Aussi, le rapporteur vous propose d’adopter une proposition de résolution précisant que la proposition de directive « établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport » élaborée par la Commission européenne doit être rejetée, du fait d’un recours trop large et trop imprécis à la procédure de comitologie.

Le projet de résolution que précise le projet de compromis élaborée par la présidence suédoise peut recevoir notre accord sous réserve que ce texte ne permette pas de recourir à la procédure de comitologie pour légiférer sur la conservation des données personnelles.

S’il appartient à l’Union européenne d’imposer des règles permettant la compatibilité des systèmes la directive ne doit pas imposer à un Etat le déploiement d’un système de STI, en particulier du fait de l’hétérogénéité des situations au sein de l’Union européenne.

La directive doit interdire à la Commission européenne d’imposer le recours à des « systèmes propriétaires », en particulier pour le système d’appel d’urgence.

Le déploiement du système « eCall » doit se faire dans le respect de la compétence des Etats en matière d’organisation des secours d’urgence.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

1. Examen de la communication de M. Gérard Voisin sur le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200), mercredi 4 mars 2009

« M. Gérard Voisin, rapporteur. Je vous ai présenté, le 8 juillet 2008, une communication sur le Livre vert sur une nouvelle culture de la mobilité urbaine qui soulignait l’intérêt de notre Commission pour : « la promotion du développement économique des villes, à laquelle pourraient concourir les systèmes de transport intelligents, qui, à l’aide des technologies de l’information, visent à améliorer la mobilité et l’accessibilité ».

Aujourd’hui, il nous est proposé d’examiner la première directive de mise en œuvre de ce document, qui porte sur le développement des systèmes intelligents de transport, avec onze ans de retard sur le Japon.

Si les systèmes GPS commencent à se répandre, il existe dans les laboratoires de très nombreux dispositifs électroniques améliorant la sécurité ou la fluidité du trafic. L’absence de déploiement cohérent et harmonisé de ces outils à l’échelle européenne constitue, pour la Commission européenne, la principale cause de la lenteur de la pénétration des systèmes de transports intelligents (STI) en Europe. Ce diagnostic peut être partagé, ainsi que la conviction de l’importance de ces dispositifs dans la gestion de l’espace urbain ou la lutte contre l’effet de serre, objectifs politiques majeurs de l’Union européenne.

Aussi, paraît-il normal que l’Union européenne assume de plus grandes responsabilités dans la coordination de la mise en œuvre de ces systèmes, en particulier en matière d’interopérabilité, condition préalable au déploiement européen des STI, pour éviter une multiplicité de solutions nationales, régionales et locales mettant en péril l’intégrité du marché unique.

Aux termes de la proposition de directive, la Commission, assistée par le comité européen des STI, échangerait des informations avec les Etats membres, développerait une vision d’ensemble, contrôlerait l’élaboration des orientations et des procédures, et déterminerait, dans le cadre de son mandat et lorsqu’il y a lieu, les actions spécifiques pour établir des exigences et des spécifications techniques et certifier des terminaux, des équipements de réseau et des applications logicielles de STI.

Les entreprises du secteur tireraient profit d’une politique et d’une vision claires et pourraient concevoir des services à valeur ajoutée à partir de l’instauration de mesures spécifiques d’intérêt public relatives aux STI. Quant aux consommateurs, ils profiteraient d’un plus grand nombre de services en matière de sécurité routière et de confort de conduite, ainsi que d’une réduction des prix grâce aux économies d’échelle.

Au moment où le secteur automobile traverse la crise la plus grave de son histoire, il convient de se poser les questions de fond sur le nouveau rapport qui est en train de naître entre les automobilistes et leur véhicule. Les nouvelles normes que va élaborer l’Union européenne renforceront ou amoindriront la compétitivité de l’industrie automobile. Les systèmes de transport intelligents (STI) constitueront une partie essentielle des normes à venir en matière d’efficacité et de respect de l’environnement par les véhicules.

Le coût de la mise en œuvre des STI peut être considérable pour les collectivités locales qui devront intégrer ces systèmes dans leur voirie, les gestionnaires des réseaux de transport et les usagers.

