N° 910
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 mai 2008.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 145 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES
En conclusion des travaux de la mission
sur la pénibilité au travail
ET PRÉSENTÉ
par M. Jean-Frédéric Poisson,
Député.
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TOME II
ANNEXES
ANNEXE N° 1 : COMPOSITION DE LA MISSION D’INFORMATION 5
ANNEXE N° 2 : 7
– LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 7
– LISTE DES ENTRETIENS DE LA MISSION À HELSINKI 13
– LISTE DES ENTRETIENS DE LA MISSION À MADRID 15
ANNEXE N° 3 : SYNTHÈSES DES AUDITIONS RÉALISÉES À L’ASSEMBLÉE NATIONALE 17
ANNEXE N° 4 : DÉPLACEMENT À HELSINKI DU 19 AU 21 FÉVRIER 2008 195
ANNEXE N° 5 : DÉPLACEMENT À MADRID DU 26 AU 28 FÉVRIER 2008 207
ANNEXE N° 6 : PRINCIPAUX RAPPORTS, ÉTUDES ET SYNTHÈSES PUBLIÉS EN FRANCE EN LANGUE FRANÇAISE DEPUIS 2003 SUR LA PÉNIBILITÉ AU TRAVAIL 217
ANNEXE 7 : PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT (JUIN 2005) 221
ANNEXE 8 : PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT (SEPTEMBRE 2007) 225
ANNEXE 9 : PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT (MARS 2008) 227
ANNEXE 10 PROPOSITION D'ACCORD PRÉSENTÉE PAR LA CGT 231
ANNEXE 11 : AGENCE NATIONALE POUR L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL (ANACT) – PRÉVENTION DE LA PÉNIBILITÉ AU TRAVAIL 237
ANNEXE 12 : ACCORD-CADRE EUROPÉEN SUR LE STRESS AU TRAVAIL DU 8 OCTOBRE 2004 249
ANNEXE 13 : LA SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE DES TROUBLES MUSCULO-SQUELETTIQUES 253
ANNEXE 14 : ÉVALUATION DES RISQUES DANS LES ENTREPRISES (DARES) 265
ANNEXE 15 : « LA DOUBLE PEINE DES OUVRIERS » (INED, 2008) 269
ANNEXE 16 : ANALYSER ET PRÉVENIR LES RISQUES (ERGODISTRIB) 273
ANNEXE N° 1
COMPOSITION DE LA MISSION D’INFORMATION
Groupe politique | |
M. Jean-Frédéric Poisson, président, rapporteur, député des Yvelines |
UMP |
Mme Martine Billard, députée de Paris |
GDR |
M. Xavier Breton, député de l’Ain |
UMP |
M. Georges Colombier, député de l’Isère |
UMP |
M. Bernard Depierre, député de la Côte-d’Or |
UMP |
M. Denis Jacquat, député de la Moselle |
UMP |
M. Régis Juanico, député de la Loire |
SRC |
M. Claude Leteurtre, député du Calvados |
NC |
M. Jean Mallot, député de l’Allier |
SRC |
M. Alain Néri, député du Puy-de-Dôme |
SRC |
Mme Isabelle Vasseur, députée de l’Aisne |
UMP |
La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné les membres de la mission d’information sur la pénibilité au travail lors de sa réunion du 27 novembre 2007 :
– six membres du groupe de l’union pour un mouvement populaire (UMP) ;
– trois membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC) ;
– un membre du groupe de la gauche démocrate et républicaine (GDR) ;
– un membre du groupe du nouveau centre (NC).
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
(par ordre chronologique)
Ø Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) – M. William Dab, chef du département hygiène et sécurité (ancien directeur général de la santé du ministère de la santé) (13 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø M. Régis Mollard, professeur des universités, directeur de l’Unité Ergonomie, comportements et interactions de l’Université Paris V René Descartes (13 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø M. Philippe Askenazy, économiste, directeur de recherche au CNRS (13 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Entreprise et progrès – M. Michel Durier, directeur des études, Mme Béatrice Bourges, secrétaire générale,et M. Antonin Pujos, membre (19 décembre 2007)
Ø École des hautes études en sciences sociales – M. Michel Gollac, administrateur de l’INSEE, chercheur au Centre de recherche en économie et statistique (CREST) (Groupe de recherche en économie et statistique GRECSTA – CNRS) et au Centre Maurice Halbwachs (CNRS – École des hautes études en sciences sociales – École normale supérieure) (19 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Université de Versailles Saint-Quentin – M. Alexis Triclin, directeur du Master Ressources humaines et protection sociale (19 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Centre de recherches et d’études sur l’âge et les populations au travail (CREAPT) – M. Serge Volkoff, directeur de recherche (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition et article sur les fins de vie active et « pénibilités » au travail ci-après)
Ø Inspection générale des affaires sociales (IGAS) – Mme Agnès Jeannet, inspectrice générale, responsable du groupe de soutien de la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Association des paralysés de France (APF) – M. Jean-Marie Barbier, président, et M. Jean-Claude Lebarbier, conseiller national chargé des questions d’emploi (20 décembre 2007)
Ø Professeur Alain Dômont, professeur de médecine du travail (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition et texte de la présentation faite à la mission ci-après)
Ø Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH) –M. Arnaud de Broca, secrétaire général, et M. Karim Felissi, avocat conseil de la FNATH (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) – M. Jack Bernon, responsable du département Santé-Travail (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition, document de l’ANACT « mettre le travail au coeur du changement » et la note sur « la gestion sociale de la pénibilité » établie par Mme Céline Roux, chargée de mission de l’ANACT ci-après ; en annexe 10 du rapport d’information est également reproduite la note établie par l’ANACT pour la rencontre interprofessionnelle du 3 mai 2007 intitulée « la prévention de la pénibilité, état des lieux »)
Ø Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) –M. Thierry Debrand, économiste, chercheur (20 décembre 2007) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø MEDical.MD – M. Claude-Michel Morin, président, M. Joseph Amiouny, directeur général, et M. Philippe Panzini, directeur des technologies. Société canadienne : mise au point d’un système de gestion des informations médicales sur le web (Medforyou) et application pour le suivi de la santé des employés (20 décembre 2007)
Ø Université de Nantes – M. Franck Héas, maître de conférence à la faculté de droit et de sciences politiques (droit social des affaires) (9 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition et article sur la définition juridique de la pénibilité au travail ci-après)
Ø Thalès – M. Marc-Antoine Marcantoni, représentant de branche auprès de la CFTC-UE (9 janvier 2008)
Ø CFTC – M. Joseph Thouvenel, secrétaire général adjoint, et Mme Gwenaëlle Maudet, conseillère du cabinet (10 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø CFE-CGC – M. Bernard Salengro, secrétaire national, et M. Gilles Castre, juriste (10 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition et contribution de la CFE-CGC sur les facteurs de pénibilité ci-après)
Ø FO – Mme Michèle Biaggi, secrétaire confédérale, Mme Martine Derobert, assistante confédérale, M. Éric Peres, secrétaire fédéral UCI (10 janvier 2008)
Ø CFDT – M. Jean-Louis Malys, secrétaire national, et M. Henri Forest, secrétaire confédéral (10 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Conseil économique et social – Mme Françoise Geng, conseillère CGT membre de la section « travail » (10 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø CGT – Mme Mijo Isabey et M. Eric Aubin (10 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition et note sur les douze critères à retenir pour la reconnaissance de la pénibilité au travail ci-après)
Ø Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel des hôpitaux (ANMTPH) – M. Lionel Sctrick, président (16 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition, note sur le point de vue du médecin du travail dans les établissements de santé sur la pénibilité au travail et la synthèse de l’enquête européenne PRESST-NEXT sur la prévention ci-après)
Ø CGPME – M. Jean-François Veysset, vice-président chargé des affaires sociales et M. Georges Tissié, directeur des affaires sociales (16 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Mme Ellen Imbernon, responsable du département santé travail de l’Institut de veille sanitaire (InVS) et le professeur Yves Roquelaure, avec lequel elle travaille étroitement dans le cadre d'une unité mixte InVS/Université d'Angers (16 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition, synthèse du volet sur l’épidémiologie en entreprise de l’enquête Samotrace publiée en mai 2007 et la présentation du réseau pilote de surveillance épidémiologique des troubles musculo-squelettiques dans les entreprises des Pays-de-la-Loire ci-après)
Ø Union syndicale solidaire – M. Robert Kosmann, secrétaire national, M. Thierry Lescant, secrétaire national, M. Gérard Gourguechon, secrétaire national (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø MEDEF – M. Dominique Tellier, directeur des relations sociales, M. François Xavier Clédat, chef de file de la négociation « pénibilité », et M. Guillaume Ressot, directeur-adjoint affaires publiques (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Ordre national des médecins – Dr Denis Saint-Paul, conseiller national « médecine du travail », et Mme le Docteur Liliane Boitel, médecin conseil du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise (CISME) (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) –Mme Pascale Sorrentinella, directrice marketing et communication, et M. Philippe Pager, chargé de mission auprès du directeur général adjoint (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition, présentation de l’AFPA et trois fiches métier de questionnaire de santé illustrant l’approche de prévention par le médecin de l’AFPA ci-après)
Ø UNSA – Mmes Christine Dupuis, secrétaire nationale, et Elisabeth Charrin, psychologue du travail (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø INSERM – Mme France Lert, directrice de l'unité 687 Santé publique et Épidémiologie des déterminants professionnels et sociaux de la santé (17 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Table ronde sur le secteur agro-alimentaire (24 janvier 2008) :
– Fédération CGT agro-alimentaire et forestière – M. Giuseppe D’Angelo, secrétaire fédéral
– Fédération générale agroalimentaire CFDT – Mme Claire Montgobert, secrétaire nationale, et M. Bruno Valade, secrétaire national
– Fédération nationale agro-alimentaire de la CFE-CGC – M. Bernard Boulery, président, et Mlle Christelle Dayras, assistante
– UNSA Agriculture agroalimentaire – M. Gérard Moulin, secrétaire de la branche coopération
– Fédération générale des travailleurs de l’agriculture, de l’alimentation, des tabacs et des services annexes FO – M. Christian Crétier, secrétaire fédéral
– Association nationale des industries alimentaires (ANIA) –M. Bertrand Queffelec, directeur des affaires sociales de Danone, et Mme Micheline Christot, directeur des affaires sociales de l’ANIA
Ø Syndicat général des médecins du travail (SGMT) – M. Jean Guinnepain, médecin du travail (29 janvier 2008)
Ø Délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes –Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente (29 janvier 2008)
Ø M. Vincent Vieille, avocat (spécialisé en droit du travail) (29 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Union professionnelle artisanale (UPA) – Mme Dany Bourdeaux, présidente de la commission sociale, M. Pierre Burban, secrétaire général, et Mme Houria Sandal, conseiller technique (29 janvier 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø Table ronde sur le secteur de l’hôtellerie et de la restauration (30 janvier 2008) :
– Syndicat national des Hôteliers restaurateurs cafetiers traiteurs (SYNHORCAT) – M. Jean Luc Binet, vice-président, et M. Franck Trouet, directeur du service social et juridique
– Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH) –M. Bertrand Lecourt, membre du directoire de l’UMIH et président de l’Hôtellerie nationale familiale, et M. Gérard Cagna, membre du directoire et conseiller emploi formation
– Fédération des services CFDT – M. Johanny Ramos, secrétaire national, responsable du pôle « Hôtellerie-tourisme-restauration » et responsable des relations avec les pouvoirs publics et politiques, et M. Laurent Bigot, secrétaire général du syndicat Hôtellerie-tourisme-restauration d’Île de France et membre du bureau fédéral
– Fédération FO Agriculture, alimentation et tabacs – M. Denis Raguet, secrétaire fédéral branche hôtellerie-café-restaurant, et M. Sicilio Garcia, secrétaire syndical hôtellerie-café-restaurant du groupe Accor
Ø Table ronde sur le secteur de l’enseignement et de l’éducation spécialisée (31 janvier 2008) :
– Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (SNUIPP) –M. Didier Horus, secrétaire national, et Mme Judith Fouillard, secrétaire nationale
– UNSA Éducation – Mme Marie-Lucie Gosselin, chargée du secteur éducation, Mme Dominique Thoby, représentant le syndicat des enseignants UNSA, Mme Evelyne Roques, représentant le syndicat de l’inspection de l’éducation nationale, M. Eric Giraudet, représentant les Bi-ATOS UNSA (SNPTES), et Mme Odile Ghermani, représentant le syndicat de l’éducation spécialisée UNSA.
– Fédération syndicale unitaire (FSU) – Mme Elizabeth Labaye et Mme Sophie Dusquenne, représentantes secteur protection sociale (SNEP)
– Fédération Française de l'Enseignement Privé (FEP) – M. Lionel Leturgie, président national, et M. Gérard Bailly, vice-président
– Syndicat CFTC de l’Éducation nationale, de la recherche et de l’action culturelle (SCENRAC) – Mme Claudette Garderet, correspondante SCENRAC-CFTC pour l'Académie de Versailles, et Mme Catherine Bailleul-Auzenda, représentant les enseignants CFTC des établissements catholiques et privés (SNEPL-SNEC)
Ø Table ronde sur le secteur de la santé publique (31 janvier 2008) :
– Fédération des services de santé et services sociaux de la CFDT –Mme Maryvonne Nicolle, secrétaire nationale, et Mme Yolande Briand, secrétaire générale
– Fédération française de la santé, de la médecine et de l'action sociale CFE-CGC –M. Philippe Ailleres, chef du service des urgences du groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, et M. Thierry Amouroux, président du syndicat national des professionnels infirmiers CFE-CGC
– Fédération française des industries de santé (FEFIS) – M. Jean-Pierre Cassan, président
– Fédération hospitalière de France (FHF) – Mme Hélène Boyer, adjointe au délégué général, spécialisée en « ressources humaines »
– Fédération hospitalière privée (FHP) – M. Bertrand Mignot, responsable du pôle social, et Mme Mélanie S. Belsky, responsable relations institutionnelles
– UNSA santé et sociaux – Mme Pierrette Cotard, secrétaire générale, et M. Willy Kalb, secrétaire général adjoint
Ø Conférence des évêques de France – Père Jacques Turck, directeur des questions familiales et sociales (5 février 2008) (cf. note établie par le Père Jacques Turck en vue de son audition ci-après)
Ø M. Gérard Lasfargues, professeur des universités, praticien hospitalier (médecine et santé au travail), chef du département des expertises intégrées santé environnement travail de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET) (5 février 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø M. Raphaël Draï, professeur des universités (faculté de droit et de sciences politiques d’Aix-Marseille) (5 février 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø M. Tareq Oubrou, recteur de la mosquée El Huda de Bordeaux, président de l’association « Imams de France » (5 février 2008) (cf. synthèse de l’audition ci-après)
Ø M. Gilles Bernheim, philosophe, grand rabbin de la synagogue de la Victoire à Paris, directeur du département Thora et société du Consistoire de France (6 février 2008)
Ø Table ronde sur le secteur de l’agriculture (6 février 2008) :
– Confédération paysanne – M. Philippe Collin, trésorier, et M. Jean-Pierre Nesme, commission sociale
– Coordination rurale – M. Vincent Leclerc, président départemental « couronne parisienne »
– Fédération générale agroalimentaire (FGA-CFDT) – M. Patrick Massard, secrétaire général, Mme Claire Montgobert, secrétaire national, et M. Éric Swartvagher, secrétaire national
– FNSEA – M. Claude Cochonneau, vice-président, et Mme Muriel Caillat, sous-directrice emploi-formation
– Fédération FO Agriculture, alimentation et tabacs – M. Jean-Pierre Mabillon, secrétaire fédéral agriculture
– MODEF – M. Alain Gaignerot
– Mutualité sociale agricole – M. Elie Quidu, direction des politiques sociales, M. Christophe Bernard, médecin conseil de la direction de la santé, et M. Christophe Simon, chargé des relations institutionnelles
Ø Table ronde sur le secteur du commerce et de la distribution (7 février 2008) :
– Conseil du commerce de France – Mme Laure Lazard-Holly, secrétaire générale
– Confédération des commerçants de France – M. Charles Melcer, vice-président délégué, président de la Fédération nationale de l’habillement, et Mme Sophie Jami, responsable affaires sociales
– Fédération des services CFDT – Mme Aline Levron, secrétaire nationale
– Fédération CFE-CGC nationale de l’encadrement du commerce et des services – M. René Roche, président, M. Jacques Biancotto, président du Syndicat des grands magasins, et Mme Martine Saavedra, responsable du secteur habillement
– Fédération CFTC Commerce - services - forces de vente – M. Éric Scherrer, coordinateur fédéral
– Confédération générale de l’alimentation de détail – M. Alain Duplat, président, et M. Dominique Perrot, secrétaire général
– Fédération des entreprises du commerce et de la distribution – Mme Stéphanie Lagalle-Baranès, chef du service social
– Fédération générale des travailleurs de l’agriculture, de l’alimentation, des tabacs et des services annexes FO – Mme Janine Lecot-Lothoré, secrétaire fédérale « Grande distribution »
– Fédération des Commerces et des Services UNSA – Mme Martine Laguerre et M. Michel Pozzo
Ø Table ronde sur le secteur de la métallurgie et l’industrie mécanique (7 février 2008) :
– CFE-CGC Métallurgie – M. Xavier Le Coq, vice-président en charge de la protection sociale
– Fédération CFTC Métallurgie – Mme Canivez Marie-Gilberte, secrétaire générale, et M. Éric Cruchet, secrétaire général adjoint
– Fédération générale métallurgie et mines CFDT – M. Jean-Luc Collin, secrétaire national, chargé des questions de santé au travail
– Solidaires Industrie – M. Robert Kosmann, M. Alain Gueguen (Renault), M. Mohammed Khenniche (PSA) et M. Michel Chaussepied (Renault trucks)
– Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) –
M. Franck Gambelli, directeur sécurité et conditions travail (Fédération des industries mécaniques), M. Jacques Lauvergne, président du Groupement des entreprises sidérurgiques et métallurgiques, M. François Soulmagnon, directeur formation et conditions travail (Peugeot), et M. André Robert-Dehault, vice- président métallurgie de l’UIMM de Haute-Marne
– Union Fédérale de l’industrie de l’UNSA – M. Michel Bouvy, responsable du pôle industrie, M. Sébastien Listra et M. Denis Variot
Ø Table ronde sur le secteur du bâtiment et des travaux publics (7 février 2008) :
– BTP CFE-CGC – M. Armand Suardi, président, M. Raymond Schuster, vice-président, et M. Karsten Beyer, conseiller
– Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) – Mme Dany Bourdeaux, vice-présidente de la CAPEB et présidente de la commission des affaires sociales de l’UPA
– Fédération Nationale des salariés de la Construction et du Bois CFDT – M. Pascal Roussel, secrétaire national, et Mme Perrine Grenet, secrétaire fédérale
– Fédération CFTC Bâti-Mat Travaux publics – Mme Caroline Tykoczinsky, secrétaire général
– Fédération française du bâtiment (FFB) – M. Jean-Louis Terdjman, directeur des affaires sociales
Ø Table ronde sur le secteur des industries chimiques (7 février 2008) :
– Fédération CFE-CGC Chimie – M. Gilles Lecuelle, représentant de la branche Chimie
– Fédération chimie et énergie CFDT – M. Marc Blanc, secrétaire fédéral en charge de la chimie, et M. Joël Meugnier, négociateur de branche
– Fédération CFTC Chimie, mines, textile, énergie – M. Ludovic Messelot, membre du bureau fédéral CMTE secteur Chimie et en charge de la formation professionnelle
– Fédération de la chimie FO – M. Michel Decayeux, secrétaire fédéral, et M. André Babealere, secrétaire fédéral
– Union des syndicats SUD Chimie Pharmacie – M. François Teissier, secrétaire national, M. Virgilio Mota da Silva, membre du secrétariat national, et M. Jacky Moret, membre du secrétariat national
– Union des industries chimiques – M. Jean Pelin, directeur général, et M. Ithier d’Avout, directeur des affaires sociales
– UNSA Chimie-Pharmacie-Pétrole – Mme Dominique Delmarle
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LISTE DES ENTRETIENS DE LA MISSION À HELSINKI
Mercredi 20 février 2008
Ministère des affaires sociales et de la santé de la République de Finlande
Ø Mme Terttu Savolainen, secrétaire d’Etat chargée de la sécurité sociale
Ø M. Heikki Savolainen, Conseiller médical (division de la santé et de la sécurité au travail): présentation de l’administration finlandaise en matière de santé et de sécurité au travail
Ø Mme Carin Lindqvist-Virtanen, directrice adjointe (division des assurances sociales): présentation du système des retraites finlandais
Ø M. Matti Lamberg, conseiller médical (division de la santé, Organisation de la médecine du travail)
Ø M. Ismo Suksi, conseiller (division de la santé et de la sécurité au travail): présentation du programme VETO
Ø M. Kari Gröhn, expert (division de l’économie et de la planification) : suivi des indicateurs du programme VETO
Agence finlandaise de la sécuité sociale (KELA)
Ø Mme Tiina Huusko, chef de développement : présentation des actions de rééducation et de promotion de la capacité de travail des salariés
Institut de la santé au travail (TTL)
Ø M. Juhani Ilmarinen, professeur, chef du programme national pour les travailleurs vieillissants : présentation du programme
Confédération des Entreprises finlandaises (EK)
Ø M. Seppo Riski, directeur de la division du marché du travail, M. Kari Kaukinen, médecin chef, et M. Jyrki Hollmen, expert santé et sécurité au travail
Parlement finlandais
Ø Mme Elisabeth Naucler, députée, présidente du groupe d’amitié Finlande-France
Ø M. Juha Rehula, président de la commission des affaires sociales et de la santé, et M. Erkki Virtanen, député de l’opposition membre de la commission des affaires sociales et de la santé
Ø M. Arto Satonen, député membre de la commission de la commission du travail et de l’égalité
Ambassade de France en Finlande
Ø Dîner offert par M. Philippe Merlin, chargé d’affaires, en présence de M. Claude Girard, premier secrétaire, et M. Bernard Bedas, conseiller social à l’ambassade de France en Suède
Jeudi 21 février 2008
Confédération syndicale SAK
Ø Mme Kaija Kallinen, directrice adjointe, et M. Kari Haring, médecin expert
Ministère de l’emploi, de l’industrie et du commerce de la République de Finlande
Ø M. Tuomo Alasoini, conseiller chargé de la politique de l’emploi : présentation du programme TYKES
Ø Déjeuner de travail avec le Mme Ritva Helimäki-Aro, médecin membre de l’Association finlandaise des médecins du travail, présidente de la commission internationale de l’association
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LISTE DES ENTRETIENS DE LA MISSION À MADRID
(cf. synthèse des entretiens ci-après)
Mercredi 27 février 2008
Ministère du travail et des affaires sociales du Royaume d’Espagne
Ø Mme María de Mingo Corral, conseillère technique de la direction générale du travail
Ø M. Antonio Rodríguez de Prada, directeur du Centre national de nouvelles technologies de Madrid (Institut national de sécurité et hygiène au travail)
Ø M. Alberto Sanz Merinero, conseiller technique à la direction de l’Institut national de sécurité et hygiène au travail
Ø M. Adrián González Martín, sous-directeur général pour la prévention de risques professionnels (direction générale de l’Inspection du travail et de la sécurité sociale)
Ø M. Fernando Fernández Perdido, sous-directeur général des entités collaboratrices de la sécurité sociale
Association des mutuelles d’accidents et maladies professionnelles de la sécurité sociale (AMAT)
Ø M. Enrique Valenzuela de Quinta, directeur général
Ø Mme Carlota García-Rodrígo Menéndez, directrice de Afiliación, Recaudación y Prestaciones Económicas – Ibermutuamur
Ø M. Francisco Miranda Rivas, director de Prestaciones – FREMAP
Ø M. Pere Teixidó Campàs, director de prevención, Innovación y Calidad de Servicios Mutua Universal
Ø M. Antonio Pérez Vázquez, director del Departamento Jurídico – AMAT
Ministère de la santé et de la consommation du Royaume d’Espagne
Ø Mme Montserrat García Gómez, chef du département de la santé au travail à la direction générale de la santé publique
Ø Mme Elena Martín-Asín, sous-directrice générale adjointe des relations internationales
Jeudi 28 février 2008
Ambassade de France en Espagne
Ø M. Bruno Delaye, ambassadeur de France en Espagne
Ø Mme Anne Suard, deuxième conseiller
Ø Mme Blandine Legout, conseillère pour la santé et les affaires sociales
Union générale des travailleurs (UGT)
Ø Mme Dolores Hernández, secrétaire confédérale de la santé au travail et de l’environnement
Confédération syndicale des commissions ouvrières (CC.OO)
Ø M. Julián Ariza, adjoint au Secrétariat général
Ø M. Fernando Rodrigo, coordinateur du secrétariat confédéral de la santé au travail et de l’environnement
Ø M. Javier Torres, adjoint au département de la santé au travail
Ø Mme Eva Urbano, membre du cabinet juridique
Ø Mme Begoña del Castillo, coordinatrice pour l’Europe du département international
Confédération espagnole des organisations patronales (CEOE)
Ø Mme Pilar Iglesias, directrice de la sécurité sociale, de la prévention des risques professionnels, de la santé et des services sociaux
ANNEXE N° 3
SYNTHÈSES DES AUDITIONS RÉALISÉES
À L’ASSEMBLÉE NATIONALE
Liste, par ordre chronologique, des auditions dont le compte rendu de synthèse a été validé et dont la publication a été autorisée par la personne auditionnée (1) :
13 décembre 2007 : M. William Dab, chef du département hygiène et sécurité du Conservatoire national des arts et métiers, ancien directeur général de la santé du ministère de la santé
13 décembre 2007 : M. Régis Mollard, professeur des universités, directeur de l’Unité Ergonomie, comportements et interactions de l’Université Paris V René Descartes
13 décembre 2007 : M. Philippe Askenazy, économiste, directeur de recherche au CNRS
19 décembre 2007 : M. Michel Gollac, administrateur de l’INSEE, chercheur au Centre de recherche en économie et statistique (CREST) (Groupe de recherche en économie et statistique GRECSTA – CNRS) et au Centre Maurice Halbwachs (CNRS – École des hautes études en sciences sociales – Ecole normale supérieure)
19 décembre 2007 : M. Alexis Triclin, directeur du Master Ressources humaines et protection sociale à l’Université de Versailles Saint-Quentin
20 décembre 2007 : M. Serge Volkoff, directeur de recherche Centre de recherches et d’études sur l’âge et les populations au travail (CREAPT) (joint un article sur les fins de vie active et « pénibilités » au travail)
20 décembre 2007 : Mme Agnès Jeannet, inspectrice générale des affaires sociales (IGAS), responsable du groupe de soutien de la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité
20 décembre 2007 : Professeur Alain Dômont, professeur de médecine du travail (joint le texte de la présentation faite à la mission d’information)
20 décembre 2007 : M. Arnaud de Broca, secrétaire général de la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH), et M. Karim Felissi, avocat conseil de la FNATH
20 décembre 2007 : M. Jack Bernon, responsable du département Santé-Travail de l’Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) (joint le document de l’ANACT « mettre le travail au coeur du changement » et la note sur « la gestion sociale de la pénibilité » établie par Mme Céline Roux, chargée de mission de l’ANACT ; en annexe 10 du rapport d’information est également reproduite la note établie par l’ANACT pour la rencontre interprofessionnelle du 3 mai 2007 intitulée « la prévention de la pénibilité, état des lieux »)
20 décembre 2007 : M. Thierry Debrand, économiste, chercheur à l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES)
9 janvier 2008 : M. Franck Héas, maître de conférence à la faculté de droit et de sciences politiques (droit social des affaires) à l’Université de Nantes
10 janvier 2008 : M. Joseph Thouvenel, secrétaire général adjoint de la CFTC, et Mme Gwenaëlle Maudet, conseiller
10 janvier 2008 : M. Bernard Salengro, secrétaire national de la CFE-CGC, et M. Gilles Castre, juriste (joint la contribution de la CFE-CGC sur les facteurs de pénibilité).
10 janvier 2008 : M. Jean-Louis Malys, secrétaire national de la CFDT, et M. Henri Forest, secrétaire confédéral de la CFDT
10 janvier 2008 : Mme Françoise Geng, conseillère CGT membre de la section « travail » du Conseil économique et social
10 janvier 2008 : Mme Mijo Isabey et M. Eric Aubin, secrétaires de la CGT (joint une note sur les douze critères à retenir pour la reconnaissance de la pénibilité au travail)
16 janvier 2008 : M. Lionel Sctrick, président de l’Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel des hôpitaux (ANMTPH) (joint une note sur le point de vue du médecin du travail dans les établissements de santé sur la pénibilité au travail et la synthèse de l’enquête européenne PRESST-NEXT sur la prévention)
16 janvier 2008 : M. Jean-François Veysset, vice-président chargé des affaires sociales de la CGPME, et M. Georges Tissié, directeur des affaires sociales de la CGPME
16 janvier 2008 : Mme Ellen Imbernon, responsable du département santé travail de l’Institut de veille sanitaire (InVS) et le professeur Yves Roquelaure, avec lequel elle travaille étroitement dans le cadre d’une unité mixte InVS–Université d’Angers (joint une synthèse du volet sur l’épidémiologie en entreprise de l’enquête Samotrace publiée en mai 2007 et la présentation du réseau pilote de surveillance épidémiologique des troubles musculo-squelettiques dans les entreprises des Pays-de-la-Loire)
17 janvier 2008 : MM. Robert Kosmann, Thierry Lescant et Gérard Gourguechon, secrétaires nationaux de l’Union syndicale solidaire
17 janvier 2008 : M. Dominique Tellier, directeur des relations sociales du MEDEF, M. François Xavier Clédat, chef de file de la négociation « pénibilité » du MEDEF et M. Guillaume Ressot, directeur-adjoint affaires publiques du MEDEF
17 janvier 2008 : Dr Denis Saint-Paul, conseiller national « médecine du travail » de l’Ordre national des médecins, et Madame le Dr Liliane Boitel, médecin conseil du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise (CISME)
17 janvier 2008 : Mme Pascale Sorrentinella, directrice marketing et communication de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), et M. Philippe Pager, chargé de mission auprès du directeur général adjoint (joint une présentation de l’AFPA et trois fiches métier de questionnaire de santé illustrant l’approche de prévention par le médecin de l’AFPA ci-après)
17 janvier 2008 : Mmes Christine Dupuis, secrétaire nationale de l’UNSA, et Elisabeth Charrin, psychologue du travail
17 janvier 2008 : Mme France Lert, directrice de l’unité 687 Santé publique et Épidémiologie des déterminants professionnels et sociaux de la santé de l’INSERM
29 janvier 2008 : M. Vincent Vieille, avocat (spécialisé en droit du travail)
29 janvier 2008 : Mme Dany Bourdeaux, présidente de la commission sociale de l’Union professionnelle artisanale (UPA), M. Pierre Burban, secrétaire général de l’UPA, et Mme Houria Sandal, conseiller technique de l’UPA
5 février 2008 : Père Jacques Turck, directeur des questions familiales et sociales de la Conférence des évêques de France (note établie pour l’audition)
5 février 2008 : M. Gérard Lasfargues, professeur des universités, praticien hospitalier (médecine et santé au travail), chef du département des expertises intégrées santé environnement travail de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET)
5 février 2008 : M. Raphaël Draï, professeur des universités (faculté de droit et de sciences politiques d’Aix-Marseille)
5 février 2008 : M. Tareq Oubrou, recteur de la mosquée El Huda de Bordeaux, président de l’association « Imams de France »
Réunion du 13 décembre 2007, 15h15
Audition de M. William Dab, titulaire de la chaire d’hygiène et sécurité
au Conservatoire national des arts et métiers
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Isabelle Vasseur, députée
M. William Dab considère qu’il est très difficile de définir des critères universels de pénibilité du travail. Du point de vue épidémiologique, il faut garder à l’esprit le vieillissement de la population des travailleurs avec les multiples que cela implique. Dans le même temps, la relation entre travail et santé s’est inversée. Avant, on attendait de la santé qu’elle crée de la force de travail. Aujourd’hui c’est du travail dont on attend qu’il produise de la santé. On attend de l’entreprise qu’elle ait un rôle social, qu’elle soit créatrice de bien-être.
Pour contourner la difficile question de la définition de la pénibilité, on pourrait prendre en compte ses conséquences en termes de mortalité prématurée. C’est un critère objectif et opérationnel (il existe un registre national de décès tenu par l’Insee et l’Inserm). On appelle mortalité prématurée le décès qui survient avant 60 ans ou avant 65 ans. Il est possible de réaliser une étude systématique sur le lien entre la profession et l’âge au décès. Il y aurait « surpénibilité » quand il existe une surmortalité significative. Par exemple, si on veut étudier la pénibilité du travail de nuit, on regarde si ce type de travail a un impact significatif sur l’espérance de vie. C’est certes partiel, mais ce peut être une première étape utile.
Une telle approche « gomme » la pénibilité psychologique. Il faudra la compléter par des données de morbidité (fréquence des maladies) et d’incapacité (retentissement de la maladie sur la vie quotidienne). Le problème est qu’on ne dispose pour l’instant en routine que des données de mortalité
La solution pour avancer viendra du dossier médical personnel (DMP). Il existe déjà des projets qui fonctionnent, par exemple MEDical.MD au Canada. La question de la confidentialité des données peut être résolue quand on ne s’intéresse qu’au niveau populationnel.
M. Jean-Frédéric Poisson, président, a souhaité auditionner les responsables de l’entreprise MEDical.MD à ce sujet.
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Réunion du 13 décembre 2007, 16h10
Audition de M. Régis Mollard, professeur des universités, directeur de l’unité Ergonomie, Comportement et Interactions à l’Université Paris Descartes
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Isabelle Vasseur, députée
M. Régis Mollard a souligné qu’il a longtemps étudié le lien qui existe entre la fatigue et la sécurité au travail, dans deux domaines : les transports, et les activités postées ou le travail en horaires décalés.
On peut définir la pénibilité de deux façons. Tout d’abord, il s’agit de l’accumulation de fatigue liée à l’activité professionnelle et son impact sur la santé. En allant plus loin, on peut considérer toutes les astreintes liées au travail et susceptibles d’impacter la santé.
En ce qui concerne la pénibilité physique, elle est plutôt bien diagnostiquée. C’est l’exemple de la reconnaissance récente des troubles musculo-squelettiques (TMS). En revanche, il est plus difficile de prendre en compte la pénibilité mentale qui peut résulter pour une part de l’automatisation de certaines tâches et la pression du temps de plus en plus présente. Le contexte social rend aussi le travail plus pénible : le changement de logique dans une entreprise peut rendre inacceptables des horaires et une organisation du travail qui étaient adoptés auparavant.
L’acceptabilité des conditions de travail est liée à la satisfaction procurée par le travail, notamment au travers de la reconnaissance sociale et productive, les perspectives de carrière, la rémunération.
Le stress peut être perçu de deux manières : positif, et ses effets sur la santé sont alors souvent sous évalués du fait du masquage lié à la motivation dans le travail (encadrement), ou. négatif et il est alors vécu comme une contrainte en raison de l’absence de contrôle sur la situation ou de marges de manœuvre (exécution). L’existence même de stress n’est pas nécessairement due à la présence d’un « stresseur », mais plus à l’évaluation que chacun se fait de sa capacité à faire face à ce qui est demandé. Ainsi, les causes du stress ne sont pas toujours celles qu’on pense. On pourrait aussi définir le stress comme le fait de vouloir bien faire et être efficace sans avoir les moyens de le faire.
En qui concerne les actions possibles pour lutter contre la pénibilité, les mesures de prévention d’un programme efficace de santé au travail peuvent supprimer une partie de la pénibilité mais pas son intégralité.
De plus, il existe des différences culturelles. Les études auprès des pilotes d’avions effectuant des vols long courrier font ressortir qu’en Amérique du nord, et en Europe, la tendance est plus à optimiser le temps de travail de manière à dégager le maximum de temps libre qui est utilisé intensément et pas nécessairement pour une récupération fe la fatigue, alors qu’en Asie ou en Amérique du sud le temps libre est apprécié pour le repos qu’il procure afin de maximiser l’efficacité au travail. Les travailleurs peuvent donc fabriquer leur propre pénibilité au travail. En France, on privilégie d’abord les rythmes sociaux sur les contraintes professionnelles qui vont elles-mêmes primer sur les rythmes biologiques. Ceci entraîne des privations de sommeil et une fatigue accrue qui ont pour conséquence une baisse de l’efficacité du travail, une irritabilité des personnes est plus élevée et des troubles de santé.
La pénibilité est souvent très forte en cas d’horaires décalés, de plus en plus fréquents, en raison d’une mauvaise gestion du temps libre dégagé qui devrait être utilisé pour préserver les rythmes biologiques indispensables à la préservation de la santé sur le long terme.
Enfin, globalement, une transformation du travail mal accompagnée a pour conséquence une hausse de la pénibilité.
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Réunion du 13 décembre 2007, 17h10
Audition de M. Philippe Askenazy, économiste du travail, directeur de recherche au CNRS
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Isabelle Vasseur, députée
La France est globalement en retard par rapport à de nombreux pays voisins dans la prise en compte de la pénibilité au travail pour les seniors. Ceci s’explique par deux phénomènes : l’héritage historique français et la qualification moindre des salariés. En ce qui concerne l’héritage, la situation est plus dégradée que dans les pays nordiques par exemple. Ce retard s’explique par une expertise tardive de la part de l’État notamment en matière d’emploi de produits toxiques, ce qui fait que la masse de salariés exposés avec une espérance de vie réduite est élevée. Cette expertise tardive est due à la fois au poids de certains lobbies patronaux et à des moyens longtemps limités (l’Institut de veille sanitaire par exemple possède encore de faibles moyens). Ceci a pour conséquence un déficit d’information des entreprises, qui ne connaissaient pas les risques liés à certains produits, comme l’amiante.
En ce qui concerne la qualification, les salariés français de plus de 50 ans sont moins qualifiés que dans les pays voisins, d’où des postes à pénibilité plus nombreux. Le flux de diplômés actuels est maintenant comparable à celui de l’Allemagne mais les salariés sont usés prématurément alors que l’on sait qu’il y a un différentiel d’espérance de vie fort entre les ouvriers peu qualifiés et les cadres. Ce différentiel est égal à 7 ans en France (10 ans pour l’espérance de vie en bonne santé) contre de l’ordre de 5 ans en Europe (8 ans pour l’espérance de vie en bonne santé).
Il faudrait aider les entreprises à mieux gérer les aspects les plus délétères du travail et aménager les carrières. Dès 45 ans les salariés pourrait, par exemple, être mis sur des postes « plus doux » comme en Europe du nord. Il faudrait réfléchir aux incitations de carrières (mettre en place des deuxièmes carrières comme dans les collectivités locales) et cibler la formation professionnelle sur les transitions de carrière.
Ces politiques ne résoudront pas le problème de stock des travailleurs prématurément « usés ». Il faut donc examiner les problèmes de la réparation. Du point de vue de l’équité, on peut envisager des départs anticipés ou des retraites bonifiées pour ceux dont on sait que l’espérance de vie est la plus faible. On peut aussi envisager de mettre en place une réflexion sur l’information et l’aide aux entreprises relatives aux métiers pénibles. On peut, dans le même temps, inciter les entreprises à opérer une gestion des carrières en fonction de la pénibilité.
Se pose enfin la question de la réparation. Plusieurs choix sont possibles :
– on peut désigner des métiers pénibles et offrir des compensations. Cette politique a cependant des effets pervers importants (les employeurs expliqueront que la pénibilité dans leur entreprise est fondée et prise en compte ; les salariés ne chercheront pas à s’extraire des métiers pénibles en raison de leur préférence dite hyperbolique pour les avantages économiques qu’ils procurent) et ne va pas dans le sens d’une hausse du taux d’emploi des seniors.
– les avantages vieillesse ne devraient être accordés qu’aux salariés âgés en stock au titre d’un dispositif transitoire. Cette mesure serait la plus efficace économiquement mais aussi la plus difficile à mettre en œuvre.
– on peut opérer un questionnement individuel sur l’état de santé des personnes de 55 ans mais là aussi des écueils existent : certains problèmes de santé ne seront pas observables à cet âge et peuvent se révéler mortel par exemple à 61 ans ; la mesure va à l’encontre de l’accroissement du taux d’emploi des seniors (les employeurs seraient incités à demander des constats d’inaptitude.
Aucun pays européen n’a mis en place des dispositifs systématique de réparation de la pénibilité au travail, sauf en Grèce.
En matière de financement, l’Etat ne peut pas s’affranchir de sa responsabilité pour l’insuffisance de son expertise et pourrait donc prendre une partie du coût des mesures à sa charge. Les entreprises devrait être l’autre contributeur dans la logique du « pollueur payeur » même si les pollueurs ont disparu.
Le coût des mesures de réparation (prise en charge par l’Etat d’une année de cotisation retraite, soit 50 % de l’écart d’espérance de vie de deux ans constaté avec les voisins européens qui peut être imputé aux conditions de travail, pour 10 à 20 % des salariés des professions concernées) pourrait être conséquent de l’ordre de 2 milliards d’euros par an. La direction générale du Trésor et de la politique économique doit disposer des outils pour offrir à la représentation nationale des estimations précises.
