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N° 697

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 février 2008.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,

FAMILIALES ET SOCIALES

En conclusion des travaux de la mission
sur
les agences régionales de santé

ET PRÉSENTÉ

par M. Yves Bur,

Député.

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INTRODUCTION 9

I.- UN CONSTAT PARTAGÉ : DU FAIT DE SON ORGANISATION CLOISONNÉE, NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PRÉSENTE UN MANQUE D’EFFICIENCE PRÉOCCUPANT POUR L’ÉTAT DE SANTÉ DES FRANÇAIS 11

A. NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PRÉSENTE UN MANQUE D’EFFICIENCE PRÉOCCUPANT : IL NE PERMET PLUS D’OFFRIR AUX PATIENTS LA MEILLEURE PRISE EN CHARGE AU MEILLEUR COÛT 11

1. La réponse aux besoins de santé des Français n’est pas organisée de la façon la plus efficace 11

a) L’offre de soins n’est pas suffisamment maîtrisée pour assurer l'égal accès aux soins de tous les patients 11

b) Le parcours de soins du patient manque de fluidité 17

c) La prévention reste le parent pauvre du système de santé 19

2. Le coût de notre système de santé est mal contrôlé et sa croissance est difficilement soutenable 21

a) Notre système de santé a un coût élevé, auquel contribue son « hospitalo-centrisme », et mal maîtrisé, notamment pour les dépenses de soins de ville 22

b) La croissance des dépenses de santé n’est pas soutenable sans gains d’efficience 23

B. L’ORGANISATION CLOISONNÉE DU PILOTAGE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ ET LA MAUVAISE RÉPARTITION DES RESPONSABILITÉS ENTRE L’ÉTAT ET L’ASSURANCE MALADIE ENGENDRENT DES PERTES D’EFFICIENCE 24

1. Cloisonné, le pilotage de notre système de santé complique la mise en œuvre des politiques de santé et ne permet pas de structurer efficacement une prise en charge globale du patient 25

a) Le système territorial de santé est organisé « en tuyaux d’orgue » et piloté en double commande par l’État et l’assurance maladie, parfois de façon divergente 25

b) Le cloisonnement des secteurs et la multiplication des structures compliquent la mise en œuvre des politiques de santé 30

c) Le cloisonnement des compétences ne permet pas d'organiser le système de santé de façon globale et cohérente 33

2. Le cloisonnement des acteurs et l’enchevêtrement des compétences engendrent des pertes d’efficience et ne permettent pas de réguler efficacement les dépenses de santé 34

a) Au niveau territorial, le pilotage cloisonné de notre système de santé engendre des pertes d’efficience 34

b) Au niveau national, l’enchevêtrement des compétences de l’État et de l’assurance maladie ne permet pas une régulation efficace des dépenses de santé 39

II.- L’ENJEU DE LA RÉFORME EST TRIPLE : RENDRE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PLUS LISIBLE, PLUS EFFICACE ET PLUS EFFICIENT 43

A. REDONNER DE LA LISIBILITÉ À NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ 43

1. Illisible pour les usagers, voire pour les acteurs eux-mêmes, d’où une dilution des responsabilités, le pilotage du système de santé doit être simplifié 43

2. Pour des structures nouvelles, contre des structures supplémentaires 44

a) L’unification du pilotage territorial du système de santé gagnera en crédibilité si elle n’est pas mise en œuvre par un élargissement des missions de l'une des structures existantes 44

b) Pour éviter d’aggraver la sédimentation des structures territoriales de pilotage du système de santé, la création de nouvelles structures devra avoir pour corollaire la suppression des structures existantes 44

B. RENFORCER L’EFFICACITÉ DES POLITIQUES DE SANTÉ 45

1. Les politiques de santé doivent agir plus efficacement sur les déterminants de santé et garantir l'égal accès aux soins 45

a) La santé publique doit « irriguer » toutes les politiques publiques, à commencer par les politiques de santé. 45

b) L’offre de soins doit être maîtrisée, pour garantir l’égalité de tous dans l’accès aux soins. 45

2. Le pilotage du système de santé doit reposer sur une culture d'objectifs, de résultat et d'évaluation 46

C. AMÉLIORER L’EFFICIENCE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ POUR ASSURER SA SOUTENABILITÉ 47

1. Garantir la soutenabilité de notre système de santé constitue le premier enjeu de nos politiques de santé 47

2. Le pilotage du système de santé devra exploiter des marges de productivité dans ce système 47

3. Le pilotage territorial du système de santé doit pour cela mettre tous les acteurs en situation de responsabilité dans la recherche d’une efficience accrue 49

III. – RECONFIGURÉ AUTOUR DES AGENCES RÉGIONALES DE SANTÉ (ARS), LE PILOTAGE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ DOIT ÊTRE DÉCLOISONNÉ ET RESPONSABILISÉ 51

A. POUR UNE ORGANISATION EFFICIENTE ET DÉCLOISONNÉE DE LA RÉPONSE AUX BESOINS DE SANTÉ DES FRANÇAIS, LES ARS DOIVENT AVOIR UN LARGE PÉRIMÈTRE DE COMPÉTENCES 52

1. Les ARS devront, au minimum, organiser conjointement l’offre de soins ambulatoires et hospitaliers 52

a) Charger les ARS de piloter à la fois l’offre de soins de ville et l’offre de soins hospitaliers permettra d’exploiter mieux qu’aujourd’hui les complémentarités qui existent entre la ville et l’hôpital dans la réponse aux besoins de santé 52

b) Compétentes pour organiser conjointement l’offre de soins ambulatoires et hospitaliers, les ARS pourront contribuer à rééquilibrer l’offre de soins au profit des soins ambulatoires et à résoudre la « crise des soins primaires » 54

2. La politique régionale de santé publique gagnerait à être organisée conjointement avec l’offre de soins 55

a) Mieux articulée avec l’offre de soins, la politique de santé publique serait plus efficace 55

b) Certains craignent toutefois que les ARS délaissent la politique de santé publique au profit de l’organisation de l’offre de soins et que la politique de santé publique soit coupée de ses relais interministériels 57

c) Les ARS peuvent être organisées de façon à éviter ce risque 57

d) Il ne faut pas écarter l’idée de confier aux ARS la santé environnementale et la santé au travail, voire la santé scolaire 61

3. L’implication des ARS dans le pilotage de certains établissements médico-sociaux, en lien avec les conseils généraux, contribuerait à fluidifier le parcours des patients et faciliterait les restructurations 62

a) Un pilotage conjoint du secteur sanitaire et d’une part du secteur médico-social contribuerait à fluidifier le parcours de soins, favoriserait les filières et les réseaux de santé et faciliterait les restructurations hospitalières 62

b) Il faudra cerner avec précision les établissements et services médico-sociaux qu’il est pertinent de piloter conjointement avec l’offre de soins et la prévention 64

c) Certains acteurs plaident en faveur d’une intégration différée du secteur médico-social au périmètre des ARS, pour laisser à ce secteur le temps de se restructurer 65

d) Au contraire, les ARS pourraient simplifier le pilotage du secteur tout en garantissant le respect de ses spécificités 67

4. Le périmètre de compétence des ARS pourrait utilement intégrer les activités de veille et de sécurité sanitaires 68

a) Certains estiment que les activités de veille et de sécurité sanitaires n’ont pas leur place dans le périmètre de compétence des ARS, du fait de leur caractère régalien et de leur « cinétique rapide » 68

b) Au contraire, confier aux ARS les compétences des DDASS, des DRASS, des ARH et des CIRE en matière de veille et de sécurité sanitaire permettrait d’optimiser les moyens qui y sont consacrés 69

5. Confier ou non la gestion du risque aux ARS relève d’un choix stratégique fondamental quant à l’organisation de notre système de santé 71

a) Premier scénario : la voie unitaire, suivant laquelle une seule structure, l’ARS, serait chargée à la fois de l’organisation de l’offre de soins et de la régulation des dépenses de santé 73

b) Second scénario : la voie du dialogue entre une ARS chargée d’organiser l’offre de soins et la politique de santé publique d’une part, et une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM) régulatrice des dépenses de santé d'autre part 76

B. QUEL QUE SOIT LE SCHÉMA RETENU POUR SON PILOTAGE RÉGIONAL, LE SYSTÈME DE SANTÉ NE POURRA PAS ÊTRE PILOTÉ EFFICACEMENT SANS OUTILS NOUVEAUX 78

1. Les outils de planification de l’offre de soins et de programmation des politiques de santé doivent être rénovés, mis en cohérence et enrichis 79

a) Charger les ARS de mettre en cohérence les différents schémas d’organisation, voire les fusionner, et établir des procédures d’élaboration coordonnées et partagées 79

b) Laisser aux ARS des marges de manœuvre financières et organisationnelles 80

c) Développer de nouveaux outils pour favoriser l’adéquation de l’offre de soins aux besoins de santé 82

2. Il faut de nouveaux outils au service de l’efficience du système de santé 85

a) L’ARS, dans sa fonction d’organisation de l’offre de soins, devra disposer d’outils lui permettant de promouvoir des organisations efficientes et de suivre la performance des producteurs de soins 85

b) Le régulateur de l’offre de soins doit mettre en œuvre la politique tarifaire fixée au niveau national et développer un programme inter-régimes de gestion du risque élaboré en lien avec l’ARS 86

3. Les ARS devront s’appuyer sur des systèmes d’information exhaustifs 88

a) Le foisonnement et le cloisonnement qui caractérisent l’offre de systèmes d’information en santé compliquent le pilotage du système de santé et engendrent des pertes d’efficience 88

b) La réforme du pilotage régional du système de santé doit passer par une meilleure maîtrise de l’offre de systèmes d’information en santé 92

C. LA GOUVERNANCE TERRITORIALE DU SYSTÈME DE SANTÉ DOIT AVANT TOUT GARANTIR L’EFFICACITÉ OPÉRATIONNELLE DE SON PILOTAGE, EN COHÉRENCE AVEC LES MISSIONS ASSIGNÉES À CHAQUE ACTEUR 94

1. La gouvernance territoriale du système de santé devra s’appuyer sur un organe de démocratie sanitaire renforcée 94

a) Les actuelles conférences régionales de santé (CRS) doivent être dynamisées 94

b) De même, les conférences territoriales de santé doivent être renforcées 96

c) La représentation des professionnels de santé pose cependant des problèmes 97

d) Le renforcement de la démocratie sanitaire passe surtout par un rôle accru des élus dans la gouvernance territoriale du système de santé 98

2. La gouvernance des ARS, leur statut et leur organisation doivent être cohérents avec les fonctions qui lui sont confiées 100

a) Le statut de l’ARS doit permettre à sa direction d’avoir une autorité fonctionnelle sur ses personnels, à la différence de l’ARH, ce qui plaide pour un statut d’établissement public administratif plutôt que de GIP 100

b) L’organisation des ARS doit prendre en compte la réalité territoriale et les spécificités des secteurs entrant dans son périmètre 102

c) Pour être efficace, l’exécutif de l’ARS doit être resserré, légitime, stable et responsable 103

d) Une instance intermédiaire de concertation, de suivi et de surveillance serait utile entre l’exécutif de l’ARS et la conférence régionale de santé 106

3. La reconfiguration du réseau de l’assurance maladie sera plus ou moins complexe selon que l’on choisit d’intégrer tout son échelon régional aux ARS ou de constituer une direction régionale de l’assurance maladie chargée de la régulation des dépenses de santé 108

a) Le transfert de la gestion du risque aux ARS aurait pour corollaire l’intégration aux ARS d’une large part des structures régionales de l’assurance maladie 108

b) Face à une ARS aux missions centrées sur l’organisation de l’offre de soins, l’assurance maladie serait conduite à parachever la structuration d’un vrai pôle régional, avec une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM) 108

c) Pour être plus efficiente, l’assurance maladie devrait en outre envisager de recomposer son réseau en regroupant les caisses infradépartementales et en mutualisant autant que possible les capacités de production 110

D. QUELLE QUE SOIT L’ORGANISATION RETENUE POUR LE PILOTAGE RÉGIONAL DU SYSTÈME DE SANTÉ, CELUI-CI NE POURRA PAS ÊTRE EFFICACE SI LE PILOTAGE NATIONAL DU SYSTÈME N’EST PAS RÉORGANISÉ EN CONSÉQUENCE 110

1. Si la gestion du risque est confiée aux ARS, il parait indispensable d’unifier complètement le pilotage national du système de santé, avec une véritable Agence nationale de santé 111

a) L’unification du pilotage national du système de santé est le corollaire de la création d’ARS compétentes en matière de gestion du risque 111

b) Plusieurs organisations sont possibles pour garantir la cohérence du pilotage national d’un réseau d’ARS cumulant les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation des dépenses de santé. 112

2. Si l’on prend le parti de séparer les fonctions de régulation des dépenses de santé (remboursement avisé) et d’organisation de l’offre sanitaire, médico-sociale et de prévention (planification) à l’échelon régional, il suffira à l'échelon national de clarifier la répartition des compétences entre l'État et l'assurance maladie 115

a) Le recentrage de l’assurance maladie sur ses fonctions de régulation conduirait à sortir du champ conventionnel certains dispositifs qui n’en relèvent pas par nature 115

b) Pour réguler efficacement le système de santé, l’autorité investie d’une fonction de remboursement avisé des soins doit disposer des outils nécessaires à l’exécution de sa mission de gestion des enveloppes de l’ONDAM 116

c) Un dialogue doit être organisé au niveau national entre l’État et l’UNCAM, par exemple au sein d’un Conseil d’orientation stratégique du système de soins 118

3. Quelle que soit l’organisation retenue pour les ARS et leur pilotage national, une attention particulière devra être portée à la conduite de la réforme 118

CONCLUSION DES TRAVAUX DE LA MISSION 121

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR 125

CONTRIBUTIONS DES MEMBRES DE LA MISSION 127

TRAVAUX DE LA COMMISSION 143

ANNEXE N° 1 : Composition de la mission 149

ANNEXE N° 2 : Liste des personnes auditionnées 151

ANNEXE N° 3 : Nature, nombre, capacités, financement et tutelle des établissements et services sociaux et médico-sociaux 159

ANNEXE N° 4 : Activités de veille et de sécurité sanitaire des DDASS et DRASS et effectifs qui y sont consacrés 161

ANNEXE N° 5 : Pilotage des établissements hébergeant des personnes âgées 163

ANNEXE N° 6 : Glossaire 165

INTRODUCTION

La plupart des acteurs du système de santé partagent le même constat : du fait de son organisation « en tuyaux d’orgue », marquée par des cloisonnements entre des secteurs pourtant interdépendants – la prévention, la médecine de ville, l’hôpital, le secteur médico-social –, notre système de santé présente un manque d’efficience préoccupant pour l’état de santé des Français. En effet, il ne permet plus d’offrir aux patients la meilleure prise en charge au meilleur coût, car son organisation est éclatée et les responsabilités mal réparties entre l’État et l’assurance maladie.

C’est pourquoi le Gouvernement envisage d’unifier le pilotage régional du système de santé autour d’agences régionales de santé (ARS) : un pilotage décloisonné du système de santé doit permettre des gains d’efficience. La mission d’information sur les ARS constituée au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a été associée à la préparation de cette réforme, en amont de sa phase législative, au sein du comité de pilotage constitué à cet effet par le ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, ce qui mérite d’être salué.

Le présent rapport constitue donc une contribution de la mission d’information aux réflexions en cours sur l’organisation, les missions, le statut et les outils opérationnels des ARS ainsi que sur leur articulation avec les autres acteurs du système de santé. Il ressort notamment des travaux de la mission que l’unification du pilotage régional du système de santé, pour justifiée qu’elle soit, ne permettra pas de gains d’efficience sans un pilotage national du système de santé moins éclaté qu’aujourd’hui.

Il doit en effet y avoir une profonde cohérence entre l’organisation des ARS et la répartition générale des compétences entre l’État et l’assurance maladie, notamment en matière de régulation des dépenses de santé. Dès lors, le présent rapport décrit les deux principaux scénarios de réforme envisageables :

– soit les ARS cumulent les fonctions de planification de l’offre de soins et de régulation des dépenses de santé, intégrant les services compétents de l’assurance maladie : cela simplifierait radicalement le pilotage du système, au risque que les ARS soient accaparées par leur activité de planification au détriment de la recherche des gains d’efficience ;

– soit les ARS se concentrent sur les fonctions d’organisation de la prévention et de l’offre de soins, en dialogue avec un organe régional de l’assurance maladie aux missions recentrées sur la régulation des dépenses.

I.- UN CONSTAT PARTAGÉ :
DU FAIT DE SON ORGANISATION CLOISONNÉE, NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PRÉSENTE UN MANQUE D’EFFICIENCE PRÉOCCUPANT POUR L’ÉTAT DE SANTÉ DES FRANÇAIS

S’il est un consensus parmi les acteurs du système de santé, c’est pour refuser le statu quo, marqué par une mauvaise répartition des rôles entre l’État et l’assurance maladie ainsi que par le cloisonnement des compétences et des institutions.

A. NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PRÉSENTE UN MANQUE D’EFFICIENCE PRÉOCCUPANT : IL NE PERMET PLUS D’OFFRIR AUX PATIENTS LA MEILLEURE PRISE EN CHARGE AU MEILLEUR COÛT

Malgré des dépenses élevées et en forte croissance, notre système de santé n’est pas toujours efficace.

1. La réponse aux besoins de santé des Français n’est pas organisée de la façon la plus efficace

Notre système de santé présente notamment trois insuffisances reconnues par tous les acteurs : l’offre de soins n’est pas suffisamment maîtrisée pour assurer l’égal accès aux soins de tous les patients, le parcours de soins manque de fluidité, et la prévention reste le parent pauvre du système de santé.

a) L’offre de soins n’est pas suffisamment maîtrisée pour assurer l’égal accès aux soins de tous les patients

Le programme de qualité et d’efficience (PQE) « maladie » annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2008, qui présente les orientations stratégiques de notre système de santé, fixe comme objectif n° 1 « l’égal accès aux soins ». Pour atteindre cet objectif, il faudrait maîtriser mieux qu’aujourd’hui l'offre de soins, ambulatoires comme hospitaliers.

● Le niveau de l’offre de soins de ville, sa structure, sa répartition territoriale et ses modes d'organisation ne sont pas bien maîtrisés.

Dans son rapport annuel 2007, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) montre que « la baisse du potentiel démographique médical, la croissance attendue du nombre de recours, auxquels s’ajoutent des déséquilibres démographiques persistants pourraient rendre l’équilibre offre/demande de plus en plus difficile à atteindre ».

Cette baisse du potentiel démographique médical est due à la réduction du nombre de postes offerts aux étudiants à l’issue de la première année des études de médecine (numerus clausus) à partir du début des années 1980 et jusqu’à la fin des années 1990. Selon le rapport 2005 de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) (1), cette réduction « inconsidérée » explique que le nombre de médecins entrés en activité – à peu près égal au numerus clausus avec un décalage d’environ dix ans, compte tenu de la durée des études médicales – soit actuellement à son niveau le plus bas, alors qu'en parallèle, le nombre de médecins cessant leur activité devrait augmenter fortement dans les années à venir, les promotions ayant bénéficié d’un numerus clausus élevé, ou n’y étant pas encore soumises, arrivant à l’âge de la retraite. Certes, le numerus clausus a été porté à 7 000 places environ depuis 2006, mais il faudra attendre 2016 pour que le nombre d’installations croisse plus rapidement que celui des cessations d'activité, et 2025 pour que ces nombres s’équilibrent.

On prévoit donc une baisse du nombre total de médecins en activité et de la densité médicale entre 2006 et 2025 – cf. graphique ci-dessous.

ÉVOLUTION DU NOMBRE ET DE LA DENSITÉ DE MÉDECINS DE 1985 À 2025

Source : ONDPS, rapport 2004, tome 2

L’adéquation entre l’offre et la demande de soins est d’autant moins assurée que selon les analyses du HCAAM, la demande risque de croître, car le vieillissement de la population, son niveau d’exigence en matière sanitaire et l’évolution des modes de prise en charge des patients ont profondément modifié les besoins de santé des populations, comme le montre un récent rapport sur la démographie médicale (2). Le nombre de médecins disponibles pour faire face à 10 000 recours passerait ainsi de 4,3 aujourd’hui à 3,3 en 2025.

Le Haut Conseil souligne d’ailleurs que la densité médicale constitue un indicateur « très frustre » pour apprécier l’offre médicale : il faut aussi tenir compte de l’intensité du travail des praticiens, ainsi que de leur répartition par spécialités et par territoires.

Or, comme l’a montré notre collègue M. Georges Colombier dans un récent rapport d’information (3), si sur ce point les effets de la féminisation de la profession sont discutés, il est établi que les jeunes générations de médecins ont « un nouveau rapport au temps et au rythme de travail », qui va dans le sens d’une diminution de l’offre de soins.

De plus, la répartition des médecins par spécialités, mal maîtrisée, présente des déséquilibres. En effet, il ressort des analyses précitées de l’ONDPS et du HCAAM que la formation des médecins en centre hospitalier universitaire (CHU) a pour inconvénient de ne leur faire connaître qu’un mode d’exercice très spécialisé, très encadré et marqué par une grande technicité, ce qui les conduit à délaisser certaines spécialités : la médecine interne, la chirurgie, l’anesthésie, l’obstétrique et surtout la médecine générale, qui est, avec la médecine du travail, la dernière spécialité choisie par les étudiants ; 40 % des postes proposés en médecine générale n’ont pas été pourvus en 2005.

Ce biais est aggravé par le mode de répartition des internes, qui ne permet pas de maîtriser la ventilation des futurs médecins spécialistes car dans la plupart des régions, le nombre de postes ouverts est supérieur à celui des internes. Un récent rapport de la Cour des Comptes (4) montre que cette marge de manœuvre représente 10 à 15 % des postes, ce qui « donne de la souplesse aux internes mais empêche toute régulation fine ». La mission a pu observer que ce taux d’inadéquation atteint 20 % dans certaines régions, comme en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Le rapport 2005 précité de l’ONDPS en conclut que « la répartition des internes par filière et par région ne s’appuie pas de façon évidente sur des critères qui tiennent compte à la fois des besoins de santé et des données démographiques », mais qu’« elle est plus une réponse aux lobbies ».

Enfin, la démographie médicale est marquée par d’importants déséquilibres géographiques. Au cours de ses travaux, notamment de ses déplacements en Bourgogne et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, la mission a pu constater que si le nombre total de médecins et la densité médicale moyenne sont encore satisfaisants, les disparités de répartition entre régions (cf. carte ci-dessous) et, au sein même des régions, entre les départements, les zones rurales et les agglomérations, voire les quartiers, sont « parfois criantes », comme l’affirme le rapport précité du HCAAM. À l’échelle infrarégionale, les disparités sont encore plus importantes et difficiles à cerner. La mission a pu constater ainsi que même une région bien dotée en offre de soins comme la région Provence–Alpes–Côte d’Azur peut comprendre des zones de « désertification médicale ».

Le Haut conseil précise que c’est « exactement la même disparité de densité médicale que celle qui prévalait au début des années 1970 », ce qui témoigne de l’absence de politique efficace en matière d’installation des omnipraticiens. Mais si ces disparités n’ont pas posé de problème dans l’accès aux soins en période de croissance générale de la démographie médicale, il n’en sera pas de même en période de baisse de la densité médicale, notamment dans les zones du territoire déjà sous-médicalisées, où le remplacement des médecins en place, relativement âgés, n’est pas assuré, comme dans certains cantons du Morvan étudiés par la mission lors de son déplacement en Bourgogne.

Cependant, le ciblage des zones déficitaires en offre de soins semble malaisé. En 2004, l’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) a analysé les disparités d’offre de soins à l’échelle du canton, identifiant ainsi 86 cantons en difficulté sur 3 263 (soit 1,6% de la population). Dans ces cantons, les généralistes libéraux doivent compenser leur faible densité par une forte activité. En 2005, les caisses d’assurance maladie ont procédé à une nouvelle analyse de ces inégalités à l’échelle des « zones de recours », c’est-à-dire des bassins d’attraction des généralistes. Sur 7 442 zones de recours métropolitaines, 119 « zones en difficulté » (0,6 % de la population), et 524 « zones fragiles » (3,5 % de la population) ont été identifiées (cf. tableau ci-dessous). Dans les zones en difficultés, 88 % des généralistes effectuent plus de 7 500 actes par an, contre 14 % sur l’ensemble du territoire.

DISPARITÉS ENTRE « ZONES DE RECOURS »

 

ensemble

zones sans problème

zones fragiles

zones en difficulté

nombre de zones concernées

7442

6799

524

119

population concernée

59 518 395

56 099 678

2 042 266

376 451

Nombre moyen d'habitants

7863

8251

3897

3163

densité médicale moyenne de la zone

4,9

5,1

3,1

2,6

nombre d'actes moyen par généraliste

5 033

4 995

8 486

8 868

part de généralistes effectuant plus de 7 500 actes par an

14 %

12 %

69 %

88 %

Source : rapport 2005 de l’ONDPS

Depuis 2004, les missions régionales de santé (MRS) ont défini les communes éligibles à divers dispositifs d’aide à l’installation des professionnels de santé (article L. 164-47 du code de la sécurité sociale). Selon le rapport précité de M. Georges Colombier, elles ont retenu près de 360 zones, représentant 4 500 communes et 4 % de la population, mais le zonage qui en ressort ne recoupe pas les zonages précités. Dans un récent rapport (5), La Cour des comptes juge d’ailleurs ce zonage « hétérogène car les méthodes utilisées ont différé en fonction de la région », ce qui est problématique car le classement des zones est opposable aux partenaires conventionnels pour l’attribution de leurs aides à l’installation. Un nouveau recensement devait être achevé au 1er janvier 2007, mais il a dû être reporté du fait de « problèmes méthodologiques », selon un récent rapport d’information du Sénat, qui en conclut que « le caractère stratégique de ces recensements requiert (…) de conforter la légitimité des missions régionales de santé, soit par le renforcement de la structure, par exemple sa transformation en agence régionale de santé, soit en associant les collectivités territoriales concernées à la détermination des zones, ces mesures n’étant pas exclusives l’une de l’autre ».

On ajoutera qu’il existe des zones dans lesquelles l’accès à un médecin conventionné en secteur 1, c’est-à-dire ne pratiquant pas de dépassements d’honoraires, est difficile. D’après les acteurs rencontrés par la mission en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, il serait impossible de consulter un spécialiste conventionné en secteur 1 à Nice, sauf dans un centre de santé mutualiste. Cela rejoint les déclarations faites devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales par M. Philippe Séguin, premier président de la Cour des Comptes, qui considère que l’importance des dépassements d’honoraires « met en cause, dans certaines zones et pour certaines spécialités, le principe fondamental d’égal accès aux soins, car le reste à charge qui en résulte pour les assurés peut être insupportable » (6).

On peut donc conclure, comme M. Didier Houssin, directeur général de la santé, l’a déclaré devant la mission (7), que notre système de santé connaît une crise des soins primaires.

● Les restructurations hospitalières sont encore insuffisantes dans certaines régions.

La plupart des interlocuteurs de la mission reconnaissent que la restructuration de l’offre hospitalière est nécessaire, mais qu’elle a souvent pris du retard.

Pourtant, le financement intégral, dès 2008, des activités hospitalières de médecine, de chirurgie et d’obstétrique par la seule tarification à l’activité (T2A), et non plus par la dotation globale, constitue un « levier puissant de restructuration du secteur hospitalier », comme le souligne le rapport de M. Jean-Pierre Door sur le PLFSS 2008 (8). En effet, par leur mode de construction, les tarifs ne sont pas adaptés au financement des activités des établissements qui n’ont pas une taille critique suffisante : avec la T2A à 100 %, il devient donc indispensable de redéployer les moyens hospitaliers, c'est-à-dire, si nécessaire, de fermer, de regrouper ou de transformer certains hôpitaux dont l’activité très réduite ne garantit pas toujours la sécurité des soins et entraîne d’onéreux sous-emplois. Lors de son audition par la mission (9), M. Claude Évin, président de la fédération hospitalière de France (FHF), a jugé nécessaire une réorganisation territoriale de l’offre hospitalière, qui pourrait viser, en exploitant des complémentarités dans le cadre de stratégies de groupe, à structurer cette offre autour d’« établissements de territoire de santé ».

L’évolution de la démographie médicale justifie également ces restructurations hospitalières : selon l’ONDPS, la multiplicité des établissements favorise en effet le « gaspillage du temps médical », alors que « l’évolution annoncée de la démographie médicale ne permettra pas de les faire fonctionner tous de façon optimale » (10).

Or, comme le constate M. Jean-Pierre Door dans son rapport, « la restructuration hospitalière, trop lente, n’a pas encore atteint ses objectifs » : en la matière, l’hôpital public est en retard sur le secteur de l’hospitalisation privée à but lucratif, dont la restructuration autour de stratégies de groupe a été favorisée, de l’avis général, par son financement intégral par la T2A depuis le 1er janvier 2006. C’est pourquoi un nombre important d’hôpitaux rencontrent des difficultés budgétaires, leur activité étant trop faible pour engendrer des ressources à la hauteur de leurs charges : la FHF estime ainsi que 62 % des établissements publics sont en situation de « vulnérabilité » (11).

La mission a pu vérifier ces constats sur le terrain, notamment en Bourgogne, où les responsables du secteur hospitalier lui ont indiqué que l’offre hospitalière restait dispersée, au nom d’une exigence de proximité qu’ils jugent inappropriée, la qualité des soins étant incompatible avec la dissémination des moyens. Les personnels ainsi dispersés manquent aux hôpitaux généraux, qui n’ont d’autre choix que de recruter des praticiens à diplôme étranger ou des remplaçants dont la rémunération pèse sur leurs budgets (12). Le retard pris dans les restructurations hospitalières explique que les hôpitaux de la région cumulent 130 millions d’euros de déficit annuel, et que la Bourgogne compte encore une centaine d’établissements de soins, contre une cinquantaine seulement en Franche-Comté (13). En région Provence-Alpes-Côte d’Azur, où les parts de marché gagnées par le secteur privé sont particulièrement importantes, les responsables des hôpitaux publics reconnaissent qu’ils ont parfois moins de mal à coopérer avec les cliniques qu’entre eux. Ainsi, pour l’hôpital comme pour la ville, l’offre de soins s’avère mal maîtrisée.

b) Le parcours de soins du patient manque de fluidité

Pour améliorer la qualité de la prise en charge des patients (objectif n° 3), le programme de qualité et d’efficience « maladie » précité mise sur la structuration du parcours de soins des patients, organisé autour du médecin traitant, articulant la médecine de ville et l’hôpital, avec un dispositif efficace de permanence des soins et de prise en charge des urgences. Pourtant, on observe que le parcours de soins est marqué par des ruptures de prise en charge.

● Ces difficultés tiennent notamment aux insuffisances du dispositif de permanence des soins (14)

Ce dispositif mis en place à la suite de la « grève des gardes » de 2001-2002 repose sur quatre principes directeurs :

– le volontariat des médecins, qui, selon le rapport précité de M. Georges Colombier, ne suffit pas à remplir tous les tableaux d’astreinte, laissant des « zones blanches » (c’est-à-dire des secteurs sans médecin pour effectuer des actes de permanence des soins, notamment entre minuit et 8 heures). De plus, les médecins d’astreinte ont pour la plupart abandonné les visites à domicile ;

– une régulation téléphonique préalable à l’effection de tout acte médical, que M. Georges Colombier juge parfois insatisfaisante, relevant des problèmes d’engorgement et des modes d’organisation illisibles pour le patient, par exemple quand sont proposés plusieurs numéros de téléphone différents ;

– la permanence est organisée sur la base d’une sectorisation qui présente, selon M. Georges Colombier, des disparités importantes dans la taille des secteurs de garde et le nombre de médecins par secteur, parfois trop restreint pour garantir la viabilité du système ;

– une rémunération forfaitaire de la régulation téléphonique et de l’astreinte (15), qui renchérit le coût moyen des actes effectués (compte tenu de leur faible nombre), au point, selon un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’inspection générale de l’administration (IGA) (16), qu’il « heurte le bon sens » – M. Georges Colombier note que dans certains secteurs de la Nièvre, le coût moyen d’un acte entre minuit et 8 heures atteint 845 euros.

● On constate aussi des ruptures dans la prise en charge des patients des patients entre l’hôpital et son aval.

Selon M. Philippe Ritter (17), chargé d’une mission sur les ARS par la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, certains patients, notamment des personnes âgées et des personnes handicapées, « stagnent » à l’hôpital faute de place dans une structure médico-sociale. Selon les représentants du ministère des comptes publics entendus par la mission (18), c’est le cas de 18 à 22 % des patients hospitalisés en court séjour.

Cela témoigne du manque de structuration des réseaux de santé, qui sont pourtant censés cordonner différents acteurs sanitaires ou médico-sociaux concernés par une pathologie ou un problème médico-social spécifique, pour mettre le patient « au centre du dispositif », notamment en dépassant le clivage ville / hôpital. Or, comme M. Jean-François Rey l’a indiqué à la mission (19) au nom de la confédération des syndicats médicaux français (CSMF), les structures ville / hôpital qui fonctionnent bien sont rares, très liées à des initiatives personnelles et peu formalisées. Un récent rapport de l’IGAS (20) tire ainsi un bilan très critique de ce type de structures : « rares sont les projets (…) où un impact positif a effectivement été démontré sur l’état de santé des personnes prises en charge », dont le nombre semble d’ailleurs « très limité », et « pratiquement aucune preuve tangible d’amélioration des relations entre professionnels de ville, en particulier des médecins généralistes, et établissements de santé n’a été apportée ».

c) La prévention reste le parent pauvre du système de santé

L’objectif n° 2 du programme de qualité et d'efficience (PQE) « maladie » précité concerne « le développement des politiques de prévention ». En effet, si la France est selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le pays dans lequel l’espérance de vie est la plus élevée après 60 ans, deux difficultés persistent :

– une mortalité prématurée excessive avant 65 ans ;

– des inégalités de santé importantes entre régions, entre hommes et femmes et entre catégories socio-professionnelles.

Selon le PQE, ces difficultés trouvent largement leurs causes dans certains facteurs de risque tels que le tabac, l’alcool et les déséquilibres nutritionnels, ce qui plaide en faveur de politiques de prévention plus efficaces.

● Les infrastructures de santé publique restent peu développées.

D’après l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (21), sur 28 pays membres, la France arrive en 20ème position seulement pour la part des dépenses publiques allouées à la santé publique et à la prévention, avec 1,8 %, contre 3,1 % en moyenne et jusqu’à 8,6 % pour le Canada. La faiblesse relative des moyens consacrés à la prévention limite nécessairement la portée de cette politique.

De plus, on constate que tous les acteurs locaux de la politique de santé publique ne sont pas encore assez structurés. Ainsi, lors de son audition par la mission (22), M. Philippe Lamoureux, directeur de l’Institut national de la prévention et de l’éducation à la santé (INPES) a jugé souhaitable une professionnalisation accrue de ces acteurs, notamment des associations qui répondent aux appels à projets de santé publique. En effet, la complexité des procédures d’obtention de financements publics requiert de sérieuses capacités d’ingénierie administrative de la part des associations, à tel point que selon les acteurs de la prévention rencontrés par la mission à Marseille, les petites associations sont conduites à consacrer trois mois par an à l’élaboration des dossiers de réponse aux appels à projets, deux mois à attendre la décision administrative, et seulement sept mois à la mise en œuvre opérationnelle de leurs actions. De même, Mme Pascale Flament, directrice générale de l’Institut national du cancer (INCa) a souligné devant la mission (23) les difficultés rencontrées dans le pilotage des structures de gestion du dépistage du cancer, du fait de leur nombre et de leur hétérogénéité (il peut s’agir de collectivités territoriales, d’associations etc.). Estimant lui aussi que les associations de santé publique sont « très dispersées et trop peu professionnalisées », M. Jean-Marie Rolland recommande dans un récent rapport (24) de les inciter à mutualiser leurs moyens pour professionnaliser leurs pratiques, afin de structurer des réseaux de « porteurs de projets réactifs et compétents ».

• Faute de lien entre le secteur de la prévention et celui des soins, la politique de santé publique est déséquilibrée au profit de la prévention primaire.

Selon une typologie établie en 1950 par l’OMS, on distingue trois domaines dans la politique de prévention :

– la « prévention primaire » : ensemble d’actes destinés à diminuer l'incidence d’une maladie, c’est-à-dire à réduire l’apparition des nouveaux cas ;

– la « prévention secondaire » : ensemble d’actes destinés à diminuer la gravité et la prévalence d’une maladie, notamment par son dépistage et son traitement précoce ;

– la « prévention tertiaire » : ensemble d’actes destinés à diminuer la prévalence des incapacités chroniques ou des récidives à la suite d’une maladie, y compris par des actions de rééducation et de réinsertion professionnelle et sociale.

Devant la mission (25), Mme Annie Podeur, directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS), a constaté que notre politique de santé publique était déséquilibrée au profit de la prévention primaire, car les professionnels de santé ne sont pas impliqués dans cette politique, alors que leur mobilisation est indispensable pour mener des actions de prévention secondaire ou tertiaire. Votre rapporteur note que la plupart des acteurs de la santé publique rencontrés par la mission considère que le corps médical est encore très peu sensible à la prévention, et regrette que celle-ci ne tienne qu’une place limitée dans la formation des autres soignants : 80 heures sur les trois ans que dure la formation des infirmières, par exemple.

En outre, M. Philippe Lamoureux (INPES) a expliqué à la mission que les actions de prévention menées en France ne jouent pas suffisamment sur les différents ciblages possibles. Une politique de prévention peut en effet être organisée :

– par risque, ce qui est bien fait en France ;

– par population, ce qui est peu fait, sauf pour les personnes âgées ;

– par milieux (comme l’entreprise, où des actions de prévention permettent de réduire l’absentéisme, ou le milieu scolaire), ce qui est mieux fait, par exemple, au Québec qu’en France ;

– par territoires – M. Philippe Lamoureux juge la territorialisation des actions de santé publique insuffisante, par rapport à ce qui est fait en matière de planification sanitaire.

Cela rejoint le point de vue des acteurs de la prévention rencontrés par la mission en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, qui estiment que la politique de santé publique reste marquée par des approches très médicales, d’où ses résultats moyens dans les domaines qui relèvent d’une approche plus comportementale, comme la prévention de l’obésité ; des approches par populations ciblées seraient également pertinentes, par exemple en matière de SIDA. En outre, les actions de prévention doivent selon eux intégrer toutes les dimensions de l’Éducation et de la promotion de la Santé, y compris par exemple l’estime de soi, condition de l’observance des traitements, élément particulièrement important pour certaines affections de longue durée.

2. Le coût de notre système de santé est mal contrôlé et sa croissance est difficilement soutenable

Bien que la France consacre déjà 11 % de son PIB aux dépenses de santé, ce qui la place au troisième rang des pays de l’OCDE, après les États-Unis et la Suisse, la soutenabilité de notre système de santé n’est pas assurée, car les dépenses augmentent fortement.

a) Notre système de santé a un coût élevé, auquel contribue son « hospitalo-centrisme », et mal maîtrisé, notamment pour les dépenses de soins de ville

● Le coût de notre système de santé n’est pas bien maîtrisé.

En témoignent les dépassements fréquents de l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (ONDAM), créé par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 22 juillet 1996 en vue de renforcer le contrôle des pouvoirs publics, notamment du Parlement, sur les dépenses de santé. L’ONDAM est décliné en trois sous-objectifs, consacrés respectivement aux dépenses relatives aux soins de ville, aux établissements de santé et au secteur médico-social. Son caractère contraignant a été renforcé par la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, avec l’institution d’un comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie. On observe néanmoins que l’ONDAM a été régulièrement dépassé, comme le montrent les tableaux ci-dessous.

MONTANT DE L’ONDAM VOTÉ ET RÉALISÉ

TAUX DE PROGRESSION DE L’ONDAM VOTÉ ET RÉALISÉ

Source : rapport de M. Alain Vasselle au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, adopté par l’Assemblée nationale, Tome I : Équilibres financiers généraux.

● Notre système de santé est marqué par un « hospitalo-centrisme » qui engendre des pertes d’efficience et contribue ainsi au niveau élevé des dépenses de santé.

La quasi-totalité des interlocuteurs de la mission s’accorde à constater l’hospitalo-centrisme de notre système de santé ; Mme Annie Podeur (DHOS) a ainsi fait remarquer à la mission (26) que depuis la réforme hospitalière de 1958, le système a été organisé autour de l’hôpital et non à partir d’une structuration des soins primaires, comme dans les autres pays.

Cet hospitalo-centrisme conduit ainsi les médecins libéraux à adresser leurs patients de façon inappropriée à l’hôpital, qui, ne refusant pas de patients et offrant à tous un système de « tiers payant », est conduit à suppléer la ville en cas de carence de l’offre ou de la permanence des soins, tout en suppléant aussi le secteur médico-social, dont les structures ne sont pas suffisamment médicalisées et ne réussissent pas à assurer une prise en charge rapide des patients en aval de l’hôpital. Selon M. Frédéric Roeckeghem (27), directeur général de la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la structure de notre consommation de soins défavorise les soins ambulatoires au profit des soins hospitaliers.

Les soins hospitaliers étant plus coûteux que les soins de ville, l’hospitalo-centrisme engendre des pertes d’efficience. Les représentants du ministère des comptes publics entendus par la mission évaluent à 5 millions de journées d’hospitalisation environ le volume des phénomènes de « stagnation » à l’hôpital de personnes en attente de lit d’aval, ce qui, en application du dispositif de T2A, représenterait un manque à gagner de 2,5 milliards d’euros pour les hôpitaux. Cela explique que 64 % des dépenses françaises de soins curatifs et de réadaptation soient produites par le secteur hospitalier, contre 46 % en moyenne pour les pays de l’OCDE (28).

Compte tenu de ces données, M. Frédéric van Roeckeghem a fait valoir devant la mission que si l’ONDAM hospitalier a été mieux tenu que l’ONDAM ambulatoire depuis plusieurs années, cette tendance peut s’expliquer par un phénomène de rééquilibrage entre l’hôpital et la ville, et non comme une simple différence de performance entre les deux secteurs. Il souligne en outre que les dépenses de personnel des hôpitaux augmentent de 1,5 % par an, et que le taux d’encadrement des patients varie de 1 à 2,5 entre l’hospitalisation privée et l’hôpital public, ce qui indique, selon lui, que les hôpitaux publics n’ont pas encore optimisé la gestion de leurs ressources humaines.

b) La croissance des dépenses de santé n’est pas soutenable sans gains d’efficience

● Une tendance à l’augmentation des dépenses de santé.

Les dépenses de santé augmentent tendanciellement de deux milliards d’euros par an, d’après M. Frédéric van Roeckeghem. Dans son rapport annuel 2007, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie explique également que les dépenses d’assurance maladie obligatoire devraient continuer à croître plus rapidement que le PIB dans les années à venir, notamment du fait du vieillissement de la population, qui engendrerait pour les régimes de base d’assurance maladie un supplément de charges de 0,3 % du PIB, selon les estimations retenues par le Haut conseil.

Commentant le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 (29), votre rapporteur soulignait les difficultés persistantes des finances sociales, tant à court terme qu’à moyen ou long terme, et relevait que malgré des hypothèses volontaristes en termes de croissance du PIB et de progression de l’ONDAM, le retour à l’équilibre ne peut être envisagé, toutes choses égales par ailleurs, qu’en 2011 (cf. tableau ci-dessous).

ÉVOLUTION PRÉVISIONNELLE DU SOLDE DU RÉGIME GÉNÉRAL DE LA BRANCHE MALADIE SUR LA PÉRIODE 2007-2012

Source : Rapport de M. Jean-Pierre Door au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, tome II « Assurance maladie et accidents du travail ».

● Des gains de productivité sont donc indispensables pour assurer la soutenabilité du système.

Le HCAAM considère qu’« admettre la tendance spontanée de la dépense soumettrait le système d’assurance maladie à des tensions extrêmement fortes. Or, l’offre de soins peut être améliorée : il existe en effet des marges d’économies importantes. Encore faut-il être capable de les cerner et de déployer les politiques permettant de les « lever ».