A partir de ce travail de recensement, peut-être sera-t-il opportun de proposer un dispositif limitant et encadrant la procédure de comitologie. En effet, s’agissant de décisions qui auront un impact majeur sur les conditions de vie des européens, le contrôle politique doit trouver à s’affirmer. Aussi, cette proposition de directive doit-elle être à notre sens davantage précisée ; ce sera l’objet du travail que je serai amené à présenter devant vous au mois de mai.

M. Jérôme Lambert. Le déploiement des systèmes de transport intelligents est sans doute fascinant et prometteur, pourvu que l’on n’en oublie pas les impératifs du respect de la vie privée et les équilibres entre ce qui relève de la légitime sécurité et l’indispensable sauvegarde des libertés individuelles. La perspective posée par le développement de systèmes d’information épiant tous les comportements des usagers de la route, et pouvant aller jusqu’à l’apparition de véritables « mouchards » relevant la moindre infraction au code de la route au sein de tous les véhicules, est même franchement inquiétante si notre vigilance se relâche. Ici comme ailleurs, le point de vue social ne doit pas être totalement obscurci par les adorateurs de la technologie.

M. Gérard Voisin. Je partage cette analyse en rappelant que, précisément, les réserves que j’ai voulu exprimer devant la place laissée à la « comitologie » dans le déploiement des STI ont pour objet de rappeler à l’Union que ces questions appellent avant tout un arbitrage de nature politique, qui fixe clairement les barrières de l’acceptable à partir d’une vision de la société, avant que les choix technologiques qui en découlent ne puissent être développés. »

2. Examen de la communication de M. Gérard Voisin sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (E 4200), mardi 29 septembre 2009

« M. Gérard Voisin. Le développement des systèmes intelligents de transport (STI) est extrêmement important ; il va toucher, dans leur vie quotidienne, tous les Européens ; il doit être encouragé, harmonisé et rendu compatible, au sein de l’Union européenne.

Je vous ai présenté, le 4 mars 2009, une communication sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport.

Comme je l’avais indiqué dans ce document, nos divergences avec la proposition de la Commission européenne ne portent en aucun cas sur le fond mais sur les procédures envisagées et, en particulier, sur le recours, excessif, à la comitologie.

Suite à la communication du Président Pierre Lequiller de la semaine dernière sur ce thème, je développerai devant vous la stratégie utilisée pour obtenir un meilleur encadrement en amont d’une proposition de directive.

En effet, le texte qui nous est soumis est une directive-cadre, renvoyant à des mesures d’application, sans préciser les points qui seront réglés par des règlements, du Conseil et du Parlement européen, et ceux qui le seront par des décisions de la Commission européenne, soumis à la procédure de comitologie.

Or, dans des domaines qui touchent aux libertés publiques (par exemple l’utilisation des données informatiques individuelles) ou qui peuvent avoir un impact financier considérable (équiper en STI tout le réseau routier) il est difficilement concevable que la législation européenne soit élaborée par la procédure de comitologie, qui doit être cantonnée aux questions techniques, relevant en France du pouvoir réglementaire.

Aujourd’hui, les questions que j’ai soulevées ne sont toujours pas réglées, mais je me félicite de l’écoute du Secrétaire d’Etat aux transports, qui a intégré les préoccupations exprimées par notre Commission dans la position des négociateurs français.

L’examen de cette proposition de directive, qui devait être approuvée par le Conseil au mois de juin, a été repoussé, et la négociation se poursuit sur deux points essentiels : son champ d’application et la procédure suivie.

Comme je l’ai souligné dans ma précédente communication, il est malaisé de définir un domaine qui est en pleine évolution. Je ne prendrai qu’un seul exemple, celui de l’intermodalité.

La directive pose le principe de l’installation dans les véhicules d’un boîtier permettant le dialogue entre l’infrastructure et les véhicules. Il n’est pas complètement évident que le téléphone portable, que nous pouvons garder sur nous quel que soit le mode de transport utilisé, ne soit pas à terme un meilleur outil, si nous utilisons plusieurs modes successifs de transport, qu’un ensemble fixé dans le véhicule. Je n’ai pas la réponse, mais prétendre trancher ce débat est peut-être prématuré.

