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N° 3864

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 19 octobre 2011.

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

en application de l’article 145 du Règlement

AU NOM DE LA MISSION D’INFORMATION
RELATIVE À L'ANALYSE DES CAUSES DES ACCIDENTS DE LA CIRCULATION
ET À LA PRÉVENTION ROUTIÈRE (1)

TOME I : Rapport et annexes

Président

M. Armand JUNG,

Rapporteur

M. Philippe HOUILLON,

Députés.

——

La mission d’information est composée de :

M. Armand Jung, président ; M. Guy Geoffroy, Mme Françoise Hostalier, M. Alfred Trassy-Paillogues, M. Jean-Jacques Urvoas, vice-présidents ; Mme Pascale Gruny, M. François Rochebloine, M. François de Rugy, M. Gérard Voisin, secrétaires ; M. Philippe Houillon, rapporteur ; M. Jean-Jacques Candelier, M. René Dosière, M. Olivier Dosne, M. Jean-Paul Garraud, M. Jérôme Lambert, M. Gilbert Le Bris, M. Marc Le Fur, M. Jean-Louis Léonard, Mme Annick Lepetit, M. Philippe Meunier, M. Jacques Myard, M. Henri Nayrou, M. Dominique Raimbourg, M. Michel Raison, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean-Marc Roubaud, M. Rudy Salles, M. Alain Suguenot, M. Jean-Louis Touraine, M. Christian Vanneste, M. Alain Vidalies, M. Michel Voisin.

AVANT-PROPOS DU PRÉSIDENT DE LA MISSION 9

INTRODUCTION 13

PREMIÈRE PARTIE : APRÈS DES ANNÉES DE PROGRÈS HISTORIQUES, LA BAISSE DE L’ACCIDENTALITÉ ROUTIÈRE SEMBLE MARQUER LE PAS 27

I. – DES PROGRÈS HISTORIQUES ONT ÉTÉ ACCOMPLIS EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE, NOTAMMENT DEPUIS 2003 27

A. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE S’EST CONSIDÉRABLEMENT AMÉLIORÉE EN FRANCE DEPUIS 1972 27

B. CES AMÉLIORATIONS SONT LE FRUIT D’UNE POLITIQUE VOLONTARISTE ET AMBITIEUSE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE 30

II. – CETTE TENDANCE A CONNU UN INFLÉCHISSEMENT RÉCENT 32

A. LES CAUSES MULTIPLES DES MAUVAIS CHIFFRES DU DÉBUT DE L’ANNÉE 2011 33

B. LA RÉPONSE FORTE DU CISR DU 11 MAI 2011 36

III. – POUR PROGRESSER, UNE ANALYSE PRÉCISE DES CAUSES DES ACCIDENTS EST NÉCESSAIRE 38

A. DES SOURCES D’INFORMATION VARIÉES MAIS PERFECTIBLES 38

1. Les sources statistiques de l’ONISR 39

2. Les recherches et études scientifiques 41

B. LES PRINCIPALES CAUSES D’ACCIDENTS 42

1. La vitesse, une cause pas comme les autres 44

2. La conduite sous l’emprise de substances psychoactives, cause majeure d’accidents 46

a) L’alcool, première cause d’accidents 46

b) Les drogues, facteur aggravant ? 49

c) Les médicaments 50

3. Les défauts d’attention et l’hypovigilance 50

a) Les effets des distracteurs, dont le téléphone portable 51

b) Inattention et hypovigilance 53

4. Les causes tenant aux véhicules et aux infrastructures 54

a) Les véhicules 54

b) Le cas particulier des deux-roues motorisés 55

c) Les infrastructures 56

C. UNE DISTRIBUTION INÉGALE DES RISQUES 57

1° Des hommes, jeunes,… 58

a) Le sexe, principale variable 58

b) L’âge 58

2° …, en tant qu’usagers vulnérables,… 61

3° …sur une route départementale ou communale… 63

a) Le type de réseau 63

b) La configuration de l’accident 64

4° …plutôt aux beaux jours et un vendredi ou un samedi soir 66

DEUXIÈME PARTIE : UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE NE PEUT ÊTRE QU’UNE POLITIQUE PARTAGÉE 69

I. – UNE MARGE DE PROGRESSION ENCORE IMPORTANTE 69

A. L’INSÉCURITÉ ROUTIÈRE, UN GRAND GÂCHIS 69

1. Un enjeu humain majeur 69

2. Un coût économique considérable 71

B. UN RETARD TOUJOURS IMPORTANT SUR LES MEILLEURS PAYS EUROPÉENS 73

C. 2 000 MORTS SUR LES ROUTES EN 2020, UN OBJECTIF ATTEIGNABLE AVEC UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE AMBITIEUSE ET PARTAGÉE 75

II. – SIX PRINCIPES CARDINAUX POUR UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE AMBITIEUSE ET PARTAGÉE 77

A. UNE DÉMARCHE SYSTÉMIQUE 77

1. La globalité : proposer une vision de la sécurité routière 77

a) Une politique réellement interministérielle 78

b) Une politique pluriannuelle 83

2. L’information et la communication 85

a) L’une des missions principales de la sécurité routière 85

b) Une mission à adapter 86

B. UNE DÉCISION SEREINE 88

1. L’objectivité : des décisions fondées sur les résultats scientifiques 88

2. La concertation avec les différents acteurs 91

a) Revivifier le « Parlement de la sécurité routière » 91

b) Organiser une concertation de proximité 93

C. UNE POLITIQUE JUSTE 95

1. La transparence : les usagers ne doivent pas douter des intentions de l’État 95

a) Les radars appauvrissent l’État, enrichissent les usagers et la société dans son ensemble 95

b) « Contrôler sans piéger », un principe à afficher 97

c) Les radars feux rouge, un dispositif à évaluer 97

2. L’équité : la politique répressive doit être perçue comme juste 99

a) Soumettre l’ensemble des usagers aux mêmes règles 99

b) Récompenser les conduites vertueuses 101

c) Mieux prendre en compte la situation des victimes et de leur famille 103

d) Améliorer le fonctionnement du permis à points 104

TROISIÈME PARTIE : LES COMPORTEMENTS DEMEURENT LE PRINCIPAL GISEMENT DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE, JUSTIFIANT UNE ACTION PUBLIQUE RÉSOLUE 107

I. – NE PAS RELÂCHER L’EFFORT SUR LA VITESSE 107

A. LE DÉPLOIEMENT DES RADARS A EU DES EFFETS CONSIDÉRABLES SUR L’ACCIDENTOLOGIE ROUTIÈRE 107

B. CONFORTER LA POLITIQUE DE CONTRÔLE EN RENFORÇANT SON ACCEPTABILITÉ SOCIALE 111

1. Lever l’hypocrisie liée au bridage des véhicules 111

2. Adapter la répression du facteur vitesse à l’accidentologie 113

3. Promouvoir l’équité devant les contrôles 115

a) Les deux-roues motorisés 115

b) Les conducteurs étrangers 117

c) Le tiers conducteur 118

d) Les panneaux avertisseurs de radars 119

4. Poursuivre et diversifier le déploiement des radars 119

II. – ALCOOL, DROGUES ET MÉDICAMENTS : DES CONTRE-INDICATIONS FORMELLES 121

A. LE FLÉAU DE L’ALCOOLISME AU VOLANT N’EST PAS UNE FATALITÉ 121

1. L’autodépistage : une étape vers la responsabilisation 121

2. Quand la persuasion ne suffit plus : l’éthylotest anti-démarrage 123

3. Alcoolémies fortes, sanctions aggravées 124

4. Les conducteurs novices et l’alcool 125

B. DROGUES ET CONDUITE : UN RISQUE ÉMERGENT QUI DOIT ÊTRE MIEUX JUGULÉ 126

C. LA CONDUITE SOUS MÉDICAMENTS : INFORMATION ET RESPONSABILITÉ 128

III. – LES « DISTRACTEURS » UN RISQUE CROISSANT QUI APPELLE DES DÉCISIONS FORTES ET IMMÉDIATES 129

A. TÉLÉPHONER ET CONDUIRE, NE FAUT-IL PAS ÉVOLUER ? 130

B. LES AIDES À LA CONDUITE : UN USAGE À ENCADRER 132

C. LES AUTRES ÉCRANS 137

IV. – FORMATION ET PRÉVENTION : LA DIFFUSION DES BONNES PRATIQUES 137

A. LA FORMATION 138

1. Le continuum éducatif : des acquis certains, des progrès toujours possibles 138

2. Faciliter l’accès au permis de conduire 139

3. Les formations post-permis 140

B. LA PRÉVENTION DU RISQUE ROUTIER PROFESSIONNEL 141

1. Le monde du travail, un milieu favorable à la sensibilisation et à la formation à la sécurité routière 141

2. La responsabilité de l’employeur dans la diffusion des bonnes pratiques 142

C. LA PRÉVENTION DES CONDUITES SANS ASSURANCE ET SANS PERMIS 143

V. – L’APTITUDE À CONDUIRE TOUT AU LONG DE LA VIE 144

A. LE PERMIS DE CONDUIRE : SÉSAME À VIE OU PERMIS À DURÉE DÉTERMINÉE ? 144

B. UNE FAUSSE PISTE : LA STIGMATISATION DES SENIORS 145

C. UN ENJEU PLUS LARGE : CONCILIER LE DROIT INDIVIDUEL À LA MOBILITÉ DE CHACUN ET LE RESPECT DE LA SÉCURITÉ COLLECTIVE 147

QUATRIÈME PARTIE : LES VÉHICULES ET LES INFRASTRUCTURES CONTRIBUENT AUSSI, DE MANIÈRE COMPLÉMENTAIRE, À L’AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE 149

I. – DES VÉHICULES PLUS SÛRS 149

A. DES VÉHICULES PLUS PROTECTEURS DE LEURS OCCUPANTS COMME DES AUTRES USAGERS DE LA ROUTE 149

1. Des progrès constants 149

2. Des véhicules désormais sûrs 150

B. DE NOUVELLES AVANCÉES SONT À PORTÉE DE MAIN 151

1. Le système LAVIA 151

2. Simples accessoires ou vraies avancées : un tri à opérer 152

C. LE CAS PARTICULIER DES DEUX-ROUES MOTORISÉS 154

1. Le système de freinage ABS 155

2. S’équiper pour mieux se protéger : une attitude de bon sens 155

3. Des cyclomoteurs mieux contrôlés 156

4. Un accès maîtrisé aux engins les plus puissants 157

5. Le contrôle technique : éliminer les engins dangereux 158

II. – LES INFRASTRUCTURES : UNE ROUTE PLUS LISIBLE ET QUI CORRIGE LES ÉCARTS DE CONDUITE 159

A. UNE ROUTE PLUS LISIBLE 159

B. UNE ROUTE QUI CORRIGE LES ÉCARTS DE CONDUITE 160

1. Pour une plus grande cohérence du réseau 161

2. Une route « qui pardonne » 162

a) Moins d’obstacles 162

b) Plus aucun passage à niveau 163

c) La route qui tient éveillé 163

C. VERS UNE ROUTE INTELLIGENTE ? 164

III. – LE PARTAGE DE LA ROUTE, REFLET DE NOTRE CAPACITÉ AU VIVRE ENSEMBLE 165

A. LE PARTAGE DE L’ESPACE PUBLIC ENTRE LES USAGERS : CIVISME ET COURTOISIE 166

B. DE NOUVELLES RÈGLES POUR DE MEILLEURS USAGES ? 167

1. La remontée interfilaire des deux-roues motorisés 167

2. La place des bicyclettes dans le trafic 167

3. La « sanctuarisation » des passages piétons 168

ANNEXE 1 : SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS 171

ANNEXE 2 : ÉTUDE RÉALISÉE PAR L’IFSTTAR À LA DEMANDE DE LA MISSION D'INFORMATION 199

ANNEXE 3 : DOSSIER DE PRESSE DU CISR DU 11 MAI 2011 259

ANNEXE 4 : COMPARAISONS INTERNATIONALES 287

EXAMEN ET ADOPTION DU RAPPORT 305

AVANT-PROPOS DU PRÉSIDENT DE LA MISSION

Cinq mois après sa création par la Conférence des Présidents, la mission d’information relative à l’analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière achève aujourd’hui ses travaux par l’adoption du présent rapport.

Cette mission d’information que j’ai eu l’honneur de présider, j’en ai mené les travaux avec deux soucis réels, d’une part, celui de faire le point sur un sujet tellement débattu qu’il était devenu indispensable de retrouver quelques repères ; et, d’autre part, celui de rechercher, autant que faire se peut, un consensus sur une question qui nous interpelle tous, quelles que soient nos convictions politiques : Comment sauver des vies sur la route ?

En 2010, les statistiques de la sécurité routière ont enregistré 100 000 blessés et un tout petit peu moins de 4 000 morts sur les routes. Il s’agit là d’un bilan très lourd. Il y a, derrière ces chiffres, des drames humains immenses, que, de tout cœur, l’on aurait voulu avoir pu éviter.

À cela s’ajoute la question du coût social des blessés. Le rapport de l’Observatoire national de la sécurité routière avance le chiffre de 23,4 milliards d’euros. C’est un coût énorme. Et en termes humains, comme je l’ai dit, il n’y a pas de prix.

Dans le cadre des auditions de la mission, nous avons réalisé un très gros travail d’écoute pour renouer des fils qui s’étaient peu à peu distendus entre les parties prenantes à ce dossier, après le déclin, depuis environ deux ans, du Conseil national de la sécurité routière, et après les mesures un peu hâtives, et mal comprises, du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 11 mai 2011. C’est ainsi que la mission a entendu pas loin de 170 personnes, des spécialistes de tous bords : scientifiques, constructeurs, membres des associations de défense des victimes, avocats, etc., et je remercie ici, tout particulièrement, tous ceux qui ont permis que ce travail s’accomplisse.

À un moment donné, après les incompréhensions qui avaient suivi la tenue du dernier CISR, on avait l’impression que le dialogue était tellement rompu que l’on ne pourrait plus rien préconiser qui fasse consensus, dans le domaine de la sécurité routière, avant vraiment longtemps. C’était un peu l’avis, notamment, de M. Robert Namias, ancien Président du CNSR. Par ailleurs, M. le Professeur Claude Got avait exprimé fortement, dans son audition, l’idée que la mission ne serait peut-être pas en état de conclure ; que les voix étaient tellement discordantes que c’était désormais mission impossible.

Et pourtant nous sommes arrivés, grâce à nos entretiens, à formuler un audit dans des délais raisonnables. Nous avons sélectionné 39 propositions pour faire reculer les accidents de la circulation, dans le cadre d’un objectif visant à atteindre un seuil de 2000 morts sur les routes, d’ici à la fin de la décennie. Elles répondent à plusieurs objectifs que, je crois, nous avons réussi à concilier : prévention, formation, vigilance et pédagogie.

Il y a, dans le rapport, l’énoncé de mesures très importantes : l’interdiction du kit mains libres en ville, du moins dans sa conception actuelle (c'est-à-dire avec fil et oreillettes), l’apparition de nouveaux droits en appel pour les victimes, l’incitation à développer le LAVIA (c'est-à-dire le limiteur de vitesse s’adaptant à la vitesse autorisée) en première monte sur les véhicules de série, etc. D’autres mesures sont plus techniques, telles que le contrôle technique des motocyclettes à la revente ou l’obligation, à terme, de les équiper d’un ABS.

Mais toutes, cependant, doivent concourir à ce que le rapport serve de boîte à outil conceptuelle pour tous les décideurs, quel que soit leur bord politique, pendant un certain nombre d’années.

Dans nos analyses, nous en sommes d’ailleurs vite arrivés à l’idée, également partagée par l’IFSTTAR (Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux), qu’il n’y avait pas une mesure phare qui serait capable, à elle seule, de produire des résultats significatifs, comme autrefois, par exemple, le port de la ceinture de sécurité, mais qu’il fallait procéder à une analyse systémique, reposant sur une série de mesures ciblées, visant tous les secteurs de la société. Nous sommes partis de l’idée que tout était affaire de comportement et qu’il fallait donc agir sur toutes les composantes de la prévention et de la circulation routières, en essayant de tendre naturellement vers un maximum d’acceptabilité sociale, étant entendu qu’il ne peut pas y avoir de politique durable, si aucun citoyen ne veut accepter les mesures de cette politique ou même simplement se rallier à ses objectifs.

Il y a enfin, dans le rapport, une question qui est revenue souvent, au cours des entretiens, et que nous adressons aux constructeurs : est-il cohérent, est-il acceptable que l’on produise des voitures qui peuvent dépasser le 230 km/h, alors que la limitation maximale sur autoroute est le 130 ? Il faudrait mettre fin à cette hypocrisie qui consiste à permettre d’acheter des voitures surpuissantes puis à sanctionner lourdement la vitesse, et développer résolument la technique du bridage des véhicules.

Nous avons voulu ne pas trop tarder dans le rendu des conclusions du rapport, afin que l’on ait le temps, ensuite, de faire les modifications législatives ou réglementaires qui tiendront compte de l’avis et de l’expertise du Parlement et qui traduiront dans l’ordre juridique nos propositions.

Pour cela, nous disposons, comme on dit dans le vocabulaire de la défense, d’une « fenêtre d’opportunité ». Le Gouvernement, à la suite du Comité interministériel du 11 mai dernier, a lancé des pistes, proposé des réformes. Le 25 mai, le lendemain du jour de la création de notre mission, M. le Premier ministre a indiqué qu’aucune modification législative ou réglementaire ne serait décidée, dans le domaine de la circulation ou de la prévention routières, avant de connaître les conclusions de la mission. Ce contexte est donc très favorable pour faire passer nos idées, pour traduire de manière efficace le résultat de nos travaux sur le plan juridique. Nous avons fait ce qu’il fallait ; au Gouvernement aussi de prendre ses responsabilités, au moins pour tout ce qui relève du pouvoir réglementaire.

J’ajoute encore un point mais qui exprime une conviction forte.

Les usagers veulent évidemment de la sécurité, ce qui se comprend aisément. D’ailleurs nul ne conteste que les mesures prises depuis 2002 et axées autour de la répression de la vitesse ont fait reculer les accidents et qu’elles ont apporté plus de sûreté, qu’elles ont permis de circuler dans des conditions plus rassurantes.

La vitesse, on l’a vu pendant tout le temps qu’ont duré les travaux de la mission, et nos interlocuteurs ont été à peu près tous unanimes sur ce point, n’est pas une cause comme les autres. Il n’est évidemment pas question de dire qu’il suffit de ne pas rouler pour ne pas avoir d’accidents ; mais on sait qu’au-delà de 130, sur les meilleures routes, on multiplie par 3 ou 4 le risque d’accident et d’accident grave, voire mortel.

Par conséquent, je suis intimement et fermement convaincu que tout signe donné à la vitesse, et à une moindre sanction en cas de dépassement de la vitesse autorisée, est une mauvaise chose. Je partage absolument le propos du Préfet Guyot qui dit, dans son audition, qu’il faut « freiner le peloton ». Tous les progrès en accidentologie obtenus depuis 2002 ont été liés à une baisse de la vitesse moyenne de 10 km/h. La moindre mesure semblant aller à l’inverse ne pourra avoir que des effets désastreux. Et, en matière de sécurité routière, tous les désastres se paient cash.

Partant, alors même que ma préoccupation constante a été de rechercher un consensus sur ce rapport, je ne peux m’associer à une mesure présentée dans ce dernier, une seule, la proposition 11, celle qui consiste à dispenser l’automobiliste de la retenue d’un point, lorsque, sur autoroute ou sur voie à grande circulation, il dépasse, pour la première fois en 6 mois, de 10km/h, le seuil de la vitesse autorisée, c'est-à-dire la barre des 130 km/h. C’est la raison pour laquelle je me suis abstenu lors du vote de ce rapport.

Il me paraissait important de le souligner avec force ici.

De même, je regrette que les membres de la mission aient rejeté l’instauration d’un taux d’alcoolémie zéro pour les titulaires du permis probatoire.

Pour le reste, j’espère vraiment qu’avec tous les députés membres de la mission, nous aurons fait, avec ce rapport, une œuvre utile ; et j’ajouterais même que si, avec l’ensemble des mesures préconisées, nous ne parvenions, par impossible, à ne gagner qu’une seule vie au final, je n’hésiterais pas à dire, néanmoins, que nous n’aurions pas perdu notre temps.

MESDAMES, MESSIEURS,

La mission d’information relative à l’analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière, créée par la Conférence des Présidents le 24 mai 2011, est née d’une question politique ponctuelle.

Le Gouvernement, à la suite de mauvais résultats statistiques en matière d’accidents de la route, au cours des quatre premiers mois de l’année 2011, a décidé, dans le cadre d’une lutte résolue contre la vitesse au volant, de supprimer les panneaux indicateurs de radars, d’augmenter le nombre de ces radars et d’interdire les avertisseurs embarqués dans les véhicules. Les usagers, et un certain nombre de députés, se sont émus de ces mesures, les premiers ayant le sentiment que l’État cherchait à les « piéger », et les seconds que l’accidentologie était un phénomène complexe et que, sans doute, la vitesse excessive ne devait pas être la seule cause de l’insécurité routière, dont on constatait la remontée en puissance et les effets dramatiques. L’Assemblée nationale s’est donc résolue, pour faire le point sur ces différentes questions, à créer une mission d’information sur le sujet.

En fait, très vite, au cours des travaux de la mission, la question des radars, et de l’interdiction des appareils embarqués, de type « coyote » ou autres, a perdu de son acuité, d’abord pour des raisons extérieures à elle : en effet, le Gouvernement, soucieux de favoriser les conditions d’un consensus en matière de sécurité routière, a décidé de remplacer, selon certaines modalités sur lesquelles nous reviendrons dans le corps du présent rapport, les panneaux indicateurs par des radars pédagogiques. D’autre part, un accord a été passé avec l’AFFTAC (l’Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies et d’aides à la conduite) pour remplacer les avertisseurs de radars par des équipements aux finalités plus larges, destinés, en définitive, à servir réellement d’aide à la conduite et à détecter les points noirs de la circulation routière, ainsi que les zones à risques.

Ensuite, la question des radars a été replacée par la mission elle-même dans un contexte plus large, celui de l’accidentologie routière, conformément à l’objectif qui lui avait été confié par la Conférence des Présidents.

Soucieuse de dégager des orientations nouvelles pour une politique de sécurité routière vraiment efficace, la mission a proposé un certain nombre de solutions susceptibles d’apporter du mieux tout de suite, mais aussi, au-delà, des solutions qui peuvent projeter leurs effets et faire reculer la mortalité sur les routes, de manière significative, d’ici à la fin de la décennie. En fait, avec ces préconisations, l’objectif de la mission a été de rendre plausible l’objectif d’au plus 2 000 morts, d’ici à la fin de l’année 2020.

Grâce aux nombreuses auditions et tables rondes qu’elle a organisées, la mission s’est retrouvée dépositaire d’une masse considérable d’informations qui lui ont permis de faire un bilan aussi exhaustif que possible des connaissances actuelles. À cet égard, l’étude commandée à l’IFSTTAR (l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux) lui a fourni une précieuse synthèse des analyses récentes parues dans la littérature scientifique sur l’accidentologie (elle est annexée au présent rapport). Dès lors, ce rapport a vocation à s’adresser à tout acteur oeuvrant dans le domaine de la sécurité routière, et à tout décideur politique, quelle que soit sa famille de pensée. Tous pourront y puiser des solutions, non seulement pendant la période qui suivra immédiatement la publication du document, mais, sans doute, encore plusieurs années à venir.

Mais, à présent, votre rapporteur voudrait encore, en propos liminaires, développer quelques points, qui lui paraissent être des acquis très importants issus des travaux de la mission, et qui correspondent aussi chez lui à des convictions fortes.

La conduite et la circulation routière, des enjeux nationaux

La conduite, que ce soit celle d’une automobile ou d’un deux-roues motorisé, est aujourd’hui indissociable de la plupart des activités liées à une économie développée.

Elle représente une forme certaine de liberté, celle d’aller et de venir, de manière rapide et aussi confortable que possible, d’un point à un autre d’une sphère géographique donnée. Elle est aussi une garante de la mobilité. Car, dans notre société, elle-même dominée par le mouvement, la performance, l’efficacité et la vitesse, les moyens de transport, individuels ou collectifs, et notamment la voiture, deviennent des instruments absolument indispensables, des compléments inséparables de la vie moderne.

Parler de la voiture, ce n’est donc pas seulement mentionner un vecteur de transport. C’est aussi évoquer un élément lié à tout un mode de vie. En tant que telle, la voiture touche au moins 40 millions de personnes, puisque, sans que l’on sache évaluer précisément le parc des voitures circulant en France, on s’accorde généralement à reconnaître que l’effectif des automobiles possédées par les Français s’élèverait à 40 ou à 45 millions de véhicules.

En conséquence, les pouvoirs publics se doivent de s’assurer que la circulation routière s’effectue dans de bonnes conditions, et notamment des conditions optimales de sécurité. Compte tenu de l’importance du trafic, du nombre de personnes concernées et du rôle prépondérant de l’automobile et des deux roues dans le mode d’organisation de notre société, l’objectif de sécurité routière s’avère être un enjeu politique primordial.

Or, si la conduite peut être un bonheur, force est de constater que la pratique n’est pas toujours heureuse. En fait, le nombre des accidents de la circulation, des morts et des blessés, malgré tous les efforts déployés, de longue date, par les gouvernements successifs, reste considérable.

Aujourd’hui, les accidents s’élèvent à un peu plus de 69 000 par an. Selon les statistiques, près de 100 000 personnes sont blessées chaque année sur la route, dont plus de 31 000 doivent être hospitalisées. 4 000 personnes perdent la vie au cours de l’accident (dont 19 % ne sont pas les conducteurs mais les occupants des véhicules) et l’on estime qu’autant de personnes, soit également 4 000, restent handicapées à vie. En 2000, avant l’accent mis sur la politique de sécurité routière, le chiffre des décès était encore de plus de 8 000. En 1986, moment où l’on a enregistré un pic en matière d’accidentologie, le nombre des morts s’élevait à près de 11 000 et le nombre des blessés graves à plus de 63 000.

Les statistiques européennes sont d’ailleurs, elles aussi, préoccupantes. Selon un rapport de la commission des transports et du tourisme du Parlement européen, déposé en juillet 2011 et consacré à la sécurité routière, le nombre des tués sur les routes de l’Union européenne se serait élevé à plus de 35 000 personnes en 2009 ; le nombre des blessés, pour sa part, se serait élevé à 1 500 000.

En ce qui concerne le coût social de l’insécurité routière, on l’évalue, en France, en 2010, à 23,4 milliards d’euros, soit environ 1,3 % du PIB, chiffre qui est très certainement sous-estimé car ne prenant pas en compte l’ensemble des coûts induits par cette insécurité. En revanche, on doit noter que, dans ce coût, figure (pour une somme d’environ 4,5 milliards d’euros) le montant relatif à la prise en charge des conséquences corporelles des accidents pour les blessés, qui présentent souvent des séquelles à vie.

L’enjeu social et humain s’ajoute donc à l’enjeu politique, et rend anecdotique l’idée selon laquelle les décisions prises en matière de circulation auraient vocation à remplir les caisses de l’État. En effet, les amendes issues du contrôle-sanction automatisé (CSA) ne génèrent qu’environ 550 millions d’euros par an, dont l’essentiel est affecté à l’amélioration de la sécurité routière.

D’autre part, il convient d’observer que les questions de sécurité routière s’inscrivent dans un environnement économique dont il faut tenir compte, mais qui peut aider à favoriser la prévention et la diminution des accidents.

Le chiffre d’affaires de l’industrie automobile représente, en France, en 2010, la somme de 109 milliards d’euros. Le marché national est loin d’être saturé ; l’âge moyen des véhicules est de 8,3 ans ; la durée de renouvellement du parc est de 15 ans et les véhicules neufs représentent seulement 20 % du trafic. Cela veut dire que le secteur de l’automobile est un marché porteur, dont le potentiel est fort et qui incorpore beaucoup de valeur ajoutée, notamment dans le domaine de la recherche et du développement. Ce marché peut donc parfaitement s’adapter à toutes les mutations technologiques visant à rendre les voitures plus sûres (par exemple l’installation du limiteur de vitesse s’adaptant à la vitesse autorisée – ou Lavia – en première monte sur les véhicules de série). Ce dynamisme constitue un atout considérable, dans le cadre d’une politique volontariste axée sur la sécurité des transports.

Au total, l’accidentalité, dans le domaine de la circulation routière, reste forte en France.

Nous n’en sommes pas, certes, au stade des chiffres considérables des accidents de la vie courante. On recensait en effet en ce domaine, en 2009, 11 millions d’accidents, 19 000 décès (53 % de femmes et 47 % d’hommes) et près de 4,5 millions de blessés. Néanmoins, si l’on compare nos chiffres d’accidents de la route avec les chiffres anglais par exemple – en 2010, on enregistre en Grande-Bretagne 1 857 morts à ce titre –, on peut mesurer tout l’écart qui nous sépare de résultats vraiment favorables et tout le chemin qui nous reste encore à parcourir. Améliorer la sinistralité dans le domaine des accidents de la route reste une grande cause nationale.

Une causalité multifactorielle

Il ressort des travaux de la mission d’information que les causes des accidents, et notamment des accidents mortels, sont souvent multiples. En fait, il n’y a pas une grande cause qui permettrait de fédérer sous son égide tous les accidents et, partant, de promouvoir une seule et même solution dont les effets seraient absolument déterminants. À cela s’ajoute le fait que de nombreuses causes peuvent intervenir pour un même accident, ce qui complique encore la tâche du décideur.

Traditionnellement, on recherche les causes des accidents derrière le comportement des usagers, l’état – plus ou moins bon – des véhicules ou la qualité – plus ou moins grande – des infrastructures.

Du point de vue de l’usager, on peut estimer que le défaut de vigilance joue toujours un rôle important dans la survenue des accidents, qu’il soit provoqué par un distracteur, une faible aptitude à la conduite, l’absorption d’alcool ou de stupéfiants… En ce qui concerne les éléments matériels liés aux infrastructures et aux véhicules, tout ce qui touche à l’entretien joue un rôle essentiel.

La vitesse, pour sa part, joue un rôle particulier, et en quelque sorte transversal, en tant que cause possible de certains accidents et facteur aggravant pour tous les autres. En fait, autant que cause d’accident, la vitesse est facteur de risque. Plus on roule vite, et plus il est certain, si quelque chose se passe, que l’accident qui s’en suivra sera grave.

Au-delà de ce qui vient d’être énoncé, de grandes catégories d’accidents peuvent néanmoins être distinguées. Elles font l’objet de quantifications, notamment de la part de l’ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière). Il ressort de son rapport portant sur l’année 2010 que le taux légal d’alcoolémie serait dépassé dans environ 31 % des accidents mortels pour au moins l’un des conducteurs impliqués. Le respect de l’ensemble des limitations de vitesse aurait permis d’éviter 18 % des morts sur la route. Le téléphone portable serait impliqué dans environ 10 % des accidents corporels. Le défaut de port de la ceinture de sécurité serait responsable de 8 % des décès en cas d’accident. 7 % des morts seraient dues au non respect des distances de sécurité. 3 % à la fatigue. Au total, la principale cause d’accidents aujourd’hui est donc la conduite sous l’emprise alcoolique.

Cette analyse doit être croisée avec celle des catégories d’usagers :

– Les hommes représentent 3/4 de l’accidentalité, contre 1/4 seulement pour les femmes.

– Les jeunes, et spécialement la classe d’âge 18-24 ans, représentent 21 % des personnes tuées sur la route, alors que cette classe d’âge ne représente que 9 % de la population française.

– Les personnes âgées de 75 ans et plus représentent près de 10 % de l’accidentalité.

– Les deux-roues motorisés représentent près de 23 % des tués pour 2 % du trafic

– Les piétons représentent près de 12 % des tués.

– Les cyclistes, enfin, près de 4 % des tués.

Au total, il existe deux catégories de population spécialement fragiles au regard de l’accidentalité : les deux-roues motorisés et les jeunes. On peut même ajouter que ces deux catégories à risque se recoupent, les jeunes étant fréquemment conducteurs de deux roues. En fait, près d’un usager de deux-roues motorisés tué sur deux a entre 25 et 44 ans.

On notera, par ailleurs, que 85 % des accidents ont lieu sur les routes départementales et communales, alors que les routes nationales ne sont concernées que par un peu plus de 9 % de l’accidentologie et que les autoroutes représentent 5 % de cette même accidentologie.

Bien entendu, on pourra trouver, dans le présent rapport, des dispositions qui tiennent compte de ces différents aspects des accidents de la circulation.

Le Comité interministériel sur la sécurité routière du 11 mai 2011

Mais les statistiques masquent une incontestable réalité : des progrès considérables ont été accomplis dans la lutte contre l’accidentalité routière.

La mise en œuvre d’une politique extrêmement active, à partir de 1973, et surtout à partir de 2002, a permis des progrès historiques. On évalue à environ 306 000 le nombre de vies épargnées depuis 1973 et à 26 800 depuis 2000.

Ces succès (diminution de moitié du nombre des morts en 10 ans) ont résulté, en particulier, de la combinaison de mesures basées sur la stricte application des règles liées au permis à points, sur les limitations de vitesse et sur le contrôle sanction automatisé.

À la fin de l’année 2010, notamment, on passe sous le seuil des 4 000 morts annuels. On enregistre 3 090 tués sur les routes et 78 000 blessés.

En avril 2011 néanmoins, on constate une pause dans la tendance globale à la baisse des accidents de la circulation et, même, on note un brusque retournement de la tendance. On enregistre en effet une augmentation de + 20 % dans le nombre des tués, après une progression de + 10 % de ce nombre au cours du premier trimestre de l’année 2011.

Le 11 mai 2011, s’est tenue la réunion d’un Comité interministériel sur la Sécurité routière (CISR). Un dispositif de 18 mesures est prévu pour contrecarrer la tendance constatée.

Parmi celles-ci, on peut distinguer les mesures suivantes : un excès de vitesse de plus de 50 km/h sera désormais un délit dès la première infraction ; téléphoner en conduisant, le téléphone tenu en main, sera sanctionné plus sévèrement avec une contravention de la 4ème classe (au lieu de la 2ème classe), soit de 90 à 375 euros, donnant lieu à un retrait de trois points du permis de conduire (au lieu d’un retrait de deux points) ; les écrans placés dans le champ de vision du conducteur seront également sanctionnés plus sévèrement et entraîneront un retrait de trois points et une amende de 1 500 € (contre 135 € d’amende et deux points de permis en moins) ; le Secrétariat d’État aux Transports mettra en place un label « voiture sûre » qui concernera le niveau d’équipement de sécurité des véhicules ; toute alcoolémie en situation de conduite supérieure à 0,8 g par litre d’air expiré sera sanctionnée par le retrait de 8 points contre 6 actuellement ; les plaques d’immatriculation pour les deux-roues motorisés seront de plus grande taille, pour rendre plus opérants les contrôles ; les conducteurs de motos et de trois roues devront porter obligatoirement un équipement rétro-réfléchissant ; ceux qui reprennent l’usage d’une moto après cinq années d’interruption devront suivre une formation ; les panneaux routiers avertissant de la présence de radars fixes seront supprimés ; de même, les cartes d’implantation des radars mobiles, souvent diffusées sur les sites Internet des préfectures ou dans la presse régionale, ne seront plus rendues publiques ; par ailleurs, 1 000 nouveaux radars seront déployés d’ici fin 2012 ; enfin, tous les avertisseurs de radars « embarqués » seront interdits.

Immédiatement, environ une quarantaine de panneaux signalant des radars fixes sont enlevés dans les départements.

On connaît ensuite les réactions que ce dispositif a suscitées, jusqu’à la création, le 24 mai 2011, de la mission d’information.

Rapidement, le ministre de l’Intérieur, M. Claude Guéant, annonce que l’on ne démontera pas davantage de panneaux « avant concertation locale » (2) (la concertation se faisant par le biais de commissions départementales réunissant des représentants de l’État et des élus). M. Guéant indique également que l’on favorisera les radars pédagogiques, prévenant les automobilistes qu’ils sont en dépassement de vitesse. « Il y aura toujours un radar pédagogique avant un radar fixe mais il y aura aussi des radars pédagogiques qui ne seront pas suivis de radars fixes » (3). En fait, les radars pédagogiques « seront implantés de façon aléatoire, parfois à plusieurs kilomètres en amont ; ils seront aussi en des endroits où il n’y a pas de radars » (4).

Par ailleurs, s’agissant des autres mesures du CISR, le Premier ministre s’est engagé à ce qu’aucune modification, législative ou réglementaire, dans le domaine de la circulation routière, ne soit plus décidée, avant de connaître les conclusions de la mission d’information parlementaire relative à l’analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière (5).

On reviendra sur le CISR du 11 mai 2011 dans le corps du présent rapport. Mais, tout de suite, on doit remarquer que, si l’on ne peut, à l’évidence, reprocher au Gouvernement d’avoir immédiatement réagi face à une mauvaise situation dans le domaine de l’accidentalité routière au cours des quatre premiers mois de l’année 2011 – quadrimestre qui fait suite à une année 2010 qui, elle-même, n’est pas si fameuse –, on peut regretter, cependant, que celui-ci ait centré ses mesures les plus notables, au fond, sur la répression de la vitesse. Cette attitude a provoqué, dans la population, un certain sentiment d’incompréhension, à cause du poids des petites infractions (dépassements de vitesse retenus de moins de 20 km/h) dans l’effectif total des infractions sanctionnées par le contrôle sanction automatisé (CSA). En fait, 42 % des contraventions et des pertes de points générées par le CSA concernent des dépassements égaux ou inférieurs à 20 km/h. Cet émoi, chez nos concitoyens, a pu paraître d’autant plus explicable que, d’une part, on n’est pas sûr que la lutte renforcée contre la vitesse – malgré le rôle essentiel de ce facteur dans l’accidentologie –, lorsqu’elle tend à se concentrer sur la répression des petits excès de vitesse, soit une mesure vraiment susceptible, aujourd’hui, de produire des gains additionnels significatifs de vies sauvées. D’autre part, il n’est pas certain que l’évolution de l’accidentalité, constatée en début d’année, perdure tout au long de la période 2011.

L’absence d’une mesure unique pour mettre fin à la mortalité sur les routes et la nécessité de conduire des actions sectorisées

Comme on l’a vu plus haut, grâce à des mesures successives, depuis l’obligation du port de la ceinture et les limitations des vitesses (1973), jusqu’au démontage des panneaux avertisseurs de radars, le nombre des familles endeuillées, en une petite quarantaine d’années, a été divisé par plus de quatre.

Pourtant, il est vrai que l’on se trouve probablement, aujourd’hui, à un palier dans la lutte contre l’insécurité routière.

Depuis 2006, les chiffres semblent s’être stabilisés autour de 4 000 morts par an. C’est un niveau en dessous duquel il n’est plus si facile de descendre, parce que les mesures classiques – et notamment la lutte contre la vitesse – commencent à marquer le pas.

Il n’est évidemment pas question de revenir sur les limitations de vitesse et sur le contrôle automatisé. Comme il a déjà été dit plus haut, la vitesse occupe toujours une place essentielle dans les accidents et que, si elle n’est pas toujours la cause principale de l’accidentologie, elle en est toujours une cause aggravante.

Néanmoins, on a le sentiment que le « plus gros » en termes de vies sauvegardées a été accompli au titre de la lutte contre la vitesse excessive, et qu’il faut maintenant trouver d’autres solutions, plus fines, plus sectorisées, pour préserver des vies, pas à pas, gisements par gisements, en fonction des grandes causes d’accidents.

Désormais, si l’on veut réduire d’une façon durable le nombre des morts sur les routes, il faut recourir, ainsi que le souligne l’IFSTTAR (l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux), non plus à quelques mesures phares, comme l’avaient été autrefois le port obligatoire de la ceinture de sécurité ou la multiplication des radars – car l’on serait sans doute en peine d’en trouver d’aussi efficaces aujourd’hui – mais à une approche systémique, c’est-à-dire une approche très fine agissant sur tous les secteurs de la société.

C’est la conjugaison de l’ensemble de ces mesures ciblées que l’on trouvera dans les pages qui suivent. Elles feront, sans nul doute, la preuve que la mortalité routière n’est pas une fatalité et qu’elle peut être réduite de manière tout à fait significative.

Bien entendu, les mesures de cette politique, à la fois ambitieuse et aussi très sectorisée, doivent également être empreintes d’une forte acceptabilité sociale. Si cette condition d’acceptabilité sociale se trouve remplie, il ne serait pas illusoire de penser que l’on pourrait atteindre l’objectif de 2 000 tués sur les routes d’ici la fin de la décennie.

Un appareil statistique riche mais complexe

Un acquis important des travaux de la mission d’information paraît être que les chiffres de l’accidentologie routière doivent être manipulés avec précaution.

Un travail de documentation très sérieux existe, qui est conduit, en particulier, par l’ONISR. Il faut souligner à ce titre que la sécurité routière est dotée d’un appareil statistique particulièrement riche et fait l’objet de nombreux travaux de recherche.

Cependant, il résulte de ce qui a été dit précédemment – c’est-à-dire la constatation que, dans un accident, plusieurs facteurs doivent toujours être pris en compte : la vitesse, l’alcool, l’état de la voiture, l’état de la route, la météorologie, l’hypovigilance, etc. – que l’on ne peut pas toujours définir de manière très précise, en fait, la part de ces différents facteurs dans chaque accident, et spécialement dans les accidents mortels.

Toutes les statistiques relatives aux causes des accidents sont donc toujours plus ou moins partielles ou plus ou moins sélectives. Des choix et une réflexion ont été conduits, au moment de leur élaboration, pour arrêter plutôt tel ou tel facteur, au détriment de tel autre. Ces choix ont reposé sur une approche de la réalité en fonction du plus probable. Et c’est bien précisément là ce que l’on peut reprocher aux statistiques. Elles représentent bien la réalité en fonction du plus probable ; mais il ne s’agit pas là de données totalement sûres.

C’est ainsi que, de manière très concrète, les statistiques de l’accidentologie peuvent présenter un certain décalage par rapport au réel et cela pour les motifs suivants :

– Comme la mission a pu le constater sur place, en Préfecture, les statistiques reposent sur trois grands types de tableaux réalisés par les forces de police : tout d’abord, les tableaux journaliers ATBH (tableaux recensant les Accidents où figurent les Tués, les Blessés ou les personnes Hospitalisées). Ces tableaux sont purement informatifs et ils n’indiquent pas les causes des accidents constatés. Ensuite, les tableaux ATBH « consolidés », qui sont réalisés tous les 30 jours après enquêtes. Et, enfin, les BAAC (c’est-à-dire les bulletins d’analyse des accidents corporels de la circulation) qui sont des recensements plus détaillés, intervenant 45 jours après l’accident (pour tenir compte, notamment, des 30 jours nécessaires pour avoir les ATBH consolidés), mais reposant sur les mêmes enquêtes que les tableaux ATBH eux-mêmes. Les BAAC précisent, en général, une cause principale pour l’accident et deux causes secondaires.

– Les statistiques agrégées, qui remontent jusqu’à nous et que nous connaissons, sont des sommations effectuées à partir des causes reconnues dans les tableaux BAAC, tant les causes principales que les causes secondaires, après différents types de vérifications réalisées par les observatoires départementaux qui relèvent de l’ONISR, et par l’ONISR lui-même.

– Au niveau des tableaux ATBH journaliers, il peut y avoir des différences sensibles dans la collecte qui n’est pas homogène d’un département à l’autre. Notamment, la saisie du nombre de blessés peut être contingente (selon les lieux et les pratiques, un blessé « hospitalisé » peut être seulement quelqu’un qui monte dans une ambulance…).

– De même, au niveau des ATBH consolidés ou des bulletins BAAC, il peut y avoir des zones qui sont relativement mal renseignées, y compris en cas d’accident mortel (état de la voirie, emprise de cannabis, usage d’un téléphone portable…). En effet, ces zones ne peuvent être renseignées que plusieurs jours après l’accident, grâce aux résultats de l’enquête, et notamment grâce aux données émanant de l’autopsie (par exemple la conduite sous l’emprise du cannabis). Pour cela, il faut, bien entendu, que l’enquête arrive à des résultats certains.

– En revanche, dans les ATBH consolidées, certaines rubriques paraissent un peu généralistes, en particulier lorsque les enquêtes ne peuvent pas conclure de manière certaine (par exemple, la rubrique « vitesse » qui renvoie à la notion d’inadaptation de la vitesse en fonction des circonstances, souvent retenue dans les enquêtes). Cette relative indétermination peut aussi, bien entendu, affecter les bulletins BAAC, au moment des remontées correspondantes.

C’est ainsi que l’on a très certainement des distorsions, compte tenu du mode de confection des statistiques, entre les chiffres produits et la parfaite réalité du terrain. Cela doit naturellement conduire à une certaine prudence vis-à-vis des statistiques d’accidentologie, lesquelles doivent toujours être complétées par d’autres données, qu’elles soient de contexte ou qu’elles aient un objet plus spécifique.

De ce point de vue, d’ailleurs, une expérience d’enrichissement des statistiques est conduite à Lyon, avec le fichier du Rhône, qui permet notamment une meilleure fiabilité des données recueillies en ce qui concerne les blessés. Une telle initiative doit être encouragée et étendue à d’autres départements, afin de permettre aux décideurs de disposer de données plus fiables.

Une gouvernance à revoir

Un autre acquis de la mission, à l’heure actuelle, semble être que la gouvernance, dans le domaine de la sécurité routière, devrait être repensée.

Au terme des auditions qu’elle a conduites, il a semblé à la mission qu’il n’y avait pas toujours assez de coordination entre les différents intervenants, publics ou privés, pouvant opérer en matière de prévention ou de lutte contre les accidents ; qu’il n’y avait pas suffisamment de vision à long terme de la politique suivie ; et que la communication n’était ni toujours adaptée dans le fond, ni toujours rattachée à un ou plusieurs programmes d’action, définis et cohérents, et surtout susceptibles de progresser sans à-coups.

On a bien vu cela au moment du CISR du 11 mai 2011. On peut dire que les pouvoirs publics ont réagi de manière sans doute trop rapide, face aux chiffres provisoires de l’accidentalité des quatre premiers mois de l’année 2011, chiffres provisoires qui, certes, étaient mauvais, mais qui, précisément, n’étaient pas encore totalement définitifs. Or, comme cela a été indiqué plus haut, il n’est pas possible, statistiquement, d’avoir une vision claire de l’accidentologie à moins de 45 jours de recul. Il aurait donc fallu, très probablement, se borner à analyser les statistiques de janvier, février et mars – et certainement avec beaucoup de prudence, compte tenu des incertitudes qui pèsent toujours sur les chiffres liés aux « remontées » dans le domaine des accidents, surtout lorsque ces remontées sont très récentes. À noter d’ailleurs qu’il est, aujourd’hui encore, difficile de tirer des conclusions définitives pour l’année 2011, à partir des chiffres connus à l’heure actuelle. En effet, après les bons résultats des mois de juillet et août 2011, l’évolution du nombre de morts sur les 9 premiers mois de l’année semble indiquer une augmentation de + 0,7 % seulement par rapport au nombre de morts enregistrés sur la même période, au cours de l’année 2010.

La conclusion a été, en tout cas, le sentiment d’un durcissement subit et non préparé dans l’opinion publique de la politique de sécurité routière, situation qui a été mal perçue par les usagers, d’où une certaine confusion dans la communication.

Des propositions seront faites dans le corps du rapport pour améliorer la gouvernance, la coordination et la communication dans le domaine de la sécurité routière. Notamment, il a paru important de revivifier le Conseil national de la sécurité routière qui pourrait être un organe de concertation et d’impulsion permanent, garant d’une bonne définition de la politique routière et d’une programmation pluriannuelle adaptée pour cette dernière.

C’est avec une bonne gouvernance que l’on pourra disposer de programmes d’action cohérents et continus dans le domaine de la sécurité routière. À partir de là, il sera possible de communiquer souvent, correctement et sans incompréhensions de la part de l’opinion publique.

Favoriser l’acceptabilité sociale

Une autre conviction forte de la mission est qu’il paraît difficile d’agir dans le domaine de la sécurité routière si l’on ne cherche pas à introduire, dans les mesures préconisées, une part importante de consensus social.

Si la société exprime une forte demande collective de sécurité routière, chacun étant favorable à la diminution du nombre de blessés et de morts et redoutant que ses proches ou lui-même ne soient touchés par un drame de la route, cette adhésion de principe est mise à l’épreuve presque quotidiennement par notre capacité individuelle à accepter les mesures prises.

Les universitaires entendus lors des travaux de la mission font valoir que l’acceptabilité d’une mesure de sécurité routière dépend de trois facteurs : la bonne information de ses destinataires sur ses tenants et aboutissants – par exemple, le législateur impose le port du casque non pour attenter à la liberté des motards mais pour les protéger –, la conviction partagée de son équité – la règle s’applique à tous et ne souffre aucune dérogation – et la perception de son efficacité – dans les faits, le port du casque permet de sauver des vies.

Cette grille d’analyse – information, équité, efficacité – se révèle pertinente pour évaluer la politique de sécurité routière : lorsque l’une au moins des conditions n’est pas remplie, la mesure, qu’elle soit mal comprise, jugée inéquitable ou que son efficacité soit mise en doute, suscite incompréhension, controverse, réclamation et se trouve souvent contournée, ce qui entame son efficacité.

La mission d’information a donc acquis la conviction que la pertinence de la politique de sécurité routière dépendait strictement de l’acceptabilité sociale des mesures qu’elle déclinait.

