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Projet de loi

portant

nouvelle organisation du marché de l’électricité

(NOME)

Etude d’impact

Avril 2010

SOMMAIRE

Partie A : Étude d'impact des articles 1 à 9 : mise en place de l'accès régulé à l'électricité de base, de l'obligation de capacité, évolution des tarifs réglementés de vente et de la Commission de régulation de l'énergie 4

1 SITUATION DE RÉFÉRENCE ET DIFFICULTÉS À RÉSOUDRE : une ouverture progressive à la concurrence des marché européens de l'électricité qui n'a pas atteint, en France, les objectifs attendus 4

2 OBJECTIFS : assurer aux consommateurs le bénéfice de l'investissement consenti dans le nucléaire, inciter à l'innovation et à la maîtrise de la demande en électricité et favoriser les investissements dans le cadre du marché européen de l'électricité 14

3 Parmi les différentes OPTIONS, le gouvernement choisit la mise en place d'un accès régulé à l'électricité de base, suivant les préconisations de la commission Champsaur. 15

4 IMPACTS DE LA RÉFORME ENVISAGÉE 20

Description de la nouvelle organisation du marché de l'électricité inscrite dans le projet de loi 20

Mise en place d'un accès régulé des fournisseurs à la production électrique de base d'EDF 20

Obligation de capacité 24

Tarifs réglementés de vente 24

4.1 Hypothèses de cadrage 25

4.1.1 Écart prix de marché - prix régulé 25

4.1.2 Volume cédé aux fournisseurs alternatifs 26

4.1.3 Prix de la garantie de capacité 26

4.2 Impacts économiques pour les acteurs du marché de l'électricité 27

4.2.1 Les fournisseurs alternatifs 27

4.2.2 EDF 29

4.2.3 Les consommateurs 32

4.2.4 Les gestionnaires de réseau 39

4.2.5 Les entreprises locales de distribution (ELD) 40

4.2.6 Impacts sur le marché de gros de l'électricité 40

4.2.7 Ces impacts seront suivis de manière dynamique afin d'adapter la régulation aux enjeux. 44

4.3 Impacts macro économiques 44

4.3.1 L'impact macroéconomique associé à la maîtrise de la facture électrique est potentiellement très important 44

4.3.2 La nouvelle organisation du marché électrique pourrait conduire à un léger gain macroéconomique à long terme par rapport à la situation de dérégulation des prix pour les gros consommateurs. 45

4.3.3 L'absence de volatilité du prix de l'électricité permet aux acteurs d'améliorer leurs anticipations et joue un rôle assurantiel par rapport aux chocs des prix pétroliers 45

4.4 Impacts sur les finances et sur l'emploi public 46

4.4.1 Impact financier pour l'État 46

4.4.2 Impact sur l'emploi public 47

4.5 Impacts environnementaux 47

4.5.1 La mise en œuvre du Grenelle de l'environnement conduit à une réduction des émissions de CO2 par rapport à aujourd'hui 47

4.5.2 La réforme envisagée permettra de clarifier les signaux économiques, d'inciter à une meilleure maîtrise de la demande en électricité et contribuera à l'atteinte des objectifs de la PPI 49

4.5.3 Certes, le scénario virtuel de dérégulation des prix pourrait se traduire par des émissions de CO2 encore inférieures mais exclusivement du fait de prix plus élevés 50

4.6 Impacts sociaux 51

4.6.1 La réforme conforte les tarifs réglementés de vente d'électricité pour les petits consommateurs et a donc un impact social bénéfique 51

4.6.2 Les consommateurs les plus modestes continueront à pouvoir bénéficier du tarif de première nécessité 51

4.7 Impacts juridiques 52

5 CONSULTATIONS MENÉES 53

6 APPLICATION DE LA RÉFORME DANS LE TEMPS 56

7 GLOSSAIRE 57

8 ANNEXE 1 : rapport de la Commission sur l'organisation des marchés de l'électricité, présidée par Paul Champsaur - avril 2009 59

9 ANNEXE 2 : échange de lettres entre le Premier Ministre et les commissaires européens à la concurrence et à l'énergie - 15 septembre 2009 59

10 ANNEXE 3 : tableau de concordance pour la transposition des dispositions relatives à la protection des consommateurs d’électricité et de gaz des directives européennes 2009/72 et 2009/73 60

Partie B : Étude d'impact de l'article 10 autorisant le gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires à la transposition des directives 2009/72 et 2009/73 75

Partie C : Étude d'impact de l'article 11 modifiant l'art. 20 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 relative à la transparence et à la sûreté nucléaire 77

Partie A : Étude d'impact des articles 1 à 9 : mise en place de l'accès régulé à l'électricité de base, de l'obligation de capacité, évolution des tarifs réglementés de vente et de la Commission de régulation de l'énergie

1 SITUATION DE RÉFÉRENCE ET DIFFICULTÉS À RÉSOUDRE : une ouverture progressive à la concurrence des marché européens de l'électricité qui n'a pas atteint, en France, les objectifs attendus

Le système électrique et le marché de l'électricité sont organisés autour de quatre grands pôles : la production, le transport, la distribution et la fourniture (ou commercialisation) de l'électricité. Depuis 1946 et jusqu'avant 2000, l'ensemble de ces activités étaient assurées par les opérateurs historiques (EDF et distributeurs non nationalisés), en situation de monopoles locaux.

Depuis 1996, la France est engagée, aux côtés de ses partenaires européens, dans un processus de construction d'un marché européen de l'énergie qui vise à développer une offre d'énergie sûre, respectueuse de l'environnement et compétitive, au bénéfice de l'ensemble des consommateurs européens. L'Union européenne a ainsi adopté deux premiers paquets de mesures législatives relatives au marché intérieur du gaz et de l'électricité en 1996, 1998 et 20031, complétés par un troisième, adopté à l'été 20092. L'objectif des deux premiers paquets était d'organiser l'ouverture du marché de l'énergie en prévoyant, pour les consommateurs, la faculté de choisir librement son fournisseur, pour les producteurs, la liberté d'établissement, et pour les utilisateurs des réseaux de transport et de distribution, le droit d'accès aux infrastructures dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.

Le 3e paquet vise en particulier à renforcer la régulation des réseaux de transport et la coordination des gestionnaires de réseaux. Il améliore notamment la séparation des activités d'approvisionnement et de production, d'une part, et de la gestion des réseaux, d'autre part. Il crée par ailleurs une Agence européenne de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER). La transposition de ces nouvelles dispositions des directives est proposée par ordonnance (cf. partie B de la présente étude, pp. 75 et suivantes).

Pour transposer les directives communautaires, la France a fait le choix d'une ouverture progressive et maîtrisée du marché, et l'ouverture à la concurrence des marchés de l'électricité a été achevée le 1er juillet 2007. Ainsi, les lois

- n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité,

- n°2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie,

- n°2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières,

- et n°2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie

ont notamment :

- complètement ouvert à la concurrence l'activité de production d'électricité : dès lors qu'il dispose des capacités techniques et financières, tout industriel peut désormais construire et exploiter une centrale de production d'électricité après avoir obtenu les autorisations administratives requises,

- organisé la régulation des réseaux de transport et de distribution qui restent en monopole, comme le permettent les directives,

- progressivement ouvert la fourniture d'électricité en rendant les clients finals éligibles au libre choix de leur fournisseur :

en 2000, les sites industriels consommant plus de 16 GWh/an représentant 107 TWh/an soit 30% du marché,

en 2003, les sites consommant plus de 7 GWh/an (123 TWh/an soit 37% du marché)

en 2004, tous les clients professionnels (310 TWh, 70% du marché)

enfin au 1er juillet 2007, les clients particuliers.

Ainsi, aujourd'hui tout consommateur peut librement choisir son fournisseur d'électricité parmi ceux ayant déclaré exercer l'activité d'achat - revente d'électricité.

La France ayant souhaité jusqu'ici conserver, pour son marché intérieur, un système de tarifs réglementés de vente d'électricité, fournis par les opérateurs historiques, les consommateurs ont le choix entre des offres libres et des offres réglementées. Néanmoins, sauf pour les particuliers pendant une période transitoire s'achevant mi-2010, le choix d'une offre libre (l'exercice de l'éligibilité) est irréversible, c'est-à-dire qu'après avoir choisi de conclure, pour un site de consommation, une offre libre, le consommateur ne peut plus bénéficier pour ce site d'une offre au tarif réglementé.

Les tarifs réglementés sont fondés sur les coûts complets d'EDF, dont l'essentiel de la production provient de centrales nucléaires et hydrauliques, moyens de production compétitifs et insensibles aux évolutions du prix des hydrocarbures et des quotas de CO2. Les tarifs réglementés de vente connaissent ainsi une évolution régulière, fidèle à l'évolution des coûts complets d'EDF3.

En revanche, les prix de marché de l'électricité se déterminent en fonction de l'équilibre entre l'offre et de la demande au niveau européen, les réseaux étant interconnectés. Ils s'établissent, conformément à la théorie économique, au niveau du coût marginal de production de la dernière centrale appelée à fonctionner, soit la plus chère des centrales en fonctionnement au niveau du marché européen, et par exemple fréquemment au niveau du coût du combustible et du CO2 d'une centrale à charbon fonctionnant en Allemagne4.

Ainsi, comme le montre le graphique ci-dessous, les prix de marché présentent une forte volatilité et ne reflètent, en France, pas les fondamentaux de coût du parc de production électrique qui devraient rester durablement inférieurs aux prix de marché en Europe, le parc nucléaire historique étant durablement compétitif par rapport aux autres moyens de production.

Au début de l'ouverture des marchés à la concurrence, les prix de marché étaient inférieurs aux tarifs réglementés de vente, en raison notamment du faible niveau du cours des hydrocarbures et combustibles et d'une surcapacité de production. Aussi, de nombreux industriels ont choisi de conclure une offre librement négociée. A partir de 2005, la réduction des surcapacités5, la hausse des prix des combustibles et l'entrée en vigueur du système d'échange de quotas de CO2 ont entraîné en Europe, et donc en France, une hausse des prix de marché de l'électricité, déconnectée des fondamentaux économiques du parc français de production d'électricité. Les prix de marché sont donc devenus largement supérieurs aux tarifs réglementés de vente.

Les consommateurs ne pouvant pas solliciter à nouveau le bénéfice des tarifs réglementés, et les prix de marché atteignant des niveaux particulièrement élevés, la situation est devenue difficile pour les consommateurs industriels d'électricité, notamment ceux pour lesquels l'électricité constitue une charge importante par rapport à leur valeur ajoutée (les « électro-intensifs »). Le Parlement et le gouvernement ont donc décidé par la loi du 7 décembre 2006 de mettre en place le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché (TaRTAM) qui permet aux consommateurs non résidentiels (i.e. : professionnels, industriels, etc.6) ayant exercé leur éligibilité de revenir à un tarif réglementé pour une durée initialement fixée à deux ans, ensuite prolongée jusqu'au 30 juin 2010. Le TaRTAM ne peut être supérieur de plus de 25% au tarif réglementé de vente.


NB : dans la légende : prix issu du tarif réglementé vert A8 base ; estimation du prix payé par un client industriel en offre libre pour une consommation en base

Le système actuel n'est satisfaisant ni au plan juridique, ni au plan économique

Au plan économique :

A ce stade, force est de constater que, en France, les objectifs de l'ouverture à la concurrence des marchés européens de l'électricité (énergie sûre et compétitive au bénéfice des consommateurs européens) n'ont pas été atteints. Le constat est même fait que, sans régulation spécifique, la compétitivité du parc de production électrique français ne peut bénéficier au consommateur final d'électricité.

Ainsi, aujourd'hui, les consommateurs sont cloisonnés dans des offres, réglementées ou non, sans cohérence7. La multiplicité des niveaux de prix (tarifs réglementés, TaRTAM, offres de marché) crée des distorsions inefficaces sur le plan microéconomique. Elle contribue en outre à renforcer l'incertitude quant au prix futur de l'électricité.

Les parts de marché entre EDF et les fournisseurs alternatifs se décomposent entre les différentes offres tarifaires comme indiqué dans le tableau suivant.

Parts de marché des fournisseurs alternatifs par catégorie de consommateurs


De façon dynamique, on observe depuis plusieurs trimestres une stagnation des parts de marchés des fournisseurs alternatifs sur le segment des clients non résidentiels, notamment en raison du TaRTAM, et un faible développement des fournisseurs alternatifs sur le segment des clients résidentiels. Sur ce dernier segment, les fournisseurs alternatifs ne disposent pas de source d'approvisionnement en électricité compétitive par rapport au coût moyen de production d'EDF, lequel repose essentiellement sur le nucléaire, et ne disposent donc pas des moyens leur permettant de faire des offres compétitives par rapport aux tarifs réglementés
8.

Compte tenu de ces conditions de concurrence, les fournisseurs alternatifs n'ont pu que proposer des offres très similaires, calées notamment sur les tarifs réglementés. Ils ne sont pas incités à se démarquer et à proposer des services innovants, notamment en terme de maîtrise de la demande en électricité. Par ailleurs, de nombreuses incertitudes pèsent sur l'évolution future des dispositifs règlementaires actuellement en vigueur. Dans ces conditions, ces fournisseurs alternatifs adoptent une posture d'attente plutôt qu'une réelle stratégie de conquête et d'innovation.

Au 31 décembre 2009, la CRE a constaté que, sur les 365 000 mises en services par mois environ, seules 10% se faisaient au profit de fournisseurs alternatifs.

Au plan juridique :

Le TaRTAM n'est pas pérenne, s'agissant d'un dispositif transitoire. La loi de 2006 en fixe le terme au 30 juin 2010. Lors de l'examen de la loi de 2006, le Conseil constitutionnel a considéré que les tarifs réglementés « imposent aux opérateurs historiques du secteur de l'énergie, et à eux seuls, des obligations tarifaires permanentes, générales et étrangères à la poursuite d'objectifs de service public »9. Selon cette décision, le TaRTAM, en ce qu'il s'applique à tous les professionnels, ne saurait être que temporaire au risque d'aller à l'encontre des objectifs d'ouverture à la concurrence des marchés de l'énergie.

De plus, les autorités européennes mettent en cause la compatibilité du dispositif tarifaire français avec le droit de l'union. Elles ont engagé une procédure d'infraction contre la France pour défaut de transposition de la directive 2003/54 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'énergie et ont également ouvert une procédure d'enquête au titre des aides d'Etat à l'encontre des tarifs réglementés de vente d'électricité et du TaRTAM.

S'agissant du défaut de transposition de la directive 2003/54, la France a ainsi fait l'objet d'une mise en demeure du 10 avril 2006, portant notamment sur le maintien des tarifs réglementés pour les consommateurs non résidentiels. La réponse des autorités françaises de juin 2006 n'ayant pas suffi à convaincre la Commission, l'infraction a été confirmée par un avis motivé du 15 décembre 2006. Dès juillet 2007, la saisine de la Cour européenne a été envisagée.

S'agissant de la procédure engagée au titre des aides d'État, une enquête approfondie a été ouverte le 13 juin 2007 au sujet des tarifs réglementés de vente d'électricité et du TaRTAM dont bénéficient certaines grandes et moyennes entreprises en France. L'enquête a été étendue en mars 2009 suite à la décision de la France de prolonger le système du TaRTAM.

Ces procédures sont actuellement en suspens dans l'attente de la mise en œuvre de la nouvelle organisation du marché de l'électricité. En cas de reprise des procédures, la France pourrait être condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) à de lourdes sanctions pécuniaires (astreintes ou amendes) pour défaut de transposition des directives communautaires et la Commission pourrait également exiger le remboursement des aides qu'elle estimerait illégalement perçues par les entreprises consommatrices d'électricité.

En raison de l'évolution des règles applicables au secteur de l'énergie, le dispositif français n'est aujourd'hui plus conforme ni au droit national, ni au droit de l'Union. Au plan national, le Conseil constitutionnel s'est déjà prononcé sur l'incompatibilité manifeste du système actuel avec le droit de l'union dans une décision du 30 novembre 200610. Au plan européen, la Commission européenne, dans sa communication du 10 janvier 2007 accompagnant les nouvelles propositions de législation (le « troisième paquet énergie »), a également jugé insuffisantes les dispositions actuelles. En plus des deux procédures ouvertes contre la France, tendant à remettre en cause les tarifs réglementés, des enquêtes ont été ouvertes à l'encontre d'opérateurs historiques pour abus de position dominante11 ou entente. Elles pourraient, en l'absence de modification du droit français, aboutir à une saisine de la CJUE. Le droit français doit donc impérativement évoluer.

Il est vrai que le cas français n'est pas isolé : l'état d'avancement réel de l'ouverture à la concurrence des marchés de l'énergie est très différent selon les pays. Ceux-ci n'ont pas tous, à ce stade, transposé les directives européennes de 2003 mentionnées. Une enquête sectorielle de la Commission sur les marchés du gaz et de l'électricité, dont un rapport préliminaire avait été publié fin 2005, a recensé les domaines où la concurrence n'est pas pleinement effective et dans lesquels il convient d'intervenir afin que l'ouverture des marchés puisse porter ses fruits. En 2006, la Commission a poursuivi 16 Etats membres qui tardaient à libéraliser leur marché. Dans son communiqué du 13 mars 2010 accompagnant la publication d'un rapport d'étape sur la création d'un marché intérieur du gaz et de l'électricité, la Commission européenne fait à nouveau le constat que la l'ouverture des marché est loin d'être effective. Elle rappelle que les directives existantes ne sont pas encore correctement transposées par les États membres et que de graves problèmes de transparence, de régulation, de coordination des gestionnaires de réseau persistent.

Comme ses partenaires, la France doit donc s'adapter au nouveau cadre juridique dans le domaine de l'énergie. Elle l'a déjà fait pour partie, mais ces évolutions ne s'avèrent aujourd'hui ni suffisantes au plan juridique ni satisfaisantes au plan économique dans la mesure où elles n'ont pas conduit à l'ouverture escomptée du marché de la fourniture d'électricité.

L'incertitude juridique relative à l'organisation actuelle du marché électrique fait subir un grave préjudice aux consommateurs français et aux acteurs du marché de l'électricité. En effet, ceux-ci, peu confiants dans la robustesse du dispositif actuellement en vigueur, ne sont pas en capacité de prédire avec un bon niveau de confiance l'évolution du système. Cette faiblesse est particulièrement préoccupante pour les consommateurs industriels, dont les hypothèses d'évolution des conditions d'approvisionnement en électricité constituent l'un des critères importants dans les décisions d'investissements. Ce manque de visibilité peut nuire également aux décisions d'investissement dans les moyens de production électrique. Elle est en outre paradoxale au regard des caractéristiques du parc français, largement nucléaire, dont les facteurs de coûts ne peuvent varier de façon erratique.

L'équilibre entre l'objectif d'ouverture des marchés concurrentiels de l'électricité et le droit à l'électricité pour tous est perfectible

Explicitement affirmé par l'article 1er de la loi n°2000-108 du 10 février 2000, le droit à l'électricité pour tous requiert de garantir un accès des consommateurs résidant sur le territoire national à l'énergie électrique dans des conditions reflétant les choix énergétiques français. La spécificité française que constitue l'existence d'un parc nucléaire historique doit donc être prise en compte pour maintenir l'équilibre entre l'objectif d'ouverture à la concurrence et la préservation du droit à l'électricité pour tous.

Si la France ne prend pas d'initiative, elle s'expose à l'engagement de procédures au niveau européen dont les conséquences sont peu prévisibles mais pourraient être, même à très court terme, extrêmement préjudiciables aux intérêts français des consommateurs, des opérateurs (dont EDF) ou de l'économie. Il parait donc préférable de faire évoluer le dispositif en vigueur, sans renoncer à l'acquis du maintien d'un fort niveau de régulation, ciblé de façon plus efficace, dont le bilan coût-avantage des différents intérêts pris en compte est à coup sûr plus favorable que ceux d'une initiative européenne non impulsée par la France.

C'est pourquoi, en s'engageant dans la réforme de l'organisation du marché électrique, le gouvernement a fait le choix d'un équilibre entre les intérêts des consommateurs pour des prix compétitifs et stables, les intérêts environnementaux pendant cette phase de transition énergétique et les intérêts des différents acteurs, historiques et nouveaux entrants, du marché de l'énergie. Par un échange de courriers du 15 septembre 2009 (cf. annexe 2), le Premier ministre a présenté aux commissaires européens à la concurrence et à l'énergie les grandes lignes du projet de la réforme relative à l'organisation du marché de l'électricité. En réponse, les commissaires concernés ont indiqué que ce projet de réforme s'inscrivait dans le cadre d'une amélioration effective des conditions d'ouverture du marché électrique à la concurrence. Mieux, les commissaires ont estimé que la mise en place d'une telle organisation répondrait aux griefs formulés par la Commission et serait de nature à permettre la clôture des procédures contentieuses en cours. La nécessité de la mise en œuvre du dispositif par le biais d'une loi apparaît dans cet échange de courriers.

Encadré : les prix de l'électricité en Europe

Source : Eurostat

Au sein de l'Union européenne, la France affiche des prix de l'électricité pour le consommateur final parmi les plus bas des 27 pays (cf. graphes). Cette situation reflète la compétitivité du mix électrique français composé à 78% de nucléaire et environ 14% d'hydraulique. Les tarifs réglementés, calés sur le coût de production moyen du parc français, permettent aux consommateurs de bénéficier de cet atout. La très grande majorité des pays européens présentent quant à eux des parcs de production constitués essentiellement de centrales thermiques plus coûteuses.

Composition du parc de production d'électricité des pays de l'UE



Source : Commission Européenne

La forte particularité de la structure de production du parc français (la France est le seul pays au monde à produire plus des trois quarts de son électricité à partir de nucléaire) a toutefois peu de répercussions sur le niveau du prix de gros de l'électricité.

En effet, le prix de gros de l'électricité :

- dépend de l'équilibre entre l'offre et la demande sur la plaque européenne (et non uniquement de la situation en France),

- correspond au coût de la centrale marginale (i.e. la plus chère en fonctionnement).

En conséquence, et notamment du fait des interconnexions avec les pays voisins, le prix de gros se cale sur le coût de centrales fonctionnant avec des énergies fossiles et carbonées (gaz, charbon, fioul). Il est très peu influencé par le nucléaire, et se situe donc à un niveau bien supérieur au coût moyen du parc français. Ainsi, si les caractéristiques fondamentales des parcs de production français et allemand diffèrent largement, les prix du marché de gros, du fait des échanges transfrontaliers, ont des évolutions similaires (cf. graphe infra). L'interconnexion des « plaques » est optimale du point de vue économique global (sécurité d'approvisionnement, recourt aux moyens de production les moins chers au niveau de la plaque interconnectée) mais conduit, par rapport à une situation hypothétique où la France serait isolée, à un ajustement du prix de gros à un niveau bien supérieur à celui correspondant au coût du nucléaire.

Source : Powernext

Or, dans un contexte de libéralisation du marché de l'électricité, le prix du marché de gros, du fait qu'il reflète l'équilibre offre demande au niveau global, est devenu une référence pour tous les acteurs. Il est par ailleurs représentatif du coût d'approvisionnement d'un nouvel entrant sur le marché de l'électricité. En conséquence, la déréglementation « brutale » du prix de l'électricité au client final, sans mesure d'accompagnement, se traduirait en France par une forte hausse de la facture électrique, induite par l'alignement de toutes les offres de détail sur le prix de gros.

Cette situation ne serait pas problématique si la technologie nucléaire était facilement diffusable et rapide à déployer. En effet, dans tous les pays les industriels auraient alors intérêt à construire leurs propres réacteurs nucléaires le plus rapidement possible, ce qui entraînerait, le cas échéant, une baisse du prix de gros de l'électricité. Cependant, le développement d'une filière nucléaire est un choix politique fort et la durée de construction des réacteurs est d'au moins cinq années, précédées souvent d'une procédure d'autorisation qui s'écoule aussi sur plusieurs années, afin de garantir le respect des droits des citoyens à l'information et à la concertation. Il n'y a donc pas lieu d'attendre à ce que l'écart entre le prix de gros et le coût moyen de production du parc français ne diminue.

2 OBJECTIFS : assurer aux consommateurs le bénéfice de l'investissement consenti dans le nucléaire, inciter à l'innovation et à la maîtrise de la demande en électricité et favoriser les investissements dans le cadre du marché européen de l'électricité

La situation actuelle, dans laquelle la concurrence peine à se développer et où le maintien en l'état des tarifs réglementés est juridiquement fragile, n'apparaît donc pas tenable, et ce d'autant moins que le dispositif transitoire mis en place, le TaRTAM, ne donne pas pleine satisfaction. C'est pourquoi le Ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer et la Ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ont demandé à une commission de parlementaires (MM. les députés Brottes et Lenoir et MM. les sénateurs Pastor et Poniatowski) et de personnalités qualifiées (MM. Bergougnoux, Hellwig, Labetoulle et Percebois), présidée par M. Paul Champsaur, de formuler des propositions sur l'organisation du marché électrique. Le rapport de cette commission, auquel il a déjà été fait référence, est joint en annexe à la présente étude d'impact et ne peut en être dissociée.

