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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

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R A P P O R T   D’ I N F O R M A T I O N

Présenté à la suite de la mission effectuée au Portugal

du 11 au 15 mai 2008

par une délégation du

GROUPE  D’AMITIÉ  FRANCE- PORTUGAL (1)

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(1) Cette délégation était composée de M. Pierre Bourguignon, Président, MM.  Loïc Bouvard, Marc Le Fur, Georges Mothron, Alain Néri, Michel Lefait, Francis Hillmeyer

CARTE 5

I.- UNE ASSEMBLÉE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA VOIE DE LA RÉFORME 9

A. UN PARLEMENT MONOCAMÉRAL MARQUÉ PAR LE RÔLE PRÉPONDÉRANT DES COMMISSIONS 9

1. Le rôle essentiel des commissions dans la procédure législative 10

2. Le contrôle parlementaire : une fonction qui devrait à long terme se développer 12

3. Des droits importants confiés à l’opposition 13

B. LES RÉCENTES RÉFORMES DE L’ASSEMBLÉE : VERS PLUS DE TRANSPARENCE ET D’EFFICACITÉ DES TRAVAUX PARLEMENTAIRES 14

1. Des mesures en faveur de la transparence des travaux parlementaires 14

2. Le renforcement des compétences des commissions en matière de contrôle 14

3. Une attention particulière portée à l’environnement : 15

4. Une rationalisation des activités législatives 16

II.- L’ACTION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE DE LA FRANCE AU PORTUGAL : UNE INFLUENCE HISTORIQUE, DÉSORMAIS CONTESTÉE 17

A. L’ACTION CULTURELLE: LA NÉCESSITÉ DE S’APPUYER SUR UN RÉSEAU DYNAMIQUE 17

1. Alliances françaises et centres culturels : un réseau culturel dense à préserver 17

2. L’Institut franco-portugais de Lisbonne : le succès d’une structure originale 18

B. L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR : FAIRE FACE À UNE CONCURRENCE ACCRUE 19

1. L’action des lycées français : faire face à la demande avec des moyens limités 20

2. Promouvoir l’enseignement du français en seconde langue 22

3. Rénover des liens universitaires fragilisés 23

III.- LA QUESTION EUROPÉENNE EN FRANCE ET AU PORTUGAL 25

A. LE RÔLE DE L’ASSEMBLÉE DE LA RÉPUBLIQUE PORTUGAISE EN MATIÈRE EUROPÉENNE : UNE FORTE IMPLICATION 25

1. Le renforcement des pouvoirs de l’Assemblée en matière européenne depuis la loi du 25 août 2006 25

2. Le rôle de l’Assemblée portugaise durant la présidence de l’Union européenne 27

B. D’UNE PRÉSIDENCE À L’AUTRE : LES LEÇONS DE LA PRÉSIDENCE PORTUGAISE DE L’UNION EUROPÉENNE ET LES ATTENTES DU PORTUGAL À L’AUBE DE LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE 29

1. La présidence portugaise de l’Union européenne : un succès unanimement salué 29

2. Les attentes du Portugal vis-à-vis de la France : une attention « bienveillante » mais « vigilante » 30

C. L’EUROPE DES PARLEMENTS : RELANCER LE DIALOGUE INTERPARLEMENTAIRE FRANCO-PORTUGAIS 33

ANNEXE : PROGRAMME DE LA MISSION 35

CARTE

Carte du Portugal

Une délégation du groupe d’amitié France-Portugal, conduite par son président, M. Pierre Bourguignon, député (SRC) de Seine-Maritime, a été reçue à Lisbonne à l’invitation de l’Assemblée de la République portugaise du 11 au 15 mai 2008. La délégation était en outre composée de M. Loïc Bouvard député (UMP) du Morbihan, M. Marc Le Fur député (UMP) des Côtes-d’Armor, M. Georges Mothron député (UMP) du Val-d’Oise, M. Alain Néri député (SRC) du Puy-de-Dôme, M. Michel Lefait député (SRC) du Pas-de-Calais et M. Francis Hillmeyer député (NC) du Haut-Rhin.

Cette visite a été vivement appréciée par les députés portugais. En effet, bien que les deux pays soient historiquement liés par de forts liens culturels, économiques et humains, leur dialogue interparlementaire était quelque peu en sommeil. Ce voyage, préparé par de nombreux échanges individuels entre les deux présidents de groupe d’amitié, Mme Maria Carrilho et M. Pierre Bourguignon, a été l’occasion de relancer le dialogue entre nos deux Assemblées.


Le programme a comporté notamment :

- une visite du Lycée français Charles Lepierre et de l’Institut franco-portugais, qui abrite également l’Alliance française.

- un déjeuner à l’Ambassade de France à Lisbonne en présence des conseillers du commerce extérieur et de la mission économique, ainsi que d’entrepreneurs français au Portugal. Ce déjeuner a été précédé d’une rencontre avec M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, en visite à Lisbonne pour rencontrer son homologue portugais, M. José Vieira da Silva en vue de la présidence française de l’Union européenne.

- des entretiens de travail avec les commissions de l’Assemblée républicaine portugaise (commission du pouvoir local, de l’environnement et de l’aménagement du territoire, commission des affaires européennes, commission des affaires économiques, commission de l’éducation, des sciences et de la culture).

- des entretiens avec le président de l’Assemblée portugaise, M. Jaime Gama, et le secrétaire d’État aux affaires européennes, M. Manuel Lobo Antunes.

Le programme, élaboré conjointement par l’Assemblée portugaise et l’Ambassade de France à Lisbonne, a été en tout point remarquable, et les députés de la délégation ont été touchés par la chaleur de l’accueil qui leur a été réservé. La délégation tient à remercier particulièrement Mme Maria Carrilho, présidente du groupe d’amitié Portugal-France, pour son investissement dans la réalisation de cette mission ainsi que M. Denis Delbourg, ambassadeur de France, pour l’efficacité du personnel de l’Ambassade.

I.-  UNE ASSEMBLÉE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA VOIE DE LA RÉFORME

A. UN PARLEMENT MONOCAMÉRAL MARQUÉ PAR LE RÔLE PRÉPONDÉRANT DES COMMISSIONS

Le régime parlementaire portugais est monocaméral, en vertu de la Constitution adoptée le 2 avril 1976, après la « Révolution des Œillets ». L'Assemblée de la République (Assembleia de Republica) compte actuellement 230 députés dont quatre représentant les Portugais de l'étranger (deux pour l'Europe et deux pour le reste du monde). Selon les membres du groupe d’amitié Portugal-France, il est question d’augmenter le nombre de ces représentants. Les députés sont élus pour quatre ans par circonscription électorale, au scrutin de liste et selon le système de la représentation proportionnelle. Tout citoyen portugais majeur (plus de 18 ans) peut être député.