Généraliser le système Lavia

Enfin, le dernier acquis de la mission semble être celui-ci : la meilleure garantie, pour les usagers, de ne pas être verbalisés, dans le cadre des limitations de vitesse et du contrôle sanction automatisé, et, pour les pouvoirs publics, de faire en sorte que les voitures ne roulent pas trop vite, puisque la vitesse, sans être nécessairement la principale cause des accidents, est toujours un facteur aggravant, réside certainement dans les aides embarquées à la conduite.

De ce point de vue, le Lavia, c’est-à-dire le limiteur de vitesse s’adaptant à la vitesse autorisée, paraît constituer une évolution technique tout à fait intéressante.

Ce dispositif semble atteindre, à l’heure actuelle, un stade de mise au point satisfaisant et sa démonstration, le 15 septembre dernier, à l’UTAC, à Montlhéry, a fortement impressionné la mission. Pourvu que les problèmes qui sont liés à la cartographie et à son actualisation soient prochainement levés, sa généralisation progressive à tous les véhicules en première monte semble opportune et devrait être encouragée. L’objectif en ce domaine serait que tous les véhicules neufs en soient équipés un peu avant la fin de la décennie, la mission préconisant la date du 1er janvier 2018.

Il convient de noter que le Lavia informatif (rappel sur un écran de la vitesse limite autorisée avec un système d’alerte – par exemple un bip – lorsque celle-ci est dépassée) présente un faible coût et qu’il équipe déjà en série des modèles très accessibles, commercialisés par certains constructeurs.

*

* *

Pour parvenir à toutes ces conclusions, la mission a donc travaillé pendant cinq mois, avec l’objectif de rendre son rapport à la fin du mois d’octobre 2011.

Il était en effet important de faire paraître le rapport de la mission à cette date, afin que le Gouvernement puisse en prendre connaissance, avant qu’il ne s’attache à publier certains décrets d’application de la loi LOPPSI 2, ou encore les décrets liés à la mise en forme des décisions du dernier CISR.

La mission a procédé, pendant plus de 60 heures, à l’audition de près de 170 personnes représentant toutes les parties prenantes : chercheurs, médecins, associations d’usagers de la route, assureurs, constructeurs, associations de victimes, etc. Elle a animé douze tables rondes sur les différentes problématiques de la sécurité routière. Ses travaux ont été retransmis en direct sur le site Internet de l’Assemblée et des extraits de ses travaux ont été diffusés en différé sur la chaîne parlementaire LCP. Plus de 3 000 personnes ont suivi ces retransmissions en direct sur le portail de l’Assemblée.

Elle s’est déplacée à Strasbourg, le 28 juillet 2011, pour étudier, notamment, comment s’effectuait le recueil des statistiques d’accidents par les forces de police, en liaison avec la DDT (en l’occurrence la Direction Départementale des Territoires du Bas-Rhin), dans le cadre d’un département.

Elle s’est rendue à Montlhéry, le 15 septembre 2011, sur le site de l’UTAC (Union Technique de l’Automobile, du Motocycle et du Cycle), pour étudier les aménagements techniques des voitures « communiquantes » de l’avenir, et en particulier le Lavia.

Enfin, elle s’est déplacée à Bruxelles, le 28 septembre 2011, pour faire le point sur la réglementation européenne dans le domaine de la prévention et de la sécurité routières.

Au total, la mission a rassemblé ses conclusions autour de six grands principes, ou encore de six idées forces, pour une nouvelle gouvernance et une nouvelle action politique, ambitieuse et partagée, dans le domaine de la sécurité routière. Elle fait, par ailleurs, trente-neuf propositions, organisées en dix axes de travail, pour combattre durablement la mortalité sur les routes. Ce dispositif se trouve détaillé dans les pages qui suivent.

PREMIÈRE PARTIE : APRÈS DES ANNÉES DE PROGRÈS HISTORIQUES, LA BAISSE DE L’ACCIDENTALITÉ ROUTIÈRE SEMBLE MARQUER LE PAS

Il peut sembler étonnant, pour un observateur non averti, que les politiques publiques aient un impact aussi rapide et aussi important sur ce qui constitue un fait social de premier ordre, à savoir la mobilité routière. Alors que dans d’autres secteurs de la société, les évolutions prennent souvent des dizaines d’années, on ne peut qu’être surpris de lire qu’entre 2000 et 2010 le nombre de morts sur les routes a été divisé par deux et que la vitesse moyenne de circulation a baissé de 10 km/h. Dans peu de domaines, l’action publique peut avoir un effet aussi direct sur la vie quotidienne d’autant de nos concitoyens.

À la lecture de ces chiffres, on mesure également la responsabilité qui est celle des pouvoirs publics quand il s’agit de prendre une décision en matière de sécurité routière. C’est pourquoi la mission d’information, avec l’appui scientifique de l’Institut français des sciences et technologies des transports (IFSTTAR), a tenu à appuyer ses conclusions sur un panorama aussi précis et actualisé que possible des causes des accidents de la circulation.

I. – DES PROGRÈS HISTORIQUES ONT ÉTÉ ACCOMPLIS EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE, NOTAMMENT DEPUIS 2003

Peu de Français savent que la sécurité routière s’est améliorée de manière considérable depuis le début des années 2000. Or, il s’agit là de l’une des plus belles réussites d’une politique publique en France lors de la dernière décennie.

A. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE S’EST CONSIDÉRABLEMENT AMÉLIORÉE EN FRANCE DEPUIS 1972

Il faut mesurer le chemin parcouru en matière de sécurité routière. En 1972, année de la mortalité routière la plus forte, plus de 18 000 personnes avaient perdu la vie sur les routes françaises (6). En 2010, elles étaient moins de 4 000. Ceci représente une division par plus de quatre (77,9 % de diminution) de la mortalité sur les routes, alors que, dans le même temps, le parc roulant et le trafic ont été multipliés par plus de deux. Ainsi que l’a indiqué M. Jean Chapelon, ancien secrétaire général de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, « sur le long terme, on observe une baisse tendancielle du nombre de tués sur les routes de 2,1 % par an, entre 1974 et 2001, avec, en toile de fond, une augmentation du trafic qui tourne autour de 2 % par an. Autrement dit, la sécurité routière améliore régulièrement son « efficacité » d’environ 4 à 4,5 % par an, depuis trente ans. » (7)

Ainsi que l’a expliqué M. Sylvain Lassarre, directeur de recherche à l’IFSTTAR, « la courbe du nombre de tués, qui a connu une croissance jusqu’à 1973, puis une décroissance, est le produit d’une compétition entre la mobilité et la sécurité. Au début des années 1970, la mobilité croissait à un rythme de 8 % à 10 % par an – taux que l’on observe aujourd’hui par exemple en Chine ou en Inde – et l’emportait sur la sécurité, qui saturait avec une progression de l’ordre de 6 % par an, d’où une augmentation du nombre de tués. La crise de 1973 a marqué une rupture dans la mobilité, dont le taux de croissance est passé à 3 % ou 4 %, voire à 0 % aujourd’hui. La sécurité l’emporte, ce qui se traduit par une baisse du nombre de tués – qui enregistre des records : moins 14 % en 1973 et moins 17 % en 2003. » (8)

UNE DIVISION PAR QUATRE DE LA MORTALITÉ ROUTIÈRE DEPUIS 1972,
MALGRÉ UN DOUBLEMENT DU PARC ROULANT ET DU TRAFIC

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 14. Note de l’ONISR : « Ni le parc ni le trafic ne prennent en compte les deux roues motorisés, dont le poids est marginal sur ces indices. »

Ces chiffres traduisent le fait que depuis 1972, environ 306 000 vies ont été préservées grâce à la réduction de la mortalité routière.

Si l’on affine l’analyse, il apparaît que cette diminution du nombre de victimes de la route n’a pas été linéaire. Il est possible de distinguer plusieurs périodes, ainsi que l’ont fait notamment Jean Chapelon et Claude Got au cours de leur audition (9:

–  la première période correspond aux années 1972-1974. C’est alors que sont prises les premières mesures de sécurité routière et notamment celles qui consistent à limiter les vitesses maximales autorisées sur les différents réseaux. Au cours de cette période, la diminution de la mortalité routière a été particulièrement marquée, puisqu’elle représentait presque 10 % par an ;

–  la deuxième phase se situe entre 1974 et 2001. Jalonnée de mesures ponctuelles et d’ensemble (instauration du permis à points par exemple), la diminution de la mortalité routière connaît une tendance régulière, qui se situe aux environ de 2 % par an ;

–  la troisième étape, initiée en 2001/2002, est une phase de forte baisse du nombre de tués sur la route, puisque entre 2001 et 2007, ce nombre a chuté de plus de 9 % par an ;

–  se pose enfin la question de l’existence d’une dernière phase, dans laquelle nous nous trouverions et sur laquelle nous reviendrons, qui serait marquée par un retour à une tendance de baisse moins forte de la mortalité routière.

GRANDES PHASES DE LA DIMINUTION DE LA MORTALITÉ ROUTIÈRE

 

1972-1974

1974-2001

2001-2007

2007-2010

Évolution annuelle

-9,8 %

- 2,1 %

- 9,2 %

- 5 %

Source : Jean Chapelon, La politique de sécurité routière. Derrière les chiffres, des vies, 2008, p. 4 et ONISR.

Divers facteurs influent sur le rythme de diminution de la mortalité routière. Il est incontestable que l’amélioration régulière des véhicules et des infrastructures explique, pour une part d’ailleurs difficile à quantifier, la tendance à la baisse constante de l’accidentalité. M. Jean Chapelon a notamment mis en avant ce facteur en indiquant qu’« une étude a[vait] mis en évidence que le risque d’accident doublait selon que les véhicules avaient moins de quatre ans d’âge ou plus de huit ans, à distances parcourues égales, et en neutralisant l’âge du conducteur. » (10) Mme Michèle Merli, ancienne Déléguée interministérielle à la sécurité routière, a également souligné le rôle de l’amélioration du dispositif de secours (11). Mais ces facteurs sont insuffisants pour expliquer dans le détail l’évolution de l’accidentologie. Il faut insister sur le fait que si la mortalité routière a été divisée par plus de quatre depuis 1972 c’est d’abord et avant tout parce que la sécurité routière a progressivement été érigée en priorité politique.

B. CES AMÉLIORATIONS SONT LE FRUIT D’UNE POLITIQUE VOLONTARISTE ET AMBITIEUSE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Les interlocuteurs de la mission d’information se sont accordés à reconnaître que l’action des pouvoirs publics avait été décisive en matière de sécurité routière. À cet égard, les deux phases de baisse rapide de la mortalité routière évoquées ci-dessus sont particulièrement éloquentes. Le rapport de l’IFSTTAR note qu’au cours de ces deux phases, « le système de sécurité routière a changé de nature » (12).

C’est en effet de 1973 que date la première démarche forte des pouvoirs publics afin de promouvoir la sécurité routière. L’instauration de limitations de vitesse, à 90 km/h sur les routes nationales et à 130 km/h sur les autoroutes, ainsi que l’obligation de port du casque pour les conducteurs de deux roues motorisés et de la ceinture de sécurité hors agglomération à l’avant des voitures, ont constitué les premières mesures ambitieuses de sécurité routière, qui se sont traduites par un effondrement de l’accidentologie (13).

Le même schéma s’est répété au début des années 2000 puisque la forte diminution de la mortalité routière est attribuable à la décision du Président Jacques Chirac d’ériger la sécurité routière en grand chantier de son quinquennat. Cette annonce, effectuée le 14 juillet 2002, a été accompagnée de l’automatisation du contrôle de la vitesse (système dit de contrôle-sanction automatisé ou CSA), de l’annonce de la fin des indulgences pour les infractions au code de la route et du vote de la loi contre la violence routière (14). Grâce à cette volonté politique d’ensemble, couplant prévention et répression, la mortalité routière s’est effondrée de plus de 20 % en 2003, chiffre qui n’avait jamais été atteint. Le résultat le plus spectaculaire de cette politique a été la division par deux, en dix ans, du nombre de tués sur les routes, alors qu’il avait fallu près de 30 ans pour parvenir au même résultat sur la période précédente.

ÉVOLUTION ANNUELLE DU NOMBRE DE PERSONNES TUÉES, BLESSÉES ET HOSPITALISÉES ET DES ACCIDENTS CORPORELS

Source : ONISR, septembre 2011. NB : Les données concernant le nombre de personnes hospitalisées ne sont disponibles que depuis 2005.

Entre ces deux périodes, la volonté d’améliorer la sécurité routière, si elle a été moins fortement affirmée, n’en est pas moins demeurée une constante de l’action gouvernementale, ainsi qu’en témoignent de nombreuses mesures, générales ou ponctuelles, afin de réduire l’accidentalité. Parmi beaucoup d’autres, on peut citer la limitation de la vitesse en ville à 50 km/h en 1990, l’obligation de porter la ceinture de sécurité à l’avant en agglomération en 1979, puis à l’arrière en 1990, les abaissements progressifs du taux d’alcoolémie légale en 1983 et en 1995 ainsi que la mise en œuvre du permis à points en juillet 1992.

MISE EN PERSPECTIVE DES GRANDES MESURES DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE ET DE LA DIMINUTION DU NOMBRE DE TUÉS SUR LES ROUTES DEPUIS 1970

Source : Document fourni par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR.

Au final, ainsi que l’a souligné M. Bernard Pottier, président de l’Association « Prévention routière », « la sécurité routière, depuis qu’elle a été érigée en chantier national le 14 juillet 2002 par le président Jacques Chirac, fait sans doute partie des actions publiques les plus réussies, tous domaines confondus. » (15)

II. – CETTE TENDANCE A CONNU UN INFLÉCHISSEMENT RÉCENT

Afin de fixer un cap ambitieux aux politiques publiques et de continuer à faire de la sécurité routière une priorité, le Président de la République, Nicolas Sarkozy, a souhaité, à la fin de l’année 2007, que la mortalité routière soit réduite à 3 000 en 2012, ce qui représentait une diminution de 35 % sur cinq ans. Cependant, après de bons résultats entre 2008 et fin 2010, de mauvais chiffres ont été enregistrés au début de l’année 2011, compromettant la réalisation de cet objectif et entraînant une réponse des pouvoirs publics à l’occasion du comité interministériel du 11 mai 2011.

A. LES CAUSES MULTIPLES DES MAUVAIS CHIFFRES DU DÉBUT DE L’ANNÉE 2011

« À partir de janvier 2011, et pendant quatre mois consécutifs, la courbe s’est inversée. Une augmentation de 13 % des décès – 144 de plus que pendant les quatre mêmes mois de 2010 – a laissé présager, en cas de confirmation de la tendance, une mortalité de 4 500 personnes à la fin de l’année » (16), a expliqué Mme Michèle Merli au cours de son audition. Cette nette inflexion, à partir du mois de janvier, est d’ailleurs visible sur les courbes qui retracent le nombre de tués sur les routes mois par mois.

COMPARAISON DU NOMBRE DE TUÉS SUR LES ROUTES DURANT LES CINQ PREMIERS MOIS DES ANNÉES 2010 ET 2011

 

Janvier

Février

Mars

Avril

2010

273

254

300

296

2011

331

273

308

355

Évolution

+ 21 %

+ 7,5 %

+ 2,6 %

+ 20 %

Source : ONISR, 12 septembre 2011.

NOMBRE DE TUÉS PAR MOIS DEPUIS 1999

Source : ONISR, 12 septembre 2011.

Ces mauvais chiffres, dont l’interprétation est à la source des préconisations qui pourraient être formulées pour améliorer la sécurité routière, ont été expliqués de manière différente voire contradictoire devant la mission d’information.

Pour les uns, la cause principale de cette dégradation réside dans les facteurs météorologiques. Telle a notamment été l’analyse menée par l’association 40 Millions d’automobilistes, qui estime que l’augmentation observée en début d’année résulte de conditions météorologiques particulièrement favorables à la circulation, alors que l’hiver 2010 avait été plus rigoureux et enneigé, limitant les possibilités de déplacement et donc le nombre d’accidents (17). Mme Michèle Merli a également souligné le rôle du facteur météorologique : « Nous pouvons supposer que la météorologie extrêmement défavorable à la circulation au début de 2010 avait entraîné une forte diminution du trafic, des vitesses et de la circulation des deux-roues motorisés. Au contraire, du fait de la reprise économique, le début de l’année 2011 a connu une augmentation du trafic, notamment des camions. À cela se sont ajoutées de meilleures conditions météorologiques, qui ont favorisé les départs en week-end et entraîné une reprise de l’utilisation des deux-roues motorisés un mois et demi plus tôt que l’année précédente. » (18)

Cette théorie peut également s’appuyer sur les comparaisons à l’échelle européenne, dans la mesure où la dégradation d’ensemble aurait été de 4 %, certains pays connaissant une augmentation plus marquée, tels que l’Allemagne (+ 16 %), la Finlande (+ 19 %) ou la Suède (+ 29 %) (19).

Si l’on suit ce raisonnement, « il n’y a pas de dégradation de la sécurité routière » (20), pour reprendre les mots de M. Gérard Minoc, responsable de l’Institut d’étude des accidents de la route à l’association 40 Millions d’automobilistes, puisque les variations enregistrées sont dues à des facteurs conjoncturels.

Pour d’autres, il faut chercher la cause de cette augmentation dans les modifications législatives qui ont été apportées au permis à points dans le cadre de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (dite LOPPSI 2). En effet, dans ce cadre, une large publicité a été faite, à l’occasion du débat en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, entre septembre et décembre 2010, aux mesures destinées à faciliter la récupération de points (21).

Ce facteur a notamment été soulevé par M. Claude Got : « pour moi, l’élément le plus destructeur n’est pas la possibilité de récupérer un point en un an, mais celle de pouvoir en récupérer quatre tous les ans, contre quatre tous les deux ans. » (22) Mme Michèle Merli a, plus largement, établi une relation entre toute mesure ayant pour effet d’amodier le contrôle sur les vitesses pratiquées et l’augmentation de l’accidentalité : « Ont joué une diminution de l’effet dissuasif des radars et le développement d’attitudes de contournement de certains usagers, ainsi que l’annonce de mesures liées à la LOPPSI : chaque fois que les automobilistes ont pu penser que la sévérité pourrait s’atténuer, on a assisté à une détérioration momentanée de la sécurité routière. » (23)

Les enquêtes d’opinion accréditent la thèse d’un relâchement des comportements consécutif à l’assouplissement du permis à points. M. Benoît de Laurens, vice-président de l’agence de communication Lowe Strateus, a estimé que l’aménagement du permis à points avait eu « des conséquences désastreuses » : « Selon des enquêtes d’opinion, 31 % des sondés, soit environ 12 millions de personnes, ont déclaré avoir changé leurs comportements après la loi LOPPSI 2. Le changement s’est manifesté dans le sens d’un moindre respect des règles, dans la mesure où les conducteurs avaient moins peur de perdre des points. D’autre part, en avril 2011, un autre sondage a montré que, pour la première fois, le pourcentage de ceux qui déclaraient respecter les règles en toutes circonstances était tombé en dessous de la barre des 50 %, à 48 % très exactement. […] Ce chiffre est d’autant plus significatif que le pourcentage de ceux qui reconnaissent observer strictement les règles n’a fait que croître depuis 2002. » (24)

Ces deux explications ne sont pas contradictoires mais complémentaires. Il est probable que chacune d’entre elle ait joué pour une part dans l’augmentation de l’accidentalité au début de l’année 2011, ainsi que l’ont souligné Mme Michèle Merli et M. Claude Got (25). Si le nombre d’accidents a augmenté dans toute l’Europe, cette augmentation a été en moyenne plus forte en France, différentiel que l’on peut expliquer, au moins en partie, grâce aux enquêtes d’opinion précitées. Il est cependant difficile d’établir la part respective de chacun de ces facteurs, dans la mesure où le modèle utilisé par l’ONISR pour déterminer l’influence de la météorologie est obsolète et doit être prochainement revu afin de prendre en compte l’évolution des modes de circulation (26).

Il faut enfin mentionner le fait, resté sans explication au cours des auditions de la mission, que les accidents corporels survenus en début d’année, alors que leur nombre n’a pas beaucoup augmenté par rapport aux premiers mois de l’année 2010, ont été beaucoup plus meurtriers. Cette augmentation de la gravité moyenne des accidents explique une part importante de l’accroissement de la mortalité routière.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’ACCIDENTS CORPORELS, DE BLESSÉS, D’HOSPITALISÉS ET DE TUÉS ENTRE LES 4 PREMIERS MOIS DES ANNÉES 2010 ET 2011

 

Accidents corporels

Blessés

Hospitalisés

Tués

Janvier-avril 2010

20036

25056

8712

1123

Janvier-avril 2011

20128

25065

9649

1267

Évolution

+ 0,5 %

+ 0,0 %

+ 10,8 %

+ 12,8 %

Source : ONISR.

B. LA RÉPONSE FORTE DU CISR DU 11 MAI 2011

Pour apporter une réponse à la dégradation de la sécurité routière, la décision a été prise de convoquer, apparemment en urgence, un comité interministériel de sécurité routière (CISR). Présidé par le Premier ministre, ce comité rassemble tous les ministres concernés par la politique de sécurité routière. Il est chargé de définir la politique du Gouvernement dans ce domaine et de s’assurer de son application (27). Le CISR du 11 mai 2011 a arrêté 18 mesures visant à :

–  dissuader les excès de vitesse ;

–  lutter contre l’alcoolémie et les stupéfiants sur la route ;

–  sécuriser l’usage du deux-roues motorisé ;

–  renforcer la vigilance au volant et combattre tous les facteurs qui réduisent l’attention portée à la conduite ;

–  donner plus de place aux citoyens dans la politique de sécurité routière.

Les mesures qui ont le plus retenu l’attention ont été celles consistant à retirer les panneaux avertisseurs des radars fixes de vitesse, à interdire les avertisseurs de radars et à obliger les usagers de motocyclette et de tricycle de 125 cm3 et plus à porter un équipement rétro-réfléchissant (28).

L’annonce de ces mesures a suscité de vives réactions, notamment parmi les associations d’usagers, qui ont organisé plusieurs manifestations visant à dénoncer la politique menée par le Gouvernement, considérée comme uniquement répressive. Une manifestation a ainsi été organisée le 18 juin 2011. Par ailleurs, les fabricants d’avertisseurs de radar se sont regroupés, dès le 12 mai 2011, au sein de l’« Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d’aide à la conduite » (AFFTAC), afin de protester contre l’interdiction de leurs appareils et appeler à manifester.

Bien que les mesures annoncées lors du CISR du 11 mai 2011 n’aient, pour la plupart, pas été mises en œuvre, dans l’attente des conclusions de la mission d’information, leur diffusion dans les médias a semble-t-il permis de renverser la tendance des premiers mois de l’année. Les mois de mai, de juillet et d’août ont été les moins meurtriers jamais connus sur cette période. Par ailleurs, le nombre d’accidents corporels, qui regroupe un nombre de sinistres plus important et est donc plus significatif d’un point de vue statistique, a connu un net décrochage en juin, juillet et août 2011.

NOMBRE D’ACCIDENTS CORPORELS PAR MOIS DEPUIS 1999

Source : ONISR, 12 septembre 2011.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’ACCIDENTS CORPORELS ENTRE 2010 ET 2011

 

Janvier

Février

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

2010

4545

4299

5326

5866

5904

6546

6288

5147

2011

4675

4343

5362

5748

6176

5848

5525

4728

Évolution

+ 2,9 %

+ 1 %

+ 0,7 %

– 2 %

+ 4,6 %

– 10,7 %

–12,1 %

– 8 %

Source : ONISR.

Au total, sur les huit premiers mois de l’année 2011, la mortalité routière a augmenté de + 0,7 %.

Malgré la chute de l’accidentalité consécutive aux annonces du CISR du 11 mai 2011, plusieurs personnes auditionnées ont souligné que, de manière générale, l’accidentalité avait atteint un « palier ». Cette expression a notamment été utilisée par M. Benoît de Laurens : « Pour le dire simplement, nous avions fait le plein des gens raisonnables et nous arrivions au noyau dur. […] Mais si l’on a atteint un palier, il ne s’agit aucunement d’une limite. » (29) D’ailleurs, Mme Laurence Derrien-Lallement, chef du département communication et information de la DSCR, a confirmé que « huit à neuf Français sur dix considèrent que l’on peut encore progresser » (30).

C’est pour étudier la meilleure manière de progresser qu’a été créée la mission d’information, dont le premier objet porte sur l’analyse des causes des accidents de la circulation.

III. – POUR PROGRESSER, UNE ANALYSE PRÉCISE DES CAUSES DES ACCIDENTS EST NÉCESSAIRE

Selon la revue de littérature scientifique effectuée par l’IFSTTAR, il importe de différencier une cause d’un facteur de risque. Une cause provoque une augmentation de probabilité de l’événement, alors qu’un facteur de risque décrit « une association statistique globale » (31), sans que cette association ne soit forcément vraie au niveau individuel. Ainsi, le fait qu’un conducteur soit alcoolisé est un facteur causal d’accident, car tout conducteur alcoolisé a plus de risques d’accidents que quand il ne l’est pas. À l’inverse, le fait d’être âgé n’est qu’un facteur de risque, dans la mesure où toute personne âgée n’a pas nécessairement un risque d’accident plus élevé que quelques années auparavant, bien que les conducteurs âgés aient, en moyenne, plus de risque d’accident (32).

Avant d’analyser en détail les causes et les facteurs de risques dans les accidents de la circulation, il est nécessaire de s’interroger sur les sources d’informations, notamment statistiques, disponibles, ainsi que sur leurs modalités de collecte, afin d’en déterminer la robustesse.

A. DES SOURCES D’INFORMATION VARIÉES MAIS PERFECTIBLES

De nombreuses données existent en matière de sécurité routière. La difficulté tient davantage en leur synthèse que dans leur détail. Dans cette perspective, le document réalisé par l’IFSTTAR pour le compte de la mission d’information est particulièrement précieux, de même que la préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010 que cet observatoire a bien voulu communiquer à la mission.

1. Les sources statistiques de l’ONISR

L’observatoire national interministériel de la sécurité routière a pour mission d’assurer « la collecte et la diffusion des informations nécessaires à la préparation et à la mise en oeuvre de la politique de sécurité routière. » (33) À ce titre, il est notamment chargé « de rationaliser et d’unifier la collecte des données statistiques provenant des différentes sources nationales et internationales, d’assurer leur mise en forme, leur interprétation et leur diffusion ». Dans ce cadre, il publie deux grands types de statistiques :

–  des « résultats provisoires », publiés chaque mois, sous la forme de « Baromètre mensuel de la sécurité routière ». « Les données ainsi recueillies se limitent au nombre d’accidents corporels, de personnes tuées – sur le coup ou dans les trente jours qui suivent l’accident –, blessées et blessées hospitalisées (données dites ATBH). Ce sont des chiffres bruts fin de mois, éclatés par département, donnant la répartition des tués par catégorie d’usagers, par tranche d’âge – on en distingue quatre – et par motif présumé d’accident – vitesse, alcool, refus de priorité et autres » (34), a indiqué M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR. Ce sont ces chiffres du nombre de tués, d’hospitalisés, de blessés et d’accidents corporels qui sont généralement repris dans les médias, au début de chaque mois. Ainsi que le note le rapport annuel de l’ONISR, il s’agit uniquement « d’estimations [qui] sont construites par extrapolation, à partir des statistiques des « remontées rapides » communiquées à l’ONISR par la Direction de la modernisation et de l’action territoriale. » (35) Ces remontées rapides sont elles-mêmes le fruit de décomptes effectués par les forces de l’ordre et agrégés au niveau des préfectures. Elles ne prennent en compte que les tués « connus à la fin du mois » et non pas les tués à trente jours. Sur le fondement de ces remontées rapides, l’ONISR estime le nombre de morts à trente jours, d’hospitalisés, de blessés et d’accidents corporels. Ces calculs permettent d’obtenir de bonnes approximations. Ainsi, en 2008, 2009 et 2010, l’erreur quant au nombre de tués sur l’année a été respectivement de - 2 %, - 0,3 % et de + 0,05 % (36;

–  des résultats définitifs, qui sont fournis par le Fichier national des accidents corporels, qui est une base de données recensant annuellement 70 000 accidents corporels et, pour chacun d’eux, les circonstances de l’accident (voies, usagers, infractions éventuelles…). Ce fichier est alimenté par les fiches BAAC (« bulletin d’analyse des accidents corporels de la circulation »), qui comprennent une soixantaine d’items et sont établies par les forces de l’ordre à l’occasion de chaque accident corporel. Cependant, ainsi que l’a noté M. Louis Fernique, « il est impossible que ceux appelés à le remplir soient des experts chevronnés en tous ces domaines. Pour quantité d’items, se retrouve donc la mention « indéterminé ». » (37) Les fiches sont contrôlées et consolidées sous l’égide des observatoires départementaux de la sécurité routière et transmises à l’ONISR. Cette base de donnée est complète, pour une année n, entre la mi-mai et la mi-juin de l’année n+1, et sert de fondement au Bilan annuel de la sécurité routière. Elle constitue, selon M. Jean Chapelon, ancien secrétaire général de l’ONISR, « une base de données extraordinairement riche » (38).

Ce système existe depuis une soixantaine d’années mais la décision a été prise de le refondre à la fin de l’année 2009. Le but principal est de rendre plus rapide la constitution du fichier BAAC, d’assurer une meilleure qualité dès la saisie et pouvoir en tirer d’emblée des données destinées à remplacer les remontées rapides. L’une des conséquences devrait être une diminution de la charge de travail des unités de police et de gendarmerie. Selon l’ONISR, « ce projet pourrait exiger plus de deux années avant introduction généralisée des nouveaux outils, après leur réception et la formation de tous les opérateurs à leur maniement. » (39)

Par ailleurs, l’ONISR peut participer à la réalisation d’études ou en commander. C’est ce qu’il fait afin d’améliorer la connaissance de certains comportements sur la route. Ainsi, en matière de vitesses pratiquées, une société d’études spécialisées fournit, selon un plan de sondage, chaque année à l’ONISR des données relatives à environ 200 000 observations. Ces données sont publiées tous les quatre mois par l’ONISR et permettent de déterminer quelles sont les vitesses moyennes pratiquées sur chacun des réseaux et par chacune des catégories d’usagers et comment ces dernières évoluent. Ces données fournissent également le taux de dépassement des vitesses maximales autorisées. De la même manière, des observations sont effectuées concernant le nombre de personnes qui téléphonent au volant.

La description de la fabrication de ces diverses statistiques conditionne l’usage qui peut en être fait. Il faut souligner à ce titre que les membres des forces de l’ordre qui remplissent les fiches BAAC ne sont ni des statisticiens, ni des accidentologues. En conséquence le recueil des données comporte une certaine marge d’erreur, notamment quant aux causes des accidents qui y sont indiquées. Par ailleurs, certaines données ne figurent pas, ou peu, dans ces fiches. Tel est le cas, par exemple, de l’utilisation d’un téléphone portable au moment de l’accident. Enfin, s’il est souhaitable de pouvoir disposer rapidement de statistiques afin de percevoir la tendance de l’accidentalité, le fait que ces chiffres ne sont pas définitifs doit être clairement mis en valeur (40).

2. Les recherches et études scientifiques

En France, de nombreux organismes publics d’études et de recherche travaillent dans le domaine de la sécurité routière (41). Beaucoup de leurs travaux sont financés, au moins en partie par la Délégation à la sécurité et à la circulation routière, dont une partie dans le cadre du Programme de recherche et d’innovation dans les transports terrestres (PREDIT), qui est un programme initié et conduit par les ministères concernés ainsi que l’Agence nationale de la recherche (ANR), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et OSEO. Le programme actuellement en cours couvre la période 2008-2012 et comprend un axe n° 2 consacré à la qualité et à la sécurité des systèmes de transport, ce qui inclut la sécurité routière.

Certaines études ont particulièrement retenu l’attention ces dernières années car elles font le point sur l’état des connaissances dans un domaine particulier. On peut notamment citer l’étude portant sur « Stupéfiants et accidents mortels de la circulation routière », dite étude SAM, dont les résultats ont été publiés en 2005 et qui réunissait plusieurs organismes de recherche, publics et privés (42). Plus récemment, une expertise collective a été menée par l’IFSTTAR et par l’INSERM afin de mieux connaître la problématique des liens entre téléphone et conduite, sur la base d’une revue de la littérature scientifique internationale (43).

Par ailleurs, certains accidents sont étudiés très en détail, afin de comprendre précisément quel est l’ensemble de leurs causes. Ainsi que l’a mentionné M. Louis Fernique, ce travail est effectué « d’une part par une unité de l’IFSTTAR, basée à Salon de Provence, qui réalise des études détaillées sur une cinquantaine d’accidents par an, avec utilisation de logiciels pour en reconstituer la dynamique et en procédant à une étude approfondie de l’état des véhicules pour en déduire la vitesse à partir de l’énergie estimée du choc ; d’autre part par le centre européen d’études de sécurité et d’analyse des risques (CEESAR) sur une centaine d’accidents en région parisienne, essentiellement dans les Yvelines. Ce travail permet de beaucoup mieux comprendre les facteurs des accidents que le fichier BAAC, mais l’échantillon est extrêmement réduit. » (44)

Il faut également faire une place à part au Registre du Rhône, qui recense, depuis 1995, l’ensemble des victimes d’accident corporel du Rhône, la nature et l’évolution de leurs blessures, ainsi que leurs éventuelles séquelles. Ce registre permet d’obtenir un ordre de grandeur du nombre de blessés dans les accidents de la circulation en France qui est beaucoup plus juste que celui qui résulte des fiches BAAC, lesquelles n’en recensent qu’environ 30 % (45). Il fournit également de précieux renseignements sur la nature des blessures engendrées par les accidents.

De manière générale, les organismes publics d’études et de recherche publient une quantité très importante de documents dans le domaine de la sécurité routière. Il faut y adjoindre les données collectées, exploitées et publiées par les constructeurs automobiles, notamment dans le cadre du laboratoire d’accidentologie, de biomécanique et d’études du comportement humain (LAB), qui est commun à Renault et à PSA Peugeot-Citroën. Son objectif est que les constructeurs puissent améliorer leur système de sécurité, tant passive d’active, par une meilleure connaissance de l’accidentologie : « Nous analysons les causes des accidents à partir de bases de données et d’enquêtes que nous conduisons sur le terrain et, sur ce fondement, nous établissons des hypothèses sur lesquelles travaille le service de biomécanique. Nous sommes alors à même de fournir aux constructeurs des éléments pour la mise au point des systèmes de sécurité. Ensuite, nous vérifions l’efficacité de ceux-ci, en biomécanique, par nos enquêtes sur le terrain et via nos bases de données accidentologiques, en cherchant à identifier les dispositifs les plus prometteurs » (46), a ainsi expliqué sa directrice, Mme Anne Guillaume.

Enfin, les assureurs disposent également d’une très bonne connaissance de l’accidentologie et notamment des conséquences humaines et matérielles des accidents de la circulation.

B. LES PRINCIPALES CAUSES D’ACCIDENTS

Avant d’aborder les grandes causes d’accidents (47), plusieurs remarques méthodologiques s’imposent.

En premier lieu, ainsi que l’a relevé M. Jean-Paul Mizzi, directeur général adjoint de l’IFSTTAR, « en ce qui concerne les causes d’accident, il est indiscutable que celles-ci sont multifactorielles. » (48) Un accident se situe en effet à l’interface de trois composants : un ou plusieurs conducteur(s), un ou plusieurs véhicule(s) et une infrastructure. Il est donc possible qu’un accident ait pour cause « première » le comportement d’un conducteur (allure trop rapide) mais qu’il ait été aggravé par l’infrastructure (présence d’arbres à proximité de la chaussée) et que le véhicule n’ait pas réussi à l’empêcher (absence de système de freinage le plus récent sur ce véhicule). Tous ces facteurs, mais aussi bien d’autres (inaptitude à la conduite, fatigue, conditions météorologiques,…) expliquent, pour une part, la survenue et la gravité d’un accident. Il est donc difficile d’isoler, dans chaque cas, les facteurs qui ont conduit à l’accident et plus encore d’en tirer des enseignements d’ensemble.

L’analyse détaillée d’un seul cas suffit à voir une pluralité de causes agir de concert. MM. Claude Azam, chef du bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) et Jean-Louis Humbert, chef de la division transports routiers au ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, ont donné l’exemple de l’accident survenu à un autocar polonais dans la descente de Laffrey, sur la commune de Notre-Dame-de-Mésage, dans l’Isère, le 22 juillet 2007 : « Ayant perdu sa capacité de freinage en bas de la descente, l’autocar a fait une sortie de route et s’est écrasé après une chute de 15 mètres, avant de s’embraser. Les facteurs qui peuvent expliquer l’accident sont ici le non-respect – délibéré – de l’interdiction de la descente de Laffrey aux poids lourds et autocars, une conduite inappropriée dans la descente – le conducteur savait mal conduire en montagne et n’a pas utilisé le frein moteur – ainsi que le mauvais état du système de freinage, qui n’était pas signalé par les témoins d’alerte. » (49)

En deuxième lieu, la connaissance que l’on peut avoir de chacune des causes d’accident peut être très variable. Par exemple, s’il est relativement facile d’identifier les accidents où au moins l’un des conducteurs dépasse le taux légal d’alcoolémie ou s’ils portaient leur ceinture de sécurité, il est beaucoup plus difficile de savoir à quelle vitesse les conducteurs impliqués roulaient exactement ou si l’un d’entre eux faisait usage de son téléphone portable au moment de l’accident (50). Il est encore plus compliqué de savoir si un aménagement de l’infrastructure aurait été susceptible d’éviter l’accident. Dès lors, il est nécessaire d’adopter des méthodologies spécifiques pour parvenir à quantifier l’importance respective de chaque cause d’accident. Par exemple, pour déterminer le nombre de morts attribuables à la vitesse, une formule mathématique qui a fait ses preuves, l’équation de Nilsson, est employée, corrélée au relevé, par sondage, des vitesses pratiquées (51).

En troisième lieu, la connaissance de chacune des causes d’accident demande une quantité variable mais souvent importante de données extérieures. Ainsi que le note l’étude de l’IFSTTAR, « au plan quantitatif, différents indicateurs sont nécessaires pour éclairer cette décision : l’importance de la population cible concernée par une cause donnée (par exemple, combien de conducteurs font usage de leur téléphone en conduisant ?), la prévalence de la cause parmi les conducteurs circulants (à un instant donné, quelle part des conducteurs téléphone ?), le risque relatif associé à cette cause (par combien un conducteur multiplie-t-il son risque d’accident s’il téléphone ?), la fraction de risque attribuable à cette cause (quelle est la part des accidents directement imputable à l’usage du téléphone en conduisant ?) et, idéalement, la fraction préventive attachée à telle ou telle mesure (dans quelle proportion une interdiction du kit mains libres, plus ou moins respectée, réduirait-elle le nombre d’accidents ?). Pour chacune des causes inventoriées, ces différents indicateurs sont fournis lorsqu’ils sont connus. Cependant, le plus souvent, seule une estimation du risque relatif peut être avancée. » (52) M. Louis Fernique a confirmé, au cours de son audition, la nécessité de disposer de « statistiques d’exposition », afin de calculer les sur-risques et de « statistiques de contexte » (par exemple du trafic routier), lesquelles font parfois « cruellement défaut » (53).

Enfin, un accident pouvant être dû à la combinaison de plusieurs facteurs causaux, les nombres de morts généralement imputés à chacun des facteurs ne se cumulent pas en intégralité. Ainsi, si l’on considère que 717 vies auraient pu être épargnées si les limitations de vitesse avaient été systématiquement respectées en 2010, nombre qui est de 1 150 pour ce qui concerne le taux d’alcoolémie (54), il serait erroné d’en déduire que 1 767 auraient pu être préservées si personne n’avait conduit au-delà des limitations de vitesse ni en présentant un taux d’alcoolémie supérieur au taux légal. Certains accidents sont en effet imputables à la fois à une vitesse et à un taux d’alcoolémie excessifs ; le nombre total aurait donc été inférieur à 1 767.

1. La vitesse, une cause pas comme les autres

La vitesse de circulation n’est pas un facteur d’accident comme un autre. En effet, les accidents de la circulation sont avant tout des accidents de la mobilité et il est incontestable que sans mobilité, et donc avec une vitesse nulle ou extrêmement réduite, les accidents de la circulation disparaîtraient. En ce sens, la vitesse, en tant que condition de possibilité de la mobilité, est un facteur inhérent à tout accident. Ainsi que le note l’IFSTTAR, « il est fondé de considérer que tous les autres facteurs réputés constituer des “causes” d’accidents ne sont que des facteurs aggravants qui, pour une vitesse donnée, décalent la relation vitesse / risque d’accident vers des risques plus élevés. » (55)

Néanmoins, quand il est question de vitesse comme cause d’accident, c’est généralement à une vitesse excessive ou inappropriée qu’il est fait référence. En effet, la vitesse, notamment en matière de circulation routière, possède des propriétés spécifiques qui font que chaque kilomètre/heure dont elle est augmentée accroît plus que proportionnellement le risque d’accident. L’énergie cinétique accumulée, de même que la distance de freinage, sont proportionnelles non pas à la vitesse du véhicule mais au carré de cette dernière (56). En conséquence, la vitesse intervient non seulement comme facteur déclenchant d’accident, mais également comme facteur aggravant. Un accident dû à un défaut d’attention qui aurait été sans gravité à 60 km/h peut être mortel à 80 km/h. De plus, la vitesse diminue le temps qui est à la disposition du conducteur pour faire face à la difficulté qui se présente à lui. Enfin, la vitesse est une cause transversale d’accidents. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, on enregistrera moins d’accidents liés à l’alcool si les vitesses moyennes diminuent, même si la consommation d’alcool demeure exactement la même.

Des modèles statistiques ont été construits pour tenter d’établir une corrélation quantitative entre les vitesses pratiquées et le nombre d’accidents de la circulation, de blessés et de tués. Tous les scientifiques auditionnés par la mission ont corroboré le constat que pose l’IFSTTAR dans son rapport : « Tous les modèles empiriques agrégés du risque s’accordent pour considérer que le taux d’accidents par véhicule x kilomètre sur un réseau augmente en fonction de la vitesse moyenne pratiquée sur ce réseau selon un facteur 4 pour les accidents mortels. Ainsi, en première approximation, augmenter la vitesse moyenne de 1 % sur un réseau quel qu’il soit (urbain, interurbain, autoroutier) conduirait à augmenter le risque d’accident mortel de 4 %. Le risque d’accidents corporels est fonction du carré de la vitesse moyenne, et celui d’accidents matériels strictement proportionnel à la vitesse. Ainsi, pour une même augmentation de 1 % de la vitesse moyenne, on observera 2 % d’accidents corporels et 1 % d’accidents matériels en plus. » (57) Cette relation entre vitesse et accidents, « corroboré[e] par des centaines d’études » (58) étant statistique et découlant des propriétés de la vitesse, elle est fortement prédictive. Il faut souligner qu’elle vaut ceteris paribus et ne prend donc pas en compte des facteurs tels que l’amélioration des véhicules et des infrastructures (59).

La réduction des vitesses pratiquées en France a déjà largement contribué à la diminution de l’accidentalité et de la gravité des accidents. La vitesse moyenne a en effet diminué de 11 % entre 2002 (vitesse moyenne de 89,5 km/h) et 2010 (vitesse moyenne de 79,7 km/h), chiffres qui sont connus grâce aux quelques 200 000 observations de vitesse réalisées chaque année pour le compte de la DSCR.

ÉVOLUTION DE LA VITESSE MOYENNE PRATIQUÉE EN FRANCE ENTRE 2000 ET 2010

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 174.

Si l’on se fonde sur cette relation solidement établie, on peut évaluer à environ 717 le nombre de vies qui auraient pu être préservées si tous les conducteurs avaient respecté les limitations de vitesse. Ce chiffre n’épuise pas tous les accidents que l’on attribue à la « vitesse », puisque cette catégorie recouvre également ceux qui résultent d’une vitesse inappropriée aux circonstances, bien qu’elle demeure inférieure à la vitesse maximale autorisée. Si aucune donnée n’existe en la matière en France, « l’Allemagne et la Suisse mentionnent, dans leurs statistiques une proportion de l’ordre de 40 % » (60), selon l’ONISR.

2. La conduite sous l’emprise de substances psychoactives, cause majeure d’accidents

Au titre des substances psychoactives, on peut analyser les effets de l’alcool, des drogues et des médicaments sur l’activité de conduite.

a) L’alcool, première cause d’accidents

D’après les statistiques disponibles et sous réserve de la remarque méthodologique concernant le caractère premier de la vitesse, l’alcool est aujourd’hui la première cause d’accidents mortels en France.

L’influence de l’alcool sur les capacités physiologiques est désormais bien documentée : « Il existe un consensus sur le fait que l’absorption d’alcool à faible dose (< 0,4 g/l) affecte essentiellement les processus attentionnels (notamment sur le seuil de sélectivité des informations) alors que les doses supérieures (> 0,8 g/l) dégradent significativement le processus d’inhibition de la réponse et les capacités psychomotrices » (61), note l’étude de l’IFSTTAR. S’il existe une dégradation des performances de conduite dès qu’un conducteur est alcoolisé (engendrant un sur-risque théorique compris entre 2 et 3 selon les études (62)), quelle que soit la dose absorbée, les études existantes n’ont pas mis en évidence de sur-risque d’accident lié aux faibles consommations (taux d’alcoolémie inférieur à 0,5 gramme par litre de sang). L’une des hypothèses avancées pour expliquer ce paradoxe est que les conducteurs alcoolisés savent que cette situation est porteuse de risques. Ils compenseraient dès lors leurs plus faibles performances par une plus grande prudence. Cependant, seuls les conducteurs faiblement alcoolisés y parviendraient (63). À l’inverse, les conducteurs dont le taux d’alcoolémie est plus élevé n’y réussiraient pas. En conséquence, le risque relatif, s’il reste relativement stable jusqu’à 0,5 g/l de sang, connaît ensuite une croissance exponentielle.

RISQUE RELATIF D’ACCIDENT CORPOREL GRAVE SELON LE TAUX D’ALCOOLÉMIE

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 211.

Si le sur-risque lié à la consommation d’alcool est donc étroitement lié au taux d’alcoolémie, il serait en moyenne de 8, selon M. Bernard Laumon, directeur de recherche à l’IFSTTAR (64). « Au-delà de 2 grammes par litre de sang, le risque d’être responsable d’un accident mortel est multiplié par 40 ou 80, selon les études. L’effet-dose est une des caractéristiques de l’alcool », a-t-il estimé.

La proportion de conducteurs conduisant avec un taux d’alcoolémie supérieur à la limite légale serait d’environ 3 %, selon l’étude SAM (65). Pour ce qui est des accidents corporels, un conducteur alcoolisé est impliqué dans environ 11 % des cas, pourcentage qui monte à plus de 30 % pour les accidents mortels. Les 18-24 ans, et notamment les jeunes hommes, sont davantage touchés encore par les accidents avec alcool, puisque ces derniers ont occasionné près de 40 % des décès sur la route dans cette classe d’âge. Ces taux sont très variables en fonction de facteurs temporels. Ainsi, la nuit, une personne alcoolisée est impliquée dans 47 % des accidents mortels, pourcentage qui est porté à près de 60 % lors des nuits de fin de semaine ou de jours fériés.

POURCENTAGE DE CONDUCTEURS ALCOOLISÉS (>0,5 G/L DE SANG)

Circulation générale

Accidents corporels

Accidents mortels

3 % (estimation)

10,8 %

30,4 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 201.

Ainsi, en 2010, on peut estimer à environ 1 230 le nombre de personnes tuées alors que l’un des conducteurs impliqués dans l’accident était alcoolisé, à 4 589 le nombre de personnes hospitalisées et à 9 401 celui de personnes blessés (66).

La donnée la plus saisissante réside dans le taux d’alcoolémie des personnes impliquées dans un accident corporel ou mortel. Ce dernier est en effet extrêmement élevé.

RÉPARTITION DES CONDUCTEURS AU TAUX D’ALCOOLÉMIE POSITIF IMPLIQUÉS
DANS UN ACCIDENT EN 2010

Taux d’alcoolémie

Impliqués dans un accident corporel

% du total

Impliqués dans un accident mortel

% du total

0,5-0,8 g/l

732

12,3

84

9,3

0,81-1,49 g/l

1923

32,4

253

28,1

1,5-1,99 g/l

1499

25,3

216

24,0

2-2,99 g/l

1517

25,6

281

31,3

3 g/l et plus

262

4,4

65

7,2

Total

5 933

100

899

100

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 210.

Si l’on met ces taux en regard de la courbe de risque présentée ci-dessus, il n’est pas étonnant que dans deux tiers des cas, les accidents mortels dont un conducteur alcoolisé est responsable soient des accidents à un seul conducteur sans piéton, alors que cette proportion est d’un quart pour les accidents mortels dans leur ensemble (67). En effet, l’absorption de telles doses d’alcool rend particulièrement difficile tout contrôle du véhicule, même en l’absence de dangers ou d’obstacles extérieurs.

b) Les drogues, facteur aggravant ?

Pour ce qui est de l’influence des drogues sur la conduite, les travaux expérimentaux semblent montrer que leur influence sur la conduite est limitée à dose modérée. Par exemple, pour la cocaïne, les amphétamines et les opiacés, « il n’a pas été possible de mettre en évidence un sur-risque significatif d’accident (ce qui ne permet pas pour autant d’affirmer qu’un tel risque n’existe pas). » (68)

Les études les plus précises ont été conduites sur le cannabis. Il faut citer à ce propos l’étude SAM, menée entre 2002 et 2003, qui a montré que le risque d’être responsable d’un accident mortel est multiplié par deux quand la conduite est effectuée sous l’emprise de cannabis. Sur ce fondement, l’étude a permis de déterminer qu’environ 4 % des accidents mortels étaient imputables au cannabis (69), ce qui représentait environ 230 personnes tuées. Parmi ces victimes, la moitié avait moins de 25 ans et la grande majorité était des jeunes hommes. Faute de politique de dépistage d’envergure, et contrairement à ce qui est pratiqué pour l’alcool, l’ONISR ne dispose que de peu d’informations quant aux personnes qui conduisent sous l’emprise de cannabis (70). En effet, la rubrique « drogue » des fiches BAAC n’est renseignée que dans environ 10 % des cas (71).

