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PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement du Burkina Faso relatif à la gestion concertée des

flux migratoires et au développement solidaire

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ETUDE D’IMPACT

I - Problématique et objectifs de l’accord :

Le Burkina Faso compte aujourd'hui 14,8 millions d’habitants (projection 2025 : 23,7 millions d’habitants) dont 47% de moins de 15 ans. La tradition d’émigration des ressortissants burkinabè est forte et ancienne, d'abord vers les pays de la sous-région de l'Afrique de l'Ouest : Côte d'Ivoire (qui reste le premier pays d'accueil de la diaspora burkinabè dans la région), Ghana, Niger et Mali.

La France, avec une communauté de 3 798 personnes en situation régulière en 2008, est le premier pays de destination des ressortissants burkinabè en Europe, devant l'Italie. Cependant, le Burkina Faso n'arrive qu'au 50ème rang des pays d'origine de la migration à destination de la France. La communauté burkinabè en France a augmenté de 40,31% depuis 2003 (2 664 personnes en 2003) avec un flux annuel des migrants en hausse constante : 570 premiers titres de séjour délivrés en 2003, 609 en 2007, soit 6,8% d'augmentation.

L’accord signé à Ouagadougou le 10 janvier 2009 illustre la volonté de la France de développer avec le Burkina Faso, pays membre du comité de pilotage de la préparation de la deuxième conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement qui s’est tenue à Paris les 23-25 novembre 2008 un partenariat visant à assurer, dans une perspective de développement solidaire, une meilleure maîtrise des flux migratoires.

Cet accord poursuit quatre objectifs :

a) Faciliter et privilégier la circulation des ressortissants des deux pays qui concourent au dynamisme des échanges bilatéraux entre la France et le Burkina Faso, par une augmentation du nombre de visas de court séjour à entrées multiples, dits visas de circulation, d'une durée de validité de un à cinq ans délivrés à ces personnes.

De 2004 à 2008, le nombre des visas de court séjour délivrés est passé de 5 480 à 6 357, soit une augmentation de 16%, alors que la demande de visas toutes catégories confondues est restée stable sur la période (2004 : 10 462 ; 2008 : 10 762). La délivrance des visas de circulation connaît une progression régulière. En 2008, ils représentent 21,20% du nombre de visas de court séjour contre 8,39% en 2004.

Il est attendu de l'accord qu'il contribue au renforcement des relations, en particulier dans le domaine économique, entre la France et le Burkina Faso.

b) Modifier la proportion entre migration familiale, aujourd’hui dominante, et migration professionnelle, encore très faible, en tenant compte des besoins du marché du travail français et des capacités du Burkina Faso à y répondre.

A cette fin, l’accord prévoit :

- l’ouverture du marché du travail français aux ressortissants burkinabè, sans que leur soit opposée la situation de l’emploi, à 64 emplois métiers qualifiés et non qualifiés dans 19 domaines professionnels différents ;

- la délivrance de cartes de séjour "compétences et talents" sans limitation de renouvellement ;

- la possibilité pour les étudiants burkinabè ayant obtenu en France, au Burkina Faso ou dans un pays tiers, un diplôme délivré par un établissement d’enseignement habilité au moins équivalent au master ou à la licence professionnelle de rechercher un emploi en France pendant six mois renouvelables une fois, afin de compléter leur formation par une première expérience professionnelle, dans la perspective de leur retour au Burkina Faso.

En matière de visas de long séjour, le nombre de visas délivrés à des ressortissants burkinabè a enregistré une augmentation de 28% entre 2004 (457 visas délivrés) et 2008 (586 visas délivrés). En 2008, 36% de ces visas ont été délivrés pour motifs familiaux, soit 209 visas (dont 127 à des conjoints de français) et 49% (291 visas) à des étudiants. Avec 12 titres de séjour délivrés, la migration professionnelle occupe une part tout à fait marginale.

Par ailleurs, dans un souci de répondre aux besoins des secteurs d’activité affectés par un déficit de compétences au Burkina Faso, l'accord comporte une liste de domaines professionnels considérés comme prioritaires, pour lesquels la migration de ressortissants français est encouragée.

c) Contribuer au développement solidaire par la mise en œuvre d’un programme qui cible les zones de forte émigration, à travers :

- des actions de codéveloppement associant les migrants burkinabè au développement de leur pays, favorisant le transfert de leur épargne vers des activités créatrices de richesse économique, et encourageant le retour des membres de la diaspora résidant en France. Sur ce dernier aspect, en 2008, les deux formes d'aide au retour, l'aide au retour volontaire et l'aide au retour humanitaire, ont été très peu distribuées (1 pour la première, 5 pour la seconde).

- le financement de projets relatifs à la santé, la sécurité alimentaire, l’assainissement de l’eau, la formation professionnelle, au soutien des activités de production agricole

d) Améliorer la lutte contre l'immigration irrégulière essentiellement dans deux directions :

- l’extension de la coopération policière notamment en matière d’organisation des services concernés, de formation des personnels, de sécurisation des titres, de lutte contre la fraude documentaire et de renforcement des capacités opérationnelles des postes frontières terrestres et aéroportuaires internationaux du Burkina Faso par la mise à disposition d’équipements.

