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N° 1809

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 juillet 2009.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION
ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE

sur les formations internationales des agents publics

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Bernard DEROSIER,

Député.

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INTRODUCTION 5

I. ––  LES FORMATIONS INTERNATIONALES RELÈVENT PRINCIPALEMENT DE L’ECOLE NATIONALE D’ADMINISTRATION 7

A. LE REGROUPEMENT DES FORMATIONS INTERNATIONALES AU SEIN DE L’E.N.A. 7

1. La reconnaissance juridique du rôle de l’ENA en matière de formation internationale 7

2. La fusion de l’ENA et de l’Institut international d’administration publique 8

3. La fusion de l’ENA et du Centre des études européennes de Strasbourg 8

B. LES AUTRES ACTEURS FRANÇAIS EN MATIÈRE DE FORMATION INTERNATIONALE 9

1. Les instituts régionaux d’administration (IRA) 9

2. Les organismes de formation des fonctionnaires territoriaux 10

a) Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) 10

b) L’Institut national des études territoriales (INET) 11

C. LES LIENS AVEC D’AUTRES ORGANISMES DE FORMATION INTERNATIONALE 12

1. L’État subventionne des écoles étrangères de formation des fonctionnaires 12

a) L’institut européen d’administration publique de Maastricht 12

b) Le Collège d’Europe de Bruges 13

2. L’ENA entretient des partenariats avec plusieurs écoles étrangères 13

a) Les collaborations ponctuelles avec d’autres écoles de formation des fonctionnaires 13

b) Le master européen de gouvernance et d’administration (MEGA) 14

II. ––  UNE OFFRE FOISONNANTE REDÉFINIE EN RAISON DES RESTRICTIONS BUDGÉTAIRES 14

A. UNE GRANDE DIVERSITÉ DE FORMATIONS PROPOSÉES 14

1. Les activités de formation, de recherche et d’expertise 14

2. Les formations sur catalogue ou sur mesure 15

3. Des cycles internationaux de formation de durées différentes 16

4. Les formations aux questions communautaires 17

B. LE RECENTRAGE DES FORMATIONS SUR DES CIBLES PRIORITAIRES 17

1. Les contraintes budgétaires imposent de définir des priorités au sein des formations internationales 17

2. Le développement de l’offre de formation payante 19

3. La montée en puissance des formations européennes 20

a) Le rôle majeur du CEES 20

b) L’avenir compromis du master européen de gouvernance et d’administration 22

C. LA RECHERCHE D’UNE MEILLEURE VALORISATION DES FORMATIONS 25

EXAMEN EN COMMISSION 27

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 33

MESDAMES, MESSIEURS,

La formation des fonctionnaires s’inscrit dans un environnement en mutation. L’accent est désormais mis sur la formation permanente, ou formation tout au long de la vie, en lien avec le déroulement de carrière des fonctionnaires. En outre, l’offre de formation doit s’adapter aux nouveaux besoins des administrations liés aux interdépendances croissantes entre les États, en particulier dans le cadre de la construction européenne.

Dans ce contexte, il convient de porter un intérêt particulier aux formations internationales, bien qu’elles ne représentent qu’une part infime des dépenses de l’État en matière de formation des fonctionnaires. Un nombre croissant de programmes permettent ainsi de former conjointement des agents publics de nationalités différentes. Ces formations s’adressent pour l’essentiel aux fonctionnaires de catégorie A, et notamment aux cadres dirigeants de la fonction publique.

Les formations internationales présentent un intérêt aussi bien pour la fonction publique que, plus largement, pour la France.

Dans la fonction publique, une ouverture sur l’étranger permet d’enrichir le parcours professionnels des agents et d’élargir leur point de vue. La compréhension de systèmes institutionnels et administratifs différents ne peut qu’inviter les fonctionnaires français à porter un regard neuf sur nos propres usages. L’ouverture à des expériences étrangères permet de constater la variété de réponses susceptibles d’être apportées face à des enjeux similaires. Par ailleurs, la mutualisation des moyens et des expériences de diverses administrations nationales peuvent améliorer l’efficacité et le contenu des formations.

Au-delà de cette utilité pratique, la France a intérêt à être présente sur le marché des formations internationales, pour plusieurs raisons :

––  les formations internationales sont un vecteur d’influence de la France sur les futurs décideurs publics étrangers. Elles permettent de faire connaître et de promouvoir le modèle juridique français hors de nos frontières ;

––  l’existence de formations internationales prestigieuses dispensées en français est un élément de promotion de la langue française, notamment au sein des instances communautaires et internationales ;

––  les formations des fonctionnaires constituent l’une des composantes de la coopération technique avec d’autres pays, dans une logique de solidarité internationale ;

––  elles permettent de faire progresser dans le monde les valeurs auxquelles la France est attachée, notamment en favorisant les pratiques institutionnelles et administratives qui assurent l’effectivité des droits de l’homme et de l’État de droit ;

––  elles permettent enfin aux élèves étrangers de mieux connaître l’administration française. Cela favorise l’entente et le dialogue avec des administrations dont la culture et l’organisation sont différentes de celles de l’administration française.

L’une des particularités de la formation permanente internationale est qu’elle intervient dans un domaine très concurrentiel, dans lequel interviennent d’autres écoles, des universités et des organismes de formation privés. Cela crée une exigence particulièrement forte de performance et de compétitivité pour les écoles françaises.

Votre rapporteur a constaté que la situation des formations internationales est paradoxale à plusieurs titres.

En premier lieu, des efforts indéniables ont été accomplis pour simplifier le paysage administratif, notamment au moyen de la fusion de divers organismes de formation au sein de l’École nationale d’administration. Pourtant, il est quasiment impossible d’avoir une vue d’ensemble des formations internationales compte tenu de la multiplicité des intervenants et de la complexité du pilotage par le Gouvernement.

En second lieu, malgré les restrictions budgétaires imposées depuis plusieurs années, on observe un foisonnement de l’offre proposée par des organismes français grâce à un effort de diversification des ressources. Néanmoins, la pérennité de certaines formations est menacée faute de financement par l’État.

I. ––  LES FORMATIONS INTERNATIONALES RELÈVENT PRINCIPALEMENT DE L’ECOLE NATIONALE D’ADMINISTRATION

A. LE REGROUPEMENT DES FORMATIONS INTERNATIONALES AU SEIN DE L’E.N.A.

Depuis une dizaine d’années, il a été décidé de regrouper la plupart des actions de formation internationales au sein de l’École nationale d’administration (ENA) (1). La pluralité d’acteurs intervenant dans ce domaine compliquait le pilotage par l’État et conduisait à une certaine dispersion des moyens.

Plusieurs opérateurs ont ainsi été fusionnés avec l’ENA, qui présentait l’avantage d’être l’opérateur le mieux connu à l’étranger.

1. La reconnaissance juridique du rôle de l’ENA en matière de formation internationale

Avant 2002, les textes réglementaires relatifs à l’ENA ne mentionnaient pas la coopération internationale parmi les missions de l’ENA. Ils ne comportaient qu’une disposition relative aux étudiants étrangers, permettant à l’ENA d’accueillir des étudiants étrangers, d’une part, dans le cadre des séminaires destinés à de hauts fonctionnaires étrangers organisés à la demande de leur État et, d’autre part, dans le cadre de cycles internationaux destinés à des étudiants et des fonctionnaires étrangers (2).

Le décret n° 2002-49 du 10 janvier 2002 relatif aux missions, à l’administration et au régime financier de l’École nationale d’administration a consacré le rôle de l’École en matière de formation internationale. Son article 2 définit les missions de l’ENA de la manière suivante :

« a) La formation initiale de fonctionnaires français ou étrangers ;

b) La formation permanente et le perfectionnement de fonctionnaires français ou étrangers ;

c) La coopération européenne et internationale, bilatérale et multilatérale, dans le domaine de l’administration publique et dans le cadre de la politique étrangère du Gouvernement français, avec les institutions et établissements étrangers, notamment par la réponse aux appels d’offres internationaux ;

d) La recherche, l’expertise et la publication, notamment en prospective administrative et en droit et administration comparés. »

2. La fusion de l’ENA et de l’Institut international d’administration publique

L’institut international d’administration publique a été créé en 1966 pour développer la coopération administrative internationale dans les domaines de la formation des fonctionnaires, de la recherche et de l’expertise. Il dispensait des cycles internationaux de formation, de longue ou de courte durée, aux fonctionnaires de tous pays. Il participait aux travaux portant sur l’administration et la modernisation du service public, notamment par la publication de la Revue française d’administration publique. Il réalisait enfin des missions d’expertise dans le cadre de programmes de réforme administrative.

