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N2653

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 juin 2010.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
la politique de qualité des produits agricoles,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Philippe Armand MARTIN,

Député

——

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Michel Herbillon, Jérôme Lambert, Thierry Mariani, Didier Quentin, vice-présidents ; M. Jacques Desallangre, Mme Marietta Karamanli, MM. Francis Vercamer, Gérard Voisin secrétaires ; M. Alfred Almont, Mme Monique Boulestin, MM. Pierre Bourguignon, Yves Bur, François Calvet, Christophe Caresche, Philippe Cochet, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Delebarre, Michel Diefenbacher, Jean Dionis du Séjour, Marc Dolez, Daniel Fasquelle, Pierre Forgues, Jean-Claude Fruteau, Jean Gaubert, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Mmes Annick Girardin, Anne Grommerch, Elisabeth Guigou, Danièle Hoffman-Rispal, MM. Régis Juanico, Marc Laffineur, Robert Lecou, Michel Lefait, Lionnel Luca, Philippe Armand Martin, Jean-Claude Mignon, Jacques Myard, Michel Piron, Franck Riester, Mmes Chantal Robin-Rodrigo, Valérie Rosso-Debord, Odile Saugues, MM. André Schneider, Philippe Tourtelier.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LA POLITIQUE DE QUALITE : VALORISER LES DIFFERENCES ET LES SPECIFICITES DES PRODUITS AGRICOLES 11

A. L’INTÉRÊT DE TIRER PARTI DE LA DIVERSITÉ 11

1. Les attentes légitimes des consommateurs 11

2. Des impératifs territoriaux et environnementaux forts 11

3. Un enjeu économique de premier ordre 12

B. LA RÉGLEMENTATION DE LA QUALITÉ : DIFFÉRENCIATION ET SEGMENTATION DES MARCHÉS 14

1. La politique de qualité dans la logique des réformes de la PAC 14

2. Un système complexe de valorisation des produits 16

a) Normes de commercialisation, systèmes de certification et mentions valorisantes 17

b) Systèmes de qualité spécifiques liés au terroir ou à un mode de production 20

3. Un système inégalement utilisé et perçu 21

a) Par les Etats membres 21

b) Par les filières agricoles 25

c) Par les consommateurs 26

II. RENDRE LA POLITIQUE DE QUALITE PLUS LISIBLE ET PLUS COHERENTE TOUT EN RESPECTANT LES EQUILIBRES DES SECTEURS 29

A. ELABORER DES NORMES DE COMMERCIALISATION PLUS SIMPLES ET PLUS SOUCIEUSES DE L’INTÉRÊT DES CONSOMMATEURS 29

1. L’élaboration et le contrôle communautaire des normes de commercialisation 29

2. Des systèmes de certification plus cohérents n’entraînant pas de confusion pour le consommateur 31

3. Des mentions facultatives harmonisées 33

4. La mention du lieu de production sous certaines conditions 34

5. Un label biologique crédible 35

B. RENFORCER LE LIEN ENTRE LA POLITIQUE DE QUALITÉ ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DES TERRITOIRES 36

1. Améliorer les conditions d’enregistrement des signes de qualité 36

2. Conserver des systèmes d’enregistrement et des instruments différenciés 37

a) Ne pas fusionner les trois systèmes d’enregistrement 37

b) Maintenir la distinction entre les deux instruments AOP et IGP 38

c) Ne pas instaurer des régimes de protection différenciée selon les indications géographiques 39

d) Conserver la dénomination de spécialité traditionnelle garantie 40

e) Promouvoir le logo « Régions ultrapériphériques » 41

f) Distinguer le droit de la protection des indications géographiques du droit des marques 41

3. Rendre plus présente la dimension de durabilité des territoires 42

a) Introduire des critères environnementaux dans les cahiers des charges 42

b) Valoriser la provenance des matières premières AOP et IGP 43

C. CONFORTER ET DÉFENDRE LA QUALITÉ DES PRODUITS 44

1. Réguler les quantités pour maintenir la qualité 44

2. Protéger les indications géographiques vis-à-vis des pays tiers 47

3. Aider les producteurs et informer les consommateurs 49

CONCLUSION 51

TRAVAUX DE LA COMMISSION 53

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA COMMISSION 55

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR ET REMERCIEMENTS 59

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Alors que les débats s’engageaient sur les enjeux de la politique agricole commune (PAC) après 2013, la présentation en octobre 2008 par la Commission européenne d’un Livre vert sur la politique de qualité des produits agricoles(2) aura été particulièrement bienvenue. La qualité des produits agricoles a constitué un axe majeur de la PAC, contribuant à la mise en place du modèle agricole européen d’une agriculture économiquement et socialement durable(3). Pour que l’agriculture reste un secteur primordial de l’économie européenne, cette ligne de conduite doit être tenue et renforcée.

La PAC se caractérise par le respect de normes rigoureuses(4) et un niveau de sécurité alimentaire parmi les plus élevés au monde. Au-delà de ces exigeantes « règles de base », certains produits agricoles présentent, en raison d’un savoir-faire particulier ou d’un lien aux territoires et à l’histoire, une identité et une spécificité auxquelles les consommateurs sont profondément attachés. Dans le contexte de crise que connaissent actuellement nos économies et plus généralement nos sociétés, les citoyens européens ne cessent d’accorder de plus en plus d’importance à la valeur des choses, donc à la qualité de ce qu’ils consomment.

La valorisation des produits agricoles s’est construite autour de signes d’identification de la qualité et de l’origine. En réponse à l’attente des consommateurs pour lesquels ces signes sont une garantie, la politique de qualité constitue aussi un levier économique et commercial de premier ordre. Dans un monde de plus en plus concurrentiel, la PAC doit se battre avec ses armes. La qualité, créatrice de valeur ajoutée, est incontestablement un facteur de compétitivité qui, à l’intérieur des frontières de l’Union européenne, contribue à l’application du principe de la préférence communautaire et qui, à l’extérieur, permet de gagner des marchés. Comme moyens de redonner de la compétitivité aux modèles agroalimentaires européens, les démarches de qualité prendront légitimement une importance croissante.

De façon corollaire, la politique de qualité est un outil essentiel de la pérennisation du tissu économique et social rural. La nécessité de conserver des activités dans certains bassins de production justifie la pleine implication des pouvoirs publics.

D’une manière générale, la politique de qualité ne peut être disjointe du reste de la politique agricole commune et ne peut davantage se tenir à l’écart des nouveaux défis que posent la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité, l’approvisionnement en énergie…

Ouvert pour toutes ces raisons par le livre vert d’octobre 2008, le débat sur la politique de qualité avait pour objet de revoir en profondeur le mécanisme des appellations d’origine, des signes de qualité et des normes de commercialisation.

Après une large consultation, une communication de la Commission européenne a été présentée en mai 2009(5). Elle a le mérite de réaffirmer la recherche de la qualité comme un « élément essentiel de la stratégie du secteur agroalimentaire européen sur le marché mondial ». La Commission pose des principes de simplification et de transparence afin d’offrir des produits disposant des qualités requises par les consommateurs et de les informer clairement. Si l’on ne peut que souscrire au souci de la Commission de simplifier les outils de la politique de qualité et d’introduire une plus grande cohérence entre les différents instruments, il convient cependant de respecter l’équilibre du système. Simplification ne doit pas signifier dérégulation… Ainsi la proposition de la Commission de fusionner les appellations d’origine protégée (AOP) et les indications géographiques (IG) reviendrait à ne retenir que la définition la moins disante en termes d’origine du produit.

Par ailleurs, si la proposition de la Commission vaut par ce qu’elle propose, il est nécessaire de voir, en creux, ce qu’elle ne propose pas. Sont passées sous silence la régulation et la gestion du potentiel de production alors que ces deux éléments sont les clés de la qualité. Cette communication porte incontestablement la marque de l’ancien commissaire à l’agriculture, Mme Mariann Fisher Boel, pour qui la régulation des quantités va à l’encontre des lois du marché et doit donc disparaître.

L’importance de la maîtrise des quantités a été soulignée au cours des auditions qui ont conduit le rapporteur à rencontrer de nombreuses filières agricoles(6). Lors de déplacements en Espagne et en Hongrie, il a pu constater que les autres Etats membres, soucieux de promouvoir la spécificité de leurs produits, partagent cette approche. De la même façon, le Parlement européen a, dans un rapport d’initiative(7), considéré la maîtrise de la production, comme « un élément essentiel pour garantir une politique de qualité ».

Le projet sur la politique de qualité est un des premiers textes agricoles qui sera examiné en application des nouvelles règles issues du traité de Lisbonne qui, avec la codécision, donne un rôle accru au Parlement européen. Dans la perspective de la présentation des propositions législatives de la Commission européenne au cours du second trimestre 2010, le rapporteur souhaite que la voix du Parlement français appuie celle du Parlement européen.

Les propositions législatives que la Commission européenne doit mettre sur la table au second semestre 2010 s’inscrivent dans un processus de décision communautaire engagé depuis le Livre vert sur la qualité présenté le 15 octobre 2008. Ce Livre vert a posé un ensemble de questions relatives à la qualité des produits et le nombre des contributions reçues –plus de 500 de multiples acteurs (Etats membres, organisations agricoles, associations de consommateurs…) – témoigne de l’intérêt suscité par ce débat dans la société. Un rapport d’initiative a été présenté par Mme Maria Petre sur le Livre vert en mars 2009(8) et une conférence de haut niveau sur le sujet s’est tenue à Prague en mars 2009. Le Parlement européen, maintenant codécisionnaire en matière agricole, a déjà fait part de ses réserves sur la communication de la Commission européenne dans le rapport d’initiative présenté en mars 2010(9).

I. LA POLITIQUE DE QUALITE : VALORISER LES DIFFERENCES ET LES SPECIFICITES DES PRODUITS AGRICOLES

L’un des principaux atouts des agricultures européennes est la grande diversité de ses produits alimentaires, résultat à la fois de milieux naturels, de méthodes de culture et d’une tradition séculaire. Ces produits font partie intégrante du patrimoine et de l’identité européenne.

A. L’intérêt de tirer parti de la diversité

L’Union européenne a compris tout l’intérêt qu’elle avait à disposer d’une politique destinée à promouvoir la qualité de ses produits. Dans une note adressée aux experts du Comité spécial agricole des Vingt-sept le 17 mai dernier, la présidence espagnole a tiré les conclusions des débats actuels sur le manque de compétitivité du modèle agricole européen, rappelant que « ce modèle est un défi en termes de compétitivité sur le marché global d’aujourd’hui…Un des moyens d’y faire face est de le promouvoir et le convertir par une réelle opportunité de marché, sur les plans interne et externe ». C’est cet objectif que l’on peut assigner à la politique de qualité.

1. Les attentes légitimes des consommateurs

Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à privilégier la qualité dans leur alimentation et à rechercher des produits spécifiques ou dont l’origine géographique est connue et précisée. Les signes de qualité constituent un gage de reconnaissance d’un produit typique et de qualité, fabriqué dans des conditions caractéristiques. Ces signes, utilisés comme repère lors de l’achat, ne garantissent pas seulement sa qualité mais également son authenticité.

2. Des impératifs territoriaux et environnementaux forts

Si l’évolution du marché mondial conduit les producteurs agricoles à n’être plus que de simples fournisseurs de matières premières, sollicités au gré des fluctuations des cours, les conséquences en seront très dures pour les pays agricoles européens.

La mise en place de nombreux signes de qualité et notamment des indications géographiques permet la valorisation des productions régionales élaborées et identifiées en tant que telles. Dès lors qu’une production est identifiée par son nom géographique, elle devient indélocalisable. Si l’on arrive à assurer l’équilibre entre le produit et le marché, on pérennise à long terme un enracinement régional et on construit un aménagement du territoire solide. En permettant le développement de productions spécifiques et régionales, la politique de qualité contribue à diversifier la production agricole et, par conséquent, à favoriser un développement équilibré des zones rurales. C’est parfois aussi l’unique possibilité de développement pour des régions rurales qui n’ont pas d’autres alternatives.

Les filières de qualité ont un impact fort sur l’activité économique et sociale de leurs régions de production. Ainsi, la moyenne française d’emplois directs pour 100 000 litres de lait produits est de 0,76 % alors qu’elle est de 2,8 emplois pour le Saint-Nectaire et de 7,1 % pour le roquefort, deux produits bénéficiant d’une appellation d’origine. Un des facteurs qui a permis aux zones de montagne de résister à la crise laitière est le classement de 30 % de leur production de lait en appellation d’origine contrôlée. D’ailleurs, une des pistes examinée par le groupe à haut niveau sur le lait - constitué à la demande de la France en octobre 2009 pour se pencher sur l’avenir du secteur laitier - est la possibilité de plus et mieux valoriser les productions de lait de qualité.

3. Un enjeu économique de premier ordre

Les exploitants agricoles comprennent de plus en plus fréquemment que l’exigence de la qualité ne doit pas être considérée comme un fardeau mais plutôt un moyen de protéger et de valoriser leur production, tout en répondant aux attentes des consommateurs.

Dans la mesure où la qualité a un coût – le coût supplémentaire de production pouvant varier de 3 à 150 %(10) –, elle a aussi un prix qui peut légitimement être supérieur à celui des produits standards. Une étude réalisée dans le secteur laitier(11) indique que les fromages bénéficiant d’un système de protection peuvent atteindre un prix supérieur de 30 % à celui des autres fromages. De plus, la valeur ajoutée se répartit tout au long de la chaîne alimentaire, procurant ainsi des bénéfices tant aux producteurs et transformateurs locaux qu’aux détaillants et autres opérateurs en aval.