C’est pourquoi votre rapporteur considère que la réforme du système de santé doit viser avant tout à renforcer son efficience, condition de sa viabilité. Les conclusions du présent rapport et les recommandations du rapporteur découlent toutes de cette considération.

B. L’ORGANISATION CLOISONNÉE DU PILOTAGE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ ET LA MAUVAISE RÉPARTITION DES RESPONSABILITÉS ENTRE L’ÉTAT ET L’ASSURANCE MALADIE ENGENDRENT DES PERTES D’EFFICIENCE

Votre rapporteur observe que les interlocuteurs de la mission, dans leur grande majorité, s’accordent à regretter le cloisonnement excessif du système de santé et de son pilotage. Dans son rapport annuel de 2004, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie constatait que les compétences de l’État et des organismes d’assurance maladie « sont la plupart du temps empilées et enchevêtrées », estimant « que l’enchevêtrement des compétences explique en partie, et en tout cas favorise, les dérives du système ».

1. Cloisonné, le pilotage de notre système de santé complique la mise en œuvre des politiques de santé et ne permet pas de structurer efficacement une prise en charge globale du patient

Le rapport 2004 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale déplorait « une conduite confuse des politiques de santé », liée à « l’enchevêtrement des responsabilités » entre l’État et l’assurance maladie, qui « se traduit, au niveau local, par une multiplicité d’instances décisionnelles et de programmes d’action ».

a) Le système territorial de santé est organisé « en tuyaux d’orgue » et piloté en double commande par l’État et l’assurance maladie, parfois de façon divergente

● Le pilotage du système de santé repose sur deux réseaux distincts et asymétriques : celui de l’État et celui de l’assurance maladie.

Pour mener ses politiques de santé, l’État dispose du réseau de l’administration sanitaire et sociale, constitué :

– au niveau national, des agences sanitaires et du ministère de la santé, dont un récent rapport d’audit (30) souligne qu’il est « caractérisé par son éclatement », notamment entre ses principales directions : direction générale de la santé (DGS), direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) et direction générale de l’action sociale (DGAS), qui comptent 3 200 équivalents temps plein (ETP) ;

– au niveau déconcentré, des directions régionales (DRASS) et départementales (DDASS) des affaires sanitaires et sociales, avec 11 000 ETP.

En parallèle, l’assurance maladie applique un cadre conventionnel national par le biais d’un réseau distinct de celui de l’État. Au niveau national, ce réseau comprend notamment les caisses des principaux régimes (31), qui ont chacun leur réseau territorial. Ceux du régime social des indépendants (RSI) et de la mutualité sociale agricole (MSA) ont la région pour échelon territorial de référence, avec des caisses régionales ou des associations régionales de caisses (MSA). Le réseau du régime général s’articule quant à lui autour de trois niveaux territoriaux, avec :

– au niveau national, la CNAMTS et son service du contrôle médical ;

– au niveau régional, un « directeur coordonnateur de la gestion du risque », une caisse régionale d’assurance maladie (CRAM) chargée de la gestion hospitalière et de la prévention, et une direction régionale du service médical (DRSM) ;

– au niveau local, 128 caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et les échelons locaux du service médical (ELSM) correspondants.

En outre, le réseau de l’assurance maladie comprend des structures inter-régimes : l’union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM – article L. 182-2 du code de la sécurité sociale) et l’union régionale des caisses d’assurance maladie (URCAM – article L. 181-1 du même code), chargée de piloter les actions de « gestion du risque » – cf. encadré au II. A. 5).

Les acteurs rencontrés par la mission font tous état de divergences entre les instructions de l’État et les « lettres réseaux » de la CNAMTS. Pour l’association des directeurs des affaires sanitaires et sociales (ADIRASS), ce système de pilotage central « à double commande » « se révèle peu opérationnel et génère sur le terrain d’importantes difficultés de mise en œuvre des politiques ». M. Christian Dutreil, directeur de l’Agence régionale de l’hospitalisation (ARH) de Provence-Alpes-Côte d’Azur, a ainsi indiqué à la mission qu’en matière de maîtrise médicalisée et de contrôles dans les hôpitaux, les CPAM mènent leurs actions en commande directe par la CNAMTS, hors du cadre de l’ARH, qui proteste en vain.

L’avis publié par la Conférence nationale de santé sur les ARS (32) ajoute que ce pilotage en double commande répond moins à une logique fonctionnelle qu’à une logique institutionnelle dont elle dénonce la complexité : « sans jamais supprimer de structures, mais toujours en les ajoutant, on peut constater que tout le monde est dans tout et réciproquement » : l’État, la sécurité sociale, les collectivités territoriales, et parfois les associations se retrouvent à la fois dans les ARH et les groupements régionaux de santé publique (GRSP), alors que les MRS ont été créées précisément pour que les URCAM et les ARH coopèrent dans la coordination de l’offre de soins.

● La prévention, la ville, l’hôpital, le secteur médico-social ainsi que la veille et la sécurité sanitaires sont pilotés de façon compartimentée, « en tuyaux d’orgue », par des institutions différentes, avec des outils de planification et des donneurs d’ordres distincts (cf. schéma ci-après).

PRÉSENTATION SCHÉMATIQUE DE L’ORGANISATION « EN TUYAUX D’ORGUE »
DU PILOTAGE DU SYSTÈME DE SANTÉ

secteur

soins hospitaliers

soins de ville

santé publique

secteur médico-social

planification territoriale

SROS

PRAM

zonage des zones déficitaires

PRSP


PRIAC

schémas départementaux et régionaux d’organisation sociale et médico-sociale

organe de concertation :

conférences sanitaires de territoire + CROS

conseil de l’URCAM

conseil régional du FIQCS

CRS

CROSMS

responsable territorial

ARH

URCAM

MRS

GRSP

Département, DDASS

correspondant national

DHOS

UNCAM

UNCAM

DHOS

DGS

DGAS + CNSA

1° Le secteur hospitalier est piloté sous l’égide de l’État par l’ARH (articles L. 6115-1 et suivants du code de la santé publique). Créée par les ordonnances du 24 avril 1996, l’ARH est chargée « de définir et de mettre en oeuvre la politique régionale d’offre de soins hospitaliers » publics comme privés. Son directeur, nommé en conseil des ministres, a voix prépondérante au sein d’une commission exécutive où siègent à parité les représentants de l’État et de l’assurance maladie, mais de fait, les acteurs rencontrés par la mission s’accordent à constater que le réseau des ARH est piloté surtout par la DHOS. L’ARH met en œuvre le schéma régional d’organisation sanitaire (SROS – articles L. 6121-1 et suivants du même code), arrêté par son directeur après avis du comité régional de l'organisation sanitaire (CROS). Le SROS « a pour objet de prévoir et susciter les évolutions nécessaires de l'offre de soins préventifs, curatifs et palliatifs afin de répondre aux besoins de santé » sur la base d’un découpage de la région en territoires de santé, pour chacun desquels il fixe des objectifs quantifiés de l'offre de soins (OQOS) et planifie les « créations, suppressions d'activités de soins et d'équipements matériels lourds, transformations, regroupements et coopérations d'établissements nécessaires ».

2° Le secteur ambulatoire est piloté à l’échelon régional par l’URCAM (articles L. 183-1 et suivants du code de la sécurité sociale), sans qu’ait été prévu un document de planification de l’offre de soins de ville. Créée elle aussi dans le cadre de la réforme de 1996, l’URCAM, sous le contrôle d’un conseil paritaire, définit «  une politique commune de gestion du risque, notamment dans le domaine des dépenses de soins de ville ». Elle est planifiée dans un programme régional commun à l’ensemble des organismes d’assurance maladie (PRAM), et elle mène les « actions de coordination des soins et la mise en œuvre des bonnes pratiques par les professionnels de santé », au moyen d’outils conventionnels définis au niveau national, comme les contrats de bonne pratique.

Entre l’ARH et l’URCAM est constituée une mission régionale de santé (MRS – article L. 162-47 du code de la sécurité sociale) chargée de délimiter les zones déficitaires en offre de soins, dans lesquelles les médecins libéraux sont éligibles à certaines aides à l’installation, et de gérer les dotations régionales du fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS), sous le contrôle du conseil régional de la qualité et de la coordination des soins (article L 221-1-1 du même code).

3° La politique de santé publique est pilotée par le groupement régional de santé publique (GRSP – articles L. 1411-11 et suivants du code de la santé publique) constitué entre l’État, les agences sanitaires, l’assurance maladie et les collectivités territoriales volontaires pour élaborer et mettre en œuvre le plan régional de santé publique (PRSP), qui définit pour cinq ans les objectifs et les priorités de santé publique de la région. Le PRSP est arrêté par le préfet de région, président du GRSP, après l’avis de la conférence régionale de santé (CRS). Comme le souligne le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland, « la politique de santé publique est organisée sur un mode partenarial mais demeure contrôlée par l’État », qui détient la majorité des sièges au conseil d’administration du GRSP et en nomme le directeur – il s’agit généralement du directeur de la DRASS. Le réseau des GRSP est piloté par la DGS.

4° Le pilotage du secteur médico-social est partagé entre l’État, les conseils généraux, l’assurance maladie et la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Comme M. Jean-Jacques Trégoat, directeur de la DGAS, l’a souligné devant la mission (33), le pilotage de ce secteur est très complexe, à l’image du secteur lui-même. L’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles distingue en effet quinze catégories de structures, dont les procédures d’autorisation, d’habilitation au titre de l’aide sociale et de financement sont différentes ; elles ont notamment des modes de tarification variables (prix-journée, tarif horaire, dotation globale, mode mixte etc.) et des tarificateurs différents (conseil général, assurance maladie, État, voire plusieurs d’entre eux à la fois) – cf. annexe n° 1.

5° Le pilotage de la veille et de la sécurité sanitaires est lui aussi très éclaté. Le rapport d’audit IGF-IGAS précité recense 19 activités de veille et sécurité sanitaires (cf. annexe n° 2), qui relèvent de quatre fonctions principales :

– le contrôle des établissements de santé et médico-sociaux, assuré par les DDASS et les DRASS, l’ARH étant responsable de la sécurité sanitaire dans les établissements de santé (article L. 6115-1 du code de la santé publique) ;

– la police sanitaire, notamment le contrôle des eaux, assuré par les DDASS sous l’autorité des préfets ;

– la veille et l’observation de la santé humaine, assurée par les DDASS avec l’appui des 16 cellules interrégionales d’épidémiologie (CIRE), constituées auprès des DRASS pour relayer l’activité de l’Institut de veille sanitaire (InVS) – elles sont d’ailleurs placées sous son autorité scientifique et sous l’autorité administrative de la DRASS ;

– la gestion des crises, qui relève de la responsabilité du préfet de département, voire du préfet de zone en cas de crise à périmètre large. Pour la gestion de la crise, ils peuvent s’appuyer sur les moyens des DDASS et des DRASS, ainsi que sur ceux des CIRE et de l’ARH, et recevoir l’appui de l’InVS.

Au niveau national, le pilotage du système de veille et de sécurité sanitaire est partagé entre l’InVS et la DGS, qui s’est d’ailleurs dotée d’un « département des urgences sanitaires », et d’un établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) (34) pour la gestion des crises sanitaires.

● Le copilotage par l’État et l’assurance maladie de groupements d’intérêt public constitués entre eux ne fonctionne pas de façon satisfaisante.

C’est pour décloisonner le pilotage du système de santé et faire collaborer les réseaux de l’État et de l’assurance maladie que des structures communes aux deux réseaux ont été constituées, sous la forme de groupements d’intérêt public (GIP), comme les ARH, les MRS et les GRSP.

Il ressort cependant des travaux de la mission que ce mode de copilotage n’est pas efficace. Mme Annie Podeur a ainsi estimé devant la mission (35) que les MRS n’avaient fonctionné qu’au prix d’un pilotage en double commande, qui constitue un gaspillage regrettable au regard des modestes résultats qu’elles ont obtenus concernant la permanence des soins, la maîtrise médicalisée des dépenses ou le développement des réseaux. Il en va parfois de même des ARH, constitués entre l’État et l’assurance maladie, comme la mission a pu l’observer lors de son déplacement en Bourgogne : le directeur de l’ARH a expliqué que la perspective de restructurations hospitalières crispait les jeux des acteurs, l’assurance maladie mettant des obstacles à l’approbation d’états des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD) hospitaliers en déficit, alors que le ministère charge les directeurs d’ARH de faire respecter par les hôpitaux des plans de retour à l’équilibre échelonnés jusqu’en 2011.

En outre, les travaux de la mission ont permis de constater que souvent, le fait d’être affecté à une ARH ou à un GRSP n’est pas considéré comme un avantage dans le déroulement de carrière des agents de l’État ou de l’assurance maladie, ce qui est regrettable.

b) Le cloisonnement des secteurs et la multiplication des structures compliquent la mise en œuvre des politiques de santé

● La dispersion des moyens nuit à l’efficacité des structures qui mettent en œuvre les politiques de santé.

En effet, un grand nombre de DDASS et de DRASS n’ont plus la taille critique nécessaire pour que leurs moyens soient dispersés au sein de différentes structures (ARH, GRSP, MDPH etc.). Le rapport d’audit IGF-IGAS précité montre en effet que les services déconcentrés « sont dans une situation de grande fragilité », « liée à la dispersion des structures et des activités » : les DDASS ont en moyenne 71 ETP, la moitié d’entre elles en comptant moins de 60, et, selon M. Philippe Ritter (36), il faut encore prendre en compte le fait qu’un tiers des agents sont affectés à des structures extérieures. L’Association des directeurs des affaires sanitaires et sociales (ADIRASS) confirme ce constat, en soulignant que le « foisonnement » des missions des DDASS et des DRASS est le résultat d'une sédimentation « sans véritable cohérence », et sans rapport avec la « réduction régulière, importante et continue des plafonds d'emploi qui est accentuée, tout en étant masquée dans son ampleur, par le maintien dans les effectifs des services déconcentrés d’agents mis à la disposition de collectivités territoriales ». L’ADIRASS déplore ainsi « une multiplication d’opérateurs et de « donneurs d’ordre » qui prétendent chacun pouvoir bénéficier des ressources en personnel des services déconcentrés, pour conduire leurs missions ».

Or le fonctionnement des groupements d’intérêt public (GIP) dont l’État est membre dépend, par construction, de la disponibilité des DDASS et des DRASS. C’est notamment le cas des ARH, constituées sous la forme de GIP entre l’État et, au moins, la CRAM et l’URCAM (article L. 6115-2 du code de la santé publique), organisation dont le rapport 2004 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale estime qu’« elle n’est pas à la hauteur de la difficulté des missions confiées aux ARH », car elle fragilise leur fonctionnement par deux biais :

– d’une part, les effectifs mis à la disposition des ARH n’ont pas pu être adaptés, car, selon le Cour, cela affecterait l’équilibre global entre l'État et l’assurance maladie et supposerait des négociations complexes. Ainsi, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, en vertu de sa convention constitutive jamais révisée malgré l’accroissement de ses tâches, l’ARH ne dispose que de 11 % de l’effectif des DDASS ;

– d’autre part, hormis l’équipe restreinte placée auprès de son directeur, l’ARH ne dispose pas d’autorité sur les personnels mis à sa disposition, qui restent intégrés à leur structure d’origine et ne sont mis à sa disposition que « numériquement », par volume d’ETP, et non nominativement, comme M. Philippe Ritter l’a regretté devant la mission (37). Pour la Cour des comptes, cette « absence de prise directe… entraîne vraisemblablement une déperdition d’efficacité ».

Le directeur de l’ARH n’a donc pas les moyens effectifs d’encadrer ses équipes. Selon Mme Annie Podeur, on observe d’ailleurs un retrait des moyens consacrés aux ARH, autant du fait des DDASS, de plus en plus occupées à d’autres tâches, que de l’assurance maladie, dont les médecins-conseils sont mobilisés sur des activités de contrôle. Indiquant que l’assurance maladie s’est ainsi progressivement désinvestie de son agence, M. Christian Dutreil, directeur de l’ARH de Provence-Alpes-Côte d’Azur, a souligné devant la mission que si l’ARH peut adresser des « instructions » aux services de l’État, elle ne peut adresser que des « demandes » à ceux de l’assurance maladie.

Enfin, alors que les GRSP avaient vocation à renforcer la cohérence de la politique de santé publique en mutualisant les moyens qu’y consacrent l’État, les agences sanitaires, les caisses et les collectivités territoriales, on constate que ces moyens restent dispersés. Le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland remarque en effet que « l’État est souvent le seul à jouer pleinement le jeu de la mutualisation financière » :

– les structures comme l’INPES, l’INCa ou la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) participent peu aux GRSP ;

– les fonds de prévention institués par les conventions d’objectifs et de gestion (COG) des caisses leur échappent pour une large part ;

– les collectivités ne leur apportent que très exceptionnellement une contribution financière.

Votre rapporteur signale aussi qu’au titre des volets « prévention » des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM – article D. 6114-2 du code de la santé publique) conclues avec les établissements de santé, l’ARH gère des fonds consacrés à la prévention, dont le montant dépasse parfois celui du budget du GRSP, comme c’est le cas en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

● Par ailleurs, le cloisonnement des secteurs et la multiplication des structures compliquent l’animation des politiques de santé par les agences sanitaires nationales qui ne disposent pas de leur propre réseau territorial.

C’est par exemple le cas de la Haute autorité de santé (HAS) (38), qui doit animer plusieurs réseaux de correspondants régionaux identifiés au sein des ARH, des URML et des CRAM et URCAM, à la fois pour apporter à ces instances une aide à la décision et pour obtenir des informations du terrain.

C’est également le cas de l’INCa, dont la directrice, Mme Pascale Flament, a souligné devant la mission (39) que le cloisonnement santé publique / offre de soins lui était « très préjudiciable ». En effet, sa particularité étant d’avoir des compétences transversales (recherche, prévention, information, organisation des soins), l’INCa n’a pas d’interlocuteur régional aux compétences aussi larges que les siennes, ce qui l’oblige à animer plusieurs réseaux à la fois, notamment celui des GRSP pour le dépistage, et celui des ARH, têtes de ponts des réseaux cancérologiques régionaux. Pour Mme Pascale Flament, un tel cloisonnement freine l’innovation thérapeutique, en compliquant l’articulation entre la prévention, les soins ambulatoires et l’hôpital, alors que la filière de traitement du cancer, aujourd’hui organisée pour une prise en charge lourde de patients en fin de vie, doit être reconfigurée pour traiter des cas plus nombreux mais moins lourds, car dépistés à un stade plus précoce. Ainsi, le développement du dépistage conduit à mettre en place des thérapeutiques plus légères (chimiothérapie orale, à domicile ou ambulatoire), adaptées à des patients qui survivront plus longtemps ; le dépistage n’a d’ailleurs de sens que si le patient est pris en charge dans la foulée du diagnostic, ce qui suppose un lien fort entre la santé publique et l’offre de soins.

● Des difficultés de mise en œuvre du dispositif de permanence des soins.

Analysées par M. Georges Colombier dans son rapport sur la prise en charge des urgences médicales, ces difficultés illustrent elles aussi les inconvénients d’un pilotage cloisonné du système de santé. Le pilotage du dispositif de permanence des soins fait en effet intervenir plusieurs acteurs :

– à l’échelon national, l’État organise cette « mission de service public » (article L. 6314-1 du code de la santé publique), dont l’assurance maladie assure le financement ;

– à l’échelon régional, la MRS élabore des propositions relatives à l’organisation de la permanence des soins et les transmet au conseil régional de l'ordre des médecins, aux syndicats représentatifs des médecins libéraux et des urgentistes hospitaliers, et à l’URML (article R. 6315-7 du même code) ;

– à l’échelon départemental, le préfet arrête le cahier des charges de la permanence des soins après avis du comité départemental de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins (PDS) et des transports sanitaires (CODAMUPS) et peut procéder à des réquisitions individuelles de médecins (article R. 6315-4 du même code). Le conseil départemental de l’Ordre des médecins (CDOM) établit les tableaux de garde. En outre, les médecins libéraux participant à la PDS constituent souvent des associations départementales.

Comme le montre M. Georges Colombier dans son rapport précité, « la multiplicité des acteurs de l’organisation de la permanence des soins est source de confusion dans la répartition des rôles ». Il relève qu’« il arrive même parfois que l’URCAM, en liaison avec l’URML, prenne des options contraires à celles retenues par le préfet » et que « là où la région a voulu dépasser son rôle strictement financier pour se lancer dans des opérations, ne fût-ce qu’à titre d’expériences, les pistes ont été considérablement brouillées ». Il met ainsi en évidence les complémentarités qui pourraient être exploitées entre la ville et l’hôpital pour garantir un accès continu aux soins, mais dont l’exploitation est compliquée par le pilotage cloisonné des dispositifs d’aide médicale urgente à l’hôpital (organisée par l’ARH dans le cadre du SROS) et de permanence des soins en ville, qui ne relèvent ni des mêmes autorités, ni des mêmes zonages administratifs.

● Un cloisonnement préjudiciable à la politique de santé publique.

Enfin, votre rapporteur relève que de l’avis général, le cloisonnement des secteurs est particulièrement préjudiciable à la mise en œuvre de la politique de santé publique. M. Jean-Marie Rolland note ainsi dans son rapport précité que « ce cloisonnement n’a pas de pertinence par rapport au champ professionnel cohérent que forment les activités concernées », comme le relève également un récent rapport de l’IGAS (40), selon lequel la prévention « se situe par construction au carrefour du soin et de la promotion de la santé, du sanitaire et du social, du biomédical et des sciences sociales ».

c) Le cloisonnement des compétences ne permet pas d'organiser le système de santé de façon globale et cohérente

Selon les textes, le SROS « prend en compte les objectifs » du PRSP (article L. 1411-11 du code de la santé publique) et « tient compte de l'articulation des moyens des établissements de santé avec la médecine de ville et le secteur médico-social » (article L. 6121-2 du même code), et les schémas d'organisation sociale et médico-sociale sont établis « en cohérence » avec le SROS (article L. 312-4 du code de l’action sociale et des familles). Mais il ressort des travaux de la mission que ces dispositions ne sont pas appliquées avec rigueur.

Ce constat est largement partagé et plusieurs travaux parlementaires ont déjà appelé à élargir le champ de la planification sanitaire ou à mieux articuler les différents outils de planification. C’est par exemple le cas du rapport de M. Georges Colombier, qui préconise de faire de la permanence des soins un volet du SROS. De même, M. Jean-Marie Rolland estime que « l’articulation des volets du PRSP est à rechercher notamment avec les schémas médico-sociaux départementaux » et l’ADIRASS déplore que la multiplication des agences oblige les services sanitaires et sociaux à conduire pour chacune d’elles « des exercices de planification qui ont beaucoup de mal à s’articuler ».

Aujourd’hui, non seulement les différents outils de planification ne sont pas élaborés de façon coordonnée entre les différentes structures (ARH, GRSP, départements, préfets, MRS etc.), mais leurs calendriers d’élaboration sont décalés : si le PRSP sont élaborés pour la même durée de cinq ans (article L. 1411-11 du code de la santé publique), soit la durée minimale d’un SROS (article L. 6121-1 du même code), les premiers ont été élaborés en 2005 ou 2006, selon les régions, alors que l’élaboration des seconds est en cours.

Ainsi, le cloisonnement des compétences et des outils de planification sanitaire ne permet pas de structurer une réponse globale et cohérente à l’ensemble des besoins de santé des Français.

2. Le cloisonnement des acteurs et l’enchevêtrement des compétences engendrent des pertes d’efficience et ne permettent pas de réguler efficacement les dépenses de santé

a) Au niveau territorial, le pilotage cloisonné de notre système de santé engendre des pertes d’efficience

• La dispersion des compétences engendre des redondances dans les tâches administratives, d’où des pertes d’efficience.

En effet, la multiplicité d’instances décisionnelles locales entraîne inévitablement des coûts de structure importants et engendre des « doublons » dans les activités administratives.

Le rapport 2004 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale note ainsi entre les différents outils de planification « des zones de recoupement », par exemple entre le SROS et les programmes de prévention. Or elle constate que « les attentes distinctes des ARH et des DRASS, bien que ces dernières soient membres des ARH, ne conduisent pas à des démarches véritablement complémentaires » et en souligne « les risques de juxtaposition ». Selon le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland, au sein des DDASS, les fonctions de chef de projet des programmes du PRSP et des volets correspondants du SROS (par exemple : plan cancer / volet cancérologie, programmes addictions et suicide / volet santé mentale) sont souvent confiés au même médecin inspecteur, ce qui pallie le cloisonnement du système mais n’en génère pas moins des pertes de temps médical d’autant plus regrettables que les effectifs de médecins inspecteurs sont faibles.

L’assurance maladie fait le même constat : la contribution conjointe de l’association des directeurs de caisses d’assurance maladie et de la conférence des directeurs d’URCAM souligne « le gaspillage des moyens et des énergies » qui résulte de l’éclatement du pilotage territorial du système de santé. Les représentants de l’union interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS) entendus par la mission (41) ont quant à eux parlé de « concurrence des acteurs ».

• Le pilotage cloisonné du système de santé, et notamment la non fongibilité des enveloppes, ne permet pas de tirer parti des complémentarités qui existent entre la prévention, la médecine de ville, les soins hospitaliers et les services médico-sociaux.

Ce cloisonnement freine surtout les restructurations de services hospitaliers en établissements médico-sociaux destinés aux personnes âgées ou aux personnes handicapées, qui sont pourtant nécessaires dans la perspective du vieillissement de la population. M. Jean-Jacques Trégoat (DGAS) a en effet souligné devant la mission (42) que l’allongement de la durée de vie porte sur la durée de vie autonome : il aura donc pour effet d’accroître la demande de services médico-sociaux plutôt que de soins. Compte tenu de cet enjeu, le pilotage des établissements de santé et celui des établissements médico-sociaux ne paraissent pas suffisamment articulés :

– les enveloppes finançant les établissements de santé et les établissements médico-sociaux ne sont pas fongibles ;

– la planification de l’offre et l’autorisation des structures sanitaires et médico-sociales ne relèvent pas des mêmes autorités : l’ARH pour les établissements de santé, l’État et les présidents de conseils généraux pour les établissements médico-sociaux, notamment ceux qui accueillent des personnes âgées (cf. annexe n° 3).

En conséquence, la restructuration d’un service hospitalier est moins complexe à planifier s’il s’agit de créer un autre service de soins que s’il s’agit de transformer le service considéré en structure médico-sociale, ce qui ne contribue pas à réduire l’hospitalo-centrisme.

De même, le rapport précité de M. Georges Colombier relève que le problème de la prise en charge des urgences médicales en France est en partie dû au cloisonnement des structures. Il souligne qu’« un véritable effort de mutualisation des moyens et des objectifs est donc nécessaire », concernant les plateformes téléphoniques (centres 15, centre de traitement des appels au 18, plateformes libérales de régulation des appels de permanence des soins ou de SOS médecins etc.), mais aussi la permanence des soins. Celle-ci doit pouvoir être confiée aux structures hospitalières lorsqu’il n’y a pas assez de libéraux pour l’effectuer, ou lorsque le volume des actes est si faible que le coût de revient de ces actes est déraisonnable (cf. supra). Cela suppose d’organiser des transferts d’enveloppes pour compenser le transfert de charges vers l’hôpital, ce qui a été difficile.

• Les structures régionales de l’assurance maladie ont été difficiles à mettre en place et restent éclatées, d’où des pertes d’efficience.

En effet, comme votre rapporteur l’a exposé plus haut, l’échelon régional du réseau de l’assurance maladie n’est pas organisé de façon unifiée, mais éclaté entre :

– les CRAM, qui, pour la branche maladie, sont censées assumer les tâches d'intérêt commun aux caisses primaires de leur circonscription et, sur le même plan que les CPAM, mener des actions de prévention et de promotion de la santé (articles L. 215-1 et L. 262-1 du code de la sécurité sociale). Le rapport 2004 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale soulignait que leur mission « ne s’étend pas à la conception d’une politique régionale ou à la coordination des actions des caisses », et constatait qu’« elles ne remplissent dans aucun domaine le rôle de mutualisation des tâches qui leur est conféré » ;

– les directeurs coordonnateurs régionaux de la gestion du risque, désignés au sein de son réseau par le régime général ;

– les caisses ou associations de caisses de la MSA et du RSI ;

– les URCAM, dont la Cour des comptes indiquait en 2004 qu’« après avoir longtemps paru [les] négliger…, le régime général a tendu, dans la période récente, à les considérer comme ses relais, notamment dans la mesure où il ne dispose pas d’un échelon régional qui lui soit propre », ce que l’audition des représentants de la MSA par la mission (43) tend à confirmer. Selon eux, les URCAM seraient plus efficaces si elles étaient dirigées par un exécutif resserré, à l’image du collège des directeurs de l’UNCAM, composé exclusivement des directeurs généraux de la CNAMTS, de la MSA et du RSI.

M. Frédéric van Roeckeghem a souligné devant la mission certaines incohérences de ce pilotage éclaté : ni les médecins-conseil, ni les équipes hospitalières des CRAM ne sont intégrés aux URCAM, alors qu’ils opèrent la gestion du risque et siègent à la commission exécutive de l’ARH. En outre, la mise en place des URCAM aurait désorganisé le réseau de l’assurance maladie, dans la mesure où elles n’ont pas de pilote national clairement identifié et où leur création a suscité parmi les CPAM la crainte d’être cantonnées à un rôle de simple liquidateur, appelé d’ailleurs à perdre beaucoup d’importance avec le système SESAM-Vitale. C’est selon lui pour ces raisons que la création des URCAM n’a pas beaucoup contribué à rendre la gestion du risque plus efficace.

LA COORDINATION RÉGIONALE DE LA GESTION DU RISQUE

Pour permettre cette efficacité accrue du régime général dans la gestion du risque, et pour donner un cadre aux actions destinées à renforcer l’efficience de ses réseaux, la CNAMTS a créé en 2006 une fonction de coordination régionale.

Le directeur coordonnateur de la gestion du risque

Le directeur coordonnateur de la gestion du risque assure fonctionnellement, en liaison avec l’URCAM, une meilleure coordination des actions de gestion du risque du régime général de manière à garantir, à un niveau intermédiaire entre le niveau national et le niveau local :

– la mise en œuvre des programmes et la comparaison des résultats obtenus au niveau des assurés du régime général, au niveau administratif et médical, au sein de la région ;

– la mise en œuvre des politiques nationales en région (formation, outils de déploiement…) ;

– le développement des synergies entre les réseaux administratif et médical, notamment dans la mise en œuvre de la liquidation médico-administrative et des programmes de maîtrise médicalisée ;

– une déclinaison plus efficace et réactive, au sein du régime général, des priorités de l’Assurance Maladie dans les champs ambulatoire et hospitalier ;

– le pilotage des projets de mutualisation dans le champ de la gestion du risque.

Le coordonnateur exerce cette responsabilité, en sus de son rôle de directeur d’organisme ou de structure, dans le cadre d’une mission déléguée par la CNAMTS. Il supervise l’évolution des résultats de gestion du risque et propose éventuellement des mesures d’ajustements : plan d’action complémentaire, dispositif de soutien inter organismes.

Il rend compte régulièrement à la CNAMTS de l’évolution des résultats obtenus par le régime général.

Conformément aux dispositions de la loi du 13 août 2004, les fonctions de ce coordonnateur et celles de directeur d’URCAM ont vocation à être agrégées.

Les organes de concertation

Un comité de pilotage de la gestion du risque

Ce comité est composé des directeurs des organismes et de la direction régionale du service médical (DRSM). Il est animé par le coordonnateur de la gestion du risque qui en assure le secrétariat. Ce comité a vocation à examiner toutes les actions du régime général dans le domaine de la gestion du risque ainsi que leurs modalités de mise en œuvre et l’évolution des résultats obtenus en région.

L’implication des Conseils

La création de nouvelles structures n’est pas envisagée. Cependant, il paraît indispensable de permettre au coordonnateur de connaître l’avis des conseillers.

À cette fin, il présentera annuellement devant le conseil de chaque caisse de sa région :

– les projets de déclinaison régionale des actions de gestion du risque du régime général,

– les résultats obtenus au cours de l’année.

Source : Conseil de la CNAMTS, note d’orientations 2006/2009 relative à l’organisation du réseau, 16 mars 2006.

• Malgré quelques progrès récents, les caisses d’assurance maladie rencontrent des difficultés dans la mise en œuvre de leurs actions de gestion du risque à l’hôpital.

Depuis 2004, certains outils de maîtrise médicalisée à l’hôpital ont été mis en place, « avec l’objectif d’inscrire la maîtrise des dépenses de santé dans un effort collectif et équilibré entre l’hôpital et la médecine de ville », compte tenu du fait que « l’hôpital est devenu un grand producteur de soins externes », comme le note M. Jean-Pierre Door dans son rapport précité. D’ailleurs, bien que l’ONDAM soit ventilé en sous-objectifs sectoriels, les enveloppes sont perméables, comme en témoigne le fait que les prescriptions des médecins hospitaliers représentent 23 % des médicaments remboursés en ville, pour un montant de 9,1 milliards d’euros en 2006, en forte croissance (+ 23,6 % depuis 2003).

Parmi ces outils de maîtrise médicalisée des dépenses à l’hôpital, on citera notamment les « contrats de bon usage des médicaments coûteux » prévus à l’article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale, qui dispose que les médicaments et dispositifs médicaux onéreux financés en sus de tarifs ne sont remboursés à 100 % qu’aux établissements de santé qui respectent un contrat de bon usage, négocié entre l’ARH et l’URCAM, afin de limiter les prescriptions. Il existe également des accords de bonnes pratiques professionnelles (article L. 6113-12 du code de la santé publique), conclus soit au niveau national, soit entre une ARH et un établissement, en vue d’améliorer les pratiques hospitalières. Un accord-cadre a ainsi été signé le 23 janvier 2006 sur le bon usage des antibiotiques, visant à réduire de 10 % en trois ans la consommation d’antibiotiques au sein des établissements de santé. Dans la même logique, le plan d’action 2007 de la CNAMTS « Élargir la maîtrise médicalisée à l’hôpital » du 8 mars 2007 fixait comme objectif que 70 % des établissements aient conclu un accord-cadre local sur au moins 2 des 6 thématiques prioritaires suivantes : les antibiotiques, les statines (44), les médicaments génériques, l’ordonnancier bizone (45), les prescriptions d’arrêts de travail et les transports sanitaires.

Certains obstacles techniques à l’élargissement de la maîtrise médicalisée à l’hôpital ont par ailleurs été levés. Ainsi, avant la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2005, il n’existait pas de dispositif d’identification individuelle des médecins hospitaliers permettant aux systèmes d’information de l’assurance maladie de suivre leurs prescriptions, contrairement à ce qui est fait pour les médecins libéraux. Pour lever ce frein, la LFSS 2005 a instauré un dispositif de traçabilité des prescriptions à l’hôpital (article L. 162-5-15 du code de la sécurité sociale), dont la mise en œuvre effective est subordonnée à l’élaboration du répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS) nécessaire à son exploitation.

En tout état de cause, les caisses ont déclaré à la mission qu’il reste beaucoup à faire selon elles (46) pour impliquer véritablement l’hôpital dans la gestion du risque.

b) Au niveau national, l’enchevêtrement des compétences de l’État et de l’assurance maladie ne permet pas une régulation efficace des dépenses de santé

● Une gouvernance nationale dont le renforcement est limité par la mauvaise répartition des compétences entre l’État et l’assurance maladie.

Dans son rapport annuel 2007, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie fait le bilan des réformes mises en œuvre depuis 2004 en passant en revue six grandes fonctions :

1° Sur la définition et le cadrage global de la politique de santé et d’assurance maladie, le Haut conseil salue la fixation par la loi d’objectifs de santé publique (47) et considère que l’ONDAM, décliné en sous-objectifs (48), suivi par un comité d’alerte (49) et élaboré avec l’avis de l’UNCAM, « est redevenu une référence crédible », même si l’ONDAM 2007 a manqué de réalisme.

2° En matière d’expertise scientifique, le HCAAM tire un bilan positif de la création de la HAS (50), mais relève des problèmes de coordination avec les délégués de l’assurance maladie (DAM) pour la promotion des bonnes pratiques, et avec l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) en matière d’évaluation des pratiques professionnelles et de formation continue.

3° S’agissant de la régulation du système de santé, le HCAAM rappelle que la loi du 13 août 2004 visait à la renforcer par deux leviers :

– une réorganisation de la gouvernance des institutions de l’assurance maladie, consistant à renforcer le management du régime général (51) et la coordination inter-régimes nationale, avec l’UNCAM ;

– un partage plus clair des compétences entre l’État et l’assurance maladie.

Sur le premier point, le HCAAM dresse un bilan favorable de la réforme des structures de l’assurance maladie et considère que l’action de l’assurance maladie y a gagné en efficacité. Sur le second point en revanche, le Haut conseil note « une consolidation et un accroissement des compétences de l’assurance maladie nécessaires à l’exercice de ses responsabilités », mais en fait un bilan « contrasté ». En effet, si l’assurance maladie a « effectivement exercé ses nouvelles compétences », par exemple dans le domaine de la nomenclature des actes dont elle est maintenant responsable en direct, la HCAAM constate que « la pratique s’éloigne de la théorie ».

4° Pour ce qui est des relations conventionnelles, le bilan de l’UNCAM est positif mais le HCAAM regrette « un maintien persistant de l’intervention de l’État dans un certain nombre de grands choix conventionnels », par exemple sur le secteur optionnel, ce qui remet en question la responsabilisation de l’assurance maladie dans ses compétences conventionnelles – le Haut conseil rappelle que « cette intervention est passée dernièrement par le vote au Parlement d’une loi autorisant une substitution réglementaire aux parties conventionnelles sur la question du secteur optionnel ».

5° C’est en matière de décloisonnement institutionnel de la gestion du système de soins que le bilan de réformes est le plus modeste : la représentation de l’assurance maladie au sein du comité économique des produits de santé (CEPS) a certes été renforcée, passant d’un siège sur neuf à quatre sièges sur onze (52), mais les apports du conseil de l’hospitalisation (53), censé réunir l’État et l’assurance maladie pour élaborer la politique de financement des établissements de santé et déterminer l’ONDAM hospitalier, restent trop limités.

6° Quant à la territorialisation des systèmes de soins et d’assurance maladie, le HCAAM n’a pas noté de progrès.

● Une large part des acteurs constate des incohérences dans le pilotage du système de santé, qui ne permettent pas une allocation optimale des ressources.

Ainsi, M. Jean-Claude Régi, représentant de la Fédération des médecins de France (FMF), a estimé devant la mission (54) que les décideurs devraient être capables de financer leurs décisions, ce qui n’a pas été le cas récemment, avec des revalorisations conventionnelles incompatibles avec l’ONDAM.

De même, M. Claude Évin, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), a souligné devant la mission (55) que l’hôpital n’est pas associé à la négociation du prix des médicaments, qui pèse pourtant dans ses budgets, pas plus qu’à l’élaboration de la classification commune des actes médicaux (CCAM), qui a selon lui des incidences sur l’hôpital.

Surtout, votre rapporteur observe qu’aucun dispositif ne garantit la cohérence des objectifs quantifiés de l’offre de soins (OQOS) – fixés par le SROS pour chaque structure de production de soins autorisée – avec l’ONDAM.

II.- L’ENJEU DE LA RÉFORME EST TRIPLE :
RENDRE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ PLUS LISIBLE,
PLUS EFFICACE ET PLUS EFFICIENT

Il ressort clairement des travaux de la mission que concernant l’organisation du système de santé, nul ne souhaite le statu quo : une réforme ambitieuse est largement souhaitée, pour remédier au cloisonnement du système de santé et à l’enchevêtrement des compétences. Si les propositions avancées par les différents acteurs diffèrent, ce qui fera l’objet de la dernière partie de ce rapport, votre rapporteur n’en relève pas moins un large accord sur l’enjeu de la réforme, qui doit permettre à la fois de redonner de la lisibilité à notre système de santé, de renforcer l’efficacité de nos politiques de santé et, surtout, d'améliorer l’efficience du système pour assurer sa soutenabilité.

A. REDONNER DE LA LISIBILITÉ À NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ

1. Illisible pour les usagers, voire pour les acteurs eux-mêmes, d’où une dilution des responsabilités, le pilotage du système de santé doit être simplifié

● Une complexité unanimement dénoncée.

Un des huit critères fixés par la Conférence nationale de santé (CNS) dans son avis sur les ARS concerne leur « capacité à simplifier le dispositif ». La CNS indique que « s’il est un constat unanimement partagé, c’est bien celui de la complexité excessive de la gouvernance régionale, probablement à l’image de la complexité nationale ». Selon elle, la décentralisation et la déconcentration des services de l’État n’ont pas rendu le système plus lisible, ni les procédures plus simples. Elle considère donc que « tout projet de création d’ARS qui ne déboucherait pas sur une très forte simplification de la gouvernance régionale du système de santé n’aurait qu’une crédibilité très limitée » et, appelant à ce que « les ARS ne deviennent pas des structures palliatives de dysfonctionnements centraux », elle préconise le même effort de mise en cohérence au niveau national, notamment à l’occasion de la réforme de l’État.

Votre rapporteur a d’ailleurs pu constater que les usagers ne sont pas les seuls à trouver notre système de santé illisible : au contraire, l’UNIOPSS a souligné que les acteurs du secteur médico-social en pâtissent aussi, et l’ADIRASS a indiqué à la mission que c’est parfois aussi le cas des DDASS et des DRASS elles-mêmes.

● Un facteur de dilution des responsabilités.

Le manque de lisibilité du système tend aussi à diluer les responsabilités, comme le souligne par exemple la Fédération hospitalière de France (FHF) dans sa plateforme de propositions pour 2007 (56), qui juge « les responsabilités aujourd’hui diluées dans un empilement de dispositifs qui créent plus d’antagonismes que de synergie », et plaide en conséquence pour l’unification du pilotage régional du système de santé. Notons d’ailleurs que faute de pouvoir identifier un responsable, l’opinion publique se tourne toujours vers le ministre chargé de la santé.

2. Pour des structures nouvelles, contre des structures supplémentaires

a) L’unification du pilotage territorial du système de santé gagnera en crédibilité si elle n’est pas mise en œuvre par un élargissement des missions de l'une des structures existantes

La mission a pu constater qu’un grand nombre des acteurs du système de santé craint que des ARS issues des ARH accentuent l’hospitalo-centrisme du système. C’est le cas par exemple des représentants des syndicats médicaux entendus par la mission (57), qui se sont accordés à alerter la mission sur ce risque. De même, dans la contribution qu’elle a fait parvenir à votre rapporteur, l’association des médecins conseils régionaux de l’assurance maladie considère qu’ « une ARH dont les compétences auraient été étendues au champ des soins de ville symboliserait une véritable étatisation du dispositif ».

À l’inverse, l’unification du pilotage régional du système de santé ne saurait être faite autour des structures de l’assurance maladie. Les médecins conseils régionaux reconnaissent d’ailleurs qu’ « une structure dirigée par la seule assurance maladie disposant du transfert des compétences jusqu’alors dévolus à l’ARH serait considérée comme totalement asservie au financier, c’est-à-dire comme un dispositif de régulation purement comptable et financière ».

Aussi, les ARS ne devraient-elles pas être construites à partir des instances existantes, mais constituer des structures véritablement nouvelles.

b) Pour éviter d’aggraver la sédimentation des structures territoriales de pilotage du système de santé, la création de nouvelles structures devra avoir pour corollaire la suppression des structures existantes

Votre rapporteur constate un consensus parmi les interlocuteurs de la mission pour que la réforme annoncée du pilotage régional du système de santé ne consiste pas à ajouter une structure aux structures existantes, par le même phénomène de « sédimentation » qui a conduit à créer les MRS plutôt qu’à fusionner les URCAM et les ARH. Il rappelle d'ailleurs que la commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l’assurance maladie avait déjà dénoncé les empilements institutionnels dans le pilotage régional du système de santé et avait adopté un dispositif permettant, à titre expérimental, de fusionner les ARH et les URCAM dans des ARS.