En janvier 2002, l’institut a été intégré à l’ENA, qui a repris ses missions et ses personnels (3). Le décret précité du 10 janvier 2002 a transféré à l’ENA les missions auparavant dévolues à l’institut en matière de coopération internationale. Une direction des relations internationales a été créée. Les activités de formation des fonctionnaires étrangers et de recherche ont été regroupées avec celles de formation permanente au sein d’une grande direction de la formation permanente et de la recherche (4).

L’ENA a repris l’intégralité des activités exercées par l’institut, en matière de formation, d’expertise et de recherche. En matière de formation, pour éviter toute confusion avec les cycles internationaux propres à l’ENA, le « cycle long » de l’institut est devenu le cycle international d’administration publique (CIAP) et les « cycles courts » ont été rebaptisés cycles internationaux spécialisés d’administration publique (CISAP).

3. La fusion de l’ENA et du Centre des études européennes de Strasbourg

Le Centre des études européennes (CEES) a été créé en 1994 sous la forme d’un groupement d’intérêt public (5). Il dispensait de la formation initiale pour le compte des écoles d’administration, de la formation continue, des préparations aux concours des institutions européennes, tout en participant à des programmes de coopération internationale et en menant des activités d’études et de publication. Le CEES devait constituer une structure susceptible d’apporter une expertise spécialisée aux écoles et aux administrations.

La fusion du CEES avec l’ENA s’est opérée en deux étapes.

Depuis le 1er janvier 2005, le CEES n’est plus un groupement d’intérêt public, mais a été adossé à l’ENA pour en constituer le pôle européen. Il a toutefois conservé son autonomie fonctionnelle et budgétaire (6). Les relations de travail entre l’ENA et le CEES ont été définies par un protocole d’accord entre les deux directeurs, signé le 31 décembre 2004.

Une intégration plus complète est cependant en cours. Le budget annexe du CEES a été supprimé depuis le 1er janvier 2009 et le Centre fonctionne désormais comme une direction de l’ENA. Dans le cadre de la réorganisation de l’ENA, le CEES devrait prochainement être transformé en une direction des affaires européennes. Compte tenu de la spécificité de l’action européenne de l’ENA, il a été choisi de distinguer cette action de celle de la direction des affaires internationales.

La fusion de l’ENA avec l’IIAP, puis le CEES, a permis de constituer un grand pôle français en matière de formation internationale. Le CEES, en particulier, concentre l’ensemble de la formation communautaire des fonctionnaires français, pour les trois fonctions publiques. L’ENA apparaît ainsi comme un acteur de premier plan au niveau mondial : elle travaille aujourd’hui avec 120 pays environ, sur tous les continents.

B. LES AUTRES ACTEURS FRANÇAIS EN MATIÈRE DE FORMATION INTERNATIONALE

Bien que l’ENA constitue le principal acteur français en matière de formation internationale des hauts fonctionnaires de l’État, des coopérations internationales sont également menées par d’autres organismes de formation des fonctionnaires.

1. Les instituts régionaux d’administration (IRA)

Un décret du 18 décembre 2000 a consacré la mission de coopération internationale assurée par les instituts régionaux d’administration (IRA) depuis de nombreuses années (7).

Chaque IRA a ainsi conclu une convention de partenariat avec deux ou trois écoles d’administration étrangères, notamment en Russie et en Ukraine. Ils participent à l’organisation de séminaires sur des thèmes précis dans ces établissements et reçoivent en retour des délégations.

Les IRA accueillent chaque année de nombreuses délégations étrangères et effectuent des déplacements à l’étranger pour participer à des conférences ou établir des contacts avec les écoles d’administration nouvellement créées. Les échanges avec la Chine, par exemple, sont réguliers.

Les IRA sont également actifs en matière de coopération transfrontalière. Ils organisent ainsi des séminaires communs, des formations croisées ou de brefs échanges de fonctionnaires avec des administrations étrangères.

2. Les organismes de formation des fonctionnaires territoriaux

a) Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT)

Le CNFPT assure à titre principal la formation des fonctionnaires territoriaux français. Au-delà de cette mission, il effectue également des actions à destination de fonctionnaires étrangers, au moyen de conventions de partenariat. Ces actions peuvent être effectuées à la demande d’institutions étrangères, notamment d’écoles d’administration, mais également à la demande du ministère des affaires étrangères, de l’ENA ou des IRA. Les charges liées à ces actions de formations sont intégralement prises en charge par l’organisme demandeur.

En 2009, par exemple, le CNFPT s’est engagé dans des partenariats :

––  avec le ministère de l’administration locale du Yémen, pour appuyer la préfiguration d’un centre de formation des autorités locales ;

––  avec le ministère de l’intérieur du Royaume du Maroc, dans le cadre d’un projet d’accompagnement du processus de décentralisation marocain ;

––  avec l’ambassade de France au Ghana, pour une mission d’appui à la décentralisation et à la gouvernance locale, comprenant notamment des actions de formation de la fonction publique locale.

De 2006 à 2009, le CNFPT a organisé des actions de formation en partenariat avec la Chine, la Russie, le Brésil, la Roumanie, le Cambodge, l’Ukraine, l’Albanie, le Ghana, l’Azerbaïdjan, la Croatie, la Tunisie, le Japon et la Mauritanie.

Le CNFPT participe également à l’organisation d’actions de formation transfrontalières une ou deux fois par an. L’École nationale d’application des cadres territoriaux de Nancy (8) et l’école supérieure d’administration de Kehl, par exemple, ont organisé régulièrement des formations portant sur l’approche comparée des politiques culturelles en France et en Allemagne. La délégation du CNFPT de Haute-Normandie a également organisé une formation sur la gestion des déchets dans une perspective de développement durable en partenariat avec l’Université de Brighton.

b) L’Institut national des études territoriales (INET)

L’Institut national des études territoriales (INET), qui dépend du CNFPT et assure la formation des cadres de direction des grandes collectivités territoriales, est particulièrement actif en matière de formation internationale.

En premier lieu, l’INET entretient une collaboration au sein du Pôle européen d’administration publique (PEAP).

Le PEAP, créé le 16 novembre 2004, réunit des partenaires institutionnels : l’État, la ville et la communauté urbaine de Strasbourg, le département du Bas-Rhin et la région Alsace, ainsi que des partenaires pédagogiques : l’École Nationale d’Administration (ENA), l’Institut national des Études territoriales (INET), le Centre des Études européennes de Strasbourg, l’Euro-Institut de Kehl, l’Université Robert Schuman et l’Institut d’Études politiques de Strasbourg.

Les objectifs du PEAP sont de former davantage d’agents publics à l’Europe, en profitant des expériences diverses de plusieurs acteurs de premier plan, dans le domaine de la formation, et de développer un centre de ressources en administration publique en fédérant les activités de recherche et d’études de ses membres.

Dans ce cadre, l’INET a participé à des actions de formation franco-allemandes transfrontalières avec l’Euro-Institut de Kehl (9). Ces actions ont porté, en 2006, sur la politique de la ville et, en 2007, sur l’habitat social.

En deuxième lieu, les stagiaires de l’INET peuvent réaliser des stages à l’étranger.

Pour la période 2005-2009, on compte ainsi :

––  des élèves administrateurs ayant suivi de courtes formations à l’étranger ;

––  des élèves administrateurs ayant effectué leur stage de perfectionnement à Bruxelles, Moscou ou au Maroc ;

––  des élèves conservateurs du patrimoine ou conservateurs des bibliothèques ont effectué des stages à l’étranger ;

––  les élèves en formation continue ont participé à des cycles de formation au Brésil, au Venezuela ou en Russie.

Enfin, l’INET accueille des stagiaires tunisiens dans le cadre de la convention signée entre le CNFPT et l’école nationale d’administration de Tunis. Ils sont placés en stage dans des collectivités territoriales.