Comme l'indique la lettre de mission des ministres à la commission présidée par M. Paul Champsaur, l'objectif est de disposer d'une organisation de marché qui, simultanément, protége les intérêts des consommateurs, incite à la maîtrise de la demande et aux investissements, et s'inscrit dans le marché européen de l'électricité. Plus précisément, il s'agit de permettre aux consommateurs d'électricité de bénéficier des avantages compétitifs du parc de production électrique français, d'assurer aux nouveaux entrants sur le marché de une marge de manœuvre suffisante pour se développer, et développer ainsi la concurrence et l'innovation tout en ne réduisant pas les incitations pour ces nouveaux acteurs à investir dans des moyens de production d'électricité.

Si, sur l'initiative du sénateur Poniatowski, le sujet des règles de réversibilité entre le choix d'une offre libre et de tarifs réglementés est déjà à l'ordre du jour du Parlement12, le gouvernement entend s'inscrire dans une démarche plus générale proposant une nouvelle régulation plus ciblée et plus efficace.

3 Parmi les différentes OPTIONS, le gouvernement choisit la mise en place d'un accès régulé à l'électricité de base, suivant les préconisations de la commission Champsaur.

En préliminaire, il faut noter que le passage par la loi pour atteindre les objectifs décrits dans la partie précédente est nécessaire. Sans cela, il faudrait compter sur des engagements volontaires que prendrait EDF afin de fournir de l'énergie à ses concurrents à un prix reflétant les coûts du parc nucléaire historique. Toutefois, le prix des contrats de ventes qu'EDF a récemment signés avec d'autres fournisseurs ont tous pour sous jacent le coût du « nouveau nucléaire » supérieur aux coûts du parc nucléaire historique du fait d'exigences plus fortes en matière de sûreté. Leur prix est donc sensiblement supérieur à celui permettant aux fournisseurs alternatifs de faire des offres similaires aux tarifs réglementés.

Dans son rapport, la commission Champsaur passe en revue les différentes options envisageables. Plusieurs scénarii peuvent être considérés :

1. statu quo juridique impliquant l'extinction programmée du TaRTAM qui arrive à échéance en 2010, sans solution de remplacement à ce jour,

2. prolongation du TaRTAM et ainsi maintien de la situation économique actuelle,

3. libéralisation complète des prix avec la disparition de tout tarif réglementé pour les industriels et maintien pour les petits consommateurs

4. libéralisation complète des prix avec la disparition de tout tarif réglementé, tant pour les industriels que pour les petits consommateurs13,

5. libéralisation complète des prix, accompagnée d'un mécanisme de taxation du parc de production électrique de base et d'une réallocation de cette ressource14,

6. mise en place d'un accès régulé à l'électricité de base accompagné du maintien des tarifs réglementés pour les petits consommateurs et d'une disparition progressive des tarifs réglementés pour les industriels15.

Le premier scénario de statu quo juridique impliquerait la fin du TaRTAM et conduirait donc les consommateurs ayant exercé leur éligibilité à ne pouvoir souscrire que des offres au prix de marché, ne leur assurant donc pas le bénéfice de la compétitivité du parc de production français. En outre, ce statu quo juridique resterait contesté par les autorités européennes essentiellement en ce qui concerne le maintien de tarifs réglementés de vente aux consommateurs industriels qui n'ont pas exercé leur éligibilité. Enfin, dans un tel scénario, les nouveaux entrants n'auraient pas de marge de développement sur le segment des consommateurs n'ayant pas encore exercé leur éligibilité.

Le deuxième scénario diffère du premier par la prolongation du TaRTAM. Si au plan économique il pourrait apparaître supportable pour les consommateurs, le TaRTAM a conduit à un gel des parts de marché des fournisseurs et a pu contribuer à réduire l'activité sur le marché de gros (voir infra). De plus, un tel scénario serait très fragile au regard du droit de l'union. En effet, le TaRTAM qui ne serait plus transitoire, serait d'autant plus contesté par les autorités européennes qui ont d'ores et déjà ouvert un contentieux contre la France au titre des aides d'Etat risquant de conduire à terme à la fin non maîtrisée des tarifs réglementés (voir supra). Enfin, ce scénario ne résoudrait pas les problèmes posés par le cloisonnement du marché électrique en différents sous-marchés étanches.

Le troisième scénario apparaît juridiquement compatible avec les critiques de la Commission européenne puisque l'existence de tarifs réglementés pour les petits consommateurs n'est pas exclue par la nouvelle directive. Économiquement, il permet donc aux petits consommateurs de bénéficier de la compétitivité du parc de production français ; a contrario, il ne permet pas le développement des fournisseurs alternatifs (par défaut d'accès à l'électricité de base dans des conditions similaires à celles d'EDF), et reste de ce fait contestable. En revanche, les gros consommateurs se verraient proposer des prix de l'électricité déconnectés des fondamentaux de coûts du parc français. Par conséquent, dans ce scénario, une part importante de l'avantage de la compétitivité du parc nucléaire, correspondant à la fourniture des gros consommateurs, est transférée à l'opérateur historique au détriment des gros consommateurs.

Le quatrième scénario (libéralisation totale des prix) permet le développement de la concurrence sur tous les segments de marché. En ce sens, il apparaît juridiquement robuste aux critiques de la Commission Européenne. Deux critiques majeures ont néanmoins conduit la commission Champsaur à l'écarter. En raison de la disparition de tout tarif réglementé et donc de l'alignement des prix de détail sur les prix de gros, il ne permet aux consommateurs de bénéficier ni de l'investissement consenti dans le nucléaire, ni de leur choix majoritaire d'accepter la présence de centrales nucléaires sur le territoire national. La totalité de l'avantage de la compétitivité du parc électronucléaire bénéficierait à l'opérateur historique, au détriment des consommateurs. Renforçant la position dominante d'EDF, cette situation pourrait en outre pousser la Commission Européenne à prôner des solutions radicales, comme une restructuration industrielle se traduisant par le démantèlement du parc nucléaire au profit de plusieurs opérateurs, afin de renforcer la concurrence. En l'absence d'initiative de la France et en cas d'aboutissement des contentieux engagés par les autorités européennes, c'est à une organisation de ce type que le marché français pourrait aboutir.

Les cinquième et sixième scenarii sont précisément décrits et analysés dans le rapport de la commission Champsaur. Ils devraient permettre de garantir le bénéfice de la compétitivité du parc de production à l'ensemble des consommateurs, le développement de la concurrence et être compatible avec le droit européen. La commission Champsaur préconise néanmoins, entre ces deux scenarii, le scénario 6, c'est-à-dire celui du système d'accès régulé à l'électricité de base.

Le gouvernement a décidé de suivre cette préconisation et de mettre en place un accès régulé à l’électricité de base, assorti du maintien des tarifs réglementés pour les petits consommateurs, dont l'impact est précisément évalué au § IV de la présente étude.

En effet, par rapport à la solution 5, le gouvernement préfère :

- éviter de faire supporter la volatilité des prix de marché aux consommateurs

En effet, la redistribution du produit de la taxe serait complexe à gérer et ne pourrait qu'intervenir avec un décalage par rapport aux évolutions de prix du marché de gros. Ainsi, les consommateurs finals devraient supporter la volatilité des prix du marché de gros qui ne reflète pas la structure des coûts du parc de production en France.

- ne pas s'exposer à la difficulté de définir les modes et bénéficiaires de la redistribution

La taxation se traduirait par un prélèvement sur EDF, aussi volatil que les prix de marché, de 4 à 11 Md€ par an (sur la base de différentes hypothèses d'écart entre le prix de gros de l'électricité et le coût de production du nucléaire). La redistribution de tels montants aux consommateurs finals d'électricité ne manquerait pas de provoquer des débats liés non seulement aux critères de redistribution (définition d'un niveau plus ou moins forfaitaire, fonction des caractéristiques des consommateurs, compatibilité de cette redistribution envers les professionnels avec les règles relatives aux aides d'Etat, …) mais également à la pertinence du choix de ces bénéficiaires (alternative d'usage du produit de la taxe pour aider d'autres secteurs de l'économie ou pour le budget de l'Etat). Cela ferait inévitablement peser un risque politique sur ce système de régulation, réduisant d'autant la visibilité des acteurs et nuisant ainsi aux investissements et aux changements durables de comportement, notamment en matière d'économie d'énergie.

- mettre en place un système de régulation sans intermédiaire budgétaire et reposant uniquement sur des principes de droit de la concurrence.

Le scénario 6 correspond en effet à un transfert le plus direct possible, compte tenu des enjeux liés au développement de la concurrence, de la compétitivité du parc nucléaire historique vers le consommateur final d'électricité. De ce fait, il apparaît comme le plus robuste, offre une meilleure visibilité et correspond à l'objectif politique poursuivi.

Une telle organisation du marché électrique impose notamment des obligations à EDF qui seront strictement proportionnées à l'objectif poursuivi, donne des droits aux fournisseurs d'électricité aux clients finals résidant en France, établit de nouveaux principes pour l'élaboration des tarifs et confie de nouvelles missions à la Commission de régulation de l'énergie. Cette organisation du marché nécessite d'être mise en place par voie législative.

Synthèse de l'analyse d'option

 

Gros consommateurs

Petits consommateurs

EDF

Nouveaux entrants

Robustesse juridique

Scénario 1

(statu quo juridique impliquant l'extinction programmée du TaRTAM qui arrive à échéance en 2010, sans solution de remplacement à ce jour)

Pas de bénéfice de la compétitivité du parc nucléaire historique pour ceux qui ont fait jouer leur éligibilité

Protégés par le tarif réglementé de vente

Accroissement de la rentabilité, par le biais d'une augmentation des prix sans rapport avec les fondamentaux des coûts, pour ceux des gros consommateurs ayant exercé leur éligibilité

Pas de marge de développement sur les consommateurs n'ayant pas exercé aujourd'hui leur éligibilité

fragile

Scénario 2

(prolongation du TaRTAM et ainsi maintien de la situation économique actuelle)

Maintien de la situation actuelle

protégés par le tarif réglementé de vente

Maintien de la situation actuelle

Maintien de la situation actuelle

très fragile

Scénario 3

(libéralisation complète des prix avec la disparition de tout tarif réglementé pour les industriels et maintien pour les petits consommateurs)

Exposés au prix de marché

Protégés par le tarif réglementé de vente

Accroissement de la rentabilité, par le biais d'une augmentation des prix sans rapport avec les fondamentaux des coûts, pour tous les gros consommateurs

Des marges de développement du fait de la suppression des tarifs réglementés pour les gros consommateurs

compatible

Scénario 4

(libéralisation complète des prix avec la disparition de tout tarif réglementé, tant pour les industriels que pour les petits consommateurs)

Exposés au prix de marché

Exposés au prix de marché

Accroissement de la rentabilité, par le biais d'une augmentation des prix, sans rapport avec les fondamentaux des coûts, pour tous les consommateurs, gros ou petits

Des marges de développement du fait de la suppression des tarifs réglementés pour tous les consommateurs

Robuste

Scénario 5

(libéralisation complète des prix, accompagnée d'un mécanisme de taxation du parc de production électrique de base et d'une réallocation de cette ressource)

Protection dépendant des conditions de réallocation des ressources de la taxe

Protection dépendant des conditions de réallocation des ressources de la taxe

Maintien de la situation actuelle, à supposer que la taxe permettre de restituer l'écart entre les prix et les coûts

Des marges de développement du fait de la suppression des tarifs réglementés pour les gros consommateurs

Compatible

Scénario 6

(mise en place d'un accès régulé à l’électricité de base accompagné du maintien des tarifs réglementés pour les petits consommateurs et d'une disparition progressive des tarifs réglementés pour les industriels)

Bénéfice de la compétitivité du parc nucléaire historique garanti par la concurrence ayant accès régulé à l’électricité de base

Protégés par les tarifs réglementés de vente

Maintien de la situation actuelle

Sont sur le même pied d'égalité que l'opérateur historique

Compatible

4 IMPACTS DE LA RÉFORME ENVISAGÉE

Description de la nouvelle organisation du marché de l'électricité inscrite dans le projet de loi

D'un point de vue opérationnel, la nouvelle organisation du marché électrique repose sur trois dispositions fondamentales :

• la mise en place, au profit des fournisseurs alternatifs, d'un droit d'accès régulé à la production électrique de base d'EDF à des conditions représentatives des conditions économiques de production de l'électricité par ses centrales nucléaires déjà en service (le parc de référence) ;

• l'instauration d'une obligation de capacité afin de garantir a priori que chaque fournisseur est capable de couvrir les besoins de consommation en pointe de ses clients ;

• l'évolution progressive du système des tarifs réglementés de vente d'électricité.

Mise en place d'un accès régulé des fournisseurs à la production électrique de base d'EDF

Les droits des fournisseurs

Les droits d'un fournisseur à accéder à l'électricité de base d'EDF seront calculés sur la base des caractéristiques de la consommation prévisionnelle de son portefeuille de clients en France de façon claire, transparente et non discriminatoire, sans jugement a priori de la crédibilité de ses prévisions. Il s'agit de reproduire, pour le fournisseur, des conditions d'approvisionnement en électricité de base équivalentes à celles d'EDF. La Commission de régulation de l'énergie (CRE) sera chargée de la gestion du dispositif. Le cas échéant, elle disposera des moyens pour dissuader les fournisseurs d'abus manifeste, en particulier dans leurs prévisions commerciales.

En parallèle de ce système, la possibilité pourrait être maintenue pour les fournisseurs nouveaux entrants de conclure avec l'opérateur historique des contrats de gré à gré d'approvisionnement en électricité de base, éventuellement de long terme, susceptibles d'inclure une part de risque industriel en contrepartie d'un prix plus adapté. De tels contrats pourraient notamment permettre à EDF de transférer une partie des risques industriels liés à la production d'électricité nucléaire (notamment ceux concernant la disponibilité des centrales) et aux fournisseurs alternatifs d'obtenir un meilleur prix et/ou un aménagement des conditions de livraison (possibilité de moduler la puissance, durée des contrats, etc.). Dans ce cas, les volumes d'électricité de base couverts par de tels contrats pourront être déduits des droits d'accès au dispositif des fournisseurs alternatifs, ceci afin d'inciter EDF à conclure de tels contrats.

Ce dispositif d'accès régulé à l’électricité de base peut être complémentaire mais ne doit pas faire double emploi avec un approvisionnement des électro intensifs via le consortium Exeltium16, qui bénéficie d'une autorisation particulière de conclure des contrats de long terme d'approvisionnement en électricité. A ce jour, seul EDF s'est déclaré intéressé pour conclure un tel contrat.

Les quantités d'électricité que les gestionnaires de réseaux achètent pour compenser les pertes, notamment dues à l'échauffement des câbles, seront progressivement éligibles au dispositif d'accès régulé à l’électricité de base. Elles donneront, aux fournisseurs d'électricité qui fourniront les gestionnaires de réseau le droit d'acheter à EDF de l'électricité, dans le cadre de l'accès régulé à l’électricité de base, dans la limite de 20 TWh/an.

L'accès régulé des fournisseurs alternatifs à l'électricité de base produite par EDF sera limité dans le temps et en volume. Ainsi, le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base sera globalement plafonné. Le plafond sera déterminé par les ministres chargés de l'énergie et de l'économie après avis de la Commission de régulation de l'énergie dans la limite de 100 TWh / an17. Il sera déterminé de façon à être proportionné à l'objectif d'approvisionnement en électricité sur le territoire national dans des conditions économiques satisfaisantes pour les consommateurs, dans le respect de la compétitivité de l'économie et de la liberté des consommateurs de choisir leur fournisseur d'électricité18. Il faut donc s'assurer que le dispositif ne soit ni une entrave au développement de la concurrence sur la fourniture aux clients finals, ni ne réduise les incitations de l'ensemble des acteurs à investir dans le renouvellement des moyens de production d'électricité.

Le prix d'accès à la production électrique de base d'EDF

Le prix régulé d'accès à ces volumes d'électricité de base traduira les conditions économiques du parc de référence et tiendra compte :

- de la nécessaire rémunération des capitaux, tenant compte de la nature de l'activité,

- des coûts d'exploitation,

- des coûts des investissements de maintenance ou nécessaire à l'extension de la durée de l'autorisation d'exploitation,

- des coûts prévisionnels liés aux charges nucléaires de long terme.

Ce prix sera défini sur la base de documents qu'EDF devra produire pour suivre les coûts du parc de référence (c'est-à-dire le parc constitué des centrales nucléaires actuellement en service), de sorte à couvrir sur la durée du dispositif l'ensemble des coûts de ce parc. Ce prix sera ré-évalué de façon régulière pour tenir compte de la réalité des coûts. La Commission de régulation de l'énergie sera responsable de l'évaluation des coûts.

Par exception, jusqu'à l'achèvement d'une phase de transition de 3 ans au plus, nécessaire à la mise en place de cette nouvelle organisation, le prix sera déterminé par les ministres après avis de la Commission de régulation de l'énergie. Dans un premier temps, et afin d'assurer une bonne transition, le prix effectif de l'accès régulé à l’électricité de base sera cohérent avec le prix facturé aux clients bénéficiant du TaRTAM.

Le suivi et l'évolution du dispositif dans la durée

L'accès régulé à l’électricité de base est mis en place car l'accès aux conditions économiques du parc nucléaire historique est aujourd'hui déterminant et discriminant pour le développement de la concurrence sur le marché de la fourniture d'électricité aux clients finals. Le dispositif est mis en place pour une période transitoire de 15 ans de nature à assurer à tous les acteurs une visibilité suffisante. A ce jour, la fin de cette période coïncide avec le début du renouvellement du parc nucléaire. Si des projets de nouvelles capacités de production nucléaire sont aujourd'hui engagés (Flamanville pour une mise en service en 2012 et Penly pour une mise en service en 2017), ils n'ont pas vocation à remplacer le parc nucléaire historique mais à satisfaire, en complément du parc actuel, l'évolution de la demande, tout en se prémunissant des incertitudes qui pèsent sur la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire, ainsi qu'à maintenir les compétences humaines et industrielles de réalisation de centrales électronucléaires (cf. programmation pluriannuelle des investissements de production électrique –PPI-). Néanmoins, dans cette période, les enjeux de la régulation vont évoluer avec la réalité industrielle du parc de production d'électricité sujette à de nombreuses incertitudes. La levée progressive de ces incertitudes permet de dégager trois phases de 2010 à 2025 :

• Durant la première phase (2010-2015), l'enjeu industriel concernera le bon fonctionnement du parc nucléaire actuel et les investissements dans les moyens de production de semi base et de pointe. Les incertitudes liées à la décision d'allonger ou non la durée de vie des centrales nucléaires seront progressivement levées. En effet, si dans une perspective économique et sous réserve de toute exigence en terme de sûreté, le scénario privilégié repose sur la prolongation de la durée d'exploitation des centrales nucléaires au-delà de 40 ans après des investissements de jouvence, l'Autorité de sûreté nucléaire est la seule compétente et habilitée à se prononcer sur la fermeture ou la prolongation de chaque réacteur, le cas échéant à la condition que des investissements soient réalisés. Cette phase s'achèvera par la convergence de l'ensemble des références de prix.

• Durant la deuxième phase (2015-2020), beaucoup d'investissements de prolongation devront, le cas échéant, être réalisés sur le parc nucléaire et leurs coûts répercutés dans le prix de l'accès régulé à l’électricité de base.

• Durant la troisième phase (2020-2025), le renouvellement du parc nucléaire devra être préparé.

Au-delà de la gestion de ces incertitudes industrielles, des bilans périodiques que le gouvernement adressera au Parlement, notamment sur la base de rapports de la Commission de régulation de l'énergie et de l'Autorité de la concurrence, permettront de s'assurer, tout au long de cette période, de l'efficacité de la nouvelle organisation du marché électrique, en ce qui concerne le développement effectif de la concurrence, la cohérence entre les offres de détail des fournisseurs et le prix de l'accès régulé à l'électricité de base, et la participation de tous les acteurs aux investissements dans le renouvellement des capacités de production nécessaires à notre sécurité d'approvisionnement.

Les garanties d'équilibre du système

L'objectif de la loi consiste à permettre un accès de tous les fournisseurs à l'électricité du parc nucléaire historique, dans des conditions équivalentes. Le dispositif est donc conçu pour que la contrainte imposée à l'opérateur historique soit strictement proportionnée à l'objectif poursuivi :

- le périmètre de la régulation est borné dans son champ d'application, comme dans le temps. La régulation porte exclusivement sur l'accès à une fraction de la production du parc nucléaire historique d'EDF, dont la duplication n'aurait aucun sens au plan économique. Les autres moyens de production en base ne sont pas pris en compte : ils sont en effet sur la voie d'un développement concurrentiel que ce soit l'hydraulique avec la mise en concurrence des renouvellements de concessions ou le nouveau nucléaire qui implique déjà des co-investissements dans une logique concurrentielle. Par suite, le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base diminuera en proportion au fur et à mesure du développement de nouvelles capacités de production de base et de la sortie de service des centrales nucléaires du parc historique ;

- le périmètre de la régulation est borné en volume : le montant maximal d'électricité pouvant faire l'objet d'un accès régulé à l’électricité de base est fixé, par la loi, à 100 TWh/an (auxquels s'ajoute un maximum de 20 TWh/an pour les pertes), ce qui représente moins de 30% du volume d'électricité produit par le parc nucléaire historique. Un niveau inférieur ne permettrait pas d'engager le développement d'un marché concurrentiel de la fourniture d'électricité ;

- la loi impose que l'accès à l'électricité du parc nucléaire historique se fasse dans des conditions économiques équivalentes pour les différents fournisseurs, EDF et les nouveaux entrants. Le prix de vente de l'électricité dans le cadre des contrats d'accès régulé permettra à EDF de couvrir ses coûts et de bénéficier d'une rentabilité normale. Le dispositif vise ainsi à conserver, pour les consommateurs résidant sur le territoire national, le bénéfice de l'avantage compétitif que représentent les choix spécifiques français en matière d'énergie nucléaire, sans pénaliser EDF ;

- le dispositif est placé sous le contrôle et la surveillance d'une autorité indépendante, la Commission de régulation de l'énergie, chargée par la loi d'assurer, autant que possible, la neutralité du dispositif d'accès régulé à l’électricité de base, pour tous les fournisseurs d'électricité de base, y compris le propriétaire du parc nucléaire historique. Il lui appartient, d'une part, de proposer le juste niveau des tarifs et de définir le juste niveau des volumes, permettant d'assurer la neutralité des opérations pour EDF. La Commission est ainsi chargée, entre autres choses, de superviser les éventuelles corrections dans le cas où un cocontractant d'EDF aurait surestimé le nombre de consommateurs finaux résidant sur le territoire national dans son portefeuille : si, après constat et analyse par la Commission de régulation de l'énergie, les droits alloués à un fournisseur donné pour une période donnée ont excédé le besoin réel de base du portefeuille de clients effectif de ce fournisseur, un complément de prix sera en effet appliqué. Il sera établi conformément aux prix de marché, à partir de la différence entre le prix de gros régulé et le prix en vigueur sur le marché de gros en France, et portera uniquement sur les volumes en excès des besoins de base du portefeuille de clients finals effectif. Pour que ce mécanisme soit à la fois protecteur pour les fournisseurs alternatifs qui s'engagent effectivement dans le développement d'un portefeuille de clients et prévienne les comportements spéculatifs, ce complément de prix pourra être ajusté en fonction de l'ampleur de l'écart entre la prévision et le constaté. La loi confie d'autre part à la Commission de régulation de l'énergie la mission de réprimer les cas éventuels d'abus ou d'entrave.

Obligation de capacité19

La nouvelle organisation du marché de l'électricité prévoit que chaque fournisseur devra contribuer à la sécurité d'approvisionnement en électricité en France continentale. La mise en place de cette obligation de capacité vise une nécessité déjà prise en compte dans les tarifs réglementés de vente d'électricité : la garantie d'un niveau de sécurité d'approvisionnement en électricité, notamment en période de pointe de consommation. Elle ne se traduira pas, par rapport à la situation actuelle, par un coût additionnel.

Chaque fournisseur devra apporter la garantie qu'il détient, directement ou indirectement, la capacité d'effacement de consommation ou de production nécessaire pour satisfaire la demande de ses clients lors des pointes de consommation20. L'objectif fixé à chaque fournisseur sera déterminé en fonction du profil de consommation de ses clients et de manière à ce que l'objectif de sécurité d'approvisionnement au niveau global, fixé par le gouvernement, soit atteint. Par ailleurs, cet objectif sera fixé de façon suffisamment anticipée (3 - 4 ans par exemple) pour inciter leurs consommateurs à prendre leurs dispositions pour s'effacer et pour que les fournisseurs puissent développer de nouvelles capacités d'effacement ou de production (notamment à la pointe).