En outre, la directrice de l’hospitalisation et de l'organisation des soins a fait valoir devant la mission (58) que les DDASS et les DRASS n’ont plus la taille critique nécessaire pour être à nouveau scindées, ce qui plaide pour que l’ARS ne soit pas une simple structure de concertation, mais une véritable administration.

B. RENFORCER L’EFFICACITÉ DES POLITIQUES DE SANTÉ

Pour votre rapporteur, la portée de la réforme annoncée ne saurait se limiter à un jeu institutionnel : la logique opérationnelle doit prévaloir.

1. Les politiques de santé doivent agir plus efficacement sur les déterminants de santé et garantir l'égal accès aux soins

a) La santé publique doit « irriguer » toutes les politiques publiques, à commencer par les politiques de santé

Pour réduire la mortalité évitable, particulièrement forte en France avant 65 ans (cf. supra), les politiques de santé doivent pouvoir agir efficacement sur les déterminants de santé, ce qui suppose :

– que les objectifs et les actions de santé publique soient mieux pris en compte par les autres politiques publiques (Éducation nationale, Travail etc.), comme M. Philippe Lamoureux (INPES) l’a souligné devant la mission (59) ;

– que les professionnels de santé s'approprient mieux qu’aujourd'hui les objectifs de santé publique et en relaient les actions, ce qui permettra de rééquilibrer cette politique au profit de la prévention secondaire et tertiaire, notamment pour les patients atteints d’une affection de longue durée.

b) L’offre de soins doit être maîtrisée, pour garantir l’égalité de tous dans l’accès aux soins

Le pilotage régional du système de santé devra assurer plus efficacement qu’aujourd'hui l’adéquation de l’offre de soins aux besoins, ce qui suppose de :

– consolider la permanence des soins ;

– garantir une répartition territoriale harmonieuse de l’offre de soins ;

– améliorer le parcours de soins, en optimisant l’articulation entre la ville, l’hôpital et le secteur médico-social ;

– assurer l’adéquation de l’offre de soins aux besoins de santé, par des restructurations hospitalières, dont votre rapporteur a souligné l’urgence.

LES ENJEUX DES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIÈRES

Les schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS) et les schémas interrégionaux d’organisation sanitaire (SIOS) déclinés sous la forme de contrats d’objectifs et de moyens signés avec chaque établissement de santé poursuivent les objectifs suivants :

- offrir un accès gradué aux soins en maintenant à proximité les soins qui mobilisent des savoir-faire et une expérience médicale et paramédicale mais ne requièrent pas d'équipes de spécialistes et des équipements très sophistiqués : médecine générale et soins infirmiers en ville, soins de suite - ex convalescence -, réadaptation, médecine gériatrique ou polyvalente, soins palliatifs) ; a contrario, l’organisation de la filière de soins comportant plusieurs niveaux et modalités de prise en charge permet de limiter à quelques plateaux techniques sur le territoire, les soins les plus complexes (greffes, chirurgie cardiaque) ; il s’agit d’appliquer le principe de subsidiarité.

- développer les nouveaux modes de prise en charge alternatifs à l’hospitalisation complète : hospitalisation à domicile et chirurgie ambulatoire

- regrouper les plateaux techniques et notamment l'activité obstétricale et chirurgicale très consommatrice de ressource médicale. Les opérations de restructuration sont facilitées par : la promotion de la coopération hospitalière, la valorisation récente de la gériatrie et des soins palliatifs, des initiatives locales cherchant à structurer et pérenniser une offre publique dans chaque territoire de santé ou encore la définition de normes garantissant la qualité de certaines activités de soins. Elles devraient être facilitées également par la reconnaissance de la participation des établissements privés à des missions d’intérêt général.

- enfin, la contrainte prégnante de la démographie médicale incite à une optimisation de la permanence des soins spécialisés sur le territoire de santé (ex : un seul urologue d'astreinte la nuit et le week-end sur un territoire de santé de 250 000 habitants).

Source : rapport 2007 du HCAAM.

2. Le pilotage du système de santé doit reposer sur une culture d'objectifs, de résultat et d'évaluation

Dans son rapport précité, M. Jean-Marie Rolland montre qu’il faut approfondir l’observation de la santé, le suivi des actions et l’évaluation des plans. Il relève notamment que la politique régionale de santé publique gagnerait en lisibilité et en efficacité si l’évaluation des programmes était bien organisée. Une évaluation bien menée doit permettre de ne pas reconduire les programmes dont l’efficacité n’est pas certaine, en faisant prévaloir une logique de résultat sur la logique de moyens qui sous-tend encore trop de politiques de santé.

Suivre la mise en œuvre de ces politiques et évaluer a posteriori leurs résultats suppose de disposer d’indicateurs fixés préalablement. Cela nécessite également de disposer en région d’un organisme d’analyse des données de santé qui soit aussi indépendant que possible des décideurs et des financiers régionaux, comme peuvent l’être les observatoires régionaux de santé (ORS), lorsque leurs moyens sont suffisants.

Votre rapporteur ajoute que le pilotage du système de santé doit aussi gagner en réactivité, ce qui suppose un assouplissement des procédures administratives, comme M. Frédéric van Roeckeghem (CNAMTS) l’a montré à la mission (60) en revenant sur la mise en place du dispositif de vaccination anti-grippale : il a en effet fallu deux ans et demi, plusieurs tours de négociations avec les professionnels de santé, diverses consultations administratives et finalement le vote d’une disposition législative pour mettre en place un programme de vaccination relativement simple, ce qu’il juge, à juste titre, excessif.

C. AMÉLIORER L’EFFICIENCE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ POUR ASSURER SA SOUTENABILITÉ

Compte tenu de la situation dégradée de nos comptes sociaux, et des perspectives de croissance des besoins de santé, le renforcement de l’efficience de notre système de santé constitue le premier enjeu de toute réforme de son pilotage.

1. Garantir la soutenabilité de notre système de santé constitue le premier enjeu de nos politiques de santé

Comme M. Didier Houssin, directeur général de la santé, l’a souligné devant la mission (61), la viabilité des comptes de l'assurance maladie constitue un véritable enjeu pour la santé publique et l’égal accès aux soins. La soutenabilité du système de santé n’étant pas assurée, la question de l’efficience du système de santé a plus d’importance que les questions d’organisation institutionnelle. Il faut avant tout restaurer la soutenabilité du système, et éviter des déficits qui pèsent in fine sur les assurés, en renforçant son efficience.

2. Le pilotage du système de santé devra exploiter des marges de productivité dans ce système

Selon M. Frédéric van Roeckeghem (62), pour mobiliser des marges de productivité, il faut :

– prévenir les pathologies chroniques, pour endiguer la croissance des dépenses relatives aux affections de longue durée ;

– fluidifier le parcours de soins des patients et optimiser le recours au système de soins, avec le dispositif du médecin traitant et des parcours de soins plus structurés, définis notamment en lien avec de la HAS ;

– réduire le coût de production des soins par des gains de productivité, par une gestion du risque plus efficace – ce qui suppose d’encadrer un peu plus l’exercice de la médecine de ville, et surtout d’accélérer les restructurations hospitalières.

Une part de l’offre de soins aigus, que la ministre a évaluée devant la mission à plusieurs dizaines de milliers de lits, doit en effet être reconfigurée au bénéfice de l’offre médico-sociale, et les effectifs hospitaliers doivent être limités, afin de libérer des énergies et d’éviter des tensions de recrutement dans le secteur médico-social. Le rapport 2007 du HCAAM indique en effet que « l’analyse des écarts de performance des établissements – très élevés – montre qu’on peine à dégager les gains de productivité, pourtant potentiellement élevés ».

LA MOBILISATION DES MARGES DE PRODUCTIVITÉ
DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ

Selon le rapport 2007 du HCAAM, la mobilisation de ces marges passe par :

a) la poursuite résolue des restructurations du réseau hospitalier, au-delà des réflexions engagées sur la chirurgie, en intégrant un impératif de meilleure conciliation de l’activité hospitalière avec la médecine ambulatoire et les établissements médico-sociaux : l’activité des établissements de santé doit être recentrée sur leur mission de forte technicité, la médecine ambulatoire doit garantir une prise en charge efficace en amont, et les prises en charge en aval doivent être assurées dans les meilleurs délais par le secteur médico-social, vers lequel un transfert de moyens doit être engagé (on notera qu’à la différence de nombreux secteurs économiques, le secteur des établissements n’est pas en situation potentielle de déflation caractérisée des effectifs). Il faut développer les alternatives à l’hospitalisation.

b) des gains d’efficience dans les établissements

La recherche de ces gains n’est pas suffisamment effective. Si le cadrage financier par la T2A est correctement établi – c’est la responsabilité des pouvoirs publics – il va créer une contrainte globale qui doit normalement conduire les établissements à s’y engager plus résolument.

Mais pour appuyer ce mouvement, il conviendrait qu’on développe des tableaux de bord sur les performances des établissements de même catégorie (les récentes études de la MEAH montrent l’importance des écarts de productivité) et qu’on prévoit l’intégration systématique d’engagements de performance dans les contrats d’objectifs et de moyens entre ARH et établissements.

Mais l’essentiel des gains de productivité ne peut provenir que de l’effort propre des établissements. Il faudra vérifier que les nouvelles organisations de la gouvernance contribuent à la réalisation de l’objectif. Encore faut-il qu’ils déploient – soit en interne, soit par recours à des consultants extérieurs pour avancer sur l’organisation interne – des équipes dédiées à la recherche concrète des gains de productivité. Compte tenu du poids des dépenses de personnel, il est réaliste d’accepter qu’une partie des départs ne soit pas compensée de façon à permettre des rééquilibrages régionaux et contribuer à redéployer des établissements actuellement « surdotés » sur des établissements situés en aval dans la chaîne hospitalière comme indiqué au a). Cette option doit être portée publiquement par les pouvoirs publics.

c) la condition que l’État veille à ce que sa politique statuaire et salariale soit en rapport avec les objectifs macroéconomiques qu’il a fixés.

d) une meilleure maîtrise des normes qui encadrent l’activité des services hospitaliers en termes de pertinence et de calendrier d’application.

e) un assouplissement important des règles de fonctionnement des hôpitaux pour leur permettre une plus grande réactivité et une meilleure adaptabilité.

f) un suivi attentif de la T2A devrait cantonner les risques qu’elle implique (production de soins non pertinents, surfacturations…).

g) la maîtrise des dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux qui sont pris en charge en sus des tarifs des GHS (groupe homogène de séjours). Le volet prix incombe au CEPS pour les molécules onéreuses et les dispositifs médicaux innovants. Par ailleurs, il appartient aux gestionnaires de contrôler de façon plus rigoureuse les prescriptions et de mener les négociations utiles avec les laboratoires sur les volumes et les prises en charge. Si elles ne produisent pas les effets escomptés, il faudrait permettre au CEPS de procéder à une régulation prix/volumes.

h) une analyse raisonnée des actes et interventions doit être menée pour comprendre dans un premier temps les variations considérables constatées, puis les réduire.

Rapport annuel 2007 du HCAAM.

3. Le pilotage territorial du système de santé doit pour cela mettre tous les acteurs en situation de responsabilité dans la recherche d’une efficience accrue

Lettre de mission fixant des objectifs précis, suivi régulier et retour d’expérience (reporting) annuel, sanctions effectives, rémunération modulée en fonction des résultats, contractualisation sur des objectifs d’efficience etc. : il existe de nombreux instruments permettant de responsabiliser les gestionnaires, les professionnels et les établissements. Si certains de ces outils ont déjà été mis en place, il reste à les faire jouer pleinement et à les généraliser à tous les responsables.

Par ailleurs, les instances chargées de l’organisation de l’offre de soins devront avoir suffisamment d’autorité pour prendre des décisions parfois difficiles, notamment en matière de restructurations hospitalières. Elles devront aussi être incitées à mener de telles mesures : pour cela, il faut organiser un dialogue entre le financeur et l’organisateur de l’offre de soins.

III. – RECONFIGURÉ AUTOUR DES AGENCES RÉGIONALES DE SANTÉ (ARS), LE PILOTAGE DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ DOIT ÊTRE DÉCLOISONNÉ ET RESPONSABILISÉ

La réforme du pilotage du système de santé doit procéder d’une logique fonctionnelle, et non institutionnelle, ce qui consiste à partir des missions pour définir les institutions et leurs outils, et non l’inverse.

On a constaté les inconvénients d’un pilotage cloisonné du système de santé. Pour y remédier, les agences régionales de santé (ARS) qu’il est envisagé de créer devront piloter ensemble les différents secteurs du système de santé : la santé publique, l’offre de soins, l’offre médico-sociale à teneur sanitaire, ainsi que la veille et la sécurité sanitaires ; elles devront donc avoir un périmètre de compétences très large en matière d’organisation de ces secteurs. Mais le regroupement des instances existantes, malgré les synergies que l’on peut en attendre, ne suffira pas à maîtriser l’offre de soins et à renforcer l’efficience du système : le pilotage régional de santé, quelle que soit son organisation, devra disposer d’outils nouveaux. La gouvernance régionale du système de santé devra être organisée en cohérence avec les missions et les outils de chaque acteur ; elle devra garantir avant tout l’efficacité opérationnelle des nouvelles instances, ce qui suppose de les adosser à des organes de démocratie sanitaire mieux structurés qu’aujourd’hui, et de les responsabiliser par rapport à des objectifs d’efficience.

Pour que la réforme atteigne son objectif principal – à savoir renforcer l’efficience du système de santé – il faut que la régulation des dépenses de santé soit plus efficace, ce qui suppose de mieux structurer cette fonction. Il faut en effet distinguer les fonctions de régulation des dépenses et d’organisation du système de santé : l’une tend à promouvoir l’efficience, tandis que l’autre consiste à planifier l’offre de soins et les actions de prévention. Partant, votre rapporteur souligne qu’un choix fondamental doit être fait entre deux modèles de gouvernance :

– le premier, suivant une logique de secteurs, consisterait à confier aux ARS à la fois les fonctions d’organisation et de régulation du système, au risque qu’elles soient accaparées par les activités d’organisation de l’offre (planification, autorisations etc.) au détriment du renforcement de l’efficience du système de santé ;

– le second, suivant une logique de missions, consisterait à organiser un dialogue entre des ARS chargées de l’organisation du système de santé, et une autorité régionale chargée de la régulation des dépenses de santé, afin de mettre en permanence le système « sous tension ».

Quel que soit le modèle retenu pour les ARS, le pilotage national du système de santé devra être réorganisé en cohérence.

A. POUR UNE ORGANISATION EFFICIENTE ET DÉCLOISONNÉE DE LA RÉPONSE AUX BESOINS DE SANTÉ DES FRANÇAIS, LES ARS DOIVENT AVOIR UN LARGE PÉRIMÈTRE DE COMPÉTENCES

Le contre-exemple du pilotage actuel du système de santé, doublement marqué par un cloisonnement entre secteurs et par un enchevêtrement des compétences, montre qu’il faut donner une cohérence à l’organisation de la réponse aux besoins de santé des Français, en la confiant à une autorité unique : l’ARS.

1. Les ARS devront, au minimum, organiser conjointement l’offre de soins ambulatoires et hospitaliers

Votre rapporteur note un véritable consensus parmi les acteurs rencontrés par la mission pour souhaiter qu’un pilotage commun de la ville et de l’hôpital constitue le socle des compétences des ARS. Un tel pilotage doit permettre d’exploiter les complémentarités qui existent entre les deux secteurs et de rééquilibrer les activités de soins au profit des soins primaires.

a) Charger les ARS de piloter à la fois l’offre de soins de ville et l’offre de soins hospitaliers permettra d’exploiter mieux qu’aujourd’hui les complémentarités qui existent entre la ville et l’hôpital dans la réponse aux besoins de santé

Comme la directrice de hospitalisation et de l’organisation des soins l’a déclaré à la mission (63), un pilotage unifié de l’offre de soins, ambulatoires comme hospitaliers, doit permettre d’optimiser l’articulation entre la ville et l’hôpital, afin notamment de favoriser l’hospitalisation à domicile (HAD) et d’améliorer la prise en charge des urgences médicales.

• Favoriser l’hospitalisation à domicile (HAD).

En effet, l’hospitalisation à domicile constitue une alternative à l’hospitalisation classique qui permet à la fois de désengorger les services d’hospitalisation et, dans certains cas, d’offrir aux patients une prise en charge plus adaptée à leurs spécificités. C’est le cas par exemple des personnes âgées, pour lesquelles les transferts à l’hôpital peuvent entraîner des pertes de chances. C’est pourquoi la mesure n° 24 du Plan urgences 2003-2008 mise sur le développement de la HAD pour « maintenir les personnes âgées à leur domicile en prodiguant des soins continus et coordonnés d’une intensité équivalente à ceux dispensés à l’hôpital ». Le rapport précité de M. Georges Colombier note, dans le même sens, que le nombre de places de HAD autorisées devrait passer de 7 660 en 2006 à 15 000 en 2010. Le fait que les SROS de troisième génération doivent obligatoirement comprendre un volet relatif à la HAD, et le principe du financement de ces structures par la T2A à 100 % depuis le 1er janvier 2006 sont deux éléments censés contribuer à leur développement.

Mais pour aller encore plus loin, il est également indispensable de renforcer l’implication des médecins libéraux dans la HAD et, en général, dans les modes de prise en charge alternatifs à l’hospitalisation classique, notamment au sein de réseaux de santé.

• Améliorer la prise en charge des urgences médicales.

Comme le recommande le rapport de M. Georges Colombier, il faut par ailleurs exploiter au mieux la complémentarité entre la ville et l’hôpital pour consolider la permanence des soins.

Les textes le permettent : l’article R. 6315-6 du code de la santé publique se réfère ainsi aux « collaborations nécessaires entre les médecins assurant la permanence et les structures hospitalières » pour l’organisation de la permanence des soins au niveau départemental. En effet, compte tenu de la tendance à la désaffection de la permanence des soins par les praticiens libéraux, particulièrement en nuit profonde (entre minuit et 8 heures), liée à des facteurs démographiques, la permanence des soins doit être organisée de façon à tirer le meilleur parti de l’offre de soins existante, notamment hospitalière.

Sur ce point, M. Georges Colombier préconise, à juste titre, dans son rapport, de privilégier, sauf solution alternative viable et efficiente, le transfert de la permanence des soins à l’hôpital en seconde partie de nuit. C’est en effet une période pour laquelle un nombre important de secteurs n’est pas couvert, faute de libéraux volontaires, tandis que le coût moyen d’un acte (nombre de secteurs de garde x 100 € / nombre d’actes réalisés) est très élevé, en raison du faible nombre d’actes réalisés. Pour cela, il propose d’associer les médecins libéraux aux structures des urgences des hôpitaux – services des urgences, services d’aide médicale urgente (SAMU), structures mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) – citant plusieurs expériences locales concluantes. On relèvera d’ailleurs que pour encourager l’implication des libéraux dans la régulation, la circulaire du 10 octobre 2006 relative au dispositif de permanence des soins en médecine ambulatoire prévoit déjà que les médecins libéraux peuvent bénéficier du statut de collaborateur occasionnel du service public (64) lorsqu’ils participent aux systèmes de régulations téléphoniques intégrées au SAMU ou situées dans ses locaux.

Des ARS chargées de piloter conjointement la ville et l’hôpital seront en mesure d’encourager ce type de synergies ville / hôpital dans l’organisation de la permanence des soins.

b) Compétentes pour organiser conjointement l’offre de soins ambulatoires et hospitaliers, les ARS pourront contribuer à rééquilibrer l’offre de soins au profit des soins ambulatoires et à résoudre la « crise des soins primaires »

Le plan d’action 2007 de la CNAMTS « Élargir la maîtrise médicalisée à l’hôpital » du 8 mars 2007 recommande de « veiller à une utilisation justifiée des structures d’hospitalisation », pour corriger le « transfert inapproprié des soins réalisés en ville vers les établissements de santé ». L’assurance maladie constate en effet que l’hospitalisation de jour ou à temps partiel tend actuellement à se développer de façon importante pour des actes qui devraient être pratiqués en cabinet de ville, comme les échographies, l’étude du champ visuel ou certains actes de dermatologie.

Sur ce point, la Conférence nationale de santé considère d’ailleurs, dans son avis précité sur les ARS, qu’il faudra juger la nouvelle gouvernance du système de santé à sa « capacité à promouvoir les soins de santé primaire ». Elle plaide pour un « recentrage » des activités de soins, qui consisterait à « passer d’un système hospitalo-centré à un système ambulo-centré, véritablement organisé » (cf. encadré ci-dessous). Un tel recentrage contribuerait à régler ce que M. Didier Houssin, directeur général de la santé au ministère de la santé, a appelé devant la mission (65) « la crise des soins primaires », c’est-à-dire la perte relative de sens du métier de généraliste, liée selon lui au consumérisme croissant de certains patients, à l’influence des industriels du médicament et à la tendance générale actuelle à la réduction du temps de travail. Selon la Conférence nationale de santé, il s’agit de faire face à la montée des maladies chroniques et aux conséquences du vieillissement de la population par la promotion des soins curatifs de premiers recours, des soins de prévention, des soins palliatifs et par des actions de promotion de la santé.

CENTRER L’ORGANISATION DES SOINS SUR LES SOINS DE PREMIER RECOURS

Il faut améliorer l’organisation du système de santé en faveur d’une meilleure coordination des soins primaires.

Les disciplines de soins primaires présentent les caractéristiques suivantes : premier accès avec le système de santé, accès ouvert, discipline centrée sur la personne, discipline orientée vers l’individu, la famille et la communauté, relation personnalisée dans le temps, utilisation efficiente des ressources, développement de la promotion et de l’éducation de la santé, action en santé publique. La multiplicité des acteurs de soins primaires , médicaux et paramédicaux et des acteurs du social, ainsi que des représentants des malades et autres acteurs associatifs, impose des échanges entre professionnels via la coordination des soins, les réseaux et filières, et des collaborations entre secteur social, médico-social et sanitaire, quel que soit le mode de gestion, des échanges avec la famille et l’entourage des patients, des échanges liés aux activités non soignantes dans les cabinets médicaux ou paramédicaux et dans la communauté. Il s’agit aussi d’améliorer la communication médecin-malade.

L’organisation nouvelle peut s’articuler autour du principe du médecin traitant (notion législative) pour lequel la population a désigné dans la quasi totalité des cas un médecin généraliste. Le médecin traitant doit être le médecin pivot ambulatoire à l’interface entre les besoins identifiés et l’offre de soins, en étroite relation avec les autres professionnels de santé de proximité, mais aussi avec le secteur hospitalier dans le cadre d’un libre choix organisé et régulé.

En résumé, les soins primaires c’est la proximité, l’accès de premier recours au système de santé, une approche globale des patients et la porte d’entrée privilégiée vers les soins de santé secondaires et tertiaires.

Source : Conférence nationale de santé, avis du 22 mars 2007, « Les voies d’amélioration du système de santé français ».

Le recentrage préconisé par la Conférence nationale de santé, loin de creuser l’écart entre la ville et l’hôpital, ne peut se concevoir, comme elle le reconnaît d’ailleurs, que « dans le cadre d’une articulation beaucoup plus poussée qu’aujourd’hui entre soins ambulatoires et hospitaliers ». Il faut en effet encourager le développement de réseaux de santé ville / hôpital plus structurés qu’aujourd’hui, ce qui serait cohérent avec la stratégie qui sous-tend les SROS de troisième génération (66) consistant à hiérarchiser le recours au système de soins en organisant l’offre de soins de façon graduée.

2. La politique régionale de santé publique gagnerait à être organisée conjointement avec l’offre de soins

Les travaux de la mission ont permis de constater que l’inclusion de la politique de santé publique dans le périmètre des compétences des ARS est souhaitée par une large majorité des acteurs. Rapprochée du pilotage de l’offre de soins, la politique de santé publique aura probablement plus de portée, sous réserve que des mécanismes budgétaires et institutionnels soient mis en place pour garantir que la santé publique ne sera pas négligée par les ARS.

a) Mieux articulée avec l’offre de soins, la politique de santé publique serait plus efficace

Il ressort des travaux de la mission que le rapprochement du pilotage régional de la politique de santé publique – aujourd’hui confié aux groupements régionaux de santé publique (GRSP) – avec le pilotage de l’offre de soins offrirait trois avantages :

– le pilotage régional des politiques de santé serait simplifié ;

– les objectifs régionaux et les actions de santé publique joueraient sur des enveloppes financières plus importantes que les moyens actuels des GRSP ;

– en lien plus étroit avec les professionnels de santé, la politique de santé publique pourrait être rééquilibrée au bénéfice de la prévention secondaire et de la prévention tertiaire.

• En effet, le rapprochement de l’ARH et du GRSP au sein d’une ARS offrirait une plus grande lisibilité aux politiques de santé.

Les représentants de l’ADIRASS entendus par la mission estiment que la suppression des GRSP irait aussi dans le sens d’une réduction du nombre d’instances de pilotage et de décision, ce qui présenterait l’avantage de simplifier la gouvernance du système, de permettre un gain de temps et d’énergie, augmentant de ce fait la performance des organisations.

Il ressort en outre des analyses du rapport précité de M. Jean-Marie Rolland que des ARS au périmètre large fédéreraient l’État, l'assurance maladie et les collectivités territoriales plus efficacement que ne le font les GRSP. Il considère que « si, outre la santé publique, les ARS sont compétentes en matière de planification hospitalière, d'organisation des soins de ville et de pilotage du secteur médico-social, il sera impossible que les collectivités territoriales et l'assurance maladie ne participent pas activement à l’ARS », compte tenu de leurs compétences en la matière ; « aussi, au sein d’ARS au périmètre large, la politique de santé publique serait-elle adossée à des structures administratives plus partenariales que les GRSP ne le sont dans les faits ».

• Surtout, dans des ARS au périmètre large, la politique de santé publique serait moins isolée des autres secteurs du système de santé.

Cela permettrait une meilleure prise en compte des objectifs de santé publique par les établissements de soins, les praticiens libéraux et les structures médico-sociales, comme le reconnaît l’ADIRASS, qui voit dans la création des ARS « une opportunité de développer et d’intégrer la prévention à l’hôpital » et « d’impliquer plus fortement les médecins de ville ». Certaines expériences locales, d’ailleurs trop peu nombreuses, montrent en effet l’utilité de leur association étroite aux politiques de prévention, comme la mission a pu le vérifier en Bourgogne, où, par exemple, l’URML et le CHU de Dijon ont mis en place un dispositif ambulant de fond d’œil destiné aux diabétiques.

De plus, un lien renforcé entre les autorités chargées de la prévention et les professionnels de santé permettrait de développer la prévention secondaire et la prévention tertiaire, ce que les GRSP n’ont pas réussi à faire. L’ADIRASS estime en ce sens que la promotion de la prévention à l’hôpital pourra utilement « compléter l’éducation thérapeutique, qui fait déjà partie des axes de travail des établissements de soins », et favoriser les actions conduites « auprès de populations cibles ». Votre rapporteur ajoute qu’un pilotage conjoint de la santé publique et de l’offre de soins permettrait de développer un suivi plus efficace des patients atteints de maladies chroniques, avec des programmes plus individualisés, organisés autour du médecin traitant.

En outre, pilotée par les ARS conjointement avec les autres secteurs du système de santé, la politique de santé publique pourrait « irriguer » plus facilement les autres politiques de santé et jouer sur des masses financières largement supérieures aux seuls crédits des GRSP, comme l’a fait observer à la mission M. Christian Dutreil, directeur de l’ARH de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ces crédits, limités à une dizaine de millions d’euros en moyenne par groupement, pourraient ainsi faire jouer plus efficacement leur effet de levier.

b) Certains craignent toutefois que les ARS délaissent la politique de santé publique au profit de l’organisation de l’offre de soins et que la politique de santé publique soit coupée de ses relais interministériels

La Conférence nationale de santé, dans son avis sur les ARS, rappelle qu’elle considère le développement de la promotion de la santé et de la prévention comme un des cinq enjeux prioritaires des années 2007-2012. C’est pourquoi elle considère que « la mise en œuvre des ARS sera appréciée en fonction de leur capacité à permettre des progrès très sensibles dans ce domaine », analysant notamment « la place réservée, dans leur organisation et leurs moyens, à la promotion de la santé et à la prévention, pour garantir la prise en compte de ces deux démarches dans les politiques régionales ».

Mme Bernadette Malgorn, secrétaire générale du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, a ainsi souhaité devant la mission (67) que la dynamique née de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, qui a refondé cette politique sur une logique d'objectifs et non plus de moyens, ne se perde pas au sein d’ARS accaparées par l’offre de soins, et que la prévention primaire, qui relève de la responsabilité de l’État, soit favorisée. M. Michel Autès, vice-président de l’association des régions de France, a lui aussi jugé nécessaire que des dispositions soient prises pour que les ARS ne négligent pas la santé publique et les collectivités territoriales qui s’y investissent.

Il faut reconnaître que l’importance des enjeux, y compris financiers, liés à l’organisation de l’offre de soins pourrait accaparer les ARS, d’autant qu’en matière de prévention, les politiques ne portent leurs résultats que sur le long terme. C’est en ce sens que l’ADIRASS met en garde, dans la contribution qu’elle a fait parvenir à la mission, contre « le risque que le modèle du soin prédomine dans cette nouvelle organisation regroupée et continue à influer fortement sur la manière de concevoir la prévention », comme c’est le cas « avec la confusion récurrente dans notre pays entre système de soins et système de santé, où paradoxalement les notions qui ont longtemps servi à décrire la prévention (primaire, secondaire) étaient calquées de fait sur le modèle de prise en charge de la maladie ».

c) Les ARS peuvent être organisées de façon à éviter ce risque

Divers mécanismes, budgétaires et institutionnels, permettraient de garantir que la santé publique ne soit pas négligée par les ARS.

● Un mécanisme de fongibilité asymétrique des crédits au sein des ARS pourrait garantir les moyens consacrés à la santé publique.

Pour éviter que les crédits consacrés à la santé publique, une fois délégués aux ARS, ne servent à abonder occasionnellement les enveloppes destinées aux soins de ville, aux soins hospitaliers et aux activités de soins des établissements et services médico-sociaux, on pourrait envisager un dispositif de fongibilité « asymétrique » de ces crédits, c’est à dire à sens unique, permettant d’abonder les crédits de la santé publique par ceux du secteur sanitaire, mais non l’inverse.

Un tel dispositif est souhaité par une large part des interlocuteurs de la mission, à l’image de M. Philippe Lamoureux, directeur de l’INPES, qui souligne qu’une telle mesure contribuerait également à atténuer la prééminence de la logique sanitaire dans la politique de santé publique.

● Le préfet de région, représentant de l’État et garant du caractère interministériel des politiques publiques, doit être associé à la gouvernance des ARS.

Comme Mme Bernadette Malgorn l’a souligné devant la mission, l’inclusion de la santé publique dans le périmètre des compétences des ARS justifierait que le préfet occupe une place importante dans leur gouvernance, en sa qualité de représentant de l’État, dont la compétence en matière de politique de santé publique a été réaffirmée par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. On notera d’ailleurs que la Conférence nationale de santé, dans son avis sur les ARS, juge que la création d’agences régionales de santé non seulement ne doit pas conduire à un affaiblissement du rôle de l’État, mais doit au contraire améliorer sa capacité à remplir le rôle que lui confient la Constitution et la loi (68).

M. Jean-Marie Rolland, dans son rapport précité, considère également qu’il faudra que l’État tienne une place dans la gouvernance des ARS, compte tenu de sa responsabilité en matière de santé publique, mais précise que « cela ne signifie pas pour autant qu’il doive les contrôler, à l’instar de ce qui est prévu pour les GRSP », cette prééminence de l’État dans les GRSP expliquant selon lui les difficultés qu’ont rencontrées ces groupements pour susciter la mobilisation de l’assurance maladie et l’adhésion des collectivités territoriales.

De même, selon M. Philippe Lamoureux, il faudra également veiller à ce que les ARS aient des liens avec le rectorat d’académie – qui n’est pas placé sous l’autorité du préfet – pour développer les actions d’information que l’INPES mène en milieu scolaire, où l’information de santé publique est trop souvent subventionnée par des acteurs en situation de conflit d’intérêt, comme les industriels agro-alimentaires.

● L’ARS pourrait être organisée de façon à comprendre un pôle sectoriel bien identifié, avec un directeur à sa tête, consacré à la politique régionale de santé publique.

Votre rapporteur relève que la plupart des intervenants rencontrés par la mission, ainsi que la Fédération nationale des comités d’éducation pour la santé (FNES), dans la contribution qu’elle a fait parvenir à la mission, se prononcent pour l’organisation de pôles fonctionnels au sein des ARS, notamment pour garantir le maintien de la dynamique créée autour de la santé publique par la loi du 9 août 2004.

Une telle option paraît raisonnable, pourvu que soient organisées des « transversalités », comme l’a souhaité Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins du ministère de la santé. Il s’agit d’éviter que l’ARS ne reproduise par son organisation interne le cloisonnement des secteurs et l’isolation du GRSP qu’elle est censée permettre de dépasser.

● L’ARS devra maintenir un lien institutionnel avec l’ensemble des acteurs de la politique de santé publique.

Devant la mission, M. Didier Houssin a jugé nécessaire que dans le cas où le GRSP disparaîtrait au profit de l’ARS, celle-ci comportât une structure de concertation des acteurs de la santé publique (services extérieurs des différents ministères, collectivités territoriales etc.) pour entretenir la dynamique partenariale créée par les GRSP.

Il faut en effet noter que les actuels GRSP comprennent, outre leurs membres d’office (État, InVS, INPES, ARH, URCAM et CRAM) (69), les collectivités territoriales qui souhaitent mutualiser avec l’État leurs actions de santé publique. D’après le rapport de M. Jean-Marie Rolland, c’est le cas de 17 régions sur 26 et de 68 départements sur 100 (cf. tableau ci-dessous).

PARTICIPATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AUX GRSP

Données à jour au 31 juillet 2007

Région

Conseil régional

Conseils généraux

Communes & groupements

 

Région

Conseil régional

Conseils généraux

Communes & groupements

Alsace 

 

2/2

3

 

Haute-Normandie

 

0/2

1

Aquitaine 

oui

5/5

5

 

Limousin

oui

3/3

4

Auvergne 

 

4/4

4

 

Languedoc-Roussillon

oui

4/5

4

Basse-Normandie 

oui

2/3

4

 

Lorraine

oui

4/4

4

Bourgogne 

oui

4/4

2

 

Martinique

 

1/1

4

Bretagne 

oui

2/4

4

 

Midi-Pyrénées

oui

6/9

4

Centre 

oui

5/6

4

 

Pays de la Loire

oui

2/5

4

Champagne-Ardenne 

 

2/4

3

 

Picardie

oui

2/3

4

Corse 

 

1/2

1

 

Poitou-Charentes

oui

3/4

2

Franche-Comté 

 

3/4

1

 

Nord-Pas-de-Calais

 

0/2

5

Guadeloupe 

oui

1/1

2

 

PACA

 

2/6

4

Guyane 

oui

1/1

0

 

Réunion

oui

1/1

4

Ile-de-France 

oui

3/8

4

 

Rhône-Alpes

oui

5/8

20

Source : Avis présenté par M. Jean-Marie Rolland au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de finances pour 2008, tome VIII : Santé.

Lors de son déplacement à Marseille, la mission a pu mesurer l’intérêt d’une implication approfondie des collectivités territoriales dans la politique de santé publique, notamment les municipalités associées au comité régional d’éducation pour la santé ou engagées dans des « ateliers santé villes ». Par exemple, Vitrolles mène diverses actions en matière de santé mentale, d’addictions, de risques liés aux pratiques sexuelles et d’accès aux soins des populations défavorisées. Compte tenu de la complexité du système de santé, les communes ont en effet à gérer les dysfonctionnements du système, qu’elles sont bien placées pour percevoir sur le terrain.

La création des ARS ne devrait pas conduire à couper la politique de santé publique de ses relais locaux, non seulement parce qu’une telle coupure risquerait de rompre la dynamique insufflée par la loi du 9 août 2004, mais aussi parce que la territorialisation des actions de santé publique doit être privilégiée, comme le montre le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland. Celui-ci préconise d’ailleurs d’« organiser au sein des ARS la représentation des communes et des intercommunalités qui sont aujourd'hui adhérentes au GRSP », estimant que leur exclusion des ARS reviendrait à les dissuader de poursuivre leurs efforts en faveur de la santé publique.

Pour ces raisons, il serait utile que les ARS disposent d’une structure de concertation ad hoc, institutionnalisée mais légère, rassemblant toutes les collectivités territoriales engagées dans la politique de santé publique.

d) Il ne faut pas écarter l’idée de confier aux ARS la santé environnementale et la santé au travail, voire la santé scolaire

Les représentants des services déconcentrés de l’État rencontrés par la mission considèrent que si la politique régionale de santé publique est transférée aux ARS, la santé environnementale et la santé au travail doivent l’être aussi.

C’est par exemple le cas de ceux que la mission a rencontrés à Marseille, qui considèrent que même si la politique de santé au travail fait intervenir des acteurs particuliers (les chefs d’entreprises), elle a gagné en efficacité et en légitimité du fait que le programme régional de santé au travail a été intégré au PRSP, ce qui plaide en faveur de son transfert aux ARS.

Il en va de même de la santé environnementale. En effet, selon les interlocuteurs de la mission à Marseille, en matière de santé environnementale, l’évaluation a priori des risques sanitaires implique plusieurs directions (70) dont le partenariat est organisé par une convention. Elles traitent ensemble divers dossiers, des centres locaux d’information et de coordination (CLIC) aux risques technologiques, et produisent ainsi des études globales pour certains grands dossiers, comme celui de la zone industrielle de Fos-sur-mer. Or, compte tenu de leur taille limitée, il est difficile de scinder les DDASS et les DRASS entre ARS et services hors ARS, chargés notamment de la santé environnementale (contrôle de la qualité des eaux etc.). Par ailleurs, l’ADIRASS déconseille de transférer la santé environnementale aux services de l’équipement, car ceux-ci la défendraient moins bien que les DDASS et les DRASS, dont l’expertise dans ces dossiers est reconnue et les avis souvent suivis par les préfets, qui seraient tenus responsables en cas d’incident. L’ADIRASS considère en effet que l’action en matière de santé environnementale « ne peut pas avoir partie liée avec des politiques d’aménagement, ce qui ne manquerait pas d’être le cas si elle était devait relever des DRIRE ». Les moyens techniques et scientifiques de la santé environnementale ne doivent donc pas quitter les services sanitaires, même transférés aux ARS, ce qui plaide pour le regroupement en leur sein de l’ensemble des activités de biovigilance et d’expertises, ainsi que du pilotage de associations de surveillance de la qualité de l’air.

En matière de santé scolaire, les représentants du secteur rencontrés à Marseille par la mission font remarquer qu’elle constitue un volet important de la santé publique et de la promotion de la santé en général. Ils souhaitent donc que l’Education nationale reste un acteur important de la politique de santé publique.

L’ADIRASS va plus loin en indiquant que la création des ARS représente « une occasion de regrouper dans le champ de la santé publique et notamment au niveau de la prévention santé, des missions jusque là éparses menées par d’autres services », parmi lesquels elle cite notamment la santé au travail et la santé scolaire. Elle estime que « ces regroupement peuvent paraître plus facilement réalisables avec une entité nouvelle fédératrice et dans le contexte porteur de la RGPP (71) ». Votre rapporteur considère que l’idée d’un tel regroupement ne doit pas être écartée.

3. L’implication des ARS dans le pilotage de certains établissements médico-sociaux, en lien avec les conseils généraux, contribuerait à fluidifier le parcours des patients et faciliterait les restructurations

a) Un pilotage conjoint du secteur sanitaire et d’une part du secteur médico-social contribuerait à fluidifier le parcours de soins, favoriserait les filières et les réseaux de santé et faciliterait les restructurations hospitalières

• Éviter les ruptures de prise en charge dans le parcours de soins.

Les ruptures de prise en charge observées dans le parcours des patients, et notamment les phénomènes de « stagnation » de certains patients à l’hôpital, faute de place dans des structures médico-sociales d’aval, tiennent en partie à des problèmes d’articulation et d’organisation du parcours du patient entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social.

C’est pourquoi, un grand nombre d’acteurs considèrent qu’un pilotage conjoint de l’hôpital et des structures médico-sociales d’aval permettrait de fluidifier le parcours de patients, comme Mme Annie Podeur l’a déclaré devant la mission (72). De même, Mme Yolande Briand et M. Michel Rosenblatt ont souligné au nom de la fédération « santé-sociaux » de la confédération française des travailleurs (CFDT) (73) que le secteur sanitaire et le secteur médico-social constituent un champ professionnel cohérent, qui correspond à une vision large de la santé publique – ainsi d’ailleurs qu’à celui de leur fédération syndicale.

Dans son rapport sur la prise en charge des urgences médicales, M. Georges Colombier estime lui aussi qu’une meilleure articulation entre les structures hospitalières et leur environnement social et médico-social contribuerait à fluidifier le passage des patients à l’hôpital. Il considère notamment que l’articulation entre les établissements de santé et les établissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD) devrait être approfondie et formalisée le cas échéant, par des conventions et des coopérations très fortes entre les établissements sanitaires et ces établissements médico-sociaux. Votre rapporteur relève que de telles coopérations sont désormais possibles au sein des groupements assurant la coordination des interventions en matière d'action sociale et médico-sociale (GCSMS) (74) – outils dont M. Jean-Jacques Trégoat, directeur général de l’action sociale a souligné l’intérêt devant la mission – et que les ARS seront bien placées pour promouvoir.

• Favoriser la structuration de filières de prise en charge et de réseaux de soins.

Avec la médecine de ville, l’hôpital et les structures médico-sociales d’aval, les ARS auraient un périmètre suffisamment large pour organiser la prise en charge globale des patients, et donc structurer des filières et des réseaux de soins plus efficaces qu’aujourd’hui, comme l’ont estimé devant la mission les représentants de l’ADIRASS (75).

Le rapport de M. Georges Colombier appelle d’ailleurs à des progrès dans la structuration en filières de la prise en charge de trois populations de patients : les enfants, les patients présentant des troubles psychiatriques et les personnes âgées. Les professionnels médico-sociaux rencontrés par la mission en Provence-Alpes-Côte d’Azur estiment aussi que leur secteur peut apporter un savoir-faire utile aux hospitaliers pour la prise en charge de populations spécifiques, notamment les personnes âgées ou handicapées. De la même façon, c’est « dans une perspective de décloisonnement des outils de la filière gériatrique » que l’ADIRASS juge utile « de mieux articuler, dans les champ des personnes âgées, le court séjour, le soin de suite, les unités de soins de longue durée, la géronto-psychiatrie, les établissements pour personnes âgées dépendantes, les accueils de jour Alzheimer, les SSIAD (76) etc. ». Le même décloisonnement est également souhaitable pour l’organisation en filière de la prise en charge du handicap psychique, avec une meilleure articulation de la psychiatrie, des maisons d’accueil spécialisées (MAS) et des foyers d’accueil médicalisés (FAM) accueillant des personnes handicapées psychiques, et des groupes d’entraide mutuels (GEM), notamment.

• Intégrer le secteur médico-social aux ARS pour faciliter les restructurations hospitalières avec reconversion de services hospitaliers en services médico-sociaux.

Comme M. Jean-Louis Bonnet, président de la Conférence nationale des directeurs d’ARH, l’a indiqué à la mission (77), la prise en charge des personnes âgées est au cœur de toutes les recompositions hospitalières. C’est pourquoi il faut, selon lui, traiter ensemble les services de soins de suite et de réadaptation (SSR), les unités de soins de longue durée (USLD) et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Pour M. Philippe Ritter, dès lors que l’ARS disposerait à la fois des enveloppes du soin et des enveloppes médico-sociales, et que celles-ci seraient fongibles, les restructurations hospitalières impliquant des transformations d’unités de soins en structures médico-sociales seraient plus faciles.