Si le sur-risque d’accident lié à la consommation de cannabis est relativement faible (environ 1,8) (72), les conducteurs qui conduisent à la fois sous l’emprise de l’alcool et de la drogue ont un sur-risque de 15. 0,4 % de ces conducteurs représentent ainsi 5 % des conducteurs responsables d’accident mortel. L’étude de l’IFSTTAR conclut donc : « En d’autres termes, on peut considérer que l’enjeu majeur du cannabis au volant est son association avec l’alcool. » (73)

c) Les médicaments

L’enjeu, pour la sécurité routière, lié à la prise de médicament n’est apparu que récemment. C’est ainsi qu’aucune enquête épidémiologique n’avait pris en compte, jusqu’à récemment, leur impact sur la conduite.

Ce travail a été entrepris à partir du début des années 2000. Il a d’abord été mené à partir des données pharmacologiques issues des essais cliniques complétées par celles de la pharmacovigilance. Les effets de certains médicaments, qui induisent une somnolence, ont alors pu être mis en lumière. Il apparaît, ainsi que l’a indiqué M. Bernard Delorme, de l’unité de l’information des patients et du public de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, que sur les 16 000 médicaments qui sont autorisés aujourd’hui en France, dont 9 000 sont commercialisés, « un tiers […], soit 3 000, ont été identifiés comme ayant des effets potentiels sur la conduite. » (74)

Afin d’affiner ces résultats, une étude a été lancée par l’INSERM afin de croiser les données accidentologiques issues des BAAC avec les fichiers de la CNAM relatifs à la consommation des médicaments incriminés. Cette étude a été décrite par M. Bernard Delorme au cours de son audition : « Elle a permis non seulement de connaître le nombre de personnes accidentées prenant tel ou tel médicament mais également d’évaluer la responsabilité des conducteurs accidentés. C’est une première mondiale, puisqu’elle a permis de récolter 75 000 dossiers documentés de conducteurs, qui se partagent pour moitié entre responsables et non responsables. » (75)

Il en est ressorti que seul un petit nombre de médicaments peuvent être considérés comme dangereux pour la conduite. La moitié des accidents attribuables à la conduite sous l’emprise de médicaments serait imputable aux psycholeptiques (anxiolytiques et hypnotiques) et un tiers aux psychoanaleptiques (antidépresseurs) (76). Leurs effets sont susceptibles de s’additionner avec ceux qui résulteraient de l’absorption d’autres substances psychoactives et notamment d’alcool.

Enfin, l’étude a permis de confirmer que les médicaments sont responsables d’environ 3 % des accidents (77).

3. Les défauts d’attention et l’hypovigilance

« La caractéristique fondamentale de l’activité de conduite est qu’elle a lieu dans une situation dynamique en constante évolution et sous pression temporelle. Elle requiert à tout instant un contrôle cognitif de la part du conducteur » (78), a souligné Mme Catherine Gabaude, chargée de recherche à l’IFSTTAR. Ce contrôle cognitif peut être perturbé et amoindri par divers facteurs (79) :

–  les défauts d’attention, qui se produisent lorsque le conducteur est en situation de « double tâche ». Elle peut se manifester soit par une distraction, lorsque le défaut d’attention est dû à des facteurs externes au conducteur (sonnerie de téléphone portable, consultation d’un plan…), soit par une inattention quand elle résulte de facteurs internes. Cette dernière « est le plus souvent […] liée à la difficulté de canaliser ou de maîtriser ses pensées. Elle survient généralement lorsque la tâche à exécuter est routinière, et ne semble pas exiger une attention particulière de la part du conducteur, ce qui lui laisse l’opportunité de penser à autre chose. » (80) ;

–  la fatigue, quelle qu’en soit la cause (accumulation d’efforts, maladie, dépression…), qui peut se traduire par un état de somnolence, voire par un endormissement. La somnolence peut également être causée, par exemple, par la chaleur ou par un repas copieux.

De manière générale, il est difficile de quantifier ces manques d’attention. Selon certains chiffres cités par l’ONISR, ce facteur « pourrait être présent dans 25 à 50 % des accidents corporels. » (81) Une étude de l’INRETS, prédécesseur de l’IFSTTAR, de 2009 avait conclu que les problèmes attentionnels concernent 34,3 % des conducteurs impliqués dans les 1 107 accidents corporels étudiés (82).

a) Les effets des distracteurs, dont le téléphone portable

Les cas de « double tâche » au volant semblent relativement fréquents. L’IFSTTAR cite une étude américaine qui estime qu’un conducteur est engagé dans une ou plusieurs activités distractives autres qu’une conversation avec un passager pendant environ 16 % du temps durant lequel son véhicule est en mouvement (83).

Du fait, notamment, de la difficulté d’identifier les accidents dans lesquels le téléphone portable est impliqué, aucune étude accidentologique d’ensemble n’a été conduite en France sur ce sujet. En revanche, une expertise collective a été menée par l’INSERM et par l’IFSTTAR. Par ailleurs, depuis 2009, des observations sont effectuées sur le bord des routes, sur une base annuelle, par l’institut de sondage prestataire de l’ONISR. Elles permettent de quantifier le nombre de conducteurs qui conduisent en ayant le téléphone tenu en main et à l’oreille, ou tenu en main mais pas à l’oreille. En revanche, elles ne permettent pas de mesurer l’utilisation du téléphone portable avec un kit mains-libres.

TAUX D’UTILISATION DU TÉLÉPHONE PORTABLE

 

Tenu en main et à l’oreille

Tenu en main mais pas à l’oreille

Total

2009

1,8 %

0,5 %

2,3 %

2010

1,9 %

0,4 %

2,3 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 220.

L’ONISR estime à environ 6 % le nombre de conducteurs qui téléphoneraient à un instant donné, que ce soit avec ou sans kit mains-libres (84).

Selon l’expertise collective précitée, téléphoner accapare l’attention du conducteur et réduit donc les ressources attentionnelles indispensables à la conduite, qu’un kit mains-libres soit employé ou pas : « le conducteur qui téléphone est tout juste capable d’assurer en parallèle les tâches de conduite routinières, comme s’il se mettait en « pilotage automatique » » (85). Ainsi que l’a résumé M. Louis Fernique, « de l’ensemble des études que nous jugeons pertinentes par rapport au contexte européen, il ressort […] que la conversation téléphonique au volant représente un danger – en ce sens, l’utilisation du kit mains libres ne change rien. » (86)

L’expertise collective a permis de déterminer que téléphoner (avec ou sans kit main-libre) multiplie par trois le risque de provoquer un accident. Compte tenu du taux de prévalence de cette pratique, on peut estimer qu’environ 10 % des accidents survenant en France seraient imputables à l’usage du téléphone au volant (87).

Les risques liés à l’usage du téléphone en conduisant seraient croissants, dans la mesure où les nouveaux usages du téléphone, qui sont très répandus chez les jeunes, tels que l’envoi de SMS, qui nécessite une attention prolongée, entraîneraient un risque d’accident bien plus important. L’envoi et la réception de SMS entraîneraient ainsi un sur-risque d’environ 20 (88), contre 3 pour l’usage du téléphone. Pour ce qui est des autres distracteurs, et notamment des systèmes d’assistance à la conduite, des études sont en cours de réalisation, qui devraient fournir de précieux renseignements.

b) Inattention et hypovigilance

Sous ces différents termes, auxquels l’on pourrait ajouter, par exemple, l’endormissement, se cache une nébuleuse difficile à appréhender. Ces notions décrivent des processus non intentionnels (à la différence de la majorité des distracteurs), qui surviennent quand la tâche à exécuter est routinière ou en présence d’une fatigue importante. Si l’inattention recouvre plutôt le fait de « penser à autre chose », sans qu’une fatigue ou une somnolence particulière ne soient en cause, l’hypovigilance est souvent causée par ces deux derniers éléments. Leur importance dans le déclenchement des accidents ainsi que leur caractère de cause d’insécurité routière sont sujets à débats au sein de la communauté scientifique.

L’hypovigilance, qui peut aboutir à l’endormissement, « est difficile à mettre en évidence lors des accidents car elle requiert un faisceau d’indices » (89), a expliqué M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR.

Elle serait présente selon certaines études menées aux États-Unis, dans 13 % des accidents (90). En France, cette réalité peut être appréhendée par l’intermédiaire des BAAC pour lesquels la cause « malaise-fatigue » est mentionnée comme manifeste et déterminante. Tel est le cas dans 8 % des accidents mortels survenus en France en 2010 comme en 2009. Ce résultat est fortement variable selon les réseaux en question. Selon une étude de l’Association française des sociétés d’autoroutes menée en 2009, un tiers des accidents mortels survenus sur autoroute seraient attribuables à l’hypovigilance (91), chiffre qui est supérieur à ceux de l’ONISR.

TAUX DE MISE EN CAUSE DES « MALAISE-FATIGUE »
DANS LES ACCIDENTS MORTELS EN FRANCE EN 2010

 

Autoroutes

Routes nationales

Routes départementales

Autre réseau

Tous réseaux

Jour

22 %

22 %

9 %

5 %

10 %

Nuit

14 %

7 %

5 %

2 %

5 %

Ensemble

18 %

15 %

7 %

3 %

8 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 34.

La DSCR vient de lancer une étude avec le docteur Pierre Philip, professeur au CHU de Bordeaux, pour mieux appréhender ces différences entre les réseaux, a indiqué M. Louis Fernique (92).

Le rapport de l’IFSTTAR consacre également des développements aux accidents qui seraient causés par d’autres pathologies que celles qui ont été précédemment abordées (pathologies cardiovasculaires, déficiences auditives ou visuelles, diabètes, dépression…). La liste pourrait être longue, mais la relation entre ces différentes pathologies et un surrisque pour la conduite n’est ni automatique (elle dépend notamment du traitement suivi), ni établi avec certitude. Certaines études montrent cependant que le risque cardio-vasculaire est à l’origine de 1 à 11 % des décès sur la route, mais ces accidents provoquent rarement d’autres victimes que le conducteur lui-même (93).

4. Les causes tenant aux véhicules et aux infrastructures

La part des causes tenant aux infrastructures et aux véhicules dans les accidents de la circulation est particulièrement difficile à apprécier, du fait, notamment, du manque d’indicateurs pour les objectiver. Il ne s’agit pas ici de quantifier la part respective de chaque catégorie d’usager ou de réseau dans l’accidentologie générale (94), mais d’analyser de quelle manière ils peuvent constituer l’une des causes d’un accident.

a) Les véhicules

Selon les données des forces de l’ordre, dans 6 à 8 % des accidents corporels, le véhicule est comptabilisé comme facteur d’accident. On peut en citer quelques exemples : éclatement d’un pneumatique, défaillance du système de freinage, anomalie du fonctionnement moteur… Il est difficile, de manière générale, de faire la part des choses entre un mauvais entretien du véhicule et un défaut inhérent à ce dernier (95). A également été évoqué le fait que les véhicules modernes, plus confortables, pouvaient donner une impression de sécurité au conducteur, constituant ainsi une cause indirecte d’accident.

En dehors de ces défaillances à proprement parler, le véhicule peut être analysé comme une source de sécurisation de la conduite. On distingue à ce titre la sécurité active (ou primaire) de la sécurité passive (ou secondaire), la première ayant pour but de « prévenir l’accident », alors que la seconde cherche à « réduire autant que possible les conséquences de l’accident » (96), selon les définitions proposées par Mme Anne Guillaume, directrice du LAB.

Si la première a beaucoup évolué et est encore très prometteuse, la seconde a permis, progressivement, de réduire la létalité des chocs. Ainsi que l’a indiqué Mme Anne Guillaume, « l’enquête effectuée par le LAB sur l’évolution des lésions, graves à mortelles, subies par un conducteur ceinturé lors d’un choc frontal démontre que les dispositifs dont les véhicules ont été dotés au fil des années – en premier lieu le renforcement de l’habitacle, mais avec tous les compléments indispensables que sont l’airbag, la ceinture de sécurité, les limiteurs d’efforts, etc., car la rigidité accrue des structures augmente l’énergie transmise aux passagers – ont permis de diminuer très sensiblement l’importance des lésions pour un même choc. » (97)

Cependant, ces facteurs d’amélioration de la sécurité des véhicules entraînent, en contrepartie, une augmentation du poids des véhicules, qui peut aggraver les conséquences d’un accident pour les autres usagers. En effet, le risque d’être tué est très supérieur dans le véhicule le plus léger (98) ; c’est ce que l’on appelle l’« agressivité » d’un véhicule.

Il faut également prendre en considération le fait que l’âge moyen du parc de voitures étant de 8,3 ans, le renouvellement presque complet du parc prend une quinzaine d’années (99). Les effets des innovations technologiques qui contribuent à l’amélioration de la sécurité tant passive qu’active des véhicules ne se font donc sentir que progressivement dans le temps.

Au titre de la sécurité passive, il faut mentionner un facteur spécifique de gravité des accidents de la circulation qu’est l’absence de port de la ceinture de sécurité. Le taux de port de la ceinture est en progression constante mais il est encore fortement variable. En 2010, il était ainsi de 98,9 % en rase campagne et de 95,5 % en ville. Il est beaucoup plus fort à l’avant des véhicules qu’à l’arrière (85 % seulement en moyenne) et pour les enfants que pour les adultes (92 % contre 78 % à l’arrière des véhicules) (100). L’efficacité de la ceinture de sécurité est pourtant démontrée. L’ONISR estime à 341 le nombre de vies qui auraient pu être préservées si le port de la ceinture était systématique (101). Des progrès pourraient également être réalisés en matière d’utilisation de rehausseur et de siège adapté pour les enfants, lesquels permettent une forte réduction des lésions corporelles engendrées par un accident (102).

b) Le cas particulier des deux-roues motorisés

Le sur-risque frappant les conducteurs de deux-roues motorisés est particulièrement important. Il est d’autant plus préoccupant que ce parc est en augmentation, que les personnes qui les utilisent sont en général jeunes et que les séquelles qui résultent des accidents subis sont en moyenne plus graves, notamment en termes de handicap.

Plusieurs facteurs, soulignés par l’IFSTTAR, expliquent la vulnérabilité accrue des conducteurs de deux-roues motorisés :

–  les possibilités restreintes de protection en cas de choc, l’usager ne disposant pas d’un habitacle ;

–  la sensibilité élevée aux conditions d’adhérence, que ce soit pour un freinage ou pour un changement de trajectoire ;

–  leur détectabilité réduite par les autres usagers, en raison de leur gabarit visuel mais aussi du manque d’habitude de ces derniers ;

–  le comportement de certains utilisateurs, en particulier le respect des vitesses autorisées (103).

c) Les infrastructures

L’infrastructure peut participer des causes d’un accident, ainsi que l’a montré M. Claude Azam en prenant l’exemple de l’accident d’autocar, survenu à Puymorens, sur une route de montagne, au cours duquel « une de ses roues a « pris » le bas-côté de la route. Le véhicule a alors dévié de sa trajectoire, pour venir en heurter un autre. Nous avons constaté lors de l’enquête que cette voie avait été « rechargée » en bitume sans que les bas-côtés soient remis au même niveau. Une marche s’était donc formée. Lorsque la roue de l’autocar est partie sur le bas-côté, le conducteur n’est pas parvenu à remonter la marche et a perdu la maîtrise de son véhicule. » (104)

Le rôle causal joué par l’infrastructure est cependant difficile à quantifier, dans la mesure où, en tout état de cause, l’usager doit adapter son comportement aux conditions de circulation. D’ailleurs, lors de son déplacement à Strasbourg, la mission a appris que les forces de l’ordre, qui remplissent les fiches BAAC, ont de grandes difficultés à déterminer si la voirie est en cause et préfèrent attribuer les accidents à un défaut d’adaptation de la vitesse aux conditions de circulation (105).

Sous cette réserve préalable, les lieux que l’on appelle les « points noirs », où plusieurs accidents graves se sont déroulés, sont probablement ceux qui correspondent le mieux à ce que l’on pourrait identifier comme étant des infrastructures accidentogènes. Les spécialistes auditionnés par la mission ont cependant souligné le fait que les « points noirs », à proprement parler, avaient été traités, de manière à les rendre moins dangereux (106). Le rapport de l’IFSTTAR n’y consacre d’ailleurs pas de développements en tant que tels.

Il n’en demeure pas moins que certaines caractéristiques des infrastructures ainsi que certains aménagements peuvent réduire ou, à l’inverse, accroître la probabilité d’accident. Pour donner un exemple parlant, si l’on ne peut pas faire de la simple présence d’un passage à niveau sur une voie une cause d’accident, il n’en demeure pas moins que si tous les passages à niveau avaient été supprimés, aucun accident ne se produirait à leur hauteur. De la même manière, il est avéré que la diffusion des carrefours giratoires entraîne une diminution importante de la mortalité (12 tués en 2010 dans un giratoire contre 184 en carrefour ordinaire).

Le rapport de l’IFSTTAR met en lumière deux caractéristiques routières qui sont essentielles pour la sécurité routière : la visibilité de la route et les caractéristiques de la surface : la première offre à l’usager une meilleure compréhension de la route et la seconde détermine la distance de freinage, laquelle est fonction du niveau d’adhérence (107). On peut y ajouter la présence d’obstacle, à proximité de la chaussée, ainsi que l’a signalé le préfet Régis Guyot : « En 2009, un peu plus de 1 200 personnes se sont tuées en rase campagne contre des obstacles fixes – dont environ un tiers contre des arbres. La recherche a mis en évidence des données qui sont rarement portées à la connaissance du public. Dans ce type d’accident, 43 % des décès surviennent entre zéro et deux mètres de la chaussée, 25 % entre deux et quatre mètres, et un petit tiers au-delà de quatre mètres. Les études techniques ont par ailleurs prouvé que l’élimination ou le recul de ces obstacles fixes permettrait d’éviter 80 % des décès à moins de deux mètres de la chaussée, 50 % entre deux et quatre mètres et 30 % au-delà. Autrement dit, on pourrait espérer un gain de 700 vies. » (108)

Enfin, même si elles ne relèvent pas réellement de l’infrastructure, il faut mentionner, au titre de l’environnement propre à la circulation, les circonstances météorologiques, qui sont susceptibles de dégrader les caractéristiques d’adhérence et de visibilité. Le brouillard serait ainsi à l’origine d’1 %, à l’origine des accidents mortels. Pour ce qui est des tués sur chaussée mouillée, ils représentent 17 % des tués pour 2009. L’IFSTTAR estime qu’« avec l’usure du revêtement par le trafic et le climat, les caractéristiques d’adhérence se détériorent. Le taux d’accidents peut être multiplié par deux voire par quatre selon le niveau d’adhérence atteint. » (109)

C. UNE DISTRIBUTION INÉGALE DES RISQUES

Tous les usagers de la route ne sont pas égaux devant le risque routier. De très nombreuses variables doivent être prises en compte pour identifier les facteurs de risque et diverses classifications peuvent être élaborées. Pour s’en tenir aux principales d’entre elles, il est nécessaire de prendre en considération le sexe et l’âge, la catégorie d’usager ainsi que le type de réseau.

1° Des hommes, jeunes,…

L’âge et le sexe des usagers constituent les variables les plus importantes en matière d’accidentalité routière.

a) Le sexe, principale variable

« Le principal déterminant des accidents de la route s’impute à la tenue du volant par un homme ou par une femme. Le reste est presque négligeable » (110), a souligné M. Jean-Pascal Assailly, chargé de recherche à l’IFSTTAR. En effet, les hommes meurent beaucoup plus sur la route que les femmes. Le nombre d’hommes tués sur les routes est 3,4 fois supérieur à celui des femmes par million d’habitant. « On constate de grandes différences entre hommes et femmes. Parmi les jeunes, huit tués sur dix sont des garçons et, sur les deux filles, l’une se trouvait être la passagère d’un conducteur masculin. La responsabilité des accidents mortels s’établit donc à neuf contre un selon le sexe », a continué M. Jean-Pascal Assailly.

Ce chiffre résulte de facteurs tenant à la structure de la circulation routière Les hommes circulent davantage que les femmes : 15 000 km en moyenne chaque année pour les premiers contre 10 000 pour les secondes (111). De même, les conducteurs de deux-roues motorisés sont beaucoup plus fréquemment des hommes que des femmes. Or, cette catégorie paye un lourd tribut à l’accidentalité routière.

Mais ce chiffre est aussi le reflet de prises de risques différenciées selon les sexes. Ainsi, les conducteurs masculins représentent 92 % des conducteurs impliqués dans les accidents mortels au taux d’alcool positif (112). Il en va de même pour la consommation de cannabis et pour les vitesses excessives.

b) L’âge

L’âge constitue également une variable importante de l’accidentalité routière qui permet de distinguer deux catégories qui présentent un risque accru d’accident : les jeunes et les personnes âgées.

DISTRIBUTION PAR ÂGE DES PERSONNES DÉCÉDÉES
DANS UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION EN 2010

Source : Document fourni par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR.

Les jeunes de la classe d’âge 18-24 ans représentent 8,8 % de la population mais près de 21 % des personnes tuées sur la route (113). Le sur-risque est lié d’une part à l’inexpérience de la conduite et, d’autre part, aux conduites à risque précédemment évoquées (114). Ainsi que l’a indiqué M. Vincent Lassarre, « l’apprentissage du risque par les jeunes conducteurs, hommes ou femmes, est particulièrement long : ce n’est que vers l’âge de 23 ans que le saillant de la courbe s’atténue, indiquant que le risque diminue – il est alors pratiquement divisé par 10. » (115)

Pour ce qui est des personnes âgées, les données de l’accidentologie n’établissent pas avec certitude l’existence d’un sur-risque d’accident. Ainsi que le note le rapport de l’IFSTTAR, « peu d’études ont mis en évidence un risque d’accident augmenté lié au vieillissement locomoteur et sensoriel et, lorsqu’elles trouvent un sur-risque, celui-ci est de niveau assez faible. » (116) Ceci s’explique notamment par le fait que les conducteurs âgés tentent d’adapter leur conduite à leurs capacités. Ces conducteurs sont cependant impliqués dans des accidents spécifiques, notamment aux intersections (117), et leur responsabilité est plus souvent engagée (118). Cependant, il apparaît que les personnes âgées « sont surtout dangereuses pour elles-mêmes » (119), au sens où elles sont plus souvent victimes des accidents dans lesquels elles sont impliquées.

Il est intéressant de croiser l’âge des personnes tuées dans un accident mortel avec le véhicule qu’elles utilisaient, le cas échéant, afin de faire apparaître des catégories à risque plus précises.

DISTRIBUTION DES TUÉS PAR CATÉGORIES D’USAGERS
SELON LEUR CLASSE D’ÂGE EN 2010

 

0-14 ans

15-17 ans

18-24 ans

25-44 ans

45-64 ans

65-74 ans

75 ans et +

Total

Piétons

4,9 %

2,3 %

9,3 %

15,1 %

17,9 %

13,2 %

37,3 %

100 %

Bicyclettes

8,2 %

6,1 %

7,5 %

12,2 %

29,9 %

17,7 %

18,4 %

100 %

Cyclomoteurs

2,8 %

30,2 %

24,2 %

25,4 %

11,3 %

3,6 %

2,4 %

100 %

Motocyclettes

0,7 %

1,3 %

21,0 %

51,1 %

24,7 %

0,9 %

0,3 %

100 %

Véhicules légers

3,6 %

2,5 %

25,2 %

29,6 %

20,2 %

6,8 %

12,1 %

100 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 21.

DISTRIBUTION DES TUÉS PAR CATÉGORIES D’USAGERS
SELON LEUR CLASSE D’ÂGE EN 2010

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 21.

Ces données croisées, qui devraient être pondérées avec la part respective de chacune de ces catégories dans le trafic routier, laissent apparaître les sous-catégories suivantes :

–  les jeunes de 15 à 17 ans qui pratiquent le cyclomoteur. Ils représentent plus de 30 % des tués en cyclomoteurs en 2010 ;

–  les jeunes de 18 à 24 ans, qui connaissent une sur-accidentalité généralisée, quel que soit le mode de déplacement, à l’exception des piétons et des cyclistes ;

–  les conducteurs de motocyclettes âgés de 25 à 44 ans, lesquels forment plus de 50 % de ces usagers tués sur les routes en 2010 ;

–  les piétons âgés de plus de 75 ans qui représentent 37 % des piétons tués, catégorie destinée à croître du fait du vieillissement de la population et de l’allongement de l’espérance de vie.

2° …, en tant qu’usagers vulnérables,…

Tous les usagers n’ont pas le même risque d’avoir un accident. Les usagers de véhicules légers (automobiles) représentent plus de la moitié des morts sur la route. Cependant, ce chiffre doit être pondéré par le trafic de chaque catégorie d’usagers afin de déterminer le risque relatif de chacune d’entre elles. Ces données ne sont pas disponibles pour les cyclistes et les piétons, dont le trafic ne peut pas être évalué. Ils représentent respectivement 3,7 % et 12,1 % des tués sur la route en 2010.

PART DE CHAQUE CATÉGORIE PARMI LES PERSONNES TUÉES SUR LA ROUTE EN 2010

Piétons

485

12,1 %

Cyclistes

147

3,7 %

Cyclomotoristes

248

6,2 %

Motocyclistes

704

17,6 %

Usagers de véhicule léger

2 117

53,0 %

Usagers de véhicule utilitaire

146

3,7 %

Usagers de poids lourds

65

1,6 %

Autres usagers

80

2,0 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 16 et document fourni par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR. La catégorie « autres usagers » renvoie principalement aux voiturettes, aux tracteurs agricoles et aux véhicules de transport en commun.

ESTIMATION DU RISQUE PAR CATÉGORIE D’USAGERS EN 2010

Catégorie

Conducteurs et passagers tués dans le véhicule

Conducteurs et passagers tués par milliard de véhicules x km

Risque relatif

Cyclomotoristes

248

109,5

20,7

Motocyclistes

704

103,9

19,6

Usagers VL

2 117

5,3

1

Usagers PL

65

2,7

0,5

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 17.
VL : véhicules légers ; PL : poids lourds et transports en commun.

Les usagers de deux-roues motorisés sont particulièrement vulnérables, dans la mesure où ils présentent un risque relatif vingt fois supérieur à celui des conducteurs de voiture d’être tués sur la route. Les motocyclistes représentent en effet 17,6 % des personnes tuées (soit 21 % des personnes tuées en véhicules à moteur) alors que leur part dans l’ensemble du trafic est estimée à 1,2 %.

Il faut souligner que le type de véhicule n’est pas le seul facteur de risque à prendre en compte. Son âge importe également. L’ONISR estime en effet que le risque par kilomètre parcouru d’avoir un accident mortel de la circulation avec un véhicule de moins de 4 ans est 2 fois moins élevé que pour un véhicule de plus de 8 ans (120). Cela tient, d’une part, à l’amélioration de la sécurité des véhicules au fil du temps et, d’autre part, au fait que les jeunes conducteurs ont souvent des véhicules plus anciens.

LES CONDUCTEURS SANS PERMIS

Doit être envisagée la question d’une accidentalité éventuellement accrue des conducteurs qui circulent sans permis.

Environ 100 000 infractions sont relevées chaque année par les forces de l’ordre pour défaut de permis mais, faute de savoir combien de contrôles sont effectués chaque année, la proportion des conducteurs sans permis ne peut pas être déterminée sur ce fondement.

L’ONISR évalue, sur la base des conducteurs présumés non responsables dans les accidents, à environ 1,2 % le nombre de conducteurs qui circulent sans permis, ce qui correspond à un nombre de conducteurs sans permis de l’ordre de 450 000. Ceux-ci se répartissent de la manière suivante :

–  20 % l’ont perdu, le permis ayant été invalidé ou suspendu. Il faut noter que 85 700 permis de conduire ont été invalidés en 2010 ;

–  74 % ne l’ont jamais obtenu ;

–  6 % ont un permis qui ne correspond pas à la catégorie du véhicule conduit.

Il faut noter que la proportion de conduite sans permis est plus fréquente dans les grandes agglomérations qu’en zone rurale.

Si ces conducteurs représentent 1,2 % des conducteurs, ils sont impliqués dans 2,2 % des accidents corporels (2 066) et dans 3,8 % des accidents mortels (195), ce qui dénote un sur-risque d’accident important.

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, notamment p. 9, 145 et 146 ; audition de Mme Michèle Merli du 21 juin 2011 et de Mme Anne Lebrun du 22 juin 2011.

La mortalité de la quasi-totalité des catégories d’usagers a diminué depuis 2000, dans des proportions qui sont cependant variables et qui sont fonction de l’évolution du parc. Il faut noter le cas particulier des véhicules utilitaires, dont le nombre d’accidents mortels a pratiquement doublé en 10 ans.

ÉVOLUTION DE LA MORTALITÉ ROUTIÈRE
ENTRE 2000 ET 2010 PAR CATÉGORIES D’USAGERS

Usagers

Évolution de la mortalité routière entre 2000 et 2010

Évolution du parc entre 2000 et 2010

Piétons

- 43 %

Cyclistes

- 46 %

Cyclomotoristes

- 46 %

- 14 %

Motocyclistes

- 26 %

+ 44 %

Usagers de véhicule léger

- 60 %

+ 16 %

Usagers de véhicule utilitaire

+ 82 %

Usagers de poids lourds

- 52 %

- 8 %

Source : Document fourni par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR.

3° …sur une route départementale ou communale…

L’infrastructure est également une variable importante de l’accidentalité. On peut classifier les accidents par type de réseau et en fonction de leur configuration.

a) Le type de réseau

Ainsi que le note le rapport de l’IFSTTAR, « le réseau routier français est très long et très dense (un million de kilomètres), comparativement à celui des autres pays » (121). Cela n’est pas sans conséquences sur l’accidentalité. Les réseaux départementaux et communaux sont en effet très étendus et cumulent une large part de l’accidentalité.

PART RESPECTIVE DE CHACUN DES RÉSEAUX DANS L’ACCIDENTOLOGIE

Réseau

Part du linéaire

Part du trafic

Part des accidents

Part des tués

Autoroutes

1,1 %

25,5 %

6,4 %

6,0 %

Routes nationales

0,9 %

8,6 %

5,7 %

8,8 %

Routes départementales

36,8 %

39,5 %

32,5 %

66,2 %

Autres

61,3 %

26,3 %

55,4 %

19 %

Tous réseaux

100 %

100 %

100 %

100 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 24. La catégorie « autres » correspond au réseau communal.

GRAVITÉ, RISQUE ET DENSITÉ DES ACCIDENTS SELON LE RÉSEAU

Réseau

Gravité
(nb tués/nb accidents)

Exposition au risque
(nb tués/véhicule x km)

Densité
(nb tués/1 000 km)

Autoroutes

5,44

1,99

21,33

Routes nationales

8,54

10,66

51,92

Routes départementales

12,07

12,64

7,34

Autres

2,16

6,40

1,44

Total

5,79

8,05

4,24

Source : IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 24.

Ces données démontrent qu’il existe un risque différentiel selon les réseaux. En termes de nombre de tués, les routes départementales constituent le principal enjeu de sécurité routière, avec un risque d’accident six fois plus élevé que sur autoroute, qui constitue le réseau le plus sûr. Au total, 85 % des accidents mortels se déroulent sur une route départementale ou communale, chiffre qui est de 66 % pour les seules routes départementales.

En revanche, si l’on ne prend en compte que les accidents, c’est le réseau communal qui est le plus touché. Ces accidents sont cependant de beaucoup plus faible gravité, puisque le nombre de tués par accident y est environ six fois inférieur à ce qu’il est pour les routes départementales. De manière générale, alors que 72 % des personnes tuées le sont en rase campagne (hors milieu urbain), 70 % des accidents corporels se produisent en milieu urbain (122).

b) La configuration de l’accident

Il importe également d’avoir à l’esprit ce que représentent, en termes statistiques, les grands schémas d’accidents. Les ordres de grandeur sont les suivants :

–  environ 4 personnes tuées sur 10 le sont à la suite d’un accident sans tiers (38,5 %). L’accident découle en règle générale d’une perte de contrôle du véhicule, qui finit sa course contre un obstacle fixe. Une personne sur dix qui meurt sur la route perd ainsi la vie en heurtant un arbre. Ces situations peuvent résulter de nombreux facteurs, tels qu’une sortie de route en virage, une collision avec un animal, un endormissement ;

–  plus de 4 personnes tuées sur 10 le sont à l’occasion d’une collision entre deux véhicules (42,4 %). La moitié de ces collisions sont des chocs frontaux, qui se produisent généralement à l’occasion de dépassements. Les collisions à un carrefour représentent 15 % des accidents corporels en rase campagne (123) ;

–  moins d’une personne tuée sur 10 trouve la mort lors d’une collision entre plus de deux véhicules (7,9 %) ;

–  environ une personne tuée sur 10 est un piéton, qui est renversé par un véhicule (11,2 %) (124).

RÉPARTITION DES ACCIDENTS CORPORELS ET DES PERSONNES TUÉES SELON LE TYPE DE COLLISION EN MÉTROPOLE EN 2010

Type de collision

Nombre d’accidents corporels

Part des accidents corporels

Nombre de personnes tuées

Part des personnes tuées

Un véhicule

Un véhicule seul avec piéton(s)

11 689

17,4 %

447

11,2 %

Un véhicule seul sans piéton

14 178

21,1 %

1 537

38,5 %

Total accidents à un véhicule

25 867

38,4 %

1 984

49,7 %

Deux véhicules

Collision frontale

6 281

9,3 %

844

21,1 %

Collision par le côté

19 455

28,9 %

589

14,8 %

Collision par l’arrière

7 778

11,6 %

190

4,8 %

Autres collisions

3 547

5,3 %

71

1,8 %

Total accidents à 2 véhicules

37 061

55,1 %

1 694

42,4 %

Trois véhicules et plus

Collision en chaîne

1 942

2,9 %

43

1,1 %

Collisions multiples

2 045

3,0 %

261

6,5 %

Autres collisions

373

0,6 %

10

0,3 %

Total accidents à 3 véhicules et plus

4 360

6,5 %

314

7,9 %

Ensemble

67 288

100,0 %

3 992

100,0 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 128.

Afin d’expliquer le chiffre très élevé des personnes qui trouvent la mort lors d’un accident à une seule voiture en rase campagne (42 % des tués en rase campagne), les résultats des études détaillées d’accident distinguent cinq causes (125) :

–  une sollicitation trop importante du véhicule ;

–  une manœuvre de dépassement ;

–  la présence d’un élément sur la chaussée (liquide, gravillons, animaux) ;

–  l’exécution d’une tâche annexe par le conducteur (distraction) ;

–  des phénomènes de somnolence, endormissement.

Il est également possible de mettre en valeur les différences importantes qui existent entre catégories d’usagers, notamment quant à la répartition entre personnes tuées à l’occasion d’un accident sans autre véhicule, et avec un autre véhicule.

INDICE DE MORTALITÉ SANS TIERS PAR CATÉGORIE D’USAGER

Piétons

Cyclistes

Cyclo

Moto

VL

VU

PL

Autres

Toutes catégories

0 %

12 %

31 %

36 %

49 %

53 %

55 %

54 %

39 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 131. VL : véhicules légers ; VU : véhicules utilitaires ; PL : poids lourds et transports en commun.

Il en résulte logiquement que plus un usager circule à bord d’un véhicule massif et protecteur, plus son risque de perdre la vie à l’occasion d’un accident avec un autre véhicule sont faibles et, corrélativement, plus la probabilité que le décès soit engendré sans tiers est forte. Le pourcentage relativement faible d’accidents sans tiers pour tous les types de deux-roues est expliqué, par l’ONISR, par le fait que compte tenu de leurs conditions de conduite, ils sont moins soumis à l’hypovigilance (126).

Les statistiques disponibles permettent également de quantifier les situations particulières d’accidents :

–  les accidents corporels survenus au droit d’un passage à niveau, en 2010, ont été au nombre de 61, provoquant 17 décès ;

–  les remontées à contre-sens sur une route à chaussée séparée ont fait 25 morts en 2010, pour 104 accidents corporels.

4° …plutôt aux beaux jours et un vendredi ou un samedi soir

Les accidents de la circulation obéissent à plusieurs périodicités. La première est annuelle. Ces accidents se répartissent en effet différemment selon le mois de l’année concerné, ce qui explique que les évolutions soient mesurées entre le même mois de deux années consécutives. Si cette périodicité annuelle est marquée pour l’accidentalité dans son ensemble (127), elle l’est encore davantage pour celle des deux-roues motorisés.

Source : document fourni par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR.

Comme il a été dit précédemment, l’influence du climat sur la circulation routière, et donc sur l’accidentalité, est sans doute non négligeable et devrait être mieux mesurée.

L’accidentalité connaît également une périodicité hebdomadaire, avec un nombre important d’accidents qui surviennent dans la nuit du vendredi au samedi et du samedi au dimanche, ainsi que les veilles de fête. Le nombre de morts en moyenne sur la route est de 11 par jour, chiffre qui est plutôt de 9 à 10 en début de semaine et de 14 à 15 en fin de semaine.

RÉPARTITION DES ACCIDENTS EN FONCTION DU JOUR DE LA SEMAINE EN 2010

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 30.

Enfin, l’accidentalité obéit également à un rythme quotidien. Alors que seul 10 % du trafic a lieu de nuit, ce dernier est à la source de 44 % des décès (1 757 morts en 2010) (128).

DEUXIÈME PARTIE : UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE NE PEUT ÊTRE QU’UNE POLITIQUE PARTAGÉE

Une politique visant à améliorer la sécurité routière ne saurait être la simple mise en vigueur de mesures supposées être les plus efficaces pour réduire le nombre d’accidents. En effet, à s’en tenir à ce principe, l’usage de tout véhicule à moteur finirait par devenir interdit, puisque porteur de risque d’accident.

En vérité, la politique de sécurité routière constitue une conciliation entre l’aspiration à la mobilité, qui constitue l’une des manifestations de la liberté fondamentale d’aller et venir, et celle à la sécurité. Elle ne peut donc être efficace que si elle est acceptable par la société dans son ensemble. Elle ne saurait être imposée mais doit, à l’inverse, résulter d’un véritable pacte social, lequel pourra être d’autant plus facilement atteint que les dégâts que cause l’insécurité routière seront connus de tous.

I. – UNE MARGE DE PROGRESSION ENCORE IMPORTANTE

Malgré le bilan positif des politiques conduites depuis 2002 en matière de sécurité routière, cette dernière doit demeurer une priorité des politiques publiques, du fait des dégâts humains, sociaux et économiques que provoque l’insécurité routière.

A. L’INSÉCURITÉ ROUTIÈRE, UN GRAND GÂCHIS

L’accidentalité routière est un problème majeur de nos sociétés, tant par les traumatismes qu’elle induit que par les coûts qu’elle génère.

1. Un enjeu humain majeur

Mme Michèle Merli a donné, à l’occasion de son audition, la mesure des conséquences de l’insécurité routière : « depuis 1972, de nombreux drames de la route ont continué d’endeuiller les familles de France : 380 000 vies perdues, 8 900 000 blessés, 300 000 handicapés à vie, des dizaines de milliers d’orphelins… » (129)

3 992 personnes ont encore trouvé la mort sur les routes françaises en 2010. Ce chiffre peut sembler faible en comparaison des 18 000 personnes qui perdaient la vie chaque année dans la période qui a suivi l’année 1972. Il est cependant considérable si on le rapporte aux autres types d’accidents qui sont susceptibles de survenir. Récemment, une résolution du Parlement européen soulignait que la tolérance de la société face aux accidents de la route était toujours « relativement élevée » et que le nombre de morts sur les routes de l’Union prendrait une autre signification si on le rapportait à d’autres réalités voisines. Elle montrait que le nombre de victimes de la circulation routière (environ 35 000) « correspond à 250 avions de ligne de taille moyenne qui s’écraseraient au sol avec leurs passagers à bord » (130). Si l’on ramène ce chiffre aux proportions françaises, les 4 000 personnes qui meurent chaque année sur les routes correspondent environ à celles qui perdraient la vie dans 30 catastrophes aériennes sur le territoire français. Ce chiffre, qui est pourtant équivalent, susciterait à n’en pas douter une émotion plus forte. On voit bien là les progrès qui restent à faire pour réduire la tolérance de notre société vis-à-vis de cette forme de violence.

Il faut également prendre garde à ne pas oublier les personnes qui sont blessées dans un accident de la circulation. Si certaines blessures sont superficielles et ne portent pas à conséquence, tel n’est pas le cas de l’ensemble d’entre elles.

L’ONISR recense, pour l’année 2010, 87 173 blessés dont 31 387 ont été hospitalisés. L’IFSTTAR note cependant, dans son étude, que ce chiffre est sous-estimé. Il se fonde sur le nombre de blessés comptabilisés à l’étranger et sur les données issues du registre du Rhône pour estimer à environ 334 000 le nombre de blessés chaque année du fait des accidents de la circulation (131). Ce registre permet également d’affirmer que pour chaque tué, une personne restera handicapée lourdement à vie, chiffre qui est encore plus important pour les conducteurs de deux-roues, à tel point que l’IFSTTAR estime que « le nombre de blessés graves à deux-roues motorisés serait aujourd’hui supérieur à celui des occupants de voiture. » (132) Les lésions les plus fréquentes ont été décrites par Mme Martine Hours, médecin épidémiologiste à l’IFSTTAR : « Le profil des lésions est en outre différent selon l’âge ou selon qu’on est piéton, automobiliste ou cyclomotoriste : les blessures à la tête graves sont plus fréquentes chez les piétons âgés tandis qu’un jeune adulte sera davantage exposé à des problèmes orthopédiques. Et ce qui peut être bénin à une certaine époque de la vie peut à une autre entraîner une perte d’autonomie. » (133)

Les personnes qui sont blessées au cours d’un accident de la circulation doivent souvent affronter un parcours de soins particulièrement long, qui a été décrit par le Professeur Djamel Bensmail, chef de service en médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches, qui a souligné que « rien que la phase initiale – réanimation et rééducation – exige six mois à deux ans, voire davantage. » (134) Même une fois leur situation médicale stabilisée, de fréquentes complications surviennent. Par ailleurs, se pose le problème de leur réinsertion professionnelle : « Parmi ceux dont le traumatisme n’est que léger, 15 à 17 % encore seront dans l’incapacité de reprendre une activité. […] Quant aux blessés médullaires, une enquête menée à la fin des années 1990 et au début des années 2000 a montré que, sur 75 % qui exerçaient une activité professionnelle avant leur accident, seuls 33 % la reprenaient : moins de la moitié ! » (135), a indiqué le Professeur Djamel Bensmail.

Les répercussions sur la famille peuvent aussi être considérables. La mission d’information a pu le constater lors de l’audition de Mme Freani, qui a perdu son fils dans un accident de la circulation : « Le traumatisme psychologique a été tel, pour moi, que j’ai dû abandonner mon activité professionnelle – la sécurité sociale m’a placée en invalidité, au taux de 80 % – et je n’ai plus aucune activité associative, sociale ni sportive, non plus. Plus rien : tout est parti en éclats ce 5 octobre, à vingt-deux heures. » (136) De fait, la survenue d’un accident chez l’un des membres de la famille peut obliger un parent à interrompre son activité, ce qui entraîne une perte de revenus, voire contraindre à un réaménagement du logement ou à déménager, situation dans laquelle se trouvent 7 % des blessés, 4 % devant y renoncer faute de moyens (137).

2. Un coût économique considérable

Chaque année, le bilan de l’ONISR chiffre le coût de l’insécurité routière. En 2010, ce coût a été évalué à 23,4 milliards d’euros, soit 1,3 % du PIB. Les accidents corporels engendreraient un coût d’environ 10 milliards d’euros, contre 13,5 milliards pour les accidents matériels.

RÉPARTITION DES COÛTS DE L’ACCIDENTALITÉ ROUTIÈRE EN 2010

Personnes tuées

5,04 milliards d’euros

Hospitalisés

4,15 milliards d’euros

Blessés légers

0,30 milliard d’euros

Total blessés

4,45 milliards d’euros

Total victimes

9,49 milliards d’euros

Dégâts matériels des accidents corporels

0,43 milliard d’euros

Total accidents corporels

9,92 milliards d’euros

Accidents matériels

13,45 milliards d’euros

Total accidents

23,37 milliards d’euros

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 37.

Cette estimation comprend à la fois les coûts marchands directs (coûts médicaux et sociaux, coûts matériels, coûts induits en termes d’assurance, de justice…) et les coûts marchands indirects (perte de production des personnes tuées ou blessées, préjudice moral, esthétique, d’agrément…). Ce chiffre est cependant un minimum, dans la mesure où il ne prend pas en compte de nombreux frais inhérents à la sécurité routière (formation des médecins spécialisés, coût des politiques publiques, coût de la recherche en sécurité routière des constructeurs…).

Au titre de la responsabilité civile automobile, les assureurs ont versé, en 2010, 16,3 milliards d’euros, dont 26 % environ pour les 271 000 sinistres mettant en jeu la responsabilité civile corporelle (138). Ainsi que l’a indiqué M. Louis Fernique, on peut donc estimer, en première approche, que le coût pour la collectivité de l’accidentologie routière est au moins égal à la différence entre le coût théorique (23,4 milliards d’euros) et les indemnisations versées par les assurances (16,3 milliards d’euros), c’est-à-dire à 7 milliards d’euros (139).

En comparaison, l’effort financier de l’État en faveur de la sécurité routière apparaît limité. Selon le document de politique transversale annexé au projet de loi de finances pour 2011, les crédits consacrés par l’État à la politique de sécurité routière étaient les suivants.

CRÉDITS CONSACRÉS PAR L’ÉTAT Â LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Programme 207

Sécurité et circulation routière

259 682 470 €

Programme 176

Police nationale

554 195 134 €

Programme 152

Gendarmerie nationale

791 155 832 €

Programme 203

Infrastructures et services de transport

438 967 030 €

Programme 751

Radars

196 000 000 €

Programme 752

Fichier national du permis de conduire

16 050 000 €

Programme 166

Justice judiciaire

151 939 200 €

Programme 182

Protection judiciaire de la jeunesse

1 154 235 €

Programme 140

Enseignement scolaire public du premier degré

34 351 171 €

Programme 141

Enseignement scolaire public second degré

27 458 295 €

Programme 214

Soutien de la politique de l’Éducation nationale

580 324

Programme 190

Recherche dans le domaine de l’énergie

31 615 762 €

Programme 204

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

505 800 €

Programme 219

Sport

70 000 €

Programme 307

Administration territoriale

4 662 927 €

Programme 174

Énergie, climat

28 500 000 €

Source : Document de politique transversale annexé au PLF 2011.

B. UN RETARD TOUJOURS IMPORTANT SUR LES MEILLEURS PAYS EUROPÉENS

Ce constat est d’autant plus frustrant que certains de nos voisins européens ont des chiffres bien meilleurs en matière de lutte contre l’accidentalité routière. La Commission européenne collecte les données des 27 États membres au sein d’une base de données, ce qui permet les comparaisons (140).

À la lumière des chiffres étrangers, il apparaît que la France connaît un nombre de tués par million d’habitants (62) qui est un peu inférieur à la moyenne européenne (70), ce qui la place au onzième rang européen.

NOMBRE DE PERSONNES TUÉES DANS CHACUN DES PAYS DE L’UNION EUROPÉENNE

 

Population
(million d’habitants)

Personnes tuées

Ratio

Royaume Uni

61,8

2 337

38,00

Suède

9,3

358

38,49

Pays-Bas

16,5

644

39,03

Allemagne

81,5

4 152

50,94

Irlande

4,6

239

51,96

Malte

0,4

21

52,50

Finlande

5,3

279

52,64

Danemark

5,5

303

55,09

Espagne

45,3

2 714

59,91

Chypre

1,1

71

64,55

France

63,1

4 273

67,72

Italie

60

4 237

70,62

Slovaquie

5,4

384

71,11

Autriche

8,4

633

75,36

Estonie

1,3

98

75,38

Portugal

10,7

840

78,50

Slovénie

2,1

171

81,43

Hongrie

9,9

822

83,03

Belgique

10,9

944

86,61

République tchèque

10,4

901

86,63

Luxembourg

0,5

47

94,00

Lituanie

3,3

370

112,12

Lettonie

2,2

254

115,45

Pologne

38,1

4 572

120,00

Bulgarie

7,4

901

121,76

Grèce

11,2

1 456

130,00

Roumanie

21,5

2 796

130,05

Total Union européenne

497,4

34 817

70

Source : Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 83.

De manière générale, selon l’ONISR (141), on peut classer les pays européens en trois grandes catégories :

–  les pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Suède, Royaume-Uni, Allemagne, Irlande, Finlande et Danemark), où la mortalité routière est la plus faible (moins de 55 personnes tuées par million d’habitants) ;

–  les pays de l’Europe centrale, où la mortalité est la plus forte, avec plus de 100 tués par million, auxquels s’ajoute la Grèce, sans que leurs résultats n’atteignent ceux des pays émergents, qui dépassent largement les 200 personnes tuées par million d’habitants ;

–  les autres pays, où la mortalité routière se situe autour de la moyenne européenne. La France se situe dans ce dernier groupe de pays.

Il faut cependant noter que ces chiffres ne permettent pas une comparaison réellement satisfaisante entre pays européens, dans la mesure où le trafic peut être différent dans chacun des pays concernés. Il faudrait donc diviser le nombre de morts sur les routes non pas par le nombre d’habitants mais par le trafic qui y est effectivement parcouru. Or, on sait que la France est un pays de transit, qui est susceptible d’accueillir un trafic supérieur à celui des autres pays européens. Il n’en demeure pas moins que, même en considérant ces données rectifiées, la France reste dans la moyenne européenne.