Devant les incertitudes liées aux évolutions techniques, j’ai tendance à penser qu’il ne faut pas présumer des évolutions techniques. Cette attitude, je crois de bon sens, pose un problème dans la définition du champ de la directive : doit-elle préciser les outils à utiliser ou se limiter à une exigence de résultat, à savoir la compatibilité des différents outils et systèmes ?

La première approche, qui est privilégiée par la Commission européenne, a deux inconvénients : elle peut figer la recherche et les évolutions technologiques, ce qui n’est pas souhaitable, et surtout elle peut impliquer la nécessité de recourir à des « systèmes propriétaires », c'est-à-dire des dispositifs impliquant le paiement d’une redevance au détenteur d’un brevet. Ce risque est dénoncé par les constructeurs automobiles français et allemands qui sont d’accord pour atteindre les objectifs de dialogue entre véhicules et entre l’infrastructure et les véhicules, mais souhaitent demeurer libres de définir les outils qu’ils installeront sur leurs véhicules pour atteindre l’objectif souhaité.

Si, comme je l’ai indiqué dans ma précédente communication, nous nous situons dans une compétence communautaire incontestable, nous pouvons nous demander si, au regard du principe de subsidiarité, il ne serait pas utile de limiter le champ de cette directive à la définition des normes permettant la compatibilité des différents matériels utilisés dans l’Union européenne.

La nature des services qui doivent être offerts (en dehors peut-être de l’appel d’urgence), le rythme et la décision de déploiement par les autorités nationales, doivent-ils relever de Bruxelles, alors que les coûts de ces infrastructures sont considérables et les moyens des Etats et des collectivités locales de l’Union européenne très disparates ?

La réponse à cette question ne saurait être simple. Les perspectives de mise en place d’écotaxes liées au kilométrage parcouru, ou la gestion des appels d’urgence, très utiles quand l’accidenté ne parle pas la langue du pays, imposent la définition d’outils au niveau européen.

Nous devons être plus circonspects quand il s’agit de données à usage local. Par exemple, le système permettant à l’automobiliste de synchroniser sa vitesse pour éviter les feux rouges est certainement utile, mais il nous semble que la décision de le déployer doit relever des autorités locales.

En l’état actuel de la proposition de directive, je ne peux vous indiquer la solution retenue en matière de répartition des compétences entre les différents acteurs car tous les aspects du déploiement des STI pourraient, en théorie, être réglementés par l’Union européenne.

Il est clair qu’il est dans la nature d’une directive-cadre de ne pas rentrer dans les détails, mais que le texte qui nous est soumis doit impérativement définir plus précisément les domaines de compétence de l’Union européenne.

Lors de ma précédente communication sur cette proposition, je concluais en indiquant à notre Commission que : « j’essaierai de proposer un dispositif limitant et encadrant la procédure de comitologie. En effet, s’agissant de décisions qui auront un impact majeur sur les conditions de vie des Européens, le contrôle politique doit trouver à s’affirmer ».

En constatant les difficultés que rencontrait l’adoption par le Conseil de cette proposition de directive, j’ai entrepris une action de sensibilisation auprès de M. Dominique Bussereau, Secrétaire d’Etat aux transports. Elle semble avoir porté quelques fruits, puisque la position française a sensiblement évolué et que les préoccupations exprimées dans mes notes au Secrétaire d’Etat, des 21 juillet et 8 septembre 2009, ont été relayées par les négociateurs français.

En ce qui concerne la question des données personnelles et le recours à la comitologie, le groupe de travail du Conseil, sur la suggestion de la France, a demandé que la Commission européenne précise par écrit ses intentions, et indique si elle entendait proposer un règlement du Conseil et du Parlement européen ou promulguer une décision de la Commission par voie de comitologie.

Le Secrétaire d’Etat aux transports a également saisi la CNIL d’une demande d’avis sur cette question.

