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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l’accord relatif aux pêches dans le sud de l’Océan Indien

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectif de l’accord

Le présent accord vise à créer une nouvelle organisation régionale de gestion des pêches (ORGP)1 pour les espèces non thonières dans le sud de l’Océan Indien. Il n’y a en effet dans cette partie du monde qu’une ORGP, la Commission des thons de l’Océan Indien (CTOI), créée en 1993 et couvrant tout l’océan Indien mais compétente seulement pour le thon et les espèces apparentées.

La création de cette nouvelle ORGP fait suite à une recommandation de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (OAA/ FAO) visant à encourager les anciens membres de la Commission des Pêches pour l’Océan Indien (CPOI) à instituer un nouvel organisme. La CPOI, organe subsidiaire de l’OAA créé par la résolution 2/48 du Conseil de l’OAA du 23 juin 1963, a été elle-même à l’origine de la CTOI mais, dotée de peu de pouvoirs, elle a été dissoute le 17 février 1999.

La France est présente dans cette zone (îles de La Réunion, de Mayotte, de Saint-Paul et d’Amsterdam) et a vocation à participer à la mise en place dans la région de mesures cohérentes de gestion des pêches. La France est ainsi déjà partie à l’accord portant création de la Commission des thons de l'Océan Indien (CTOI) adopté à Rome le 25 novembre 1993 publié par décret n° 2007-1033 du 15 juin 2007 ; elle a signé en 2006 l’accord relatif aux pêches dans le sud de l’océan Indien, objet du présent projet de loi.

Les ressources concernées par l’accord portent sur toutes les espèces halieutiques à l’exception :

- des espèces sédentaires, dont la gestion relève classiquement de la juridiction des Etats côtiers en vertu de l’Article 77. 4 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 (CNUDM)2 ;

- et des espèces hautement migratoires figurant à l’annexe I de la CNUDM (principalement le thon, le martin, le voilier, la brème de mer, l’espadon, la dorade tropicale, le requin, les baleines et les marsouins) : celles-ci sont déjà comprises dans le champ d’application de par la CTOI.

La zone de compétence de l’accord correspond aux zones de haute mer du sud ouest de l’océan Indien, soit pour l’essentiel aux zones FAO 51 et 573. Ce découpage complète la zone de compétence de l’ORGP jumelle, la Commission des Pêches du sud ouest de l’océan Indien (CPSOOI/SWIOFC), qui gère les zones sous juridiction comprises dans la zone. Au sud, la limite de la zone de compétence de l’accord prend dûment en compte les limites de la convergence antarctique, si bien qu’il n’y a pas de chevauchement de compétence entre la nouvelle ORGP et la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR) ; en revanche l’accord recouvre partiellement la zone de compétence de la CTOI sans la recouper complètement.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’Accord

Conséquences économiques

Elles sont pour le moment très limitées, étant donné la faible implication des pêcheries françaises dans la zone de l’accord ; toutefois, les entreprises de pêche entendent diversifier leur activité dans cette zone : elles se concentrent actuellement sur la pêche au grand pélagique (espèces thonières) mais les entreprises françaises en océan Indien pourraient vouloir utiliser prochainement leur droit d’exploitation de nouvelles ressources bathy-pélagiques et démersales (pêche de fond), que la France exploite déjà en Atlantique du nord-est. A ce jour cependant, aucun investissement n’a encore été réalisé en la matière pour cette zone. Il est donc aujourd’hui difficile d’évaluer les conséquences économiques pour ce secteur.

Conséquences financières

De manière directe, l’approbation de cet accord impliquera une participation française aux coûts de fonctionnement de la nouvelle ORGP, qui seront compris entre 50 000 et 75 000 euros par an. Le suivi de sa mise en œuvre devrait se limiter à 0,1 Equivalent Temps Plein (ETP) pour la France et à un déplacement sur zone par an (outre les éventuelles réunions de coordination au sein de l’Union européenne).

Conséquences sociales

Aujourd’hui, aucune personne n’est employée par les entreprises françaises dans l’océan Indien dans la perspective de la mise en œuvre du présent accord, puisqu’aucune pêche non thonière n’est pratiquée en haute mer par des navires français. A terme, la possibilité d’exploiter de nouvelles ressources bathy-pélagiques et démersales, encouragée par l’adoption d’un cadre juridique de régulation, devrait inciter les entreprises françaises de pêche dans l’océan Indien à s’orienter vers ces nouvelles activités, avec les conséquences qui s’y attachent en termes d’emploi.