NOMBRE DE MORTS SUR LES ROUTES
PAR MILLIARD DE KILOMÈTRES PARCOURUS EN 2008

Belgique

Autriche

Danemark

France

Finlande

Allemagne

Royaume-Uni

Suède

9,6

9

8,2

7,8

6,5

6,5

5,2

5,1

Source : Base de donnée International transport forum de l’OCDE.

D’un point de vue plus fin, les comparaisons européennes (142) sont également fort instructives. Il en résulte en effet que la France dépasse, parfois largement, la moyenne européenne pour un certain nombre de catégories d’usagers. Ainsi, le pourcentage de personnes tuées sur la route dans un accident où l’un des conducteurs avait un taux d’alcoolémie positif le plus élevé d’Europe est celui de la France.

QUELQUES DONNÉES MARQUANTES DES COMPARAISONS EUROPÉENNES

 

En France

Moyenne européenne

Part des 18-24 ans parmi les tués sur la route

21,1 %

16,8 %

Part des usagers de deux-roues motorisés parmi les tués sur la route

28,2 %

18,8 %

Pourcentage d’accidents où l’alcool est impliqué

30,8 %

25 %

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 84-87.

Même si ces comparaisons européennes montrent que la France a encore du chemin à parcourir pour rejoindre le peloton de tête des États européens, l’écart entre ces derniers et notre pays se réduit. D’ailleurs, la réduction de la mortalité routière enregistrée en France depuis 2002 a contribué pour 29 % à la diminution de la mortalité routière en Europe, faisant ainsi de la France le plus gros contributeur à la diminution du nombre des morts sur les routes européennes (143).

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE MORTS PAR MILLION D’HABITANTS
DEPUIS 1991, EN ITALIE, FRANCE, ESPAGNE, ALLEMAGNE ET AU ROYAUME-UNI

Source : Base de donnée CARE de la Commission européenne.

C. 2 000 MORTS SUR LES ROUTES EN 2020, UN OBJECTIF ATTEIGNABLE AVEC UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE AMBITIEUSE ET PARTAGÉE

Dans la lignée du Président Jacques Chirac, qui a été à l’origine de la baisse importante de l’accidentalité routière à partir de 2002, Nicolas Sarkozy a fixé comme objectif de son mandat le chiffre de 3 000 morts sur la route en 2012. Cette ambition est cependant compromise par les résultats mitigés qui ont été enregistrés ces dernières années. Dans le but de corriger une tendance qui semblait mal engagée en ce début d’année et de maintenir l’espoir d’atteindre le chiffre des 3 000 morts en 2012, un CISR a été convoqué le 11 mai 2011, dont les conséquences ont été évoquées (144). Il semble cependant que cet objectif ne pourra pas être atteint en 2012, l’année 2011 devant vraisemblablement se situer à niveau comparable par rapport à l’année précédente (autour de 4 000 morts).

Face à cet échec, c’est la politique de sécurité routière dans son ensemble qu’il faut revoir. Il est à cet égard éclairant que Mme Michèle Merli, alors Déléguée interministérielle à la sécurité routière, ait tenu les propos suivants : « Je ne sais que répondre à propos de la levée de boucliers contre les mesures récemment prises » (145), traduisant un certain désarroi au plus haut niveau de la sécurité routière française. Ce désarroi se comprend aisément. Elle-même l’explique d’ailleurs dans la suite de son audition : « L’une des causes des protestations actuelles est sans doute aussi que, alors même que, depuis quatre mois, nous devions bien constater une détérioration très nette de la sécurité routière, ces décisions n’étaient pas attendues. » (146)

Pour le dire plus explicitement, la politique qui est actuellement menée engendre une triple frustration. Frustration des responsables de la sécurité routière, tout d’abord, qui ont du mal à enrayer la perte d’efficacité de la politique qu’ils mènent. Frustration des usagers ensuite, qui ont l’impression que s’abat périodiquement sur eux une série de mesures répressives sur lesquels ils n’ont pas de visibilité et dont les objectifs ne leur sont que peu explicités. Frustration des scientifiques enfin, qui disposent de la connaissance en matière de sécurité routière et qui ont souvent de multiples idées à soumettre aux décideurs politiques, mais qui ne sont guère écoutés de ces derniers. Dès lors, chacun de ces trois acteurs, tout en étant convaincu de faire le maximum (respectivement pour faire diminuer l’insécurité routière, respecter les règles et produire des connaissances), ne peut que constater que les résultats obtenus sont moins bons que ceux qui auraient pu l’être.

Pour surmonter ces difficultés, la sécurité routière a besoin de deux boussoles qui seules permettront d’en faire une préoccupation constante.

• En premier lieu, une volonté politique doit être réaffirmée avec force. Il revient non seulement au pouvoir exécutif mais aussi à la représentation nationale d’affirmer que la sécurité routière se situe en tête de ses priorités. À cette fin, la mission d’information souhaite que le seuil des 3 000 morts soit franchi le plus rapidement possible et fixe comme objectif le chiffre de 2 000 tués sur les routes en 2020, objectif ambitieux, puisqu’il correspond à une division par deux de la mortalité en dix ans, laquelle ne s’est produite que pendant la décennie particulièrement propice des années 2000.

• En second lieu, les principes sur lesquels cette politique est bâtie doivent être refondés. Il ne s’agit pas de bouleverser l’économie d’ensemble des actions de sécurité routière (contrôle sanction automatisé, contrôles d’alcoolémie, communication, formation…), qui ont pour beaucoup fait leurs preuves, mais de refonder les principes sur lesquels elle est bâtie. C’est pourquoi la mission a tenu à placer en tête de ses préconisations celles qui ont trait à la gouvernance de la sécurité routière.

II. – SIX PRINCIPES CARDINAUX POUR UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE AMBITIEUSE ET PARTAGÉE

« Pour le futur, il faudrait retrouver un consensus » a estimé M. Jean Chapelon (147). Ce consensus ne pourra pas être atteint si les méthodes décisionnelles qui ont été appliquées jusqu’à présent ne sont pas réformées. Le CISR du 11 mai 2011 a constitué l’exemple des travers qui sont ceux de la prise de décision en matière de sécurité routière en France : des mesures prises dans l’urgence, sans concertation préalable, qui n’ont pas été précédées ni accompagnées d’un effort d’information et de pédagogie.

Afin de restaurer la confiance, condition de la réussite d’une politique de sécurité routière ambitieuse, il est nécessaire de réformer en profondeur le processus décisionnel, en le fondant sur quelques grands principes transversaux qui garantiront, au-delà des aléas de la conjoncture, que la sécurité routière demeure une politique partagée.

On peut à ce titre identifier six grands principes, qui répondent à trois objectifs : parvenir à faire de la sécurité routière une politique systémique et juste, fondée sur une prise de décision sereine.

A. UNE DÉMARCHE SYSTÉMIQUE

« Il faut avant tout adopter une approche systémique, voir le problème dans son ensemble et non de façon éclatée. Par exemple, toutes les actions menées en faveur de la politique environnementale, comme celles visant à favoriser le transfert de la voiture vers les modes doux ou les transports en commun, ont des impacts en termes de sécurité routière [qu’il faut anticiper] » (148). Comme M. Jean-Paul Mizzi, directeur général adjoint de l’IFSTTAR, de nombreuses personnes auditionnées ont mis en lumière les pays étrangers qui ont fait de la sécurité routière une politique transversale aux différentes politiques publiques. Cela passe à la fois par une adaptation des structures, tant au niveau national que local, ainsi que par une action de communication et d’information renforcées, seules à même de diffuser la sécurité routière dans l’ensemble du corps social.

1. La globalité : proposer une vision de la sécurité routière

La politique de sécurité routière ne s’élabore pas au jour le jour. Elle doit s’inscrire dans un cadre à la fois interministériel et pluriannuel.

a) Une politique réellement interministérielle

Le constat posé par l’IFSTTAR en matière de gouvernance est sévère : « On peut parler d’un assemblage d’acteurs plutôt que d’un véritable système », écrit l’Institut. D’ailleurs, la mission a pu constater que le nombre d’acteurs impliqués dans la sécurité routière était considérable, que ce soit au sein de l’administration centrale, des établissements publics de l’État, de l’administration déconcentrée ou décentralisée. Par ailleurs, ainsi que l’a évoqué M. Louis Fernique, « S’agissant de la constellation de partenaires extérieurs avec lesquels nous travaillons, notamment dans le cadre des grandes concertations nationales … il peut arriver que, sur 80 participants, on dénombre 60 à 70 représentants d’intérêts différents – constructeurs, assurances… –, chacun a sa spécialité et tous ont leur importance. Les bonnes volontés sont nombreuses en matière de sécurité routière, les lobbies aussi… » (149)

LES PRINCIPAUX ORGANISMES DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

I. ORGANES INTERMINISTÉRIELS

Comme toutes les instances interministérielles, ces instances sont placés sous l’autorité directe du Premier ministre :

Le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) : il regroupe l’ensemble des ministres concernés par la sécurité routière, définit la politique du Gouvernement en la matière et assure son application. Les mesures adoptées par le CISR sont de nature très diverse, du dépôt d’un projet de loi à la rédaction d’une circulaire, et concernent tous les domaines de la sécurité routière, de la prévention à la répression.

Le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) : créé le 25 octobre 2000, il est chargé de formuler au Gouvernement des propositions en faveur de la sécurité routière. Pour ce faire il rassemble l’ensemble des acteurs concernés par la sécurité routière (élus, associations, entreprises et administrations). Il est assisté d’un comité d’experts dont les membres sont nommés par le CNSR sur proposition du Délégué interministériel à la sécurité routière. Ce comité d’experts est chargé de l’analyse des statistiques et des études de l’ONISR dans le but d’éclairer les travaux du CNSR et peut être consulté sur la qualité scientifique des publications mises à la disposition du public.

II ORGANES PLACÉS SOUS LA DOUBLE TUTELLE DU MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR ET DU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT

Le Délégué interministériel à la sécurité routière (DISR) : nommé par décret en conseil des ministres, il s’assure de la coordination de l’activité des ministères en matière de sécurité routière. Il préside le groupement interministériel permanent de la sécurité routière (GIPSR) et gère le secrétariat du CISR. Il s’appuie sur l’observatoire national interministériel de sécurité routière (ONISR) et des conseillers techniques mis à disposition par les ministères chargés de la santé, du travail, de la justice et de l’éducation nationale.

La Délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR) : cette délégation, créée en 1982 sous le nom de direction à la sécurité et à la circulation routières - direction qui est rattachée, à l’époque, au ministère chargé des transports - élabore et met en œuvre la politique de sécurité routière. Pour cela elle contribue notamment à la mise en œuvre des actions interministérielles, à la coordination des travaux législatifs et règlementaires sur le sujet, à la collecte et à la diffusion de l’information routière, à l’élaboration des politiques de sécurité routière et à la conception et à la mise en œuvre des systèmes de contrôles automatisés des infractions routières. En 2008, le périmètre de la DSCR a été modifié, la gestion du trafic a été confiée à la direction générale des infrastructures du transport et de la mer et la sous direction en charge de la sécurité des véhicules a rejoint la direction générale de l’énergie et du climat. Elle assure par ailleurs la direction du programme budgétaire 207 « Sécurité routière ». Elle est également responsable du programme LOLF n° 751 consacré aux radars et pilote les activités de déploiement et de maintenance des systèmes de contrôle automatisés. L’administration du Centre national de traitement (CNT) est confiée à un établissement public spécifique. Cette instance a d’abord été la Direction du projet interministériel de contrôle automatisé (DPICA) qui relevait à la fois de la tutelle du ministère de l’Intérieur et de celle du ministère de l’Ecologie, du développement durable, des transports et du logement. Depuis le mois d’avril 2011, il s’agit de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), établissement public placé sous la tutelle du seul ministère de l’Intérieur. Depuis novembre 2010, la DSCR est placée sous l’autorité conjointe du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement et du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Ce ministère met en œuvre la politique en matière de sécurité et d’éducation routières, à l’exclusion des politiques de sécurité des infrastructures routières et de réglementation technique des véhicules qui relèvent du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

III. SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DES TRANSPORTS

Le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) : sa mission est d’informer et de conseiller le ministre de l’écologie dans les domaines de la sécurité routière et des infrastructures de transport.

Le Bureau d’enquête sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) : il réalise les enquêtes techniques sur les accidents et incidents de transport terrestre et contribue à la diffusion des connaissances issues du retour d’expérience sur les accidents.

La Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) : elle met en œuvre, à travers la sous direction de la sécurité et des émissions des véhicules, la réglementation technique relative aux véhicules.

La Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) : la DGITM veille à la cohérence du réseau routier dans son ensemble et prend en charge la réglementation des transports routiers. Elle assure le pilotage de la gestion de la circulation routière. Le réseau scientifique et technique en apporte son expertise sur les sujets de sécurité routière an particulier dans les domaines des infrastructures, des équipements, des déplacements et du comportement des usagers.

IV. SERVICES DÉCONCENTRÉS DU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DES TRANSPORTS

Les Directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) : ces directions mettent en place le budget opérationnel de programme « sécurité routière » au niveau régional, disposent d’un observatoire régional de sécurité routière (ORSR) et animent les observatoires départementaux.

Les Directions interrégionales des routes (DIR) : elles assurent la sécurité des infrastructures et des usagers et veillent à la gestion du trafic et à l’information des automobilistes.

Les Directions départementales des territoires (DDT) : elles animent la politique locale de sécurité routière avec l’aide du service d’éducation routière et de l’observatoire départemental.

V. SERVICES DU MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

La Direction de la modernisation et de l’action territoriale (DMAT) : elle constitue la direction d’application des 2 fichiers essentiels à la sécurité routière : le Système d’immatriculation des véhicules (SIV) et le Fichier national des permis de conduire (FNPC).

La DMAT assure la centralisation des statistiques provisoires en matière d’accidents des départements. Elle établit le bilan des infractions relevées et le suivi du permis à points. De même, elle recense les statistiques relatives aux auteurs présumés d’accidents mortels, ainsi que les données portant sur le nombre d’immobilisations et de mises en fourrières décidées par les préfets.

La DMAT en lien avec la DSCR a également procédé, entre juin 2010 et juin 2011, à 25 entretiens de gestion sur la politique locale de sécurité routière avec les départements connaissant le plus de difficultés en la matière. A l’issue, elle a rédigé un guide des bonnes pratiques, qui a été largement diffusé à l’ensemble des services centraux et déconcentrés compétents en matière de politique locale de sécurité routière.

Elle est également chargée d’assurer la tutelle de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), dont les missions essentielles consistent à assurer le fonctionnement du Centre national de traitement (CNT) de Rennes, ainsi que le déploiement du Procès verbal électronique (PVe).

L’Unité de coordination de la lutte contre l’insécurité routière (UCLIR) : créée en juin 2010, l’UCLIR a pour vocation de coordonner l’action opérationnelle des services de police et de gendarmerie, de faire valoir leur point de vue dans les évolutions envisagées et de proposer des mutualisations réalisables en matière logistique.

La Direction générale de la police nationale (DGPN) : la direction centrale de la sécurité publique s’appuie sur ses unités généralistes et spécialisées afin d’assurer une mission quotidienne de lutte contre l’insécurité routière. La direction centrale des CRS met en œuvre des unités spécialisées en complément de l’action des services territoriaux.

La Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) : la DGGN assure une action continue sur l’ensemble du réseau autoroutier et du réseau secondaire. Elle s’appuie sur des unités généralistes comme les brigades territoriales autonomes et les communautés de brigades et des unités spécialisées de sécurité routière.

La préfecture de police de Paris : elle est en charge de la sécurité routière et de la gestion de la circulation sur Paris et les trois départements de la petite couronne.

Les préfectures : chaque préfet a la responsabilité de la politique locale de sécurité routière et met en place un pôle de compétences Etat regroupant les services déconcentrés de l’Etat en la matière pour travailler en collaboration avec les collectivités locales, les entreprises et les associations. Le comité de pilotage de sécurité routière, généralement présidé par le directeur du cabinet du préfet, se réunit régulièrement, afin de fixer les orientations des actions de l’Etat ainsi que leur programmation.

VI. SERVICES DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

La Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) : elle prépare les projets de loi relevant du droit pénal et de la procédure, en élabore les circulaires d’application, coordonne et contrôle l’exercice de l’action publique et suit l’activité des tribunaux correctionnels, des tribunaux de police et des juridictions de proximité.

La Direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) : elle participe à la délivrance des attestations scolaires de sécurité routière.

VII. SERVICES DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ

La Direction générale de la santé (DGS) : elle contribue à la lutte contre l’insécurité routière par la sensibilisation des conducteurs aux risques d’accidents, en particulier la somnolence au volant, ainsi qu’à la mise en œuvre des contrôles concernant la consommation de substances psycho-actives et l’imprégnation alcoolique.

La Direction générale de l’offre de soins : elle pilote l’offre de soins prenant en charge médicalement les blessés.

Les partenaires de l’urgence : les médecins généralistes ou urgentistes, les ambulanciers et les associations secouristes, telle la Croix-Rouge en lien avec les sapeurs-pompiers qui relèvent des services départementaux d’incendie et de secours.

VIII. SERVICES DU MINISTÈRE DU TRAVAIL

La Direction générale du travail : à travers le plan Santé au travail, elle a pour mission de réduire le risque routier professionnel en évaluant ces risques et en y sensibilisant les entreprises.

IX. SERVICES DU MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE

La Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) : sa mission est de mettre en œuvre l’éducation à la sécurité routière dans les écoles, les collèges, les lycées et les centres de formation des apprentis. Cette éducation se fait, à l’école primaire, avec l’attestation de première éducation à la route (APER) puis au collège avec l’attestation scolaire de sécurité routière (ASSR).

X. LES PARTENAIRES DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Les collectivités territoriales : les régions interviennent dans les domaines de l’aménagement du territoire. Les départements sont compétents en matière de transport scolaire et de voirie départementale et participent à la mise en œuvre du document général d’orientation (DGO) élaboré par le préfet. Les communes interviennent en matière d’aménagement et de sécurisation de la voirie d’agglomération et le maire détient des pouvoirs de police en matière de circulation et de stationnement. Il coopère avec le plan départemental d’actions de sécurité routière à travers les actions qu’il propose.

Les associations : une centaine d’associations participent à la politique de sécurité routière dont certaines sont directement partenaires de la DSCR par convention. La raison sociale de ces associations peut avoir trait spécifiquement à la défense et au soutien des victimes d’accidents de la route, à l’intervention dans le domaine de la jeunesse, à régler des aspects spécifiques de la sécurité routière (alcool, prévention, éducation) ou à la sécurité de certains types d’usagers.

Les sociétés d’autoroute : elles veillent à l’amélioration des conditions de circulation à travers les infrastructures qu’elles gèrent et contribuent à la sensibilisation des usagers de ces infrastructures.

Les assurances : regroupées au sein de la FFSA et du GEMA, les sociétés d’assurance mènent des actions de prévention notamment à travers des fondations dédiées à la sécurité routière. Elles sont également partenaires de la DSCR dans le cadre d’une convention qui prévoit l’affectation de 0,5% du montant des primes d’assurance en responsabilité civile à des actions pour améliorer la sécurité routière.

Les établissements d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière : ils participent à l’amélioration de la sécurité routière notamment à travers le Conseil supérieur de l’éducation routière (CSER) chargé de questions telles que l’apprentissage de la conduite, le permis de conduire ou l’organisation des professions.

Les constructeurs automobiles : intégré aux directions techniques de PSA et de Renault, le Laboratoire d’accidentologie, de biomécanique et d’études du comportement humain (LAB) contribue à l’amélioration des connaissances en matière d’accidentologie. Par ailleurs, l’association CEESAR regroupe des constructeurs automobiles, des équipementiers, des écoles d’ingénieurs, des assureurs et des médecins et industriels dans un but de prévention des risques routiers.

Source : Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 287-298 et ministère de l’Intérieur

La création de la Délégation à la sécurité et à la circulation routières et la nomination d’un Délégué en 1972 ont constitué une étape importante en direction d’une coordination accrue des différents services de l’État. Elle a également permis de donner une visibilité accrue à la sécurité routière dans les médias.

Par les décrets n° 2010-1143 et 2010-1444 du 25 novembre 2010, la Délégation à la sécurité et à la circulation routières, à la tête de laquelle se trouve le Délégué interministériel, a été placée sous la double autorité du ministre de l’Intérieur et du ministre de l’Écologie. Cependant, de nombreux autres ministères sont concernés par la politique de sécurité routière. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Délégué interministériel bénéficie de l’appui de conseillers techniques mis à disposition par certains ministères (Éducation nationale, Justice, Santé et Travail).

Cependant, ce rapprochement auprès du ministère de l’Intérieur a pu accréditer l’idée que la politique de sécurité routière est désormais perçue comme uniquement répressive. Ainsi que l’a indiqué M. Robert Namias, « C’est une très mauvaise mesure que d’avoir transféré la Délégation interministérielle du ministère des Transports à celui de l’Intérieur, et ce pour une raison simple : la sécurité routière est un dossier symbolique ; or le fait qu’elle dépende du ministère de l’Intérieur souligne le caractère répressif de la politique de sécurité routière. » (150) Les effets négatifs de cette décision ont été confirmés par M. Benoît de Laurens, vice-président de l’agence de communication Lowe Strateus, « le rattachement de la DSCR au ministère de l’Intérieur a produit un basculement dans l’opinion publique, qui a eu l’impression d’une verbalisation à la chaîne. » (151) D’ailleurs, il faut noter que le Document de politique transversal, qui est l’un des vecteurs de l’interministérialité de la sécurité routière, comprend essentiellement des politiques destinées à modifier les comportements des usagers, celles qui portent sur les infrastructures et sur les véhicules étant minoritaires (152).

À l’inverse, les pays qui ont obtenu les meilleurs résultats en Europe sont ceux qui ne se focalisent pas sur l’aspect répressif, mais quin au contraire, entendent combattre l’insécurité routière par tous les leviers disponibles. Dans ces pays, « il ne s’agit plus d’incriminer le seul comportement des usagers, mais de mettre en question l’ensemble du système de sécurité routière » (153), écrit l’IFSTTAR.

En France, c’est au Premier ministre qu’il revient de coordonner les différents ministères du Gouvernement. Il préside d’ailleurs le Comité interministériel de sécurité routière, qui définit la politique du Gouvernement en la matière. C’est donc tout naturellement auprès de lui que devrait être placé le Délégué interministériel et la Délégation à la sécurité et à la circulation routières. De cette manière, la sécurité routière serait perçue comme un enjeu transversal, et une coordination interministérielle plus approfondie serait possible.

Afin de marquer l’importance de sa mission, le Délégué interministériel pourrait même avoir rang de Haut commissaire à la sécurité routière. Il serait alors un membre du Gouvernement, rattaché au Premier ministre. Cette préconisation a été formulée par M. Robert Namias, qui souhaitait même que la sécurité routière soit érigée au rang de secrétariat d’État (154), afin de donner plus de poids à cette politique.

Proposition n° 1 : Rattacher le Délégué interministériel à la sécurité routière au Premier ministre, éventuellement en lui donnant le statut de Haut commissaire.

Par ailleurs, la mission a constaté qu’il existait un nombre considérable de structures, administratives ou scientifiques, ayant de près ou de loin des relations avec la sécurité routière. Une démarche de rapprochement a été initiée par la création, le 1er janvier 2011, de l’Institut français des sciences et des technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR), issu de la fusion du Laboratoire central des Ponts et Chaussées (LCPC) et de l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS). Cet effort devrait être poursuivi.

b) Une politique pluriannuelle

Autre aspect de sa globalité, la politique de sécurité routière doit être organisée dans la durée.

De nombreuses personnes auditionnées ont expliqué l’échec des annonces du dernier CISR par le caractère abrupt des décisions prises. Personne ne savait, la veille du CISR, quelles seraient les mesures qui seraient annoncées le lendemain, d’où le sentiment d’une mauvaise gestion, au coup par coup, de la politique de sécurité routière et le jugement sévère de M. Robert Namias, ancien président du Conseil national de la sécurité routière, qualifiant ces mesures de « décisions contradictoires, très souvent prises à l’emporte-pièce et contraires à une politique efficace, utile et acceptée par tous. » (155)

La production statistique, telle qu’elle est organisée en France, peut induire une influence prépondérante du court terme dans la définition des politiques suivies. Le choix a en effet été fait de publier au début de chaque mois le nombre de morts du mois précédent, sur la base des remontées rapides qui sont effectuées par les forces de police et de gendarmerie (156). Or, ce sont généralement les résultats enregistrés par ces statistiques qui déterminent l’action à court terme des pouvoirs publics. L’existence de telles remontées rapides est certes positive, afin que les pouvoirs publics puissent être alertés au plus tôt des évolutions de l’accidentalité. De telles données doivent cependant être interprétées avec précaution, ainsi que l’a souligné le secrétaire général de l’ONISR, M. Louis Fernique : « Cette périodicité est extrêmement rapprochée pour des statistiques, qui n’ont de sens véritable que sur un temps plus long. Les chiffres d’accidentalité, même agrégés au niveau national, sont extrêmement volatils et difficiles à interpréter. L’ONISR est le seul organisme à publier aussi vite des chiffres en matière de sécurité routière, ce qui pose d’ailleurs un problème, car ceux-ci ne peuvent être correctement interprétés que couplés à des données de contexte. Or, lors de la publication du baromètre, on ne dispose pas encore des données concernant le trafic, qui ne seront disponibles que quatre mois plus tard, non plus que des bulletins complets de Météo France, qui le seront, eux, plus tard dans le mois. » (157)

À l’inverse, les pays qui connaissent les meilleurs résultats dans le domaine de la sécurité routière sont ceux qui se sont dotés d’une planification pluriannuelle. Ainsi que l’analyse le rapport de l’IFSTTAR, « au niveau mondial, deux modèles inspirent aujourd’hui les politiques de sécurité routière conçues dans les principaux pays occidentaux et soutenues par les instances internationales : le programme de « sécurité durable » des Pays-Bas (Dutch Sustainable Safety) et la « vision zéro » suédoise (Swedish Vision Zero). Ils ont été érigés en modèles (cf. la démarche comparative SUNFLOWER), du fait qu’ils affichent clairement une vision hautement ambitieuse et de long terme de la sécurité routière. […] Ces programmes reposent également sur l’adoption d’objectifs intermédiaires (pluriannuels) et finaux (à long terme). » (158)

Les statistiques publiées chaque mois ne sauraient donc déterminer la politique française de sécurité routière. Cette dernière doit au contraire consister en une vision de long terme, élaborée après concertation et sur le fondement des divers résultats scientifiques disponibles. D’ailleurs, il est illusoire de prétendre améliorer les infrastructures sur le court terme. Ces dernières doivent faire l’objet de programmes pluriannuels, ainsi que l’a souligné le préfet Régis Guyot (159).

La sécurité routière ne doit pas viser périodiquement le grand soir, au risque de se mettre à dos l’opinion publique, mais procéder par des évolutions prévisibles et concertées. « Il faut […] sortir du système « action/ réaction » », a estimé M. Jean-Paul Mizzi, directeur général adjoint de l’IFSTTAR. Il pourrait, à ce titre, revenir au Parlement, en liaison avec les acteurs de la sécurité routière, et notamment les administrations, les scientifiques et les usagers, de fixer ces perspectives de long terme. Tel est le rôle que joue, au Royaume-Uni, la Chambre des Communes, dont les études « insistent sur la nécessité d’une vision à dix ans, qui permet de définir des orientations d’une grande stabilité, indépendantes des préoccupations conjoncturelles. » (160)

2. L’information et la communication

Pour que la sécurité routière soit l’affaire de tous, encore faut-il que chacun puisse se convaincre de l’importance de cette cause, ainsi que l’a exprimé avec force Mme Chantal Perrichon : « Nous souhaitons aussi une communication efficace. Or, il n’y en a eu aucune depuis trois ans. Comment voulez-vous que les Français acceptent des mesures qui « réduisent » leur liberté si on ne leur explique pas pourquoi ? L’acceptabilité dépend de l’information. » (161)

a) L’une des missions principales de la sécurité routière

La communication constitue l’un des principaux leviers d’action de la DSCR. Les crédits qui lui sont consacrés s’élevaient à 18,66 millions d’euros en 2011 (autorisations d’engagement). Ces crédits sont imputés sur deux programmes budgétaires gérés par la DSCR : les programmes 207 (« Sécurité et circulation routières »), à hauteur de 15,66 millions d’euros, et 751 (« Radars »), pour un montant de 3 millions d’euros. Environ un tiers des crédits du programme 207 sont consacrés à la communication. Pour ce qui est du programme 751, il est mobilisé pour l’achat d’espaces publicitaires destinés à des campagnes visant à lutter contre la vitesse et à améliorer l’acceptabilité sociale du dispositif de contrôle automatisé. À titre indicatif, le coût des campagnes de communication est en moyenne le suivant.

COÛT D’UNE CAMPAGNE DE COMMUNICATION SELON LE MÉDIA CHOISI

Média

Coût unitaire d’une campagne

Contenu

Télévision

1,5 M €

Spot de 30 secondes
3 x une semaine de diffusion

Radio

0,9 M €

3 spots radio de 30 secondes
3 x une semaine de diffusion

Presse

1,5 M €

3 x 1 jour de parution dans la PQR, la PQN et les magazines

Affichage

0,8 M €

1 semaine d’affichage 4x3m sur 12 000 faces

Internet

0,2 M €

3 semaines d’affichage sur 10 sites

Source : DSCR. (PQR : presse quotidienne régionale ; PQN : presse quotidienne nationale).

Ces campagnes officielles ne résument pas la totalité de la communication de la DSCR. La DSCR participe également, chaque année, à une vingtaine de manifestations, telles que le Mondial de l’auto, différents grands festivals de musique ou certains grands salons des collectivités territoriales. Il faut également mentionner les interventions directes du Délégué interministériel dans la presse : ce dernier donne en moyenne 200 interviews par an, tandis que son service de presse répond à 600 sollicitations annuelles.

Seule une équipe réduite, d’une douzaine de personnes, est chargée de la communication publique dans le domaine de la sécurité routière, alors qu’il s’agit de l’un des budgets de communication les plus importants du Gouvernement. Ainsi que l’a indiqué Mme Laurence Derrien-Lallement, chef du département communication et information de la DSCR, « l’externalisation est très forte et nous travaillons avec les entreprises de tous les métiers de la communication » (162). De fait, les campagnes de communication sont proposées par un partenaire privé, dans le cadre d’un marché quadriennal passé avec une agence de communication, laquelle décline la stratégie quadriennale en plans annuels. L’agence Lowe Strateus a détenu ce contrat entre 2001 et 2011, ce dernier venant d’être attribué à l’agence Publicis Consultants.

Il faut toutefois noter que le budget de la politique de communication de la sécurité routière n’est en rien comparable à ceux qui sont mobilisés par les constructeurs pour faire la promotion de leurs véhicules. D’après M. Benoît de Laurens, vice-président de l’agence de communication Lowe Strateus, les sommes dépensées chaque année par les constructeurs avoisineraient les 300 millions d’euros (163).

b) Une mission à adapter

Selon les spécialistes de la sécurité routière, la politique de communication a joué un rôle important dans la baisse récente de la mortalité routière.

Plusieurs interlocuteurs de la mission d’information ont mis en lumière la possibilité, à travers une politique de communication bien maîtrisée, de faire sensiblement évoluer les mentalités. Ceci se manifeste notamment par les « effets d’annonce » qui ont bel et bien une réalité en matière de sécurité routière. Ainsi que l’a montré, notamment, M. Jean Chapelon, ancien secrétaire général de l’ONISR, « l’analyse des courbes montre que la baisse des vitesses est bien antérieure à la mise en place des radars fixes. En matière de sécurité routière, l’effet d’annonce est courant. Ainsi, en 1978, les infractions ont baissé avant l’autorisation donnée aux forces de l’ordre de pratiquer des contrôles d’alcoolémie sans passer par le procureur ; puis elles ont remonté quand les gens se sont rendu compte que les contrôles n’étaient pas si nombreux. De même, la vitesse a diminué avant que les radars ne soient en service. » (164) Par ailleurs, au terme d’enquêtes menées depuis 2005, 70 % des Français indiquent que les campagnes de communication les ont incités à changer de comportement, pourcentage qui est très important par rapport aux standards d’efficacité de campagnes analogues (165).

Cependant, si un certain nombre de campagnes récentes ont connu un succès important, telle que la diffusion du court film Insoutenable, qui a été l’objet de plus de 10 millions de connexions sur Internet, faisant de ce dernier la vidéo la plus consultée en France pendant l’année 2010, plusieurs intervenants ont évoqué la nécessité de rénover la politique de communication.

Traditionnellement, la politique de communication poursuivait trois objectifs, énumérés par Mme Laurence Derrien-Lallement : « réduire le nombre d’accidents graves et mortels, rendre acceptable la politique menée, aider les usagers à intérioriser les bons comportements. » (166) Sans entrer dans le détail de ce en quoi devrait constituer cette politique, qu’il n’appartient pas à la mission d’information de définir, plusieurs orientations se dégagent des auditions :

–  en premier lieu, la mission est convaincue que la sécurité routière doit être « permanente », pour reprendre le terme de M. Robert Namias (167;

–  en deuxième lieu, le rapport de l’IFSTTAR (168), ainsi que de nombreuses personnes auditionnées, ont souligné la nécessité de coupler mesures de prévention et mesures de répression. Ainsi que l’a indiqué Mme Chantal Perrichon, « les campagnes d’information doivent donc accompagner les mesures. Sinon, elles ne font que jouer sur l’émotion, sans rien changer aux comportements. » (169;

–  en troisième lieu, confirmant en cela un constat plus général (170), il est désormais nécessaire de cibler la politique de communication sur les personnes les plus récalcitrantes aux mesures de sécurité routière, tout en maintenant une communication générale ferme visant à éviter que ceux qui ont changé de comportement ne reviennent à leurs mauvaises habitudes. En conséquence, une communication plus ciblée doit désormais être pratiquée, qui passe notamment par la mise en œuvre d’une forme de « contrôle social », par l’entourage, de ceux qui ne sont pas naturellement réceptifs à la politique de sécurité routière. Mme Laurence Derrien-Lallement a donné un exemple de mise en œuvre de cette orientation dans le cas de l’alcool au volant : « Nous avons choisi de ne plus dire « ne faites pas » mais de passer par le contrôle social. […] Nous avons communiqué sur le thème : « Ne laissez pas une personne conduire… » » (171)

–  en quatrième lieu, il semble essentiel à la mission d’information de davantage communiquer sur l’intérêt de mener une politique de sécurité routière, de manière générale. Peu de personnes, en France, connaissent les ordres de grandeur des dégâts causés par l’insécurité routière. Certains chiffres emblématiques gagneraient à ce titre à être mis en perspective, tels que le nombre de morts chaque année sur la route – qui équivaut à une trentaine de catastrophes aériennes qui auraient lieu chaque année en France –, le nombre de blessés (certainement plusieurs centaines de milliers chaque année), le coût que cela représente pour l’ensemble de la société (près de 23 milliards d’euros) ou encore le nombre de vies qui ont été préservées, depuis 1972, grâce à la politique de sécurité routière (plus de 300 000). Il est nécessaire que nos concitoyens puissent avoir connaissance de ces ordres de grandeur, mais aussi qu’ils puissent être fiers des progrès réalisés en la matière depuis plusieurs années ;

–  en dernier lieu, la mission a constaté que l’une des idées reçues les plus tenaces en matière de sécurité routière consistait dans la croyance que « l’argent des radars » constituait, pour l’État, une source d’enrichissement importante (172). Cette idée fausse doit absolument être combattue à travers la politique de communication du Gouvernement. Or, comme l’a indiqué M. Claude Got, « je n’ai jamais vu présenter de façon valorisante pour l’action gouvernementale les sommes qui ont été épargnées par les usagers à la suite des décisions de 2002 – notamment grâce à la diminution des tarifs d’assurance » (173).

B. UNE DÉCISION SEREINE

À n’en pas douter, l’une des principales raisons de la mauvaise réception des mesures annoncées lors du comité interministériel du 11 mai 2011 résidait dans leur annonce abrupte. Afin que cette situation ne se reproduise plus et pour éviter que des épisodes de ce type ne portent atteinte à l’acceptabilité de la politique de sécurité routière dans son ensemble, il est possible de s’inspirer des expériences menées à l’étranger et de fonder la prise de décision publique sur deux principes forts : l’objectivité et la concertation.

1. L’objectivité : des décisions fondées sur les résultats scientifiques

« D’une certaine manière, la prise de décision, dans le domaine de la sécurité routière, n’est pas toujours extrêmement rationnelle. » C’est par cette phrase que M. Jean Chapelon ouvrait la partie de son livre consacrée aux relations entre expertise et décision politique (174). La suite de son propos est beaucoup plus explicite : « Une des raisons, qui n’est pas propre à la sécurité routière, de cette situation est le mode de prise de décision des gouvernements qui repose au niveau du Premier ministre sur un système d’arbitrage entre des positions de chaque ministère […]. Ce mode de prise de décision n’est […] pas adapté lorsque la décision repose sur des considérants scientifiques et que les ministères ne sont pas organisés pour produire ces considérants. […] Dans ce contexte, on comprend que le vraisemblable prime sur le vrai. De fait, comme il s’agit surtout de convaincre le public, l’essentiel du travail consiste à préparer le communiqué ou le dossier de presse du Comité interministériel de sécurité routière. » (175)

Près de trois années après leur formulation, ces remarques sont toujours pertinentes. Ainsi, le rapport de l’IFSTTAR souligne que « la contribution des milieux de la recherche et l’usage systématique des données produites par la démarche scientifique dans la définition et l’adoption des mesures de sécurité routière apparaissent secondaires. » (176) Du point de vue des décideurs publics, le point de vue est le même. Le préfet Régis Guyot, auteur de plusieurs rapports sur la sécurité routière, a ainsi affirmé que « le dialogue entre le chercheur et le décideur public reste en partie à inventer – les chercheurs ne savent pas toujours parler aux décideurs publics, qui eux-mêmes ne savent pas toujours exprimer parfaitement les objectifs qu’ils poursuivent. » (177)

Cette sous-exploitation des données scientifiques est d’autant plus dommageable que la recherche française ne souffre pas de la comparaison avec celle des pays européens qui connaissent les meilleurs résultats en matière de sécurité routière (178). Pourtant, certains exemples montrent qu’une collaboration satisfaisante entre chercheurs et décideurs est réalisable. Ainsi, M. Bernard Laumon, directeur de recherche à l’IFSTTAR, s’est-il félicité qu’ait pu être réalisée, à la demande des pouvoirs publics, l’enquête SAM, qui a conduit, pour la première fois, à mettre en évidence le surrisque entraîné par une consommation de cannabis préalable à la conduite (179). De même, l’évaluation qui a été réalisée du système de contrôle-sanction automatisé (CSA), fait-elle figure de modèle (180).

Pour la mission, il est primordial, dans l’intérêt de la sécurité routière, d’appuyer davantage la prise de décisions sur les recherches scientifiques. Il est incontestable que l’élaboration d’un plan pluriannuel de sécurité routière serait l’occasion de passer en revue, en dehors de toute urgence, les connaissances scientifiques permettant de présumer de l’efficacité de chacune des mesures envisagées. M. Sylvain Lassare, directeur de recherche à l’IFSTTAR, a ainsi évoqué le cas de l’Autriche, qui, pour la définition de son programme pluriannuel, a passé en revue 200 mesures. La mise en œuvre d’un tel programme en France conduirait naturellement à associer beaucoup plus étroitement les scientifiques à l’élaboration de son contenu.

Par ailleurs, la France pèche par le manque d’évaluation a posteriori des actions entreprises. Il semble qu’une fois qu’une mesure a été entreprise, son bien-fondé soit définitivement acquis. L’évaluation systématique des politiques publiques mises en œuvre est la condition de leur succès sur la durée. Cette dernière peut être couplée à une expérimentation, qui permet de tester une mesure avant de la généraliser. Un exemple récent donne une idée de ce en quoi une évaluation peut consister. Il s’agit de l’expertise collective qui a été menée par l’INSERM et l’IFSTTAR au sujet de l’impact de l’usage du téléphone portable sur l’activité de conduite (181). Grâce à cette dernière, toutes les données disponibles sont sur la table et les décideurs publics peuvent prendre une décision en connaissance de cause.

L’interface entre pouvoirs publics et chercheurs devrait naturellement revenir à l’ONISR et, en particulier, à son secrétaire général, qui se situe au contact direct du Délégué interministériel tout en étant un producteur de données. Dans cette hypothèse, il serait nécessaire de revaloriser les moyens dont ce dernier dispose.

Pour que les scientifiques soient en mesure de bâtir des expertises de qualité, encore faut-il qu’ils puissent avoir accès aux données pertinentes. Or, ainsi que l’ont indiqué plusieurs d’entre eux, la baisse de l’accidentalité routière entraîne une diminution de la taille des échantillons d’accidents qui peuvent être analysés. L’une des solutions consiste à mobiliser les bases de données étrangères ou à étudier les « presque accidents », c’est-à-dire les situations où un accident a failli se produire. Au sein des sources statistiques disponibles, le registre du Rhône occupe une place particulière, du fait de sa qualité et de sa fiabilité (182).

LE REGISTRE DU RHÔNE

Reposant sur le réseau de soins prenant en charge les victimes d’accidents de la circulation routière dans le département du Rhône, le registre du Rhône recense l’ensemble de des victimes d’accident corporel depuis 1995. Il a été mis en place par l’INRETS (actuel IFSTTAR) en collaboration avec l’ARVAC (Association pour le registre des victimes d’accident de la circulation routière dans le département du Rhône).

Ce registre permet de disposer de données fiables sur la morbidité liée aux accidents de la circulation, c’est-à-dire sur la connaissance des blessés et de la nature et de la gravité de leurs blessures. Pour ce faire, toutes les blessures sont codées selon une classification reconnue au plan international, l’AIS (Abbreviated Injury Scale). Cette classification permet non seulement de décrire la nature des blessures, mais aussi d’en préciser la gravité et le pronostic séquellaire, et ce à travers une échelle de gravité additionnelle, l’IIS (Injury Impairment Scale).

Ce registre permet de réaliser des extrapolations au plan national, qui rendent possible une approximation du nombre de blessés du fait de la circulation routière en France.

Source : IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 7-8.

Ce registre ne concerne que les accidents survenus dans le Rhône et ne permet donc pas de donner une image fiable de l’ensemble de l’accidentalité française. C’est pourquoi plusieurs chercheurs ont souhaité qu’un tel fichier soit également constitué dans plusieurs autres départements, au profil sociologique et géographique différents. Cette demande notamment a été relayée par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR (183). Le nombre de départements qui devrait être concerné dépendrait de la quantité de données dont les scientifiques ont besoin pour que l’échantillon récolté soit le plus représentatif possible.

Proposition n° 4 : Étendre le registre du Rhône à plusieurs autres départements.

2. La concertation avec les différents acteurs

Les lacunes en matière de concertation sont l’un des signes les plus flagrants des difficultés récentes de gouvernance de la sécurité routière en France. Dans un domaine où autant d’acteurs sont concernés, l’acceptabilité sociale d’une nouvelle mesure passe forcément par une concertation préalable.

a) Revivifier le « Parlement de la sécurité routière »

Au niveau national, une instance a été précisément pensée pour abriter la concertation. Il s’agit du Conseil national de la sécurité routière (CNSR), créé par un décret du 28 août 2001 (184). Aux termes de l’article 1er de ce décret, le CNSR a trois missions principales :

–  être associé à l’élaboration et à l’évaluation de la politique des pouvoirs publics en matière de sécurité routière ;

–  commander les études et recherches qui lui paraissent utiles pour améliorer la connaissance dans le domaine de la sécurité routière et faire procéder à des évaluations des actions engagées ;

–  remettre chaque année au ministre chargé de la sécurité routière un rapport rendu public.

L’article 4 du décret prévoit en outre que le CNSR soit « assisté par un comité d’experts, dont il nomme les membres sur proposition du Délégué interministériel à la sécurité routière. Ce comité est chargé d’éclairer les travaux du conseil. Sur l’invitation du président, les experts de ce comité participent aux débats du conseil. » M. Louis Fernique a indiqué à la mission que le CNSR « évaluait chaque année le programme d’activité de l’ONISR et le comité d’experts l’assistant le conseillait sur les méthodes statistiques, en même temps qu’il orientait son programme d’études et de recherches. » (185)

À la lecture de ces différentes missions, on mesure à quel point le CNSR est destiné à occuper une place importante dans la gouvernance de la sécurité routière, à l’interface entre les pouvoirs publics, la société civile et le monde de la recherche. Sa composition confirme cette impression.

LA COMPOSITION DU CONSEIL NATIONAL DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Le président du Conseil national de la sécurité routière est nommé par décret.

Le conseil est composé comme suit :

1° Trois personnalités qualifiées, désignées par le ministre chargé de la sécurité routière ;

Deux membres du Sénat et deux membres de l’Assemblée nationale, désignés par leur assemblée respective ;

Un membre du Conseil économique, social et environnemental ;

Un représentant des régions, désigné par l’Association des présidents de conseils régionaux ;

Un représentant des départements, désigné par l’Association des départements de France ;

Un représentant des communes ou des groupements de communes, désigné par l’Association des maires de France ;

Un membre du conseil de la jeunesse, désigné par celui-ci ;

Un membre du Conseil national des transports, désigné par la section permanente ;

Huit représentants des entreprises et institutions intéressées par la sécurité routière, désignés par le ministre chargé de la sécurité routière ;

Dix-sept représentants d’associations agissant dans le domaine de la sécurité routière, désignés par le ministre chargé de la sécurité routière ;

Deux représentants des professions médicales et des associations et fondations oeuvrant dans le domaine de l’hospitalisation ou de la santé publique, désignés par le ministre chargé de la santé.

2° Le ministre chargé des finances ou son représentant ;

Le ministre chargé de l’emploi ou son représentant ;

Le ministre de la justice ou son représentant ;

Le ministre de l’intérieur ou son représentant ;

Le ministre chargé de l’éducation nationale ou son représentant ;

Le ministre de la défense ou son représentant ;

Le ministre chargé des transports ou son représentant ;

Le ministre chargé de la jeunesse ou son représentant ;

Le ministre chargé de la recherche ou son représentant ;

Le ministre chargé de la santé ou son représentant ;

Le délégué interministériel à la sécurité routière ;

Le président de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Les membres mentionnés au 1° ci-dessus sont nommés par décret.

Le président du Conseil national de la sécurité routière et les membres mentionnés au 1° ci-dessus sont nommés pour une durée de trois ans. Le mandat des membres mentionnés au 1° prend fin, s’ils perdent la qualité au titre de laquelle ils ont été nommés. En cas de vacance survenant, pour quelque cause que ce soit, avant le terme normal du mandat, le président et les membres mentionnés au 1° sont remplacés, dans les mêmes conditions, pour la durée du mandat restant à courir.

Source :Article 2 du décret n°2001-784 du 28 août 2001 portant création du Conseil national de la sécurité routière et modifiant le décret n° 75-360 du 15 mai 1975 relatif au comité interministériel de la sécurité routière.

Cependant, ses membres n’ayant pas été renouvelés depuis 2008, ce dernier a cessé de facto d’exister, ainsi que l’a confirmé à la mission son ancien président, M. Robert Namias. Ce dernier a d’ailleurs attribué à sa disparition « les cafouillages comme ceux auxquels nous assistons depuis quelques semaines. Si le Conseil a permis d’éviter de tels cafouillages, particulièrement déplorables, a-t-il poursuivi, c’est qu’il entendait les avis des uns et des autres et qu’il était capable d’évaluer la façon dont seraient accueillies les mesures qui pouvaient être envisagées. » (186).

La principale fonction du CNSR était en effet, selon son ancien président, « d’éviter les pièges, de mesurer les seuils d’intolérance de l’opinion publique et de prévoir la façon dont serait acceptée telle ou telle mesure – ce qui est primordial en matière de sécurité routière car le seuil d’acceptabilité évolue en permanence, en fonction de l’environnement dans lequel la mesure a été prise et de la façon dont elle est portée, expliquée et communiquée dans la durée. » (187)

La mission ne peut donc qu’approuver la décision prise, dans le cadre du CISR du 11 mai 2011, de relancer le CNSR en en adaptant la composition aux nouveaux enjeux de la sécurité routière (188). Il est ainsi prévu que puissent y siéger des représentants des associations de collectivités territoriales gestionnaires d’infrastructure et des spécialistes des questions médicales, en lien notamment avec les problématiques contemporaines d’hypovigilance.

Proposition n° 2 : Revivifier le Conseil national de la sécurité routière.

b) Organiser une concertation de proximité

Toute aussi importante que la concertation nationale, la concertation de proximité permet de faire vivre, au jour le jour, la politique de sécurité routière. C’est en effet au niveau local qu’ont vocation à être prises de nombreuses mesures, notamment en ce qui concerne les infrastructures.