L'Assemblée de la République compte actuellement six groupes parlementaires. Les prochaines élections auront lieu en février 2009.

1. Le rôle essentiel des commissions dans la procédure législative

Le parlement portugais compte actuellement douze commissions spécialisées qui jouent un rôle essentiel dans la discussion et l’adoption des projets et propositions de loi (1).

Commission des affaires constitutionnelles, des droits, des libertés et des garanties

Commission du travail et de la sécurité sociale

Commission des affaires européennes

Commission de la défense nationale

Commission du budget et des finances

Commission des affaires étrangères

Commission du pouvoir local, de l'environnement et de l'aménagement du territoire

Commission de l'éducation, des sciences et de la culture

Commission des ouvrages publics, des transports et des communications

Commission des affaires économiques, de l'innovation et du développement régional

Commission de la santé

Commission de l'éthique

Des sous-commissions peuvent être créées au sein d'une commission, laquelle définit alors leur composition et leur domaine de compétence. Par exemple, existent actuellement la « sous-commission de la justice et des affaires pénitentiaires » au sein de la commission des affaires constitutionnelles ainsi que la « sous-commission de l'agriculture, du développement rural et de la pêche » et la « sous-commission du textile, de l’industrie et de l’automobile » au sein de la commission des affaires économiques, de l'innovation et du développement régional.

À la demande d'au moins dix députés, une commission ad hoc peut également être créée pour examiner un texte, « lorsque son importance ou sa technicité le justifie ». La commission déclarée compétente est chargée de nommer un rapporteur qui ne doit en principe pas être un député appartenant au groupe parlementaire à l'origine du projet ou de la proposition de loi examiné.

La procédure législative accorde un rôle prépondérant au travail en commissions. En effet, dès lors qu’un projet ou qu’une proposition de loi a été inscrit à l’ordre du jour, débute une discussion générale en séance plénière qui se termine par un vote général sur les grandes orientations du texte. L’examen détaillé du projet ou de la proposition de loi et son vote, article par article, ont lieu en commission.

La commission doit rendre son avis dans les trente jours suivant la transmission du texte. Elle peut demander une prorogation de ce délai au Président de l'Assemblée, par requête motivée. Il faut noter que l’avis publié sur le projet de loi est plus politique que technique et exprime la position du rapporteur et non de la commission. La commission saisie peut également présenter un texte alternatif au projet ou à la proposition de loi qu'elle examine. Dans ce cas, il est discuté en même temps que la proposition ou le projet de loi initial. La discussion détaillée a lieu en séance plénière lorsque le texte concerne certaines matières, en particulier la citoyenneté, le territoire portugais et son unité, le droit électoral applicable aux titulaires des organes de souveraineté, le referendum, les partis politiques ou la création de collectivités locales.

Les commissions constituent fréquemment des groupes de travail en leur sein, chargés de préparer la discussion détaillée des textes à examiner, dans lesquels tous les groupes parlementaires sont représentés. S'agissant du droit d'amendement, il s'exerce, pour l'essentiel, lors de l'examen du texte en commission, et plus rarement en séance plénière.

Le texte est ensuite adopté en séance plénière. Le vote n’est pas précédé d’un débat, mais les groupes parlementaires disposent de trois minutes pour s’exprimer. Il faut noter que dans le cadre de la réforme engagée au sein du Parlement, il avait été envisagé, en particulier par le parti socialiste et le parti social démocrate, de limiter encore davantage le temps d'examen en séance plénière, en réduisant le nombre des séances publiques de trois à deux par semaine. Cependant l’idée a été abandonnée.

La commission saisie au fond est chargée de la rédaction finale des textes adoptés. Tout en respectant l'intention du législateur, elle peut ainsi parfaire le plan et la « disposition générale » du texte, par une délibération à l'unanimité.

2. Le contrôle parlementaire : une fonction qui devrait à long terme se développer

Comme dans la majorité des régimes parlementaires, la Constitution de 1976 prévoit que la responsabilité du gouvernement peut être engagée au moyen du vote de confiance et de la motion de censure. Ainsi, une fois constitué, le gouvernement présente son programme devant l’Assemblée et peut, de même que tout groupe parlementaire, demander un vote de confiance. Par la suite et à tout moment, il peut déclencher une procédure de question de confiance, dont le rejet requiert la majorité simple des députés en fonction. Enfin, un groupe parlementaire ou le quart des députés en fonction peuvent déposer une motion de censure, qui si elle est adoptée à la majorité absolue, a pour effet la démission du gouvernement.

En séance publique, les députés disposent de trois instruments pour contrôler l’action gouvernementale : les questions, les interpellations et les débats.

- Les questions : on distingue les questions écrites, les questions orales, qui ont lieu tous les quinze jours, et les questions d’actualité. Il faut noter que la récente réforme de l’Assemblée a raccourci les temps de parole lors de ces questions, qui sont retransmises par les médias, afin de dynamiser les débats.

- Les interpellations : tout groupe parlementaire peut demander, deux fois par an, l’organisation d’un « débat d’interpellation » sur des questions générales ou sectorielles.

- Les débats : un « débat en présence du Premier ministre » a lieu la première semaine de chaque mois (un discours du Premier ministre est suivi de questions) ; un débat sur une « affaire d'importance nationale » peut être organisé à la demande du gouvernement ; enfin des débats sur la politique générale peuvent se tenir, à une date convenue entre le gouvernement et le Président de l'assemblée, au cours des dix dernières séances de la session législative. Les temps de parole au cours de ces débats ont été réduits dans le cadre de la réforme de l’Assemblée afin de les rendre plus dynamiques.

Enfin, le contrôle exercé par les commissions spécialisées tend, comme dans la majorité des pays européens, à se développer. Les commissions spécialisées disposent d’instruments similaires à ceux de l’Assemblée nationale dans la mise en œuvre du contrôle parlementaire. L’Assemblée peut également constituer des commissions d’enquête qui ont les mêmes pouvoirs que les institutions judiciaires, mais cet instrument est relativement peu utilisé à ce jour.

3. Des droits importants confiés à l’opposition

Sans que cela soit inscrit en tant que tel dans le règlement de l’Assemblée portugaise, plusieurs présidences de commissions sont confiées à des parlementaires issus de l'opposition. Ainsi, des membres de l'opposition président des commissions importantes (Commission du Budget et des Finances; Commission de l'éducation, des sciences et de la culture ; Commission des Affaires étrangères et des communautés portugaises; Commission des Travaux Publics, des Transports et des Communications) et détiennent de nombreuses vice-présidences.

Les députés de l’opposition participent à la fixation de l’ordre du jour et un certain nombre de propositions de lois présentées à leur initiative sont également discutées et adoptées chaque année.