Conséquences environnementales

S’agissant d’étendre la gouvernance des pêches internationales dans cette zone de l’océan Indien et d’assurer ainsi une gestion durable des stocks halieutiques, la création d’une ORGP ne peut avoir que des conséquences positives sur l’environnement, les pêcheurs s’accordant sur ce point avec les organisations non gouvernementales de protection de l’environnement.

Conséquences juridiques

Il n’y aura pas lieu de compléter le droit interne. Le droit international se suffit ici à lui-même : c’est l’ORGP qui définit les taux de capture et le non respect de ceux-ci est sanctionné par une inscription du navire concerné comme « navire INN » (engagé dans la pêche illicite, non déclarée et non réglementée).

Les compétences en matière de pêche ont été entièrement transférées à l'Union européenne, avec toutefois une exception pour les pays et territoires d'outre-mer (listés en annexe II du TFUE) non inclus dans le territoire de l'Union. L’Union européenne est déjà partie au présent accord, qu’elle a approuvé en 2008. Dans le sud de l’Océan Indien, à l’instar de la France, l’Union a le statut d’« Etat côtier » (au titre de l’île de la Réunion) et celui d’Etat pêcheur car plusieurs navires battant pavillon de pays de l’Union y pratiquent la pêche. La France a la qualité pour devenir partie à l’accord, en son nom propre, aux côtés de l’Union, car les territoires d’Amsterdam et de Crozet sont, aux termes du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), des pays et territoires d’outre-mer (PTOM).

En ce qui concerne l’Union européenne, la Commission représente l’Union européenne dans six ORGP thonières et onze ORGP non thonières dans lesquelles la flotte communautaire est déjà active ou envisage de participer dans un avenir proche. Elle tient à favoriser une meilleure gouvernance des pêches internationales en renforçant les ORGP existantes et en veillant à ce qu’elles disposent des compétences et des ressources nécessaires pour assurer la réglementation et la conservation de la pêche dans leur région, y compris le pouvoir de lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN)4. Elle partage également son expérience dans les ORGP au sein desquelles l’Union n’a pas un intérêt direct et encourage la mise en place de telles organisations dans les régions et pêcheries où la pêche n’est pas encore réglementée. Dans ce cas précis, la Commission a été mandatée par le Conseil de l’Union européenne en novembre 2000 pour participer aux négociations de l’accord au nom de la Communauté. : celle-ci a des intérêts de pêche dans le sud de l’océan Indien et est également un « Etat côtier » au titre de l’île de La Réunion. La Communauté est donc tenue, aux termes de la CNUDM, de coopérer avec les autres parties impliquées dans la gestion et la conservation des ressources de cette région et elle a signé l’accord le 7 juillet 2006, conformément à la décision du Conseil 2006/496/CE du 6 juillet 2006. Cet accord est donc pleinement compatible avec les engagements de l’Union et le droit européen.

L’accord entrera en vigueur 90 jours après la date de réception par le dépositaire (en l’occurrence, le Directeur général de l’OAA) du quatrième instrument de ratification ou d’adhésion, pourvu que deux au moins de ces quatre Etats soient des Etats riverains de la zone. Pour chaque signataire qui ratifie l’accord, celui-ci entre en vigueur 30 jours après le dépôt de son instrument de ratification, sous réserve de son entrée en vigueur générale.

Conséquences administratives

Elles sont limitées compte tenu de l’absence actuelle de pêcherie française non thonière dans la zone. Le suivi de cette ORGP sera réduit au minimum et sera assuré par la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture du ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Le suivi scientifique des ressources de haute-mer pourra faire l'objet, sur la base du volontariat, du concours des scientifiques de l'Institut de recherche pour le développement (IRD), de l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER), comme c'est le cas dans d'autres ORGP (exemple de la « South Pacific Regional Fisheries Management Organisation » - SPRFMO, où l'IRD participe aux suivis acoustiques des stocks pélagiques avec les scientifiques chiliens).

