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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de la décision du Conseil européen modifiant l'article 136 du traité

sur le fonctionnement de l'Union européenne en ce qui concerne un mécanisme

de stabilité pour les Etats membres dont la monnaie est l'euro

NOR : MAEX1203177L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs

1- En réponse à la crise de la dette souveraine, un mécanisme européen d’assistance financière a été établi au printemps 2010, qui repose sur deux éléments :

§ un mécanisme européen de stabilité financière (MESF), établi par le règlement n° 407/2010 du Conseil du 11 mai 2010, sur le fondement de l’article 122 paragraphe 2 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Le MESF permet d’accorder un prêt ou une ligne de crédit, dans une limite de 60 Mds € correspondant à la marge en crédits de paiement disponible sous le plafond des ressources propres ;

§ un fonds européen de stabilité financière (FESF), dispositif de nature intergouvernementale, établi par un accord-cadre signé le 7 juin 2010. Il est doté d’une capacité de prêt de 440 Mds €, garantie par les Etats signataires à hauteur de leur part dans le capital libéré de la Banque centrale européenne (BCE).

Ces instruments ont cependant été établis pour une durée limitée de trois ans.

Le Conseil européen est convenu lors de sa session des 28 et 29 octobre 2010 de la nécessité « que les États membres établissent un mécanisme permanent de gestion de crise pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble ». Dans cette perspective, il a parallèlement invité examiner les voies d’« une modification limitée du traité nécessaire à cet effet ».

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de la décision du Conseil européen

- Conséquences politiques

La décision concrétise la détermination du Conseil européen et des Etats membres de l’Union européenne à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble, y compris la mise en place d’un mécanisme permanent de gestion de crise.

Une révision des traités est apparue nécessaire à certains partenaires pour des raisons de plus grande sécurité juridique. Cette option a été en particulier défendue par l’Allemagne dès le début des travaux du groupe de travail sur la gouvernance économique établi en mars 2010 et présidé par M. Van Rompuy. Dans une contribution1 aux travaux du groupe, en date du 19 mai 2010, les autorités allemandes notent ainsi que « si notre objectif est de créer un cadre fort et durable pour l’Union monétaire, nous devons également prendre en considération la possibilité d’amendements aux traités ». Cette orientation a également été endossée par les autorités françaises.

Comme le note le rapport du Président du Conseil européen relatif aux consultations engagées sur le mécanisme de stabilité pour la zone euro2 soumis au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010, « toutes les délégations ont confirmé qu'elles étaient disposées à envisager d'apporter au traité les modifications limitées nécessaires à cet effet ».

- Conséquences juridiques et financières

a) Lors de sa réunion des 16 et 17 décembre 2010, le Conseil européen a approuvé plusieurs orientations :

§ le principe d’une révision du traité. Le Conseil européen « a décidé que le traité devait être modifié afin que les États membres de la zone euro mettent en place un mécanisme permanent pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble (mécanisme européen de stabilité). Ce mécanisme remplacera le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le mécanisme européen de stabilisation financière (MESF), qui seront maintenus jusqu'en juin 2013 » ;

§ le recours à la procédure de révision simplifiée, telle que visée à l’article 48 paragraphe 6 du traité sur l’Union européenne. Pour mémoire, cet article stipule précisément que :

« Le gouvernement de tout État membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil européen des projets tendant à la révision de tout ou partie des dispositions de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, relatives aux politiques et actions internes de l'Union.

« Le Conseil européen peut adopter une décision modifiant tout ou partie des dispositions de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Le Conseil européen statue à l'unanimité, après consultation du Parlement européen et de la Commission ainsi que de la Banque centrale européenne dans le cas de modifications institutionnelles dans le domaine monétaire. Cette décision n'entre en vigueur qu'après son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

« La décision visée au deuxième alinéa ne peut pas accroître les compétences attribuées à l'Union dans les traités. »

§ le Conseil européen s’est accordé sur un projet de décision modifiant l’article 136 TFUE, présenté le 16 décembre par la Belgique qui exerçait alors la présidence du Conseil.