Surtout, deux instruments originaux permettent aux parlementaires de l’opposition de s’exprimer: les groupes de travail constitués au sein des commissions pour préparer la discussion d’un texte et les propositions de loi alternatives dont la discussion peut accompagner la discussion de tout projet ou proposition de loi.

Enfin, depuis une récente réforme, un dixième des députés peut demander la création d’une commission d’enquête, ce qui fournit à la minorité l’occasion de s’exprimer.

B. LES RÉCENTES RÉFORMES DE L’ASSEMBLÉE : VERS PLUS DE TRANSPARENCE ET D’EFFICACITÉ DES TRAVAUX PARLEMENTAIRES

En juillet 2007, au terme de six mois de travaux et de réflexions, l’Assemblée portugaise a achevé un processus de réforme dont l’objectif était double : améliorer l’image publique du travail parlementaire et le rendre plus efficace.

La réforme comporte l’adoption d’un nouveau Règlement de l’Assemblée de la République, ainsi que la modification du Statut des députés, des conditions d’exercice du droit de pétition et enfin du formulaire des textes adoptés. L’Assemblée a également adopté des résolutions portant sur la création d’un groupe de travail pour l’élaboration d’un Code de bonnes pratiques et l’adoption de mesures d’efficacité énergétique, d’économie d’eau et de réduction progressive des émissions de CO2 à l’Assemblée de la République.

Il faut noter également le renforcement du rôle de l’Assemblée en matière européenne (cf. III A).

1. Des mesures en faveur de la transparence des travaux parlementaires

La diffusion des réunions des commissions parlementaires est devenue une règle. Tous les actes et documents dont la publication au journal officiel est obligatoire, ainsi que tous les documents dont la production et le traitement sont imposés par le Règlement de l’Assemblée de la République, sont désormais disponibles en temps réel sur le site Internet de l’Assemblée et aussi sur son Intranet. Les journalistes ont accès à tous les documents distribués à chaque réunion de commission, dès lors qu’ils ne comportent pas d’informations classées secrètes. Enfin les absences des députés sont retranscrites sur le site Internet de l’Assemblée.

2. Le renforcement des compétences des commissions en matière de contrôle

Selon la secrétaire générale de l’Assemblée de la République, « le renforcement des outils de contrôle politique consiste à mettre l’accent sur un domaine de compétence parlementaire dont l’importance ne cesse de croître et qui exige par conséquent une redéfinition de ses modalités d’exercice ».

Ainsi, les ministres sont désormais entendus par les commissions au moins quatre fois par session législative. Les groupes parlementaires ont le droit de demander la présence de membres du Gouvernement ou de dirigeants, fonctionnaires et contractuels de l’administration d’État.

Les commissions procèdent aussi à l’audition des personnes désignées aux fonctions dirigeantes des Autorités de régulation indépendantes et aux hautes fonctions de l’État, notamment les membres de l’Autorité de régulation des médias, du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et fiscaux, de la Commission nationale de protection des données personnelles et le Médiateur de la République (Ombudsman).

Le renforcement des compétences des commissions parlementaires s’est accompagné d’une modification de leurs règles de fonctionnement et de composition : le quorum de fonctionnement et de délibération des commissions est désormais fixé à la moitié de leurs membres en exercice.

3. Une attention particulière portée à l’environnement :

La réforme prévoit l’adoption de mesures relatives à l’efficacité énergétique, aux économies d’eau et à la réduction progressive des émissions de CO2.

En réalité, la résolution n’a fait qu’institutionnaliser des pratiques déjà existantes telles l’utilisation généralisée de papier recyclé, le recours aux ampoules à basse consommation, l’installation de capteurs de lumière dans les bureaux, les couloirs et les sanitaires, l’installation de robinets à débit contrôlé, le recyclage des lampes, piles, papiers et toners, ainsi que l’adoption de critères de sélection écologiques dans les marchés de fourniture de biens et de services.

Dans le même esprit, et à la suite de ces résolutions, l’Assemblée de la République a lancé un appel d’offres afin de doter son bâtiment principal, le Palais de São Bento, d’un système de climatisation solaire.

4. Une rationalisation des activités législatives

Pour chaque initiative législative, les services de l’Assemblée sont chargés d’élaborer une note technique dans un délai de 15 jours. Cette note comprend une analyse du cadre législatif et réglementaire existant, une présentation des autres initiatives en cours sur le même sujet (notamment au niveau européen), un aperçu historique des problèmes considérés et une analyse des conséquences prévisibles de l’adoption du texte concerné et des charges liées à son application.

Les commissions parlementaires ont ensuite trente jours, après la déclaration de recevabilité, pour rendre leur avis. Les propositions et projets de loi déclarés recevables doivent être obligatoirement examinés et votés en Assemblée plénière au cours des 18 réunions plénières qui suivent l’émission de l’avis par la commission parlementaire compétente au fond.

En aval du travail législatif, le suivi de l’application des lois a été renforcé. En plus de l’élaboration d’un rapport d’avancement relatif à l’entrée en vigueur des lois et à leur application, similaire au travail accompli par les commissions parlementaires de notre Assemblée, la Conférence des Présidents choisit parmi les lois adoptées celles qui doivent faire l’objet d’une analyse qualitative d’évaluation de leur contenu, de leurs moyens d’application et de leurs effets pratiques.

Toute commission parlementaire peut également demander un rapport de suivi qualitatif de la réglementation et de l’application d’une législation au rapporteur concerné ou à un autre de ses membres .

Il est encore trop tôt pour évaluer les conséquences de cette réforme. Néanmoins, comme l’indique le rapport du Groupe de travail sur la réforme du Parlement, « il n’y a pas de réformes parfaites et il est nécessaire de suivre de près les résultats politiques de ce processus et des changements introduits. Cette évaluation doit notamment se concentrer sur l’augmentation de la demande d’information et de la participation des citoyens aux activités parlementaires, sur la visibilité accrue de l’Assemblée de la République, sur son image auprès des citoyens, sur le degré de satisfaction des députés et sur l’impact financier, malgré les coûts maîtrisés des propositions, sur le budget de l’Assemblée de la République. »

II.-  L’ACTION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE DE LA FRANCE AU PORTUGAL : UNE INFLUENCE HISTORIQUE, DÉSORMAIS CONTESTÉE

A. L’ACTION CULTURELLE: LA NÉCESSITÉ DE S’APPUYER SUR UN RÉSEAU DYNAMIQUE

1. Alliances françaises et centres culturels : un réseau culturel dense à préserver

L’action de la France s’appuie sur l’existence d’un réseau culturel dense : on compte 14 alliances françaises au Portugal ce qui en fait un des pays les mieux dotés en Europe. À la différence du réseau du Goethe Institut ou du British Council, il s’agit d’établissements de droit local, ce qui constitue un atout, soutenus financièrement par le ministère des affaires étrangères. La mission des Alliances françaises et des centres culturels est triple : dispenser des cours de français, organiser des manifestations culturelles et offrir des ressources documentaires sur la France.