- la réadmission des nationaux et des ressortissants des pays tiers en situation irrégulière En 2008, 54 obligations de quitter le territoire français (OQTF)) et 32 arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière (APRF) ont été prononcés. Le nombre de mesures exécutées est de 3 pour les OQTF et 6 pour les APRF. La demande de laissez-passer consulaires (documents nécessaires à l’éloignement d’un étranger dépourvu de document de voyage et/ou d’identité) vis-à-vis de ce pays n’est pas significative et stable ces dernières années (environ 5 demandes par an).

II – Conséquences de la mise en œuvre de l’accord :

- dans le domaine économique et social :

En matière de migration professionnelle, l’accord prévoit des contingents annuels chiffrés : 150 cartes «compétences et talents », 500 cartes "salarié". Ces contingents pourront être révisés annuellement selon le constat tiré de la mise en œuvre de l’accord, par le Comité de suivi créé par l’accord. La mise en œuvre de ces dispositions est de nature à remédier aux vacances d’emploi dans les métiers en tension en France tout en limitant le risque d’exode des élites burkinabè.

La réalisation de projets de développement solidaire combinée avec l’effet des autres mesures de l’accord (retour des professionnels burkinabè ayant acquis une expérience professionnelle en France, mobilisation des ressources des migrants burkinabè résidant en France) devrait avoir un impact sensible sur le développement du Burkina Faso et contribuer à l’amélioration des conditions de vie dans les régions source d’émigration.

- dans le domaine financier :

La France s’est engagée à consacrer :

- 6,24 millions d’euros sur une période de trois ans aux actions de développement solidaire, (programme LOLF 301) ;

- 770 000 euros sur trois ans à la coopération policière (programme LOLF 303).

- dans le domaine juridique :

Le présent accord complète les dispositions de la convention bilatérale relative à la circulation et au séjour des personnes entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Burkina Faso, conclue le 14 septembre 1992 (loi d’approbation n°94-533 du 28 juin 1994, et décret de publication n°95-45 du 10 janvier 1995). Cette convention a une portée plus large puisqu’elle s’applique à l’ensemble des ressortissants des deux parties
Les dispositions du présent accord prévalent sur toutes dispositions contraires de la convention susmentionnée (article 17 de l’accord).



L’accord s’inscrit pleinement dans le cadre de l’Approche globale sur les migrations approuvée par le Conseil européen de décembre 2005 et réaffirmée par celui de décembre 2006. Il se situe également dans le prolongement de la conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement de Rabat (10-11 juillet 2006) qui a confirmé le lancement d’un partenariat global entre les pays d’origine, de transit et de destination de la migration, couvrant à la fois le développement, l’organisation de la migration légale des migrants et la lutte contre l’immigration irrégulière et de la conférence de Paris des 23-24-25 novembre 2008.

Au plan interne, l’accord s’inscrit, pour plusieurs de ses dispositions, dans le cadre de la loi du 24 juillet 2006 relatif à l'immigration et l'intégration et de celle du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, tout en introduisant un régime préférentiel par rapport au droit commun au bénéfice des ressortissants du Burkina Faso.

Les dispositions de l'accord dérogeant, dans un sens plus favorable, au droit commun portent sur :

- l'extension de l’autorisation de séjour de six mois, réservée aux titulaires d'un diplôme équivalent au master, aux étudiants titulaires d'une licence professionnelle qui souhaitent compléter leur formation professionnelle par une première expérience professionnelle en France, avant leur retour au pays ;

- le prolongement de six mois de cette autorisation de séjour à ces deux catégories d'étudiants ;

- l'octroi de la carte "compétences et talents" pour une durée de trois ans renouvelable alors que le droit commun limite ce renouvellement à une seule fois s’agissant d’un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire ;

- l'ouverture d'une liste de métiers beaucoup plus étendue que celle des trente métiers prévus par le droit commun aux ressortissants des pays tiers, sans aucune restriction concernant la situation de l'emploi.

Cet accord n’appelle pas, pour autant, de modification du droit interne.

- dans le domaine administratif :

La mise en œuvre de l’accord se traduira par :

- une augmentation dans un premier temps du nombre de visas de circulation délivrés, suivie d’une baisse, compte tenu du fait qu’une durée de validité plus longue réduit le nombre de renouvellements.

- la rédaction et la diffusion d’une circulaire d’application ; et la mise à jour de la réglementation,

-la mise en place des circuits nécessaires à l’organisation pratique de la migration,

- l’information des publics concernés,

- des réunions du Comité de suivi prévu à l’article 16 de l’accord.

III – Historique de la négociation de l’accord :

La conclusion d’un tel accord a été proposée aux autorités burkinabè en mai 2008 à Ouagadougou, en marge de la réunion préparatoire à la conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement de Paris.

Un projet d’accord a été soumis à la partie burkinabè en septembre 2008. Il a été évoqué par M. Hortefeux lors de ses entretiens à Ouagadougou les 6 et 7 octobre 2008. Une première session de négociations a eu lieu à Ouagadougou les 14-15 octobre 2008, suivie d’une deuxième à Paris les 20-21 novembre 2008. Les discussions se sont poursuivies par le canal diplomatique et ont abouti lors d’une troisième session de négociation le 9 janvier 2009 à Ouagadougou. L’accord a été signé par M. Hortefeux, le 10 janvier 2009 à Ouagadougou.

IV – Etat d’avancement des procédures d’approbation au Burkina Faso :

La procédure d’approbation est en cours. Le projet de loi devrait être soumis au parlement à la session d’automne 2009.


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