En complément de ces diverses actions, l’INET envisage une adhésion au réseau ENTO (European Network of Training Organisation), qui est un réseau européen de formation à destination des autorités locales et régionales des États membres du Conseil de l’Europe. Les différents membres de l’ENTO organisent, à tour de rôle, des conférences sur des sujets relatifs à la gestion locale.

C. LES LIENS AVEC D’AUTRES ORGANISMES DE FORMATION INTERNATIONALE

1. L’État subventionne des écoles étrangères de formation des fonctionnaires

Le maintien d’une pluralité d’acteurs sur le marché de la formation internationale n’est pas contradictoire avec le souhait de simplifier le cadre institutionnel français. Il est souhaitable, en effet, que des offres complémentaires soient présentes au niveau européen et international, pour favoriser la diversité des formations et des approches pédagogiques. En outre, une présence française au sein des principaux organismes de formation européens est un vecteur d’influence indispensable.

a) L’institut européen d’administration publique de Maastricht

L’Institut européen d’administration publique (IEAP) de Maastricht, créé en 1981, est un organisme de droit privé. Il fournit des formations à des fonctionnaires, magistrats et cadres publics provenant de 40 pays différents.

La France est représentée au conseil d’administration de l’IEAP par la direction générale de l’administration et de la fonction publique, moyennant une subvention forfaitaire annuelle de 55 000 euros (10). Elle met en outre à la disposition de l’IEAP un assistant technique qui contribue à la définition des programmes de formation.

Outre le versement de la subvention annuelle, la France achète des formations à l’IEAP. Celui-ci a ainsi accueilli dans le cadre de ses séminaires 172 élèves français en 2006 et 119 en 2008. En outre, certains ministères ont régulièrement recours aux formations sur mesure délivrées par cet organisme. L’Institut de formation de l’environnement (IFORE), en particulier, travaille en partenariat avec l’IEAP.

b) Le Collège d’Europe de Bruges

Le Collège d’Europe de Bruges présente la particularité d’être une école trilingue. Il forme beaucoup de futurs décideurs publics des pays européens, bien que la majorité des élèves travaillent dans le secteur privé.

La France paie au Collège une subvention forfaitaire lui permettant de présenter des candidats français pour suivre des formations. Elle participe également aux jurys de recrutement.

L’État verse par ailleurs des bourses à des élèves français du Collège, en raison du caractère payant de la scolarité (les frais pour l’année 2009-2010 s’élèvent à 21 000 euros). Selon les informations communiquées à votre rapporteur par la direction générale de l’administration et de la fonction publique, treize bourses complètes et neuf bourses partielles ont été accordées en 2008.

2. L’ENA entretient des partenariats avec plusieurs écoles étrangères

a) Les collaborations ponctuelles avec d’autres écoles de formation des fonctionnaires

La taille de l’ENA la place parmi les principaux organismes de formation européens, avec lesquels elle entretient des relations de concurrence, mais également de collaboration. L’ENA forme fréquemment des partenariats avec d’autres écoles pour répondre aux appels d’offres lancés par la Commission européenne en matière de formation. Le résultat est que l’ENA remporte, seule ou en partenariat, environ huit marchés européens sur dix.

Contrairement à d’autres grandes écoles de formation des fonctionnaires, l’ENA ne siège pas au conseil d’administration de l’Institut européen d’administration publique de Maastricht (IEAP). Néanmoins, l’ENA est amenée à coopérer avec l’IEAP sur plusieurs projets de formation, en particulier sur deux réseaux pilotés par l’IEAP :

––  le programme EuroMed de formation des administrations publiques, qui s’inscrit dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen (11) et prévoit des actions de formations sur les questions européennes au profit de fonctionnaires des pays du sud de la Méditerranée et du Moyen-Orient. En mai 2009, l’ENA a co-organisé un séminaire à Paris sur le thème de la politique européenne de voisinage ;

––  le projet de création d’une école régionale des Balkans, lancé en janvier 2009. Dans ce cadre, l’ENA a organisé en juin 2009 une action sur le thème de l’éthique dans la fonction publique.

b) Le master européen de gouvernance et d’administration (MEGA)

L’ENA est l’une des écoles participant au master européen de gouvernance et d’administration (MEGA). Ce master est une formation diplômante franco-allemande d’une durée d’un an, destinée aux cadres du secteur public titulaires d’un diplôme de niveau maîtrise.

Le MEGA associe dix partenaires différents. Au niveau administratif, il est supervisé par la direction générale de l’administration et de la fonction publique et par le ministère de l’intérieur allemand. Parmi les partenaires pédagogiques membres du comité directeur, on compte :

––  des écoles d’administration publique : l’ENA et l’Académie fédérale allemande de l’administration publique ;

––  des établissements d’enseignement supérieur : l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, l’institut d’études politiques de Paris, l’université Robert Schuman de Strasbourg, l’université de Potsdam et l’université Humboldt de Berlin ;

––  une institution européenne : l’institut universitaire européen de Florence.

La formation se compose de quatre modules de trois mois chacun :

––  un module initial, organisé à Paris ;

––  un module pratique, qui est un stage dans une administration française ou allemande ou éventuellement dans une organisation européenne ou internationale ;

––  un module d’approfondissement à Berlin et Postdam ;

––  un module final à Berlin et Postdam, pendant lequel le mémoire de master est rédigé.

II. ––  UNE OFFRE FOISONNANTE REDÉFINIE EN RAISON DES RESTRICTIONS BUDGÉTAIRES

A. UNE GRANDE DIVERSITÉ DE FORMATIONS PROPOSÉES

1. Les activités de formation, de recherche et d’expertise

L’activité internationale de l’ENA comporte la délivrance de formation stricto sensu, mais également des missions d’expertise et des activités de recherche et de publication. Toutes ces activités participent de la formation permanente des fonctionnaires.

L’ENA apporte son expertise à des États étrangers dans des domaines divers, notamment en matière de recrutement et de formation des hauts fonctionnaires, de gestion publique, de management, de finances publiques ou d’administration territoriale. En 2008, elle a organisé 196 missions d’experts, représentant 1 808 journées d’expertise. La majorité de ces missions sont commandées par la Commission européenne pour des États européens.

Les missions de recherche de l’ENA sont assurées, depuis 2006, par le Centre d’expertise et de recherche administrative (CERA). Ce dernier accueille des chercheurs français ou étrangers et assure la représentation de l’ENA dans les réseaux internationaux, les groupes de travail et les grandes conférences internationales. Il participe ainsi aux activités de l’Association internationale des écoles et instituts d’administration.

Enfin, les activités de formation stricto sensu recouvrent aussi bien des formations théoriques, avec des cours ou des séminaires – par exemple les préparations aux concours administratifs – que des formations plus pratiques. Certaines consistent en des ateliers de travail ou des études de cas. On peut citer, par exemple, les séances de préparation des administrations nationales à la présidence de l’Union européenne. En outre, l’ENA propose à des fonctionnaires étrangers francophones d’effectuer des stages en responsabilité dans des administrations françaises. En 2008, 34 fonctionnaires ont ainsi effectué un stage, notamment dans les préfectures.

2. Les formations sur catalogue ou sur mesure

Au sein des activités de formation de l’ENA, il convient de distinguer les formations sur catalogue des formations sur mesure.

L’ENA propose plusieurs cycles de formation sur catalogue, qui répondent à un programme précis. Ces cycles représentent la majeure part de l’offre de formation de l’École.

Toutefois, des cycles de formation sur mesure peuvent également être organisés à la demande d’administrations étrangères, qui définissent le cahier des charges. Les sujets possibles de formation recouvrent tous les champs de l’administration et des politiques publiques. Les formations peuvent être dispensées aussi bien en France (14 sessions en 2008, avec 220 participants) qu’à l’étranger (133 missions en 2008). Elles accueillent de plus en plus souvent des fonctionnaires français, afin de favoriser la mixité des publics.

Lorsqu’elle est sollicitée pour l’organisation d’une formation sur mesure, l’ENA établit un devis, qui donne lieu ensuite à l’émission d’une facture, dont le règlement est assuré, selon les cas, par l’administration demandeuse ou par le ministère des affaires étrangères. Par conséquent, bien que les cycles sur mesure soient autofinancés, leur volume dépend largement des crédits consacrés par le Gouvernement à la coopération internationale en matière de formation.

