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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l’avenant à la convention entre la République française

et la République d’Autriche en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir

l’évasion fiscale en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune

NOR : MAEJ1123894L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou traité

1. Contexte général

La France et l’Autriche sont liées par une convention en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune signée à Vienne le 26 mars 19931.

L’Autriche ayant émis une réserve sur le paragraphe 5 de l’article 26 du modèle de l’OCDE2 qui l’autorisait à ne pas inclure ce paragraphe dans ses conventions, les stipulations relatives à la clause d’échange de renseignements de la convention actuelle sont très restrictives.

Or, dans le contexte international où la transparence et l’échange d’informations fiscales se sont révélés être les contreparties indispensables à la mondialisation, la France a fait de la lutte contre l’évasion fiscale internationale un axe majeur de sa politique conventionnelle.

Dès lors, les stipulations relatives à l’échange de renseignements contenues dans l’actuelle convention franco-autrichienne, non conformes aux standards internationaux, ne sont pas en adéquation avec cette politique, et sont d’autant moins acceptables pour la France qu’elles concernent l’un de ses partenaires européens.

Cette signature s’inscrit dans le contexte de la conférence de Berlin du 21 octobre 2008 et traduit la volonté manifestée par les Etats du G20, le 2 avril 2009, de promouvoir la transparence et l’échange d’informations. En effet, en mars 2009, l’Autriche a accepté de retirer ses réserves sur le paragraphe 5 de l’article 26 du modèle de convention fiscale OCDE et consenti à négocier des accords comportant des stipulations relatives à l’échange de renseignements conformes aux standards de l’OCDE.

Afin de rendre possible la mise en œuvre effective des stipulations prévues au paragraphe 5 de l’article 26 du modèle de convention fiscale de l’OCDE, le 9 septembre 2009, l’Autriche a modifié sa législation interne et adopté une loi d’exécution sur l’assistance administrative autorisant les établissements de crédit à communiquer des informations bancaires aux autorités fiscales dans le cadre d’une demande d’assistance administrative bilatérale en matière fiscale.

Cette loi respecte les principes établis par l’OCDE en autorisant les autorités étrangères à demander la transmission des informations couvertes par le secret bancaire si cette demande se fait dans le cadre d’une convention fiscale ou de tout autre instrument d’échange d’information respectant les principes établis au paragraphe 5 de l’article 26 du modèle de convention de l’OCDE.

Le paragraphe 5 du nouvel article 26 de la convention prévoit donc expressément la levée du secret bancaire. Il interdit désormais à l’Autriche d’opposer le secret bancaire pour refuser de communiquer à la France des renseignements.

Le nouvel avenant à cette convention signé le 23 mai 2011 répond à la volonté conjointe de la France et de l’Autriche d’améliorer leur coopération en matière d’échange d’informations fiscales aux fins de lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales.

2. Situation actuelle de l'Autriche

Selon la banque nationale (OeNB), les encours en dépôts atteignent 333Mrd EUR au 4ème trimestre 2010. Les fonds d’origine étrangère déposés dans les banques autrichiennes atteindraient 48,5Mrd EUR dont 20Mrd EUR en provenance d’Allemagne et 1,5Mrd EUR en provenance d’Italie (chiffres de 2010). La mission économique de l’Ambassade ne dispose pas d’informations quant aux fonds d’origine française.

Selon l’OeNB, l’Autriche comptait 853 banques au 2ème trimestre 2010. Le secteur bancaire autrichien est caractérisé par un grand nombre de petits instituts à dimension régionale, voire locale. Sur les 853 établissements bancaires, 539 appartiennent au réseau Raiffeisen (équivalent des caisses locales et régionales du Crédit agricole) et 54 au réseau Sparkassen (équivalent des caisses d’épargne). Seuls trois instituts bancaires affichent un bilan supérieur à 100Mrd EUR (Bank Austria, ERSTE Bank et Raiffeisen Bank International) dont uniquement deux sont cotés en bourse (ERSTE Bank et Raiffeisen Bank International) ; Bank Austria étant une filiale de l’italienne Unicredit.

Les banques autrichiennes reposent en majorité sur un modèle de transformation classique de dépôts en prêts, notamment en faveur des PME. Ces dernières représentent l’élément essentiel du tissu économique autrichien. Par la prédominance du canal bancaire dans le financement des entreprises, le bon fonctionnement du mécanisme de transformation est primordial pour l’économie autrichienne.