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Réunion du 19 décembre 2007, 17h15
Audition de M. Michel Gollac, administrateur de l’INSEE, chercheur au Centre de recherche en économie et statistique (CREST) (GRECSTA-CNRS) et au Centre Maurice Halbwachs (CNRS–EHESS–ENS)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, MM. Régis Juanico et Claude Leteurtre, députés
M. Michel Gollac a présenté quatre possibles définitions de la pénibilité au travail, le choix entre ces différentes définitions étant d’ordre politique :
1° Des conditions de travail entraînant une baisse de l’espérance de vie : par exemple, exposition aux cancérogènes, travail de nuit, forte usure psychologique pouvant avoir des conséquences somatiques importantes (fortes contraintes de temps combinées avec une autonomie, un soutien social et une reconnaissance faibles,…).
2° Des conditions de travail entraînant une baisse de l’espérance de vie sans incapacité : par exemple, travaux répétitifs sous contrainte de temps provoquant des troubles musculo-squelettiques, postures difficiles, faible autonomie dans le travail.
Ces définitions 1 et 2 utilisent le concept d’espérance de vie (ou d’espérance de vie sans incapacité) qui est un concept statistique, ne se référant pas à la diversité des situations individuelles.
3° Des conditions de travail nuisibles à la santé du travailleur mais n’entraînant pas d’incapacité : cette définition s’appuie sur la définition de la santé de l’OMS (état complet de bien-être social, physique et mental).
4° Des conditions de travail entraînant une baisse de la qualité de vie au travail et hors travail, sur les périodes de travail : la pénibilité constitue ici une altération temporaire et réversible de la santé, au sens de l’OMS.
En ce qui concerne les horaires, on peut affirmer qu’au-delà de 45 heures de travail hebdomadaires, il y a présomption de pénibilité.
Le travail monotone peut se traduire par une pénibilité car il est difficile à supporter et cause une atteinte psychologique à la personne. Mais sa répercussion sur l’état de santé n’est pas mesurée aujourd’hui. En ce qui concerne l’intensité du travail, la pénibilité est aux deux extrêmes : une surcharge excessive de travail avec une pression du temps et une absence de travail associée à une coupure des relations avec l’environnement.
Il n’y a pas de correspondance uniforme entre la pénibilité ressentie et la pénibilité effective : le stress lié à de fortes contraintes de temps peut être bien vécu (workoholism).
La pénibilité pose des problèmes de mesure. On est souvent tenté d’agir sur la seule pénibilité que l’on peut mesurer. Par ailleurs, le caractère mesurable des pénibilités évolue. Il convient donc de rendre visibles les pénibilités.
Les origines des pénibilités sont diverses. Il peut s’agir de dispositifs concrets de travail (présence de cancérogènes,…) ou d’une organisation de l’entreprise et du travail (contrainte de temps, isolement du travailleur, instructions contradictoires,…).
Des actions de prévention sont possibles au travers de dispositifs concrets de protection contre les toxiques ou les accidents, par l’amélioration des contraintes techniques du travail et surtout grâce à des transformations des organisations. Il existe des contraintes économiques qui limitent l’action des entreprises, mais leurs comportement ne sont cependant pas aujourd’hui optimaux eu égard à la pénibilité. Certaines entreprises sous-estiment les pénibilités (situation en recul), d’autres en évaluent mal les causes, beaucoup sous-estiment les possibilités de les alléger.
La compensation monétaire de la pénibilité a deux vertus : elle individualise la compensation ; elle incite les entreprises à améliorer les conditions de travail. Cette compensation existe, au moins en partie, pour des pénibilités bien observées (travail de nuit,…). Elle a l’avantage de mettre la pénibilité à la charge des entreprises qui la causent et non de la collectivité (y compris les autres entreprises). Des chercheurs estiment cependant que la compensation peut avoir des effets pervers : les travailleurs peuvent préférer la pénibilité à la perte de la compensation.
Un autre effet pervers à craindre est celui d’une compensation qui ne serait pas financée par les entreprises à l’origine des pénibilités. La bonification de trimestres d’assurance vieillesse tombe typiquement dans ce travers si cette bonification ne s’accompagne pas d’un mécanisme de financement adapté.
En France, la réglementation des conditions de travail est forte mais l’application de la législation n’est pas optimale. Il faut commencer par mieux appliquer la loi. La négociation sur la pénibilité est importante car elle permet d’avoir un diagnostic et d’améliorer les interventions des entreprises.
Il ne faut pas séparer les deux concepts de pénibilité et de danger car dans les deux cas on trouve un rôle causal de l’organisation du travail (par exemple, le risque pris par le grutier dépendra de l’organisation du chantier). On doit pouvoir traiter la pénibilité comme les accidents du travail et les maladies professionnelles (sans cependant recourir à des tableaux précis, trop limitatifs, comme pour les maladies professionnelles). Il y a un continuum entre conditions de travail illicites ou dangereuses et pénibilité au travail. Il faut caractériser la pénibilité en fonction de l’état des connaissances scientifiques, mais il appartient aux décideurs politiques de définir la frontière.
Concernant les moyens de la prévention, il faut redéfinir les interventions de l’ANACT et des ARACT. Des formations devraient être développées notamment pour attirer davantage de bons étudiants dans les métiers de la prévention.
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Réunion du 19 décembre 2007, 18h15
Audition de M. Alexis Triclin, professeur à l’Université de Versailles Saint-Quentin, directeur du master Ressources humaines et protection sociale
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, MM. Régis Juanico et Claude Leteurtre, députés
M. Alexis Triclin a indiqué qu’il n’existe pas une définition mais des définitions de la pénibilité au travail. C’est un terme polysémique. Plusieurs axes de définition sont possibles :
1° Un travail difficile : c’est la conception historique de la pénibilité en France, qui se traduit par des compensations salariales, comme dans le BTP (primes de salissure, d’intempérie, de chaleur,…).
2° Une sécurité au travail insuffisante : cette piste est en voie d’amélioration sous l’impulsion de la Commission européenne.
3° Une réduction de l’espérance de vie en retraite : c’est l’approche des régimes spéciaux de retraite. Les dispositifs en vigueur constituent des pactes conclus entre les salariés et leurs entreprises qu’il sera difficile de changer brutalement. Par ailleurs, le régime général couvre des salariés ayant des métiers pénibles ; seul le régime des carrières longues peut être assimilé à une reconnaissance de pénibilité, mais est-ce suffisant ?
4° On peut s’interroger sur le parallèle entre pénibilité et handicap. La piste de l’invalidité est utilisée aux Pays-Bas, au Danemark, en Suède et en Espagne (mais dans ce dernier pays la sécurité sociale est étatisée). La piste des maladies professionnelles a permis des améliorations sensibles à partir du moment où on a accepté de prendre en charge des maladies hors tableaux (35 000 maladies reconnues aujourd’hui contre 10 000 en 1993).
5° On peut s’interroger sur le rapprochement entre pénibilité et dépendance ; la grille AGGIR pourrait être utilisée mais elle devrait être élargie pour s’appliquer à la pénibilité.
Il faut approfondir la solution des secondes carrières professionnelles.
Faire appel aux préretraites serait une grave erreur. De même, il faut éviter des dispositifs avec des effets de seuil.
En fait, il ne faut pas chercher à définir rigoureusement la pénibilité car autrement les forces sociales se mobiliseraient, se diviseraient et les corporatismes ressurgiraient.
La prévention des risques professionnels est insuffisamment traitée par les acteurs professionnels. Elle relève de trois types d’acteurs :
– les employeurs : il faut mettre l’accent sur les PME et les sous-traitants ;
– les structures internes aux entreprises (comité d’entreprise, CHSCT) : le centre de gravité doit être déplacé vers le CHSCT mais celui-ci reste trop dans l’orbite syndicale (il est instrumentalisé et relaye les actions syndicales en laissant de côté l’évaluation et la prévention) ;
– le travailleur : des actions pédagogiques doivent être menées pour une meilleure prise de conscience.
Le médecin du travail n’est pas dans la liste car il n’est pas dans un véritable partenariat avec l’entreprise pour la prise en compte de la pénibilité.
Le document unique d’évaluation (décret du 5 novembre 2001) commence à rentrer en application sur le terrain. L’ANACT et l’INRS y participent mais les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers sont trop absentes.
Il ne faut pas confondre risque professionnel et pénibilité même s’il peut y avoir recoupement.
Il faut mettre en place une expertise permanente de la pénibilité, à l’exemple du Conseil d’orientation des retraites ou du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels : un diagnostic partagé avec les partenaires sociaux est indispensable.
Il faut être prudent avec les négociations de branche. Un accord interprofessionnel structurant et bornant le travail des partenaires sociaux dans les branches doit être trouvé, d’autant plus que les branches ont une vitalité disparate. La négociation en entreprise doit permettre de décliner la prise en compte de la pénibilité, surtout en matière de prévention, car il faut éviter de tomber dans la compensation par la rémunération supplémentaire.
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Réunion du 20 décembre 2007, 9h
Audition de M. Serge Volkoff, directeur de recherche au Centre de recherches et d’études sur l’âge des populations au travail (CREAPT)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, MM. Régis Juanico, Claude Leteurtre et Xavier Breton, députés
M. Serge Volkoff a exposé différents exemples de pénibilité au travail afin d’éclairer la définition de la notion (cf. : note jointe).
Il a ensuite précisé le concept de « deuxième carrière », c’est-à-dire le fait de pouvoir évoluer vers des métiers moins pénibles lorsque l’on vieillit. Une des critiques est liée à la prétendue « résistance au changement » des seniors, qui ne repose en fait sur aucune base scientifique, mais qui est fortement intériorisée dans les comportements sociaux.
En ce qui concerne les moyens d’actions, le réseau ANACT devrait être étendu. On pourrait suivre l’expérience du plan finlandais « l’expérience est une richesse nationale » qui a permis de repousser de deux ans et demi l’âge moyen de départ à la retraite, en agissant sur les préjugés. Il faut aussi désenclaver les problématiques liées à la pénibilité. Cette dernière ne concerne pas uniquement les médecins du travail, les directeurs des ressources humaines ou les consultants. Les chefs d’entreprise et l’encadrement intermédiaire doivent aussi s’emparer de ce problème.
On constate que les employeurs n’ont pas une mauvaise image des employés vieillissants, ce sont plutôt les systèmes d’organisation du travail qui peuvent avoir pour conséquence une stigmatisation des travailleurs seniors.
Au niveau de la prise en compte de la pénibilité au sein des services administratifs, il importe de ne pas faire table rase des conceptions passées, mais de s’en servir pour comprendre le sens du travail, afin de le faire évoluer. On peut prendre l’exemple des professeurs des écoles maternelles et leur perception de l’évaluation des élèves qui leur est demandée. Ils conçoivent cette évaluation comme contraire à leur conception de la pédagogie, ce qui a pour conséquence leur volonté de partir dès que possible à la retraite.
En ce qui concerne la définition même de la pénibilité, il faut combiner critères objectifs et subjectifs car les deux peuvent être mesurés, bien que de façon différente (statistiques ou entretien individuel).
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Réunion du 20 décembre 2007, 10h
Audition de Mme Agnès Jeannet, inspectrice générale des affaires sociales, responsable du groupe d’appui de la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, MM. Régis Juanico et Xavier Breton, députés
Mme Agnès Jeannet a rappelé que début 2007 un groupe d’appui à la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité a été constitué à l’initiative du ministre du travail. Toutes les administrations y sont représentées.
La question de la pénibilité vue au travers des politiques sociales est d’une grande complexité car la pénibilité peut être prise en compte sous l’angle de l’invalidité, de l’assurance maladie, des maladies professionnelles et de la retraite. Le terme recouvre des sens différents : la pénibilité peut être ressentie par le travailleur sans provoquer d’effets visibles sur sa santé ; elle peut être avérée c'est-à-dire avoir un effet immédiat et manifeste sur la santé ; mais elle peut aussi avoir des effets différés c'est-à-dire révéler ses manifestations morbides longtemps après la fin de l’exposition aux risques (cas de cancers professionnels).
La notion de pénibilité est polysémique. Ce sont les objectifs poursuivis qui permettent de cerner la notion. . L’objectif de prévention appelle une définition très large de la pénibilité. Car il faut identifier tous les facteurs de risque qui peuvent avoir un impact sur la santé du travailleur. En revanche, si l’on cherche à compenser ou réparer, la définition peut être plus étroite car seuls les dommages irréversibles méritent d’être pris en compte.
La prévention de la pénibilité conduit à mener des actions larges. Mais dans un but de réparation, il faut « resserrer le curseur » ; c’est pourquoi une autre définition est nécessaire ; il faudrait d’ailleurs employer un autre terme que pénibilité. Parler d’invalidités professionnelle ?.
Il y a un miroitement entre compensation et réparation. A mon sens il faut distinguer les deux concepts qui sont parfois utilisés l’un pour l’autre. La compensation c’est un ensemble d’action svisant à atténuer les effets d’un risque sur la santé : le repos compensateur (voie insuffisamment explorée) est un exemple de mesure compensatrice ; autre exemple celui des primes salariales (pire solution à éviter si l’on veut prévenir les effets de la pénibilité sur la santé) ; reclassement (bonne solution, si elle est mise en oeuvre avant que les effets sur la santé ne se manifestent (par exemple, au bout de 10 à 15 ans pour les travailleurs de nuit).
La compensation doit être en lien direct avec le risque. Elle est destinée à prévenir le dommage sur la santé. La réparation n’intervient qu’une fois le dommage apparu.
La réparation est possible, soit au travers des rentes servies par la branche des accidents du travail en cas de maladie d’origine professionnelle avérée, soit au travers des régimes de préretraite par des mécanismes de cessation anticipée d’activité. Dans le régime des maladies professionnelle, il faut que le travailleur passe devant une commission médicale pour voir reconnaître le dommage. Dans le régime des CATS (cessation anticipée d’activité) ce sont des critères de pénibilité qui sont retenus pour ouvrir droit à un départ anticipé, sans qu’il y ait besoin de constater par voie d’examen médical un quelconque état de santé. Car dans ce cas, le risque est potentiel. Le rapport d’Yves Struillou s’appuie sur cette notion de risque potentiel et sur des critères de gravité, d’irréversibilité : le plus important étant la réduction de l’espérance de vie engendrée par de mauvaises conditions de travail.
La négociation interprofessionnelle qui est aujourd’hui en cours, n’est cependant pas parvenue à un accord sur les critères d’une réparation. Réparation pour risque avéré ou pour risque potentiel : le clivage reste ouvert.
Le thème de la prévention de la pénibilité est plus consensuel. Il rejoint la politique d’amélioration des conditions de travail. L’accord interprofessionnel du 12 mars 2007 dans la branche des accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP) a permis d’améliorer la prévention des risques professionnels. Il a notamment prévu de mettre en place un suivi de l’exposition des salariés aux risques afin d’en prévenir les manifestations néfastes pour la santé.
Le thème de la réparation oppose les partenaires sociaux. Le MEDEF propose un dispositif de réparation proche du mécanisme de l’invalidité (donc avec un examen médical individuel) ; les organisations syndicales lui préfèrent un droit collectif ouvert sur des critères d’exposition aux risques..
Une piste de solutionconsisterait à traiter la pénibilité dans le champ des risques professionnels, c’est-à-dire à la branche des accidents du tarvail et des maladies professionnelles (AT-MP). Cela permet d’articuler prévention, compensation et réparation et non traiter séparément les différents modes de prise en charge de la pénibilité.
Cette articulation permet de responsabiliser les employeurs sur les impacts des conditions de travail. Elle évite une solution de facilité consistant à faire payer par la solidarité nationale la réparation de la pénibilité
La pénibilité est liée au travail ; c’est à l’employeur de financer même si la pénibilité peut avoir des causes extérieures à l’entreprise (intempéries, par exemple).
Le lien entre prévention et réparation consiste à créer comme dans le régime des maladies professionnelles un financement incitatif à la prévention. Plus l’employeur aurait réalisé d’actions de prévention moins il aurait à fincancer.
La difficulté de la prévention réside dans la nécessite de mettre en oeuvre le reclassement des salariés avant que leur santé soit altérée), Et les procédures de reclassement sont plus difficliles à mettre en œuvre dans les PME, et encore plus dans les TPE. Le dialogue social territorial doit être utilisé pour mettre en place une gestion prévisionnelle de l’emploi dans les PME.
En conclusion, n’oublions pas que sur la longue période, les conditions de tavail ont connu de fortes améliorations sous l’impulsion notamment du droit européen. Les conditions de travail ont été considérablement améliorées grâce à la directive du 12 juin 1989 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail.
Mais la pénibilité renvoie aussi à des évolutions dans les modes d’organisation du travail ou dans les risques subis par les travailleurs : des secteurs d’emploi naissent avec de nouveaux risques (déchetterie, par exemple) ; la précarité de l’emploi aboutit à des itinéraires professionnels où des facteurs de risques peuvent se cumuler.
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Réunion du 20 décembre 2007, 12h
Audition de M. Alain Dômont, professeur de santé publique
spécialiste de médecine du travail et de santé au travail
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et M. Régis Juanico, député
M. Alain Dômont, après avoir précisé le concept de pénibilité (cf. : présentation jointe), a développé deux points.
Tout d’abord, les critères de la pénibilité sont définissables à plusieurs niveaux : ils peuvent être qualitatifs, semi-quantitatifs ou quantitatifs. Or, on ne va pas apporter les mêmes réponses selon les différents niveaux. De plus, l’évaluation clinique de la pénibilité ne sera pas la même que l’évaluation sociale. La bonne solution serait donc d’apporter une réponse individuelle tout en ayant une gestion collective et une approche transversale du problème.
Ensuite, la place de la médecine du travail dans un système plus global de prise en compte de la pénibilité est à étudier. La médecine du travail doit subir une refondation complète, que n’a pas permis la réforme de 2002 instaurant la santé au travail. La loi de 1946 portait bien sur la santé et pas uniquement sur la médecine du travail. La notion d’aptitude au poste de travail est, par exemple, inadéquate. Il ne doit pas y avoir d’automaticité dans le rôle du médecin du travail. Des bilans de capacité peuvent trouver leur sens dans le cadre du travail de nuit ou de l’aptitude des personnes handicapées mais il y a un bien un recentrage de l’action médicale à opérer. Il y a un décalage complet entre ce que préconisait la directive-cadre de 1989 et la façon dont on l’a comprise en France. La protection et la prévention sont essentielles. Cependant, on ne peut pas faire de santé sans médecin, alors que la santé au travail n’implique pas que le médecin. La surveillance de la santé pourrait passer par une visite médicale non obligatoire pour les salariés qui le souhaitent.
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Réunion du 20 décembre 2007, 15h
Audition de la FNATH, association des accidentés de la vie :
M. Arnaud de Broca, secrétaire général, et M. Karim Felissi, avocat conseil.
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et M. Jean Mallot, député
M. Arnaud de Broca a dénoncé le fait que les négociations imposées par la loi de 2003 sur les retraites et qui sont menées actuellement piétinent depuis de longs mois sans qu’aucun accord ne semble pouvoir se dessiner entre les partenaires sociaux. Il importe de déconnecter la pénibilité du seul enjeu des retraites et de réformer dans le même temps la réparation et la prévention des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) et d’améliorer le taux d’emploi des seniors.
Sur la définition de la pénibilité, il est possible techniquement et scientifiquement de trouver des critères communs (des types de contrainte, par exemple).
En ce qui concerne le financement de cette pénibilité, il doit revenir exclusivement aux entreprises notamment parce que les efforts de prévention seront réduits à néant si la solidarité nationale les prend en charge mais aussi parce que la pénibilité est générée avant tout par le travail et son organisation. Cela n’exclut pas la participation de l’Etat, mais en tant qu’Etat employeur et non pas au non de la solidarité nationale.
De plus, la prévention est l’un des enjeux essentiels. Des adaptations doivent être réalisées, notamment de la part des caisses régionales d’assurance maladie (CRAM) et des médecins du travail. Par ailleurs, il faut prendre en compte le poids du parcours professionnel et des trajectoires diverses des personnes et créer un véritable dispositif de traçabilité des salariés en ce qui concerne la santé au travail (ce qu’aurait permis le dossier médical personnel avec une partie « santé au travail »), pour mieux identifier et prévenir les situations de pénibilité pendant la vie professionnelle mais aussi après (ce qui implique aussi la mise en place d’une politique efficace de suivi post professionnel).
En ce qui concerne la compensation et les dispositifs de retraite anticipée, le dispositif mis en place pour les travailleurs de l’amiante – qui doit être amélioré - peut nous apprendre beaucoup. Il est indispensable de définir des critères généraux, tout en instaurant de façon complémentaire une analyse individuelle de la pénibilité, afin d’inclure un maximum de personnes dans le dispositif d’indemnisation. En effet, l’objectif est d’avoir un système réactif, à l’opposé de ce qui existe actuellement sur les tableaux de maladie professionnelle, dont la révision fait l’objet de longues négociations entre les partenaires sociaux.
En tout état de cause, la FNATH attire l’attention des parlementaires sur l’urgence d’une réponse à apporter en terme de cessation anticipée de l’activité pour tous les travailleurs qui sont d’ores et déjà usés par le travail, ou qui ont été exposés à des travaux pénibles.
Enfin, en ce qui concerne le taux d’emploi des seniors et des personnes handicapées, il serait utile de mieux utiliser les dispositifs qui existent déjà, relatifs notamment à la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
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Réunion du 20 décembre 2007, 16h
Audition de M. Jack Bernon, responsable du département Santé-Travail de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et M. Jean Mallot, député
1. Présentation du réseau ANACT-ARACT
M. Jack Bernon a détaillé les missions confiées à l’ANACT. L’Agence traite des questions de santé au travail, de compétences et d’organisation du travail dans les entreprises ainsi que de gestion des âges. Elle est aussi un des acteurs clefs de la prévention des risques qu’elle envisage en rapport avec le travail et ses effets sur la santé. L’un des buts de l’ANACT est de prévenir les maladies professionnelles en essayant d'agir sur les risques à effet différé (exposition à des substances chimiques, troubles musculo-squelettiques (TMS), etc.) et sur le processus qui mène à un état de santé dégradé (l’usure professionnelle ou les risques psychosociaux).
Depuis la Seconde Guerre mondiale, le système de la branche accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP) a été efficace au niveau des accidents dont le nombre a très nettement diminué, notamment le nombre d’accidents mortels alors que le nombre de déclarations de maladies professionnelles ne cesse de croître. C’est donc sur le deuxième segment qu’il faut agir, et l’étude de la pénibilité apparaît importante dans ce cadre.
Le réseau ANACT-ARACT est répandu sur l’ensemble du territoire mais dispose de ressources limitées : alors qu’il y a 7 800 médecins du travail en France, le réseau ne compte que 300 salariés, 80 à l’Agence et 220 répartis dans 25 ARACT. Compte tenu de la faiblesse de ses effectifs, il essaie de développer des modes d’actions innovants capables de rassembler de nombreuses entreprises : c’est le cas du développement d’actions collectives territoriales. La gestion du Fonds d’amélioration des conditions de travail (FACT) par l’ANACT devrait permettre de financer ces actions.
2. La définition de la pénibilité
Deux façons d’appréhender la définition de la pénibilité ont récemment été utilisées : celle du rapport d’Yves Struillou (rapport adressé au Conseil d’orientation des retraites) qui rejoint les critères développés par Gérard Lasfargues et celle plus large de l’enquête SUMER. Ces deux approches se recoupent partiellement. Les critères de la pénibilité physique sont proches. Les critères organisationnels sont déjà un peu moins en commun. Ce sont surtout les critères subjectifs qui divergent et sont les plus débattus : le rapport ne les prend pas en compte alors qu’ils sont introduits dans l’enquête.
Lorsque l’on définit la pénibilité, la question de la finalité se pose. On n’utilisera pas les mêmes critères si l’objectif est d’aboutir à de la réparation (et son corollaire la compensation) ou au contraire se placer sur le champ de la prévention.
La logique de la prévention est de faire prendre conscience que les facteurs de la pénibilité peuvent provoquer des phénomènes d’usure. En France, notre équipement pour suivre l’usure professionnelle tout au long de la vie est déficient : le séquencement entreprise par entreprise des parcours professionnels nuit à la traçabilité des pénibilités. Plusieurs problèmes se posent : il faut distinguer, en fin de parcours professionnel, le phénomène naturel de vieillissement de celui induit par les pénibilités subies lors des parcours, il faut aussi prendre en compte l’effet différé de certaines pénibilités (cas des TMS, par exemple). Enfin, le ressenti de la pénibilité est difficile à appréhender, des situations peuvent être vécues comme pénibles par certaines personnes et pas par d’autres.
3. Modalités d’intervention en entreprise sur la pénibilité
Le réseau ANACT-ARACT a réalisé une centaine d’interventions en entreprise en 2007 sur le sujet de la pénibilité, selon trois dimensions : la gestion et la compensation de la pénibilité : l’usure avérée ; l’accompagnement a priori (on assiste alors à une articulation des approches individuelle et collective).
Le schéma d’intervention utilisé par le réseau ANACT-ARACT est le suivant. Tout d’abord, précisons que le réseau n’intervient qu’à la demande de l’entreprise ou de la branche professionnelle. L’intervention porte sur la mobilisation des acteurs, la compréhension du travail et l’analyse de données. Cette analyse de données consiste en un croisement de phénomènes en lien avec la santé (absentéisme, accidents, maladies, etc.) et des indicateurs de la production. On étudie également la démographie du travail : structure d’âge de la population, ancienneté, etc. Pour chaque entreprise, l’intervenant recherche avec les acteurs une définition propre de la pénibilité admise de manière à pouvoir ensuite engager les actions de prévention : installation durable de la prévention, amélioration de certaines installations, gestion du parcours professionnel, valorisation des atouts de l’expérience, place des acteurs dans le suivi des actions de prévention, etc. L’intervention passe ainsi par un dialogue social, notamment avec les représentants du personnel qui siègent au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
Sur les aspects relatifs aux risques psychosociaux, en 2007, l’ANACT a publié un ouvrage. Parmi les interventions sur ce thème, on note des différences sur l’origine des demandes : par exemple, le secteur privé appelle l’ANACT davantage sur des questions de stress et le secteur public davantage sur des questions relationnelles, parfois violentes, en particulier avec le public. Pour conduire les investigations dans le milieu du travail le réseau a recours au concept de « tensions–régulation » qui l’aide à diagnostiquer les origines des risques au sein des organisations en place.
Sont joints à la synthèse le document de l’ANACT « mettre le travail au coeur du changement » et la note sur « la gestion sociale de la pénibilité » établie par Mme Céline Roux, chargée de mission de l’ANACT. En annexe 10 du rapport d’information est également reproduite la note établie par l’ANACT pour la rencontre interprofessionnelle du 3 mai 2007 intitulée « la prévention de la pénibilité, état des lieux ».
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Réunion du 20 décembre 2007, 17h
Audition de M. Thierry Debrand, chercheur à l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, M. Jean Mallot, député
M. Thierry Debrand a remarqué que le contexte démographique européen, dans lequel on étudie le concept de pénibilité, est particulier. La population vieillit, le taux de natalité diminue (bien qu’en France ce phénomène soit moins marqué), et le « papy-boom » pèse sur l’équilibre des régimes de retraite. Or on pensait que la modification des processus productifs allait en faire diminuer la pénibilité, qui, en fait, s’est transformée mais n’a pas disparue.
Le premier enjeu est de définir la notion de pénibilité qui est complexe parce qu’il s’agit de la rencontre entre un individu et son emploi (même s’il y a des travaux ouvertement pénibles). De plus, cette notion doit aussi être étudiée dans le temps ;. Par exemple, les horaires atypiques n’ont pas de conséquence s’ils sont très peu fréquent, c’est leur répétition qui peut porter atteinte à la santé. De plus, certains facteurs de la pénibilité sont difficiles à analyser. C’est le cas du stress, qui est certainement le facteur le plus important de pénibilité au travail. Aujourd’hui, le travail est moins pénible physiquement mais, plus psychologiquement, l’incertitude de pouvoir garder son travail et le manque de reconnaissance au sein de l’entreprise peuvent être des facteurs importants de pénibilité. Une étude réalisée au sujet du recours à la médecine de ville est très éclairante ; 8 % des consultations sont liées aux conditions de travail, soit, avec un calcul rapide, approximativement 15 à 20 millions de consultations par an. Sultan-Taieb et Béjéan (2007) de l’Université de Dijon ont estimé à 1 à 2 milliards d’euros les dépenses liées au stress, et Dorman (2000) estime que les coût économiques liés aux conditions de travail dans les pays développés se situent entre 2 et 4 % du PIB.. On estime à 6,6 milliards d’euros le coût des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) en France, bien qu’il soit assez mal évalué. En effet, les AT-MP ont des répercussions en termes de productivité et en termes d’espérance de vie, qui n’entrent pas dans ce calcul.
La question de la pénibilité va au-delà de la seule santé, elle touche aussi les retraites. En France, il semble exister une substitution des arrêts maladies longue durée aux préretraites, qui ont été très utilisées dans le passé et qui sont aujourd’hui fortement critiquées. Or, le déterminant de l’aspiration à la retraite est le fait de se sentir reconnu dans l’entreprise, plus que le niveau du salaire.
Aujourd’hui, le monde de l’entreprise n’attache pas assez d’importance à la pénibilité, qui représente pourtant un vrai coût. Par exemple, on comptabilise dix jours de RTT par salarié et par an, contre onze jours d’arrêt maladie en moyenne. Or sur ces onze jours, nombre sont directement liés à la santé au travail. Il importe donc qu’une prise de conscience générale ait lieu. L’exemple des infirmières à l’hôpital est ici illustratif. Le « turnover » des infirmières est très important. S’il existe un problème de recrutement, c’est aussi parce que leur niveau de salaire et la reconnaissance de leur métier n’sont pas suffisant et n’est pas proportionnel au degré de pénibilité subi.
Les entreprises doivent prendre conscience que la pénibilité est, pour elles, un réel enjeu, alors qu’actuellement elles calculent peu les coûts indirects qui sont liés à la pénibilité. Aux États-Unis, par exemple, ces calculs existent car l’entreprise paye pour l’assurance de ses salariés. En France, on pourrait développer le concept d’« entreprise rationnelle » afin de démontrer aux entreprises qu’il peut être rentable d’avoir une politique plus active sur la pénibilité.
Enfin, il importe de ne pas apporter que des réponses systématiques et collectives, qui ne prendraient pas en compte les situations individuelles. Ces politiques ont de forts effets pervers et sont faciles à détourner. Les entreprises doivent aussi avoir une part de responsabilité.
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Réunion du 9 janvier 2008, 16h15
Audition de M. Franck Héas, maître de conférences à la faculté de droit et de sciences politiques de l’Université de Nantes
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et MM. Jean-Claude Leteurtre et Jean Mallot, députés.
M. Franck Héas a précisé que son approche était celle d’un juriste spécialisé en droit du travail. C’est la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites qui a donné un relief particulier à la pénibilité en en faisant un « objet de dialogue social », d’où l’intérêt de donner une définition juridique de cette notion, apparue dans les années 1960.
En droit, la pénibilité n’est pas un concept clairement établi, d’où l’importance de dresser un état des lieux, ce qu’il s’est appliqué à faire dans deux articles (cf. son premier article remis aux membres de la mission: « La définition juridique de la pénibilité au travail » in Travail et emploi, n° 104, octobre-décembre 2005 reproduit ci-après). On s’aperçoit que la diversité des acceptions est totale, que ce soit au niveau de la loi, de la jurisprudence ou des négociations menées par les partenaires sociaux. Il existe plusieurs types de situations pénibles : l’exposition aux intempéries, le port d’équipements de sécurité, les travaux soumis à une aptitude physique particulière, etc.
On peut, pour tenter d’établir le concept, partir d’une définition large : est pénible ce qui est contraignant et difficile à supporter. Plusieurs critères aident ensuite à préciser la définition. Tout d’abord, la pénibilité est liée à l’environnement et aux conditions de travail. Il s’agit alors d’étudier la situation concrète de l’individu avec des critères dits « objectifs » : port de charges lourdes, travail posté, etc. Ensuite, des critères plus « subjectifs » concernent la personne même du travailleur, notamment sa perception de ses conditions de travail. Deux individus n’appréhendent pas une situation identique de la même manière.
Dans ce contexte, la pénibilité doit être différenciée d’autres concepts ayant une signification proche, à savoir les travaux dangereux et le risque au travail. Le danger, tout d’abord, résulte d’une dégradation de l’état de santé uniquement si le risque professionnel se réalise, alors que la pénibilité a pour conséquence une dégradation inéluctable et irréversible. Le risque au travail, ensuite, ne touche la santé du salarié qu’en cas de réalisation d’un aléa futur incertain ; il impose alors une démarche de prévention pour éviter qu’il ne se réalise.
In fine, la pénibilité se définit comme « une situation de travail difficile et contraignante entraînant une dégradation de son état de santé pour celui qui fournit la prestation ». De cette définition découle l’importance du rôle du médecin du travail, à qui pourrait revenir la mise en place d’un curriculum doloris : en effet, le médecin du travail est, selon la loi, chargé de la surveillance médicale des salariés.
Le but de la réflexion menée est bien de construire une définition juridique autonome du concept de pénibilité, même si elle peut recouper des notions déjà existantes telles que l’inaptitude, l’invalidité, les maladies professionnelles ou encore le stress. Une fois cette définition inscrite de façon générale dans la loi, elle peut donner lieu à des négociations interprofessionnelles puis de branche. L’objectif final de la définition juridique est bien la compensation pour les travailleurs en situation de travail pénible.
Cependant, une telle définition pose plusieurs problèmes. Il importe tout d’abord de redéfinir les missions du médecin du travail au regard d’éventuels mécanismes de compensation de la pénibilité. Le recours au médecin a pour conséquence une individualisation de la problématique qui est parfois contestée par les syndicats. Ensuite, cette définition pourrait aboutir à une discrimination parce que l’employeur chercherait à employer les personnes les plus résistantes à un travail pénible. Enfin, se pose le problème de la contradiction avec l’obligation de sécurité défendue dans le code du travail. En effet, selon la jurisprudence cette exigence correspond à une obligation de résultat.
Or , la définition proposée suppose une « dégradation mécanique » de la santé de la personne en situation de travail pénible, ce qui signifie que l’on admet que le travail dégrade la santé et ainsi que l’employeur ne respecte pas l’obligation de sécurité inscrite dans le code du travail. Le même code impose d’ailleurs également aux salariés de veiller à respecter individuellement l’obligation de sécurité. Les conséquences d’une telle définition de la pénibilité paraissent donc aujourd’hui difficilement conciliables avec le principe de l’obligation de sécurité, ce qui pourrait, à l’extrême, aboutir à une absence de cause du contrat de travail en cas d’activité pénible.
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Travail et Emploi n° 104 • Octobre-décembre 2005
La définition juridique de la pénibilité au travail
Franck Héas (2)
Alors que le législateur de 2003 a fait de la pénibilité au travail un objet du dialogue social, la notion ne bénéficie pas d’un régime juridique établi et encore moins d’une définition admise en droit du travail. Si l’on peut considérer le travail pénible comme celui qui est difficile à supporter, les acceptions de la notion demeurent très éparses, tant dans la loi qu’en jurisprudence. À partir du droit positif, le présent article tente donc de proposer des critères spécifiques au concept de pénibilité et aboutit à deux éléments constitutifs : celui lié aux conditions de travail et celui lié à la personne du salarié (le dommage sur sa santé). Le premier est lié aux conditions concrètes et objectives dans lesquelles est fournie la prestation de travail, le second aux conséquences néfastes que l’activité professionnelle peut avoir à plus ou moins long terme sur la santé des individus. En dehors du risque professionnel, la pénibilité se caractériserait par une sorte d’usure du salarié du fait des conditions particulières de travail. Dès lors, la définition juridique de la notion de pénibilité impliquerait une appréciation subjective, nécessitant de prendre en compte les incidences du milieu du travail sur les situations individuelles, ce qui justifie l’implication croissante des partenaires sociaux.
Lors des débats relatifs à la refonte du système de retraite français, le thème de la pénibilité a été abordé. À cet égard, la loi du 21 août 2003 (article 12) portant réforme des retraites (3) a imposé la pénibilité au travail comme un objet du dialogue social. Les discussions entre partenaires sociaux, qui doivent avoir lieu au moins tous les trois ans, devront notamment porter sur la notion même de pénibilité, concept flou qui demeure également « un phénomène mal connu, difficilement quantifiable et très variable selon les métiers et les branches » (LECLERC, 2004). Toute la difficulté est alors de disposer d’une définition claire, précise et univoque : si la pénibilité doit faire l’objet de négociations, il convient préalablement de s’accorder sur le contenu de la notion.
Sur un strict plan juridique, cette notion de pénibilité au travail reste en effet à construire. Nos propos s’inscrivent modestement dans cette réflexion relative aux travaux pénibles : l’objectif est de contribuer au débat et à la construction du concept, sans prétendre à la découverte d’une théorie juridique de la pénibilité au travail.
De manière exploratoire et dans une approche exclusivement juridique (4), les présents développements visent donc à cerner plus précisément cette notion et, à partir des différents aspects de la pénibilité, d’en dégager une définition applicable en droit du travail (5). En se basant sur les sources du droit du travail (loi, conventions collectives et jurisprudence), nous dégagerons les différentes acceptions du terme pour proposer des critères du concept de pénibilité au travail. La tâche n’est pas aisée pour plusieurs raisons. En premier lieu, le concept ne ressort nullement d’un régime juridique précis tant les acceptions du terme de pénibilité en droit du travail sont éparses (sans pour autant être nombreuses). En second lieu, la détermination de ce que pourrait être une pénibilité varie en fonction de la perception et de la résistance du salarié aux contraintes de son environnement de travail. À cet égard, le caractère contraignant des conditions de travail est fonction des individus, des tâches exercées, du niveau de rémunération, de la taille de l’entreprise, du secteur d’activité ou du statut de l’intéressé notamment (6). Enfin, la technologie et les procédés évoluant, la notion de pénibilité représente un concept mouvant (7) qui fluctue avec les améliorations apportées au milieu professionnel et les nouvelles formes de pénibilité qui peuvent apparaître (rythme de travail, stress, variation des horaires, pressions liées aux résultats, harcèlement, etc.) (cf. CASTEL, 1995 ; DEJOURS, 1998 ; PAUGAM, 2000 ; Documents pour le médecin du travail, 2000 ; MAGGI-GERMAIN, 2003 ; Droit ouvrier, 2002 ; Travail et emploi, 2004, no 97 ; SSL, 2004). À ce titre, nous pouvons rappeler que la loi de modernisation sociale de 2002 (8) a inclus à l’article L. 236-2 du Code du travail le concept de santé mentale à côté de celui de santé physique (LEROUGE, 2004).
Même si le concept de travail est lié aux notions de souffrance et d’effort et si les premières lois dites « sociales » du XIXe siècle visaient à la protection d’une partie de la main-d’oeuvre contre des conditions de travail susceptibles d’altérer leur santé ou leur état physique, le travail n’est pas uniquement la pénibilité. Dérivé du mot peine, le vocable de pénibilité est apparu récemment dans le vocabulaire, son usage s’étant répandu dans les années 1960. Construit à partir de l’adjectif pénible, le terme renvoie notamment, dans un sens familier, à ce qui est « difficile à supporter » et qui nécessite par conséquent des efforts dans l’accomplissement de la prestation. Dans ce cadre, le travail pénible est un travail astreignant, contraignant, susceptible de causer de la souffrance ou de la douleur à son auteur et d’occasionner des désagréments |
En dépit de ces complications, le travail pénible, entendu comme celui qui est difficile à supporter, doit demeurer autonome sur le plan juridique et désigner une notion caractéristique en droit du travail. C’est à cet objectif que s’attachent les présents développements. Il convient donc d’emblée d’établir la distinction avec d’autres notions juridiques voisines.
À ce titre les travaux dangereux, récurrents en droit du travail, désignent un concept particulier qui doit être distingué de celui de pénibilité (BANCE, 1978). Sans prétendre à l’exhaustivité, nous pouvons rappeler que le plan particulier de sécurité et de protection de la santé (9) doit notamment prendre en compte et mentionner les travaux dangereux, c’est-à-dire ceux qui peuvent « avoir une incidence particulière sur la sécurité et la santé des travailleurs (10) ». Pareillement, des travaux sont dangereux pour les femmes et les personnes de moins de dix-huit ans (11) et plusieurs activités leur sont donc proscrites (12). En outre, le Code du travail mentionne également les dangers susceptibles d’être provoqués par des activités spécifiques telles l’exploitation minière (13) ou le travail à domicile (14). Des substances ou préparations peuvent aussi être qualifiées de dangereuses pour les salariés (15) comme les éléments explosibles, inflammables, toxiques, nocifs, corrosifs, irritants ou encore cancérogènes (16).