3. Des cycles internationaux de formation de durées différentes

Dans ses formations sur catalogue, l’ENA propose toute une gamme de cycles internationaux, dont la durée va de quelques jours à 18 mois. La pluralité des cycles de formation s’explique notamment par le fait que l’ENA a conservé ses cycles propres tout en maintenant les cycles de l’ancien institut international d’administration publique. Ces formations sont, pour la plupart, payantes.

L’ENA organise trois cycles internationaux de longue durée, dont les participants sont sélectionnés par l’intermédiaire du réseau diplomatique français. Ils permettent de former les élèves étrangers conjointement aux élèves français en scolarité à l’ENA et ainsi de créer un véritable brassage.

Le cycle international long, d’une durée de 18 mois, a été créé en 1949 pour que des jeunes fonctionnaires étrangers (12) puissent bénéficier de la même formation que les élèves de l’ENA issus du concours. À l’issue d’une phase d’accueil, ils suivent deux des trois modules de la scolarité : le module « Europe » et le module « Territoires » (13), y compris les stages pratiques.

Le cycle international court, d’une durée de 9 mois, a été créé dans les années 90. Il s’adresse à des fonctionnaires expérimentés qui souhaitent une formation à mi-carrière. La scolarité comprend une phase initiale d’introduction aux institutions françaises, européennes et internationales, un stage dans l’administration française homologue à l’administration d’origine du fonctionnaire et une phase d’approfondissement commune avec les administrateurs civils recrutés au tour extérieur.

Le cycle international d’administration publique est un cycle spécialisé de 7 mois qui assure le perfectionnement de fonctionnaires étrangers dans leur domaine professionnel. Il comporte trois filières : administrations et institutions, relations internationales et questions diplomatiques, économie et finances publiques. La scolarité comprend, outre des phases de cours, un voyage d’études et un stage en administration.

Il existe également des cycles internationaux de courte durée, appelés cycles internationaux spécialisés d’administration publique (CISAP). Il s’agit de sessions de formation de deux à quatre semaines, sur des thèmes spécialisés. Bien que les sessions se déroulent à Paris, certaines sont dispensées en anglais ou en espagnol.

Ces deux derniers cycles sont autofinancés par les frais d’inscription et les paiements des administrations d’origine des agents, à la différence du cycle international long et du cycle international court qui sont financés par la dotation de l’État à l’ENA.

4. Les formations aux questions communautaires

La même diversité de formations proposées se retrouve dans le catalogue de formations européennes du CEES. Celui-ci assure ainsi :

––  une préparation aux concours des institutions communautaires, qui se focalise sur la méthodologie spécifique des épreuves ;

––  le Cycle des hautes études européennes, créé en 2006 (14), qui assure des sessions annuelles de formation des dirigeants publics et privés ;

––  une préparation à la présidence de l’Union européenne pour les États qui doivent assurer la présidence tournante ;

––  des « ateliers d’Europe », cycles courts destinés à accompagner la mobilité professionnelle. Ils s’adressent principalement à des agents publics appelés à exercer des fonctions en relation avec les questions européennes ;

––  des formations en direction d’un public étranger, généralement sur demande du ministère des affaires étrangères ou d’une ambassade française. Ces actions sont généralement réalisées dans le pays demandeur ;

––  des formations destinées aux administrations françaises. Le CEES intervient pour le compte de diverses écoles de formation des fonctionnaires pour la formation initiale aux questions communautaires (15). Il assure également des missions de formation continue à la demande des différents ministères.

B. LE RECENTRAGE DES FORMATIONS SUR DES CIBLES PRIORITAIRES

Au cours des dernières années, les contraintes budgétaires croissantes ont imposé une réorientation des formations internationales. Cependant, l’identification de priorités apparaît difficile compte tenu de la diversité des intervenants et des budgets concernés par les formations internationales.

1. Les contraintes budgétaires imposent de définir des priorités au sein des formations internationales

Depuis quelques années, les moyens budgétaires disponibles pour la formation internationale se réduisent, aussi bien les crédits de formation des ministères que les crédits de coopération des ambassades françaises. En particulier, le montant des crédits consacrés à la formation interministérielle des fonctionnaires au sein du programme « fonction publique » a diminué de 21,8 % en 2009, soit une réduction de 550 900 euros par rapport à l’année 2008.

La contraction des moyens disponibles conduit à définir des priorités en matière d’utilisation des crédits.

•  L’ENA s’est engagée dans un redéploiement de ses formations, en fonction de critères géographiques et de critères financiers.

En premier lieu, elle définit clairement les priorités géographiques de ses propres formations internationales en liaison avec le ministère des affaires étrangères. Comme cela a été indiqué à votre rapporteur, les trois priorités actuelles sont :

––  l’Europe et l’espace méditerranéen, en particulier les États candidats à l’entrée dans l’Union européenne ;

––  les grands pays émergents et les grandes puissances régionales, telles que la Chine, l’Inde, le Brésil ou l’Afrique du Sud ;

––  les pays francophones, notamment d’Afrique.

En second lieu, l’ENA s’attache à développer les formations autofinancées par les frais d’inscription.

•  En revanche, il est plus difficile d’identifier les priorités du Gouvernement en matière de formation internationale, compte tenu de la diversité des intervenants.

En premier lieu, votre rapporteur a pu constater au cours des auditions qu’aucun service ministériel ne dispose d’une vision d’ensemble des formations internationales de fonctionnaires financées par le budget de l’État. La compétence en la matière se répartit principalement entre le ministère chargé de la fonction publique, qui assure la tutelle de l’ENA et est responsable de la formation interministérielle des fonctionnaires, et le ministère des affaires étrangères, qui intervient en matière de coopération et de relations avec les pays membres de l’Union européenne.

En second lieu, on observe une très grande dispersion des dépenses en matière de formation internationale. Des subventions aux différents organismes de formation internationale sont ainsi versées par le ministère chargé de la fonction publique, sur le budget de la formation interministérielle des fonctionnaires, mais également par le ministère des affaires étrangères. Il convient d’ajouter à ces subventions les paiements des formations commandées par les différents ministères, sur leurs crédits de fonctionnement. Il en résulte une grande opacité sur la répartition des dépenses.

Il résulte de cette organisation que le Gouvernement ne dispose pas d’une stratégie d’ensemble de réorientation des formations. Alors que le secrétariat général des affaires européennes juge prioritaire de développer les formations à destination des États membres de l’Union européenne – en particulier les nouveaux entrants –, la direction générale de l’administration et de la fonction publique réduit les crédits consacrés à certaines formations européennes, comme le master européen de gouvernance et d’administration, pourtant créé récemment.

2. Le développement de l’offre de formation payante

Pour compenser la réduction de ses moyens, l’ENA a choisi de diversifier ses sources de financement en développant les formations rémunérées par le bénéficiaire, plutôt que les formations financées par le budget de l’État. L’ENA donne ainsi la priorité aux appels d’offres passés par les États étrangers et aux programmes de formation financés par des organisations internationales.

S’agissant des États étrangers, l’ENA a participé en 2008, par exemple, à un programme universitaire diplômant en République dominicaine, à des sessions de formation de l’école supérieure d’administration publique de l’université Lomonossov en Russie ou encore à une formation à la négociation et aux affaires européennes en Irlande.

Les organisations internationales, quant à elles, sont devenues la principale source de ressources nouvelles pour l’ENA. Alors que ces ressources représentaient moins de 1 % des recettes de l’action internationale de l’École en 2002, elles en constituaient 56 % en 2008. Pendant la même période, la part des financements provenant du ministère des affaires étrangères, qui était prépondérante, est tombée à 8 % des recettes. La Commission européenne est le principal client, mais l’ENA répond également à des demandes de la Banque Mondiale, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), de la Banque asiatique de développement ou de la Banque interaméricaine de développement. En 2008, par exemple, l’ENA a remporté, en partenariat avec d’autres écoles, un contrat-cadre prévoyant des formations au leadership pour les hauts fonctionnaires européens, pour une durée de quatre ans.