Plusieurs instances de concertation ont été créées et/ou réunies récemment au niveau départemental :

–  existent depuis 1986 (189) des commissions départementales de la sécurité routière, présidées par le préfet, qui réunissent les représentants des services de l’État, des conseillers généraux, des maires, des représentants des organisations professionnelles et des fédérations sportives de l’automobile, et des représentants des associations d’usagers (190). Elle est notamment compétente pour l’agrément des établissements d’enseignement de la conduite, l’autorisation des compétitions sportives ou l’agrément des organismes qui dispensent les stages de sensibilisation à la sécurité routière (191) ;

–  ont été expérimentées, à partir de 2006, des commissions consultatives départementales des usagers de la signalisation routière. Ces dernières ont été généralisées par une circulaire du 31 décembre 2007 mais n’ont pas encore été créées dans tous les départements. L’objectif de ces commissions est d’associer les usagers à l’identification des défauts de signalisation, avec l’idée qu’une signalisation correcte facilite le respect de la règle. Leur création est accompagnée de l’ouverture d’un espace Internet qui permet aux usagers d’avertir les autorités des défauts de signalisation ;

–  des commissions départementales élargies, comprenant notamment les parlementaires du département, ont été réunies au moment de la dépose des panneaux avertisseurs de radar, essentiellement au mois de juin 2011. La mission a eu communication des procès verbaux de ces réunions, qui se sont révélés, pour la plupart d’entre eux, particulièrement riches : ces commissions ont été l’occasion d’aborder, au niveau local, de nombreux sujets en lien avec la sécurité routière, au-delà de la problématique immédiate qui figurait à leur ordre du jour. Ces réunions démontrent l’existence d’une réelle volonté de discuter de la sécurité routière au plan local.

La mission considère que l’échelle départementale est la plus pertinente pour traiter des problématiques locales de sécurité routière. 85 % des personnes tuées sur la route le sont sur les routes départementales ou communales et 72 % trouvent la mort en rase campagne. C’est dire tout l’enjeu qui s’attache à ces réseaux. Pourtant, force est de constater, malgré ces structures de coordination durables ou temporaires, qu’il n’existe pas de réelle gouvernance locale de la sécurité routière, celle-ci relevant généralement du directeur de cabinet du préfet.

Il serait souhaitable de créer une commission départementale de la sécurité routière unique, qui réunisse, sous l’autorité du préfet, les forces de l’ordre, l’équipement, les associations, les usagers, les élus et les collectivités territoriales. Cette commission opérationnelle aurait notamment vocation à identifier et à traiter les endroits accidentogènes de l’infrastructure, à positionner les nouveaux radars en fonction de l’accidentalité locale et à veiller à la lisibilité de la route (192). En effet, la réglementation des routes relève de nombreuses autorités et il n’est pas rare que se succèdent des limitations de vitesse qui ne trouvent pas de justification immédiate dans la dangerosité de l’infrastructure. La commission serait donc chargée de rendre la route plus lisible, en coordonnant les différents acteurs. Elle pourrait également traiter des problèmes tels que l’éclairage de certaines portions d’infrastructure en fonction des besoins locaux.

Ce travail a été entrepris de manière convaincante dans certains départements. Mme Michèle Merli, ancienne Déléguée interministérielle à la sécurité routière, a évoqué le cas du préfet de la région Rhône qui « a réuni l’ensemble des gestionnaires de voirie pour leur demander de se mettre d’accord sur la gestion cohérente de chaque itinéraire » (193).

Proposition n° 3 : Créer dans chaque département, sous l’autorité du préfet, une commission Sécurité routière rassemblant tous les partenaires de la sécurité routière.

C. UNE POLITIQUE JUSTE

La perception de l’équité d’une mesure conditionne grandement son acceptabilité sociale, ainsi que l’a rappelé Mme Isabelle Ragot-Court, chargée de recherches à l’IFSTTAR (194). Dans le domaine de la sécurité routière, cette préoccupation prend une acuité particulière, dans la mesure où la sanction des infractions se traduit par le paiement d’amendes au profit de l’État, lequel peut être perçu comme visant d’abord à son propre enrichissement.

1. La transparence : les usagers ne doivent pas douter des intentions de l’État 

Le seul intérêt des pouvoirs publics dans la lutte contre l’insécurité routière est de préserver des vies. Pourtant, un sentiment persistant est né, qui attribue à l’État un autre objectif, celui de renflouer ses caisses par l’intermédiaire des contraventions qu’il engrange, notamment avec le contrôle sanction automatisé, considéré comme une « pompe à fric ».

a) Les radars appauvrissent l’État, enrichissent les usagers et la société dans son ensemble

Il est pourtant possible de montrer que ce dispositif fait perdre de l’argent à l’État, enrichit les usagers et la société dans son ensemble.

Pour ce qui est de l’État, la démonstration a été faite par M. Jean Chapelon. Le principal objectif des radars était de faire diminuer la vitesse moyenne pratiquée sur le réseau routier. Cette ambition a été réalisée puisque, depuis 2002, la vitesse moyenne a diminué de 9,8 km/h, s’établissant à 79,7 km/h. La consommation de carburant a diminué en conséquence, entraînant une diminution des recettes fiscales au titre de la TIPP que M. Jean Chapelon chiffrait, en 2007, à 500 millions d’euros par an, auxquels il convient d’ajouter le coût de fonctionnement du CSA, qui est d’environ 200 millions d’euros par an. Ces chiffres sont supérieurs au produit des amendes, qui est de 550 millions d’euros environ (195). Il faut par ailleurs rappeler que ces 550 millions d’euros sont consacrés, pour 100 millions d’euros au déploiement de nouveaux radars, pour 200 millions d’euros à l’entretien des radars existants et pour 100 millions d’euros à l’abondement de l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, le reste étant attribué aux collectivités locales (196).

Les usagers ont bénéficié de plusieurs façons de la baisse de l’accidentalité routière. En premier lieu, bien entendu, plusieurs milliers d’entre eux restent en vie chaque année grâce à la diminution des vitesses pratiquées. En second lieu, ainsi que l’a fait remarquer M. Yves Gascoin, président de l’association lyonnaise « Les droits du piéton », avec la division par deux du nombre des morts, les primes d’assurance, en euros constants, ont baissé de plus de 15 % depuis 2002 (197). De fait, elles ont augmenté de 10 % sur cette période, alors que l’indice des prix progressait de plus de 20 %. Si l’on rapporte ce pourcentage aux 15 milliards de prime d’assurance automobile qui sont payés chaque année, le calcul démontre que les usagers ont bénéficié financièrement du CSA.

La société, dans son ensemble, s’est également enrichie grâce à la baisse de la mortalité consécutive au déploiement du CSA. Le rapport de l’ONISR pour l’année 2000 évaluait à environ 28,5 milliards d’euros le coût de l’insécurité routière (198). Ce chiffre est, pour l’année 2010, de 23,4 milliards d’euros (199). Le gain est donc de plus de 5 milliards d’euros par an, sans prendre en compte l’inflation, du fait de l’amélioration de la sécurité routière dans son ensemble, laquelle résulte pour une large part de la diminution des vitesses pratiquées.

Cependant, la conviction des usagers est tenace, ainsi que l’a rappelé Mme Laurence Derrien-Lallement, chef du département communication et information de la DSCR : « Sur la question des « radars pompes à fric », la récrimination du public est bien connue et elle est très difficile à remettre en cause. Les usagers, en général, ne critiquent pas l’efficacité des radars et leur intérêt pour la sécurité routière ; mais ils ont beaucoup de difficultés à admettre – ce qui est pourtant le cas – que les recettes perçues ne vont pas principalement alimenter les caisses de l’État. En ce domaine, il faut faire de la pédagogie soutenue. » (200)

Ce sentiment a pu être accrédité, récemment, par la décision de retirer les panneaux avertissant de la proximité d’un radar : « Nombreux sont ceux qui considèrent que l’on retire les panneaux pour les piéger » (201), a indiqué à la mission M. Jean-Pierre Fourcat, président de la commission « sociologie des usagers » de l’association « 40 millions d’automobilistes ».

b) « Contrôler sans piéger », un principe à afficher

Pour faire pièce à cette fausse impression que l’objectif de l’État est de renflouer ses caisses, un effort important de communication est nécessaire, comme cela a été souligné. Cet effort doit s’appuyer sur les chiffres précédemment évoqués mais aussi sur un principe simple qui est de contrôler sans piéger.

Les hautes autorités de la police comme de la gendarmerie qui ont été reçues par la mission ont affirmé que ce principe faisait d’ores et déjà partie de leur politique de contrôle. Le général Éric Darras, sous-directeur à la sécurité publique et à la sécurité routière à la direction générale de la gendarmerie nationale, a ainsi expliqué : « Nous ne sommes pas là pour piéger les gens mais pour les protéger, qu’il s’agisse de sécurité routière ou qu’il s’agisse d’autres formes de délinquance. Peut-être un sentiment est-il en train de se développer à se sujet dans la population, mais j’affirme que nous ne recherchons en aucun cas le piégeage. » (202) Des propos analogues ont été tenus par M. Didier Perroudon, sous-directeur des missions de sécurité à la Direction générale de la police nationale : « C’est un fantasme de penser que les policiers sont astreints à un nombre de PV précis. On leur demande d’avoir des résultats, notamment en termes d’accidentologie. L’indicateur de l’efficacité, c’est la baisse de la délinquance routière et de l’accidentologie. Les DDSP (directions départementales de la sécurité publique) doivent essayer de cibler leurs contrôles en se fondant sur les zones accidentogènes. » (203)

Ces contrôles ne doivent pas non plus être pratiqués dans des zones où la lisibilité de la route n’est pas réelle, notamment sur les axes où plusieurs limitations de vitesse se succèdent sur une brève distance.

Le principe du « contrôler sans piéger » gagnerait à être clairement explicité et porté à la connaissance du public. Il devrait à ce titre être repris dans une circulaire adressée aux forces qui sont chargées de faire respecter le code de la route.

Proposition n° 14 : Donner instruction aux forces de l’ordre, par voie de circulaire, de pratiquer les contrôles de vitesse sur une route lisible et aux endroits les plus accidentogènes

À cet égard, la proposition de la mission (cf. supra) de rattacher le délégué interministériel au Premier ministre serait de nature à désamorcer certaines suspicions qui sont nées de son rattachement au ministère de l’Intérieur.

c) Les radars feux rouge, un dispositif à évaluer

Au 30 juin 2011, 583 radars avaient été positionnés à un feu rouge, le premier ayant été posé en mai 2009. M. Aurélien Wattez, chef du département du contrôle automatisé à la DSCR, a indiqué que « ces dispositifs sont d’ailleurs bien acceptés par la population dans la mesure où ils ont vocation à pacifier le milieu urbain et à réguler de façon plus intelligente les échanges en zones denses entre automobilistes, cyclistes et piétons. Nous tendons à les installer plus particulièrement devant les écoles ou les centres hospitaliers, c’est-à-dire dans des lieux fréquentés par des usagers vulnérables où, plus qu’ailleurs, nous devons porter attention au respect de la signalisation. » (204)

Le nombre d’infractions relevées par ces appareils est considérable. Ils ont en effet engendré un doublement de ce nombre sur la seule année 2010.

NOMBRE D’INFRACTIONS RELEVÉES POUR LE FRANCHISSEMENT D’UN FEU ROUGE

Année

Feu rouge hors CSA

Feu rouge CSA

Nombre total

Évolution

2008

213 481

0

213 481

- 4,5 %

2009

192 773

17 962

210 735

- 1,3 %

2010

158 666

287 421

446 087

111,7 %

Source : Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 228.

Or, le franchissement d’un feu rouge entraîne, de plein droit, le retrait de quatre points sur le permis de conduire. En conséquence, ainsi que l’a constaté Mme Anne Lebrun, sous-directrice de la circulation et de la sécurité routières au ministère de l’Intérieur, « un conducteur peut donc se trouver rapidement privé d’une partie importante de ses points alors qu’il ne lui semble pas avoir commis d’infraction très grave. » (205)

Face à ces sanctions massives (il faut rappeler qu’un retrait de quatre points équivaut à un excès de vitesse supérieur de 40 à 50 km/h à la vitesse limite autorisée), et pour préserver l’acceptabilité sociale du contrôle sanction automatisé dans son ensemble, il est nécessaire d’évaluer de bien informer le public sur le gain, en termes de vies préservées, de ces radars. Or, M. Jean Chapelon, ancien secrétaire général de l’ONISR, a jugé que ce dispositif avait une « efficacité assez limitée » : « Les feux rouges représentent un enjeu faible. Les études sont peut-être discutables, mais il en ressort que la baisse des accidents latéraux est compensée par la hausse des chocs à l’arrière. […] Aux yeux d’un accidentologue, l’enjeu des feux rouges est faible car il y a très peu de tués aux feux rouges. » (206)

Pourtant, franchir un feu rouge constitue une infraction d’une extrême gravité qui peut avoir des conséquences dramatiques, notamment pour les usagers de la route les plus vulnérables que sont les piétons, les enfants et les personnes âgées. La sanction du retrait de quatre points est donc parfaitement justifiée.

Il existe cependant des circonstances dans lesquelles le franchissement du feu rouge ou le non-respect de la règle de l’arrêt au feu orange sont justifiés, qu’il s’agisse de laisser passer un véhicule prioritaire (207), d’éviter un obstacle inopiné ou de prévenir une collision par l’arrière, lorsque le conducteur qui suit ne respecte pas les distances de sécurité. Un système de contrôle sanction automatisé n’est pas forcément en mesure de prendre en considération ces éléments de contexte.

Dans ces conditions, le retrait de quatre points peut être mal vécu par nos concitoyens. Une évaluation de l’efficacité et de la pertinence du dispositif est donc nécessaire. Pendant cette évaluation, le déploiement des radars devra être suspendu. Parallèlement, il faut équiper les feux munis d’un radar d’un système de décompte automatique qui permette d’informer le conducteur du temps restant avant que le feu ne passe au rouge. À défaut, les radars placés aux feux génèrent une angoisse importante pour les conducteurs.

Proposition n° 35 : Suspendre le déploiement des radars aux feux rouges dans l’attente d’une évaluation du dispositif et en équipant ceux qui sont déjà en service d’un décompte de temps.

2. L’équité : la politique répressive doit être perçue comme juste

L’acceptation de toute politique est conditionnée par la perception de son équité. La sécurité routière ne fait pas exception à ce principe. Pour rendre cette dernière acceptable, il est donc nécessaire de la rendre plus équitable. Trois conditions peuvent, à ce titre, être proposées. Une politique de sanction équitable doit, tout à la fois, soumettre chacun aux mêmes règles, récompenser les bons conducteurs, autant qu’elle sanctionne les mauvais, et donner toute leur place aux victimes.

a) Soumettre l’ensemble des usagers aux mêmes règles

Contrairement à ce qu’en disent ses détracteurs, l’un des avantages du système de contrôle sanction automatisé est de prévoir une sanction uniforme des usagers qui enfreignent les règles, en mettant fin aux indulgences.

Des lacunes importantes subsistent cependant dans l’équité devant la sanction, qui nuisent à la crédibilité de la politique engagée et notamment à celle du CSA. Certains usagers parviennent en effet à échapper à ce contrôle, le rendant ainsi plus difficilement acceptable par ceux qui ne peuvent éviter d’y être soumis. Il s’agit essentiellement :

–  des conducteurs de deux-roues motorisés, dans la mesure où la majorité des radars (si l’on cumule les radars fixes et mobiles de vitesse) photographient de face (208), ce qui ne permet pas l’identification du deux-roues, sa plaque d’immatriculation se trouvant à l’arrière. Par ailleurs, même lorsque la photographie est prise par l’arrière, la taille réduite de leur plaque d’immatriculation fait qu’ils sont difficilement identifiables ;

–  des conducteurs étrangers, qui, par manque de coopération judiciaire entre États, ne peuvent pas être identifiés. Ces véhicules représentent environ 25 % des infractions relevées par le dispositif du CSA ;

–  des conducteurs dont le véhicule est immatriculé au nom d’une personne morale, laquelle refuse ou n’est pas en mesure de dire qui le conduisait au moment où l’infraction a été commise. Or, si l’amende échoit automatiquement au titulaire de la carte de grise du véhicule, aucun point n’est retiré dans les cas où le conducteur n’a pas pu être identifié.

Plusieurs mesures sont proposées plus loin dans le présent rapport pour réduire la part des usagers qui échappent aux contrôles (209).

Enfin, il parait étonnant que seule la moitié des infractions relevées par les forces de l’ordre, alors qu’un avis de contravention a été envoyé, donne lieu à retrait de point débouchant sur un retrait de points.

INFRACTIONS DONNANT LIEU À RETRAIT DE POINTS

Messages d’infraction reçus par le centre national de traitement

Suite donnée à cette réception

Retrait de point

19 millions par an

Expédition d’un avis de contravention : 10 millions par an

Oui : 5 millions de cas par an

Non : 5 millions de cas par an

Conducteurs étrangers et « rebuts techniques » : 9 millions par an

Non

Source : Ordres de grandeur donnés lors de l’audition de M. Jean-Jacques Debacq, préfet, directeur de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, le 7 septembre 2011 et ministère de l’Intérieur.

Ces ordres de grandeur se retrouvent apparemment pour tous les types d’infractions au code de la route.

PART DES INFRACTIONS AYANT DONNÉ LIEU À RETRAIT DE POINTS EN 2010

Principales catégories d’infractions

Nombre d’infractions constatées par les forces de l’ordre

Nombre d’infractions ayant entraîné un retrait de points

Part des infractions ayant entraîné un retrait de points par rapport à l’ensemble des infractions constatées

Vitesse

(CSA et hors CSA)

10 084 707

4 984 375

49,43%

Alcoolémie

271 163

165 388

60,99%

Stupéfiants

25 194

10 570

41,95%

Source : Ministère de l’Intérieur.

Le ministère de l’Intérieur explique ce différentiel de 50 % par deux facteurs :

–  le retrait de points n’intervient qu’en aval de la procédure judiciaire, une fois la condamnation devenue définitive, ce qui expliquerait un décalage temporel entre la constatation de l’infraction et le retrait de point. Ce facteur semble cependant jouer uniquement à la marge, le taux de recours étant faible ;

–  s’agissant des délits, certains greffes des tribunaux n’adressent pas toujours les avis de condamnation aux services des préfectures, le défaut d’avis étant estimé à environ 50%.

b) Récompenser les conduites vertueuses

Le nécessaire équilibre entre prévention, communication et sanction a déjà été mis en valeur comme condition de réussite de la politique de sécurité routière, dans la mesure où cette dernière ne saurait être uniquement répressive. Dans la même perspective, la mission préconise de consacrer une part de la communication publique aux progrès effectués depuis 2002.

Plusieurs de nos voisins européens sont allés plus loin dans cette voie en instaurant un bonus de points au profit des conducteurs qui ne commettent pas d’infractions durant une période déterminée. L’Italie a ainsi instauré un bonus de deux points par an, dans la limite de dix, ce qui permet à un conducteur qui ne commet pas d’infractions de porter progressivement son capital de points de 20 à 30. En Espagne, alors que le nombre de points sur le permis de conduire est de douze, comme en France, un bonus de deux points est accordé en cas d’absence d’infractions pendant deux ans, un point supplémentaire étant attribué si cette conduite vertueuse perdure un an supplémentaire. De cette façon, le nombre maximal de points dont peut être crédité un permis de conduire est de quinze (210).

Cette politique est une bonne façon de mobiliser continûment les usagers pour la sécurité routière, tout en récompensant ceux qui ne commettent pas d’infractions. Par ailleurs, ce système, en accordant un nombre de points supplémentaires limité ne remet pas en cause l’équilibre général du permis à points.

La mission préconise donc d’instaurer un bonus de trois points, un point supplémentaire pouvant être acquis, si le conducteur possède douze points ou plus, à l’issue de chaque période de deux ans. Ce bonus permettrait de passer progressivement de douze à quinze points si aucune infraction occasionnant retrait de point n’est commise durant six ans. Les conducteurs qui se trouvent dans la période probatoire étant régis par un mécanisme particulier, ils ne seraient pas soumis à ce système de bonus de points.

Ce bonus ne consiste en aucun cas à attribuer des points supplémentaires « ouvrant une sorte de droit à commettre des infractions » (211). Il y a en effet fort à parier qu’au bout de deux, quatre ou six années de permis sans commettre d’infraction, il ne viendra à l’idée de personne, parmi ceux qui ont intégré pendant plusieurs années ces comportements vertueux, de commettre intentionnellement des infractions. Ce bonus doit être, à l’inverse, une pédagogie de la règle, une incitation, pour les usagers, à l’intérioriser.

Afin de donner un aspect encore plus incitatif à ce bonus, la mission préconise qu’en liaison avec les compagnies d’assurance, une baisse de cotisation supplémentaire soit accordée aux personnes qui possèdent 15 points sur leur permis de conduire.

Proposition n° 24 :

–  Porter, hors période probatoire, de 12 à 15 points au maximum le capital de points de permis détenu par les personnes ne commettant aucune infraction pouvant occasionner un retrait de point pendant 6 ans, à raison d’un bonus d’un point tous les deux ans ;

–  En liaison avec les compagnies d’assurance, consentir une baisse de cotisation d’assurance supplémentaire aux personnes détentrices de 15 points de permis.

S’il est nécessaire de récompenser les conduites vertueuses, il est en revanche nécessaire de lutter contre tout détournement des mécanismes visant à les encourager. Tel est le cas notamment des stages de sensibilisation à la sécurité routière, qui ont été conçus comme une manière de sensibiliser, à leur demande ou sur injonction judiciaire, les personnes ayant commis un certain nombre d’infractions. Ces stages ont une durée de deux jours (212) et sont effectués aux frais de la personne qui les suit (213). Afin de les rendre incitatifs, ces stages permettent au conducteur qui les suit de retrouver quatre points supplémentaires sur son permis de conduire.

Alors que ces stages pouvaient être suivis tous les deux ans, ils peuvent, depuis le vote de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, être suivis tous les ans (214). Ainsi que l’a expliqué M. Dominique Lebrun, inspecteur général de l’équipement, « ceux qui les suivent pour la première fois en tirent quelques enseignements. Mais les stages se trouvent un peu pollués par les « récidivistes », qui se présentent pour la deuxième fois, la troisième, ou bien davantage, et qui cherchent uniquement à racheter leurs points. […] Il y a là une réflexion à mener pour améliorer le système et lui ôter son aspect d’opération commerciale. » (215) Le risque est donc grand, pour les conducteurs qui les suivent régulièrement, de percevoir ces stages comme une forme de « rachat de points », ce qui jette le trouble sur les intentions de l’État et décrédibilise la politique de sécurité routière, perçue, une fois de plus, comme une « pompe à fric ».

La mission préconise donc de renforcer les contrôles visant à la pertinence et à l’efficacité de ces stages, qui semblent être de qualité inégale. Il serait également nécessaire d’adapter le contenu de ces stages en fonction du type d’infractions commises par les personnes qui y participent.

c) Mieux prendre en compte la situation des victimes et de leur famille

Si un guide de l’accompagnement juridique des victimes de la route a été récemment élaboré par la DSCR, en collaboration avec de nombreuses associations de victimes, il apparaît que les démarches qu’elles doivent entreprendre sont encore loin d’être simples. La mission a tenu à entendre des personnes qui avaient vécu la mort d’un proche dans un accident de la circulation, afin qu’elles puissent décrire, de l’intérieur, la situation qu’elles avaient vécue. Il résulte de leur témoignage que, dans les suites immédiates ou à plus long terme d’un accident, plusieurs éléments soulèvent des difficultés.

En premier lieu, l’annonce des décès routiers aux familles est parfois encore inadaptée, qu’elle se fasse à l’hôpital ou à domicile : « De même, le décès est le plus souvent annoncé à la famille à domicile par les représentants de l’ordre public, lesquels repartent rapidement parce qu’ils considèrent que leur mission est accomplie et parce qu’ils ne savent comment réagir aux effets de leur démarche. Il faut donc mieux former les services de police et de gendarmerie, ainsi que les personnels soignants urgentistes » (216), a expliqué M. Vincent Julé Parade, vice-président de l’association « Victimes et citoyens contre l’insécurité routière ».

En deuxième lieu, le délai est parfois long entre le moment de l’accident, où d’importants frais doivent être avancés par les proches de la victime (217), et le versement de la première provision, ainsi qu’en ont témoigné Mme et M. Freani. Il serait nécessaire de réduire ce délai.

En troisième lieu, il résulte des codes de procédure civile et pénale que, lorsqu’aucun appel n’est interjeté d’un jugement de premier ressort au civil, la cour d’appel, dans le cadre d’un appel pénal, n’est pas tenue d’informer la partie civile de la tenue de ce procès. En cas d’appel d’un jugement en matière criminelle, qui relève de la cour d’assises, « même lorsqu’elle n’a pas interjeté appel, la partie civile est avisée par tout moyen de la date à laquelle l’affaire est appelée à l’audience », sur le fondement du nouvel article 380-2-1 du code de procédure pénale (218). En revanche, aucune disposition semblable ne s’impose en matière délictuelle. La présence de la partie civile au procès est pourtant essentielle, notamment dans le domaine des accidents de la circulation, non seulement pour la manifestation de la vérité (219), mais également pour les victimes elles-mêmes. Ainsi que l’a souligné M. Vincent Julé Parade : « Une mesure simple permet souvent d’apaiser la souffrance et la frustration qu’a exprimées M. Freani : le président peut donner la parole à la partie civile, et non simplement à son conseil. Il s’agit d’un usage, non d’une obligation ; mais cela donne aux victimes le sentiment d’être entendues. » (220)

Proposition n° 39 : Prévoir une convocation et une audition des parties civiles lors des procès correctionnels en appel, y compris lorsque aucun appel civil n’a été interjeté.

d) Améliorer le fonctionnement du permis à points

Le permis à point est un outil de prévention de l’insécurité routière particulièrement efficace. Son fonctionnement pourrait cependant être amélioré de manière à le rendre plus lisible.

Le contentieux de l’annulation du permis à points est un contentieux de masse et en forte augmentation, qui ne soulève, en règle générale, pas de difficulté juridique particulière. Il représente ainsi 6,3 % des affaires nouvelles devant les tribunaux administratifs. La très grande majorité de ces recours, dirigés contre l’invalidation du permis, se fondent sur le défaut de délivrance de l’information préalable prévue à l’article L. 223-3 du code de la route. Dès lors, l’intervention du juge a pour seul objet de constater si, oui ou non, l’administration apporte la preuve que cette information a été délivrée. Il est particulièrement injustifié de mobiliser le travail d’une juridiction pour cette tâche de pure constatation : les juridictions ne doivent être saisies que des cas dans lesquels il existe un litige avéré.

La mission propose en conséquence d’instaurer un recours administratif préalable obligatoire, qui aurait un triple avantage :

–  pour les citoyens, la procédure serait plus rapide, dans la mesure où il ne serait pas nécessaire d’attendre la décision juridictionnelle pour que leurs droits puissent être garantis si la décision en cause est illégale ;

–  pour l’administration, dans la mesure où cette dernière serait alors en mesure d’admettre en temps utile que la décision est entachée d’illégalité et doit être retirée, ou, à l’inverse, de démontrer à l’usager que sa demande est infondée et n’a aucune chance de prospérer devant le juge ;

–  pour les juridictions administratives. Le ministère de la Justice évalue à environ 25 à 30 équivalents temps plein les effectifs qui travaillent à plein temps sur le contentieux du permis à points, lequel ne pose aucune difficulté juridique particulière.

Proposition n° 36 : Prévoir un recours préalable obligatoire en amont du recours administratif visant à faire annuler l’invalidation du permis de conduire.

TROISIÈME PARTIE : LES COMPORTEMENTS DEMEURENT LE PRINCIPAL GISEMENT DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE, JUSTIFIANT UNE ACTION PUBLIQUE RÉSOLUE

Indépendamment de tout ce qui vient d’être dit, il convient d’observer que, fondamentalement, la conduite c’est aussi l’homme qui conduit. Certains ont même avancé l’idée que la conduite était indissociable de la condition de l’homme « post moderne » (221). Par conséquent, il n’est pas de politique de prévention routière sans une action résolue sur les comportements.

I. – NE PAS RELÂCHER L’EFFORT SUR LA VITESSE

La réduction des vitesses moyennes a contribué à la diminution récente de l’accidentalité et de la mortalité routière. Il est donc nécessaire de maintenir les efforts qui ont été accomplis par les usagers en ce domaine. Cela passera nécessairement par une réflexion sur l’équité de la politique suivie, dans le droit fil des principes généraux précédemment évoqués  (222).

A. LE DÉPLOIEMENT DES RADARS A EU DES EFFETS CONSIDÉRABLES SUR L’ACCIDENTOLOGIE ROUTIÈRE

La réduction des vitesses moyennes, comme celle des excès de vitesse, a principalement résulté de la politique stricte qui a été menée depuis 2002, alliant contrôles automatisés et fin des indulgences.

Le déploiement des radars fixes de vitesse, qui forment une part essentielle du système de contrôle sanction automatisé (CSA), a été annoncé par le Président de la République le 14 juillet 2002. Les premiers radars n’ont cependant été installés qu’en octobre 2003 sur le bord des routes françaises. Leur nombre a régulièrement augmenté, depuis lors, pour atteindre, à l’heure actuelle, environ 2 000 unités déployées. Par ailleurs, les forces de l’ordre disposent d’environ 1 000 radars mobiles.

DÉPLOIEMENT DES RADARS FIXES DE VITESSE DEPUIS 2003

Source : Données fournies par le ministère de l’Intérieur.

L’effet le plus spectaculaire du déploiement des radars a été la réduction drastique du nombre de grands excès de vitesse. Ainsi, les véhicules roulant à plus de trente kilomètres-heure au-dessus de la vitesse limite autorisée sont passés de 4,5 % de l’ensemble de la circulation en 2002 à 0,57 % en 2010.

POURCENTAGE DE VÉHICULES COMMETTANT DES GRANDS EXCÈS DE VITESSE
ENTRE 2001 ET 2010

Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 176.

Mais la réduction de la vitesse, élément qui est d’ailleurs primordial dans la diminution de l’accidentalité, a aussi et surtout concerné les vitesses moyennes, comme cela a déjà été mentionné (223). « Auparavant, on pouvait parler de délinquance de masse, puisqu’environ 50 % des conducteurs ne respectaient pas les limitations, quel que soit le réseau » (224), a rappelé M. Sylvain Lassarre, directeur de recherche à l’IFSTTAR. Ce phénomène est particulièrement important, dans la mesure où la diminution des vitesses moyennes, qui a été de dix kilomètres-heure en dix ans, engendre un « effet peloton », pour reprendre l’expression de ce phénomène, M. Jean Chapelon, ancien secrétaire général de l’ONISR : « La répartition autour de la vitesse moyenne fait apparaître un effet de peloton : tout le monde roule moins vite, ceux qui commettent des infractions, ceux qui n’en commettent pas ; il en va de même pour les étrangers. […] Or c’est quand le peloton réduit sa vitesse que le nombre d’accidents diminue. » (225) Cela a été rendu possible par l’automatisation des contrôles, qui a engendré une probabilité multipliée par cent d’être contrôlé.

CONTRAVENTIONS POUR DES INFRACTIONS LIÉES À LA VITESSE

Année

Infractions CSA

Total infractions vitesse

1999

0

1 215 793

2000

0

1 231 304

2001

0

1 262 745

2002

0

1 354 957

2003

103 889

1 611 240

2004

1 548 493

3 182 221

2005

4 137 953

5 868 678

2006

6 214 533

7 619 805

2007

7 010 606

8 423 916

2008

8 402 053

9 683 273

2009

8 601 730

9 861 254

2010

9 059 730

10 096 626

Source : Ministère de l’intérieur - DMAT

La conséquence de ces baisses de vitesse sur celle du nombre de morts sur la route est attestée par tous les chercheurs entendus. Pour ne citer que l’un d’entre eux, M. Sylvain Lassarre, ce dernier a estimé que « la mise en place du CSA a eu, dès 2003, un effet massif sur le nombre de tués. Un tel phénomène est très rare : la dernière fois que nous sommes parvenus à changer le système de sécurité routière, c’était en 1973, lorsqu’ont été décidés la généralisation des limitations de vitesse et le port de la ceinture obligatoire. » (226) D’ailleurs, les usagers ont anticipé le déploiement des radars puisque la baisse des vitesses pratiquées a connu ses plus fortes pentes sur les années 2002-2004, phénomène qui se retrouve à l’identique pour ce qui est de la mortalité routière.

Si l’on souhaite analyser dans le détail les conséquences du CSA, trois grands effets doivent être distingués, ainsi que l’a souligné M. Philippe Zamora, chercheur au Centre de recherches en économie et statistiques (CREST) (227) :

–  un effet direct, qui est l’impact immédiat produit par le radar dans la zone qu’il couvre. Il se traduit par une vigilance accrue entre le panneau d’annonce de l’appareil et l’appareil lui-même. Tel était d’ailleurs le but de leur positionnement dans les zones à risque ;

–  un effet « de halo », qui se produit quelques kilomètres en amont et en aval du radar, dans la mesure où l’usager qui en connaît l’emplacement ralentit quelques kilomètres avant et, une fois qu’il l’a dépassé, conserve un comportement respectueux des règles sur une certaine distance ;

–  un effet politique, le plus spectaculaire, qui a résulté de l’annonce, en 2002 du déploiement des radars et de la fin des indulgences. C’est lui qui a provoqué la forte baisse de l’accidentalité, sur l’ensemble du réseau, avant même l’installation des premiers radars.

Or, ces effets se manifestent différemment dans le temps. L’effet politique est immédiat mais unique. L’installation de nouveaux radars ne permettra pas de le renouveler. Il faudrait, pour le reproduire, apporter une innovation qualitative au système de CSA, que les contrôles « mobiles mobiles » ou les radars tronçons seront peut-être à même de produire.

Les études menées montrent que le nombre d’accidents de la route chute de 50% pendant les six mois qui suivent l’installation d’un radar dans une commune donnée, comparée à une commune où aucun radar n’a été installé. Toutefois, au-delà de six mois, la différence entre les communes considérées n’est plus que de 15 à 20 %. L’accoutumance fait que la vigilance des conducteurs ne s’exerce plus que là où se trouve le radar : l’effet direct persiste mais non l’effet de halo (228). Il existe donc bien une double logique à diversifier les radars existants et à en multiplier le nombre.

Cette multiplication des radars doit cependant s’accompagner d’une forte attention apportée à l’équité de façon à ce que la politique de contrôle soit acceptable socialement.

B. CONFORTER LA POLITIQUE DE CONTRÔLE EN RENFORÇANT SON ACCEPTABILITÉ SOCIALE

La sanction des excès de vitesse est certainement la politique de sécurité routière qui suscite le plus de controverses et de passion, ainsi qu’en ont encore récemment témoigné les réactions au CISR du 11 mai 2011. C’est donc également dans ce secteur qu’il est indispensable de faire application des principes précédemment évoqués qui conditionnent l’acceptabilité de toute politique publique et au premier chef du principe d’équité.

1. Lever l’hypocrisie liée au bridage des véhicules

À l’heure actuelle, les mesures visant l’excès de vitesse sont uniquement ciblées sur les usagers de la route. Pourtant, ces derniers ne pourraient pas commettre d’excès de vitesse si les constructeurs automobiles ne leur fournissaient pas les moyens de rouler à plus de 130 kilomètres-heure. On reproche, en quelque sorte, à l’usager de se servir des véhicules qu’on l’autorise à acheter.

Par ailleurs, le bridage des véhicules permettrait de traiter le problème de la vitesse à sa racine. Or, à l’heure actuelle, la vente de véhicules surpuissants est autorisée, alors que, dans le même temps, les pouvoirs publics, les scientifiques, et même les constructeurs, s’ingénient à trouver des mécanismes pour leur faire respecter les limitations de vitesse. Il faut également mentionner le fait qu’à l’heure où l’on entend limiter les rejets de gaz à effet de serre, permettre à des véhicules de dépasser 130 kilomètres-heure n’a pas grand sens.

Il est entendu que la solution de ce problème ne saurait être purement nationale, même si l’on peut citer l’exemple du Japon qui bride les motos vendues sur son territoire national, mais pas celles qui sont exportées, ce qui ne semble pas avoir porté préjudice à son industrie. En effet, les constructeurs français ont fait savoir que si un bridage était imposé en France, notamment sur les véhicules neufs, cela leur causerait un préjudice important et entraînerait une distorsion de concurrence au profit des constructeurs étrangers.

Dans l’attente éventuelle d’une généralisation des véhicules électriques, qui, par construction et par souci d’économie d’énergie, n’auront sans doute pas les mêmes capacités que les voitures que nous connaissons, la solution la plus prometteuse, qui a recueilli le soutien tant des pouvoirs publics que des constructeurs et des associations de sécurité routière, semble résider dans les limiteurs de vitesse et, à terme, dans le perfectionnement puis la généralisation du LAVIA (229).

Il n’en demeure pas moins que la question du bridage, comme celle du LAVIA, devraient être soutenues par les autorités françaises au plan européen, même si l’hostilité de certains de nos voisins à ces mécanismes ne fait pas de doute. De cette façon, les usagers, à qui l’on demande de respecter les limitations de vitesse, auraient l’impression qu’ils ne sont pas les seuls à qui l’on demande des efforts.

Proposition n° 10 : Faire avancer l’idée, au niveau européen, d’un bridage des voitures.

La mission tient également à aborder un sujet qui pourrait faire l’objet d’évolutions dans les années à venir. Il s’agit de la progressivité dans l’accès à la puissance pour les jeunes conducteurs. Cette progressivité existe déjà pour la conduite de deux-roues motorisés, les plus grosses cylindrées n’étant accessibles qu’après un certain nombre d’années de conduite. Le même principe pourrait être adopté pour les voitures les plus puissantes, lesquelles ne pourraient pas être conduites par des conducteurs novices. Cependant, il semble difficile à la mission de mettre en œuvre immédiatement cette idée, dans la mesure où ces conducteurs débutants circulent généralement avec le véhicule de leurs parents, lesquels pourraient dépasser le seuil de puissance autorisé. Dès lors, adopter une telle mesure en l’état actuel des choses reviendrait à priver de mobilité et donc d’expérience un certain nombre de jeunes conducteurs.

2. Adapter la répression du facteur vitesse à l’accidentologie

Les statistiques des retraits de points montrent une certaine divergence entre les causes d’accidents, telles qu’elles ont été identifiées notamment par l’IFSTTAR, et la réalité des sanctions.

À titre d’exemple, la vitesse, qui représente un gisement de sécurité routière de 717 vies préservées si toutes les limitations étaient correctement respectées, concentre plus de 55 % des retraits de points. À l’inverse, la conduite avec un taux d’alcoolémie supérieur aux normes légales, qui causerait le décès de 1 230 personnes sur les routes chaque année, ne représente que 9,5 % des retraits de points. Cette disproportion induit un sentiment diffus, mais de plus en plus répandu, que la politique de sécurité routière ne cible pas les bonnes causes d’accidents et qu’elle sert uniquement à renflouer les caisses de l’État.

RÉPARTITION DES RETRAITS DE POINTS PAR TYPE D’INFRACTION


Source : Ministère de l’intérieur - DMAT

Cette impression est fausse (230), elle n’en existe pas moins. Or, la mission estime que pour faire progresser la sécurité routière, une large acceptabilité sociale doit être recherchée, ce qui nécessite, pour rendre acceptables des mesures fortes proposées par ailleurs, de prendre en considération les demandes de nombre d’usagers quant à la répression de la vitesse.

Cela doit se faire dans un climat de responsabilité. La mission a bien entendu tous ceux qui lui ont indiqué combien la politique de contrôle sanction automatisé avait été efficace et utile et elle ne songe pas à la remettre en cause, même partiellement. Elle préconise d’ailleurs de déployer de nouveaux radars. Pour rendre leur déploiement acceptable, il faut que, dans le même temps, soit envoyé aux usagers le signal selon lequel l’État ne cherche pas à les piéger et qu’une erreur d’inattention est toujours possible.

Actuellement le dépassement de la vitesse maximale autorisée est constitutif d’une contravention de la 4ème ou de la 5ème classe selon l’importance du dépassement. Elle est sanctionnée par une amende et un retrait de points dont le nombre dépend de la gravité de l’infraction commise.

Depuis le vote de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, le délai de récupération d’un point est passé d’un an à six mois, période durant laquelle aucune nouvelle infraction ne doit être commise. Il faut rappeler que la perte d’un point correspond notamment à un excès de vitesse compris entre 0 et 20 kilomètres-heure au-dessus de la vitesse autorisée, une fois tenu compte de la marge de tolérance de 5 %.

La mission estime que tout dépassement de la vitesse autorisée doit demeurer une infraction, faute de quoi cela reviendrait à relever de facto cette dernière, ce qui ne saurait être envisagé. Cependant, sur les réseaux routiers les plus sûrs, que sont les autoroutes et les voies rapides, il est proposé de créer une nouvelle tranche d’excès de vitesse, entre 0 et 10 kilomètres-heure au-delà de la vitesse autorisée. Dans cette tranche, un excès de vitesse serait seulement sanctionné d’une amende quand il est commis pour la première fois depuis six mois.

Plusieurs remarques doivent être faites au sujet de cette proposition :

–  elle ne trouverait à s’appliquer que sur les autoroutes et les voies rapides, où le risque d’accident est, comparativement, le plus faible de tout le réseau routier. Il ne saurait être question de la généraliser aux routes nationales, départementales et communales ;

–  elle ne porterait que sur les excès de vitesse compris entre 0 et 10 kilomètres-heure. À titre de comparaison, en Allemagne, aucun point n’est retiré en deçà d’un dépassement de 20 kilomètres-heure sur l’ensemble du réseau (231;

–  elle ne s’appliquerait qu’au premier excès de vitesse commis sur ces portions du réseau. En cas de nouvel excès de vitesse, même inférieur à 10 kilomètres-heure sur autoroute ou voie rapide, le retrait du point s’effectuerait de plein droit.

Parallèlement, pour préserver l’équilibre du dispositif de sanction, et ainsi que le préconisait d’ailleurs le CISR du 11 mai, la mission propose de renforcer la répression des grands excès de vitesse sur toutes les voies (pas seulement sur les autoroutes et les voies rapides). Actuellement, les dépassements de plus de 50 km/heure de la vitesse maximale autorisée sont des contraventions de la 5ème classe punies d’une amende. Ils ne deviennent des délits qu’en cas de récidive. La mission suggère que ces grands excès de vitesse soient qualifiés de délits dès la primo-infraction, sans attendre donc qu’ils soient commis en récidive.

Proposition n° 11 :

–  Sanctionner les excès de moins de 10 km/h sur autoroutes et voies rapides d’une simple amende quand ils sont commis pour la première fois depuis 6 mois ;

–  Qualifier de délit, et non plus de contravention, les excès de vitesse de plus de 50 km/heure dès la primo-infraction, quelle que soit la voie sur laquelle ils sont commis.

3. Promouvoir l’équité devant les contrôles

Certains usagers échappent, à l’heure actuelle, au retrait de points qui devrait normalement être consécutif à la commission d’une infraction relevée par l’intermédiaire du CSA (232). Cela concerne en particulier les conducteurs de deux-roues motorisés, les conducteurs étrangers et les personnes qui ne sont pas identifiables sur les photographies prises par les radars.

a) Les deux-roues motorisés

Pour ce qui est des deux-roues motorisés, de nombreuses personnes auditionnées ont signalé le fait que le CSA était insuffisamment dissuasif, dans la mesure où les plaques d’immatriculation de ces derniers ne sont souvent pas de taille suffisante pour permettre leur identification. De fait, le taux d’excès de vitesse pour les deux-roues motorisés est encore très supérieur à ce qu’il est pour les autres usagers de la route. Par ailleurs, leur vitesse moyenne est de 87,2 kilomètres-heure, contre 79,7 pour les automobilistes.

TAUX DE DÉPASSEMENT DE PLUS DE 10 KILOMÈTRES-HEURE
DES VITESSES MAXIMALES AUTORISÉES SELON LA CATÉGORIE D’USAGERS

Source : Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 176.

Le CISR du 11 mai 2011 proposait en conséquence d’augmenter la taille des plaques d’immatriculation des deux-roues motorisés. Cette mesure s’est heurtée à l’argument selon lequel, dans le même temps, les autorités allemandes avaient décidé une diminution des plaques d’immatriculation. Il n’en demeure pas moins que les nouvelles plaques allemandes seront beaucoup plus grandes que les plaques françaises actuelles.

DIMENSION DES PLAQUES D’IMMATRICULATION DES DEUX-ROUES MOTORISÉS
DANS CERTAINS PAYS DE L’UE

Pays

Format

Surface

Luxembourg 

258x70

18 060 mm2

France (petit format actuel)

170x130

22 100 mm2

France (grand format actuel)

210x130

27 300 mm2

Belgique 

210x140

29 400 mm2

Italie 

177x177

31 329 mm2

Espagne 

220x160

35 200 mm2

Autriche 

210x170

35 700 mm2

Allemagne (nouveau format)

200x180

36 000 mm2

Allemagne (ancien format) 

280x200

56 000 mm2

Grande Bretagne*

300x240

72 000 mm2

Source : Ministère de l’Intérieur. * : La réglementation anglaise n’impose pas un format de plaque mais une dimension des lettres et des marges. La taille de la plaque d’immatriculation anglaise peut varier légèrement mais en pratique, les fabricants proposent le modèle qui permet d’accueillir le maximum de caractères admis.

Un consensus semble avoir été obtenu à la suite d’une rencontre entre le Délégué interministériel à la sécurité routière et la « Fédération des motards en colère » pour un alignement de la taille des plaques sur celle des nouvelles plaques allemandes, ainsi que l’a indiqué M. Jean-Luc Nevache à la mission : « La Fédération des motards en colère nous ayant reproché d’aller à contre-courant de l’Allemagne qui diminue la taille des siennes, je lui ai répondu : « Chiche, alignons-nous ! » – ce à quoi elle a consenti. Les dimensions de nos plaques pourraient donc passer de 17 centimètres sur 13 à 20 cm sur 18. Au demeurant, tout le monde le sait : l’enjeu est de faire en sorte que les radars soient à même de lire les plaques des motards. Pour ce qui me concerne, je n’ai pas beaucoup d’états d’âme sur ce sujet car il en va de l’égalité des citoyens devant la loi. » (233)

b) Les conducteurs étrangers

Près d’un quart des messages d’infraction réceptionnés par le Centre national de traitement concernent des véhicules étrangers et ne peuvent donc donner lieu ni à une contravention ni à un retrait de points, ce qui représente un pourcentage conséquent (234).

La solution pouvant être apportée à cette difficulté, ainsi que la mission a pu le constater lors de son déplacement à Bruxelles, auprès de la Commission européenne, passe par une meilleure coopération entre États membres. À ce titre, une directive sur les poursuites transfrontières vient d’être adoptée, le 29 septembre 2011, par le Conseil européen, pour faciliter les poursuites extra-territoriales (235). Elle devrait entrer en vigueur dans les années qui viennent. Par ailleurs, la France a signé des traités de coopération avec certains de ses voisins, notamment la Belgique, qui donnent des résultats concluants.

En dehors de cette coopération, les conducteurs étrangers qui commettent des infractions sur le territoire français ne sont pas susceptibles de sanctions, hormis les cas où le contrôle est effectué par des agents de police ou de gendarmerie, lesquels sont en mesure d’exiger le paiement immédiat de l’amende.

Afin de rendre plus dissuasives les sanctions encourues par les conducteurs étrangers en France, la mission préconise que soient approfondies les négociations en cours pour une meilleure coopération judiciaire. Dans l’attente de cette dernière, il serait souhaitable de durcir les sanctions applicables aux conducteurs à qui l’on ne peut pas retirer de points, afin de faire peser sur ces derniers une pression comparable à celle qui concerne les conducteurs soumis au permis à points. En conséquence, il serait envisageable de doubler les amendes encourues par ces conducteurs. Ces dernières concerneraient non seulement les conducteurs étrangers mais aussi ceux qui circulent sans permis de conduire.

c) Le tiers conducteur

Comme indiqué précédemment, certains conducteurs parviennent à éviter les retraits de points (236). Tel est notamment le cas pour les personnes qui circulent à bord d’un véhicule qui n’est pas le leur, notamment quand il appartient à une personne morale. Selon les informations transmises par le ministère de l’Intérieur, près de 15 % des véhicules seraient détenus par une personne morale en France. Or, il n’existe aucune obligation, pour ces dernières, d’indiquer qui conduisait leur véhicule, en cas d’infraction relevée par le dispositif de CSA. Dès lors, les entreprises concernées ne sont passibles que d’une amende, aucun retrait de point n’étant effectué. Cette injustice a été soulignée par M. Thierry Pocquet du Haut-Jussé, procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Rennes : « Je ne peux, par ailleurs, passer sous silence l’attitude de certaines entreprises qui, en refusant de désigner les conducteurs fautifs, leur permettent de se soustraire à leurs responsabilités. Reste la sanction pécuniaire, dont l’assez modeste montant est peu dissuasif. Il y a là une défaillance choquante. Pourquoi ne pas imposer, comme une circulaire impérative y contraint les services judiciaires, que, dans chaque véhicule appartenant à une société ou à un organisme, soit affiché un tableau indiquant quel en est le conducteur à tout moment, de manière à pouvoir désigner l’auteur d’une infraction, lorsqu’on le recherche pour le sanctionner ? » (237)

De manière plus générale, un certain nombre de particuliers arguent du fait que le conducteur n’est pas reconnaissable afin de ne pas subir le retrait de point corrélatif à l’infraction commise. Ils sont dès lors uniquement redevables de l’amende, en vertu de l’article L. 121-3 du code de la route (238). Face à cette situation, la mission n’est pas favorable à l’extension d’une forme de responsabilité pour autrui. Il faudrait cependant réfléchir à l’instauration d’une infraction sanctionnant les personnes qui dissimulent, en connaissance de cause, l’identité de la personne qui conduisait. La personne qui commettrait cette infraction pourrait se voir sanctionner par un retrait de points équivalent à celui dont l’infraction est passible.

d) Les panneaux avertisseurs de radars

Les décisions prises à la fin du mois de mai et au mois de juin ont entraîné, dans une certaine mesure, des inégalités territoriales quant à l’avertissement des radars. En effet, certains préfets ont, conformément aux instructions qui avaient été données par le ministre de l’Intérieur, démonté les panneaux avertisseurs, alors que d’autres s’en sont abstenus. En conséquence, certains radars continuent à être précédés d’un panneau alors que d’autres ne le sont pas.