L'efficacité du dispositif tient dans ce que :

- un prix unique sera déterminé pour valoriser toute la puissance disponible ou effaçable lors des pointes de consommation ;

- les fournisseurs pourront s'ils le souhaitent échanger des garanties de capacité avec d'autres acteurs.

En conséquence, tous les acteurs (producteurs, fournisseurs, consommateurs) seront incités à offrir des capacités de production ou d'effacement et les solutions mises en œuvre seront les plus pertinentes sur le plan économique.

Cette obligation de capacité sera mise en œuvre progressivement et aura une portée effective à partir de 2015, compte tenu du délai nécessaire aux fournisseurs pour développer des offres de capacité de production et d'effacement.

La valeur de la garantie de capacité est d'ores et déjà intégrée dans les tarifs réglementés historiques. La création d'une obligation de capacité n'entraînera donc pas de surcoût mais permettra de mieux identifier la valeur de cette garantie. Ainsi chaque fournisseur (i) pourra mieux calibrer les offres faites aux clients finals afin de leur proposer de réduire leur consommation pendant les périodes de pointe, et (ii) sera invité à investir dans des moyens d'effacement ou de production de pointe, quand cela sera nécessaire au bénéfice de l'ensemble du système électrique.

Tarifs réglementés de vente

La mise en place du mécanisme d'accès régulé à la production électrique de base permettra de faire évoluer le système des tarifs réglementés en vigueur.

Les tarifs réglementés de vente sont confortés pour les petits consommateurs, particuliers comme professionnels. Pour ces consommateurs, la réversibilité totale entre les offres libres et les offres réglementées sera mise en place.

Les tarifs réglementés seront progressivement établis par addition analytique du coût d'approvisionnement en base régulée tel que déterminé par le régulateur, du coût d'approvisionnement du reste de la consommation de base et de pointe y compris la garantie de capacité mentionnée précédemment, des coûts d'acheminement et des coûts commerciaux. La Commission de régulation de l'énergie sera chargée de proposer le niveau de ces tarifs qui sera arrêté par les ministres en charge de l'énergie et de l'économie.

Les gros consommateurs ne pourront plus disposer des tarifs réglementés de vente à compter de 2015. La première étape de la transition vers le système cible de tarifs réglementés correspond à l'expiration du TaRTAM. Ensuite, au fur et à mesure, les tarifs réglementés pour les grandes et moyennes entreprises seront progressivement mis en cohérence avec le prix régulé d'accès à la base étant entendu qu'une réversibilité totale entre les offres libres et réglementées sera offerte aux consommateurs n'ayant pas aujourd'hui fait jouer leur éligibilité. Les consommateurs ayant déjà fait jouer leur éligibilité ne pourront en revanche plus souscrire le tarif réglementé.

4.1 Hypothèses de cadrage

Les impacts économiques de la réforme envisagée dépendent essentiellement des facteurs suivants :

- différence entre le prix de marché de l'électricité et le prix régulé auquel les fournisseurs pourront acheter leur électricité à EDF ;

- volumes cédés aux fournisseurs alternatifs ;

- prix de la garantie de capacité.

Les facteurs suivants : modalités de calcul des droits des fournisseurs alternatifs (critères permettant de déterminer les droits), nature du « produit » qui leur sera livré (électricité livrée sous la forme d'une puissance constante tout au long de l'année ou variant selon les heures et les saisons conformément à la production nucléaire), modalités de compensation dans le cas où le volume alloué est supérieur au volume auxquels ont droit les fournisseurs, etc. sont décisifs pour le bon fonctionnement du dispositif mais ne constituent pas en soi des paramètres dimensionnant pour l'analyse de l'impact de la réforme.

4.1.1 Écart prix de marché - prix régulé

Les mécanismes de formation des prix de marché de l'électricité reposent sur des déterminants sans lien direct avec les coûts de production du parc de référence. Les prix de marché dépendent des prix des pays voisins, des coûts marginaux de production de la dernière centrale appelée et donc du prix des combustibles et des quotas de CO2, d'un équilibre général entre l'offre et la demande en Europe, des réserves hydrauliques, etc. Comme indiqué au § 1., le prix de marché21 est très volatil et reflète principalement l'équilibre entre l'offre et la demande au niveau européen.

A contrario, comme c'est le cas aujourd'hui pour les tarifs réglementés de vente fondés sur les coûts du parc de production d'EDF, le prix de l'accès régulé à l’électricité de base sera représentatif des conditions économiques du parc nucléaire de référence, et dépendra en particulier des dépenses opérationnelles et des provisions pour démantèlement, des investissements d'allongement de la durée de vie du parc, de la disponibilité des centrales et de la rémunération du capital. Il ne dépendra qu'à la marge du prix du combustible nucléaire car celui-ci ne compte que pour 5% du coût complet de production nucléaire. Ce coût de production est donc assez stable dans le temps. Au-delà de la simple détermination du coût de production du parc de référence, la régulation devra s'attacher à assurer le financement des investissements de maintenance et le cas échéant, d'allongement de la durée de vie du parc. La réalisation des investissements de prolongation dont l'échéance approche22 et des investissements de maintenance dont le montant devrait croître du fait du vieillissement du parc, devrait avoir un impact sur les coûts de production du parc de référence par rapport à leur niveau actuel. Ce phénomène, de nature industrielle, ne présente aucun lien avec le projet de nouvelle organisation du marché électrique.

Notamment en raison des incertitudes sur l'éventualité de la prolongation de la durée d'exploitation des centrales nucléaires et des investissements nécessaires, la régulation devra être dynamique et évolutive. La trajectoire de prix de l'accès régulé à l’électricité de base ne peut être précisément établie à ce stade. Si la compétitivité du parc de référence se traduira sûrement par un coût inférieur au prix de marché, il n'est pas possible de présumer de son niveau. C'est pourquoi, afin de permettre d'illustrer l'impact de la réforme envisagée, on propose dans la suite quelques évaluations sur la base d'un écart entre le prix régulé de la base et le prix de marché compris entre 10 et 30 € / MWh, ordre de grandeur représentatif de la différence observée ces dernières années entre le niveau du TaRTAM ou des tarifs réglementés de vente et les prix de marché.

4.1.2 Volume cédé aux fournisseurs alternatifs

Le volume d'électricité de base mise à disposition des fournisseurs alternatifs sera calculé en fonction des caractéristiques et des prévisions d'évolution de la consommation de leurs clients finals et de la part représentative de la production du parc de référence dans l'approvisionnement des clients en France. Si des règles précises devront être définies par la suite pour garantir aux fournisseurs alternatifs des conditions équivalentes à celles d'EDF et pourront le cas échéant dépendre du profil de consommation des clients, une première règle, donnée à des fins d'illustration, pourrait être la suivante : la consommation sera supposée égale à la consommation observée en 2007, et chaque client donnera droit à son fournisseur à un accès régulé à l’électricité de base pour un volume correspondant à 80% de sa consommation totale.

4.1.3 Prix de la garantie de capacité

L'obligation de capacité, imposée à chaque fournisseur en vue d'atteindre l'objectif global de sécurité d'approvisionnement en électricité, associée à la possibilité d'échanger des garanties de capacité fera émerger un prix de la garantie de capacité. Le niveau de ce prix ne peut être anticipé car il dépend des gisements d'effacement existants, de la fin de vie des moyens de production existants et de la création de nouveaux moyens de production. Ce prix pourra varier d'une année sur l'autre.

Néanmoins, sur le long terme, ce prix ne pourra dépasser le coût fixe des moyens de production de pointe : en effet, le cas échéant, de nouvelles centrales seraient construites, jusqu'à ce que l'offre de capacité satisfasse les besoins en pointe. En première approximation, cette analyse supposera que le prix de la garantie de la capacité soit donc plafonné au coût fixe annuel d'une turbine à combustion. Ce coût fixe est ici estimé à 60 000 €/MW/an.

Le coût de la garantie de capacité est depuis toujours intégré dans les tarifs réglementés de vente de l'électricité. La mise en place de l'obligation de capacité ne se traduira donc pas par un coût additionnel pour les consommateurs mais par une meilleure identification par les fournisseurs.

Scénarii de comparaison : situation actuelle et scénario virtuel de dérégulation

Dans l'analyse d'impact, on compare la situation résultant de la nouvelle organisation du marché électrique, d'une part à la situation actuelle, d'autre part à un scénario virtuel de dérégulation totale pour les gros consommateurs.

Dans la situation actuelle :

- Les petits consommateurs bénéficient des tarifs réglementés ;

- Les gros consommateurs bénéficient du tarif réglementé ou du tarif de retour (TaRTAM).

Dans le scénario virtuel de dérégulation :

- Les petits consommateurs bénéficient des tarifs réglementés de vente d'électricité : il n'existe donc pas de différence du point de vue du petit consommateur entre le scénario étudié et le scénario virtuel pour ce segment de marché ;

- Les tarifs réglementés pour les gros consommateurs sont supprimés : ces consommateurs souscrivent donc une offre de marché dont le niveau reflète le prix de l'électricité sur le marché de gros.

Dans la situation actuelle comme dans le scénario virtuel de dérégulation :

- il n'existe pas d'accès régulé à l’électricité de base ;

- il n'existe pas d'obligation de capacité.

4.2 Impacts économiques pour les acteurs du marché de l'électricité

4.2.1 Les fournisseurs alternatifs

Il existe plus de 150 fournisseurs alternatifs d'électricité23 en France. Parmi eux, 15 sont positionnés sur le marché des consommateurs résidentiels24. La nouvelle organisation du marché électrique leur donne des droits (accès régulé à l'électricité de base) mais aussi des devoirs notamment en terme de sécurité d'approvisionnement, en faisant ainsi des acteurs à part entière du système électrique avec les moyens de développer l'innovation.

Le droit à l'accès régulé à l’électricité de base permettra aux fournisseurs alternatifs de faire des offres compétitives par rapport aux tarifs réglementés

L'accès régulé à l'électricité de base permettra aux fournisseurs alternatifs de proposer des offres compétitives par rapport aux tarifs réglementés, sans subir de marge négative. Le complément d'approvisionnement en électricité, au delà de l'accès régulé à l’électricité de base, sera assuré par le développement de leurs propres moyens de production ou par des achats sur le marché de gros dans des conditions économiques similaires à celles d'EDF. Les fournisseurs alternatifs pourront également continuer à s'approvisionner avec les dispositifs existants aujourd'hui : Virtual Power Plan (VPP), contrats bilatéraux (notamment sous la forme de SWAP, échange de capacité avec EDF), contrats issus des enchères AOF dites « Direct Energie » (cf. notes de bas de pages 41 et 42). Ainsi, les fournisseurs alternatifs seront en mesure de proposer des offres compétitives par rapport à celles, réglementées ou non, de l'opérateur dominant, et ainsi de se développer en se distinguant notamment par des offres innovantes.

Avec l'obligation de capacité, les fournisseurs alternatifs seront pleinement responsables de la sécurité d'approvisionnement en électricité à hauteur des besoins de leurs clients et seront ainsi encouragés à devenir des acteurs industriels de l'effacement et de la production

Faute de rémunération suffisante par le seul marché de l'énergie, les investissements en pointe, qu'il s'agisse de capacités d'effacement ou de production, ne sont pas assurés aujourd'hui par les nouveaux opérateurs. En effet, le système repose sur une assurance implicite de l'opérateur historique. L'obligation de capacité incitera les acteurs à exploiter tous les gisements d'effacement. Si nécessaire, ils seront incités à investir dans de nouvelles capacités d'effacement ou de production de pointe. La détention d'outils de gestion de la pointe (effacement et capacité de production) fournira de la flexibilité aux fournisseurs alternatifs. Cette flexibilité leur permettra de mieux optimiser leur portefeuille et contribuera par ailleurs à faire correspondre l'offre à la demande. L'obligation de capacité fera des fournisseurs alternatifs des acteurs à part entière assumant leurs responsabilités quant au bon fonctionnement du système électrique.

La dynamique du dispositif donnera les moyens aux fournisseurs alternatifs de développer de nouvelles offres au profit du consommateur

L'attribution des droits des fournisseurs sur la base de leurs prévisions de développement leur permettra d'acquérir de façon anticipée l'électricité de base dont ils estiment avoir besoin. Ce principe est à la fois incitatif et protecteur pour eux sans pour autant leur offrir une situation plus confortable que celle d'EDF. Un calcul régulier des droits leur permettra d'adapter leur stratégie d'approvisionnement en électricité de base à la dynamique d'évolution de leur portefeuille clients.

Les fournisseurs alternatifs pourront donc se développer en proposant des innovations sur :

- la commercialisation : nouvelles offres, nouveaux services, meilleure productivité ;

- l'optimisation de la gestion amont/aval notamment par :

- le développement d'offres incitant à la maîtrise de la demande,

- l'optimisation de l'approvisionnement en électricité, le cas échéant avec le développement de moyens de production si nécessaires.

Le développement de la concurrence s'opérera progressivement.

Lors de la mise en place du dispositif, le segment immédiatement contestable est celui des consommateurs non résidentiels ayant exercé leur éligibilité et bénéficiant donc aujourd'hui d'offres libres ou au TaRTAM. Ce segment représente environ 750 000 sites25 pour une consommation de 141 TWh/an, soit 32% de la consommation nette d'électricité en France.

La mise en cohérence progressive des tarifs réglementés avec le prix de l'accès régulé à l’électricité de base, puis leur suppression, permettra d'augmenter la taille du marché contestable d'environ :

- 4 100 000 sites de consommateurs non résidentiels représentant 157 TWh/an;

- 28 000 000 sites de consommateurs résidentiels représentant de l'ordre de 140 TWh/an.

La réversibilité totale entre le choix d'une offre libre et d'une offre réglementée sera mise en place pour les petits consommateurs, ainsi que, jusqu'en 2015, pour les plus gros consommateurs qui n'ont pas encore fait jouer leur éligibilité. L'assurance de pouvoir revenir au tarif réglementé protègera les consommateurs et les encouragera ainsi à choisir les meilleures offres. De manière progressive, les consommateurs bénéficiant aujourd'hui des tarifs réglementés devraient se tourner en partie vers les fournisseurs alternatifs. Pour autant, ce changement ne sera pas brutal : il est conditionné par le rythme des nouvelles mises en service (déménagements, nouvelles constructions, etc.), par celui des renouvellements de contrat et surtout par la force de vente et d'innovation des fournisseurs alternatifs.

Le dispositif prévoit de limiter le volume d'électricité cédé dans le cadre de l'accès régulé à l’électricité de base, dans la limite de 100 TWh/an auxquels sont ajoutés les volumes correspondant aux pertes. Le plafond sera déterminé en fonction de la taille du marché contestable et de sorte à inciter également au développement de la concurrence à la fois sur le marché de la fourniture mais aussi de la production. Le plafonnement des volumes ne sera pas, dans les faits, limitant pour le développement de la concurrence si la concurrence évolue au rythme habituellement constaté lors de l'ouverture de marchés autrefois sous monopole.

4.2.2 EDF

Concernant l'accès régulé à l’électricité de base

• Par rapport à la situation actuelle

La régulation préserve au plan économique et industriel EDF comme acteur intégré de la production et de la fourniture d'électricité

Au plan industriel, cette nouvelle régulation permet à EDF de rester le propriétaire et l'exploitant de son parc de centrales nucléaires. EDF pourra continuer à optimiser l'exploitation de son parc de production en fonction de ses engagements commerciaux et de ses contraintes techniques et économiques.

Au plan économique, le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base poursuit le transfert de la compétitivité du parc nucléaire vers les consommateurs, transfert jusqu'alors assuré par les tarifs réglementés. En effet, aujourd'hui, la quasi totalité de l'électricité consommée en France est achetée à un prix réglementé (tarif réglementé de vente ou TaRTAM26), et EDF, en particulier, vend l'essentiel de sa production à un prix réglementé. La nouvelle organisation revient donc à remonter vers l'amont, dans la chaîne de valeur, le lieu de régulation. De ce fait, toutes choses égales par ailleurs, l'impact est globalement neutre pour EDF en termes financiers.

Le dispositif est proportionné à l'objectif d'ouverture des marchés à l'aval

Les volumes cédés aux fournisseurs alternatifs seront déterminés en fonction du rapport entre la production nucléaire du parc de référence et la consommation effective des clients situés sur le territoire français. De ce fait, par construction, EDF est assuré de disposer d'énergie nucléaire pour alimenter ses propres clients dans la même proportion.

En fonction du dynamisme commercial de ses concurrents, EDF perdra des parts de marchés comme tout opérateur historique lors de l'ouverture d'un marché. Néanmoins, en prévenant tout effet d'aubaine (complément de prix en cas de demande trop élevé de la part des nouveaux entrants, sanctions en cas d'abus, …), la loi s'assure qu'EDF ne transférera pas de valeur économique qui resterait exclusivement aux nouveaux entrants. En effet, la concurrence entre eux et EDF les conduira à répercuter l'avantage compétitif du nucléaire dans leurs offres aux consommateurs finals.

La régulation est garante d'une meilleure visibilité pour EDF et peut donc même être présentée comme un progrès

La régulation proposée conduira à la définition d'une méthode de calcul du prix d'accès régulé à l’électricité de base et des tarifs réglementés de vente appliquée sous le contrôle de la Commission de régulation de l'énergie, autorité administrative indépendante. Cette formalisation est garante d'une meilleure transparence qui permet d'anticiper l'évolution des prix et ainsi de donner une plus grande visibilité pour EDF.

Cette méthode assure, de manière systématique, la couverture des coûts et une rémunération normale d'EDF. Elle garantit le financement de l'ensemble des investissements qui seront nécessaires sur le parc nucléaire historique afin d'en améliorer la performance voire en allonger la durée d'exploitation.

La régulation permettra de garantir à EDF une situation financière saine à l'aube du renouvellement du parc nucléaire quand des investissements très importants devront être engagés.

• Par rapport au scénario virtuel de dérégulation

La seule perte de valeur pour EDF est celle par rapport à un scénario virtuel qui n'a jamais été celui ni des pouvoirs publics, ni des consommateurs à savoir une dérégulation totale

La comparaison par rapport à une situation théorique où EDF pourrait commercialiser l'électricité de base produite par le parc nucléaire historique au prix du marché a peu de sens. Cette dérégulation consistant en la fin des tarifs conduirait à la captation de toute la compétitivité du parc nucléaire historique par EDF grâce à son pouvoir de marché. Une telle hypothèse ne correspond pas à la spécificité du parc nucléaire historique, dont les avantages par rapport aux autres modes de production doivent bénéficier non à l'opérateur historique mais aux consommateurs. Un tel scénario n'a d'ailleurs jamais été celui des pouvoirs publics, y compris lors de l'ouverture du capital d'EDF et ne saurait donc leur être opposé.

Concernant l'obligation de capacité

L'obligation de capacité garantit une rémunération à toute capacité, y compris celles qui sont peu utilisées (centrales de production de pointe) mais indispensables à la sécurité d'approvisionnement et donc à l'intérêt général.

Avant l'ouverture des marchés, EDF garantissait l'équilibre du système27 en s'assurant que la capacité totale dont il disposait couvrait les besoins de l'ensemble des consommateurs en France continentale, notamment lors des périodes de pointe de consommation. Le coût des centrales de pointe était couvert par les tarifs réglementés que payait l'ensemble des consommateurs. Les tarifs réglementés comprennent en effet une prime fixe, proportionnelle à la puissance souscrite, reflétant le coût fixe des moyens de pointe et couvrant ainsi le coût de la garantie de puissance.

Depuis l'ouverture des marchés de l'énergie, l'érosion du portefeuille de clients d'EDF a conduit à ce que certaines centrales de pointe ne soient plus rémunérées par les tarifs réglementés mais par le marché de gros. Or le prix de gros, plafonné sur les marchés de l'électricité, est insuffisant pour rentabiliser des investissements dans des moyens de pointe. Le maintien en service de ces centrales, utilisées initialement pour satisfaire les besoins de pointe des clients au tarif réglementé, constitue une assurance pour l'ensemble du système dont le coût est aujourd'hui supporté par EDF. Dans la perspective d'investissements à venir en semi-base et en pointe, une telle assurance « implicite » et non rémunérée de l'équilibre électrique par EDF, n'était ni soutenable, ni équitable vis-à-vis d'EDF

Par rapport à la situation dans laquelle la capacité n'est pas explicitement rémunérée en dehors des tarifs réglementés de vente, la mise en place d'une obligation de capacité se traduira par un gain financier pour EDF par la vente de garanties de capacité aux fournisseurs qui n'en disposent pas. Cette rémunération permettra notamment à l'opérateur historique de rémunérer correctement les centrales de pointe qui ne servent pas à la fourniture de ses clients au tarif réglementé et de partager ainsi entre les fournisseurs la charge de l'« assurance » de la sécurité d'approvisionnement. Le gain financier est proportionnel à l'excédent de capacité détenu par EDF par rapport aux besoins de ses clients. Cet excèdent se calcule en soustrayant à la capacité globale dont dispose EDF en France continentale :

- la capacité utilisée par EDF pour fournir ses propres clients ;

- la capacité transférée aux opérateurs alternatifs par le biais de l'accès régulé à l’électricité de base.

L'excédent de capacité dont disposera EDF lors de la mise en place du dispositif (en 2015) est difficile à calculer. Il dépendra notamment de l'évolution de la capacité installée d'EDF et de ses parts de marché dans la fourniture. Quoi qu'il en soit, cet excédent de capacité augmentera avec la part de marché des fournisseurs alternatifs. En effet, lorsqu'un client est capté par un fournisseur alternatif, EDF n'a plus à couvrir la consommation de ce client par une garantie de capacité correspondante. Par rapport à la situation dans laquelle le marché de capacité n'existe pas, le bilan est positif pour EDF qui peut valoriser les capacités de pointes utilisées initialement, en complément des moyens de base, pour couvrir les besoins de capacité du client. La croissance progressive des parts de marché des fournisseurs alternatifs pourrait donc se traduire par un impact financier positif pour EDF (toujours par rapport à la situation sans marché de capacité) qui pourra céder, aux fournisseurs qui ne disposent pas en propre de suffisamment de capacité pour fournir les besoins de leurs clients, au-delà de l'accès régulé à l’électricité de base, une fraction28 de ses capacités de semi-base et de pointe valorisé jusqu'à 60 000 €/MW/an.

4.2.3 Les consommateurs

4.2.3.1 Les petits consommateurs : particuliers et petits professionnels (site dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kVA29)

Au 31 décembre 2009, les consommateurs résidentiels et petits professionnels30 représentent respectivement un peu moins de 30 millions et 3,5 millions de sites.

Le dispositif pérennise les tarifs réglementés et la réversibilité totale pour les petits consommateurs

Les petits consommateurs pourront toujours bénéficier d'offres à un tarif réglementé reflétant le prix de gros régulé de la base ou conclure des offres libres avec des fournisseurs ayant un accès régulé à l’électricité de base. Le prix final payé par les consommateurs restera donc fondé sur les conditions économiques du parc de production français, aujourd'hui et demain reflétées par les tarifs réglementés de vente.

L'assurance de pouvoir revenir au tarif réglementé encouragera les consommateurs à tirer profit de la concurrence.

La réversibilité constitue une forme de protection pour les consommateurs qui pourront revenir aux tarifs réglementés s'ils ne sont pas satisfaits des offres libres. Cette réversibilité garantit donc une pleine et entière liberté de choix au consommateur.

Pour être en mesure de gagner des parts de marché, chaque fournisseur devra développer une variété d'offres tarifaires attrayantes31, adaptés aux différents usages de l'énergie et aux besoins de différentes catégories de consommateurs. Certains fournisseurs proposeront ainsi des offres incitatives à la maîtrise de l'énergie (remise conditionnée à une baisse de la consommation d'une année sur l'autre) incitant aux effacements de consommation notamment en période de pointe, des services associés à la fourniture (dépannage de l'installation électrique intérieure, …), des assurances (assurance grand froid), etc. D'autres fournisseurs pourront proposer des offres dites « vertes » dont l'énergie proviendra de sources renouvelables.

A moyen terme, l'apparition de compteurs évolués devrait également favoriser la diversification des offres tarifaires en fonction des périodes de consommation (jour de la semaine, tranche horaire). Enfin, la concurrence devrait pousser chaque fournisseur à minimiser ses coûts commerciaux. A cet égard, les modes de facturation et de suivi de la consommation innovants et peu coûteux devraient être favorisés.

Afin de renforcer la protection des petits consommateurs particuliers et petits professionnels, certaines dispositions du code de la consommation sont modifiées ou complétées.