S’agissant d’une directive-cadre, procédé peu usité jusqu’à présent, le groupe du Conseil de travail a considéré que la réponse de la Commission (« nous appliquerons les textes ») n’était pas satisfaisante et qu’il était fondamental de définir la nature des textes découlant de la directive, en précisant les champs respectifs de la codécision et de la comitologie.

Je me suis rendu à deux reprises en Allemagne depuis le début de l’année car, dans le domaine des transports routiers, la géographie donne à l’Allemagne et à la France un poids considérable.

La proposition de directive relative aux STI bute sur un désaccord franco-allemand.

Après ma mission du mois de juillet, j’ai indiqué au Gouvernement la volonté allemande d’aboutir à un accord avec la France sur la base d’un contre-projet qui m’avait été communiqué et qui privilégiait la voie de la normalisation.

Les négociateurs français et allemands se sont rencontrés à deux reprises depuis le mois de juillet. Il semble qu’un accord sur un mandat de normalisation soit en passe d’aboutir.

Les objections allemandes au recours à la comitologie sont aujourd’hui relayées par la France.

Au vu des explications données lors de cette réunion j’estime que M. Dominique Bussereau a parfaitement relayé les inquiétudes dont je lui avais fait part, après en avoir informé notre Commission.

Ce travail est une illustration de ce qui s’est dit lors de notre réunion de la semaine dernière consacrée à la comitologie. Notre Commission a intérêt à se saisir de cette problématique car, ce faisant, nous aidons le Parlement français, les parlements étrangers et le Gouvernement. Nous pouvons rectifier des erreurs, même sur des sujets mineurs et éviter ainsi des bévues.

Le Président Pierre Lequiller. Je suis d’accord avec vos conclusions, mais je souhaiterais ajouter qu’en l’occurrence, il y a certes eu un défaut dans le fonctionnement du système – la décision aurait dû être déférée au ministre des transports et les experts n’ont pas cru bon de le faire – mais que la comitologie, concernant plus d’un millier d’actes, présente aussi des aspects positifs, dans la mesure où elle encadre le pouvoir réglementaire de la Commission. Notre devoir est de suivre l’application des textes européens et cette fonction est en phase avec l’idée du renforcement du rôle du Parlement. Notre Commission des affaires européennes s’est vu confier de nouvelles prérogatives dans l’application des directives et notre antenne de Bruxelles participera à ce travail. Par ailleurs, le Gouvernement doit aussi exercer ce contrôle.

La comitologie est utile mais doit être maîtrisée par le pouvoir politique, au risque de dessaisissement. Il nous appartient, notamment aux rapporteurs chacun dans leurs domaines de compétence, d’assurer cette surveillance. Une vigilance particulière est nécessaire et c’est la raison pour laquelle il était nécessaire de faire un rapport sur un sujet mal connu, afin de renforcer notre contrôle. »

3. Examen du rapport d’information de M. Gérard Voisin sur les systèmes de transport intelligents (E 4200), mercredi 2 décembre 2009

La Commission s’est réunie le 2 décembre 2009, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

« M. Gérard Voisin, rapporteur. Les systèmes de transport intelligents (STI) désignent les applications des nouvelles technologies de l’information et de la communication au domaine des transports.

Ils sont amenés à jouer un rôle essentiel dans cinq domaines : l’amélioration de la sécurité (notamment de la sécurité routière) ; l’optimisation de l’utilisation des infrastructures de transport ; la limitation des consommations d’énergie, des pollutions et des nuisances ; la promotion des transferts vers les modes les plus respectueux de l’environnement ; le développement des services.

Les systèmes de transport intelligents (STI) vont constituer, à l’évidence, un des outils majeurs de cette croissance économique respectueuse de l’environnement que nous appelons tous de nos vœux, car ils concourent à la maîtrise de la mobilité, en favorisant entre autres le report de la voiture vers des modes plus respectueux de l’environnement.

Ils font l’objet d’une compétition économique serrée au niveau mondial, car les plus-values et les marges de demain se situeront dans les services permettant l’optimisation des déplacements, par une évolution similaire à celle qu’à connu l’informatique avec le développement des concepteurs de logiciels.