Le budget consacré aux cycles sur mesure est passé de 204 000 euros en 2006 à 277 000 euros en 2007, puis à 390 000 euros en 2008.

S’agissant des formations sur catalogue, on peut observer une croissance rapide des cycles de formations financés par les recettes propres de l’École. Ainsi, le budget des cycles internationaux spécialisés d’administration publique est passé de 283 000 euros en 2006 à 343 000 euros en 2007 et en 2008.

Cette réorientation a eu pour effet de renforcer le poids relatif des recettes propres de l’ENA par rapport à la subvention accordée par l’État. Les recettes propres de l’action internationale ont ainsi représenté 4,6 millions d’euros en 2008, alors qu’elles ne s’élevaient qu’à 2,67 millions d’euros en 2006. Les formations européennes, quant à elles, ont rapporté 1,5 million d’euros en 2008. Les recettes propres représentent ainsi plus de 15 % des ressources de l’ENA (16).

L’orientation choisie par le Gouvernement consiste à renforcer encore le poids des formations payantes, et ainsi les recettes tirées des droits de scolarité. Ce choix repose sur le constat que, grâce au prestige de l’ENA, on dénombre plus de candidats prêts à payer une formation que de places proposées par l’ENA. Toutefois, il convient de signaler que les recettes propres comportent une grande part d’aléa, notamment en cas de restrictions budgétaires de la part des clients habituels.

3. La montée en puissance des formations européennes

Parmi les évolutions récentes des formations internationales, on observe surtout une progression des formations aux questions communautaires. L’accent a particulièrement été mis sur ces formations dans le cadre du « plan d’action relatif à l’influence française en Europe » adopté par le Premier ministre en 2004 et du « « plan de formation et de soutien aux carrières européennes » de 2005.

Aujourd’hui, les plans de formation élaborés dans les différents ministères incluent presque tous des modules européens. Cette importance des questions communautaires apparaît également dans les formations de l’ENA. Depuis la réforme de la scolarité intervenue en 2005, la scolarité des élèves de l’ENA se compose de trois modules, dont l’un consacré à l’Europe, comprenant 10 semaines théoriques et 17 semaines de stage en responsabilité.

a) Le rôle majeur du CEES

•  L’intégration du CEES à l’ENA a élargi le champ d’action de ces deux organismes en matière européenne. Le CEES a pu, en effet, s’appuyer sur la structure et la notoriété internationale de l’ENA pour développer son offre de formation, tandis que l’ENA a pu bénéficier de l’expertise du CEES. Le CEES propose ainsi une large gamme de formations et accueille un public important.

Parmi les formations dispensées par le CEES, on dénombre trois réussites particulières.

En premier lieu, le CEES est au premier rang en Europe pour la préparation aux concours communautaires. Il est ainsi recensé comme centre préparatoire par l’Office européen de sélection du personnel, qui est en charge du recrutement par les institutions européennes. Le CEES a largement développé son offre dans ce domaine. Les formations sont ainsi délivrées en français, en anglais ou en allemand. Des sessions de préparation aux concours ont lieu à Bruxelles, à Paris, à Luxembourg, mais également dans la majorité des nouveaux États membres et en Croatie. Cela a permis au CEES de devenir le leader européen de la préparation aux concours depuis cinq ans. Il s’agit de la préparation qui dispose du public le plus important : depuis 2003, plus de 10 000 candidats aux concours des institutions communautaires ont été formés par le CEES. On estime que cette préparation multiplie par six les chances de réussite.

En deuxième lieu, on peut observer le succès du Cycle des hautes études européennes. Ce programme, unique en Europe, est une formation de haut niveau qui s’adresse aux dirigeants communautaires. Elle est compatible avec l’exercice de leurs fonctions (17) et largement tournée vers la pratique. Elle comporte notamment des rencontres avec divers acteurs européens dans différents pays. Au cours des années 2007 à 2009, le Cycle a accueilli 119 auditeurs, dont 62 fonctionnaires français. Six à huit nationalités sont représentées chaque année.

Enfin, le CEES est également un acteur majeur en matière de préparation à la présidence de l’Union européenne. Les États membres ont besoin de formations spécifiques pour assurer cette présidence, puisque celle-ci ne revient que tous les treize ans. Il importe donc de bénéficier des retours d’expérience des autres États membres. Le CEES a développé un savoir-faire spécifique en la matière – notamment sur la négociation et les techniques linguistiques – et entretient un réseau d’experts ayant été impliqués dans les présidences précédentes. Les formations qu’il fournit permettent ainsi un échange de bonnes pratiques autour de cas concrets. Depuis 2005, le CEES a ainsi été sollicité par l’Autriche, la Finlande, la Slovénie, le Royaume-Uni, la République tchèque, la Suède, l’Espagne, la Hongrie, Chypre et la Lituanie.

La succès des formations offertes par le CEES montre que l’objectif de constituer un pôle de formation aux questions européennes d’importance égale à celle de grands instituts européens comme le Collège d’Europe de Bruges, l’Institut européen d’administration publique de Maastricht ou l’Institut universitaire européen de Florence, a été atteint. Le CEES fait effectivement partie des quatre organismes de formation de premier rang pour les questions communautaires.

•  À la différence de l’ENA, le financement du CEES est déjà assuré en majorité par des recettes propres, ce qui a permis un développement considérable de l’offre de formation.

En 2008, les recettes propres ont ainsi représenté 79 % du budget du CEES. Le poids du produit des ventes de formation au sein des recettes a permis au CEES d’augmenter ses dépenses de 61 % entre 2005 et 2008 (18).

 

2006

2007

2008

Moyenne annuelle 2006-2008

Budget du CEES

2 809 101 € 

3 631 999 € 

3 749 318 € 

3 396 806 €

Subvention nette de l’ENA

858 446 € 

523 658 € 

777 501 € 

719 868 €

Part de la subvention nette de l’ENA dans le budget

31 %

14 %

21 %

21 %

Il convient de signaler que le financement du Cycle des hautes études européennes est hybride : bien que la formation soit payante, le CEES perçoit une subvention de la direction générale de l’administration et de la fonction publique. Le montant des frais de participation, qui s’échelonne de 3 000 euros à 15 000 euros selon les publics (19), reste en effet inférieur au coût moyen du Cycle par auditeur, qui est de l’ordre de 16 500 euros, incluant les frais d’hébergement et de repas. Compte tenu du caractère incertain du maintien des subventions de l’État, le CEES recherche de nouveaux sponsorings. En particulier, une action sera menée pour tenter de rétablir la subvention versée par la Commission européenne jusqu’en 2006 (20).

b) L’avenir compromis du master européen de gouvernance et d’administration

•  La création du master européen de gouvernance et d’administration (MEGA) en 2005 témoigne également de l’européisation des formations. À l’origine, le MEGA est un programme franco-allemand de formation continue, créé à la suite du 40ème anniversaire du traité de l’Élysée. Les formations sont délivrées dans les deux langues et sont diplômantes dans les deux États. Sa raison d’être était donc largement symbolique.

S’il s’adresse principalement aux cadres supérieurs du secteur public français ou allemand, le MEGA s’est néanmoins ouvert à d’autres publics, notamment des fonctionnaires d’États membres de l’Union européenne ou ayant vocation à y adhérer ou d’organismes européens, ainsi que des cadres du secteur privé. Ces participants représentent désormais une part importante des promotions.

Promotions

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2009

Participants secteur public allemand

10

9

3

7

Participants secteur public français

9

5

6

3

Autres participants

5

8

11

7

Total

24

22

20

17

La formation dispensée a pour objectif de donner aux candidats une connaissance pratique des administrations française et allemande et des mécanismes de l’Union européenne. Elle permet également d’avoir une vision comparative des structures publiques et économiques des deux États, ainsi qu’une approche interculturelle des différents problèmes, destinée à favoriser la coopération intergouvernementale. Enfin, les élèves doivent acquérir des compétences en matière de conception, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques publiques et en matière de gestion de crise et de communication publique.

•  La part française de financement du MEGA est financée par une subvention de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, dont le montant s’élève à 253 800 euros pour la promotion 2008-2009. En outre, les participants qui ne sont pas fonctionnaires doivent acquitter des frais d’inscription d’un montant de 10 000 euros par participant. Le nombre croissant de non fonctionnaires au sein du MEGA s’est donc logiquement traduit par une augmentation des recettes propres du MEGA, tandis que la subvention de l’État a diminué aussi bien en termes absolus qu’en termes relatifs.