b) Comme le requiert le traité, le projet a été soumis à la consultation de la Commission, du Parlement européen et de la Banque centrale européenne. Ces trois institutions ont rendu leur avis respectivement le 15 février 20113, le 23 mars 20114 et le 17 mars 20115.

c) Pratiquement, la décision du Conseil européen ajoute à la rédaction actuelle de l’article 136 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) un paragraphe 3, qui se lit comme suit :

«3.  Les États membres dont la monnaie est l'euro peuvent instituer un mécanisme de stabilité qui sera activé si cela est indispensable pour préserver la stabilité de la zone euro dans son ensemble. L'octroi, au titre du mécanisme, de toute assistance financière nécessaire, sera subordonné à une stricte conditionnalité ».

d) La décision du Conseil européen du 25 mars 2011 reconnaît ainsi aux Etats membres de la zone euro la faculté d’établir entre eux ce mécanisme permanent. Il convient de relever que les Etats membres disposaient déjà de la compétence de mettre en place un mécanisme de stabilité financière et que la révision de l’article 136 TFUE a une portée purement recognitive et non habilitative. Dès lors, il est possible, d’un point de vue juridique, de mettre en place un tel mécanisme avant même l’entrée en vigueur de la présente décision, dès lors que ce mécanisme n’est pas contraire au droit de l’Union.

Une première version du traité instituant le mécanisme européen de stabilité (MES) a été signé par les ministres des finances des pays membres de la zone euro le 11 juillet. Les nouvelles orientations fixées par les Chefs d’Etat ou de gouvernement de la zone euro dans leur déclaration du 21 juillet ont imposé une adaptation du texte qui, dans sa version révisée, a été signée le 23 janvier 2012.

e) Si la décision du Conseil européen n’emporte pas en soi de modification de la législation nationale ni de conséquences financières, il en va autrement du traité instituant le mécanisme de stabilité financière. L’autorisation de ratification de ce traité fait l’objet d’un projet de loi distinct. La présente décision fait l’objet d’un projet de loi portant autorisation de ratification dans la mesure où la modification de l’article 136 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, sans constituer le fondement juridique préalable indispensable à la création d’un mécanisme de stabilité financière, peut être considérée comme une modification substantielle à ce traité. La présente décision relève ainsi des traités relatifs à l’organisation internationale dont la ratification ne peut intervenir qu’en vertu d’une loi.

f) A noter enfin que, conformément aux conclusions du Conseil européen des 16 et 17 décembre dont les termes sont repris au considérant (4) de la décision du 25 mars 2011, une fois le mécanisme de stabilité en vigueur, il ne sera plus recouru à l’article 122 paragraphe 2 TFUE pour l’octroi d’une assistance financière à un Etat de la zone euro.

III. – Historique des négociations

a) Dans la déclaration commune du Président de la République et de la Chancelière fédérale d’Allemagne adoptée à Deauville le 18 octobre 2010, la France et l'Allemagne ont appelé à une révision du traité afin, en particulier, de permettre « l'établissement d'un mécanisme permanent et robuste pour assurer un traitement ordonné des crises dans le futur, comprenant les arrangements nécessaires pour une participation adéquate du secteur privé et permettant aux Etats membres de prendre les mesures coordonnées appropriées pour préserver la stabilité financière dans la zone euro. »

b) Lors de leur réunion des 28 et 29 octobre 2010, les chefs d’Etat ou de gouvernement sont convenus de la nécessité « que les États membres établissent un mécanisme permanent de gestion de crise pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble ».

Ils ont invité le président du Conseil européen « à engager avec les membres du Conseil européen des consultations sur une modification limitée du traité nécessaire à cet effet, sans toucher à l'article 125 TFUE (clause de "no bail-out") ».

c) Le Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010 a approuvé les conclusions suivantes :

« 1. Le Conseil européen a salué le rapport présenté par son président dans le prolongement de ses conclusions des 28 et 29 octobre 2010. Il a décidé que le traité devait être modifié afin que les États membres de la zone euro mettent en place un mécanisme permanent pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble (mécanisme européen de stabilité). Ce mécanisme remplacera le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le mécanisme européen de stabilisation financière (MESF), qui seront maintenus jusqu'en juin 2013. Étant donné que ce mécanisme est conçu pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble, le Conseil européen a décidé qu'il ne sera plus utile de recourir à l'article 122, paragraphe 2, à ces fins. Les chefs d'État ou de gouvernement sont donc convenus que cette disposition ne devrait pas être utilisée à ces fins.