La commission chargée de réfléchir sur le grand emprunt, présidée par MM. Michel Rocard et Alain Juppé, propose, à travers son rapport « Priorités stratégiques d’investissement et emprunt national », de consacrer 3 milliards d’euros à la mobilité du futur.

L’importance des systèmes de transport intelligents est donc considérable. Il n’est pas excessif de considérer que la proposition de directive « établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport » est le texte fondateur d’une nouvelle politique des transports.

Cette proposition de directive peut entraîner à terme une révolution de notre conception du transport, en rendant effective l’intermodalité ou efficace la gestion des flux routiers. Comme toute révolution, elle s’accompagne de crispations et de craintes qui conduisent à un certain blocage sur lequel ce rapport se penchera.

Il est clair que la plupart des engagements du Grenelle de l’environnement, particulièrement dans le domaine des transports, ne pourront être atteints que par un recours accru aux nouvelles technologies.

Enfin la mise en œuvre des réglementations, notamment en matière de sécurité, s’appuiera de plus en plus sur des systèmes de collecte et de traitement de l’information automatisés. Elle impliquera également une meilleure coopération entre les différents niveaux d’institutions (l’Etat, les collectivités locales et l’Europe) pour identifier les bonnes pratiques et normaliser des produits répondant aux besoins des usagers, afin qu’ils puissent être diffusés à un moindre coût.

Les transports sont un secteur où les investissements sont lourds et s’amortissent lentement. Le remplacement d’un parc automobile nécessite plusieurs années, il ne faut donc pas perdre de temps pour déployer des systèmes qui existent déjà. Les technologies utilisées dans les systèmes de transport intelligents vont des dispositifs utilisés depuis de longues années, tels que les systèmes de gestion des carrefours à feux, les panneaux à messages variables, les radars automatiques ou la télésurveillance, jusqu’à des applications plus avancées, intégrant le retour des données en temps réel d’informations reposant sur de nombreuses sources (météo, GPS, surveillance vidéo…).

Le développement des systèmes de transport intelligents (STI) est donc une question extrêmement importante qui va toucher, dans leur vie quotidienne, tous les Européens. Or l’Union européenne n’arrive pas à déployer pour le moment de manière coordonnée ces systèmes. L’harmonisation des systèmes de péage automatique, qui n’est pas encore entrée dans les faits, a, par exemple, pris huit ans. Il serait commode d’attribuer ce retard à la lourdeur des procédures de l’Union européenne, mais cela serait excessif et peut-être injuste. Le retard est particulièrement frappant par rapport au Canada et au Japon. Je me suis rendu au Japon pour examiner les effets concrets d’une politique de promotion des STI. Dès 1994 le gouvernement japonais à procédé à une analyse des besoins en STI de la société japonaise Aujourd’hui le Japon dispose d’une stratégie jusqu’à l’horizon 2025, et son système de navigation « intelligent » VICS est mis en œuvre depuis 13 ans.

La Commission européenne propose, dans le but de renforcer les systèmes de transport intelligents (STI) en Europe : un plan d’action qui énonce six priorités visant à accélérer et à coordonner le déploiement des STI, une proposition de directive qui délimite le cadre de ce plan d’action.

Le plan d’action proposé en matière de STI par la Commission européenne concerne le domaine du transport routier, ainsi que les interfaces avec d’autres moyens de transport. Le but est d’arriver à coordonner les ressources et les instruments disponibles existants, en mettant en œuvre les actions suivantes :

- l’optimisation des données relatives aux routes, au trafic et aux voyages grâce à un service d’informations sur le trafic et les voyages en temps réel au niveau européen ;

- la continuité des services STI de gestion du trafic et des marchandises dans les corridors de transport européens et dans les agglomérations urbaines grâce à un cadre commun ;

la promotion de bonnes pratiques en matière de sûreté et de sécurité routière ;

l’intégration des véhicules dans l’infrastructure des transports, par exemple par le biais d’une plateforme de services et d’applications STI ;

la protection de la sécurité des données à caractère personnel.