Ceci est une des raisons qui expliquent, selon M. Jean-Luc Buer, directeur de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) ,auditionné par le rapporteur, que « près d’un agriculteur français sur deux s’est engagé dans une démarche qualitative »(12).

Les démarches de qualité ont significativement contribué au maintien de certaines filières. L’exemple le plus significatif est celui du secteur de la volaille qui s’est, dès 1960, engagé dans la voie de la labellisation, ce qui a permis de faire face à la concurrence des pays comme le Brésil et d’éviter la disparition de la filière volaille française.

Le chiffre d’affaires des produits sous signes (appellation d’origine protégée et indication géographique protégée) (voir tableau infra) est estimé pour l’année 2007 à 14,2 milliards d’euros (hors vins et spiritueux), la part de marché étant de 2,5 % de la consommation alimentaire de l’Union européenne(13).Au sein de l’Union européenne, 8 % des fromages sont sous signes de qualité, constituant 37 % du chiffre d’affaires total de ces produits. En France, les appellations d’origine protégée représentent 49 % de la récolte de vin et les indications géographiques, 29 %.

Depuis 2005, la part des produits sous signes de qualité est en croissance constante et des marges de progression existent. Si l’on considère que l’agriculture européenne doit rester compétitive face à une concurrence toujours plus forte, la carte de la qualité doit être jouée. L’Union européenne reste le premier exportateur mondial de produits agricoles (17 % environ du commerce mondial total). Ses exportations portent essentiellement sur des produits transformés et des produits à forte valeur ajoutée (67 % des exportations agricoles totales) et dans cette catégorie, les produits de qualité représentent un fort potentiel d’exportation.

B. La réglementation de la qualité : différenciation et segmentation des marchés

Quelle définition donner de la qualité ?

Dans tous les domaines, mais particulièrement en ce qui concerne les denrées alimentaires, l’appréciation de la qualité est une question subjective. Au-delà des normes de base liées à la salubrité et la sécurité, les critères de qualité généralement pris en compte concernent les aspects suivants :

– caractéristiques spécifiques du produit liées à l’origine ou la zone de production (par exemple, zones de montagne), à une race animale ou une méthode de production (agriculture biologique) ;

– ingrédients spéciaux ;

– méthodes de production particulières résultant souvent de compétences et traditions locales.

1. La politique de qualité dans la logique des réformes de la PAC

Dans les années 60 et 70, les organisations communes de marché (OCM) portaient essentiellement sur la définition de normes de commercialisation mais certains pays disposaient déjà de leur propre réglementation pour favoriser et protéger certaines appellations de produits alimentaires spécifiques.

C’est surtout au début des années 90 que la politique de qualité communautaire s’est développée, étroitement liée aux premières réformes de la PAC(14). Il s’agissait en effet de mettre l’accent sur la productivité du secteur agricole à un moment où, dans le cadre du GATT devenu l’Organisation mondiale du commerce (OMC), l’agriculture européenne s’ouvrait à la concurrence internationale avec l’accord de Marrakech de 1994. Les règles en vigueur étaient diverses selon les pays membres alors que l’Union européenne réalisait l’achèvement de son marché intérieur unique. Il devenait dès lors capital de protéger les producteurs européens contre les tentatives d’exploitation par la concurrence internationale de la réputation de leurs produits. La mondialisation des échanges internationaux et le développement d’un marché mondial intégré rendaient nécessaire de faire reconnaître et protéger les différences des produits européens.

La première réglementation communautaire de qualité a concerné les boissons alcoolisées avec la réforme de l’OCM vitivinicole du 16 mars 1987 et l’adoption de dispositions particulières relatives aux vins de qualité produits dans des régions déterminées. Trois règlements de 1991 et 1992 portant respectivement sur l’agriculture biologique, les appellations d’origine protégée et les indications géographiques protégées ont, par la suite, complété l’ossature du droit alimentaire communautaire. Cette réglementation communautaire était d’ailleurs largement inspirée du système français dont les premières appellations datent de 1905(15).

En annonçant le contenu de la réforme de la PAC de juin 2003, le texte de la présidence du Conseil indiquait qu’« avec cette réforme, nous apportons une réponse aux attentes des citoyens en ce qui concerne l’offre d’aliments sains et de meilleure qualité, la protection de l’environnement et du bien-être animal, le maintien de conditions de vie naturelles et de l’entretien de l’espace rural ».

En application de cette réforme :

– l’accent a été mis sur le contenu du deuxième pilier (développement rural) qui a vu le champ de ses instruments étendu. Six catégories sont introduites ou améliorées(16). La première des mesures concernait l’amélioration de la qualité alimentaire qui ne bénéficiait jusqu’alors d’aucun régime d’aides spécifiques. Les agriculteurs participant à des programmes reconnus d’amélioration de la qualité des produits et des processus de production, sous réserve de garanties données aux consommateurs, peuvent à partir de cette date recevoir une aide « qualité »(17) et les actions d’information et de promotion réalisées par les groupements de producteurs peuvent être financées jusqu’à 70 % des coûts éligibles.

– la réglementation a été adaptée afin de tenir compte de l’acquis communautaire, des nécessaires adaptations et des impératifs de conformité aux règles de l’OMC (18). Les règlements no 509/2006 et 510/2006 du 30 mars 2006 relatifs aux spécialités traditionnelles garanties et à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires ont permis à l’Union de disposer de plusieurs systèmes de qualité. Par ailleurs, un règlement no 834/2007 du 28 juin 2007 est destiné à stimuler le développement de l’agriculture biologique.

Dans le bilan de santé de la PAC à la fin 2008, la qualité a été un axe réaffirmé, notamment dans les dispositions relatives à la réallocation des aides. L’article 68 du règlement (CE) no 73/2009 du 19 janvier 2009(19) autorise les pays à prélever 10 % de leurs aides directes du premier pilier pour les réaffecter sur 5 objectifs dont le premier est « l’environnement, la qualité et la commercialisation des produits ».

2. Un système complexe de valorisation des produits

La politique de qualité est bâtie autour de différents systèmes de certification des produits qui sont inégalement utilisés par les Etats membres.

Cette certification porte sur des normes de base mais peut également servir à indiquer des qualités conférant une valeur ajoutée au produit par rapport à ces normes de base, qu’il s’agisse de propriétés du produit ou de caractéristiques de production. Celles-ci sont généralement définies dans un cahier des charges détaillé dont le respect fait l’objet de contrôles périodiques réalisés par un organisme de certification. Il existe différentes démarches de qualité caractérisées par une gradation des degrés d’exigence (voir schéma infra).

La mise en œuvre des systèmes de qualité de l’Union européenne relève de la compétence des autorités des Etats membres qui agissent dans le cadre de la réglementation adoptée au niveau communautaire. Les Etats membres sont tenus de mettre en place les organes de contrôle nécessaires au respect de la réglementation.

Différents types d’identification –européens et nationaux– coexistent et il est souvent difficile d’effectuer une distinction claire entre les dispositifs officiels et les marques, ce qui nuit à la lisibilité pour le consommateur et peut indirectement porter préjudice à la qualité des produits. On note finalement peu d’identifications officielles communautaires, sauf pour les appellations d’origine protégée (AOP), les indications géographiques protégées (IGP) et les spécialités traditionnelles garanties (STG).

a) Normes de commercialisation, systèmes de certification et mentions valorisantes

– Les aliments produits dans l’Union européenne doivent respecter une série de règles en matière de production dont le but est de garantir que les produits commercialisés répondent non seulement aux normes d’hygiène et de sécurité, mais intègrent un certain nombre de préoccupations en matière d’environnement, d’éthique, de protection sociale… Les normes de commercialisation européennes(20) remplacent les diverses normes nationales et ont pour objectif d’aider les agriculteurs à proposer des produits de qualité conformes aux attentes des consommateurs. Elles prennent la forme de règlements sur la base du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et portent essentiellement sur la qualité, le classement, le stockage, le transport, la présentation, l’origine et l’étiquetage des produits. Ces normes de commercialisation font partie du droit communautaire et sont gérées par la Commission européenne.

– Au-delà de ces normes de commercialisation que l’on pourrait qualifier de « standard », de nombreux Etats membres se sont engagés dans des démarches de valorisation facultatives pour les produits de qualité supérieure. Pour certains produits, il existe une réglementation européenne, par exemple, en matière de viande de volailles : le règlement (CE) no 543/2008 relatif aux normes de commercialisation pour la viande de volaille encadre la notion de « fermier ». Mais la plupart des mentions valorisantes facultatives sont mises en œuvre par les Etats membres en application du principe de subsidiarité : elles sont autorisées à condition de ne pas constituer une entrave au principe de la libre circulation des marchandises au sein de l’Union(21).

– Enfin, les démarches de certification de la conformité des produits (CCP) attestent qu’une denrée alimentaire est conforme à des règles spécifiques et des caractéristiques préalablement fixées. La certification repose sur des critères très variables d’un produit à l’autre et souvent limités à un des aspects de la production. Il peut s’agir de l’alimentation des animaux d’élevage, des races utilisées, de la durée d’élevage, de l’origine du produit(22). Les caractéristiques certifiées peuvent être relatives à la composition du produit, à ses caractéristiques organiques ou chimiques, ou à certaines règles de fabrication. Il s’agit d’une logique particulière s’inscrivant dans une démarche différente de celles des signes d’identification de la qualité et de l’origine. En effet, si elles permettent d’augmenter la confiance et la sécurisation des échanges, elles ne peuvent pas se positionner sur le créneau des indications géographiques.

Cette certification est faite par des organismes certificateurs nationaux accrédités par un organisme d’accréditation national signataire de l’accord multilatéral pris dans le cadre de la coordination européenne des organismes d’accréditation.

Le dispositif français des signes de qualité

L’exemple français a largement inspiré la réglementation communautaire. Les labels agricoles existent depuis 1905 et ont été formalisés en 1960 par la loi no 60-808 du 5 août 1960 d’orientation agricole afin de défendre et développer les produits agroalimentaires de qualité au moment de l’industrialisation de l’agriculture française.

Le dispositif français des signes de qualité a été revu par l’ordonnance no 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer. Trois catégories de signes d’identification coexistent : signes d’identification de la qualité et de l’origine, les mentions valorisantes et les démarches de certification de la conformité des produits.

Les signes d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO) sont des signes liés soit à la tradition (STG) ou à l’origine (AOC-AOP), soit à une qualité supérieure (labels rouges), soit une qualité environnementale (agriculture biologique). Ces SIQO bénéficient de logos officiels nationaux ou communautaires pour les identifier, attribués par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), relayé par les organismes de défense et de gestion (ODG) représentant la filière collective(23).

Un premier label rouge a été obtenu en 1965 par les volailles du Périgord et des Landes. Ce signe s’est ensuite étendu à d’autres produits alimentaires (miel, plantes aromatiques, fruits et légumes…) mais aussi pour d’autres produits agricoles non alimentaires non transformés (fleurs). On compte en France plus de 500(24cahiers des charges enregistrés en label rouge.

D’autres mentions valorisantes sont utilisées comme dénomination « montagne », « produit pays », « produit fermier ». Ces mentions obéissent à des règles d’obtention plus ou moins strictes selon les cas. Ainsi, la dénomination « montagne » est une dénomination qui vise à assurer que l’ensemble des étapes d’élaboration d’un produit est bien situé en zone de montagne(25). Un arrêté du préfet de région pris après avis de la commission régionale donne droit à l’utilisation de terme sur les étiquettes. La même procédure est applicable pour la dénomination « pays » réservée aux denrées alimentaires et aux produits agricoles transformés dont toutes les opérations sont réalisées dans un département d’outre-mer. Les mention « fermier », « à la ferme », « produits de la ferme » ne sont pas définies de manière générale mais par catégorie de produits. Les articles D. 641–57 -1 à 5 du code rural définissent les conditions de production des produits fermiers. Une déclaration auprès du préfet doit être faite et il revient aux associations de producteurs de contrôler l’utilisation de cette dénomination.

Les déclarations d’engagement dans une démarche de certification sont enregistrées auprès du ministère chargé de l’agriculture, l’organisme d’accréditation étant le Comité français d’accréditation (COFRAC). Contrairement au Label Rouge, il n'existait pas de logo officiel pour identifier les produits certifiés CCP, mais seulement un logo privé. Depuis le 1er janvier 2009, le logo « Produit Certifié », géré par l'ADCCPA (Association pour le développement de la certification de conformité de produit agroalimentaire), est approuvé par les pouvoirs publics comme le logo unique de la certification de conformité de produit.

b) Systèmes de qualité spécifiques liés au terroir ou à un mode de production

Trois catégories de dénominations de produits et une réglementation spécifique aux produits de l’agriculture biologique coexistent, caractérisées par des cahiers des charges rigoureux dont la vocation est de procurer un maximum de garantie pour le consommateur.

Les dénominations de produits peuvent être liées à un territoire ou s’appuyer sur une méthode de production particulière. Les produits caractérisés par un lien territorial peuvent recevoir le label AOP (appellation d’origine protégée) ou IGP (indication géographique protégée). Les produits liés à une méthode particulière de production peuvent bénéficier du logo STG (spécialité traditionnelle garantie). Alors que les AOP et IGP impliquent l’existence d’un lien précis avec une zone géographique déterminée, les STG ne se réfèrent pas à l’origine géographique d’un produit mais ont pour but de souligner son caractère traditionnel du point de vue de sa composition ou de la méthode de production utilisée.