« 2. Le Conseil européen a approuvé le texte du projet de décision modifiant le TFUE qui figure à l'annexe I. Il a décidé de lancer immédiatement la procédure de révision simplifiée prévue à l'article 48, paragraphe 6, du TUE. La consultation des institutions concernées devrait s'achever à temps pour permettre l'adoption formelle de la décision en mars 2011, l'accomplissement des procédures nationales d'approbation d'ici la fin de 2012 et l'entrée en vigueur du traité modifié le 1er janvier 2013.

« 3. Le Conseil européen a également demandé aux ministres des finances de la zone euro et à la Commission d'achever, d'ici mars 2011, les travaux portant sur l'accord intergouvernemental instituant le futur mécanisme, en y intégrant les composantes générales décrites dans la déclaration de l'Eurogroupe en date du 28 novembre 2010, que le Conseil européen a approuvées (annexe II). Ce mécanisme sera activé d'un commun accord entre les États membres de la zone euro en cas de risque pesant sur la stabilité de la zone euro dans son ensemble.

« 4. Les États membres dont la monnaie n'est pas l'euro seront associés à ces travaux s'ils le souhaitent. Ils peuvent décider de participer à des opérations menées dans le cadre du mécanisme, au cas par cas. »

d) La décision « modifiant l'article 136 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l'euro » a été formellement adoptée par le Conseil européen le 25 mars 2011. L’acte a été publié au journal officiel de l’Union européenne du 6 avril 20116.

IV. - Etat des signatures et ratifications

La décision n° 2011/199/UE a été adoptée par le Conseil européen, conformément à l’article article 48 paragraphe 6 du traité sur l’Union européenne. A ce titre, elle a été formellement signée par le président du Conseil européen, M. Herman Van Rompuy

Conformément à l’article 48 paragraphe 6 précité, cette décision n'entre en vigueur qu'après son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

A ce stade, aucun pays n’a notifié au Secrétariat général du Conseil l’achèvement de sa procédure nationale de ratification.

V. - Déclarations ou réserves

La France n’a fait aucune déclaration ni émis aucune réserve lors de l’adoption de la décision.

A noter en revanche que Chypre et Malte ont fait une déclaration commune, inscrite au procès-verbal de la réunion du Conseil européen des 24 et 25 mars7 et qui se lit comme suit :

« Sans préjudice de l'article 125 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), le fait qu'il soit précisé dans la proposition de modification de l'article 136 du TFUE que le "mécanisme de stabilité sera activé d'un commun accord, si cela est indispensable pour préserver la stabilité de la zone euro dans son ensemble" n'empêche pas de plein droit que le mécanisme soit utilisé pour fournir une assistance financière à tout État membre dont la monnaie est l'euro, puisque la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble est indissociablement liée au fait qu'elle forme un tout et à la stabilité financière de tous ses membres ».

1  Cf http://www.bundesfinanzministerium.de/nn_97140/DE/Wirtschaft__und__Verwaltung/Europa/Der__Euro/20100520-Task-Force.html

2 http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/10/st00/st00031.fr10.pdf

3 COM(2011) 70 final (http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0070:FIN:FR:PDF)

4 Résolution du Parlement européen du 23 mars 2011 sur le projet de décision du Conseil européen modifiant l'article 136 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l'euro (http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2011-0103+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR)

5 Avis de la Banque centrale européenne du 17 mars 2011 sur un projet de décision du Conseil européen modifiant l’article 136 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les États membres dont la monnaie est l’euro. In JOUE C 140 du 11.5.2011, pp. 8 et suivantes (http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2011:140:0008:0011:FR:PDF)

6 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:091:0001:0002:FR:PDF

7 http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/11/st00/st00016.fr11.pdf


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