La coopération et la coordination efficace de toutes les parties concernées devraient être effectuées au niveau européen au travers du cadre juridique issu d’une directive. La proposition de directive a pour objectif de définir un cadre juridique permettant d’atteindre les objectifs précédents. Dans son texte initial elle prévoit que les Etats membres sont tenus de rendre accessible et interopérable l’utilisation et l’application de services STI qui comprennent des données relatives au transport routier : des données de circulation ; des systèmes de sûreté et de sécurité dans les véhicules et l’infrastructure routière ; des informations entre véhicules et infrastructures routières.

Il s’agit d’une directive-cadre qui donne un large mandat à la Commission pour décliner les dispositifs juridiques contraignant destinés à mettre en œuvre le plan d’action. Au regard des règles de subsidiarité, la proposition de directive ne soulève pas d’objections. La politique commune des transports et la politique des réseaux transeuropéens confèrent une responsabilité d’action à l’Union européenne

Je suis pleinement d’accord avec les objectifs affirmés par la proposition de directive, mais réticent devant l’imprécision du mandat donné à la Commission européenne, qui fait une place trop importante à la procédure de comitologie. Dans des domaines qui touchent aux libertés publiques (par exemple l’utilisation des données informatiques individuelles) ou qui peuvent avoir un impact financier considérable (équiper en STI tous le réseau routier), il est difficilement concevable que la législation européenne soit élaborée par la procédure de comitologie, qui doit être cantonnée aux questions techniques.

Le caractère obligatoire du recours aux STI est en passe d’être abandonné. La nature des services qui doivent être offerts, en dehors peut-être de l’appel d’urgence, le rythme et la décision de déploiement par les autorités nationales doivent-ils relever de l’action de l’Union européenne, alors que les coûts de ces infrastructures sont considérables et les moyens des Etats et des collectivités locales de l’Union très disparates ?

En l’état actuel de la proposition de directive je ne peux pas vous indiquer la solution retenue en matière de répartition des compétences entre les différents acteurs, car tous les aspects du déploiement des STI pourraient, en théorie, être réglementés par l’Union européenne.

Il est clair qu’il est dans la nature d’une directive de ne pas rentrer dans les détails mais, le texte qui nous est soumis doit impérativement définir plus précisément les domaines de compétence de l’Union européenne.

Les négociations conduites au sein du Conseil ont essentiellement portée sur cette question : faut-il réglementer le développement des STI en l’encadrant de dispositifs juridiques contraignants ou faire confiance aux acteurs économiques pour que l’objectif recherché soit atteint par la normalisation, tous les systèmes diffusés en Europe devant pouvoir dialoguer entre eux ?

Il me semble que la méthode de la normalisation, par sa souplesse, présentait des avantages évidents dans un domaine où il est difficile de figer l’évolution technique. Il devrait se dégager aujourd’hui au sein du Conseil un consensus dans ce sens, ce qui me semble adaptée au domaine concerné.

La directive pose le principe de l’installation dans les véhicules d’un boîtier permettant le dialogue entre l’infrastructure et les véhicules. Or, j’ai tendance à penser qu’il ne faut pas présumer des évolutions techniques et que le téléphone portable, que nous pouvons garder sur nous quelque soit le mode de transport utilisé, pourrait être un meilleur outil, si nous utilisons plusieurs modes successifs de transport, qu’un ensemble fixé à demeure dans le véhicule. Il est également possible que cette plateforme fasse appel à des systèmes propriétaires imposant le versement de redevances à des constructeurs automobiles qui ont développé leur propre système. En tous cas il est totalement exclu à mes yeux qu’une directive européenne détermine les outils obligatoires de l’interopérabilité : elle doit poser les objectifs à atteindre et laisser jouer la concurrence.

Cette question est illustrée par l’« eCall ». Dans un document adopté le 21 août 2009, la Commission indique que, si son déploiement n’est marqué par aucune avancée significative d’ici à la fin de 2009, elle pourrait proposer des mesures réglementaires visant à rendre opérationnelle le plus rapidement possible dans toute l’Europe cette technologie. En outre le système « eCall », que souhaite promouvoir la Commission, repose sur une licence américaine mise gratuitement à disposition des européens pour la fonction d’appel d’urgence, mais payante pour les services associés. Nos constructeurs automobiles ont développé leur propre système. L’action européenne est légitime pour imposer des normes destinés à rendre compatibles les systèmes entre eux, mais il n’est pas acceptable que la Commission cherche à imposer le recours à un système propriétaire. Je suis donc favorable au développement de l’« e Call » mais pas à celui de la Silicon Valley.