Selon l’association autrichienne des fondations privées (Privatstiftungen), VÖP, l’Autriche compte 3293 fondations privées au premier trimestre 2011. La banque privée Kathrein estime que les fonds détenus par ces établissements avoisinent les 60Mrd EUR.

Le secret bancaire autrichien est très strict. Il est régi par la loi sur les activités bancaires (Bankwesengesetz, cf. § 38). Les organismes et institutions de crédit, leurs associés, les membres des organes de gestion, les salariés et toute personne exerçant une activité quelconque à leur service ne doivent divulguer aucune information dont ils ont pu avoir connaissance à l’occasion d'une relation d'affaires avec un client. La violation du secret bancaire comporte des sanctions civiles et pénales.

Le secret bancaire doit aussi être respecté vis-à-vis des autorités fiscales à moins qu'une procédure fiscale pénale n’ait été engagée pour un délit fiscal intentionnel (vorsaetzliches Finanzvergehen) tandis qu'une procédure pour une simple infraction fiscale (Finanzordnungswidrigkeit) n’autorise pas à lever le secret bancaire. La France ne pouvait en conséquence pas obtenir toutes les informations nécessaires à l’application de la législation fiscale française par la mise en œuvre des stipulations conventionnelles existantes.

Par ailleurs, il existe l’obligation de révélation devant le juge civil dans une procédure de succession, devant les autorités administratives ou de police dans les cas d’un soupçon de blanchiment d’argent, selon l’obligation d’information prévue par l’article 25 alinéa 1 de loi sur les successions et les donations, en cas d’obligation d’information de l’autorité des marchés financiers, etc.

En septembre 2009, l’Autriche a adopté la loi d’exécution sur l’assistance administrative. Elle constitue la base pour l’échange bilatéral des informations en matière fiscale en respectant les principes établis par l’OCDE. Les autorités étrangères peuvent donc désormais demander la transmission des informations couvertes par le secret bancaire dès lors que la Convention les liant à l’Autriche a été amendée en conséquence. Cet avenant à la convention fiscale permet de procéder à cet amendement des stipulations conventionnelles.

3. L'accord signé avec l’Autriche, le 23 juin 2011, constitue un avenant à la Convention fiscale franco-autrichienne du 26 mars 1993, actuellement en vigueur.

4. L'accord est une « copie » du modèle OCDE.

Cet avenant introduit une clause relative à l’échange de renseignements très proche de l’article 26 du modèle OCDE. La clause insérée précise, en plus de la clause OCDE, que chaque Etat contractant doit prendre les mesures afin de garantir la disponibilité des renseignements et la capacité de son administration fiscale à accéder à ceux-ci et à les transmettre.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre des accords

Conséquences économiques et financières

Dans son rapport annuel de 2007, le Conseil des prélèvements obligatoires estimait le montant de la fraude fiscale et sociale annuelle entre 29 et 40 milliards d’euros. Il n’est cependant pas possible d’estimer, même en termes d’ordre de grandeur, la part de la fraude et de l’évasion fiscales qui impliquerait des opérateurs profitant de l’absence d’échange de renseignements existant avec l’Autriche.

Selon la dernière enquête réalisée par la Mission économique en Autriche, la présence française dans cet Etat était constituée fin 2009 de 218 entreprises qui employaient 23 667 personnes. Une des caractéristiques de l’Autriche est que de nombreuses entreprises ont une dimension régionale et se servent de ce territoire comme d’un point d’entrée vers les pays d’Europe centrale et orientale et même au-delà. La mission économique ne dispose pas d’informations sur le nombre de dépôts ou de comptes détenus par des Français.

Dans un tel contexte, la proximité géographique de l’Autriche avec la France, la législation protectrice du secret bancaire et l’absence d’un cadre de coopération efficace entre administrations fiscales constituent des facteurs qui accroissent considérablement le risque de fraude et d’évasion fiscales.

L’avenant permet désormais à la France d’obtenir des renseignements de la part des autorités autrichiennes sans limitation quant à la nature des impôts, des personnes et des renseignements visés par la demande de renseignements. Il interdit à l’Autriche d’opposer sa législation sur le secret bancaire pour refuser de communiquer à la France des renseignements.

