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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

     

Ministère des affaires étrangères

et européennes

     
     

NOR :

MAEJ1001969L

PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement

de la République française et le Gouvernement de Jersey relatif à l’échange de

renseignements en matière fiscale et à l’imposition des pensions

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ETUDE D’IMPACT

I – Situation de référence et objectif des accords

Jusqu’à une date récente, les efforts entrepris en matière de transparence et d’échange d’informations fiscales connaissaient peu de progrès. Malgré la publication des premières listes de paradis fiscaux en 2000 par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ces juridictions non coopératives en matière fiscale n’avaient guère amélioré leurs pratiques, même si la plupart s’étaient engagées à mettre en œuvre les standards internationaux en matière de transparence.

A partir de la fin de l’année 2008, sous l’impulsion de la conférence internationale organisée à Paris par les ministres des finances français et allemand le 21 octobre 2008, la situation a de nouveau évolué dans un sens favorable. Ainsi, grâce à une volonté politique forte et très largement partagée au plan international, notamment au sein du G20, l’ensemble des juridictions qui s’y refusaient jusqu’alors1 ont reconnu les standards internationaux en matière de transparence et d’échange d’informations. Dans le même temps, de nombreux pays se sont engagés dans la signature d’accords internationaux devant permettre l’échange de renseignements conformément à ces standards.

C’est dans ce contexte que la France a pu faire aboutir les négociations qui étaient en cours avec Jersey, Guernesey et l’Ile de Man de façon à pouvoir signer, dès la fin du mois de mars 2009, des accords d’échange de renseignements.

Les accords relatifs à l’échange de renseignements en matière fiscale visent à mettre en place un cadre juridique général et auparavant inexistant, de façon à permettre un échange effectif de renseignements, conformément au modèle d’accord mis au point en 2002 par l’OCDE.

L’accord d’échange de renseignements fiscaux avec Jersey contient en outre des règles visant à éviter les situations de double imposition ou de double exonération des pensions et revenus assimilés, en prévoyant que ces revenus soient imposés exclusivement au lieu de résidence du bénéficiaire, sous réserve que l’Etat de résidence exerce effectivement ce droit.

II – Conséquences estimées de la mise en œuvre des accords

Conséquences économiques et financières

Dans son rapport annuel de 2007, le Conseil des prélèvements obligatoires estimait le montant de la fraude fiscale et sociale annuelle entre 29 et 40 milliards d’euros. Il n’est cependant pas possible d’estimer, même en termes d’ordre de grandeur, la part de la fraude et de l’évasion fiscales qui impliquerait des opérateurs profitant de l’absence d’échange de renseignements existant avec Jersey.

Toutefois, la structure de l’économie de ces territoires, ajoutée à la proximité géographique avec la France, laissent supposer que le risque de fraude ou d’évasion fiscales est avéré.

Ainsi, le produit intérieur brut (PIB) de Jersey était de 4 089 millions de livres en 2007, dont
2 177 pour le secteur de la finance (53%). 47 banques hébergeaient 197 milliards de livres de dépôts et 1452 fonds, d’un montant total de 240 milliards de livres, étaient administrés depuis l’île en 20082. 200 000 Français viennent chaque année à Jersey, dont environ 2000 y résident en permanence mais, en dehors de l’électricité, que Jersey achète à la France, les échanges d’ordre commercial sont minimes, le partenaire privilégié des îles anglo-normandes étant le Royaume-Uni.

Conséquences juridiques

1. L’ordonnancement juridique n’est pas affecté par cet accord.

Toutefois, cet accord d’échange de renseignements offre la possibilité à la France de demander aux autorités de l’autre Partie contractante toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne et de transmettre ces informations aux autorités concernées, y compris les autorités juridictionnelles et administratives.

Pourront être sollicités, selon les termes des accords, tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts visés dans l’accord, pour le recouvrement et l’exécution des créances fiscales sur les personnes soumises à ces impôts, ou pour les enquêtes ou les poursuites en matière fiscale pénale à l’encontre de ces personnes. Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les trusts et les fondations. De plus, les Etats signataires ne pourront pas opposer un éventuel secret bancaire ni subordonner la délivrance de l’information à l’existence d’un intérêt pour l’application de leur propre législation fiscale.

La disposition visant à éviter les situations de double imposition ou de double exonération des revenus et pensions assimilés entre Jersey et la France devrait plutôt concerner les citoyens de Jersey résidant en France qui aujourd’hui s’acquittent des impôts français mais paient également des impôts à Jersey. Ces derniers ne paieraient ainsi des impôts qu’en France. Toutefois, afin de se prémunir de toute possibilité d’échapper à l’impôt, l’accord prévoit également que, si une partie décide d’exonérer en tout ou partie ces pensions versées à un de ses résidents, l’autre partie peut alors exercer son droit d’imposer à due concurrence.

2. Au regard des standards internationaux de transparence et d’échange d’informations, le présent accord est conforme au modèle d’accord sur l’échange de renseignements en matière fiscale élaboré par l’OCDE en 2002, comme les accords de même nature conclus généralement par nos principaux partenaires de l’OCDE.

Conséquences administratives

S’agissant des conséquences administratives des accords d’échange de renseignements, leur mise en œuvre sera gérée par la Sous-direction du Contrôle fiscal de la Direction générale des finances publiques et par les Directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales au niveau déconcentré. Ces services sont déjà en charge de la mise en œuvre de l’assistance administrative, que ce soit dans le cadre communautaire ou en application des conventions fiscales existantes. Au regard des volumes d’informations déjà échangés, l’entrée en vigueur de l’accord d’échange de renseignements avec Jersey ne devrait pas entraîner de surcharges administratives substantielles.

III – Historique des négociations

Les négociations avec les autorités de Jersey ont été entamées en 2004. La durée de ces négociations reflète à la fois la réticence initiale de cette juridiction à signer des accords d’échange de renseignements fiscaux et le niveau d’exigence élevé de la France.

Cependant, l’évolution du contexte international a finalement incité Jersey à hâter l’achèvement des négociations et à réduire ses prétentions en termes de contreparties.

IV – Etat des signatures et ratifications

Jersey

L’accord entre les gouvernements de Jersey et de la République française a été signé, par échange de lettres, le 19 mars 2009, par Mme Christine Lagarde, ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi et par M. Terry Le Sueur, Chief minister de Jersey.

L’accord a été ratifié par le Parlement de Jersey le 23 juillet 2009.

1 En particulier la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, l’Autriche, Andorre, Monaco et le Liechtenstein.

2 Source : Jersey in figures 2008


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