Il en résulte que les travaux dangereux apparaissent en fonction de circonstances particulières. Ainsi, dans les mines et carrières, les emplois dangereux auxquels il est interdit d’affecter les personnes de moins de dix-huit ans sont ceux qui exposent leurs auteurs « à des dangers caractérisés en raison du fonctionnement de certains engins mécaniques ou de la mise en oeuvre de certaines méthodes d’exploitation (17) ». Dans d’autres hypothèses, la notion de travail dangereux peut être davantage explicitée. C’est notamment le cas lorsque les travaux en question font l’objet d’une liste préétablie. Par exemple, deux arrêtés (18) déterminent les travaux dangereux pour lesquels il est interdit de recruter en intérim (19) ou en contrat de travail à durée déterminée (20) : il s’agit notamment des activités exposant au fluor gazeux, au tétrachlorométhane ou à l’arsénite de sodium.
Cette énumération, proche d’un inventaire à la Prévert, recouvre des situations objectivement dangereuses. Il s’agit toujours de circonstances spéciales et particulières, dans lesquelles il est considéré que la réalisation d’un risque professionnel est hautement probable. À ce titre, de telles activités sont marquées du sceau de la dangerosité. Dans cette analyse, les travaux explicitement dangereux pourraient désigner les activités susceptibles de causer un accident du travail ou une maladie professionnelle. Les travaux pénibles désignent des situations de travail différentes, l’altération de la santé du salarié étant irrémédiable, sans qu’il y ait nécessairement une probabilité forte qu’un risque professionnel se réalise.
Distincts des travaux dangereux, les travaux pénibles ne recouvrent pas davantage la notion de risque (BABIN, 2003 ; HÉAS, 2004). Juridiquement, le risque désigne un événement futur, plus ou moins certain (donc éventuel), susceptible de causer un préjudice à celui qui fournit une prestation de travail pour autrui (CORNU, 2005). Ainsi, en cas de « risques sérieux d’atteinte à la santé ou à l’intégrité physique ou morale de l’apprenti », l’administration du travail peut suspendre le contrat d’apprentissage (21).
De même, le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut recourir à un expert « lorsqu’un risque grave, révélé ou non par un accident du travail ou une maladie professionnelle » existe dans l’établissement (22). Au-delà de ces exemples, il apparaît que le risque en entreprise se caractérise par l’aléa, alors que nous pourrons démontrer que la pénibilité aboutit de manière certaine à l’altération de la santé du salarié (23).
Enfin, en droit de la fonction publique, la notion d’emploi actif peut également apparaître proche de celle de pénibilité. Le Code des pensions civiles et militaires prévoit que la liquidation de la pension de retraite peut intervenir de manière anticipée, dès lors que l’intéressé a exercé ses fonctions, pendant une certaine période, dans des emplois classés dans la catégorie active. Il s’agit d’« emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles (24) ».
De la même manière, le statut national du personnel des industries électriques et gazières (25) envisageait originellement la classification des emplois en trois catégories selon le degré de contrainte des postes (26), chaque catégorie impliquant des droits à la retraite différents. Outre les services sédentaires qui n’imposaient aucune sujétion particulière, les périodes effectuées en services dits « actifs » étaient majorées de deux mois par année, alors que les temps d’affectation à un service « insalubre » étaient majorés de quatre mois par année pour le calcul de la durée de cotisation. Les agents étaient considérés en services insalubres dès lors qu’ils étaient « appelés à exercer une fonction dans des conditions telles qu’il puisse en résulter pour eux une altération immédiate ou lointaine de leur santé (27) ». En revanche, les services actifs désignaient « les emplois qui requièrent, de la part des agents qui les exercent, une dépense physique importante, ou qui exposent les agents aux intempéries, ou qui comportent des conditions de travail pénibles (28) ».
D’autres bases de réflexion existent en droit positif pour approcher la notion de pénibilité en droit du travail. Ainsi, toujours en droit de la fonction publique, des primes et indemnités peuvent être attribuées aux agents soumis à des sujétions spéciales, afin de compenser les contraintes subies et les risques encourus dans l’exercice de leurs fonctions. Ce dispositif bénéficie par exemple aux individus exerçant des fonctions essentiellement itinérantes dans des services déconcentrés (29). Des indemnités peuvent également être allouées aux personnels chargés d’effectuer des travaux insalubres, salissants, ou dont l’exécution comporte certains risques (dangerosité) ou incommodités (30). Les dispositifs sont toujours dégagés au cas par cas, au regard de la situation concrète des individus. Au-delà des circonstances particulières dans lesquelles peuvent apparaître la dangerosité, le risque ou les difficultés liées à la prestation de travail, ce type d’activité nécessite et impose à leur exécutant une attention, une concentration, un soin ou des modes opératoires spécifiques, c’est-à-dire des efforts physiques ou mentaux importants. De tels postes de travail entraînent donc des sujétions et des contraintes pour ceux qui les occupent. De ce point de vue, il pourrait s’agir de travaux présentant une certaine forme de pénibilité.
En droit du travail, la tentative de cerner précisément la notion de pénibilité n’est pas davantage aisée. Néanmoins, il convient préalablement de proposer des indicateurs possibles de la pénibilité au travail avant de pouvoir suggérer et avancer une définition juridique du concept.
Les indicateurs possibles de la pénibilité au travail
Ne disposant pas à ce stade de réflexion, d’une définition juridique précise de la pénibilité, nous la considérons simplement comme la difficulté à supporter une prestation de travail. À partir de cet angle large d’analyse, les indicateurs de la pénibilité au travail peuvent être nombreux. Distinct des travaux dangereux, de la notion de risque ou d’autres acceptions proches en droit de la fonction publique, le concept de pénibilité doit pourtant être appréhendé de façon spécifique. Le Code du travail mentionne en effet plusieurs situations précises qui pourraient a priori illustrer une forme de pénibilité. C’est en raison de cette diversité que l’intervention des partenaires sociaux peut sembler pertinente dans le cadre de la négociation collective.
Les illustrations possibles d’une forme de pénibilité au travail
Si l’on considère en droit du travail le concept de façon extensive, entendu comme la difficulté ou la contrainte à occuper un emploi, un certain nombre d’outils ou de mécanismes juridiques existent, qui pourraient constituer des indicateurs éventuels d’une pénibilité au travail.
Dans le cadre de l’obligation générale de prévention, l’article L. 230-2 du Code du travail impose notamment à l’employeur d’évaluer les risques. À ce titre, s’agissant des activités susceptibles de présenter des risques d’exposition à des agents biologiques, l’employeur doit par exemple « déterminer la nature, la durée et les conditions de l’exposition des travailleurs » à ce type d’activité (31). Cette démarche d’analyse est effectuée au regard du classement des agents biologiques selon l’importance du risque d’infection et le danger potentiel qu’ils représentent pour les travailleurs (32). Les dispositifs de connaissance du temps et du degré d’exposition ou de contact du salarié avec des produits nocifs existent en matière de prévention des risques biologiques. Ils pourraient être activés pour établir ou constituer un indice du niveau de pénibilité des activités professionnelles concernées.
Le décret du 5 novembre 2001 instituant le document unique relatif à l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs (33) représente une étape essentielle dans le processus d’évaluation a priori des risques au sein des entreprises. Plus largement, le texte doit inciter à une démarche de connaissance et de ciblage des contraintes liées à l’environnement de travail. Il s’agit pour tout employeur de procéder préventivement à une « analyse des modalités d’exposition des salariés à des dangers ou à des facteurs de risques ». Cette évaluation doit alors prendre en compte les « situations concrètes de travail (34) ». En raison de leur caractère impérativement exhaustif, les indications et informations contenues dans le document unique de sécurité (35) pourraient être mobilisées pour déterminer les travaux exposant leurs auteurs à une forme de pénibilité. En effet, il est plus aisé avec un tel document d’établir pour un métier, une entreprise ou un secteur d’activité, des fonctions présentant des sujétions, contraintes ou désagréments caractéristiques d’un travail pénible.
Un autre indicateur possible de la pénibilité au travail pourrait être les cadences et rythmes de travail. Selon l’article L. 231-3-3 du Code du travail, les partenaires sociaux peuvent organiser par branche d’activité « les cadences et les rythmes de travail lorsqu’ils sont de nature à affecter l’hygiène et la sécurité des travailleurs ». Ce cadre juridique pourrait permettre aux organisations de salariés et d’employeurs d’engager des négociations sur les activités considérées comme pénibles afin d’en aménager les conditions de travail. Il pourrait, par exemple, s’agir des travaux pour lesquels des équipements individuels de sécurité sont indispensables (36) ou des activités susceptibles d’être soumises aux intempéries (37).
De même, l’employeur a l’obligation d’établir la liste des postes au sein de l’entreprise qui nécessitent une formation renforcée à la sécurité pour les salariés engagés en contrat à durée déterminée ou en intérim (38). À travers cette exigence, est admise l’idée selon laquelle certaines activités peuvent donc présenter des contraintes, exigences ou suggestions particulières de telle sorte que des personnes, présentes temporairement dans l’entreprise, ne pourront y être affectées sans préalable.
Au final, il ressort que les conditions dans lesquelles est accomplie la prestation de travail peuvent, par le biais de facteurs divers, renseigner de façon fi able sur le « degré de pénibilité de chaque profession (39) ». Le concept recouvre donc une notion protéïforme que le droit conventionnel appréhende également.
L’apport du droit conventionnel
Le Parlement n’a pas directement légiféré sur la question de la pénibilité au travail en matière de retraite. Lors des débats parlementaires, le ministre en charge du travail avait souligné que les partenaires sociaux devront « définir les métiers pénibles, la manière d’en diminuer le nombre et, pour ceux qui le demeureront, la manière d’accorder des bonifications ou des départs anticipés (40) ». La loi d’août 2003 a donc prévu que la pénibilité fera l’objet de discussions entre partenaires sociaux (41), plus à même d’appréhender les situations concrètes et individuelles de travail pénible. Ainsi, en février 2005, une négociation interprofessionnelle a été initiée au niveau national sur le sujet. Une approche individualisée, ou du moins segmentée de la pénibilité au travail doit être privilégiée. Sans dédouaner complètement les pouvoirs publics, l’intervention des partenaires sociaux est en effet nécessaire et légitime pour définir et mesurer le degré de pénibilité, voire hiérarchiser les activités pénibles susceptibles d’être fournies par les salariés. À cet égard, la pénibilité au travail est déjà un thème de la négociation collective dans certaines entreprises. Par exemple au sein du groupe Peugeot Citroën, un accord du 25 avril 2003 prévoit des compensations financières liées aux conditions de travail, lorsque survient une diminution de la prime indemnisant les contraintes spéciales de certains emplois (horaires, postes, salubrité) (42). C’est admettre que certaines situations professionnelles présentent des contraintes et des désagréments qu’il est possible de compenser sur le plan financier. Cette démarche est ancienne dans l’entreprise puisqu’un accord de 1973 prévoyait déjà des compensations pécuniaires lorsque le salarié (souvent en fi n de carrière) était muté d’un « poste pénible » à un « poste plus léger » (43). De même, dans les industries chimiques, les partenaires sociaux se sont impliqués dans une démarche de prise en compte des conditions de travail et des aléas susceptibles d’en découler. Des droits spécifiques ont pu être attribués aux personnes soumises, lors de l’exécution du travail, à des sujétions spéciales (44). Pareillement, la convention de travail du commissariat à l’énergie atomique du 19 mai 1982 prévoyait que cinq années passées en service posté ou en travail pénible au CEA permettaient d’abaisser l’âge de départ en retraite des candidats d’un an. Depuis le milieu des années soixante-dix, la notion de travail pénible est donc fréquente dans les conventions collectives (BANCE, art. cit., p. 172). Dans plusieurs secteurs d’activité, les négociations des partenaires sociaux ont pu porter sur la prise en compte de la pénibilité (45), pour en supprimer les effets (46) ou la compenser par des primes (47).
Il est donc possible aux organisations représentatives des employeurs et des salariés de lister par secteur d’activité, les emplois, tâches ou fonctions relevant de la catégorie des travaux pénibles : la pénibilité peut varier d’une branche professionnelle à une autre et d’une entreprise à une autre.
Par-delà les indicateurs possibles du travail pénible, le concept de pénibilité désigne une notion juridique complexe et peut recouvrir des mécanismes juridiques variés qui sont autant d’illustrations d’une certaine forme de pénibilité. C’est pourquoi des critères précis (48), constitutifs d’une pénibilité au travail doivent être avancés sur le plan juridique.
L’acception juridique de la pénibilité au travail
Les frontières du concept étant posées, il s’agit à présent de rationaliser la notion de pénibilité pour en proposer une définition juridique. À cet égard, même si elles sont peu nombreuses, les acceptions du terme de pénibilité existent en droit du travail. Il s’agit toujours de situations de travail précises, ce qui peut donc permettre de proposer des critères spécifiques de la notion de pénibilité.
Les utilisations de la notion en droit du travail
Très peu usitée par le législateur, la notion de pénibilité n’est pas davantage établie en jurisprudence.
• Dans le Code du travail, les occurrences du terme de pénibilité sont peu nombreuses. De façon isolée, l’article L. 133-5 dispose que la convention de branche peut prévoir des majorations de salaire pour les travaux physiquement ou nerveusement pénibles. Toutefois, une telle convention ne peut instituer une rémunération au rendement pour les « travaux dangereux, pénibles ou insalubres » (49). De même, selon l’article R. 231-68 du Code du travail, la mise à disposition des salariés d’aides mécaniques ou d’accessoires de préhension peut permettre de rendre la tâche de manutention manuelle « plus sûre et moins pénible ». Par ailleurs, l’article D. 432-1 du Code du travail mentionne de façon explicite un facteur possible de pénibilité constitué par « le caractère répétitif des tâches ». Enfin, l’article R. 211-3 du Code du travail relatif à l’emploi des enfants contient également une acception du terme de pénibilité. Tout en interdisant de les employer à des travaux causant une fatigue anormale, ce texte exclut également « les travaux répétitifs ou exécutés dans une ambiance ou à un rythme qui leur confère une pénibilité caractérisée ».
De surcroît, sans que le terme ne soit expressément inscrit dans la lettre du texte, il est possible de considérer que le Code du travail fait référence à une forme de pénibilité à propos des travaux qu’il est interdit de confier aux personnes de moins de dix-huit ans dans les mines et carrières. Il s’agit d’« emplois ou de postes de travail exigeant des aptitudes physiques particulières ou comportant pour les intéressés ou pour les autres travailleurs des risques nécessitant une prudence et une attention soutenue » (50). Ces situations pouvant occasionner des difficultés à supporter la prestation de travail, il pourrait aussi s’agir de travaux pénibles.
Plus directement, le dispositif de cessation anticipée d’activité au bénéfice de certains travailleurs salariés (CATS) est une mesure permettant, dans un cadre conventionnel précis (51), de suspendre le contrat de travail à partir d’un certain âge et d’indemniser des catégories de travailleurs (52). Il s’agit de personnes ayant travaillé dans des conditions pénibles, c’est-à-dire en équipes successives, à la chaîne, de nuit ou bénéficiant de la qualité de travailleur handicapé (53). Plusieurs secteurs d’activité ont mis en place un tel dispositif afin de limiter les difficultés d’adaptation de ces personnels à l’évolution des emplois (54).
• En jurisprudence, la Cour de cassation fait référence à la notion de pénibilité ou à celle de travaux pénibles sans véritable ligne directrice. Il n’existe aucune approche globale du concept, la notion étant évoquée selon les requêtes des plaignants. Ainsi, c’est par le biais de plusieurs éléments de la relation professionnelle que les juges peuvent être amenés à évoquer ou recourir à la notion de pénibilité. Globalement, le concept demeure toutefois lié à l’environnement de travail et aux conditions dans lesquelles le travailleur subordonné fournit sa prestation. Ainsi, postérieurement à la réalisation d’un risque professionnel, le médecin du travail peut déclarer un salarié apte à la reprise, tout en limitant les charges et postures pénibles (55). À l’inverse, en cas d’avis médical d’inaptitude, l’employeur doit proposer au salarié inapte un poste de reclassement présentant une pénibilité physique inférieure à celle du poste précédent (56). De même, les circonstances pénibles de travail peuvent être à l’origine d’un accident du travail (57).
La pénibilité a pu également être caractérisée lors d’un transfert de lieu de travail de Fontainebleau à Melun (58), ce qui augmentait le temps de trajet du personnel : selon l’arrêt de la cour d’appel cassé en l’espèce, les salariés plaignants habitant tous à proximité de l’ancien lieu de travail, « la mutation rendait plus pénibles leurs conditions de travail (59) ». Dans certaines espèces, la Cour de cassation est davantage explicite sur la notion de pénibilité. Ainsi, se référant toujours aux conditions de travail, la Chambre sociale a pu qualifier de travail pénible un labeur exécuté en position débout, rendant obligatoire le port du casque, imposant des manutentions manuelles et nécessitant pour les salariés la prise d’une collation supplémentaire (60).
La pénibilité peut également apparaître dans des contentieux liés à l’égalité de rémunération entre hommes et femmes. En l’espèce, pour justifier des différences de salaire dans l’entreprise, l’employeur arguait que les manutentionnaires masculins procédaient à des travaux de chargement et déchargement, qu’ils portaient des charges lourdes et pouvaient travailler la nuit : leur travail était alors qualifié de pénible. À l’inverse, les manutentionnaires féminines étaient exclusivement affectées au tri des champignons. Pour la Cour de cassation, « le caractère pénible des tâches accomplies » ne pouvait justifier les différences de traitement (61).
Au-delà de l’environnement de travail, la pénibilité est également, en jurisprudence, une caractéristique inhérente à la personne du salarié. Dans un contentieux qui a donné lieu à cassation, la cour d’appel avait relevé que des travaux occasionnels de construction d’une villa pouvaient être qualifiés de pénibles, dès lors qu’ils avaient été effectués par un salarié en arrêt maladie suite à un accident du travail et souffrant d’une lombalgie aiguë (62). En l’espèce, la pénibilité était retenue au regard de la situation individuelle et de l’état de santé d’une personne, dont les aptitudes physiques étaient vraisemblablement réduites.
Dans le même sens, la Loi de modernisation sociale (63) a prévu que les personnes atteintes d’une incapacité inférieure à 80 % peuvent bénéficier d’une carte spéciale portant la mention « station debout pénible ». Dans sa rédaction antérieure à la Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (64), l’article L. 241-3-1 du Code de l’action sociale et des familles précisait à cet égard, que le document était délivré en raison de « la réduction importante de la capacité et de l’autonomie de déplacement à pied » de l’intéressé. Dorénavant, cette carte d’invalidité permet d’obtenir « une priorité d’accès aux places assises dans les transports en commun et dans les espaces et les files d’attente, ainsi que dans les établissements et les manifestations accueillant du public ». De manière identique, les qualités et aptitudes de l’individu sont donc prises en compte pour apprécier la pénibilité. Il s’agit toujours d’un état relatif.
Il en ressort qu’en droit positif, la pénibilité est liée aux conditions de travail, à la dégradation de la santé des travailleurs qui peut en résulter et donc, à l’espérance de vie des personnes. Même si les implications sont nombreuses, il est fait recours à la notion de pénibilité de façon parcellaire et variée en droit du travail.
Les critères de la notion en droit du travail
En raison de l’utilisation de la notion dans des hypothèses limitées, nous pensons que la pénibilité renvoie à des situations particulières de travail. Ainsi, la pénibilité peut être liée aux conditions concrètes de fourniture de la prestation de travail ou apparaître postérieurement eu égard aux conséquences néfastes qu’une activité professionnelle peut avoir à plus ou moins long terme sur la santé des individus. À ce titre, la pénibilité n’est pas exclusivement liée aux conditions objectives de travail. Le concept se caractérise aussi par un élément subjectif, lié à la situation individuelle de la personne fournissant sa prestation de travail dans un tel environnement.
À l’inverse (65), les travaux dangereux et/ou risqués (66) illustrent une situation instantanée, constituée par un environnement de travail caractérisé par une dangerosité manifeste ou un risque réel. Plus spécifiquement, la pénibilité est également liée à la situation de l’individu qui fournit sa prestation de travail : son état de santé serait, de manière quasi irrémédiable, susceptible d’être altéré. Le travail dangereux et/ou risqué n’entraîne pas nécessairement la réalisation d’un risque professionnel. Cette situation est alors envisagée objectivement en tant que telle. Différemment, le travail pénible entraînerait, à plus ou moins long terme, une dégradation de l’état de santé du salarié. C’est donc de manière subjective, eu égard à la situation de l’intéressé, que le droit du travail entendrait la situation pénible. Le travail dangereux et/ou risqué est apprécié concrètement pour ce qu’il est. Le travail pénible impliquerait une appréciation subjective, en tenant compte des incidences du milieu du travail sur la santé de la personne. La distinction de la dangerosité et de la pénibilité apparaîtrait donc dans les effets du travail fourni sur la personne. La pénibilité devrait donc être considérée comme une conséquence des conditions de travail (67) et être appréciée in concreto.
Cette observation appelle trois remarques. En premier lieu, la définition de la pénibilité au regard d’un critère subjectif pourrait induire des effets pervers. Il est en effet à craindre que, lors du recrutement, l’employeur tente d’apprécier la réceptivité du candidat à son environnement et aux conditions de travail. Une telle démarche pourrait alors être source de discriminations à l’endroit de personnes. En effet, il serait difficile de ne pas recourir à des critères tels le sexe, l’âge, l’état de santé ou les caractéristiques génétiques ce que l’article L. 122-45 du Code du travail proscrit expressément. En second lieu, le critère subjectif de la pénibilité impliquerait que le médecin du travail soit pleinement associé à la détermination des situations professionnelles considérées comme pénibles. Le praticien est essentiellement compétent dans la surveillance médicale des salariés afin d’éviter toute altération de leur santé (68) et toute usure anticipée (CHAUMETTE, 1981 ; SAVATIER, 1980). Dans cette mission de surveillance des conditions de travail et de la situation physique des individus, le médecin du travail demeure « le conseiller du chef d’entreprise (69) ». Enfin, s’il est admis qu’il convient de prendre en compte les situations individuelles, la pénibilité et la dégradation de l’état de santé subséquente pourraient s’apprécier au regard du degré d’autonomie de la personne dans la réalisation des actes de la vie courante. De ce point de vue, un critère de la pénibilité pourrait alors être l’incidence des conditions de travail sur l’espérance de vie des individus (STRUILLOU, art. cit., pp. 954-956). C’est pourquoi le travail pénible est présent dans la problématique des retraites, dès lors que la question est envisagée transversalement et au regard de l’articulation des différents temps de l’existence (HÉAS, 2002).
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En résumé, la pénibilité serait une situation de travail dans laquelle la santé ou l’intégrité physique ou mentale du travailleur pourrait apparaître altérée à plus ou moins longue échéance. La pénibilité résulterait donc de conditions particulières dans lesquelles la prestation de travail est fournie, de telle sorte qu’une exposition prolongée à ce type d’environnement serait nécessairement préjudiciable à l’état de santé du salarié. En dehors de la réalisation d’un risque professionnel, la pénibilité se caractériserait donc par une sorte d’usure de l’individu, dont l’organisme se dégraderait inévitablement (70). Certes, cette dégradation pourrait résulter de la réalisation d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. Néanmoins, ce qui caractériserait la pénibilité, c’est que l’état de dégradation physique ou mentale de l’individu qui pourrait en résulter semblerait acquis au regard des conditions particulières de travail, même en l’absence de risque professionnel (71).
En droit du travail, la notion de pénibilité pourrait donc être défi nie par deux éléments constitutifs. Liée aux contraintes inhérentes à l’activité professionnelle, la pénibilité serait en premier lieu déterminée au regard des conditions et de la nature du travail fourni (élément objectif). Liée à la personne, la pénibilité serait en second lieu caractérisée par les conséquences de l’environnement de travail sur la santé du salarié (élément subjectif) (STRUILLOU, 2003). Dès lors, la pénibilité résulterait d’une situation de travail difficile et contraignante, causant à celui qui fournit la prestation de travail un dommage. Cette tentative de définition juridique mériterait d’être affinée, notamment quant au critère subjectif qui ne manquerait pas de poser des difficultés pratiques. Elle peut néanmoins constituer une base de réflexion dans la prise en compte de la pénibilité au travail sur le plan juridique.
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Réunion du 10 janvier 2008, 9h
Audition de la CFTC : M. Joseph Touvenel, secrétaire général adjoint,
et Mme Gwénaëlle Maudet, conseiller
Synthèse de l’audition
Etait présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Joseph Touvenel a fait valoir, en introduction, que rien ne doit être considéré comme figé en matière de pénibilité : elle concerne des métiers qui évoluent, les partenaires sociaux ont fourni de gros efforts pour améliorer de nombreuses situations, la pénibilité psychique a été reconnue par le patronat. L’attention devrait être davantage portée sur certains métiers pénibles physiquement et psychiquement comme ceux de l’accompagnement des personnes handicapées ou ceux de l’accompagnement des personnes en fin de vie. En ce cas, des passerelles devraient être prévues pour permettre une évolution ou une reconversion professionnelle au bout d’un certain nombre d’années. Dans ces métiers, il faut non seulement adapter les postes de travail mais également organiser la gestion des carrières.
La CFTC retient la définition suivante de la pénibilité au travail : sollicitation physique ou psychique qui demande au salarié des efforts constants d’adaptation qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles sur sa santé.
Le critère le plus évident de détection de la pénibilité est la réduction de l’espérance de vie : il faut pour son application raisonner par métiers réellement exercés et non par employeurs. Les autres critères pourraient être la réduction de l’espérance de vie sans incapacité, la morbidité accrue, l’atteinte à l’intégrité physique ou mentale.
Des activités entraînent objectivement une pénibilité : le port de charges lourdes, les travaux de manutention, l’existence d’un environnement difficile (chaleur, humidité,…), le rythme de travail, le travail posté, le travail en trois huit, les horaires décalés ou alternés, le travail le dimanche.
La difficulté survient quand il s’agit de pénibilité psychique : comment mesurer le stress dépassant le stress normal lié au travail ?
Des évolutions de carrière doivent être aménagées. Elles sont indispensables dans certaines branches comme le bâtiment où la moitié des ouvriers cessent leur activité avant l’âge de la retraite. Mais il ne faut pas imposer des mises à la retraite automatiques une fois atteint un certain âge.
Une traçabilité de la pénibilité doit être mise en place.
Les délocalisations sont préoccupantes car elles conduisent à déplacer le problème de la pénibilité sans le résoudre. Il faudrait mettre en place une traçabilité sociale des produits importés pour s’assurer que les normes sociales internationales ont été respectées. C’est moralement nécessaire et économiquement indispensable.
Le fait d’assigner un objectif à un employé n’est pas en soi un facteur de pénibilité ; cela peut même conduire à réduire la pénibilité car le salarié connaît la base sur laquelle il va être jugé. C’est l’objectif aberrant qui est un facteur de pénibilité.
Compenser la pénibilité par un avantage de retraite est important car la pénibilité touche directement à l’espérance de vie. Ces mesures doivent s’ajouter aux rémunérations supplémentaires accordées au titre de la pénibilité. Ces primes, comme par exemple pour le travail de nuit, permettent en fait de fournir un salaire acceptable. Le cumul de ces deux avantages ne devrait pas inciter les salariés à se maintenir dans le travail de nuit : on observe qu’une fois leur ménage installé les travailleurs privilégient le travail compatible avec une vie familiale et sociale normale et renoncent d’eux-mêmes au travail de nuit.
Le financement des mesures de prévention et de compensation de la pénibilité doit venir majoritairement des entreprises, surtout en matière de prévention. Les pouvoirs publics devront intervenir pour gérer le « stock » des travailleurs âgés usés par la pénibilité. Aujourd’hui la pénibilité est traitée par des mesures de mise au chômage, en invalidité ou en préretraite ; ces mesures sont financées par la collectivité au travers des cotisations sociales. Ces fonds ainsi dépensés pourraient être réorientés vers le traitement direct des facteurs de pénibilité. Par ailleurs, il faut s’interroger sur l’emploi et l’efficacité des 23 milliards d’euros annuels d’exonérations de charges et aides diverses attribuées aux entreprises.
Pour la traçabilité de la pénibilité, les caisses régionales d’assurance maladie pourraient être utilisées pour stocker les informations qui auraient un caractère confidentiel au même titre qu’un dossier médical. Cette solution aurait l’avantage de permettre une gestion mutualisée indispensable entre toutes les entreprises.
Un droit d’alerte devrait être donné au CHSCT.
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Réunion du 10 janvier 2008, 10h
Audition de la CFE-CGC :
M. Bernard Salengro, secrétaire national, et M. Gilles Castre, juriste
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Martine Billard, députée.
M. Bernard Salengro a rappelé que la notion de pénibilité a été consacrée par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Chacun admet que c’est un bon critère pour mesurer les effets du travail sur la santé. Les différents états des lieux montrent qu’il existe de gros problèmes de pénibilité en France en raison de la culture industrielle du pays et de la déshérence de l’Etat dans son domaine de contrôle social. La gravité du problème peut s’observer par la seule réduction de la durée de vie de nombreux travailleurs.
La prise en compte de la pénibilité relève d'abord d’une mesure de justice sociale à l’égard du « stock » de travailleurs usés et proches de l’âge de la retraite. Un exemple de la pression actuelle est le phénomène des départs en retraite précoces si nombreux, ce n’est pas tant dû aujourd’hui à un attrait pour la retraite mais plutôt à une répulsion par rapport au travail. Ce phénomène s’observe même chez les cadres au travers de toutes les enquêtes réalisées par la CFE-CGC, ainsi que dans les analyses de la CNAV au sujet des personnes qui rachètent des années d'étude pour partir plus tôt.
La CFE-CGC demande que des mesures soient prises pour régler la question du « stock » : départs anticipés en retraite financés par les entreprises et l’Etat selon la part de responsabilité de chacun.
Le traitement global de la pénibilité exige de mettre au point les indicateurs et les outils adaptés pour détecter la pénibilité et la tracer. Les données sociales actuelles sur les décès sont le reflet des conditions de travail des années 1970 ; elles ont radicalement changées aujourd’hui : les systèmes industriels usant les ouvriers ont disparu ou se sont fortement mécanisés et modernisés ; en revanche, la pression psychique et cognitive, en particulier sur l’encadrement, s’est fortement accrue et la charge mentale pesant sur les cadres constituent une véritable pénibilité au travail. Dans trente ou quarante ans lorsque les cadres et les ouvriers qui partiront en retraite mourront, le rapport entre les espérances de vie des ouvriers et des cadres pourrait être inversé, il sera en tout cas profondément modifié ne serait-ce que par ses sources différentes de pénibilité.
La priorité est de prévenir la pénibilité. A défaut, il faut la réparer.
Des pénibilités sont inextinguibles, comme le travail de nuit dont la société aura toujours besoin. Toutes ces pénibilités devraient être traitées par un accord interprofessionnel.
L’outil de traitement de la pénibilité pourrait être un curriculum laboris, c’est-à-dire un relevé permettant de repérer l’exposition d’un travailleur à des facteurs de pénibilité, qui serait exploité en fin de carrière pour déterminer la réparation due comme cela est fait pour les militaires avec le relevé de leurs campagnes. Ce curriculum laboris pourrait être soit un document individuel tenu par l’entreprise, soit la fiche d’entreprise tenue par le médecin du travail. Les deux paraissent complémentaires.
La fiche d’entreprise est l’analyse faite par le médecin du travail des risques et des précautions devant être prises dans l’entreprise ; elle est mise à la disposition des inspecteurs du travail et archivée au même titre que les dossiers médicaux. Pour une application à la pénibilité, la fiche d’entreprise devrait être déclinée par postes de travail pour avoir une analyse suffisamment fine pour être exploitable.
Les informations figurant sur le relevé du médecin seraient couvertes par le secret médical. Le médecin du travail est donc le bon acteur de la pénibilité à condition d’être réformée pour mettre un terme à la gestion patrimoniale qui en est actuellement faite et pour ne plus qu’elle soit entre les mains de l’employeur.
On pourrait également envisager que ces informations soient déposées sur le dossier médical personnel ou sur le Web médecin.
Cependant, la médecine du travail doit être réformée afin de lui donner une indépendance d’action si elle doit être amenée à traiter la pénibilité. A cette condition, le médecin du travail est la bonne personne pour remplir le curriculum laboris.
La CFE-CGC défend la fiche d'aptitude médicale, dans son acceptation de prévention et de reclassement, elle constitue de plus une protection du salarié : elle évite que l’employeur ne s’intéresse aux facteurs médicaux ou génétiques de leurs salariés, elle est rédigée avec le consentement du salarié.
Quelle que soit la solution retenue, c'est l’employeur qui a la responsabilité ultime de la déclaration des risques exposés, lui seul en a la connaissance exhaustive ainsi que la responsabilité, c'est donc lui qui doit faire la déclaration de la pénibilité. C'est dans le document unique d'évaluation, dans les déclarations des procédés susceptibles de maladies professionnelles (art L 461-4) ainsi que dans les fiches d'exposition que devraient se retrouver les déclarations relevant de sa responsabilité.
Cependant, globalement, la gestion de la pénibilité n’est pas encore ancrée dans les préoccupations des employeurs ; ils n’y sont pas encore prêts. Il faut néanmoins lancer la mise en place du relevé de manière simple, c’est-à-dire en évitant la machinerie de la fiche amiante.
La CFE-CGC a mis en place un observatoire du stress : les cadres subissent une véritable révolution de leurs conditions de travail, qui est générale en France et en Europe. Certes, le stress n’est pas spécifique à l’encadrement mais les cadres sont en première ligne et sont ceux qui portent le plus cette pénibilité.
Les Chambres de commerce et d’industrie devraient conduire des actions de sensibilisation dans les métiers de services, à l’instar des actions menées dans le bâtiment ou l’industrie.
Globalement, les outils de la sociométrie restent toutefois insuffisamment utilisés par les médecins qui n'en ont pas la formation. Ils permettraient de mettre en évidence la pénibilité née, d’une part, de la confrontation croissante des salariés avec les clients et, d’autre part, de l’individualisation des situations professionnelles. De même, il est difficile de mesurer la pression mentale subie par un salarié d’une entreprise annonçant un plan de licenciement alors même qu’il n’est pas concerné par ce plan. La pénibilité n’est toujours là où on pense la trouver : les cadres des banques, alors même qu’ils disposent du meilleur confort de travail, sont les premiers utilisateurs de l’écoute téléphonique mise en place par la CFE-CGC.
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19 mars 2008
Contribution CFE-CGC sur les facteurs de pénibilité
Pour la CFE-CGC, l'exercice durable du travail dans certaines conditions génère une pénibilité créatrice d'une usure prématurée de la santé du salarié, difficilement compatible avec le maintien dans l’emploi, sans adaptation avant l'âge légal de la retraite. L’espérance de vie sans atteinte à la santé, participe au socle de définition de la pénibilité.
Pour notre confédération, la pénibilité peut être physique mais également mentale et psychique. L’évolution des organisations du travail augmente les risques psychosociaux comme source de la pénibilité. La fixation d’objectifs démesurés, au regard des moyens mobilisables, est l’une des nombreuses causes du stress d’origine professionnelle. Ces causes professionnelles peuvent avoir un effet dévastateur sur la vie personnelle. C’est ce qui se dégage des informations recueillies par l’Observatoire du stress de la CFE-CGC.
Dans le cadre de cette négociation, la CFE-CGC estime que la réflexion doit porter prioritairement sur la construction d’outils d’identification des facteurs professionnels de pénibilité, tant physiques que mentaux ; l’objectif étant de développer la prévention, d’améliorer les conditions de travail et pour les situations non améliorables d’en déterminer la compensation.
Le risque de voir s'installer des souffrances chroniques doit absolument être pris en considération, dans la mesure où à long terme, aux âges élevés, une partie des déficiences et des incapacités locomotrices peut trouver ses racines dans ces affections survenues au cours de l’activité professionnelle.
La CFE-CGC distingue différents types de facteurs de la pénibilité du travail.
Ø Les facteurs matériels ou physico-chimiques visent notamment :
Les facteurs d'exposition à des agents de pénibilité physique visent donc avant tout des expositions ou des contraintes dans le travail ayant un effet biomécanique sur les tissus et les organes humains.
- Les charges physiques c’est à dire la manutention de charges lourdes : soulever, tirer, déplacer des charges, cf. Arrêté du 15 juin 1993 pris en application de l’article R. 231-69 du Code du travail déterminant les recommandations que les médecins du travail doivent observer en matière d’évaluation des risques et d’organisation des postes de travail comportant le recours à la manutention manuelle de charges et l’Arrêté du 29 janvier 1993 portant application de l’article R. 231-68 du Code du travail relatif aux éléments de référence et aux autres facteurs de risques à prendre en compte pour l’évaluation préalable des risques et l’organisation des postes de travail lors des manutentions manuelles de charges comportant des risques, notamment dorsolombaires. S’agissant des indicateurs cf. le Décret no 92-958 du 3 septembre 1992 relatif aux prescriptions minimales de sécurité et de santé concernant la manutention manuelle de charges comportant des risques, notamment dorsolombaires, pour les travailleurs et transposant la directive (C.E.E.) no 90-269 du conseil du 29 mai 1990.
- Les postures prolongées (cela concerne les travaux nécessitant des efforts physiques tel que le port de charge, les contraintes posturales et articulaires, le travail à la chaîne, les gestes répétitifs) Cf. décret n° 76/404 du 10 mai 1976 portant application de la loi 75-1279 du 30-12-1975 relative aux conditions d'accès à la retraite de certains travailleurs manuels.
- Les travaux s’effectuant dans un environnement agressif on peut citer notamment :
o L’exposition au bruit, cf. la directive européenne 2003/10/EC et la réglementation 1910.95 de l’OSHA "Exposition au bruit sur le lieu de travail" réglementent le volume de bruit autorisé sur les lieux de travail. Quelques pays ont des normes encore plus strictes que les normes européennes. Ainsi, par exemple en Suède, la valeur limite d’exposition quotidienne au bruit est fixée à 85 dB, soit 2 dB inférieure aux exigences de la directive de l’UE ;
o L’exposition aux vibrations, cf. le décret n° 2005-746 du 4 juillet 2005 relatif aux prescriptions de sécurité et de santé applicables en cas d'exposition des travailleurs aux risques dus aux vibrations mécaniques et modifiant le code du travail ;
o L’exposition aux produits toxiques. Dans le cadre de cette exposition, il faut noter que les pathologies peuvent survenir postérieurement à la fin de l’exposition. Par exposition aux produits toxiques, il faut entendre les risques biologiques ou chimiques (à savoir les substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction ou reprotoxiques) les substances à prendre en compte figurent notamment à l'annexe I de la directive 67/548/CEE modifiée, qui correspond en droit français à l'annexe I de l'arrêté du 20 avril 1994. Des modifications ont été faites le 30 décembre 1998 et le 8 juin 2000.De même, cf. le Décret n° 2001-97 du 1er février 2001 établissant les règles particulières de prévention des risques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction et modifiant le Code du travail, ainsi que le décret n°2003-1254 du 23 décembre 2003 relatif à la prévention du risque chimique et modifiant le Code du travail. Il est également nécessaire de se reporter à différentes études réalisées par l’INRS, et notamment les études :
§ manipulation des substances génotoxiques utilisées au laboratoire, ED 769, 2002,
§ produits chimiques, cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction, ND 2168-187-02,
§ fonction de reproduction et risque chimique en milieu professionnel : une introduction, 2002,
§ les cancérogènes et les cancers figurant aux tableaux des maladies professionnelles,
§ le point des connaissances sur les cancers professionnels, ED 5013, 2001,
§ Une introduction au risque cancérogène en milieu professionnel, 2000.
o Les irradiations, les rayonnements ionisants ;
o L'exposition à différents types de poussières, de ciment, de bois, etc. cf. Art. R. 232-5-5- I et II ;
o L'exposition aux fumées ;
o Les températures extrêmes (hautes et basses). Cela se manifeste par un travail soumis à de fortes chaleurs ou un travail soumis au froid, Cf. décret n° 76/404 du 10 mai 1976 portant application de la loi 75-1279 du 30-12-1975 relative aux conditions d'accès à la retraite de certains travailleurs manuels ;
o Les intempéries, Cf. décret n° 76/404 du 10 mai 1976.
Ø Les facteurs liés aux locaux de travail :
- Espace de travail exigu (confinement) ;
- Sol encombré, en mauvais état, glissant...
- Les environnements insalubres ;
- Le confinement ;
- L’isolement.
Ø Les facteurs relatifs aux pressions psychologiques et qui créent le stress
- La contrainte de temps qui peut se manifester par une intensification des rythmes de travail. Cette intensification est associée à un accroissement de la charge mentale du travail, même si celle-ci est naturellement plus difficile à mesurer que la pénibilité physique.
- L’intensification des rythmes de travail peut se concrétiser par :
o Une contrainte industrielle seule (rythme imposé par un équipement automatique ou des normes ou des délais à horizon d’un jour maximum) ;
o Une contrainte marchande seule (rythme de travail dépend de la demande) ;
o Une contrainte industrielle et une contrainte marchande ;
o Une cadence élevée ;
o Le travail dans l’urgence, le travail en flux tendu ;
o Les interruptions continues dans le travail (cela se manifeste par des travaux hachés appelés aussi phénomène de zapping d’une tâche à une autre)
- L’insuffisance des moyens alloués pour effectuer ses missions.