RECETTES DU M.E.G.A. EN FRANCE

 

Subvention de l’État

Frais d’inscription

 

Montant

Part du budget

Montant

Part du budget

Promotion 2005-2006

262 000 €

96 %

10 000 €

4 %

Promotion 2006-2007

262 000 €

84 %

50 000 €

16 %

Promotion 2007-2008

270 000 €

81 %

61 500 €

19 %

Promotion 2008-2009

253 600 €

86 %

43 000 €

14 %

En raison des contraintes budgétaires précédemment évoquées en matière de formation interministérielle des fonctionnaires, il n’a pas été prévu de verser une subvention au MEGA au titre de la promotion 2009-2010. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, il reviendra à l’ENA de financer le MEGA à partir de sa dotation globale. Comme rien ne garantit que cette dotation sera augmentée dans des proportions permettant de maintenir la subvention au MEGA, l’ENA recherche des solutions de financement complémentaires.

•  Au vu de ces difficultés budgétaires, la pérennité du MEGA n’est pas assurée au-delà de la promotion 2009-2010. Le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique a indiqué à votre rapporteur que les crédits de formation seront à l’avenir concentrés sur les formations les plus « utiles » pour les fonctionnaires, dont le MEGA ne ferait pas forcément partie. Ainsi, une évaluation de cette formation est en cours afin de déterminer si elle atteint son objectif originel : former de hauts fonctionnaires français et allemands.

Votre rapporteur a pu constater que le MEGA rencontre des problèmes certains de démarrage. L’une des principales difficultés tient au recrutement des élèves, pour diverses raisons :

––  une très bonne connaissance du français comme de l’allemand est requise ;

––  il est difficile aux hauts fonctionnaires de consacrer une année entière à une formation, fût-elle diplômante, ce qui écarte bon nombre de candidats de valeur. Les formations qui sont compatibles avec l’exercice d’une activité professionnelles, telles que le Cycle des hautes études européennes, rencontrent un plus grand succès ;

––  pour les deux dernières promotions, il a été difficile de sélectionner des agents publics allemands et français. En effet, la présidence allemande de l’Union européenne, puis la présidence française, ont mobilisé presque tous les hauts fonctionnaires ;

––  le MEGA rencontre encore des difficultés à trouver son public, en raison de son caractère ambigu : il est destiné aux agents publics mais un tiers des élèves sont issus du secteur privé. En outre, il est franco-allemand mais s’ouvre de plus en plus à d’autres nationalités. Le positionnement de cette formation n’est pas encore totalement arrêté.

Le nombre très limité d’élèves, généralement une vingtaine, ne permet pas forcément au MEGA d’atteindre une taille critique. Ainsi, le coût par élève fonctionnaire français a augmenté dans des proportions considérables depuis la création du MEGA. Il semble à votre rapporteur que le MEGA pourrait accueillir 35 ou 40 élèves sans que cela ne diminue la valeur de la formation.

COÛT DU M.E.G.A. PAR ÉLÈVE

Promotions

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2009

Coût d’un élève français pour l’État

29 111 €

52 400 €

45 000 €

84 533 €

Compte tenu du caractère relativement onéreux de cette formation, une réflexion sur les objectifs, la spécificité et les modalités d’organisation du MEGA s’impose certainement. Néanmoins, il n’est pas souhaitable de mettre fin à ce programme qui, au-delà de la portée symbolique de la coopération franco-allemande, présente de nombreux atouts.

Il convient de rappeler que le MEGA est l’une des rares formations diplômantes authentiquement internationales. Il n’existe pas d’autres programmes de formation continue des fonctionnaires, binationaux et conduisant à la délivrance d’un double diplôme par des établissements d’enseignement supérieur de grande notoriété. Compte tenu du caractère encore récent du MEGA, celui-ci pourra très probablement se développer dans l’avenir.

Tout d’abord, un programme long de formation continue des hauts fonctionnaires, répondant à des enjeux nationaux et internationaux, correspond à un besoin réel des États. La France, notamment, a engagé une politique de développement de la formation continue.

La dimension franco-allemande est un autre élément important d’attractivité du MEGA, notamment pour les fonctionnaires des autres pays membres de l’Union européenne. Il est probable que le MEGA devra s’élargir davantage aux participants issus d’États membres ou candidats à l’entrée à l’Union européenne, qui souhaitent mieux connaître le fonctionnement de l’Union et des grands pays fondateurs.

Enfin, il apparaît que les anciens élèves du MEGA sont majoritairement satisfaits de la formation qu’ils ont suivie et souhaitent son maintien. Le rapport d’évaluation des deux premières promotions, rendu par les organisateurs du MEGA, souligne le fait que les participants apprécient particulièrement la dimension interculturelle du programme, notamment la réalisation d’un stage dans une administration étrangère et les échanges et contacts établis avec les élèves ou les intervenants d’autres nationalités.

C. LA RECHERCHE D’UNE MEILLEURE VALORISATION DES FORMATIONS

L’efficacité des dépenses consenties en matière de formation ne dépend pas uniquement du contenu des formations proposées, mais également de la manière dont ces formations sont valorisées par la suite. Il semble à votre rapporteur que des progrès sont susceptibles d’être accomplis dans ce domaine.

En premier lieu, le suivi qualitatif des formations par les ministères, en particulier le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, est quasi inexistant. Actuellement, il n’existe pas d’objectifs quantifiés permettant d’évaluer l’efficacité des différentes formations internationales. La direction générale de l’administration et de la fonction publique souhaite améliorer cette situation, au moins pour les formations dispensées par l’ENA. Le futur contrat d’objectifs et de performance avec l’ENA, qui est en cours d’élaboration, devrait clarifier les objectifs assignés à l’ENA en matière de formation internationale et créer des objectifs de suivi quantifiés. L’ENA devrait par ailleurs se doter d’une comptabilité analytique opérationnelle à compter de cette année.

En deuxième lieu, les formations internationales restent insuffisamment valorisées dans le déroulement de carrière des fonctionnaires français. Les promotions internes et les procédures d’affectation restent souvent régies par leur logique propre et ne permettent pas forcément de bénéficier des compétences acquises par les fonctionnaires, notamment en matière communautaire. Il serait souhaitable que les formations soient mieux prises en compte dans la gestion des ressources humaines, y compris en amont. Dans certains États, tels que l’Allemagne, le suivi d’une formation s’intègre souvent dans un plan de carrière défini à l’avance entre l’agent et son administration et débouche sur un avancement ou sur l’accès à un poste comprenant de nouvelles responsabilités.

Enfin, les réseaux d’anciens élèves, qui constituent un vecteur d’influence important pour la France, restent largement sous-utilisés. Le réseau des anciens élèves de l’ENA est ainsi peu valorisé, aussi bien par l’École elle-même que par le Gouvernement (21). Or c’est un réseau potentiellement puissant, qui comprend des personnes situées à un niveau hiérarchique élevé. Tout au long de son histoire, l’ENA a accueilli 2 864 élèves étrangers dans des cycles de longue durée, auxquels il fait ajouter plusieurs milliers d’anciens élèves de l’institut international d’administration publique. Il existe aujourd’hui trente associations nationales d’anciens élèves étrangers, qui se réunissent avec l’association française des anciens élèves au sein d’une confédération. Afin de renforcer ses liens avec les anciens élèves, l’ENA a décidé d’organiser, pour la première fois, une réunion des anciens élèves étrangers en juillet 2009, à l’occasion du soixantième anniversaire de la création des cycles internationaux de l’ENA. Le secrétariat général des affaires européennes devrait également mieux mobiliser les réseaux d’anciens élèves. Par exemple, des rendez-vous réguliers avec le réseau des anciens élèves du collège européen de Bruges ont été mis en place.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 8 juillet 2009, la Commission examine le rapport d’information budgétaire sur les formations internationales des agents publics.

M. Bernard Derosier. Le 16 décembre 2008, sur proposition du président Jean-Luc Warsmann, la commission a désigné des rapporteurs d’informations sur l’exécution budgétaire.