Il s'agit principalement de transposer les dispositions relatives au droit de la consommation contenues dans les directives 2009/72 CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, relative aux règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et 2009/73 CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, relative aux règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel. Les nouvelles directives abrogent les directives 2003/54/CE et 2003/55/CE du 26 juin 2003.

En ce qui concerne le droit de la consommation, les directives du 13 juillet 2009 contiennent chacune un article 3 sur les obligations de service public et la protection des consommateurs, ainsi qu'une annexe I sur les mesures relatives à la protection des consommateurs. Elles édictent au niveau communautaire des règles qui figurent déjà pour l'essentiel à la section 12 du chapitre 1er du titre II du livre Ier du code de la consommation depuis la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie.

Cependant, des dispositions nouvelles précisent l'information générale et particulière à délivrer au public, facilitent les relations avec le fournisseur ou concernent certains sujets récurrents de réclamation. Elles améliorent le dispositif existant sur les points suivants :

- une facturation erronée ou retardée ou des services insuffisants peut donner lieu à compensation ou remboursement. Il s'agit de donner une information explicite au consommateur, puisque le principe selon lequel une facturation inexacte peut donner lieu à remboursement existe déjà en droit civil.

- l'offre de fourniture doit compléter les informations déjà requises sur les modes de règlement amiable des litiges avec les informations relatives aux modes de règlement contentieux des litiges. Seule la directive 2009/72/CE relative à l'électricité prévoit cette disposition. Les directives transposées par le présent projet ne sont pas des directives d'harmonisation qui interdiraient aux États membres de prendre des dispositions plus strictes ; par souci de clarté et de cohérence cette disposition est rendue applicable aux contrats de fourniture de gaz naturel.

- les fournisseurs doivent communiquer avec leurs offres un exemplaire de l'aide mémoire du consommateur d'énergie établi par la Commission ou par les Ministres chargés de la consommation et de l'énergie dans l'attente de ce document. La France a déjà communiqué les éléments la concernant permettant à la Commission d'élaborer l'aide mémoire.

- le délai dans lequel l'opérateur doit effectuer le changement de fournisseur demandé par le client est réduit de trente jours à trois semaines.

- le consommateur qui change de fournisseur doit recevoir le décompte final de facturation dans un délai de six semaines. Actuellement, aucun délai n'est fixé.

- le consommateur n'a rien à payer à son fournisseur lorsqu'il en change. Actuellement, les frais que les fournisseurs peuvent facturer sont limités aux frais qui correspondent aux coûts qu'ils ont effectivement supportés, directement ou par l'intermédiaire du gestionnaire de réseau au titre de la résiliation et sous réserve que ces frais aient été explicitement prévus dans l'offre et qu'ils soient dûment justifiés. La modification proposée supprime la faculté pour le fournisseur de facturer ses propres frais. Cette disposition doit contribuer à l'ouverture effective des marchés. Elle permet au consommateur de changer de fournisseur plus librement puisque aucun frais ne s'ajoutera dans son décompte final à ceux dus au gestionnaire de réseau.

- le consommateur dispose d'un choix de mode de paiement. Cette mesure correspond à une attente des consommateurs qui souhaitent, d'une manière générale, ne pas se voir imposer un mode de paiement unique tel que le prélèvement automatique.

- le fournisseur encadre les estimations de consommation facturées sur les données réelles antérieures connues. Si le fournisseur ne dispose pas des consommations précédentes, il doit expliquer la méthode d'estimation de consommation sur laquelle il fonde sa facture. Actuellement, une seule facturation annuelle sur indice réel est requise des fournisseurs. Cependant, les gestionnaires de réseaux responsables de la relève des compteurs et de la transmission des données aux fournisseurs procèdent à deux relevés par an. En revanche, de nombreux consommateurs se considèrent régulièrement lésés par les évaluations réalisées par les fournisseurs dans le cadre des « factures intermédiaires estimées » émises entre les relevés réels. Ils affirment qu'elles ne correspondent pas à leur niveau de consommation.

- le fournisseur organise son système de facturation de manière à prendre en compte les indices réels transmis par le consommateur qui souhaite relever son compteur entre les relèves du gestionnaire de réseau. Cette mesure a déjà été adoptée par certains fournisseurs ; elle sera désormais obligatoire pour tous.

- le consommateur dispose, sans surcoût, de ses données de consommation. Cette mesure d'information sera en outre utile pour permettre de réaliser des économies d'énergie. Une plus grande disponibilité de ce type d'information contribuera à créer de nouveaux services, voire de la valeur ajoutée.

L'entrée en vigueur des mesures transposant les directives 2009/72/CE et 2009/73/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour les marchés de l'électricité et du gaz naturel est prévue dans un délai de neuf mois à compter de la date de publication du projet de loi adopté. Les directives prévoient la mise en application par les Etats membres avant le 3 mars 2011.

Indépendamment des mesures de transposition du troisième paquet énergie (cf. tableau de concordance en annexe 3) , la modification de l'article L. 121-86 du code de la consommation a pour objet de préciser le champ d'application des articles L. 121-87 à L. 121-93 du même code sur les contrats de fourniture d'électricité ou de gaz naturel.

Actuellement, ces dispositions sont applicables aux consommateurs aux termes de l'article L. 121-86 du code de la consommation et, pour la plupart d'entre elles ainsi qu'il est prévu à l'article 43 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie, aux consommateurs finals non domestiques, c'est à dire aux « petits professionnels » souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères ou consommant moins de 30 000 kilowattheures par an de gaz naturel.

Dans le domaine du droit de la consommation, la notion de consommateur, qui a pu comprendre les personnes morales, évolue actuellement à la suite d'interprétations plus restrictives inspirées de la jurisprudence communautaire. La nouvelle définition jurisprudentielle du consommateur pourrait être amenée à ne couvrir que les seules personnes physiques.

Ainsi, pour les contrats de fourniture d'électricité et de gaz naturel, la couverture des personnes physiques et des « petits professionnels » conduit à exclure de la protection du code de la consommation et par conséquent de la compétence du Médiateur national de l'énergie les personnes non-professionnelles toutefois éligibles aux tarifs réglementés telles que les syndicats de copropriétés.

Pour assurer une protection identique à tous les bénéficiaires des tarifs réglementés et éviter une insécurité juridique, il est souhaitable d'étendre le champ d'application des articles L. 121-87 à L. 121-93 du code de la consommation aux non-professionnels en complétant l'article L. 121-86.

Au regard du code de la consommation, cette mesure est en harmonie avec les dispositions identiques prises en 2008, par exemple, à l'article L. 121-85 portant sur les contrats de services de communications électroniques et à l'article L. 136-1 relatif à l'information en matière de reconduction des contrats.

Au regard de la compétence du Médiateur national de l'énergie, fixée à l'article 43-1 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, cette mesure est également cohérente. Elle permettra à l'ensemble des clients bénéficiant des tarifs réglementés de saisir le Médiateur en cas de différend avec un fournisseur.

4.2.3.2 Les moyens et gros consommateurs (sites dont la puissance souscrite est supérieure à 36 kVA)32

Les moyens et gros consommateurs (PME, grands sites industriels, hôpitaux, immeubles, hypermarchés, etc.33) représentent environ 4 800 000 sites.

Les tarifs réglementés de vente sont maintenus jusqu'en 2015 pour les consommateurs qui n'ont pas aujourd'hui fait jouer leur éligibilité tout en les autorisant à faire des allers-retours entre tarifs réglementés et offres de marché (réversibilité).

Ces clients pourront ainsi appréhender progressivement l'ouverture des marchés avant 2015, date de suppression des tarifs réglementés pour l'ensemble des gros consommateurs. A cette échéance, les grandes ou moyennes entreprises disposeront d'informations suffisamment précises pour pouvoir faire jouer à leur profit la concurrence entre des fournisseurs disposant de conditions comparables d'accès à la production de base. Le maintien des tarifs réglementés au-delà de 2015 n'apporterait donc pas d'avantage significatif à ces entreprises.

A terme, le dispositif permettra aux moyens et gros consommateurs de tirer parti de la concurrence

Pour les moyens et gros consommateurs qui ne bénéficieront plus, à terme, de tarifs réglementés, la transparence du dispositif (rendant public le prix régulé de l'électricité de base), leurs moyens techniques pour tirer parti de la concurrence et le jeu concurrentiel conduiront les fournisseurs à intégrer dans leurs offres la compétitivité du parc de production français dont ils bénéficient à travers l'accès régulé à l’électricité de base.

La Commission de régulation de l'énergie se voit confier la mission de surveillance de la cohérence des prix proposés par les acteurs du marché de l'électricité avec leurs contraintes économiques, notamment l'accès régulé à l’électricité de base. Cela permettra, le cas échéant, de détecter des écarts manifestement injustifiés entre les prix de détail proposés aux clients finals par l'ensemble des fournisseurs et les coûts d'approvisionnement de ces fournisseurs, traduisant un comportement coordonné. Le contrôle des pratiques anticoncurrentielles relève de l'Autorité de la concurrence en vertu des articles L 420-1 et suivants du code de commerce. Cette articulation des missions permettra de détecter les éventuels abus et est de nature à protéger les consommateurs et à leur garantir un prix de l'électricité reflétant la compétitivité du parc de production.

Par rapport à la situation économique actuelle, le dispositif permet de pérenniser la maîtrise de la facture d'électricité fondée sur la réalité industrielle des coûts compétitifs de production du parc de référence, non exposée aux aléas des prix de marché européen et dépendant des coûts des combustibles fossiles.

Par rapport à une situation virtuelle de dérégulation totale des prix de détail, où le prix serait fixé par le prix de gros de l'électricité, le dispositif se traduit par un prix inférieur de 8 à 24€/MWh34 pour l'ensemble des entreprises, soit 10 à 25% d'économie moyenne sur la facture électrique (en fonction de l'hypothèse faite pour l'écart entre prix de marché et prix d'accès régulé à l’électricité de base).

La consommation de ce type de clients représente un volume d'environ 300 TWh. Le transfert direct au secteur industriel et professionnel est compris entre 2,4 et 7,2 Md€.

Economie réalisée grâce au dispositif, par secteur, par rapport à la situation virtuelle d'absence de tarif dans laquelle le prix de détail reflète le prix de marché

 

Petits consommateurs (correspondant au tarif bleu)

Moyens et gros consommateurs

(correspondant aux tarifs jaune et vert)

Total moyens et gros consommateurs

 

Ménages

Secteur tertiaire

Secteur tertiaire

Industrie

Secteur énergétique

Transports

 

Consommation d'électricité 2007 (TWh) Source : RTE (Bilan prévisionnel édition 2009) et estimations DGEC*

145

40

82

134

58

13

297

Economie (Md€) sur la facture électrique par rapport au scénario virtuel de dérégulation

0

0

0,6 à 2

1, à 3,2

0,5 à 1,4

0,1 à 0,3

2,4 à 7,2

*Les consommateurs résidentiels du secteur tertiaire sont supposés avoir une consommation de 40 TWh.

Plus spécifiquement pour le secteur industriel, la facture énergétique représente environ 13 Md€ par an (soit 5,5% de la valeur ajoutée du secteur). Par rapport à la situation virtuelle de fin des tarifs réglementés, la mise en place du dispositif permettra une économie comprise entre 1,2 et 3,5 Md€ (soit 9 à 27% de la facture énergétique), ce qui représente entre 0,5 et 1,5% de la valeur ajoutée du secteur industriel français.

Facture énergétique du secteur industriel

 

Unité

2008

Évolution des énergies marchandes :

   

Consommation brute

Milliers de TEP

30 854

Facture énergétique

Millions d'euros courant

12 965

     

Répartition des énergies consommées hors utilisation matière première

Total

 

100,0

Electricité

%

40,9

Vapeur

%

7,2

Gaz

%

36,5

Combustibles Minéraux Solides (houille, lignite , coke de houille)

%

5,7

Produits pétroliers (coke de pétrole, Butane propane, Fioul lourd et Fioul domestique)

%

9,7

     

Prix moyen annuel

   

Électricité

€/Mwh

52,7

Vapeur

€/tonne

28,1

Gaz naturel

€/Mwh

31,5

Autres gaz de réseau

€/Mwh

33,0

Charbon (Houille, lignite, charbon pauvre)

€/tonne

95,3

Coke de houille

€/tonne

241,7

Coke de pétrole

€/tonne

148,6

Butane - Propane

€/tonne

558,3

Fioul lourd

€/tonne

374,4

Fioul domestique

€/litre

0,64

Source : Insee : Les consommations d'énergie dans l'industrie en 2008

L'économie réalisée, en pourcentage de la facture électrique, pour un site donné, dépend des caractéristiques de consommation et de raccordement au réseau.

Ecart de facture par rapport au scénario virtuel de dérégulation totale des prix, pour des consommateurs industriels types (chiffres indicatifs*)

Consommateurs

Jaune

Vert

Electrointensif

Ensemble des entreprises

Hausse

-9 à -22%

-11 à -27%

-13 à -31%

-10 à -25%

*La fourchette correspond à celle prise pour l'écart entre prix de marché et prix régulé d'accès à la base. Ces chiffres sont approximatifs.

L'activité de certaines filières industrielles grosses consommatrices d'électricité est particulièrement dépendante des conditions d'approvisionnement en énergie (une part significative des coûts est imputable à la facture électrique). En particulier, plusieurs d'entre elles sont soumises à la concurrence internationale et sont donc susceptibles d'être délocalisées pour tout ou partie de leur activité. Celles-ci sont notamment l'industrie du papier et carton, la fabrication de fibres de verre, la fabrication d'autres produits chimiques inorganiques de base, la sidérurgie, la production d'aluminium, la production de plomb, zinc ou étain et première transformation. Elles représentent un chiffre d'affaires de plusieurs dizaines de milliards d'euros et environ 80 000 emplois. Le dispositif envisagé devrait donc permettre de continuer à leur faire bénéficier de la compétitivité du parc de production et de conforter ainsi leur implantation et les emplois.

La mise en œuvre du dispositif envisagé maintiendra l'attractivité économique du territoire français notamment pour les industries électro intensives. Par ailleurs, ces dernières peuvent, grâce au dispositif établi via le consortium Exeltium, bénéficier à partir du 1er mai 2010 de conditions d'approvisionnements offrant une bonne visibilité, stables sur le long terme et à un prix représentatif du coût de production des centrales nucléaires.

4.2.4 Les gestionnaires de réseau

Dans le cadre de cette réforme, les gestionnaires de réseau (Réseau de Transport d'Electricité, Electricité Réseau Distribution France et les entreprises locales de distribution35 qui sont au nombre de 175) sont progressivement considérés comme des consommateurs finals en ce qu'ils permettent à leurs fournisseurs de bénéficier de droits à l'accès régulé à l’électricité de base. Ainsi, pour répondre aux appels d'offres des gestionnaires de réseau pour l'approvisionnement des pertes, les fournisseurs pourront intégrer le prix de l'accès régulé à l’électricité de base. Ainsi, de même que pour tout autre consommateur, les gestionnaires de réseaux pourront bénéficier d'une visibilité à long terme sur une partie significative de leurs coûts.

Un tel approvisionnement aura un impact à la baisse sur le TURPE (tarif d'utilisation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité), toutes choses égales par ailleurs. Les coûts annuels moyens retenus par la Commission de régulation de l'énergie pour l'achat des pertes sont de 750M€ (11,5 TWh) pour Réseau de Transport d'Electricité (RTE) et 1 372 M€ (21,6 TWh) pour Electricité Réseau Distribution France (ERDF). Le gain en termes de coûts évités pour les gestionnaires de réseau pourrait s'élever à une fourchette de 250M€ à 800M€ soit 1,7% à 5,0% des charges totales sur la base des hypothèses illustratives du 4.2. Cette réforme n'aura pas d'impact sur le tarif actuellement en vigueur (dit "TURPE 3") puisque l'inclusion de l'approvisionnement des pertes dans le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base sera mise en œuvre, progressivement sur 3 ans, à compter de la fin de ce tarif, en août 201336.


L'impact sur le TURPE, qui, en fonction de la tension de raccordement, représente une part plus ou moins grande de la facture électrique totale pour le consommateur final, pourrait être de l'ordre de 0,6 à 1,7 €/MWh.

Par ailleurs, RTE jouera un rôle central dans la gestion du dispositif d'obligation de capacité en déterminant la répartition, entre les fournisseurs, des objectifs de couverture de la pointe, délivrant les "certificats" de capacité et contrôlant le niveau de puissance garantie.

4.2.5 Les entreprises locales de distribution (ELD)

Les entreprises locales de distribution sont au nombre de 175 et distribuent environ 5% de l'électricité.

Le tarif de cession aux distributeurs non nationalisés est pérennisé pour leur permettre de fournir leurs clients bénéficiant des tarifs réglementés de vente de l'électricité. A l'instar des autres fournisseurs, les distributeurs non nationalisés pourront bénéficier de l'accès régulé à l'électricité de base pour fournir leurs clients en offres libres et acheter leurs pertes.

4.2.6 Impacts sur le marché de gros de l'électricité

4.2.6.1 En modifiant radicalement les échanges commerciaux entre les acteurs, la mise en place de l'accès régulé à l’électricité de base pourrait avoir un impact significatif sur le fonctionnement du marché de gros

L'instauration de l'accès régulé à l’électricité de base a pour effet :

- d'accroître la part des volumes échangés dans un cadre régulé ;

- de modifier les échanges commerciaux entre opérateurs.

De ce fait, des interrogations se posent quant à l'impact de cette réforme sur le marché de gros de l'électricité, dont la liquidité est aujourd'hui relativement faible37.

A cet égard, l'approvisionnement des pertes par les gestionnaires de réseau joue aujourd'hui un rôle important d'animation du marché. En effet RTE et ERDF effectuent régulièrement des appels d'offres pour l'achat d'électricité, selon diverses modalités (contrats fermes et optionnels à diverses échéances)38. De nombreux acteurs répondent à ces appels d'offres et couvrent généralement leur position sur le marché de gros ou via les enchères VPP39. L'existence simultanée des enchères pour l'achat des pertes et des enchères de vente de VPP joue donc un rôle moteur dans le fonctionnement du marché de gros.

Dans ce contexte, l'inclusion des pertes dans le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base (possibilité pour les fournisseurs d'avoir des volumes de base régulée pour alimenter les gestionnaires de réseau) pourrait modifier le recours au marché par les acteurs fournissant les gestionnaires de réseau. Ce point, s'il doit être relativisé40, suscite des interrogations de la part de certains acteurs41. Le projet de réforme y répond en prévoyant d'intégrer les pertes au dispositif d'accès régulé à l’électricité de base seulement de manière progressive. Cette progressivité permet de tenir compte du fait que le TURPE en vigueur a été établi sur la base d'une couverture des pertes au prix de marché. Elle permettra en outre de bénéficier du retour d'expérience concernant les effets immédiats (dès la mise en œuvre de l'accès à la base, excluant initialement l'approvisionnement des pertes) de la réforme sur la liquidité du marché de gros.

La suite de l'analyse distingue donc :

- l'effet immédiat, c'est-à-dire à la date de la mise en œuvre de la réforme ;

- l'effet à moyen terme, c'est-à-dire après quelques années, à un horizon auquel l'approvisionnement des pertes aura pu être intégré dans le dispositif.

4.2.6.2 L'évaluation de l'impact immédiat de la mise en place du dispositif d'accès régulé à de l'électricité en base sur la liquidité du marché de gros est soumise à de fortes incertitudes

L'activité du marché de gros couvre toutes les transactions effectuées :

- sur les bourses de l'électricité ;

- sur les plateformes de brokers ;

- de façon bilatérale entre deux acteurs.

Les deux premières catégories sont dites « intermédiées » car les cocontractants utilisent un intermédiaire (bourse ou broker). Les deux dernières catégories constituent les transactions « OTC » 42.

Le marché de gros constitue en soi une source d'approvisionnement. Néanmoins, il existe peu de fournisseurs « purs » se procurant de l'énergie uniquement sur le marché de gros, de nombreux fournisseurs étant également producteurs, le cas échéant dans un autre pays. De fait, ce dernier est généralement utilisé par les acteurs comme « ajustement », pour résorber les déséquilibres pouvant exister entre leurs différentes sources d'approvisionnements (hors marché de gros donc) et les besoins de leurs clients. Ces sources d'approvisionnement proviennent :

- des moyens de production propres ;

- des importations ;

- des enchères Virtual Power Plant (VPP) et « Direct Energie43 » pour les fournisseurs alternatifs44 ;

- des « swap » passés entre opérateur (échanges de capacité de production).

Le déséquilibre existant entre, d'une part, les volumes issus des moyens de production propres, des importations et des VPP et, d'autre part, la consommation des clients est résorbé par le recours au marché de gros. Il traduit la « position nette » de l'acteur sur le marché de gros.

Il peut être négatif : on parle alors d'une position d'« acheteur net » sur le marché de gros. Les « fournisseurs purs » (sans actif de production) sont généralement dans cette catégorie.

Il peut être positif : on parle alors d'une position de « vendeur net ». Par exemple, un acteur disposant de grandes capacités de productions peut chercher à vendre sur le marché de gros l'énergie qu'il n'a pas destinée à ses propres clients finals.

L'impact de l'instauration d'un accès régulé à l’électricité de base dépendra donc essentiellement de la modification induite dans les « positions nettes » des acteurs45. Il est difficile a priori de prédire quel sera le sens de ce changement.

4.2.6.3 A moyen terme, la dynamique concurrentielle instaurée par le dispositif d'accès régulé et les échanges avec les pays voisins prendront le relais sur l'accroissement de la liquidité

L'activité du marché de gros dépend de nombreux facteurs. En particulier, elle est reliée à la réglementation et au degré de concurrence pouvant exister sur le marché de détail et de la production.

Les freins au développement du marché de gros devraient être levés du fait de la mise en œuvre de la réforme :

- Le TaRTAM 

Le TaRTAM a poussé les acteurs à adopter une attitude passive vis-à-vis de l'optimisation des coûts d'approvisionnement, compte tenu du fait qu'ils étaient compensés de leurs surcoûts d'approvisionnement dans la limite d'un plafond. La fin du TaRTAM incitera les opérateurs alternatifs à optimiser de manière plus active leur approvisionnement en énergie car toute réduction de coût se traduira par un gain immédiat. En conséquence, les volumes échangés sur le marché de gros augmenteront.

- Le manque de visibilité sur la réglementation concernant les tarifs de détail 

Les incertitudes liées à l'évolution du cadre réglementaire français constituent un des facteurs les plus fréquemment cités par les acteurs eux-mêmes pour expliquer le faible dynamisme du marché de l'électricité français. En particulier, par prudence et compte tenu de la multiplicité des signaux de prix donnés par la réglementation et son imprévisibilité, les acteurs sont peu enclins à adopter des stratégies de couverture de leurs approvisionnements, sur la base des instruments disponibles sur le marché. Le nouveau dispositif permettra de stabiliser les « règles du jeu » pour de nombreuses années.

La construction des tarifs par empilement des composantes « prix de base régulée » et « coût d'approvisionnement complémentaire » est, par ailleurs, de nature à accroître la visibilité des acteurs sur les déterminants futurs du prix. Ces éléments permettront aux acteurs d'élaborer des stratégies de couverture à des horizons plus lointains que ceux considérés actuellement. Le développement des marchés à terme devrait ainsi être favorisé.

- Le manque de concurrence sur le marché de détail

Le renforcement de la concurrence sur le marché de détail devrait contribuer à dynamiser le marché de gros. C'est en effet le marché de détail et les besoins qu'il crée en termes de couverture des risques, d'approvisionnement complémentaire, etc., qui alimente l'activité sur le marché de gros. L'augmentation des parts de marché des opérateurs alternatifs sur le marché de détail devrait ainsi entraîner parallèlement une hausse de l'activité sur le marché de gros. Cette dynamique devrait participer à la création d'un marché de gros liquide et robuste, car animé par de nombreux acteurs. Elle devrait s'auto entretenir car elle renforcera la confiance dans le marché et encouragera davantage d'acteurs à y avoir recours.

A moyen terme, la réforme devrait contribuer à améliorer sensiblement le fonctionnement du marché et accroître son activité :

- La prise en compte des prix de marché pour la construction des tarifs réglementés de vente 

Les modalités de construction des tarifs réglementés de vente envisagées incluent une référence aux prix de marché pour le complément d'approvisionnement en électricité au delà de l'accès régulé à l’électricité de base. Cette méthodologie appelle à un bon fonctionnement du marché en particulier pour l'électricité de pointe et donc à une bonne liquidité de celui-ci. Cette construction des tarifs contribuera aussi à alimenter cette liquidité car les fournisseurs aux tarifs réglementés auront intérêt à s'adosser au marché pour sécuriser leurs coûts dans le cadre de la fourniture au tarif.