La principale différence entre les AOP et les IGP réside dans le degré de lien entre le produit et la zone géographique. Les produits AOP doivent remplir deux conditions : présenter des caractéristiques découlant d’éléments particuliers de la zone géographique d’origine, comme les matières premières locales, le climat ou la qualité des sols, et être produits et transformés sur place. Pour les IGP, il suffit que l’une des étapes de la production se déroule dans la zone géographique concernée.

Le bénéfice des dénominations protégées est obtenu après une demande d’enregistrement par les producteurs, avec l’appui d’ un cahier des charges. La demande d’enregistrement est adressée à l’Etat membre compétent qui l’examine et communique sa décision à la Commission en vue d’une décision définitive sur la dénomination. Le déclenchement d’une procédure d’opposition des Etats membres, des pays tiers, d’association de défense des consommateurs ou de milieux économiques intéressés est possible. La mise en œuvre du système est de la compétence des Etats membres qui sont tenus de prévoir les organes de contrôle nécessaires afin d’assurer le respect de la réglementation.

Les produits biologiques font l’objet du règlement no 834 /2007 du 28 juin 2007. L’agriculture biologique est définie comme une agriculture basée sur des restrictions de fertilisants et de pesticides. Le règlement définit les objectifs, les principes et les règles applicables à cette agriculture. Il prévoit que les produits OGM sont strictement interdits dans ce mode de production avec un seuil général de présence accidentelle de 0,9 %(26). Seuls les aliments contenant au moins 95 % d’ingrédients biologiques peuvent être étiquetés comme produits biologiques. Le logo de l’Union européenne, obligatoire à partir de juillet 2010, pourra être accompagné de logos nationaux ou privés dans le but de promouvoir un concept commun de mode de production biologique et les normes plus contraignantes sont possibles. Le lieu où les produits ont été cultivés doit être obligatoirement mentionné.

Exemples d’appellations d’origine protégée et d’indications géographiques protégées (hors vins et spiritueux)

Pays

Produit

Belgique

Fromage de Herve AOP

Jambon d’Ardenne IGP

Allemagne

Lübecker Marzipan IGP

Spreewälder Gurken IGP

Grèce

Feta AOP

Sitia Lasithi Kritis AOP

Espagne

Jamón de Teruel AOP

Turrón de Alicante/ Jijona IGP

France

Riz de Camargue IGP

Volaille de Bresse AOP

Hongrie

Szegedi Szalámi AOP

Szegedi Fűszerpaprika AOP1

Italie

Toscano IGP

Mela Val di Non AOP

Suède

Svecia IGP

Danemark

Esrom IGP

Royaume-Uni

Jersey Royal Potatoes AOP

Whitstable Oysters IGP

3. Un système inégalement utilisé et perçu

Globalement, la réglementation communautaire sur les AOP et les IGP a connu un succès et à ce jour, 906 dénominations- hors vins et spiritueux- ont été enregistrées. En revanche, seulement 20 dénominations en STG sont dénombrées.

Les dénominations concernant les vins sont plus nombreuses : 1334 AOP et 587 IGP.

Derrière ces chiffres, on constate des disparités importantes, liées à de nombreux facteurs dont sans doute la montée en régime du système.

a) Par les Etats membres

Les principaux pays qui ont, en valeur, le plus de productions sous indication d’origine pour les denrées alimentaires sont l’Italie (un tiers), l’Allemagne (25 %), la France (17 %) et le Royaume Uni (8 %).

S’agissant des vins, la France est très largement représentée avec 450 AOP et 160 IGP.

Classement des Etats membres par AOP, IGP ET STG enregistrées
(Denrées alimentaires hors vins et spiritueux)

1

Italie (202)

2

France (171)

3

Espagne (130)

4

Portugal (116)

5

Grèce (86)

6

Allemagne (68)

9

Royaume-Uni (34)

10

République tchèque (24)

11

Pologne (14)

12

Autriche (13)

13

Belgique (12)

14

Pays-Bas (7)

15

Finlande (6)

16

Luxembourg (4)

17

Slovaquie (4)

18

Suède (4)

19

Irlande (4)

20

Hongrie (4)

21

Slovénie (4)

Source : Commission européenne.

Vins avec appellation d’origine protegee (aop)

Source : Commission européenne (base Bacchus).

Vins avec indication geographique protegee (IGP)

Source : Commission européenne (base Bacchus).

Comment expliquer ces différences ?

Les pays les plus représentés sont des pays agricoles qui se sont, historiquement, lancés les plus tôt dans une politique de qualité.

De nombreux Etats membres ont moins de cinq protections enregistrées pour des raisons diverses. Certains sont de petits pays(27). D’autres, pour des raisons climatiques, ne sont pas de grands pays agricoles(28). Parmi les nouveaux Etats membres, certains pays comme la Hongrie, la Roumanie et la Bulgarie pourraient être de futurs demandeurs de protection du fait de l’importance du produit intérieur brut (PIB) agricole dans leur PIB national(29), et également par l’attachement à leurs spécialités que l’on peut expliquer par des raisons historiques liées aux déplacements de leurs populations.

Il est à noter que deux pays que l’on peut plutôt qualifier de pays du Nord du point de vue agricole, l’Allemagne et le Royaume-Uni, commencent à bien s’approprier le système.

Cette disparité peut également s’expliquer par la lenteur administrative communautaire qui retarde certains enregistrements(30). Sans esprit de polémique, on peut noter que 26 dossiers français(31) ont été reçus par la Commission et sont toujours en attente depuis 2006 et plus. 18 produits ont terminé la période de six mois qui détermine le délai d’opposition et, malgré tout, n’ont pas encore été enregistrés. Pour l’Italie, sur les 30 produits en publication, seul l’un date de 2008. Il apparaît que les dossiers italiens avancent plus vite que les dossiers français : un tiers des produits italiens reçus sont en publication alors que seuls 12 % des produits français en sont à ce stade de la procédure (voir tableau infra sur l’état des dénominations protégées). On peut également citer l’exemple du gruyère français dont la dénomination AOP est encore en instance d’évaluation, la Commission européenne ayant souhaité que ce fromage soit classé en IGP alors qu’il remplit les conditions de cahiers des charges(32).

Alors que la réglementation de l’OMC avait contraint l’Union européenne à modifier sa réglementation afin de la rendre conforme aux mesures de réciprocité, peu de pays tiers participent au système. Seulement 16 produits(33) en provenance des pays tiers ont demandé la protection européenne dont 10 en provenance de Chine. Plusieurs faits peuvent expliquer le peu d’engouement de ces pays: le marché européen ne les intéresse pas, les cahiers des charges ne correspondent pas aux exigences de la réglementation, les groupements demandeurs comportent des opposants internes ou externes à cet enregistrement…

Etat des dénominations protégées PAR ETATS MEMBRES au 19/03/2010

(denrées alimentaires hors vins et spiritueux)

Etats

En attente (nouveaux cahiers des charges ou modifications)

Publiées

JOUE

Enregistrées

AOP

IGP

STG

Autriche

1

0

13

8

5

0

Allemagne

24

2

68

30

38

0

Belgique

0

1

12

3

4

5

Bulgarie

1

0

0

0

0

0

Chypre

1

1

1

0

1

0

Danemark

3

0

3

0

3

0

Espagne

49

10

130

70

57

3

Estonie

0

0

0

0

0

0

Finlande

3

1

6

2

1

3

France

61

12

171

79

92

0

Grèce

11

0

86

63

23

0

Hongrie

8

2

4

3

1

0

Irlande

1

0

4

1

3

0

Italie

102

32

202

125

75

2

Lettonie

0

0

0

0

0

0

Lituanie

2

1

0

0

0

1

Luxembourg

0

0

4

2

2

0

Malte

0

0

0

0

0

0

Pays-Bas

2

2

7

5

1

1

Pologne

16

6

14

4

4

6

Portugal

3

0

116

58

58

 

République tchèque

1

7

24

7

17

0

Roumanie

1

0

0

0

0

0

Royaume-Uni

14

2

34

15

18

1

Slovaquie

10

0

4

0

4

0

Slovénie

14

4

4

1

0

3

Suède

3

0

4

0

2

2

Total Etats membres

331

86

911

473

407

27

Source : Base DOOR (Commission européenne).

b) Par les filières agricoles

Six secteurs agricoles, hors vins et spiritueux, sont principalement représentés dans les dénominations d’origine.

Les fruits et légumes représentent le plus grand nombre de protections : 119 IGP et 87 AOP. Dans ce secteur, l’Italie est première, l’Espagne, deuxième et la France et la Grèce, troisièmes. Tous ces pays sont des pays du Sud où le climat favorise ce type de secteur.

Les fromages sont le deuxième secteur représenté avec 171 produits, dont 155 AOP. Dans ce secteur, l’ancienneté, le lien du terroir, la renommée et le savoir-faire sont très présents. La France est première dans ce secteur avec 42 AOP et 4 IGP ; l’Italie est deuxième avec 36 AOP ; suivent l’Espagne (22 AOP et 1 IGP), la Grèce (20 AOP), le Royaume-Uni (9 AOP et 3 IGP), le Portugal (10 AOP et 1 IGP) et l’Allemagne (4 AOP). Les sept premiers producteurs d’indications géographiques comptabilisent 88 % des fromages enregistrés dans l’Union.

Les viandes et volailles constituent le troisième secteur (112 produits enregistrés), la France ayant également le plus grand nombre de dénominations enregistrées (53)(34), suivie par le Portugal (27) et le Royaume-Uni (9).

Les 7 principaux Etats membres dans les 6 principaux secteurs de dénominations protégées

Etats

Viandes-volailles

Fromages

Fruits et légumes

Produits de la mer

Huiles et M.G.

Charcuteries

et salaisons

Allemagne

3

4

7

3

1

8

Espagne

14

24

37

3

22

11

France

53

45

38

3

9

4

Grèce

0

20

33

1

26

0

Italie

3

37

74

2

39

32

Portugal

27

12

24

0

6

36

Royaume-Uni

9

12

1

5

0

1

Total des 7 Etats membres

109

154

214

17

103

92

Total tous Etats membres

112

180

229

20

108

102

Source : Base DOOR de la Commission européenne.

Ces disparités selon les productions s’expliquent naturellement pour des raisons liées aux pratiques agricoles mais aussi, dans la mesure où le coût de production est plus élevé, par le niveau d’encouragement administratif et de soutien financier accordé aux demandeurs. En effet, il n’existe pas de système de mise en œuvre homogène et de grandes différences se rencontrent dans l’institution responsable de la promotion et de l’administration du système, du délai prévu pour les oppositions au niveau national et du contrôle de la conformité.

c) Par les consommateurs

Le degré de reconnaissance des logos européens est relativement faible, même dans les Etats membres où les appellations sont nombreuses. Une étude pour la Commission européenne(35) indique que seulement 8 % des consommateurs reconnaissent le logo AOP/IGP.

Ce chiffre est sans doute pessimiste. Une étude d’impact réalisée en France par l’IPSOS sur la campagne de promotion des AOP laitières en 2007 et 2008, cofinancée par l’Union européenne, montre que le logo AOP est reconnu par 18 % des consommateurs. En France, le label rouge a un taux de reconnaissance comme garantie officielle de 97 % et une attribution du critère « qualité supérieure » à 72 %(36).

Afin d’améliorer la visibilité des logos, le règlement no 628/2008 du 2 juillet 2008 a assuré une différenciation des logos AOP/IGP par la couleur. Le nouveau logo communautaire sera obligatoire à partir du 1er mai 2009, avec une tolérance de l’utilisation de l’ancien logo jusqu’au 10 mai 2010. La France a appuyé cette volonté d’amélioration de la lisibilité en abrogeant l’obligation d’apposition du logo spécifique aux appellations d’origine fromagères(37).

II. RENDRE LA POLITIQUE DE QUALITE PLUS LISIBLE ET PLUS COHERENTE TOUT EN RESPECTANT LES EQUILIBRES DES SECTEURS

Compte tenu de ces impératifs – d’ordre économique, sociétal et territorial –, la Commission européenne a mis l’accent dans sa communication de mai 2009 sur une « approche cohérente permettant de créer des synergies entre les différents outils ». Ses propositions sont à la fois tournées vers les consommateurs qui ne s’y retrouvent pas dans un maquis de diverses appellations et les producteurs qui espèrent trouver des avantages dans les démarches de qualité forcément coûteuses.

L’objectif affiché de la Commission- que l’on ne peut que partager- est de promouvoir la qualité comme un des principaux outils de la compétitivité de la politique agricole commune. Son idée de base est de simplifier, quel que soit le secteur. Cependant on peut craindre que ce document horizontal concernant l’ensemble des produits agricoles ne prenne pas en compte les spécificités de certains secteurs et qu’au motif de simplification, il aboutisse à déréguler et remettre en cause un système qui ne demande qu’à être plus efficace.

Surtout, la Commission passe sous silence un aspect essentiel à la qualité, la nécessaire maîtrise des quantités.

A. Elaborer des normes de commercialisation plus simples et plus soucieuses de l’intérêt des consommateurs

La Commission constate que les diverses normes font souvent l’objet de critiques pour leur caractère trop détaillé, trop contraignant et reposant sur des règles obligatoires, là où des règles appliquées sur la base du volontariat suffiraient. Elle décline donc le principe de simplification en matière de normes de commercialisation et de certification. Si certaines propositions de la Commission peuvent être retenues, la prudence s’impose pour d’autres.