Afin de remédier à cette disparité, la mission préconise que l’installation des radars pédagogiques, qui a été décidée pour remplacer les panneaux avertisseurs, se fasse en priorité sur les sites où ces derniers ont été retirés.

Proposition n° 12 :

–  Rendre le CSA plus dissuasif pour les deux-roues motorisés (agrandissement de la plaque) et les étrangers (doublement de l’amende en cas d’impossibilité de retrait de points et accords avec les pays étrangers) ;

–  Créer une infraction visant à sanctionner les personnes qui, de mauvaise foi, disent ne pas pouvoir indiquer qui conduisait leur véhicule, afin que les retraits de points puissent être effectués ;

–  Installer prioritairement les radars pédagogiques là où les panneaux avertisseurs ont été retirés.

4. Poursuivre et diversifier le déploiement des radars

La politique de renforcement du contrôle sanction automatisé menée par le Gouvernement prend deux formes complémentaires.

D’une part, le Gouvernement a pour ambition de renforcer le nombre d’unités déployées. M. Aurélien Wattez, chef du département du contrôle automatisé à la DSCR, a indiqué que l’objectif fixé par le ministre de l’Intérieur est d’installer, en 2011 et en 2012, 1 000 nouveaux radars, hors radars pédagogiques (239). Comme il a été dit plus haut, l’effectif total des radars fixes de vitesse s’élevait, en juillet 2011, à 1 941 (cumul des unités déployées depuis les débuts du CSA, en octobre 2003), celui des radars mobiles étant de 933. L’objectif à terme, qui correspond au souhait de la mission, est de parvenir au chiffre de 5 000 radars, fixe ou mobile, déployés.

Par ailleurs, depuis le CISR du 11 mai 2011, le ministre de l’Intérieur a annoncé le déploiement de 2 200 radars pédagogiques d’ici la fin de l’année 2011 et de 2 000 nouveaux en 2012.

D’autre part, le Gouvernement a engagé une politique de diversification des radars, qui ressortissent désormais de sept grands types. Si l’on excepte les radars positionnés aux feux rouges, qui ont une autre fonction, ceux qui sanctionnent les excès de vitesse sont :

–  les radars fixes de vitesse ;

–  les radars mobiles de vitesse ;

–  les radars discriminants de vitesse, qui sont capables de distinguer les véhicules légers des poids lourds, et donc de sanctionner le chauffeur en tenant compte des limitations propres à la catégorie à laquelle appartient son véhicule, mais aussi d’identifier avec certitude la voie sur laquelle circule le conducteur en infraction. Actuellement, une quinzaine de ces équipements est en service, chiffre qui devrait atteindre une centaine à la fin de l’année 2012 (240). Il serait souhaitable qu’un radar discriminant soit installé dans tous les cas où les limitations de vitesse sont différentes selon la catégorie d’usager sur une même voie (cas des véhicules légers et des poids lourds, par exemple) ;

–  les radars « tronçons » ou « vitesse moyenne » qui permettront de mesurer la vitesse moyenne d’un véhicule entre deux points de façon à inciter les usagers à maîtriser leur vitesse sur une distance plus longue ;

–  les radars « mobiles mobiles » qui sont des radars embarqués, capables de contrôler les automobilistes dans le flux de la circulation. Ils sont actuellement en cours d’expérimentation ;

–  les radars destinés au contrôle de la vitesse dans les zones de travaux, où la vitesse maximale autorisée n’est presque jamais respectée. Leur expérimentation doit être prochainement lancée.

Compte tenu des effets positifs sur l’accidentalité routière qui ont été enregistrés grâce au contrôle-sanction automatisé, la mission préconise de poursuivre le déploiement des radars pour arriver, à terme, à l’objectif des 5 000 unités mises en place. Le coût de cette mesure étant non négligeable, elle doit prendre place dans une perspective pluriannuelle.

Proposition n° 13 : Parvenir à terme à 5 000 radars de vitesse sur le territoire national, en veillant à diversifier le parc et à déployer des radars photographiant par l’arrière et par l’avant.

II. – ALCOOL, DROGUES ET MÉDICAMENTS : DES CONTRE-INDICATIONS FORMELLES

Si la vitesse est une cause d’accidents tout aussi bien qu’un facteur d’aggravation, il n’en demeure pas moins que l’alcool est aujourd’hui, selon les statiques disponibles, la première cause d’accidents mortels. La conduite du véhicule est encore plus accidentogène si l’alcool est couplé avec une prise de drogue ou de médicaments, pratique qui semble progresser.

A. LE FLÉAU DE L’ALCOOLISME AU VOLANT N’EST PAS UNE FATALITÉ

Dans 31 % des accidents mortels, l’un des deux conducteurs présentait un taux supérieur au taux légal d’alcoolémie. Cette situation est unique en Europe : notre pays est celui où ce pourcentage est le plus élevé. Si les taux autorisés avaient été respectés, on estime que 1 150 vies auraient été sauvées. Ce chiffre est considérable et démontre que l’alcool au volant constitue un gisement majeur de sécurité routière.

Très préoccupée par ce bilan que rien ne peut justifier et qui est malheureusement trop souvent perçu comme une fatalité liée à un certain art de vivre ou à une certaine convivialité proprement française, la mission d’information entend défendre plusieurs propositions pour l’améliorer.

1. L’autodépistage : une étape vers la responsabilisation

La politique en matière de lutte contre l’alcool au volant repose sur les contrôles et la communication. À cet égard, les contrôles ont été considérablement augmentés et sont bien ciblés – environ 11 millions en 2010 – et la communication a déjà dissuadé les conducteurs « raisonnables ».

L’idée selon laquelle les contrôles d’alcoolémie, pourtant possibles depuis plus de 40 ans (241), ne seraient pas assez fréquents est battue en brèche par les forces de l’ordre qui font valoir que le ciblage des opérations de dépistage, s’il les rend moins visibles, en renforce l’efficacité : un jeune homme circulant aux abords d’une discothèque au cours d’une nuit de samedi à dimanche est beaucoup plus exposé au contrôle qu’une mère de famille circulant en ville en pleine matinée un jour de semaine…

Trop souvent négligée jusqu’à présent, la voie de l’autodépistage semble constituer l’un des axes de travail les plus prometteurs dans la mesure où elle procède d’une démarche de conviction personnelle a priori plus efficace qu’une hypothétique évolution du comportement liée à une quelconque « peur du gendarme ».

Si chaque conducteur disposait à bord de son véhicule d’un éthylotest, se conformant ainsi à une obligation qui figure à l’article L. 234-14 du code de la route depuis 1970 mais qui n’est jamais entrée en vigueur faute de décret d’application, il pourrait, en cas de doute sur son taux d’alcoolisation, renoncer à son déplacement ou décider de laisser le volant à un tiers en connaissance de cause. Bien entendu, s’il prenait malgré tout la décision de prendre la route, sa responsabilité personnelle s’en trouverait aggravée puisqu’il ne pourrait même pas plaider l’ignorance ou la bonne foi.

On peut considérer que la banalisation d’un tel équipement donnerait à l’entourage – souvent démuni face à des situations de prise de risque répétées – un moyen d’agir en incitant le conducteur à se tester avant de prendre le volant.

La démarche d’autocontrôle, récemment facilitée par le Gouvernement dans les discothèques et les bars de nuit, avec la parution de l’arrêté conjoint des ministres des Transports, de l’Intérieur et de la Santé du 24 août 2011, relatif aux conditions de mise à disposition de dispositifs certifiés permettant le dépistage de l’imprégnation alcoolique dans les débits de boissons en application de l’article L. 3341-4 du code de la santé publique, se doit d’être généralisée. Issu de la loi  LOPPSI 2, le dispositif tend à diffuser largement dans l’opinion le message « Soufflez et vous saurez » – si vous êtes en état de conduire.

À terme, on pourrait concevoir de sanctionner l’absence d’éthylotest à bord du véhicule d’une amende de quatrième classe de 135 euros, la même que celle applicable pour le défaut de triangle de signalisation ou de « gilet jaune » réfléchissant.

Il semble que cette mesure de bon sens puisse être facilement acceptée du fait de sa facilité de mise en œuvre, de son caractère finalement peu contraignant –le test est facile à réaliser et parfaitement indolore – et du faible coût des éthylotests chimiques d’entrée de gamme, limité à quelques euros. Il importe que les dispositifs mis à la disposition des automobilistes soient homologués et fiables : les critères de vérification de leurs caractéristiques seraient précisés par décret.

Sans doute encore plus fiables, les éthylotests électroniques présentent un coût sensiblement plus élevé. Ils semblent particulièrement recommandables pour les personnes se trouvant régulièrement en situation de devoir vérifier leur taux d’alcoolémie ou qui, ayant déjà été contrôlées « positives », s’exposent à un risque de sanction aggravée en cas de récidive.

La mission d’information n’ignore pas le risque de contentieux induit, en cas de défaillance technique de l’éthylotest personnel et/ou de non concordance de la mesure du taux d’alcoolémie effectuée par les forces de l’ordre. Compte tenu des enjeux, elle considère que ce risque peut être assumé.

Il est en effet paradoxal que l’un des seuls risques routiers contre lequel les conducteurs ne se protègent pas soit celui de la conduite en état d’ébriété, dont la triste contribution à l’accidentalité la plus meurtrière n’est pourtant plus à démontrer.

Proposition n° 6 : Obliger chaque conducteur à détenir un éthylotest en état de fonctionner à bord de son véhicule et inviter le Gouvernement à faire du non-respect de cette obligation une contravention de la quatrième classe

2. Quand la persuasion ne suffit plus : l’éthylotest anti-démarrage

Les articles 71 et 72 de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – dite LOPPSI 2 – permettent à l’autorité judiciaire de conditionner le maintien du droit à la conduite de l’auteur d’un délit de conduite en état alcoolique – ou en état d’ivresse manifeste ou d’un délit d’homicide ou de blessures involontaires sous l’empire d’un état alcoolique – à l’installation d’un système éthylotest anti-démarrage (EAD).

Il peut s’agir d’une peine complémentaire ou d’une mesure de composition pénale. Les modalités d’application de cette nouvelle mesure sont fixées dans le décret n° 2011-1048 du 5 septembre 2011. Aux termes de l’arrêté du ministre chargé des Transports du 13 octobre 2009, le dispositif EAD était déjà obligatoire dans tous les autocars assurant le transport d’enfants – en pratique, le transport d’au moins neuf mineurs – mis en service pour la première fois à compter du 1er janvier 2010.

Ces dispositifs sont désormais fiabilisés et autorisent le démarrage « forcé » – sous réserve de justification ultérieure, tout démarrage « à la clé » étant enregistré – en cas d’urgence manifeste. Le constructeur suédois Volvo en propose de série ou en option sur ses véhicules lourds et légers depuis 2008.

Ces systèmes donnent l’assurance que le conducteur alcoolisé est mécaniquement empêché de prendre la route. Ils peuvent aussi exiger une vérification périodique – par exemple toutes les quinze minutes – pour prévenir le risque que le conducteur soit parvenu à faire démarrer le véhicule « en faisant souffler quelqu’un d’autre ».

Leur systématisation progressive, prévue par la Commission européenne dans le programme d’action européen pour la sécurité routière 2011-2020, devrait en réduire sensiblement le coût.

Il convient cependant d’en évaluer la pertinence :

• D’abord, il va de soi que leur généralisation éventuelle ne constitue pas une réponse de fond au problème de santé publique de la dépendance alcoolique et qu’elle devrait s’accompagner d’une prise en charge adéquate des personnes qui se trouvent en état de dépendance avérée.

• Ensuite, il ne semble guère envisageable de soumettre l’ensemble de la population des conducteurs – y compris les personnes qui ne boivent pas d’alcool ou qui n’ont jamais été contrôlées positives – à un dispositif aussi contraignant à chaque utilisation de leur véhicule personnel. La définition des catégories de populations concernées devra donc intervenir de manière concertée (certains conducteurs professionnels, récidivistes, personnes volontaires…)

• Enfin, la logique selon laquelle il serait préférable de s’en remettre à un appareil plutôt que d’agir par la conviction pour modifier certains comportements humains dangereux peut être discutée.

Proposition n° 7 : Évaluer la pertinence et l’efficacité de l’installation en première monte d’éthylotests anti-démarrage (EAD)

3. Alcoolémies fortes, sanctions aggravées

La mission propose que le retrait de points de permis pour une conduite avec un taux d’alcoolémie supérieur à 0,8 gramme d’alcool par litre de sang soit porté de six à huit. Dans l’état actuel du droit, toutes les alcoolémies dépistées supérieures à 0,5 gramme d’alcool par litre de sang sont passibles d’un retrait de six points.

Dans 90 % des accidents mortels où l’alcool est présent, le taux d’alcoolémie du conducteur est supérieur à 0,8 g/l. Toutes les études disponibles démontrent l’existence d’un lien direct entre le degré d’alcoolisation et la gravité du risque encouru.

Autrement dit, ce n’est pas l’éventuel « deuxième verre de vin » ou l’alcoolisation « inconsciente » ou par inadvertance qui tue le plus, mais des taux d’alcoolémie élevés, souvent supérieurs à 1,2 gramme par litre de sang, et qui résultent donc d’un processus d’alcoolisation délibéré, voire méthodique. (242)

En l’espèce, compte tenu des effets sur la mortalité routière et de la nature des publics en cause – malades alcooliques chroniques, jeunes gens à la recherche d’une conduite transgressive, adeptes du binge drinking (hyper alcoolisation) (243), etc. –, la réponse la mieux adaptée consiste en un renforcement significatif de la sanction.

Au surplus, il n’est pas conforme au principe de la progressivité de la sanction que le retrait de points encouru pour un taux d’alcoolémie compris entre 0,5 et 0,8 g/l – lequel peut résulter d’une alcoolisation « accidentelle » voire involontaire et souvent occasionnelle – soit identique à celui applicable pour un taux supérieur à 0,8 g/l.

Proposition n° 8 : Porter de 6 points à 8 points le retrait de points de permis de conduire en cas de conduite avec plus de 0,8 gramme d’alcool par litre de sang

4. Les conducteurs novices et l’alcool

La mission d’information a mené une réflexion approfondie quant à l’opportunité de réduire à 0,2 gramme par litre de sang (244) le seuil d’alcoolémie légale pour les conducteurs au cours des trois années qui suivent l’obtention du permis de conduire, que le nouveau conducteur ait ou non bénéficié de la conduite accompagnée.

Une telle orientation serait conforme à la recommandation de la Commission européenne du 17 janvier 2001 qui prône d’abaisser le taux maximal d’alcool au volant à 0,2 g/l pour les conducteurs novices et les conducteurs professionnels. Par ailleurs, onze États membres de l’Union européenne (245), dont l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, appliquent un taux minimal d’alcoolémie autorisée – de l’ordre de 0,2 g/l – pour les conducteurs jeunes et/ou novices.

40 % des 18-24 ans tués sur la route le sont dans un accident avec présence d’alcool, ce qui représente 331 vies qui auraient pu être sauvées en 2010. Si les campagnes de communication sur le thème « celui qui conduit, c’est celui qui ne boit pas » ont rencontré un certain écho, force est cependant de constater que la législation actuelle n’interdit pas de conduire avec un taux d’alcoolémie de 0,5 gramme par litre de sang. Des messages contradictoires sont donc envoyés aux conducteurs, en particulier aux plus jeunes.

L’abaissement du seuil conforterait la philosophie du « celui qui conduit, c’est celui qui ne boit pas » et apporterait un soutien sans réserve à la démarche qui consiste à désigner, sur le mode de l’alternance, un « capitaine de soirée » investi de la responsabilité de ramener ses passagers à bon port.

Certaines personnes auditionnées se sont cependant opposées à l’abaissement du seuil légal d’alcoolémie pour les conducteurs novices, redoutant un risque de stigmatisation des jeunes conducteurs et de fragilisation excessive de leur permis de conduire, lequel, il faut le rappeler, n’est doté que de six points. Par ailleurs, il faut rappeler que les spécialistes s’accordent sur le fait qu’une conduite avec moins de 0,5 gramme d’alcool par litre de sang n’engendre pas de sur-risque particulier.

Comparaison européenne concernant les accidents en présence d’alcool

Environ 10 000 décès sur les 38 927 déplorés sur les routes de l’Union européenne en 2009 seraient attribuables à une conduite sous l’emprise de l’alcool selon une estimation de l’Observatoire européen de la sécurité routière (ERSO – 2006), soit 26 % de la mortalité. Une fourchette d’incidence de 5 à 35 % selon les pays a été mise en évidence dans le projet SafetyNet de la direction générale de l’énergie et des transports (DG-TREN) de la Commission européenne.

Ces importantes variations reflètent en partie des différences dans la détection de la donnée et dans son recueil. Ainsi, dans certains pays, il n’est pas légalement autorisé d’effectuer un dépistage d’alcoolémie sur une personne décédée. Ces variations de taux s’expliquent également par le fait que la législation est encore très variable sur le sujet.

La Commission européenne a publié une Recommandation le 17 janvier 2001 qui milite pour un taux maximal d’alcool au volant de 0,5 g/l, abaissé à 0,2 g/l pour les conducteurs novices et les conducteurs professionnels.

En décembre 2010, 17 États membres sont à 0,5g/l (tout comme la Suisse et la Croatie hors UE), un à 0,4g/l (Lituanie), 3 à 0,2g/l (Estonie, Pologne, Suède) tout comme la Norvège hors UE, 4 à 0,0g/l (Hongrie, République tchèque, Roumanie et Slovaquie). Seuls, le Royaume-Uni et Malte en sont encore à 0,8 g/l.

11 États membres ont établi leur taux maximal dans une fourchette contenue entre 0,0g/l et 0,3g/l pour les conducteurs novices et/ou les conducteurs jeunes. 8 États membres ont fixé le taux maximal entre 0,0g/l er 0,3g/l pour les conducteurs professionnels.

% du

Source : Pré-rapport de l’ONISR sur le bilan de la sécurité routière en France en 2010.

B. DROGUES ET CONDUITE : UN RISQUE ÉMERGENT QUI DOIT ÊTRE MIEUX JUGULÉ

Aux termes du pré-rapport de l’ONISR sur le bilan de la sécurité routière en 2010, transmis à la mission le 13 septembre 2011 : « L’enquête de référence SAM – Stupéfiants et accidents mortels de la circulation routière, septembre 2005 – menée en 2002-2003 avait permis d’évaluer à 230 personnes tuées le nombre de victimes de la route annuellement imputables au cannabis, directement ou indirectement (sur-responsabilité et sur-vulnérabilité), sur la base d’une enquête qui avait juste précédé la création du délit correspondant. Elle n’a pas encore été renouvelée depuis.

Depuis lors, la rubrique « drogue » du fichier accidents est apparue mais elle reste pratiquement inexploitable en 2010 car elle n’est renseignée que dans un cas sur dix (les tests sont rarement pratiqués et les retours de résultats trop tardifs pour renseigner la fiche BAAC). A titre indicatif, notons qu’en 2010, on recense 829 accidents corporels dont 192 accidents mortels – soit 3 % d’entre eux – où au moins un conducteur a subi un test positif, que l’accident lui soit imputable ou non. Ces accidents « à présence cannabis » ont provoqué 209 décès, soit 5 % de la mortalité routière. Mais tous ne sont pas imputables au cannabis, ni directement ni indirectement. Toute exploitation plus fine de la base est impossible vu le très faible taux de renseignement.

L’étude SAM attire de plus l’attention sur l’effet cumulé de l’alcool et du cannabis. Le risque d’être responsable d’un accident mortel chez les conducteurs à la fois positifs au cannabis et à l’alcool est estimé dans cette recherche à 14, soit très proche du produit des risques (15,1) attachés au cannabis seul (1,8) d’une part et à l’alcool seul (8,5) d’autre part. »

S’agissant de la détection des situations de conduite sous l’emprise de drogues, la mission d’information est favorable à la décision du Comité interministériel de sécurité routière du 11 mai 2011 d’étendre aux infirmiers la possibilité de procéder aux prises de sang obligatoires pour établir une infraction d’alcoolémie excessive ou de stupéfiants.

Précédemment, seuls les médecins étaient habilités à effectuer ou à faire effectuer les prises de sang destinées à vérifier le taux d’alcool ou la présence de stupéfiant à la suite d’un dépistage positif, ce qui tendait à désorganiser tant les services des urgences des hôpitaux que les forces de l’ordre, lesquels devaient souvent patienter plusieurs heures avec la personne dépistée, au risque de la dissipation de la concentration des substances.

Afin de favoriser les démarches d’auto-contrôle et de régulation, la mission souhaite que se multiplient les opérations de dépistage de stupéfiant sur les lieux de forte consommation d’alcool – lieux festifs, fêtes, concerts, rave parties, etc. – car le cumul alcool cannabis constitue le mélange de produits le plus accidentogène – risque d’accident multiplié par seize par rapport à un conducteur sobre.

Mais il faut accompagner ces opérations sur le terrain d’actions de communication à vocation pédagogique, notamment en direction des jeunes. Il y en a déjà eu un certain nombre, qui ont connu un indéniable succès, comme, récemment, le court-métrage de six minutes intitulé « Insoutenable », pourtant exclusivement disponible sur les plateformes de diffusion sur Internet. Il semble également que la campagne télévisée « Les coups de fil », qui met en scène l’annonce d’un décès à la mère d’une victime, ait eu un certain impact sur les publics les moins communément accessibles aux messages de prévention, dont les jeunes motards.

Compte tenu des succès récents remportés par certaines campagnes de sécurité routière plus particulièrement destinées aux jeunes, la mission souhaite que les services en charge de la communication de la DCSR mènent une action extrêmement déterminée pour alerter sur les dangers de la drogue au volant et, plus encore, du cocktail inacceptable que constitue le mélange alcool-cannabis.

Proposition n° 9 : Lutter contre les mélanges drogues-alcool en accentuant les opérations de dépistage, en particulier aux abords des lieux de consommation d’alcool

C. LA CONDUITE SOUS MÉDICAMENTS : INFORMATION ET RESPONSABILITÉ

Dans la revue de littérature scientifique qu’il a adressée à la mission d’information en septembre 2011, l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR) propose une analyse très convaincante du risque d’accidentalité lié à la consommation de médicaments sous le titre « Les médicaments, certes, mais il faut bien se soigner » :

« Au plan qualitatif, les effets des médicaments, recherchés ou indésirables, parmi lesquels ceux susceptibles d’avoir un effet délétère sur les capacités de conduite sont pour la plupart bien identifiés en pharmacologie. Par ailleurs, des études récentes montrent que les effets résiduels de certaines molécules sur la conduite sont souvent méconnus et sous-estimés par les utilisateurs.

« Au plan quantitatif, ni l’étude SAM, ni aucune étude accidentologique française antérieure ne prévoyaient le dosage sanguin des métabolites médicamenteux. Elles n’ont donc pas permis d’étudier le rôle des médicaments (ni a fortiori leurs interactions avec les autres substances psychoactives) dans la survenue des accidents. Pour pallier ce manque, l’INSERM, en collaboration avec l’IFSTTAR, a mis en place une vaste étude nationale croisant les données accidentologiques des BAAC et les données médicales de la CNAM. Encore en cours d’analyse, elle a cependant déjà livré ses premiers résultats. C’est ainsi qu’a été confirmée la pertinence des pictogrammes de mise en garde apposés sur les boîtes de médicaments, notamment de ses deux niveaux les plus élevés. Pour la première fois en France a pu être aussi estimée la part des accidents imputables à une conduite sous l’emprise de médicaments : toutes familles de médicaments confondues, la conduite sous l’emprise de médicaments induirait 3 % des accidents corporels recensés dans les BAAC, dont la moitié imputable aux psycholeptiques (anxiolytiques et hypnotiques), et un bon tiers aux psychoanaleptiques (antidépresseurs). »

La mission souhaite que soit renforcée l’information des conducteurs sur les incompatibilités entre la prise de certains médicaments et la conduite.

Le médecin prescripteur – qu’il s’agisse du médecin traitant de famille, d’un spécialiste ou d’un prescripteur occasionnel – doit veiller à alerter le patient sur les effets potentiels des médicaments prescrits par rapport à l’aptitude à conduire et doit faire figurer par écrit ces indications sur l’ordonnance. De même, il serait hautement souhaitable que les médecins, lors de la prescription, puissent avertir leurs patients de manière précise, lorsqu’ils préconisent des médicaments dont la prise combinée avec l’alcool serait susceptible d’engendrer un risque pour la conduite.

Les boîtes de médicaments intègrent déjà un système de pictogrammes destinés à alerter les conducteurs sur les effets potentiels – principalement un risque de somnolence – des médicaments qu’ils absorbent. Cependant, ces derniers sont peu connus et pas forcément pris en compte. En outre, ils concernent un nombre élevé de spécialités (environ 300).

Il serait donc opportun que le ministère chargé de la santé établisse une liste plus réduite de médicaments présentant une contre-indication formelle à la conduite et que l’obligation d’information par écrit sur l’ordonnance – fût-elle sous la forme d’une abréviation de type « CFC » (contre-indication formelle à la conduite) – soit réservée à ceux qui y figurent.

Bien entendu, le pharmacien qui délivre les produits participe à la démarche d’information et de prévention, en particulier pour certains médicaments délivrés sans ordonnance qui peuvent entraîner de la somnolence, comme ceux qui agissent contre les états grippaux.

Proposition n° 30 : Renforcer l’information sur les incompatibilités entre la prise de certains médicaments et la conduite

III. – LES « DISTRACTEURS » UN RISQUE CROISSANT QUI APPELLE DES DÉCISIONS FORTES ET IMMÉDIATES

Des débuts de l’automobile au tournant des années 2000, le seul équipement embarqué constituant une source possible de distraction pour le conducteur était l’autoradio, dont il faut noter que l’écoute n’a jamais été interdite ni réglementée, et dont la contribution à l’accidentalité n’est pas établie.

Avec la généralisation, en quelques années seulement, du téléphone mobile – envoi de SMS compris –, des systèmes de navigation, des aides à la conduite, voire des écrans de télévision ou de navigation sur Internet, l’habitacle des automobiles est devenu un espace multimédia d’un haut degré de sophistication technique au sein duquel le conducteur entend conserver tous ses contacts avec l’extérieur, au risque de ne plus mobiliser toute son attention sur l’acte de conduite.

À terme, on pourrait imaginer des situations à la limite de l’absurde où il serait demandé aux écrans d’aide à la conduite – lesquels constituent une source évidente de distraction – d’adresser au conducteur des messages de vigilance et de concentration, selon la logique du « Regardez l’écran pour vous souvenir de regarder la route… »

A. TÉLÉPHONER ET CONDUIRE, NE FAUT-IL PAS ÉVOLUER ?

Au cours des auditions (246), la mission a été confrontée à une forme de paradoxe avec :

• une mise en cause assez vigoureuse et unanime de toutes les formes de distracteurs d’attention pouvant altérer la vigilance du conducteur ;

• une certaine modération dans la critique spécifique de l’usage du téléphone au volant, un consensus ne se dégageant pas en faveur de son interdiction totale (247).

L’incompatibilité foncière entre la mobilisation nécessaire à la conduite et l’engagement dans une conversation à distance ne fait pourtant guère de doute, au point qu’il est tentant de détourner le slogan historique naguère réservé à l’alcool pour affirmer : « téléphoner ou conduire, il faut choisir ! ».

Face à ce risque massif, plutôt qu’un éventail de mesures isolées, la mission d’information est favorable à la diffusion progressive d’une culture allant vers une modification de l’usage du téléphone au volant.

Bien entendu, les téléphones mobiles resteraient utilisables en toutes circonstances pour les appels d’urgence, leur contribution à une alerte plus précoce et à une meilleure organisation des secours d’urgence n’étant plus à démontrer.

Il est donc proposé de décliner un programme en plusieurs mesures tendant à une modification progressive de la pratique de la téléphonie au volant :

–  dans un premier temps, l’usage du téléphone mobile tenu en main – a fortiori pour envoyer des SMS ou exploiter les fonctionnalités d’un smartphone – doit être banni, ce qui passe par un renforcement des sanctions encourues, du reste déjà prévu par le CISR du 11 mai 2011 ;

–  parallèlement, le kit mains-libres, tel qu’il existe actuellement, c’est-à-dire nécessitant la manipulation du téléphone ou le port d’oreillettes, ne serait plus autorisé. Les constructeurs et équipementiers automobiles doivent être incités à proposer les systèmes de téléphonie nécessitant le moins de manipulations possible, notamment à commande vocale, de manière à ce que l’obligation de garder les deux mains sur le volant et une vision permanente de la route soit strictement respectée ;

–  simultanément, des campagnes de communication particulièrement offensives sur le thème du « téléphoner ou conduire, il faut choisir » doivent être lancées, en vue notamment de sensibiliser les conducteurs aux dangers du kit mains libres sous sa forme actuelle (c’est-à-dire non intégré au véhicule et supposant des opérations manuelles, telles que la composition du numéro, le positionnement du micro, etc.) ;

–  enfin, les constructeurs et les opérateurs doivent être incités à développer des systèmes limitant la durée des conversations hors numéros d’urgence.

Décision n°12 du CISR du 11 mai 2011

Renforcer la sanction pour usage du téléphone tenu en main et lutter contre le téléphone au volant et les autres distracteurs : réduire le nombre d’appels en situation de conduite.

–  135 euros et 3 points en moins en cas de conduite avec un téléphone tenu en main.

–  En partenariat avec les professionnels de téléphonie mobile, des solutions techniques seront développées pour permettre de limiter les conversations téléphoniques au volant.

L’usage du téléphone au volant est impliqué dans 10 % des accidents corporels. Le nombre d’appels acceptés au téléphone est très élevé : 506 000 infractions pour usage du portable tenu à la main ont été relevées en 2010. Parmi les conversations échangées, par téléphone, nombre d’entre elles peuvent résulter d’un appel extérieur, sans que le conducteur en soit à l’initiative.

L’infraction n’est aujourd’hui sanctionnée que d’une contravention de 2ème classe avec un retrait de 2 points. Il est nécessaire d’accroître la sanction afin de réduire l’usage du téléphone au volant.

Le comité interministériel de la sécurité routière décide de requalifier l’infraction d’usage du téléphone tenu en main en contravention de la 4ème classe (au lieu de la 2ème classe) donnant lieu à une amende de 135 euros (au lieu de 35 euros) et à un retrait de 3 points du permis de conduire (au lieu d’un retrait de 2 points).

Le comité interministériel de la sécurité routière décide également de développer avec les opérateurs de téléphonie mobile la diffusion de messages de prévention lors de l’usage du téléphone au volant.

1) Le premier type de message vise à neutraliser le téléphone quand le véhicule est en mouvement. Un message automatique, informant l’appelant que la personne contactée :

- est au volant

- que répondre à son appel la met en danger

- invitant l’appelant à renouveler son appel

2) Un autre type de message peut se traduire :

- par un message d’accueil signalant que la personne est au volant et invitant l’appelant à rappeler

- si le conducteur a malgré tout répondu à l’appel, des messages réguliers (par exemple toutes les 30 secondes) viennent rappeler, à l’appelant et à l’appelé, qu’il convient d’écourter la conversation.

3) Un dispositif analogue peut être appliqué aux appels sortants, passés par le conducteur en position de kit mains-libres : diffusion d’un message de sécurité routière, pour le conducteur lui-même, et pour l’appelé, invitant à couper la conversation, de manière à sensibiliser la personne appelée que l’appel qu’elle reçoit met en danger la personne qui l’appelle.

Proposition n° 22 :

–  Porter de deux à trois points le retrait de points du permis de conduire encouru pour conduite avec un téléphone mobile tenu en main ;

–  Mettre fin au système existant des kits mains libres lorsqu’ils reposent sur des manipulations techniques (composition du numéro, réglage du micro, etc.) et sur l’usage d’oreillettes. Demeureraient tolérés les équipements totalement intégrés au véhicule et fonctionnant à commande vocale (de type bluetooth) ;

–  Inciter les constructeurs et les opérateurs à développer des systèmes limitant la durée des conversations à quelques minutes, hors numéros d’urgence.

B. LES AIDES À LA CONDUITE : UN USAGE À ENCADRER

Aux termes du protocole d’accord conclu entre l’« Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d’aide à la conduite » (AFFTAC) et le ministère de l’Intérieur le 29 juillet 2011, reproduit ci-après, les dispositifs anciennement dédiés à la détection des radars de type « Coyote » restent autorisés s’ils s’orientent vers une signalisation des zones de danger, que des contrôles de vitesse fixes ou mobiles y soient ou non organisés.

Cette mesure vise à renforcer la lisibilité de la route et à encourager une forme d’entraide entre conducteurs, en faisant de ces outils de véritables auxiliaires de conduite plutôt que des instruments de contournement de la loi.

Un pas supplémentaire doit être franchi en mobilisant ces technologies embarquées dans la lutte contre l’hypovigilance au volant, dont il est désormais établi qu’elle constitue un facteur d’accident non négligeable. Au stade actuel de leur développement technique, il semble que ces instruments soient en mesure d’envoyer des messages d’alerte aux conducteurs conduisant depuis trop longtemps ou manifestant des signes d’endormissement (écarts de trajectoires, clignement des paupières, etc.).

Proposition n° 23 : Autoriser les avertisseurs de « zones de danger », conformément au protocole d’accord du 28 juillet 2011

Protocole relatif aux outils technologiques d’aide à la conduite de véhicules terrestres à moteur, conclu le 28 juillet 2011, entre le ministère de l’intérieur et l’association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d’aide à la conduite (AFFTAC)

PRÉAMBULE

Le ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration et l’Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d’aide à la conduite (AFFTAC) ont décidé d’unir leurs efforts afin de contribuer ensemble à la réduction du nombre de victimes de la route.

La qualité de l’information et la simplicité d’utilisation des outils technologiques d’aide à la conduite ont vocation, à certaines conditions précises, à participer aux objectifs de sécurité routière et de renforcement de la pédagogie à l’égard des conducteurs, conformément aux orientations de la politique gouvernementale qui visent à diminuer le nombre des victimes de la route en luttant, notamment, contre les facteurs importants d’accidents comme la vitesse excessive et l’hypovigilance.

Dès lors, le ministère de l’Intérieur et l’AFFTAC sont parvenus à la rédaction du présent protocole, lequel fixe les modalités de la collaboration entre les entreprises membres de l’AFFTAC, qui conçoivent, fabriquent, développent et commercialisent les produits et services d’aide à la conduite (boîtiers, applications, GPS intégrés ou nomades), et les différents intervenants publics de la sécurité routière.

Les parties s’engagent :

Pour l’AFFTAC, à :

• Dénommer l’ensemble de ses produits comme des outils d’aide à la conduite et supprimer toute référence aux avertisseurs de radars ;

• Ne pas indiquer la localisation précise des radars fixes ou mobiles, ainsi que celle des contrôles routiers opérés par les forces de l’ordre ;

• Signaler, ou laisser signaler par les utilisateurs, dans la limite des contraintes techniques, les sections de voie dangereuses, définies selon les critères fixés en annexe I du présent protocole, représentant une section d’au moins 4 km sur le réseau autoroutier, d’au moins 2 km hors agglomération et d’au moins 300 mètres en agglomération ;

• Signaler les points de danger précis selon les critères fixés en annexe I ;

• Signaler, dans la limite des contraintes techniques, pour les appareils communicants, en permanence, les limitations de vitesse en vigueur sur l’ensemble du territoire, et pour les applications et les appareils non communicants, les limitations de vitesse sur les sections de voie dangereuses, selon les sources d’information fixées en annexe III ; Pour cela, acquérir auprès des services de l’État et de toute autre partie disposant de ces informations, à titre gratuit ou onéreux, les informations nécessaires à la constitution des bases de données sur les sections de voies dangereuses (définies à l’annexe I) ;

• Diffuser des messages de prévention routière sur les appareils techniquement compatibles, selon la liste fixée en annexe II ;

• Développer et mettre en place un dispositif de lutte contre l’hypovigilance dans le cadre d’un groupe de travail conjoint AFFTAC/Ministère en charge de la sécurité routière ; •

• Créer un label professionnel, validé par un tiers-certificateur, désigné conjointement par les deux parties, des produits conformes aux exigences techniques suivantes :

– absence d’indication de la localisation précise des radars ;

– indication des sections de voie dangereuses et des points de danger précis tels que prévus à l’annexe I ;

– diffusion des messages de prévention prévus à l’annexe II, dans la limite des contraintes techniques.

Pour le ministère de l’Intérieur, à :

• Reconnaître l’AFFTAC comme une organisation représentative des fabricants et utilisateurs de technologies d’aide à la conduite ;

• Élaborer et mettre en œuvre les mesures nécessaires pour que l’ensemble des outils d’aide à la conduite, quel que soit le fabricant ou l’utilisateur, n’indique pas la localisation des radars fixes ou mobiles ;

• Associer l’AFFTAC sur l’évolution des mesures visées au précédent alinéa ;

• Communiquer à l’AFFTAC toutes les données des services de l’État disponibles nécessaires à la définition des sections de voie dangereuses et les points de danger précis, selon les critères fixés en annexe I ;

• Reconnaître la labellisation par un tiers-certificateur telle que définie supra.

Calendrier de mise en œuvre :

• De façon immédiate, les membres de l’AFFTAC s’engagent à diffuser des messages de prévention routière, dans la limite des contraintes techniques ;

• Dès que possible et, en tout état de cause, quatre mois après la signature du présent protocole, les membres de l’AFFTAC s’engagent :

– à ne plus diffuser (sites internet ou sortie de leurs entrepôts) de supports de communication (emballage, publicité sur le lieu de vente) mentionnant les termes « avertisseurs de radars » ;

– à ne plus indiquer la localisation des radars fixes ou mobiles et des contrôles routiers opérés par les forces de l’ordre.

• Dans un délai de six mois à compter de la réception par les membres de l’AFFTAC des données des services de l’État figurant en annexe I, les outils d’aides à la conduite donneront des informations sur les sections de voie dangereuses, dans la limite des contraintes techniques.

• Le ministère de l’Intérieur s’engage à diffuser, par voie de circulaire, le présent protocole en vue de sa mise en œuvre, accompagné de directives d’application par les forces de l’ordre.

Suivi du protocole :

Un comité de suivi sera mis en place entre les services du ministère de l’Intérieur et l’AFFTAC pour une évaluation régulière de la mise en œuvre du présent protocole, du processus de labellisation et examiner les mesures complémentaires qui pourraient s’avérer utiles.

Un bilan sera fait chaque année et le présent protocole pourra être révisé en tant que de besoin.

Fait à Paris, le 28 juillet 2011, en quatre exemplaires originaux.

Annexe I

I- Définition des sections de voie dangereuses

Les sections de voie dangereuses représentent des sections de voie d’au moins 4 km sur le réseau autoroutier, d’au moins 2 km hors agglomération et d’au moins 300 mètres en agglomération.

Le danger peut être lié :

• soit à des sections de voie accidentogènes identifiées par les services de l’État ;

• soit à des sections de voie de fort trafic (en dynamique : sortie ou entrée de grandes agglomérations selon calendrier Bison Futé)

• soit à des événements remontés par des sources définies par le point III de l’annexe I

Les sections de voie dangereuses pourront contenir, ou pas, des radars.

II- Définition des points de danger précis

Les points de danger précis peuvent faire l’objet d’un signalement précis. Il s’agit des points particuliers tels que :

• un obstacle au trafic (passage à niveau, chaussée rétrécie, traversée de voie de tramway) ;

• un passage dangereux (pont, tunnel, forte pente, virage signalé dangereux) ;

• des endroits où se concentrent les publics fragiles (écoles, colonies de vacances, hôpitaux, maisons de retraite…) ;

• des sources de danger temporaires (zone de travaux, obstacle imprévisible lié à une perte de chargement ou à un animal, chaussée glissante ou rétrécie, intervention d’exploitation en cours, dévoiement temporaire de chaussée, accident ou embouteillage ponctuel).

III- Sources d’information pour identifier les sections de voie dangereuses

• État du trafic basé sur les données institutionelles (CNIR, CRICR, outils de surveillance du trafic des exploitants comme Sytadin) ;

• Informations complémentaires sur l’état du trafic auprès d’autres partenaires, gestionnaires de voirie, notamment les communes et les conseils généraux, les sociétés d’autoroute, les opérateurs de géonavigation ;

• Sections de voie de forte accidentalité, basées sur les cartes d’accidentalité du SETRA et la carte départementale des ZAAC (ODSR) ;

• Limites de vitesse en temps réel, basées sur les données de l’État (Sytadin…) ;

• Bases de données des sociétés membres de l’AFFTAC ;

• Données issues des utilisateurs des produits des différentes sociétés membres de l’AFFTAC.

IV Sources d’information pour identifier les points de danger précis

• Lieux dangereux permanents et répertoriés : passages à niveau (base de données), fortes pentes (DIR) ;

• Zones de chantier (info Asfa, DIR, CNIR, CRICR) ;

• Informations complémentaires sur l’état du trafic auprès d’autres partenaires, gestionnaires de voirie, notamment les communes et les conseils généraux, les sociétés d’autoroute, les opérateurs de géonavigation ;

• Bases de données des sociétés membres de l’AFFTAC.

En aucun cas, les données fournies par les utilisateurs et signalant des points précis ne pourront être transmises directement aux autres utilisateurs.

Annexe II

I- Messages de prévention routière au démarrage du produit, diffusés en mode aléatoire, sauf impossibilité technique

• Attache des ceintures (avant et arrière)

• « Soufflez vous saurez » plus message drogues et médicaments

• « Faites vérifier vos pneus »

• « La majorité des accidents se produisent à moins de 5 km de chez soi »

• Contrôle technique à jour

II- Messages de prévention routière pendant l’utilisation du produit, diffusés en mode aléatoire, sauf impossibilité technique

• Pause toutes les deux heures

• Distances de sécurité à respecter

• Attache des ceintures

Annexe III

III- Sources d’information relatives aux limitations de vitesse

• Les données de l’État

• Les bases de données des cartographes

• Informations complémentaires sur les limitations de vitesse auprès d’autres partenaires, gestionnaires de voirie, notamment les communes et les conseils généraux, les sociétés d’autoroute, les opérateurs de géonavigation

Les données issues des utilisateurs des produits des différentes sociétés membres de l’AFFTAC

C. LES AUTRES ÉCRANS

La mission d’information soutient sans réserve la décision n° 13 du Comité interministériel de la sécurité routière visant à aggraver la sanction pour toute forme de conduite avec, dans le champ de vision du conducteur, un appareil à écran en fonctionnement – récepteur de télévision, lecteur de DVD, console de jeu, etc.

Il semble en effet que certains conducteurs, notamment professionnels, luttent contre la congestion du trafic ou contre la monotonie des trajets en recourant à ce type de distraction. L’intentionnalité de l’infraction étant ici établie, à la différence de l’inattention liée à l’utilisation d’un dispositif d’aide à la conduite, le renforcement de la sanction semble en effet parfaitement légitime.

Décision n°13 du CISR du 11 mai 2011

Renforcer la sanction pour conduite d’un véhicule

avec un appareil à écran en fonctionnement dans le champ de vision du conducteur

• 1 500 euros d’amende et perte de 3 points de permis en cas de consultation d’écran par conducteur

• Saisie de l’appareil à écran.

La circulation avec un appareil à écran ne constituant pas une aide à la conduite ou à la navigation en fonctionnement dans le champ de vision du conducteur se banalise chez les chauffeurs, notamment de poids lourds. Des opérations ciblées de gendarmerie ont également mis en évidence que le visionnage de film au volant était devenu une pratique courante. Ces comportements constituent une mise en danger de la vie d’autrui susceptible, dans certaines circonstances, d’être qualifiée de délit.

Le comité interministériel de la sécurité routière décide l’aggravation de la sanction encourue: la contravention de 4e classe (135 euros) sera remplacée par une contravention de la 5e classe (1 500 euros). La perte de points sera portée à 2 à 3 points.

À l’instar de ce qui est prévu à l’article R413-15 du Code de la route pour les appareils de détection illégaux, le nouvel article R412-6-2 prévoira la saisie de l’appareil à écran.

IV. – FORMATION ET PRÉVENTION : LA DIFFUSION DES BONNES PRATIQUES

La quasi-totalité des intervenants entendus au cours des travaux de la mission ont insisté sur l’importance de la formation, à tout âge de la vie et en toute circonstance: la sécurité routière s’apprend, à l’école, des petites classes au lycée, puis dans l’environnement professionnel qui semble constituer un milieu adapté pour aider à la diffusion des bonnes pratiques.

A. LA FORMATION

L’apprentissage des règles élémentaires du code de la route, puis, à un âge variable, de la conduite, est une œuvre de longue haleine dont trois aspects au moins peuvent être améliorés : dans le cadre scolaire, il faut être attentif à la mise en place d’un véritable continuum éducatif destiné à se dérouler à tous les stades du cursus de formation ; parallèlement, l’accès au permis de conduire doit être facilité, pour prévenir notamment le risque de conduite sans permis d’un nombre croissant de jeunes ; enfin, les formations postérieures à l’obtention du permis de conduire méritent d’être encouragées tant leur bénéfice, immédiat et durable, sur la pratique des conducteurs novices est indiscutable.

1. Le continuum éducatif : des acquis certains, des progrès toujours possibles

Ainsi que le notent les experts de l’IFSTTAR, il subsiste un paradoxe dans le fait de délaisser l’éducation routière au lycée alors qu’il s’agit de la période de la vie où se déroulent les prises de risque les plus importantes, en même temps que l’apprentissage de la conduite – conduite accompagnée, préparation des épreuves théorique et pratique du permis de conduire, usage régulier d’un cyclomoteur ou d’une moto de faible cylindrée.

Pourtant, si l’éducation routière donne de bons résultats et semble bien organisée en école élémentaire et au collège, elle est beaucoup moins présente au lycée. C’est pourquoi le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 18 février 2010 avait préconisé de mettre en place un cadre de sensibilisation des lycéens et des apprentis aux différents enjeux de la sécurité routière.

Et, d’ailleurs, compte tenu de la surmortalité bien plus forte des jeunes gens par rapport aux jeunes filles, la mission souhaite qu’un effort d’imagination particulier soit réalisé pour que la formation des lycéens prenne en compte cette donnée. L’idée selon laquelle une conduite dangereuse serait synonyme de virilité doit être éradiquée une fois pour toutes.

Une expérimentation a donc été lancée à la rentrée de septembre 2010 dans 80 établissements relevant de sept académies, choisies en raison d’une accidentalité particulièrement marquée des 16-24 ans ou de la préexistence d’actions pertinentes dans certains lycées ou établissements de second cycle.

Compte tenu des résultats encourageants de cette expérience de terrain, le CISR du 11 mai 2011 a décidé de faire progressivement monter en charge ce dispositif, mesure que la mission d’information soutient sans réserve.

Parallèlement, la création de pistes de sécurité routière, destinées à permettre aux jeunes de tous âges d’expérimenter des situations de conduite dans le cadre d’opérations de prévention routière, doit être encouragée, leur financement pouvant être mutualisé entre les collectivités territoriales, les compagnies d’assurance, certaines entreprises mécènes – notamment pour la fourniture de véhicules – certaines associations partenaires, et l’État.

Enfin, la mission d’information salue deux décisions récentes :

- celle du Gouvernement tendant à obliger les titulaires du permis auto « passant » au deux-roues motorisé à suivre, à compter du 1er janvier 2011, une formation minimale à la conduite de 7 heures – même si le dispositif mérite d’être évalué et sans doute enrichi ;

- la mesure n° 10 du CISR du 11 mai 2011 visant à imposer aux motards « reprenant le guidon » après une interruption de conduite d’au moins cinq ans de suivre une session de perfectionnement post-permis.

Proposition n° 27 : Généraliser l’éducation routière au lycée

Dans un autre registre, la mission a auditionné de nombreuses personnes qui ont souligné les insuffisances de l’épreuve dite « du code » du permis de conduire, laquelle se limite à encourager le bachotage. Aucun cours théorique n’est généralement délivré, si bien que les candidats au permis de conduire se limitent à identifier les « questions pièges » afin de les repérer lors de l’épreuve. Il serait, à l’inverse, nécessaire de jouer sur ce levier que constitue la formation théorique obligatoire pour diffuser une culture de sécurité routière, dans le cadre d’une rénovation de l’examen du permis. Cette rénovation de l’épreuve théorique devrait également inclure une meilleure sensibilisation des automobilistes à la cohabitation avec les autres usagers, et notamment les conducteurs de deux-roues.

2. Faciliter l’accès au permis de conduire

En dépit de controverses persistantes à ce sujet, il est communément admis qu’au moins 450 000 personnes conduisent sur nos routes sans permis de conduire. Parmi les conducteurs sans permis impliqués dans un accident corporel – ce qui constitue la seule base de données statistiquement exploitable –, 74 % n’ont jamais obtenu de permis de conduire, 20 % l’ont perdu par invalidation ou suspension et 6 % ne sont pas titulaires du permis de la catégorie requise.

Il convient donc d’encourager et de faciliter l’apprentissage de la conduite, y compris dans un cadre professionnel et à un jeune âge. Or, selon un avis répandu, la formation à la conduite reste perfectible, même si l’introduction de la conduite accompagnée a permis de progresser. Le permis reste cher, la formation dispensée est très générale et elle ne prépare pas à toutes les situations de conduite. Non corrigé des variations régionales, une dépense moyenne de 1 500 euros semble réaliste, compte non tenu du surcoût engendré par un éventuel premier échec à l’examen. Incontestables dans leur principe et bien conçues, les opérations de type « permis à 1€ » mériteraient sans doute une plus large diffusion.