Il ressort d’ailleurs des travaux de la mission que les acteurs médico-sociaux attendent d’un pilotage commun de leur secteur avec l’offre de soins des innovations dans la prise en charge des patients. Ainsi, les acteurs médico-sociaux rencontrés par la mission à Marseille ont évoqué l’idée d’enrichir l’offre des hôpitaux locaux par des services médico-sociaux, ce qui les rendrait plus attractifs pour les professionnels, et de développer de nouveaux services, à l’instar des nouvelles structures d’accès aux soins dentaires pour les personnes handicapées qu’ils essaient de développer. Ils souhaitent aussi pouvoir mutualiser les moyens des établissements médico-sociaux avec ceux des hôpitaux, par exemple en mutualisant les gardes et astreintes médicales.

b) Il faudra cerner avec précision les établissements et services médico-sociaux qu’il est pertinent de piloter conjointement avec l’offre de soins et la prévention

• Seule une partie du secteur médico-social est financée par l’assurance maladie au titre d’activités de soins.

Le secteur social et médico-social se caractérise par une grande diversité : il compte selon M. Jean-Jacques Trégoat (DGAS) quelques 35 000 établissements et services sociaux et médico-sociaux au sens de la loi du 2 janvier 2002 précitée, allant de structures lourdes comme les EHPAD ou les USLD à des structures légères qui s’apparentent presque à des structures de services à la personne. Surtout, les activités de certains pans du secteur ne s’apparentent pas suffisamment aux activités de soins pour qu’un pilotage commun soit pertinent : si la création des ARS vise à regrouper sous un pilotage unique tous les intervenants du parcours de soins des patients, cela ne concerne pas les structures médico-sociales dont l’activité n’a pas de volet sanitaire.

Pour savoir précisément quelles catégories d’établissements et de services médico-sociaux les ARS devront piloter, M. Philippe Ritter propose de choisir comme critère leur financement total ou partiel par l’assurance maladie, ce qui revient à retenir surtout les établissements et services concourant à la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées. Pour votre rapporteur, ce critère a l’avantage de la clarté : il reviendrait à transférer aux ARS le pilotage des établissements et services entrant dans le champ du programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie (PRIAC).

• Certaines catégories particulières d’établissements pourraient cependant mériter un examen spécifique.

Néanmoins, l’attention de la mission a été appelée par M. Jean-Jacques Trégoat sur le cas de certaines catégories d’établissements pour lesquels le critère envisagé ne serait pas suffisant : il conduirait en effet à exclure du périmètre des ARS les structures qui ont une activité de soins sans financement de l’assurance maladie, alors qu’il tendrait à placer sous la tutelle des ARS certaines structures financées par l’assurance maladie mais n’exerçant pas d’activité de soins, comme les « lits infirmiers ». Surtout, M. Jean-Jacques Trégoat a estimé que même pour des structures ayant des activités de soins financées par l’assurance maladie, un pilotage commun avec le secteur sanitaire n’est pas toujours pertinent : ainsi, les instituts d'éducation pour enfants handicapés (78) devraient plutôt être rapprochés du secteur scolaire, et pour certaines structures dédiées aux personnes handicapées (79), la logique sociale primerait sur la logique sanitaire, notamment, selon lui, dans l’optique de l’activation des minima que sous-tend la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Votre rapporteur considère que le sort de ces catégories d’établissements pourrait mériter un examen approfondi.

c) Certains acteurs plaident en faveur d’une intégration différée du secteur médico-social au périmètre des ARS, pour laisser à ce secteur le temps de se restructurer

• Une restructuration en cours.

Certains interlocuteurs de la mission ont estimé que le secteur médico-social n’est pas encore assez structuré pour être piloté conjointement avec le secteur sanitaire. Ainsi, les représentants de l’UNIOPSS entendus par la mission ont souligné que contrairement au secteur hospitalier, le secteur médico-social est composé depuis la loi de 1975 de petites structures, souvent légères, favorisant des projets de vie dans la durée et à dimension interdisciplinaire (éducation, culture etc.) et pas seulement sanitaire. Ils ont aussi fait état d’une certaine « frilosité » envers les ARS (que la mission a pu vérifier sur le terrain), craignant que l’hôpital y tienne une place prépondérante, comme c’est souvent le cas dans les expériences récentes de rapprochement entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social, comme les réseaux gérontologiques.

Pour la DGAS, il faut éviter d’emboliser les ARS dès leur création avec la gestion de la tarification des 25 000 structures médico-sociales financées par l’assurance maladie. Il vaudrait mieux attendre que le secteur médico-social ait achevé sa restructuration autour de 3 000 associations de gestion ou groupements. La DGAS pilote actuellement cette restructuration au moyen de deux outils :

– les « groupements assurant la coordination des interventions en matière d’action sociale et médico-sociale » (GCSMS) qui permettent de regrouper les acteurs sociaux et médico-sociaux, voire sanitaire à l'échelle d'un bassin de vie, pour mutualiser certaines fonctions de gestion et fluidifier le parcours des patients par une meilleure articulation des établissements ;

– les « conventions pluriannuelles d’objectifs et de moyens » (CPOM) que les tarificateurs peuvent conclure pour cinq ans, non pas avec les 35 0000 structures tarifiées, mais avec les associations ou les GCSMS au sein desquels elles mutualisent leurs fonctions de gestion.

Comme M. Jean-Jacques Trégoat l’a indiqué à la mission, les établissements n’ont pas l’obligation d’adhérer à un GCSMS ou de conclure une CPOM par le biais d’une association de gestion, mais ils pourraient y être plus fortement incités qu’aujourd’hui, voire contraints, s’il fallait accélérer la restructuration du secteur en vue du transfert de son pilotage aux ARS.

Aussi, de nombreux acteurs rencontrés par la mission, à l'image du régime social des indépendants (RSI) (80), estiment que le secteur médico-social ne doit être piloté par les ARS qu’après sa restructuration (réforme de la tarification, professionnalisation des acteurs, restructuration autour de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) etc.), considérant qu’une intégration prématurée risquerait de compromettre la réussite de la mise en place des ARS.

• La perspective de la création d’une cinquième branche de la sécurité sociale.

De plus, la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale relative à la dépendance est souvent avancée comme un argument justifiant le report de l’intégration du secteur médico-social aux ARS, par exemple par l’ADIRASS ou l'UNIOPSS.

L’ADIRASS fait également observer que si les activités de soins sont bien identifiées pour la prise en charge des personnes âgées, avec une tarification spécifique, ce n’est pas encore le cas dans le champ du handicap, pour lequel elle considère que les activités d’hébergement, de prise en charge de la dépendance et de soins sont moins bien distinguées tant que le cinquième champ de protection sociales n’est pas créé.

d) Au contraire, les ARS pourraient simplifier le pilotage du secteur tout en garantissant le respect de ses spécificités

• Un pilotage conjoint du secteur sanitaire et du secteur médico-social pourrait faciliter les restructurations.

Votre rapporteur considère que le secteur médico-social a beaucoup à gagner à un pilotage conjoint avec l’offre de soins, ne serait-ce que parce qu’un tel pilotage pourrait faciliter les reconversions d’unités hospitalières en structures médico-sociales, allant ainsi dans le sens d’une hiérarchisation du recours aux soins privilégiant les soins ambulatoires et les prises en charge médico-sociales plutôt que les soins hospitaliers.

• Un dispositif de fongibilité asymétrique pour garantir les enveloppes médico-sociales.

Si la fongibilité des enveloppes est nécessaire à de telles restructurations, elle ne doit cependant pas conduire à ce que les enveloppes médico-sociales, qui connaissent une croissance importante depuis plusieurs années, servent de variable d'ajustement pour pallier des difficultés financières dans les secteurs ambulatoire et hospitalier, liées à la difficulté de respecter un ONDAM ambitieux dans un système d’enveloppes ouvertes. Aussi, pour ne pas accroître l’hospitalocentrisme, il faut un dispositif de fongibilité asymétrique permettant des transferts d’enveloppes du sanitaire vers le médico-social, mais pas l’inverse.

• Un pôle sectoriel consacré au sein de l’ARS au secteur médico-social.

Pour préserver la spécificité de l’action médico-sociale, dont la majorité des intervenants rencontrés par la mission s’accorde à souligner qu’elle s’appuie sur des projets de vie dans la durée, et non sur des projets de soins à court terme, un pôle sectoriel de l’ARS pourrait être consacré au secteur médico-social, à l'image de ce qui est proposé supra pour la politique de santé publique.

Un tel dispositif est d'ailleurs largement demandé par les acteurs du secteur médico-social, notamment ceux que la mission a rencontrés sur le terrain, en Bourgogne et en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

• Impliquer les conseils généraux dans la réforme, afin de simplifier le pilotage du secteur médico-social.

Selon l’UNIOPSS, la création d’ARS au périmètre large permettrait d’unifier le pilotage de la prise en charge des personnes âgées, mais pas celui de la prise en charge du handicap, qui resterait éclaté entre les ARS pour les maisons d’accueil spécialisées (MAS) et les foyers d’accueil médicalisé (FAM), le préfet pour les établissements et service d’aide par le travail (ESAT), et le conseil général pour les structures d’hébergement. Surtout, le financement des établissements resterait complexe : il relèverait de l’ARS pour les activités de soins, du conseil général pour l’hébergement (au titre de l’aide sociale), et de la CNSA pour la dépendance. Par ailleurs, comme l’ont indiqué à la mission les représentants du secteur médico-social qu’elle a rencontrés à Marseille, certains conseils généraux financent déjà des activités de soins dans des foyers occupationnels (81).

Aussi, pour simplifier la gestion des établissements médico-sociaux, votre rapporteur suggère de confier aux conseils généraux la tarification des activités de soins de ces établissements. Si les modalités d’une telle délégation de gestion restent préciser, en lien avec les départements et les acteurs concernés, votre rapporteur souligne qu’il n’envisage pas à ce stade un transfert de compétence aux départements, mais bien une simple délégation de gestion, encadrée par l’ARS au moyen de ses outils de planification et d’une convention conclue à cet effet avec les conseils généraux.

4. Le périmètre de compétence des ARS pourrait utilement intégrer les activités de veille et de sécurité sanitaires

Votre rapporteur a montré que le pilotage des activités de veille et de sécurité sanitaire repose en partie sur les mêmes intervenants que celui de l’offre de soins : les DDASS, les DRASS et les ARH. La perspective de l’intégration de ces intervenants aux ARS amène donc à envisager le transfert à ces agences de leurs activités de veille et de sécurité sanitaires.

a) Certains estiment que les activités de veille et de sécurité sanitaires n’ont pas leur place dans le périmètre de compétence des ARS, du fait de leur caractère régalien et de leur « cinétique rapide »

• Des missions régaliennes.

Activités à caractère régalien, la veille et la sécurité sanitaires devraient selon certains être opérées par l’État. Mme Bernadette Malgorn (82), secrétaire générale du ministère de l’intérieur, a ainsi souligné devant la mission que ce caractère régalien justifie que la veille et la sécurité sanitaires restent de la responsabilité du préfet de département, dont personne ne conteste d’ailleurs la compétence en matière de gestion de crise.

Aussi, dans l’hypothèse où la plus grande partie des moyens des DDASS serait transférée aux ARS, Mme Bernadette Malgorn considère qu’il faudrait que le préfet du département conserve auprès de lui une équipe de gestion des crises sanitaires, ce qu’il ne saurait faire efficacement qu’avec l’appui d’une équipe qu’il connaît bien. Pour coordonner les préfets de département et l’ARS, une cellule de liaison pourrait en outre être placée auprès du préfet de région. En tout état de cause, selon Mme Bernadette Malgorn, il serait trop compliqué de mettre ponctuellement des équipes de l’ARS à sa disposition pour la gestion des crises. S’agissant des fonctions de contrôle en matière sanitaire et sociale, elle considère que les contrôles qui ont trait à la sécurité doivent rester prescrits par le préfet.

• Une « cinétique rapide ».

Votre rapporteur relève également que certains interlocuteurs de la mission craignent que la veille et la sécurité sanitaires focalisent les ARS sur une « cinétique rapide », celle qui prévaut dans les situations de crise, à l’opposé de la cinétique plus lente des autres activités qui entreraient dans leur périmètre : la prévention, la planification sanitaire et la gestion de l’offre médico-sociale. Un tel décalage pourrait nuire au bon fonctionnement des ARS.

b) Au contraire, confier aux ARS les compétences des DDASS, des DRASS, des ARH et des CIRE en matière de veille et de sécurité sanitaire permettrait d’optimiser les moyens qui y sont consacrés

Votre rapporteur reconnaît que le préfet est le mieux placé pour gérer efficacement les crises sanitaires, du fait de l’étendue interministérielle de ses responsabilités. Pour autant, il paraît difficile de doter chaque préfecture des moyens d’expertise et de contrôle sanitaires nécessaires à la veille sanitaire et à la préparation de la gestion des crises : le niveau régional semble constituer un échelon pertinent pour mutualiser ces moyens sans s’éloigner trop du terrain.

• Pour la veille sanitaire, la préparation des crises et la sécurité sanitaire, les ARS pourraient mutualiser les capacités d’expertise dispersées et, ainsi, approfondir la spécialisation des personnels.

Comme M. Didier Houssin, directeur général de la santé, l’a souligné devant la mission, la préparation de la société aux crises sanitaires, notamment aux pandémies (de grippe aviaire, par exemple), constitue un enjeu majeur de la réforme du pilotage territorial du système de santé, qui, en la matière, ne doit pas négliger l’aspect de coopération transfrontalière, matière dans laquelle l’Union européenne n’a pas de compétence. Or la préparation des crises fait l’objet de divers outils de planification – « plans blancs » (83), « plans rouges » (84), plans de préparation à une pandémie grippale, etc.– dont l’élaboration nécessite des moyens d’expertise et une pratique de la planification, justifiant qu’on la confie principalement aux DDASS et DRASS. Si les moyens de ces services sont transférés aux ARS, il serait logique de leur confier l’élaboration des outils de préparation des crises.

Il en va de même des activités de veille sanitaire, qui reposent largement sur les DDASS et les DRASS et à ce titre pourraient être transférées aux ARS. De même, les cellules interrégionales d’épidémiologie (CIRE) pourraient leur être intégrées, pourvu qu’un mécanisme garantisse l’autorité scientifique de l’InVS sur ces équipes – l’InVS pourrait par exemple nommer les personnels chargés de fonctions d’expertises scientifiques.

S’agissant en outre de la sécurité sanitaire, il paraît difficile de ne pas confier aux ARS le contrôle des établissements de santé, qui a été transféré aux ARH en 2003 dans une perspective de simplification du fonctionnement du système de santé (85). Pour le reste des activités de sécurité sanitaire, votre rapporteur relève que la plupart des interlocuteurs de la mission mettent en avant la faiblesse des moyens des DDASS et des DRASS pour souhaiter qu’elles ne soient pas scindées entre ARS et services hors-ARS. En effet, des difficultés de recrutement entraînent des situations d’insuffisance, parfois majeure, en matière de présence médicale dans les DDASS et les DRASS, comme l’a montré un récent rapport de l’IGAS sur l’utilisation des compétences médicales des services déconcentrés de l’État (86). Pour pallier ces difficultés, ce rapport recommande de mutualiser les effectifs de médecins inspecteurs de santé publique à l’échelle régionale, ce qui a déjà été engagé, au stade expérimental, par une circulaire du 20 avril 2007 (87). Avec la création des ARS, cette démarche mériterait d’être pérennisée, approfondie et élargie à l’ensemble des moyens des DDASS, des DRASS et des CIRE. C’est notamment ce que souhaite l’ADIRASS, pour laquelle les ARS favoriseront la « mutualisation de moyens humains dispersés et parfois « rares », numériquement insuffisants pour couvrir actuellement l’ensemble des compétences réglementaires ». Les représentants des DDASS et de la DRASS de Bourgogne rencontrés par la mission font aussi valoir qu’une telle mutualisation permettrait une plus grande spécialisation des personnels, ce qui va dans le sens du développement des capacités d’expertise régionales et d’un pilotage plus efficace des politiques de santé publique.

• Pour la gestion des crises sanitaires, le préfet devra pouvoir mobiliser les moyens de l’ARS.

Par souci de subsidiarité, plusieurs acteurs, comme Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (88), estiment qu’une crise sanitaire circonscrite à un établissement de santé pourrait être gérée directement par l’ARS.

En revanche, dès lors qu’une crise sanitaire affecte un périmètre plus large, ou que sa nature n’est plus strictement sanitaire mais créée par exemple des problèmes d’ordre public, nul ne conteste que le préfet soit compétent pour la gérer. L’ARS pourrait alors, comme le suggère Mme Annie Podeur, lui servir de structure de ressource, mettant à sa disposition ses moyens, notamment les médecins de santé publique et les ingénieurs de génie sanitaire.

Pour être en mesure de participer efficacement à la gestion du volet sanitaire des crises (accidents naturels, accidents technologiques etc.), ou des crises sanitaires qui ne seraient pas circonscrites à un établissement (pandémie de grippe aviaire etc.), les ARS devront avoir tissé des liens avec les services de l’État chargés de la protection civile, afin notamment d’articuler mieux qu’aujourd’hui les « plans blancs » des hôpitaux et les « plans rouges » des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS).

5. Confier ou non la gestion du risque aux ARS relève d’un choix stratégique fondamental quant à l’organisation de notre système de santé

Le code de la sécurité sociale fait mention de la « gestion du risque » mais n’en donne pas de définition. Il s’agit selon M. Frédéric van Roeckeghem (89) d’un concept économique qui désigne l’ensemble des actions visant à identifier et à réduire les risques qui pèsent sur les actifs d’une entreprise (cf. encadré ci-dessous).

DÉFINITION DE LA « GESTION DU RISQUE »

La gestion du risque vise à identifier et à réduire les risques qui pèsent sur les actifs d’une entreprise – pour un assureur, il s’agit des contrats avec ses assurés. La gestion du risque consiste donc à accroître la valeur de ces contrats, c’est-à-dire à sélectionner les risques, à les tarifer au mieux et à réduire le coût des sinistres.

Ce concept s’applique-t-il à l’assurance maladie, investie d’un monopole et obligée d’offrir une couverture universelle ? Certes, elle ne peut pas sélectionner ses contrats, mais il est légitime qu’elle mette en œuvre d’autres actions de gestion du risque, en vue de restaurer la soutenabilité de notre système d’assurance maladie obligatoire.

La gestion du risque passe en effet par différents types d’actions :

– connaître le risque, c’est-à-dire les comportements des assurés, leurs déterminants, et les facteurs de coût du risque et de son évolution– d’où l’intérêt pour l’assurance maladie de disposer de systèmes d’information exhaustifs, y compris en ce qui concerne l’hôpital et le secteur médico-social, et des capacités techniques nécessaires à leur exploitation ;

– prévenir les sinistres, en agissant sur le comportement des assurés ;

– limiter l’aggravation des sinistres : à ce titre, l’assurance maladie finance notamment des actions de prévention destinées aux assurés en affection de longue durée (ALD) (90) ;

– réduire les coûts de la réparation des sinistres, en promouvant un recours aux soins plus pertinent et en maîtrisant les coûts de production des soins par des actions visant à infléchir les pratiques soignantes (91) ;

– fournir des services à l’assuré ou au fournisseur de prestations, par exemple en mettant à la disposition des médecins des profils de prescription leur permettant d’auto-évaluer leurs pratiques.

Au cours de ses travaux, la mission a plusieurs fois été conduite à étudier les avantages et les inconvénients d’un transfert aux ARS de la gestion du risque et, nécessairement, des équipes de l’assurance maladie qui, au sein des CPAM et des URCAM, opèrent la gestion du risque (ces équipes représentant presque un tiers des 80 000 agents de l’assurance maladie, d’après les informations fournies à la mission).

Votre rapporteur souligne qu’il s’agit là d’un choix fondamental, qui doit procéder d’une option stratégique fondamentale sur l’organisation de notre système de santé :

– transférer la gestion du risque aux ARS permettrait d’unifier totalement le pilotage régional du système de santé, lui conférant ainsi une grande lisibilité. Cela pourrait aussi, selon la ministre de la santé (92), contribuer à une meilleure prise en compte des questions financières par les administrations chargées de la planification sanitaire. En revanche, une telle mesure reviendrait à cantonner l’assurance maladie à un rôle de simple payeur, et irait de ce fait dans le sens d’une véritable « étatisation » du système de santé ;

– confier la gestion du risque à une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM), distincte de l’ARS, serait cohérent avec une organisation du système de santé reposant sur la distinction des missions d’assureur, chargé de réguler le système de santé en exerçant une fonction de remboursement avisé des soins, et des missions d’organisateur de l’offre de soins, chargé de planifier l’offre et de gérer les structures de production de soins.

Les deux options méritent d’être examinées.

Quel que soit le schéma retenu, il faudra que l’articulation entre les services déconcentrés de l’État et le réseau de l’assurance maladie soit réglée de façon à éviter les relations conflictuelles et les luttes de pouvoir qui pourraient compromette l’efficacité du pilotage territorial des politiques de santé.

a) Premier scénario : la voie unitaire, suivant laquelle une seule structure, l’ARS, serait chargée à la fois de l’organisation de l’offre de soins et de la régulation des dépenses de santé

• L’hypothèse d’un cumul des fonctions de régulation des dépenses et d’organisation de l’offre de soins.

Les tenants de cette option, que l’on trouve notamment parmi les administrations sanitaires et sociales de l’État, plaident pour la concentration de la planification de l’offre et de la régulation financière dans la même main. Ils avancent pour cela trois raisons principales :

1° Si les ARS étaient chargées à la fois de la planification hospitalière et de la gestion du risque, elles seraient plus efficaces que l’assurance maladie pour mettre en œuvre des actions de maîtrise médicalisée des dépenses à l’hôpital.

On doit d’ailleurs noter que les représentants des caisses eux-mêmes, tant pour la CNAMTS que pour le RSI et la MSA, ont fait état devant la mission des difficultés que rencontrent leurs services pour mener à l’hôpital des actions de gestion du risque. On pourrait donc soutenir, comme M. Benoît Péricard, directeur du centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy que les médecins-conseil de l’assurance maladie gagneraient en autorité auprès des praticiens, notamment hospitaliers, s’ils étaient rattachés aux ARS et non à l’assurance maladie.

2° Il serait incohérent de vouloir responsabiliser l’ARS par rapport à des objectifs d’efficience du système de santé sans lui donner les moyens d’agir sur le niveau des dépenses de santé, comme M. Philippe Ritter l’a déclaré à la mission.

3° Pour mettre en œuvre des politiques d’efficience, les ARS doivent disposer à la fois d’outils de planification et d’outils d’orientation des pratiques. Ainsi, lors de son audition par la mission, la ministre de la santé (93) a estimé que les actions tendant à coordonner les acteurs dans une organisation globale de l’offre de soins et celles qui tendent à améliorer les pratiques constituent deux volets indissociables de la politique d’accroissement de l’efficience du système de santé.

Elle a rappelé a contrario que le dispositif de permanence des soins est déjà piloté de façon duale – les fonctions d’organisation étant confiées aux préfets avec le concours des conseils départementaux de l’ordre des médecins et les fonctions de régulation étant confiées aux URCAM – et a souligné que le bilan de ce dispositif est décevant : la permanence des soins n’est pas garantie efficacement sur l’ensemble du territoire, alors que le coût du dispositif a dépassé ce qui était initialement prévu.

Dans le même sens, Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, a fait valoir devant la mission que si la régulation et l’organisation de l’offre de soins étaient dissociées, il serait plus difficile à l’ARS de promouvoir des outils contractuels auprès des producteurs de soins. En revanche, elle a jugé que certaines actions de gestion du risque orientées vers les assurés, et non vers les producteurs, ne devaient pas nécessairement relever de l’ARS, citant notamment les dispositifs d’intervention auprès des patients atteints de maladies chroniques (disease management), ainsi que le contrôle des conditions d’ouverture des droits et de liquidation des prestations, et les contrôles relatifs à certains actes.

Cependant, pour ne pas compliquer la gestion du personnel des futures ARS, la ministre n’envisage pas de leur transférer les personnels compétents des CPAM. Celles-ci pourraient opérer la gestion du risque pour le compte des ARS dans le cadre d’une délégation conventionnelle.

• Votre rapporteur estime que ce scénario de réforme conduit soit à une étatisation de fait de l’assurance maladie, soit à une gouvernance qui risque de s’avérer instable.

Confier la gestion du risque à l’échelon régional aux ARS reviendrait en effet à ce que deux têtes de réseau (l’État et l’UNCAM) aient un opérateur régional unique. Un tel schéma comporterait un risque évident de pilotage en double commande, avec ce que cela engendrerait de pertes d’efficience et d’efficacité dans le pilotage du système de santé. Lors de son audition par la mission, la ministre a d’ailleurs reconnu ce risque et admis que la création d’ARS dotées de fonctions de régulation a pour corollaire l’unification du pilotage national du système de santé. Pour votre rapporteur, cela irait dans le sens d’une étatisation du système – dès lors qu’il paraît difficile de confier à l’assurance maladie le contrôle d’une Agence nationale de santé (ANS) – ou d’un succédané d’ANS, qui aurait autorité sur les directions d’administration centrale.

Par ailleurs, confier les fonctions de régulation aux ARS sans y rattacher directement les équipes compétentes des CPAM risquerait de causer des dysfonctionnements. En effet, la CNAMTS continuerait à piloter les CPAM pour leurs fonctions de remboursement et pour les contrôles s’y rapportant. Or la frontière entre ces activités et les actions de gestion du risque étant parfois ténue – comme le reconnaît M. Philippe Ritter quand il souligne l’imprécision de la notion de « gestion du risque » (94) –, dans le schéma proposé par la ministre, le pilotage des CPAM risquerait d’être éclaté entre la CNAMTS et l’ARS, avec des risques de pertes d’efficience du réseau de l’assurance maladie.

Cantonner l’assurance maladie à un rôle de simple payeur irait en outre à l’encontre de l’orientation de la réforme de 2004 (95). En effet, depuis 2004, l’assurance maladie a considérablement développé ses capacités de gestion du risque et commence à obtenir des succès. Comme les représentants des caisses rencontrés par la mission, tant à Paris que sur le terrain, l’ont souvent souligné, le réseau de l’assurance maladie est en mouvement. Il serait donc regrettable de rompre la dynamique créée autour de la gestion du risque par la réforme de 2004, d’autant que la situation dégradée de nos comptes publics ne nous permet pas d’amortir les pertes d’efficiences, même transitoires, que le transfert de cette fonction aux ARS engendrerait inévitablement. En effet, M. Dominique Libault, directeur de la sécurité sociale, a expliqué devant la mission que les réorganisations institutionnelles importantes engendrent souvent des pertes d’efficience pendant la mise en œuvre de la réforme, comme cela a été le cas à l’occasion de la création du RSI.

Par ailleurs, comme l’a relevé, à juste titre, le directeur général de la MSA, si les caisses étaient dessaisies de la mise en œuvre opérationnelle de la gestion du risque, elles seraient moins incitées à négocier des avancées en matière de maîtrise médicalisée des dépenses en contrepartie des augmentations tarifaires conventionnelles.

Surtout, la gestion du risque repose sur des systèmes d’information que seules les caisses possèdent, car ils sont constitués par les informations relatives à la liquidation des remboursements. Comme l’a souligné devant la mission M. Denis Ducasse, chef du bureau des systèmes d’information hospitaliers et du PMSI au ministère de la santé, ce sont en effet les mêmes informations qui servent à la fois à la production de soins et à la gestion du système de santé. Pour la gestion du risque, M. Yves Humez, directeur général de la MSA, a souligné que les données utilisées sont des informations fines, issues d’agrégations complexes : pour que les systèmes d’information soient configurés de façon à permettre ces opérations, il faut que les liquidateurs des prestations et les gestionnaires du risque collaborent, ce qui suppose de ne pas les éloigner ; en tout état de cause, l’exploitation des systèmes d’information de l’assurance maladie, configurés pour les tâches de remboursement, est trop complexe pour que les ARS puissent les exploiter sans aide.

Enfin, placer sous la même commande l’organisation de l’offre de soins d’une part, et la régulation financière du système de santé – c’est-à-dire la fonction d’achat de soins – d’autre part, risquerait d’entretenir une certaine confusion des rôles et des intérêts. Il est en effet à craindre qu’affranchie du regard d’un financeur externe, l’institution qui organise l’offre de soins ne soit pas suffisamment incitée à accroître l’efficience des producteurs de soins et à mener les restructurations nécessaires, surtout si cette institution est également chargée de gérer directement l’offre hospitalière publique. Dans ce cas, on peut craindre que ses décisions en matière de régulation soient orientées par ses responsabilités de gestionnaire, dans un sens privilégiant les structures dont elle est responsable, par exemple en freinant le développement d’alternatives à l’hospitalisation. De même, si le régulateur doit lui-même gérer les adaptations des structures nécessaires à ses actions de contrôle ou à l’application d’une politique tarifaire dynamique, il risque d’éviter toute action forte.

b) Second scénario : la voie du dialogue entre une ARS chargée d’organiser l’offre de soins et la politique de santé publique d’une part, et une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM) régulatrice des dépenses de santé d'autre part

• La viabilité financière de notre système d’assurance maladie dépendant largement de l’accroissement de son efficience, votre rapporteur juge indispensable de restructurer la fonction de régulation du système de santé.

Dans un système centralisé comme le nôtre, le responsable in fine de la gestion du système de santé est éloigné des acteurs de terrain, alors que le niveau de nos dépenses de santé dépend fortement de la gestion quotidienne du système de soins, comme en témoignent les économies importantes que les premières actions de maîtrise médicalisée ont permis de réaliser. De l’avis général, l’excès de centralisme déresponsabilise les acteurs, limite les initiatives et favorise l’inertie, protégeant ainsi les producteurs de soins peu performants en termes d’efficience, voire de qualité des soins.

Cela plaide en faveur d’une meilleure structuration de la fonction de régulateur des dépenses de santé, fonction que l’assurance maladie n’assure pas pleinement aujourd’hui et qui devrait répondre à cinq critères :

– la régulation quotidienne du système de santé doit être déconcentrée, avec des régulateurs régionaux responsabilisés et dotés des marges de manœuvre nécessaires ;

– le régulateur doit être autonome par rapport à l’organisateur de l’offre de soins, surtout si celui-ci est aussi le gestionnaire direct de l’offre hospitalière publique ;

– le régulateur doit disposer de marges de manœuvre dans l’exercice de sa fonction d’achat de soins, afin d’orienter les patients vers les producteurs de soins le plus efficients, par exemple dans le cadre des ententes préalables ;

– la régulation doit reposer sur des mécanismes de marché – comme la T2A – ou au moins de négociation, et pas seulement sur des mécanismes de planification ;

– le régulateur doit se concentrer sur ses fonctions de régulation, et ne pas être chargé de fonctions relevant de l’organisation de l’offre de soins.

M. Frédéric van Roeckeghem (96), a d’ailleurs indiqué à la mission que la plupart des systèmes de soins étrangers reposent sur des unités de régulation représentant 100 000 à 1,5 million d’assurés, et que les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation des dépenses sont le plus souvent séparées, notamment dans les pays où l’offre hospitalière publique est importante. En outre, dans la quasi-totalité des pays de l’OCDE, la planification aurait été abandonnée au profit de mécanismes de marché, l’usage résiduel de la planification étant assorti d’une exigence d’efficience des structures.

• Pour ces raisons, votre rapporteur juge préférable d’opérer une séparation entre le régulateur du système, chargé des fonctions de remboursement avisé des soins, et l’organisateur de l’offre de soins, chargé de la planification de cette offre et de la gestion du secteur public hospitalier.

Ainsi seraient créées les conditions d’un dialogue équilibré entre l’ARS organisatrice de l’offre de soins et une DiRAM, aux missions centrées sur les fonctions de régulation. Alors que la première option repose sur une logique d’organisation du système de santé par secteurs (ville / hôpital / médico-social), celle-ci se fonde davantage sur une logique de métiers en distinguant :

– le métier d’assureur, pleinement exercé, qui consiste à gérer le risque, c’est-à-dire à mener des contrôles et des actions visant à infléchir les comportements (sur les professionnels comme sur les patients) pour diminuer la dépense dans le respect des droits des assurés – ce métier de « rembourseur avisé » est celui de l’assurance maladie ;

– le métier d’organisateur de l’offre de soins, pour lequel les DDASS et les DRASS ont déjà acquis une grande expérience dans le champ hospitalier, et qui consiste à organiser l’égal accès aux soins, dans un souci de qualité et d’efficience, et à piloter des actions de santé publique – ce métier serait celui de l’ARS.

Ce type de gouvernance a été adopté dans plusieurs pays européens.

SÉPARATION DES FONCTIONS DE RÉGULATION ET D’ORGANISATION DU SYSTÈME DE SANTÉ COMPARAISONS INTERNATIONALES

Dans les pays d’Europe du Nord, la séparation de la fonction de régulation (ou d’achat de soins) de celle de fournisseur de soins a été au cœur des dernières réformes du système de santé, l’objectif étant d’abord d’accroître la qualité, notamment en réduisant les délais d’attente, tout en maîtrisant la dépenses.

En Suède, la réforme Ädel, adoptée en 1992, instaure une sorte de marché interne : une distinction est faite entre acheteurs de soins et prestataires. Les acheteurs, à savoir les comtés eux-mêmes, négocient avec les hôpitaux afin d’établir des contrats d’activité et de rémunération fondés le plus souvent sur un paiement à la pathologie. Certains champs comme la psychiatrie, la gériatrie ou les urgences ne sont pas inclus dans ce type de contrat et bénéficient d’un remboursement des coûts. Pour les radiographies, les analyses de laboratoires et certains autres services, un système de fixation interne des prix est mis en place afin de développer la concurrence.

En Finlande, la réforme de 1993 va dans le même sens. Elle permet aux municipalités de mener une politique active, notamment en achetant des services de santé. Elles peuvent, par exemple, signer des contrats avec des établissements hospitaliers, les revenus des hôpitaux dépendant alors de la demande exprimée par les municipalités pour les soins de leurs administrés.

Au Danemark, les réformes des années 2000 ont conduit à supprimer les liens entre les hôpitaux et les comtés, gestionnaires du système de santé.

En Angleterre, les hôpitaux sont incités à adopter un statut de fondation et les Primary Care Trusts, autorités locales responsables de la régulation des dépenses, passent des contrats avec les établissements mais ne sont pas responsables de leur gestion.

Source : Les systèmes de santé nationaux du nord de l’Europe et l’influence des modèles libéraux durant la crise des années quatre-vingt-dix, S. Chambaretaud et D. Lequet-Slama, revue française des affaires sociales n° 4-2003.

Les textes pourraient alors fixer les règles encadrant le partenariat entre la DiRAM et l’ARS, par exemple en organisant leur travail en commun sur le PRAM, notamment pour son volet hospitalier.

• Une telle répartition des fonctions conduirait à une reconfiguration de l'échelon régional de l'assurance maladie, en contrepoint de la création des ARS.

D’une part, le réseau de l’assurance maladie serait recentré sur son métier d’assureur. Il continuerait ainsi à assurer ses missions de contrôle et de gestion du risque, mais il interviendrait davantage dans les établissements de soins, tant pour y effectuer des contrôles relatifs à la tarification ou à l’adéquation du mode de prise en charge du patient à ses besoins, que pour agir sur les pratiques des soignants. En revanche, il abandonnerait à l’ARS les compétences des URCAM relevant de l’organisation du système de soins (en matière de démographie médicale, de modes d’exercice médical, de permanence des soins etc.).

D’autre part, les ARS seraient concentrées sur leur mission d'organisation du système de soins et disposeraient, pour organiser l’égal accès aux soins, de tous les outils qui ne relèvent pas de la fonction de gestion du risque, notamment les dotations de missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC), ainsi que les enveloppes de l’assurance maladie destinés à la permanence des soins, à la restructuration des modes d’exercice médical et aux actions visant à pallier les difficultés liées à la démographie des professions de santé (ces enveloppes relevant pour la plupart du fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins, FIQCS).

Les personnels des CRAM et de l’échelon régional du service médical qui participent à la planification hospitalière devraient être transférés à l’ARS.

La structuration d’un vrai pôle régional du régime général constituerait une avancée importante dans la simplification de l’organisation de son réseau, et le renforcement de son efficacité.

B. QUEL QUE SOIT LE SCHÉMA RETENU POUR SON PILOTAGE RÉGIONAL, LE SYSTÈME DE SANTÉ NE POURRA PAS ÊTRE PILOTÉ EFFICACEMENT SANS OUTILS NOUVEAUX

Il ressort des travaux de la mission que les outils de planification et d’efficience existants sont insuffisants pour un pilotage efficace du système de santé, notamment pour ce qui concerne les outils informatiques.

1. Les outils de planification de l’offre de soins et de programmation des politiques de santé doivent être rénovés, mis en cohérence et enrichis

a) Charger les ARS de mettre en cohérence les différents schémas d’organisation, voire les fusionner, et établir des procédures d’élaboration coordonnées et partagées

Au minimum, les ARS devront assurer la cohérence des différents outils de planification de l’offre de soins (le SROS, le PRIAC ainsi que les schémas départementaux et régionaux d’organisation sociale et médico-sociale) et de programmation des politiques de santé (PRSP et PRAM).

En effet, comme on l’a montré, il y a entre ces différents outils des zones de recoupement. La plupart des PRSP comportent des volets relatifs au grand âge, qu'il serait pertinent de mieux articuler avec les schémas gérontologiques départementaux. Il en va de même de leurs volets consacrés à la santé des enfants et des jeunes, qu’il faut coordonner avec les schémas départementaux « enfance –famille », et de leurs volets intéressant la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques, à rapprocher des schémas départementaux « enfants et adultes handicapés », « accès aux soins » et « pratiques addictives ». En outre, des volets spécifiques aux personnes détenues pourraient utilement être mis en cohérence avec les plans départementaux d’insertion et les plans départementaux « solidarité santé ».

Dans le même sens, lors de son audition par la mission (97), la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports a estimé qu'il serait nécessaire de fusionner le SROS, le PRSP, le PRIAC et le PRAM dans un « plan régional de santé » (PRS) unique. Celui-ci planifierait entre autres les autorisations de structures médico-sociales relevant de la compétence de l’État. La FHF partage ce point de vue, en proposant un « schéma régional de l’organisation de l’offre de soins » (SROOS) qui pourrait intégrer les SROS, les PRIAC et des éléments d’organisation de l’offre de soins de ville. D’autres interlocuteurs de la mission ont, par contre, émis des réserves sur cette idée, faisant valoir la nature très différente des documents en question, qui vont de la programmation financière pour les PRIAC à la planification des infrastructures de soins et de leur activité pour le SROS. Si le cas du PRIAC mérite un examen particulier, car il ne contient que des éléments de programmation financière établis sur la base des schémas d’organisation sociale et médico-sociale, votre rapporteur estime pourtant qu’une telle fusion présenterait trois avantages majeurs :

– elle garantirait la suppression des doublons inutiles et consommateurs de temps médico-administratif dans l'élaboration de ces différents outils ;

– elle permettrait l’harmonisation des procédures et des calendriers d’élaboration de ces outils ;

– elle donnerait à la programmation pluriannuelle des politiques de santé une lisibilité accrue et bienvenue.

Il faudrait également inclure dans un tel PRS les éléments de planification relatifs à l'organisation des soins de ville notamment :

– le zonage des zones déficitaires en offre de soins dans lesquelles les médecins libéraux sont éligibles à certaines aides à l’installation ;

– les dispositifs d’organisation de la permanence des soins des médecins, mais également des autres professions de santé – notamment les pharmaciens, les infirmières libérales et les transporteurs sanitaires –, conformément aux recommandations du rapport précité de M. Georges Colombier sur la prise en charge des urgences médicales ;

– les outils d’approbation et de financement des réseaux de santé ;

– les outils d’aide à la structuration de l’offre, tendant notamment à favoriser les structures d’exercice collectif, voire pluridisciplinaire (centres de santé, maisons de santé pluridisciplinaires etc.).

De plus, pour une meilleure cohérence du « plan régional de santé » avec les schémas départementaux et régionaux d’organisation sociale et médico-sociale, il faudrait harmoniser l’architecture de ces schémas, autour d’une trame commune de chapitres, comme l’ont recommandé les représentants du secteur médico-social rencontrés par la mission à Marseille. En outre, il faudra que le « plan régional de santé » fasse une large place aux spécificités régionales, ce qui est le cas des actuels PRSP, qui doivent décliner une centaine d’objectifs et de plans nationaux.

b) Laisser aux ARS des marges de manœuvre financières et organisationnelles

• Des marges de manœuvre financières.

L’expérience des ARH montre que pour organiser efficacement l’offre de soins, et notamment pour procéder à des restructurations à des fins d’efficience, les ARS auront besoin de marges de manœuvre financières leur permettant notamment :

– d’adapter davantage qu’aujourd’hui les orientations nationales de la politique de santé publique aux spécificités régionales, comme l’a montré le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland ;

– de trouver des modes efficients d’organisation de la permanence des soins, ce qui suppose des marges de manœuvre financières et règlementaires, comme l’a montré le rapport précité de M. Georges Colombier ;

– de structurer l’offre de soins primaires, en favorisant l’exercice collectif ;

– d’influer sur les pratiques des soignants, notamment en déployant les outils contractuels prévus à cet effet dans le cadre conventionnel ;

– d’accompagner les établissements hospitaliers et médico-sociaux dans leurs restructurations, dans le cadre de leurs contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM).

En conséquence, il faut déléguer aux ARS les crédits consacrés par l’État et par l’assurance maladie à l’organisation de l’offre de soins et à la prévention.

Il s’agit, pour la prévention, des crédits de l’État regroupés dans la mission ministérielle « Santé » (déjà déconcentrés pour une large part), de ceux du fonds national de prévention d’éducation et d'information sanitaires (FNPEIS) du régime général et de ceux des fonds de prévention de la MSA et du RSI.

Pour l’organisation de l’offre de soins ambulatoires, il s’agit surtout des crédits du fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) et de ceux consacrés au dispositif de permanence des soins.

Pour l’organisation de l’offre hospitalière, il s’agit avant tout des dotations de MIGAC, ainsi que des crédits du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), et, comme l’a souligné devant la mission Mme Annie Podeur, des crédits d’investissement prévus dans le cadre du plan « hôpital 2012 ».

Ces outils financiers, dont il faut souligner la multiplicité et la complexité, pourraient utilement être regroupés dans une enveloppe fermée qui serait déléguée aux ARS pour financer l’ensemble de leurs actions tendant à structurer l’offre de soins. Cette enveloppe permettrait, le cas échéant, de corriger certains effets du financement des soins à l’activité (T2A pour les établissements, paiement à l’acte pour les praticiens libéraux), lorsque des motifs d’intérêt général le justifient. Avec une enveloppe bien identifiée, le coût de ces actions serait en effet plus lisible qu’aujourd’hui. C’est ainsi que les ARS pourront exercer pleinement leur fonction d’organisation de l’offre.

Pour que les ARS disposent de véritables marges de manœuvre financières, ces enveloppes doivent être fongibles, sous réserve des règles de fongibilité asymétriques déjà proposées pour sécuriser les enveloppes consacrées à la prévention et au secteur médico-social.

• Des marges de manœuvre organisationnelles.

De nombreux acteurs rencontrés par la mission souhaitent également que les ARS disposent de marges de manœuvre organisationnelles, voire réglementaires, dans l’organisation de l’offre de soins.

L’article 66 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a d’ores et déjà renforcé les pouvoirs donnés aux directeurs d’ARH de structurer, le cas échéant de manière contraignante, la coopération au niveau d’un territoire de santé en créant des groupements de coopération sanitaire (GCS) de territoires qui pourront désormais être érigés en établissements de santé et dotés de compétences obligatoires.

Certains, comme le directeur de l’ARH de Bourgogne, souhaitent également que le SROS et le contrat État/ARH ne fixent pas toutes les opérations à accomplir, mais laissent à l’ARH une marge d'appréciation, par exemple pour lui permettre de conserver le service de chirurgie d’un centre de lutte contre le cancer qui n’est pas en déficit, même si le SROS ne prévoit qu’une autorisation de chirurgie pour un CHU et ce centre.

c) Développer de nouveaux outils pour favoriser l’adéquation de l’offre de soins aux besoins de santé

Un consensus se dégage pour considérer que les ARS ne pourront pas structurer efficacement l’offre de soins primaires sans disposer d’outils nouveaux d’organisation du secteur ambulatoire. Il ressort notamment des travaux de la mission que les acteurs attendent des ARS qu’elles aient un rôle à jouer dans la formation initiale des professionnels de santé et qu’elles mettent en œuvre les outils d’organisation de l’offre ambulatoire qui pourraient être élaborés à l’issue des États généraux de l’organisation de la santé.