- La fluidification des échanges sur la plaque continentale

Les volumes physiquement exportés aujourd'hui devraient continuer à l'être demain, entretenant ainsi l'activité du marché de gros. La programmation pluriannuelle des investissements électriques (PPI46) indique même un possible doublement des volumes exportés d'ici 2020 avec le doublement de la production des énergies renouvelables et le développement des économies d'énergies qui devraient stabiliser la demande nationale.

Par ailleurs, le couplage des marchés de l'électricité sur des zones plus étendues (le couplage de la région centre ouest47 est prévu pour 2010) contribuera à la création d'un marché unique au niveau régional voire européen, sur lequel les échanges se feront indistinctement entre opérateurs de plusieurs pays.

Compte tenu des éléments précédents, l'inclusion de l'approvisionnement des pertes dans le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base devrait intervenir à terme dans un contexte de meilleure liquidité du marché de gros. Quoi qu'il en soit, la loi prévoit qu'une analyse de l'évolution du fonctionnement du marché suite notamment à la mise en œuvre de la réforme soit effectuée par la Commission de régulation de l'énergie.

4.2.7 Ces impacts seront suivis de manière dynamique afin d'adapter la régulation aux enjeux.

La loi prévoit des rendez-vous quinquennaux, par la remise de bilans périodiques au Parlement, pour faire un bilan précis de l'impact de la mise en œuvre de cette nouvelle organisation des marchés de l'électricité sur les différents acteurs. Ces rendez-vous sont nécessaires pour s'assurer de l'efficacité de la régulation et permettre son adaptation aux enjeux. En effet, cette régulation devra s'adapter à la levée progressive des incertitudes ainsi qu'à l'évolution de la réalité industrielle du parc de production, comme indiqué précédemment.

4.3 Impacts macro économiques

4.3.1 L'impact macroéconomique associé à la maîtrise de la facture électrique est potentiellement très important

Au 4.2.3.2 ont été détaillés les impacts directs, relatifs à la maîtrise de la facture d'électricité, pour les gros consommateurs. Compte tenu de l'ampleur de l'impact direct sur la facture électrique des entreprises, les effets indirects, ou de « second tour », ne peuvent être négligés, bien qu'ils soient très difficiles à chiffrer (voir infra).

Par rapport à la situation actuelle, l'impact macroéconomique réside essentiellement dans une meilleure visibilité du cadre de régulation et dans le développement attendu des fournisseurs alternatifs qui pourra stimuler l'innovation.

Par rapport au scénario virtuel qui vise la fin des tarifs réglementés, la mise en œuvre du dispositif prévu par le rapport Champsaur se traduira par un prix de l'énergie plus compétitif qui a un effet stimulant sur l'ensemble de l'économie, dans la mesure où l'énergie est un input pour de nombreux secteurs économiques. Ces effets de « second tour » sont un prix moindre des intrants et un prix moindre des produits. La propagation de ce « choc de prix des intrants » dans toute l'économie accroît le surplus des ménages et des entreprises. L'effet réel sur l'économie, en termes de création de richesse, est donc potentiellement supérieur à l'effet direct évalué par la baisse de la facture électrique. Ces effets de « second tour » sont donc susceptibles d'avoir un effet positif significatif sur l'emploi.

4.3.2 La nouvelle organisation du marché électrique pourrait conduire à un léger gain macroéconomique à long terme par rapport à la situation de dérégulation des prix pour les gros consommateurs.

Comme mentionné précédemment, par rapport à la situation actuelle, l'impact macroéconomique réside dans la meilleure visibilité du cadre de régulation et dans le développement attendu des fournisseurs alternatifs qui pourra stimuler l'innovation.

Par rapport au scénario virtuel de fin des tarifs réglementés, à long terme, la réforme est légèrement favorable à l'activité et à l'emploi, la mesure revenant à alléger le coût d'un facteur de production. A court terme, la réforme proposée pourrait avoir un impact légèrement négatif sur l'activité : la compensation des moindres recettes publiques pèse immédiatement sur l'activité tandis que les effets positifs de la diminution des prix de l'électricité apparaissent progressivement. Ce point doit être relativisé dans la mesure où cette évaluation macroéconomique ne tient pas compte de l'obligation de capacité qui va orienter les acteurs dont EDF vers l'investissement dans de nouveaux moyens de production.

Par ailleurs, l'effet global de la réforme repose sur l'hypothèse que les gains de compétitivité des entreprises en France, liés à l'écart entre les prix de l'électricité nucléaire relativement aux prix de marché, sont permanents et ne sauraient être remis en cause à terme par leurs concurrents étrangers : il y a un marché pertinent français avec des caractéristiques de marché dont bénéficient exclusivement les entreprises installées en France. Cette hypothèse est réaliste car peu de pays disposent ou envisagent de développer des capacités de production à bas coût en quantité suffisante (par rapport à la demande en électricité de base notamment) pour avoir une influence significative sur les prix de l'électricité pour les industriels situés sur leur territoire.

4.3.3 L'absence de volatilité du prix de l'électricité permet aux acteurs d'améliorer leurs anticipations et joue un rôle assurantiel par rapport aux chocs des prix pétroliers

La stabilité du coût de production nucléaire, et en particulier sa décorrélation avec le prix du pétrole, constitue un avantage macroéconomique qui n'est pas pris en compte dans les analyses précédentes, compte tenu de la difficulté inhérente à son évaluation chiffrée.

Premièrement, la prédictibilité du prix de l'électricité serait renforcée à moyen et long terme. Cela permet de réduire les incertitudes sur les coûts et donc sur les revenus futurs des projets d'investissement et donc les risques associés à leur rentabilité. Sur le plan financier, la réduction de ces risques se traduit par une prime positive par rapport à la situation virtuelle de dérégulation dans laquelle les prix seraient très volatils. En conséquence, l'instauration d'un dispositif d'accès régulé à l’électricité de base accroîtrait le nombre de projets rentables et favoriserait donc le développement économique.

Secondement, le prix de marché de l'électricité est fortement lié au prix du gaz, lui-même lié au prix du pétrole. Ainsi existe-t-il, à long terme, une corrélation entre le prix du pétrole et le prix de l'électricité. Ce type de corrélation conduit à aggraver les effets négatifs des chocs pétroliers, en favorisant leur propagation à l'économie tout entière. Au contraire, une facture électrique stable, calée pour une part importante sur les coûts du parc nucléaire, permet de limiter cette propagation en temps de crise. Le dispositif envisagé apporte donc à l'économie française un bénéfice additionnel sous une forme assurantielle.

4.4 Impacts sur les finances et sur l'emploi public 

4.4.1 Impact financier pour l'État

Par rapport à la situation actuelle, l'impact de la réforme sur les finances publiques est globalement neutre. En effet le prix de l'accès régulé à l’électricité de base étant le sous jacent des tarifs réglementés, l'ensemble des prix, ainsi que les revenus d'EDF, seront déterminés par les mêmes facteurs que le cadre de régulation existant.

Dans un scénario virtuel de dérégulation complète des prix (fin des tarifs réglementés), la situation serait évidemment différente. L'évaluation de l'impact de la réforme sur les finances publiques par rapport à ce scénario virtuel a un caractère artificiel mais peut être effectuée. L'impact de la réforme sur les recettes de l'État passe par trois canaux : la TVA, l'impôt sur les sociétés (IS) et le dividende versé par EDF à l'État actionnaire. La quantification de ces effets n'est pas toujours aisée à effectuer, notamment ceux liés à l'impact sur l'activité globale de l'économie.

- Concernant la TVA, l'impact final résulte de deux effets contraires.

D'une part, le développement de l'activité économique en général induit par le maintien du prix de l'électricité à un niveau calé sur le coût de production nucléaire devrait se traduire par des montants prélevés via la TVA supérieurs à ceux du scénario virtuel de dérégulation. D'autre part, le dispositif se traduit par un chiffre d'affaires inférieur à celui, théorique, correspondant au scénario de dérégulation totale des prix, et donc des marges d'EDF inférieures par rapport au scénario virtuel de fin du tarif. De ce fait, la TVA prélevée sur les ventes d'électricité est inférieure par rapport à celle correspondant à la situation de dérégulation complète des prix. La somme des deux effets est difficile à évaluer. Il pourrait s'agir d'un effet de second ordre.

- Concernant l'impôt sur les sociétés (IS), on peut considérer que, au premier ordre, l'impact est nul pour le périmètre des professionnels du secteur électrique.

En effet, si par rapport à la situation théorique du scénario de dérégulation complète des prix, le résultat du groupe EDF et des autres fournisseurs est inférieur (et donc l'IS aussi), celui des entreprises consommatrices d'électricité est lui supérieur (et donc leur IS également). Les variations d'IS des fournisseurs et des consommateurs professionnels sont du même ordre mais de signe contraire. Au premier ordre, et en supposant toutefois que les entreprises consommatrices ont toutes des résultats positifs et paient l'IS, quelle que soit l'organisation du marché de l'électricité, l'IS total provenant de l'ensemble « fournisseur-consommateurs professionnels » peut être considéré comme constant. Pour le périmètre des résidentiels, les tarifs réglementés étant maintenus dans le scénario virtuel de dérégulation et dans le cadre du projet de loi sur la nouvelle organisation du marché de l'électricité, l'impact est aussi nul. Concernant le groupe EDF, l'IS devrait être inférieur de 0,9 à 2,7 Md€48 par an par rapport à la situation théorique du scénario virtuel de dérégulation.

- Dans un scénario virtuel de dérégulation totale, les dividendes versés par EDF seraient très supérieurs à leur montant actuel

L'écart du chiffre d'affaire et la baisse de l'IS chiffrés précédemment se répercutant mécaniquement sur le résultat net du Groupe EDF, ce dernier serait inférieur de 1,7 à 5,2 Md€ par rapport à la situation théorique d'absence de régulation. En supposant que 50% du résultat net est reversé aux actionnaires, la part de l'Etat (85% des actions) dans le dividende est inférieure de 0,7 à 2,2 Md€ par rapport à la situation de dérégulation complète des prix. Ces calculs sont valables toutes choses égales par ailleurs.

4.4.2 Impact sur l'emploi public

La réforme suppose une évolution vers une régulation plus ciblée et plus efficace : la détermination des droits de chaque fournisseur alternatif, le contrôle de l'utilisation des volumes alloués, la détermination du prix d'accès régulé à l'électricité de base, la gestion de l'obligation de capacité et la surveillance accrue des marchés nécessiteront un travail supplémentaire pour la puissance publique.

Compte tenu de son rôle actuel (avis sur les tarifs réglementés de vente, détermination des compensations pour la fourniture au TaRTAM, fixation du montant de la CSPE, surveillance du marché de gros de l'électricité) et des compétences dont elle dispose, la Commission de régulation de l'énergie sera amenée à jouer un rôle accru dans la réforme envisagée. Ce renforcement nécessitera un accroissement des moyens humains de la Commission, qui pourrait être de l'ordre de quelques emplois, ce qui est négligeable par rapport aux effets macroéconomiques de la réforme envisagée.

4.5 Impacts environnementaux

Les impacts environnementaux du système électrique sont essentiellement ceux des moyens de production électrique. La réforme envisagée ne porte pas directement sur les moyens de productions d'électricité, néanmoins il convient d'évaluer son impact sur la consommation d'électricité et donc sur la sollicitation des moyens de production mais aussi, le cas échéant, son impact sur les investissements dans de nouveaux moyens de production.

4.5.1 La mise en œuvre du Grenelle de l'environnement conduit à une réduction des émissions de CO2 par rapport à aujourd'hui

Dans la suite du Grenelle de l'environnement, le gouvernement a élaboré en 2009 une nouvelle programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité (PPI) qui décline, pour la production électrique, les objectifs d'économie d'énergie, de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de sécurité d'approvisionnement et de compétitivité.

Les hypothèses de trajectoire de prix de l'électricité qui sous-tendent la PPI supposent le maintien d'une régulation

La PPI repose sur des hypothèses de consommation issues d'une « évaluation de la situation énergétique de la France à l'horizon 2020 du fait de l'application et de l'atteinte des objectifs du projet de loi Grenelle de l'environnement »49. Cette évaluation a permis de mesurer l'impact de la loi de programmation relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement sur la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre. En ce qui concerne les prix de l'électricité, ce scénario repose sur l'hypothèse du maintien d'une régulation qui permette aux consommateurs de bénéficier de prix de l'électricité reflétant les coûts.

Cette hypothèse est compatible avec la réforme envisagée. En effet, dans la nouvelle organisation du marché, la part énergie du prix au consommateur final sera la somme d'une composante « électricité de base » dont le niveau est calé sur le coût de production du nucléaire, et d'un terme correspondant à la consommation de semi-base et de pointe, représentatif du prix de l'électricité sur le marché. Le prix « régulé » sera donc, pour l'essentiel, le prix « directeur » du marché. Par ailleurs, la structure du tarif importe peu dans la mesure où le modèle utilisé dans l'exercice de la PPI ne prenait en compte que le niveau du prix de l'électricité50.

La PPI prévoit une stabilisation de la consommation d'électricité et une diminution des émissions du secteur électrique par rapport à aujourd'hui

Grâce à une politique vigoureuse d'économie d'énergie, et tout en restant dans le cadre d'hypothèse de prix régulés, la PPI prévoit à l'horizon 2020 une quasi stabilité, par rapport à 2008, de la consommation intérieure nette d'électricité à 492 TWh/an. Cette perspective prend en compte des hypothèses de transfert entre énergies.

La PPI prévoit donc que les émissions de CO2 imputables à la production électrique diminueront nettement, passant de 34,7 Mt en 2006 à 13 à 25 Mt/an en 2020, en fonction du niveau de demande en électricité. Par ailleurs, les transferts d'énergie carbonée vers l'électricité, notamment le développement des véhicules électriques, pourront également contribuer à la baisse des émissions de CO2.

4.5.2 La réforme envisagée permettra de clarifier les signaux économiques, d'inciter à une meilleure maîtrise de la demande en électricité et contribuera à l'atteinte des objectifs de la PPI

4.5.2.1 La construction du prix de l'électricité par empilement des différentes composantes constitue a priori un bon signal pour inciter à la maîtrise de la demande

Dans la nouvelle organisation du marché, le prix payé par le consommateur final sera la somme :

- des coûts d'acheminement d'électricité,

- d'une composante « électricité de base » dont le niveau est calé sur le coût de production du nucléaire,

- du coût du complément de fourniture d'électricité y compris la garantie de capacité,

- des coûts de commercialisation.

Cette architecture explicite les différentes composantes du tarif réglementé actuel. Elle ne se traduit donc pas par des coûts additionnels pour les consommateurs mais permet de leur donner les bonnes incitations en termes de maîtrise de la demande. A cet égard, le complément de fourniture jouera un rôle efficace d'identification des coûts explicites de la pointe électrique, permettant ainsi à tous les fournisseurs de proposer des solutions innovantes de réduction de celle-ci.

Le complément d'approvisionnement permettra de transmettre le prix du CO2 aux consommateurs

Le prix du CO2 est déjà pris en compte dans la structure des tarifs réglementés. Il le sera également dans le nouveau système, de manière plus explicite et transparente. Le complément d'approvisionnement se fera dans les conditions du marché. Or, le secteur de la production électrique étant soumis au système de quotas d'émissions de CO2, les producteurs prennent en compte le prix des quotas pour l'optimisation du fonctionnement de leurs centrales. C'est pourquoi le prix de marché de l'électricité intègre, heure par heure, la valeur, telle qu'estimée sur le marché, des émissions de CO2 de la centrale marginale (i.e. celle permettant de répondre à la dernière unité d'énergie consommée)51 : l'électricité est donc plus chère en période de pointe de consommation lorsqu'on doit faire appel à des centrales de production émettant plus de gaz à effet de serre. Ainsi, en 2008, il était en moyenne trois fois plus bas en heure creuse (5h heure du matin) qu'en heure de pointe (19h).

L'obligation de capacité conduira tous les fournisseurs à inciter les consommateurs à s'effacer lors des pointes de consommation

Le coût lié à la garantie de puissance est déjà intégré dans les tarifs réglementés. Pour autant, il n'est pas pris en compte dans les offres « libres ». En effet le cadre actuel de régulation ne permet pas de révéler la valeur de la capacité de pointe.

L'instauration de l'obligation de capacité et l'émergence d'une valorisation de la garantie de puissance devrait amener les fournisseurs à proposer à leurs clients des offres attractives si ceux-ci acceptent de modérer leur consommation lors des périodes de pointe, comme c'est aujourd'hui le cas des offres tarifaires heures pleines / heures creuses ou Tempo qui seront pérennisées. En particulier, leur capacité à s'effacer devrait permettre aux consommateurs de nouer des engagements gagnant-gagnant avec leur fournisseur. En effet, dès lors qu'un consommateur sera prêt réduire sa consommation en heures de pointe, contre le paiement par exemple d'une prime par le fournisseur dont le montant est inférieur à la valeur de la puissance ainsi effacée sur le marché de la capacité, la transaction aura lieu car chacun effectuera un gain. Ce système permettra de révéler le gisement potentiel d'effacement existant parmi l'ensemble des consommateurs. Il deviendra parfaitement efficient lorsque l'installation de compteurs évolués sera parachevée.

4.5.2.2 Le dispositif permettra le développement d'offres innovantes participant à une meilleure maîtrise de la consommation

La réforme envisagée permettra aux fournisseurs alternatifs de développer des offres innovantes et compétitives. En particulier, de nombreux fournisseurs alternatifs souhaitent proposer des services de maîtrise de la demande en énergie : information précise sur la consommation, conseils en maîtrise de la demande, offres tarifaires horosaisonnalisées ou à effacement, le cas échéant par des boxes. De telles innovations, de nature à inciter le consommateur à modifier son comportement de consommation, ne sont pas développées dans la situation actuelle faute de marge de développement pour les fournisseurs alternatifs. A plus long terme, le déploiement des compteurs évolués « Linky » permettra aux fournisseurs de développer des offres encore plus adaptées et diversifiées.

4.5.3 Certes, le scénario virtuel de dérégulation des prix pourrait se traduire par des émissions de CO2 encore inférieures mais exclusivement du fait de prix plus élevés

Compte tenu de l'élasticité prix des consommateurs, les prix élevés de l'électricité dans le scénario virtuel de dérégulation inciterait les consommateurs à moins consommer.

A long terme (horizon 2020), en supposant une hausse des prix finaux de l'électricité correspondant à un écart de 10 à 30€/MWh entre le coût de production du parc nucléaire et le prix de marché, il est possible d'évaluer l'impact d'une dérégulation du prix de l'électricité sur la consommation, la production électrique en France et les émissions de CO2.

Résultats d'une modélisation de « dérégulation » du prix de l'électricité dans le secteur industriel réalisée avec le modèle d'équilibre général calculable GEMINI-E352

En écart /scénario tarif régulé

   

CO2

-0.4 à -1.2%

Soit -1,6 à -4.9 MtCO2/an

Production électrique

-1 à -3.1%

 

Production électrique fossile

-5.5 à -16.6%

 

Consommation électrique

-2.1 à -6.2%

 

Source : C-ORDEE, « Evaluation du paquet énergie-climat à l'aide du modèle GEMINI-E3 », Contrat MEEDDAT, 2008

Il apparaît que l'impact en termes d'émission pourrait être significatif.

Néanmoins, l'effet global en termes d'émissions de CO2 n'est pas si clair

Premièrement, il est calculé sur la base d'un scénario dans lequel aucun effort particulier n'est fait pour réduire les émissions en France (en particulier, les objectifs européens ne sont pas atteints). Or, les objectifs de la PPI supposent un effort important en termes de maîtrise de la demande. Dans ce cadre, une hausse du prix final de l'électricité aurait probablement un gain marginal en termes de réduction des émissions de CO2 moins important que celui auquel aboutit le modèle.

Secondement, un prix final de l'électricité plutôt bas devrait faciliter la pénétration de certaines technologies vertueuses sur le plan environnemental, comme les voitures électriques. De ce point de vue, le scénario avec le dispositif prévu par le projet de loi, en favorisant les transferts d'usage des énergies fortement émettrices vers l'électricité, pourrait contribuer à réduire les rejets de CO2.

4.6 Impacts sociaux

4.6.1 La réforme conforte les tarifs réglementés de vente d'électricité pour les petits consommateurs et a donc un impact social bénéfique

Concernant les ménages, les tarifs réglementés de vente existent dans le scénario de référence. En tant que telle, cette réforme n'a donc pas d'impact social concernant le pouvoir d'achat des ménages.

Par ailleurs, la pérennisation de la réversibilité totale entre les offres libres et réglementées constitue une forte protection du consommateur qui gardera à tout moment sa liberté de choix.

4.6.2 Les consommateurs les plus modestes continueront à pouvoir bénéficier du tarif de première nécessité

Mis en place depuis le 1er janvier 2005, le tarif social d'électricité est un tarif spécial applicable aux clients disposant de faibles ressources. Le bénéfice de la tarification de l'électricité comme produit de première nécessité, est ouvert sur leur demande et pour leur résidence principale, aux personnes physiques titulaires d'un contrat de fourniture d'électricité, dont les ressources annuelles du foyer, sont inférieures ou égales à un montant bien défini. Il s'agit du quotient social ouvrant droit à la Couverture Maladie Universelle Complémentaire, soit, actuellement, 626,76 €/mois pour une personne seule. Ce niveau de ressource couvre ainsi 2 millions de bénéficiaires potentiels. Les bénéficiaires effectifs sont estimés à 950 000 fin 2009.

Pour un bénéficiaire, la tarification de l'électricité comme produit de première nécessité est calculée à partir des tarifs de vente de l'électricité aux consommateurs ayant souscrit la même puissance dans la limite de 9 kVA en appliquant un pourcentage de réduction sur la partie fixe du tarif et sur le prix de l'énergie dans la limite d'un plafond mensuel de consommation. Dans la pratique, cette réduction consiste en une réduction de 30 % à 50 % du montant de la facture sur les 100 premiers kWh mensuels de consommation. La réduction moyenne constatée sur une facture annuelle est de l'ordre de 70 € TTC. En principe, ce sont les organismes d'assurance maladie qui communiquent aux distributeurs d'électricité la liste des personnes remplissant les conditions de ressources. Ensuite, les distributeurs envoient aux personnes concernées une attestation à compléter.

Enfin, on souligne l'existence de dispositifs particuliers pour le traitement des impayés.

Ces dispositions seront maintenues.

4.7 Impacts juridiques

Le projet de loi propose des modifications aux lois n°2000-108 de modernisation du service public de l'électricité et n°2005-781 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, ainsi que des dispositions auto portantes. A l'exception des mesures transitoires, ces dispositions ont à terme vocation à être codifiés dans le Code de l'énergie.

Des décrets d'application et des arrêtés seront nécessaires pour mettre en œuvre le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base et la modernisation des tarifs réglementés de vente

Liste des textes d'application envisagés pour le projet de loi NOME :

1. décret en Conseil d'Etat précisant les obligations des acteurs de l'accès régulé à l'électricité de base (AREB) : renvoi aux arrêtés mentionnés au II al.7, III al.3 et les conditions d'édiction des arrêtés fixant les conditions d'achat : renvoi aux arrêtés mentionnés au I al.2, III al.1.

2. décret en Conseil d'Etat fixant les modalités de la mise en place d'un système d'obligation de capacité

3. décret en Conseil d'Etat fixant les modalités de calcul du complément de prix en cas d'allocation de droits à l'AREB supérieurs à la consommation constatée

4. un arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie fixant le volume global d'électricité sur lequel sont conclus les contrats AREB

5. arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie suspendant, le cas échéant, l'exécution des contrats AREB

6. arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie fixant le prix des contrats AREB

7. arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie fixant de manière transitoire le prix de l'AREB en attendant la mise en place de la comptabilité appropriée

8. arrêté des ministres chargés de l'économie et de l'énergie fixant les tarifs réglementés de vente de l'électricité

Les arrêtés seront pris en application du décret 1.

L'arrêté 8 serait également pris sur le fondement du décret n°2009-975, lui-même pris en application de l'actuel article 4 I. al.4 de la loi 2000-108.

La compétence de la Commission de régulation de l'énergie, en tant qu'autorité consultée pour ces trois arrêtés est prévue par l'article 5 I du projet de loi, ce qui prive d'utilité la mention des arrêtés au sen du texte de loi.

Le fonctionnement de la Commission de régulation de l'énergie est amélioré

Les nouvelles compétences confiées à la Commission de régulation de l'énergie font apparaître le besoin de mettre en place un collège plus resserré, gardien dans la durée d'une doctrine claire et pérenne de régulation, et, parallèlement, d'organiser son « écoute » des enjeux de la politique énergétique dont la Commission n'est pas directement en charge et qui peuvent donner lieu à des orientations du gouvernement ou des parties prenantes représentées au Conseil supérieur de l'énergie.