Sans préjudice des prérogatives des sociétés d’auto-école, la mission n’est donc pas défavorable à une possible inclusion de l’épreuve théorique du permis de conduire dans les cursus de formation des apprentis, selon des modalités à définir à l’issue d’une concertation entre les parties intéressées.

Par ailleurs, les psychologues ont sensibilisé les membres de la mission sur le fait que l’âge de début de conduite coïncidait avec celui où certains jeunes – en particulier les garçons – sont attirés par les comportements de prise de risque maximum, ce qui explique pour partie la surmortalité, en particulier des motards, et incline à la prudence pour ce qui concernerait une éventuelle expérimentation de l’abaissement de l’âge limite du permis de conduire, à 17 ou 16 ans (248).

Proposition n° 27 : Inscrire dans le contrat d’apprentissage la possibilité de passer l’épreuve théorique du permis de conduire (le « code »)

3. Les formations post-permis

Dans un esprit d’incitation aux bonnes pratiques, il est proposé de faire bénéficier d’un bonus d’assurance les conducteurs novices – souvent jeunes – qui font la démarche de suivre un stage de formation à la conduite postérieurement à l’obtention du permis de conduire. Cette mesure pourrait en outre donner lieu à une participation financière des compagnies d’assurance pour ce qui concerne l’organisation des formations. À plus long terme, cette disposition pourrait figurer dans les clauses obligatoires des contrats d’assurance, tandis que la formation post-permis serait rendue obligatoire.

Il faut noter que cette mesure permettrait aussi de lutter contre le phénomène des jeunes qui conduisent sans assurance du fait des surprimes appliquées par les compagnies ou qui ne sont dans les faits que partiellement couverts – qu’ils en soient ou non conscients – lorsqu’ils utilisent un véhicule assuré au nom de leur parents.

Au cours des auditions, la mission a été convaincue par divers témoignages de l’efficacité des formations post-permis, surtout lorsque celles-ci sont réalisées rapidement après l’obtention du permis, avant que ne s’installent de mauvaises habitudes de conduite. Il importe qu’il s’agisse de formations pratiques, mettant directement les conducteurs novices aux prises avec des situations de conduite difficiles à gérer, telles qu’on en rencontre quotidiennement sur route ouverte.

Ainsi, selon leur lieu de résidence ou la saison d’apprentissage, nombre de « lauréats » de l’épreuve pratique du permis de conduire n’ont jamais expérimenté la conduite sur neige, la conduite de nuit, voire la conduite sur autoroute, avant d’être « lâchés » dans le trafic ordinaire. Quant aux situations de freinage d’urgence ou d’évitement d’un obstacle inopiné, elles ne peuvent être maîtrisées qu’au terme d’un apprentissage élémentaire, alors que leurs conséquences en termes d’accidentalité sont considérables.

Le coût de l’insécurité routière est évalué à près de 25 milliards d’euros par an, dont au moins 16 milliards à la charge des assureurs. Il semble que le coût moyen d’une formation post-permis de deux jours puisse être évalué à environ 200 euros par stagiaire. Dès lors, si l’on souhaite que le million de conducteurs qui obtient son permis chaque année puisse bénéficier d’une telle formation, le budget à prévoir serait d’environ 200 millions d’euros par an.

Outre le bénéfice pour la sécurité collective, ce coût serait donc facilement compensé, même dans l’hypothèse basse où la généralisation de la formation post-permis ne réduirait la sinistralité que de 1 %.

Proposition n° 25 : Durant la période probatoire, accorder un bonus d’assurance aux conducteurs novices suivant un stage de perfectionnement à la conduite

B. LA PRÉVENTION DU RISQUE ROUTIER PROFESSIONNEL

Du fait de la large diffusion dans la société de la culture de la formation tout au long de la vie et de la présence, dans nombre d’entreprises, de structures de formation performantes, le milieu du travail représente un environnement privilégié pour se sensibiliser aux enjeux de la sécurité routière et, le cas échéant, améliorer sa conduite. En outre, la responsabilité de l’employeur se trouve renforcée lorsque l’activité professionnelle implique de conduire. Son engagement dans la diffusion des bonnes pratiques doit donc être total et tout doit être mis en œuvre pour l’y encourager.

1. Le monde du travail, un milieu favorable à la sensibilisation et à la formation à la sécurité routière

Au cours des dernières décennies, la culture de la formation continue s’est largement diffusée dans le monde du travail, la nécessité d’actualiser ses connaissances et de mettre à l’épreuve ses compétences de manière permanente ne faisant plus débat. Il convient de s’appuyer sur cet acquis pour faire de l’aptitude à conduire et de la sensibilisation aux enjeux de la sécurité routière un champ de formation ordinaire.

L’action en milieu professionnel permet en outre d’échapper au regard de l’entourage et de se prêter au processus de formation dans un état d’esprit libéré des préjugés et des inhibitions, en particulier pour ceux qui se considèrent, à tort ou à raison, comme de mauvais conducteurs.

En tout état de cause, la sanction de l’évaluation sera vécue de manière moins passionnelle dans un milieu professionnel que dans un environnement privé où les enjeux personnels sont plus prégnants.

Enfin, il existe une continuité naturelle entre l’activité de certaines entreprises et la formation à la sécurité routière dans la mesure où l’usage des véhicules professionnels s’est largement répandu et où le permis de conduire est souvent devenu un élément indissociable du contrat de travail.

2. La responsabilité de l’employeur dans la diffusion des bonnes pratiques

Les accidents mortels de la circulation, accidents de trajet et accidents survenant lors de déplacements professionnels, constituent la première cause d’accident du travail et représentent donc une priorité absolue de la politique de prévention du risque professionnel.

Pourtant, cette problématique n’a émergé que récemment dans le débat public portant sur la sécurité routière. Comme l’a déclaré, M. Jean-Denis Combrexelle, Directeur général du travail, lors de la table ronde sur le risque routier professionnel du 7 septembre 2011 : « Le risque routier constitue l’un des principaux risques professionnels comme en témoignent le nombre de décès et celui des journées de travail perdues. Ainsi que l’atteste notamment le plan « santé au travail », il s’agit là d’une préoccupation prioritaire pour le ministère du Travail et la direction générale du travail. Le principal enjeu consiste à ce que les entreprises considèrent le risque routier à l’instar des risques cancérogènes ou des troubles musculo-squelettiques de manière à ce qu’il soit intégré dans le document unique d’évaluation des risques pesant sur les salariés qu’elles sont obligées de produire, lequel comprend un diagnostic et des actions de prévention. Avec les partenaires sociaux, l’entreprise doit donc évaluer la nécessité et l’organisation des déplacements, veiller au contrôle technique et à l’entretien des véhicules, mais également se soucier de l’utilisation du téléphone pendant les déplacements.

Enfin, le ministère du Travail a réalisé des études sur l’utilisation des véhicules utilitaires légers, qui soulèvent un certain nombre de problèmes pour la sécurité des salariés ainsi que pour l’ensemble des usagers de la route, tandis que, du 1er avril au 30 juin 2011, l’inspection du travail a, quant à elle, mené 2 700 contrôles témoignant de ce que le chemin à parcourir est encore long, puisque seule une entreprise sur deux a intégré le risque routier au sein du document unique d’évaluation, et qu’une minorité d’entreprises seulement a engagé des démarches de prévention. Il importe donc de renouveler une telle opération, tant pour les entreprises que pour les partenaires sociaux ».

Afin de responsabiliser les entreprises, il est donc essentiel de les inciter à inclure le risque routier professionnel dans le document unique d’évaluation des risques, en vue d’en faire, à moyen terme, un élément obligatoire de ce document.

L’incitation à interdire l’usage du téléphone portable et à se montrer intraitable pour ce qui concerne la conduite sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants s’inscrit dans la même logique.

Bien entendu, la mission ne méconnaît pas les situations où c’est l’employeur lui-même, en imposant certaines cadences ou en retenant une organisation rendant indispensable le fait de téléphoner en conduisant, qui met en danger la vie de ses salariés sur la route.

Proposition n° 28 :

–  Inciter les entreprises à inclure le risque routier dans le document unique d’évaluation des risques ;

–  Inciter les entreprises à inscrire dans leur règlement intérieur l’interdiction de l’usage du téléphone au volant dans le cadre des déplacements professionnels de leurs salariés.

C. LA PRÉVENTION DES CONDUITES SANS ASSURANCE ET SANS PERMIS

En dépit de l’obligation légale introduite en France en 1958, de nombreux conducteurs conduisent un véhicule non assuré. Par ailleurs, nombre d’entre eux conduisent sans permis, l’estimation la plus probable étant de 450 000 conducteurs sans permis (249).

Lorsque ces automobilistes sont les auteurs d’un accident, les conséquences économiques et sociales sont lourdes :

–  d’abord, parce que le coût de l’indemnisation des victimes pèse sur la communauté des assurés qui participe au financement du fonds spécialement destiné à traiter de ces situations, le Fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO), auquel l’État n’apporte aucune subvention ;

–  ensuite, parce que ces mêmes auteurs devront rembourser le montant des indemnités versées par le Fonds aux victimes, situation parfois très difficile tant sur le plan social que personnel ;

–  enfin parce que cela génère un manque à gagner significatif pour les entreprises d’assurance.

La non-assurance constitue donc un enjeu de société majeur qu’il convient d’analyser pour le combattre efficacement.

Des actions de sensibilisation et de prévention sont d’ores et déjà en cours pour réduire le nombre de conducteurs sans assurance et/ou sans permis. M. François Werner, directeur général du FGAO, a souligné toute l’utilité qu’il y aurait à constituer un répertoire central des fichiers d’assurés, qu’il « suffirait, alors, comme le font tous les pays voisins, de croiser avec le registre des cartes grises (…). Nous serions alors à même de détecter ces conducteurs avant qu’ils n’aient le temps de mettre en danger les autres usagers de la route. »  (250).

La mission soutient la création d’un tel croisement de fichiers, qui pourrait également comprendre utilement le fichier des permis de conduire de manière à détecter l’ensemble des situations non respectueuses de la loi : conduite sans permis, conduite sans assurance, cumul des deux infractions.

Proposition n° 5 : Autoriser le croisement des fichiers des permis de conduire, des cartes grises et des assurances pour identifier les conducteurs qui roulent sans permis et/ou sans assurance.

V. – L’APTITUDE À CONDUIRE TOUT AU LONG DE LA VIE

Sensible et riche sur le plan humain, la question de la capacité à continuer de conduire lorsque l’âge vient ou lorsque l’état de santé se dégrade a été abordée dans un grand nombre d’auditions de la mission. Elle a suscité une réflexion approfondie de ses membres, dont il ressort que, si la mise en cause de l’aptitude ouvre un champ de réflexion légitime, l’idée de stigmatiser les seniors doit sans doute être écartée – ne serait-ce qu’au vu de leur implication relativement limitée dans l’accidentalité. Parallèlement, il convient de concilier le respect du droit à la mobilité de chacun avec le maintien d’un degré optimal de sécurité collective.

A. LE PERMIS DE CONDUIRE : SÉSAME À VIE OU PERMIS À DURÉE DÉTERMINÉE ?

L’idée selon laquelle le fait d’obtenir le fameux « carton rose » à 18 ans rend apte à conduire une automobile ou une motocyclette la vie durant, quelle que soit l’évolution de sa situation personnelle, du trafic et de l’environnement global, est aujourd’hui de plus en contestée, du fait notamment de la diffusion de la culture de l’évaluation et de la formation tout au long de la vie.

Toutefois, dans notre pays, le projet d’instaurer un contrôle de l’aptitude physique à la conduite au cours de la vie est loin de faire consensus, dans son principe comme dans ses modalités :

• dans son principe, il est souvent considéré que l’éventuelle interdiction de conduire pour inaptitude physique ferait gravement obstacle à la liberté fondamentale d’aller et de venir et constituerait une forme de discrimination à l’égard des personnes vieillissantes ou en mauvaise santé ;

• dans ses modalités, le contrôle de l’aptitude à la conduite ne semble pas aisé à organiser : quels critères retenir ? Selon quelle périodicité l’organiser ? À qui en faire supporter les coûts ? Telles sont les principales questions qui se posent.

Une directive européenne a institué un permis de conduire européen unique (251), applicable à compter du 19 janvier 2013, et dont la durée de validité administrative serait limitée à 10 ou à 15 ans. La tentation est grande d’instaurer à cette occasion un contrôle de l’aptitude à conduire.

Dans le principe, il serait en effet insatisfaisant de considérer que peuvent continuer à circuler des personnes dont les capacités seraient altérées, par l’âge ou la maladie.

Au reste, d’autres pays se sont déjà engagés dans cette voie. En Italie, le « patente di guida » n’est pas délivré à vie et sa validité n’est reconduite qu’au terme d’une visite médicale. L’aptitude est vérifiée tous les dix ans jusqu’à 50 ans, puis tous les cinq ans, trois ans et même deux ans au-delà de 80 ans. Au Danemark, il est interdit de conduire passé l’âge de 100 ans… En Belgique, le candidat au permis de conduire doit passer un test de vue lors de l’épreuve théorique du code de la route.

À cet égard, sans doute serait-il justifié de traiter à part le problème de l’acuité visuelle, dont la vérification périodique semble indispensable. Quelles que soient les évolutions techniques de toute nature, le principe « Au volant, la vue c’est la vie » conserve en effet toute sa pertinence.

Très attentive à cette question, qui a été abordée lors de la quasi-totalité des auditions, la mission d’information n’est pas favorable à l’instauration d’un système de contrôle général et périodique dont la lourdeur et le caractère systématique ne semblent pas adaptés à la réalité de l’accidentalité directement imputable à l’âge ou à la maladie.

B. UNE FAUSSE PISTE : LA STIGMATISATION DES SENIORS

Empirique et souvent liée à des expériences personnelles qui ne peuvent être érigées en généralités, l’idée qu’il n’est « pas raisonnable » de conduire au-delà d’un certain âge mérite d’être nuancée. La plupart des études menées à ce sujet montrent en effet que les personnes âgées tendent à adapter leurs déplacements et leurs comportements de conduite à leurs capacités et à leurs besoins essentiels. Certes souvent médiatisés à l’excès, les accidents graves impliquant des personnes âgées ne présentent parfois aucune spécificité liée à l’âge du conducteur. Ainsi, ce n’est pas un quelconque malaise du conducteur octogénaire qui est à l’origine du drame de Loriol ayant coûté la vie, le 29 novembre 2002, à cinq pompiers drômois, mais le très grand excès de vitesse dont il s’est rendu coupable au volant d’un véhicule très puissant, aux abords d’un accident signalé.

Au reste, comme l’a rappelé un expert de la sécurité routière, « Celui qui est le plus accidentogène, c’est celui qui est le plus apte » (252), soit, souvent, un homme jeune, en bonne santé et sûr de lui, au volant – ou au guidon – d’une machine performante…

L’âge venant, les trajets, essentiellement diurnes, sont réduits, souvent limités à quelques kilomètres par jour hors des grandes agglomérations. Sont aussi constatées des stratégies d’évitement visant à contourner les obstacles mal maîtrisés que constituent les ronds-points ou les carrefours imposant de tourner à gauche en se plaçant au milieu de la chaussée.

En outre, les autorités médicales auditionnées (253) insistent sur la difficulté d’évaluer valablement l’aptitude à la conduite d’une personne vieillissante, sous réserve, bien entendu, qu’elle ne présente pas une déficience évidente constitutive d’une contre-indication formelle. Une telle évaluation devrait reposer sur une batterie d’examens et de tests, auxquels les médecins traitants ne pourraient procéder que s’ils disposaient d’une formation préalable et d’un temps suffisant pour la mener à bien.

Se pose aussi la question de l’âge auquel procéder à une telle démarche, l’inégalité foncière devant le vieillissement étant flagrante. Alors que certains voient leurs aptitudes décliner dès la soixantaine, d’autres restent en état de conduire de manière satisfaisante à un âge très avancé.

En considération de ces différents éléments, la mission d’information est favorable, dans la perspective d’une réactivation du Conseil national de la sécurité routière (CNSR) évoquée plus haut, à l’extension de sa composition à des spécialistes des questions médicales, pour que la question de l’aptitude des séniors à la conduite y soit abordée, eu égard aux nouveaux thèmes de l’accidentalité que constituent la fatigue, la dépendance aux médicaments, l’hypovigilance et le vieillissement global de la population.

Il semble également indispensable d’appeler l’attention des conducteurs sur leur aptitude à la conduite. En la matière, le médecin, traitant ou autre, doit être sensibilisé au fait qu’il ne doit pas attendre que la personne aux capacités potentiellement déclinantes aborde d’elle-même la question de l’aptitude à conduire, car il a été établi que cela ne se produisait jamais.

C’est donc à lui qu’incombe la responsabilité d’alerter son patient sur la diminution temporaire ou durable de son aptitude à la conduite et de l’informer, le cas échéant, sur les moyens de restaurer sa capacité à conduire.

En lien avec un professionnel de santé spécialisé – ophtalmologiste, gériatre, psychomotricien, kinésithérapeute, etc. –, le médecin traitant pourra ainsi donner des conseils ou prescrire des interventions pour que le patient désireux de continuer à conduire puisse éventuellement le faire sans attenter à la sécurité des autres usagers de la route. En cette matière délicate, une action de persuasion reposant sur la confiance réciproque semble en tout point préférable à un dispositif de coercition.

Proposition n° 29 : Conforter le rôle du médecin traitant dans l’information du patient sur une éventuelle diminution de sa capacité à conduire

C. UN ENJEU PLUS LARGE : CONCILIER LE DROIT INDIVIDUEL À LA MOBILITÉ DE CHACUN ET LE RESPECT DE LA SÉCURITÉ COLLECTIVE

Dans nos sociétés, la mobilité est considérée comme une liberté individuelle qui constitue tout à la fois un droit et un gage d’indépendance. Dès lors, prononcer une interdiction de conduire sans justification incontestable pourrait être interprété comme une condamnation à une forme de mort sociale, peu compatible avec les objectifs de santé publique globaux que représentent le maintien à domicile des personnes âgées et la lutte contre toutes les formes de dépendance.

Aussi, plutôt qu’une approche binaire en termes d’interdiction ou d’autorisation de conduire, la mission d’information souhaite promouvoir un accompagnement personnalisé, coordonné par les professionnels de santé et/ou les intervenants sociaux présents dans l’entourage proche de l’intéressé, tendant à prendre en compte les besoins de déplacements spécifiques et les capacités constatées, quitte à prévoir certaines contre-indications comme la conduite de nuit, la conduite sur autoroute ou dans une grande agglomération, voire les trajets excédant une certaine distance.

S’agissant des personnes atteintes de certaines pathologies, l’arrêté du 31 août 2010 modifiant l’arrêté du 21 décembre 2005 fixe la liste des affections médicales incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée. Ce texte vise les affections nécessitant que soit vérifiée l’aptitude à la conduite par une commission médicale préfectorale agréée, en application des articles R. 221-12 à 15 et R. 221-19 du code de la route.

Ce système relativement souple, mais rigoureux et protecteur des libertés individuelles, n’appelle pas à ce jour d’évolution particulière.

QUATRIÈME PARTIE : LES VÉHICULES ET LES INFRASTRUCTURES CONTRIBUENT AUSSI, DE MANIÈRE COMPLÉMENTAIRE, À L’AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Prendre la route en toute sécurité consiste à rechercher une interface optimisée entre un conducteur, une machine et des infrastructures. Dans ces trois domaines, des progrès considérables ont été accomplis au cours des trois dernières décennies, ce qui explique pour une très large part l’amélioration spectaculaire du bilan de la sécurité routière. De nouvelles avancées semblent cependant à portée de main, qu’il s’agisse de rendre les véhicules plus sûrs, d’améliorer la qualité de l’infrastructure – tout en la rendant plus lisible – ou d’évaluer toutes les nouvelles pratiques qui tendent à un meilleur partage de l’espace public entre les différents usagers de la route.

I. – DES VÉHICULES PLUS SÛRS

Il est d’usage de dire que l’élément le plus dangereux d’un véhicule motorisé quel qu’il soit, c’est son conducteur… Aussi ne faut-il sans doute pas trop attendre des évolutions technologiques ni céder à l’illusion que la voiture de demain pardonnera tous les écarts. Force est cependant d’admettre que la mortalité a aussi régressé du fait de l’amélioration des véhicules et que des innovations très prometteuses seront désormais disponibles à un horizon très proche. Une attention particulière doit être portée aux deux-roues motorisés, dont la vulnérabilité foncière ne peut être ignorée.

A. DES VÉHICULES PLUS PROTECTEURS DE LEURS OCCUPANTS COMME DES AUTRES USAGERS DE LA ROUTE

Pour sympathique qu’elle paraisse aujourd’hui – le succès des voitures de collection l’atteste –, l’automobile d’hier n’était pas pensée autour des enjeux de la sécurité routière : objet d’évasion et de recherche de performance, elle ne protégeait valablement ni ses occupants ni les autres usagers de l’espace public. Ces temps sont révolus : au terme d’un long processus d’amélioration constante, les véhicules d’aujourd’hui sont désormais plus sûrs, et s’il ne faut sans doute pas céder à une illusion de sécurité absolue, ils apportent un concours précieux au recul de la mortalité routière.

1. Des progrès constants

Ce n’est pas sans un certain retard sur des pays pionniers, tels que la Suède ou les États-unis, que la France, au tournant des années 1970, a pris des mesures législatives et réglementaires en faveur de la sécurisation des véhicules : port obligatoire de la ceinture de sécurité, à l’avant et à l’arrière des automobiles, et port obligatoire du casque en toutes circonstances pour les cyclomotoristes et les motards.

Même si ces mesures reposant sur des techniques relativement simples ont parfois été mal acceptées car considérées par certains comme « liberticides », elles se sont massivement et rapidement diffusées grâce à la réalisation d’un bon équilibre entre information, communication et répression. Désormais, le port de la ceinture ou du casque est quasi généralisé et il a permis d’accomplir des progrès considérables en termes de lésions corporelles et de décès.

Au cours des deux dernières décennies, l’avancée des techniques et la demande sociale de sécurité routière ont amené bien d’autres innovations qui se sont progressivement diffusées, et, au plan économique, « démocratisées » : tableau de bord et volant rembourrés, appuis-tête, sièges enfants adaptés, vitrage de sécurité, pare-chocs à absorption d’énergie, système de freinage ABS, coussins gonflables de sécurité, système anti-patinage ESC, rétroviseurs anti-éblouissement et anti-angles morts, aide au freinage d’urgence, etc.

Une étape supplémentaire a été franchie avec la prise de conscience que le véhicule devait non seulement protéger ses occupants mais aussi être conçu pour causer le moins de dommages possibles aux autres usagers de la route en cas d’accident. C’est ainsi que se sont généralisées, à l’échelle mondiale et européenne, les normes de déformation de l’avant des véhicules visant à atténuer autant que possible l’effet de collisions avec des piétons.

2. Des véhicules désormais sûrs

Au final, les véhicules actuels présentent un niveau de sécurité active et passive jamais atteint, dont témoignent leurs excellents résultats aux tests de sécurité pratiqués par l’association européenne Euro NCAP.

Préalablement à leur mise sur le marché, les véhicules sont en effet soumis à une batterie de tests visant à éprouver leur résistance aux chocs et le degré de protection procuré aux passagers – en distinguant les adultes des enfants -, ainsi qu’à limiter les dommages qu’ils pourraient causer à un piéton ou à tout autre véhicule en cas de collision.

Ces « crash tests » aboutissent à un classement selon un barème de 5 étoiles : à ce jour, la majorité des véhicules disponibles sur le marché français obtiennent le score de 4 ou 5 étoiles. La clientèle française est du reste de plus en plus sensible à ce critère de choix et il est notable que la pénétration sur le marché européen des marques chinoises a été considérablement freinée par le fait qu’une proportion très limitée de leurs modèles obtient un score supérieur à 3 étoiles sur 5.

Encore faut-il tenir compte des freins à la diffusion des équipements de dernière génération, liés pour l’essentiel à des obstacles économiques : en France, en 2010, l’âge moyen d’achat du premier véhicule neuf s’établit à 51 ans et l’ancienneté moyenne des véhicules en circulation – en dépit des opérations de prime à la casse ou de bonus écologique – atteint huit ans, ce qui fixe à une demi-génération – quinze ans – le rythme de renouvellement minimal du parc automobile.

Au plan national, il convient cependant de saluer l’effort des constructeurs français pour proposer dès le niveau des modèles d’entrée de gammes, marques low cost comprises, un niveau d’équipement suffisant, comprenant au moins deux airbags frontaux et l’aide au freinage d’urgence.

B. DE NOUVELLES AVANCÉES SONT À PORTÉE DE MAIN

Même s’ils semblent parfois hésiter à faire de la sécurité l’un de leurs principaux arguments de vente, préférant faire rêver plutôt que d’évoquer la possibilité d’un accident, les constructeurs et les équipementiers automobiles ne relâchent pas leurs efforts dans la recherche de véhicules toujours plus sûrs.

1. Le système LAVIA

Se sont ainsi développées les approches fondées sur la recherche d’un optimum en matière de sécurité primaire, secondaire et tertiaire. De manière schématique, la sécurité primaire consiste à empêcher l’accident, la sécurité secondaire à en limiter les effets lorsqu’il survient et la sécurité tertiaire à en atténuer les conséquences, par exemple par une meilleure organisation des secours d’urgence.

Au cours des auditions, les membres de la mission d’information ont pu apprécier les pistes très prometteuses qui se dessinent dans ces différents domaines.

Au titre de la sécurité primaire, de nouveaux dispositifs destinés à « empêcher » la survenue d’un accident sont sur le point de se généraliser. Il s’agit en particulier du limiteur de vitesse s’adaptant aux vitesses limites autorisées, le LAVIA (254), dont la visée est essentiellement sécuritaire. Si l’on considère en effet que les limitations de vitesse tendent à prendre en compte les caractéristiques particulières de l’itinéraire pour fixer une allure adaptée aux circonstances, leur respect constitue un gage de sécurité. « Aidé » à respecter la vitesse limite autorisée, le conducteur se met à l’abri d’un triple risque : celui de circuler à une vitesse inadaptée aux circonstances, celui de voir amplifiées par la vitesse les conséquences d’un accident qui eût pu être bénin et, à titre sans doute accessoire, celui d’être verbalisé.

À l’heure où il semble atteindre un stade de mise au point satisfaisant, le système LAVIA a favorablement impressionné la mission – y compris dans sa version informative qui n’agit pas directement sur la vitesse de marche –, sous réserve que les difficultés liées à l’actualisation de la cartographie soient surmontées. Il convient notamment, au terme d’une concertation approfondie entre les gestionnaires d’infrastructures et les équipementiers, d’améliorer en permanence le niveau d’information disponible, notamment pour ce qui concerne les changements de vitesse limite autorisée – temporaires ou permanents –, les zones de travaux ou le signalement de toute zone pouvant présenter un danger ponctuel, durable ou permanent.

Compte tenu de ces différents éléments, la généralisation du LAVIA en première monte semble opportune, avec un déploiement progressif à compter du 1er janvier 2015 pouvant être achevé, selon les souhaits de la mission, le 1er janvier 2018.

Le CISR du 11 mai dernier a d’ailleurs décidé de promouvoir, en lien avec les partenaires de l’automobile et notamment les assureurs, un label « voiture sûre » qui facilitera l’équipement progressif et l’usage du limiteur de vitesse. Cette démarche s’accompagne d’actions visant à :

– développer l’information en temps réel des conducteurs sur la limite de vitesse à respecter à un point donné, indiquée par les GPS, via une convention cadre entre la Sécurité routière, les opérateurs de géonavigation et les gestionnaires de voirie ;

– en liaison avec les constructeurs, favoriser le bridage volontaire des véhicules pour les conducteurs qui souhaitent accroître la sécurité de leur conduite : une telle mesure pourrait par exemple être proposée pour les conducteurs novices, de manière volontaire, en lien avec les assureurs ;

– promouvoir, par convention avec la Fédération professionnelle des loueurs de véhicules, le limiteur de vitesse.

Proposition n° 31 : Généraliser progressivement l’installation en première monte du système LAVIA, avec l’objectif que tous les véhicules soient équipés à compter du 1er janvier 2018.

2. Simples accessoires ou vraies avancées : un tri à opérer

Une simple consultation des catalogues de vente des constructeurs spécialisés dans les véhicules de catégorie premium, notamment germaniques, permet de constater que nombre d’équipements de sécurité dynamique reposant sur des technologies embarquées d’un très haut degré de sophistication sont d’ores et déjà disponibles, en série sur les modèles de haut de gamme ou en option – souvent coûteuse – sur les autres.

Il serait souhaitable qu’une expertise indépendante puisse être conduite de manière à distinguer les systèmes dont une généralisation rapide semble justifiée de ceux qui présentent un moindre intérêt, voire s’apparentent à de simples « gadgets ».

Au titre de la sécurité secondaire, une fois que l’accident est malheureusement survenu, plusieurs études récentes attestent que le niveau atteint par les véhicules les plus récents est satisfaisant, peu de véhicules présentant un résultat inférieur à 3 étoiles sur 5 aux crash-tests Euro NCAP (cf. supra) étant désormais commercialisés sur notre territoire. Pour les raisons déjà évoquées, l’ancienneté et l’hétérogénéité du parc roulant ne mettent pas à l’abri d’accidents mortels qui auraient pu aisément être évités avec des véhicules de dernière génération.

L’idée selon laquelle le haut niveau de sécurité passive atteint par les véhicules actuels, s’il diminue la létalité des accidents, tendrait à favoriser les lésions graves – la personne blessée ne décède pas mais reste lourdement handicapée – n’a pas été formellement confirmée. Elle reste cependant présente dans les esprits et mérite d’être considérée, au même titre que l’excès de confiance que peut générer la conduite d’un véhicule caparaçonné de tous les équipements de sécurité disponibles.

Essentielle, alors que les accidents de la route laissent chaque année au moins autant de personnes en situation de handicap définitif que de tués, l’amélioration de la sécurité tertiaire passe notamment par une meilleure géolocalisation en temps réel des véhicules accidentés, que permet le système d’alerte « eCall », dont la généralisation est envisagée à l’horizon de 2020 à l’échelle de l’Union européenne.

L’attention de la mission d’information a également été appelée sur la nécessité de rationaliser l’orientation des victimes : plutôt que de diriger une victime vers l’établissement hospitalier le plus proche, mieux vaut souvent l’acheminer – fût-ce au prix de quelques kilomètres supplémentaires – vers celui qui possède le plateau technique le mieux adapté à sa situation.

Enfin, l’idée d’installer dans les véhicules des systèmes de type « boîte noire » permettant d’analyser les causes des accidents – voire des « quasi accidents », par nature très difficiles à étudier – n’est pas à écarter : si elle présente des difficultés de mise en œuvre technique, de coût et de respect des données personnelles liées aux déplacements des conducteurs non résolues à ce jour, elle permettrait sans doute de progresser sensiblement dans la prévention des accidents et dans la gestion des situations pouvant conduire à la survenue d’un accident, à l’image de ce qui a été réalisé dans le domaine du transport aérien.

PROGRAMME D’ACTION POUR LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE 2011-2020

(adopté par la Commission européenne le 20 juillet 2010)

Objectif stratégique n°1 : améliorer les mesures de sécurité applicables aux véhicules en rendant obligatoires d’ici 2020 les équipements suivants :

- Système de contrôle électronique de la stabilité (ESC)

- Système d’avertissement de changement de voie (AFIL), pour les PL et les autocars

- Système de freinage automatique (AFU), pour les PL et les autocars

- Dispositifs lumineux et sonores d’incitation au port de la ceinture de sécurité

- Limiteurs de vitesse (type LAVIA)

- Dispositifs de sécurité spécifiques pour les véhicules électriques (255)

- Radars anti-collision (au terme d’une expérimentation spécifique)

- Équipements spécifiques de protection des usagers vulnérables (piétons et cyclistes)

La mission d’information a eu l’occasion de vérifier que les constructeurs français avaient pris de l’avance sur ces différents équipements, la totalité étant d’ores et déjà disponible en série ou en option, y compris sur les modèles neufs d’entrée de gamme.

C. LE CAS PARTICULIER DES DEUX-ROUES MOTORISÉS

Présentant, même à faible cylindrée et à puissance contenue, un rapport poids/puissance qui génère des performances sans équivalent, les deux-roues motorisés n’offrent, par nature, qu’un niveau de protection limité, qui expose leurs conducteurs (256) – et plus encore leurs passagers – à un risque maximum.

Ces données élémentaires méritent d’être rappelées dans la mesure où elles expliquent, pour partie, que la mise en sécurité des cyclomoteurs et des motocyclettes ne se soit pas opérée sur un rythme analogue à celui des automobiles au cours des dernières années(257), ce qui peut expliquer, outre l’effet de certains comportements, la surmortalité persistante des motards.

1. Le système de freinage ABS

Afin de faire progresser la sécurité sans créer de contraintes dont l’acceptation sociale serait incertaine, la mission est favorable à la généralisation progressive des systèmes d’anti-blocage de freins ABS sur l’ensemble des deux-roues motorisés de 125 cm3 et plus mis en circulation à compter du 1er janvier 2013.

Si la mission ne le juge pas négligeable, le surcoût engendré – de l’ordre de 500 euros avant généralisation du dispositif – semble compensé par le bénéfice induit en matière d’amélioration du comportement des véhicules en cas de freinage d’urgence, en particulier dans des conditions d’adhérence dégradées. Au cours de leur formation à la conduite, les aspirants au permis moto devront être sensibilisés au risque particulier d’excès de confiance que peut générer le système ABS sur un deux-roues motorisé. Ils devront donc pouvoir s’exercer sur des véhicules munis d’un ABS débrayable permettant d’expérimenter les deux configurations de conduite.

Proposition n° 17 : Rendre le système de freinage ABS obligatoire en première monte sur tous les deux-roues motorisés de 125 cm3 et plus mis en circulation à compter du 1er janvier 2013

2. S’équiper pour mieux se protéger : une attitude de bon sens

On peut relever que s’est banalisée, dans les grandes villes en particulier, avec la progression exponentielle de la circulation des scooters et des tricycles, le port de casques non intégraux ou transformables, naturellement moins protecteurs que les modèles les plus évolués, souvent pour des raisons de mode ou d’esthétique que rien ne justifie par ailleurs.

Ce relâchement, qui n’est pas le fait exclusif des jeunes puisqu’il concerne aussi les « nouveaux motards » que sont les « anciens automobilistes », s’accompagne d’un laisser-aller généralisé dans la tenue des cyclomotoristes et des motards, contraire aux exigences élémentaires de sécurité en matière d’équipement : tenue de ville inadéquate, bras ou jambes nus, absence de gants, chaussures de ville voire sandalettes, etc.

À cet égard, il a été souligné que l’obligation, un temps envisagée, de porter un « gilet jaune » ne constituait pas une réponse suffisante puisqu’elle ne s’accompagnait pas de nouvelles obligations en matière d’habillement et d’équipement. Il reste que le port d’équipements réfléchissants – blousons à bandes, casques, brassards… – reste un gage de sécurité, l’absence de visibilité des motards constituant un facteur d’accidentalité évident.

Face à cette situation, la mission souhaite que soit édictée une norme d’équipement obligatoire pour la conduite d’un deux-roues motorisé, établie en concertation avec les usagers et éventuellement modulée en fonction de la puissance de l’engin et de l’aire de circulation – usage urbain exclusif, trajets mixtes, longs parcours. Elle pourra s’inspirer de la liste communautaire des équipements de protection individuelle, telle qu’établie par la directive adoptée le 21 décembre 1989, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux équipements de protection individuelle (EPI). La France l’a notamment transposée dans la loi du 31 décembre 1991 modifiant le code du travail et le code de la santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels.

Sans attendre, la mission souhaite que les services en charge de la communication sur la sécurité routière mènent des campagnes actives en faveur du port d’un casque intégral, de gants et d’une tenue adaptée à la pratique du deux-roues motorisé. Les associations auditionnées ont également mentionné l’intérêt des dispositifs de protection dorsale qui permettent de prévenir, pour quelques dizaines d’euros seulement, des lésions graves de la colonne vertébrale.

Parallèlement, la mission encourage la poursuite des études de mise au point des dispositifs de type « blouson airbag » (258), dont l’acquisition pourrait être à terme facilitée, en liaison avec les assureurs ou par le biais d’une incitation fiscale. Certes, le prix de ces équipements est encore élevé mais on peut sans doute s’attendre à ce qu’un accroissement de la demande provoque une baisse des prix.

Proposition n° 20 : Édicter une norme d’équipements obligatoires pour les conducteurs de deux-roues motorisés

3. Des cyclomoteurs mieux contrôlés

S’agissant des cyclomoteurs de moins de 50 cm3– que conduisent souvent les plus jeunes usagers de deux-roues motorisés, puisqu’ils leur sont accessibles dès 14 ans –, la mission préconise la diffusion de blocs anti-débridage réellement efficaces (259). Il est en effet établi que le phénomène du débridage des moteurs est aujourd’hui quasiment généralisé, qu’il génère des nuisances sonores difficilement supportables lorsqu’il est associé à une intervention sur le pot d’échappement et qu’il touche une population très jeune et essentiellement masculine, particulièrement exposée au risque.

En contrepartie de ce durcissement de la réglementation, il pourrait être fait droit à une revendication ancienne de relever de 45 km/h à 50 km/h la vitesse limite de circulation des deux-roues de moins de 50 cm3, de manière à leur permettre de mieux s’insérer dans le flot de la circulation, urbaine, périurbaine et interurbaine.

Ces deux objectifs étant réalisés, il conviendra de prévoir la possibilité de confisquer les machines qui auraient été malgré tout débridées.

Proposition n° 18 : Porter de 45 km/h à 50 km/h la vitesse limite des cyclomoteurs de moins de 50 cm3 de manière à leur permettre de mieux s’insérer dans le trafic, tout en généralisant l’installation de blocs anti-débridage renforcés et en prévoyant la confiscation des machines débridées

4. Un accès maîtrisé aux engins les plus puissants

Partant du constat simple que, malgré le renforcement des épreuves du permis moto, la maîtrise des engins les plus puissants par des conducteurs novices ne va pas de soi, le législateur a prévu un dispositif progressif d’accès à la puissance que retrace le tableau ci-après :

PERMIS

ÂGE

VÉHICULE POUVANT ÊTRE CONDUIT

Brevet de sécurité routière

(BSR)

14 ans minimum pour tous ceux qui sont nés après le
1er janvier 1988

Cyclomoteur : 2 roues à moteur ne dépassant pas 50 cm3 dont la vitesse est limitée à 45 km/h (article R. 311-1 du code de la route)

Permis A1

16 ans minimum

Motocyclette légère (MTL) : 2 roues à moteur de plus de 50 cm3 dont la cylindrée n’excède pas 125 cm3 et la puissance 15 ch (article R. 311-1 du code de la route)

Permis A

de 18 à 21 ans

Moto (MTT 1) : 2 roues à moteur de puissance supérieure à 15ch et inférieure ou égale à 34 ch (ou d’un rapport puissance/poids inférieur ou égal à 0.16 KW/kg, soit un poids à vide supérieur ou égal à 156 kg). Accès après deux ans à toutes motos (article R. 221-6 du code de la route)

Permis A

à partir de 21 ans ou après 2 ans de permis

Accorde automatiquement le droit de conduire toutes les motos (MTT 2) de plus de 34ch et dont la puissance n’excède pas 100 ch (article R. 311-1 du code de la route)

Permis B1 

16 ans

Tricycle à moteur (catégorie L5e) et quadricycles lourds à moteur (catégorie L7e) dont la puissance n’excède pas 20 ch et dont le poids à vide ne dépasse pas 550 kg (article R. 311-1 du code de la route)

Permis B avec deux ans d’ancienneté
+ formation obligatoire de 7 heures depuis le 1er janvier 2011

20 ans

Motocyclette légère (MTL) n’excédant pas 125 cm3 et la puissance de 15 ch, uniquement sur le territoire national (article R. 311-1 du code de la route)

Cependant, à l’heure actuelle, les plus grosses cylindrées peuvent être conduites, sans expérience particulière, par les titulaires du permis A dès l’âge de 21 ans. Au cours des auditions, il est, en outre, apparu que la limitation de puissance à 100 chevaux ne constituait pas en elle-même un gage de sécurité suffisant, dans la mesure où, compte tenu du rapport poids-puissance favorable des motos sportives, il est courant que la vitesse maximale de ces engins excède largement 250 km/h.

La directive 2006/126/CE du 20 décembre 2006, qui institue un permis de conduire européen unique, applicable à compter du 19 janvier 2013, et qui doit être transposée en droit français dans les prochains mois, prévoit des catégories nouvelles de permis de conduire pour les deux-roues motorisés – en particulier un permis AM pour les cyclomoteurs de moins de 50 cm3. Elle renforce la progressivité dans l’accès aux machines les plus puissantes, sous une double condition d’âge et d’expérience. En effet, pour conduire les plus grosses cylindrées, il faudra être âgé au minimum de 24 ans ou avoir deux d’expérience sur plus petite cylindrée, suivre une formation de 7 heures et être âgé de plus de 20 ans.

Il semble cependant à la mission qu’en aucun cas il ne doit être possible de commencer la conduite d’un deux-roues motorisé sur un des cylindrées les plus puissantes. Il est donc nécessaire d’exiger, dans tous les cas, deux ans d’expérience sur une plus petite cylindrée. C’est pourquoi la mission propose que la conduite des motocyclettes de la catégorie MTT 2 dont la puissance est comprise entre 34 ch et 100 ch ne soit accessible qu’aux conducteurs de plus de 21 ans titulaires d’un permis moto depuis au moins 2 ans et pratiquant une formation de 7 heures, sans définir d’âge à partir duquel un accès direct à ces machines serait possible.

Proposition n° 19 : Prévoir que le permis A ne soit accessible qu’après deux ans d’expérience sur des plus petites cylindrées.

5. Le contrôle technique : éliminer les engins dangereux

Conformément aux orientations communautaires, la mission souhaite soumettre les motocyclettes et les scooters à trois roues à un dispositif de contrôle technique. Il importe en effet que des contrôleurs spécialement formés à cet effet puissent vérifier le bon état de fonctionnement des principaux organes de sécurité.

Toutefois, afin de simplifier le dispositif et d’en assouplir les modalités avant qu’il soit possible de procéder à son évaluation complète, il est proposé de ne soumettre au contrôle technique que les motocyclettes de plus de quatre ans, à l’occasion d’un changement de titulaire de la carte grise (vente, cession, échange, etc.). Les motocyclettes de plus de trente ans, éligibles au dispositif de la carte grise de collection, seraient exonérées de l'obligation de contrôle technique, même en cas de changement du titulaire de la carte grise.

Les obligations de contrôle périodique auxquelles sont soumises les automobiles – premier contrôle quatre ans après la première mise en circulation puis contrôle technique obligatoire tous les deux ans – ne seraient donc pas applicables aux motos.

Proposition n° 21 : Soumettre au contrôle technique les motocyclettes de plus de 4 ans à l’occasion d’un changement de titulaire de la carte grise

II. – LES INFRASTRUCTURES : UNE ROUTE PLUS LISIBLE ET QUI CORRIGE LES ÉCARTS DE CONDUITE

La réflexion sur la qualité des infrastructures routières met en jeu deux problématiques principales. D’abord, la route doit devenir plus lisible. Dans les faits, cela se traduit par la recherche constante d’un haut degré de cohérence dans les informations destinées à être prises en compte par le conducteur et, à l’évidence, des progrès considérables sont à accomplir dans ce domaine tant les messages semblent parfois contradictoires, voire incompréhensibles.

Ensuite, l’ensemble des aménagements d’infrastructures, du chantier le plus important à la plus modeste intervention, doit être conçu et réalisé en vue de limiter le risque encouru par l’usager. Dans la mesure où l’erreur humaine ne sera jamais évitable, tout doit être mis en œuvre pour offrir une route qui corrige les écarts de conduite et pardonne, autant que faire se peut, les fautes qui sont à l’origine des accidents les plus graves.

A. UNE ROUTE PLUS LISIBLE

Signalisation manquante ou incohérente, brusque changement de la vitesse limite autorisée que rien ne semble justifier, marquage au sol insuffisant, sentiment d’une réglementation qui cherche à piéger plutôt qu’à protéger… nombre d’interlocuteurs de la mission – en particulier lorsqu’ils représentaient des conducteurs professionnels ou des « gros rouleurs » – ont dénoncé le manque de lisibilité de la route française en ce début de 21ème siècle.

À l’évidence, cette situation constitue un défi pour les décideurs publics : comment faire respecter la règle si celle-ci n’est pas claire ?

Comment susciter une compréhension optimale de l’environnement dans lequel chacun est destiné à évoluer ?

Comment tenir compte des contraintes et attentes parfois contradictoires des différents usagers ?

Comment faire la part entre la nécessaire adaptation aux réalités locales et le maintien d’un degré d’uniformité suffisant à l’échelle du territoire ?

Pour relever ces différents défis, il semble souhaitable de s’en remettre aux solutions les plus simples possible et de veiller à une application cohérente des dispositions du code de la route : à chaque type de voie correspond une vitesse limite autorisée (VLA) de référence, diminuée en cas de conditions météorologiques dégradées :

• En agglomération : 50 km/h hors les zones de rencontre limitées à 30 km/h

• Sur le réseau secondaire : 90 km/h

• Sur les routes à deux fois deux voies : 110 km/h

• Sur les autoroutes : 130 km/h.

Si elle présente l’avantage de la simplicité – « je sais en permanence à quelle vitesse je suis censé rouler » –, cette solution ne tient sans doute pas suffisamment compte des situations locales qui, dans un pays au relief aussi accidenté que celui de la France, appellent des adaptations permanentes.

Un effort d’harmonisation des itinéraires semble cependant indispensable. Il ne pourra être accompli qu’au terme d’une triple démarche :

– D’abord, les différentes autorités politiques et administratives en charge de la fixation des vitesses limites autorisées doivent travailler de manière coordonnée afin d’éviter les incohérences et les initiatives isolées qui sont autant de sources de perturbations pour les conducteurs ;

– Ensuite, un audit indépendant de l’état de la signalisation et des infrastructures doit être mené, de manière à recenser les principales anomalies qui attentent à la lisibilité des itinéraires et à proposer des solutions harmonisées ;

– Enfin, une réflexion doit être menée sur la lisibilité de la signalisation et sur la manière d’actualiser en permanence sa cartographie pour l’intégrer aux systèmes intelligents de communication d’informations entre les gestionnaires d’infrastructures et les usagers.

Au final, un saut qualitatif permettant d’intégrer le respect de la norme pourrait être accompli : « Je sais à quelle vitesse je dois circuler et je sais pourquoi cette vitesse limite a été fixée ». Ce ne serait donc plus par « peur du gendarme » que le conducteur respecterait la vitesse mais parce qu’on lui aurait appris à lire la route et à analyser ses dangers.

B. UNE ROUTE QUI CORRIGE LES ÉCARTS DE CONDUITE

Si la responsabilité humaine n’est jamais étrangère à l’acte de conduite, il est avéré que certains aménagements d’infrastructure de bon sens permettent, parfois à moindre frais, de limiter les risques et de faire reculer l’accidentalité de manière significative. C’est ainsi que doit être recherchée une plus grande cohérence du réseau routier, tant dans son organisation que dans sa signalisation, en vue d’éviter les pièges de conduite qui ne pardonnent pas, et, à plus long terme, de banaliser la route intelligente, en interaction constante avec ses usagers.

1. Pour une plus grande cohérence du réseau

Dans une large mesure, le modèle de la route qui pardonne les fautes et écarts de conduite est bien connu. Il s’agit d’une route à – au moins – deux fois deux voies séparées par un terre-plein central, aussi bien revêtue, rectiligne et éclairée que possible : c’est l’autoroute française, où l’on n’enregistre que 6 % du total des personnes tuées annuellement sur la route, malgré une vitesse de circulation bien supérieure à celle enregistrée sur le reste du réseau.

La diffusion de ce modèle ayant été considérablement freinée dans le dernier tiers du 20ème siècle, après que l’on eut renoncé à « adapter la ville à la voiture » et à supprimer tous les arbres de bord de route, de nouvelles voies doivent être recherchées car, comme l’a entendu la mission au cours des auditions, « le risque minimum d’accident, c’est lorsqu’un conducteur bien formé emprunte une route cinq étoiles au volant d’une voiture cinq étoiles …» (260).

Présenté par certains comme une pathologie de la mobilité, l’accident survient en effet lorsque l’interaction entre l’homme, la machine et la route ne remplit plus la fonction recherchée, soit se déplacer en toute sécurité d’un point à un autre. Toute démarche de prévention ignorant l’un des trois facteurs – le comportement humain, la performance du véhicule, la qualité de l’infrastructure – est donc vouée à l’échec.

Même si elle demeure un objectif permanent, encore renforcé par le fait que 85 % des accidents mortels se produisent sur le réseau secondaire, l’amélioration du réseau routier ne semble plus constituer une priorité nationale déclinée dans un plan d’ensemble concerté. C’est ainsi que nombre de nouvelles liaisons autoroutières ou d’aménagements d’envergure n’ont pas été repris dans l’avant projet consolidé de schéma national des infrastructures de transport (SNIT), lequel se concentre plutôt sur la promotion des modes de transport non routiers, dans un objectif de protection de l’environnement par ailleurs incontestable.

Sans contester le bien-fondé d’une telle politique, il convient cependant de la mettre à l’épreuve de la réalité : dans la mesure où les objectifs de report modal de la route vers les autres modes – en particulier ferroviaire et fluvial – ne sont pas atteints, est-il raisonnable de prendre du retard dans l’adaptation du réseau routier, lequel continue – et continuera vraisemblablement longtemps – de supporter une part croissante du trafic, notamment de marchandises ?