Lors de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2009, j’avais remarqué que les crédits des formations internationales diminuaient de 550 900 euros, soit une baisse de 22 %. J’avais donc souhaité en savoir plus.

C’est ce qui m’a amené à m’intéresser plus spécifiquement aux formations internationales, qui s’adressent aussi bien aux fonctionnaires français qu’aux fonctionnaires internationaux. On connaît généralement les formations de l’ENA, mais il en existe d’autres en Europe, que la France contribue à financer.

Je voudrais vous faire part d’un premier constat : la difficulté à réunir des informations sur ces formations internationales des agents publics. Il n’existe pas de ministère dédié à ce domaine. Certaines formations sont financées par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, d’autres par le ministère des affaires étrangères et d’autres encore par les budgets de formation propres aux différents ministères. Il est donc difficile, voire impossible d’avoir une vision globale, d’autant plus que les ministères que je viens de citer ne considèrent pas ce sujet comme prioritaire. Il ne fait pas l’objet d’une stratégie d’ensemble, par exemple, alors même que dans un contexte budgétaire tendu il pourrait être de bonne méthode de chercher à déterminer des priorités. Je tiens d’ailleurs à saluer la collaboration établie avec le directeur de l’ENA pour l’élaboration de ce rapport car ils ont répondu de manière très complète et détaillée aux questions que je leur ai adressées.

Je vous présenterai, dans un premier temps, les différents acteurs en matière de formation internationale puis, dans un deuxième temps, les types de formations proposées et, enfin, l’intérêt de maintenir une présence française significative sur le marché des formations internationales.

S’agissant des acteurs, on observe depuis plusieurs années une simplification du paysage français. La France comptait il y a quelques années pas moins de trois grands organismes en matière de formation internationale : l’ENA, qui accueille des fonctionnaires étrangers dans sa scolarité depuis 1949, l’Institut international d’administration publique, qui dispensait des cycles de formation continue aux fonctionnaires étrangers, et le Centre des études européennes de Strasbourg, qui est spécialisé dans les questions européennes.

Ces formations internationales sont désormais regroupées sous l’égide de l’ENA. Cette dernière a fusionné avec l’Institut international d’administration publique en 2002 et avec le Centre des études européennes en 2005. On a donc, désormais, un seul grand pôle de formations internationales en France, ce qui est préférable pour atteindre la taille critique pour ce genre d’actions. Cela permet aussi de profiter de la renommée de l’ENA à l’étranger pour valoriser les différents produits de formation.

Le budget de l’État finance également des organismes étrangers de formation des fonctionnaires. C’est le cas de l’Institut européen d’administration publique de Maastricht ou du Collège d’Europe de Bruges. Le fait de leur verser une subvention forfaitaire, parfois modeste, de l’ordre de 55 000 euros, donne le droit de présenter des élèves français – sachant que la formation reste malgré tout payante – et surtout de siéger au conseil d’administration et ainsi d’avoir de l’influence sur les programmes et le choix des enseignants.

L’État finance enfin une formation unique en son genre : le Master européen de gouvernance et d’administration. Il s’agit d’une formation franco-allemande, diplômante dans les deux pays, qui s’adresse principalement à des hauts fonctionnaires français et allemands mais qui peut accueillir des élèves d’autres pays européens. Elle dure un an et se déroule en alternance en France et en Allemagne. C’est une formation assez généraliste, un peu sur le modèle de celle de l’ENA. C’est cette formation qui avait subi une suppression de ses crédits dans le projet de loi de finances, avant qu’ils ne soient rétablis.

Pour compléter ce panorama des formations financées par l’État, les organismes de formation des fonctionnaires territoriaux font également de la coopération administrative en matière de formation des agents publics locaux. Le CNFPT ou l’INET ont conclu des partenariats avec des écoles étrangères et accueillent des stagiaires étrangers. L’INET, qui est implantée à Strasbourg, coopère de plus en plus avec l’ENA et propose des modules communs de formation.

En deuxième lieu, cette variété d’intervenants signifie une grande variété de formations proposées.

L’offre de formation est très riche. Même en se limitant aux formations de l’ENA, on voit un catalogue d’une diversité que l’on ne suppose pas. L’ENA propose des formations de toutes durées, allant de quelques jours à 18 mois. Certaines formations sont prédéfinies – ce sont les « cycles internationaux », d’autres sont dispensées « sur mesure » quand l’ENA répond à des appels d’offres d’États étrangers ou de la Commission européenne. Certaines formations sont à dominante académique, avec une scolarité, d’autres sont beaucoup plus opérationnelles avec des ateliers d’échanges de bonnes pratiques ou des stages en responsabilité dans une administration française ou étrangère. Rien que pour les questions communautaires, il existe six catégories différentes de formations.

L’importance de l’offre de l’ENA s’explique largement par les fusions successives que j’ai évoquées et lui permet d’avoir une place de premier rang sur le marché international des formations des fonctionnaires. C’est un point important, car contrairement aux formations initiales des fonctionnaires français, les formations internationales se déroulent dans un cadre concurrentiel qui impose d’être attractif et compétitif. L’ENA forme aujourd’hui des agents publics en provenance de 120 pays, de tous les continents, y compris l’Océanie ! En Europe, elle fait partie des quatre grandes écoles de fonctionnaires et forme donc un nombre très important de fonctionnaires de l’Union européenne. Son programme de préparation aux concours communautaires est d’ailleurs le plus performant en Europe. Au vu de ces résultats, la constitution à l’ENA d’un pôle français de formation internationale peut donc être considérée comme un succès.

C’est d’ailleurs ce succès qui a permis à l’ENA de maintenir une offre de formation importante malgré les restrictions budgétaires imposées depuis plusieurs années. L’ENA a en fait tout simplement développé ses formations payantes, notamment les réponses aux appels d’offres étrangers, pour compenser la diminution des crédits versés par l’État pour la coopération. Concrètement, cela signifie une réorientation vers les clients les plus « solvables », notamment les pays d’Europe ou la Commission européenne. Mais ces recettes sont malheureusement des recettes fragiles, qui fluctuent au gré de la demande.

Il me paraît important de ne pas fragiliser les formations internationales en réduisant de manière trop systématique leur budget, ce qui m’amène à mon troisième et dernier point : pourquoi est-il important de développer les formations internationales ?

Pour les fonctionnaires, c’est bien sûr une source d’ouverture. En côtoyant des fonctionnaires étrangers ou en découvrant le fonctionnement d’autres administrations, ils peuvent comparer les différents systèmes et les différences de conduite des politiques publiques. Cela leur donne du recul par rapport à nos propres pratiques et c’est incontestablement un « bol d’air » pour l’administration française. Cela peut notamment fournir des pistes de réforme. Cela permet également de disposer de fonctionnaires possédant des compétences pointues sur le fonctionnement des institutions communautaires ou internationales.

Mais l’État tire aussi des bénéfices à long terme des formations internationales. En finançant des écoles étrangères et en accueillant des hauts fonctionnaires étrangers à l’ENA, la France a tissé des liens avec ceux qui seront les décideurs publics étrangers quelques années plus tard. Elle leur fait connaître son modèle juridique et promeut les valeurs auxquelles elles est attachée. La connaissance acquise de la France facilitera ensuite le dialogue et la compréhension mutuelle dans les discussions internationales. Enfin, l’existence de formations prestigieuses est un élément de promotion de la francophonie. Par exemple, l’excellence de la préparation aux concours communautaires incite des ressortissants des nouveaux États membres à apprendre le français avant de passer les concours, et cela participe ensuite à l’utilisation du français dans les institutions communautaires. Les répercussions sont donc plus importantes que ce que l’on pourrait croire.

Par conséquent, sacrifier certaines formations internationales pour des motifs budgétaires pourrait remettre en cause la place de la France au niveau international, et surtout au niveau communautaire, et il serait difficile de la retrouver ensuite.