Au moment où le secteur automobile traverse la crise la plus grave de son histoire, il convient de se poser les questions de fond sur le nouveau rapport qui est en train de naître entre les automobilistes et leur véhicule. Les nouvelles normes que va élaborer l’Union européenne renforceront ou amoindriront la compétitivité de l’industrie automobile. Les systèmes de transport intelligents (STI) constitueront une partie essentielle des normes à venir en améliorant plus précisément la sécurité, l’efficacité et le respect de l’environnement par les véhicules.

Le très large recours aux experts et à la procédure de comitologie est inquiétant, car les décisions normatives doivent intégrer une analyse coûts-avantages qui relève d’abord de l’appréciation du pouvoir politique pour la décision d’extension et des acteurs économiques pour la mise en œuvre.

Aussi, je vous propose d’adopter une proposition de résolution précisant que la proposition de directive « établissant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport » élaborée par la Commission européenne doit être rejetée, du fait d’un recours trop large et trop imprécis à la procédure de comitologie, mais que le projet de résolution que précise le projet de compromis élaborée par la présidence suédoise peut recevoir notre accord, sous réserve que ce texte ne permette pas de recourir à la procédure de comitologie pour légiférer sur la conservation des données personnelles et n’impose pas le système de STI.

J’estime également que la directive doit interdire à la Commission européenne d’imposer le recours à des « systèmes propriétaires », en particulier pour le système d’appel d’urgence et que le déploiement du système « eCall » doit se faire dans le respect de la compétence des Etats en matière d’organisation des secours d’urgence. »

Sur proposition du rapporteur, la Commission a ensuite adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RESOLUTION

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil, sur le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (COM [2008] 887 final/n° E 4200), présentée par la Commission européenne,

1. Considère que l’harmonisation et la compatibilité des systèmes de « transport intelligents » relèvent de la compétence de l’Union européenne ;

2. Rejette la proposition initiale de la Commission européenne, du fait d’un recours trop large et trop imprécis à la procédure de comitologie ;

3. Approuve la proposition de directive amendée soumise au Conseil, par la Présidence suédoise, dans la mesure où ce texte exclut la procédure de comitologie pour légiférer sur la conservation des données personnelles, et l’obligation pour un Etat de déployer un système de STI ;

4. Estime que la directive doit interdire la voie de la comitologie pour le recours à des « systèmes propriétaires », en particulier pour le système d’appel d’urgence ;

5. Estime que le déploiement du système d’appel d’urgence (« eCall ») doit se faire dans le respect de la compétence des Etats en matière d’organisation des secours d’urgence.

ANNEXES

ANNEXE 1 :
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

1. A Paris

Ø Secrétariat d’Etat chargé des transports

- Mme Laure Lassagne, conseillère technique, pôle diplomatique.

Ø Constructeurs automobiles

- M. Emmanuel Bonbon, chef du département Aide à la conduite et connectivité, Renault ;

- M. Christian Rousseau, directeur délégué à la politique des transports, Renault ;

- M. Franck Batocchi, directeur services télématiques, directiion des pièces de rechange, PSA Peugeot Citroën ;

- M. Jean-François Huere, sécurité, ITS, direction juridique, des relations institutionnelles et de l’audit, PSA Peugeot Citroën.

Ø CEA, direction des programmes, service des affaires publiques

- M. Xavier Apolinarski, responsable des partenariats stratégiques « transports » du laboratoire LIST ;

- M. Jean-Pierre Vigouroux, chef du service des affaires publiques ;

- M. Fabrice Auzanneau

- Mme Karine Gosse ;

- M. Christophe Janneteau ;

- Mme Elvire Leblanc ;

- M. Jean-Denis Muller ;

- M. Patrick Sayd.