• Les ARS pourraient utilement être chargées de fixer les quotas de formation initiale des professionnels de santé.

S’agissant des formations paramédicales, les ARS pourraient se voir confier les compétences des DRASS, s’appuyant sur une évaluation approfondie des besoins de formation. En effet, si l’organisation des formations paramédicales (98) relève des compétences de la région (article L. 4311-7 du code de la santé publique), la DRASS a en charge notamment la fixation des quotas de formation sur la base d’un numerus clausus national (article L. 4382-2 du même code). Les ARS pourraient être chargées de fixer ces quotas, et, pour que leurs décisions soient plus cohérentes qu’aujourd’hui avec les besoins de formation, s’appuyer sur une évaluation des besoins menée par l’observatoire régional de la santé (ORS) avec le comité régional de l’observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), et sur l’avis du conseil régional. Cela irait dans le sens d’une meilleure adéquation des quotas de formation avec les besoins constatés.

S’agissant des études de médecine, il semble que le lieu de formation des médecins détermine largement leur lieu d’installation future, comme l’a indiqué à la mission M. Michel Autès, vice-président de l’association des régions de France, qui souligne que 80 à 85 % des professionnels de santé formés dans une région s’y installent. Le rapport 2006 de l’ONDPS, ayant par ailleurs montré que la répartition du nombre d’étudiants admis en PCEM2 (numerus clausus) et en 3ème cycle (internes) est inégale entre les régions et les interrégions, cette situation plaide pour « un rééquilibrage régional ou, de préférence, interrégional des affectations des étudiants (numerus clausus et internes) », tenant compte des besoins de formation ainsi que des inégalités régionales de répartition des médecins en exercice déjà existantes. La déconcentration de certains aspects de l’organisation de la formation des médecins peut ainsi contribuer à réduire les inégalités interrégionales en matière de démographie médicale et à assurer une meilleure adéquation entre les formations de médecins et les besoins. Dans ce sens, l’organisation des études de médecine pourrait être modifiée de trois façons :

 Moduler plus fortement le numerus clausus d’un point de vue géographique, au niveau régional mais aussi infrarégional, afin de corriger les disparités dans la répartition des praticiens et de réduire les risques d’inégalités d’accès aux soins, comme le préconise la Conférence nationale de santé (99).

 Déconcentrer les « épreuves classantes nationales », ainsi que le recommande le rapport 2005 de l’ONDPS, qui juge « urgent de transformer les épreuves classantes nationales en épreuves classantes interrégionales », pour maîtriser la répartition géographique des internes.

 Fixer la liste des postes ouverts à l’internat en veillant à rapprocher le nombre de postes ouverts du nombre d’étudiants admis aux épreuves classantes, afin de réduire le taux d’inadéquation entre les besoins de formation et les choix des étudiants. Le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, qui recommande cette mesure, considère en effet qu’elle « amènerait mécaniquement plus d’étudiants à la médecine générale ».

• Les ARS devraient être munies des futurs outils de régulation de la répartition géographique des professionnels de santé.

Si à la suite des États généraux de l’organisation de la santé étaient créés de nouveaux outils d’orientation, éventuellement contraignants, de la répartition territoriale des professionnels de santé et de leurs modes d’exercice, ceux qui pourraient être déconcentrés devraient être confiés aux ARS.

Un consensus s’est dégagé parmi les interlocuteurs de la mission pour souhaiter que l’exercice médical groupé soit encouragé, notamment dans les zones déficitaires en offre de soins. Les « centres de santé » et « maisons de santé pluridisciplinaires » permettent en effet des modes d’exercice variés (exercice salarié, à temps partiel, en cabinet secondaire etc.), plus attractifs pour les jeunes générations de médecins que l’exercice libéral en cabinet individuel, comme l’analyse M. Jean-Jacques Juilhard dans son rapport précité sur la démographie médicale. Le rapport annuel 2007 du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) ajoute que le regroupement des professionnels « pourrait améliorer l’efficacité productive de la médecine libérale », par des « pratiques plus collectives », et « permettre de coordonner la prise en charge médicale des patients ». Il souligne aussi que le développement de programmes de disease management, permettant que la charge des maladies chroniques puisse reposer en partie sur d’autres professionnels que les médecins, exige d’ailleurs un regroupement des praticiens pour mutualiser des postes d'infirmières.

Or le HCAAM constate que « le regroupement s’opère actuellement en France dans le cadre de réalisations disparates et aléatoires » et plaide pour « un soutien fort de la part des pouvoirs publics » à l’image d’autres pays qui ont « une politique plus volontariste » visant à développer les capacités d’investissement et de recrutement des structures d’exercice médical groupé. Dans ce but, Mme Annie Podeur, directrice du DHOS, a émis l’idée que les ARS pourraient conclure des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens avec les centres de santé, en prévoyant des rémunérations forfaitaires le cas échant. De même, les représentants des médecins libéraux rencontrés par la mission en Bourgogne ont souligné l’intérêt de nouveaux modes d’organisation exploitant les complémentarités ville/hôpital, notamment avec les hôpitaux locaux, qui font de la médecine de proximité et pourraient constituer le socle de maisons de santé.

Les travaux de la mission ont également mis en lumière l’attente profonde des usagers comme des professionnels vis-à-vis des États généraux de l’organisation de la santé en matière de démographie médicale. Sans entrer dans le détail des mesures qui pourraient être proposées dans le cadre de ces prochaines négociations, votre rapporteur souligne que jusqu’à présent, seules des mesures incitatives ont été mises en œuvre qui n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. L’existence de zones déficitaires en témoigne et comme le relève M. Jean-Jacques Juilhard dans son rapport précité, « la possibilité de recourir à des mécanismes plus coercitifs s’installe progressivement dans le débat ». Ainsi, l’Académie de médecine envisage de recourir à de tels outils pour le cas où l’orientation des étudiants ne suffirait pas à améliorer la situation (100) et le rapport 2007 du HCAAM a quant à lui jugé nécessaire de dépasser la politique actuelle de « moindre contrainte ». M. Jean-Jacques Juilhard relève enfin les déclarations tenues le 18 septembre 2007 (101) par le président de la République, suivant lesquelles « en matière de démographie médicale, il faut au minimum s’inspirer des négociations entre l’assurance maladie et les infirmières ». Pour votre rapporteur, le plus important n’est pas que ces mesures soient contraignantes, désincitatives ou simplement incitatives, mais qu’elles soient efficaces.

2. Il faut de nouveaux outils au service de l’efficience du système de santé

a) L’ARS, dans sa fonction d’organisation de l’offre de soins, devra disposer d’outils lui permettant de promouvoir des organisations efficientes et de suivre la performance des producteurs de soins

Devant la mission, la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, a jugé nécessaire de doter les ARS d’outils leur permettant d’améliorer l’efficience de l’offre de soins, précisant qu’à cette fin, la contractualisation entre l’ARS et les producteurs de soins devait prendre une orientation médico-économique. Votre rapporteur partage ce point de vue : plutôt que les modes classiques de tutelle, la contractualisation avec les établissements devra être développée, incluant des objectifs d’efficience et de gains de productivité, ainsi que des modalités de suivi et d’évaluation.

En outre, pour inciter les directeurs d’hôpitaux à rechercher des gains de productivité, les ARS pourraient avoir sur eux davantage d’autorité que n’en ont les ARH : Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, a estimé devant la mission (102) qu’en cas d’efforts d’efficience insuffisants, les directeurs d’hôpitaux devraient pouvoir être sanctionnés par une mise en attente d’affectation. Les directeurs eux-mêmes devraient avoir des instruments juridiques nouveaux leur permettant une gestion active des ressources humaines : M. Alain Vasselle dans son rapport précité propose ainsi de leur permettre, dans le cas d’une externalisation de certains services (restauration, blanchisserie), de mettre du personnel à la disposition des entreprises privées auxquelles est concédée cette exploitation.

Pour piloter l’offre de soins de ville, des outils contractuels axés sur l’efficience pourraient offrir aux praticiens une rémunération forfaitaire en contrepartie d’inflexions de leurs pratiques, par exemple dans le sens du développement des soins de prévention et du suivi de cohortes de patients en affection de longue durée (programmes de disease management), ou en rémunération de leur participation à des projets d’intérêt général (action de santé publique, inclusion dans un réseau, projets territoriaux, interventions en établissements etc.), comme le propose la conférence des directeurs d’ARH (103). Votre rapporteur tient à souligner les avancées permises en la matière grâce aux articles 43 et 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, qui permettent aux CPAM et aux médecins de conclure des contrats d’adhésion prévoyant des rémunérations forfaitaires, soit en contrepartie d’engagements individualisés d’amélioration des pratiques – prescription, prévention etc. – (article L. 162-12-21 du code de la sécurité sociale), soit à titre expérimental, pour compléter le paiement à l’acte ou s’y substituer, par exemple pour le suivi des personnes atteintes d’une affection chronique. La promotion et le développement de ces outils devront être confiés aux ARS.

Mme Yolande Briand et M. Michel Rosenblatt, représentants de la CFDT, voient d’ailleurs dans ces rémunérations mixtes contractuelles la préfiguration d’un mode de rémunération commun à la ville et à l’hôpital, qui allierait des tarifs à l’acte et des forfaits, en contrepartie de missions d’intérêt général.

Certains acteurs, comme la fédération de l’hospitalisation privée (FHP) (104), vont plus loin et proposent, pour dégager des gains de productivité, que les ARS disposent de marges de manœuvre non seulement financières, mais aussi organisationnelles (voire réglementaires), par exemple pour développer la chirurgie ambulatoire en y consacrant non des ressources supplémentaires, mais des moyens dégagés par un assouplissement des taux d’encadrement des patients dans certains services (passant par exemple d’une infirmière pour 5 malades à une infirmière et une aide soignante pour 10 malades).

Enfin, comme Mme Annie Podeur l’a exposé devant la mission, un récent audit de modernisation (105) a montré qu’il manque aux ARH des tableaux de bord sur l’offre de soins, la qualité des soins, les dépenses hospitalières et leurs ressources humaines. Ces outils ne devraient être mis en place qu’en 2008, ce qui explique que le pilotage national des ARH ait jusqu’à présent été trop souple en matière de stratégie et de retour d’expérience (reporting).

b) Le régulateur de l’offre de soins doit mettre en œuvre la politique tarifaire fixée au niveau national et développer un programme inter-régimes de gestion du risque élaboré en lien avec l’ARS

• La politique tarifaire doit rester fixée au niveau national.

Devant la mission, certains intervenants se sont prononcés pour une modulation des tarifs de remboursement des soins de ville à l’intérieur d’un « tunnel » dont les bornes inférieures et supérieures seraient fixées dans les conventions nationales. C’est notamment le cas du syndicat des médecins libéraux, dont le président, M. Dinorino Cabrera, a fait valoir qu’une telle modulation permettrait de tenir compte des conditions locales d’exercice des médecins, notamment des frais d’installation.

Votre rapporteur estime cependant qu’un tel dispositif risquerait d’avoir des effets inflationnistes, et irait donc à l’encontre de l’exigence de maîtrise des dépenses. En revanche, des outils contractuels offrant aux praticiens des rémunérations forfaitaires peuvent répondre aux attentes des médecins libéraux.

• Si une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM) était créée, l’élaboration du PRAM devrait lui être confiée.

Pour la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, qui ne souhaite pas séparer les fonctions d’organisateur de l’offre de soins et de régulateur des dépenses de santé, le PRAM – programme régional commun à l’ensemble des organismes d’assurance maladie – doit être intégré au futur plan régional de santé (PRS).

Au contraire, dans le schéma de gouvernance proposé par votre rapporteur, l’élaboration du PRAM reviendrait bien entendu à la direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM). Toutefois, pour favoriser l’appropriation des objectifs de la politique de gestion du risque par l’autorité chargée d’organiser les soins, il serait utile que l’ARS soit associée à l’élaboration du PRAM. Une telle procédure serait d’ailleurs cohérente avec le fait qu’au niveau national, les grandes lignes de la politique de gestion du risque sont fixées en lien avec l’État, dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion (COG) des caisses.

• La définition d’un objectif régional indicatif des dépenses d’assurance maladie (ORDAM) de portée indicative serait utile.

La plupart des acteurs se prononcent en faveur d’une déclinaison régionale de l’ONDAM. En effet, un objectif régional des dépenses d’assurance maladie (ORDAM) renforcerait au moins la lisibilité de la politique de maîtrise des dépenses.

Mme Annie Podeur a également estimé devant la mission qu’un ORDAM, qui ne serait pas nécessairement voté par le Parlement, permettrait de réduire les inégalités interrégionales d’offre de soins en plaçant une contrainte financière sur les régions surdotées, qui pourraient alors inciter leurs établissements de santé à ne pas renouveler tous les départs.

Cependant, votre rapporteur considère qu’un tel ORDAM ne saurait avoir de portée qu’indicative, au moins dans un premier temps : il serait en effet difficile de le faire fonctionner en enveloppe fermée sans donner aux autorités régionales (ARS et DiRAM le cas échéant) le pouvoir de le faire respecter, c’est-à-dire d’agir sur les tarifs des prestations ou sur les taux de remboursement.

3. Les ARS devront s’appuyer sur des systèmes d’information exhaustifs

Il ressort des travaux de la mission que les systèmes d’information en matière de santé constituent des outils indispensables non seulement pour améliorer l’efficience des producteurs de soins, mais également pour piloter plus efficacement le système de santé. Les ARS, dont la création vise avant tout à renforcer l’efficience du système de santé, devront donc disposer à la fois :

– d’outils leur permettant de promouvoir l'informatisation de la production de soins, qui génère des gains de productivité ;

– des outils informatiques nécessaires au pilotage du système.

a) Le foisonnement et le cloisonnement qui caractérisent l’offre de systèmes d’information en santé compliquent le pilotage du système de santé et engendrent des pertes d’efficience

● L’offre de systèmes d’information en santé est marquée par son foisonnement et par son cloisonnement.

Ce double constat, énoncé devant la mission par M. Pascal Forcioli, directeur de l’ARH Picardie (106), est partagé par tous les acteurs du secteur informatique rencontrés par la mission. Selon M. Jean-François Penciolelli, directeur des activités françaises de la société Oracle relatives à la santé et ancien directeur de l’informatique à l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) (107), on recense près de 7 000 systèmes différents, dont l’interopérabilité n’est pas garantie faute de stratégie de mutualisation des équipements et des données.

M. Pascal Forcioli ajoute qu’il n’y a pas de culture du partage de données dans notre système de santé. De même, dans son rapport annuel 2007 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes constate que « le domaine de la santé se caractérise par un grand nombre de systèmes d’information interdépendants, mais dont les projets sont pilotés par des structures différentes », d’où une « atomisation du parc de logiciels » qui limite le développement de l’« interopérabilité », c’est-à-dire la possibilité de partager les données entre systèmes d’information. La Cour recense ainsi une vingtaine de logiciels de gestion de dossiers médicaux pour médecins de ville, et cite une étude de 2003 sur les systèmes d’information hospitaliers qui dénombre, dans 18 établissements, 16 logiciels différents, dont 7 développés en interne. Dans le même sens, M. Georges Colombier, dans son rapport précité, recommande de poursuivre l’informatisation des urgences « dans un souci constant d’interopérabilité avec les systèmes utilisés par les autres acteurs de la prise en charge des urgences médicales (SAMU, transporteurs sanitaires, plateaux techniques, services d’hospitalisation…) » et de « développer des systèmes informatiques recensant, à l’échelle d’un territoire de santé, les disponibilités de lits d’hôpital et de places en établissements ».

Le cloisonnement État/assurance maladie se retrouve ainsi dans le champ des systèmes d'information. L’assurance maladie a mis en place en 2004 un système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIR-AM) visant à mettre en chaîne l’ensemble des informations, y compris médicalisées, relatives au parcours de soins de chaque patient (cf. encadré ci-dessous). Par des dispositifs de codage utilisés par les praticiens, l’assurance maladie recueille elle-même les données relatives à la médecine de ville. Mais pour intégrer au SNIIR-AM les maillons de la chaîne de soins ayant trait à l’hospitalisation publique, l’assurance maladie dépend des données issues du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), retraitées par l’Agence technique d’information sur l’hospitalisation (ATIH – article R. 6113-33 du code de la santé publique). Certes, un Institut des données de santé a été créé sous la forme d’un GIP constitué entre l’État et les régimes d’assurance maladie pour assurer la cohérence des systèmes d’information utilisés pour la gestion du risque maladie et veiller à leur qualité (article L. 161-36-5 du code de la sécurité sociale), mais de l’avis général des interlocuteurs de la mission, il faut aller plus loin, par exemple dans l’exhaustivité des données du PMSI. Mme Annie Podeur a constaté devant la mission (108) qu’aujourd’hui, les systèmes d’information de l’État (l’ATIH, par exemple, qui traite notamment les données du PMSI  109)) sont moins développés que ceux de l’assurance maladie (SNIRAM  (110)) et l’Institut des données de santé ne parvient pas encore à assurer leur interopérabilité. L’exploitation de ce système pour la gestion du risque, notamment en vue d'actions sur les prescripteurs, sera plus fructueuse une fois que les hôpitaux se seront dotés de systèmes de facturation individuelle des actes pour chaque patient et d’identification personnelle des prescripteurs, ce qui devrait être fait en 2009.

Le SNIIR-AM

En application de l’article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale, l’assurance maladie a créé le système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIR-AM) « qui contribue :

 A la connaissance des dépenses de l’ensemble des régimes d’assurance maladie par circonscription géographique, par nature de dépenses, par catégorie de professionnels responsables de ces dépenses et par professionnel ou établissement ;

 A la transmission en retour aux prestataires de soins d'informations pertinentes relatives à leur activité et leurs recettes, et s’il y a lieu à leurs prescriptions ;

 A la définition, à la mise en œuvre et à l'évaluation de politiques de santé publique ».

Le SNIIR-AM recouvre donc :

– l’exhaustivité des données de remboursements de l’ensemble des régimes obligatoires individualisées par patient anonyme et qui portent sur la médecine de ville et les établissements de santé ou médico-sociaux ;

– le chaînage avec les données médicalisées du PMSI transmises par l’ATIH.

Ce système d’information introduit des informations médicales via :

– le code pathologie pour les patients en affections de longue durée et en maladie professionnelle ;

– les diagnostics pour les séjours hospitaliers ;

– les codages disponibles dans les feuilles de soins : le code CIP des médicaments délivrés, les codes détaillés des actes de biologie, des dispositifs médicaux et des actes de spécialités (codage CCAM).

Au total, ce système d’information, mis en œuvre à compter du 1er janvier 2004, permet de :

– calculer les dépenses prises en charge par l’assurance maladie par pathologie relevant des affections de longue durée (ALD) ;

– déterminer les parcours de soins des patients, en particulier les soins avant et après une hospitalisation pour une intervention donnée ;

– calculer les restes à charge (montant du ticket modérateur, dépassement) par catégorie de patients ;

– établir les profils d’activité et de prescription des professionnels de santé libéraux et les comparer aux recommandations professionnelles;

– établir les profils d’activité médicale des établissements de santé et comparer les modes de prise en charge des pathologies d’un établissement à l’autre.

Ces données sont accessibles, selon des conditions définies par la CNIL, aux partenaires de l’Assurance maladie : ministères, agences sanitaires, URML, organismes de recherche en santé, Institut des données de santé.

Source : informations fournies à la mission par M. Yvon Merlière, responsable du SNIIR-AM.

De récents rapports ont dressé un bilan très critique de l’état des systèmes d’information en matière de santé, comme celui de M. Jean-Jacques Jégou, sénateur (111). D’après les interlocuteurs de la mission, ce bilan mériterait d’être nuancé : s’il est vrai que la création du dossier médical personnel (DMP) connaît des difficultés, il faut noter que la France se classe au deuxième rang européen pour les dépenses en matière d’informatisation du système de santé (derrière l’Allemagne mais devant la Grande-Bretagne).

● Cette situation est regrettable car la maîtrise des données de santé est indispensable pour piloter efficacement le système de santé et le partage d’information permet d’importants gains de productivité.

Les systèmes d'information sous-tendent aujourd’hui la production de soins, qui crée des besoins de plus en plus importants de partage d’informations médicales, notamment :

– dans le cadre des réseaux de soins, avec les dossiers médicaux partagés, à l'image du « dossier commun de cancérologie » promu par l’INCa ;

– pour la prise en charge des urgences, qui nécessite d’accéder rapidement à l’historique médical du patient et de connaître en temps réel la disponibilité des équipes et des équipements lourds ;

– dans la gestion des établissements et l’organisation du système de santé, la T2A ayant intensifié les flux d’échanges de données ;

– pour la diffusion des bonnes pratiques et des référentiels professionnels, et pour l’aide à la prescription ;

– en réponse à un besoin croissant d’accès des patients à leurs données de santé personnelles et à des outils pédagogiques (sites internet médicaux, forums etc.).

La Cour des comptes observe d’ailleurs dans son rapport précité qu'avec l'informatisation de la production de soins, « la connaissance immédiate des informations médicales relatives à un patient est source d’économies, dans la mesure où elle évite les examens redondants ».

Or le foisonnement de systèmes d’informations atomisés limite les gains de productivité liés à l’informatisation de la production de soins, car il ne permet pas de mutualiser les coûts des infrastructures. Ainsi, M. Jean-François Penciolelli, représentant de la société Oracle, a fait observer à la mission (112) que 20 % seulement des dépenses de santé consacrées aux systèmes d’information vont à l’édition de logiciels spécialisés, activité à forte valeur ajoutée, contre 50 % en rémunération de services et 30 % en achat de biens d’équipement informatiques (hardware).

Par ailleurs, selon M. Pascal Forcioli, directeur de l’ARH de Picardie (113), on ne peut pas piloter le système de santé sans disposer de systèmes d’information : pour la maîtrise médicalisée des dépenses, il faut connaître la consommation de soins des assurés dans sa globalité, et pour établir des projets territoriaux de santé, il faut connaître l’offre de soins ambulatoires comme hospitaliers. En outre, pour attirer des médecins dans les zones déficitaires, il faudrait offrir aux praticiens des états prévisionnels de besoins et d’effectifs médicaux territoire par territoire. On notera également que M. Martial Olivier-Koehret, représentant de MG-France, a souhaité devant la mission (114) que le recueil des données relatives aux soins primaires soit mieux organisé, par exemple par un institut régional des données de santé, pour que l’offre de soins soit planifiée à partir d’un état des lieux précis des objectifs et des indicateurs de performance.

b) La réforme du pilotage régional du système de santé doit passer par une meilleure maîtrise de l’offre de systèmes d’information en santé

● Pour exercer ses fonctions d’organisation de l’offre de soins, les ARS devront avoir un accès direct aux principales sources de données, contrairement aux ARH.

M. Pascal Forcioli a regretté devant la mission qu’à chaque fois qu’une ARH a besoin d’informations, elle soit obligée d’adresser une requête formelle à la direction régionale du service médical (DRSM). C’est pour cette même raison que les directeurs de la DRASS et des DDASS rencontrés en Bourgogne par la mission ont souhaité que les futures ARS disposent de leurs propres systèmes d’information, mais interopérables avec ceux des autres acteurs.

Comme M. Denis Ducasse, chef du bureau des systèmes d’information hospitaliers et du PMSI au ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, l’a indiqué à la mission (115), ce sont les mêmes informations qui servent à la fois à la production de soins et à la gestion du système de santé – d’où l’attention portée à l’exhaustivité de ces informations dans le cadre de la T2A, du codage des actes ou du PMSI. Or c’est l’assurance maladie qui collecte ces informations – d’abord pour la liquidation des remboursements, puis pour la gestion du risque – dans le cadre du SNIIR-AM. Dès lors, il est indispensable que les ARS aient un accès direct au SNIIR-AM pour organiser efficacement le système de santé. Il serait également utile que les systèmes d’information des ARS soient reliés avec ceux des observatoires régionaux de santé (ORS).

● Pour accroître l’efficience du système de santé, les ARS devraient aussi promouvoir le partage des données de santé à l’échelle régionale et la mutualisation des infrastructures.

Pour gérer efficacement l’enveloppe affectée aux investissements informatiques dans le cadre du plan « hôpital 2012 » (1,5 milliard d’euros), c’est-à-dire éviter qu’une trop large part de cette enveloppe ne soit consacrée à des achats d’infrastructures plutôt qu’à l’élaboration de logiciels médicaux qui ont une plus forte valeur ajoutée, les ARS devront promouvoir la mutualisation des systèmes d’information hospitaliers, et surtout veiller à ce que les projets retenus reposent sur un véritable projet partagé entre établissements, et non sur la recherche opportuniste de financements supplémentaires. Il faudra aussi veiller à l’interopérabilité des systèmes d’information, conformément aux recommandations du récent rapport de M. Jean-Pierre Door sur le dossier médical personnel. (116)

Il est toutefois envisageable d’aller plus loin dans la mutualisation des moyens informatiques, en développant les infrastructures informatiques communes à la ville et à l’hôpital. En effet, la Cour des comptes constate qu’actuellement, les réseaux de soins ville / hôpital disposent rarement de systèmes d’information développés, constatant que « peu de réseaux disposent de systèmes d’information permettant, par des moyens autres qu’une simple messagerie, de partager des informations médicales » et que « ces systèmes sont très rarement interfacés avec les systèmes d’information propres des professionnels de santé », d’où des doubles saisines très consommatrices de temps médical.

C’est pourquoi Mme Annie Podeur (117) a estimé devant la mission que sans attendre le DMP, les ARS devront mettre à niveau les systèmes d’information hospitaliers et les rendre accessibles aux libéraux à travers des plateformes régionales de télésanté. Il s’agit de fluidifier efficacement le parcours des patients par un meilleur partage des dossiers, notamment au sein de réseaux de santé.

De même, M. Jean-François Penciolelli (118) a jugé l’échelon régional pertinent pour mutualiser les systèmes d’information visant à structurer les réseaux ville/hôpital et le parcours de soins, comme le suggère l’exemple des plateformes régionales de santé très intégrées mises en place en Andalousie. Il faut selon lui que les ARS s’attachent à recenser les systèmes d’information existants puis à mutualiser leurs données (dossiers partagés) et leurs infrastructures (plateforme commune, hébergement unique des dossiers, accès mutualisé aux bases de données). Il a évoqué trois scénarios de plateforme informatique régionale de santé :

– au minimum, un portail internet officiel offrant un simple accès aux nombreux systèmes existants ;

– pour aller plus loin, les ARS pourraient gérer des systèmes mutualisant des outils de gestion des structures (comme les logiciels de paie), centralisant l’hébergement des « dossiers patients » des réseaux ville-hôpital et proposant un accès mutualisé à des bases de données de formation, d’évaluation des pratiques professionnelles et d’auto-évaluation ;

– mieux encore, des systèmes d’information régionaux mutualisant les infrastructures de tous les systèmes d’information existants, ce qui laisserait les acteurs se concentrer sur des tâches à forte valeur ajoutée.

Pour votre rapporteur, l’idée de créer de telles plateformes mérite d’être étudiée, pourvu que l’interopérabilité de ces systèmes d’information soit assurée.

Pour M. Jean-François Penciolelli, il faudrait pour cela que les ARS procèdent par appels à projets souples, laissant les acteurs proposer des solutions innovantes, plutôt que par des appels d’offre très contraignants, comme le font les ARH. Il préconise aussi que les enveloppes informatiques soient fongibles entre le secteur ambulatoire et le secteur hospitalier. Dès à présent, il serait souhaitable que les crédits prévus pour les systèmes d’information hospitaliers dans le cadre du plan « hôpital 2012 » puissent aussi être mobilisés pour financer des systèmes d’information communs à la ville et à l’hôpital, par exemple dans le cadre d’un réseau de santé.

La définition des outils des nouvelles instances régionales de pilotage du système de santé doit suivre une logique opérationnelle et fonctionnelle, plutôt qu'institutionnelle, privilégiant leur efficacité. Il en va de même de l'organisation de la gouvernance du système de santé.

C. LA GOUVERNANCE TERRITORIALE DU SYSTÈME DE SANTÉ DOIT AVANT TOUT GARANTIR L’EFFICACITÉ OPÉRATIONNELLE DE SON PILOTAGE, EN COHÉRENCE AVEC LES MISSIONS ASSIGNÉES À CHAQUE ACTEUR

Un pilotage efficace du système de santé suppose avant tout une gouvernance bien organisée, non pas à partir d'une logique institutionnelle, mais dans le seul but de la rendre efficace.

1. La gouvernance territoriale du système de santé devra s’appuyer sur un organe de démocratie sanitaire renforcée

Votre rapporteur souligne que la réforme annoncée du pilotage territorial du système de santé constitue une occasion historique de renforcer la démocratie sanitaire, à laquelle les actuelles conférences régionales de santé ne suffisent pas à donner corps. Dans son avis sur les ARS, la Conférence nationale de santé considère elle aussi que la réforme doit être jugée à sa « capacité à promouvoir la démocratie sanitaire ».

a) Les actuelles conférences régionales de santé (CRS) doivent être dynamisées

Votre rapporteur observe un large consensus parmi les acteurs du système de santé pour souhaiter un renforcement des conférences régionales de santé (CRS), qui ont contribué à organiser la démocratie sanitaire, sans pour autant y parvenir pleinement, du fait de certaines insuffisances dans leur mode de fonctionnement.

● Trop larges, les CRS actuelles ne permettent pas aux acteurs de s’approprier les enjeux des politiques de santé.

Les CRS sont composées de 60 à 120 membres (articles L. 1411-13 et R. 1411-4 du code de la santé publique), désignés par arrêté du préfet de région pour un mandat de trois ans renouvelable deux fois et répartis en six collèges :

– collège 1 : collectivités territoriales et organismes d'assurance maladie obligatoire et complémentaire ;

– collège 2 : malades et usagers du système de santé ;

– collège 3 : professionnels de santé ;

– collège 4 : institutions, établissements, organismes et associations participant au système de santé, à son observation et à l'éducation à la santé ;

– collège 5 : personnalités qualifiées ;

– collège 6 : acteurs économiques.

Dans son rapport précité, M. Jean-Marie Rolland note que les CRS « paraissent plus autonomes et plus dynamiques que les conseils régionaux de santé auxquels elles ont succédé ». Leur composition permet de réunir l’ensemble des acteurs de la santé autour de la définition des priorités régionales de santé publique (censées être prises en compte non seulement par le PRSP, mais aussi par le SROS et, par conséquent, par les schémas d’organisation sociale et médico-sociale). Le rapport relève néanmoins que la mobilisation des membres des différentes CRS est inégale, à tel point que certaines, par exemple dans le Nord-Pas-de-Calais, envisagent de modifier – voire de supprimer – la disposition de leur règlement intérieur fixant un quorum pour les séances plénières. Selon Mme Annie Podeur (119), les CRS sont en fait trop larges pour être efficaces.

Surtout, les CRS ne se réunissent que deux à trois fois par an et dépendent largement des DRASS pour leurs moyens de fonctionnement. Selon les acteurs rencontrés sur le terrain par la mission, elles ont de larges progrès à faire en matière d’autonomie par rapport aux DRASS : les personnes rencontrés par la mission à Dijon déclarent que les conclusions de certaines CRS seraient même rédigées avant l’ouverture de la séance. Mme Bernadette Malgorn, secrétaire générale du ministère de l’intérieur, a elle aussi reconnu que si les actuelles conférences régionales de santé ne sont pas inutiles, leurs travaux présentent parfois un aspect de « kermesse » sans contenu opérationnel. D’ailleurs, la Conférence nationale de santé juge elle-même qu’« aucun saut quantitatif ou qualitatif dans le renforcement de la démocratie sanitaire (…) ne pourra être obtenu (…) sans augmenter notablement les moyens en fonctionnement des conférences régionales de santé ».

● Avec une composition resserrée, les CRS pourraient constituer un véritable contrepoids de démocratie sanitaire aux ARS.

Votre rapporteur partage pleinement les vues de la Conférence nationale de santé quand celle-ci considère que la création d’ARS « fortes » peut avoir pour conséquence une dérive technocratique, voire « autocratique », de la gouvernance régionale du système de santé. Tout projet dans ce domaine doit donc s’apprécier au regard des contrepoids prévus pour équilibrer ces risques. Il s’agit notamment de disposer d’outils ou de procédures assurant plus de transparence et de démocratie sanitaire en matière d’information, d’évaluation des besoins et de détermination des priorités de santé, mais aussi de contrôle de l’action des ARS. La Conférence nationale de santé va d’ailleurs plus loin, et voit dans la démocratie sanitaire l’expression d’un droit collectif d’accès à l’information en matière de santé, parallèle au droit individuel reconnu par la loi du 4 mars 2002 à tout patient d’être informé sur son état de santé : il s’agit de permettre à toute population, sur une base géographique (milieux de vie) ou professionnelle (milieux de travail), d’accéder aux informations lui permettant de connaître les principaux indicateurs de son état de santé et de ses déterminants mais aussi le niveau des ressources humaines et financières qui lui sont consacrées, en ayant la possibilité d’apprécier ces indicateurs de façon comparative.

Pour éviter une approche trop réductrice des questions de santé, la Conférence nationale juge le débat social « indispensable, qu’il s’agisse de faire appel à l’expertise, dite « profane », des usagers ou qu’il s’agisse de débattre des critères à prendre en compte ou de leur pondération respective pour hiérarchiser les priorités ». Votre rapporteur souligne d’ailleurs que des mécanismes de démocratie sanitaire plus efficaces pourraient contribuer à une meilleure acceptation des décisions que les ARS devront prendre, notamment en matière de restructurations hospitalières. Les compétences du comité régional de l’organisation sanitaire (CROS) et du comité régional de l’organisation sociale et médico-sociale (CROSMS) pourraient à cette fin être confiées à la CRS. Les CRS seraient ainsi consultées obligatoirement en amont dans la prise des décisions, et non plus en aval, comme de nombreux intervenant l'ont souhaité devant la mission.

Pour cela, il faudrait que la composition des nouvelles CRS soit plus resserrée – par exemple une soixantaine de personnes – et que le rythme de réunions soit plus intense qu’aujourd’hui. Par cohérence avec le pilotage conjoint de la ville, de l’hôpital et du secteur médico-social financé par l'assurance maladie, il serait par ailleurs logique d’y conforter la représentation des établissements médico-sociaux et des partenaires sociaux. Une large part des partenaires sociaux souhaite en effet, comme Mme Dany Bourdaux et M. Guillaume Tabourdeau l’ont déclaré à la mission au nom de l’Union professionnelle artisanale (UPA) (120), que leur place dans la gouvernance du système de santé soit en rapport avec la part des cotisations sociales dans son financement.

b) De même, les conférences territoriales de santé doivent être renforcées

Devant la mission (121), M. Philippe Ritter a estimé que les ARS devront favoriser la territorialisation des politiques de santé, notamment en confortant les conférences sanitaires de territoire, dont le fonctionnement dépend encore trop de la personnalité de leurs membres.

Ces conférences rassemblent les élus et les représentants des établissements de santé, des centres de santé, des praticiens libéraux et des usagers du système de santé, ainsi que des représentants des établissements médico-sociaux (avec voix consultative – articles R. 6131-1 à R. 6131-8 du code de la santé publique). Elles sont chargées d’établir un projet médical de territoire et de participer à l’analyse des besoins de santé, à l’échelle de leur territoire, dans le cadre de la préparation du SROS. Compte tenu du périmètre envisagé pour les compétences des ARS, il faudra y intégrer avec voix délibérative les représentants du secteur médico-social, ce qui irait dans le sens d’une construction globale de la réponse aux besoins de santé des populations.

c) La représentation des professionnels de santé pose cependant des problèmes

S’agissant d’abord des médecins libéraux, les travaux de la mission ont mis en lumière un conflit de légitimité, entre les unions régionales des médecins libéraux (URML), élues (article L. 4134-1 et suivants du code de la santé publique), et les syndicats médicaux représentatifs signataires de la convention nationale. Certains estiment que l’ARS devrait tisser des liens avec les signataires de la convention. M. Jean-François Rey a ainsi déclaré au nom de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) (122) que dès lors qu’une politique conventionnelle est fixée au niveau national, il faut éviter que les élections régionales ne créent des foyers de résistance à cette politique. M. Dinorino Cabrera (123) a quant à lui souligné que les syndicats qui n’ont pas signé la convention nationale ont beau jeu de faire campagne contre elle en vue des élections aux URML, d’où des résultats électoraux très différents de l’enquête administrative de représentativité préalable à la négociation conventionnelle.

D’autres font valoir la légitimité électorale des URML, comme MM. Jean-Claude Régi et Djamel Dib au nom de la Fédération des médecins de France (FMF), ou Mme Christiane Giraud et M. Jacques Marlein au nom d’Espace généraliste. Ces derniers soulignent également que le mode de fonctionnement des URML permet de dépasser les rivalités syndicales, ce qui a été confirmé à la mission lors de ses déplacements à Dijon et à Marseille. Pour votre rapporteur, il serait difficile de passer outre la légitimité électorale des URML.

Par ailleurs, comme l’a souligné devant la mission M. Dinorino Cabrera (124), président de l’Union nationale des professions de santé (UNPS), il ne saurait y avoir d’ARS sans représentation de l’ensemble des professionnels de santé, surtout si le périmètre de compétences de ces agences inclut la prise en charge des personnes âgées ou handicapées, qui ne fait pas intervenir que les médecins. Selon lui, les difficultés des URML, qui coûtent cher pour peu de résultats concrets, dissuadent les autres professions de se doter de structures analogues ; dès lors, il propose que l’UNPS désigne en son sein des représentants régionaux.

Pour votre rapporteur, quel que soit le mécanisme retenu pour la représentation régionale des professionnels de santé, il faudrait que celui-ci permette de représenter l’ensemble des professionnels, médicaux et paramédicaux, libéraux et hospitaliers, généralistes et spécialistes, de façon aussi décloisonnée que possible.

d) Le renforcement de la démocratie sanitaire passe surtout par un rôle accru des élus dans la gouvernance territoriale du système de santé

● Aujourdhui, les élus ne sont pas assez associés au pilotage territorial du système de santé.

L’article 69 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (article L. 6115-7 du code de la santé publique) a intégré à la commission exécutive (« comex ») de l’ARH deux conseillers régionaux avec voix consultative, mais, comme l’a indiqué à la mission Mme Annie Podeur (125), ceux-ci sont plus enclins à venir quand l’ordre du jour porte sur des points d’organisation et d’orientation, plutôt que sur des questions administratives, qui constituent une large part de l’activité de la commission exécutive « comex ». L’article 70 de la même loi permet, à titre expérimental, de donner une voix délibérative à ces élus si la région participe à l’investissement hospitalier, mais pour l’heure, seule la région Nord-Pas de Calais s’est portée volontaire pour le faire, à hauteur de 12 millions d’euros par an, avec, d’ailleurs, un fort effet de levier, en retour.

Quant au rôle des élus au sein des conférences sanitaires de territoire, M. Michel Autès, vice-président de la région Nord-Pas de Calais, a regretté devant la mission que dans certains cas, élus et professionnels de santé s’attachent moins à organiser l’offre de soins qu’à « marchander » la répartition des enveloppes.

Certes, dans la plupart des cas, les maires président les conseils d’administration des établissements de santé situés sur le territoire de leur commune (article L. 6143-5 du code de la santé publique). Cela tend à associer les élus locaux à la gestion des hôpitaux et à les lier aux intérêts d’un établissement en particulier, mais n’équivaut pas, loin s’en faut, à les associer à l’organisation stratégique de l’offre de soins. Celle-ci vise en effet à répondre dans un souci d’intérêt général aux besoins d’une population – ces besoins s’exprimant d'ailleurs le plus souvent à une échelle territoriale plus large que la commune, comme le territoire de santé. Votre rapporteur constate d’ailleurs que souvent, les interlocuteurs de la mission ont expliqué les retards pris dans les restructurations hospitalières par les freins qu’y auraient mis certains maires. Ainsi, loin de les mettre en position de responsabilité dans le pilotage du système de santé, la présidence du conseil d’administration des hôpitaux tend à cantonner les maires à des préoccupations de gestion d’établissement de santé, plutôt que de réponse aux besoins de santé globaux de leurs administrés.

● Les élus doivent être pleinement associés aux fonctions stratégiques du pilotage du système de santé.

Ils ont pour cela une double légitimité :

– d’une part, ils sont les représentants « naturels » des usagers du système de santé ;

– d’autre part, ils représentent des collectivités qui possèdent des compétences intéressant le système de santé.

En effet, comme le rappelle la Cour des comptes dans son rapport 2004 sur la sécurité sociale, les communes et les départements ont depuis longtemps des compétences sanitaires et l’implication de l’ensemble des collectivités territoriales dans le domaine de la santé a connu « une impulsion nouvelle au travers de procédures contractuelles, qui leur permettent de s’engager dans des domaines ne relevant pas strictement de leur compétence ». En outre, au fil des lois de décentralisation, le département a vu son rôle croître en matière sociale et médico-sociale ; ils seront donc des interlocuteurs incontournables pour des ARS dont le périmètre inclura le secteur médico-social financé par l’assurance maladie.

Aussi votre rapporteur estime-t-il que les élus ne sauraient être cantonnés à la CRS. Ils doivent avoir une place au plus près des instances décisionnelles de l’ARS. C’est notamment ce que souhaite l’Association des régions de France (ARF), dont le représentant, M. Michel Autès, a déclaré à la mission (126) que les élus doivent siéger dans les instances décisionnelles de l’ARS, au moins avec voix consultative pourvu que le consensus y soit recherché le plus souvent possible, comme au sein des commission exécutive « comex » des ARH. Selon lui, il serait particulièrement injustifié que les élus des régions participant à titre expérimental à l’investissement hospitalier ne soient pas associés à la gouvernance des ARS. D’ailleurs il serait regrettable que la création des ARS mette un terme à cette expérimentation.

Une large part des acteurs souligne aussi qu'il serait judicieux de choisir les élus siégeant à ces instances parmi ceux qui exercent des responsabilités en matière de santé au sein de la collectivité qu’ils représentent, compte tenu de la complexité des enjeux et des procédures en question. M. Christian Dutreil, directeur de l’ARH de Provence-Alpes-Côte d’Azur a cité le contre-exemple des membres des CRS et des représentants des usagers et des conseils régionaux aux commission exécutive « comex » des ARH : trop peu habitués aux débats techniques, ils ne sont guère présents, ce qui prive les CRS et les commission exécutive « comex » d’une part de leur poids en tant qu’instances consultatives.

Pour votre rapporteur, cette situation plaide pour que soient associés aux instances régionales de pilotage du système de santé, par exemple, le président du conseil régional, les présidents des conseils généraux et les présidents des conférences territoriales de santé – ainsi que des parlementaires – qui définissent le cadrage global des politiques de santé (notamment en fixant l’ONDAM chaque année et les priorités de santé publique, théoriquement, tous les cinq ans). De plus, une articulation doit être trouvée entre l’ARS et les maires, afin notamment de sensibiliser ces derniers aux problématiques liées aux restructurations hospitalières.

De plus, le conseil régional et les conseils généraux devraient être consultés dans l’élaboration des documents de planification de l’offre de soins, des actions de santé publique et de l’offre médico-sociale, et tenus informés de leur mise en œuvre. Pour cela, le conseil régional et les conseils généraux pourraient être saisis pour avis des projets de plans, schémas et programmes concernés – regroupés, le cas échéant, dans un « plan régional de santé » comme le souhaite la ministre de la santé. Ensuite, le directeur de l’ARS pourrait être entendu chaque année par le conseil régional et par les conseils généraux pour présenter l’état de mise en application de ces plans et son programme d’action pour l’année à venir, à l’image de ce que font les préfets pour présenter l’action territoriale de l’État.