Depuis une décennie, le réseau culturel français doit faire face à des difficultés financières et mettre en oeuvre des efforts de restructuration. Entre 1999 et 2007, plus du tiers des établissements culturels ont été fermés en Europe (leur nombre est passé de 52 à 31).

Le Portugal n’a pas échappé à ce mouvement puisque le nombre d’Alliances françaises est passé de 30 à 14. La fermeture d’un centre peut avoir des effets négatifs en termes d’image mais surtout de baisse de l’enseignement du français. Le rôle des Alliances françaises est en effet primordial et le maintien de l’enseignement de la langue française dépend en grande partie du maintien de leurs activités.

À Lisbonne, l’Alliance française s’est efforcée de moderniser l’enseignement du français en proposant des formations ciblées aux entreprises. Par ailleurs a été mis en place un DELF scolaire (diplôme d’études en langue française). Ce diplôme vient sanctionner trois années d’apprentissage du français au collège à un prix très attractif par rapport au DELF classique. L’objectif de cet instrument est d’inciter les élèves à continuer ensuite le français au lycée ou à l’Alliance française. Le succès a été immédiat puisqu’une vingtaine d’établissements se sont portés candidats et que l’Alliance compte près de 2 000 inscrits au dispositif. Cette politique active permet d’enrayer la baisse de l’enseignement du français.

Autre illustration du rôle moteur des centres culturels et Alliances françaises, alors que le dispositif audiovisuel français a perdu de son importance au Portugal (l’ancienne station de radio Paris-Lisbonne n’effectue qu’une faible reprise de RFI), le cinéma reste un des principaux vecteurs de promotion de la culture française avec l’organisation chaque année d’une « festa » qui permet la projection d’une trentaine de films français dans cinq à six villes portugaises dotées d’Alliances françaises.

2. L’Institut franco-portugais de Lisbonne : le succès d’une structure originale

L’Institut français de Lisbonne, confronté à de graves difficultés financières, a fait preuve d’originalité et offre maintenant un exemple abouti de synergie au service de la diffusion de la culture française.

Créé en 1937 et installé initialement au Palais de Santos, l'Institut Français de Lisbonne est devenu l'Institut Franco-Portugais en 1984. Sa mission est de diffuser la langue et la culture française et d'être un lieu privilégié du dialogue franco-portugais et de la création contemporaine.

En 2004, l’Alliance française de Lisbonne était virtuellement en faillite et l’État lui a accordé une subvention exceptionnelle de 250 000 € pour assurer la couverture des indemnités dues en contrepartie de la cessation de 8 contrats de travail. En 2007, un plan de redressement a permis d’apurer la dette de l’Alliance, de payer un loyer, de reconstituer des fonds propres et de financer les activités culturelles de l’Institut.

L’Institut a ceci d’original qu’il abrite l'Alliance française, la nouvelle Librairie française et l'Institut culturel roumain (qui verse un loyer à l’Alliance française) au sein d’un même bâtiment. Il possède en outre une salle de spectacle, l'Auditorium Philippe Fridman, une médiathèque, des lieux d'accueil et d'exposition, une cafétéria. Cette concentration en un même lieu des institutions culturelles françaises à Lisbonne présente un double intérêt. Cela permet non seulement de réaliser des économies, mais également de créer des synergies entre différentes activités culturelles trop souvent cloisonnées.

L’action de l’Institut est particulièrement dynamique et sa fréquentation tend à s’accroître. À la veille de la présidence française de l’Union européenne, un certain nombre de manifestations sont prévues.

Sur le thème de la diversité linguistique, de nombreux évènements sont inscrits au programme. Un site Internet sur le multilinguisme a été lancé en partenariat avec l’Institut culturel portugais Camoes, le Parlement européen et le réseau Eunic qui regroupe les instituts culturels européens. Dans le cadre de la fête européenne des langues et des états généraux du multilinguisme, l’Institut organise un événement en partenariat avec la Sorbonne. Un colloque sur le thème « langue et pouvoir » est organisé par l’Ambassade et l’Eunic en marge de la réunion officielle des directeurs des institutions linguistiques des pays européens.

Une saison théâtrale présentera le Cid de Corneille, Hyppolyte de Robert Garnier, présenté au festival d’Avignon, et recevra le directeur du théâtre de la ville, M. Demarcy-Mota. Par ailleurs, la 9ème édition de la fête du cinéma portera sur le thème du dialogue interculturel et comportera l’intervention de nombreux réalisateurs.

Dans le domaine du livre, une manifestation réunira tous les centres culturels européens en vue de la promotion du livre jeunesse. Un colloque sur les bibliothèques numériques et une présentation de Gallica 2 par la BNF, en présence des représentants des syndicats nationaux de l’édition française, portugaise, allemande, italienne et espagnole, sont prévus.

B. L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR : FAIRE FACE À UNE CONCURRENCE ACCRUE

La présence d’une importante communauté portugaise en France et la francophilie d’une partie de la population portugaise ont permis de maintenir des liens linguistiques et éducatifs forts entre nos deux pays.

Le maintien de ces liens passe par trois vecteurs essentiels :

– la présence des lycées français : le Lycée Charles Lepierre à Lisbonne et l’École française Marius-Latour à Porto ;

– l’enseignement du français comme seconde langue au lycée ;

– les échanges scientifiques et universitaires entre nos deux pays.

Cependant, l’attrait du système anglo-saxon fait concurrence au système français et l’anglais s’impose peu à peu comme la première langue étrangère auprès des jeunes générations. Concurrence à laquelle il est difficile de faire face, compte tenu des moyens limités.

1. L’action des lycées français : faire face à la demande avec des moyens limités

Lors de leur visite du lycée français Charles Lepierre, les députés membres de la délégation ont pu constater que, malgré la concurrence du modèle anglo-saxon, la demande des familles demeure forte, preuve que le lycée français est encore synonyme d’enseignement de qualité. Cependant, les lycées peinent à y répondre tant leurs moyens matériels et financiers sont limités. Cette situation est d’autant plus regrettable que la scolarisation dans une école française peut être le prélude à des études supérieures en France. C’est là que se préparent les liens universitaires entre nos deux pays.