- La fixation d’objectifs irréalistes.
- L’incertitude de carrière.
- Les pratiques en matière de flexibilité de l’emploi, la précarité du statut.
- Le contact permanent et direct avec le « client », (agressions; violences).
- Le management intrusif dans la personnalité.
- Le manque de reconnaissance cf. la théorie de Siegrist
- L’isolement des acteurs : le faible soutien social de la hiérarchie et/ou des collègues, la pauvreté des relations.
- La faible autonomie : faible utilisation des compétences, faible autorité de décision.
- Le manque ou la perte de sens cf. l’anomie de Durkheim, ...
- L’absence de contrôle sur les tâches planifiées.
- Les exigences contradictoires.
- Le manque d’information sur les objectifs.
- La concurrence nationale et internationale.
Ø Les facteurs relatifs à l’organisation du travail qui ne respectent pas les rythmes « circadien » (Rythme biologique)
On retrouve dans cette catégorie entre autres :
- Le travail de nuit visé par le Code du travail aux articles L.213-2 et L213-1-1.
- Les horaires alternants, décalés.
- Les déplacements transcontinentaux fréquents.
- Le travail posté.
Ø L’exercice d’un métier « dangereux »
Pour définir la nature des activités pouvant être considérées comme dangereuses, deux critères peuvent être utilisés :
- La nature même de l’activité comportant l’exposition à une activité dangereuse ou comportant un risque avéré (tel que par exemple l’emploi d’armes).
- Les statistiques disponibles en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles (taux de fréquence et taux de gravité des accidents du travail, taux et indice de gravité des incapacités temporaires, nombre d’accidents mortels, accidents du travail). La direction de la sécurité sociale a établi à partir des données de la CNAMTS de 1996 un repérage des « secteurs » dangereux. Un autre repérage a été effectué en utilisant les critères de pénibilité retenus par l’enquête "Conditions de travail" de 1998 et 2005 et l’enquête Sumer 2003 dont le champ d’application est sensiblement différent de l’enquête « conditions de travail ». De même, le rapport de l’INVS (Institut national de veille sanitaire) relatif aux Conditions de travail selon l’activité professionnelle dans l’enquête décennale santé 2003 de l’Insee, est riche d’enseignement.
Pôle protection sociale CFE-CGC
Réunion du 10 janvier 2008, 16h
Audition de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) : M. Jean-Louis Malys, secrétaire national, et M. Henri Forest, secrétaire confédéral
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Martine Billard, députée.
M. Jean-Louis Malys a souligné l’importance de la prévention. L’accord relatif à la branche AT-MP conclu en mars 2007 peut avoir un impact réel sur la situation de nombreuses personnes. Or, aujourd’hui, il n’est toujours pas transposé. Dans le même état d’esprit, la conférence d’octobre 2007 sur les conditions de travail a traité trois thématiques : les moyens des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), Le dialogue social dans les TPE PME sur les conditions de travail, le droit d’alerte sur le stress et les troubles musculo-squelettiques (TMS). De même, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) réalise des études sur le ressenti des salariés sur leur travail.
Cependant, la réparation de la pénibilité demeure le dossier le plus urgent puisque son coût humain et financier est élevé pour la société, qu’il y a un lien direct avec le dossier des retraites et que des négociations sont en cours avec les partenaires sociaux à ce sujet. Ces négociations devaient être terminées à la fin de l’année 2006 à l’issue de laquelle a été menée une journée d’action sur la pénibilité par la CFDT. Cette journée a permis la relance des négociations par le lancement de la mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui a apporté des connaissances de fond sur le sujet. Après des négociations « poussives » et diverses propositions, le calendrier à venir devrait se dérouler en quatre étapes.
La CFDT souhaiterait que les thèmes des quatre séances soient établis comme suit : une première séance concernant les critères précis de la pénibilité et les profils visés ; une deuxième séance sur les dispositifs et mécanismes de réparation ; une troisième séance concernant le financement et enfin une séance conclusive.
La première séance serait l’occasion de différencier le « stock » du « flux ». Le « stock » regroupe les personnes pour lesquelles les effets de la pénibilité sont déjà visibles. Pour elles, se pose le problème de l’équité parce qu’on sait que leur espérance de vie et leur espérance de vie sans incapacité sont d’ores et déjà diminuées. L’idée défendue par la CFDT est une individualisation du dispositif, sans viser globalement ni de métiers ni d’entreprises particulières, en reprenant les critères développés par Yves Struillou dans son rapport au Conseil d’orientation des retraites (COR). Le problème de la pénibilité du « flux » passerait, quant à lui, par de la prévention.
La deuxième séance aurait pour objectif une réflexion sur les dispositifs de réparation qu’il faudrait mettre en place le plus rapidement possible. Il pourrait, par exemple, y avoir une commission interprofessionnelle territoriale qui examinerait les dossiers. Un système de cessation anticipé d’activité pourrait être mis en place tout en prenant garde à ne pas mettre en place une prime de pénibilité qui serait trop attractive : le but est bien la disparition progressive de la pénibilité. Une fois le stock étudié, une forme de traçabilité de la pénibilité pourrait être mise en place pour le flux, par l’intermédiaire du dossier médical personnel (DMP) par exemple. Des enseignements pourraient aussi être tirés de la réflexion, menée actuellement dans le Pas-de-Calais, sur la façon de tracer les risques professionnels et dont le but est d’établir des objectifs méthodologiques.
La troisième séance traiterait du financement qui doit être mixte. Là encore, il faut faire la différence entre stock et flux. En ce qui concerne le stock, la participation des entreprises est indispensable mais resterait limitée. Viendraient ensuite les organismes sociaux, qui versent des indemnités déjà liées à la pénibilité (c’est le cas de la sécurité sociale lorsque les personnes ayant subi la pénibilité se retrouve dans le dispositif d’invalidité par exemple). L’État devrait être le troisième contributeur car il a une part incontestable de responsabilité dans la situation actuelle. Pour le flux, la part du financement des entreprises devrait pouvoir monter en puissance progressivement, parallèlement à la mise en place d’une prévention efficace.
Par ailleurs, la CFDT considère que deux enjeux sont directement liés aux négociations actuelles. Le premier concerne le manque de gouvernance au sujet de l’étude de la pénibilité, d’où l’intérêt de la création d’un Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT) qui aurait pour conséquence la transformation du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels (CSPRP) et qui fonctionnerait sur le modèle du COR. Le deuxième enjeu est le congé de fin de carrière qui interviendrait en réparation de la pénibilité. Il est important, à la différence de ce que souhaitent les organisations patronales, qu’il n’y ait pas rupture du contrat vers un basculement en invalidité. Il faut aussi faire attention à un éventuel dispositif de temps partiel en fin de carrière. L’effet pervers serait que les salariés cumule pour partir plus tôt, ce qui ne réduit donc pas la pénibilité. Par exemple, sur une période de temps partiel de cinq ans, les personnes en temps partiel travailleront à temps plein pendant deux ans et demi, et par accord tacite avec l’employeur, partiront de l’entreprise une fois les deux ans et demi effectués.
M. Henri Forest a tenu à rappeler que la pénibilité était un enjeu plus vaste que le seul problème des retraites puisqu’elle touche aussi à l’emploi et aux conditions de travail.
— * —
Réunion du 10 janvier 2008, 17h
Audition de Mme Françoise Geng, conseiller CGT représentant la section « travail » du Conseil économique et social (CES)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président et Mme Martine Billard, députée.
Mme Françoise Geng a rappelé le contexte dans lequel le CES étudie la pénibilité au travail. Ce dernier a été saisi par le Premier ministre au sujet de la médecine du travail, et la pénibilité est un thème abordé. L’avis du rapporteur, M. Christian Dellacherie, sera présenté à la fin du mois de février 2008.
Les enjeux liés à la pénibilité sont aujourd’hui multiples. Il est difficile d’établir une définition exacte car si certains éléments sont facilement identifiables (postures difficiles, travail de nuit, etc.), d’autres sont appréhendés plus difficilement. Ceci s’explique notamment par l’intensification du travail qui a pour conséquence un « productivisme réactif », qui limite les anticipations et les temps de récupérations (les « micropauses », par exemple). De plus, les différentes formes de pénibilité migrent d’un secteur d’activité à un autre et ne sont pas forcément visibles de prime abord. Cette nouvelle pénibilité touche beaucoup les cadres qui, dans un contexte de chômage élevé, doivent faire face au stress et à des comportements d’agression psychique (au travers de l’obligation de résultat, par exemple). On estime que 850 000 salariés sortent du monde du travail pour cause de pénibilité, pour un coût de 9 milliards d’euros par an.
Ensuite, la réflexion du CES porte sur la façon de résoudre le problème de la pénibilité. Cela passe d’abord par de la prévention. Des organismes existent déjà mais il est nécessaire que la cohérence de leur travail soit améliorée, notamment le rôle du médecin du travail. Il faut aussi un meilleur suivi des travailleurs en situation pénible. Cependant, il ne faut pas mettre en place de compensation financière : une prime n’est pas la bonne solution puisque l’idée est, à terme, de réduire substantiellement la pénibilité.
En ce qui concerne les phénomènes de pénibilité qui sont intrinsèques à certaines situations (travail de nuit et horaires alternants, travail à la chaîne et cadences imposées, port de charges lourdes, travail posté, exposition aux produits toxiques, environnement de travail agressif, etc.), un départ à la retraite anticipée semble être la solution.
Par ailleurs, l’importance est la mise en place d’outils dans les entreprises, ce qui est plus facile à faire dans les grandes entreprises que dans les petites et moyennes entreprises (PME) et dans les très petites entreprises (TPE). La période est propice à la mise en place d’une réflexion sur ce sujet même si des problèmes existent, notamment dans les entreprises où il n’y a pas de représentants du personnel ni a fortiori de comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). On pourrait créer un organisme collégial à l’échelon territorial, au niveau du bassin d’emploi par exemple, qui regrouperait diverses entreprises de la même branche et dans lequel les questions relatives à la pénibilité pourraient être abordées.
La question de la fonction publique pose, quant à elle, des problèmes tout particuliers. La fonction publique hospitalière, notamment, a une pénibilité reconnue, avec une possibilité de départ à la retraite anticipée. 80 % des aides soignantes partent à la retraite en étant complètement « usées ». La pénurie d’effectifs a pour conséquence une intensification qui accroît les risques et détourne les étudiants de ces professions. De plus, les CHSCT manquent de moyens dans les hôpitaux. Le management pose aussi problème.
Enfin, il est important que, quel que soit le système choisi pour traiter de la pénibilité, une évaluation soit réalisée dans un cadre expérimental.
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Réunion du 10 janvier 2008, 18h
Audition de la Confédération générale du travail (CGT) :
Mme Mijo Isabey et M. Éric Aubin
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Éric Aubin a souligné que la CGT souhaitait qu’un accord sur la pénibilité soit conclu avant la discussion sur les retraites en 2008. L’agenda des négociations prévoit quatre rencontres d’ici à la fin mars.
Plusieurs propositions ont été formulées et plusieurs problèmes soulevés. La notion de pénibilité pose tout d’abord une question d’égalité et de justice sociale : l’enjeu est l’équité devant la retraite en pleine santé alors même que l’on sait que l’espérance de vie moyenne à 60 ans d’un ouvrier est inférieure de sept ans à celle d’un cadre.
Une majeur partie de cet écart à pour origine les conditions de travail. La prévention est essentielle. La réparation est indispensable. Les critères de la pénibilité sont, sans doute, fortement débattus. Mais on peut évoquer l’environnement de travail agressif, les rythmes de travail et les efforts physiques et psychiques qui ont des effets sur l’espérance de vie. La CGT a établi depuis de longues années un tableau qu’il soumet à la discussion.
Trois approches de la pénibilité doivent être distingués. Tout d’abord, aux problèmes des salariés en difficulté physique, doit répondre un dispositif d’invalidité. Ensuite, pour les salariés confrontés au stress et/ou au travail répétitif, il importe de faire de la prévention et de changer l’organisation du travail. Enfin, quand les conditions de travail ont pour conséquence une diminution de l’espérance de vie, la mise en place d’un dispositif de départ à la retraite anticipée apparaît être la seule solution si l’on veut réparer les conséquences des conditions de travail.
En conséquence, il importe d’agir en deux temps, d’abord sur le « stock » et ensuite sur le « flux », en combinant les mécanismes de réparation et de prévention. Les mesures sur le stock passeraient par un financement mixte de la part des entreprises et des pouvoirs publics, puisque ces derniers ont une part de responsabilité dans la situation actuelle. En ce qui concerne le flux, le financement serait triple : par l’État, par un transfert de la part des organismes sociaux et par les entreprises. En ce qui concerne le financement par les employeurs, l’idée serait de mettre en place deux cotisations (proches du système AT-MP) : une part serait mutualisée, afin de prendre en compte la spécificité des très petites entreprises (TPE), et une autre part serait variable pour prendre en compte l’effort de prévention de chaque entreprise.
L’enjeu est ensuite de savoir comment on traite la pénibilité au sein même de chaque entreprise. Le problème se pose surtout dans les TPE qui n’ont pas de délégués du personnel ou de comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). La CGT souhaite, pour cette raison, la modification, à la baisse, des seuils de représentation obligatoire ou bien la création d’une représentativité au niveau des bassins d’emploi. L’enjeu sous-jacent est la traçabilité du parcours professionnel qui pourrait être effectuée par l’utilisation d’un compte individuel à la CNAV ou par le biais de la visite biannuelle du médecin du travail. Ce dernier est donc amené à jouer un rôle essentiel dans le futur dispositif.
De plus, dans ce contexte de forte intensification du travail, la formation des entreprises à la problématique de la pénibilité est faible. Or, la diminution de la pénibilité passe par une réorganisation du travail. En effet, aujourd’hui la souffrance au travail augmente, ce qui impacte la motivation des salariés. Ainsi, même si la conséquence est une perte d’argent, les salariés feront primer leur volonté de partir le plus tôt possible à la retraite. Les entreprises prennent aujourd’hui peu en considération cet aspect des conditions de travail. Certains craignent, de plus, que la mise en place de cotisations liées à la pénibilité crée des tensions sur le recrutement dans certains secteurs comme le bâtiment. C’est bien sûr une argumentation inacceptable.
En ce qui concerne les négociations actuelles, la position de la CGT a été amenée à évoluer. Sans abandonner nos objectifs, nous avons tenu compte de la négociation on est passé, pour les personnes auxquelles il faut apporter une réponse immédiate, de l’idée d’une retraite anticipée à un congé de fin de carrière. Mais le problème qui se pose est le statut du salarié dans un tel dispositif. Les enseignants, par exemple, pourraient voir leur fin de carrière aménagée, car l’on sait qu’il est difficile à un certain âge de s’occuper d’enfants alors que, dans le même temps, cette profession a l’espérance de vie la plus longue. A l’inverse, les salariés du BTP, qui ont une espérance de vie plus faible, pourraient bénéficier d’une retraite anticipée. Il faut néanmoins faire attention à ne pas figer le dispositif, il ne faut pas parler de métier mais bien d’exposition à la pénibilité.
Il importe aussi que les salariés de branches différentes soient traités de façon équitable. Les négociations interprofessionnelles en cours sont donc fondamentales et devront être suivies de négociations de branche.
La proposition d’accord national interprofessionnel sur la pénibilité soumise par la CGT aux partenaires sociaux est reproduite en annexe du rapport d’information.
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Le 25 mars 2008
12 critères à retenir pour la reconnaissance
de la pénibilité du travail
I- Contraintes physiques
1/ Manutention et port de charges lourdes
On entend sous ce critère 3 types d’opérations :
• Manutention (manuelle) : c’est-à-dire toute opération exigeant l'effort physique d'un ou plusieurs travailleurs
• Transport manuel : c’est-à-dire le portage sur une certaine distance d'une charge à une ou plusieurs personnes
• Manutention (manuelle) au poste de travail : c’est-à-dire la manutention au poste de travail sans déplacement de l'opérateur avec la charge ou déplacement sur une distance inférieure à deux mètres
Directive 90/269/CEE : « Aux fins de la présente directive, on entend par manutention manuelle de charges toute opération de transport ou de soutien d'une charge, par un ou plusieurs travailleurs, dont le levage, la pose, la poussée, la traction, le port ou le déplacement d'une charge qui, du fait de ses caractéristiques ou de conditions ergonomiques défavorables, comporte des risques, notamment dorsolombaires, pour les travailleurs. »
Le curseur principal serait le temps d’exposition. Nous proposons de retenir le seuil de 20 h par semaine, adopté par de nombreux experts.
Au-delà de la combinaison avec toutes les autres pénibilités, certains facteurs peuvent être utilisés comme de curseurs :
• Facteurs liés à la charge : poids, taille et forme de la charge ; charge située en hauteur ou à déposer en hauteur
• Facteurs liés aux locaux de travail : espace de travail exigu, sol encombré, en mauvais état, glissant...
2/ Contraintes posturales et articulaires
Les contraintes posturales, peuvent se définir à partir des trois situations portant sur la position à genoux, le maintien des bras en l’air et les autres contraintes posturales (posture accroupie, en torsion…). D’autres postures peuvent être prises en compte, position debout et piétinement.
Le curseur d’exposition est la durée par semaine. Nous proposons de prendre les seuils utilisés par l’enquête SUMER. Ils sont différents suivant l’exposition. Les différents seuils à retenir sont au nombre de 4 :
Exposition toute durée,
Exposition supérieure à deux heures par semaine,
Exposition supérieure à dix heures par semaine,
Exposition supérieure à vingt heures par semaine.
3/ Vibrations
Cela concerne tous les travaux utilisant des outils transmettant des vibrations aux membres supérieurs ou à l’ensemble du corps.
La définition légale figure à l’article Art. R.231-118.- (D. no2005-746, 4 juill.2005, art.1er)
On entend par :
A)vibration transmise aux mains et aux bras” : une vibration mécanique qui, lorsqu'elle est transmise aux mains et aux bras chez l'homme, entraîne des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, notamment des troubles vasculaires, des lésions ostéo-articulaires ou des troubles neurologiques ou musculaires ;
b)vibration transmise à l'ensemble du corps”: une vibration mécanique qui, lorsqu'elle est transmise à l'ensemble du corps, entraîne des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, notamment des lombalgies et des microtraumatismes de la colonne vertébrale.
Nous proposons de prendre deux critères pour identifier la pénibilité liée aux vibrations :
A) les valeurs limites et d’exposition journalière
Il y deux critères possibles décrites par Art. R. 231-119.- (D. no 2005-746, 4 juill. 2005, art. 1er)
- I) La valeur limite d'exposition journalière rapportée à une période de référence de huit heures est fixée à 5 m/s2 pour les vibrations transmises aux mains et aux bras, et à 1,15 m/s2 pour les vibrations transmises à l'ensemble du corps.
- II) La valeur d'exposition journalière rapportée à une période de référence de huit heures déclenchant l'action de prévention prévue au II de l'article R. 231-122 et au I de l'article R. 231-124 est fixée à 2,5 m/s2 pour les vibrations transmises aux mains et aux bras, et à 0,5 m/s2 pour les vibrations transmises à l'ensemble du corps.
B) Les fréquences avec deux situations :
Toutes les vibrations inférieures à 20 Hz, en effet elles ne peuvent pas être amorties par les masses molles
- Les fréquences verticales 3 Hz, 4,5 Hz, 6 Hz, 7 Hz sont les plus graves, elles amplifient le mouvement du tronc par apport au bassin de 1,5 à 4 générant des contraintes pathogènes au niveau du rachis lombaire
II- Environnement agressif
1/ Exposition à des produits toxiques ….(cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques)
Cancérogènes
Vingt-huit produits sont référencés comme cancérogènes dans les études du Ministère du Travail. Leur identification comme cancérogènes repose sur l’appartenance aux catégories 1 ou 2A du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) et/ou aux catégories 1 ou 2 de la classification européenne.
Mutagènes
Les substances sont classées par l'Union européenne comme mutagènes en se référant spécifiquement aux défauts génétiques héréditaires. Sont classées M1 les substances que l'on sait mutagènes pour l'homme.
Reprotoxiques :
Nous proposons de prendre les reprotoxiques classées 1 par l'Union européenne, c’est à dire les substances connues pour altérer la fertilité de l'espèce humaine et les substances connues pour provoquer des effets toxiques sur le développement dans l'espèce humaine.
Expositions
Toutes durées et supérieur à deux heures par semaine doivent être choisies comme le font toutes les études et cela en raison de la dangerosité évidente de l’exposition aux produits CMR retenus, les plus nocifs.
Il suffit donc de reprendre ces listes CMR classées les plus dangereuses par l’Union Européenne avec comme durée d’exposition au moins 2 h d’exposition / semaine.
2/ Exposition aux poussières et fumées
Poussières :
Est considérée comme « poussière » toute particule solide dont le diamètre aérodynamique est au plus égal à 100 micromètres ou dont la vitesse limite de chute, dans les conditions normales de température, est au plus égale à 0,25 mètre par seconde. Les poussières ainsi définies sont appelées « poussières totales ».
Doivent être prises en compte toutes les situations qui sortent des limites fixées par de l’Art. R. 232-5-5.- I (D. no 2003-1254, 23 déc. 2003, art. 4, I, a). — « Dans les locaux à pollution spécifique, les concentrations moyennes en poussières totales et alvéolaires de l’atmosphère inhalée par une personne, évaluées sur une période de huit heures, ne doivent pas dépasser respectivement 10 et 5 milligrammes par mètre cube d’air. »
Fumées :
Doivent prisent en compte toutes les situations dépassant les valeurs limites prévues par le code du travail ou l’OMS concernant les fumés contenant : Le monoxyde de carbone, le monoxyde d’azote, le dioxyde d’azote, l’ozone, le dioxyde de soufre, l’indice des fumées noires, les particules en suspension de diamètre inférieur à 10 µm, le benzène, le toluène, les xylènes, le plomb, le cadmium, le Zinc, l’ammoniac, l’hydrogène sulfuré
3/ Exposition à des températures extrêmes et aux intempéries
Températures extrêmes
Doivent être pris en compte pour les exposition à des températures extrêmes « les travaux exposant de façon habituelle et régulière à une forte chaleur ambiante ou rayonnante résultant de l'utilisation d'un traitement thermique, d'un processus de cuisson, de la transformation de produits en état de fusion, d'ignition ou d'incandescence ou de la production d'énergie thermique. » (Extrait Décret n° 76/404)
Intempéries
« Sont considérés comme travaux exposant aux intempéries sur les chantiers les travaux soumis au régime d'indemnisation défini aux articles L. 731-1 et suivants du code du travail ainsi que les travaux effectués de façon habituelle et régulière sur les chantiers souterrains ou subaquatiques, ou en plein air sur les constructions et ouvrages, les aires de stockage et de manutention" » (Extrait décret n° 76/404)
4/ Exposition aux bruits intenses
Il faut retenir comme critère de pénibilité l’exposition prolongée à des bruits intenses ou du fait de traumatismes sonores résultant de bruits impulsionnels très intenses.
La DIRECTIVE 2003/10/CE peut servir de base en partant des « valeurs d'exposition inférieures déclenchant l'action » : LEX, 8h = 80 dB (A) et ρcrête = 112 Pa (3) respectivement (Cette notion couvre tous les bruits présents au travail, y compris le bruit impulsif)
5/ Les rayonnements ionisants
Nous proposons de retenir les critères établis dans le cadre des règles de radioprotection médicolégale définissant les « travailleurs exposés ».
III Contraintes liées aux rythmes de travail
1/ Travail de nuit : Définition Les articles L. 213-2 et L. 213-1-1 du code du travail prévoient que sont des travailleurs de nuit les salariés qui :
- soit accomplissent, au moins deux fois par semaine, selon leur horaire habituel, au moins trois heures de leur temps de travail quotidien au cours de la période comprise entre 21 heures et 6 heures ;
- soit accomplissent, au cours d'une période de référence, un nombre minimal d'heures de travail au cours de la période comprise entre 21 heures et 6 heures.
2/ Travail alterné, décalé :
La directive du Conseil 93/104/CE du 23 novembre 1993, reprise par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, définit le travail posté comme tout mode d'organisation du travail en équipes selon lequel des travailleurs occupés successivement sur les mêmes postes de travail, selon un certain rythme, y compris le rythme rotatif, et qui peut être continu ou discontinu, entraînant pour les travailleurs la nécessité d'accomplir un travail à des heures différentes sur une période donnée de jours ou de semaines. Dans la pratique, il existe trois systèmes d'organisation du travail posté.
Alterné figurant dans le décret n° 76/404 du 10 mai 1976 précisant la loi de 1975
- Continu équipes successives fonctionnant par rotation vingt-quatre heures sur vingt-quatre heures, sans interruption la nuit, le dimanche et les jours fériés, qu'il y ait ou non arrêt pendant les congés payés.
- Semi continu équipes fonctionnant dans les mêmes conditions mais avec arrêt hebdomadaire
Le travail posté en discontinu
Selon ce système, le travail est organisé en deux équipes qui se succèdent sur les mêmes postes de travail, une équipe dite « du matin » et une équipe dite « du soir ». Le travail est interrompu en fin de journée et en fin de semaine au moins le dimanche.
Travail par relais en équipe alternante :
Le travail par relais consiste à pratiquer des horaires différents d’un groupe de salariés ayant la même activité. Dans ce cadre là, les horaires à prendre en compte pour la pénibilité seraient :
- du travail en équipes alternantes, formule consistant à faire travailler tour à tour plusieurs équipes, les périodes de travail étant entrecoupées de pauses de longue durée. Par exemple une équipe A travaille de 6 à 10 h et de 14 h à 18 h, une équipe B de 10 h à 14 h et de 18 h à 22h.
- du travail en équipe tournante ou volante : une équipe étant destinée à remplacer les autres pendant les temps de pause.
- Travail par roulement : Le travail par roulement consiste à attribuer des journées de repos hebdomadaire différentes à des salariés ou des équipes de salariés ou des équipes de salariés exerçant la même activité. La prise en compte pour la pénibilité le serait lorsque ces journées de repos sont flottantes.
3/ longs déplacements fréquents
4/ Gestes répétitifs, travail de chaîne, cadences imposées
Sont considérés comme travaux à la chaîne :
" Les travaux effectués dans une organisation comportant un dispositif automatique d'avancement à cadence constante des pièces en cours de fabrication ou de montage en vue de la réalisation d'opérations élémentaires et successives aux différents postes de travail ;
" Les travaux effectués sur des postes de travail indépendants consistant en la conduite ou l'approvisionnement de machines à cycle automatique et à cadence préréglée en vue de la réalisation d'opérations élémentaires et successives aux différents postes de travail ;
" Les travaux effectués sur des postes interdépendants sans dispositif automatique d'avancement des pièces où la cadence est imposée par le mode de rémunération ou le temps alloué pour chaque opération élémentaire. (Décret n° 76/404 du 10 mai 1976 précisant la loi de 1975)
Réunion du 16 janvier 2008, 16h45
Audition de l’Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel des hôpitaux (ANMTEPH) : M. Lionel Sctrick, président, médecin du travail au centre hospitalier de Poissy-Saint-Germain-en-Laye
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et MM. Régis Juanico, Claude Leteurtre, Jean Mallot et Alain Néri, députés.
M. Lionel Sctrick a commenté la note de présentation de la pénibilité au travail qu’il a établie en vue de l’audition (cf. document joint).
Les précisions supplémentaires suivantes ont été apportées :
1° La charge globale de travail des personnels hospitaliers est particulièrement lourde comme en témoignent :
– les études ergonomiques relatives à la charge physique (déplacements, piétinements, station debout prolongée, postures pénibles, mouvements répétitifs, port de charges, manipulation des malades) ; des études podomètriques ont montré que les aides soignants, notamment dans les services de gériatrie, font fréquemment 8 à 10 km de déplacement par jour ; trois à quatre tonnes, voire huit tonnes dans les cas extrêmes, peuvent être manipulés en une seule journée ; ces charges sont d’autant plus conséquentes qu’elles sont supportées par des femmes, parfois enceintes, ou un personnel vieillissant ; le travail est considéré avant tout comme « physique » et à l’origine de troubles musculo-squelettiques ;
– l’organisation du travail sur douze heures qui malheureusement se généralise dans les établissements de santé (services des urgences, maternité, SMUR, chirurgie,…) ne peut être qu’un facteur d’aggravation de la pénibilité du travail ; cette organisation est recherchée par les personnels car elle permet de concentrer la semaine de travail sur trois jours ; la demande est si forte que les directeurs des ressources humaines la propose pour en faire un argument de recrutement : aujourd’hui quand un standardiste demande à faire douze heures de travail en continue, on ne lui refuse pas de crainte de le voir partir …;
– les modifications organisationnelles répétées dans les services et la lourdeur des procédures qui accentuent certes la charge mentale mais aussi la charge psychologique des personnels infirmiers, ne laissent que peu de place à une prise en charge globale et de qualité du patient ; par insuffisance de personnel et donc par manque de temps disponible, en raison d’objectifs avoués de rentabilité, le patient devient un numéro et perd sa dimension humaine ; l’infirmière accomplit de plus en plus de tâches non sanitaires (saisie de données, gestion des prestations, des disponibilités de lits,…) qui orientent son activité vers une mission de gestion et facturation, ce qui crée une pénibilité psychologique eu égard à la perte des repères professionnels et éthiques acquis au cours des 28 mois d’école (il lui devient de plus en plus difficile de s’épanouir professionnellement ; les consultations pour syndromes réactionnels dépressifs sont en nette augmentation) ;
– enfin, les problèmes récurrents d’incivilités, de violence verbales ou même physiques auxquels sont fréquemment confrontés, de nos jours, les personnels des établissements de santé, violence exprimée par les patients, familles ou visiteurs, engendrent indéniablement un climat d’insécurité difficile à supporter.
2° Un curriculum laboris, obligatoire, qui serait renseigné et actualisé par le médecin du travail, permettrait d’effectuer un état réel des différents postes de travail d’affectation (de la durée quotidienne de travail, des rythmes du travail, du travail posté et du travail de nuit) au cours de la carrière professionnelle du salarié (voire un suivi post-professionnel), un suivi des expositions, des travaux pénibles ou dangereux réalisés, ainsi que des conséquences sur sa santé ; dans ce document, le secret médical sera toutefois une limite d’exploitation de cette dernière donnée.
3° L’Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel des hôpitaux (ANMTEPH, www.anmtph.fr), créée en 1963 et qui regroupe environ 300 adhérents, attire une nouvelle fois l’attention des pouvoirs publics sur la situation de la médecine du travail : le contexte démographique de la profession (actuellement, moins de 290 équivalents temps plein pour l’ensemble de la fonction publique hospitalière) ne permettra plus, à court terme, un suivi préventif convenable des agents, dans ce milieu où les risques sont multiples et les situations de travail complexes.
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Réunion du 16 janvier 2008, 17h50
Audition de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) : MM. Jean-François Veysset, cive-président chargé des affaires sociales, et Georges Tissié, directeur des affaires sociales
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, MM. Jean Mallot et Alain Néri et Mme Isabelle Vasseur, députés.
M. Jean-François Veysset a rappelé que la CGPME prend une part active à la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité qui devrait s’achever fin mars 2008. Une difficulté majeure subsiste : la question de la réparation avec ses deux aspects liés à l’individualisation du dispositif et au financement des pouvoirs publics. Les exemples européens montrent que trois données sont fondamentales : le salarié doit avoir été réellement exposé à la pénibilité ou victime de pénibilités ; les risques de pénibilité doivent avoir été reconnus ; la pénibilité doit s’inscrire dans la durée. Une approche individualisée du traitement de la pénibilité est indispensable car il existe une véritable inégalité devant la pénibilité, y compris dans les secteurs difficiles. Il convient d’être strict pour apprécier l’éligibilité d’un travailleur au dispositif de réparation. Une structure d’examen individuel devrait être mise en place et composée de médecins et de représentants des partenaires sociaux. Il faut absolument éviter l’application mécanique de critères (cf. ci-joint la proposition d’accord soumis par les représentants des employeurs à la négociation interprofessionnelle en septembre 2006).
M. Georges Tissié a insisté sur la nécessité de ne pas multiplier les formules de cessation anticipée d’activité. A titre d’exemple, il met en avant le nombre de personnes ayant bénéficié du dispositif « carrières longues » inclus dans la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites (plus de 400 000 bénéficiaires) et le coût qui en résulte. A force de multiplier les formules de ce type, on va finir par être en contradiction avec la volonté politique affirmée par ailleurs de prolonger l’activité des seniors.
M. Jean-François Veysset a, lui aussi, souligné l’explosion des dépenses liées à ce type de dispositif (2,1 milliards d’euros en 2007). Il faudrait être prudent, c’est-à-dire strict, pour la mise en place d’une mesure d’assurance vieillesse pour réparer les effets de la pénibilité.
Pour traiter « le flux » des travailleurs usés, il faut utiliser au maximum les dispositifs de prévention. Les financements devraient être mutualisés, des partenariats conclus et une approche interprofessionnelle de la question mise en place. La prévention doit être développée par la formation, en particulier l’accueil des « primo-entrants ». Il est possible de « dépénibiliser » des tâches par des actions de prévention, mais des relais doivent être mis en place au sein des entreprises. Les fonds existants pourraient être utilisés, par exemple pour mettre en place un droit individuel prioritaire à la formation, bonifié par l’employeur, pour les secondes parties de carrière des seniors.
Si le curriculum laboris doit être mis en place, il faut choisir les modalités les plus simples possible, par exemple le recours à des documents types comme les CERFA. Il faut également éviter de donner l’impression que ce document sera une source de contrôle systématique. La principale difficulté liée à ce document tient à la protection des libertés individuelles : l’établissement du document devra recevoir l’agrément du salarié eu égard à son contenu. La CGPME est disposée à participer à l’identification des pénibilités. Mais il y a une certaine contradiction des syndicats de salariés à vouloir un dispositif d’application générale et la mise en place de curriculums laboris.
M. Georges Tissié, à propos de la négociation sur l’amélioration des conditions de travail et la réduction de la pénibilité du travail, donne un certain nombre de précisions.
Il indique que la commission médicalisée prévue dans le document patronal remis lors de la dernière séance paritaire (26 septembre 2007) pourrait valider les conditions d’accès au droit à une cessation anticipée d’activité pour travaux pénibles - notamment 30 ans d’exposition à des contraintes physiques et psychiques marquées, à un environnement agressif ou à certains rythmes de travail ainsi que l’existence de traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié résultant des travaux pénibles qu’il a exercés -.
Il s’agirait donc d’un dispositif dont l’accès serait lié à un examen individualisé sur la base de conditions (strictes) fixées au niveau national interprofessionnel.
Par ailleurs, un tel dispositif, s’il était mis en œuvre, ne pourrait être financé par les seules entreprises.
M. Jean-François Veysset a conclu que l’on ne peut pas se permettre d’avoir un dispositif d’application automatique (par exemple, anticipation de tant de trimestres de l’âge de départ en retraite pour 10 ans de travail en trois huit). Les critères de pénibilité doivent être utilisés pour détecter les situations individuelles qui devront être traitées séparément.
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Réunion du 16 janvier 2008, 18h30
Audition de l’Institut de veille sanitaire (InVS) : Mme Ellen Imbernon, responsable du département santé travail, et M. Yves Roquelaure, membre du département santé travail et professeur au CHU d’Angers
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, M. Régis Juanico et Mme Isabelle Vasseur, députés.
Mme Ellen Imbernon a indiqué que le département santé travail de l’Institut de veille sanitaire (InVS) travaille sur des programmes destinés à documenter le poids du travail sur la santé (exposition aux cancérogènes, troubles musculo-squelettiques (TMS), asthme, santé mentale,…) et sur l’élaboration d’outils structurants pour exercer ou faciliter la veille sanitaire (réalisation de suivi de cohortes de population générale ou de travail et de matrices emplois-expositions aux nuisances comme l’amiante, les solvants, les farines ou le ciment). Les travaux de l’InVS sont d’ordre épidémiologique. Les risques psycho-sociaux font partie des sujets d’intérêt et l’InVS a un programme spécifique sur ces risques : le programme Samotrace. Par contre, la notion de pénibilité est un concept très complexe, il est d’ailleurs très difficile de le définir. La perception de la pénibilité dépend à la fois des contraintes auxquelles les personnes sont soumises et de leur faculté à répondre à ces contraintes. De nombreux facteurs individuels peuvent moduler ce ressenti et les effets de certaines contraintes de travail peuvent peser plus particulièrement sur certaines catégories de travailleurs, notamment sur les travailleurs vieillissants (postures, contraintes de temps, travail en horaires décalés, déplacements, pluri compétence, éclatement des collectifs de travail et recours à la sous-traitance, non reconnaissance de l’expérience et du savoir faire, etc.). Certaines contraintes, qui peuvent ne pas être ressenties comme pénibles peuvent toutefois être très délétères pour la santé, c’est le cas par exemple de l’exposition à certaines nuisances chimiques cancérogènes. De nombreux travaux ont permis d’objectiver les principaux facteurs de pénibilité et leur impact sur la santé des populations de travailleurs, on peut citer : postures difficiles, port de charges lourdes, travail de nuit, à la chaleur, aux intempéries, exposition aux cancérogènes (plus de deux millions de personnes sont, en France, exposées au moins une fois par semaine), exposition aux contraintes psychosociales (tension au travail, faible latitude décisionnelle), exposition au bruit, aux poussières, à certaines nuisances chimiques, la charge mentale et le « stress »en lien avec les sollicitations du public, pour ne citer que ceux-là..
Mme Ellen Imbernon décrit le principe des matrices emplois expositions : il s’agit de bases de données d’attribution d’expositions à des nuisances selon les professions et les secteurs d’activité. Elles contiennent des indices d’exposition qui varient dans le temps en fonction de la réglementation. Ces bases de données croisées avec des histoires professionnelles des travailleurs permettent de retracer l’historique de leurs expositions. L’histoire professionnelle des individus doit être connue : l’InVS utilise un échantillon constitué par une enquête sur 10 000 de personnes représentatives, ce qui permet d’évaluer la prévalence des expositions dans la population en France..
L’application des matrices emplois-expositions au problème des relations dans le travail est plus difficile. Le modèle Karasek est le plus communément utilisé : il mesure le stress professionnel selon trois dimensions (demande psychologique, latitude décisionnelle et relations avec les collègues et avec la hiérarchie) et permet de définir la notion de « job strain » ou « tension au travail » à partir d’un questionnaire auto-administré. Ce modèle définit la tension au travail comme une forte demande psychologique associée à une faible latitude décisionnaire. Un essai d’élaborer une matrice emplois-exposition a été réalisé à partir des données de l’enquête Sumer mais la matrice construite donne des résultats trop dispersés selon le secteur d’activité. En effet, si certaines professions et secteurs engendrent une forte tension au travail (activités financières par exemple), la profession et le secteur d’activité sont insuffisants pour caractériser ce risque qui est fortement dépendant de situations particulières. Des travaux de typologies de situations stressantes à partir de ce modèle sont toutefois en cours (Sumer, Samotrace). La littérature épidémiologique internationale regorge d’études établissant un lien entre la dégradation de la santé (physique et mentale) et la contrainte organisationnelle.
Les risques psycho-sociaux sont difficiles à appréhender mais les modèles proposés (Karasek, Siegrist) permettent une bonne approche, l’étude de leurs effets sur la santé mentale des populations de travailleurs est plus complexe car il faut tenir compte de facteurs de risques extra-professionnels. On constate de réelles dégradations des conditions de travail : par exemple, le temps de travail morcelé des caissières et des agents de nettoyage. Le posté avec modification des rythmes circadiens (travail de nuit) vient, début janvier 2008, d’être ajouté par le Centre international de recherche sur le cancer de l’OMS à Lyon à la liste des agents probablement cancérogènes. De nombreux facteurs de pénibilité sont connus ; le code du travail contient une importante réglementation de prévention et interdit certains travaux à certaines catégories de travailleurs (jeunes, femmes, femmes enceintes). C’est le cas du port de charges lourdes ou de gestes répétitifs et postures délétères dont on sait aujourd’hui qu’ils ne se réduisent pas avec l’âge (les jeunes travailleurs restent surexposés mais les travailleurs plus âgés, y compris de plus de 45 ans, restent très exposés).
M. Yves Roquelaure a indiqué que l'expérience favorise la construction de savoir faire de métier pouvant limiter la pénibilité, lorsque l'organisation du travail permet des marges de manœuvre suffisantes, par l'adoption de stratégies opératoires et gestuelles d'allègement des contraintes. Cependant, ces savoir-faire de métier tendent à se perdre peu à peu avec la généralisation de la polyvalence,de la mobilité des travailleurs et du manque de formation professionnelle initiale et continue. Les travailleurs sont fragilisés par cette mobilité: les mécanismes d’entraide disparaissent ce qui favorise l'apparition de TMS par réduction des stratégies collectives d'allègement des contraintes. A contrario, le réseau TMS de l’InVS a montré que dans le BTP, le collectif reste plus fort qu'ailleurs, ce qui permet de limiter en partie les effets des contraintes biomécaniques et sans doute la pénibilité ressentie. L'exemple du BTP pose la question des normes sociales de la tolérance à la douleur qui est plus forte dans ce secteur qu'ailleurs. De plus ces normes évoluent avec les progrès de la société: naguère on tolérait qu’une personne légèrement malade continue de travailler, maintenant moins.