1. L’élaboration et le contrôle communautaire des normes de commercialisation

La plupart des normes de commercialisation définissent les produits agricoles ou alimentaires en établissant des règles communes claires pour leur description(38). Dans certains cas, comme pour les fruits ou légumes, ou la viande de volaille, les normes de commercialisation fixent également des exigences en matière de qualité dont le respect est une condition sine qua non de la vente au consommateur. Par ailleurs, dans certains secteurs, sont organisés des systèmes de classement obligatoires, introduits à l’origine pour des raisons de transparence du marché afin que les acheteurs puissent comparer les prix des produits en fonction de la catégorie. Ainsi les découpes de volailles sont classées en catégorie A ou B en fonction de critères de qualité(39). Les œufs doivent être rangés dans une catégorie de taille et classés selon la méthode d’élevage utilisée (« en cage », « au sol », « en plein air » ou « biologique »). De même, certains fruits et légumes doivent être classés en catégorie extra, I ou II.

Afin d’atténuer la tension sur les cours dans un contexte de hausse des prix des denrées alimentaires, la Commission européenne a, en 2008, pris l’initiative d’assouplir les normes de commercialisation des fruits et légumes relatives à la taille, à la forme ... Le règlement (CE) no 1221/2008 du 5 décembre 2008 portant modalités d’application de règlements européens abroge tous les règlements antérieurs fixant des normes de commercialisation pour les fruits et légumes auxquels sont applicables les normes de commercialisation générale. Seules sont conservées des normes spécifiques pour dix fruits et légumes(40).

La Commission propose de poursuivre ce mouvement de simplification et d’ajustement des normes, soit en simplifiant les procédures au sein de la Commission, soit en confiant cette tâche à d’autres organismes (autorégulation par la profession ou corégulation), soit en s’appuyant sur des normes internationales(41).

L’autorégulation consisterait à attribuer aux opérateurs la tâche d’établir les normes et d’en assurer le suivi. La Commission estime que ce système présenterait l’avantage d’être mis en œuvre par des acteurs au fait des réalités du marché. Dans un environnement de marché dynamique, de telles procédures d’établissement des normes pourraient être plus simples et permettre des ajustements plus rapides. Des exemples d’autorégulation existent dans le domaine de la pomme de terre ou des jus de fruits.

Dans le cadre de la corégulation, il s’agirait de confier la réalisation d’objectifs définis à des parties prenantes reconnues dans le domaine concerné. L’Union se concentrerait sur les aspects essentiels du dispositif juridique des normes de commercialisation tandis que les représentants des parties concernées seraient chargés de compléter la législation en définissant les données et éléments techniques.

Enfin, il pourrait être envisagé de ne faire référence qu’aux normes internationalement reconnues.

S’il est utile de procéder au réexamen, dans certains cas, des règles de commercialisation existantes, il apparaît indispensable de le faire dans le cadre du droit communautaire afin d’assurer le plus de transparence possible. Ainsi la suppression des normes de commercialisation pour les fruits et les légumes qui permettaient aux opérateurs de définir des paramètres homogènes risque d’entraîner le développement d’initiatives privées visant à établir de nouvelles normes , ce qui va à l’encontre du marché unique.

Les trois solutions envisagées présenteraient des inconvénients majeurs. L’autorégulation aboutirait inévitablement à une standardisation au détriment de la qualité, de la diversité et de l’intérêt public. Le principe d’une corégulation risque de favoriser les intérêts des opérateurs majoritaires et de ne pas prendre en compte l’avis des petits producteurs et des consommateurs. La seule référence aux normes internationales est une règle minimale qui ne peut satisfaire les exigences du consommateur et qui pourrait être utile seulement pour les échanges extracommunautaires, à la condition que cela n’entraîne pas l’abaissement du niveau d’exigences.

Il apparaît donc essentiel que la gestion et l’arbitrage des normes de commercialisation restent encadrés au niveau communautaire afin d’apporter une garantie d’indépendance. Un dispositif de normes obligatoires de commercialisation est un gage de loyauté des transactions commerciales et favorise la diversité des produits.

2. Des systèmes de certification plus cohérents n’entraînant pas de confusion pour le consommateur

Les systèmes de certification existant dans l’Union européenne portent à la fois sur le respect des normes obligatoires et sur des exigences supplémentaires concernant la protection de l’environnement, le bien-être des animaux, les qualités organoleptiques, le bien-être des travailleurs, le commerce équitable, les problèmes climatiques… La certification est bien adaptée pour répondre à des exigences sociétales particulières. Aussi, les systèmes privés et nationaux se sont ils multipliés au cours des dernières années, ce qui a suscité des inquiétudes concernant la transparence des exigences des systèmes, la crédibilité des allégations formulées et leurs effets possibles sur l’équité des relations commerciales.

La Commission propose donc d’élaborer des lignes directrices pour la conception des systèmes de certification qui doivent aller très significativement au-delà des seules prescriptions réglementaires.

Cette idée est à retenir dans la mesure où elle participe à l’objectif général de cohérence au profit du consommateur. Il faudrait veiller cependant à ce que cela ne complexifie pas le système et que, par ailleurs, cela ne se superpose pas avec les signes officiels de qualité. Un guide de lignes directrices pourrait prévoir des normes de reconnaissance mutuelle entre les Etats membres qui permettrait en outre de réduire la lourdeur des contrôles. Cette certification devrait au minimum être réalisée par des organismes certificateurs agrées au niveau communautaire et dans cette perspective, le recours au Comité européen de normalisation (CEN), entité privée regroupant les organismes nationaux de normalisation (pour la France, l’AFNOR – association française de normalisation), pourrait être plus fréquent.

La Commission propose l’utilisation accrue des « termes réservés »(42) développés en fonction de critères horizontaux de qualité (faible empreinte carbone, sauvegarde de la biodiversité, agriculture de montagne, bien-être animal, produit traditionnel, production intégrée…). S’il s’agit de favoriser les innovations, il ne faut toutefois pas noyer le consommateur sous les informations innombrables sur les produits qu’il achète.

Ainsi, deux questions ne doivent pas faire partie de la démarche de certification dans le cadre de la politique de qualité :

– l’extension de l’écolabel(43) aux produits agricoles transformés agricoles semble complexe et pourrait conduire à certaines incohérences dans la mesure où elle aboutirait à un mélange des genres. Elle serait difficilement compréhensible par les producteurs agricoles, la matière première agricole étant exclue des critères de ce label. Par ailleurs, une telle intégration des matières premières dans l’écolabel créerait un risque de confusion avec l’agriculture biologique ;

– de la même façon, les questions relatives au bien-être animal, qui résultent principalement de l’application de la réglementation, doivent être exclues d’une politique de qualité qui porte sur la qualité intrinsèques des produits, d’autant que des critères spécifiques en matière de bien-être animal sont d’ores et déjà inclus dans la réglementation relative à l’agriculture biologique.

Enfin, l’introduction d’un nouveau logo européen ou logo européen de qualité supérieure, envisagée par la Commission et préconisée par le Parlement européen comme moyen de valorisation des productions européennes, doit être évitée au risque de confusion. La réglementation communautaire garantit en effet au consommateur le respect de critères correspondant à un niveau de qualité « minimale »dont le respect relève de l’obligation (voir supra, les normes de commercialisation). Par défaut, le consommateur est en droit de considérer que ce niveau est atteint. Dès lors, la mise en place d’un identifiant sur l’origine communautaire qui se limiterait en fait à certifier le respect de la réglementation, présenterait, outre le risque de nivellement par le bas de la qualité, des inconvénients majeurs. Par sa redondance, elle participerait à une surcharge d’informations pour le consommateur ; par sa similitude avec les démarches volontaires de qualité, elle risquerait de l’induire en erreur sur la nature des efforts réalisés par les producteurs. Un tel dispositif supplémentaire pourrait en outre conduire à un alourdissement des coûts pour le producteur.

D’une manière générale, il faut éviter la mise en place de dispositifs susceptibles de porter atteinte à la lisibilité des signes officiels de qualité, d’introduire des risques de confusion pour le consommateur ou de complexifier pour les opérateurs les différents niveaux de certification.

3. Des mentions facultatives harmonisées

Des termes réservés facultatifs ont été mis en œuvre dans l’ensemble des secteurs, le plus souvent par des organismes privés, dans un cadre national. Certains peuvent avoir un contour incertain comme « traditionnel », « frais », « extra ». Le contenu peut être plus précis, comme dans le secteur viticole, les mentions de « crémant », « sec », « doux », du cépage ou du millésime(44).

L’enjeu est celui du maintien d’une concurrence loyale entre les opérateurs et une bonne information du consommateur. L’harmonisation de certaines mentions réservées facultatives apporterait davantage de clarté sur le marché communautaire. Cependant la définition communautaire de telles mentions devrait inclure des critères précis d’utilisation et correspondre à un usage répété sur une durée suffisamment longue sur les marchés et non à de simples effets de mode dont le consommateur pourrait se lasser.

Ainsi la notion de produits de montagne n’a pas été étendue au niveau européen. Elle existe en France depuis 1985(45), pratiquée dans les secteurs du lait, de la viande et des eaux minérales. Dans un contexte de difficultés du secteur laitier notamment, l’introduction d’une telle dénomination serait utile dans la mesure où, en montagne, les coûts de production de lait sont de 4 à 15 % plus élevés pour les éleveurs(46). Les deux tiers de la production sont écoulés sur le marché ordinaire et un tiers est valorisé sous forme d’appellations. La fin programmée des quotas laitiers en 2015, qui garantissent en France, un lien de la production avec le territoire, nécessite que ce lien soit rappelé de manière explicite : la création d’une appellation montagne pourrait y participer.

Des conditions spécifiques pour l’obtention de ce label devraient être définies : provenance de la matière première d’une zone de montagne, réalisation de la transformation en zone de montagne, prise en compte de préoccupations d’environnement durable, du maintien de la biodiversité et du patrimoine des zones de montagne, garantie de la transparence des informations au consommateur.

4.  La mention du lieu de production sous certaines conditions

Actuellement, le marquage de l’origine des produits par nom complet du pays est obligatoire pour les seuls produits agricoles non transformés, une telle obligation n’existant pas pour les produits agricoles transformés.

Dans le contexte actuel d’un marché mondialisé, le consommateur recherche de plus en plus la proximité. La mention du lieu de production correspond à une attente des consommateurs et pourrait favoriser le choix de produits européens.

En tout état de cause, l’origine ne doit pas être simplement le dernier lieu de transformation, ce qui pourrait induire le consommateur en erreur. Il lui importe en fait de connaître l’origine de la matière agricole principale. Dans la mesure où les ingrédients présents dans un produit transformé sont souvent multiples, la mise en œuvre risque d’être complexe pour les producteurs et les fabricants.

Il conviendrait donc de mener une expertise approfondie afin de considérer les avantages réels qui pourraient en découler et de voir comment la mise en place d’une telle mesure pourrait prendre en considération les contraintes pratiques spécifiques propres à certains produits alimentaires. Si l’on opte pour une démarche volontaire, il faudrait veiller, sur l’étiquetage, à ce que le consommateur soit correctement informé. Ainsi la mention de l’origine ou de la provenance devrait s’accompagner de l’indication d’origine du ou des ingrédients primaires.

En tout état de cause, il sera indispensable d’assurer une cohérence avec les dispositions prévues dans le projet de règlement communautaire relatif à l’information des consommateurs afin que soient clarifiées les définitions des termes comme « lieu de production », « origine », « provenance » mais aussi les notions de « produit agricole brut » ou de « matière première ».

5. Un label biologique crédible

Depuis 1991, l’Union européenne dispose de normes en matière d’agriculture biologique applicables aux producteurs et transformateurs européens ainsi qu’aux exportateurs des pays tiers. Les règles européennes sont très proches de celles établies dans la norme internationale adoptée par le codex alimentarius(47). Les objectifs stratégiques pour ce secteur ont été définis en juin 2004 dans le « plan d’action européen en matière d’action européen en matière d’alimentation et d’agriculture biologique »(48).

Une des faiblesses du marché européen de l’alimentation biologique est sa fragmentation selon des lignes de partage nationales. En effet, la réglementation communautaire prévoyait l’application du principe de « subsidiarité positive », c'est-à-dire la possibilité d’avoir des cahiers des charges plus rigoureux que le règlement européen. C’est le cas de la France et le label « AB français » a une réelle spécificité.

Le règlement no 834 /2007 du 28 juin 2007 a supprimé la « subsidiarité positive », la remplaçant par la notion de « flexibilité », qui permet d’adapter les normes en fonction de contraintes locales.

L’enjeu est l’harmonisation du marché communautaire dans des conditions respectueuses des intérêts des consommateurs. L’institution du nouveau logo européen qui, à compter du 1er juillet 2010, devra obligatoirement figurer sur tous les produits biologiques préemballés élaborés dans les Etats membres de l’Union et répondant aux normes requises devrait y participer. Pour les produits importés, il sera facultatif. L’apposition, à côté du logo de l’Union européenne, d’autres logos à caractère privé, régional ou national sera autorisée.

Le travail d’harmonisation de l’agriculture biologique se poursuit actuellement sur des secteurs précis comme l’aquaculture ou la vinification. Ainsi, jusqu’à présent, la notion de vin biologique était peu encadrée, cette dénomination signifiant seulement que le raisin était certifié biologique. Dans une nouvelle réglementation, il ne s’agira plus seulement de se conformer à des exigences sur les matières premières mais également de faire appel à des méthodes de traitement(49), de fabrication et d’étiquetage répondant aux critères de l’agriculture biologique.