Ouvert en 1952, le lycée français Charles Lepierre est un établissement en gestion directe qui accueille 1752 élèves dont une partie significative de l’élite politique, économique et intellectuelle du pays. L’école compte 43 % de Français et 50 % de Portugais. Ce dernier pourcentage tend pourtant à baisser (il était en 2007 de 52 %). Parmi les Français, on compte de plus en plus de bi-nationaux.

De façon générale, la demande est forte et le lycée français peine à la satisfaire : pour la rentrée 2008 le lycée ne pourra accueillir que les enfants dont au moins deux frères ou sœurs ont été scolarisés dans l’établissement. Ainsi, certains enfants d’anciens élèves portugais ne pourront pas entrer au lycée ce qui est fortement préjudiciable, d’autant plus que le lycée français peut être une passerelle vers l’enseignement supérieur français (10 % des élèves portugais du lycée Charles Lepierre poursuivent leurs études en France. Ce chiffre pourrait d’ailleurs être augmenté).

Le protocole sur la coopération éducative signé le 10 avril 2006 proposait de « constituer un groupe de travail chargé d’élaborer un projet de double délivrance du diplôme de fin d’études secondaires portugais et du baccalauréat français. » afin de permettre l’accès à l’enseignement supérieur portugais des titulaires du baccalauréat passé au lycée français de Lisbonne, accordé depuis 2004 sur une base provisoire. L’accord sur l’accès à l’éducation supérieure des élèves du lycée Charles Lepierre a été pérennisé en octobre 2007, ce qui est une avancée positive.

Cependant le lycée doit faire face à trois problèmes majeurs : le manque de place, le coût des chantiers de rénovation et le retard en équipement. Ainsi, faute de capacité d’accueil, l’école maternelle satisfait à peine la moitié des demandes des familles portugaises. Il a même été envisagé de la délocaliser. De même, renforcer les effectifs du lycée pose un problème d’espace. Par ailleurs, l’équipement informatique est largement insuffisant. Enfin, la mise aux normes du lycée et les travaux d’entretien entraînent des coûts très élevés (plus de 4 millions d’euros d’ici 2009). Le proviseur envisage donc de proposer d’augmenter les frais de scolarité de 6 % pour faire face aux investissements nécessaires.

L’École Française de Porto appartient également au réseau des établissements français de l’étranger (AEFE). Créée en 1963, elle est gérée par l’Association Marius Latour, association de droit portugais qui a passé une convention avec l’AEFE. Elle compte aujourd’hui 776 élèves, chiffre en constante augmentation, dont 14 % d’élèves français. Suite à une active sensibilisation des familles par le Consulat Général de France à Porto et l’obtention de bourses de scolarité (2), 16 élèves boursiers ont été inscrits en 2008. Malgré la bonne santé financière actuelle de l’établissement, celui-ci ne pourra faire face seul à la demande croissante, les frais de scolarité devenant dissuasifs.

2. Promouvoir l’enseignement du français en seconde langue

À partir des années 1980, le français a perdu au profit de l’anglais sa place de première langue étrangère dans le système éducatif portugais. L'enseignement de la langue française concerne aujourd’hui près de 35 % de la population scolaire.

La promotion du français s’appuie essentiellement sur le protocole sur la coopération éducative du 10 avril 2006 qui établit « la perspective de développer une offre linguistique plurielle, permettant aux élèves français et portugais d’apprendre au moins deux langues étrangères tout au long de la scolarité primaire et secondaire ». Cette perspective est une avancée car jusqu’alors les Portugais refusaient d’envisager d’introduire une deuxième langue obligatoire au lycée. Ils faisaient valoir également que l’effort d’enseignement du portugais en France était insuffisant (alors que l’offre d’enseignement y est supérieure à la demande et que la France est le pays d’Europe où le portugais est le plus enseigné).

En application de ce protocole, 25 sections européennes de langue française ont été créées au Portugal depuis la rentrée 2006.

La France soutient également une politique de certifications françaises dans les Alliances françaises.

Enfin, une centaine de fonctionnaires portugais ont bénéficié d’une formation au français en vue de la présidence française de l’Union européenne.

3. Rénover des liens universitaires fragilisés

Les liens universitaires et scientifiques anciens entre la France et le Portugal ont tendance à s’émousser face à l’influence du modèle anglo-saxon.

À titre d’illustration, aujourd’hui seuls 10 % des élèves portugais du lycée Charles Lapierre poursuivent leurs études en France. Les autres intègrent soit des universités portugaises, soit des universités anglo-saxonnes.

Ainsi, en 2006, des accords ont été signés par le gouvernement portugais avec trois universités américaines prestigieuses (MIT, Austin et CMU). Il faut d’ailleurs noter que l’envoi d’étudiant portugais dans ces universités est financé par le ministère de l’éducation nationale portugais, lui-même financé par des fonds européens. La France, qui accueille un nombre non négligeable d’étudiants (3 300 en moyenne par an) et de chercheurs portugais doit donc intensifier ses relations avec les universités portugaises. Il faut saluer à ce titre l’organisation, dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, d’une réception qui sera organisée par l’Ambassade de France pour les ex-boursiers d’Erasmus en présence d’ambassadeurs des autres pays européens, en vue de promouvoir la mobilité européenne des étudiants.

III.-  LA QUESTION EUROPÉENNE EN FRANCE ET AU PORTUGAL 

La visite du groupe d’amitié France-Portugal a été saluée comme un événement dans la mesure où elle est intervenue à moins de deux mois du début de la présidence française de l’Union européenne et moins de six mois après la présidence portugaise. Le président du groupe a donc souhaité mettre l’accent sur les questions européennes lors de cette mission.

De riches échanges avec la commission des affaires européennes, présidée par le député socialiste Vitalino Canas, et le secrétaire d’État aux affaires européennes, M. Manuel Lobo Antunes, ont porté sur les raisons du succès de la présidence portugaise et les attentes du Portugal à la veille de la présidence française.

Les députés membres de la mission ont été particulièrement sensibles au rôle actif joué par l’Assemblée lors de la présidence portugaise, notamment par le biais d’une commission des affaires européennes aux pouvoirs étendus, et souhaitent que la France en tire tous les enseignements avant la PFUE.

A. LE RÔLE DE L’ASSEMBLÉE DE LA RÉPUBLIQUE PORTUGAISE EN MATIÈRE EUROPÉENNE : UNE FORTE IMPLICATION

1. Le renforcement des pouvoirs de l’Assemblée en matière européenne depuis la loi du 25 août 2006

Comme la majorité des pays européens, l’Assemblée portugaise est dotée d’une commission des affaires européennes. Composée de 33 membres, elle fut créée en 1980 (elle se nommait alors « commission pour l’intégration européenne ») en vue de l’adhésion du Portugal à l’Union européenne.