En matière de relation entre les divers organismes en charge du suivi de la pénibilité (médecins du travail, CREAPT, ANACT, INRS,…), Mme Ellen Imbernon a estimé qu’il y a un défaut de pilotage, même s’il existe un réel travail en commun. Les résultats dépendent toutefois largement des personnes au plan local. Il manque en fait une définition d’une véritable politique de santé au travail.
L’InVS s’appuie notamment sur les observations des médecins du travail dans plusieurs de ses programmes (maladies à caractère professionnel, TMS, asthme et travail, santé mentale et travail). En effet, ces médecins sont détenteurs d’un savoir faire unique : la clinique médicale du travail qui analyse de l’état de santé des personnes à la lumière de leurs conditions de travail et de leurs expositions professionnelles. Ils ont toutefois besoin de s’organiser pour la mise en commun de leurs données, car la visibilité des informations qu’ils recueillent est encore insuffisante ; ils doivent réfléchir à des stratégies d’actions communes ; il faut une volonté et des moyens. Les médecins du travail ne doivent pas être supprimés. Ils permettent ainsi une vision unique sur la santé en lien avec le travail. De plus, les médecins du travail jouent un rôle important sur le plan de la santé publique, ne serait-ce pour les hommes de moins de 50 ans qui ne consultent jamais de médecin, ne serait-ce pour leur rôle en matière de maintien dans l’emploi des seniors. Il faut cependant que les médecins du travail aient le temps de se rendre dans les entreprises.
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Réunion du 17 janvier 2008, 10h
Audition de l’Union syndicale Solidaires :
MM. Thierry Lescant, Gérard Gourguechon, Robert Kosmann, secrétaires nationaux
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Isabelle Vasseur, députée.
La délégation a rappelé que l’Union syndicale Solidaires est composée de 42 syndicats.
On ne peut donner une définition globale de la pénibilité. On peut trouver des définitions transversales mais des particularités subsisteront dans de nombreux secteurs d’activité.
Solidaires n’est pas d’emblée en faveur de la compensation ; la prévention de la pénibilité doit être prioritaire. Il faut toutefois prendre en compte les travailleurs âgés usés.
La pénibilité est une somme de facteurs mais elle découle pour beaucoup de la volonté patronale d’accroître la productivité. Le lien entre, d’une part, rentabilité et productivité et, d’autre part, pénibilité de salariés se constate de plus en plus. La pénibilité est également provoquée par la faiblesse des moyens en personnel mis par l’entreprise en face des objectifs. Il découle de l’accroissement des rendements et des objectifs de production une pénibilité mentale. Or « la santé et la vie des gens ne sont pas à vendre ». En particulier dans les métiers en rapport avec l’humain, la pression au rendement crée une souffrance mentale et du mal-être car le travailleur constate qu’il ne peut plus faire correctement son métier. La pénibilité devient conflictuelle, d’autant plus qu’elle dépasse le cadre du travail pour retentir sur la vie familiale.
Les facteurs de pénibilité sont variables dans le temps et selon l’âge. Ils sont cependant connus (travail de nuit, horaires décalés, temps de travail,…).
La pénibilité se généralise et touche aujourd’hui tous les employés. Ainsi à l’usine Renault de Guyancourt, M. Xavier Bertrand a pu observer une amplitude horaire de 5h30 à 23h, qui a depuis été ramenée à 7h-21h, mais le CHSCT a relevé qu’un tiers des salariés travaille plus de dix heures par jour et deux tiers plus de neuf heures par jour, tout en emportant du travail à la maison. Ces conditions expliquent beaucoup les suicides. En France, on compte un suicide par jour sur les lieux de travail.
Depuis les lois Aubry sur les 35 heures, les pauses ont été supprimées ; les repas sont pris grâce à des distributeurs ; ils ne sont plus pris en commun depuis ces lois. Et la tendance du patronat est à la suppression des pauses : le syndicat majoritaire (SIA, ex-CFT-CSL) de l’usine PSA d’Aulnay a accepté, en 2007, que le temps de pause des pistoleteurs, qui travaillent avec des casques de 2 kg, passe de 1h15 à 20 minutes en contrepartie d’un rachat du temps de pause. Le travail n’est plus conçu comme un lieu de vie.
Il appartient au législateur d’intervenir sur les points suivants :
– renforcer l’obligation de respect des règles de la médecine du travail : aujourd’hui quand on a un bras cassé, on revient le lendemain pour être affecté à un autre poste ;
– renforcer les pouvoirs et les moyens de la médecine du travail ;
– arrêt de l’extension des horaires atypiques de travail ;
– revenir sur le travail de nuit des femmes : il y a trop de volontaires pour du travail de nuit (parfois parce que les primes sont bonnes) car les salaires de base sont insuffisants ; l’espérance de vie d’une infirmière ayant effectué toute sa carrière de nuit est réduite de dix ans ;
– prendre en compte les travailleurs atteints d’une incapacité permanente inférieure à 80 % ;
– rétablir les cessations anticipées d’activité et les préretraites ;
– liquider les pensions de retraite au taux plein quand on a 37,5 ans d’assurance ;
– étendre le pouvoir d’intervention des pouvoirs publics à l’organisation du travail dans l’entreprise (cf. législation belge).
Naguère, les employeurs affectaient systématiquement les travailleurs de plus de 50 ans de la métallurgie à des postes de travail plus faciles, c’est-à-dire hors de la ligne de production. Cette politique est terminée. De même, Renault a supprimé ses ateliers protégés par automatisation ou sous-traitance des tâches.
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Réunion du 17 janvier 2008, 11h
Audition du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) :
MM. François-Xavier Clédat, chef de file de la négociation interprofessionnelle sur la pénibilité, Dominique Tellier, directeur des relations sociales, et Guillaume Ressot, directeur adjoint des affaires publiques
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et Mme Isabelle Vasseur, députée.
M. François-Xavier Clédat a souligné la grande complexité du sujet, qui explique le temps pris par la négociation interprofessionnelle. Il existe peu d’études ; les arguments reposent sur les différences d’espérance de vie.
On ne peut pas nier l’existence de la pénibilité au travail et d’une pénibilité ressentie. Le MEDEF veut la prendre en compte. Mais quand on regarde les autres pays européens, on constate qu’il n’existe pas de dispositif sur la pénibilité. Seule l’Italie cherche à en mettre un en place. Néanmoins les entreprises françaises essaient d’améliorer les conditions de travail.
Le volet le plus important de la négociation est celui de l’amélioration des conditions de travail.
L’idée selon laquelle il convient de faire un geste en direction des salariés usés est louable mais la France est le pays européen où l’espérance de vie est presque la plus longue. Il ne faut pas concevoir un dispositif de départ anticipé en retraite alors que tout le monde sait qu’il va falloir travailler plus longtemps.
L’accord interprofessionnel sera d’autant efficace plus qu’il sera mesuré. De plus, les comptes des entreprises ne permettent pas d’avoir des provisions pour financer les mesures de traitement de la pénibilité. Il faudra faire appel à la solidarité nationale et accessoirement aux financements des entreprises.
M. Dominique Tellier a rappelé que la discussion s’est engagée sur le fondement de l’article 12 de la loi portant réforme des retraites. Nous sommes dans une logique de recherche d’accroissement du taux d’activité des seniors. Or les syndicats suivent une logique d’égalisation des espérances de vie à la retraite des Français. Ces deux approches sont difficilement conciliables.
On ne peut pas également, comme le propose des syndicats, appliquer de manière automatique des critères d’éligibilité, comme pour le dispositif des carrières longues. Le coût financier serait excessif et le système provoquerait des tensions sur le marché du travail.
Les négociateurs sont confrontés à des problèmes techniques lourds : définition des critères de pénibilité (il faudrait laisser aux branches le soin d’affiner des principes généraux), définition des populations concernées, définition des emplois effectivement exercés (la pénibilité d’un peintre est différente selon qu’il exerce son activité en intérieur ou en extérieur), reconstitution des carrières des salariés âgés usés.
L’argument de la pénibilité apparaît souvent comme un biais utilisé par les syndicats pour reconstituer des dispositifs de départ anticipé à la retraite. Or il n’existe pas d’égalité devant la mort ou l’espérance de vie. Il n’est pas possible de retenir le seul facteur de l’espérance de vie pour l’application d’un dispositif sur la pénibilité. Il existe des facteurs multiples et diffus. Ainsi, entre des ouvriers français et espagnols travaillant dans deux usines identiques avec des conditions de travail identiques en France et en Espagne, les ouvriers français ressentiront plus de fatigue, plus de pénibilité et auront plus d’arrêts de travail. C’est d’autant moins explicable que la durée hebdomadaire du temps de travail est plus élevée en Espagne.
La traçabilité pose problème car les carrières ne sont plus accomplies dans une seule entreprise. Le problème est encore plus aigu dans les PME.
Le MEDEF n’est pas sur une logique de réparation ; il n’exprime donc pas le besoin de pouvoir reconstituer les carrières et donc de disposer d’une traçabilité des pénibilités. Le curriculum laboris n’a pas encore été vraiment débattu mais il pourrait être pris pour une recherche de rétablissement du livret ouvrier. On peut éviter la reconstitution de carrière par des efforts d’amélioration des conditions de travail.
Quant aux aménagements de carrière, ils sont utiles pour le traitement des seniors mais il faut passer par des accords de branche.
M. François-Xavier Clédat a souligné que la donnée fondamentale en matière de pénibilité est la durée et le cumul des facteurs de pénibilité. Les branches peuvent travailler à un accord pour la gestion des carrières.
M. Dominique Tellier a indiqué qu’un accord de branche dans le textile permet de traiter prioritairement une demande de changement d’affectation après un certain nombre d’années de travail de nuit. Le curriculum laboris pourrait être utilisé pour savoir si un tel dispositif doit être déclenché, mais il crée un risque de discrimination à l’embauche.
M. François-Xavier Clédat a jugé qu’il y a là une matière à étude. Quant à la suppression de la compensation par la rémunération, elle est difficilement envisageable car les travailleurs quitteront les emplois où les primes de pénibilité sont supprimées.
M. Dominique Tellier a précisé que des mesures de seconde carrière sont envisageables dans les grandes entreprises mais les PME ne pourront pas offrir de tels aménagements. Dans les métiers où la pénibilité ne peut pas être éliminée, seule la mobilité professionnelle peut apporter une solution.
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Réunion du 17 janvier 2008, 12h
Audition de l’Ordre national des médecins : Dr Denis Saint-Paul, chargé de mission au CNOM pour la médecine du travail, accompagné de Madame le Dr Liliane Boitel, médecin conseil du Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise (CISME)
Synthèse de l’audition
Etaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Denis Saint-Paul a proposé de définir la pénibilité au travail comme étant « ce qui est difficile à supporter de par les contraintes et l’environnement du travail et qui aboutit à une dégradation de l’état de santé ». La pénibilité peut varier dans le temps. Elle se différencie des travaux dangereux par le fait que ces derniers ne sont pas toujours ressentis comme pénibles (par exemple, l’exposition aux cancérogènes).
L’enquête Summer effectuée sur 50 000 salariés par 1 800 médecins en 1994 et 2003 a correctement recensé les facteurs de pénibilité (gestes répétitifs, travail de nuit, cadences élevées, port de charges lourdes, bruit, etc.).
La pénibilité pose le problème particulier des travailleurs seniors dont l’état de santé rend pénibles des travaux qui ne le sont pas pour d’autres travailleurs. La plupart des postes de travail n’ont pas, en fait, été conçus pour des travailleurs vieillissants.
Mme Liliane Boitel a estimé que la pénibilité est appréciée différemment par le salarié, l’employeur et le médecin. Le médecin apprécie la pénibilité à partir de sa connaissance des postes de travail et de celle de l’état de santé des salariés qui « ne tiennent pas le coup ». Cette altération de la santé recouvre des situations différentes. D’une part les salariés usés par leurs conditions de travail (une étude récente de la DARES apporte des précisions sur ce sujet), d’autre part des salariés présentant des problèmes de santé liés à l’âge (leur nombre risque d’augmenter avec le recul de l’âge de la retraite) et enfin des salariés pour lesquels le poste de travail n’est plus adapté à leur vieillissement physiologique.
La culture du travailleur vieillissant n’est pas passée dans l’entreprise. La France a pris l’habitude de gérer les travailleurs âgés par les préretraites : c’est une culture du départ précoce. On a géré l’emploi par l’âge et maintenant on se demande comment gérer l’âge dans l’emploi. Cette situation est d’autant plus grave que le départ des anciens crée une perte dans la transmission du savoir-faire ; certaines entreprises sont amenées à faire revenir en cachette des retraités.
Par ailleurs, l’image des seniors est paradoxale dans notre société : beaucoup préfèrent apparaître comme un jeune retraité dynamique qu’être perçu dans son entreprise comme un « vieux salarié ».
La répartition des salariés âgés varie selon le secteur professionnel. Si, en moyenne, dans le secteur privé on retrouve près de 20 % de salariés âgés de plus de 50 ans, ce pourcentage varie considérablement selon les secteurs professionnels (moins de 5 % dans la coiffure, par exemple). Par ailleurs, il faut relever le fait que les arrêts maladies des seniors ont augmenté alors que certains dispositifs de préretraite ont diminué.
Des études font état d’une augmentation de l’incidence de certaines pathologies peu de temps après le départ en retraite des salariés. On peut s’interroger sur ce constat : est-il lié à une véritable augmentation ou au fait que ces jeunes retraités prennent le temps de consulter un médecin et que, de ce fait, les dépistage et diagnostic sont mieux assurés que pendant leur vie active ?
Nous ne disposons que de très peu de données (en dehors des statistiques d’accidents du travail et de maladies professionnelles) sur l’état de santé de la population active alors que tous les salariés sont vus chaque année ou tous les deux ans par un médecin du travail. Les rapports demandés aux médecins du travail par le ministère du travail sont essentiellement des rapports d’activité et de moyens et ne donnent pas d’informations exploitables sur l’état de santé des salariés. Nous ne sommes pas dans une logique de santé publique mais les choses sont en train de changer.
M. Denis Saint-Paul a considéré que le bilan de la santé au travail « n’est pas meilleur en France que dans d autres pays européens ».
Mme Liliane Boitel a estimé que, dans un champ de santé au travail, la France n’a pas su mettre en place, jusqu’à ces dernières années, une politique d’aide à la décision reposant sur des constats collectifs. Le Plan national « santé et environnement » et le Plan « santé travail » sont récents.
Un effort important est également à conduire en matière d’éducation pour la santé. Il vaut mieux expliquer pourquoi une situation de travail présente des risques que d’imposer une réglementation (même si elle est nécessaire) mais il importe de commencer par une action pédagogique et ce dès l’enfance et lors de la formation professionnelle. La pédagogie de l’éducation pour la santé commence à se développer et à prendre en compte les représentations sociales des risques. Cela a été fait dans le domaine de la prévention routière mais exige encore des efforts importants en termes de communication.
A partir des données détenues par les médecins du travail, il faut définir des actions sectorielles déclinées régionalement.
Il faut utiliser l’effet de levier des taux de cotisation, comme pour les accidents du travail et maladies professionnelles, pour agir sur les conditions de travail.
M. Denis Saint-Paul a rappelé l’existence de l’article L. 231-3-3 du code du travail, qui n’est pas appliqué sur le terrain (« Des décrets en Conseil d’Etat, pris en application de l’article L. 231-2, et après avis des organisations syndicales d’employeurs et de salariés intéressées, organisent par branche d’activité, en fonction des risques constatés, la limitation progressive des modes de travail par équipes successives, des cadences et des rythmes de travail lorsqu’ils sont de nature à affecter l’hygiène et la sécurité des travailleurs »).
Mme Liliane Boitel a souhaité que la pénibilité psychique soit prise en compte et que le risque psychosocial soit enseigné dans les programmes de formation des managers.
En ce qui concerne le risque psychosocial, il importe de ne pas tout médicaliser. De nombreux médecins réfléchissent sur ce sujet, font des constats et les analysent, puis entreprennent des actions de formation et d’information.
M. Denis Saint-Paul a souligné que les contraintes psychiques sont cependant les plus difficiles à résoudre : les solutions sont multiples.
Mme Liliane Boitel a indiqué que des actions sont nécessaires et cite l’exemple – que l’on ne devrait plus voir – de ces offres d’emploi où l’on demande « une personne capable de manager par le stress ».
Si le stress résulte d’une pression il s’exprime différemment selon la capacité de résistance de l’individu. Beaucoup de campagnes anti-stress privilégient le renforcement de ces capacités de résistance au détriment d’une véritable action de prévention sur les facteurs de stress. De même, la médecine de soins traite et médicalise les symptômes du stress (qui est parfois nécessaire et utile) mais n’a que peu d’actions en direction des facteurs qui en sont à l’origine.
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Réunion du 17 janvier 2008, 15h00
Audition de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) : Mme Pascale Sorrentinella, directrice marketing et communication
et M. Philippe Pager, chargé de mission auprès du directeur général adjoint
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
Mme Pascale Sorrentinella a rappelé que l’AFPA dispose de 130 centres, avec deux métiers essentiels que sont la formation et la gestion des compétences (ingénierie, mise en œuvre des prestations). L’AFPA accueille en son sein 160 000 stagiaires par an. Ces derniers ont en général un niveau de qualification assez faible.
L’accueil de publics de tous âges se fait en plusieurs étapes et est différencié selon le but de la formation : une reconversion ou une évolution professionnelle.
La première étape est celle de l’orientation, et de la vérification des aptitudes. Cette vérification passe par une évaluation par le psychologue du travail qui peut diriger la personne vers une visite médicale complémentaire réalisée par le médecin de ville ou par les centre d’examen de santé (CES). La limite de cette vérification est qu’elle ne s’assure que de l’absence de contre-indications à la formation et non pas de l’aptitude au métier que la personne sera amenée à exercer ensuite. La fiche de non contre-indications est ensuite conservée par le stagiaire, qui décidera ou non de la transmettre à son employeur.
La seconde étape est l’entrée en formation où la personne est préparée à des questions de sécurité. L’idée est de former à la dangerosité du travail, et de donner aux personnes la capacité de s’adapter aux risques qu’elles rencontreront.
M. Philippe Pager a souligné que la question de la pénibilité prend toute son importance lors de l’élaboration des référentiels métiers, qui précisent les aptitudes nécessaires que doit avoir une personne pour un titre de formation. Une enquête a ainsi été réalisée sur vingt-deux titres, sur les trois cent cinquante qui existent à l’AFPA. Le but est de repérer les situations à risque et de les traduire dans la formation afin de diminuer le taux d’accidentologie. Ces fiches recensent les dix-sept risques identifiés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ainsi que les risques physico-biologiques (troubles du comportement, addiction, etc.). L’enquête est maintenant en attente de mise en pratique opérationnelle, mais il est sûr qu’elle permettra une meilleure prise en compte des risques.
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Questionnaire de santé préalable à l’entrée en formation
Avis d’absence de contre indication médicale à suivre la formation
A remplir par vous-même et au selon vos réponses par votre médecin référent.
Exigences du métier de Cariste d’entrepôt :
Ø Endurance physique : capacité de manutentions fréquentes et variées.
Ø Environnement bruyant
Ø Endurance de postures inconfortables
Ø Ambiances thermiques variées (forte chaleur, grand froid)
Ø Bonne vision de loin et de près, résister à l’éblouissement, apprécier les distances
Ø Bonne audition
Ø Etre en contact avec l’un ou plusieurs des produits suivants :
o Fumée, gaz d’échappement, poussières, vapeurs
Ø Présenter des TMS ou des déficiences sensorielles permettant l’exercice de la formation ou du métier avec ou sans compensation.
A partir de ces critères, nous vous demandons de bien vouloir vérifier si le candidat ne présente pas de contre indication médicale pour suivre cette formation.
Question au stagiaire :
Pensez vous que votre état de santé est compatible avec ces exigences ?
Si OUI : signer le document
Si NON : vous pouvez prendre contact avec votre médecin référent.
Question au médecin référent :
Pouvez-vous certifier que le candidat ne présente pas de contre-indications médicales lui empêchant d’accéder à une formation et un emploi de cette nature ?
Date :
Avis du médecin :
Nom et prénom :
Signature du Stagiaire
Questionnaire de santé préalable à l’entrée en formation
Avis d’absence de contre indication médicale à suivre la formation
A remplir par vous-même et au selon vos réponses par votre médecin référent.
Exigences du métier de menuisier d’agencement :
Ø Station debout prolongée
Ø Ambiance thermique variées (courants d’air, froid, chaleur,..)
Ø Fréquentes manutentions
Ø Bonne vision de près
Ø Bonne audition
Ø Effectuer de fréquentes manutentions
Ø Dextérité manuelle
Ø Utilisation d’outils et de machines telles que scie circulaire, dégauchisseuse, toupie, machines à bois,..
Ø Etre en contact avec l’un ou plusieurs des produits suivants :
o Poussières de bois, composés minéraux (bois traités en préventif) colles, solvants, décapants (soude, acide) pigments, vernis, métaux
Ø Présenter des TMS ou des déficiences sensorielles permettant l’exercice de la formation ou du métier avec ou sans compensation
A partir de ces critères, nous vous demandons de bien vouloir vérifier si le candidat ne présente pas de contre indication médicale pour suivre cette formation.
Question au stagiaire :
Pensez vous que votre état de santé est compatible avec ces exigences ?
Si OUI : signer le document
Si NON : vous pouvez prendre contact avec votre médecin référent.
Question au médecin référent :
Pouvez-vous certifier que le candidat ne présente pas de contre-indications médicales lui empêchant d’accéder à une formation et un emploi de cette nature ?
Date :
Avis du médecin :
Nom et prénom :
Signature du Stagiaire
Mission pénibilité au travail
Audition du 17 janvier 20081. Rappel de ce qu’est l’AFPA
Deux métiers :
- formation pour des emplois allant d’ouvrier / employé à technicien supérieur
- gestion des compétences,
• au bénéfice des demandeurs d’emploi : comment acquérir des compétences ; comment les faire évoluer ; comment les faire reconnaître
• pour construire les titres professionnels – diplômes du ministère du travail
Quelques chiffres :
- 260.000 demandeurs d’emploi accueillis pour les conseillers sur leur projet de formation
- 160.000 personnes formées
- 70% des stagiaires accèdent à un emploi dans les 6 mois suivant la fin de leur formation
- 130 centres de formation et 200 services d’orientation professionnelle
Une pédagogie :
- qui repose sur l’apprentissage en situation de travail : reconstituée dans les centres ou réelle en entreprise
- qui apporte les connaissances requises en lien avec ces situations de travail
- qui repose sur des formateurs qui sont d’abord des professionnels de leur métier
- qui propose un accompagnement des personnes pour sécuriser leur réussite
- qui conduit à une reconnaissance des compétences acquises
2. L’évolution du monde du travail
2.1. Les métiers
Pour construire les référentiels des titres professionnels, l’AFPA est amenée à analyser le contenu et les conditions d’exercice de 300 métiers dans les secteurs du bâtiment, de l’industrie et des services.
Ce travail opérationnel et les échanges avec le monde universitaire permettent de dégager quelques tendances au regard de la problématique traitée qui vont au-delà de la pénibilité physique :
- les prescriptions qui encadrent le travail se renforcent, notamment sur les questions environnementales et de sécurité ;
- ces prescriptions sont contradictoires : arbitrage entre qualité et productivité ;
- la capacité à faire face à des aléas est une composante de plus en plus importante de la compétence professionnelle.
Ces évolutions peuvent contribuer à l’augmentation de la pénibilité et nécessitent de nouvelles compétences de la part des salariés :
- savoirs faire liés à la dangerosité du travail : aptitude à l’identifier, l’éviter, la contourner ou la réduire ;
- savoir que faire, comment agir face à des situations imprévues ou à risques ;
- savoir gérer des aléas, prendre des décisions autrefois dévolues à l’encadrement de proximité ;
- renforcer l’autonomie du salarié porteur de sa propre prévention.
2.2. L’allongement de la vie au travail / les tensions sur les recrutements
Dans un marché du travail plus tendu et du fait de l’allongement de la vie au travail, plusieurs phénomènes vont coexister :
- la nécessité pour les entreprises de fidéliser leurs salariés parce que les recrutements deviendront plus difficiles avec pour conséquence une gestion de la mobilité professionnelle horizontale ou verticale au sein des entreprises ; dans ce contexte, la mise en place de la GPEC dans les PME dans une logique de fidélisation des salariés et d’évitement de la concurrence entre les grandes et petites entreprises constitue une opportunité ;
- une augmentation croissante de la mobilité volontaire des salariés, notamment en cas d’insatisfaction par rapport aux conditions d’exercice de leur métier qui implique l’accompagnement des mobilités volontaires ;
- les mutations économiques qui induisent des besoins de reconversion des salariés ;
- la persistance d’un noyau dur du chômage plus apparent qu’aujourd’hui
3. Conséquences pour la formation professionnelle
Pour la formation professionnelle, le sujet est double : il s’agit d’avoir une action de prévention et de reconversion.
La prévention concerne le domaine de la suppression des risques au travail et la reconversion concerne la construction des supports adaptés aux différents publics en cas de besoin (ergonomie du poste de travail, modélisation des pratiques réussies développées au sein des MDPH au bénéfice des personnes en situation de handicap, techniques de compensation, adaptation des organisations de travail, aménagement des plateaux techniques, suivi et accompagnement de la personne…)
3.1. La description des métiers et l’objet de la formation
La formation professionnelle a pour mission de préparer les stagiaires à l’exercice d’un métier. Chaque référentiel métier sur lequel l’ingénierie de formation est construite décrit les composantes de ce métier : il définit les compétences professionnelles en intégrant la prévention des risques d’un métier donné, mais développe également les compétences transverses pour une adaptation aux conditions réelles d’exercice de l’emploi et donc des éléments de pénibilité qui s’y rattachent.
La démarche pédagogique vise l’acquisition des comportements professionnels d’un métier aussi importants que l’apprentissage d’une technique ou d’un savoir-faire.
Ainsi, d’un périmètre de formation strictement limité au geste technique et des postures gestuelles limitant la pénibilité physique, on passe à un périmètre plus large intégrant des problématiques telles que l’éthique, le développement durable, la sécurité, la capacité à faire face à des aléas.
3.2. L’accès à la formation professionnelle
Les services d’orientation aident les demandeurs d’emploi à construire leur projet de formation, qu’il se déroule à l’AFPA ou dans un autre organisme de formation. Pour éviter que ces demandeurs d’emploi ne s’engagent dans une formation alors qu’ils ne sont pas en mesure d’occuper les emplois visés, ces prestations doivent prendre en compte de la pénibilité au travail pour le métier visé.
Ces services se structurent autour :
- de l’écoute des besoins du candidat et de la connaissance de son profil,
- du positionnement (service d’appui au projet professionnel) en vue d’intégrer une formation adaptée,
- la mise en adéquation entre les exigences santé du métier et les caractéristiques correspondantes du candidat/stagiaire.
Ils s’appuient sur les référentiels des métiers élaborés pour permettre la reconnaissance des compétences par un titre professionnel.
4. Exemples
a) Analyse des métiers à fort de risques et de pénibilité (22)
Objectifs de l’enquête :
- Repérage des situations à risque dans l’ingénierie de formation,
- Elaboration d’instrumentation de toute situation à risque,
- Construction de séquences pédagogiques adaptées à la prévention des risques intégrant la pénibilité.
b) Sécurisation de l’entrée en formation
- Pour les formations à risque, élaboration d’une grille type concernant les exigences de santé relatives au métier cible ;
- Réalisation lors de l’entretien entre le stagiaire et le psychologue du travail de l’évaluation des capacités du stagiaire avec les exigences santé du métier. En cas de doute, réalisation de visites médicales complémentaires permettant de vérifier qu’il n’y a pas d’incompatibilité.
c) Equipements de Protection Individuelle
- Identification des équipements nécessaires et obligatoires sur les formations cibles (22),
- Dotation des stagiaires des EPI nécessaires,
- Sensibilisation par le formateur au port et à l’utilisation de chaque EPI,
- Evaluation.
Questionnaire de santé préalable à l’entrée en formation
Avis d’absence de contre indication médicale à suivre la formation
A remplir par vous-même et au selon vos réponses par votre médecin référent.
Exigences du métier de soudeur à l’ARC :
Ø Endurance physique.
Ø Environnement bruyant
Ø Endurance de postures inconfortables (espace restreint)
Ø Ambiance thermique variée (forte chaleur, grand froid)
Ø Station debout prolongée
Ø Environnement de tôles, d’acier et de feu
Ø Bonne vision, même corrigée
Ø Dextérité, précision du geste (pas de tremblements des mains)
Ø Etre en contact avec l’un ou plusieurs des produits suivants :
o fumée de soudage, rayonnements (ultraviolets, lumineux, infrarouge), oxyde de fer (poussières) gaz de combustion (CO2, O3, oxydes d’azote, monoxyde de carbone), autres
Ø Présenter des TMS ou des déficiences sensorielles permettant l’exercice de la formation ou du métier avec ou sans compensation.
A partir de ces critères, nous vous demandons de bien vouloir vérifier si le candidat ne présente pas de contre indication médicale pour suivre cette formation.
Question au stagiaire :
Pensez vous que votre état de santé est compatible avec ces exigences ?
Si OUI : signer le document
Si NON : vous pouvez prendre contact avec votre médecin référent.
Question au médecin référent :
Pouvez-vous certifier que le candidat ne présente pas de contre-indications médicales lui empêchant d’accéder à une formation et un emploi de cette nature ?
Date :
Avis du médecin :
Nom et prénom :
Signature du Stagiaire
Réunion du 17 janvier 2008, 16h00
Audition de l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) : Mme Christine Dupuis, secrétaire nationale et Mme Elizabeth Charrin, psychologue du travail
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
Mme Christine Dupuis a défini la pénibilité comme un ensemble de facteurs inhérents à l’exercice de l’activité professionnelle et reconnus comme nocifs et délétères à plus ou moins long terme pour la santé physique et mentale. Il s’agit de l’ensemble de facteurs qui rendent le travail pénible, qui causent une peine excessive,. L’idée essentielle est la charge ou la peine excessive et la différence entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. Il importe donc d’avoir une définition très large de la pénibilité.
La densification du travail (la suppression des pauses par exemple), aggrave le sentiment de pénibilité. Elle a pour conséquence une baisse de la solidarité, qui, combinée à la crainte accrue de perdre son emploi, contribue fortement à la souffrance au travail. Cette souffrance se traduit par un nombre d’arrêts maladie toujours croissant. Un groupe de travail existe d’ailleurs chez Total à ce sujet.
Plusieurs critères de pénibilité peuvent être distingués. Certains sont liés à des risques identifiés (accidents, contamination, etc.) ; d’autres, en revanche ont trait à des problèmes psycho-sociaux qui peuvent avoir pour conséquence de l’agression et de l’agressivité (relation avec la clientèle par exemple). Il est facile de déterminer certains risques objectifs mais les risques subjectifs sont beaucoup plus difficiles à déterminer.
Si le système français de prévention est un des systèmes qui disposent du plus de moyens en terme de couverture des entreprises privés, du nombre d’acteurs de prévention et de compétence, il n’en demeure pas moins qu’il n’est pas efficient.
La prévention est un axe majeur de la politique de la santé au travail qui nécessite un dialogue accepté de la part de tous les acteurs autour d’objectifs communs.
L’absence problématique de représentation syndicale dans les très petites entreprises (TPE) pourrait être résolue par la mise en place d’un dialogue territorial. En effet, le niveau de la branche n’est pas adapté. Le niveau territorial, comme le bassin d’emploi, pourrait, en revanche être un lieu de discussion et d’échange.
Mme Elizabeth Charrin a souligné l’importance de la pluridisciplinarité des ces structures territoriales d’écoute et d’échange, qui doivent associer des médecins du travail, des ergonomes, etc. Le but de telles structures est de plusieurs ordres. Elles doivent être un moyen de recours en cas de harcèlement effectif ou ressenti, permettre un échange entre salariés sur le ressenti des conditions de travail, évaluer la gravité des situations, et faire un travail de réflexion et de sensibilisation générale sur la problématique de la pénibilité. Elles ne doivent, en revanche, pas être des lieux de sanction. Elles peuvent, par ailleurs, travailler en partenariat avec les associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail (ARACT).
Mme Christine Dupuis a ensuite évoqué la réparation. Il est clair aujourd’hui que les préretraites doivent être exceptionnelles et liées à une reconnaissance de la pénibilité au travail. On doit par contre améliorer le taux d’activité des seniors. La formation est donc d’autant plus importante et elle doit permettre le reclassement et la « deuxième carrière ».
Mme Elizabeth Charrin a conclu sur le fait que l’enjeu de la notion de pénibilité est bien le seuil (fluctuant) entre ce qui est pénible et ce qui ne l’est pas. Ce seuil est avant tout subjectif, en particulier pour les critères psychologiques, sur lesquels le médecin du travail est le plus à même de statuer. En ce qui concerne le seuil physique de la pénibilité, une discussion par branche pourrait avoir lieu pour déterminer ce seuil pour chaque métier.
Enfin, le plus important est que la pénibilité, en particulier psychique, soit reconnue ; la compensation est moins nécessaire que cette reconnaissance, l’instauration d’une prime de pénibilité n’est donc pas une bonne idée.
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Réunion du 17 janvier 2008, 17h30
Audition de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) :
Mme France Lert, directrice de l’unité 687 Santé et Épidémiologie des déterminants sociaux et professionnels de la santé
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
Mme France Lert a détaillé son travail, ciblé sur les déterminants socio-professionnels de la santé. Ses recherches identifient les risques avec pour objectif la réduction des inégalités de santé. Il existe donc à l’INSERM différentes études d’épidémiologie relatives à la pénibilité et à l’organisation du travail et à leurs conséquences pour la santé.
Le but de ces études est de voir dans quelle mesure les conditions de travail ont un impact sur l’état de santé et aussi sur les comportements de santé (consommation d’alcool, de tabac, etc.). On estime qu’un tiers des inégalités de santé s’explique par les expositions professionnelles.
Des activités prospectives, telles que l’enquête SUMER, sont menées dans le même temps et servent de référence pour une connaissance actualisée des conditions de travail de l’ensemble des salariés. Cette enquête permet d’établir des matrices emploi/exposition qui associent à chaque emploi l’ensemble des contraintes de travail auxquels les salariés sont expposés. Cette enquête donne, par ailleurs, de bons critères de définition de la pénibilité, parce que c’est une enquête opposable, qui donne des résultats concrets qui peuvent être appréhendés par les salariés, les employeurs et les acteurs sociaux.. En ce qui concerne la charge mentale, l’enquête SUMER a utilisé un outil standardisé (echelle de Karazek) qui mesure les trois phénomènes qui contribuent au stress: les contraintes organisationnelles, la latitude de réponse du salarié, et la relation hiérarchique et entre collègues.
L’INSERM (U687) met actuellement en place la cohorte CONSTANCES en lien avec la CNAMTS, la DGS et le Cetaf, cohorte qui va recruter 200 000 personnes, qui seront interrogées sur leur profession et leur carrière et leurs expositions professionnelles. Le but est d’aboutir à un instrument utile pour l’évaluation des politiques de santé. Les données recueillies contribueront à la surveillance des conditions de travail par l’InVS (Département Santé Travail). Le cadre comparatif dans lequel s’effectue ce type d’études est lui aussi important et l’agence européenne des conditions de travail joue, dans ce contexte, un rôle fondamental.
Par ailleurs, les hôpitaux sont un secteur fortement touché par la pénibilité pour plusieurs raisons. Il y a tout d’abord une contrainte liée aux horaires postés et au travail de nuit, ce dernier a pu être considéré pendant longtemps comme moins pénible du fait de l’absence de hiérarchie médicale et une plus grande autonomie. L’intensification conitnue du travail en raison d’actes de plus en plus nombreux dans un temps d’hospitalisation de plus en plus court, a pour conséquence des contraintes d’organisation de plus en plus génératrices de stress. De plus, les contraintes posturales sont très fortes mais sont très difficiles à résoudre. La confrontation à la maladie elle-même est un facteur de pénibilité, qui ne peut être résolue que par une reconnaissance forte des métiers. Ces contraintes se conjuguent avec le fait que les patients revendiquent plus de participation à la décision, plus d’information et de fait sont de plus en plus exigeants et que les soignants désirent vivre comme le reste de la société, c'est-à-dire avec un bien être personnel.
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Réunion du 29 janvier 2008, 10h45
Audition de M. Vincent Vieille, avocat spécialiste en droit du travail
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Vincent Vieille a rappelé qu’il avait une vue d’ensemble sur le sujet de la pénibilité, à la fois comme ancien inspecteur du travail et comme avocat spécialiste en droit du travail.
La notion de pénibilité est de plus en plus difficilement objectivable. D’un côté, l’atteinte à l’intégrité physique est facilement mesurable. De l’autre, la dématérialisation du travail peut aboutir à des atteintes psychiques qu’on ne peut pas évaluer.
Il existe trois façons de faire reconnaître un accident du travail, lié à la pénibilité, au contentieux (outre le recours devant les juridictions administratives pour la fonction publique).
La première solution est la voie pénale, qui est assez utilisée. L’inspecteur du travail dresse un procès-verbal qui est suivi d’un jugement.
La deuxième est la mise en cause de la responsabilité civile de l’employeur devant la juridiction prud’homale pour absence de prévention. Cette option est très peu utilisée car elle est quasiment tout le temps vouée à l’échec. En effet, la règle de l’unicité de l’instance impose que tous les litiges relatifs à un contrat de travail soient étudiés en même temps. Le litige lié à la pénibilité risque donc être « noyé » par d’autres aspects du contentieux entre l’employé et l’employeur. Cette règle d’unicité se justifie dans le cadre de la rupture d’un contrat mais ne correspond pas aux demandes en terme de réparation de la pénibilité. En outre, un avocat ne conseillera pas à un salarié d’éteindre tous les contentieux possibles futurs (rémunération, accident du travail, rupture abusive,…) par une requête en réparation civile d’une pénibilité dont l’issue est incertaine.
La troisième est le contentieux de la faute inexcusable devant les juridictions de la Sécurité sociale, qui peut uniquement avoir lieu après réalisation du risque. La juridiction évalue alors le respect ou non de l’obligation contractuelle de sécurité et de résultat. Deux problèmes se posent : la mauvaise organisation de la procédure et le fait que l’obligation soit contractuelle. Tout d’abord, la procédure pour faute inexcusable passe d’abord par une décision en commission de conciliation, qui est paritaire. En l’absence de décision de cette commission, le tribunal des affaires sociales statue sur la qualification d’accident du travail, sans avoir d’obligation d’entendre la victime. Deux sanctions à la charge de l’employeur peuvent être décidées : la majoration de la rente, qui constitue une réparation forfaitaire des incapacités de travail, et la réparation des préjudices éventuels. Un recours à l’encontre de la décision du tribunal est toujours possible en cas de refus de qualification en tant qu’accident du travail mais la décision sera alors non opposable à l’employeur (elle n’aura pas d’impact sur ses cotisations ni sur ses statistiques d’accidents du travail). Ensuite, la Cour de cassation a considéré que l’obligation de sécurité et de résultat était contractuelle et non pas délictuelle, ce qui en fait un « animal juridique » inapplicable. Par ailleurs, cette obligation de sécurité ne peut pas avoir pour conséquence la nullité du contrat pour absence de cause, car le contrat de travail organise la dépossession du risque du salarié : ce dernier perd sa propre responsabilité. En dernier lieu, ce contentieux est mal organisé puisque non seulement les parties ne sont pas présentes à tous les stades de la procédure (la commission de conciliation de recours amiable n’a pas d’obligation de les entendre) mais en outre si une caisse primaire décide qu’un suicide ne constitue pas un accident du travail et revient par la suite sur sa décision pour requalifier le suicide en accident du travail, l’employeur peut s’appuyer sur la première décision pour ne pas compter le suicide dans les accidents du travail survenus dans son entreprise .
En résumé, le contentieux de la pénibilité n’existe pas en tant que tel ; il n’existe qu’un contentieux de la maladie ou de l’accident. Alors même que l’on ne peut pas réduire la pénibilité aux accidents du travail et maladies professionnelles.
Dans la fonction publique, il n’existe presque pas de contentieux parce que les indemnisations accordées sont dérisoires : dernièrement, 800 euros accordés par le tribunal administratif pour harcèlement ayant entraîné deux tentatives de suicide et de multiples arrêts du travail ; en appel, la cour administrative a accordé 6 000 euros, ce qui est loin de correspondre aux frais engagés sur plusieurs années.
L’un des enjeux est l’obligation de prévention de l’employeur en cas de stress, mais cette idée n’est absolument pas ancrée dans les mœurs. Il faudrait mettre en place des indicateurs sur le bien-être et la pénibilité au travail. Il existe certains indicateurs externes du stress par exemple : les arrêts de travail à répétition, l’absentéisme, et les troubles musculo-squelettiques (TMS). L’utilisation d’outils, comme le document unique, pourrait être une solution.
Il existe une obligation de mise en œuvre de mesures de prévention en cas de stress excessif mais ceci n’est pas entré dans les mœurs.