B. Renforcer le lien entre la politique de qualité et le développement durable des territoires

L’ancrage des indications géographiques dans l’économie des territoires est un des éléments essentiels de la politique de qualité. Sur ce point aussi, la Commission européenne souhaite simplifier le système d’enregistrement des produits sous signes. Il s’agit de savoir où placer le curseur de cette simplification afin de prendre en compte la diversité des situations.

1. Améliorer les conditions d’enregistrement des signes de qualité

La Commission s’interroge sur la nécessité de prévoir des critères supplémentaires d’enregistrement des AOP/IGP pour en réduire le nombre.

Il n’apparaît pas utile de restreindre les demandes d’enregistrement d’indications géographiques car un nombre important d’AOP /IGP est un résultat positif dans la mesure où il favorise la notoriété de ces signes auprès des consommateurs européens. Les protections doivent être accessibles à toute filière de production, quelque soit la taille et son niveau de commercialisation (locale, nationale, européenne ou internationale). La protection est utile quel que soit le marché et une petite production locale peut, grâce à une protection, se voir ouvrir ultérieurement de nouveaux marchés.

La nouvelle réglementation apparaît relativement claire. En revanche, il est vrai que les délais d’instruction et d’enregistrement sont encore trop longs même s’ils ont été réduits depuis 2006. Au-delà de quelques années, il y a un risque de laisser passer des occasions de développer des marchés. Aussi ne peut on que souscrire à la proposition de la Commission de limiter les délais en achevant son analyse et en prenant une décision finale plus rapidement, notamment par un refus à un stade plus précoce de demandes manifestement irrecevables.

La transparence devrait également être améliorée dans les décisions de la Commission. On a vu ainsi dans le dossier de l’attribution de l’AOP au gruyère français que les critères d’évaluation n’étaient pas toujours appliqués en toute transparence et que les services de la Commission européenne les appliquait avec une large marge d’appréciation.

Par ailleurs, aucun signe de qualité ou démarche de certification n’est légitime sans un plan de contrôle sérieux. Une harmonisation européenne des pratiques de contrôle par les organismes de contrôle est nécessaire afin de réduire les distorsions de concurrence entre les producteurs des différents Etats membres et d’apporter plus de transparence aux consommateurs.

Les conditions d’enregistrement doivent se faire en cohérence avec la réforme sur l’étiquetage actuellement en cours au niveau communautaire. La crise dans le secteur laitier a montré l’importance de disposer des normes claires de commercialisation, d’étiquetage et de qualité. Dans la mesure où les producteurs sont tenus de respecter des normes très exigeantes, les produits doivent être clairement étiquetés afin que les consommateurs puissent faire des choix éclairés lors de leurs achats.

2. Conserver des systèmes d’enregistrement et des instruments différenciés

La réglementation communautaire prévoit trois systèmes d’enregistrement- un pour les vins, un pour les spiritueux et un pour les produits agricoles et denrées alimentaires – et deux instruments, l’appellation d’origine protégée (AOP) et l’indication géographique protégée (IGP).

Dans un souci de simplifier, clarifier et rationaliser, la Commission envisage de fusionner les trois systèmes actuels en une structure réglementaire unique, tout en préservant les spécificités de chaque système. D’autres mesures de simplification sont envisagées : la fusion des deux instruments existants – AOP et IGP –, la suppression de la dénomination « spécialité traditionnelle garantie » et l’instauration de différents niveaux de protection à l’échelle de l’Union européenne.

Sur ces tous ces points, le rapporteur émet les plus fortes réserves.

a) Ne pas fusionner les trois systèmes d’enregistrement

Les trois systèmes d’enregistrement ont été conçus pour tenir compte du caractère propre des différents produits. La fusion d’un document horizontal relatif aux denrées agricoles avec des documents verticaux relatifs aux vins et aux spiritueux aurait de multiples inconvénients. La Commission reconnaissant elle-même la nécessité de préserver les particularités de chaque système, pourquoi dès lors les fusionner, sauf à gommer ces spécificités et à aboutir à moyen terme, à une uniformisation au détriment de la qualité ?

La particularité la plus notable des trois systèmes tient à l’origine de la matière première. Les autres portent sur les points suivants :

– la législation sur le vin s’applique à un seul produit et est donc plus particulière dans ses critères que la législation horizontale. Par exemple, le document unique pour le vin doit spécifier les pratiques œnologiques, les variétés des raisins à cuve, le rendement maximum par surface et les mentions traditionnelles utilisées. Le document unique dans la législation horizontale sur les denrées alimentaires comprend une référence générale aux matières premières ;

– la définition du produit AOP et IGP et le lien avec la zone géographique sont plus stricts dans la législation sur le vin. La définition des AOP et IGP inclut l’origine du raisin et de la production. Dans la législation horizontale, il est fait référence à la production. Alors que la législation relative au vin parle d’une zone géographique, la législation horizontale se réfère à une région, un lieu spécifique ou à un pays. S’agissant du vin, la production d’une IGP doit se faire dans cette zone géographique, 85 % des raisins devant provenir de cette zone et les 15 % pour les IGP du même Etat membre ou du même pays tiers. Selon la législation horizontale, un seul des procédés – production, transformation ou préparation – doit avoir lieu dans la zone géographique ;

– les cahiers des charges diffèrent. Pour le vin, ils doivent comprendre les principales caractéristiques analytiques et organoleptiques, les pratiques œnologiques, les rendements maxima, les variétés de raisins…La législation horizontale inclut une description du produit, la méthode d’obtention, les matières premières utilisées ;

– les demandeurs sont différents. Dans la législation sur le vin, les demandes sont limitées aux groupes de producteurs intéressés tandis que dans la législation horizontale, elles peuvent émaner soit de groupes de producteurs, soit de groupes de transformateurs ;

– le délai pour formuler des oppositions pour le vin est fixé à deux mois alors qu’il est de six mois dans les denrées alimentaires ;

– le règlement spiritueux ne fait quant à lui aucune distinction entre les notions d’AOP et d’IGP.

b) Maintenir la distinction entre les deux instruments AOP et IGP

Alors qu’elle reconnaît que « les systèmes d’indications géographiques de l’Union sont fondamentalement bien conçus », la Commission envisage paradoxalement la fusion entre AOP et IGP pour n’en faire qu’un.

Ce dont les produits européens ont besoin, c’est un système plus cohérent mettant en valeur les spécificités des deux concepts. Regrouper ces deux outils reviendrait à nier les différences profondes entre les deux systèmes, différences qui reposent sur l’origine et les conditions de production de la matière première, exprimant pour les AOP un lien fort au terroir. En fusionnant les deux définitions, on ne pourra retenir qu’une définition proche de celle des actuelles IGP, c'est-à-dire moins disante en termes de lien à l’origine. L’uniformisation serait fatale à la spécificité de chaque produit et les producteurs AOP ne comprendraient pas que l’on brade ainsi leur patrimoine.

Cela reviendrait en fait à faire disparaître les notions d’AOP et d’IGP en tant que signes européens officiels de qualité et ne plus retenir que le concept d’indication géographique, au sens de l’OMC. La Commission s’engagerait ainsi dans la seule voie de la protection des noms géographiques qui est, certes, une politique essentielle mais insuffisante au regard des attentes que la politique des AOP/IGP a fait naître au sein des Etats membres depuis 1992.

Il serait enfin quelque peu surprenant d’avoir fait entrer les vins dans la catégorie des AOP/IGP au 1er août 2009 et de faire disparaître le système après seulement un an d’application.

c) Ne pas instaurer des régimes de protection différenciée selon les indications géographiques

Constatant que tous les produits à indication géographique n’ont pas vocation à s’exporter n’ayant qu’une audience régionale, la Commission propose d’étudier la possibilité d’une protection différenciée au niveau communautaire et que le niveau d’enregistrement soit fonction du poids économique de l’indication.

La création d’un tel système à deux vitesses entre indications géographiques à fort potentiel commercial et « petites » indications géographiques ne semble pas adaptée. En effet, la définition commune de l’indication géographique dans les accords de l’OMC impose à l’Union européenne de mettre en œuvre une protection minimale commune à tous les produits sous indication géographique. Toutes les IG ont vocation à être exportées. Un produit qui ne s’exporte pas à un moment de son histoire peut très bien avoir, par la suite, une notoriété qui dépasse les frontières nationales et européennes. Dès lors, il risque d’être usurpé hors du territoire national ou communautaire, si l’on considère le rôle économique croissant d’Internet.

En revanche, cela ne doit pas interdire à l’Union européenne d’avoir des priorités en termes de protection dans les négociations commerciales bilatérales ou multilatérales agricoles. Ainsi, la Commission européenne est fondée à rechercher en priorité la fin des usurpations de telle ou telle indication géographique pour autant qu’elle ne renonce pas au principe même de la protection de toutes les indications géographiques.

d) Conserver la dénomination de spécialité traditionnelle garantie

La notion de spécialité traditionnelle garantie (STG) correspond aux dénominations des produits agricoles ou denrées alimentaires fabriquées à partir de matières premières traditionnelles ou selon des méthodes traditionnelles ou dont la composition revêt un caractère traditionnel. Cette mention ne fait pas référence à une origine géographique.

A ce jour, seules 20 dénominations ont été enregistrées50 et 30 sont candidates à une telle appellation. Ainsi pour la France, aucune dénomination n’est encore enregistrée à ce titre et une seule – Moules de Bouchot – est en instance d’enregistrement.

La Commission considère que ce chiffre correspond à un échec de cet instrument, arguant de plus que les dénominations enregistrées et celles candidates n’ont pas une importance économique significative. Elle fait également valoir que dans la plupart des cas, l’enregistrement sert à mettre en évidence le caractère traditionnel du produit et que les produits traditionnels peuvent continuer à utiliser la dénomination sans en avoir le logo. Plus de deux tiers des demandes ont opté pour ce type de dénomination, à savoir l’enregistrement sans réservation du nom. L’autre possibilité consiste à demander l’enregistrement exclusif du nom, auquel cas, celui-ci ne peut être utilisé que pour décrire le produit conformément au cahier des charges, qu’il porte ou non le logo « STG ».

Considérant que les enregistrements comme STG ne servent pas à protéger une dénomination, la Commission propose en conséquence de supprimer les STG, en trouvant un autre moyen de les identifier, par le biais notamment de mentions valorisantes dans le cadre des normes de commercialisation (voir supra).

La dénomination STG a le mérite d’exister et peut répondre, demain, à des besoins spécifiques. En effet, un savoir faire ou une recette traditionnelle n’est pas toujours localisable. Tous les nouveaux Etats membres sont en faveur de ce signe. En effet, ce sont souvent des peuples qui ont été déplacés après la deuxième guerre mondiale et qui ont emporté, avec eux, leurs traditions. Il serait être lourd de conséquence qu’un produit traditionnel non protégé voit sa notoriété s’effondrer s’il déçoit le consommateur qui pourrait trouver, sous l’appellation « traditionnelle », des produits de qualité disparate. En France, il est vrai que la culture de « recettes » n’est pas très ancrée mais les professionnels travaillent sur ce dossier (emmenthal, bœuf à l’herbe…) qui pourrait être un mode de revalorisation de certaines productions.

De plus, la STG est le seul outil qui peut permettre des projets inter Etats membres. C’est pourquoi, il apparaît nécessaire de maintenir ce système en simplifiant les conditions de son attribution et en améliorant la communication sur son fonctionnement.

e) Promouvoir le logo « Régions ultrapériphériques »

Le logo « RUP » introduit en 2006 permet au consommateur d'identifier et de reconnaître les produits agricoles de qualité originaires des régions ultrapériphériques. Son utilisation est contrôlée par des organismes désignés par les autorités nationales, les conditions d'utilisation étant proposées par les organisations professionnelles concernées.

Les produits agricoles pour lesquels le logo peut être utilisé doivent respecter les exigences définies en référence aux règles communautaires ou, à défaut, à des normes internationales. Le cas échéant, des exigences spécifiques sont arrêtées sur proposition des organisations professionnelles représentatives.

Les producteurs des régions ultrapériphériques françaises et espagnoles ont eu recours à cette possibilité, notamment pour les ananas, les bananes, les melons et d'autres fruits exotiques cultivés en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion, ainsi que pour les fleurs, le vin, les bananes, les tomates, les concombres et d'autres fruits et légumes produits aux Canaries.

La Commission s’interroge sur son utilité. Il faut rappeler que cette initiative a fortement incité les producteurs à respecter les exigences en matière de qualité et a valorisé la production locale des régions ultrapériphériques, contribuant par là même à renforcer la compétitivité de leur secteur agricole aussi bien au niveau local qu'international. Aussi, le logo « RUP » doit-il être maintenu. Il convient de le promouvoir et de l’articuler avec le dispositif relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine.

f) Distinguer le droit de la protection des indications géographiques du droit des marques

La Commission évoque la possibilité d’instaurer un système alternatif de marques aux appellations afin d’inciter les producteurs à utiliser davantage les marques et moins les indications géographiques. Elle fait valoir que certains pays tiers ne reconnaissent pas encore ou pas totalement les spécificités des signes distinctifs de qualité et n’offrent de possibilité de protection que par le biais du droit des marques.

Or le droit des marques est fondamentalement différent de celui des appellations : ces deux droits répondent à des objectifs clairement distincts.