2. La gouvernance des ARS, leur statut et leur organisation doivent être cohérents avec les fonctions qui lui sont confiées

S’il n’y a pas lieu dans le cadre du présent rapport de déterminer dans le détail le statut, l’organisation, et la répartition des pouvoirs des ARS, il apparaît clairement que la gouvernance des ARS ne doit pas être la même selon qu’elles cumulent les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation du système de santé, ou que ces fonctions restent séparées, ainsi que le propose votre rapporteur. Il est aussi à noter que même dans l’hypothèse d’ARS au périmètre de compétences large, celles-ci ne pourront pas être des structures légères : selon M. Philippe Ritter, elles pourraient même compter plusieurs centaines d’agents, ce qui pourrait nuire à leur efficacité si elles n’étaient pas bien organisées.

a) Le statut de l’ARS doit permettre à sa direction d’avoir une autorité fonctionnelle sur ses personnels, à la différence de l’ARH, ce qui plaide pour un statut d’établissement public administratif plutôt que de GIP

Comme on l’a exposé plus haut, une des faiblesses des ARH tient au manque d'autorité hiérarchique de leur directeur sur leurs personnels, pour la plupart mis à disposition numériquement – mais pas nominativement – par leurs administrations d’origine (DDASS, DRASS, CRAM, URCAM, CPAM). C’est d’ailleurs ce que M. Philippe Ritter (127), lui même ancien directeur d’ARH, a déclaré à la mission, qui a pu le vérifier sur le terrain. Cette situation s’explique par le statut des ARH, constituées sous forme de GIP. Si cette formule institutionnelle souple est bien adaptée à un partenariat entre l’État et l’assurance maladie à statut constant des personnels et en préservant l’identité institutionnelle de leurs réseaux, elle ne favorise pas en revanche la transformation d’une administration de mission en véritable administration de gestion.

C’est pourquoi l’ADIRASS estime que « le GIP constitue, au vu de l’expérience que nous en avons (ARH, GRSP, MDPH), une option peu satisfaisante notamment en cas d’absence de clarification suffisante des responsabilités État / assurance maladie qui laisserait subsister une situation de co-pilotage peu adaptée à cette forme juridique » (128). L’association estime ainsi qu’« il est inutile d’envisager une telle réforme si les moyens actuellement dispersés ne sont pas regroupés », notamment ceux de l’assurance maladie et de l’État, qui doivent être clairement intégrés aux ARS.

Aussi, votre rapporteur juge-t-il préférable la formule de l’établissement public administratif (EPAD) qui est généralement considéré comme plus solide, notamment du point de vue de la gestion du personnel et du dialogue social. M. Philippe Ritter reconnaît néanmoins que l’EPAD est plus attractif pour les personnels de l’État que pour ceux de l’assurance maladie, qui seraient ainsi éloignés de leurs réseaux d’origine.

En tout état de cause, ces formules ne sont pas strictes : la loi pourra, le cas échéant, fixer des modes de gestion spécifiques.

Il est d’ailleurs à noter que dans l’hypothèse où l’ARS cumulerait les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation du système de santé, le nombre de personnels de l’assurance maladie à transférer aux ARS serait beaucoup plus important que si une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM) était créée, comme le propose votre rapporteur. En effet, avec une DiRAM, seuls ceux des CRAM qui assurent aujourd’hui des fonctions de planification hospitalière pour le compte des ARH devraient être transférés aux ARS contre plus de 4 000 agents dans l’hypothèse contraire (soit 5 % des effectifs de l’assurance maladie), d’après les estimations faites par la ministre de la santé devant la mission.

b) L’organisation des ARS doit prendre en compte la réalité territoriale et les spécificités des secteurs entrant dans son périmètre

● Pour territorialiser ses actions, dialoguer avec les conseils généraux et éviter une centralisation régionale excessive, les ARS devront pouvoir déployer des antennes locales, éventuellement départementales.

Une large part des acteurs souhaite que l’organisation territoriale des ARS soit souple : dans les régions les moins vastes, elles pourraient concentrer leurs services sur un seul site, mais dans les régions plus étendues, des antennes locales seraient utiles, et pas forcément au niveau départemental, comme l’a déclaré à la mission, par exemple, M. Jean-Louis Bonnet (129), président de la Conférence nationale des directeurs d’ARH.

En outre, on note chez certains interlocuteurs de la mission – notamment les représentants du secteur médico-social, comme l’UNIOPSS (130) –, une préoccupation quant à la qualité du dialogue que les ARS pourront mener avec les acteurs locaux. Par exemple, les représentants de l’UNIOPSS souhaitent que les ARS aient les moyens – des moyens stables, notamment humains – de mener un dialogue de qualité avec les structures médico-sociales, ce qui ne serait pas le cas de toutes les DDASS aujourd’hui, d’où certaines frustrations chez les acteurs.

De ce point de vue, la position de votre rapporteur de déléguer aux conseils généraux la gestion quotidienne des établissements médico-sociaux et de laisser les CPAM opérer la gestion du risque au niveau local irait également dans le sens d’une territorialisation des politiques de santé.

En effet, comme l’estime M. Jean-Marie Rolland dans son rapport précité, la territorialisation des actions de santé publique doit être privilégiée. Il faut rechercher un équilibre entre les différents niveaux territoriaux dans nos politiques de santé. De même, selon M. Frédéric van Roeckeghem (131), le niveau régional permet de mutualiser des moyens sans s’éloigner trop du terrain, mais de même qu’aucun système de santé étranger ne repose sur un seul échelon territorial, la régionalisation du nôtre ne peut pas suffire à assurer son efficience :

– au niveau national, une volonté politique est indispensable pour une action durable et efficace sur l’offre de soins, comme le montre le contre-exemple des ARH ;

– au niveau local, il serait dommage de mettre un frein aux actions des CPAM sur les patients (« disease management ») et sur les prescripteurs.

Le choix d’un niveau territorial de référence peut dépendre du type d’action à mener, compte tenu d’éventuelles économies d’échelle à exploiter, mais en règle générale, pour le directeur général de la CNAMTS, une organisation territoriale équilibrée des politiques de santé pourrait être la suivante :

– au niveau national : un pilotage stratégique du système de santé cohérent, veillant notamment à la compatibilité des mesures tarifaires avec l’ONDAM, et la production d’outils quand elle permet des économies d’échelle ;

– à l’échelon régional : un « relais de management » de la planification de l’offre de soins et de la coordination des acteurs ;

– au niveau local : des actions de gestion du risque sur les patients et les producteurs de soins, y compris les hôpitaux. La CNAMTS considère en effet que l’échelon optimal de gestion du risque serait un ensemble de 600 000 « bénéficiaires actifs pondérés » (132).

Cela rejoint les déclarations de M. Christian Dutreil, directeur de l’ARH de Provence-Apes-Côte d’Azur, selon lequel l’expérience de l’ARH – qui a consenti de larges délégations de signature aux DDASS (juridiquement impossibles pour les directeurs de CPAM) – suggère que les ARS devraient disposer d’antennes locales (pas nécessairement départementales) dirigées par des fonctionnaires d’autorité.

Ainsi, les ARS devront se créer des relais territoriaux, par voie conventionnelle ou en constituant des antennes locales.

● Pour préserver les spécificités des secteurs entrant dans son périmètre, l’ARS pourrait être organisée en plusieurs pôles : offre de soins, santé publique, secteur médico-social, fonctions support, etc.

La constitution des pôles sectoriels évite de procéder d’emblée à un remaniement trop profond des équipes en place, qui comporterait des risques de pertes d’efficience pendant une période transitoire. Les ARS devront cependant veiller à ne pas reproduire en leur sein le cloisonnement que leur création vise à surmonter, ce qui plaide pour la constitution de pôles transversaux, chargés de fonctions d’études, de contrôle, ou de fonctions support, et pour un exécutif fort.

c) Pour être efficace, l’exécutif de l’ARS doit être resserré, légitime, stable et responsable

Votre rapporteur constate que la gouvernance de l’ARS, et particulièrement l’organisation de son exécutif, a suscité beaucoup d'intérêt parmi les acteurs. On pourrait même regretter que le débat ait tendance à se focaliser sur les modalités d’organisation de l’ARS plutôt que sur les orientations fondamentales de la réforme, comme la séparation ou le cumul, d’une part, des fonctions d’organisation de l’offre de soins et de la prévention, et, d'autre part, de régulation du système de santé. Mais quel que soit le schéma retenu pour la gouvernance régionale du système de santé, l’exécutif de l’ARS devra être organisé de façon à être plus efficace que celui des instances actuelles.

● Pour avoir de lautorité, le directeur de lARS devra être doté dune forte légitimité.

Pour M. Philippe Ritter (133), la nomination du directeur de l’ARS en Conseil des ministres contribuerait à asseoir son autorité vis-à-vis des acteurs du système de santé, à l’instar de ce qui est prévu pour les directeurs d’ARH. Les directeurs d’ARH rencontrés sur le terrain par la mission ont d’ailleurs fait valoir que ce mode de nomination leur était utile pour « s’imposer », y compris face aux préfets.

Par ailleurs, il va de soi pour la plupart des acteurs que les directeurs actuels des ARH ne seraient pas automatiquement nommés directeurs des ARS qui les remplaceront.

Pour autant, une nomination en Conseil des ministres ne suffira sans doute pas à conférer aux directeurs d'ARS toute l'autorité qui leur sera nécessaire, compte tenu de la difficulté de certaines des décisions à prendre, notamment en matière de restructurations hospitalières et, peut-être, de régulation de la démographie médicale. Comme l’a dit Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, lors de son audition (134), il faut aussi que le directeur de l’ARS soit choisi pour ses compétences techniques, sa fermeté et son sens politique. Pour trouver les personnalités correspondant aux besoins de ce poste, M. Philippe Ritter a évoqué l’idée d’une procédure de sélection qui pourrait être réglée de façon à garantir que les directeurs d’ARS soient choisis dans des viviers de recrutement diversifiés (cadres de l’État, de l’assurance maladie, personnalités extérieures), ce qui avait été fait pour la première génération des directeurs d’ARH et qui est jugé pertinent par beaucoup d’acteurs.

● Pour être réactif, lexécutif de lARS devra être resserré.

L’expérience des ARH, dont la commission exécutive compte une vingtaine de membres, suggère qu'il faut aux ARS un exécutif plus resserré pour être efficace. Dès lors que les ARS ont vocation à se substituer aux instances existantes (URCAM, DDASS et DRASS, ARH etc.) et qu’elles ne sont pas constituées en GIP à l’image des ARH, rien n’oblige d’ailleurs à les doter d'un exécutif composé à parité de représentants de l’État et de l'assurance maladie, comme l’a indiqué à la mission (135) M. Jean-Louis Bonnet, président de la conférence des directeurs d’ARH.

Aussi peut-on estimer avec Mme Annie Podeur que pour être responsable et réactif, l’exécutif de l’ARS doit être limité (4 ou 5 personnes, selon qu’une DiRAM indépendante de l’ARS est chargée de la gestion du risque ou pas), ce qui permettrait d’intégrer les personnels de direction des services de l’État, des caisses et des ARH, et serait cohérent avec une organisation de l’ARS par pôles.

● Pour qu’il soit efficace, l’exécutif de l’ARS doit être mis en position de responsabilité.

Le contre-exemple des ARH montre l’utilité d’un dispositif de suivi des agences tendant à responsabiliser leur direction, avec des tableaux de bord sur l’offre de soins, la qualité des soins, les dépenses hospitalières ou les ressources humaines. En effet, si l’efficience du système de santé est au cœur de la réforme annoncée, la lecture de l’audit de modernisation IGF-IGAS précité sur les ARH (136), donne la mesure des progrès à accomplir : « les ARH ne disposent à ce jour ni de référentiels communs avec les établissements pour le suivi de la performance, ni d’outils nationaux d’aide à la décision, ni d’analyse structurée des causes des différences observées sur les coûts entre les établissements de l’échelle nationale de coûts (ENC) ou sur les durées moyennes de séjour (DMS) dans l’ensemble des établissements ». Ce rapport relève également « des limites importantes à l’action des ARH vis-à-vis des établissements en matière de performance et d’efficience ». Il estime enfin que « les ARH ne conçoivent pas leur mission au quotidien en fonction de l’amélioration de la performance hospitalière » et que « la politique menée par la DHOS en matière d’amélioration de la performance et de l’efficience n’est pas perçue comme une priorité. Les structures qui s’intéressent à la traduction concrète de la performance et de l’efficience sont extérieures à la DHOS ».

Aussi, les directeurs d’ARS pourraient-ils recevoir une lettre de mission leur fixant des objectifs précis en matière de performance et d’organisation de l’offre de soins, comme l’a souhaité M. Philippe Ritter (137), ajoutant qu’ils devront être évalués, et que leur rémunération pourrait comprendre une part variable, à l’instar de ce qui est prévu – mais pas encore assez mis en œuvre – pour les directeurs d’hôpitaux. D’ailleurs, comme l’ont souligné devant la mission les représentants du RSI (138), MM. Dominique Liger et M. Philippe Ulmann, la rémunération variable en fonction de résultats doit être généralisée, avec des objectifs clairs, réalistes et suivis, à l’image de ce qui se fait en Grande-Bretagne, où les organismes ainsi que leurs gestionnaires sont récompensés ou sanctionnés financièrement en fonction de leurs résultats. Un tel système permettrait de rendre les postes de direction des caisses et des ARS attractifs, ce qui est d’autant plus nécessaire que les spécialistes de l'efficience du système de santé sont rares. Ni l’École nationale d’administration (ENA) ni l’École nationale de la santé publique (ENSP) ni l’École nationale supérieure de la sécurité sociale (EN3S) ne forment leurs élèves à ce mode de gestion. Cela suppose par ailleurs de faciliter la mobilité des cadres.

Dans la même logique, les directeurs d’ARS devront être contrôlés régulièrement, comme le sont les directeurs d’ARH au cours de leur « revue annuelle de contrat », qui permet, selon Mme Annie Podeur, un bilan précis et transparent de leur action, leur évaluation portant pour 70 % sur l’atteinte de leurs objectifs, et pour 30 % sur leurs capacités manageriales. A l’avenir, une telle évaluation devrait pouvoir déboucher sur des sanctions effectives, comme l'a souhaité M. Frédéric van Roeckeghem (139) pour les cas où les objectifs de dépenses seraient dépassés. Votre rapporteur souligne l’intérêt d’une telle démarche, qui mérite d’être approfondie, avec un suivi encore plus fréquent pour les directeurs d’ARS qu’actuellement pour les directeurs d’ARH.

d) Une instance intermédiaire de concertation, de suivi et de surveillance serait utile entre l’exécutif de l’ARS et la conférence régionale de santé

Assurer le suivi de l’exécutif de l’ARS nécessite une capacité de mobilisation permanente, difficilement compatible avec le format de la CRS, même resserré autour d’une soixantaine de membres. Cela plaide en faveur de la création d’une instance intermédiaire chargée d’assurer une sorte de permanence de suivi et de surveillance entre l’organe de démocratie sanitaire et l’exécutif de l’ARS.

Pour être réactif, ce conseil de surveillance devrait avoir une composition restreinte à une douzaine de membres. Pourraient y siéger, notamment :

– des élus, représentant notamment le conseil régional et les conseils généraux ;

– des représentants des professionnels de santé, des établissements de santé et des établissements médico-sociaux ;

– des représentants de l’assurance maladie ;

– un représentant de la mutualité, dont il est à noter qu’elle participe à la fois au financement des dépenses de santé et à l’offre de soins, via son réseau de centres de santé mutualistes ;

Cette instance pourrait être présidée par le préfet de région, ce qui serait cohérent avec la redéfinition du rôle du préfet de région dans le cadre de la revue générale des politiques publiques (RGPP), dont les grandes lignes ont été définies à l'issue du conseil de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 : selon M. Philippe Ritter, le préfet est en effet appelé à voir son rôle d’animation des politiques publiques renforcé et à devoir promouvoir une culture d’objectifs au sein de services de l’État recomposés à l’échelon régional, avec des périmètres larges qui ne seront pas calqués sur ceux des départements ministériels. Ainsi, le préfet serait le garant du caractère interministériel des actions de santé publique menées par l’ARS.

Si l’ARS est compétente en matière de veille et de sécurité sanitaire, il serait utile que les préfets et le directeur de l’ARS aient des liens étroits. Il faudrait donc confier au préfet la présidence d’un conseil de surveillance de l’ARS. Par ailleurs, le directeur de l’ARS devrait être associé au comité de l’administration régionale (CAR) qui se réunit autour du préfet.

Le conseil de surveillance pourrait aussi constituer un lieu de concertation entre les producteurs de soins, l’organisateur de l’offre de soins et le régulateur du système de santé. L’attention de la mission a plusieurs fois été appelée sur l’intérêt d’une telle structure, notamment lors de ses déplacements : en Provence-Côte-d’Azur comme en Bourgogne, des commissions régionales des finances ont été créées par les ARH pour associer les fédérations d’établissements au pilotage du système de santé. De plus, les représentants de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) (140) ont fait valoir que le pilotage régional du système de santé ne gagnera pas en efficacité sans concertation entre l’ARS et les établissements en amont de la planification de l’offre de soins. Il existe certes le CROS, qui n’est que consultatif, et certaines ARH ont créé des comités de suivi du SROS et des comités d’experts (fédérations, URML etc.), mais pour la FHP, il faut aller plus loin dans l’implication des fédérations d’établissements. Pour cela, elle propose de réactiver les « comités régionaux des contrats », qui associaient les fédérations, l’État et l’assurance maladie.

La FHP propose notamment que les MIGAC régionales soient négociées au sein de ces instances intermédiaires entre l’exécutif de l’ARS et l’organe de démocratie sanitaire. Selon la FHP, la répartition des MIGAC serait ainsi plus transparente qu’aujourd’hui, et donc plus équitable et efficiente ; en outre, les fédérations seraient responsabilisées. Une telle proposition mérite d’être étudiée. Elle irait dans le sens d’un dialogue mieux organisé entre ces trois parties.

3. La reconfiguration du réseau de l’assurance maladie sera plus ou moins complexe selon que l’on choisit d’intégrer tout son échelon régional aux ARS ou de constituer une direction régionale de l’assurance maladie chargée de la régulation des dépenses de santé

a) Le transfert de la gestion du risque aux ARS aurait pour corollaire l’intégration aux ARS d’une large part des structures régionales de l’assurance maladie

Comme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports l’a expliqué à la mission (141), la création d’ARS chargées de réguler le système de santé en même temps que de l’organiser supposerait d’y intégrer les URCAM, la partie sanitaire des CRAM et l’échelon régional du service médical. Cela supposerait également de trouver une articulation contractuelle entre l’ARS et les CPAM permettant à l’ARS de piloter les effectifs des caisses consacrés à la gestion du risque.

Il faudrait aussi verser aux ARS les effectifs des caisses de la MSA et du RSI qui participent à la gestion du risque. Or, selon le directeur général de la caisse nationale du RSI (142), les caisses régionales du RSI n’ont pas une taille critique suffisante pour être scindées entre ARS et services administratifs hors-ARS : les effectifs de ces caisses sont limités à 20 ETP en moyenne car elles délèguent la liquidation de leurs prestations d’assurance maladie à d’autres opérateurs.

Votre rapporteur souligne donc la complexité de telles opérations, qui ne manqueraient pas d’être perçues comme un pas décisif vers l’« étatisation » de l’assurance maladie, et couperait d’ores et déjà le lien entre les caisses nationales et les caisses primaires.

b) Face à une ARS aux missions centrées sur l’organisation de l’offre de soins, l’assurance maladie serait conduite à parachever la structuration d’un vrai pôle régional, avec une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM)

Comme cela a été souligné plus haut, le réseau de l’assurance maladie n’a pas réussi à trouver une organisation régionale efficace, stable et lisible. Il semble notamment que les URCAM ne suffiraient pas à assurer de façon active une fonction de régulation des dépenses de santé en dialogue avec les ARS : l'assurance maladie serait alors amenée à achever la structuration de l’échelon régional de ses réseaux autour d’une organisation technique : la DiRAM.

● La DiRAM doit être une structure robuste.

La direction régionale de l’assurance maladie pourrait constituer le pôle régional du régime général qui n’existe pas aujourd’hui, ce qui représenterait une avancée importante dans la simplification de l’organisation du réseau de l’assurance maladie et, par conséquent, dans le renforcement de son efficacité.

La DiRAM regrouperait les moyens et les compétences des URCAM, de l’échelon régional du service médical et des services sanitaires des CRAM qui ne seraient pas transférés à l’ARS. Elle concentrerait alors tous les moyens et toutes les compétences en matière de gestion du risque, de maîtrise médicalisée, de contrôle et de lutte contre la fraude. Les CRAM pourraient disparaître et leurs activités hors DiRAM et hors ARS être regroupées au sein de caisses régionales d’assurance vieillesse, à l’image de celles qui existent en Alsace et en Île-de-France.

La DiRAM constituerait ainsi un « relais de management » entre la CNAMTS et les CPAM.

Reste à préciser si cette structure serait dotée d’un conseil. Dès lors que les partenaires sociaux sont représentés au sein de la CRS, il ne parait pas indispensable qu’ils disposent en supplément d’une représentation spécifique ; au contraire, la multiplication des organes de concertation ne va pas dans le sens de la simplification du pilotage du système de santé, et leur éclatement ne contribue pas à renforcer le poids de la démocratie sanitaire au sein de ce système. Mais à l’inverse, on pourrait considérer que la disparition du conseil de l’URCAM appelle une compensation et qu’un tel conseil donnerait une consistance supplémentaire à la nouvelle structure régionale de l'assurance maladie.

● Une bonne articulation entre les trois principaux régimes d'assurance maladie et lARS doit être garantie.

Pour organiser la politique de gestion du risque sur un mode interrégime, un collège des directeurs régionaux du régime général, de la MSA et du RSI devrait être créé et chargé d’élaborer le programme régional commun à l’ensemble des organismes d’assurance maladie (PRAM) en matière de gestion du risque.

Pour garantir une bonne coordination entre l’ARS et la DiRAM, permettant notamment à l’ARS de s’approprier les problématiques de gestion du risque pour promouvoir la recherche d’efficience dans la gestion des établissements de santé et dans la structuration territoriale de l’offre de soins, les trois directeurs régionaux des principaux régimes d’assurance maladie, qui constitueraient le collège des directeurs de la DiRAM, pourraient être membres du conseil de surveillance de l’ARS.

c) Pour être plus efficiente, l’assurance maladie devrait en outre envisager de recomposer son réseau en regroupant les caisses infradépartementales et en mutualisant autant que possible les capacités de production

Dans son rapport 2004 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes recommande de procéder à des fusions de caisses primaires infradépartementales. La Cour constate en effet une relation entre la taille et le coût des caisses au détriment des plus petites, même si d'autres variables sont à prendre en compte. Elle souligne d’ailleurs qu’un éventuel regroupement de caisses « n’aurait aucune conséquence négative sur les assurés et les cotisants dans la mesure où dans toutes les branches, à des degrés divers, les organismes de base développent des implantations de proximité conséquentes ». Aussi, un tel regroupement « permettrait aussi grâce à une concentration des moyens de faire de substantielles économies et faciliterait le pilotage par les têtes de réseau ». Dans le même sens, votre rapporteur souligne que la recomposition de l’échelon régional du réseau de l’assurance maladie constitue également une occasion de redéployer les caisses primaires. Un « relais de management » régional plus fort et mieux intégré dans un réseau hiérarchisé peut en effet être de nature à favoriser le regroupement des caisses.

Forte de sa dimension interrégime, la DiRAM pourrait aussi favoriser la mutualisation des capacités de production (c’est-à-dire de liquidation des remboursements) entre les régimes. Il semble en effet qu’il y ait là d'importants gains de productivité à exploiter, comme l'a montré le rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale présenté en septembre 2006 analysant les délégations de gestion des prestations d’assurance maladie obligatoire à des sociétés d’assurance et ou des mutuelles. La gestion déléguée concerne plus d’un bénéficiaire sur six de l’assurance maladie obligatoire, parmi lesquels, notamment, les adhérents de la MSA et les assurés du RSI. Comme l’indiquait votre rapporteur dans ses commentaires sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, la CNAMTS a évalué que l’économie d’une reprise en gestion directe de l’ensemble des assurés se traduirait par une économie nette de 250 millions d’euros. La Cour considère cette évaluation avec prudence, tout en soulignant que « la dispersion de la gestion entre de multiples structures n’est pas de nature à réduire les dépenses de gestion ». Sur ce point encore, la constitution d’un « relais de management » régional interrégimes pourrait favoriser le réexamen de certaines de ces délégations.

D. QUELLE QUE SOIT L’ORGANISATION RETENUE POUR LE PILOTAGE RÉGIONAL DU SYSTÈME DE SANTÉ, CELUI-CI NE POURRA PAS ÊTRE EFFICACE SI LE PILOTAGE NATIONAL DU SYSTÈME N’EST PAS RÉORGANISÉ EN CONSÉQUENCE

Il existe un véritable consensus parmi les interlocuteurs de la mission pour souligner que quelle que soit l’organisation institutionnelle retenue à l’échelon régional, la réforme sera sans effet si le pilotage national du système de santé n’est pas réorganisé en conséquence.

Cependant, la gouvernance nationale du système de santé ne doit pas être organisée sur le même mode selon que l’on opte pour une plus grande autonomie de la fonction de régulation des dépenses, avec au niveau régional des DiRAM chargées de la gestion du risque, ou pour l’intégration de la gestion du risque au périmètre des activités de l’ARS. De ce choix fondamental sur le sort de la gestion du risque découlent nécessairement des organisations très différentes de la gouvernance nationale du système de santé.

1. Si la gestion du risque est confiée aux ARS, il parait indispensable d’unifier complètement le pilotage national du système de santé, avec une véritable Agence nationale de santé

Dès lors que l’on prend le parti de ne pas séparer les fonctions de régulation du système de santé (c’est-à-dire de remboursement avisé des soins) et d’organisation de l’offre de soins (c’est à dire de planification sanitaire et médico-sociale) au niveau régional, il paraît difficile de les séparer au niveau national, ce qui suppose d’unifier complètement les directions de l’administration centrale de l’État et les têtes de réseau de l’assurance maladie au sein d’une Agence nationale de santé (ANS).

a) L’unification du pilotage national du système de santé est le corollaire de la création d’ARS compétentes en matière de gestion du risque

Au cours des travaux de la mission, l’ensemble des acteurs qui ont plaidé pour des ARS au périmètre large, incluant notamment la gestion du risque, ont reconnu que de telles structures ne seraient pas viables sans un pilotage plus cohérent du système de santé au niveau national, plaidant ainsi, par analogie avec les ARS, en faveur d’une Agence nationale de santé (ANS). C’est par exemple le cas de Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy et de M. Etienne Marie, respectivement secrétaire générale des ministères chargés des affaires sociales et directeur général de l’administration, du personnel et du budget du ministère de la santé. Ils considèrent que la création des ARS constitue une occasion historique de réformer le système de santé, y compris à l’échelon national, où son éclatement entre l’État et l’assurance maladie engendre des pertes d’efficience. C’est aussi le cas de l’ADIRASS, qui estime qu’une ARS au périmètre large ne peut se concevoir sans que soient réglés au préalable les dysfonctionnements liés au « double commandement » actuel ; selon l’association, « pour cela, il est désormais incontournable de clarifier une bonne fois pour toutes le rôle de l’État et celui l’assurance maladie » et d’éviter la « juxtaposition » d’ARS et de structures existantes comme les différentes agences sanitaires et les organismes d’assurance maladie dans leur configuration actuelle, qui « conduirait à un échec assuré » (143).

Le contre-exemple des ARH, pilotées en double commande au niveau central, montre donc qu’il faut pour les ARS un donneur d’ordres unique. Tous les acteurs sont conscients de la nécessité de garantir par des mécanismes institutionnels la cohérence du pilotage national du système de santé pour remédier au manque de coordination entre ministères, entre directions du ministère de la santé (voire entre bureaux), et surtout entre l’État, les agences sanitaires et l'assurance maladie.

b) Plusieurs organisations sont possibles pour garantir la cohérence du pilotage national d’un réseau d’ARS cumulant les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation des dépenses de santé

Il ressort des travaux de la mission que trois scénarios principaux sont envisagés par les différents acteurs.

● Instaurer une structure souple et légère de coordination des acteurs, à partir de l’actuel conseil de l’hospitalisation.

Le conseil de l’hospitalisation a été institué par l’article 45 de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie pour contribuer par ses recommandations à l’élaboration de la politique de financement des établissements de santé ainsi qu’à la détermination des objectifs de dépenses d’assurance maladie relatives aux frais d'hospitalisation (article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale). Comme l’a précisé Mme Annie Podeur à la mission, son secrétariat est assuré par un seul agent de la DHOS : il s’agit donc d’une structure de coordination très légère.

Il serait envisageable d’en élargir le champ de compétence aux soins ambulatoires et au secteur médico-social, et la composition – aujourd’hui restreinte à la DHOS, la DSS, la DGS, la CNAMTS et l’UNCAM – à la DGAS et à la CNSA. Il faudrait en conséquence étoffer son secrétariat par un apport de moyens en provenance de l’assurance maladie. Ainsi, M. Jacques Métais, ancien président de la Conférence des directeurs d’ARH, a indiqué devant la mission que si un pilotage unifié du système de santé est cohérent avec des ARS au périmètre large, en revanche la création d’une ANS reviendrait à confier ce pilotage à l’assurance maladie, ce qui n’est selon lui pas souhaitable, et plaide à défaut en faveur de la création d’un « conseil d’orientation des ARS » présidé par le ministre chargé de la santé, avec les directeurs d’administration centrale et de caisses, ainsi que ceux des agences sanitaires.

La création d’une telle structure ne serait probablement ni complexe ni conflictuelle, mais son fonctionnement reposerait in fine sur la bonne volonté des acteurs, dont l’identité institutionnelle ne serait pas affectée. Selon votre rapporteur, cette faiblesse ne permet pas de garantir une harmonisation durable des orientations de l’État et de l’UNCAM. En effet, comme l’a déclaré devant la mission M. Claude Evin, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), l’unification du pilotage national du système de santé suppose d’aller plus loin que de simples procédures de concertation État/assurance maladie, qui comportent des risques de blocage.

● Créer un service à compétence nationale doté du monopole des instructions aux ARS, structure souple et légère de coordination des acteurs, instituée à partir de l’actuel conseil de l’hospitalisation.

Devant la mission (144), la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports s’est prononcée en faveur de l’unification du pilotage national du système de santé autour d’un « conseil de l’offre de soins », présidé par le ministre chargé de la santé et dirigé de façon collégiale par les principaux directeurs d’administrations centrales (DGS, DHOS, DGAS, DSS, etc.) et de caisses d’assurance maladie. Cette proposition serait la plus « pragmatique », car elle est censée garantir la cohérence des décisions de ces différents acteurs sans intégrer ceux-ci dans une Agence nationale de santé. Cette proposition rejoint les vues exprimées devant la mission (145) par les représentants du RSI, qui recommandent de créer, sur le modèle du collège des directeurs de l’UNCAM, un conseil des directeurs des principaux régimes et administrations de l’État, sans personnalité morale et présidé par le ministre, plutôt qu’une Agence nationale de santé, structure lourde et coûteuse.

Ce « conseil de l’offre de soins » aurait un pouvoir exclusif de validation obligatoire de toutes les instructions destinées aux ARS, qui lui feraient rapport. Il disposerait d’un secrétariat permanent regroupant des moyens de l’État comme de l’assurance maladie, sous l’autorité d’un secrétaire général de l’offre de soins. Selon la ministre, une telle structure, dotée du monopole de la correspondance administrative avec les ARS, pourrait constituer l’embryon d’une structure plus ambitieuse, une fois les rapports de l’État et de l’assurance maladie clarifiés. La ministre n’exclut donc pas la création, à terme, d’une ANS.

Votre rapporteur souligne que le champ de compétence d’un tel conseil ne devrait pas être limité à l’offre de soins, mais intégrer toutes les compétences des ARS, y compris la santé publique et le secteur médico-social.

Votre rapporteur reconnaît que le risque de blocage du pilotage national du système de santé est moins fort avec une structure de ce type qu’avec un simple outil de coordination. Néanmoins, l’efficacité du pilotage de santé est une des conditions de son efficience, dont le renforcement constitue, rappelons-le, le premier objectif de la réforme, compte tenu des enjeux liés à la soutenabilité de notre système de santé. En conséquence, s’il devait être choisi de cumuler au sein des mêmes instances les fonctions d’organisation de l’offre de soins et de régulation des dépenses – ce que votre rapporteur ne recommande pas –, il faudrait aller jusqu’au bout de cette logique et, comme le souhaite une large part des acteurs, créer une ANS intégrée, sur le modèle des ARS.

● Instituer une Agence nationale de santé regroupant les caisses d’assurance maladie et les directions d’administration centrale pour piloter les ARS.

La mission considère que seule une telle agence serait de nature à garantir la cohérence du pilotage national des ARS, dans l’hypothèse où celles-ci cumuleraient des compétences d’organisation de l’offre de soins et de la prévention – qui relèvent majoritairement de la responsabilité de l’État – et des compétences de gestion du risque, qui relèvent aujourd’hui de l’assurance maladie. Certains acteurs, comme la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), souhaitent que les agences sanitaires soient elles aussi intégrées à l’ANS, afin de leur permettre de participer à l’animation du réseau des ARS en meilleure coordination qu’aujourd’hui avec l’État et l’assurance maladie.

Pour ces raisons la création d’une ANS est souhaitée par de nombreux acteurs, comme la FHF qui la définit comme une autorité administrative indépendante chargée de :

– gérer les procédures d’allocation des ressources, c’est-à-dire négocier les conventions nationales avec les professionnels de santé, répartir les dotations des établissements gérées par les ARS, répartir l’enveloppe médico-sociale de l’ONDAM en lien avec la CNSA, et gérer la politique du médicament ;

– assurer la gestion du risque ;

– fixer les modalités de répartition de l’offre, c’est-à-dire les plans nationaux de santé et les règles d’élaboration et de mise en œuvre des schémas territoriaux ;

– piloter la politique de santé publique, ainsi éventuellement que la veille et la sécurité sanitaires, à condition de réorganiser les diverses agences existantes.

Il faut cependant souligner qu’une telle agence, comme l’a bien indiqué M. Claude Evin, président de la Fédération hospitalière de France (146), ne pourrait être présidée que par le ministre chargé de la santé. La création d’une Agence nationale de santé risque donc d’être difficile à faire accepter à l’assurance maladie, qui y verra immanquablement un pas vers son « étatisation ». C’est une des raisons pour lesquelles votre rapporteur propose de restructurer la fonction de gestion du risque confiée à l’assurance maladie, plutôt que de l’intégrer aux ARS.

2. Si l’on prend le parti de séparer les fonctions de régulation des dépenses de santé (remboursement avisé) et d’organisation de l’offre sanitaire, médico-sociale et de prévention (planification) à l’échelon régional, il suffira à l'échelon national de clarifier la répartition des compétences entre l'État et l'assurance maladie

Le schéma d'organisation proposé par votre rapporteur n’impose pas de réforme aussi profonde au niveau national. En effet, il ne serait pas nécessaire de créer une ANS, mais seulement de clarifier la répartition des compétences entre l’État et l’assurance maladie, ainsi que le recommande d’ailleurs la Cour des comptes depuis plusieurs années. Une telle clarification consisterait à recentrer l'assurance maladie sur ses fonctions de gestion du risque, et l’État sur ses fonctions d’organisation planifiée de l’offre de soins, de l’offre médico-sociale et de la prévention. Un tel recentrage serait d’ailleurs de nature à encourager l’État à promouvoir des modes d’organisation efficients, notamment en proposant des modes d’exercice innovants et des modes de rémunération diversifiés.

a) Le recentrage de l’assurance maladie sur ses fonctions de régulation conduirait à sortir du champ conventionnel certains dispositifs qui n’en relèvent pas par nature

Dans son rapport 2003 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes dressait le constat suivant : « initialement limitées à la fixation des tarifs, les domaines couverts par les conventions se sont élargis à des aspects de plus en plus nombreux de l’activité des professionnels libéraux et de leur relation avec les patients, ainsi qu’à l’organisation des soins. Si cette extension a permis quelques accords intéressants, par exemple, récemment, la conclusion d’accords de bonnes pratiques, le bilan est pour l’essentiel négatif ». La Cour concluait qu’« élément essentiel des relations entre l’assurance maladie et les professionnels libéraux, les conventions devraient être recentrées sur leur objet propre ».

Dans son rapport 2007 sur la sécurité sociale, la Cour reprend ces critiques, et relève notamment que la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie a prévu de nouvelles extensions du champ des négociations conventionnelles dans des domaines qui relèvent plutôt de l’organisation de l’offre de soins :

– l’article 8 de cette loi (article L. 162-5 du code de la sécurité sociale) étend le champ des négociations conventionnelles avec les syndicats de médecins à la coordination des soins ;

– son article 49 (article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale) associe les professionnels de santé à la définition des dispositifs d’aides à l’installation et prévoit même que les modalités de calcul et la répartition de la charge financière de ces aides entre les régimes relèvent également du champ des conventions.

La Cour considère qu’« une place aussi essentielle des dispositions conventionnelles dans l’organisation du système de soins présente le risque de subordonner cette organisation aux objectifs d’optimisation des revenus, ainsi qu’à des positionnements d’appareils syndicaux ». Elle cite en exemple le parcours de soins, « dispositif essentiellement conventionnel », qui « illustre les dangers d’une excessive association des professionnels de santé à l’organisation du système de soins : habillage scientifique de revalorisations tarifaires, illisibilité de ce qui devrait être une réglementation compréhensible par tous ». Aussi, la Cour réitère-t-elle sa recommandation de 2003 tendant à « recentrer les négociations conventionnelles entre l’assurance maladie et les syndicats de médecins sur leur objet initial de tarifs et de revenus ».

Cette recommandation va dans le sens de ce que votre rapporteur préconise pour le niveau régional : recentrer l’assurance maladie sur la gestion du risque, en transférant aux ARS les compétences et les moyens conventionnels relatifs à la prévention et l’organisation de l’offre de soins, qui relèvent d'une logique de service public.

b) Pour réguler efficacement le système de santé, l’autorité investie d’une fonction de remboursement avisé des soins doit disposer des outils nécessaires à l’exécution de sa mission de gestion des enveloppes de l’ONDAM

Comme le note la Cour des comptes dans son rapport 2007 sur la sécurité sociale, la loi du 13 août 2004 a affiché la volonté de doter chaque intervenant de responsabilités bien définies, mais le succès de cette orientation dépendait de la pertinence de la répartition des compétences entre les acteurs. Cela « nécessitait notamment l’octroi à l’assurance maladie des outils nécessaires à l'exécution de sa mission de gestion des enveloppes de l’ONDAM » ; or la Cour constate que la loi institue ou renforce à cet effet des « structures indépendantes chargées de participer notamment à la régulation des dépenses », mais « sans leur conférer la plénitude des outils pour exercer leurs compétences ».

Pour votre rapporteur, cela supposerait que l’assurance maladie dispose de pouvoirs et d’outils lui permettant d’exercer pleinement sa fonction de remboursement avisé des soins, ce qui suppose qu’elle puisse :

– agir sur le montant des tarifs de T2A, dans le cadre de l’ONDAM voté par le Parlement et des prévisions de volume d’activité de l’ATIH ;

– agir sur les dépenses de médicaments, notamment dans la fixation de leur prix ;

– être pleinement responsable du champ conventionnel, où l’État ne devrait plus s’immiscer.

En effet, bien qu’ils engagent ses financements, l’assurance maladie ne peut pas agir sur les tarifs nationaux applicables dans le cadre de la T2A, qui sont fixés par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale (articles L. 162-22-9 et R. 162-42-1 du code de la sécurité sociale). Le conseil de l’hospitalisation est bien consulté au préalable, mais l’assurance maladie y est minoritaire (deux membres sur sept (147)). M. Frédéric Roeckeghem a jugé devant la mission que la fixation des tarifs pourrait être effectuée dans des conditions plus transparentes et offrir plus de visibilité aux gestionnaires hospitaliers. Votre rapporteur estime lui aussi que dès lors que l’ONDAM est proposé par le Gouvernement et voté par le Parlement, la fixation des tarifs – qui consiste surtout à rapporter cet ONDAM aux estimations de volumes d’activité – ne présente pas un caractère strictement régalien. Afin de renforcer les outils de l’assurance maladie nécessaires à sa fonction de gestion de risque, on pourrait donc étudier les moyens de transférer, au moins en partie, la compétence tarifaire à l’UNCAM, en l’encadrant par des textes législatifs et réglementaires fixant les principes de la convergence des tarifs.

Par ailleurs, l’action sur le prix des médicaments pourrait constituer un autre levier d’action pour l’assurance maladie en tant que rembourseur avisé de soins, alors qu’aujourd’hui ses pouvoirs en la matière sont très limités. Mais, comme le note la Cour des comptes, les transferts de compétences de l’État à l’assurance maladie réalisés en matière de médicaments par la loi du 13 août 2004 apparaissent assez limités, pour deux raisons :

– les pouvoirs de l’UNCAM en matière de fixation du taux du ticket modérateur applicable aux médicaments sont très encadrés (cf. encadré ci-dessous) ;

– malgré l’accroissement du nombre de sièges de l’assurance maladie au comité économique des produits de santé (CEPS), l’assurance maladie reste minoritaire, avec quatre sièges sur onze (article L. 167-16-3 du code de la sécurité sociale).

Les pouvoirs de l’assurance maladie en matière de fixation du taux du ticket modérateur des médicaments

La loi du 13 août 2004 a transféré à l’UNCAM le choix du taux du ticket modérateur qui s’applique à chaque médicament délivré en officine. Ce transfert de compétence en lieu et place du ministre a pour intérêt de mettre en cohérence la responsabilité du gestionnaire et les outils dont il dispose.

Toutefois, dès lors que la décision est fonction du service médical rendu (SMR) déterminé par la commission de la transparence (148), il est possible de s’interroger sur l’apport de l’intervention de l’UNCAM. De surcroît, la détermination du prix auquel s’applique le taux de remboursement échappe à l’UNCAM puisqu'il est fixé par le comité économique des produits de santé (CEPS), en accord avec les laboratoires. Le CEPS est en principe encadré dans ses décisions par le classement comparatif opéré par la commission de la transparence en termes d’utilité relative (149)mais le déterminant essentiel reste bien la politique du médicament décidée par le Gouvernement.

Enfin, le ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale conserve une compétence propre lorsqu’il s’agit de supprimer toute participation de l’assuré à l’acquisition d’une spécialité reconnue comme « irremplaçable et particulièrement coûteuse », c’est-à-dire prononcer un taux de remboursement du médicament à 100 % (150). Cette décision intervient après avis de la commission de la transparence. Le ministre peut également décider d’écarter l’avis de la commission de la transparence pour des raisons sociales.

Source : rapport 2007 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale.

En conséquence, l’assurance maladie ne peut fixer elle-même ni le prix des médicaments, ni leur taux de remboursement.

Enfin, la Cour des comptes juge qu’« il apparaît incohérent de déléguer beaucoup de pouvoirs aux partenaires conventionnels pour les reprendre ensuite par des dispositions législatives spécifiques. C’est pourtant ce qui s’est produit avec l'article 103 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 à propos de la convergence entre médecins traitants et médecins référents ». Votre rapporteur estime qu’une clarification des rôles de l’État et de l’assurance maladie devrait permettre d’éviter à l’avenir ce type d’intervention de l’État dans le champ conventionnel.

c) Un dialogue doit être organisé au niveau national entre l’État et l’UNCAM, par exemple au sein d’un Conseil d’orientation stratégique du système de soins

Dès lors que l’assurance maladie serait recentrée sur ses fonctions de gestion du risque et l’État sur ses compétences d’organisation de l’offre de soins, de la prévention et de l’offre médico-sociale, leurs deux réseaux – parallèles – seraient organisés de façon suffisamment cohérente pour qu’il n’y ait pas de risque de pilotage en double commande des instances territoriales.