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Réunion du 29 janvier 2008, 12h00
Audition de l’Union des professions artisanales (UPA) :
M. Pierre Burban, secrétaire général, Mme Dany Bourdeaux, présidente de la commission sociale, et Mme Houria Sandal, conseiller technique
Synthèse de l’audition
Étaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et M. Régis Juanico, député.
Mme Dany Bourdeaux a rappelé le cadre dans lequel la notion de pénibilité était étudiée. La loi d’août 2003 a prévu des négociations interprofessionnelles entre les partenaires sociaux. Cette question est abordée avec précaution par le secteur de l’artisanat qui ne veut pas que certains métiers soient qualifiés de pénibles a priori alors même que certains secteurs de l’artisanat souffrent d’une pénurie de main-d’œuvre. De plus, la pénibilité physique des métiers a fortement décrue. Il y a, en effet, eu de grandes améliorations des conditions de travail, les matériaux sont différents et les techniques ont progressé. Deux pays ont engagé une réflexion sur le sujet, les Pays-Bas et l’Italie, pour le moment sans succès.
La pénibilité a été définie par l’UPA dans le cadre des négociations interprofessionnelles, comme résultant « de sollicitations physiques et psychiques de certaines formes d’activités professionnelles, qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé des salariés ». Plusieurs facteurs de la pénibilité peuvent être identifiés : les contraintes physiques et psychiques marquées, les conditions de travail et l’environnement agressif.
Le constat est que l’espérance de vie d’un ouvrier est actuellement plus faible que celle d’un cadre. Dès lors, la prévention et la réparation sont les deux moyens par lesquels on peut lutter contre la pénibilité. Certains dispositifs existent déjà : un salarié qui travaille de nuit bénéficie d’une prime.
En ce qui concerne la réparation, une cession anticipée d’activité pourrait être envisagée sous réserve d’un examen individuel de chaque demandeur. Ainsi dès lors que le salarié remplirait certaines conditions (par exemple durée d’activité salariée ou encore durée d’exposition à desactivités pénibles), une commission mixte paritaire médicale pourrait ensuite décider de l’éligibilité de l’intéressé au dispositif. D’autres mesures sont aussi possibles : temps de travail allégé, « deuxième carrière », et aménagement du poste de travail (en s’assurant que ces mesures sont bien adaptables aux TPE).
S’agissant des efforts à mener, en vue d’une amélioration des conditions de travail, Madame Dany Bourdeaux attire l’attention sur l’inadéquation de certains dispositifs -comme la création du document unique par exemple- aux TPE de l’artisanat. Elle souligne à cet égard, même si dans les TPE le dialogue entre l’employeur et ses salariés est quotidien, la négociation d’entreprise qui nécessite une formalisation du dialogue et un minimum de connaissances juridiques, est totalement inadaptée pour des entreprises qui de par leur taille n’ont ni service du personnel, ni service juridique.
L’amélioration des conditions de travail passe donc également par une structuration d’un dialogue social adaptée aux TPE.
M. Pierre Burban souligne que le problème principal aujourd’hui résulte d’un blocage sur l’accord du 12 décembre 2001 relatif au développement du dialogue social dans l’artisanat signé à cet effet par l’UPA et les 5 organisations syndicales de salariés. L’objectif recherché dans cet accord est de réussir à mutualiser les moyens pour arriver à un dialogue social efficace.. Or, à ce jour, bien qu’étendu, il se heurte pour son application intégrale, au refus par l’Etat de faire aboutir les procédures d’extension des accords de déclinaison notamment des secteurs du bâtiment et des services en raison d’un véto mis par le MEDEF
Mme Dany Bourdeaux considère que le bon échelon pour mutualiser ces moyens est territoriales (département voire région) et non pas le bassin d’emploi. Elle ajoute que contrairement à l’idée du délégué de site vouée à l’échec, la mise en place de commissions paritaires territoriales par branche avec un financement collectif serait réellement efficace.
Revenant plus précisément sur la question de la réparation de la pénibilité, Madame Dany Bourdeaux conclut en insistant sur le fait qu’elle ne saurait être traitée que dans un cadre collectif avec une approche individuelle, qui prenne éventuellement en compte les comportements de chacun à l’extérieur du travail (consommation d’alcool, de tabac, etc.). L’important est de ne pas préjuger de la pénibilité de certains métiers car elle est amenée à évoluer dans le temps : il ne faut pas d’automaticité en fonction des branches.
M. Pierre Burban a rappelé que l’UPA est, en revanche, très favorable à la reconstitution de carrière a posteriori.
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Réunion du 5 février 2008, 10h20
Audition de M. Gérard Lasfargues, professeur des universités, praticien hospitalier, chef du département des expertises intégrées en santé environnement travail de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET)
Compte rendu
Étaient présents : M. Jean-Frédéric Poisson, président, et M. Xavier Breton, député.
M. Gérard Lasfargues a souligné la difficulté de définir le terme de pénibilité en raison de son ambiguïté. La pénibilité a en fait trois facettes :
1° Cela peut être des travaux ou des conditions de travail pénibles qui, à long terme, pèsent sur l’espérance de vie ou la qualité de vie au grand âge ou à la retraite ;
2° Il existe également une pénibilité vécue qui correspond à un mal-être au travail et qui ne résulte pas forcément de conditions de travail pénibles. Les chercheurs ne reconnaissent pas aujourd’hui cette pénibilité comme entraînant nécessairement une réduction de l’espérance de vie ou de qualité de vie au grand âge. Les enseignants en sont le meilleur exemple. En matière de stress au travail, le lien est désormais établi, outre les atteintes à la santé mentale comme la dépression ou l’anxiété, avec les maladies coronariennes et les TMS. Le problème tient à l’objectivation du stress au travail, évalué habituellement par des questionnaires épidémiologiques appropriés qui permettent de disposer de bonnes données collectives. Les facteurs de risques psycho-sociaux (pression psychologique répétée, manque de latitude décisionnelle, de reconnaissance et de soutien social dans le travail) touchent plus les catégories socioprofessionnelles défavorisées comme les ouvriers, contrairement aux idées reçues.
3° Les exigences du travail qui, bien que non pénibles en soi, deviennent difficiles à supporter pour les travailleurs vieillissants en raison de leur âge, de leur capacités réduites ou des traitements médicaux qu’ils suivent. On estime qu’environ un tiers des salariés âgés de moins de 35 ans, la moitié des salariés de 40 à 50 ans et les deux tiers des salariés de plus de 50 ans sont exposés à cette troisième forme de pénibilité. Cette forme de pénibilité pose le problème de l’aménagement de la fin de vie active, d’autant plus fortement que l’on cherche à maintenir et prolonger l’activité des travailleurs âgés.
Concernant la première forme de pénibilité, la difficulté pour appréhender les travaux ou des conditions de travail pénibles tient à ce que la pénibilité de chaque travailleur s’inscrit dans un parcours professionnel plus ou moins stable, mais avec des changements d’emploi parfois nombreux pour un même salarié. Ainsi on observe que les travailleurs cumulant les éléments de précarité dans le travail (contrats précaires, chômage, sous-traitance, conditions de travail pénibles) sont plus exposés aux effets majeurs sur la santé, cancers, maladies cardio-vasculaires et au suicide. De surcroît, les atteintes à la santé influent sur le travail et réduisent la capacité de travail.
Pour établir des critères fins de pénibilité, il faudrait pouvoir reconstituer les parcours professionnels. Or, aujourd’hui, on ne dispose pas d’outils le permettant de façon pragmatique et homogène. Il faut donc simplifier les données du problème pour approcher la pénibilité. En ce sens, trois critères simples de pénibilité « objective » peuvent être dégagés :
– l’existence de contraintes physiques (exigences posturales, port de charges lourdes, rythme et cadence de travail,…) ;
– le travail en horaires alternants, le travail de nuit, le travail en horaires atypiques ;
– l’exposition à des agents toxiques qui, si elle n’est pas vécue comme pénible, rentre dans les critères de la première forme de pénibilité.
Cette forme de pénibilité est durable et touche plus particulièrement certaines catégories socioprofessionnelles : ainsi, le différentiel d’espérance de vie entre les cadres et les ouvriers ne diminue pas significativement selon les dernières études, même si des facteurs personnels et des facteurs sociaux contribuent à expliquer ce différentiel. Mais tous les épidémiologistes sont d’accord pour attribuer une part de ce différentiel aux conditions de travail.
Au regard de la morbidité, les ouvriers non qualifiés et les personnels de service et de commerce sont particulièrement exposés. De surcroît, ces salariés sont touchés par la précarité de leurs contrats de travail et la polyvalence de leurs activités.
Les données dont disposent les chercheurs établissent un lien clair entre la pénibilité résultant de contraintes physiques et la morbidité accrue des salariés. Cependant le retentissement de cette forme de pénibilité s’observe différemment à court, moyen et long termes :
1° A court terme, c’est-à-dire alors que le salarié poursuit son activité professionnelle, des troubles musculo-squelettiques (TMS) et des lombalgies surviennent : plus de 40 000 TMS sont déclarés et reconnus comme maladie professionnelle chaque année ; de 5 à 6 000 lombalgies sont déclarées et reconnues comme maladie professionnelle chaque année. Le plan santé travail 2005-2009 a prévu de réduire de 20 % les TMS déclarés mais l’objectif ne sera selon toute vraisemblance pas atteint.
2° A moyen terme, c’est-à-dire en fin de vie active, les salariés atteints sont souvent engagés dans un processus d’exclusion du travail, par l’invalidité ou/et par l’inaptitude. Par ailleurs, l’indemnisation offerte par la branche des AT-MP est faible (moins de 10 % pour une pathologie du coude ; 13 % en moyenne pour une pathologie invalidante de l’épaule) ;
3° A long terme, c’est-à-dire à l’âge de la retraite, ces salariés sont atteints d’arthrose prématurée et d’incapacités locomotrices. Au vu des études, une durée d’exposition de dix ans est un cap qui, une fois franchi, provoque des altération irréversibles de santé.
Aucune étude scientifique ne permet d’avancer que les êtres humains sont moins résistants aujourd’hui qu’autrefois à la pénibilité au travail. On peut seulement avancer que la réduction de la pénibilité physique par les technologies et la prévention a été compensée négativement par l’accroissement des rythmes et cadences de travail.
Concernant les travailleurs touchés par la deuxième forme de pénibilité (horaires atypiques), les chercheurs observent un accroissement des maladies coronariennes (angines de poitrine, infarctus du myocarde,…). Les mécanismes expliquant cette association sont à la fois un lien direct via des perturbations neuro-hormonales et un lien indirect par l’augmentation des facteurs de risque d’athérosclérose : obésité (manger la nuit favorise le stockage des graisses), cholestérol, diabète et perturbations métaboliques. Un seuil de 10 ans de travail de nuit s’avère en ce sens critique au vu de certaines études.
Concernant les travailleurs touchés par la troisième forme de pénibilité (exposition aux agents chimiques en milieu de travail), les études comme l’enquête Sumer montrent le nombre élevé de salariés exposés à cette pénibilité.
Le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), basé à Lyon, tient une liste des agents cancérogènes internationalement reconnus. Cette liste est divisée en deux catégories. En catégorie 1 sont rangés les cancérogènes avérés (chrome, nickel, amiante, solvants,…). La Commission européenne tient également une liste de ces agents pour l’application du droit européen. En catégorie 2 sont répertoriés les agents probablement cancérogènes.
La réglementation sur la prévention des risques chimiques et des CMR (agents cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction) est très fournie mais son effectivité d’application en entreprise encore trop partielle. Beaucoup de PME ne disposent pas de document unique de prévention et d’évaluation des risques professionnels et n’ont pas mis en œuvre de procédure de substitution des agents déclarés cancérogènes (seuls certains agents ont été traités).
Les grandes entreprises ont adopté des mesures de prévention en matière d’agents cancérogènes car les maladies professionnelles qu’ils provoquent leur coûtent cher. Mais en matière de TMS, les entreprises ne trouvent pas nécessairement de rentabilité à modifier les cadences et les outils de travail pour lutter contre le phénomène. Le dispositif pourrait être plus incitatif pour la prévention en renforçant l’indemnisation accordée en cas de TMS. Il n’en restera pas moins que les salariés atteints de TMS sont souvent réticents à déclarer une maladie professionnelle vu des conséquences possibles sur l’emploi.
Concernant les critères de pénibilité à prendre en compte pour des compensations éventuelles du type cessation anticipée d’activité, la reconstitution des parcours individuels de carrière est possible même si la réalisation semble difficile. Néanmoins, il n’est pas nécessaire de disposer d’une vision très détaillée et complète des carrières mais plutôt, dans cette optique, de critères simplifiés comme la durée en années de soumission à des conditions de travail pénibles. On ne peut effectivement pas traiter dans ce cadre du problème de la pénibilité en l’abordant uniquement par métiers ou catégories socioprofessionnelles, car les disparités des conditions de travail sont grandes au sein d’une même profession par exemple et dépendent pour beaucoup de l’implication de l’entreprise dans la prévention.
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Réunion du 5 février 2008, 11h20
Audition de M. Raphaël Draï, professeur des universités (faculté de droit et de sciences politiques de l’Université d’Aix-Marseille)
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Raphaël Draï a estimé nécessaire de préciser le vocabulaire. Il existe deux façons de parler du travail : soit c’est une corvée et alors parler de pénibilité au travail est un pléonasme, soit c’est une œuvre, un accomplissement. L’étymologie du mot montre qu’il dérive de tripaliare qui signifie torturer et celle du mot labeur, qui vient de laborare, indique que la personne soumise à un labeur « chancelle sous la charge ». L’hébreu dispose de deux mots pour le travail : soit avoda qui désigne le travail matériel, c’est-à-dire l’accomplissement des tâches, soit melara qui désigne l’œuvre et montre l’acteur sujet de ce qui est accompli. Le grec utilisent les mots pragma, qui désigne l’action qui a un sens interne, et ergon qui désigne la pragma faite avec les autres.
Au regard de ces définitions, on peut dire que le travail n’a pas bonne réputation sauf lorsque c’est un travail de la pensée. En somme, la société distingue ceux qui travaillent sans penser et ceux qui pensent sans travailler. Les grands artistes ne se déclarent d’ailleurs jamais fatigués car ils résistent à la pénibilité.
Le travail n’est pas en crise dans notre société car une crise ne dure pas trente ans comme on le voit pour le chômage. Dans l’« Etat purgatoire », M. Raphaël Draï a montré comment la plus grande pénibilité est de ne pas avoir de travail : le système social et culturel réduit aujourd’hui au travail l’existence des individus ; on n’est plus tout à fait humain quand on n’a plus de travail.
Le travail est aujourd’hui lacunaire : on ne lui trouve plus de sens intrinsèque. Il est accomplit pour gagner sa vie mais il ne crée pas de lien social car il est devenu précaire par nature. C’est ce qui fait sa plus grande pénibilité. Dans cette situation, il n’y a plus de société civile au sens hégélien du terme (lieu de rencontre du marché et des entreprises humaines qui forme un lieu de vie matériel et éthique). Or l’apprentissage de l’autorité se fait par la société civile.
Aujourd’hui nous sommes dans une société fermée où l’Etat ne sait que dire « non ». Cela sape le concept d’autorité qui repose sur la capacité de l’Etat à organiser la distribution des richesses. Nous sommes également dans une société précaire.
Quelles sont les issues à cette situation ?
Il existe une différence radicale entre l’occupation, l’activité et l’emploi. L’occupation renvoie aux ateliers nationaux de 1848 où les ouvriers étaient employés à ne rien faire. L’activité est plus structurée et vise à remplir le temps vide, comme dans les maisons de retraite. L’emploi assure, lui, l’économie de son existence et permet de participer à la constitution de la société civile et à l’histoire de son pays ; il permet de se projeter dans l’avenir (c’est la somme des projets individuels qui forme l’historicité d’une nation). Cela est constaté dans l’enseignement ou le bâtiment. Le travail sera pénible si les travailleurs sont rebutés par celui-ci, ce qui arrivera assurément s’il ne se traduit pas par une redistribution équitable de la richesse créée.
Georges Friedmann en analysant le problème humain du machinisme et du capital montre qu’il faut réduire sur les lieux de travail la fracture entre la pensée et le travail. Le travail ne doit plus être placé dans un contexte de mendicité.
En fait, la société civile est aujourd’hui réduite à un petit club.
Concernant la revendication d’égalisation des espérances de vie à la retraite, il faut avoir à l’esprit que l’allongement de l’espérance de vie produit sa propre pathologie. Il est indispensable d’avoir une approche qualitative du problème de la retraite et non quantitative.
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Réunion du 5 février 2008, 12h00
Audition de M. Tareq Oubrou, recteur de la mosquée El Huda de Bordeaux, président de l’association « Imams de France »
Synthèse de l’audition
Était présent : M. Jean-Frédéric Poisson, président.
M. Tareq Oubrou a précisé qu’il est imam et recteur de la mosquée de Bordeaux. Après avoir développé quelques notions liées au métier d’imam (20 % des imams en France sont de nationalité française ; 45 % sont salariés ; le métier d’imam peut être exercé par n’importe quel musulman s’il remplit certaines conditions intellectuelle et morales), il a précisé quelle était la vision du travail dans la tradition musulmane.
Le travail n’est pas une sanction, ou une peine, en tant que tel, une sorte d’absolution d’un quelconque péché comme cela pourrait être compris du récit biblique. Le travail est le propre de l’homme, il distingue l’homme des animaux, elle est le propre de la culture et de la civilisation. Il ne faut cependant pas que le travail devienne une domination qui mène à « l’esclavagisme », c'est-à-dire une exploitation démesurée par rapport au travail fourni.
L’important est le sens qu’on donne au travail. On peut rechercher au travers du travail une production de bonheur, de richesse, de bonne qualité de vie et d’émancipation. Ce qu’il faudrait traiter ce n’est pas la pénibilité en soi, elle est inhérente à toute activité, à tout travail. Ce dont il faudrait parler c’est de la « supportabilité » ou l’« insupportabilité » d’un travail. Le regard que l’on jette sur un travail peut justement diminuer l’impact de cette pénibilité. Il y a effectivement des travaux qui valent la peine, à condition que l’on donne une raison motivante pour cela, symbolique ou matérielle. D’où l’importance de la reconnaissance du travail de chacun.
La notion de l’« insupportablibilité », comme degré de pénibilité intolérable d’un travail pourrait être déterminé par plusieurs approches. On pourrait par exemple appliquer à ce titre la théorie de l’agir communicationnel d’Habermas, comme éthique de la discussion et de la négociation qui aboutirait à un consensus en le domaine, sachant qu’ il peut y avoir des peines physiques et des peines psychologiques, voir intellectuelle. Au niveau rationnel, scientifique et médical, on peut établir que certains métiers sont difficiles, et à partir d’un certain niveau il peuvent présenter une peine physiologiquement et psychologiquement insupportable. Ensuite, intervient la dimension individuelle et subjective : certains métiers seront plus durs pour certains que pour d’autres, aussi un même métier peut-il être plus dure pour personne que pour une autre. Les personnes qui présentent certains handicaps physiques ou psychiques, il importe d’atténuer la pénibilité qu’elles éprouvent sans les exclure du marché du travail en leur garantissant des conditions de travail plus favorables.
Le rôle du législateur dans ce domaine est de fixer une loi-cadre tout en laissant les professionnels se mettre d’accord entre eux-mêmes et avec leurs employeurs. Le législateur doit trouver un équilibre entre les droits et les devoirs de chacun, entre les intérêts particuliers des salariés et des patrons d’une part et les intérêts globaux de la nation d’autre part. Il faut absolument au-delà de la logique « juridiciste » penser une éducation et une culture de la discussion et proposer une souplesse dans les règles en la matière.
Le risque est l’uniformisation et la rigidité d’une loi, laquelle pourrait avoir un impact peut-être positif à court terme et pour certaines professions uniquement, mais négatif à long terme sur toute l’économie du pays, si l’on considère le bouleversement économique planétaire imprévisible, notamment au niveau d’un marché mondial du travail très compétitif.
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ANNEXE N° 4
DÉPLACEMENT À HELSINKI DU 19 AU 21 FÉVRIER 2008
Synthèse des réunions
Ont participé au déplacement : M. Jean-Frédéric Poisson, président, M. Régis Juanico Mme Martine Billard et Mme Isabelle Vasseur, députés membres de la mission d’information.
I.- Repères statistiques sur la Finlande
– Population : 5,2 millions d’habitants
– Population active : 2,6 millions dont 2,4 millions de salariés
– Taux de chômage : 7,5 %
– 75 % des salariés sont syndiqués
– 120 000 accidents du travail et 6 774 maladies professionnelles reconnues (2005)
II.- Entretiens au ministère des affaires sociales et de la santé
A. Présentation du programme national en faveur des travailleurs âgés
Mme Terttu Savolainen, Secrétaire d’Etat chargée de la sécurité sociale, a tout d’abord rappelé que la Finlande a pris conscience dès les années 1990 des conséquences économiques du vieillissement de sa population active. Par rapport aux autres Etats européens, la Finlande a en effet une situation démographique particulière : le babyboom de l’après guerre a été important mais beaucoup plus bref que dans les autres pays (fin du phénomène dès 1953) et la natalité a été largement en dessous du seuil de renouvellement des générations depuis 1970.
N’étant pas un pays d’immigration, la Finlande a été confrontée à des difficultés de recrutement de main d’œuvre et a donc du trouver des solutions originales pour encourager le maintien en acticité des seniors.
Les changements législatifs qui sont intervenus depuis 1997 ont été précédés d’un long travail d’analyse des effets du vieillissement sur la capacité de travail des salariés en deuxième partie de carrière (45-58 ans). Cette étude a essentiellement été réalisée par l’Institut national de la santé au travail. Cet organisme a fait des propositions (programme FinnAge) pour promouvoir la capacité de travail des salariés vieillissants qui ont été étudiées par un comité tripartite réunissant syndicats, patronat et administrations au cours de l’automne 1996.
Cette intense négociation sociale a abouti à l’adoption d’un programme pour l’emploi des seniors couvrant la période 1998-2002. Ce programme cherchait à améliorer les performances productives de l’économie finlandaise tout en améliorant les conditions de travail des salariés notamment en réduisant la pénibilité. Il comportait trois objectifs :
– augmenter le taux d’emploi dans la tranche d’âge 45-65 ans ;
– encourager le prolongement d’activité au-delà de 60 ans ;
– augmenter la productivité.
Le programme était doté de 4,2 millions d’euros de crédits.
L’originalité de cette démarche est d’avoir pris en compte tous les facteurs qui peuvent influencer le maintien en activité des salariés âgés. L’accent a été mis sur le « bien être » des salariés qui est un facteur clé pour la réussite économique. La Finlande a privilégié une démarche de prévention plutôt que le recours aux aides financières par des emplois aidés.
Les entreprises ont été incitées à tenir compte du vieillissement de leurs salariés par l’aménagement des postes, des rythmes de travail des horaires tandis que le management des entreprises a été formé pour être en mesure d’aménager l’organisation du travail en tenant compte du vieillissement. Certaines entreprises offrent, par exemple, aux salariés âgés des jours de congés supplémentaires, d’autres ont organisé un suivi médical très approfondi pour les salariés âgés de plus de cinquante ans. De nombreux programmes d’incitation au sport et à une meilleure hygiène de vie ont été mis en place à l’initiative des entreprises.
Un effort particulier a été mené pour améliorer l’employabilité des salariés âgés et tout particulièrement des chômeurs âgés qui étaient souvent dispensés de recherche d’emploi auparavant.
Ce programme a permis de réels progrès pour la prévention individuelle du vieillissement, ses résultats sont plus mitigés pour les modifications des conditions de travail surtout dans les PME. En revanche il a permis incontestablement un changement d’état d’esprit dans la manière de considérer les travailleurs âgés. En 1998, une grande campagne d’information lancée dans tous les média finlandais avait pour slogan « l’expérience, une richesse nationale ». Ces efforts de communication ont porté leurs fruits puisque 40 % des entreprises privées finlandaises et plus de 50 % des employeurs du secteur public ont mis en place des programmes spécifiques pour les salariés âgés. Un des facteurs essentiels de la réussite de cette démarche a été la capacité de coopération entre les acteurs publics (ministères sociaux) les agences de placement des chômeurs, les acteurs économiques mais aussi les partenaires sociaux et les consultants en organisation du travail.
B. Présentation des programmes TYKES et VETO
La Finlande a aussi mis en place deux programmes d’action complémentaires à celui en faveur des salariés seniors, le premier dit « du développement du lieu de travail » TYKES est basé sur l’amélioration des modes de gestion de l’entreprise et le second dit VETO a une portée plus large et vise à promouvoir l’attractivité du monde du travail.
Le programme TYKES est centré sur une approche microéconomique de l’entreprise ou de la collectivité de travail. Lancé initialement en 1996, la première phase du programme s’est étendue jusqu’en 2003. Devant les résultats positifs, une deuxième phase a été décidée pour la période 2004-2009.
Ce programme cherche à promouvoir des innovations dans les entreprises qui améliorent simultanément la productivité du travail et la qualité de la vie professionnelle tout en encourageant les travailleurs à conserver leur emploi plus longtemps.
Le programme a donc consisté essentiellement à :
– aider les entreprises à modifier leurs méthodes de travail pour tenir compte de la pénibilité du travail et les inciter à former préventivement le personnel et ainsi éviter l’obsolescence des qualifications ;
– diffuser l’information sur les bonnes pratiques de gestion et tout particulièrement celles relatives à une gestion prévisionnelle des emplois (anticipation des mesures d’âge) ;
– encourager les travaux de recherche relatifs à l’organisation du travail et à la prévention des risques professionnels.
Dans la deuxième phase du programme, l’accent est mis sur la nécessité d’atteindre une croissance qualitative et durable de la productivité afin de permettre à la Finlande de garder un système de protection sociale performant et compatible avec les contraintes des finances publiques. La première phase du programme a permis de dégager un consensus parmi les partenaires sociaux et les autorités publiques sur l’importance de l’innovation dans la gestion des méthodes de travail : le bien être du personnel devant aller de pair avec des progrès dans l’efficience de l’organisation du travail. Elle a aussi permis d’améliorer considérablement les connaissances scientifiques sur les méthodes d’organisation du travail (travaux de recherche effectués à partir de l’évaluation de multiples expériences menées en entreprise).
Dans la deuxième phase du programme, les autorités publiques ont donc cherché à diffuser les nouvelles pratiques de travail et de gestion qui avaient fait l’objet d’une évaluation positive préalablement. L’idée n’était pas d’imposer des « solutions toutes faites » qui avaient déjà réussi dans certaines entreprises mais d’inciter les entreprises à s’inspirer des nouvelles méthodes mises en place ailleurs pour les adapter à leurs besoins propres grâce à l’aide d’un réseau d’experts. Des « réseaux d’apprentissage » ont été mis en place pour permettre aux entreprises de nouer des coopérations de longue durée (3 à 5 ans en moyenne) avec des instituts de recherche ou des universités avec pour objectif d’expérimenter des formes innovantes d’organisation du travail.
Selon l’analyse de M. Tuomo Alasoini, Responsable du projet TYKES au ministère du travail, la première phase du programme a concerné 1600 entreprises et 135 000 salariés et un montant de financement de 5,6 millions par an en moyenne sur la période 1996-2003 assuré par l’Etat finlandais. Le secteur privé a reçu 60 % des financements publics, le secteur public 30 % et 10 % ont bénéficié au secteur agricole et à la sylviculture.
La deuxième phase (2004-2009) devrait concerner 750 projets et toucher 120 000 salariés pour un montant moyen de financement de 12 millions d’euros par an. Le programme est désormais ciblé sur les PME de moins de 125 salariés (75 % des crédits leur seront consacrés).
Le Programme TYKES a incité les TPE (moins de 10 salariés) à se regrouper soit par secteur professionnel soit par bassin d’emplois pour élaborer des programmes de réorganisation pouvant faire l’objet d’un financement public.
Le programme « VETO » lancé en 2003, sous la responsabilité du ministère des affaires sociales et de la santé, a pour objectif de rendre le monde du travail plus attrayant. Le mot « VETO » pourrait être traduit par « Attrait ». Alors que le programme TYKES est centré sur une approche microéconomique pour améliorer les méthodes de travail de chaque entreprise, le programme VETO a une approche transversale et macroéconomique. Il cherche à influer sur tous les facteurs sociaux qui peuvent contribuer à promouvoir le travail et à augmenter le niveau global d’activité. L’objectif est de préserver le système finlandais de retraite par répartition et plus largement l’ensemble du modèle de protection sociale.
Les objectifs essentiels de ce programme sont les suivants :
– allonger la vie active des salariés de deux à trois ans ;
– réduire l’absentéisme de 15% ;
– diminuer la fréquence et la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles ;
– diminuer le tabagisme et la consommation d’alcool dans la population active ;
– inciter les jeunes à entrer plus tôt dans la vie active, la durée des études supérieures étant plus longue en Finlande que dans d’autres pays européens ;
– améliorer l’employabilité de certaines catégories sociales en difficulté d’insertion comme par exemple les personnes handicapées, les mères de famille, en développant des actions ciblées de formation et des services aux familles pour faciliter la conciliation entre vie privée et travail.
Le programme doit se dérouler sur la période 2003-2007 et représenter un montant de crédits publics d’un million d’euros par an.
C. La réforme du système de retraite (2005)
Avant la réforme, le système de retraite reposait sur un système à trois étages : le régime national de pension qui assurait un niveau minimal de pension versé sous conditions de ressources, le deuxième était constitué par les régimes professionnels et le troisième par un volet facultatif et par capitalisation (20 % des assurés concernés).
L’âge légal de départ en retraite était de 65 ans pour les salariés du secteur privé et pour les agents publics recrutés après 1993 (63 ans pour les fonctionnaires plus anciens). L’âge minimum était compris entre 58 et 60 ans (avec décote) mais des dispositifs de préretraite permettaient de cesser de travailler dès 56 ans.
Le niveau de la pension contributive était plafonné à 60 % du salaire brut de référence de l’assuré.
Des réformes importantes sont intervenues dans les années 1990 comme l’harmonisation entre le régime des fonctionnaires et des salariés du secteur privé, le salaire de référence a été défini par rapport aux dix dernières années de travail et non plus sur les quatre dernières et les prestations du régime national ont été mises sous conditions de ressources alors qu’elles étaient forfaitaires auparavant. Progressivement à partir de 1998, les conditions d’attribution des préretraites se sont durcies ainsi que les conditions dans lesquelles les chômeurs âgés étaient pris en charge par le régime d’assurance vieillesse.
La réforme de 2005 n’a concernée que les régimes contributifs. Elle avait pour objectif d’assurer la pérennité des systèmes contributifs et de renforcer les liens entre les revenus des assurés tout au long de leur carrière et le montant des prestations de retraite. C’est ainsi que le plafonnement des retraites a été supprimé. Afin d’inciter les salariés à prolonger leur vie active des incitations ont été mises en place pour encourager le travail au-delà de 63 ans.
Les principaux changements intervenus sont les suivants :
– l’âge légal de départ à la retraite a été supprimé pour laisser le choix d’un départ entre 63 et 68 ans ;
– les départs anticipés peuvent intervenir à partir de 62 ans mais avec une décote de 0,6 % par mois manquant par rapport à l’âge de 63 ans ;
– la valeur de l’annuité d’assurance est fixée à 1,5 % du salaire de référence pour les cotisations acquittées entre 18 et 53 ans, de 1,9 % pour celles acquittées pour une activité professionnelle accomplie entre 53 et 63 ans et de 4,5 % pour la période de 63 à 68 ans ;
– le salaire de référence n’est plus calculé sur la moyenne des salaires des dix dernières années mais sur la moyenne des salaires de la totalité de la carrière ; le travail à temps partiel est pris en compte en tant que tel alors qu’auparavant un mécanisme de compensation intervenait ;
– introduction à compter de 2009 d’un coefficient correcteur s’appliquant au taux de liquidation pour tenir compte des gains moyens d’espérance de vie à l’âge de départ à la retraite ;
– le taux de cotisation salarié est progressivement augmenté jusqu’en 2013, de 4,4 à 7,5 % ;
– les pensions de retraite partielle sont reportées à l’âge minimal de 58 ans mais en contrepartie le cumul emploi–retraite est plus favorable ;
– durcissement des conditions d’attribution des pensions d’invalidité : les caisses de retraite et la sécurité sociale ont obligation de mettre en place des systèmes plus performants de rééducation professionnelle pour réduire le nombre d’invalides.
En outre, le système finlandais dispose d’un fonds de réserve dont les crédits sont très importants (25 % des cotisations contributives sont versées au fonds) mais son utilisation fait aujourd’hui débat.
L’autre sujet de controverse, plus récent, est lié au mode d’indexation des retraites (indexation sur les prix actuellement après une période d’indexation mixte).
D. L’organisation de la santé au travail et la prévention des risques professionnels
1. L’organisation de la santé au travail
a) Présentation par M. Matti Lamberg, conseiller médical.
En Finlande, les services de santé relèvent de l’Etat (hôpitaux) et des communes (soins de santé de base) tandis que les soins assurés par les professionnels de santé libéraux sont partiellement pris en charge par le régime d’assurance maladie.
La santé au travail est organisée de manière spécifique avec un financement paritaire entre employeurs et salariés. Deux lois sont intervenues en la matière « Occupational Health care Act en 2002 et « Occupational safety and Health Act » en 2003 pour améliorer le suivi médical des salariés.
Ces deux lois avaient pour objectif de faciliter le prolongement de la vie active par la prévention des troubles de santé et par l’adaptation des méthodes de travail pour réduire la pénibilité.
Les employeurs sont tenus d’assurer une prévention des risques professionnels et d’offrir un suivi médical à leurs salariés mais ils restent libres de choisir les services de médecine du travail auxquels ils vont recourir.
L’offre est très diversifiée en Finlande : certains centres de santé municipaux offrent ce service tandis que certaines entreprises ont leur propre médecin du travail et d’autres s’adressent à des médecins du travail indépendants. Il convient de souligner que d’autres professionnels que les médecins interviennent dans la prévention des risques professionnels : il y a 1 800 médecins du travail mais aussi 2 000 infirmières, 600 kinésithérapeutes, 200 psychologues et près de 700 experts spécialisés dans l’organisation du travail.
Outre le suivi médical des salariés (visite obligatoire tous les deux ans et plus fréquemment pour les salariés à risques), ces professionnels procèdent aussi à des visites des locaux de travail pour détecter les risques professionnels.
Les différents interlocuteurs ont tous souligné que la médecine du travail jouit en Finlande d’une grande considération qui s’explique sans doute par son professionnalisme : les médecins concernés ont suivi une formation spécifique durant quatre ans après leur diplôme de médecin. De plus, les partenaires sociaux ont compris l’importance de l’amélioration des conditions de travail et de la réduction de la pénibilité pour parvenir à maintenir les salariés seniors en activité.
b) Présentation par le Docteur Ritva Helimaki –Aro
Le Docteur Ritva Helimaki –Aro, médecin du travail, qui a aussi exercé en France, a souligné que le contexte social entre la Finlande et la France est très différent. Les relations sociales finlandaises étant beaucoup moins conflictuelles qu’en France : le médecin du travail n’est jamais perçu comme « le médecin de l’employeur » et peut disposer de l’ensemble du dossier médical du salarié. A la différence du médecin du travail en France, le médecin finlandais est autorisé à faire des prescriptions et entretient des relations étroites avec le médecin traitant du salarié (surtout pour le suivi des salariés atteints de pathologies chroniques). Comme il n’a aucun pouvoir pour décider de l’inaptitude d’un salarié (la décision revient au praticien conseil de l’assurance maladie), les salariés lui font aussi beaucoup plus facilement confiance.
Concernant la signification de l’expression « bien être au travail » qui est revenue fréquemment dans les propos des interlocuteurs pour présenter l’idée directrice des réformes menées dans l’organisation du travail, le Docteur Ritva Helimaki –Aro a expliqué qu’en Finlande la sphère privée et l’implication au travail sont étroitement liées. Il n’existe pas la même séparation entre activité professionnelle et vie privée qu’en France. C’est ce qui explique, par exemple, que de nombreux employeurs ont développé des installations sportives sur les lieux de travail avec l’idée qu’un salarié « en forme » a une meilleure productivité mais aussi une appréciation positive sur son statut de salarié. En France, de telles initiatives pourraient être considérées comme non respectueuses de la liberté des salariés (incitation à cesser de fumer, à faire du sport,…), voire « paternalistes ».
La Finlande est confrontée à un problème de santé publique très complexe qui est celui de la très grande fréquence des troubles dépressifs fréquemment liés à une dépendance alcoolique. L’ensemble des interlocuteurs a insisté sur la gravité du problème et sur ses implications tant économiques que sociales. Un programme spécifique dit « MASTO » a été lancé ; un de ses objectifs est de réduire de 50 % le nombre d’invalides pour cause de troubles dépressifs (en moyenne 4 000 personnes par an). Pour améliorer la prise en charge de ces troubles psychiques, il a été décidé que l’assurance maladie prendrait en charge les traitements par psychothérapie à la condition que ce traitement ait été prescrit par un psychiatre. La majorité des patients figurent dans la tranche d’âge des 25-34 ans et suivent une thérapie sur une période d’un à trois ans. Ce programme a donné des résultats positifs avec une baisse de la consommation des psychotropes et une réduction des arrêts de travail mais, en revanche, le nombre d’invalides pour troubles psychiques n’a pas diminué.
2. Les efforts de rééducation professionnelle pour réduire le nombre de bénéficiaires de pensions d’invalidité (présentation par Mme Tiina HUUSKO chef de développement à l’Agence finlandaise de la sécurité sociale KELA)
Depuis une loi de 2003, une politique offensive a été menée pour promouvoir la capacité de travail des salariés et éviter tout particulièrement que des salariés ne soient contraints de percevoir une pension d’invalidité faute d’avoir pu faire évoluer leurs compétences pour exercer une activité professionnelle compatible avec leur état de santé.
Le premier axe de cette réforme a porté sur une meilleure coordination entre les institutions chargées de la protection sociale, de l’accompagnement des chômeurs et de la formation.
Le deuxième axe a porté sur la détection la plus précoce possible des risques d’inaptitude : lorsqu’un salarié a un arrêt de travail de plus de deux mois, la sécurité sociale procède à une évaluation médicosociale des risques d’inaptitude et des besoins d’une rééducation professionnelle.
Avant 2003, de nombreux salariés en fin de carrière et présentant des problèmes de santé chroniques étaient déclarés invalides ou dispensés de recherche d’emploi. Ces décisions administratives ont fortement contribué à la baisse du taux d’activité des 55-60 ans durant la période 1990-2000. La réforme de 2003 a rendu moins facile l’octroi de pensions d’invalidité à taux plein pour encourager le bénéfice de pensions partielles avec une incitation à exercer une activité professionnelle adaptée à la réduction de capacité professionnelle. La même démarche a été entreprise auprès des chômeurs de longue durée pour les inciter à suivre une formation professionnelle dans des secteurs où existaient des pénuries de main d’œuvre.
Le programme de rééducation professionnelle représente un budget de 250 millions par an pour KELA, cette institution finançant essentiellement les formations pour les salariés précaires, les personnes handicapées alors que les institutions de retraite professionnelle prennent en charge les salariés devant se réorienter suite à une réduction de leur capacité de travail.
III.- -Réunions au Parlement finlandais
A. Entretien à la commission du travail et de l’égalité
M. Arto Satonen, député membre de la commission, a insisté sur le contexte démographique de la Finlande en indiquant qu’en 2006 le nombre de départs à la retraite a dépassé de 15 000 le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail. Jusqu’à présent l’immigration était faible (130 000 étrangers) mais avec la pénurie de main d’œuvre dans certains secteurs la question se pose d’encourager une immigration ciblée sur certaines qualifications. La Finlande réfléchit à ses relations avec les anciennes républiques soviétiques pour déterminer si elle va encourager l’immigration économique.
L’ensemble de la population finlandaise a compris les conséquences du vieillissement de la population active et cette prise de conscience explique que le corps social ait accepté des réformes impopulaires.
Les réformes ont été menées dans un souci de faire supporter à tous les mêmes efforts et les particularismes qui existaient auparavant ont été supprimés, notamment certains privilèges des fonctionnaires. La possibilité pour les membres des forces armées de partir plus tôt à la retraite va ainsi être supprimée.
La Finlande est confrontée à un problème de mobilité de sa population, le chômage est très élevé dans le nord et l’est alors qu’il y a très peu d’activité dans ces régions. Certains secteurs sont en pénurie de main d’œuvre et il est, par exemple, envisagé d’attirer des indiens pour pourvoir les postes dans le secteur très développé des nouvelles technologies.
B. Entretien à la commission des affaires sociales et de la santé
M. Juha Rehula , président de la commission, a présenté la réforme des retraites de 2005 en insistant sur l’importance de la préparation en amont de ces décisions difficiles. La réussite de cette réforme s’explique d’abord par sa lente maturation qui a permis de dégager un consensus.
En revanche, les discussions sont vives actuellement sur le mode d’indexation du montant des pensions de retraite et sur la nécessité d’alimenter le Fonds de réserve des retraites. Les retraités contestent les masses financières ainsi gelées au profit des générations futures.