L’indication géographique est la consécration d’usages locaux constants et a été instituée pour organiser la défense collective de producteurs. Les pouvoirs publics interviennent pour constater et officialiser une indication géographique. Une indication géographique préexiste à sa reconnaissance alors que la marque peut être créée à tout moment. L’indication géographique peut s’assimiler à un droit collectif et est un élément fondamental du patrimoine des Etats tandis que la marque est un droit individuel qui permet aux entreprises d’identifier leurs produits sur le territoire de l’Union(51).

Encourager la protection des appellations d’origine par le biais du droit des marques serait un renoncement à la préservation de la particularité des signes distinctifs. Laisser la protection des indications géographiques au droit des marques serait admettre la règle du premier arrivé, premier servi et renoncer à l’établissement d’une harmonisation des régimes juridiques de reconnaissance. Les consommateurs seraient par là même trompés sur la signification réelle d’une indication géographique.

3. Rendre plus présente la dimension de durabilité des territoires 

Il importe de renforcer le lien existant entre politique de qualité et aménagement rural et d’inscrire les signes officiels dans une logique de développement durable du territoire.

a) Introduire des critères environnementaux dans les cahiers des charges

Dans le droit communautaire, il n’est juridiquement possible d’introduire un critère environnemental dans le cahier des charges que si l’on peut démontrer que cela a un impact sur la qualité du produit, cette preuve étant souvent difficile à établir. De tels critères peuvent être introduits en matière viticole car ils ont des conséquences sur les qualités organoleptiques du vin.

Les critères environnementaux et de durabilité constituent un enjeu important susceptible de répondre à une attente croissante de la société (changement climatique, préservation de la biodiversité, qualité de l’eau). Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche(52) a pris en compte cet aspect des choses, dans la limite du droit communautaire et a prévu la possibilité de mentionner ces critères dans les guides de bonne pratique.

Il pourrait être admis dans la réglementation communautaire, la possibilité d’introduire, sur une base volontaire, des critères environnementaux et de durabilité dans le cahier des charges des produits de qualité, tout en gardant la spécificité du signe et en n’entraînant pas de confusion pour le consommateur (notamment vis-à-vis de l’agriculture biologique).

b) Valoriser la provenance des matières premières AOP et IGP

Cette valorisation est possible sur deux plans : la précision de l’origine de la matière première pour les produits sous IG et la mention des ingrédients AOP ou IGP dans les produits agroalimentaires transformés.

En l’absence de cadrage sur la mention des produits sous IGP ou AOP dans la composition de produits transformés, les pratiques, laissées à l’initiative privée, sont très diverses dans la mesure où la réglementation en vigueur ne comporte aucune restriction sur la mention, sur l’étiquetage, d’un produit sous appellation. Bien souvent, le consommateur s’y perd et le produit est utilisé comme argument commercial. La Commission propose opportunément d’adopter des lignes directrices sur ce point. Il s’agira toutefois d’être attentif à tout risque de détournement de notoriété au profit d’ingrédient comparable(53).

Certaines pistes de réflexion peuvent être envisagées. Ainsi, le nom du produit bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP pourrait figurer dans l’étiquetage, la publicité ou la présentation d’un produit élaboré, si aucun autre ingrédient comparable n’a été mise en œuvre. Lorsqu’ont été mis en œuvre dans un produit élaboré des ingrédients comparables, le nom du produit AOP ou IGP ne devrait figurer que dans la liste des ingrédients.

S’agissant de l’origine de la matière première des produits sous IGP, il est possible que les matières premières proviennent d’une zone différente, contrairement aux AOP. On peut ainsi imaginer un saucisson sous appellation fabriqué à partir de viandes d’autres pays européens. La mention de cette localisation ne peut actuellement se faire que si celle-ci a un impact sur la qualité. La preuve de cet effet est souvent difficile à apporter. Elle est en vigueur dans le secteur viticole extrêmement attaché à la question de l’origine des raisins, considérant que toute autre conception représente une forme de tromperie pour le consommateur. L’indication de l’origine de la matière première, si elle diffère du lieu mentionné, dans l’indication géographique, irait dans le sens d’une plus grande transparence de nature à rassurer le consommateur et serait de nature à favoriser un plus grand ancrage territorial.

C. Conforter et défendre la qualité des produits

1. Réguler les quantités pour maintenir la qualité

La Communication de la Commission européenne n’est qu’une réponse très partielle aux enjeux liés à la qualité. Alors que la disparition des instruments de régulation est programmée – quotas laitiers en 2015, droits de plantation en 2015 au niveau de l’Union européenne et en 2018 pour les Etats qui souhaiteront prolonger le système – la Commission européenne reste sur la position dogmatique selon laquelle toute maîtrise des quantités signifie raréfaction de l’offre et donc de la concurrence, constituant ainsi un frein à la compétitivité.

L’expérience de deux grands secteurs – la viticulture et le secteur laitier – montre qu’il n’en est rien et que la gestion de la qualité à travers le seul respect d’un cahier des charges n’est en aucun cas suffisante.

Ainsi le modèle européen pour la viticulture est fondé sur un équilibre associant à un encadrement qualitatif par un cahier des charges, un encadrement quantitatif des volumes. Avec le système des droits de plantation, une gestion des autorisations de plantation a été organisée, permettant de faire en sorte que les surfaces en production soient en adéquation avec les perspectives de vente. Cela a notamment pour objectif d’éviter un déséquilibre du marché qui provoquerait un effondrement des cours ne permettant plus aux producteurs de continuer à investir dans leur outil de production et donc de maintenir la qualité de leurs produits.

Si l’encadrement des volumes n’est plus maîtrisé, un tel déséquilibre menacerait dans la mesure où les superficies disponibles à la plantation sont parfois très importantes, tant en France que dans les autres Etats membres (voir tableau infra). A titre d’exemple, la Bourgogne dispose d’une disponibilité proche du double des superficies actuellement plantées. Compte tenu de la notoriété de cette appellation, l’absence de gestion des volumes pourrait attirer des investisseurs et déstabiliser ainsi l’économie de toute une région. En Espagne, dans la région de la Rioja, 130 000 hectares sont susceptibles de s’additionner aux surfaces actuellement plantées et au Portugal, dans la région du Douro, la suppression des droits de plantation pourrait conduire à doubler les surfaces. La crise de surproduction dans des pays viticoles complètement dérégulés comme l’Australie qui connaît sa crise la plus grave depuis cinquante ans plaide incontestablement en faveur d’une régulation.

Tableau des surfaces disponibles en indications géographiques en France

(en hectares)

 

Aire géographique globale

Surface plantée (2008)

Surface libre

Alsace

20 000

15 500

4 500

Beaujolais

38 000

20 000

18 000

Bordeaux

222 000

120 200

101 800

Cognac

699 000

73 000

626 000

Bourgogne

59 000

28 000

31 000

Champagne

34 000

33 500

500

Jura

11 000

1 800

9 200

Savoie

4 300

2 100

2 200

Languedoc-Roussillon

342 000

60 000

282 000

Côtes du Rhône

120 000

61 000

59 000

Centre

8 900

5 200

3 700

Val de Loire

112 000

44 500

67 500

TOTAL

1 670 200

464 800

1 090 800

La maîtrise des volumes permet en outre de répartir équitablement entre les producteurs la croissance des marchés. Ceci est d’autant plus important que ces producteurs sont souvent de petites entreprises, confrontées aux aléas climatiques, qui ne peuvent résister longtemps face à une crise de surproduction. C’est donc toute la filière qui a intérêt à la stabilité des cours qui permet à chacun d’avoir une visibilité suffisante.

De plus, les chiffres montrent que la maîtrise du potentiel de production n’a pas eu d’impact négatif sur les prix pour les consommateurs. Au cours des trente dernières années, le prix des bouteilles de Champagne n’a augmenté que de 0,30 % par an en euros constants et pour les vins de Côtes de Provence, entre 1983 et 2007, le prix a augmenté de 27 % en euros constants.

Enfin, la gestion des volumes n’a pas d’effet restrictif sur la concurrence entre producteurs. Il permet en fait le maintien d’un tissu de production très diversifiée en terme de taille d’opérateurs. Il suffit d’examiner l’offre globale d’une appellation d’origine pour s’apercevoir que l’éventail des prix est très large.

Dans le secteur laitier, la situation est comparable. Si la production de lait dans les zones de montagne a résisté, c’est largement parce qu’une grande part de leur production était classée en appellation et que le lait était ainsi valorisé. Or, avec la disparition des quotas, c’est le lien entre production avec le territoire qui est amené à disparaître. Il faudra donc trouver des moyens de resserrer les conditions de production et notamment le lien au terroir pour maintenir la qualité du lait et la valeur ajoutée pour les producteurs. Cela passera nécessairement par une gestion des volumes produits sous appellation.

L’ensemble des auditions que le rapporteur a menées montre que l’ensemble des filières agricoles estime que la régulation des volumes est un point indispensable si l’on veut préserver la qualité et la réputation des produits. Les indications ont besoin d’avoir une croissance raisonnable pour maintenir leur réputation et contribuer au dynamisme économique et social de nombreuses régions européennes. Sans ce contrôle, on risque de privilégier la logique industrielle qui privilégie la quantité à la qualité.

La capacité de régulation de l’offre doit être prévue pour tous les produits bénéficiant d’un signe de qualité. Celle-ci permet en effet de garantir la valeur ajoutée de ces produits, en garantissant le prix de la matière première et de mieux garantir au consommateur un haut niveau de qualité.

Aussi les principes de la concurrence concernant le secteur agricole doivent être appliqués avec discernement et l’on peut regretter l’absence de proposition de la Commission européenne sur le rôle que pourraient jouer les organismes chargés de la gestion des indications géographiques en matière de maîtrise des volumes de production. Il est donc fondamental que le droit communautaire soit adapté afin que les organisations de gestion et de protection des indications géographiques soient autorisées par les Etats membres, en application du principe de subsidiarité, à adapter le potentiel de production aux exigences du marché, sur la base de principes équitables et non discriminatoires.

La question de la régulation de la production dans le secteur viticole devra aussi être posée pour les vins sans indication géographique. La mixité de la production (vin avec et sans indication géographique) dans un très grand nombre de régions viticoles impose une régulation de l’ensemble de la production. Une approche globale et cohérente devra donc être assurée entre la réforme de la politique de qualité et la réforme de la PAC.

2. Protéger les indications géographiques vis-à-vis des pays tiers

La notion d’indication géographique est protégée par l’accord ADPIC (Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle) au sein de l’OMC. Ses membres doivent fournir les moyens juridiques permettant d’empêcher l’existence de toute désignation ou toute présentation d’un bien qui pourrait tromper le public quant à son origine géographique et de prévenir toute utilisation constituant un acte de concurrence déloyale.

En application de l’ADPIC, les indications « servent à identifier un produit comme étant originaire du territoire d’un membre, ou d’une région ou d’une localité de ce territoire, dans le cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique ». Cette définition est somme toute assez proche de la définition européenne des appellations. Cependant, chaque pays reste libre de protéger ses appellations géographiques selon la méthode qu’il juge la plus appropriée. Cela peut être réalisé à travers un registre comme en Europe ou par le droit des marques comme aux Etats-Unis. De ce fait, les appellations ne bénéficient d’aucune présomption de supériorité par rapport aux marques.

S’agissant des vins et spiritueux, les membres de l’OMC ont convenu d’assurer une protection additionnelle, c'est-à-dire un niveau de protection plus élevé pour les indications géographiques relatives à ces produits. En application de l’article 23 de l’accord, ils sont tenus d’empêcher l’utilisation de ces indications pour les vins qui ne proviennent pas d’un lieu indiqué. Par ailleurs, l’enregistrement d’une marque pour les vins et spiritueux qui contient une indication géographique doit être refusé ou invalidé pour les vins ou spiritueux qui n’ont pas cette origine. Cependant, l’accord ADPIC comporte deux exceptions qui réduisent la portée de cette protection additionnelle. L’accord prévoit une exception lorsque l’indication est devenue un nom commun ou générique (toutefois le privilège ainsi accordé ne vaut que sur le territoire du membre où il est fait usage du terme générique et non sur les marchés à l’exportation). D’autre part, un membre de l’OMC ne peut exiger d’un autre membre qu’il empêche un usage continu et similaire d’une indication géographique d’un autre membre identifiant des vins et spiritueux, à condition que l’indication soit utilisée au moins dix ans avant l’accord de 1994, ou de bonne foi pendant une période, plus courte, précédant cette date (clause dite du grand-père)(54).

Dans le cadre des négociations multilatérales du cycle de Doha, une seule question de propriété intellectuelle est à l’ordre du jour, l’établissement d’un registre multilatéral de notification et d’enregistrement des indications géographiques pour les vins et spiritueux(55). Plusieurs membres de l’OMC dont l’Union européenne souhaiteraient également inclure dans les discussions, l’extension aux autres produits alimentaires du système de protection renforcé des vins et spiritueux de l’article 23 de l’ADPIC. En raison du préjudice subi par les producteurs européens, l’Union européenne attache une grande importance à ce sujet et a réclamé, en juillet 2008, le lancement d’un processus pour que la question soit prise en compte dans un accord final.