L’extension du champ de l’échange de renseignements prévue par la convention favorisera donc la lutte contre les schémas de fraude et d’évasion fiscales.

Conséquences juridiques

L’ordonnancement juridique n’est pas affecté par cet avenant.

Toutefois, l’introduction dans la convention de la clause d’échange de renseignements offre la possibilité à la France de demander aux autorités de l’autre Partie contractante toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne et de transmettre ces informations aux autorités concernées, y compris les autorités juridictionnelles et administratives.

Ni la Directive 77/799/CE du Conseil du 19 décembre 1977 modifiée concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des Etats membres dans le domaine des impôts directs et indirects , ni la Directive 2011/16/UE, qui va lui succéder, ne portent pas atteinte à l'exécution de toute obligation des Etats membres quant à une coopération administrative plus étendue qui résulterait d'autres instruments juridiques, y compris d'éventuels accords bilatéraux ou multilatéraux.

Pourront être requis tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts, pour le recouvrement et l’exécution des créances fiscales sur les personnes soumises à ces impôts, ou pour les enquêtes ou les poursuites en matière fiscale et pénale à l’encontre de ces personnes. Les demandes pourront concerner toute personne ou entité. De plus, l’Autriche ne pourra pas opposer son secret bancaire, ni subordonner la délivrance de l’information à l’existence d’un intérêt pour l’application de sa propre législation fiscale. Ainsi, la capacité de la France dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale se trouve renforcée.

Le traitement et la protection des données à caractère personnel et des autres informations fournies par les Parties seront, pour la France, assurés conformément à :

- la loi n° 78-17 modifiée du 6 janvier 1978 dite « Informatique et Libertés » ;

- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, en particulier l'article 26 ;

- la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981.

Conséquences administratives

La mise en œuvre de l’échange de renseignements sera gérée par la sous-direction du contrôle fiscal de la direction générale des finances publiques et par les directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales au niveau déconcentré. Ces services sont déjà en charge de la mise en œuvre de l’assistance administrative dans le cadre communautaire ou en application des conventions fiscales existantes. Au regard des volumes d’informations déjà échangés et dès lors que, bien que plus restrictive, une clause d’échange de renseignements existe déjà dans la convention actuelle, l’entrée en vigueur de l’avenant à la convention fiscale entre la France et l’Autriche ne devrait pas entraîner de surcharge administrative substantielle.

III. - Historique des négociations

Par courrier du 13 mars 2009, les autorités autrichiennes ont informé le Secrétaire général de l’OCDE de leur volonté de lever leur réserve au paragraphe 5 de l’article 26 du modèle OCDE et d’insérer dans leurs conventions un article relatif à l’échange de renseignements conforme aux derniers standards de l’OCDE permettant de lutter contre l’évasion et la fraude fiscale.

Suite à cette avancée, la France a informé l’Autriche, par lettre du 24 mars 2009, qu’elle souhaitait insérer dans la convention fiscale franco-autrichienne du 26 mars 1993 un article relatif à l’échange de renseignements conforme à l’article 26 du modèle de convention fiscale de l’OCDE.

Le 9 septembre 2009, l’Autriche a modifié sa législation interne et adopté une loi d’exécution sur l’assistance administrative autorisant les établissements de crédit à communiquer des informations bancaires aux autorités fiscales dans le cadre d’une demande d’assistance administrative bilatérale en matière fiscale.

Des échanges écrits se sont poursuivis et ont abouti au paraphe, le 27 janvier 2011, d’un avenant introduisant dans la convention une clause d’échange de renseignements conforme aux derniers standards de l’OCDE.

IV. - Etat des signatures et ratifications

L’avenant a été signé le 23 mai 2011 par Monsieur Andreas SCHIEDER, secrétaire d’Etat aux finances autrichien, et Madame Christine LAGARDE, alors ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

A ce jour, la partie autrichienne n’a pas notifié l’achèvement de ses procédures internes requises pour l’entrée en vigueur de l’avenant.

1 http://www.impots.gouv.fr/portal/deploiement/p1/fichedescriptive_1796/fichedescriptive_1796.pdf

2 http://www.oecd.org/dataoecd/50/27/35363892.pdf


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