2. A Bruxelles

Ø Commission européenne

- - M. Philippe Hamet, direction transports, unité systèmes de transport intelligents, Commission européenne ;

- Mme Anne E. Jensen, rapporteure sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre pour le déploiement des systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport ;

- MM. Juhani JÄÄskelÄinen, chef d’unité, et Emilio DÁvila GonzÁlez, gestionnaire de programme de recherche, direction société de l’information et multimédia, unité technologies de l’information et des communications pour le transport.

Ø Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne

- M. Jean PrÉat, secteur transport.

Ø Ertico ITS Europe

- M. Vincent Blervaque, directeur du développement.

3. En Allemagne

- M. Friedhelm Bertelsmeier, ministère fédéral des transports, de la construction et des affaires urbaines ;

- Mme Petra Winkler-Maître, déléguée aux relations franco-allemandes, affaires internationales et économiques extérieures, ministère fédéral des transports, de la construction et des affaires urbaines ;

- Prof. Dr. Ing. Josef Kunz, BMVBS ;

- Dr. Michael Niedenthal, chef du département transport, VDA ;

- M. Michael Nissen, avocat, ADAC.

4. Au japon

Ø Ambassade de France

- Son Exc. M. Philippe Faure, ambassadeur de France ;

- M. Philippe Bardol, conseiller économique, responsable du département Appui aux entreprises, correspondant Ubifrance ;

- M. Pierre Dauchez, professeur des universités, attaché pour la science et la technologie ;

- M. Pierre Destruel, professeur des universités, attaché pour la science et la technologie ;

- M. Jules Irrmann, conseiller, chef du service de communication et d’information ;

- M. Florian Lanson, chargé de mission, sciences et technologies de l’information et de la communication ;

- M. Benoit Rulleau, responsable du pôle infrastructures, transports, énergie et environnement.

Ø Nissan

- M. Keni Yao, senior manager, technical affairs and product safety group, global government affairs department, environmental and safety technologies, technology development division ;

- M. Tetsuo Hasegawa, general manager, global government affairs department, environmental and safety technologies, technology development division ;

- M. Masao Fukushima, engineering director, IT&ITS technology planning group, IT and ITS engineering department, technology development division;

- M. Makoto Ikeda, technical affairs and product safety group, technical affairs and product safety group, global government affairs department, environmental and safety technologies, technology development division.

Ø ITS Japan

- M. Kentaro Sakamoto, senior vice president, international affairs ;

- M. Ikuo Yoshizawa, senior manager, international affairs ;

- M. Junji Tatematsu, director, strategic planning.

Ø Autres personnalités

- M. Yasushi Wakou, adjoint au maire de Fujiyoshida ;

- M. Watanabe Kazufumi, mairie de Fujiyoshida ;

- M. Koichi Kubota, director, international affairs division, tourism dpt, Yamanashi prefectural goverment ;

- M. Shigeki Muramatsu, senior managerial staff, international affairs division, tourism dpt, Yamanashi prefectural government ;

- M. Yamada Sachiko, deputy director general, tourism dpt, Yamanashi prefectural government ;

- M. Masahiko Sawanobori, head assistant director, international affairs division, tourism dpt ;

M. Yokouchi Shomei, governor, Yamanashi prefecture ;

- M. Masahide Hatakeyama, police superintendent, deputy director, traffic planning division, traffic bureau, National Police Agency ;

- M. Shibuya Shuetsu; assistant director for ITS, traffic planning division, traffic bureau, National Police Agency ;

- M. Tadashi Okutani, director, ITS policy and program division, road bureau, ministry of land, infrastructure, transport and tourism ;

- M. Masayuki Shima, director, international affairs office, engineering and safety department, road transport bureau, ministry of land, infrastructure, transport and tourism ;

- M. Masataka Nakahira, deputy general manager, service enhancement division, Vehicle Information and Communication System Center.

ANNEXE 2 :
LETTRE D’ATEC-ITS FRANCE A M. GÉRARD VOISIN

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 () Le rapporteur a examiné cette question dans son rapport n° 1483 relatif à la perception des amendes transfrontalières.

3 () Voir le détail du plan en annexe n° 2.

4 () Cf. Annexe III.