Néanmoins, pour mettre le système de santé « sous tension » afin d’inciter les producteurs de soins à des gains d’efficience, une instance de coordination État / assurance maladie au niveau national serait utile, par exemple par évolution du conseil de l’hospitalisation, qui serait composé par les responsables des principales directions et têtes de réseaux nationales. Des réunions régulières permettraient une concertation sur les orientations nationales des politiques de santé (prévention, gestion du risque, tarification etc.) et un pilotage cohérent des ARS par l'État et de ses réseaux par l’assurance maladie.

3. Quelle que soit l’organisation retenue pour les ARS et leur pilotage national, une attention particulière devra être portée à la conduite de la réforme

Le contre-exemple des GRSP montre que la mise en œuvre des ARS devra être pilotée avec attention par le ministère de la santé. En effet, de nombreux responsables des administrations sanitaires et sociales de l’État rencontrées sur le terrain par la mission ont jugé tardives les mesures prises par la DGS pour appuyer les DRASS dans la création de ces groupements – le rapport précité de M. Jean-Marie Rolland partage d’ailleurs ce constat. Or, quel que soit le scénario de réforme retenu, la création des ARS engendrera des changements encore plus profonds dans les DDASS, les DRASS, et le réseau de l’assurance maladie, au risque d’ailleurs que la démobilisation de ces réseaux se traduise par des pertes d’efficience transitoires.

C’est pourquoi il importe que les personnels des services concernés s’approprient dès à présent les enjeux et les grandes lignes de la réforme. Lors de ses déplacements sur le terrain, la mission a pu constater que les acteurs n’étaient pas aussi bien informés qu’ils le souhaitaient sur les réflexions engagées au niveau national. Or il parait indispensable de consolider l’adhésion des cadres des services concernés à la réforme annoncée : si l’encadrement des administrations sanitaires et sociales de l’État et du réseau de l’assurance maladie n’est pas impliqué dans l’élaboration de la réforme et de ses modalités d’application, il ne pourra pas les relayer auprès des personnels.

Cela suppose d’ailleurs que le ministère de la santé, de la jeunesse et des sports engage un dialogue fort avec l’assurance maladie tout au long de la réforme, de son élaboration à sa mise en application.

Cela suppose également une profonde concertation avec les partenaires sociaux, non seulement au titre de leurs fonctions dans les conseils de l’assurance maladie, mais aussi pour leur rôle de représentants des personnels concernés. Les intérêts des personnels doivent en effet être préservés, tant du point de vue statutaire que financier, et, dans la mesure du possible, en termes d’implantation géographique. La réforme doit constituer pour eux une chance dans le déroulement de leur carrière. Il s’agit là d’une des clefs de la réussite de la réforme.

CONCLUSION DES TRAVAUX DE LA MISSION

Après cinq mois de travaux, près de trente auditions à Paris et deux déplacements en province, dans des régions aux caractéristiques sanitaires aussi différentes que la Bourgogne et la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, après avoir ainsi entendu près de 175 personnes représentant les principaux acteurs du système de santé et reçu plusieurs dizaines de contributions écrites d’autres acteurs, la mission observe un consensus sur l’état de notre système de santé et sur les causes de ses insuffisances, mais pas sur les remèdes à y apporter.

Unanimement, la mission considère que l’organisation de notre système de santé « en tuyaux d’orgue » segmente artificiellement la prise en charge de la santé des Français en plusieurs secteurs, pourtant interdépendants – la prévention, la médecine de ville, l’hôpital, le secteur médico-social –, dont le pilotage est cloisonné, tant au niveau national qu’au niveau territorial. Il en résulte des ruptures dans la prise en charge des patients, un déséquilibre entre le volet préventif et le volet curatif de nos politiques de santé – au détriment du premier – et, surtout, des risques importants pour la viabilité financière de notre système de santé.

En conséquence, la mission estime que la réforme du pilotage de notre système de santé doit poursuivre trois objectifs :

– redonner de la lisibilité à ce pilotage ;

– renforcer l’efficacité des politiques de santé ;

– et, surtout, améliorer l’efficience de notre système de santé pour assurer sa viabilité financière.

Dans ce but, un consensus se dégage pour que les politiques de santé publiques, l’offre de soins ambulatoires et hospitaliers, ainsi que l’offre médico-sociale – pour les établissements et services qui ont des activités de soins justifiant leur financement total ou partiel par l’assurance maladie – soient planifiées conjointement, par des agences régionales de santé, et non plus de façon éclatée comme c’est le cas aujourd’hui. La mission juge en effet qu’un pilotage conjoint est nécessaire, notamment pour remédier à l’hospitalo-centrisme qui marque notre système de santé au détriment des soins primaires, du secteur médico-social et de la prévention.

Unanimement, les membres de la mission souhaitent également qu’à l’occasion de la réforme annoncée par le Gouvernement pour les mois à venir, la démocratie sanitaire soit renforcée. Cela suppose à la fois de dynamiser les actuelles conférences régionales de santé et, surtout, de donner un rôle accru aux élus dans la gouvernance territoriale du système de santé, y compris au sein d’un « conseil de surveillance » des ARS, et en lien avec les collectivités territoriales.

De même, la mission juge insuffisants les outils actuels de pilotage du système de santé. En effet, il ne suffira pas de charger les ARS de mettre en cohérence les différents outils de planification existants pour qu’elles pilotent efficacement l’offre de soins, notamment ambulatoires. Il leur faudra notamment des systèmes d’information exhaustifs et des outils d’orientation de la répartition géographique des professionnels de santé plus d’efficaces que les outils existants.

La mission considère également que la création des ARS ne sera pas sans conséquence sur les équilibres qui sous-tendent l’organisation de la gouvernance du système de santé, et notamment la répartition des compétences entre l’État et l’assurance maladie.

Il ressort ainsi des travaux de la mission que le transfert aux ARS des compétences de l’assurance maladie en matière de « gestion du risque »,
c’est-à-dire de régulation des dépenses de santé, suppose, en corollaire, l’unification complète du pilotage du système de santé au niveau national. En effet, si les différentes directions d’administrations centrales et caisses d’assurance maladie ne sont pas intégrées dans un opérateur national – une « Agence nationale de santé » (ANS) –, les ARS risqueront fort d’être handicapées par un pilotage en commande multiple, potentiellement contradictoire, comme c’est le cas aujourd’hui des missions régionales de santé (MRS).

Dès lors, deux scénarios de réforme sont envisageables :

– soit les ARS cumulent, d’une part, les fonctions d’organisation de la prévention et de l’offre de soins et, d’autre part, les fonctions de régulation des dépenses de santé, sous le contrôle d’une ANS ;

– soit les fonctions d’organisation du système de santé et celles de régulation des dépenses sont séparées, confiées pour les premières aux ARS, sous la responsabilité du ministère de la santé, et pour les secondes à l’assurance maladie, dont le champ de compétences doit être recentré sur la gestion du risque, conformément d’ailleurs aux recommandations réitérées de la Cour des comptes.

Le premier schéma présente certainement l’avantage de la simplicité.

Pour votre rapporteur, il comporte cependant plusieurs risques :

– la création d’une ANS – effectivement indispensable – pourrait être perçue comme un pas décisif vers une « étatisation » de l’assurance maladie, qui irait à l’encontre des orientations prises en 2004 et des souhaits des partenaires sociaux ;

– au sein des ARS, la direction chargée de la régulation des dépenses de santé risque de n’être pas assez autonome pour se faire entendre dans tous les dossiers, notamment lorsqu’il s’agit de restructurations difficiles.

C’est pourquoi votre rapporteur confirme une certaine préférence pour le second schéma, qui repose sur une distinction fonctionnelle claire, entre d’une part, le métier d’assureur – qui est celui de l’assurance maladie – et, d’autre part, le métier d’organisateur de l’offre de soins – qui serait celui de l’ARS, dotée à cet effet des moyens permettant de financer les charges de service public que la tarification à l’activité ou à l’acte ne prend pas en compte.

Les travaux de la mission n’ayant pas permis d’aboutir à un consensus en faveur d’un des deux scénarios, l’intérêt du présent rapport sera d’avoir présenté et détaillé les deux options mais aussi de permettre qu’un débat s’ouvre à partir des prises de positions exprimées et consignées à travers les différentes contributions des membres de la mission, parties intégrantes du présent rapport.

*

Le présent rapport assorti des propositions du rapporteur et des contributions des membres de la mission a été adopté le 5 février 2008 par la mission.

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR

1. Fixer à la réforme un triple objectif :

– simplifier le pilotage de notre système de santé ;

– rendre nos politiques de santé plus efficaces ;

– renforcer l’efficience du système afin de garantir sa viabilité financière.

2. Confier les fonctions d’organisation de l’offre de soins de ville, de l’offre hospitalière, de l’offre médico-sociale et de la politique de santé publique à une seule et même autorité régionale : l’agence régionale de santé (ARS).

3. Confier les fonctions de régulation des dépenses de santé à une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM), constituant un partenaire à l’ARS.

4. Au niveau national, clarifier le partage des compétences entre l’État et l’assurance maladie, en recentrant les missions de celle-ci sur la gestion du risque, et non sur la seule liquidation des remboursements.

5. Doter les ARS d’outils nouveaux leur permettant de piloter efficacement l’offre de soins ambulatoires.

6. Refonder la démocratie sanitaire, par un renforcement des conférences régionales de santé et par une plus grande implication des élus dans la gouvernance régionale du système de santé.

7. Garantir par des mécanismes institutionnels et financiers que les ARS contribueront à réduire l’hospitalo-centrisme du système de santé au profit des politiques de prévention, des soins ambulatoires et du secteur médico-social.

8. Mener la réforme de façon concertée, en veillant aux intérêts des personnels de l’État et de l’assurance maladie.

CONTRIBUTIONS DES MEMBRES DE LA MISSION

– Contribution de M. Marcel Rogemont et des membres de la mission appartenant au groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC)

– Contribution de Mme Valérie Boyer et MM. Jean-Marie Rolland (UMP) et Guy Malherbe (UMP)

– Contribution de M. Philippe Boënnec (UMP)

– Contribution de M. Jean-Luc Préel (NC)

Contribution de M. Marcel Rogemont et des membres du groupe SRC

L’ARS : un outil pour construire une organisation territoriale du système de santé afin d’adapter l’offre au plus près des besoins de la population

Lors des débats sur le projet de loi relatif à la réforme de l’assurance maladie en août 2004, le groupe socialiste avait déposé des amendements appelant la création d’ARS. Ces amendements définissaient l’ARS comme ayant pour mission, dans le cadre des orientations définies au niveau national par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et des priorités définies au niveau régional par le conseil régional de santé, de définir et mettre en œuvre une politique régionale d’offre de soins hospitalière et ambulatoire, de promouvoir le bon usage et la qualité des soins et de définir et mettre en œuvre une politique régionale de prévention.

La création de ces structures est nécessaire, elles doivent s’inscrire au sein d’une vision globale du système de santé, dont la réorganisation est indispensable en vue d’une réforme durable et profonde.

Il s’agit de ne pas rendre encore plus complexe notre organisation administrative. Si c’était le cas, cela serait une catastrophe pour notre système de santé.

L’ARS doit être un outil efficient au service d’une politique de santé avec comme principal objectif de garantir l’accès aux soins pour nos concitoyens dans un dispositif économiquement soutenable.

Actuellement, il y a un consensus autour de la mise en place de ces agences. Les objectifs et l’organisation laissent cependant apparaître des divergences.

La situation actuelle

On constate un cloisonnement important entre la médecine de ville, l’hôpital et le médico-social, qui nuit à l’efficience du système. A cela s’ajoute la complexité du système de répartition des compétences entre l'État et l’assurance maladie, qui se répercute à l’échelon régional où l’on trouve actuellement une répartition des compétences complexe entre l’ARH, l’assurance maladie et la DRASS.

Pour mettre un terme à la dispersion des compétences et des moyens, une des solutions consisterait à créer un organe régional les regroupant et couvrant toute la chaîne des soins mais aussi les ressources et les moyens d’actions actuellement dispersés entre les ARH, les DRASS, les DDASS et les organismes composant la sécurité sociale (CPAM, CRAM, URCAM, service médical).

Un périmètre à définir avec soin

La santé est une compétence de l’État, qui la met en œuvre avec l’aide de l’assurance maladie. Seule la protection maternelle et infantile (PMI) a fait l’objet d’un transfert de compétence lors de la première étape de la décentralisation dans les années quatre-vingt. La loi du 9 août 2004 relative à la politique de la santé publique a même re-centralisé les compétences antérieurement attribuées au département en matière d’action de prévention sur les maladies infectieuses et chroniques. Cette loi a réaffirmé la responsabilité de l'État en matière de politique de santé.

Un des objectifs des ARS serait de mettre en place une base juridique pour construire une vraie politique publique régionale de santé, au vu des besoins de santé, différents selon les territoires, et des difficultés en matière d’organisation.

Cette évolution nous amène à penser qu’il faut désormais redessiner l’organisation du système en commençant par définir de véritables territoires de santé.

S’agissant du périmètre de compétence des ARS, certains points font l’objet d’un consensus, d’autres nécessitent de prendre des arbitrages politiques.

–  L’ARS doit avoir en charge la gestion de l’offre de soins de ville et de l’hôpital pour une meilleure coordination et une meilleure réponse aux besoins de santé. Sur ce point les avis recueillis pas la mission sont unanimes. De cette meilleure coordination dépendra l’amélioration de la permanence des soins, qui passe par une meilleure lisibilité, pour les usagers, de l’offre de soins de premier recours.

–  En matière de santé publique, l’ARS doit veiller à mieux adapter les politiques de prévention aujourd’hui éclatées et raisonner en termes de continuum entre la prévention et le soin. Il faudra lui assurer des financements suffisants et protégés afin de ne pas voir ce sujet relégué derrière la régulation de l’offre de soins. Ainsi les différentes agences de santé, les GRSP doivent être intégrés aux ARS et il convient de leur donner un rôle fort en matière de santé publique, en revisitant les frontières avec les autres champs de la prévention (santé scolaire, médecine du travail…). Le rapport de la mission envisage de confier aux ARS la santé environnementale, la santé au travail, la santé à l’école. Par exemple, pour la santé au travail, son intégration dans le PRSP en région Rhône Alpes lui a apporté plus d’efficacité et de légitimité.

–  L’ARS devrait avoir la gestion des outils statistiques. Actuellement il n’y a pas de recueil homogène des données dans ce secteur, ce qui s’avère catastrophique pour le pilotage du système de santé.

–  Le secteur médico-social financé par l’assurance maladie doit être intégré aux ARS. Certes le secteur du handicap et des personnes âgées, ne se réduit pas à sa dimension sanitaire, mais celui-ci est de plus en plus important, en raison de l’allongement de la vie. Par ailleurs la distinction avec le secteur sanitaire est parfois très mince. Et ce secteur ne peut être pensé distinctement des restructurations hospitalières menées dans les régions.

–  La formation est un point essentiel en matière de démographie des professions de santé. Actuellement les régions sont compétentes en matière de formation paramédicale, la formation des personnels médicaux étant du domaine national.

Cependant au vu du constat largement partagé sur le problème de la répartition des personnels médicaux sur l’ensemble du territoire, les ARS pourraient avoir un rôle utile dans l’expression des besoins de formation, en s’appuyant sur les observatoires régionaux de santé.

Cela pourrait réduire les inégalités régionales en matière de démographie médicale car les professionnels de santé formés dans une région s’y installent à 80%.

Les ARS pourraient permettre de mieux adapter le nombre de postes d’internes en fonction des besoins, et les épreuves classantes nationales de fin d’études pourraient être organisées à l’échelon régional. Tous les rapports, dont celui du Professeur Yvon Berland, préconisent cette mesure comme nécessaire pour lutter contre les déserts médicaux.

–  La veille et la sécurité sanitaire doivent être comprises dans le périmètre de compétence des ARS. Tout en respectant la gestion de crise dévolue au préfet, elle nécessite une coordination régionale.

Confier la gestion du risque au ARS est un choix stratégique fondamental

Le rapport de la mission présente deux options :

1 ) Une ARS chargée de l’organisation de l’offre de soins et de la régulation des dépenses de santé. Cela permettrait de gagner en efficacité dans les actions de maîtrise médicalisée des dépenses de santé ; de responsabiliser l’ARS en termes d’efficience du système de santé car elle aurait les moyens d’agir sur les dépenses de santé ; de réellement promouvoir des outils contractuels avec les professionnels de santé.

2 ) Une ARS chargée d’organiser l’offre de soins et la politique de santé publique, et une direction régionale de l’assurance maladie (DiRAM), régulatrice des dépenses. Le rapporteur de la mission juge préférable cette séparation entre ce qu’il appelle le régulateur chargé des fonctions d’achats de soins (DiRAM) et l’organisateur de l’offre de soins, chargé de la planification et de la gestion du secteur public hospitalier (ARS).

Cette deuxième option se situe dans le prolongement des choix faits dans la loi de 2004 réformant l’assurance maladie, que nous avions dénoncés dès le départ, et qui n’ont pas apporté l’amélioration annoncée par le Gouvernement.

C’est pourquoi nous tenons à réaffirmer notre attachement à une ARS à compétence large, chargée aussi de la régulation des dépenses de santé qui pourrait, pourquoi pas, se voir assigner un objectif régional de dépenses de santé.

La démocratie sanitaire et la place des élus

La création d’ARS doit être la base solide pour construire une réelle «démocratie sanitaire».

La démocratie sanitaire que doit porter l’ARS comporte la participation des représentants des usagers et des malades comme des professionnels de santé, des élus locaux et des partenaires sociaux représentant l'assurance maladie.

C’est pourquoi la composition de conférences régionales de santé plus resserrées en nombre de membres (50 au lieu de 120) et plus opérationnelles, avec un bureau permanent et des réunions régulières doit être encouragée.

Ces conférences pourraient éventuellement avoir compétence pour donner des avis en remplacement des CROSMS, par exemple.

Actuellement les élus territoriaux n’ont pas de place réelle dans le système de santé. La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie a permis d’intégrer deux conseillers régionaux ayant voix consultative, à la « comex » de l’ARH. Elle a donnée aussi la possibilité de faire une expérimentation en donnant une voix délibérative à ces élus si la région participe à l’investissement hospitalier (seule la région Nord pas de Calais l’a fait avec un budget de 12 millions d’euros par an). Ils sont présents dans les conférences sanitaires de territoire censées incarner la démocratie sanitaire, mais au sein desquelles la question de la répartition des enveloppes prend le pas sur l’organisation des soins.

La représentation des élus doit être prévue au sein des ARS, que ce soient les conseillers régionaux mais aussi les conseillers généraux en charge des questions sanitaires, voire les élus municipaux.

La place des élus doit être définie, principalement dans le conseil de surveillance des ARS pour les conseillers régionaux et généraux.

Dans ce conseil, la présence des professionnels de santé suscite des interrogations.

Ne serait-il pas plus judicieux de regrouper les professionnels de santé dans un comité des contrats devant lequel l’ARS viendrait présenter chaque contrat (afin que chaque acteur puisse intégrer son contrat dans l’ensemble de la politique menée par l’ARS)?

Les ARS auront pour mission de mettre en place un plan régional de santé. Il devra être soumis au Conseil régional, lequel devra émettre un avis.

Afin de garantir une transparence optimale, chaque année le directeur de l’ARS devra présenter son rapport d’activité au Conseil régional et aux Conseils généraux à l'instar du Préfet.

La nécessité d’une cohérence nationale avec cette nouvelle organisation

La mise en place des ARS à compétence large, quel que soit le cadre choisi, doit s’accompagner d’une organisation nationale en cohérence.

Un des débats au sein de la mission a tourné autour de la question de savoir s’il faut une Agence nationale de santé. Dans tous les cas il faut des outils identifiés et des responsabilités bien claires pour permettre une bonne mise en oeuvre des politiques de santé et des orientations votées par le Parlement, et s’assurer de la bonne réalisation des objectifs régionaux.

Il faut donc revoir l’organisation nationale afin d’unifier les instance de pilotage et d’animation des ARS.

Cela pose la question de la création d’une éventuelle agence nationale de santé (ANS).

En conclusion :

Le choix de l’option consistant à distinguer au niveau régional une ARS chargée de l’organisation et une DIRAM chargée de la régulation, ne correspond pas à l’ambition qui était à l’origine du projet de créer des ARS.

Après avoir critiqué, à juste titre le cloisonnement vertical de l’organisation actuelle (soins de ville, hôpital, médico-social, santé publique), le rapporteur propose un cloisonnement vertical encore plus artificiel entre l’organisation et la régulation qui conduira à la reproduction et à l'aggravation des incohérences actuelles.

La principale justification de cette position réside dans l’évocation d’une étatisation de l'assurance maladie. Or depuis la réforme de l'assurance maladie en 2004, le contrôle des partenaires sociaux sur la CNAMTS a été réduit à un rôle de conseil et d’orientation. L’assurance maladie n’est plus l'incarnation de la démocratie sociale.

Aujourd’hui l’assurance maladie est un établissement public, la CNAMTS, gérée par un directeur général nommé en conseil des ministres, qui pilote un ensemble de caisses de droit privé chargées d'une mission de service public.

Or selon nos institutions, les politiques publiques sont gérées sous le contrôle des ministres qui répondent de leur action devant le Parlement. Ainsi, il est artificiel de séparer la régulation des dépenses de l’organisation de l’offre, car il faut que les responsabilités soient clairement assumées par ceux qui les prennent.

Le dispositif :

● Nous souhaitons la création des ARS

● Elles doivent avoir un périmètre d’action très large

Nous réaffirmons note attachement à faire vivre la démocratie sanitaire par:

● Un plan régional de santé, soumis à l’avis du Conseil régional

● Un rapport annuel de l’ARS présenté devant le Conseil régional et les Conseils généraux

● Un conseil de surveillance mis en place à côté de l’ARS comprenant une représentation du Conseil régional et des Conseils généraux.

● Une conférence régionale de santé avec des élus, des représentants des associations de malades, des professionnels de santé, des partenaires sociaux représentant l’assurance maladie qui aura pour rôle de remplacer les organes de consultation intéressant la santé

● Un comité des contrats pour les professionnels de santé

Contribution de Mme Valérie Boyer et de MM. Guy Malherbe
et Jean-Marie Rolland (UMP)

Nous partageons bien évidemment le diagnostic de notre rapporteur sur la complexité et l’enchevêtrement des structures et des responsabilités de notre système de santé :

– le manque de coopération public–privé et ville-hôpital ;

– l’inégalité à l’accès aux soins de qualité sur l’ensemble du territoire ;

– la place insuffisante de la prévention ;

– l’insuffisante coordination avec le médico-social, à l’origine de l’embolisation du parcours de soins de nombreux patients.

Cette situation s’explique notamment par un manque de coordination entre l’assurance maladie, financeur, et les différents acteurs du système de santé.

Aussi, nous rejoignons le souci de notre rapporteur de construire un système plus lisible, plus efficace, plus efficient, garantissant des soins de qualité sur l’ensemble du territoire.

À cet égard, il paraît indispensable, comme le propose notre rapporteur, que les futures agences régionales de santé (ARS) disposent d’un périmètre large comprenant la médecine de ville, l’hôpital, la partie sanitaire du secteur médico-social et la santé publique. Elles doivent également pouvoir participer aux choix en matière de formation, tant sur l’aspect qualitatif que quantitatif.

Toutefois, sur le plan de la gouvernance, je m’interroge sur la pertinence et l’efficacité d’un des scénarii proposés tendant à dissocier l’organisation (future ARS) et la régulation (DiRAM).

Ø De fait, le maintien d’un système bicéphale ne conduirait-il pas à reproduire au niveau régional les mêmes difficultés que l’on connaît au niveau national, affectant par là même la lisibilité du dispositif ?

Ø Comment imaginer une ARS, dans le cadre de sa fonction d’organisation, qui pourrait autoriser des équipements lourds (IRM, scanner, etc.), l’ouverture d’activités de soins sans intégrer les conséquences sur l’activité et donc sur le financement par l’assurance-maladie ?

Ø Tous les membres de la mission sont d’accord pour des ARS à périmètre large. Ne serait-il pas pour le moins paradoxal d’affaiblir ce choix en en réduisant largement la portée dès lors que l’ARS assurerait l’organisation et la DiRAM la régulation ?

L’enjeu majeur de la réforme est de définir une organisation et une gouvernance qui puissent garantir l’accès de tous à des soins de qualité et la pérennité financière du système.

Sur ce plan, comment dans une même enveloppe régionale, définie dans un ORDAM, pourrait-on faire coexister deux sous-enveloppes, l’une au titre des missions d’intérêt général et des actions de santé publique et l’autre au titre de l’activité et du remboursement des actes relevant de la DiRAM ?

En somme, quelle crédibilité aurait une ARS privée de l’essentiel de ses leviers financiers ?

Les ARS responsables de l’organisation de la filière de soins auront notamment deux problèmes essentiels à résoudre :

– l’offre de soins de premier recours ;

– les relations avec les établissements de santé.

Ø Pour les soins de premier recours, compte tenu des évolutions sociologiques et démographiques, il est nécessaire que chaque territoire propose une offre pluridisciplinaire dont les objectifs seront définis par contrat avec l’autorité régionale (ou, pourquoi, pas son délégataire, une CPAM par exemple). Ces objectifs devront traiter du volet organisationnel, y compris de la permanence des soins, de la santé publique, du suivi et de l’accompagnement des patients atteints de maladies chroniques, l’utilisation de référentiels pour garantir la qualité et l’efficience médico-économique, le mode de paiement à l’acte et/ou au forfait. Ce volet essentiel pour la structuration de l’offre montre que l’on ne peut dissocier les démarches de l’organisation et celles de suivi des enveloppes.

Ø Concernant les relations avec les établissements de santé, autre élément de l’offre de soins, là aussi, l’approche ne peut être que globale. C’est également par le contrat que doivent se définir les engagements de l’autorité régionale et ceux des établissements.

En tout état de cause, la réussite de la réforme suppose le développement, dans chaque région, d’une culture commune, basée sur la confiance, entre l’assurance-maladie, les services de l’État et les différents acteurs du système de santé.

Une organisation unifiée ne pourrait-elle pas mieux y contribuer ?

Contribution de M. Philippe Boënnec (UMP)

La mission a été conduite avec beaucoup de sérieux et d’expérience en auditionnant de manière large les différents acteurs du secteur sanitaire et médico-social.

Le rapport expose avec pertinence l’organisation et la régulation sanitaire et médico-social française, et chacun s'accorde à constater que le système est à bout de souffle.

Le système est illisible, altérant ainsi son efficacité et son efficience.

Une réforme est donc indispensable. Car l’impact des prélèvements sociaux et obligatoires sur l’économie générale est important. L'enjeu de cette réforme est un enjeu politique. Quel degré de couverture sanitaire voulons-nous ? À quel niveau mettons nous le curseur, tout en prenant en compte les autres facteurs : la croissance, le PIB, la concurrence internationale ?

Quoiqu’il en soit la réforme est nécessaire afin d’utiliser la contribution publique avec le meilleur rendement.

Doit-on garder la dualité entre, d'une part, l'organisation sanitaire et, d’autre part, la régulation des dépenses de santé ? La réponse est complexe. L’enjeu en termes d’économie générale fait que l’État ne peut rester étranger à la régulation. Au cours du temps nous constatons que l’assurance maladie n’a gardé qu’une partie de son caractère d’assurance mutualiste.

Une organisation régionale de la santé regroupant la santé publique, l’hospitalisation, la médecine ambulatoire, la santé environnementale, la santé scolaire et la partie sanitaire du médico-social est nécessaire à la lisibilité, la cohérence, l’efficience du système de santé.

Cette nouvelle organisation entraîne un redéploiement des DRASS et des DASS, le Préfet de région restant responsable, avec le concours des services de l’ARS, de la sécurité sanitaire lorsqu'elle est liée à une perturbation de l’ordre public.

La mise en place des agences régionales de santé nécessite une coordination nationale sous l’autorité du Gouvernement et contrôlée par le Parlement.

La régulation des dépenses de santé doit-elle être confiée seulement à l’assurance maladie ? La question doit être posée. Même dans l’affirmative, on doit éviter l’écueil d’un système s’organisant en parallèle avec les ARS et nécessite de repositionner les compétences de l’assurance maladie.

La dualité ARS / assurance maladie est un facteur d'illisibilité favorisant les pertes d'efficience, en particulier dans le cadre du conventionnement avec les établissements et les professionnels de santé, ou lors de leur évaluation et de leur contrôle, activités indispensables dont le résultat doit être transmis à l’ARS.

La gouvernance de l’ARS doit faire reposer la prise de décision sur le dialogue sur la concertation avec les différents acteurs.

La réforme du système de prise en charge sanitaire de notre population est incontournable et urgente. Cette réorganisation est l’un des enjeux les plus importants de notre société et c’est un enjeu politique du fait des prélèvements et des contributions supportés par les assurés et les entreprises.

Cette réforme complexe doit être claire et lisible pour l’ensemble des acteurs car elle devra nécessairement passer par des changements d'habitudes.

Cette réforme devra également prévoir une place importante au décloisonnement et à l’évaluation. Se pose aussi la question du rôle du Parlement dans ce contrôle.

Contribution de M. Jean-Luc Préel (Nouveau Centre)

La création d’Agences Régionales de Santé apparaît comme une nécessité. Pour l’avoir proposé de longue date, je ne peux que m’en réjouir.

Cependant, plusieurs problèmes demeurent et la solution proposée par le Président-Rapporteur risque de rendre cette création inopérante.

Le but est d’aboutir à une organisation simplifiée de notre système de santé, mettant fin à un saucissonnage absurde, grâce à un responsable unique de santé au niveau régional.

La création de l’ARS ne doit pas conduire à une structure supplémentaire, elle doit dans le même temps permettre de simplifier en supprimant tous les doublons et les structures devenues obsolètes.

Le périmètre de l’ARS fait, semble-t-il, l’objet d'un quasi-consensus.

L’agence doit couvrir l’ensemble du soin, c’est-à-dire supprimer la coupure incompréhensible entre les établissements et la médecine de ville permettant de prendre en compte l’accès aux soins, la permanence, les urgences, les réseaux, les prescriptions hospitalières...

L’Agence doit comprendre la prévention et l’éducation à la santé, parents pauvres de notre système de santé. La séparation actuelle entre prévention et soin est absurde. Un médecin au cours d’une consultation fait à la fois du soin, de la prévention et de l’éducation. Une prévention et une éducation à la santé doivent pouvoir s’appuyer sur les hommes, les femmes, les associations de terrain. Il faudra veiller à un financement accru et pérenne de ces actions.

L’Agence doit avoir la responsabilité du volet sanitaire du médico-social, notamment celui concernant les personnes âgées. Il n’est pas possible de séparer le financement des services de soins à domicile, des cantous, des services de longue durée...

La nécessité de filières gériatriques est urgente : accueil aux urgences, services spécialisés, lits d’aval, cantous, etc...

La formation des professionnels de santé doit également être de la compétence des ARS. Nous connaissons des problèmes démographiques en raison notamment d'un manque d'anticipation, d’une non prise en compte des besoins au niveau régional : or, 80 à 85 % des étudiants formés restent dans leur région. Il est donc souhaitable de mettre en place un numérus clausus régional par spécialité en s’appuyant sur les travaux d’Observatoires régionaux de santé renforcés.

La gestion de l’ONDAM régionalisé réalisera ainsi la fongibilité des enveloppes. La veille et la sécurité sanitaire peuvent demeurer sous la responsabilité des préfets.

Quatre problèmes demeurent :

– la place de l’assurance-maladie ;

– la « démocratie sanitaire » ;

– le bouclage national ;

– la suppression des structures doublon.

1) La place de l'assurance-maladie :

La réforme Juppé permet au Parlement de débattre de l’ONDAM, c’est-à-dire des seules dépenses remboursables par le régime général, laissant de coté l’accès aux soins sur le territoire, les dépenses prises en charge par les complémentaires, le reste à charge, la prévention et l'éducation à la santé.

La place de l’assurance-maladie dans la santé est donc très partielle.

La réforme 2004 a étatisé l’assurance-maladie. Elle n’est plus gérée par les partenaires sociaux (l’a t’elle été ?). Le Directeur général a les pleins pouvoirs pour gérer l’ONDAM qui lui est confié par le Parlement (ou le Gouvernement ?)

Quelle est la légitimité de l’assurance-maladie ? N’est-elle pas une agence atypique ?

L’ARS doit disposer également de l’informatique pour connaître l’activité indispensable à l'organisation des soins.

L’assurance-maladie garderait le rôle de remboursement, ce qu’elle sait faire.

2) la démocratie sanitaire :

Le Directeur de l’ARS ne doit pas être un préfet sanitaire. Il doit être contrôlé par un organisme démocratique.

Les conférences régionales de santé demeurent des grand-messes. Elles ne constituent qu’un alibi.

Nous souhaitons des Conseils régionaux de santé, réunissant tous les partenaires de la santé, professionnels, établissements, associations de malades et d’anciens malades.

Les membres doivent en être élus pour avoir la légitimité, et par collèges pour permettre une juste répartition (URML et Union régionale des professionnels de santé).

Leur mission sera de contrôler l’exécutif régional qui rendra compte de ses actions, de définir les besoins à partir des travaux des observatoires régionaux de santé, de gérer l’ONDAM régionalisé.

Le but de ces conseils régionaux de santé est double :

–  assurer une «  démocratie sanitaire » avec un contrôle de l'exécutif ;

– aboutir à une réelle maîtrise médicalisée des dépenses de santé. En effet, les professionnels seront associés en amont aux décisions et en aval à la gestion, ils seront donc responsabilisés.

3) Le bouclage national :

– Création d’une branche autonome maladie professionnelle et accidents du travail gérée par les partenaires sociaux.

– Conseil national de la santé : composé de représentants élus des conseils régionaux de santé.

À partir des travaux des conseils régionaux, il préparera une synthèse définissant les priorités nationales de santé, permettant au Gouvernement de présenter chaque année au printemps un projet de loi pour la politique de santé (accès aux soins, prévention priorités...).

Le Parlement votera :

– au printemps les priorités nationales définies à partir des besoins régionaux ;

– à l’automne le financement de ces priorités. L’ONDAM sera donc médicalisé ;

– la répartition régionale de l’ONDAM sur des critères objectifs : morbidité, mortalité, âge et richesse de la région.

Le Conseil régional de la santé et l’ARS gèreront l’ONDAM régionalisé :

Une coordination des ARS présidée par le ministre de la santé veillera à l’équité.

4) La suppression des structures doublons ou devenues obsolètes :

Cette organisation implique de fait la disparition des GRSP, des URCAM, une transformation des CRAM en caisses régionales vieillesse, une rédéfinition des rôles et des missions des DRASS et des DASS.

En conclusion, la création des ARS est une occasion unique de simplifier l'organisation, de supprimer les cloisonnements absurdes (ville-hôpital, soins-prévention, sanitaire/ médico-social) mais aussi de rapprocher les décisions du terrain permettant de mieux répondre aux besoins.

L'ARS doit être le responsable unique de la santé au niveau régional. La proposition souhaitée par le Président-Rapporteur aboutirait à une dyarchie, à une confusion des rôles et donc à l’inefficacité, voire la paralysie.

Dès lors, il s’agirait d'une occasion manquée.

L’ARS doit disposer de tous les outils informatiques, contrôle médical pour gérer la médecine de ville et les établissements, pour évaluer les pratiques et assurer l'accès de tous à des soins de qualité, sans négliger la prévention et donc la santé de nos concitoyens.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission s’est réunie, le mercredi 6 février 2008, sous la présidence de M. Pierre Méhaignerie, président, pour examiner le rapport de M. Yves Bur, député.

Un débat a suivi l’exposé de M. Yves Bur, rapporteur.

Le président Pierre Méhaignerie a salué le travail accompli. Il faut aujourd’hui maîtriser l’évolution des dépenses, tout en améliorant l’état de santé des Français. Dans ce cadre, quelle sera l’étendue des missions des ARS ? Deux thèses s’affrontent, avec leurs qualités et leurs faiblesses. Peut-on tendre vers l’unité sans étatisation, de façon à assurer la lisibilité de la gouvernance ? Doit-on dissocier la régulation et la gestion du risque, au risque de créer des problèmes de lisibilité de la gouvernance ? Afin de répondre à ces questions et aboutir à un consensus, il sera proposé d’auditionner quatre ou cinq responsables de l’assurance maladie et du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports.

Après avoir rappelé qu’il souhaitait de longue date que soient créées ces agences régionales de santé, qui devraient voir le jour avant la fin de l’année, M. Jean-Luc Préel a regretté la mise en place en 2004 des groupements régionaux de santé publique (GRSP), objets de toutes les critiques aujourd’hui.

Cependant, des questions demeurent. L’instauration d’une dyarchie pourrait ainsi poser des problèmes de fonctionnement. Tout le monde s’accorde aujourd’hui pour considérer que les ARS doivent permettre de simplifier le système de santé, en installant un responsable unique au niveau régional. Si le périmètre des compétences des ARS semblait difficile à définir, un consensus a fini par se dégager, même s’il sera sans doute délicat d’articuler le rôle du préfet et de l’ARS en matière de veille et de sécurité sanitaire. Restent en débat la place de l’assurance maladie, la démocratie sanitaire, le pilotage national et la suppression des doublons ou des structures obsolètes.

S’agissant de la place de l’assurance maladie, pourquoi s’inquiéter de l’étatisation du système, puisqu’il l’est de fait depuis 2004 ? L’assurance maladie n’est plus gérée aujourd’hui par les partenaires sociaux, le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), nommé par le gouvernement, dispose des pleins pouvoirs et ne rend compte à aucune structure démocratique. L’assurance maladie est devenue une sorte d’agence nationale atypique.

Dans un souci d’efficacité, il faut confier aux ARS le service du contrôle médical, même s’il ne reste, dès lors, à l’assurance maladie qu’une mission de remboursement. En revanche, la branche accidents du travail et maladies professionnelles doit rester spécifique et autonome.

Pour ce qui est de la démocratie sanitaire, il est regrettable que les conférences régionales de santé ne s’apparentent trop souvent à une « grand-messe », dont les rapports sont parfois imprimés avant même qu’elles se réunissent. Il faut mettre en place un véritable conseil régional de santé, élu par collèges. C’est à ce niveau que pourrait être en partie géré un ONDAM régionalisé. En plaçant les responsables locaux, notamment les professionnels de santé, face à leurs responsabilités, en les associant à la prise de décision et à la gestion, on pourra peut-être régler les problèmes de corporatisme et mieux maîtriser les dépenses de santé.

Concernant le bouclage national de ce dispositif, il faudrait mettre en place un vrai conseil national de santé, émanant des conseils régionaux de santé, qui pourrait aider chaque année le gouvernement à définir les priorités de santé dans un projet de loi. Une agence nationale, ou de coordination des agences régionales de santé, serait indispensable. Cela étant, que deviendraient les directions du ministère ? Il serait logique de les intégrer dans cette agence nationale. Il serait par ailleurs souhaitable que le Parlement ait un vrai débat sur la santé chaque année, car si l’on débat aujourd’hui de l’ONDAM, de nombreuses autres questions sont négligées, comme l’accès aux soins ou le rôle des assurances complémentaires.

Enfin, il faut avoir le courage de simplifier, et de supprimer les doublons ou les structures devenues obsolètes.

M. Marcel Rogemont a souligné la nécessité de créer des ARS pour répondre à un besoin d’horizontalité fonctionnelle et territoriale, et identifier les responsables, rappelant que le rapporteur a proposé deux scénarios : étatisation de l’assurance maladie ou distinction entre le métier d’assureur et celui d’organisateur de l’offre de soins. On peut d’ailleurs s’étonner de l’emploi du terme « étatisation », pour une solution qui n’est pas souhaitée par ceux-là même qui ont le plus participé à l’étatisation rampante de l’assurance maladie : vote par le Parlement du budget de la sécurité sociale, loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie. Il est clair que les responsabilités de l’État en matière de santé sont pleines et entières. Qui est responsable des déficits si ce n’est le gouvernement et son ministre de la santé ?

La solution prônée par le rapporteur, en réduisant l’enjeu de la création des ARS à la seule question d’une meilleure organisation des services de l’État en région et en laissant à la seule assurance maladie la régulation des dépenses n’est pas sans risque, et s’éloigne des ambitions initiales. On pourra toujours prétendre que les ARS gèrent la politique des forfaits en compensation de missions de service public, c’est en fait celui qui « tiendra la machine à billets » qui organisera l’offre de soins. En effet, comme c’est l’acheteur qui commande sur un marché, l’organisation de l’offre de soins, pour être viable financièrement, n’aura d’autre destin que de s’adapter aux vœux de l’acheteur.

Par ailleurs, le rapporteur propose que les directeurs régionaux de l’assurance maladie en charge de la régulation siègent au conseil de l’ARS, affirmant au passage une primauté. Pourquoi pas l’inverse ? Qui doit être en effet le responsable d’un éventuel objectif régional de dépenses d’assurance maladie (ORDAM) : l’ARS ou l’URCAM transformée en DiRAM ? Il faudra poursuivre la réflexion. On ne pourra faire l’impasse sur la question d’une agence nationale de santé ou d’une organisation décloisonnée à l’échelon régional.

Quant à la question des activités de soins du secteur médico-social, on ne pourra pas garantir le nombre de patients âgés passant de l’hôpital au secteur médico-social. Dès lors, le dispositif de fongibilité asymétrique proposé par le rapporteur ne suffit pas à garantir qu’on ne fasse pas payer aux conseils généraux les lits nécessaires en aval de l’hôpital.

M. Jean-Marie Rolland a rappelé que l’enjeu majeur de la réforme est de définir une organisation et un mode de gouvernance qui puisse garantir l’accès de tous à des soins de qualité, ainsi que la pérennité financière du système. On constate une forte disparité des dépenses de santé par habitant selon les régions, et des économies considérables pourraient être réalisées si toutes les dépenses étaient ramenées à un niveau médian.

Si l’on veut se rallier au diagnostic établi par le rapporteur, et à la définition du périmètre des ARS, on peut néanmoins s’interroger, s’agissant de la gouvernance, sur la pertinence et l’efficacité d’une dissociation entre l’organisation de l’offre de soins et la régulation des dépenses de santé. Le maintien d’un système bicéphale au niveau des régions conduirait à reproduire à l’échelon régional les difficultés déjà rencontrées au niveau national. Comment imaginer une ARS qui, dans le cadre de sa fonction d’organisation, pourrait autoriser des équipements lourds, l’ouverture d’activités de soins, sans en intégrer les conséquences sur l’activité des établissements et donc sur leur financement par l’assurance maladie ? Comment faire coexister, dans un ORDAM, deux sous-enveloppes, l’une au titre des missions d’intérêt général et des actions de santé publique, et l’autre au titre de la tarification à l’activité et du remboursement des actes qui relèveraient de la direction régionale de l’assurance maladie ?

Les ARS responsables de l’organisation de la filière de soins devront résoudre les problèmes de l’offre de soins de premier recours et de la réorganisation des établissements de santé, pour laquelle la solution contractuelle semblerait la plus efficace.

La réussite de la réforme suppose que se développe dans chaque région une culture commune fondée sur la confiance entre l’assurance maladie, les services de l’État et les différents acteurs du système de santé. Une organisation unifiée y contribuerait davantage.

M. Philippe Boënnec a salué la qualité du travail accompli par la mission.

Parce que les prélèvements sociaux et obligatoires ainsi que les activités de soins ont un impact important sur l’économie générale, l’enjeu de cette réforme, aujourd’hui indispensable, est politique. Comment fixer le niveau de la couverture sanitaire, en tenant compte de la croissance, du PIB, et de la concurrence internationale ?

La réforme doit permettre le meilleur rendement de la contribution publique. Doit-on préserver la dualité entre l’organisation sanitaire et la régulation des dépenses de santé ? Du fait de ses enjeux sur l’économie générale, l’État ne peut rester étranger à la régulation des dépenses de santé.

L’assurance maladie n’a conservé qu’une partie de son caractère mutualiste. Une organisation régionale de la santé regroupant la santé publique, l’hospitalisation privée, les soins ambulatoires, la santé environnementale, la médecine scolaire et la partie sanitaire du médico-social est nécessaire.