Concernant l’insertion professionnelle des jeunes et le tutorat des seniors, M. Juha Rehula a reconnu que l’intégration des jeunes sur le marché du travail était difficile et qu’il serait possible d’améliorer le système de tutorat. Il y a certaines contradictions entre le discours officiel sur la retraite à taux partiel et la difficulté dans les entreprises à organiser le remplacement de ces seniors qui réduisent leur activité.
M. Erkki Virtanen, député d’opposition, a souligné les paradoxes de la situation de l’emploi. Il y a de graves manques de personnel dans le secteur de la santé mais les autorités communales sont réticentes à embaucher comme si elles craignaient d’engager des dépenses sur le long terme. La politique de formation n’est pas assez dynamique pour pallier la pénurie de personnels dans certains secteurs.
Les parlementaires ont estimé que la réforme des retraites de 2005 n’a pas eu d’impact négatif sur le montant moyen des retraites certains aspects de la réforme représentant un progrès par rapport au droit précédent : il est par exemple possible de valider certaines périodes de congé parental ou d’années d’études. Il n’existe plus de plafond pour limiter le montant maximum de la pension. Globalement les efforts supplémentaires demandés quant à la durée d’assurance paraissent compensés par certains nouveaux avantages et par la conviction que cette réforme était nécessaire pour assurer la pérennité du système de retraite par répartition.
IV.- Réunion avec la confédération syndicale des salariés (SAK) (Mme Kaijia Kallinen, directrice adjointe, et M. Kari Haring, médecin expert)
En Finlande il existe trois grandes organisations syndicales : le STTK représentant les cadres, l’AKAVA représentant les chercheurs et les enseignants des universités et la confédération SAK regroupant les ouvriers du secteur privé mais aussi les professionnels des services de santé, les employés du secteur public et ceux des entreprises de transport.
Malgré de profonds changements dans l’organisation du travail, il existe une forte différence d’espérance de vie entre les catégories socio professionnelles, cet écart étant plus fort pour les hommes que pour les femmes (écart de 6 ans entre les hommes cadres et ouvriers et 3,5 ans pour les femmes). Cette différence d’espérance de vie est plus forte en 2008 qu’il y a vingt ans.
M. Kari Haring, médecin expert, a souligné que la perception de la pénibilité par le salarié est presque plus importante que les conditions objectives de la pénibilité. Cette vision subjective dépend de multiples facteurs mais il semble très important que le salarié puisse avoir l’impression d’avoir un rôle actif dans le changement de son environnement de travail. La manière dont il est associé aux modifications du processus de production est un facteur clé.
L’idée centrale de la politique finlandaise menée depuis 1998 est de considérer que l’environnement de travail doit s’adapter au salarié senior alors qu’auparavant le salarié supportait la pression de l’adaptabilité.
Le cumul emploi–retraite avec réduction progressive du temps de travail pour les salariés seniors pose des problèmes d’organisation complexes. Les employeurs sont devenus plus réticents ces dernières années en raison d’une très forte demande et le ministère des finances commence lui aussi à vouloir restreindre le dispositif très coûteux pour les finances publiques en raison des avantages fiscaux.
Les syndicats souhaitent encadrer plus strictement le tutorat et les modalités de remplacement des retraités à temps partiel mais pour le moment il n’y a aucune obligation légale : des solutions empiriques doivent être trouvées dans chaque entreprise.
Les interlocuteurs ont aussi reconnus l’importance des troubles psychiques et ont indiqué qu’il fallait les traiter le plus en amont possible. Selon eux, leur fréquence s’explique avant tout par la difficulté à s’adapter à un environnement de travail qui change très rapidement, certains sujets étant plus sensibles que d’autres aux conséquences du stress.
V.- Bilan de la politique finlandaise en faveur de l’emploi des seniors
Il convient de souligner que l’ensemble des programmes concernant l’emploi des seniors a fait l’objet d’évaluations précises, ce travail étant à la fois réalisé par les ministères maître d’œuvre mais aussi par des universitaires qui ont été associés à l’ensemble de cette démarche de réforme. Systématiquement, les employeurs et les salariés ont été interrogés pour dresser un bilan du projet mené dans leur entreprise.
M. Tuomo Alasoini a souligné l’importance de cette culture de l’évaluation et l’intérêt de la large diffusion des résultats de ces évaluations. Selon lui, un des principaux aspects positifs de ces programmes a été de faire connaître les pratiques innovantes qui ont réussi, contribuant ainsi à une évolution des mentalités sur la possibilité de combiner incitation à l’emploi des seniors et rentabilité économique. Il a ainsi cité l’exemple du programme TYKES qui a permis, pour 70 % des projets, d’améliorer la productivité du travail. 66 % des salariés des entreprises ayant fait l’objet d’un programme TYKES ont déclaré que ce programme avait eu des résultats concrets pour leur environnement de travail.
D’après le professeur Juhani Ilmarinen, chef de projet à l’Institut de la santé au travail (TTL), ces différents programmes ont eu des effets très positifs pour faire accepter aux salariés l’idée de prolonger leur vie active au-delà de 63 ans : ils ont en effet permis de démontrer qu’il est possible de modifier positivement les conditions de travail et d’adapter les contraintes professionnelles selon l’âge des salariés.
Les différents interlocuteurs ont dressé un bilan nuancé de cette politique, ne cachant pas certains de ses échecs. Tous, ont souligné les spécificités sociales de leur pays et l’importance de la culture du consensus pour parvenir à faire accepter des décisions impopulaires.
A. L’augmentation du taux d’emploi des seniors
La politique en faveur de l’emploi des seniors a réussi à augmenter très nettement le taux d’emploi des seniors : de 1994 à 2006 le taux d’emploi des salariés de 55-64 ans est passé de 35,5 % à 54,7 %, soit le taux de progression le plus important de l’ensemble des pays de l’Union européenne (en France ce taux était de 37,6 % en 2006). Malgré cette progression remarquable, la Finlande est devancée par les autres pays scandinaves qui ont un taux d’emploi des seniors de 61 % pour le Danemark et de 70 % pour la Suède.
La Finlande semble en revanche avoir plus de difficulté pour améliorer son taux d’emploi global qui est en 2007 de 68,9 %, l’objectif du gouvernement finlandais étant d’atteindre un taux de 72 % d’ici 2010.
B. Les effets positifs de la réforme des retraites de 2005
Selon les différents interlocuteurs, le prolongement de la vie active est perçu comme une nécessité. La réforme a été globalement bien acceptée car elle apparaît comme indispensable pour assurer la pérennité du système de retraite par répartition.
Ses effets se feront sentir lentement, l’objectif étant de reculer l’âge moyen de départ à la retraite de deux à trois ans d’ici dix ans. Depuis l’entrée en vigueur de la réforme, on estime que l’âge moyen de départ à la retraite a été augmenté de huit mois (en 2006 l’âge moyen de départ était de 58,6 ans).
C. De nouvelles méthodes de gestion des méthodes de travail
Les différents programmes en faveur de l’emploi des seniors ont renforcé la pratique de négociation aussi bien au niveau des entreprises qu’au plan macroéconomique, ce qui a eu globalement un effet positif sur les relations sociales.
La Finlande a réussi par des mécanismes de formation appropriés à sensibiliser les employeurs, même ceux des PME, à la manière d’adapter les conditions de travail pour tenir compte de l’évolution sociologique des salariés. Cette adaptabilité des méthodes de travail n’aurait pu être possible sans le concours technique de multiples experts et universitaires qui ont aidé les entreprises à faire évoluer l’organisation du travail.
D. L’échec de la réduction de l’absentéisme
Un des objectifs du programme VETO est de réduire la fréquence des accidents du travail notamment dans les secteurs à risques (bâtiment, transports, industrie lourde) et de lutter contre l’absentéisme. L’objectif recherché est non seulement d’améliorer les conditions de travail mais aussi de contribuer à augmenter le taux d’activité global.
Les résultats obtenus sont inégaux : globalement la fréquence des accidents du travail et le nombre de maladies professionnelles n’ont pas diminué. En revanche des résultats positifs ont été obtenus dans la diminution des troubles musculo-squelettiques.
Tous les interlocuteurs se sont montrés préoccupés par la difficulté de traiter des troubles psychiques et d’obtenir des résultats durables dans la lutte contre l’alcoolisme.
L’absentéisme au travail n’a pas diminué ces dernières années malgré un suivi médical de très haute qualité. M. Kari Gröhn, expert chargé du suivi des indicateurs du programme VETO, a d’ailleurs indiqué que la Finlande devait à l’avenir mieux analyser ce phénomène car 50 % des congés maladie sont occasionnés par 5 à 7 % de la population active.
E. Une situation en demi teinte pour l’insertion professionnelle des jeunes et des chômeurs âgés de longue durée
Les questions de l’insertion professionnelle des jeunes et de l’accompagnement des demandeurs d’emploi âgés n’ont pas été longuement évoquées. Il apparaît cependant clairement que la Finlande a beaucoup mieux réussi à maintenir en activité ses salariés âgés qu’elle n’a trouvé de solutions pour réintégrer sur le marché du travail les chômeurs âgés.
Conclusion
Malgré les spécificités du modèle social finlandais, certains enseignements peuvent être tirés de l’expérience finlandaise pour une transposition dans le contexte français.
Les résultats obtenus par la Finlande en matière de taux d’emploi des seniors sont spectaculaires mais ils sont le fruit d’une mobilisation de tous les acteurs de la société. Les réformes introduites à partir de 1996 ont été précédées par une longue période de maturation qui a permis aux acteurs sociaux, notamment les syndicats de salariés et les organisations d’employeurs, de mesurer les conséquences du vieillissement de la population active. La crise économique à partir de 1994 a accéléré la prise de conscience de la nécessité des réformes pour sauver le modèle d’Etat providence à la finlandaise.
La politique menée a combiné des mesures incitatives dans le cadre des multiples programmes qui ont amené les entreprises à revoir leurs méthodes de travail pour les adapter aux salariés âgés et des mesures coercitives pour interdire les anciennes formes de préretraite ou retarder l’âge de départ en retraite.
La principale réussite de la Finlande est d’avoir réussi une révolution culturelle : le salarié âgé n’est plus perçu comme une charge pour le dynamisme économique du pays. Elle est aussi parvenue, grâce à la qualité de son dialogue social, à engager des réformes qui ont été perçues comme équitables malgré les sacrifices consentis. Il ne faut pas oublier qu’un travail préalable avait été mené notamment pour harmoniser les régimes sociaux de retraite, ce qui a permis en 2005 de demander à tous les actifs un effort équivalent.
ANNEXE N° 5
DÉPLACEMENT À MADRID DU 26 AU 28 FÉVRIER 2008
Synthèse des réunions
Ont participé au déplacement : M. Jean-Frédéric Poisson, président, M Régis Juanico et Mme Isabelle Vasseur, députés membres de la mission d’information.
I.- Repères statistiques sur l’Espagne
– Population : 45 millions d’habitants
– Population active : 22,3 millions (fin 2007)
– Taux de chômage : 8,6 % (fin 2007)
– 31,9 % des salariés ont un emploi temporaire (CDD ou intérim) (estimation 2007)
– 11,6 % des salariés sont à temps partiel (3,9 % pour les hommes et 22,6 % pour les femmes)
– 829 592 accidents du travail avec arrêt de travail dont 966 mortels (2006)
II.- Entretiens au ministère des affaires sociales et de la santé
Plusieurs interlocuteurs ont souligné l’influence du droit européen communautaire sur l’évolution de législation sociale espagnole. C’est une différence très nette avec la Finlande où il n’a jamais été fait mention de l’obligation de transposer en droit interne les dispositions des directives européennes.
La législation espagnole en matière de sécurité au travail est donc très récente, ces dernières années ayant été marquées par une adoption accélérée de nouvelles normes réglementaires et par la prise de conscience du retard de l’Espagne dans la prévention des risques professionnels.
L’Espagne s’est dotée d’un corpus juridique important mais ce sont les Communautés autonomes qui sont responsables, pour bien des aspects, du contrôle de la mise en œuvre de ces obligations par les entreprises. Il semble que le caractère effectif de cette législation soit très relative selon les régions, les zones fortement industrialisées avec de grandes entreprises et une implantation syndicale ancienne respectant beaucoup plus les normes en vigueur que les zones où l’activité agricole est encore dominante.
Certains fonctionnaires rencontrés n’ont pas caché que, s’il fallait se féliciter des progrès réalisés dans l’adoption de nouvelles normes contraignantes en matière de sécurité au travail, beaucoup restait à faire pour assurer une application équitable de ces normes sur l’ensemble du territoire espagnol.
La loi fondamentale qui a initié la démarche de prévention des risques professionnels en Espagne date du 8 novembre 1995 (ley n°31 -1995 prevencion de riesgos laborales) et correspond à la transposition des principes de la directive européenne n°89/391/CEE dite « directive-cadre » du 12 juin 1989 visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail. Elle a placé l’évaluation des risques professionnels au sommet de la hiérarchie des principes généraux de prévention dès lors que les risques n’ont pas pu être évités à la source. Elle pose aussi des principes généraux de prévention qui ont été repris dans la législation espagnole :
– éviter les risques ;
– évaluer les risques qui ne peuvent être évités ;
– combattre les risques à la source ;
– tenir compte de l’évolution de la technique ;
– remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou l’est moins ;
– planifier la prévention en y intégrant la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et les facteurs ambiants ;
– prendre des mesures collectives en priorité par rapport aux mesures individuelles ;
– donner les instructions appropriées aux travailleurs pour assurer leur sécurité.
A. La notion de pénibilité n’a pas de définition légale
Mme María de Mingo Corral, conseillère technique de la direction générale du travail, a expliqué qu’il n’existe pas de définition légale de la pénibilité. C’est un concept juridique qui n’existe pas en droit espagnol. La loi reconnaît que certaines activités peuvent avoir des conséquences nocives pour la santé et prévoit donc une réduction du temps d’exposition au risque comme, par exemple, le temps de travail dans les chambres frigorifiques ou dans des milieux avec un très fort taux d’humidité.
Certaines activités considérées comme pénibles sont interdites aux mineurs ou aux femmes enceintes.
Ce sont surtout les conventions collectives qui définissent les activités pénibles à partir de critères objectifs (exposition à des agents chimiques toxiques, contraintes physiques, exposition aux intempéries,…) et qui fixent des mécanismes de compensation comme par exemple les primes de salissure ou une réduction du temps de travail pour le travail de nuit.
L’employeur a la responsabilité de réduire autant qu’il le peut les risques professionnels et doit attribuer au salarié un poste compatible avec son état de santé. Les mécanismes de compensation pour activités pénibles ou risquées doivent donc être résiduels.
La pénibilité est indirectement reconnue dans certains secteurs professionnels en matière de droit à pension, la durée d’assurance étant réduite à 30 ans pour bénéficier d’une pension de retraite à taux plein. C’est notamment le cas pour les marins, les mineurs, les salariés des transports ferroviaires ou dans la tauromachie. Ces dernières années, la législation sociale a été plus restrictive pour accorder ces avantages en termes de durée d’assurance car l’Espagne est confrontée à un vieillissement de sa population et doit plutôt inciter les salariés à travailler plus longtemps.
B. La pénibilité ressentie par les travailleurs
M. Antonio Rodríguez de Prada, directeur du Centre national des nouvelles technologies de Madrid – Institut national de sécurité et hygiène au travail, a indiqué que tous les trois ans l’Institut national de sécurité et hygiène au travail réalise une grande enquête sur les conditions de travail telles qu’elles sont perçues par les salariés. Le panel comprend 11 000 salariés, les entretiens sont réalisés au domicile des intéressés pour leur permettre une totale liberté de parole. La dernière enquête révèle que 22 % des salariés interrogés considèrent que leur santé est affectée par des conditions de travail pénibles, ce taux atteignant 30 % parmi les chauffeurs de taxi et les professionnels de santé.
C. Le rôle de l’inspection du travail
M. Adrián González Martín, sous-directeur général pour la prévention de risques professionnels – direction générale de l’inspection du travail et de la sécurité sociale, a indiqué que les compétences de l’inspecteur du travail en Espagne sont très larges ; il est chargé du contrôle de l’application de l’ensemble de la législation sociale : respect de la durée du travail, législation sur la santé au travail, respect de la législation sur l’immigration, lutte contre le travail dissimulé,…
Il existe des cas où il a obligation d’intervenir pour procéder à une enquête comme par exemple suite à un accident du travail mortel ou accident grave ayant touché plusieurs salariés.
En matière de prévention des risques professionnels, l’action des inspecteurs du travail est très souvent limitée car ce sont d’autres professionnels, les techniciens habilités par les Communautés autonomes, qui sont chargés de visiter les entreprises pour vérifier le respect des normes de sécurité au travail. Si ces techniciens constatent des manquements, ils proposent à l’inspecteur du travail compétent de prendre des sanctions.
L’échelle des sanctions en cas de mise en danger de la santé d’un salarié va de 2 046 euros à 40 980 euros pour une infraction grave et de 40 980 à 819 780 euros pour une infraction très grave.
Selon les régions et l’implication des techniciens dépendant des Communautés autonomes, le contrôle des conditions de travail est très variable. De nombreux interlocuteurs ont souligné la nécessité d’améliorer la coordination entre les compétences étatiques et celles assurées par les Communautés autonomes. En effet, en raison de l’inertie de certaines communautés, des dispositions légales du droit social espagnol restent totalement virtuelles.
D. L’organisation de la prévention des risques professionnels
M. Fernando Fernández Perdido, sous-directeur général des entités collaboratrices de la sécurité sociale, a expliqué que jusqu’en 1978 la sécurité sociale était également chargée de la prévention des risques professionnels. Faute de compétences dans l’administration étatique espagnole et en raison des réticences des employeurs, la prévention des risques professionnels a été déléguée à des organismes privés, les mutuelles d’entreprise qui intervenaient déjà pour verser les prestations sociales indemnisant les accidents du travail.
Ce n’est qu’en 1995 que la loi a explicitement attribué au chef d’entreprise la responsabilité de la prévention des risques professionnels.
La tarification des cotisations d’accident du travail est incitative : si une entreprise investit en matière de prévention elle peut obtenir une réduction de ses cotisations et inversement si un accident survient faute de mesures de sécurité adéquates l’entreprise peut être sanctionnée en devant prendre à sa charge une plus grosse part des prestations servies à la victime.
Un projet de réforme est actuellement à l’étude pour mieux organiser le financement de la prévention des risques professionnels et prévoir l’affectation d’une part de l’excédent des mutuelles au financement des actions de prévention.
M. Alberto Sanz Merinero, conseiller technique à la direction de l’Institut national de sécurité et hygiène au travail, a expliqué que les risques professionnels sont gérés de manière très disparate selon la taille des entreprises. Les entreprises de plus de 50 salariés disposent d’un organe proche du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) français, en revanche pour les PME et les TPE tout reste à faire. Il faut se féliciter que certaines Communautés autonomes aient mis en place des délégués territoriaux de sécurité pour apporter un appui technique à ces entreprises. Les partenaires sociaux négocient actuellement sur cette question et étudient la manière de constituer des délégués de sécurité sectoriels pour aider les employeurs des TPE à se former en matière d’évaluation des risques professionnels.
En effet toutes les entreprises doivent être en mesure de présenter un plan d’évaluation des risques professionnels, ce qui est loin d’être le cas actuellement.
III.- Réunion avec les représentants de l’Association des mutuelles d’accidents et maladies professionnelles de la sécurité sociale (AMAT)
Ces mutuelles sont des associations à but non lucratif constituées par des employeurs. Elles doivent être agréés par le ministère du travail. Pour se constituer elles doivent regrouper au moins 50 employeurs et représenter 30 000 travailleurs.
Les entreprises ont le libre choix du prestataire qui prendra en charge la prévention des risques professionnels et le paiement des prestations pour indemniser les accidents du travail ou les maladies professionnelles. Très généralement, ces mutuelles assurent aussi le paiement des indemnités journalières suite aux arrêts de travail occasionnés par la maladie.
Une part du résultat financier de ces mutuelles (1 %) est affectée au financement de la prévention pour les PME, le reste est reversé à la Sécurité sociale.
Le discours tenu par les représentants des mutuelles est très proche de celui que pourraient avoir des assureurs : leur objectif est de réduire la probabilité de la survenance d’accidents du travail.
Ces mutuelles soumettent à la sécurité sociale des plans annuels de prévention des risques professionnels.
M. Antonio Pérez Vázquez, directeur du département juridique de l’AMAT, a souligné que l’Espagne a fait de gros progrès dans la réduction du nombre d’accidents du travail depuis 2000, les efforts de prévention ayant été longs à porter leurs fruits. Les sinistres ont baissé de 4 % par an en moyenne depuis sept ans.
Plusieurs interlocuteurs ont souligné que la définition de l’accident du travail (similaire à la définition en droit français) pose problème car elle conduit à prendre en charge, au titre des accidents du travail, des accidents de santé provoqués essentiellement par des pathologies préexistantes sans lien avec le travail. Les syndicats de salariés refusent toute évolution de la définition de l’accident du travail d’autant plus que la reconnaissance d’une maladie professionnelle est très difficile. Les conditions restrictives pour faire reconnaître une maladie professionnelle ont d’ailleurs eu pour conséquence de faire admettre comme accident du travail des pathologies qui sont en fait des maladies professionnelles (par exemple, des troubles musculo-squelettiques).
L’absentéisme pour cause de maladie a, par ailleurs, augmenté suite à la réduction du nombre d’accidents du travail. Les petits arrêts maladie sont à la charge de l’employeur (moins de 15 jours d’incapacité) et les contrôles de la sécurité sociale sont inexistants. Les employeurs demandent depuis longtemps une modification de la législation sur ce point.
IV.- Réunion au ministère de la santé et de la consommation
Mme Montserrat García Gómez, chef du département de la santé au travail - direction générale de la santé publique, et Mme Elena Martín-Asín, sous-directrice générale adjointe de relations internationales, ont insisté sur les progrès réalisés par l’Espagne en matière de prévention des accidents du travail. Des résultats significatifs ont été obtenus surtout pour les accidents mortels qui ont diminué de moitié par rapport à 1997 (846 victimes en 2007) mais la situation reste très contrastée selon les régions.
Le véritable problème de santé au travail reste la sous-déclaration des maladies professionnelles, les écarts entre régions étant encore plus significatifs. Dans les régions à forte tradition industrielle, les services de santé sont attentifs à cette question et parviennent à faire reconnaître des maladies alors que dans les régions pauvres, cette démarche n’existe pas.
En matière de santé au travail, le bilan de la politique menée ces dernières années est en demi-teinte. Seules les entreprises de plus de 500 salariés, ou de plus de 250 si l’activité est considérée comme dangereuse, doivent avoir leur propre service de surveillance médicale et de prévention des risques professionnels. Les autres peuvent recourir à un prestataire extérieur ou organiser elles–mêmes cette surveillance.
Les entreprises ont massivement sous-traité cette fonction, ce qui a permis une meilleure approche pluridisciplinaire des risques de santé au travail mais ce qui a aussi conduit à un certain désengagement des chefs d’entreprise.
Au niveau régional, des progrès ont été faits pour mieux associer les syndicats de salariés à des groupes de travail auxquels participent l’administration d’Etat, les professionnels des Communautés autonomes et des experts. Ces groupes ont permis la réalisation de publications spécialisées portant sur des protocoles de suivi sanitaires pour certains risques comme le bruit, les dermatoses professionnelles, les risques chimiques.
Au plan politique, les partenaires sociaux et le gouvernement ont signé un accord cadre portant sur un plan d’action pour la sécurité et la santé au travail (2007-2012)72. La signature de cet accord représente déjà un grand progrès symbolique car il signifie que les employeurs veulent s’impliquer sur les questions de santé au travail. Il est trop tôt pour dire si cet accord aura des résultats concrets significatifs.
L’Espagne a de gros progrès à faire en matière de médecine du travail car il n’existe pas de professionnels spécialisés. Le suivi médical n’est pas assez différencié selon les risques professionnels spécifiques : les examens réalisés sont très coûteux mais sont souvent inutiles pour détecter des risques professionnels ciblés. La coordination entre médecin du travail et médecin traitant doit être mise en place car elle est aujourd’hui inexistante.
V.- Réunions avec les confédérations syndicales de salariés
A. La confédération syndicale Union Générale des Travailleurs (UGT)
Ce syndicat réunit huit fédérations professionnelles et représente un million de salariés cotisants.
Mme Dolores Hernández, secrétaire confédérale de la santé au travail et de l’environnement, a insisté sur l’évolution des mentalités en Espagne en matière de santé au travail. Cette prise de conscience a abouti à la signature d’un accord cadre en juillet 2007 entre les partenaires sociaux et le gouvernement pour organiser sur plusieurs années une stratégie de sécurité et de santé au travail (2007-2012). Cet accord a aussi une traduction dans les communes autonomes qui auront chacune un plan de santé au travail.
Dans cette stratégie l’accent est mis sur les PME qui ne bénéficient d’aucune représentation syndicale (300 000 entreprises ont des effectifs compris entre 6 et 50 salariés).
Un groupe de travail paritaire travaille sur le financement de cet accord. Le résultat des élections législatives risque de modifier un peu les données du problème mais de premières estimations évaluent à 30 millions d’euros par an le coût annuel de la mise en œuvre d’un suivi des risques de santé dans les PME et micro-entreprises. D’autres crédits devront être trouvés pour inciter les entreprises à remplacer les machines dangereuses par exemple. Pour l’instant, la clé de répartition du financement entre autorités publiques et fédérations d’employeurs n’est pas connue.
L’Espagne a aussi un problème spécifique tenant au très fort taux de contrats précaires et des pratiques de sous-traitance en cascade. Les accidents du travail sont beaucoup plus fréquents chez les salariés intérimaires ou intervenant pour des sous-traitants (70 % des accidents mortels interviennent chez les sous-traitants). Certains travaux sont interdits aux salariés intérimaires mais cette interdiction n’est pas respectée.
La réduction de l’emploi précaire fait actuellement l’objet de négociations entre les partenaires sociaux. L’Espagne a pris conscience que sa situation a des conséquences néfastes sur la sécurité et la compétitivité. Les partenaires sociaux ont donc pris l’engagement de la réduire et des résultats significatifs ont été obtenus : en un an, le taux d’emplois précaires est passé de 33 à 30 %. La poursuite de cet effort en 2008 risque d’être plus difficile si la conjoncture économique devient défavorable.
Même si l’Espagne a fait des progrès, il convient de relativiser ses succès. En comparaison avec les autres pays de l’Union européenne, le taux d’accident du travail en Espagne est supérieur de 70 % à la moyenne des autres pays de l’Union. Cependant, la loi espagnole vient de renforcer la possibilité de mettre en cause la responsabilité du donneur d’ordre quand un accident intervient chez un sous-traitant, ce que l’UGT a salué.
Un gros travail doit être mené entre les confédérations syndicales et les Communautés autonomes pour les inciter à organiser des services de prévention offrant le concours de techniciens spécialisés afin que les entreprises disposent d’appuis techniques.
La sécurité au travail suppose un effort de formation : la convention collective du bâtiment vient d’être modifiée pour rendre obligatoire une formation initiale à la sécurité d’une durée de 10 heures, qui devra être suivie avant toute prise de fonction. Il faut espérer que d’autres branches professionnelles suivront cette démarche.
La situation de l’Inspection du travail n’est pas satisfaisante. Les effectifs sont trop faibles : il n’y a qu’un inspecteur pour 23 000 salariés (1 pour 27 000 en 2002) et la coordination avec les techniciens de sécurité habilités par les Communautés autonomes est beaucoup trop faible. Le prochain défi à relever est de permettre aux commissions paritaires qui existent dans chaque communauté autonome de donner une impulsion au travail mené par ces techniciens de sécurité qui sont très compétents mais qui n’ont pas de stratégie pour accompagner les entreprises qui en ont le plus besoin.
Mme Dolores Hernández a porté une appréciation très négative sur le rôle des mutuelles d’accidents du travail qui n’auraient pas dû recevoir de prérogatives en matière de prévention des risques. Les syndicats étaient opposés à cette réforme qui date de 1997. Les mutuelles sont dans une position de juge et partie et, de plus, ne sont pas suffisamment contrôlées par la sécurité sociale. Tous les syndicats de salariés souhaitent une réforme de l’organisation de la prévention des risques professionnels et préconisent que ces mutuelles deviennent des établissements publics gérés paritairement. Les fonds consacrés à la prévention doivent aussi être gérés de manière beaucoup plus transparente. La suspicion à l’égard de ces mutuelles est d’autant plus forte que les syndicats les considèrent comme complices des employeurs pour la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.
B. La Confédération syndicale des commissions ouvrières
M. Julián Ariza, adjoint au secrétariat général, a souligné que la situation de la santé au travail reste préoccupante en Espagne comme le montre le niveau encore très elevé d’accidents du travail. La sous-déclaration des maladies professionnelles est un véritable drame qui a de lourdes conséquences sanitaires. Il a été estimé que 16 000 personnes par an décèdent suite à une exposition à des produits toxiques durant leur vie professionnelle sans avoir pu obtenir de reconnaissance du caractère professionnel de leur pathologie. Depuis 2007, les maladies professionnelles doivent être déclarées par les mutuelles d’accidents du travail et on constate un nombre encore plus restreint de déclarations. Le rôle des mutuelles est très néfaste car elles cherchent à réduire les coûts au mépris de la santé des salariés.
Concernant l’impact concret de l’accord sur la stratégie espagnole de sécurité et de santé au travail (2007-2012), M. Fernando Rodrigo, coordinateur du secrétariat confédéral de la santé au travail et de l’environnement, a rappelé que la loi de 1995 sur la prévention des risques au travail a représenté un grand progrès d’autant plus qu’elle a été complétée par de multiples réglementations techniques limitant, par exemple, les risques relatifs à la manipulation de produits toxiques ou cancérigènes ou imposant le renouvellement des parcs de machines dangereuses. Mais la situation des salariés ne s’est pas vraiment améliorée en raison des difficultés de mise en œuvre de cette démarche de prévention des risques professionnels.
L’apport essentiel de l’accord sur la stratégie de santé au travail est tout particulièrement de permettre de contrôler l’application des normes existantes dans les PME et les micros entreprises (plus de 1,3 million d’entreprises ont moins de six salariés). Il est, par exemple, prévu de mettre en place des agents de prévention dont la mission sera d’informer les petites entreprises sur leurs obligations en matière de sécurité.
Cet accord permettra aussi de faire avancer la culture de prévention des risques et il prévoit pour cela des actions de formation des employeurs et des syndicalistes en matière de sécurité au travail. La démarche est très pragmatique : les formations seront organisées par secteurs professionnels pour permettre d’évoquer les problèmes concrets rencontrés par les PME.
Il est aussi rassurant de constater une véritable implication des Communautés autonomes pour faciliter les actions de formation.
Concernant la réforme des mutuelles d’accidents du travail et la nécessité de réformer profondément la gestion du risque AT et la prévention des risques professionnels, la position de la Confédération syndicale des commissions ouvrières est proche de celle de l’UGT. La confédération préconise que l’adhésion à tel ou tel organisme relève d’un accord entre l’employeur et les salariés et que ces mutuelles soient gérées de manière paritaire par les partenaires sociaux. Les risques de malversation financière ont également été soulignés ; il est urgent de revoir le contrôle interne des mutuelles, la sécurité sociale n’exerçant actuellement qu’une tutelle de pure forme.
Interrogés sur la qualité du dialogue social en Espagne, les représentants de la confédération ont eu une réponse nuancée. Ils ont expliqué que, malgré des conflits sociaux parfois très durs, les partenaires sociaux ont toujours été conscients de la nécessité du dialogue pour réussir la transition vers la démocratie et éviter que le pays ne connaisse une recrudescence du terrorisme. La gravité du chômage dans les années 1990 (taux de 24 % en 1993) explique aussi la modération des revendications salariales des syndicats.
Le rôle de l’Etat est très important, il a parfois eu un rôle déterminant pour inciter les partenaires sociaux à conclure des accords comme, par exemple, suite à un grave accident dans le port de Valence ayant entraîné la mort de 17 salariés. Cet évènement a eu l’effet d’un électrochoc ; il est apparu comme une évidence qu’il fallait améliorer la sécurité au travail. Il a eu aussi un rôle important pour l’aboutissement de l’accord sur la stratégie espagnole de sécurité et de santé au travail. Les organisations syndicales de salariés attendent beaucoup de cet accord qui permettra une planification pluriannuelle des actions de prévention des risques professionnels.
La réduction des formes d’emploi précaire est l’autre grand sujet qui fait l’objet de négociations. Des résultats ont déjà été atteints en 2006 et 2007. Il existe désormais un nouveau type de contrat à durée indéterminée qui offre une indemnisation réduite en cas de licenciement. Ce type de contrat a été négocié en contrepartie de l’engagement des employeurs de réduire le nombre de contrats précaires. Le taux d’emploi précaire est passé de 33 % à 30 % au cours de l’année 2007, l’objectif étant de parvenir à un taux de 25 % d’ici 2012.
Il convient aussi de souligner les progrès récents pour permettre de mettre en cause la responsabilité du donneur d’ordre en cas de manquement à la sécurité sur des chantiers où il existe une chaîne de sous traitance.
En revanche, aucun progrès n’a été constaté dans la lutte contre le travail dissimulé qui est pratiqué à grande échelle notamment dans les régions agricoles. Malgré une politique de régularisation massive des immigrés clandestins, le taux de salariés non déclarés est estimé à 16 % dans les zones agricoles. Il ne semble pas que de réels moyens d’investigation soient mis en place pour démasquer les filières d’emplois clandestins.
VI.- Réunion avec la Confédération espagnole d’organisations patronales (CEOE)
Mme Pilar Iglesias, directrice pour la Sécurité sociale, la prévention des risques professionnels, la santé et les services sociaux de la confédération, a confirmé qu’il n’existe pas de négociations spécifiques sur la pénibilité au travail mais que l’amélioration des conditions de travail est un véritable enjeu.
La Commission nationale de sécurité et de santé au travail est un organe de concertation très utile pour faire avancer certains dossiers. Organe consultatif où siègent les syndicats de salariés, les organisations représentant les employeurs, les Communautés autonomes et l’administration d’Etat, cette commission a, par exemple, fait des propositions pour améliorer la prévention des accidents du travail auprès des salariés intérimaires ou auprès des travailleurs immigrés.
Le plan 2007-2012 portant sur la stratégie de santé au travail permettra aussi des avancées significatives. La mentalité des employeurs a évolué et, même dans les PME, on a compris la nécessité de prévenir les risques professionnels.
Les modalités de déclaration des maladies professionnelles sont cependant insatisfaisantes mais il est prématuré de juger la réforme de 2007 qui a été adoptée pour répondre aux recommandations de l’Union européenne. Les formalités déclaratives devraient être simplifiées, ce qui devrait mettre un terme à la pratique actuelle qui consiste à faire prendre en charge au titre de la législation sur les accidents du travail des affections qui sont en réalité des maladies professionnelles.
Concernant l’absentéisme pour cause de maladie, les employeurs demandent depuis plusieurs années que la sécurité sociale procède à des contrôles sur les arrêts de travail. Les entreprises payent en effet les indemnités journalières (intégralement pour les arrêts inférieurs à quinze jours) sans aucune possibilité de faire contrôler le caractère médicalement justifié de ces arrêts.
Plusieurs projets d’incitations financières pour la prévention sont à l’étude pour permettre d’intéresser les entreprises à la réussite de leurs actions de prévention. Les cotisations payées aux organismes chargées de la prévention seraient versées selon un système de bonus malus pour encourager les investissements dans la prévention et récompenser les entreprises ayant réussi à réduire le nombre d’accidents du travail. Il est aussi envisagé d’utiliser certaines réserves financières de la sécurité sociale pour financer des actions de prévention mais le gouvernement est réticent en raison des prévisions pessimistes sur l’évolution des comptes sociaux espagnols.
La médecine du travail et les organismes auxquels les entreprises ont délégué la prévention des risques professionnels doivent être améliorés. Les compétences professionnelles sont très inégales et beaucoup d’organismes sont bureaucratiques. Le suivi médical des salariés est souvent déficient faute de coordination avec la médecine de ville et les services hospitaliers.
ANNEXE N° 6
PRINCIPAUX RAPPORTS, ÉTUDES ET SYNTHÈSES PUBLIÉS EN FRANCE EN LANGUE FRANÇAISE
DEPUIS 2003 SUR LA PÉNIBILITÉ AU TRAVAIL
(par ordre chronologique de publication)
• Caroline Amblard, Nicola Gianinazzi et Marie-Christine Bon – Rapport de la mission d’évaluation de la période d’essai du carnet individuel de suivi « prévention, santé, travail » – Janvier - Mars 2003
• Yves Struillou – Conseil d’orientation des retraites (COR) – « Pénibilité et retraite » – Avril 2003
• Daniel Goudard, Erwan Jaffrès – Alpha Etudes – « Pénibilité et retraite : des repères pour le débat social à partir du cas du BTP » – Février 2004
• Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) – « Pénibilité – Les positions des partenaires sociaux » – Avril 2004
• Dominique Waltisperger – Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Le travail est rendu responsable d’un problème de santé sur cinq » – Mai 2004
• Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Les conditions de travail des seniors », étude publiée dans Premières Synthèses Informations n° 19.2 – Mai 2004
• Forum, bulletin de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail – L’observation en matière de santé et de sécurité au travail dans l’Union européenne, Combiner les systèmes de données – Forum 11, 2004
• Dr Bernard Arnaudo, Dr Isabelle Magaud-Camus, Dr Nicolas Sandret, Thomas Coutrot, Marie-Christine Floury, Nicole Guignon, Sylvie Hamon-Cholet, Dominique Waltisperger – Direction de l'animation et de la recherche des études et des statistiques (DARES) – « L’exposition aux risques et aux pénibilités du travail de 1994 à 2003 - Premiers résultats de l’enquête SUMER 2003 » – Décembre 2004
• Thomas Coutrot, Dominique Waltisperger – Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « L’emploi des seniors souvent fragilisé par des problèmes de santé » – Février 2005
• Direction des relations du travail – Ministère de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale – « Plan Santé au travail 2005-2009 » – Février 2005
• Gérard Lasfargues – Centre d’études de l’emploi – « Départs en retraite et “travaux pénibles” - L’usage des connaissances scientifiques sur le travail et ses risques à long terme pour la santé » – Avril 2005
• Yves Roquelaure, Catherine Ha, Marine Sauteron – Institut de veille sanitaire – « Réseau expérimental de surveillance épidémiologique des troubles musculo-squelettiques dans les Pays de la Loire - Surveillance en entreprise en 2002 » – Mai 2005
• Thomas Barnay – Retraite et société n° 46 de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) – « Pénibilité au travail, santé et droits d’accès à la retraite » – Octobre 2005
• Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Travail de nuit et du soir depuis dix ans », étude publiée dans Premières Synthèses Informations n° 40.2 – Octobre 2005
• Franck Héas – Travail et emploi n° 104 – « La définition juridique de la pénibilité au travail » – Octobre-décembre 2005
• Jean-Louis Dayan – La documentation française – « Travail et emploi en France : état des lieux et perspectives » – 2006
• Dr Bernard Arnaudo, Dr Isabelle Magaud-Camus, Dr Nicolas Sandret, Thomas Coutrot, Marie-Christine Floury, Nicole Guignon, Sylvie Hamon-Cholet, Dominique Waltisperger – Données sociales - La société française (INSEE) – « L’exposition aux risques et aux pénibilités du travail de 1994 à 2003 » – 2006
• Engin Yilmaz – Centre d’études de l’emploi – « Pénibilité du travail - Évaluation statistique » – Janvier 2006
• Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), Benoît Rapoport – « Les intentions de départ à la retraite des salariés du privé âgés de 54 à 59 ans » – Etudes et Résultats n° 478 de mars 2006
• INRS, projet transversal « stress » du département Epidémiologie en entreprises – synthèse « Stress et risques psychosociaux : concept et prévention » publiée dans Documents pour le médecin du travail n° 106 (2e trimestre 2006)
• Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels – « Bilan et perspectives de la santé au travail 2005-2006 » – 24 mai 2006
• Collectif – « SVP 50 : Santé et vie professionnelle après 50 ans », analyse d’une enquêt réalisée en 2003) – Cahier de la médecine interprofessionnelle CAMIP n° 2006-3
• Équipe SUMER – Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Les expositions aux risques professionnels - Les ambiances et contraintes physiques – Résultats SUMER 2003 » – Document d’études n° 115 – Juillet 2006
• INRS, département Homme au travail, « Démarche de prévention du stress au travail – la réalisation d’un diagnostic organisationnel », article publié dans Documents pour le médecin du travail n° 107 (3e trimestre 2006)
• Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Conditions de travail : une pause dans l’intensification du travail », étude publiée dans Premières Synthèses Informations n° 01.2 – janvier 2007
• Didier Blanchet, Thierry Debrand – Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES) – « Aspiration à la retraite, santé et satisfaction au travail : une comparaison européenne » – Février 2007
• Thierry Debrand et Pascale Lengagne – Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES) – « Pénibilité au travail et santé des seniors en Europe » – Mars 2007
• Ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité – « Accord interprofessionnel du 12 mars 2007 relatif à la prévention, à la tarification et à la réparation des risques professionnels » – Mars 2007
• Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Plus de trois établissements sur quatre déclarent évaluer les risques professionnels », étude publiée dans Premières Synthèses Informations n° 09.3 – Mars 2007
• INRS, synthèse du congrès sur « le stress au travail, une réalité », organisé par l’INRS à Nancy les 1er et 2 février 2007, publiée dans Documents pour le médecin du travail n° 110 (2e trimestre 2007)
• Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels – « Bilan et perspectives de la santé au travail 2006-2007 » et « Chiffres et tendances - les accidents du travail et les maladies professionnelles » – 10 juillet 2007
• Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Accidents et conditions de travail », étude publiée dans Premières Synthèses Informations n° 31.2 – Août 2007
• Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAV), direction des recherches sur le vieillissement et direction de la prospective et de la coordination des études – « Les comportements de départ à la retraite », étude examinée par le Conseil d’orientation des retraites (COR) lors de sa séance du 26 septembre 2007 – Septembre 2007
• Laboratoire interdisciplinaire de recherche sur les ressources humaines et l’emploi (LIRHE) – « Etude sur l’évolution des dispositions concernant les seniors ainsi que les critères d’âge et d’ancienneté dans quelques accords de branche », rapport au Conseil d’orientation des retraites – Octobre 2007
• Inspection générale des affaires sociales (Claire Aubin, Régis Pélissier, Pierre de Saintignon), inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (Jacques Veyret), Françoise Conso, professeure de médecine honoraire, et Paul Frimat, professeur de médecine – « Rapport sur le bilan de réforme de la médecine du travail » – Octobre 2007
• Institut national de recherche et de sécurité (INRS), en collaboration avec les caisses régionales d’assurance maladie (CRAM) – « Dépister les risques psychosociaux, des indicateurs pour vous guider » (édition INRS ED 6012) – 2e édition, décembre 2007
• Direction générale du travail (ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité) – « Bilan de la mise en œuvre de la pluridisciplinarité en matière de santé et de prévention des risques professionnels » – Décembre 2007
• Dominique Waltisperger – Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) – « Pénibilité au travail et sortie précoce de l’emploi » – Janvier 2008
• Emmanuelle Cambois, Caroline Laborde, Jean-Marie Robine – Institut national d’études démographiques (INED), Population et sociétés n° 441 de janvier 2008 – « La “double peine” des ouvriers : plus d’années d’incapacité au sein d’une vie plus courte » – Janvier 2008
• Conseil économique et social, avis présenté par M. Christian Dellacherie – « L’avenir de la médecine du travail » (rapport 2008 n° 3) – avis adopté le 27 février 2008
• Philippe Nasse, magistrat honoraire, et Patrick Légeron, médecin psychiatre – « La détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail », rapport remis à M. Xaxier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité – 12 mars 2008
• Céline Mardon et Serge Volkoff (Centre d’études pour l’emploi, CREAPT) – « Les salariés âgés face au travail "sous pression" » – Connaissance de l’emploi n° 52 de mars 2008
• EUROGIP – Traçabilité des expositions professionnelles (étude réalisée pour le compte de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés) – 5 mars 2008
• Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) – « Agir sur le stress et les risques psychosociaux » – Travail et changement n° 318 de mars-avril 2008
• Le stress au travail, dossier publié dans Enjeux, Bulletin d’information de la Mutualité sociale agricole n° 83 d’avril 2008
ANNEXE 7
PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT
(JUIN 2005)
17 juin 2005
AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL
ET RÉDUCTION DE LA PÉNIBILITÉ DU TRAVAIL
Réunion paritaire du 21 juin 2005
Préambule…
…
Les parties signataires conviennent de ce qui suit :
TITRE I – AMELIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL
Article 1
L’amélioration des conditions de travail est tout à la fois un facteur de qualité de vie professionnelle pour les salariés et de progrès pour les entreprises.