D’après les informations recueillies par la délégation, la commission des affaires européennes joue un rôle croissant auprès du gouvernement dans la participation du Portugal à la politique européenne. Elle se conçoit d’une part comme une plateforme chargée de diffuser au sein de l’Assemblée et auprès des citoyens toute information utile sur l’Union européenne, et d’autre part comme un organe de veille juridique à l’égard des projets de réglementation européenne.

La loi n° 43/2006 du 25 août 2006 est venue conforter et renouveler l'intervention du parlement en matière communautaire. En effet, désormais le gouvernement ne peut exprimer sa position sur un projet de texte communautaire sans avoir préalablement recueilli l'avis du parlement. Le cas échéant, la commission chargée des affaires européennes transmet préalablement les projets de textes aux commissions spécialisées, afin qu'elles les étudient et lui donnent leur avis. Le rapport de la commission pour les affaires européennes reproduit alors en annexe les avis de ces commissions spécialisées. Après son approbation par la commission, l'avis est soumis à l'Assemblée plénière pour y être discuté et voté, sauf s'il y a urgence motivée, auquel cas la délibération de la commission suffit.

Pour les textes communautaires de nature législative, les rapports peuvent aboutir à la rédaction et à l'adoption de résolutions soumises à l'assemblée plénière. Le parlement portugais peut désormais adopter une résolution visant à adresser aux Présidents du Parlement européen, du Conseil européen, de la Commission européenne et, le cas échéant, du Comité des régions et du Comité économique et social, un avis motivé si le principe de subsidiarité n'est pas respecté par un projet de texte communautaire qui lui a été transmis.

L’information du Parlement sur les questions européennes a également été améliorée. La commission des affaires européennes organise une réunion de travail avec le gouvernement à l'occasion de chaque Conseil européen ; la semaine qui le précède avec le Secrétaire d'État chargé des affaires européennes et la semaine qui suit avec le ministre des affaires étrangères. Des débats ont aussi lieu en séance plénière : après la fin du dernier Conseil européen de chaque présidence et pour la discussion et le vote du rapport annuel de l'assemblée sur la participation du Portugal à l'Union européenne. L'Assemblée de la République examine également la programmation financière de l'Union, notamment lors de l'examen annuel du budget de l'État, ainsi que les options du plan de développement régional, dans le cadre d'une procédure à laquelle participent les commissions et l'assemblée plénière.

Enfin, le parlement portugais participe à la sélection de certaines personnalités à des postes européens (juge de la Cour de Justice des Communautés européennes, juge du Tribunal de première instance, membre de la Cour des comptes). Les candidats proposés par le gouvernement sont en effet auditionnés avant leur nomination.

En raison de l’extension de ses compétences, la commission des affaires européennes devrait voir ses moyens humains renforcés au niveau des conseillers et administrateurs.

2. Le rôle de l’Assemblée portugaise durant la présidence de l’Union européenne

Selon les informations recueillies par la délégation, le rôle actif de l’Assemblée a sur bien des points contribué au succès de cette présidence.

La commission des affaires européennes a joué un rôle de chef de file dans l’organisation et la présidence de la réunion de la XXXVIIIème COSAC (3), précédée d’une réunion préparatoire avec les présidents de ces organes. Ses membres se sont réunis plusieurs fois avec les membres du gouvernement et le ministre des affaires étrangères, pour évoquer les thèmes de l’agenda de la présidence.

L’Assemblée a été un lieu de débat et de concertation tout au long de la présidence. De multiples réunions regroupant des membres des commissions des parlements nationaux ont été organisées autour de différents thèmes tels que justice et affaires intérieures, politique extérieure et de sécurité commune, relations entre l’Union européenne et l’Afrique, politique commune de sécurité et de défense, financement et ressources propres de l’Union européenne. Par ailleurs, pendant la Présidence ont eu lieu deux réunions conjointes des commissions des Parlements nationaux et du Parlement européen, coprésidées par les deux présidents des commissions spécialisées correspondantes, sur les thèmes de l’éducation et de l’immigration. Enfin, avant chaque conseil sectoriel, le ministre en charge du secteur est venu débattre en commission des différents sujets à l’ordre du jour.

L’Assemblée a enfin fait œuvre de pédagogie auprès de la population en créant notamment un site Internet dédié aux travaux de l’Assemblée durant toute la présidence portugaise. De nombreux colloques et conférences ont été organisés sur des thèmes européens en son sein.

Cette participation au déroulement de la présidence portugaise démontre le rôle essentiel que les parlements nationaux ont à jouer au côté de leur gouvernement et en contact avec le Parlement européen, dans l’élaboration des politiques européennes.

Lors de l’entretien accordé à la délégation, le président de l’Assemblée portugaise, M. Jaime Gama, s’est dit convaincu de la nécessité de mieux intégrer les parlements nationaux à l’élaboration des normes européennes. L’inscription du rôle des Parlements nationaux dans le traité de Lisbonne est à ce titre un progrès notable, là où le rôle des Parlements ne faisait l’objet depuis 1997 que d’un protocole annexé au traité d’Amsterdam. Cependant cette reconnaissance juridique n’est qu’un début. Il s’agit dans le futur de mieux intégrer les processus législatifs nationaux et européens. Cette intégration devra passer par un rapprochement des parlements nationaux et du Parlement européen. Pour cela, la présence de parlementaires nationaux au sein du Parlement européen pourrait être envisagée. M. Jaime Gama a également évoqué la possibilité de créer une deuxième chambre au niveau européen, qui ne serait pas élue au suffrage direct et représenterait les parlements nationaux. Un tel rapprochement est essentiel pour éviter les conflits qui naissent du chevauchement des pouvoirs et renforcer aux yeux des citoyens européens la légitimité démocratique de l’Union européenne.

Lors de la réunion avec la commission des affaires européennes de l’Assemblée, son président, M. Canas, regretté le rejet de la proposition de M. Lequiller visant à obtenir une représentation des parlements nationaux à la CIG sur le traité constitutionnel. Il a souligné le rôle « très attendu » que l’Assemblée nationale française devra jouer dans la préparation des 27 parlements nationaux à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

B. D’UNE PRÉSIDENCE À L’AUTRE : LES LEÇONS DE LA PRÉSIDENCE PORTUGAISE DE L’UNION EUROPÉENNE ET LES ATTENTES DU PORTUGAL À L’AUBE DE LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE

1. La présidence portugaise de l’Union européenne : un succès unanimement salué

L’entrée du Portugal dans la Communauté européenne, le 1er janvier 1986, douze ans après la Révolution des Œillets, a véritablement donné à ce pays un nouveau départ, lui permettant de connaître un développement économique fulgurant et de stabiliser son système politique. Depuis lors, le Portugal a multiplié les efforts pour être le « bon élève » de l’Union, et un membre à part entière de toutes les avancées de la construction européenne (Euro, espace Schengen). Sa présidence de l’Union européenne, en l’an 2000, a été marquée par des initiatives d’envergure, comme la stratégie de Lisbonne, destinée à faire de l’Europe « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde », et le premier sommet UE-Afrique au Caire.