La mise en place des ARS nécessite une coordination nationale, sous l’autorité du gouvernement et le contrôle du Parlement. La régulation des dépenses de santé doit-elle être confiée à la seule assurance maladie ? Dans l’affirmative, il faudrait éviter l’écueil d’un système s’organisant en parallèle avec les ARS. Une troisième voie pourrait consister à repositionner le rôle de l’assurance maladie. La dualité entre l’ARS et l’assurance maladie, même au niveau régional, sera forcément source d’illisibilité et de perte d’efficience, en particulier lors des conventionnements avec les professionnels de santé, et surtout de l’évaluation des pratiques professionnelles.

Cela étant, cette réforme ne pourra pas être menée sans dialogue ni concertation. Complexe, elle imposera des changements d’habitudes, et devra accorder une place importante au décloisonnement et à l’évaluation des politiques. Il faudra également poser la question du rôle du Parlement dans ce contrôle. C’est pourquoi, on ne peut que se rallier à la proposition d’une audition collective des responsables.

M. Guy Malherbe a remercié le rapporteur pour la qualité du rapport, avant de s’interroger sur le caractère bicéphale du dispositif qu’il propose. Ne serait-il pas souhaitable de tendre vers une unification ? La question reste difficile à trancher. Par ailleurs, une conférence nationale des ARS pourrait peut-être représenter une solution alternative à l’agence nationale de santé, à laquelle la ministre de la santé n’est pas favorable.

M. Jean-Pierre Door a rappelé que la création d’une autorité sanitaire régionale répondait aux attentes de tous, à condition toutefois d’être pourvue d’une réelle compétence exécutive et de disposer d’une réelle marge de manœuvre. Plusieurs questions se posent. S’agit-il de regrouper les services de gestion du risque et ceux de la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) ? Comment définir clairement les rapports que les nouvelles instances devront entretenir avec les partenaires sociaux, au niveau national et local ? Comment assurer l’efficacité des ARS et quel en serait l’exécutif : un conseil d’orientation ? Un directoire ? Quid de l’URCAM ?

Quant à l’agence nationale de santé (ANS), l’idée est séduisante car un pilote est nécessaire au niveau national pour négocier les conventions avec les professionnels de santé, fixer les tarifs, répartir les enveloppes des crédits hospitaliers ou coordonner les actions des agences régionales.

Mme Catherine Génisson a estimé que, s’agissant de la gouvernance, il ne faut pas dresser de faux procès. La loi de 2004 a très largement rendu l’État responsable de la gestion de l’assurance maladie. Les partenaires sociaux n’avaient d’ailleurs pas formulé beaucoup de propositions sur le paritarisme et le mode de gestion des caisses. Mais il n’est pas possible de séparer l’organisation de l’offre de soins de la régulation des dépenses, ce qui imposera des efforts de simplification et de clarification.

S’agissant de la démocratie sanitaire, si beaucoup critiquent les conférences régionales de santé, celle du Nord Pas-de-Calais, par exemple, fonctionne de façon exemplaire. Il faut saluer, par ailleurs, les propositions du rapporteur sur la reconnaissance du rôle de l’échelon politique régional et départemental dans le système de santé.

S’agissant enfin d’un éventuel ORDAM, il est indispensable de mettre en place un système de régulation nationale, donc de péréquation nationale.

M. Georges Colombier, qui a salué la qualité du travail du rapporteur, a approuvé la proposition de M. Pierre Méhaignerie d'auditionner sur la question des ARS plusieurs responsables du secteur de la santé.

Le président Pierre Méhaignerie a relevé que les constats sont clairement partagés et les enjeux clairement identifiés : il faut rendre notre système de santé plus efficace, plus lisible et plus efficient. Face à la puissance des corporatismes nationaux, il est plus facile de dégager des solutions d’intérêt général au niveau régional. Parce qu’il est essentiel que les décideurs soient responsables et capables de faire des choix sans subir la pression des corporatismes, il serait souhaitable que soient menées des expérimentations d’enveloppe globale de dépenses de santé, laissant une certaine liberté aux autorités régionales. Pour ces raisons, une organisation unitaire serait préférable pour la gouvernance régionale du système de santé. Les partenaires sociaux ont un rôle très important à jouer. Ils craignent que la CNAM ou les URCAM ne perdent leur autorité, mais l’assurance maladie pourrait avoir une place au sein des ARS.

Afin d’avancer sur ces questions, la commission pourrait entendre M. Frédéric Van Roeckeghem, directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), M. Bertrand Fragonard, président du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), Mme Annie Podeur, directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS), M. Dominique Libault, directeur de la sécurité sociale, et M. Philipe Ritter, préfet honoraire chargé de mission sur les ARS au cabinet de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Le rapporteur a approuvé cette proposition. Il ne suffit pas, en effet, de créer une ARS à périmètre large, pour régler l’ensemble des problèmes, même si la création des ARS, quel que soit le schéma retenu, simplifiera le paysage sanitaire.

Le débat se situe aussi à un niveau national. Si le rapport Ritter traite bien des questions d’organisation, il y manque un volet relatif à la révision générale des politiques publiques (RGPP). Il faudra clarifier la question du pilotage national des ARS. Il s’agit là d’une question politique, et le Parlement doit piloter l’organisation et la régulation. Il n’est plus possible de se satisfaire de la situation actuelle. Il faudra, loin des enjeux corporatistes, recentrer le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) sur la fonction financière, éventuellement l’accompagner d’un projet de loi d’organisation de la santé, tout en déléguant au pouvoir réglementaire tout ce qui ne relève pas du domaine législatif. Il faudra améliorer l’organisation de l’offre et limiter les dépenses, pour ne pas creuser davantage les déficits.

Sur le plan régional, il conviendra de réfléchir à la meilleure coordination possible entre la culture administrative et la culture de l’assurance maladie.

En conclusion, on ne peut que se féliciter de ce débat qui met en évidence toute la complexité du problème.

La commission a décidé, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

ANNEXE N° 1

COMPOSITION DE LA MISSION

 

Groupe politique

M. Yves Bur, président-rapporteur

UMP

M. Philippe Boënnec

UMP

Mme Marie-Odile Bouillé

SRC

Mme Valérie Boyer

UMP

M. Hervé Gaymard

UMP

M. Maxime Gremetz

GDR

M. Jean-Luc Préel

NC

M. Guy Malherbe

UMP

M. Marcel Rogemont

SRC

M. Jean-Marie Rolland

UMP

M. Christophe Sirugue

SRC

ANNEXE N° 2

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Cabinet de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports – M. Philippe Ritter, chargé de mission sur les agences régionales de santé (ARS) et M. Mathias Dufour, conseiller technique en charge des ARS

Ø Secrétariat général (ministère de la santé, de la jeunesse et des sports et ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité) – Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, secrétaire générale

Ø Direction de l’administration générale, du personnel et du budget (DAGPB) du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports – M. Etienne Marie, directeur

Ø Ministère du budget – M. François Carayon, sous-directeur à la direction du budget, Mme Mathilde Lignot-Leloup, cabinet de M. Eric Woerth et Mme Marie-Astrid Ravon, conseillère, bureaux comptes sociaux et santé et M. Igor Busshaert, son adjoint

Ø Direction générale de la santé (DGS) du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports – M. Didier Houssin, directeur général

Ø Direction de la sécurité sociale (DSS) du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports – M. Dominique Libault, directeur

Ø Fédération des établissements hospitaliers et d’assistance privés (FEHAP) – M. Emmanuel Duret, président et M. Yves-Jean Dupuis, directeur général

Ø Haute autorité de santé (HAS) – Professeur Laurent Degos, président et M. François Romaneix, directeur général, M. Étienne Caniard, président de la commission qualité et diffusion de l’information médicale

Ø Mutualité sociale agricole (MSA) – M. Yves Humez, directeur général, M. Pierre-Jean Lancry, directeur de la santé et M. Christian Fer, directeur juridique

Ø Direction générale de l’action sociale (DGAS) – M. Jean-Jacques Trégoat, directeur, M. Philippe Didier-Courbon, chef de service adjoint au directeur, Mme Suzanne Lasourd-Thabaud, chef de la mission de la planification, et M. Jean-Pierre Hardy, chef du bureau de la réglementation financière et comptable

Ø Secrétariat général du ministère de l’Intérieur – Mme Bernardette Malgorn, secrétaire générale

Ø Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) – M. Frédéric van Roeckeghem, directeur général, M. Jean-Marc Aubert, directeur délégué de l’organisation et de la gestion des soins, M. Thomas Fatome, directeur de cabinet du directeur général et Mme Sophie Thuot-Tavernier, chargée des relations avec le Parlement

Ø Assemblée des départements de France (ADF) – M. Bernard Cazeau, sénateur de la Dordogne

Ø Régime social des indépendants (RSI) – M. Dominique Liger, directeur général et M. Philippe Ulmann, directeur

Ø Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) – M. Philippe Lamoureux, directeur

Ø Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports (DHOS) – Mme Annie Podeur, directrice et M. Luc Allaire, chef du service, adjoint au directeur, pour le pôle organisation des soins, établissements et financement

Ø Association des régions de France (ARF) – M. Michel Autès, vice-président de la région Nord-Pas-de-Calais et président de la commission des affaires sociales de l’ARF

Ø Fédération hospitalière de France (FHF) – M. Claude Evin, président et M. Gérard Vincent, délégué général

Ø Société Oracle – M. Jean-François Penciolelli, directeur développement du marché santé-social et Mme Isabelle Rich, chargée des relations avec le Parlement

Ø Table ronde « parternaires sociaux » :

– CGT – Mme Nadine Prigent, membre de la mission exécutive et secrétaire générale de la fédération de santé, et Mme Caroline Ferreira, secrétaire fédérale

– CFDT Santé-Sociaux – Mme Yolande Briand, secrétaire générale et M. Michel Rosenblatt, secrétaire général du SYNCASS CFDT

– FO – M. Jean-Marc Bilquez, secrétaire confédéral, secteur protection sociale

– CGPME – M. Jean-Louis Jamet, vice président et trésorier

– UPA – Mme Dany Bourdeaux, présidente de la commission sociale et M. Guillaume Tabourdeau, chargé des relations avec le Parlement

– MEDEF – Mme Muriel Carroll, chef du service assurance maladie

– CFE-CGC – Mme Monique Weber, déléguée nationale pôle protection sociale en charge du dossier santé

– CFTC – M. André Hoguet, conseiller CNAM et UNCAM au titre de la CFTC et M. Benoît Tassart, conseiller technique

Ø Association des directeurs départementaux et régionaux des affaires sanitaires et sociales (ADIRASS) – Mme Martine Riffard-Voilque, présidente et directrice de la DDASS des Bouches du Rhône, Mme Mireille Vedeau-Ulusse, DDASS du Vaucluse, M. Ramiro Pereira, DRASS Midi-Pyrénées et M. Bernard Leremboure, DDASS de l’Essonne

Ø Table ronde « syndicats de médecins » :

– Espace généraliste – Dr Jacques Marlein, secrétaire adjoint et Dr Christiane Giraud, présidente Espace généraliste PACA

– Fédération des médecins de France (FMF) – M. Jean-Claude Regi, président

– MG France – Dr Martial Olivier-Koehret, président

– Syndicat des médecins libéraux (SML) – Dr Dinorino Cabrera, président et Dr Roger Rua, secrétaire général

– Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) – Dr Jean-François Rey, membre du bureau et président de l’Union nationale des médecins spécialistes confédérés (UMESPE)

Ø Institut national du cancer –Mme Pascale Flamant, directrice générale

Ø Union interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS) – M. Arnaud Vinsonneau, adjoint au directeur général, et Mme Cécile Chartreau, chargée de mission

Ø Déplacement en Bourgogne (Dijon les 4 et 5 décembre 2007) :

• Table ronde avec les représentants régionaux des médecins libéraux et les présidents du Conseil régional de l'Ordre national des pharmaciens et des chirurgiens dentistes :

– Dr Pascal Fontaine, représentant les médecins spécialistes

– Dr Emmanuel Debost, représentant les médecins généralistes

– M. Alain Delgutte, président du Conseil régional de l'Ordre national des pharmaciens

– M. Michel Vuillaume, président du Conseil régional de l'Ordre des chirurgiens dentistes

• Table ronde avec le Directeur de l’URCAM et les directeurs régionaux des principaux régimes :

– M. Pierre Routhier, directeur de l’URCAM Bourgogne

– M. Christophe Madika, directeurs de la CRAM

– M. Alain Lagneau, directeur de la MSA de Bourgogne (21-58-89) et représentant également Mme Françoise Burlaut, directrice de la MSA de Saône-et-Loire

– Mme Françoise Picaud, directrice du Régime social des indépendants

– Dr Marc Tardieu, directeur régional du service médical

• Table ronde avec les partenaires sociaux locaux : représentants régionaux santé :

– M. Michel Moraux, CFDT

– M. Gilles Lassus, UNSA

– Mme Annie Boillaud, FO (représentante départementale)

– M. Guy Andriot, CGT

– Mme Danielle Bezard, CFE-CGC

• Réunion avec M. Olivier Boyer, directeur de l'ARH

• Déjeuner à l’Hôtel de la Préfecture

– M. le Préfet de Région

– Mme Martine Juston, secrétaire générale

– M. Philippe Castanet, secrétaire général pour les affaires régionales

– M. Patrice Richard, directeur régional des affaires sanitaires et sociales

• Table ronde avec les directeurs d'hôpitaux et leurs présidents de CME 

– M. Pierre Charles Pons, directeur général du CHU

– Professeur Claude Girard, président de CME du CHU

– M. Bernard Rouault, directeur de l’hôpital local de Vitteaux (21)

– M. Paul Christofini, directeur de l’hôpital de Lormes (58)

– Dr Lionel Thenault, président de CME de l’hôpital de Lormes

• Table ronde avec les représentants du secteur médico-social

– M. Pierre Muller, délégué régional de la FEHAP Bourgogne

– Mme Jacqueline Perwez, administratrice et vice présidente de l’URIOPSS Bourgogne

– M. Bernard Rouault, délégué régional de l’ANHL Bourgogne

– M. Gille Pierre, président de la FNARS Bourgogne

– M. Maurice Bollard, président du CREAI Bourgogne

– M. Jacques Pillien, administrateur de l'URAPEI

• Table ronde avec les services sanitaires et sociaux de l’État

– M. Patrice Richard, directeur de la DRASS Bourgogne

– Mme Francette Meynard, directrice de la DDASS de la Côte d’Or

– M. André Lorraine, directeur de la DDASS de la Nièvre

– Mme Paule Lagrasta, directrice de la DDASS de la Saône-et-Loire

– M. Yves Rullaud, directeur de la DDASS de l’Yonne

Ø Conférence des directeurs d’ARH – M. Jacques Métais, président et M. Jean-Louis Bonnet, DARS Rhône

Ø Centre hospitalier universitaire de Nancy – M. Benoît Péricard, directeur général

Ø Table ronde avec les responsables publics des systèmes d’information en santé :

– M. Pascal Forcioli, directeur de l’ARH de Picardie

– M. Marcel Saliot, secrétaire général du syndicat interhospitalier de Bretagne (SIB)

– M. Alain Folliet, responsable de la direction des systèmes d’information de la CNAMTS

– M. André Loth, chef de la mission pour l’informatisation du système de santé, accompagné de M. Philippe Cirre (MISS)

– M. Denis Ducasse, chef du bureau des systèmes d’information hospitaliers et du Programme médicalisation des systèmes d’information (PMSI), ministère de la santé

Ø Déplacement de la mission à Marseille (les 12 et 13 décembre 2007) :

• Table ronde avec des directeurs d’hôpitaux et présidents de commission médicale d’établissement :

– AP-HM : M. Guy Vallet, directeur général et le Pr Guy Moulin, président de la CME

– CHU de Nice : M. Emmanuel Bouvier-Muller, directeur général et le Pr Philippe Paquis, président de la CME

– CH Toulon la Seyne : M. Michel Perrot, directeur et Dr Andreotti, président de la CME

– Hôpital local d’Aiguilles : M. Joël Gauche, directeur, Dr Pierre Lutlzer, président de la CME

– Dr Gabriel Bossy, directeur d’établissement

– Dr Escojido, président de la Conférence Régionale des Présidents de CME

– Mme R. Girard, déléguée régionale FHP Sud Est

• Entretien avec le Président de l’Union régionale de la mutualité française : M. Thierry Pattou

• Table ronde avec les partenaires sociaux présents dans les conseils des organismes d’assurance maladie :

– M. Jean-Claude Babize, président RSI Côte d’Azur

– M. François Fantauzzo, vice-président RSI Provence Alpes

– M. Louis Navallon, président RSI Provence Alpes

Régime général :

– M. André Chopard, délégué CFE – CGC

– M. Gérard Benchenafi délégué CFE – CGC

– M. Bernard Largillier, UPR Provence Alpes Côte d'Azur

– M. Charles Pellotieri, secrétaire général de l’union régionale interprofessionnelle (URI) CFDT

– M. Dominique Plumion, délégué CFDT

– Mme Françoise Couranjou, déléguée CFDT

– M. Christian Curet, CGT, conseiller de l’URCAM

• Table ronde avec les représentants du secteur médicosocial :

– M. Bernard Delanglade, directeur de l’URIOPSS

– M. Charles Baratier, président de l’URIOPSS

– Dr Jérôme Colonna, président de l’URAPEI

– Dr Michel Jausseran, administrateur de la Chrysalide, membre de l’URAPEI

– M. Jean-Alain Margarit, délégué général de syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées PACA (SYNERPA) et M. David Grivel, conseiller technique

– Dr Piteau-Delors, directeur du CREAI

– M. Patrick Verdeau, délégué régional FEHAP

• Table ronde avec les représentants du secteur de la prévention :

– Mme Zeina Mansour, directrice du comité régional d’éducation pour la santé

– M. Stéphane Simonpietri, directeur AIDES

– M. Jean-Louis San Marco, président de la CRS

– Mme Virginie Pouget, coordinatrice PLSP, chargée de mission santé solidarité à la ville de Vitrolles

– M. Jean Chappellet, directeur régional des affaires sanitaires et sociales

• Table ronde avec les directeurs des organismes d’assurance maladie :

– M. Daniel Marchand, directeur de l’URCAM

– M. François-Emmanuel Blanc, directeur de la CPAM 13

– M. Emmanuel Godard, directeur de l’association régionale des organismes de mutualité sociale agricole

– Dr Laurent Sauze, médecin-conseil régional, RSI Provence

– M. Hugues Wauquier, agent de direction, RSI Côte d’Azur

– M. Max Solari directeur adjoint du CRAM-SE

– Dr Jean-Paul Dat, adjoint du médecin conseil régional, direction régionale du service médical

• Entretien avec le Directeur de l’Agence régionale de l’hospitalisation : M. Christian Dutreil

• Entretien avec le Président de l’Union régionale des médecins exerçant à titre libéral : Dr Jean-Claude Regi

• Table ronde avec les services de l’État :

– M. Jean-Paul Bonnetain, secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR)

– M. Didier Martin, secrétaire général de la préfecture des Bouches-du-Rhône

– Mme Marie-Thérèse Dieppedalle, chargée de mission au SGAR

– M. Romain Vernier, chef de la division environnement industriel, risques, sous-sol à la direction régionale de l’industrie et de la recherche

– M. Jean Chappellet, directeur de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales

– Mme Muriel Gautier, directrice chargée du Pôle Travail emploi et formation professionnelle à la direction régionale du travail accompagnée du Dr Jean-Louis Fumery, médecin inspecteur régional du travail

– Dr Elisabeth Arnal médecin auprès du recteur de l’académie d’Aix-Marseille et Mme Joëlle Durand, infirmière conseiller technique auprès du recteur de l’Académie d’Aix-Marseille

– M. Gérard Delga, directeur de la DDASS du Var

– M. Philippe Ferrari, directeur de la DDASS des Hautes Alpes

– Mlle Alexandra Laffitte, stagiaire de l’ENA

– Mme Mireille Verdeau-Ulysse, directrice de la DDASS du Vaucluse

– Mme Annick Piquet, directrice de la DDASS des Alpes Maritimes

Ø Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) – M. Jean-Loup Durousset, président, accompagné de Dominique Dorel, Déléguée Générale Adjointe

Ø Audition commune des régimes d’assurance maladie :

– M. Frédéric van Roeckeghem, directeur général et Mme Sophie Thot-Tavernier, chargée des relations avec le Parlement de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

– M. Dominique Liger, directeur général du Régime social des indépendants (RSI) Mme Claudine Blum-Boisgard, directrice du service médical national et Mme Stéphanie Deschaume, adjointe du directeur de la politique de santé et gestion du risque

– M. Yves Humez, directeur général et M. Pierre-Jean Lancry, directeur de la santé de la Mutualité sociale agricole (MSA)

Ø Cabinet de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports – M. Philippe Ritter, chargé de mission sur les agences régionales de santé

Ø Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

ANNEXE N° 3

Nature, nombre, capacités, financement et tutelle des établissements
et services sociaux et médico-sociaux

Nomenclature de l’article L. 312-1

INTITULÉS DES ÉTABLISSEMENTS
ET DES SERVICES

NOMBRE

PLACES

FINANCEMENT

CHAMP DE COMPÉTENCE

I - 1

ÉTABLISSEMENTS ASE

2 345

73 874

AS

D

I - 2

Établissements de l’enfance handicapée et inadaptée :

CMPP - IME - IMP - IMPRO - IR - SESSAD

3 782

157 020

AM

E

I - 3

CAMSP

220

11 909

80 % AM - 20 % AS

E + D

I - 4

Établissements PJJ

354

12 116

E

E ou E + D

I - 5

a) CAT

b) CRP - CPO

1 378

113

97 219

10 237

E

AM - E

E

I - 6

Établissements et services pour personnes âgées :

EHPAD - EHPA - Foyers logements - SSIAD – SAAD

16 869

671 510

AM et/ou AS

et/ou APA

et/ ou ASS caisses

E ou D

ou E + D

I - 7

Établissements et services pour personnes handicapées : Foyers - FAM - MAS - SSIAD - SSAAD - SAVS - SAMSAH

4 119

120 012

AM ou AS

ou AM + AS

E ou D

ou E + D

I - 8

CHRS, incluant notamment les CAVA

996

36 355

E

E

I - 9

Centres spécialisés de soins aux toxicomanes, centres d’accueil pour alcooliques, appartements de coordination thérapeutique, autres structures

202

541

AM

E

I - 10

Foyers de jeunes travailleurs

499

47 782

E - AS - CAF

E

I - 11

Centres de ressources et assimilés

/

/

E ou AM ou AS

E ou D

I - 12

Structures expérimentales

/

/

E ou AM ou AS

E ou D

ou E + D

I - 13

Centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA)

/

/

E

E

I – 14

Services chargés des mesures de protection judiciaire des majeurs

/

/

E D ou OSS selon prestations et type de mesures

E

I – 15

Services chargés des mesures judiciaires d’aide à la gestion du budget familial

/

/

OSS

E

TOTAL

30 877 (1)

1 238 575 (1)

   

III

Lieux de vie non traditionnels

352

1 848

E ou AM ou AS

E ou D

ou E + D

Source : ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, direction générale de l’action sociale, octobre 2007

ANNEXE N° 4

ACTIVITÉS DE VEILLE ET DE SÉCURITÉ SANITAIRES DES DDASS ET DRASS
ET EFFECTIFS QUI Y SONT CONSACRÉS


Source : Inspection générale des finances (IGF) et IGAS, respectivement rapport n° 2006-M-065-01 et n° RM 2007-037P, mission d’audit et de modernisation conjointe, rapport sur l’adéquation missions – moyens de l’administration sanitaire et sociale.

ANNEXE N° 5

PILOTAGE DES ÉTABLISSEMENTS HÉBERGEANT DES PERSONNES ÂGÉES

Type d’établissement

Autorisation

Habilitation au titre de sociale

Source de financement

EHPAD

(hors logements-foyers et établissements commerciaux)

PCG* (que l’établissement soit public ou privé) + ÉTAT (arrêté conjoint)

PCG

Usagers (hébergement),

Aide sociale départementale (hébergement)

Assurance Maladie (soins),

APA** en établissement et aide sociale (dépendance).

EHPA

(hors logements-foyers et établissements commerciaux)

PCG

PCG

Usagers (hébergement),

Aide sociale départementale (hébergement),

APA à domicile (dépendance)

Logements-Foyers

(habilités au titre de l'aide sociale et ayant signé une convention tripartite)

PCG (que l’établissement soit public ou privé) + ÉTAT (arrêté conjoint)

PCG

Usagers (redevance),

APL (hébergement),

Aide sociale départementale (hébergement),

APA en établissement (dépendance),

Assurance Maladie (soins).

Logements-Foyers

(non habilités au titre de l'aide sociale et pas de convention tripartite)

PCG

 

Usagers (redevance),

APL (hébergement),

APA à domicile (dépendance)

Logements-Foyers

PCG

PCG

Usagers (redevance),

APL (hébergement),

Aide sociale départementale (hébergement),

APA à domicile (dépendance)

Logements-Foyers

(non habilités au titre de l'aide sociale et ayant signé une convention tripartite)

PCG (que l'établissement soit public ou privé) + ÉTAT (arrêté conjoint)

 

Usagers (redevance),

APL (hébergement),

APA en établissement (dépendance),

Assurance Maladie si plus de 25 lits (soins).

EHPAD

(établissements commerciaux)

PCG (que l’établissement soit public ou privé) + ÉTAT (arrêté conjoint)

 

Usagers (hébergement),

Assurance Maladie (soins),

APA** en établissement (dépendance).

EHPA

(établissements commerciaux)

PCG

 

Usagers (hébergement),

APA** à domicile (dépendance).

* Président du conseil général, ** Allocation personnalisée d’autonomie

Source : DGAS

ANNEXE N° 6

GLOSSAIRE

ADF Assemblée des départements de France

ADIRASS Association des directeurs départementaux et régionaux des affaires sanitaires et sociales

AFSSAPS Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé

AMF Association des maires de France

ANHL : Association nationale des hôpitaux locaux

ANS Agence nationale de santé

ARF Association des régions de France

ARH Agence régionale de l’hospitalisation

ARS Agence régionale de santé

ATIH Agence technique d’information sur l’hospitalisation

CCAM Classification commune des actes médicaux

CEPS Comité économique des produits de santé

CFDT Confédération française démocratique du travail

CFE-CGC Confédération française de l'encadrement – Confédération générale des cadres

CFTC Confédération française des travailleurs chrétiens

CGPME Confédération générale des petites et moyennes entreprises

CGT Confédération générale du travail

CHU Centre hospitalier universitaire

CLIC Centres locaux d’information et de coordination

CIRE Cellule interrégionale d’épidémiologie

CME Commission médicale d'établissement

CNAMTS Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés

CNS Conférence nationale de santé

CNSA Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie

CODAMUPS Comité départemental de l’aide médicale d’urgence et des transports sanitaires

CODERST Conseil départemental de l’environnement et des risques technologiques

CPAM Caisse primaire d’assurance maladie

CPOM Contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens

CRAM Caisse régionale d’assurance maladie

CREAI Centre régional pour l'enfance et l'adolescence inadaptées

CROS Comité régional d’organisation sanitaire

CRS Conférence régionale de santé

CSMF Confédération des syndicats médicaux français

DAGPB Direction de l’administration générale, du personnel et du budget

DAM Délégué de l’assurance maladie

DDASS Direction départementale de l’action sanitaire et sociale

DGAS Direction générale de l’action sociale

DGS Direction générale de la santé

DHOS Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins

DNDR Dotation nationale des réseaux

DRASS Direction régionale des affaires sanitaires et sociales

DSS Direction de la sécurité sociale

ELSM Échelons locaux du service médical

EHPAD Établissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes

EHESP École des Hautes Études en santé publique

EPAD Établissement public administratif

EPP Évaluation des pratiques professionnelles

EPRD État des prévisions de recettes et de dépenses

EPRUS Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires

ETP Équivalent temps plein

FAQSV Fonds d’aide à la qualité des soins de ville

FAM Foyer d’accueil médicalisé

FEHAP Fédération des établissements hospitaliers et d’assistance privé

FHF Fédération hospitalière de France

FHP Fédération de l’hospitalisation privée

FO Force ouvrière

FNARS Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale

GIP Groupement d’intérêt public

GRSP Groupement régional de santé publique

HAS Haute autorité de santé

HCAAM Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie

HCSP Haut conseil de santé publique

IGAS Inspection générale des affaires sociales

IGF Inspection générale des finances

INCa Institut national du cancer

INPES Institut national de prévention et d’éducation pour la santé

InVS Institut national de veille sanitaire

LOLF Loi organique relative aux lois de finances

MAS Maison d’accueil spécialisée

MDPH Maison départementale des personnes handicapées

MEAH Mission d’expertise et d’appui aux hôpitaux

MEDEF Mouvement des entreprises de France

MILDT Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie

MISP Médecin inspecteur de santé publique

MRS Mission régionale de santé

MSA Mutualité sociale agricole

OCDE Organisation de coopération et de développement économique

OMS Organisation mondiale de la santé

ONDAM Objectif national des dépenses d'assurance maladie

OQOS Objectif qualifié de l’offre de soins

ORS Observatoire régional de la santé

PLFSS Projet de loi de financement de la sécurité sociale

PLSP Projet de loi relatif à la politique de santé publique

PQE Programme de qualité et d’efficience

PRAM Programme régional commun à l’ensemble des organismes d’assurance maladie

PRIAC Programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie

PRSP Plan régional de santé publique

RGPP Révision générale des politiques publiques

RSI Régime social des indépendants

SIOS Schéma interrégional d’organisation sanitaire

SROS Schéma régional d’organisation des soins

UNCAM Union nationale des caisses d’assurance maladie

UNIOPSS Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux

UNSA Union nationale des syndicats autonomes

UPA Union professionnelle artisane

URAPEI Union régionale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales

URCAM Union régionale des caisses d’assurance maladie

URIOPSS Union régionale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux

URML Union régionale des médecins libéraux

SGAR Secrétaire général pour les affaires régionales

SYNCASS Syndicats des cadres sanitaires et sociaux

SNIIRAM Système national d’information inter régimes de l’assurance maladie

SYNERPA Syndicat National des Établissements et Résidences Privés pour Personnes Agées

1 () Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), rapport de la commission « démographie médicale » présenté par M. Yvon Berland, avril 2005.

2 () Rapport d’information de M. Jean-Marc Juilhard au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur la démographie médicale, octobre 2007.

3 () Rapport d’information n° 3672, présenté par M. Georges Colombier au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale, sur la prise en charge des urgences médicales, février 2007.

4 () Cour des Comptes, Les personnels des établissements publics de santé, rapport public thématique, mai 2006.

5 () Cour des comptes, rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2007.

6 () Rapport de M. Yves Bur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, tome I « Recettes et équilibre général », par M. Yves Bur, Compte rendu de l’audition de M. Philippe Séguin du 12 septembre 2007.

7 () Audition du 9 octobre 2007.

8 () Rapport de M. Jean-Pierre Door au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, tome  II « Assurance maladie et accidents du travail ».

9 () Audition du 15 novembre 2007.

10 () ONDPS, rapport de la mission « démographie médicale hospitalière » présenté par M. Yvon Berland, septembre 2006.

11 () Estimation issue de l’Atlas hospitalier et médico-social 2007 de la FHF, décembre 2007.

12 () Voir sur ce point les développements consacrés par M. Georges Colombier dans son rapport précité au manque de main-d’oeuvre et aux pratiques irrégulières constatées dans certaines structures des urgences.

13 () Informations fournies à la mission par le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH).

14 () Décrets n° 2003-880 du 15 septembre 2003 et n° 2005-328 du 7 avril 2005 relatifs aux modalités d’organisation de la permanence des soins et aux conditions de participation des médecins à cette permanence, et avenant n° 4 du 11 mars 2005 à la convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes du 12 janvier 2005.

15 () Cette rémunération s’élève à 63 euros par heure de régulation téléphonique, 150 euros par nuit, dimanche, jour férié et jour « de pont » d’astreinte.

16 () Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et inspection générale de l’administration (IGA), respectivement rapport n° 2006 029 et n° 06-007-02, « Évaluation du nouveau dispositif de permanence des soins en médecine ambulatoire », mars 2006.

17 () Audition du 3 octobre 2007.

18 () Audition du 9 octobre 2007.

19 () Table ronde du 28 novembre 2007.

20 () IGAS, rapport n° 2006 022, « Contrôle et évaluation du fonds d’aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) et de la dotation nationale des réseaux (DNDR), mai 2006.

21 () Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Panorama de la santé, 2007.

22 () Audition du 8 novembre 2007.

23 () Audition du 28 novembre 2007.

24 () Avis présenté par M. Jean-Marie Rolland au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de finances pour 2008 – avis Santé Tome VIII.

25 () Audition du 14 novembre 2007.

26 () Audition du 14 novembre 2007.

27 () Table ronde du 19 décembre 2007.

28 () OCDE, Panorama de la santé, 2007.

29 () Rapport de M. Yves Bur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, tome  I « Recettes et équilibre général ».

30 () Inspection générale des finances (IGF) et IGAS, respectivement rapport n° 2006-M-065-01 et n° RM 2007-037P, mission d’audit et de modernisation conjointe, rapport sur l’adéquation missions – moyens de l’administration sanitaire et sociale.

31 () Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) pour le régime général, caisse centrale de la mutualité sociale agricole (MSA), caisse nationale du régime social des indépendants (RSI).

32 () Avis du 27 novembre 2007 relatif à l’introduction d’agences régionales de santé dans la gouvernance régionale et territoriale des politiques de soins et de prévention.

33 () Audition du 30 octobre 2007.

34 () Article L. 3135-1 du code de la santé publique, inséré par la loi n° 2007-294 du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur.

35 () Audition du 14 novembre 2007.

36 () Audition du 3 octobre 2007.

37 () Audition du 3 octobre 2007.

38 () Audition du 10 octobre 2007.

39 () Audition du 29 novembre 2007.

40 () IGAS, Santé, pour une politique de prévention durable, 2003.

41 () Audition du 29 novembre 2007.

42 () Audition du 9 octobre 2007.

43 () Audition du 30 octobre 2007.

44 () Médicaments destinés à réduire le taux de cholestérol dans le sang.

45 () Dispositif permettant de distinguer, pour les patients bénéficiant de la prise en charge à 100 % des frais de traitement d’une affection de longue durée, ce qui relève de cette affection et ce qui n’en relève pas et ne justifie donc pas de prise en charge à 100 %.

46 () Table ronde du 19 décembre 2007.

47 () Annexés à la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

48 () Institués par l’article 1er de la Loi organique nº 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LO 111-3 du code de la sécurité sociale).

49 () Institué par l’article 40 de la loi n° 2004810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (articles L. 114-1 et L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale).

50 () Instituée par l’article 35 de la loi n° 2004810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (articles L. 161-37 à L. 161-46 du code de la sécurité sociale).

51 () Voir sur ce point les commentaires de M. Jean-Michel Dubernard sur l’article 30 du projet de loi relatif à l’assurance maladie (article 55 de la loi n° 2004810 du 13 août 2004, articles L. 221-2 à L. 221-4 du code de la sécurité sociale).

52 () Article 43 de la loi n° 2004810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale).

53 () Institué par l’article 45 de la loi n° 2004810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale).

54 () Table ronde du 28 novembre 2007.

55 () Audition du 15 novembre 2007.

56 () Fédération hospitalière de France, « L’heure H – 65 propositions pour l’avenir du service public hospitalier – un projet pour améliorer la santé et garantir l’accès aux soins pour tous », 5 décembre 2006.

57 () Table ronde du 28 novembre 2007.

58 () Audition du 14 novembre 2007.

59 () Audition du 8 novembre 2007.

60 () Audition du 7 novembre 2007.

61 () Audition du 9 octobre 2007.

62 () Audition du 7 novembre 2007.

63 () Audition du 14 novembre 2007.

64 () La circulaire précise que ce statut place sous un régime spécifique de responsabilité les particuliers qui, sans être agents publics, ont participé au service public à la demande de l’administration. La responsabilité de l’administration est engagée sans faute à l’égard de ce collaborateur occasionnel pour les dommages qu’il aurait pu subir, ainsi qu’à l’égard des victimes pour les agissements dudit collaborateur dans le cadre du service public : le cas échéant, ce dernier est couvert des condamnations prononcées contre lui pour les dommages qu’il aurait pu causer (arrêt du Conseil d’État du 21 octobre 1949, « Mutuelle du Mans
c/ ministre de l’agriculture).

65 () Audition du 9 octobre 2007.

66 () Cf. circulaire DHOS/O n° 2004-101 du 5 mars 2004 relative à l'élaboration des SROS de troisième génération et son annexe I relative à la graduation des soins.

67 () Audition du 30 octobre 2007.

68 () Le préambule de la Constitution prévoit que la Nation « garantit à tous… la protection de la santé » et que « chacun a droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Par ailleurs, l’article premier de la loi du 13 août 2004 sur la santé publique précise que « l’État, qui définit les objectifs de la politique de santé publique, garantit l’accès effectifs aux soins sur l’ensemble du territoire ».

69 () Article L. 1411-15 du code de la santé publique.

70 () Il s’agit de la direction régionale de l’emploi, du travail et de la formation professionnelle (DRETFP), de la direction régionale de l'industrie de la recherche et de l'environnement (DRIRE), de la DRASS et des DDASS.

71 () Révision générale des politiques publiques.

72 () Audition du 14 novembre 2007.

73 () Table ronde du 21 novembre 2007.

74 () Article L. 312-7 du code de l’action sociale et des familles.

75 () Audition du 28 novembre 2007.

76 () Services de soins infirmiers à domicile.

77 () Audition du 6 décembre 2007.

78 () Instituts médico éducatifs (IME) et instituts éducatifs, thérapeutiques et pédagogiques (ITEP).

79 () Notamment les foyers d’hébergement, les foyers occupationnels et les centres d'aide par le travail (CAT).

80 () Audition du 8 novembre 2007.

81 () Structures d’accueil de jour pour adultes handicapés disposant généralement d’une relative autonomie dans les actes de la vie quotidienne mais incapables, durablement ou momentanément, d’exercer une activité professionnelle dans un cadre protégé.

82 () Audition du 30 octobre 2007.

83 () Cf. circulaire DHOS/HFD n°2002/284 du 3 mai 2002 relative à l’organisation du système hospitalier en cas d'afflux de victimes.

84 () Cf. circulaire no 89-21 du 19 décembre 1989 relative au contenu et aux modalités d’élaboration des plans destinés à de nombreuses victimes dénommés « plans rouges ».

85 () Article 1er de l’ordonnance nº 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

86 () Rapport RM 2006 141 A de l’IGAS, présenté par MM. J-F Benevise et A. Lopez, membres de l’IGAS, « L’utilisation des compétences médicales permettant à l’État d’assurer ses responsabilités dans le domaine de la santé au niveau local », septembre 2006.

87 () Circulaire SGMCAS/DGS/SD.4B n° 2007-169 du 20 avril 2007 relative à l’expérimentation d’une démarche de mutualisation régionale des compétences médicales des services déconcentrés.

88 () Audition du 14 novembre 2007.

89 () Table ronde du 19 décembre 2007.

90 () On citera par exemple un programme d’accompagnement de 100 000 diabétiques lancé le 22 janvier 2008 dans dix départements.

91 () On citera à ce titre les actions menées ces dernières années en matière de contrôle des indemnités journalières, de promotion des médicaments génériques et de rejet des factures présentant des anomalies.

92 () Audition du 16 janvier 2007.

93 () Audition du 15 janvier 2008.

94 () Audition du 19 décembre 2007.

95 () Voir notamment la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie.

96 () Audition du 7 novembre 2007.

97 () Audition du 15 janvier 2008.

98 () Les professions concernées sont celles de sage-femme, d’infirmier, de masseur-kinésithérapeute, de pédicure-podologue, d’ergothérapeute, de psychomotricien, d’orthophoniste, d’orthoptiste, d’audioprothésiste, d’opticien-lunetier, de diététicien, de préparateur en pharmacie hospitalière, d'aide soignant, d'auxiliaire de puéricultrice, d'ambulancier, de technicien de laboratoire d’analyses de biologie médicale. ONDPS « La démographie médicale hospitalière », rapport présenté par M. Yvon Berland, 2006.

99 () Conférence nationale de santé, avis du 22 mars 2007.

100 () « Comment corriger l’inégalité de l’offre de soins en médecine générale sur le territoire national ? », rapport du groupe de travail dirigé par le professeur Pierre Ambroise-Thomas, Académie nationale de médecine, avril 2007.

101 () Discours prononcé à l’occasion du 40è anniversaire de l’association des journalistes de l’information sociale.

102 () Audition du 14 novembre 2007.

103 () Audition du 6 décembre 2007.

104 () Audition du 19 décembre 2007.

105 () Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales, rapport de mission d’audit de modernisation respectivement n° 2006-M-081-02 et n° RM2007-018P, sur les agences régionales d’hospitalisation et le pilotage des dépenses hospitalières, avril 2007.

106 () Table ronde du 6 décembre 2007.

107 () Audition du 15 novembre 2007.

108 () Audition du 14 novembre 2007.

109 () Programme de médicalisation des systèmes d'information.

110 () Système national d’information inter régions d’assurance maladie.

111 () Rapport d’information n° 35 sur le suivi du référé de la Cour des comptes concernant l'interopérabilité des systèmes d'information de santé, établi par M. Jean-Jacques Jégou, sénateur, au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

112 () Audition du 15 novembre 2007.

113 () Table ronde du 6 décembre 2007.

114 () Table ronde du 29 novembre 2007.

115 () Table ronde du 6 décembre 2007.

116 () Rapport d’information n° 659 de M. Jean-Pierre Door sur le dossier médical personnel (DMP), janvier 2008.

117 () Audition du 14 novembre 2007.

118 () Audition du 15 novembre 2007.

119 () Audition du 14 novembre 2007.

120 () Table ronde du 21 novembre 2007.

121 () Audition du 19 décembre 2007.

122 () Table ronde du 28 novembre 2007.

123 () Table ronde du 28 novembre 2007.

124 () Table ronde du 28 novembre 2007.

125 () Audition du 14 novembre 2007.

126 () Audition du 14 novembre 2007.

127 () Audition du 3 octobre 2007.

128 () Audition du 28 novembre 2007.

129 () Audition du 6 décembre 2007.

130 () Audition du 29novembre 2007.

131 () Audition du 7 novembre 2007.

132 () Indicateur d’activité retenu par la branche maladie qui combine un nombre d’assurés sociaux, d’opérations de liquidation et de professionnels de santé gérés, avec une pondération respective de 50 %, 40 % et 10 %.

133 () Audition du 3 octobre 2007.

134 () Audition du 14 novembre 2007.

135 () Audition du 6 décembre 2007.

136 () IGF et IGAS, respectivement rapport n° 2006-M-081-02 et n° RM2007-018P, Les agences régionales d’hospitalisation et le pilotage des dépenses hospitalières, Mission d’audit de modernisation, avril 2007.

137 () Audition du 19 décembre 2007.

138 () Audition du 8 novembre 2007.

139 () Audition du 7 novembre 2007.

140 () Audition du 19 décembre 2007.

141 () Audition du 15 janvier 2008.

142 () Audition du 8 novembre 2007.

143 () Contribution écrite de l’ADIRASS adressée aux membres de la mission.

144 () Audition du 15 janvier 2008.

145 () Audition du 8 novembre 2007.

146 () Audition du 15 novembre 2007.

147 () Cf. arrêté du 7 mai 2007 pris en application de l'article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale et fixant la composition et les modalités de fonctionnement du conseil de l’hospitalisation.

148 () Commission spécialisée de la HAS qui évalue le SMR du médicament et le classe sur une échelle de 1 à 5 en fonction de critères uniquement médicaux. Le directeur de l’UNCAM fixe le taux de remboursement du produit en fonction de l’avis de la HAS : 65 % pour un SMR majeur, 35 % pour un SMR modéré ou faible en fonction de l’avis rendu par la commission de la transparence. Toutefois l’État et l’assurance maladie ont dans les domaines de compétence qui leur sont propres la possibilité juridique de ne pas suivre ces avis.

149 () Amélioration du service médical rendu ou ASMR.

150 () Article R. 322-2 du code de la sécurité sociale.


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