Roger Salengro

(1890 - 1936)


© Assemblée nationale

Né le 30 mai 1890 à Lille, Roger Salengro milite très jeune parmi les partisans de Jules Guesde, l’introducteur du marxisme en France. Antimilitariste, il est fiché au « carnet B » et par conséquent détenu pendant plusieurs semaines en août 1914.

Quand il est admis à porter les armes, son régiment est replié sur Cognac, mais Roger Salengro demande à partir au front et sa requête est acceptée. Évacué comme malade au printemps 1915, il obtient de revenir en première ligne. « Pour pouvoir sortir de l’hôpital, écrit-il le 22 mai 1915, il m’a fallu remuer ciel et terre, parce qu’incomplètement guéri. Mais je pars radieux sachant pourquoi je me bats et décidé à faire tout mon devoir. »

Le 7 octobre 1915, parti chercher le corps d’un combattant, il est capturé par les Allemands. Interné en Bavière, il incite ses camarades à refuser le travail forcé, ce qui lui vaut treize mois de camp disciplinaire. Sa santé s’altère d’autant plus qu’il est atteint de dépression nerveuse. Il est dirigé vers la Suisse dans un convoi de rapatriés sanitaires. Quand il revient à Lille, Roger Salengro ne pèse plus que quarante-deux kilos.

Côté français, la suspicion à l’encontre des socialistes, qui avaient combattu la « loi de trois ans » avec Jaurès, fait qu’un conseil de guerre a examiné son dossier : en janvier 1916 cependant, le soupçon de désertion est écarté et le soldat Salengro, acquitté.

Cette affaire sera néanmoins exploitée par les adversaires de Roger Salengro, et d’abord par les communistes. Conseiller municipal de Lille à partir de 1919, Roger Salengro a fait le choix de la SFIO au congrès de Tours. Il contribue à réorganiser la fédération du Nord en même temps qu’il collabore activement au Cri du peuple, le quotidien socialiste local.

Maire de Lille en 1925, Roger Salengro devient député en 1928. Réélu en 1932 et en 1936, il est nommé au poste difficile de ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Front populaire dirigé par Léon Blum. C’est donc Roger Salengro qui signe les décrets de dissolution des ligues pris en application de la loi du 10 janvier 1936, s’attirant la haine de l’extrême droite.

Son ennemi Henri Becquart, député du Nord, réclame au ministre de la Guerre Édouard Daladier des précisions sur l’attitude du soldat Salengro pendant la Grande Guerre. Bientôt s’ensuit une campagne de presse d’une grande violence, menée par L’Action française et Gringoire.

Une commission, présidée par le général Gamelin, innocente Roger Salengro. Le 13 novembre 1936, interpellé par l’opposition, Léon Blum défend son ministre, obtenant la confiance de 427 députés. « Vous savez que la campagne menée contre Roger Salengro au nom de l’honneur militaire et du patriotisme repose sur l’altération de la vérité », déclare clairement le Président du Conseil. Mais la campagne de presse se poursuit, Gringoire voulant voir dans le rapatriement sanitaire de Roger Salengro une marque de bienveillance allemande. Éprouvé par la mort de sa femme et la maladie de sa mère, le ministre met fin à ses jours dans la nuit du 17 au 18 novembre. La lettre qu’il écrit à Léon Blum est publiée en une du Populaire qui fustige le « fascisme assassin ». À Lille, sont organisées le 22 novembre des obsèques nationales qui rassemblent un million de personnes.

 

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