Pour l’heure, les négociations de Doha sont au point mort et l’Union européenne porte en conséquence le dossier de la défense des indications géographiques sur le plan des négociations commerciales bilatérales. Dans un premier temps, la politique bilatérale a été axée autour de la protection des indications géographiques des vins et spiritueux comme dans le cadre de l’accord avec les Etats-Unis sur le commerce du vin du 14 novembre 2005. Récemment, le 21 décembre 2009, la Chine a annoncé sa décision de protéger l’indication géographique du Cognac selon le mémorandum signé entre l’administration chinoise (AQSIQ)(56) et la direction générale du commerce de la Commission européenne. Il s’agit là de la toute première reconnaissance d’une indication géographique étrangère dans le droit chinois et le processus doit se poursuivre sur l’ensemble des indications géographiques57.

Dans le cadre d’une nouvelle stratégie d’accords dits de deuxième génération, l’Union européenne négocie une protection de toutes les indications géographiques. Ainsi, le projet d’accord de libre-échange avec la Corée prévoit des dispositions relatives aux indications géographiques selon le principe d’une liste restreinte, notamment pour des fromages.

Dans sa communication sur la politique de qualité, la Commission propose de :

- chercher à obtenir une protection renforcée dans les pays tiers par l’amélioration de l’accord au sein de l’OMC et la conclusion de conventions bilatérales ;

- d’inclure les indications géographiques dans le champ de l’application de l’accord commercial anti-contrefaçon actuellement en cours de discussion ainsi que dans les compétences du futur Observatoire européen de la contrefaçon et du piratage.

Le rapporteur ne peut que soutenir la Commission dans cette volonté. On pourrait aussi l’encourager à apporter une assistance technique et une aide financière aux organismes chargés des indications géographiques afin de faciliter le règlement des problèmes d’usurpation.

3. Aider les producteurs et informer les consommateurs

La reconnaissance par les consommateurs des produits sous signe officiel de qualité est le gage de leur développement ; aussi une promotion efficace et continue doit être menée. Des campagnes de communication active pour sensibiliser les consommateurs au système de manière générale et un apprentissage aux logos doivent être menées, avec des financements communautaires et en cohérence avec le changement de réglementation prévu en matière de règles relatives à l’étiquetage des denrées alimentaires.

Etant donné le surcoût occasionné par la production de produits de qualité ainsi que par le coût des démarches de valorisation – l’élaboration d’un cahier des charges est estimée à une moyenne de 250 000 euros – il est indispensable de continuer à orienter les fonds de modulation de la PAC vers l’accompagnement et le développement des signes de qualité par les producteurs.

CONCLUSION

Alors que la compétitivité du secteur agricole européen fait actuellement débat, les exigences en matière de santé, de normes de production et de qualité qui font partie intégrante du modèle européen ne doivent en aucun cas être abaissées . La défense et la promotion de ce modèle qui a été une des priorités de la Présidence française, doivent au contraire passer par la valorisation des produits de qualité et de leur valeur ajoutée.

La politique de qualité s’inscrit, dès à présent, en phase avec les trois priorités de la réforme de la politique agricole commune après 2013 : sécurité alimentaire, changement climatique et équilibres territoriaux.

Elle anticipe aussi sur un des points fondamentaux de cette réforme, la régulation des marchés. La dérégulation dans le secteur de la finance et ses répercussions devrait inciter la Commission européenne à une meilleure écoute dans le domaine agricole. Même si elle n’est pas encore acceptée par la Commission européenne, la maîtrise des volumes apparaît désormais moins malthusienne et plus susceptible de faire l’objet d’un consensus.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 23 juin 2010, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

« M. Jean Gaubert. Je suis d’accord avec vos propositions de conclusions. Du fait de la volonté de simplification de la Commission européenne, il y a effectivement un risque de confusion, de perte des repères pour les consommateurs et de standardisation. Or la transparence concernant l’origine des produits et l’éthique des producteurs est particulièrement importante.

Les critères de qualité sont vues par certains comme une entrave au marché. Je considère au contraire que la concurrence est un outil de la compétitivité mais ne doit pas être une fin en soi. Il y a à Bruxelles un clivage entre ces deux conceptions de la concurrence

M. Michel Piron. Je partage ce point de vue. Il faut éviter de céder à la tentation en apparence rationnelle de la standardisation, qui conduirait à créer des standards de masse au détriment de la qualité. Il est nécessaire de disposer de règles permettant le maintien de la diversité comme condition de la qualité. Comme l’a écrit Spinoza « ce qu’une idée gagne en extension, elle le perd en compréhension ».

M. Lionnel Luca. Je m’interroge sur cette véritable obsession de la standardisation et de l’uniformisation et je souhaite que notre Commission appelle l’attention du secrétaire d’Etat aux affaires européennes sur le poids du « lobbying » qui s’exerce à Bruxelles sur ces questions. Je citerais un exemple que je connais bien, dans mon département, celui des arômes et parfums de Grasse, dont la survie est menacée du fait de fortes pressions.

Le Président Pierre Lequiller. J’adresserai un courrier en ce sens à M. Pierre Lellouche.

M. Jacques Myard. La standardisation est voulue par les grands groupes industriels, y compris les groupes français. Il faut veiller au maintien des productions reposant sur des normes traditionnelles. Je citerais l’exemple de la bouteille de champagne, dont l’existence avait été mise en cause. Ces démarches relèvent d’un véritable obscurantisme concurrentiel !

M. Gérard Voisin. Je remercie le rapporteur pour son travail. Je souhaiterais que soit abordée la question de la libéralisation des droits de plantation. Notre réticence à les libéraliser pose des problèmes face à la concurrence des grands producteurs et ne permet pas d’atteindre une masse critique pour pouvoir exporter.

Mme Marietta Karamanli. Je souhaiterais connaître vos propositions concernant le mode de production biologique. D’autre part, quelles peuvent être les garanties sur les labels et les sigles de qualité, dont le développement est demandé par les associations de consommateurs ?

M. Philippe-Armand Martin, rapporteur. On ne peut que souscrire à l’objectif de valorisation des produits de qualité annoncé par la Commission européenne mais les instruments proposés ne conviennent pas. Il n’est pas souhaitable de rapprocher les AOP et les IGP car ce sont deux notions bien différentes. Une telle évolution supprimerait tout repère pour les consommateurs.

Une harmonisation de la certification et des labels ainsi que de la production biologique est souhaitable.

Les grands groupes sont en effet très puissants, particulièrement en Espagne où je me suis rendu dans le cadre de la préparation du rapport et qui n’est pas majoritairement un pays de petites et moyennes exploitations comme la France. Certains pays comme la France, la Hongrie, l’Espagne, l’Italie et d’autres Etats membres se sont rassemblés autour de l’association EFOW pour défendre les vins de qualité et pour faire contrepoids au lobbying des grands groupes. La qualité est en effet un atout majeur pour l’agriculture européenne.

Concernant les droits de plantation, le point 12 des conclusions indique qu’il ne peut y avoir de qualité sans maîtrise et régulation de la production et demande une gestion en fonction des perspectives de développement des marchés, sur la base de principes équitables et non discriminatoires.

Il est important d’assurer le suivi de nos propositions dans le contexte de la réforme de la PAC. Concernant les appellations protégées, il faut maintenir les régulations qui avaient été mises en place dans le cadre des différentes organisations communes de marché. L’enjeu est le maintien de la qualité de nos produits. »

Puis la Commission a adopté les conclusions dont le texte figure ci-après.

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA COMMISSION

La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les règlements (CE) no 509/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif aux spécialités traditionnelles garanties et (CE) no 510/2006 du Conseil du 20 mars 2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires,

Vu la communication de la Commission européenne du 28 mai 2009 sur la politique de qualité des produits agricoles (COM (2009) 234),

Vu les conclusions du Conseil européen du 23 juin 2009 sur la politique de qualité des produits agricoles,

Considérant que le modèle agricole européen se caractérise par des normes de qualité parmi les plus strictes du monde ;

Considérant que l’un des atouts de l’agriculture européenne est la diversité de ses produits, résultat à la fois de milieux naturels, de méthodes de culture et de traditions séculaires et que ces produits font partie du patrimoine et de l’identité européenne ;

Considérant que la qualité des produits est un facteur clé de la compétitivité de l’agriculture européenne et contribue à fonder des avantages concurrentiels sur un marché de plus en plus mondialisé ;

Considérant que la politique de qualité est un levier essentiel pour assurer la pérennisation des tissus économiques et sociaux ruraux ;

1. Prend acte de l’objectif de la Commission européenne de faire de la politique de qualité un élément essentiel de la stratégie du secteur européen sur le marché mondial ;

2. Craint toutefois que sa volonté de simplification des instruments de la politique de qualité tienne insuffisamment compte des spécificités des différents secteurs et n’aboutisse en fait qu’à déréguler et à remettre en cause les systèmes de certification de qualité et d’origine ;

3. Considère que les consommateurs doivent être informés, clairement et sans risques de confusion, des différents normes et signes de qualité et que les démarches de qualité ne doivent pas être complexifiées pour les opérateurs ;

4. Se prononce, en conséquence, pour :

- le maintien de la définition des normes de commercialisation par l’Union européenne,

- l’adoption communautaire de lignes directrices encadrant les systèmes de certification sectoriels,

- la définition harmonisée de certaines mentions valorisantes comme l’appellation « montagne »,

- l’harmonisation du mode de production biologique ;

5. Estime, en revanche, que :

- l’extension du champ d’application de l’écolabel aux produits agricoles rendrait illisible le dispositif européen de qualité et entraînerait des risques de confusion avec l’agriculture biologique,

- la mise en place d’un identifiant « qualité européenne » se limitant à certifier le respect de la réglementation communautaire multiplierait les signes, nuirait ainsi à la lisibilité de ceux en place et entraînerait un alourdissement des coûts pour les producteurs ;

6. Considère que l’obligation de mentionner le lieu de production pour les produits transformés, si elle répond à une attente des consommateurs, devrait faire l’objet d’une expertise afin d’en considérer les avantages et les difficultés de mise en
œuvre, compte tenu notamment du nombre d’ingrédients pouvant être employés. Dans le cadre d’une démarche volontaire, l’information sur l’origine d’un produit transformé devrait s’accompagner de l’indication des ingrédients primaires, en cohérence avec le projet de règlement sur l’information des consommateurs ;

7. Souligne que le système d’appellations d’origine (AOP) et d’indications géographiques protégées (IGP) est un des instruments majeurs de la politique de qualité qu’il convient d’améliorer en tenant compte de la diversité et de la spécificité des situations dans les régions et territoires de l’Union et estime donc nécessaire de :

- réduire les délais d’enregistrement et définir des procédures communautaires de contrôle afin d’assurer une protection coordonnée des indications géographiques,
- maintenir distinct les trois systèmes d’enregistrement – vins, spiritueux et denrées alimentaires,

- ne pas fusionner les deux instruments en place, l’appellation d’origine protégée (AOP) et l’indication géographique protégée (IGP), afin d’éviter le risque de ne retenir qu’une définition moins disante en termes de lien à l’origine et de mettre à mal les efforts des producteurs qui ne sont engagés dans des démarches distinctes,
- conserver la spécialité traditionnelle garantie (STG), en tant que mode de revalorisation de certaines productions traditionnelles non expressément liées à un territoire,

- ne pas instaurer un régime de protection différenciée des indications géographiques en fonction de leur poids économique,

- promouvoir le logo « Régions ultrapériphériques » ;

8. Observe que les critères environnementaux et de durabilité constituent un enjeu majeur et qu’ils doivent pouvoir être introduits, sur une base volontaire, dans les cahiers des charges des produits de qualité ;

9. Estime important de renforcer le lien avec le territoire en mentionnant, sous certaines conditions afin d’éviter tout détournement de notoriété, la présence d’ingrédients sous AOP ou IGP dans les produits transformés et l’origine de la matière première des produits sous IG ;

10. Juge indispensable, afin de protéger les consommateurs contre toute tromperie et de lutter contre la concurrence déloyale, que l’Union européenne accentue ses efforts de protection des indications géographiques au sein de l’OMC, par l’extension de l’article 23 de l’accord sur les ADPIC à toutes les indications géographiques ainsi que dans le cadre des accords bilatéraux de commerce et soutient la Commission européenne dans son intention d’inclure les indications géographiques dans le champ d’application de l’accord commercial anti-contrefaçon et dans les compétences du futur Observatoire européen de la contrefaçon et du piratage ;

11. Insiste sur la nécessité d’encourager, tant au sein du marché communautaire que dans les pays tiers, des mesures de promotion destinées aux consommateurs et des actions d’information pour les producteurs sur les avantages des politiques de qualité et souligne l’importance des aides de la politique agricole commune pour financer des démarches coûteuses, notamment pour les petits producteurs ;

12. Considère qu’il ne peut y avoir de politique de qualité sans maîtrise et régulation de la production et estime fondamentale une modification de la législation communautaire afin que les organisations chargées de la gestion et de la protection des indications géographiques puissent gérer le potentiel de production en fonction des perspectives de développement des marchés, sur la base de principes équitables et non discriminatoires ;

13. Souhaite une approche globale et cohérente de la réforme de la politique de qualité et de la réforme de la PAC notamment sur la question de la régulation.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR
ET REMERCIEMENTS

Le rapporteur tient à témoigner sa gratitude à l’ensemble des personnes qu’il a rencontrées.

*

* *

A Paris :

Ø AQUALABEL (produits de la mer) :

– M. Arnault Chaperon, président.

Ø  Assemblée des régions européennes viticoles:

– M. Jean Paul Angers, secrétaire général ;

– M. Dominique Janin, secrétaire général adjoint ;

– M. Antoine Mailliot, chargé de mission.

Ø Comité interprofessionnel du vin de Champagne

-M. Jean Luc Barbier, directeur général.