III. - Historique des négociations

C’est en 2000, peu après la disparition de la CPOI, que les Etats pêcheurs du sud de l’océan Indien et anciens membres de cette commission, ont pris l’initiative, conjointement avec l’OAA, de lancer le processus de création d’une nouvelle ORGP.

L’OAA a d’abord organisé deux réunions techniques ad hoc, la première à Albion (Maurice) du 24 au 27 janvier 2000, la seconde à Tananarive (Madagascar) les 11 et 12 juillet 2000, qui ont débouché sur la convocation d’une consultation intergouvernementale, en vertu de l’article XIV 3. A de l’Acte constitutif de l’OAA, en vue de la finalisation du projet d’accord et de sa recommandation pour adoption. La négociation a été réalisée au cours de cinq conférences intergouvernementales : Saint-Denis de la Réunion (6-9 février 2001), Tananarive (25-29 septembre 2001), Nairobi (Kenya, 27-30 janvier 2004), Mahé (Seychelles, 13-16 juillet 2004) et Mombasa (Kenya, 20-22 avril 2005), la France participant à chacune de ces conférences. Le 6 juillet 2006, une ultime session préparatoire a eu lieu au siège de l’OAA à Rome et, l’accord étant réalisé sur tous les points, la Conférence pour l’adoption de l’accord sur les pêches dans le sud de l’Océan Indien s’est réunie à Rome le 7 juillet 2006 : le document final y a été adopté à l’unanimité et l’accord a été ouvert à la signature le jour même.

IV. - Etat des signatures et ratifications

A ce jour, 10 Etats ou entités ont signé l’accord (Australie, Comores, France, Kenya, Madagascar, Maurice, Mozambique, Nouvelle-Zélande, Seychelles et Union européenne), un seul l’a ratifié (Seychelles), deux si l’on y assimile son approbation par l’Union européenne le 15 octobre 2008, auxquels il faut ajouter les Iles Cook qui ont adhéré à l’accord le 5 juin 2008.

V. - Déclarations ou réserves que le gouvernement français envisage de faire

Le Gouvernement français n’entend faire aucune déclaration ou réserve. L’Union européenne n’avait elle-même fait aucune réserve : son représentant avait signé l’accord dès le 7 juillet 2006, conformément à la décision 2006/496/CE du Conseil du 6 juillet 2006, et l’accord a été approuvé le 15 octobre 2008 par l’Union.

1 Les organisations régionales de gestion de la pêche (ORGP) sont des organismes internationaux mis en place par des pays ayant des intérêts en matière de pêche dans une zone géographique spécifique. Pour plus de précisions sur ce que sont les ORGP, voir notamment le site de la commission européenne sur ce sujet : http://ec.europa.eu/fisheries/cfp/international/rfmo/index_fr.htm

2 Texte de la CNUDM : http://www.un.org/french/law/los/unclos/closindx.htm

3 Pour des besoins statistiques, l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (OAA-FAO) a défini, dans le cadre du Groupe de travail chargé de coordonner les statistiques des pêches, 27 principales zones de pêche dans le monde, dont 8 couvrent les eaux intérieures des cinq continents et de l’Antarctique et 19 couvrent les océans et les mers qui leur sont adjacentes. Ces zones sont identifiées par leur nom et un code à deux chiffres.

Le Groupe de travail chargé de coordonner les statistiques des pêches (CWP) coordonne les programmes de statistiques des pêches des organismes régionaux des pêches et des autres organisations intergouvernementales compétentes dans ce domaine. Il a été établi par la Résolution 23/59 de la Conférence de la FAO au titre de l’Article VI-2 de l’Acte constitutif de l’Organisation, à sa dixième session, en 1959. Les statuts du CWP ont été amendés et approuvés par le Conseil de la FAO à sa cent-huitième session en juin 1995. La Zone FAO 51 correspond à l’Ouest de l’Océan Indien, et la Zone FAO 57 correspond à l’Est de l’Océan Indien, comme indiqué sur les cartes jointes en annexe.

4 Cf les dispositions européennes relatives à la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée :

http://europa.eu/legislation_summaries/maritime_affairs_and_fisheries/fisheries_resources_and_environment/pe0005_fr.htm


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