Cela ne signifie pas qu’on ne peut pas faire d’économies sur le budget de ces formations. On peut certainement continuer à rationaliser le fonctionnement des différentes formations pour réaliser des économies d’échelle, comme on l’a fait avec le regroupement au sein de l’ENA. Les coûts de fonctionnement pourraient être maîtrisés, par exemple en supprimant les déplacements de courte durée des promotions à l’étranger, qui coûtent très cher pour un intérêt assez relatif. S’agissant du Master européen de gouvernance et d’administration, que le ministère envisage de supprimer alors qu’il s’agit d’une des seules formations authentiquement internationales, on peut certainement trouver d’autres solutions pour le dynamiser. Je pense notamment à une augmentation du nombre de stagiaires. Avec des promotions d’une vingtaine de personnes, il est probable que le seuil de rentabilité n’est pas atteint.

En conclusion, je voudrais insister sur l’importance pour l’État de mieux prendre en compte les formations internationales et de définir une stratégie globale en la matière. Aujourd’hui, l’éparpillement des différentes formations ne permet peut-être pas une efficacité optimale. Il serait préférable de penser à une réorganisation pour rendre ces formations plus efficaces plutôt que de se désengager complètement de certains secteurs.

M. Jean-Luc Warsmann, président. Je remercie notre collègue pour la qualité de son travail. À travers un tel sujet, ce sont des questions aussi importantes que celle du rayonnement de notre pays, de sa capacité d’influence, qui transparaissent. Je crois qu’un suivi sera nécessaire, et pourra notamment être assuré par le rapporteur lors de l’examen budgétaire.

M. Didier Quentin. Dispose-t-on de statistiques sur les fonctionnaires d’origine française au sein des institutions européennes ? Je me souviens en effet que M. Michel Barnier expliquait que les Français étaient sur-représentés au niveau des postes de direction, mais sous-représentés à l’échelle de l’ensemble de la fonction publique européenne.

Par ailleurs, un suivi des carrières des personnes qui ont bénéficié d’une formation internationale en France est-il assuré ?

M. Étienne Blanc. La Suisse, voisine de ma circonscription, abrite un certain nombre d’organisations internationales, dont l’ONU. Des formations spécifiques sont-elles dispensées en France aux fonctionnaires internationaux de cette organisation ?

M. Émile Blessig. Le suivi d’une formation internationale est lié à la maîtrise de langues étrangères. Comment ce préalable est-il pris en compte dans les différentes filières de formation ?

M. Bernard Derosier, rapporteur. Il existe sûrement des statistiques sur le nombre de fonctionnaires français dans les institutions communautaires mais je ne dispose pas de ces chiffres puisque mon rapport portait exclusivement sur les formations.

Pour répondre à M. Étienne Blanc, lorsque l’ONU a besoin de formations pour ses fonctionnaires, l’ENA fait partie des organismes pouvant être retenus pour délivrer ces formations.

S’agissant des problèmes de langue, l’ENA propose aussi des formations en anglais ou en espagnol. De plus, dans le cadre européen, la question de la langue est liée à la politique du Secrétariat général aux affaires européennes en matière de promotion de l’influence française dans les nouveaux États membres de l’Union européenne. Comme la présidence française de l’Union européenne a été reconnue comme efficace par les autres États membres, la préparation française à la présidence est devenue une référence. Les États qui vont assurer la présidence font donc souvent former leurs fonctionnaires par l’ENA. Tout cela montre que la langue ne constitue pas un problème, d’autant plus que l’on observe une revitalisation de l’usage du français.

Enfin, s’agissant du suivi des élèves, nous sommes encore dans une première phase. Il serait souhaitable de désigner un pilote, éventuellement auprès du Premier ministre ou du ministre des affaires étrangères, pour assurer une meilleure coordination et instaurer un suivi qui aujourd’hui n’existe pas. Pour les fonctionnaires français, le fait d’avoir suivi une formation internationale est souvent un plus dans leur carrière, mais n’est pas pris en compte en tant que tel dans la gestion des ressources humaines.

Conformément à l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale, la Commission autorise le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

●   Services du Premier ministre - Secrétariat général des affaires européennes

—  M. Gilles Briatta, secrétaire général

––  Mme Florence Ferrari, en charge du secteur coordination, prospective, modernisation, communication

●   Ministère du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État - direction générale de l’administration et de la fonction publique

—  M. Grégoire Parmentier, sous-directeur des politiques interministérielles

●   Ministère des affaires étrangères et européennes - direction de la coopération européenne

––  M. Fabrice Dubreuil, chargé de mission

●   École nationale d’administration

—  M. Bernard Boucault, directeur

—  Mme Françoise Camet, directrice de la formation permanente

—  M. Philippe Bastelica, directeur des relations internationales

●   Centre des études européennes de Strasbourg

—  M. François-Gilles Le Theule, directeur

●   MEGA-Alumni (association des anciens élèves du MEGA)

––  M. Marc Foglia, représentant de l’association en France

1 () Votre rapporteur tient à remercier les services de l’ENA pour le caractère très complet et la qualité des informations qu’ils ont fournies à votre rapporteur à l’occasion de leur audition.

2 () Cette disposition figurait à l’article 44 du décret n° 82-819 du 27 septembre 1982 relatif aux conditions d’accès, au régime de la scolarité et à l’administration de l’École nationale d’administration.

3 () L’ENA n’a toutefois pas repris l’intégralité des fonctionnaires de l’institut, certains ayant été reclassés dans d’autres administrations. La fusion a permis, en effet, de réaliser des économies d’échelle.

4 () En 2006, les activités de recherche ont été confiées au Centre d’expertise et de recherche administrative.

5 () Le CEES était financé notamment par l’ENA, le Centre national de la fonction publique territoriale, l’École des mines, l’École nationale de santé publique et l’École nationale de la magistrature.

6 () Le CEES bénéficie d’un budget annexe au budget de l’ENA. Son directeur est l’ordonnateur secondaire de ce budget annexe.

7 () Le décret n° 2000-1031 du 18 octobre 2000 modifiant le décret n° 84-588 du 10 juillet 1984 relatif aux instituts régionaux d’administration a précisé que les IRA « collaborent à des actions de coopération administrative internationale » et peuvent passer des conventions « avec tout organisme compétent au titre de la coopération administrative internationale ».

8 () Les écoles nationales d’application des cadres territoriaux (ENACT) sont les écoles du CNFPT qui assurent la formation initiale des cadres territoriaux de catégorie A à l’issue de leur concours ou de leur promotion interne.

9 () L’Euro-Institut de Kehl est un organisme franco-allemand de formation continue et de conseil en coopération transfrontalière, créé en 1993 sous la forme d’un groupement local de coopération transfrontalière. Il organise notamment des actions franco-allemandes de formation continue dans tous les champs de l’administration publique en France et en Allemagne. Il s’est spécialisé dans la coopération transfrontalière pour la région du Rhin supérieur.

10 () Il s’agit du montant minimum permettant d’être représenté au conseil d’administration.

11 () Le partenariat euro-méditerranéen, ou processus de Barcelone, a été initié en novembre 1995 par la Conférence euro-méditerranéenne des ministres des Affaires étrangères de Barcelone, qui faisait suite à une décision du Conseil européen.

12 () La limite d’âge pour participer à ce cycle est de 35 ans.

13 () Ils ne suivent donc pas le module « Gestion et management publics ».

14 () La création du Cycle des hautes études européennes fait suite au comité interministériel sur l’Europe du 16 décembre 2005.

15 () Le CEES travaille, par exemple, avec l’École des hautes études en santé publique, l’École nationale de la magistrature ou l’Institut national des études territoriales (INET).

16 () La subvention versée par l’État en 2008 s’élevait à 31,3 millions d’euros.

17 () Elle consiste en 35 jours de formation répartis sur 10 mois.

18 () Les dépenses du CEES sont passées de 2,27 à 3,66 millions d’euros.

19 () En 2008, les frais de participation étaient de :

–  3 000 euros pour les membres de syndicats ou d’organisations non gouvernementales (ONG) et les représentants des cultes ;

––  6 000 euros pour les élus et les fonctionnaires ;

––  12 000 euros pour les membres du secteur public ou du secteur privé des membres de l’Union européenne ;

––  15 000 euros pour les membres du secteur privé d’États non membres de l’Union européenne.

20 () En 2006, le montant de cette subvention était de 79 327 euros.

21 () Le réseau des anciens élèves de l’ENA est parfois mobilisé par les ambassadeurs, mais l’intérêt porté à ce réseau est très inégal.


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