Cette amélioration est la première condition de la réduction de la pénibilité du travail.
Article 2
Les conditions de travail sont en constante amélioration. Cette amélioration tient à différents facteurs telles que les évolutions technologiques, économiques et sociales et la prévention des risques professionnels. Un certain nombre d’éléments objectifs en font la démonstration.
La participation des entreprises, comme celle des salariés, à ce progrès a été et reste déterminante. Elles doivent poursuivre et accentuer leurs efforts en concertation avec les représentants des salariés.
Le présent accord a pour objet de donner une nouvelle impulsion à cette démarche et d’amplifier l’effort engagé en définissant des objectifs prioritaires ainsi que la méthode pour les prendre en compte.
Il s’inscrit dans le prolongement de l’accord cadre interprofessionnel sur l’amélioration des conditions de travail du 17 mars 1975 modifié, de l’accord interprofessionnel du 13 septembre 2000 sur la santé au travail et la prévention des risques professionnels, de l’accord européen du 8 octobre 2004 sur le stress au travail et des dispositions conventionnelles de branches et d’entreprises adoptées en la matière.
Article 3
Dans ce cadre, les partenaires sociaux des branches et des entreprises s’attacheront à inscrire leur démarche dans la double perspective, d’une part d’améliorer la situation des salariés au travail pour renforcer leur intérêt au travail et leur permettre de poursuivre leur carrière jusqu’à son terme dans les meilleures conditions, d’autre part de renforcer la compétitivité des entreprises, facteur de création d'emplois et d'amélioration du pouvoir d'achat.
Article 4
L’hygiène et la sécurité, ainsi que la préservation de la santé au travail font partie intégrante de l’amélioration des conditions de travail.
Celle-ci passe par une meilleure connaissance de la situation dans ces différents domaines. Elle nécessite la mise en commun de l’expérience et des connaissances de tous et leur diffusion à l’ensemble des acteurs.
S’agissant particulièrement de la santé au travail et de la prévention des risques professionnels, la mise en oeuvre de l’accord interprofessionnel du 13 septembre 2000 dans toutes ses composantes, constitue un élément essentiel de la politique d’amélioration des conditions de travail qui doit être poursuivie activement et revêt, de ce fait, un caractère prioritaire.
Article 5
Les partenaires sociaux des branches et des entreprises s’assureront par ailleurs de la bonne adéquation aux objectifs poursuivis des dispositifs de formation à la sécurité mis en place pour les membres des CHSCT et plus généralement pour les différentes catégories de personnels concernés. Au vu de cet examen, ils prendront, si nécessaire, les dispositions utiles au renforcement de leur efficacité.
Article 6
Dans le même esprit et dans le respect des dispositions de l’accord interprofessionnel du 13 septembre 2000 sur la santé au travail et la prévention des risques professionnels, ils veilleront à ce que les modalités d’association des médecins du travail à l’amélioration des conditions de travail soient efficaces. Le développement de synergies entre ces derniers et les autres personnes concernées par l’hygiène, la sécurité, l’ergonomie et les conditions de travail dans l’entreprise est indispensable à la réalisation des objectifs du présent accord. Ils s’emploieront à développer et à renforcer ces synergies.
Article 7
Au vu de ces différents éléments, les branches et les entreprises ayant déjà conclu des accords sur l’amélioration des conditions de travail en dresseront le bilan et négocieront les adaptations jugées nécessaires pour les mettre, en fonction de leur spécificité, en conformité avec les objectifs du présent accord.
Les branches et les entreprises n’ayant pas encore conclu de tels accords ouvriront des négociations destinées à mettre en oeuvre les préconisations du présent accord.
TITRE II – PENIBILITE
Article 8
La pénibilité résulte de sollicitations physiques et psychiques de certaines formes d’activités professionnelles, qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé des salariés.
Trois facteurs de pénibilité peuvent, dans leur principe, être identifiés objectivement. Ils concernent :
– des efforts physiques marqués,
– un environnement agressif,
– certains rythmes de travail.
Article 9
La réduction de la pénibilité constitue un enjeu majeur tant au regard de la santé des salariés que des perspectives d’évolution démographique.
Elle suppose la mise en oeuvre de mesures concrètes au plus près des salariés concernés.
En conséquence, les branches et les entreprises dresseront un bilan des avantages conventionnels (primes, majorations de salaire, repos supplémentaires…), attribués en contrepartie de ce qui a été considéré comme éléments de pénibilité.
Elles étudieront avec les organisations représentatives de salariés les modalités susceptibles d’être mises en oeuvre pour réaffecter, pour l’avenir, les moyens ainsi engagés, à des actions nouvelles d’adaptations des postes de travail destinées à en réduire le degré de pénibilité.
Article 10
Sur la base de la définition et de la typologie visées à l’article 8 ci-dessus, les entreprises dresseront, en liaison avec le médecin du travail, un bilan de la situation prenant en compte les mesures déjà adoptées en vue de réduire la pénibilité. Au vu des résultats de ce bilan, elles consulteront le CHSCT sur les mesures susceptibles d’être mises en oeuvre pour réduire la pénibilité des postes de travail concernés.
Cette démarche ne pouvant utilement être réalisée qu’au niveau de l’entreprise, en raison de la nécessité de prendre en compte les adaptations apportées poste par poste, les branches professionnelles veilleront, quant à elles, à rechercher des méthodes destinées à aider les entreprises dans la réalisation de cet objectif.
Article 11
Pour les salariés affectés à des postes où il n’est pas possible de réduire de façon significative la pénibilité, les entreprises, dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et de la formation professionnelle tout au long de la vie professionnelle, offriront à chaque salarié concerné la possibilité d’accéder à des formations leur permettant de réorienter leur parcours professionnel dans l’entreprise vers d’autres postes.
TITRE III – STRESS LIÉ AU TRAVAIL
Article 12
Le stress est un état qui s’accompagne de dysfonctionnements physiques, psychiques ou sociaux tenant à l’incapacité ressentie par la personne concernée de répondre aux exigences ou aux attentes les concernant dont les causes sont multifactorielles.
Le stress n’est pas une maladie, mais il peut entraîner des changements de comportements et réduire l’efficacité au travail.
Article 13
Le stress peut potentiellement concerner tout lieu de travail et tout salarié indépendamment de la taille de l’entreprise, de son domaine d’activité et de la forme du contrat de travail. Dans les faits, tous les lieux de travail et tous les salariés ne sont pas nécessairement affectés.
Toutes les manifestations de stress au travail ne peuvent pas être considérées comme du stress lié au travail.
S’agissant du stress lié au travail, sa prévention conduit à une meilleure efficacité économique et à l’amélioration de la situation des salariés.
Article 14
Les entreprises se doteront d’outils permettant de détecter les signes susceptibles de révéler un problème de stress lié au travail.
Elles prendront, si nécessaire, les mesures adaptées pour prévenir, éliminer ou réduire les problèmes de stress liés au travail en concertation avec les représentants élus du personnel.
————
ANNEXE 8
PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT
(SEPTEMBRE 2007)
26 septembre 2007
AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL
ET RÉDUCTION DE LA PÉNIBILITÉ DU TRAVAIL
Réunion paritaire du 26 septembre 2007
Depuis le début de nos discussions, nous vous avons proposé d'organiser nos travaux autour de 3 axes :
• l'amélioration des conditions de travail
• la prise en compte de la pénibilité
• la transposition en droit interne de l'accord européen sur le stress au travail.
Nos propositions, en matière d'amélioration des conditions de travail et donc de prévention de la pénibilité, comme celles concernant le stress au travail restent ouvertes à la discussion. A cette occasion, j'attire votre attention sur la nécessité qu'il y a à procéder rapidement à la transposition de l'accord européen sur le stress au travail, si nous voulons pouvoir réaliser cette transposition par voie conventionnelle.
Lors de notre dernière rencontre le 19 juillet, nous avons eu le sentiment d'entrevoir des possibilités de convergence autour de la mise au point d'un cadre collectif de réparation de la pénibilité incluant une approche personnalisée.
Sur cette base, nous pourrions repartir de la définition proposée dans l'article 8 du projet de texte daté du 31 janvier 2006, qui prévoit que :
" La pénibilité résulte de sollicitations physiques et psychiques de certaines formes d’activités professionnelles, qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé des salariés.
Trois facteurs principaux de pénibilité peuvent, dans leur principe, être identifiés objectivement. Ils concernent :
- des contraintes physiques et psychiques marquées (efforts, postures, gestes…),
- un environnement agressif,
- certains rythmes de travail.
…"
Dans cette définition le caractère collectif réside dans l'identification des facteurs de pénibilité (contraintes physiques…) et le caractère personnalisé dans l'observation de traces durables identifiables et irréversibles sur la santé des salariés.
Dans ce cadre, la mise en place d'un dispositif destiné à traiter le problème du personnel en place en vue d'une cessation anticipée d'activité pourrait être envisagée suivant les modalités ci-après :
• Cadre collectif
Il fixe de façon normative, au niveau national interprofessionnel, les conditions d'accès au droit à une cessation anticipée d'activité pour travaux pénibles :
o 40 ans d'activité salariée (sans limite d'âge),
o 30 ans d'exposition à des contraintes physiques et psychiques marquées, (efforts, postures, gestes…), à un environnement agressif ou à certains rythmes de travail,
o existence de traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié résultant des travaux pénibles qu'il a exercé.
• Cadre personnalisé
Le salarié qui estime remplir les conditions ci-dessus pour bénéficier d'une cessation anticipée d'activité pour travaux pénibles peut les faire valider par une commission ad hoc. Cette demande de validation est exclusive de toute démarche de reconnaissance de l'inaptitude au travail.
Cette commission est composée :
§ d'une part, de membres désignés par les organisations patronales et syndicales représentatives au plan national interprofessionnel, assistés par un représentant de la sécurité sociale, ayant pour mission de valider les durées d'activité salariée et d'exposition à des travaux pénibles susceptibles d'avoir eu des effets sur l'état du salarié,
§ et d'autre part, d'un collectif de médecins (médecin de la sécurité sociale, médecin du travail et de ville) chargé d'apprécier l'existence de traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié résultant des travaux pénibles qu'il a exercé.
• Accès à la cessation anticipée d'activité
Lorsque la commission ci-dessus valide les conditions de cessation anticipée d'activité dont se prévaut le salarié, le contrat de travail de celui-ci prend fin à son initiative, suivant un mode spécifique de rupture qui lui ouvre droit au bénéfice d'une indemnité de rupture de même nature juridique qu'une indemnité de licenciement et d'un montant à déterminer.
L'intéressé perçoit alors à l'issue de son contrat de travail et jusqu'à la liquidation de sa retraite à taux plein, une pension d'invalidité de l'assurance maladie.
Un tel dispositif demanderait à être coordonné avec celui des retraites anticipées pour carrières longues à l'occasion du rendez-vous sur les retraites prévu en 2008.
Enfin, s'agissant de la prise en compte de l'impact de la pénibilité sur le "flux", nous sommes ouverts à réexaminer les propositions que nous avions faites dans le projet de texte du 31 janvier 2006.
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ANNEXE 9
PROPOSITION D'ACCORD PRESENTÉE PAR LE PATRONAT
(MARS 2008)
21 mars 2008
AMELIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL
ET REDUCTION DE LA PENIBILITE DU TRAVAIL
DOCUMENT DE TRAVAIL
Réunion du 25 mars 2008
TITRE II – PRISE EN COMPTE DE LA PENIBILITE
Article 10
La pénibilité résulte de sollicitations physiques et/ou psychiques de certaines formes d’activités professionnelles, qui laissent des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé des salariés et susceptibles d'influer sur leur espérance de vie.
Trois types de pénibilité peuvent, dans leur principe, être identifiés objectivement. Ils concernent :
– des contraintes physiques marquées
– un environnement agressif
– certains rythmes de travail.
Article 11
Les contraintes physiques marquées qui constituent des facteurs de pénibilité sont les suivantes :
Port de charges lourdes
Le port de charges lourdes s’entend de la manutention manuelle, répétitive, pendant plus de 20 heures par semaine, de charges de plus de 55 kg pour les hommes (73).
On entend par manutention manuelle toute opération de transport ou de soutien d’une charge, dont le levage, la pose, la poussée, la traction, le port ou le déplacement, qui exige l’effort physique d’un ou plusieurs travailleurs, et comportant des risques, notamment dorsolombaires, pour les travailleurs, en raison des caractéristiques de la charge ou des conditions ergonomiques défavorables.
Postures pénibles
Il s’agit des postures citées ci-après, tenues par les salariés plus de 20 heures par semaine :
– Position forcée des articulations : position agenouillée, accroupie, en torsion, …
– Maintien des bras en l’air.
Vibrations
Sont concernés les salariés exposés, avant l’entrée en vigueur du décret du 4 juillet 2005, plus de 8 heures par jour, à des vibrations transmises aux membres supérieurs, au-delà de 5m/s2, ou à des vibrations transmises à l’ensemble du corps, supérieures à 1,15m/s2.
Article 12
L’environnement agressif est constitué par les facteurs de pénibilité suivants :
Produits toxiques
Ce facteur de pénibilité recouvre le contact quotidien, effectif et répété avec des agents cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de classe 1, et/ou avec des poussières et fumées au sens de l’article R.232-5-5 du code du travail.
Températures extrêmes
Sont concernés les salariés soumis dans leur travail, plus de 20 heures par semaine, à des températures supérieures à 30°C ou inférieures à – 10°C.
Bruits intenses
Sont considérés comme soumis à des bruits intenses les salariés, exposés avant le 1er janvier 2008 de manière habituelle, plus de 20 heures par semaine, à un bruit excédant 87 dB à l’oreille.
Article 13
Les contraintes liées aux rythmes de travail visent les facteurs de pénibilité suivants :
Le travail de nuit
Pour être considéré comme soumis à ce facteur de pénibilité, les salariés doivent travailler plus de 200 nuits par an, au sens du travail de nuit tel que défini par la loi ou les accords collectifs qui leur sont applicables.
Horaires alternants
Sont concernés les salariés qui auront travaillé au moins 15 ans en équipes successives alternantes.
Travail répétitif
Le travail répétitif consiste en la répétition, plus de 20 heures par semaine, d’un même geste, à une cadence élevée, imposée ou non par le déplacement automatique d’une pièce, avec un temps de cycle de moins de 1 minute.
Article 14
Indépendamment des dispositifs d’invalidité ou d’inaptitude existants, il est mis en place, pour les salariés encore en entreprise, occupés à des travaux pénibles au sens de l’article 10 du présent accord, un dispositif spécifique de prise en compte de leur situation.
Article 15
Le dispositif visé ci-dessus est articulé autour de deux volets cumulatifs.
Tout d’abord, il comprend un cadre collectif, qui pose les conditions objectives d’accès au dispositif (article 16).
Il est complété par une approche individualisée, permettant de déterminer quels sont les salariés dont la situation justifie l’accès à ce dispositif (article 17).
Article 16
Pour accéder au dispositif spécifique de prise en compte de la pénibilité, le salarié doit remplir les conditions suivantes, constitutives du cadre collectif :
– être ouvrier ou employé d’exécution au moment de la demande ;
– avoir accompli 40 ans effectifs d’activité salariée ;
– avoir été exposé pendant au moins 30 ans à un des facteurs de pénibilité définis aux articles 11 à 13 ;
– avoir cumulé pendant au minimum 10 ans un des facteurs de chacun des 3 types de pénibilité visés à l’article 10 ;
– présenter des traces durables, identifiables et irréversibles sur leur santé résultant des travaux pénibles qu'ils ont exercé ;
– ne pas remplir les conditions pour liquider sa retraite à taux plein.
Article 17
Le salarié apte au travail qui estime remplir les conditions ci-dessus pour bénéficier du dispositif visé à l’article 14, et qui peut en justifier, peut les faire valider, dans le cadre de l’approche personnalisée, par une commission ad hoc.
Cette commission est chargée :
– d’une part de valider les durées d'activité salariée et d'exposition à des travaux pénibles susceptibles d'avoir eu des effets sur l'état du salarié, (dans le cas d’une exposition aux agents CMR, le salarié devra fournir, dans la mesure du possible, une attestation d’exposition de son employeur ou de son ancien employeur)
– d’autre part d'apprécier l'existence de traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié résultant des travaux pénibles qu'il a exercés et justifiant un allégement de sa charge de travail.
Elle est composée :
– de membres, désignés en nombre égal, par les organisations patronales et syndicales représentatives au plan national interprofessionnel, assistés par un représentant de la sécurité sociale,
– d’un médecin du travail et d’un médecin de la sécurité sociale, qui seuls ont accès aux données couvertes par le secret médical.
Article 18
Lorsque la commission ci-dessus valide les conditions requises et dont se prévaut le salarié, celui-ci peut bénéficier d'un allégement de sa charge de travail.
Cet allègement, qui peut intervenir au plus tôt deux ans avant l’âge auquel il peut faire valoir ses droits à la retraite à taux plein, peut prendre la forme, selon l’état de santé constaté du salarié :
1. de l'exercice d'une mission de tutorat au sein de son entreprise, lorsque l’organisation de l’entreprise le permet ;
2. d'un passage à mi-temps pour toute la durée restant à courir jusqu’à ce que le salarié puisse faire valoir ses droits à la retraite, ou, si l’organisation de l’entreprise ne le permet pas, d’un passage à mi temps en cumulant en fin de carrière les mi-temps non travaillés ;
3. d’une cessation d’activité anticipée.
Quelque soit la forme d'allègement retenue, durant ses périodes travaillées, le salarié perçoit de son employeur une rémunération correspondant à la durée de son temps de travail.
Les périodes non travaillées, que ce soit dans le cadre d’un mi-temps ou d’une cessation anticipée d’activité, sont financées par la solidarité nationale.
Les partenaires sociaux rechercheront avec les pouvoirs publics les modalités de ce financement.
L'indemnité de départ dont le salarié pourra bénéficier lors de sa cessation définitive et totale d'activité sera calculée sur la base de sa rémunération à temps plein.
Article 19
La mise en oeuvre de ce dispositif est subordonnée à la conclusion d'une convention avec l'Etat destinée à garantir le versement d'une allocation de complément aux intéressés.
Ce dispositif devra être coordonné avec celui des retraites anticipées pour carrières longues à l'occasion du rendez-vous sur les retraites prévu en 2008.
Il est mis en place à titre expérimental pour une durée de 5 ans.
Ce dispositif est mis en place au regard des études publiées sur le sujet, et notamment de l’évaluation d’une population cible de 6% de la tranche d’âge concernée. Il est entendu entre les parties signataires qu’en cas de dépassement significatif de ce pourcentage de bénéficiaires, les partenaires sociaux se réuniront pour réexaminer les critères d’admission.
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ANNEXE 10
PROPOSITION D'ACCORD PRÉSENTÉE PAR LA CGT
ANNEXE 11
AGENCE NATIONALE POUR L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL (ANACT) – PRÉVENTION DE LA PÉNIBILITÉ AU TRAVAIL
ANNEXE 12
ACCORD-CADRE EUROPÉEN SUR LE STRESS AU TRAVAIL
DU 8 OCTOBRE 2004
Accord européen sur le stress au travail
8 octobre 2004
Cet accord a été signé le 8 octobre 2004. Ce texte est la traduction de la proposition finale du 27 mai 2004 (rédigée en anglais et seule à faire foi), reprise par l’accord du 8 octobre 2004.
Les négociateurs de cet accord sont :
§ CES (Confédération Européenne des Syndicats de salariés)
§ UNICE/UEAPME (Union des Confédérations de l'Industrie et des Employeurs d'Europe )
§ CEEP(Centre Européen des Entreprises à participation publique et des entreprises d'intérêt économique général).
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1. Introduction
Le stress au travail est considéré sur le plan international, européen et national comme une préoccupation à la fois des employeurs et des travailleurs. Ayant identifié la nécessité d'une action commune spécifique sur cette question et anticipant une consultation sur le stress par la Commission, les partenaires sociaux européens ont inclus cette question dans le programme de travail du dialogue social 2003-2005.
Le stress peut affecter potentiellement tout lieu de travail et tout travailleur, quels que soient la taille de l'entreprise, le domaine d'activité, le type de contrat ou de relation d'emploi.
En pratique, tous les lieux de travail et tous les travailleurs ne sont pas nécessairement affectés La lutte contre le stress au travail peut entraîner une plus grande efficacité et une amélioration de la santé et de la sécurité au travail, avec les bénéfices économiques et sociaux qui en découlent pour les entreprises, les travailleurs et la société dans son ensemble. Il importe de tenir compte de la diversité des travailleurs dans la lutte contre les problèmes de stress au travail.
2. Objet
L'objet de l'accord est :
• d'augmenter la prise de conscience et la compréhension du stress au travail, par les employeurs, les travailleurs et leurs représentants,
• d'attirer leur attention sur les signes susceptibles d'indiquer des problèmes de stress au travail.
Le but de l'accord est de fournir aux employeurs et aux travailleurs un cadre qui permet de détecter et de prévenir ou de gérer les problèmes de stress au travail. Son but n'est pas de culpabiliser l'individu par rapport au stress.
Reconnaissant que le harcèlement et la violence au travail sont des facteurs de stress potentiels mais que le programme de travail 2003-2005 des partenaires sociaux européens prévoit la possibilité d'une négociation spécifique sur ces questions, le présent accord ne traite ni de la violence au travail, ni du harcèlement et du stress post-traumatique.
3. Description du stress et du stress au travail
Le stress est un état accompagné de plaintes ou dysfonctionnements physiques, psychologiques ou sociaux, et qui résulte du fait que les individus se sentent inaptes à combler un écart avec les exigences ou les attentes les concernant. L'individu est capable de gérer la pression à court terme qui peut être considérée comme positive mais il éprouve de grandes difficultés face à une exposition prolongée à des pressions intenses. En outre, différents individus peuvent réagir de manière différente à des situations similaires et un même individu peut, à différents moments de sa vie, réagir différemment à des situations similaires.
Le stress n'est pas une maladie mais une exposition prolongée au stress peut réduire l'efficacité au travail et peut causer des problèmes de santé.
Le stress d'origine extérieure au milieu de travail peut entraîner des changements de comportement et une réduction de l'efficacité au travail. Toute manifestation de stress au travail ne doit pas être considérée comme stress lié au travail. Le stress lié au travail peut être provoqué par différents facteurs tels que le contenu et l'organisation du travail, l'environnement de travail, une mauvaise communication, etc.
4. Identification des problèmes de stress au travail
Vu la complexité du phénomène de stress, le présent accord n'entend pas fournir une liste exhaustive des indicateurs potentiels de stress. Toutefois, un niveau élevé d'absentéisme ou de rotation du personnel, des conflits personnels ou des plaintes fréquents de la part des travailleurs sont quelques-uns des signes pouvant révéler la présence de stress au travail.
L'identification d'un problème de stress au travail peut passer par une analyse de facteurs tels que l'organisation et les processus de travail (aménagement du temps de travail, degré d'autonomie, adéquation du travail aux capacités des travailleurs, charge de travail, etc.), les conditions et l'environnement de travail (exposition à un comportement abusif, au bruit, à la chaleur, à des substances dangereuses, etc.), la communication (incertitude quant à ce qui est attendu au travail, perspectives d'emploi, changement à venir, etc.) et les facteurs subjectifs (pressions émotionnelles et sociales, impression de ne pouvoir faire face à la situation, perception d'un manque de soutien, etc.).
Lorsqu'un problème de stress au travail est identifié, une action doit être entreprise pour le prévenir, l'éliminer ou le réduire. La responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l'employeur. Ces mesures seront mises en oeuvre avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants.
5. Responsabilités des employeurs et des travailleurs
En vertu de la directive-cadre 89/391, tous les employeurs ont l'obligation légale de protéger la sécurité et la santé des travailleurs. Cette obligation couvre également les problèmes de stress au travail dans la mesure où ils présentent un risque pour la santé et la sécurité. Tous les travailleurs ont l'obligation générale de se conformer aux mesures de protection déterminées par l'employeur. La lutte contre les problèmes de stress au travail peut être menée dans le cadre d'une procédure globale d'évaluation des risques, par une politique distincte en matière de stress et/ou par des mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés.
6. Prévenir, éliminer ou réduire les problèmes de stress au travail
Prévenir, éliminer ou réduire les problèmes de stress au travail peut inclure diverses mesures. Ces mesures peuvent être collectives, individuelles ou les deux à la fois. Elles peuvent être mises en oeuvre sous la forme de mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés ou dans le cadre d'une politique anti-stress intégrée incluant des mesures de prévention et d'action.
Lorsque l'entreprise ne dispose pas de l'expertise requise, elle peut faire appel à une expertise externe conforme aux législations, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales.
Après avoir été instaurées, les mesures anti-stress devraient être régulièrement réexaminées afin d'évaluer leur efficacité et de déterminer si elles font un usage optimal des ressources et si elles sont encore appropriées ou nécessaires.
Ces mesures peuvent par exemple inclure:
• des mesures de gestion et de communication visant à clarifier les objectifs de l'entreprise et le rôle de chaque travailleur, à assurer un soutien adéquat de la direction aux individus et aux équipes, à assurer une bonne adéquation entre responsabilité et contrôle sur le travail, ainsi qu'à améliorer l'organisation, les processus, les conditions et l'environnement de travail,
• la formation des managers et des travailleurs afin de développer la prise de conscience et la compréhension du stress, de ses causes possibles et de la manière d'y faire face, et/ou de s'adapter au changement
• l'information et la consultation des travailleurs et/ou leurs représentants, conformément à la législation, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales.
7. Mise en oeuvre et suivi
Dans le cadre de l'article 139 du Traité, cet accord-cadre européen volontaire engage les membres de I'UNICE/UEAPME, du CEEP et de la CES (et du Comité de Liaison EUROCADRES/CEC) à le mettre en oeuvre conformément aux procédures et pratiques propres aux partenaires sociaux dans les Etats membres et dans les pays de l'Espace Economique Européen.
Les signataires invitent aussi leurs organisations affiliées des pays candidats à mettre en oeuvre cet accord.
Cet accord sera mis en oeuvre dans les trois années qui suivent la date de sa signature.
Les organisations affiliées feront rapport sur la mise en application de cet accord au Comité du dialogue social. Pendant les trois premières années suivant la date de signature de cet accord, le Comité du dialogue social préparera un tableau annuel résumant la mise en oeuvre en cours de l'accord. Un rapport complet sur les actions de mise en oeuvre sera rédigé par le Comité du dialogue social dans le courant de la quatrième année.
Les signataires évalueront et passeront en revue l'accord à tout moment après la période de cinq ans suivant sa date de signature lorsque l'un d'entre eux en fait la demande.
En cas de questions sur la portée de cet accord, les organisations membres concernées peuvent s'adresser conjointement ou séparément aux signataires, qui leur répondront conjointement ou séparément.
Lors de la mise en oeuvre de cet accord, les membres des organisations signataires évitent d'imposer des charges inutiles sur les PME.
La mise en oeuvre de cet accord ne constitue pas une raison valable pour réduire le niveau général de protection accordé aux travailleurs dans le champ de cet accord.
Cet accord ne porte pas préjudice au droit des partenaires sociaux de conclure, au niveau approprié, y compris au niveau européen, des accords adaptant et/ou complétant le présent accord d'une manière qui prenne en compte des besoins spécifiques des partenaires sociaux concernés.
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ANNEXE 13
LA SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE
DES TROUBLES MUSCULO-SQUELETTIQUES
ANNEXE 14
ÉVALUATION DES RISQUES DANS LES ENTREPRISES (DARES)
ANNEXE 15
« LA DOUBLE PEINE DES OUVRIERS » (INED, 2008)
ANNEXE 16
ANALYSER ET PRÉVENIR LES RISQUES (ERGODISTRIB)
1 () Les synthèses d’audition ont été établies par le secrétariat de la mission d’information. Elles ont été adressées aux personnes auditionnées pour validation et autorisation de publication. Certaines personnes auditionnées n’ont pas souhaité que soit publiée la synthèse de leur audition, d’autres n’ont pas donné suite à la demande et à la relance du secrétariat de la mission d’information.
2 () Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud, Droit et Changement social UMR-CNRS 6028/MSH Guépin (Université de Nantes), IREJE (Université de Bretagne-Sud). L’auteur tient ici à remercier Jean-Pierre Chauchard et Patrick Chaumette, professeurs à l’Université de Nantes, pour les échanges fructueux que cet article a pu occasionner.
3 () Loi n° 2003-775, JO, 22 août 2003, p. 14310.
4 () À ce titre, les réflexions mériteraient d’être complétées par des approches autres, telles la médecine, l’ergonomie ou la psychologie notamment.
5 () Dans une approche plus légère et plus contestable, il a été proposé de défi nir la pénibilité au regard de « valeurs viriles » : « est pénible ce qui demande du muscle, n’est pas pénible ce qui demande de la fi nesse » (M. Bosquet, in Le Nouvel Observateur, 27 novembre 1972, p 38).
6 () À titre d’exemple : Premières Informations et premières synthèses, 1999 ; Premières Synthèses, 2003 ; Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, 2001 ; Premières Synthèses, 2004.
7 () Les réglementations nationales divergent également sur la prise en compte de la pénibilité au travail (Revue de l’OFCE, 2001) : en Grèce par exemple, l’âge de départ en retraite peut être avancé de 5 ans pour les salariés ayant effectué des travaux pénibles ou insalubres.
8 () Loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, JO, 18 janvier 2002, p. 1008.
9 () Article L. 235-7 CT.
10 () Article R. 238-31 CT.
11 () Article L. 234-2 CT.
12 () Articles R. 234-9 et R. 234-10 CT pour les femmes et articles R. 234-11 et s. CT pour les jeunes travailleurs.
13 () Articles L. 712-5 et L. 712-11 CT.
14 () Article L. 721-22 CT.
15 () Article L. 231-6 CT.
16 () La liste de l’article R. 231-51 du Code du travail définissant les substances et réparations dangereuses est longue.
17 () Article R. 711-1 CT.
18 () Arrêté du 8 octobre 1990, JO, 9 novembre 1990, p. 13663 et arrêté du 27 juin 1991, JO, 17 juillet 1991, p. 9383.
19 () Article L. 124-2-3 2° CT.
20 () Article L. 122-3 2° CT.
21 () Article L. 117-5-1 CT.
22 () Article L. 236-9 1° CT.
23 () Sur la distinction du risque et de la pénibilité des conditions de travail : A. Cerf-Hollender, note sous Crim 8 octobre 2002, Revue de sciences criminelles et de droit pénal comparé, 2003, no 2, p 354. Ainsi, la cour d’appel de Paris a pu affirmer que « le risque grave (au sens de l’article L. 236-9 du Code du travail) ne saurait être constitué par la seule pénibilité au travail » (Paris 9 juin 2004, RJS, 11/04, no 1230, p 857).
24 () Article L. 24 Code des pensions civiles et militaires de retraite.
25 () Décret n° 46-1541 du 22 juin 1946, JO, 25 juin 1946.
26 () Le texte proposait ainsi une liste des emplois actifs (ex. : conducteur de travaux, forgeron, machiniste) et insalubres (ex. : réparateur de fuites dans les gazogènes, sulfatiers, égoutiers). Les services sédentaires regroupaient tous les autres emplois, fonctions ou postes.
27 () Direction du personnel Électricité de France, Gaz de France, Pers. no 169, 25 février 1950.
28 () Direction du personnel Électricité de France, Gaz de France, Pers. no 226, 21 mai 1952.
29 () Décret no 68-561 du 19 juin 1968 ; arrêté du 20 février 1996, JO, 28 février 1996, p 3142 ; arrêté du 31 décembre 1999, JO, 13 janvier 2000, p. 588.
30 () Décret n° 67-624 du 23 juillet 1967 ; arrêté du 31 décembre 1999, JO, 13 janvier 2000, p. 589.
31 () Article R. 231-62 CT.
32 () Article R. 231-61-1 CT.
33 () Décret n° 2001-1016 portant création d’un document relatif à l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, prévue à l’article L. 230-2 du Code du travail et modifiant le Code du travail, JO, 7 novembre 2001, p. 17523.
34 () Circulaire no 6 DRT du 18 avril 2002 prise pour l’application du décret n° 2001-1016 portant création d’un document relatif à l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, prévue à l’article L. 230-2 du Code du travail et modifiant le Code du travail.
35 () L’article R. 230-1 CT évoque « un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l’entreprise ou de l’établissement ».
36 () Article R. 233-1-3 CT.
37 () Article L. 731-1 CT.
38 () Article L. 231-3-1 alinéa 5 CT.
39 () JO, Débats parlementaires, Sénat, séance du 17 juillet 2003.
40 () JO, Débats parlementaires, Sénat, séance du 17 juillet 2003.
41 () Loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites (article 12), préc.
42 () Accord d’entreprise du 25 avril 2003 relatif à l’assurance collective contre les aléas de carrière, Liaisons sociales, Législation sociale, C3, no 262, 29 juillet 2003.
43 () Accord du 8 novembre 1973, Liaisons sociales, Législation sociale, C3, no 4087, 30 novembre 1973.
44 () Accord du 3 septembre 2003 sur la santé au travail et sur le travail de nuit dans la chimie, Liaisons sociales, Législation sociale, C2, n° 270, 14 octobre 2003.
45 () Accord sur l’amélioration des conditions de travail des industries du pétrole du 4 juin 1976, Liaisons sociales, Législation sociale, n° 4406, 24 juin 1976.
46 () Accord du 17 mars 1975 sur l’amélioration des conditions de travail, Liaisons sociales, Législation sociale, n° 4253, 17 mars 1975.
47 () Accord sur la revalorisation de la condition ouvrière dans le bâtiment et les travaux publics du 14 avril 1976, Liaisons sociales, Législation sociale, n° 4396, 28 avril 1976.
48 () Cf. Y. STRUILLOU (2003) : la difficulté serait alors que certaines personnes pourraient estimer leur activité pénible, sans que le critère retenu ne soit rempli.
49 () Article L. 133-7 CT.
50 () Article R. 711-4 alinéa 2 CT.
51 () Un accord professionnel national, un accord d’entreprise et une convention avec l’État sont nécessaires.
52 () Décret n° 2005-58 du 27 janvier 2005 et arrêté du 28 janvier 2005, JO, 29 janvier 2005, p. 1552 ; décret n° 2000-105 du 9 février 2000, JO, 10 février, p. 2091 ; circulaire DGEFP n° 2000-23 du 10 octobre 2000, Liaisons sociales, Législation sociale, D2, n° 8120,1 6 novembre 2000, p. 9.
53 () Article R. 322-7-2 CT.
54 () À titre d’exemples : CATS dans l’industrie du papier-carton, Liaisons sociales, Législation sociale, C2, n° 130, 28 septembre 2000 ; CATS dans les industries des carrières et des matériaux, Liaisons sociales, Législation sociale, C2, n° 139, 21 novembre 2000 ; CATS dans les bureaux d’études et cabinets d’ingénieurs-conseil, Liaisons sociales, Législation sociale, C2, n° 217, 12 août 2002 ; CATS pour le personnel au sol du transport aérien, Liaisons sociales, Bref social, n° 13982, 3 octobre 2003.
55 () Soc 22 mai 2002 n° 00-40772 Bousnina c / SA Lassarat Construction.
56 () Soc 21 janvier 2003 n° 00-45716 SA Humeau Bopy.
57 () Soc 25 octobre 2001 n° 00-13166 SA Péchiney c/ CPAM. À propos d’une pénibilité liée à l’état de fatigue et aux « fatigues accumulées » : Soc 11 juin 1981, Bull. civ., V, n° 532.
58 () Villes distantes d’une dizaine de kilomètres.
59 () Soc 10 décembre 1984, Bull. civ., V, n° 474.
60 () Soc 14 novembre 2002, Jurisp. soc., 2003, n° 668, p 27.
61 () Soc 12 février 1997, Bul.l civ., V, n° 58.
62 () Soc 5 décembre 2000 n° 4734 FS-D Benedetti C/ Sté Alpes Trophées.
63 () Loi no 2002-73 du 17 janvier 2002, préc.
64 () Loi n° 2005-102, JO, 12 février 2005, p. 2353.
65 () Même si les notions de travail dangereux et de travail pénible peuvent se rencontrer.
66 () Supra.
67 () Cf. BANCE (1978), art. préc., p 139. À ce titre, par l’intermédiaire de son pouvoir de direction et l’exécution de ses obligations de prévention (article L. 230-2 CT) et de sécurité (article L. 233-1 CT), l’employeur pourrait intervenir pour réduire le caractère pénible de certaines activités.
68 () Article L. 241-2 alinéa 1er CT.
69 () Article R. 241-41 CT.
70 () Concept plus large, la notion de travail décent développé au sein de l’OIT pourrait inclure celle de travail pénible (SOMAVIA, 1999) : il s’agirait d’« travail productif allant de pair avec la protection des droits et permettant d’obtenir un revenu suffisant et de bénéficier d’une protection sociale appropriée. Cette notion implique aussi un volume de travail suffisant dans la mesure où tout un chacun doit avoir pleinement accès à des possibilités d’emploi lucratif »). Sur le travail décent : « Travail décent pour chacun », Le Monde diplomatique, septembre 2001, p. II ; RIT, 2003).
71 () Charges lourdes, tâches répétitives, horaires, fatigue, nécessité d’équipements de protection, travail à la chaîne, attention soutenue, travail de nuit, travail posté, etc.
72 Estrategia espanola de seguridad y salud en el trabajo (2007-2012)
73 () Sachant que pour les femmes, le port de charges lourdes d’un poids supérieur à 25 kg est interdit.