Les départements d'outre mer (DOM) et la Corse, non interconnectés au réseau métropolitain continental, continuent à bénéficier de dispositions spécifiques garantissant, par la péréquation, des tarifs réglementés de vente pour tous les consommateurs reflétant les coûts de production en France métropolitaine continentale

La réforme envisagée s'inscrit dans le cadre du marché européen de l'électricité et n'a pas vocation à s'appliquer dans les zones non interconnectées au réseau continental (Corse et DOM). Les impératifs de continuité territoriale et les contraintes particulières économiques et techniques de production et d'exploitation de l'électricité dans les ZNI conduit à une gestion des systèmes électriques très dépendante de la solidarité nationale (péréquation tarifaire). Ainsi un dispositif ad hoc de compensation des surcoûts de production est mis en place par l'article 5 de la loi 2000-108 de modernisation du service public de l'électricité afin d'assurer la péréquation. Dans ces zones, dérogeant au droit de l'union et national en tant que zones non interconnectées, les tarifs réglementés de vente seront maintenus pour toutes les catégories de consommateurs comme le prévoit l'article 5 de la présente loi qui modifie l'article 66 de la loi 2005-781.

La réforme n'a donc pas d'impact dans ces territoires par rapport à la situation actuelle.

Les engagements pris avec la Commission européenne sont respectés

La mise en œuvre de cette réforme est de nature à mettre fin aux contentieux communautaires engagés à l'encontre de la France, à la fois au titre des aides d'Etat pour ce qui concerne le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, et pour défaut de transposition de la directive 2003/54/CE concernant des règles communes pour le marché de l'électricité.

5 CONSULTATIONS MENÉES

Avant d'envisager une telle réforme de l'organisation du marché électrique, le gouvernement a souhaité disposer des meilleurs avis et que les parties prenantes soient entendues. C'est pourquoi elle a demandé à la commission présidée par Paul Champsaur de procéder à des auditions et de s'entourer d'experts. La commission Champsaur a ainsi mené de nombreuses auditions des consommateurs, des producteurs et fournisseurs d'électricité, des autres acteurs du marchés, des gestionnaires de réseaux, des collectivités, des organisations syndicales, de la Commission de régulation de l'énergie, de l'autorité de la concurrence, de la Commission européenne, des personnalités qualifiées53 et a par ailleurs invité tout acteur à lui faire parvenir des contributions écrites.

Par la suite, le gouvernement a rendu public le rapport de la commission Champsaur et a ouvert en mai 2009 une consultation publique invitant toutes les personnes intéressées à lui adresser une contribution écrite.

A l'été 2009, le gouvernement a présenté les principes de la réforme envisagée à la Commission Européenne. Les commissaires chargés de la concurrence et de l'énergie ont salué ce projet de réforme de nature à renforcer la concurrence sur le marché de l'électricité français au bénéfice des consommateurs finals.

Les 19 janvier et 8 mars 2010, deux réunions publiques de consultation ont été organisées par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) du MEEDDM. Les acteurs ont en outre été invités à échanger avec les services de la DGEC de façon bilatérale.

L'ensemble des parties prenantes qui s'est exprimé lors de ces réunions s'est félicité de la démarche engagée par le gouvernement et considère qu'elle est de nature à atteindre les objectifs fixés, à savoir le bénéfice pour le consommateur final de la compétitivité du parc nucléaire historique et le développement de la concurrence. Pour autant, nombre d'acteurs soulignent l'importance de la concertation qui devra être mise en œuvre pour définir les modalités d'application, s'inquiètent du calendrier d'adoption du texte de loi et des textes règlementaires à suivre. Ils estiment souhaitable que la mise en œuvre de la réforme ne soit pas retardée et qu'elle puisse assurer la continuité avec le TaRTAM.

Les associations représentant les intérêts des consommateurs saluent le maintien pendant une période transitoire des tarifs jaunes et verts associée à la réversibilité ainsi que le maintien des tarifs pour les petits consommateurs, également associée à la réversibilité. La plupart de ces associations demandent qu'un représentant des consommateurs ou, a minima, qu'une personne sensibilisée aux questions les concernant, soit prévu dans le collège de la Commission de régulation de l'énergie. Elles sont également très sensibles aux questions de surveillance et de transparence concernant les offres de détail faites par les fournisseurs, et demande que la Commission de régulation de l'énergie ait des prérogatives renforcées dans ce domaine. La plupart de ces associations ont jugé positif que les pertes des gestionnaires de réseau soient incluses dans le dispositif d'accès régulé à l’électricité de base.

Les fournisseurs qui se sont exprimés se félicitent de la mise en œuvre du dispositif préconisé par le rapport de la commission Champsaur et pensent que celle-ci est de nature à répondre aux objectifs fixés par le gouvernement. Parmi eux, un certain nombre s'interroge néanmoins du signal donné aux investisseurs pour le développement des moyens de production électrique ainsi que pour le maintien et la prolongation des moyens existants. Certains d'entre eux se préoccupent également des effets de la réforme, et notamment de l'inclusion des pertes dans le dispositif, sur la liquidité du marché de gros : ils rejoignent sur ce point la position de l'opérateur boursier et des représentants des traders. Toutefois, cette position n'est pas unanime car certains fournisseurs estiment que le développement de la concurrence en aval va tirer le développement du marché de gros et favoriser de nouveaux investissements. Certains fournisseurs, à l'instar de certaines associations représentant des gros consommateurs, défendent la possibilité de conclure des contrats d'accès régulé sur une base pluriannuelle. L'ensemble des fournisseurs mentionne la nécessité d'une cohérence entre les tarifs réglementés de vente et les conditions de l'accès régulé à l’électricité de base afin d'éliminer tout ciseau tarifaire, tant sur le marché des gros consommateurs que sur le marché de masse.

La Commission de régulation de l'énergie se montre prête à gérer le dispositif. Elle demande que soient stipulées dans la loi des prérogatives claires lui assurant l'obtention des informations nécessaires auprès des opérateurs pour remplir sa mission de surveillance du marché de détail.

Les gestionnaires de réseau souhaitent s'assurer que les modalités d'accès à la base les conduisent bien à bénéficier de l'avantage compétitif associé au parc nucléaire historique. Ils proposent de créer un observatoire sur le prix d'achat des pertes.

Par ailleurs, l'instauration d'un marché de capacité est une des propositions phares issues des réflexions du groupe de travail sur la maîtrise de la pointe de consommation en électricité. Ce groupe de travail54, présidé par M. le député Serge Poignant et M. le sénateur Bruno Sido, a mené ses travaux au cours des trois derniers mois. Un comité de pilotage au format Grenelle, rassemblant l'ensemble des parties prenantes, s'est réuni à plusieurs reprises :

- pour le lancement du groupe de travail le 3 novembre 2009 ;

- pour un point d'étape le 6 janvier 2010 ;

- pour la présentation d'un document de concertation le 11 février 2010.

Les travaux ont été menés au cours de neuf ateliers de travail auxquels l'ensemble des membres du comité de pilotage a été invité à participer. Ces ateliers ont permis d'aborder l'ensemble des sujets inhérents à la maîtrise de la pointe électrique et ont également permis à l'ensemble des acteurs de s'exprimer. Une dernière réunion du comité de pilotage sera organisée début avril.

Au cours de la 3ème réunion du comité de pilotage, la DGEC a présenté un document de concertation. Ce document diffusé à l'ensemble des participants - avec l'accord de MM. Poignant et Sido - synthétise les principaux enseignements du groupe de travail et présente 18 propositions de mesure en faveur de la maîtrise de la pointe selon trois catégories. La réaction des participants au cours du 3ème comité de pilotage vis-à-vis des 18 propositions - et vis-à-vis des travaux du groupe de travail sur la pointe en général - a globalement été très positive. En particulier, la proposition de la création d'une obligation de capacité associée à la possibilité d'échanger des certificats de capacité a obtenu un très large soutien. MM. Poignant et Sido ont rendu public leur rapport à l’issue d’un 4ème comité de pilotage tenu le 1er avril 2010. Ce rapport est disponible sur Internet à l’adresse suivante :

http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_Poignant-Sido.pdf

6 APPLICATION DE LA RÉFORME DANS LE TEMPS

Une fois la loi adoptée, des dispositions, notamment transitoires, seront d'application immédiate et des textes réglementaires d'application devront être pris sur les sujets suivants.

Un décret en Conseil d'Etat devra préciser les obligations qui s'imposent à EDF et aux fournisseurs, les modalités de calcul par la Commission de régulation de l'énergie du volume des droits des fournisseurs à conclure avec EDF un contrat d'accès régulé à l’électricité de base ainsi que les modalités de calcul, par la Commission de régulation de l'énergie, du complément de prix au cas où les droits accordés en début de période s'avéreraient supérieurs aux droits correspondant à la consommation constatée des clients finals.

Les ministres chargés de l'énergie et de l'économie devront définir, par un arrêté pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie et de l'Autorité de la concurrence, le volume global maximal d'électricité de base sur lequel porte l'obligation pour EDF de conclure des contrats avec les fournisseurs.

De manière transitoire, les ministres chargés de l'énergie et de l'économie devront également définir par arrêté, après avis de la Commission de régulation de l'énergie, le prix des contrats d'accès régulé à l'électricité de base.

Les fournisseurs pourront alors :

- conclure avec EDF un accord cadre ;

- transmettre à la Commission de régulation de l'énergie les caractéristiques et les prévisions d'évolution de la consommation de leur portefeuille de consommateurs finals afin que la Commission de régulation de l'énergie calcule leur volume de droit et le leur notifie ainsi qu'à Electricité de France ;

- conclure un contrat d'approvisionnement en électricité de base avec EDF.

Sans qu'ils soient immédiatement nécessaires pour le démarrage du dispositif en phase transitoire, des autres décrets devront être pris pour :

- définir les modalités de détermination du prix de l'accès régulé à l'électricité de base et la comptabilité appropriée permettant d'évaluer les coûts du parc de référence à mettre en place par EDF ;

- définir les modalités de construction des tarifs réglementés de vente aux consommateurs finals.

L'accès régulé à l’électricité de base est mis en place pour une période transitoire de 15 ans de nature à assurer à tous les acteurs une visibilité suffisante.

Dans cette période, les enjeux de la régulation vont évoluer avec la réalité industrielle, sujette à de nombreuses incertitudes comme indiqué au 4.2.7.

L'obligation de capacité devra être connue par chaque fournisseur 3 à 5 ans en avance. Ce délai doit leur permettre de mettre en place avec leurs clients des mécanismes d'effacement si cela s'avère économiquement pertinent, et le cas échéant d'investir dans des capacités de production d'électricité de pointe. Compte tenu des délais nécessaires pour préciser les modalités (concertation et rédaction des textes réglementaires), les premières obligations devraient porter sur les années 2014-2015.

7 GLOSSAIRE

Base ou électricité de base

L'électricité de base est la part d'énergie consommée sous une puissance constante tout au long de l'année, soit en toute rigueur durant 8 760 heures (nombre d'heures dans l'année). Néanmoins, dans cette étude d'impact, comme dans le rapport de la commission Champsaur on retient une définition plus large, la « base » désignant l'énergie consommée sous une puissance atteinte au moins pendant 8 000, 7 000 voire 6 000 heures par an. Dans le projet de loi, l’électricité de base est définie comme la part d’électricité fournie correspondant à la production des centrales fonctionnant en permanence à l’exception des périodes d’arrêt pour maintenance.

Consommateurs résidentiels / non résidentiels

Les consommateurs résidentiels sont les consommateurs résidentiels ou encore particuliers, par opposition aux consommateurs professionnels et industriels.

Segmentation du marché de détail

Le marché peut être divisé en quatre segments regroupés en :

Gros consommateurs :

· Grands sites non résidentiels : sites dont la puissance souscrite est supérieure ou égale à 250 kVA. Ces sites sont des grands sites industriels, des hôpitaux, des hypermarchés, de grands immeubles etc. (consommation annuelle supérieure à 1 GWh en général).

· Sites moyens non résidentiels : sites dont la puissance souscrite est comprise entre 36 et 250 kVA. Ces sites correspondent à des locaux de PME par exemple (consommation annuelle comprise en général entre 0,15 GWh et 1 GWh).

Petits consommateurs :

· Petits sites non résidentiels : sites dont la puissance souscrite est inférieure à 36 kVA. Ces sites correspondent au marché de masse des non résidentiels (les professions libérales, les artisans, etc.) Leur consommation annuelle est en général inférieure à 0,15 GWh.

· Sites résidentiels : sites résidentiels dont la puissance souscrite est inférieure à 36 kVA. Leur consommation annuelle est en général inférieure à 10 MWh.

Entreprises locales de distribution

A ce jour, près de 175 entreprises locales de distribution, assurent la fourniture d'électricité d'environ 5% d'utilisateurs. La loi du 8 avril 1946, relative à la distribution publique de l'électricité, a maintenu ces entreprises. Elles présentaient la caractéristique d'être publiques (régies municipales, société d'économie mixte) ou d'intérêt public (sociétés d'intérêt collectif agricole).

Ces entreprises sont fédérées au sein de trois organisations :

L'ANROC, Association Nationale des Régies de Service Public et des Organismes Constitués,
La FNCCR, Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et Régies,
La FNSICAE, Fédération Nationale des Sociétés d'Intérêt Collectif Agricole d'Electricité.

Exeltium

Exeltium est un consortium mis en place autour de grandes entreprises fortement consommatrices d'électricité (les industries électro intensives sont définies comme consommant plus de 2,5 kWh pour dégager un euro de valeur ajoutée et dont la puissance consommée en heures creuses représente au moins 55% de la puissance maximum). Après une validation par la Commission européenne et un appel d’offres, les entreprises ont noué un partenariat innovant avec EDF et un groupe de banques afin d’acquérir des droits sur une partie de la production d’EDF pendant 24 ans à partir du 1er mai 2010.

Ce consortium a été co-fondé par les chimistes Arkéma, Rhodia et Solvay, le sidérurgiste ArcelorMittal, le producteur d'aluminium RioTintoAlcan et le fabriquant de gaz industriels Air Liquide. Il découle des dispositions prises en faveur des entreprises "électro-intensives" dans la loi de finances rectificative pour 2005 et dans le décret n° 2006-506 du 3 mai 2006 pris en application de l'article 238 bis HZ bis du code général des impôts et relatif aux sociétés d'approvisionnement à long terme d'électricité.

Exeltium approvisionne une centaine de sites en France.

Marché de gros

Désigne l'ensemble des échanges effectués entre les opérateurs (fournisseurs, producteurs, traders, etc.). Ces échanges peuvent être effectués directement entre deux acteurs (on parle alors d'échange bilatéral « pur »), par un intermédiaire (courtier appelé également broker) ou par une bourse (comme Powernext en France).

Nouvel entrant

Les nouveaux entrants sont les fournisseurs qui sont apparus après l'ouverture des marchés de l'énergie. Ils peuvent être français ou européens.

Opérateur historique

Les opérateurs historiques européens ou étrangers sont les sociétés qui disposaient d'une situation de monopole sur un marché de l'électricité avant l'ouverture des marchés. En France ce sont EDF et les entreprises locales de distribution (ELD).

Parc de référence

Il s'agit du parc nucléaire existant aujourd'hui. Il est composé de 58 tranches réparties sur 19 sites et cumulant une puissance installée de 63 GW.

Pertes

Les pertes des gestionnaires de réseau d'électricité correspondent à l'écart observé entre l'énergie injectée sur le réseau sur les sites de production et l'énergie soutirée sur les sites de consommation. Cet écart est dû, en partie à des effets physiques (effet Joule sur les lignes et les transformateurs et effet « couronne » sur les lignes), en partie du fait de la consommation interne des postes. Il existe également des pertes non « techniques » dues par exemple à des fraudes.

Période de pointe de consommation

Les périodes de pointe de consommation sont les périodes pendant lesquelles la consommation globale est la plus élevée. Ces périodes sont critiques du point de vue de la sécurité d'approvisionnement car il existe un risque que l'offre d'électricité ne puisse satisfaire la demande. Le cas échéant, des coupures de courant peuvent être imposées à certains consommateurs afin de rétablir l'équilibre du réseau électrique.

Programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité (PPI).

Dans le cadre de la politique énergétique française, la PPI fixe des objectifs de développement des moyens de production d'électricité installés en France, en termes de répartition des capacités de production par source d'énergie primaire utilisée, de techniques de production mises en œuvre. La PPI se penche enfin sur la situation particulière de certaines zones géographiques.

L'article 6 de la loi du 10 février 2000 sur le service public de l'électricité prévoit que le ministre chargé de l'énergie arrête et rende publique une programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité (PPI). L'article 8 de la loi du 10 février 2000 prévoit que le ministre chargé de l'énergie peut recourir à la procédure d'appel d'offres dans le cas où les capacités de production d'électricité ne répondent pas aux objectifs de la PPI.

TaRTAM

Tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché. Tarif réglementé dit de « retour » permettant aux consommateurs industriels ayant quitté le tarif réglementé de vente historique pour une offre de marché de revenir à un tarif réglementé. Le niveau du TaRTAM est supérieur à celui du tarif réglementé de vente historique.

8 ANNEXE 1 : rapport de la Commission sur l'organisation des marchés de l'électricité, présidée par Paul Champsaur - avril 2009

9 ANNEXE 2 : échange de lettres entre le Premier Ministre et les commissaires européens à la concurrence et à l'énergie - 15 septembre 2009

10 ANNEXE 3 : tableau de concordance pour la transposition des dispositions relatives à la protection des consommateurs d’électricité et de gaz des directives européennes 2009/72 et 2009/73

DIRECTIVE 2009/72/CE du 13 juillet 2009

concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité

abrogeant la directive 2003/54/CE

Les dispositions nouvelles sont en caractères gras

Les mesures spécifiques à « l’électricité » sont soulignées

Propositions de rédaction

Article 3 : Obligations de service public et protection des consommateurs

 

1. Les États membres, sur la base de leur organisation institutionnelle et dans le respect du principe de subsidiarité, veillent à ce que les entreprises d'électricité, sans préjudice du paragraphe 2, soient exploitées conformément aux principes de la présente directive, en vue de réaliser un marché de l'électricité concurrentiel, sûr et durable sur le plan environnemental, et s'abstiennent de toute discrimination pour ce qui est des droits et des obligations de ces entreprises.

 

2.En tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité, en particulier de son article 86, les États membres peuvent imposer aux entreprises du secteur de l'électricité, dans l'intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d'approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l'environnement, y compris l'efficacité énergétique, l'énergie produite à partir de sources d'énergie renouvelables et la protection du climat. Ces obligations sont clairement définies, transparentes, non discriminatoires et vérifiables et garantissent aux entreprises d'électricité de la Communauté un égal accès aux consommateurs nationaux. En matière de sécurité d'approvisionnement, d'efficacité énergétique/gestion de la demande et pour atteindre les objectifs environnementaux et les objectifs concernant l'énergie produite à partir de sources d'énergie renouvelables, visés au présent paragraphe, les États membres peuvent mettre en œuvre une planification à long terme, en tenant compte du fait que des tiers pourraient vouloir accéder au réseau.

 

3. Les États membres veillent à ce que tous les clients résidentiels et, lorsqu'ils le jugent approprié, les petites entreprises (à savoir les entreprises employant moins de 50 personnes et dont le chiffre d'affaires ou le bilan annuel n'excède pas 10 000 000 EUR) aient le droit de bénéficier du service universel, c'est-à-dire du droit d'être approvisionnés, sur leur territoire, en électricité d'une qualité définie, et ce à des prix raisonnables, aisément et clairement comparables, transparents et non discriminatoires. Pour assurer la fourniture d'un service universel, les États membres peuvent désigner un fournisseur de dernier recours. Les États membres imposent aux entreprises de distribution l'obligation de raccorder les clients à leur réseau aux conditions et tarifs fixés conformément à la procédure définie à l'article 37, paragraphe 6. Rien dans la présente directive n'empêche les États membres de renforcer la position sur le marché des consommateurs résidentiels ainsi que des petits et moyens consommateurs en promouvant les possibilités de regroupement volontaire en vue de la représentation de cette catégorie de consommateurs.

Le premier alinéa est mis en œuvre d'une manière transparente et non discriminatoire et n'empêche pas l'ouverture du marché prévue à l'article 33.

 

4. Les États membres veillent à ce que tous les clients aient le droit de se procurer leur électricité auprès du fournisseur de leur choix, sous réserve de son accord, indépendamment de l'État membre dans lequel il est enregistré, aussi longtemps que le fournisseur suit les règles applicables en matière de transactions et d'ajustement. À cet égard, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir que les procédures administratives ne constituent pas une discrimination envers les entreprises déjà enregistrées en tant que fournisseurs dans un autre État membre.

 

5. Les États membres veillent à ce que:

a) si un client souhaite changer de fournisseur, dans le respect des termes et conditions des contrats, ce changement soit effectué par l'opérateur ou les opérateurs concernés dans un délai de trois semaines; et

b) les clients aient le droit de recevoir toutes les données pertinentes concernant leur consommation.

Les États membres veillent à ce que les droits visés au premier alinéa, points a) et b), soient accordés aux clients, sans discrimination en matière de coût, d'investissement et de temps.

V. Au deuxième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation, les mots : « trente jours » sont remplacés par les mots  « trois semaines ».

b) Voir ci-après la proposition de rédaction pour le h) de l’Annexe I

6. Lorsqu'une compensation financière, d'autres formes de compensation ou des droits exclusifs offerts par un État membre pour l'accomplissement des obligations visées aux paragraphes 2 et 3 sont octroyés, c'est d'une manière non discriminatoire et transparente.

 

7. Les États membres prennent les mesures appropriées pour protéger les clients finals et veillent en particulier à garantir une protection adéquate aux consommateurs vulnérables. Dans ce contexte, chaque État membre définit le concept de consommateurs vulnérables, en faisant éventuellement référence à la pauvreté énergétique et, notamment, à l'interdiction de l'interruption de la connexion à l'électricité de ces clients lorsqu'ils traversent des difficultés. Les États membres veillent à ce que les droits et les obligations relatifs aux consommateurs vulnérables soient respectés. En particulier, ils prennent des mesures pour protéger les clients finals dans les régions reculées. Ils garantissent un niveau de protection élevé des consommateurs, notamment en ce qui concerne la transparence des termes et conditions des contrats, l'information générale et les mécanismes de règlement des litiges. Les États membres veillent à ce que le client éligible puisse effectivement changer aisément de fournisseur. En ce qui concerne au moins les clients résidentiels, ces mesures incluent celles figurant à l'annexe I.

 

8. Les États membres prennent des mesures appropriées, telles que des plans nationaux d'action dans le domaine de l'énergie, des prestations au titre des régimes de sécurité sociale pour assurer aux consommateurs vulnérables l'approvisionnement nécessaire en électricité, ou des aides à l'amélioration de l'efficacité énergétique, afin de lutter contre la pauvreté énergétique là où elle se présente, y compris dans le contexte plus large de la pauvreté en général. De telles mesures ne font pas obstacle à l'ouverture effective du marché, prévue à l'article 33, ni au bon fonctionnement du marché, et sont notifiées à la Commission, le cas échéant, conformément au paragraphe 15 du présent article. Cette notification peut également inclure les mesures prises dans le cadre du système général de sécurité sociale.

 

9. Les États membres s'assurent que les fournisseurs d'électricité spécifient dans ou avec les factures et dans les documents promotionnels envoyés aux clients finals:

a) la contribution de chaque source d'énergie à la totalité des sources d'énergie utilisées par le fournisseur au cours de l'année écoulée d'une manière compréhensible et, au niveau national, clairement comparable;

b) au minimum les sources de référence existantes, telles que les pages web par exemple, où des informations concernant l'impact environnemental, au moins en ce qui concerne les émissions de CO2 et les déchets radioactifs résultant de la production d'électricité à partir de la totalité des sources d'énergie utilisées par le fournisseur au cours de l'année écoulée, sont à la disposition du public;

c) des informations concernant leurs droits en matière de voies de règlement des litiges à leur disposition en cas de litige.

Pour ce qui a trait aux points a) et b) du premier alinéa, en ce qui concerne l'électricité obtenue par l'intermédiaire d'une bourse de l'électricité ou importée d'une entreprise située à l'extérieur de la Communauté, des chiffres agrégés fournis par la bourse ou l'entreprise en question au cours de l'année écoulée peuvent être utilisés.

L'autorité de régulation ou toute autre autorité nationale compétente prend les mesures nécessaires pour garantir que les informations données par les fournisseurs à leurs clients conformément au présent article sont fiables et fournies, au niveau national, d'une manière clairement comparable.

III. Au 15° de l’article L. 121-87 du code de la consommation entre les mots « amiable » et « des litiges » sont insérés les mots « et contentieux ».