La présidence portugaise de l’Union européenne au deuxième semestre 2007 a été saluée comme un succès par tous ses partenaires européens. 

– La priorité de la présidence était de résoudre la question institutionnelle. De ce point de vue, la signature du traité de Lisbonne constitue une réelle avancée et l’un des principaux acquis de la présidence portugaise. Le secrétaire d’État aux affaires européennes, M. Manuel Lobo Antunes, a d’ailleurs salué le rôle « moteur » joué par la France dans l’approbation du traité de Lisbonne sous présidence portugaise.

– Le sommet UE-Afrique a été un point phare de la présidence. Il a permis des rencontres bilatérales qui ont pu débloquer certaines situations, notamment entre la France et la Côte d’Ivoire. Il semble qu’Angela Merkel ait apporté son soutien à l’organisation de ce sommet, au nom des relations historiques entre le Portugal et d’autres pays européens avec l’Afrique.

– L’organisation d’un sommet stratégique UE-Brésil et la déclaration sur la globalisation figurent également parmi les apports de la présidence portugaise.

– Le Portugal s’est efforcé enfin d’activer la réalisation des objectifs de l’agenda de Lisbonne.

Selon les informations transmises à la délégation, la présence de M. José Manuel Barroso à la tête de la Commission européenne a considérablement contribué à la réussite de la présidence portugaise. Son dialogue avec M. José Socrates, le Premier ministre portugais, a été permanent et fructueux. Cette présidence a montré qu’il était non seulement possible mais indispensable de travailler en partenariat avec la Commission européenne. Son action médiatrice a permis de trouver des consensus sur de nombreux sujets.

Par ailleurs, pour dépasser les problèmes de la présidence unique, le Portugal a travaillé étroitement avec l’Allemagne et la Slovénie. Le travail remarquable de la chancelière allemande, Mme Angela Merkel, qui a préparé la présidence portugaise avec le plus grand soin et a contribué à fixer un mandat précis à cette présidence, a été salué par les personnalités rencontrées par la délégation.

2. Les attentes du Portugal vis-à-vis de la France : une attention « bienveillante » mais « vigilante »

Les priorités de la présidence française et les attentes du Portugal à l’égard de cette présidence ont été longuement évoquées lors d’un entretien particulièrement riche avec le secrétaire d’État aux affaires européennes et ancien secrétaire d’État à la défense M. Manuel Lobo Antunes. Échange d’autant plus intéressant que M. Manuel Lobo Antunes devrait bientôt prendre la tête de la représentation permanente du Portugal auprès des institutions européennes.

Lors de son entretien avec la délégation, M. Jaime Gama, président de l’Assemblée portugaise, a confié aux membres du groupe d’amitié que le programme de la présidence française de l’Union européenne ferait l’objet d’une attention « bienveillante » certes, mais « vigilante ». En effet les attentes des responsables politiques portugais sont grandes à l’égard de la France.

M. Manuel Lobo Antunes a affirmé que le Portugal soutenait pleinement les priorités annoncées de la présidence française en matière de défense, d’énergie, d’environnement, d’immigration, d’espace méditerranéen (notamment le projet d’Union méditerranéenne). Il a également insisté sur l’urgence de lutter contre « l’uniformisation progressive » des cultures. La France et le Portugal ont sur ce sujet une responsabilité commune.

En matière de défense, le secrétaire d’État a insisté sur le caractère éminemment « atlantique » du Portugal. De même, les députés de la commission des affaires européennes ont insisté sur la nécessité d’une politique de défense européenne forte mais qui soit complémentaire et non concurrente de l’OTAN. M. Lobo Antunes a formulé le vœu que la France et le Portugal apprennent à mieux travailler avec les États-Unis et le Royaume-Uni et poursuivent leur dialogue sur l’avenir de l’OTAN. En effet, la mise en place d’un « bras armé » de l’Europe, « dont les Américains comprennent de plus en plus la nécessité », ne pourra avoir lieu qu’à la condition de ménager une place à l’OTAN. Le secrétaire d’État a ajouté que l’OTAN constituait le seul forum de discussion euro-atlantique, outil précieux qui mérite d’être préservé.

M. Manuel Lobo Antunes a affirmé le vif intérêt du Portugal pour le projet d’Union méditerranéenne, adopté par le Conseil européen des 13 et 14 mars 2008. Il faut rappeler que le Portugal manifeste un intérêt croissant pour la Méditerranée. Il a soutenu la mise en place d'une politique euro-méditerranéenne ambitieuse ; il a coparrainé l’initiative de relance du processus de Barcelone et se montre très attentif à être associé à toutes les rencontres multilatérales et à toutes les initiatives sur la Méditerranée. Le secrétaire d’État a souligné cependant que la France devrait être attentive au fait que désormais certains pays comme l’Allemagne, la Pologne, la République Tchèque, pourraient, à raison, attendre que l’Europe « se tourne aussi vers l’Est ».

Dans le prolongement des réflexions sur le projet d’Union méditerranéenne, le secrétaire d’État a évoqué la question des relations de l’Union européenne avec la Turquie. Il règne au sein de la majorité socialiste un large consensus sur l’intégration de la Turquie au sein de l’Union européenne. Le secrétaire d’État a insisté sur la nécessité de répondre à une expectative créée de longue date et sur l’importance de créer des liens étroits avec la Turquie dans la lutte contre la menace terroriste.

Sur les questions d’immigration et d’intégration, le secrétaire d’État a admis qu’en raison d’un solde migratoire relativement peu élevé, le problème était au Portugal d’une importance moins « immédiate » qu’en France. Cependant, le Portugal veut défendre une approche « globale » et « réaliste », fondée sur le respect de la personne humaine et qui garantisse les conditions de développement des pays tiers. Le secrétaire d’État a confié que le Portugal espérait que « la France, pays des droits de l’homme, serait consciente de la dimension humaine des questions migratoires ».

En matière d’environnement et de questions énergétiques, le secrétaire d’État a rappelé que le Portugal avait développé des pratiques intéressantes dans le domaine des énergies renouvelables et portait un intérêt certain aux questions de réchauffement climatique. Les députés membres de la commission des affaires européennes ont émis le vœu que la présidence française prépare, dans le cadre du suivi de Bali, les conditions du succès de la conférence de Copenhague sur le réchauffement climatique qui aura lieu en décembre 2009 et doit actualiser, corriger et compléter les décisions prises à Kyoto. Le Portugal a, selon le secrétaire d’État, quelques difficultés dans la mise en œuvre des réductions d’émission CO2.