Ø Confédération des coopératives vinicoles de France

- M. Denis Verdier, président.

Ø Confédération nationale des appellations d’origine contrôlée

– M. Pascal Bobillier-Monnot, directeur ;

– M. Eric Tesson, chargé des affaires juridiques et sociales.

Ø Conseil national des appellations d'origine laitière :

– Mme Anne Richard, déléguée générale.

Ø FEDELIS (Fédération label rouge) :

– Mme Agnès Laszczyk, déléguée générale ;

– M. Henri Badelier, vice-président.

Ø Fédération des exportateurs de vins et spiritueux :

– M. Nicolas Ozanam, directeur général.

Ø Fédération régionale des vignerons indépendants de Champagne

- M. Michel Loriot, président.

Ø France Agrimer:

– M. Christophe Dassié, chef du service Innovation et qualité.

Ø  Institut national de l’origine et de la qualité:

– M. Jean-Louis Buer, directeur ;

– Mme Christine Avelin, directrice adjointe.

Ø Ministère de l’agriculture et de la pêche :

– M. Pascal Viné, directeur de cabinet du ministre ;

– Mme Catherine Rogy, sous-directrice ;

– Mme Ariane Angelier, chef du bureau des signes de qualité et de l’agriculture biologique ;

– M. Mathieu Gregory, conseiller technique chargé de l’alimentation, des signes de qualité, de la sécurité sanitaire et du bien-être animal.

Ø Syndicat général des vignerons de la Champagne :

– M. Benoît Stenne, directeur ;

– M. Joël Falmet, vice président, représentant de l’Aube.

Ø Valorisation des produits agroalimentaires de Provence :

– Mme Nathalie Bucher.

Ø Union des maisons de Champagne :

– M. Ghislain de Montgolfier, président, également président de l'Association générale des entreprises vinicoles.

A Strasbourg :

– M. Paolo de Castro, président de la commission de l’agriculture et du développement rural.

– M. Michel Dantin, député européen, membre de la commission de l’agriculture et du développement rural ;

– M. Giancarlo Scotta, député européen, membre de la commission de l’agriculture et du développement rural ;

– M. Philippe Magne, conseiller technique au ministère de l’agriculture.

A Bruxelles :

– M. Stéphane Le Foll, député européen, membre de la Commission agriculture ;

– M. Jean-Christophe Legris, délégué adjoint aux affaires agricoles auprès de la Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne ;

– Mme Astrid Lulling, députée européenne, présidente de l'intergroupe "viticulture-tradition-qualités" du Parlement européen ;

Ø Direction générale agriculture de la Commission européenne :

– Mme Maria-Angela Benitez-Salas, directrice du service « développement durable et qualité de l'agriculture et du développement rural » ;

– M. Keijo Hyvonen, chef de l'unité "politique de qualité des produits agricoles" ;

– M. Jesus Zorilla Torras, chef de l'unité « vin, alcool, tabac, semences et houblon ».

En Hongrie :

Ø Ambassade de France :

– Mme Marie-Christine Tardieu Smith, chef de la mission économique.

Ø Biokontroll Hungária Nonprofit Kft. (association chargée du contrôle de la qualité des produits bio en Hongrie) :

– M. Dr Péter Roszík, directeur général.

Ø Office spécial de l’administration agricole (Organisme de contrôle des produits agroalimentaire sous la tutelle du ministère de l’agriculture, Direction du vin) :

– M. Zoltán Harcz.

Ø Chambre d’agriculture de Hongrie :

– Dr András Laczkó, conseiller ;

– Dr Ferenc Ebele, secrétaire général.

Ø Groupe d’amitié franco-hongrois :

– Mme Rózsa Hoffmann, présidente.

Ø Conseil national des communautés de vins :

– Mme Diana Sidlovits, conseillère.

Ø Ministère de l’agriculture :

– M. Dr Péter Csiky, chef du département des marques de fabrique et de la protection des modèles de l’Office des brevets ;

– M. Dr Márton Oravecz, département de la sécurité des produits alimentaires et des fourrages, vétérinaire principal ;

– M. Péter Gál, conseiller viticole au département des marchés agricoles ;

– M. Enikö Zobor, conseiller au département du développement de la chaîne alimentaire ;

– M. Dr László Vajda, chef du département de la coordination européenne et des affaires étrangères.

Ø Syndicats des cultivateurs de vignes de Tokaj :

– M. Ferenc Marcinkó, président.

Ø Association Tokaj Renaissance :

– M. Péter Molnár, président.

Ø Commission de l’agriculture du Parlement hongrois :

– M Sandor Font, président.

En Espagne :

Ø Ambassade de France :

– M. Bruno delaye, ambassadeur de France ;

– M. Marc maupas-Oudinot, ministre conseiller pour les affaires économiques ;

– M. Daniel laborde, conseiller agricole au service économique.

Ø Coopératives agroalimentaires espagnoles :

– M. Gabriel Trenzado, directeur adjoint.

Ø Coordination des agriculteurs et des éleveurs :

– M. Alejandro García Gasco, membre de la Commission exécutive et président du Comité consultatif Vin de l’Union européenne.

Ø Fédération espagnole des industries alimentaires :

– M. Horacio Gonzalez Alemán, secrétaire général adjoint.

Ø Fédération espagnole du vin :

– M. Pau Roca, secrétaire général.

Ø Ministère espagnol de l’environnement et des milieux rural et marin :

– Mme Isabel Bombal Díaz, directrice générale de l’industrie et des marchés alimentaires, chargée de la qualité des produits ;

– M. Clemente Mata Taria, sous-directeur, chargé de la qualité des produits et de l’agriculture biologique.

Ø Parlement espagnol :

– M. José Cruz Pérez Lapazarán, sénateur de Navarre ;

– M. José Valín Alonso, sénateur de la Communauté autonome de Castille et Léon ;

– M. José Madero Jarabo, député de Cuenca ;

– M. Alejandro Alonso Nuñez, député de Tolède.

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 () Livre vert sur la qualité des produits agricoles : «  normes de commercialisation, exigences de production et systèmes de qualité », 15 octobre 2008. COM (2008) 641.

3 () Les conclusions du Conseil européen de novembre 1997 ont ainsi posé les bases du modèle agricole européen : une agriculture axée sur le marché ; une agriculture compétitive à la fois à l’extérieur et à l’intérieur ; une agriculture présente dans toute l’Europe, y compris dans les zones défavorisées et dans les zones de montagne et les préoccupations du consommateur.

4 () En particulier en matière d’utilisation de pesticides et de produits vétérinaires, de bien-être animal, de protection de l’environnement.

5 () Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la politique de qualité des produits agricoles, SEC (2009) 670 et SEC (2009) 671 du 28 mai 2009.

6 () Lait, volailles, produits de la mer, plantes aromatiques, vin…

7 () Rapport d’initiative de Giancarlo Scotta : « L’avenir de la politique de qualité : quelle stratégie adopter ? », 19 octobre 2009.2009/2105 (INI).

8 () « Garantir la qualité des produits alimentaires – Harmonisation ou reconnaissance mutuelle des normes », (2008/2220 (INI)).

9 () Rapport d’initiative de Giancarlo Scotta : « L’avenir de la politique de qualité : quelle stratégie adopter ? », 19 octobre 2009, 2009/2105 (INI).

10 () Chiffres tirés d’une étude réalisée pour la Commission européenne par London economics consultants, novembre 2008.

11 () Données SECODIP, 2002.

12 () Le Monde du 20 janvier 2010.

13 () Source : Direction générale de l’agriculture et du développement rural de la Commission européenne.

14 () Réforme de la PAC de 1992 dite Mac Sharry.

15 () La loi de 1905 a défini pour la première fois le concept d’origine : avant 1905, vin de Bordeaux voulait dire au départ du port de Bordeaux. A partir de 1905, le vin de Bordeaux doit provenir uniquement du département de la Gironde. En 1919, sous l’impulsion de la Champagne, est créée l’appellation d’origine simple, définition d’une aire de production géographique. En 1935, la loi sur les appellations d’origine contrôlée remplace les appellations d’origine simple. L’AOC définit une aire de production et d’autres conditions alors que l’AOS définissait uniquement l’aire de production.

16 () Règlement (CE) no 1783/2003 du 21 octobre 2003.

17 () A concurrence d’un montant plafonné à 3 000 euros par exploitation et par an.

18 () Il s’agissait, d’une part, de supprimer formellement l’exigence communautaire selon laquelle les pays tiers doivent appliquer une protection similaire sur une base de réciprocité et d’équivalence et, d’autre part, de permettre aux opérateurs de ces pays de présenter directement à la Commission leurs demandes d’enregistrement.

19 () Règlement établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la PAC et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs.

20 ( )Les normes de commercialisation ne concernent pas le vin.

21 () Dans une question préjudicielle du 7 mai 1997 – C-321, 322,323 et 324/94–, la Cour de cassation française a précisé que l’utilisation de la dénomination «  montagne » ne devait pas être réservée aux seuls produits fabriqués sur le territoire national et élaborés à partir de matières premières nationales.

22 () Par exemple, « viande bovine française ».

23 () A toutes les étapes de la production et de l’élaboration, le produit doit répondre à des exigences définies par le cahier des charges homologué par l’INAO dont le respect est contrôlé régulièrement par des organismes indépendants.

24 () Dont plus de 400 dans les filières viande, volaille, charcuterie et salaisons.

25 () Des dérogations à cette contrainte sont possibles pour la provenance des matières premières, et notamment l’alimentation des animaux.

26 () Auparavant, une présence accidentelle d’OGM supérieure à 0,9 % n’empêchait pas la vente des produits comme produits biologiques.

27 () Chypre, Malte.

28 () Estonie, Lituanie, Lettonie.

29 () En Roumanie, le PIB agricole est de 10 % du PIB national.

30 () Consultables sur la base DOOR de la Commission européenne.

31 () La viande Maine-Anjou, en publication depuis 2008, attend toujours son enregistrement.

32 () Voir rapport d’information de Philippe-Armand Martin no 2368 du 24 février 2010 au nom de la commission des affaires européennes sur la demande d’enregistrement de la dénomination «  Gruyère » en appellation d’origine protégée (AOP).

33 () Café de Colombie, thé Darjeeling, riz thaï…

34 () Dont 33 pour la volaille.

35 () « Evaluation de la politique agricole commune relative aux appellations d’origine protégée et aux indications géographiques protégées », London economics, novembre 2008.

36 () Etude ISHA (Institut scientifique d hygiène et d’analyse), novembre 2006.

37 () Décret no 2008-356 du 15 avril 2008.

38 () Ainsi le terme « jus » ne peut pas être employé si le jus de fruits a été dilué et le terme « lait » ne peut être employé pour les boissons au soja.

39 () Forme de la carcasse et dommages sur cette dernière.

40 () Agrumes, fraise, kiwi, pêche et nectarine, poire, poivron doux, pomme, raisin, salades, tomate.

41 () Normes CEE-ONU disponibles sur le site de l’UNECE, commission économique des Nations unies pour l’Europe.

42 () Les mentions réservées facultatives ne doivent pas obligatoirement être utilisées pour désigner un produit dans le commerce ou sur les étiquettes, mais si elles le sont, le produit doit correspondre à la définition établie.

43 () Créé en 1992 par le règlement no 880/92 modifié par le règlement (CE) no 66/2010 du 2 novembre 2009, l’écolabel européen est un label écologique officiel utilisable dans tous les pays de l’Union ; c’est une marque volontaire de certification de produits et de services. L’écolabel européen s’applique aux produits et services qui satisfont à des critères figurant dans des référentiels de certification applicables à chaque catégorie de produits. Sont exclus du champ d’application de ce label, les produits pharmaceutiques, les produits agroalimentaires et le secteur automobile.

44 () La possibilité d’inscrire le millésime et le cépage sur les vins sans indication géographique a été actée lors de la dernière réforme de l’OCM vitivinicole de 2008.

45 () Loi no 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

46 () Le surcoût moyen de la collecte est de 12 euros pour 1 000 litres de lait.

47 () La Commission du Codex alimentarius a été créée en 1963 par la FAO et l’OMS afin d’élaborer des normes alimentaires.

48 () Communication de la Commission eu Conseil et au Parlement européen du 10 juin 2004, « Plan d’action européen en matière d’alimentation et d’agriculture biologiques ». COM (2004) 415.

49 () Notamment sur l’emploi des sulfites.

50 Par exemple, mozarella italienne, jambon serrano, Gueuze lambic belge.

51 () La marque communautaire permet, par une procédure unique devant l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI), l’enregistrement d’une marque qui bénéficiera d’une protection uniforme et produira ses effets sur tout le territoire communautaire.

52 () Projet de loi no 200.

53 () On entend par ingrédient comparable, tout produit alimentaire substituable totalement ou partiellement à l’ingrédient bénéficiant d’une origine protégée, par exemple le bleu peut paraître substituable au roquefort.

54 () Cette disposition a conféré aux Etats-Unis, à la fin du cycle d’Uruguay, le droit de continuer à utiliser les appellations européennes comme le Chablis ou le Champagne.

55 () Négociation sur l’article 22 de l’ADPIC (accord international sur la protection des droits intellectuels).

56 () Acronyme anglais signifiant administration générale de la supervision de la qualité.

57 La Commission européenne a demandé au Conseil le 20 juin 2010, l’autorisation d’engager des négociations avec la Chine sur la protection de l’ensemble des indications géographiques portant sur les vins et spiritueux et les produits agricoles et denrées alimentaires.