10. Les États membres prennent des mesures pour atteindre les objectifs en matière de cohésion économique et sociale et de protection de l'environnement, qui comprennent, le cas échéant, des mesures d'efficacité énergétique/ gestion de la demande ainsi que des moyens de lutte contre le changement climatique, et de sécurité d'approvisionnement. Ces mesures peuvent inclure notamment des incitations économiques adéquates, en ayant recours, le cas échéant, à tous les instruments nationaux et communautaires existants, pour la maintenance et la construction des infrastructures de réseau nécessaires, y compris la capacité d'interconnexion.

 

11. Afin de promouvoir l'efficacité énergétique, les États membres ou, si un État membre le prévoit, l'autorité de régulation, recommandent vivement aux entreprises d'électricité d'optimiser l'utilisation de l'électricité, par exemple en proposant des services de gestion de l'énergie, en élaborant des formules tarifaires novatrices ou, le cas échéant, en introduisant des systèmes de mesure ou des réseaux intelligents.

 

12. Les États membres veillent à la mise en place de guichets uniques afin de fournir aux consommateurs l'ensemble des informations nécessaires concernant leurs droits, la législation en vigueur et les voies de règlement des litiges à leur disposition en cas de litige. Ces guichets uniques peuvent faire partie de centres d'information générale des consommateurs.

 

13. Les États membres veillent à mettre en place un mécanisme indépendant, comme un médiateur de l'énergie ou un organisme de consommateurs, de façon à assurer un traitement efficace des plaintes et le règlement extrajudiciaire des litiges.

 

14. Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions des articles 7, 8, 32 et/ou 34 si leur application risque d'entraver l'accomplissement, en droit ou en fait, des obligations imposées aux entreprises d'électricité dans l'intérêt économique général et pour autant que le développement des échanges n'en soit pas affecté dans une mesure qui serait contraire aux intérêts de la Communauté. Les intérêts de la Communauté comprennent, entre autres, la concurrence en ce qui concerne les clients éligibles conformément à la présente directive et à l'article 86 du traité.

 

15. Les États membres informent la Commission, lors de la mise en œuvre de la présente directive, de toutes les mesures qu'ils ont prises pour remplir les obligations de service universel et de service public, y compris la protection des consommateurs et la protection de l'environnement, et de leurs effets éventuels sur la concurrence nationale et internationale, que ces mesures nécessitent ou non une dérogation à la présente directive. Ils notifient ensuite à la Commission, tous les deux ans, toute modification apportée à ces mesures, que celles-ci nécessitent ou non une dérogation à la présente directive.

 

16. La Commission établit, en consultant les parties intéressées, notamment les États membres, les autorités de régulation nationales, les organisations de consommateurs, les entreprises d'électricité et, sur la base des progrès déjà accomplis, les partenaires sociaux, un aide-mémoire du consommateur d'énergie, clair et bref, qui donne des informations pratiques sur les droits des consommateurs d'énergie. Les États membres veillent à ce que les fournisseurs d'électricité ou les gestionnaires de réseau de distribution, en coopération avec l'autorité de régulation, prennent les mesures nécessaires en vue de fournir à leurs consommateurs un exemplaire de l'aide-mémoire du consommateur d'énergie, et à ce que celui-ci soit mis à la disposition du public.

IV – Il est ajouté après le 16° de l’article L. 121-87 du code de la consommation un alinéa ainsi rédigé : « Un exemplaire de l’aide mémoire du consommateur d’énergie établi par la Commission européenne, ou à défaut un document équivalent établi par les ministres chargés de la consommation et de l’énergie, est joint par le fournisseur à l’offre de fourniture d’électricité ou de gaz naturel. »

ANNEXE I

Mesures relatives à la protection des consommateurs

Propositions de rédaction

1. Sans préjudice de la réglementation communautaire sur la protection des consommateurs, notamment la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance55 et la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs56, les mesures visées à l'article 3 ont pour objet de faire en sorte que les clients:

 

a) aient droit à un contrat conclu avec leur fournisseur d'électricité précisant:

- l'identité et l'adresse du fournisseur;

- le service fourni, les niveaux de qualité du service offert, ainsi que le délai nécessaire au raccordement initial;

- les types de services de maintenance offerts;

- les moyens par lesquels des informations actualisées sur l'ensemble des tarifs applicables et des redevances de maintenance peuvent être obtenues;

- la durée du contrat, les conditions de renouvellement et d'interruption des services et du contrat, et l'existence d'une clause de résiliation sans frais;

- les compensations et les formules de remboursement éventuellement applicables dans le cas où les niveaux de qualité des services prévus dans le contrat ne sont pas atteints, y compris une facturation inexacte et retardée;

- les modalités de lancement des procédures pour le règlement des litiges conformément au point f);

- la communication de façon claire, sur les factures ou sur le site web de l'entreprise d'électricité, d'informations concernant les droits des consommateurs, notamment les modalités de traitement de leurs plaintes et toutes les informations visées au présent point.

Les conditions des contrats sont équitables et communiquées à l'avance. En tout état de cause, ces informations devraient être fournies avant la conclusion ou la confirmation du contrat. Lorsque le contrat est conclu par le truchement d'un intermédiaire, les informations relatives aux éléments visés au présent point sont également communiquées avant que le contrat soit conclu;

VII. – Au troisième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation les mots : « directement ou » sont supprimés.

II. – Au 12° de l’article L. 121-87 du code de la consommation après le mot « distribution » sont ajoutés les mots : « et les modalités de remboursement ou de compensation en cas de d’erreur ou de retard de facturation ou lorsque les niveaux de qualité des services prévus dans le contrat ne sont pas atteints ; ».

b) soient avertis en temps utile de toute intention de modifier les termes et conditions des contrats et soient informés qu’ils ont le droit de dénoncer le contrat au moment où ils sont avisés de l’intention de le modifier. Les fournisseurs de services avisent immédiatement leurs abonnés de toute augmentation des tarifs, en temps utile et en tout cas avant la fin de la période de facturation normale suivant l’entrée en vigueur de l’augmentation, de manière transparente et compréhensible. Les États membres veillent à ce que les clients soient libres de dénoncer un contrat s’ils n’en acceptent pas les nouvelles conditions qui leur sont notifiées par leur fournisseur d’électricité ;

 

c) reçoivent des informations transparentes relatives aux prix et aux tarifs pratiqués, ainsi qu’aux conditions générales applicables, en ce qui concerne l’accès aux services d’électricité et à l’utilisation de ces services ;

 

d) disposent d'un large choix de modes de paiement, qui n'opèrent pas de discrimination indue entre clients. Les systèmes de paiement anticipé sont équitables et reflètent de manière appropriée la consommation probable. Toute différence dans les conditions générales reflète le coût pour le fournisseur des différents systèmes de paiement.

Les conditions générales doivent être équitables et transparentes. Elles sont énoncées dans un langage clair et compréhensible et ne constituent pas des obstacles non contractuels à l'exercice par les consommateurs de leurs droits, par exemple par un excès de documentation sur le contrat. Les clients sont protégés des méthodes de vente déloyales ou trompeuses;

VIII. - L’article L. 121-91 du code de la consommation est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

«  Cet arrêté précise également les différents modes de paiement que le fournisseur est tenu d’offrir au client et leurs modalités.

En cas de facturation terme à échoir ou fondée sur un index estimé, l’estimation du fournisseur reflète de manière appropriée la consommation probable. Cette estimation est fondée sur les consommations réelles antérieures lorsqu’elles sont disponibles ; à défaut, le fournisseur indique au consommateur sur quelle base repose son estimation.

Le fournisseur est tenu d’offrir au client la possibilité de transmettre, par internet, par téléphone, ou à l’aide d’un système automatisé de relève, le relevé de son compteur à des dates qui permettent une prise en compte de cet indice pour l’émission des factures. »

e) n'aient rien à payer lorsqu'ils changent de fournisseur;

 

f) bénéficient de procédures transparentes, simples et peu onéreuses pour traiter leurs plaintes. En particulier, tous les consommateurs ont droit à un bon niveau de service et à un traitement des plaintes de la part de leur fournisseur d'électricité. Ces procédures de règlement extrajudiciaire des litiges permettent un règlement équitable et rapide des litiges, de préférence dans un délai de trois mois, assorti, lorsque cela se justifie, d'un système de remboursement et/ou de compensation. Ces procédures devraient respecter, quand cela est possible, les principes énoncés dans la recommandation 98/257/CE de la Commission du 30 mars 1998 concernant les principes applicables aux organes responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation57;

 

g) soient informés, s'ils ont accès au service universel conformément aux dispositions adoptées par les États membres en application de l'article 3, paragraphe 3, de leurs droits en matière de service universel;

 

h) puissent disposer de leurs données de consommation et donner accès à leurs relevés de consommation, par accord exprès et gratuitement, à toute entreprise enregistrée en tant que fournisseur. Les responsables de la gestion des données sont tenus de communiquer ces données à l'entreprise. Les États membres définissent les modalités de présentation des données et une procédure d'accès aux données pour les fournisseurs et les consommateurs. Ce service ne donne lieu à aucun surcoût pour le consommateur;

IX. - L’article L. 121-92 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le consommateur accède gratuitement à ses données de consommation. Un arrêté des ministres chargés de la consommation et de l’énergie pris après avis du Conseil national de la consommation et de la Commission de régulation de l’énergie précise les modalités d’accès aux données et aux relevés de consommation. »

i) soient dûment informés de la consommation réelle d'électricité et des coûts s'y rapportant, à une fréquence suffisante pour leur permettre de réguler leur propre consommation d'électricité. Cette information est fournie à des intervalles appropriés, compte tenu de la capacité du compteur du client et du produit électrique en question. Il y a lieu de prendre dûment en compte le rapport coût-efficacité de telles mesures. Ce service ne donne lieu à aucun surcoût pour le consommateur;

 

j) reçoivent, à la suite de tout changement de fournisseur d'électricité, un décompte final de clôture, dans un délai de six semaines après que ce changement a eu lieu.

VI. - Le deuxième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans tous les cas, le consommateur doit recevoir la facture de clôture dans un délai de six semaines à compter de la résiliation du contrat. »

2. Les États membres veillent à la mise en place de systèmes intelligents de mesure qui favorisent la participation active des consommateurs au marché de la fourniture d'électricité. La mise en place de tels systèmes peut être subordonnée à une évaluation économique à long terme de l'ensemble des coûts et des bénéfices pour le marché et pour le consommateur, pris individuellement, ou à une étude déterminant quel modèle de compteurs intelligents est le plus rationnel économiquement et le moins coûteux et quel calendrier peut être envisagé pour leur distribution.

Cette évaluation a lieu au plus tard le 3 septembre 2012.

Sous réserve de cette évaluation, les États membres, ou toute autorité compétente qu'ils désignent, fixent un calendrier, avec des objectifs sur une période de dix ans maximum, pour la mise en place de systèmes intelligents de mesure.

Si la mise en place de compteurs intelligents donne lieu à une évaluation favorable, au moins 80 % des clients seront équipés de systèmes intelligents de mesure d'ici à 2020.

Les États membres, ou toute autorité compétente qu'ils désignent, veillent à l'interopérabilité des systèmes de mesure à mettre en place sur leur territoire et tiennent dûment compte du respect des normes appropriées et des meilleures pratiques, ainsi que de l'importance du développement du marché intérieur de l'électricité.

 

Disposition complémentaire

Proposition de rédaction

Mesure de clarification du code de la consommation :

La modification de l’article L. 121-86 permet de préciser le champ d’application des articles L. 121-87 à L. 121-93 du code de la consommation.

Les dispositions du code de la consommation concernant les contrats de fourniture d’électricité ou de gaz naturel sont applicables aux consommateurs aux termes de l’article L. 121-86 du code de la consommation et, pour la plupart d’entre elles, aux consommateurs finals non domestiques, c’est à dire aux « petits professionnels » souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères ou consommant moins de 30 000 kilowattheures par an de gaz naturel, ainsi qu’il est prévu à l’article 43 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie.

La notion de consommateur, qui a pu comprendre les personnes morales, évolue actuellement à la suite d’interprétations jurisprudentielles plus restrictives inspirées de la jurisprudence communautaire. La nouvelle définition du consommateur pourrait être amenée à ne couvrir que les seules personnes physiques.

Ainsi, la couverture des personnes physiques et des consommateurs « petits professionnels » conduit à exclure de la protection du code de la consommation et par conséquent de la compétence du Médiateur national de l’énergie les personnes non-professionnelles toutefois éligibles aux tarifs règlementés telles que les syndicats de copropriétés.

Afin d’éviter une insécurité juridique et pour assurer une protection identique à tous les bénéficiaires des tarifs règlementés, il est souhaitable d’étendre le champ d’application des articles L. 121-87 à L. 121-93 du code de la consommation aux non-professionnels en modifiant l’article L. 121-86.

I – A l’article L. 121-86 du code de la consommation, après le mot « consommateur » sont ajoutés les mots « ou un non-professionnel ».

DIRECTIVE 2009/73/CE du 13 juillet 2009

concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel

abrogeant la directive 2003/55/CE

Les dispositions nouvelles sont en caractères gras

Propositions de rédaction

Article 3 : Obligations de service public et protection des consommateurs

 

1. Les États membres, sur la base de leur organisation institutionnelle et dans le respect du principe de subsidiarité, veillent à ce que les entreprises de gaz naturel, sans préjudice du paragraphe 2, soient exploitées conformément aux principes de la présente directive, en vue de réaliser un marché du gaz naturel concurrentiel, sûr et durable sur le plan environnemental, et s’abstiennent de toute discrimination pour ce qui est des droits et des obligations de ces entreprises.

 

2. En tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité, en particulier de son article 86, les États membres peuvent imposer aux entreprises opérant dans le secteur du gaz, dans l’intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d’approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l’environnement, y compris l’efficacité énergétique, l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables et la protection du climat. Ces obligations sont clairement définies, transparentes, non discriminatoires et vérifiables et garantissent aux entreprises de gaz naturel de la Communauté un égal accès aux consommateurs nationaux. En matière de sécurité d’approvisionnement, d’efficacité énergétique et de gestion de la demande et pour atteindre les objectifs environnementaux et les objectifs concernant l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables, visés au présent paragraphe, les États membres peuvent mettre en œuvre une planification à long terme, en tenant compte du fait que des tiers pourraient vouloir accéder au réseau.

 

3. Les États membres prennent les mesures appropriées pour protéger les clients finals et veillent en particulier à garantir une protection adéquate aux consommateurs vulnérables. Dans ce contexte, chaque État membre définit le concept de consommateurs vulnérables, en faisant éventuellement référence à la pauvreté énergétique et, notamment, à l’interdiction de l’interruption de la connexion au gaz de ces clients lorsqu’ils traversent des difficultés. Les États membres veillent à ce que les droits et les obligations relatifs aux consommateurs vulnérables soient respectés. En particulier, ils prennent des mesures appropriées pour protéger les clients finals raccordés au réseau du gaz dans les régions reculées. Ils peuvent désigner un fournisseur de dernier recours pour les clients raccordés au réseau de gaz. Ils garantissent un niveau de protection élevé des consommateurs, notamment en ce qui concerne la transparence des termes et conditions des contrats, l’information générale et les mécanismes de règlement des litiges. Les États membres veillent à ce que le client éligible puisse effectivement changer aisément de fournisseur. En ce qui concerne au moins les clients résidentiels, ces mesures incluent celles figurant à l’annexe I.

 

4. Les États membres prennent des mesures appropriées, telles que des plans nationaux d’action dans le domaine de l’énergie, des prestations au titre des régimes de sécurité sociale pour assurer aux consommateurs vulnérables l’approvisionnement nécessaire en gaz, ou des aides à l’amélioration de l’efficacité énergétique, afin de lutter contre la pauvreté énergétique là où elle se présente, y compris dans le contexte plus large de la pauvreté en général. De telles mesures ne font pas obstacle à l’ouverture effective du marché, prévue à l’article 37, ni au bon fonctionnement du marché, et sont notifiées à la Commission, le cas échéant, conformément au paragraphe 11 du présent article. Les mesures prises dans le cadre du système général de sécurité sociale ne font pas l’objet d’une telle notification.

 

5. Les États membres veillent à ce que tous les clients raccordés au réseau du gaz aient le droit de se procurer leur gaz auprès du fournisseur de leur choix, sous réserve de son accord, indépendamment de l’État membre dans lequel il est enregistré, aussi longtemps que le fournisseur suit les règles applicables an matière de transactions et d’équilibrage et à condition de répondre aux exigences de sécurité d’approvisionnement. À cet égard, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir que les procédures administratives ne constituent pas une entrave pour les entreprises déjà enregistrées en tant que fournisseurs dans un autre État membre.

 

6. Les États membres veillent à ce que:

a) si un client souhaite changer de fournisseur, dans le respect des conditions contractuelles, ce changement soit effectué par l’opérateur ou les opérateurs concernés dans un délai de trois semaines; et

b) les clients aient le droit de recevoir toutes les données pertinentes concernant leur consommation.

Les États membres veillent à ce que les droits visés au premier alinéa, points a) et b), soient accordés aux clients, sans discrimination en matière de coût, d’investissement et de temps.

V. Au deuxième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation, les mots : « trente jours » sont remplacés par les mots  « trois semaines ».

b) Voir ci-après la proposition de rédaction pour le h) de l’Annexe I

7. Les États membres mettent en œuvre les mesures appropriées pour atteindre les objectifs en matière de cohésion économique et sociale et de protection de l’environnement, qui peuvent comprendre des moyens de lutte contre le changement climatique, et de sécurité d’approvisionnement. Ces mesures peuvent inclure notamment des incitations économiques adéquates, en ayant recours, le cas échéant, à tous les instruments nationaux et communautaires existants, pour la maintenance et la construction des infrastructures de réseau nécessaires, et en particulier de la capacité d’interconnexion.

 

8. Afin de promouvoir l’efficacité énergétique, les États membres ou, si un État membre le prévoit, l’autorité de régulation, recommandent vivement aux entreprises de gaz naturel d’optimiser l’utilisation du gaz, par exemple en proposant des services de gestion de l’énergie, en élaborant des formules tarifaires novatrices ou, le cas échéant, en introduisant des systèmes de mesure ou des réseaux intelligents.

 

9. Les États membres veillent à la mise en place de guichets uniques afin de fournir aux consommateurs l’ensemble des informations nécessaires concernant leurs droits, la législation en vigueur et les voies de règlement des litiges à leur disposition en cas de litige. Ces guichets uniques peuvent faire partie de centres d’information générale des consommateurs.

Les États membres veillent à mettre en place un mécanisme indépendant, comme un médiateur de l’énergie ou un organisme de consommateurs, de façon à assurer un traitement efficace des plaintes et le règlement extrajudiciaire des litiges.

 

10. Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions de l’article 4 à la distribution si leur application risque d’entraver l’accomplissement, en droit ou en fait, des obligations imposées aux entreprises de gaz naturel dans l’intérêt économique général et pour autant que le développement des échanges n’en soit pas affecté dans une mesure qui serait contraire aux intérêts de la Communauté. Les intérêts de la Communauté comprennent, entre autres, la concurrence en ce qui concerne les clients éligibles conformément à la présente directive et à l’article 86 du traité.

 

11. Les États membres informent la Commission, lors de la mise en œuvre de la présente directive, de toutes les mesures qu’ils ont prises pour remplir les obligations de service public, y compris la protection des consommateurs et la protection de l’environnement, et de leurs effets éventuels sur la concurrence nationale et internationale, que ces mesures nécessitent ou non une dérogation à la présente directive. Ils notifient ensuite à la Commission, tous les deux ans, toute modification apportée à ces mesures, que celles-ci nécessitent ou non une dérogation à la présente directive.

 

12. La Commission établit, en consultant les parties intéressées, notamment les États membres, les autorités de régulation nationales, les organisations de consommateurs et les entreprises de gaz naturel, un aide-mémoire du consommateur d’énergie, clair et bref, qui donne des informations pratiques sur les droits des consommateurs d’énergie. Les États membres veillent à ce que les fournisseurs de gaz et les gestionnaires de réseau de distribution, en coopération avec l’autorité de régulation, prennent les mesures nécessaires en vue de fournir à leurs consommateurs un exemplaire de l’aide-mémoire du consommateur d’énergie, et à ce que celui-ci soit mis à la disposition du public.

IV – Il est ajouté après le 16° de l’article L. 121-87 du code de la consommation un alinéa ainsi rédigé : « Un exemplaire de l’aide mémoire du consommateur d’énergie établi par la Commission européenne, ou à défaut un document équivalent établi par les ministres chargés de la consommation et de l’énergie, est joint par le fournisseur à l’offre de fourniture d’électricité ou de gaz naturel. »

ANNEXE I

Mesures relatives à la protection des consommateurs

Propositions de rédaction

1. Sans préjudice de la réglementation communautaire sur la protection des consommateurs, notamment la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance [1] et la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs [2], les mesures visées à l’article 3 ont pour objet de faire en sorte que les clients:

 

a) aient droit à un contrat conclu avec leur fournisseur de gaz précisant:

- l'identité et l'adresse du fournisseur;

- le service fourni, les niveaux de qualité du service offert, ainsi que le délai nécessaire au raccordement initial;

- les types de services de maintenance offerts;

- les moyens par lesquels des informations actualisées sur l'ensemble des tarifs applicables et des redevances de maintenance peuvent être obtenues;

- la durée du contrat, les conditions de renouvellement et d'interruption des services et du contrat, et l'existence d'une clause de résiliation sans frais;

- les compensations et les formules de remboursement éventuellement applicables dans le cas où les niveaux de qualité des services prévus dans le contrat ne sont pas atteints, y compris une facturation inexacte et retardée;

- les modalités de lancement des procédures pour le règlement des litiges conformément au point f);

- la communication de façon claire, sur les factures ou sur le site web de l'entreprise de gaz naturel, d'informations concernant les droits des consommateurs, notamment les modalités de traitement de leurs plaintes et toutes les informations visées au présent point.

Les conditions des contrats sont équitables et communiquées à l'avance. En tout état de cause, ces informations devraient être fournies avant la conclusion ou la confirmation du contrat. Lorsque le contrat est conclu par le truchement d'un intermédiaire, les informations relatives aux éléments visés au présent point sont également communiquées avant que le contrat soit conclu;

VII. – Au troisième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation les mots : « directement ou » sont supprimés.

II. – Au 12° de l’article L. 121-87 du code de la consommation après le mot « distribution » sont ajoutés les mots : « et les modalités de remboursement ou de compensation en cas de d’erreur ou de retard de facturation ou lorsque les niveaux de qualité des services prévus dans le contrat ne sont pas atteints ; ».

b) soient avertis en temps utile de toute intention de modifier les termes et conditions des contrats et soient informés qu’ils ont le droit de dénoncer le contrat au moment où ils sont avisés de l’intention de le modifier. Les fournisseurs de services avisent immédiatement leurs abonnés de toute augmentation des tarifs, en temps utile et en tout cas avant la fin de la période de facturation normale suivant l’entrée en vigueur de l’augmentation, de manière transparente et compréhensible. Les États membres veillent à ce que les clients soient libres de dénoncer un contrat s’ils n’en acceptent pas les nouvelles conditions qui leur sont notifiées par leur fournisseur de gaz ;

 

c) reçoivent des informations transparentes relatives aux prix et aux tarifs pratiqués, ainsi qu’aux conditions générales applicables, en ce qui concerne l’accès aux services de gaz et à l’utilisation de ces services ;

 

d) disposent d'un large choix de modes de paiement, qui n'opèrent pas de discrimination indue entre clients. Les systèmes de paiement anticipé sont équitables et reflètent de manière appropriée la consommation probable. Toute différence dans les conditions générales reflète le coût pour le fournisseur des différents systèmes de paiement.

Les conditions générales doivent être équitables et transparentes. Elles sont énoncées dans un langage clair et compréhensible et ne constituent pas des obstacles non contractuels à l'exercice par les consommateurs de leurs droits, par exemple par un excès de documentation sur le contrat. Les clients sont protégés des méthodes de vente déloyales ou trompeuses;

VIII. - L’article L. 121-91 du code de la consommation est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

«  Cet arrêté précise également les différents modes de paiement que le fournisseur est tenu d’offrir au client et leurs modalités.

En cas de facturation terme à échoir ou fondée sur un index estimé, l’estimation du fournisseur reflète de manière appropriée la consommation probable. Cette estimation est fondée sur les consommations réelles antérieures lorsqu’elles sont disponibles ; à défaut, le fournisseur indique au consommateur sur quelle base repose son estimation.