La réforme de la politique agricole commune a été évoquée lors de l’audition de la commission des affaires européennes de l’Assemblée. Le Conseil informel Agriculture, tenu sous présidence portugaise, aura marqué le début des discussions sur la réforme de la PAC et les nouvelles positions françaises en la matière. Les Portugais se sont dits prêts à soutenir la France dans la réforme de la PAC, vers une régionalisation des aides et un transfert du premier au deuxième pilier.

Enfin, le secrétaire d’État aux affaires européennes, tout comme le président de la commission des affaires européennes, a insisté sur la responsabilité française dans la bonne mise en œuvre du traité de Lisbonne qui entre en vigueur en janvier 2009. L’Assemblée portugaise attend que l’Assemblée nationale française, notamment par le biais de l’organisation de la COSAC, joue un rôle actif dans la préparation des parlements nationaux à cette échéance.

C. L’EUROPE DES PARLEMENTS : RELANCER LE DIALOGUE INTERPARLEMENTAIRE FRANCO-PORTUGAIS 

Si l’on excepte les rencontres individuelles des députés lors de réunions internationales et le dialogue entre les présidents des deux Assemblées, les relations interparlementaires entre la France et le Portugal étaient depuis longtemps en sommeil.

Le président de l’Assemblée portugaise n’a pas manqué de rappeler que la dernière visite du groupe d’amitié remontait à plus de dix ans et a encouragé les deux groupes à « intensifier leur coopération ».

Au cours d’une réunion de travail, les membres des deux groupes d’amitié ont ainsi exprimé le vœu d’entretenir des relations plus régulières, à l’image de leurs gouvernements respectifs.

En effet, au-delà de la présidence portugaise, qui a donné lieu à de nombreuses visites ministérielles, l’organisation depuis 2003 d’un séminaire intergouvernemental annuel autour d’un thème particulier a permis de relancer le dialogue entre la France et le Portugal sur nombre de sujets. En 2006, la réunion portait sur le thème de la compétitivité. À cette occasion ont été signés une déclaration sur la coopération dans les domaines de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi qu’un protocole sur la coopération éducative. Cette année, la réunion a porté sur le thème de la mer. Un accord sur la reconnaissance des diplômes et un accord sur la sécurité maritime ont été signés.

Comme l’ont constaté les membres de la délégation lors de l’audition des différentes commissions de l’Assemblée portugaise, nombreux sont les sujets bilatéraux sur lesquels la France et le Portugal auraient à échanger et sur lesquels une approche comparée serait riche d’enseignements.

Une réunion entre les membres des deux groupes d’amitié a permis d’identifier des thèmes de travail sur lesquels les députés ont convenu de se concentrer durant la législature: la valorisation des parlements nationaux dans l’Union européenne ; le renforcement de la coopération avec l’Afrique ; la question de l’espace méditerranéen ; la défense de la diversité culturelle et linguistique et enfin le développement durable.

De plus, la valorisation du rôle des parlements nationaux, désormais inscrite dans le traité de Lisbonne, appelle l’institutionnalisation des relations interparlementaires entre nos deux pays. Les représentations nationales devront en effet trouver les moyens d’exercer au mieux leurs prérogatives en matière européenne. Les membres du groupe d’amitié souhaitent faire de cette question une priorité lors de leurs prochains échanges.

Des rencontres interparlementaires entre membres des commissions pourraient être organisées régulièrement, en marge des réunions internationales. L’organisation de la prochaine réunion COSAC à Paris fournira l’occasion d’approfondir ces réflexions.

Enfin, le groupe d’amitié France-Portugal souhaite pouvoir accueillir très prochainement une délégation portugaise à l’Assemblée nationale.

ANNEXE : PROGRAMME DE LA MISSION

Dimanche 11 mai

14 h 35 – Arrivée à Lisbonne – Accueil par Mme Maria Carrilho, présidente du Groupe d’Amitié

20 h 00 – Dîner offert par Mme Maria Carrilho présidente du Groupe d’amitié Portugal – France

Lundi 12 mai

10 h 15 – Visite du Lycée français Charles Lepierre

11 h 30 – Visite de l'Institut Franco-Portugais

13 h 15 – Déjeuner à la Résidence, avec les Conseillers du Commerce extérieur et la Mission économique en présence de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et des solidarités.

16 h 00 –  Visite du Monastère des Hiéronymites et de la Collection Berardo

19 h 00 – Idoménée de Mozart à la Fondation Gulbenkian

Mardi 13 mai

10 h 30 – Visite à Cascais

12 h 30 – Déjeuner dans la zone du « Guincho », dans les environs de Cascais

15 h 00 – Réunion avec la Commission du gouvernement local, de l'environnement et de l'aménagement du territoire

16 h 00 – Réunion avec le Groupe parlementaire d’amitié Portugal-France

18 h 00 – Réunion avec la Commission des Affaires européennes

20 h 00 – Dîner buffet offert par l’Ambassade de France au Palais de Santos.

Mercredi 14 mai

10 h 30 – Réunion avec la Commission de l’Éducation et de la Science

12 h 00 – Réunion avec la Commission des affaires économiques, de l’innovation et du développement régional

13 h 00 – Déjeuner offert par le Groupe parlementaire d’amitié Portugal-France au Restaurant du nouveau bâtiment parlementaire

15 h 30 – Visite guidée du Palais de São Bento

17 h 00 – Assistance à la Séance plénière

17 h 30 – Audience avec le Président de l’Assemblée de la République

20 h 00 – Dîner offert par Mme Maria Carrilho présidente du Groupe d’amitié Portugal – France

Jeudi 15 mai

10 h00 – Réunion avec M. Manuel Lobo Antunes, Secrétaire d'État aux Affaires européennes

14 h 00 – Départ pour l’aéroport

Rapport d’information du groupe d’amitié France-Portugal, suite à la mission effectuée du 11 au 15 mai 2008

© Assemblée nationale

1 () Pour une analyse détaillée de la procédure législative, voir le rapport d'information n° 418 (2006-2007) de MM. Patrice GÉLARD et Jean-Claude PEYRONNET, fait au nom de la commission des lois et de la mission d'information de la commission des lois du Sénat, déposé le 25 juillet 2007 « L'expérience des parlements nationaux au sein de l'Union européenne : une source d'inspiration pour la modernisation du Sénat. Les exemples luxembourgeois, belge, portugais, grec, tchèque, autrichien et slovaque ».

2 () Les frais annuels de scolarités s’élèvent à 3 222€ en maternelle, 3 144 € en primaire et 3 426€ au collège.

3 () Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires et européennes des Parlements de l’Union européenne