Le fournisseur est tenu d’offrir au client la possibilité de transmettre, par internet, par téléphone, ou à l’aide d’un système automatisé de relève, le relevé de son compteur à des dates qui permettent une prise en compte de cet indice pour l’émission des factures. »

e) n'aient rien à payer lorsqu'ils changent de fournisseur;

 

f) bénéficient de procédures transparentes, simples et peu onéreuses pour traiter leurs plaintes. En particulier, tous les consommateurs ont droit à un bon niveau de service et à un traitement des plaintes de la part de leur fournisseur de gaz. Ces procédures de règlement extrajudiciaire des litiges permettent un règlement équitable et rapide des litiges, de préférence dans un délai de trois mois, assorti, lorsque cela se justifie, d'un système de remboursement et/ou de compensation. Ces procédures devraient respecter, quand cela est possible, les principes énoncés dans la recommandation 98/257/CE de la Commission du 30 mars 1998 concernant les principes applicables aux organes responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation58;

 

g) soient informés, s'ils ont accès au service universel conformément aux dispositions adoptées par les États membres en application de l'article 3, paragraphe 3, de leurs droits en matière de service universel;

 

h) puissent disposer de leurs données de consommation et donner accès à leurs relevés de consommation, par accord exprès et gratuitement, à toute entreprise enregistrée en tant que fournisseur. Les responsables de la gestion des données sont tenus de communiquer ces données à l'entreprise. Les États membres définissent les modalités de présentation des données et une procédure d'accès aux données pour les fournisseurs et les consommateurs. Ce service ne donne lieu à aucun surcoût pour le consommateur;

IX. - L’article L. 121-92 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le consommateur accède gratuitement à ses données de consommation. Un arrêté des ministres chargés de la consommation et de l’énergie pris après avis du Conseil national de la consommation et de la Commission de régulation de l’énergie précise les modalités d’accès aux données et aux relevés de consommation. »

i) soient dûment informés de la consommation réelle de gaz et des coûts s'y rapportant, à une fréquence suffisante pour leur permettre de réguler leur propre consommation de gaz. Cette information est fournie à des intervalles appropriés, compte tenu de la capacité du compteur du client. Il y a lieu de prendre dûment en compte le rapport coût-efficacité de telles mesures. Ce service ne donne lieu à aucun surcoût pour le consommateur;

 

j) reçoivent, à la suite de tout changement de fournisseur de gaz naturel, un décompte final de clôture, dans un délai de six semaines après que ce changement a eu lieu.

VI. - Le deuxième alinéa de l’article L. 121-89 du code de la consommation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans tous les cas, le consommateur doit recevoir la facture de clôture dans un délai de six semaines à compter de la résiliation du contrat. »

2. Les États membres veillent à la mise en place de systèmes intelligents de mesure qui favorisent la participation active des consommateurs au marché de la fourniture du gaz. La mise en place de tels systèmes peut être subordonnée à une évaluation économique à long terme de l'ensemble des coûts et des bénéfices pour le marché et pour le consommateur, pris individuellement, ou à une étude déterminant quel modèle de compteurs intelligents est le plus rationnel économiquement et le moins coûteux et quel calendrier peut être envisagé pour leur distribution.

Cette évaluation a lieu au plus tard le 3 septembre 2012.

Sous réserve de cette évaluation, les États membres, ou toute autorité compétente qu'ils désignent, fixent un calendrier, pour la mise en place de systèmes intelligents de mesure.

Les États membres, ou toute autorité compétente qu'ils désignent, veillent à l'interopérabilité des systèmes de mesure à mettre en place sur leur territoire et tiennent dûment compte du respect des normes appropriées et des meilleures pratiques, ainsi que de l'importance du développement du marché intérieur du gaz naturel.

 

Partie B : Étude d'impact de l'article 10 autorisant le gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires à la transposition des directives 2009/72 et 2009/73

Exigences requises par les dispositions des articles 8 & 11 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009

CONTENU

Définissent les objectifs poursuivis par le projet de loi, recensent les options possibles en dehors de l'intervention de règles de droit nouvelles et exposent les motifs du recours à une nouvelle législation.

L'objectif du projet consiste à rendre la législation française conforme aux dispositions des directives 2009/72 et 2009/73 relatives au marché intérieur de l'énergie. Il répond donc à l'exigence constitutionnelle de transposition du droit dérivé de l'Union et se contente de modifier les dispositions législatives explicitement contraires aux textes transposés. Il n'y a donc pas d'alternative à son adoption, seule à même d'éviter une procédure en manquement.

l'articulation du projet de loi avec le droit européen en vigueur ou en cours d'élaboration, et son impact sur l'ordre juridique interne

Ces directives sont appelées 3° paquet puisqu'elles prennent la suite de directives respectivement adoptées en 1996, 1998 et en 2004. Elles sont complétées par plusieurs règlements. Elles tendent à garantir l'indépendance des gestionnaires de réseau de transport tout en préservant l'existence, dans le domaine de l'énergie, d'entreprises verticalement intégrées permettant de bénéficier des synergies propres à ce secteur. Le nouveau statut de ces entreprises déroge en plusieurs points au droit commun des sociétés ainsi qu'au droit du travail. En outre, les pouvoirs de la Commission de Régulation de l'Energie sont renforcés, notamment en matière tarifaire.

l'état d'application du droit sur le territoire national dans le ou les domaines visés par le projet de loi

Le droit français s'est progressivement adapté aux principes d'un marché européen libéralisé et des lois importantes ont été adoptées depuis la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité. Les textes sont actuellement pour l'essentiel regroupés dans cette loi, la loi 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie et la loi 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières qui sont toutes consolidées à la suite de modifications adoptées postérieurement à leur adoption ainsi que la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie. Si RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité a déjà anticipé les nouvelles règles de l'Union européenne, la situation est plus contrastée chez les deux transporteurs de gaz naturel GRTgaz et TIGF

les modalités d'application dans le temps des dispositions envisagées, les textes législatifs et réglementaires à abroger et les mesures transitoires proposées ;

Les dispositions proposées nécessiteront de nombreux compléments d'ordre réglementaire, notamment pour ce qui concerne les contrats auxquels un Gestionnaire de réseau de transport d'électricité ou de gaz naturel peut ou non être partie, le régime des investissements applicable au réseau, les modalités d'intervention de la Commission de Régulation de l'Energie dans la nomination et la cessation de fonction des cadres dirigeants des Gestionnaire de réseaux de transport d'électricité ou de gaz naturel etc. Certaines d'entre elles seront mises en œuvre progressivement : la Commission de Régulation de l'Energie pourra certifier des Gestionnaires de réseau de transport sur la base d'engagements pris par ceux-ci pour faire évoluer leur structure interne. Les modalités d'intéressement des salariés de ces entreprises garantiront à terme leur indépendance vis à vis du groupe etc…

l'évaluation des conséquences économiques, financières, sociales et environnementales, ainsi que des coûts et bénéfices financiers attendus des dispositions envisagées pour chaque catégorie d'administrations publiques et de personnes physiques et morales intéressées, en indiquant la méthode de calcul retenue ;

L'ensemble du dispositif envisagé tend à garantir un meilleur fonctionnement des marchés de l'énergie. L'effet bénéfique bien connu de la concurrence devrait, à terme faire émerger des offres innovantes et peser sur les tarifs de détails. Mais ces effets positifs ne sont quantifiables ni dans leur impact ni pour ce qui concerne leurs délais de réalisation.

Cet effet devrait largement compenser les quelques contraintes imposées aux Gestionnaires du réseau de transport d'électricité ou de gaz naturel dans l'intérêt de la transparence de leur intervention à un point stratégique du dispositif. Celles-ci ne concernent qu'un nombre très restreint d'acteurs majeurs, à savoir RTE pour le secteur de l'électricité et GRTgaz et TIGF pour celui du gaz. L'exemple de RTE tend à montrer qu'une véritable indépendance de gestion est possible et ne nuit ni à la bonne tenue du réseau ni à la cohérence de l'ensemble.

les consultations qui ont été menées avant la saisine du Conseil d'Etat

Ce projet fait suite d'une part à des rencontres individuelles avec les acteurs concernés et d'autre part au fonctionnement régulier d'un groupe de concertation associant ceux-ci à la DGEC du MEEDDM ainsi qu'à la Commission de Régulation de l'Energie.

Partie C : Étude d'impact de l'article 11 modifiant l'art. 20 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 relative à la transparence et à la sûreté nucléaire

I. SITUATION DE REFERENCE ET DIFFICULTES A RESOUDRE

Contexte

La loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 a instauré l'obligation pour tous les exploitants d'installations nucléaires de base de sécuriser le financement des charges de long terme (démantèlement, gestion des combustibles usés, stockage des déchets radioactifs). Cette sécurisation doit prendre la forme de la constitution d'actifs dédiés (respectant un ensemble de contraintes fixées par voie réglementaire : décret n° 2007-243 du 23 février 2007 et arrêté du 21 mars 2007 relatif à la sécurisation des charges nucléaires).

Cette exigence étant nouvelle, la loi a prévu un délai pour la constitution des actifs dédiés devant couvrir 100% des charges nucléaires. Le délai aujourd'hui prévu est de 5 ans à compter de la date de publication de la loi n° 2006-739 soit le 28 juin 2011.

Difficultés

Dans le cadre des dépenses de démantèlement des installations nucléaires, les situations sont très disparates parmi les exploitants. Le CEA doit faire face actuellement à d'importantes opérations de démantèlement et d'assainissement de ses installations. De même, AREVA devra commencer à démanteler son usine d'enrichissement d'uranium Georges Besse 1 après la mise en service de l’usine Georges Besse 2. Par comparaison, pour EDF, l'échéance moyenne des dépenses de démantèlement, d'évacuation et de stockage des déchets définitifs est de plus de 25 ans dans une hypothèse conservatrice d'une durée d'exploitation de 40 ans.

En phase de constitution des actifs, les théories économique et financière plaident pour un étalement des dotations afin de diversifier les actifs et les périodes de placement au sein des cycles économiques. Du fait de l'échéance lointaine des décaissements et des montants en jeu afin de garantir la liquidité du groupe, il est important que la réglementation ne conduise pas les exploitants à investir massivement dans une période de volatilité forte des marchés mettant ainsi en risque les dotations restant à réaliser et conduisant à une mauvaise affectation des actifs. La crise, en 2008-2009, a ainsi entamé provisoirement la valeur du portefeuille et compliqué la stratégie de placement. Malgré une amélioration des marchés, ceux-ci sont volatils et incertains, ce qui plaide pour une stratégie de placement prudente et progressive.

EDF doit constituer le plus important portefeuille d'actifs dédiés alors même que l'essentiel de ses décaissements interviendront à partir de l'horizon 2030 (contrairement aux autres exploitants nucléaires qui font déjà face ou vont rapidement faire face à des opérations importantes de démantèlement d'installations nucléaires). Compte tenu de la forte volatilité observée sur les marchés financiers, il apparaît plus efficace et financièrement moins risqué d'étaler le rythme de dotation plutôt que de devoir achever la dotation dans un délai de 18 mois.

II. OBJECTIFS

L'objectif de la modification législative est de permettre aux opérateurs aux échéances de démantèlement lointaines, qui n'auraient pas encore constitué l'intégralité de leurs actifs, typiquement EDF, de poursuivre dans des conditions financières optimales leurs dotations aux actifs dédiés.

III. OPTIONS

Le statu quo est une option qui conduirait EDF à devoir investir 6,7 Md€ entre début 2010 et mi 2011 ce qui apparaît comme un rythme trop soutenu et non optimal car intervenant dans une période de forte volatilité des marchés. L'étalement des dotations sur 5 ans permet de réduire la sensibilité de la valeur du portefeuille par rapport aux variations du marché. Il permet ainsi une meilleure sécurité financière.

IV. IMPACTS DE LA REFORME ENVISAGEE

Impacts financiers et impacts sur l'emploi public

La disposition n'a pas d'impact sur l'emploi public.

EDF a un portefeuille d'actifs dédiés de 11,4Md€ au 31/12/2009 pour une valeur actualisée des charges nucléaires à couvrir par de tels actifs de 18,1Md€ au 30 juin 2011.

En cas d'allongement de 10 ans de la durée de vie de ses réacteurs, EDF verrait ses provisions actualisées diminuer d'environ 2,5 Md€. Pour autant, il serait prématuré d'intégrer d'ores et déjà une telle prolongation de la durée de vie des réacteurs. Le dossier devra être instruit en temps et en heure par l'Autorité de sûreté nucléaire. En revanche, ceci éclaire d'un jour nouveau le problème de la stratégie de placement.

Les décaissements à couvrir entre 2011 et 2016 s'élèvent à 1,7 milliard d'euros ce qui montre que le niveau de couverture actuel, soit plus de 11 Md€, couvre 6 fois environ les décaissements à venir sur les six prochaines années. Le décalage de l'échéance de dotation de ces actifs n'a donc pas d'impact sur le financement des charges nucléaires de long terme.

La disposition envisagée a un impact financier certain sur EDF en lui permettant d'étaler une charge financière qu'il n'a pas étalée entre 2006 et aujourd'hui du fait de la crise des marchés financiers de 2008-2009. Sans modification de la législation en vigueur, EDF devrait donc investir 6,7Md€ en un peu plus d'un an Le niveau de couverture des actifs dédiés à atteindre en juin 2016 s'élèvera à environ 21 Md€, ce qui permettra d'optimiser le placement des actifs, sur un rythme de dotation de près de 2 Md€ par an. Ce rythme correspond d'ailleurs à celui anticipé pour la période 2006-2011 avant la crise financière.

Impacts sociaux

La disposition n'a pas d'impact social : il s'agit d'une modification législative qui ne porte que sur des contraintes de sécurisation de financement.

Impacts environnementaux

La disposition n'a pas d'impact sur l'environnement : il s'agit d'une modification législative qui ne porte que sur des contraintes de sécurisation de financement.

Impacts juridiques

Il n'y a pas d'impact juridique, la mesure étant circonscrite à un sujet très précis : la sécurisation du financement des charges nucléaires.

V. CONSULTATIONS MENÉES

Des consultations bilatérales avec les acteurs concernés ont pris place, dans un cadre interministériel, et ont démontré un soutien d'ensemble à la mesure proposée.

VI. APPLICATION DE LA RÉFORME DANS LE TEMPS

La réforme doit s'appliquer le lendemain de la publication du support législatif. La mesure aura une portée limitée dans le temps jusqu'au 28 juin 2016, date à laquelle les charges nucléaires devront être totalement sécurisées.

1 Concernant l'électricité, il s'agit des directives 96/92/CE du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et 2003/54/CE du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 96/92/CE, ainsi que du règlement 1228/2003/CE du 26 juin 2003 sur les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité.

2 Concernant l'électricité, il s'agit des directives 2009/72/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE, règlement 714/2009 du 13 juillet 2009 sur les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité et abrogeant le règlement 1228/2003 et règlement 713/2009 du 13 juillet 2009 instituant une agence de coopération des régulateurs de l'énergie.

3 cf. rapport de la commission Champsaur §2.1.1

4 cf. rapport de la commission Champsaur §2.1.2

5 A la fin des années 90, les capacités de production d'électricité étaient excédentaires par rapport aux besoins en France continentale. Cette surcapacité avait notamment conduit EDF à « mettre sous cocon » (en arrêt) certaines centrales. Suite à l'augmentation de la consommation d'électricité en France, les marges de production se sont réduites.

6 Voir glossaire en annexe.

7 cf 2.2 du rapport Champsaur

8 cf 2.3 du rapport Champsaur

9 Décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006.

10 Décision DC n°2006-543 du 30 novembre 2006, Loi relative au secteur de l'énergie.

11 En décembre 2008, la Commission a adressé à EDF une communication des griefs (voir MEMO/08/809), lui faisant part de sa crainte de voir la portée, la durée et la nature exclusive de ses contrats d'approvisionnement empêcher l'entrée et l'expansion d'autres fournisseurs sur le marché français de l'électricité.

Le 17 mars 2010, la Commission européenne a rendu contraignants les engagements offerts par le groupe EDF en réponse à ses préoccupations. Elle craignait en effet que les contrats passés par EDF avec les grands consommateurs d'électricité n'entravent l'entrée et l'expansion de concurrents sur le marché français. EDF s'engage à permettre chaque année à un nombre élevé de clients de conclure des contrats avec d'autres fournisseurs d'électricité. Les restrictions à la revente seront également supprimées.

12 Le Sénat a examiné dans sa séance du 25 mars 2010, une proposition de loi du sénateur Poniatowski tendant à autoriser les consommateurs finals domestiques d'électricité et les petites entreprises à retourner au tarif réglementé d'électricité

13 Voir glossaire pour la définition.

14 cf. § 4.1 du rapport Champsaur

15 cf. § 4.2 du rapport Champsaur

16 Exeltium est un consortium de consommateurs industriels électro intensifs s'approvisionnant en électricité de base par un contrat de long terme avec EDF.

17 Le plafond ne sera bien sûr atteint que dans l'hypothèse d'un développement de la concurrence dans ces proportions, ce qui ne sera naturellement pas immédiat, vu le rythme courant de développement de la concurrence dans les marchés récemment libéralisés..

18 Cf. I de l'article 1 : «Afin d’assurer la liberté de choix du fournisseur d’électricité tout en faisant bénéficier l’attractivité du territoire et l’ensemble des consommateurs de la compétitivité du parc électro-nucléaire français, il est mis en place à titre transitoire un accès régulé et limité à l’électricité de base produite par EDF, ouvert à tous les opérateurs fournissant des consommateurs finals résidant sur le territoire national, à des conditions économiques équivalentes à celles résultant pour EDF de l’utilisation de ses centrales nucléaires actuelles  »

19 De tels mécanismes ont été mis en place, notamment aux Etats Unis (marché dit « PJM », ainsi que New England).

20 Voir glossaire pour la définition des périodes de pointe de consommation.

21

Année

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Moyenne du prix spot Powernext

38,70

21,19

29,23

28,13

46,67

49,29

40,87

69,16

43,01

22 Le réacteur le plus ancien du parc nucléaire français aura 40 ans en 2017 le cas échéant. Les investissements de prolongement devraient intervenir quelques années auparavant.

23 Voir la liste au lien suivant :

http://www.developpement-durable.gouv.fr/energie/electric/textes/liste-achat-revente.htm

24 Voir la liste au lien suivant :

http://www.energie-info.fr/fichier/Liste_Fourn_Particuliers.pdf

25 Fin 2009, cf. CRE.

26 Lorsqu'un fournisseur alternatif vend de l'énergie au prix Tartam, il est compensé du surcoût que cela induit. Ce surcoût est compensé essentiellement par EDF (à 95%). En conséquence, même si ce n'est pas directement EDF qui livre ces clients, financièrement, tout se passe comme si EDF vendait de l'énergie à ces clients au prix Tartam.

27 A hauteur des critères de sécurité fixés sur une base probabiliste.

28 Cette fraction dépendra de la part de marché des fournisseurs alternatifs, du développement de leurs propres moyens de production et de l'évolution du parc de production de semi-base et de pointe d'EDF.

29 Ceux pour lesquels s'appliquait le tarif réglementé bleu.

30 Voir glossaire en annexe.

31 Actuellement, pour capter de nouveaux clients, les fournisseurs font généralement des offres similaires au tarif réglementé de vente auquel ils appliquent une « ristourne ». Ce type de comportement n'est pas pérenne dans le cadre concurrentiel actuel, car il se traduit généralement par des pertes pour les fournisseurs qui l'adoptent. En revanche il sera économiquement viable dans la nouvelle organisation du marché de l'électricité.

32 Ceux pour lesquels s'appliquaient les tarifs réglementés jaune et vert.

33 Voir glossaire en annexe.

34 A titre d'illustration, il est supposé que l'écart entre prix de l'accès régulé et prix de marché est de 10 à 30€/MWh et que le taux de couverture des besoins est de 80%

35 Voir glossaire en annexe.

36 Le TURPE 3 inclut déjà l'achat des pertes à prix de marché

37 Les volumes échangés sur le marché de gros français représentent 134% de la consommation nationale. En Allemagne, ce ratio est d'environ 900%.

38 Le gestionnaire du réseau de transport (RTE) et le gestionnaire du réseau de distribution (ERDF) achètent leurs pertes via des appels d'offre. Les produits mis aux enchères sont à échéance mensuelle, trimestrielle et annuelle. L'énergie engagée contractuellement en 2007 par les vendeurs de pertes s'est élevée à 39 TWh de produits fermes et l'équivalent de 18 TWh sous forme de produits optionnels.

39 Virtual Power Plant. Suite à une décision de la Commission européenne, EDF est contraint de mettre à disposition une partie de ses capacités de production (5,4 GW). Le droit d'utiliser l'énergie produite par ces installations est vendu aux enchères.

40 En premier lieu il convient de noter que les gestionnaires de réseau n'agissent pas aujourd'hui directement sur les marchés mais indirectement via les stratégies de couverture des volumes sur le marché. En second lieu, les volumes concernés, soit 57 TWh en 2007, doivent être comparés aux 577 TWh échangés la même année sur le marché à terme (bourse et OTC) : ils en représentent 10%.

41 Voir rapport du groupe de travail « pertes sur le réseau électrique » http://gtpe.cre.fr/.

42 Over The Counter. Il s'agit de contrats dont l'exécution n'est pas centralisée par une bourse : ce sont soit des contrats intermédiés par des brokers, soit des contrats « bilatéraux purs » c'est à dire sans aucun intermédiaire.

43 Saisi par la société Direct Énergie, le 22 février 2007, de pratiques mises en œuvre par EDF sur le marché de la fourniture d'électricité, le Conseil de la concurrence a rendu une décision le 10 décembre 2007 par laquelle il rend obligatoire la fourniture d'électricité en gros permettant d'alimenter la revente au détail par les concurrents d'EDF sur le marché libre. Ces enchères concernent au total une capacité de 1500 MW.

44 Ces enchères répliquent la structure de coût de fonctionnement de centrales nucléaires et de pointe. Elles ont été conçues précisément pour palier le manque de moyens de production des fournisseurs alternatifs. Leur prix s'aligne généralement sur les prix à terme observés sur le marché de gros. Pour autant, elles ne constituent pas à proprement parler des transactions de marché de gros.

45 Généralement, la couverture des besoins physiques sur le marché de gros donne lieu à des transactions dont le volume total est supérieur à celui correspondant au strict besoin physique. En effet, les acteurs cherchent à réduire les risques liés notamment de la volatilité de prix. A cette fin, ils adoptent des stratégies d'intervention sur les marchés qui peuvent être très complexes, conduisant in fine à accroître les volumes effectivement échangés. Il est possible de tenir compte de cet effet multiplicateur en utilisant un facteur moyen pour passer du marché physique au marché des transactions. Par exemple, sur le marché pétrolier, les volumes échangés sont environ 100 fois supérieurs aux volumes consommés mondialement.

46 La PPI de production d'électricité est prévue par l'article 6 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité. La PPI est la traduction concrète de la politique énergétique dans le domaine de l'électricité. Elle doit permettre de vérifier la mise en ligne des objectifs de politique énergétique et la sécurité d'approvisionnement à l'échelle nationale. Le dernier rapport de PPI, pour la période 2009- 2020 est disponible au lien suivant :

http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/ppi_elec_2009.pdf

47 La région centre-ouest regroupe les pays suivants : France, Allemagne, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas.

48 Soit 34% multiplié par l'écart de chiffre d'affaire entre les deux scénarii, chiffré précédemment (2,7 à 7,8 Md€).

49 Essai d'évaluation de la situation énergétique de la France à l'horizon 2020 du fait de l'application et de l'atteinte des objectifs du projet de loi « Grenelle de l'environnement » - document de synthèse - MEEDDAT octobre 2008.

50 Voir également p7 du document - Scénario énergétique de référence (DGEMP-OE) 2008 – MEEDDAT idem

51 cf. rapport Champsaur - §2.1.1

52 Modèle utilisé notamment pour calculer les effets de mesures fiscales type « taxe carbone » sur les émissions de CO2 au niveau mondial.

53 cf. liste en annexe 2 du rapport Champsaur

54 Dans sa lettre de mission à MM. Poignant et Sido, le Ministre d'État a rappelé la nécessité pour la France d'intensifier les efforts pour maîtriser la croissance des pointes de consommation d'électricité. Dans le prolongement des travaux de la PPI, il a été demandé au groupe de travail :

- de caractériser la pointe électrique,

- d'identifier les solutions techniques permettant à court, moyen et long terme de réduire la demande à la pointe par le biais d'effacements de consommation,

- de contribuer à l'analyse économique permettant de valoriser les effacements de consommation,

- de formuler des propositions permettant de favoriser les effacements au financement de nouveaux moyens de production.

55 JO L 144 du 4.6.1997, p. 19.

56 JO L 95 du 21.4.1993, p. 29.

57 JO L 115 du 17.4.1998, p. 31.

58 JO L 115 du 17.4.1998, p. 31.


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