Dans le cadre de l’audit précité sur l’état des infrastructures, il serait opportun de revoir la pertinence d’ensemble du programme d’équipement autoroutier national à dix ans, afin d’étudier la possibilité de mener à bien tous les programmes susceptibles d’améliorer la sécurité routière de manière significative.

Les auditions réalisées par la mission ont par ailleurs mis au jour d’éventuels effets indésirables de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, laquelle attenterait à la cohérence des interventions entre les différents niveaux d’administration et pourrait conduite à un certain désengagement de la puissance publique.

Proposition n° 32 : Demander aux services de l’État compétents de réaliser, en liaison avec les collectivités territoriales, un audit sur les infrastructures de manière à rendre la signalisation plus cohérente et lisible. Dans le cadre de cet audit, revoir la pertinence de l’ensemble du programme autoroutier national à dix ans, en vue de mener à bien tous les programmes susceptibles d’améliorer la sécurité routière de manière significative.

2. Une route « qui pardonne »

S’il ne s’agit pas de s’en remettre aux aménagements de voirie pour dégager la responsabilité individuelle de chaque conducteur dans le bon usage de l’espace public, un consensus se dégage sur le fait que doivent être levés les principaux obstacles – en particulier pour les motards –, que la persistance de passages à niveaux problématiques est anachronique et que l’une des seules armes connues contre l’hypovigilance sur longs trajets consiste en l’installation de bandes sonores permettant d’avertir des écarts de trajectoire liés à un possible assoupissement.

a) Moins d’obstacles

Au plan technique, il semble qu’un effort particulier doive être accompli en direction des motards. Les préconisations du guide du Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques (CERTU) « Recommandations pour la prise en compte des usagers de deux-roues motorisés dans l’aménagement et la gestion des infrastructures », paru en mai 2011, méritent une attention particulière. Elles visent notamment à limiter la présence d'obstacles fixes de bord de route, à privilégier les dispositifs de glissières de sécurité les moins dangereux pour les usagers de deux-roues motorisés, et, plus globalement, à mieux associer les motocyclistes à la réflexion sur les aménagements d'infrastructures. C’est ainsi qu’un référentiel d’inspection de sécurité des routes avec une vision « moto » est en cours de test sur le réseau routier de l’État.

Un audit national des points les plus « accidentogènes » du réseau, par récolement des démarches menées dans les départements, est également souhaitable, l’objectif n’étant pas de re-centraliser la gestion des infrastructures mais de diffuser les bonnes pratiques et d’harmoniser les itinéraires.

Dans le même ordre d’idée, doivent être lancées des réflexions sur l’éclairage des bretelles d’autoroutes et une expérimentation des dispositifs visant à empêcher de s’engager à contresens sur une autoroute (261), de tragiques accidents – impliquant notamment des personnes âgées ou en état d’ébriété – se produisant régulièrement pour ce motif.

b) Plus aucun passage à niveau

Enfin, la mission souhaite que soit accélérée la réalisation d’un plan de suppression progressive mais totale des passages à niveau, en liaison avec l’établissement public propriétaire des voies « Réseau ferré de France », en commençant par les plus dangereux. En effet, si la suppression d’un passage à niveau, par enfouissement des voies ou par construction d’une passerelle d’évitement, coûte cher (262), certains accidents récents – en particulier l’accident d’autocar d’Allinges, en Haute-Savoie, qui a coûté la vie à sept collégiens en juin 2008 – ont démontré leur dangerosité persistante, peu acceptable en ce début de XXIème siècle.

Dans l’attente de la réalisation de ce plan de suppression, la mission préconise d’équiper en feux tricolores les passages à niveau les plus dangereux, de manière à en sécuriser le franchissement autant que faire se peut.

Proposition n° 33 : En liaison avec Réseau ferré de France (RFF), accélérer la réalisation d’un plan de suppression des passages à niveau, en commençant par les plus dangereux.

c) La route qui tient éveillé

Dans le cadre de la lutte contre le facteur d’accidentalité majeur que constitue l’hypovigilance, du simple défaut d’attention à l’endormissement au volant, la mission est favorable à la généralisation des bandes de rive sonores sur les autoroutes qui permettent d’alerter les conducteurs – notamment de poids lourds – sur leurs déviations involontaires de trajectoire. S’il a été objecté au cours des auditions que certains risquaient d’être tentés d’adopter de ce fait une conduite « à l’oreille » particulièrement dangereuse, il semble toutefois nécessaire de s’engager dans cette voie car elle constitue l’un des seuls dispositifs « mécaniques » et non embarqués imaginés, à ce jour, contre l’hypovigilance, laquelle doit désormais constituer un champ de recherche prioritaire en matière de sécurité routière.

La mission soutient par conséquent la décision prise en ce sens par le CISR du 11 mai 2011. Il reste que l’efficacité de ces aménagements gagnerait à être établie par des études internationales et que le coût d’une telle généralisation n’a pas été chiffré, non plus que son calendrier de réalisation.

Proposition n° 34 : Généraliser l’installation de bandes de rive sonores sur les autoroutes

C. VERS UNE ROUTE INTELLIGENTE ?

A l’image du contrôle aérien, la route intelligente permettrait un échange d’informations permanent et en temps réel entre les conducteurs et les gestionnaires d’infrastructures. Dans une certaine mesure, les radars pédagogiques et les panneaux d’information installés sur les autoroutes en constituent une préfiguration.

Promu à l’échelle européenne, le concept de route intelligente est prometteur en matière de sécurité routière. Il doit permettre un meilleur partage de la route et, notamment, un meilleur contrôle des temps de circulation des autocars et des poids lourds.

Dans un rapport d’information déposé par la commission des Affaires européennes sur le déploiement de systèmes de transport intelligents (STI) dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport (e4200) (263), M. le député Gérard Voisin, membre de la mission d’information, résume ainsi l’apport des STI pour la sécurité routière :

« Répondre à une politique des transports dotée d’objectifs ambitieux en matière de sécurité implique de se doter des outils les plus adaptés car l’éducation des populations, indispensable, ne permettra pas seule d’atteindre les objectifs fixés ; des dispositifs comme l’appel d’urgence ont leur utilité.

Dans la proposition de directive en cours de négociation, la Commission européenne propose d’intégrer les systèmes d’appel d’urgence dans le champ des STI rendus obligatoires. Elle estime que la généralisation de ce système éviterait la mort de 2 500 personnes sur les routes européennes. Même si le rapporteur considère que ce chiffre est surestimé, l’efficacité de ces dispositifs n’est pas contestable (264).

La gestion d’urgence, en cas d’accident de la route, utilise au maximum des systèmes automatisés de recueil de l’information et des transmissions performantes. Les principaux enjeux sont la rapidité d’intervention, l’évitement d’accidents en chaîne et le rétablissement de la circulation.

Les principaux dispositifs d’aide en cas de situation d’urgence sont :

- la Détection automatique d’incidents (DAI) par les capteurs routiers installés sur l’infrastructure et qui préviennent l’exploitant du réseau (image de DAI par capteur vidéo) ;

- les services d’assistance à l’automobiliste (exemple : appel automatique des secours en cas de collision, envoi automatique de la localisation précise du lieu d’accident) qui, malgré les efforts de Renault et de PSA, ne sont pas encore démocratisés.

Toutefois, ces dispositifs ne constituent que le premier maillon d’une chaîne et sont tributaires de l’efficacité globale des services de secours. Les STI vont au-delà de l’appel d’urgence et peuvent contribuer grandement à éviter les accidents de la route :

- certains sont largement diffusés tels que l’aide électronique au freinage, la boîte de vitesses automatique « intelligente » (qui gère les rapports en fonction de la nature du sol ou du type de conduite) qui sont des systèmes bien connus ;

- les limiteurs de vitesse pour ne pas dépasser la vitesse réglementaire et limiter la consommation de carburant ;

- les systèmes anti-collision trop peu diffusés ;

- les systèmes d’aide à la navigation (GPS, GSM et systèmes informatiques embarqués).

À cela s’ajoutent les moyens de contrôle du respect de la réglementation que sont les radars automatiques pour le contrôle de la vitesse et le contrôle automatisé du franchissement de feux rouges qui font appel à des technologies telles les flash infrarouges utilisés de nuit pour lire les plaques minéralogiques sans éblouir les conducteurs ou des capteurs précis pour déterminer la vitesse des véhicules

Au-delà de la sécurité routière, il convient de noter que de récentes actions gouvernementales dans le domaine des STI – spécifiquement aux Etats-Unis – sont motivées par des besoins en matière de sécurité du territoire car ils peuvent jouer un rôle important dans une évacuation de masse rapide des centres-villes en cas d’évènements causant un nombre important de victimes comme des catastrophes naturelles ou d’autres menaces.

Une donnée essentielle pour l’intégration des STI dans la politique de sécurité routière réside dans la diminution du prix de ces systèmes. Aujourd’hui les options GPS des constructeurs automobiles sont affichées à des tarifs supérieurs à 2 000 euros, à l’exception de Renault pour certains modèles. C’est excessif et entrave l’utilisation de ces outils qui, bien utilisés, pourraient contribuer grandement à l’amélioration de la fluidité et de la sécurité sur nos routes. Cet aspect monétaire est particulièrement important pour les jeunes qui sont plus accidentogènes et roulent dans des véhicules plus âgés ne disposant pas des outils d’aide à la conduite. »

Cette description offre un riche catalogue de ce que pourrait être, à l’avenir, une route intelligente, c’est-à-dire offrant une large interaction entre les équipements dont elle est dotée et ceux embarqués dans les véhicules. De cette interaction naît une forme nouvelle d’accompagnement de la conduite, et donc une sécurité accrue.

III. – LE PARTAGE DE LA ROUTE, REFLET DE NOTRE CAPACITÉ AU VIVRE ENSEMBLE

Bien qu’il se prête moins facilement que l’accidentalité à l’exercice statistique, le stress au volant suscité par un certain degré d’incivilité routière est générateur d’un climat global d’insécurité qui ne peut être méconnu. Au-delà des objectifs chiffrés en termes de personnes tuées ou blessées, il semble donc essentiel de réaffirmer un certain nombre de valeurs comme le respect de la règle, la courtoisie, la solidarité entre usagers de la route et le partage de l’espace public.

A. LE PARTAGE DE L’ESPACE PUBLIC ENTRE LES USAGERS : CIVISME ET COURTOISIE

La violence routière constitue une manifestation d’incivilité qui porte gravement atteinte à la qualité du lien social, notamment – mais pas seulement – dans les grandes agglomérations où le trafic est le plus intense. Alors que les temps de trajets sont allongés par l’étalement urbain et par le coût des logements de centre ville, le climat d’agressivité larvée qui se développe souvent entre les différentes catégories d’usagers est générateur d’une insécurité qui dépasse le cadre routier stricto sensu.

Les réactions suscitées par certaines annonces du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR), qui s’est tenu le 11 mai 2011, témoignent aussi d’une montée de l’individualisme et d’une altération du rapport à la règle : « pourquoi m’imposer une contrainte surtout valable pour les autres alors que je suis, moi, un bon conducteur ? »

Le constat un peu rebattu d’une certaine réticence française à se plier aux règles collectives ne doit pas conduire à une forme de fatalité : en tant qu’espace public à partager, la route constitue un bien commun que les Français, au nom d’un soi-disant tempérament latin, ne sont pas enclins à toujours respecter.

Pourtant, les comparaisons internationales montrent chez nos voisins latins un comportement bien différent : mieux classée que nous dans le palmarès européen de la sécurité routière, l’Espagne est passée sous le seuil des 3 000 morts par an ; quant à l’Italie, elle nous talonne avec un nombre de personnes tuées en 2010 sensiblement équivalent au nôtre.

Pour anecdotiques qu’elles semblent parfois, les initiatives de type « Journée de la courtoisie au volant », organisée par l’Association des maires de France (AMF) en partenariat avec le ministère des Transports, et dont la treizième édition aura lieu le 22 mars 2012 sur le thème « La rue, la route : un espace à partager », les campagnes d’éducation au civisme routier menées en milieu scolaire ou dans les médias, et les actions de rappel à la règle des forces de l’ordre – pas forcément assorties de sanctions – méritent d’être encouragées.

Enfin, les initiatives de type « code de la rue », « permis piéton » ou « permis vélo », popularisées par certaines collectivités territoriales, peuvent servir d’exemples.

B. DE NOUVELLES RÈGLES POUR DE MEILLEURS USAGES ?

L’irruption des deux-roues motorisés et la vogue de l’usage de la bicyclette dans les centres urbains ont concouru à la diffusion de nouveaux usages dont les effets se doivent d’être évalués. S’agissant des usagers particulièrement vulnérables que constituent les piétons, des progrès semblent également réalisables au prix de certains aménagements élémentaires dictés par le bon sens.

1. La remontée interfilaire des deux-roues motorisés

S’agissant des deux-roues motorisés, lesquels constituent une réponse adaptée aux besoins de déplacement dans des aires urbaines marquées par une congestion croissante du trafic, la pratique de la remontée interfilaire se banalise bien qu’elle constitue un facteur d’accident et, surtout, de stress au volant absolument incontestable. Face à cette situation, le législateur est confronté à un dilemme.

Faut-il la réprimer avec la plus extrême fermeté, en sachant que cela exigerait une mobilisation des forces de l’ordre sans précédent, compte tenu de l’ampleur du phénomène dans une agglomération comme Paris et que l’un des intérêts majeurs de l’usage du deux – ou trois – roues en contexte urbain s’en trouverait entamé ?

Faut-il maintenir la situation actuelle de « tolérance non bienveillante », en comptant sur les seules capacités de régulation des usagers et en faisant des accidents – souvent mortels – la variable d’ajustement entre laxisme et sanction ?

Faut-il oser s’attaquer au problème en envisageant, en concertation avec tous les usagers, une réglementation minimale de la remontée interfilaire sur la base de quelques principes simples : par exemple, ne la tolérer qu’en cas de forte congestion du trafic, lorsque les flux principaux de la circulation automobile sont à l’arrêt ou s’écoulent à moins de 15 km/h, ne la tolérer qu’à une vitesse inférieure à 20 km/h, en actionnant les feux de détresse et avec l’interdiction pour les deux-roues de se doubler entre eux ?

La mission d’information penche pour la troisième option, en souhaitant que la réflexion sur cette possibilité de réglementation se déroule dans un climat apaisé et ne soit en aucun cas ressentie comme une incitation des conducteurs de deux-roues motorisés à s’affranchir des règles de droit commun du code de la route.

Proposition n° 16 : Évoquer la situation juridique de la circulation interfilaire dans le cadre d’un dialogue avec les usagers

2. La place des bicyclettes dans le trafic

La généralisation des systèmes de vélos en libre service dans les principales métropoles a eu un effet sur le partage de l’espace public, entre cyclistes et automobilistes, entre cyclistes et conducteurs de poids lourds, d’autocars ou de taxis, entre cyclistes et deux roues motorisés, et enfin entre cyclistes et piétons, ce dernier cas méritant qu’on s’y arrête.

Généralement peu sanctionnée – voire ouvertement tolérée – la circulation des vélos sur les trottoirs adresse un mauvais signal : d’abord en ce qu’elle ôte au trottoir son caractère de « sanctuaire » pour les piétons, tout particulièrement les personnes âgées et les enfants ; ensuite, parce qu’elle incite le cycliste à se considérer comme exonéré du respect des règles communes du code de la route ; enfin, parce qu’elle suscite l’imitation chez les conducteurs de deux-roues motorisés, ce qui constitue un danger mortel pour les piétons.

Plusieurs membres de la mission ont exprimé des réserves quant à la banalisation des voies de circulation à contresens destinées aux cyclistes, les « double-sens cyclables » institués, en particulier dans les « zones 30 », par le décret n°2008-754 du 30 juillet 2008 portant diverses dispositions de sécurité routière. En effet, ces aménagements transgressent le "tabou" du sens interdit et peuvent entraîner, par effet de surprise, des réactions non maîtrisées des autres usagers de la route. En outre, bien que le code de la route l'interdise expressément, il n'est pas rare que les usagers des deux-roues motorisés se croient autorisés à emprunter ces voies, ce qui fait changer de nature le risque induit.

On peut donc juger souhaitable qu'une évaluation de ce mode de circulation soit menée avant d'en poursuivre l'extension dans les zones urbaines. Dans le cadre de cette étude, il conviendra de ne pas se focaliser sur l’accidentalité induite par de tels aménagements car au-delà du risque direct d’accident qu’ils peuvent entraîner, ils contribuent à rendre l’espace partagé moins sécurisant en créant de nouvelles sources de tension. En d’autres termes, même si l’enfant ou la personne âgée qui n’ont pas l’habitude de regarder des deux côtés avant de traverser une voie à sens unique ne sont pas renversés par le cycliste, le choc émotionnel que peut occasionner son irruption brutale n’est pas à négliger.

La mission a eu connaissance de situations – sans doute extrêmes – où des personnes âgées finissaient par renoncer à sortir de chez elles de peur d’être renversées sur un trottoir par un patineur, un usager de trottinette, un cycliste ou un scootériste.

Enfin, la sécurité de tels aménagements pour les cyclistes eux-mêmes n’est pas formellement établie, l’effet de surprise pour les automobiles pouvant entraîner des collisions qui leurs sont forcément défavorables du fait de leur vulnérabilité.

Proposition n° 38 : Évaluer le dispositif des double-sens cyclables

3. La « sanctuarisation » des passages piétons

S’agissant de la protection des usagers particulièrement vulnérables que représentent les piétons, la mission demande de faire du stationnement devant un passage piéton un cas de stationnement dangereux – et non plus simplement gênant.

Les piétons représentent en effet plus de 12% des victimes de la route recensées annuellement. Nombre d’entre eux sont des personnes âgées renversées par un véhicule à l’occasion d’une traversée de voie. Les passages protégés doivent par conséquent être « sanctuarisés ». L’un des éléments essentiels de leur mise en sécurité résidant dans la bonne visibilité de la circulation, il est proposé que les véhicules garés ou arrêtés à proximité d’un passage piéton, en dehors d’un emplacement autorisé, soient considérés comme en état de stationnement dangereux. Cette catégorie d’infraction permet en effet la mise en fourrière immédiate, la délivrance d’une amende de 150 euros au maximum et le retrait de trois points du permis de conduire.

La mission serait également favorable à l’installation de systèmes d’affichage à décompte de temps aux passages piétons protégés par un feu tricolore, de manière à ce que les usagers, en particulier les enfants et les personnes à mobilité réduite – dont certaines personnes âgées -, sachent s’ils ont le temps de s’engager sur la chaussée ou si le feu va changer de couleur dans un laps de temps insuffisant pour qu’ils traversent de manière sûre.

Enfin, une réflexion doit être conduite sur la sonorisation des véhicules électriques, qui peuvent s’avérer très accidentogènes pour les piétons, notamment les personnes âgées, dans la mesure où on ne les entend pas venir. Cette réflexion est d’autant plus indispensable que leur nombre est appelé à croître.

Proposition n° 37 : Améliorer la sécurité des piétons en faisant du stationnement devant un passage protégé un cas de « stationnement dangereux » et en installant des afficheurs numériques de décompte de temps aux passages protégés par des feux tricolores.

ANNEXE 1 :
SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS

6 principes, 10 axes de travail, 39 propositions

1. Le pilotage de la politique de sécurité routière

Rattacher le Délégué au Premier Ministre ou l’intégrer à l’équipe gouvernementale

Revivifier le CNSR

Créer des commissions départementales de sécurité routière

Améliorer la fiabilité des données

Améliorer le recoupement des informations (fichiers)

2. L’alcool au volant

Obligation de détenir un éthylotest

Évaluer la pertinence d’une généralisation progressive des EAD

Mieux sanctionner les fortes alcoolémies

Lutter contre les mélanges drogues-alcool

3. La vitesse

Pointer l’hypocrisie de l’absence de bridage des véhicules

Adaptation des sanctions à l’accidentalité

Équité devant les radars

Déploiement de nouveaux radars

Contrôler sans piéger

4. Les deux-roues motorisés

Faciliter l’identification des machines

Engager une réflexion au sujet de la remontée interfilaire

Généraliser le freinage ABS

Renforcer les dispositifs antidébridage contre un relèvement de la vitesse limite des cyclomoteurs

Progressivité dans l’accès à la puissance

Édicter une norme d’équipements obligatoires

Contrôle technique des 2 roues motorisés lors des mutations

5. Le téléphone et les aides à la conduite

Aller vers une modification de l’usage du téléphone au volant

Appliquer le protocole d’accord AFFTAC/Gouvernement

et orienter les aides à la conduite vers la détection de l’hypovigilance

6. Prévention et conduites vertueuses

Bonus de 3 points en 6 ans – post probatoire – couplé à un « super bonus » d’assurance

Inciter les conducteurs novices à se former post-permis

Parvenir à un continuum éducatif

Favoriser l’accès au permis dans le cadre de l’apprentissage

Prévenir le risque routier professionnel

7. L’aptitude à la conduite

Conforter le rôle du médecin traitant

Informer sur les effets des médicaments

8. Véhicules et infrastructures

Aider les conducteurs à respecter les vitesses limites autorisées

Renforcer la lisibilité de la route

Supprimer les passages à niveau

Bandes sonores sur autoroute

9. Permis à points

Évaluer les radars feux rouges avant de poursuivre leur déploiement

Recours gracieux obligatoire

10. Usagers vulnérables et victimes

Protéger les passages piétons (contre le stationnement dangereux et en installant des feux à décompte de temps)

Évaluer les double-sens cyclables

Les victimes en appel

six principes cardinaux pour une politique de sécurité routière ambitieuse et partagée

L’information et la pédagogie

L’information, en matière de sécurité routière, doit être la plus partagée possible. Ses enjeux doivent être portés à la connaissance du grand public (un coût de plus de 20 milliards d’euros par an pour la société, plusieurs centaines de milliers de personnes touchées chaque année, un nombre de morts équivalent à celui qui résulterait d’une trentaine de catastrophes aériennes chaque année). La sécurité routière est un enjeu collectif : chacun, quand il prend la route, a intérêt à ce que ses proches ne s’inquiètent pas. La pédagogie et une communication permanente doivent donc constituer des axes majeurs de l’action des pouvoirs publics.

La concertation

Les décisions prises doivent avoir fait l’objet d’une concertation en amont, afin de jauger de leur acceptabilité au sein de l’opinion et parmi les usagers. La volonté de revivifier le CNSR et d’instituer des commissions départementales chargées de la sécurité routière va dans ce sens. Ceci implique également de ne pas prendre de décisions dans l’urgence.

L’objectivité : des décisions fondées sur les études scientifiques

Les décisions prises doivent reposer sur les résultats des études scientifiques disponibles afin d’être incontestables. La mission a constaté que les études étaient nombreuses et que les chercheurs souhaitaient faire partager leur expertise aux pouvoirs publics. Or, il n’est pas rare que les décisions soient prises alors que leur effet est inconnu voire possiblement contreproductif, sur le fondement des études disponibles.

Il faut, en conséquence, améliorer l’interface entre chercheurs et pouvoirs publics, faire de l’ONISR cette interface, promouvoir l’évaluation des politiques menées, voire promouvoir l’équipement des véhicules en boîtes noires pour analyser les causes d’accidents.

La transparence : les usagers ne doivent pas douter des intentions de l’État 

La politique de sécurité routière ne doit pas pouvoir être vue comme ne visant pas exclusivement à faire régresser l’insécurité routière. Pour le dire autrement, les pouvoirs publics doivent montrer que cette politique a ce seul objectif.

Dans cette optique, il serait souhaitable de communiquer sur l’argent des radars, de rattacher la DISR au Premier ministre et de donner instruction de « contrôler sans piéger », pour ne pas donner l’impression que la sécurité routière n’est en fait qu’une « pompe à fric ».

L’équité : les sanctions doivent être perçues comme justes

L’une des composantes de l’acceptabilité sociale de toute politique est son équité perçue. La sécurité ne fait pas exception à cette règle. Il conviendrait à ce titre d’appliquer le CSA de manière équitable à tous les usagers (amende majorée pour les étrangers, plaques « flashables » pour les 2RM…), de prendre en compte l’injustice perçue de certaines sanctions (petits excès de vitesse involontaires, feux rouges) et de récompenser les bons conducteurs (bonus).

La globalité : la politique de sécurité routière doit être envisagée dans son ensemble

Une politique de sécurité routière efficace doit être intégrée dans toutes les autres politiques publiques. Ainsi, la réalisation d’une nouvelle infrastructure ou d’un nouvel aménagement doit s’accompagner d’une étude sur son impact en matière de sécurité routière. Le positionnement de la sécurité routière auprès du Premier ministre est essentiel.

Autre aspect de la globalité, la politique de sécurité routière doit être lisible dans la durée. Des programmes pluriannuels, avec des objectifs de long terme doivent être fixés, comme en Suède ou aux Pays-Bas, afin d’éviter les annonces de dernière minute.

Axe 1 : Une meilleure gouvernance, au service de l’affirmation d’une réelle volonté politique

Le chemin parcouru depuis 2003, et plus encore depuis 1973, est considérable. Pour la première fois en 2010, nous sommes passés sous la barre des 4 000 morts sur les routes en France métropolitaine. Cependant, depuis quelques années, les progrès sont moins flagrants. Afin de dépasser ce palier, qui n’a rien d’une fatalité, comme le montrent certains exemples étrangers, une volonté politique forte est nécessaire, associée à une meilleure organisation administrative.

Proposition n° 1 : Faire de la sécurité routière une politique interministérielle

Rattacher le Délégué interministériel à la sécurité routière au Premier ministre, éventuellement en lui donnant le statut de Haut commissaire.

La sécurité routière est un domaine transversal s’il en est. Comment justifier que le délégué interministériel à la sécurité routière soit principalement rattaché au ministre de l’Intérieur, ce qui accrédite l’idée d’une politique principalement voire exclusivement orientée vers la répression ? Afin de couper court à cette interprétation, un positionnement institutionnel auprès du Premier ministre serait un minimum. Il serait même envisageable, afin d’accroître son emprise médiatique d’en faire un membre du Gouvernement, en tant que haut commissaire. Ce positionnement, couplé au choix d’une personnalité charismatique, capable d’incarner la sécurité routière dans les médias, est indispensable.

Par ailleurs, la mission a constaté qu’il existait un nombre considérable de structures, administratives ou scientifiques, ayant de près ou de loin des relations avec la sécurité routière. Il existe d’innombrables organismes de recherches, établissements publics et départements administratifs en la matière, qu’il faudrait rapprocher pour certaines, à l’image de la démarche qui a récemment donné naissance à l’IFSTTAR. En tout état de cause, une coordination interministérielle est plus que jamais nécessaire pour optimiser le travail en commun de l’ensemble de ces acteurs.

Proposition n° 2 : Légitimer la prise de décisions

Revivifier le Conseil national de la sécurité routière.

Le Conseil national de la sécurité routière, véritable « Parlement » de la sécurité routière, qui rassemblait tous les acteurs, notamment associatifs, concernés, ne s’est pas réuni depuis 2008. On pourrait y voir l’une des causes de l’annonce, en mai 2011, de mesures peu soumises à concertation préalable et qui ont donc provoqué de vives réactions. Sa présence aux côtés du délégué interministériel est indispensable pour évaluer l’acceptabilité sociale des mesures envisagées.

Proposition n° 3 : Organiser la concertation et la décision locales

Créer dans chaque département, sous l’autorité du préfet, une commission Sécurité routière rassemblant tous les partenaires de la sécurité routière.

72 % des personnes tuées sur la route le sont en rase campagne. C’est dire l’enjeu qui s’attache aux routes nationales et départementales. Ces dernières relèvent généralement de l’administration déconcentrée (préfectures) ou décentralisée (collectivités territoriales) et nécessitent l’intervention de nombreux acteurs locaux. Si, dans certains départements, une bonne collaboration permet des progrès remarquables, cette coopération n’est pas généralisée.

À cette fin, ont été expérimentées, à partir de 2006, des commissions consultatives départementales des usagers de la signalisation routière. Ces dernières ont progressivement été étendues en 2010 et doivent être généralisées. Par ailleurs, des commissions départementales ont été réunies au moment de la dépose des panneaux avertisseurs de radar, essentiellement au mois de juin 2011. La mission a eu communication des procès verbaux de ces réunions, qui se sont révélés, pour la plupart d’entre eux, particulièrement riches : ces commissions ont été l’occasion d’aborder, au niveau local, de nombreux sujets en lien avec la sécurité routière.

Il est donc nécessaire de créer une instance départementale qui réunisse, sous l’autorité du préfet, les forces de l’ordre, l’équipement, les associations, les usagers, les élus et les collectivités territoriales. Cette commission opérationnelle aurait notamment vocation à identifier et à traiter les points noirs de l’infrastructure, à positionner les nouveaux radars en fonction de l’accidentalité locale.

Elle serait également chargée de la lisibilité de la route. En effet, la réglementation des routes relève de nombreuses autorités et il n’est pas rare que se succèdent des limitations de vitesse qui ne trouvent pas de justification immédiate dans la dangerosité de l’infrastructure. La commission sera donc chargée de rendre la route plus lisible, en coordonnant les différents acteurs. Elle pourrait également traiter des problèmes tels que l’éclairage de certaines portions d’infrastructure en fonction des besoins locaux.

Proposition n° 4 : Améliorer la fiabilité des données recueillies

Étendre le registre du Rhône à plusieurs autres départements.

Le grand public ne connaît pas beaucoup de données en matière de sécurité routière. Celles qui retiennent son attention sont principalement les chiffres mensuels de la sécurité routière, qui sont pourtant les moins fiables des statistiques disponibles. À l’inverse, les politiques publiques doivent être fondées sur des données scientifiques aussi exactes et précises que possibles, ce qui nécessite la mise en place d’un système de recueil performant. À ce titre, l’expérience du registre du Rhône, qui recense les conséquences sur la santé des victimes des accidents de la circulation, gagnerait à être étendue à plusieurs autres départements. Cette extension permettrait notamment une meilleure fiabilité des données recueillies en ce qui concerne les blessés.

Proposition n° 5 : Améliorer le recoupement des informations

Autoriser le croisement des fichiers des permis de conduire, des cartes grises et des assurances pour identifier les conducteurs qui roulent sans permis et/ou sans assurance.

On évalue à environ 450 000 le nombre de conducteurs qui circulent sans permis et à 2,2 % le nombre de véhicules sans assurance. Ces situations peuvent être dramatiques lorsque des personnes sans assurance sont contraintes d’indemniser à vie les personnes qu’elles ont blessées lors d’un accident de la route.

Pourtant, la France ne s’est pas donnée, jusqu’à présent, les moyens de lutter efficacement contre les défauts d’assurance et les défauts de permis. En effet, il n’est pas autorisé de croiser les fichiers des cartes grises, des assurances automobiles et des permis de conduire, recoupement qui permettrait une identification immédiate des personnes qui se trouvent dans cette situation et que tous les pays européens pratiquent.

Axe 2 : L’alcool au volant, cause majeure d’accidents

Dans 31 % des accidents mortels, l’un des deux conducteurs présentait un taux supérieur au taux légal d’alcoolémie. Cette situation est unique en Europe : notre pays est celui où ce pourcentage est le plus élevé. Si chacun avait respecté le taux autorisé, on estime que 1 150 vies auraient été sauvées. Ce chiffre est considérable et démontre que l’alcool au volant constitue un gisement majeur de sécurité routière.

Proposition n° 6 : Promouvoir l’autodépistage

Obliger chaque conducteur à détenir un éthylotest en état de fonctionner à bord de son véhicule et inviter le Gouvernement à faire du non-respect de cette obligation une contravention de la quatrième classe.

La politique en matière d’alcool au volant repose sur les contrôles et la communication. À cet égard, les contrôles ont été considérablement augmentés et sont bien ciblés (environ 11 millions en 2010) et la communication a déjà dissuadé les conducteurs « raisonnables ». Une autre voie, qui a été jusqu’à présent négligée, doit être explorée, celle de l’autodépistage. Si chaque conducteur dispose à bord de son véhicule d’un éthylotest, obligation qui figure dans le code de la route depuis 1970 mais qui n’a jamais été appliquée (art. L. 234-14), il pourra prendre la route ou décider de laisser le volant. Par ailleurs, les passagers pourront inciter le conducteur à se tester et monter à bord en toute connaissance de cause.

Cette logique, qui a été celle développée par le Gouvernement pour les discothèques, doit être généralisée. L’absence d’éthylotest serait sanctionnée d’une amende de 135 € (4e classe), identique à celle existante pour le triangle et le gilet jaune. Cette mesure serait facilement acceptable du fait du coût abordable des éthylotests, qui devront correspondre à un matériel strictement homologué afin d’être parfaitement fiable, facile d’utilisation et fiable. Ces critères seront précisés par décret.

Proposition n° 7 : Généraliser la prévention du risque alcool

Évaluer la pertinence et l’efficacité de l’installation en première monte d’éthylotests anti-démarrage (EAD).

La LOPPSI 2 vient d’autoriser, au titre de peine complémentaire pour les personnes ayant été condamnées pour conduite en état d’ébriété, l’installation d’un éthylotest anti-démarrage dans leur véhicule si elles souhaitent continuer à conduire. Ces dispositifs sont désormais fiables et autorisent le démarrage en cas d’urgence (Volvo en propose de série ou en option depuis 2008 et ils sont obligatoires en France pour les transports d’enfants). Ils donnent l’assurance que le conducteur n’est pas alcoolisé et leur systématisation devrait en réduire le coût. Il va de soi que leur généralisation devrait s’accompagner d’une prise en charge adéquate des personnes qui se trouvent en état de dépendance.

Il est donc préconisé d’évaluer la pertinence et l’efficacité de leur généralisation, afin de pouvoir procéder à cette dernière, si les résultats sont probants, à échéance 2015 ou 2020.

Proposition n° 8 : Accroître la répression des grands délits liés à l’alcool

Porter de 6 points à 8 points le retrait de points de permis de conduire en cas de conduite avec plus de 0,8 gramme d’alcool par litre de sang

Dans 90 % des accidents mortels où l’alcoolémie était présente, le taux était supérieur à 0,8g/l, ce qui implique une répression accrue. De surcroît, il n’est pas pédagogique que le retrait de points (6) pour un taux compris entre 0,5 et 0,8 g/l soit identique à celui applicable pour un taux supérieur à 0,8 g/l.

Proposition n° 9 : Lutter contre les mélanges drogues-alcool

Lutter contre les mélanges drogues-alcool en accentuant les opérations de dépistage, en particulier aux abords des lieux de consommation d’alcool

Les auditions et l’étude de l’IFSTTAR mettent en valeur plusieurs faits essentiels concernant les interactions entre consommation de drogues et conduite. En premier lieu, il apparaît que, du fait des consommations actuelles, la principale substance en cause est le cannabis (on estime à environ 3 % le nombre de conducteurs sous l’emprise de cannabis), qui multiplie par deux le risque d’être responsable d’un accident mortel (contre environ 8 pour l’alcool). Mais le principal risque réside dans le cumul alcool-cannabis, qui multiplie le risque par 16. Sur ce fondement, il est nécessaire d’accentuer le nombre de dépistage de cannabis en les ciblant sur les lieux de grande consommation d’alcool.

Axe 3 : La vitesse, une cause pas comme les autres : à la recherche de l’acceptabilité sociale

La vitesse est à la fois cause d’accidents, quand elle est excessive ou inadaptée aux conditions de circulation, et facteur aggravant, mais elle est aussi la condition de la mobilité. La diminution de la vitesse moyenne (d’environ 10 km/h en 10 ans) constitue l’un des facteurs explicatifs décisifs de la réduction de la mortalité routière. Elle résulte d’une politique ferme de prévention et de sanction. Cependant, les réactions au dernier CISR semblent montrer que la politique menée en la matière a atteint ses limites en termes d’acceptabilité sociale. Cette dernière doit donc être restaurée.

Proposition n° 10 : Mettre chacun devant ses responsabilités en matière de vitesse

Faire avancer l’idée, au niveau européen, d’un bridage des voitures

Il existe une hypocrisie collective en ce qui concerne la vitesse. Alors que tout le monde s’accorde pour en faire une cause cardinale des accidents de la circulation, des véhicules qui permettent d’enfreindre largement les limitations de vitesse sont mis sur le marché. Il faut cesser ce double discours : soit la vitesse est effectivement une cause essentielle d’accidents et il faut traiter le problème à sa racine, en bridant les véhicules ; soit ça ne l’est pas, et l’on ne peut alors pas sanctionner les conducteurs qui ne respectent pas les limitations.

En tout état de cause, il est difficilement compréhensible que l’on fasse peser sur les seuls conducteurs la charge de respecter les limitations de vitesse, alors que sont mises entre leurs mains des voitures qui leur donnent les moyens de les excéder largement. Parallèlement, les pouvoirs publics dépensent des sommes importantes (déploiement de radars, recherches sur le LAVIA…) pour tenter de réduire la vitesse de véhicules conçus pour pouvoir enfreindre les limitations de vitesse, dans un contexte où la vitesse est aussi synonyme de rejet de gaz à effet de serre. L’hypocrisie de la situation est flagrante et demanderait à être évoquée au niveau européen, cette problématique ne pouvant être résolue à l’échelle d’un pays. Il est du reste envisageable que la diffusion des véhicules électriques, dont la vitesse limite est généralement contenue, permettra de sortir de ce paradoxe.

La mission n’a pas retenu l’idée difficilement réalisable d’une limitation dans l’accès à la puissance des véhicules automobiles pour les jeunes conducteurs. Au demeurant, dans la mesure où ces derniers empruntent le véhicule de leurs parents, l’effectivité de la mesure eut été illusoire.

Proposition n° 11 : Adapter la répression de la vitesse à l’accidentologie

–  Sanctionner les excès de moins de 10 km/h sur autoroutes et voies rapides d’une simple amende quand ils sont commis pour la première fois depuis 6 mois ;

–  Qualifier de délit, et non plus de contravention, les excès de vitesse de plus de 50 km/heure dès la primo-infraction, quelle que soit la voie sur laquelle ils sont commis

Les autoroutes et les voies rapides sont les voies les plus sûres pour leurs usagers. Par ailleurs, « l’enjeu vitesse » (c’est-à-dire le non-respect des limitations) représenterait environ 18 % du nombre de tués sur les routes mais concentre 80 % des retraits de points, notamment du fait du contrôle sanction automatisé. Les excès de vitesse de moins de 20 km/h constituent une large part de ces retraits. La répression semble donc disproportionnée, ce qui nuit à l’acceptabilité sociale de la politique de sécurité routière dans son ensemble.

Il faut donc privilégier, dans un premier temps la pédagogie, notamment sur les portions les plus sûres du réseau, pour que les usagers n’aient plus l’impression (fausse) d’un « racket », tout en veillant à ce que cet allégement n’entraîne pas d’augmentation des vitesses moyennes, et en aggravant la répression des grands excès de vitesse.

Ainsi, le premier excès de vitesse donnera lieu à une amende. Le second, s’il est commis dans les six mois, à une amende et au retrait d’un point, lequel pourra être récupéré, selon les règles en vigueur, si aucune infraction n’est commise dans un délai de 6 mois.

Proposition n° 12 : Promouvoir l’équité devant les contrôles

–  Rendre le CSA plus dissuasif pour les deux-roues motorisés (agrandissement de la plaque) et les étrangers (doublement de l’amende en cas d’impossibilité de retrait de points et accords avec les pays étrangers) ;

–  Créer une infraction visant à sanctionner les personnes qui, de mauvaise foi, disent ne pas pouvoir indiquer qui conduisait leur véhicule, afin que les retraits de points puissent être effectués ;

–  Installer prioritairement les radars pédagogiques là où les panneaux avertisseurs ont été retirés

Le sentiment d’équité est une dimension essentielle de d’acceptabilité d’une politique publique. Or, force est de constater que face au CSA, certains usagers sont moins égaux que d’autres. Tel est le cas notamment des 2RM, dont plus de 25 % des utilisateurs dépassent la vitesse limite autorisée, du fait notamment des difficultés des radars à photographier une plaque trop petite (cf. ci-dessous). Cela est également vrai pour les conducteurs étrangers, qui ne sont généralement pas sanctionnés par le CSA, par défaut de coopération judiciaire. 25 % des infractions constatées par les radars n’ont ainsi pas de suite. Les accords avec les pays étrangers doivent être développés et la sanction alourdie pour dissuader les excès de vitesse commis en France, la sanction relative au permis de conduire ne pouvant pas être pratiquée.

Par ailleurs, le contrôle automatisé est susceptible de poser des difficultés juridiques. En effet, le propriétaire n’est redevable que d’une amende s’il fait valoir qu’il n’est pas identifiable sur la photographie qui a été prise. Ceci pose une difficulté pour les radars qui photographient de dos, lesquels sont de plus en plus nombreux car seuls ces derniers sont susceptibles de contrôler les motos. Il faudrait donc réfléchir à l’instauration d’une infraction sanctionnant les personnes qui dissimulent, en connaissance de cause, l’identité de la personne qui conduisait. Ceci serait tout particulièrement valable dans les cas où le véhicule est propriété d’une personne morale.

Proposition n° 13 : Poursuivre et diversifier le déploiement des radars

Parvenir à terme à 5 000 radars de vitesse sur le territoire national, en veillant à diversifier le parc et à déployer des radars photographiant par l’arrière et par l’avant

Il existe actuellement de nombreux types de radars de vitesse, dont certains sont encore au stade du développement ou de l’expérimentation (radars « tronçons », discriminants ou embarqués par exemple). Leur contribution à la diminution de la mortalité routière a été essentielle, que ce soit au plan local comme national. Il faut donc poursuivre leur déploiement, tout en les diversifiant, afin d’accroître les possibilités de contrôle, sous réserve, pour chaque type de ces radars, d’une analyse de leur impact sur le respect des libertés publiques. Un équilibre doit être respecté entre radars photographiant par l’arrière (qui permettent de contrôler la vitesse des 2RM) et ceux qui photographient par l’avant (qui assurent une meilleure sécurité juridique pour la sanction des automobilistes). Par ailleurs, les radars discriminants devraient être privilégiés chaque fois que les vitesses autorisées varient selon le type d’usager sur une même voie. Le coût de cette mesure étant non négligeable, elle doit prendre place dans une perspective pluriannuelle.

Proposition n° 14 : Contrôler les usagers sans les piéger

Donner instruction aux forces de l’ordre, par voie de circulaire, de pratiquer les contrôles de vitesse sur une route lisible et aux endroits les plus accidentogènes

Nos concitoyens ne doivent pas pouvoir penser que la politique de sécurité routière puisse en fait servir un autre objectif que la diminution de la mortalité routière. Par conséquent, la politique de contrôle doit être transparente et équitable et, pour ce faire, obéir à des principes simples. Les forces de l’ordre ne doivent pas être incitées à constater un nombre donné d’infractions mais à pratiquer un certain nombre de contrôles. Elles doivent pratiquer ces contrôles aux endroits les plus accidentogènes et ne pas utiliser le manque de lisibilité de l’infrastructure (passage d’une limitation à 110 km/h à 90 km/h) pour « faire du chiffre ». Sans aller jusqu’à interdire les contrôles inopinés, il faut qu’aucun contrôle ne soit délibérément pensé comme destiné à piéger les usagers. En conséquence, il faut encourager le déploiement des radars « tronçons » qui calculent la vitesse moyenne des usagers.

Axe 4 : Mettre en sécurité les conducteurs de deux-roues motorisés

Face à la congestion des centres urbains, le deux-roues motorisé offre une solution de mobilité qui a séduit, au cours des dernières années, une part croissante d’usagers. En dépit de l’augmentation continue du trafic, les chiffres de l’accidentalité, s’ils restent excessifs (plus du quart des personnes tuées annuellement pour 2 % du trafic), semblent relativement stables, ce qui constitue un résultat encourageant.

Ces chiffres résultent notamment de la grande vulnérabilité de ces usagers, qui ne disposent pas d’une carrosserie pour les protéger. Par ailleurs, la défaillance des infrastructures explique également le recours accru aux deux-roues, qui permettent des gains de temps importants, mais au prix d’un risque accru. Il est probable que l’amélioration de ces infrastructures et des réseaux de transport en commun limite l’accidentalité des deux-roues.

Les mesures proposées visent à réaliser un meilleur équilibre entre sanction et prévention : si rien ne justifie que les deux-roues motorisés échappent au droit commun du système de contrôle sanction automatisé de la vitesse, des efforts doivent être accomplis pour leur permettre de bien s’intégrer dans le trafic et pour les rendre plus sûrs.

Proposition n° 15 : Faciliter l’identification des machines

Ajuster la dimension de la plaque minéralogique de manière à mieux assurer le contrôle sanction automatisé de la vitesse des motocyclettes

L’agrandissement de la plaque minéralogique – en rappelant que les cyclomoteurs et les motocyclettes n’en possèdent qu’une, à l’arrière, ce qui constitue déjà une dérogation au droit commun – participe de la responsabilisation des conducteurs : celui qui adopte une conduite non respectueuse du code de la route ne doit jouir d’aucun sentiment d’impunité ; il sait qu’il peut être sanctionné dans les mêmes conditions que les autres usagers de la route.

Il faut rappeler que l’Allemagne a récemment décidé d’une réduction de la taille des plaques d’immatriculation des motocyclettes (actuellement de 56 000 mm², soit 28 cm sur 20), qui demeurent cependant plus grandes que les plaques françaises (comprises entre 22 000 et 27 300 mm²). Il est donc proposé d’adopter la même taille que les futures plaques allemandes (36 000 mm² soit 20 cm sur 18).

Proposition n° 16 : Engager une réflexion au sujet de la circulation interfilaire

Évoquer la situation juridique de la circulation interfilaire dans le cadre d’un dialogue avec les usagers

La légalisation de la remontée interfilaire, qui est pratiquée aux abords des grandes villes, est une des revendications constantes des associations d’usagers de deux-roues motorisés. Elle permet d’ailleurs de fluidifier le trafic et semble peu accidentogène. En 2010 pour la France métropolitaine, on ne relevait que 3 tués en deux-roues motorisés dans des situations d’interfile (sur 952 tués en deux-roues motorisés soit 0,32 %).

Des difficultés se posent cependant quant à une éventuelle expérimentation. En premier lieu, sa légalisation entraînerait des modifications au regard du droit des assurances dans la mesure où il faudrait rechercher quelles sont les responsabilités en cause. De plus, il n’existe pas de moyen de vérifier que ces remontées sont uniquement pratiquées quand les voitures sont à l’arrêt ou roulent au pas. Ces difficultés s’opposent à une expérimentation immédiate mais un dialogue pourrait être engagé à ce sujet avec les associations d’usagers.

Proposition n° 17 : Rendre obligatoire l’ABS

Rendre le système de freinage ABS obligatoire en première monte sur tous les deux-roues motorisés de 125 cm3 et plus mis en circulation à compter du 1er janvier 2013

Si elle entraîne un surcoût que le législateur ne néglige pas, l’installation obligatoire du système ABS sur les motos de 125 cm3 et plus tend à renforcer la protection des motocyclistes, y compris contre leurs propres écarts de conduite. Par ailleurs, il sera nécessaire d’effectuer les formations à la conduite sur des deux-roues équipés d’un ABS.

Proposition n° 18 : Améliorer la réglementation concernant le bridage des cyclomoteurs

Porter de 45 km/h à 50 km/h la vitesse limite des cyclomoteurs de moins de 50 cm3 de manière à leur permettre de mieux s’insérer dans le trafic, tout en généralisant l’installation de blocs anti-débridage renforcés et en prévoyant la confiscation des machines débridées

S’agissant des cyclomotoristes, qui sont majoritairement des adolescents ou de très jeunes adultes, il est proposé que l’installation de systèmes anti-débridage plus efficaces s’accompagne d’un relèvement de 5 km/h de la vitesse limite (de 45 à 50 km/h), de manière à leur permettre de mieux s’insérer dans le trafic urbain et péri-urbain. Par ailleurs, la confiscation des cyclomoteurs débridés serait rendue possible.

Proposition n° 19 : Généraliser la progressivité dans l’accès à la puissance

Prévoir que le permis A ne soit accessible qu’après deux ans d’expérience sur des plus petites cylindrées.

La nouvelle directive européenne favorise la progressivité dans l’accès à la puissance des conducteurs de motocyclettes, ce qui est incontestablement positif. À l’heure actuelle, les plus grosses cylindrées peuvent être conduites, sans expérience, à partir de 21 ans. La directive européenne fera passer cet âge à 24. Il faut aller au bout de cette logique et exiger, dans tous les cas, une expérience minimale de la conduite d’un deux-roues pour les plus grosses cylindrées. Par ailleurs, il est positif que la directive européenne prévoit un permis pour tous les véhicules pouvant rouler à plus de 40 km/h, ce qui inclut les tricycles et les scooters.

Proposition n° 20 : Édicter une norme d’équipements obligatoires pour les conducteurs de deux-roues motorisés

Prévoir que certains équipements soient obligatoires pour la conduite des deux-roues, leur acquisition ouvrant droit à une réduction de la prime d’assurance.

Le seul équipement qui soit aujourd’hui obligatoire pour la conduite d’un deux-roues est le casque. Les usagers de deux-roues sont pourtant particulièrement vulnérables à la moindre chute. Il serait donc indispensable que certains équipements soient rendus obligatoires. Leur liste devra être soumise à concertation et pourrait être variable selon la puissance de l’engin conduit, mais elle devrait s’inspirer de la liste communautaire des équipements de protection individuelle (EPI) et inclure une réflexion sur un équipement obligatoire en gilet airbag.

Proposition n° 21 : Veiller à la sécurité des deux-roues motorisés

Soumettre au contrôle technique les motocyclettes de plus de 4 ans à l’occasion d’un changement de titulaire de la carte grise.

Compte tenu de la fragilité des deux-roues motorisés, il serait souhaitable de les soumettre à un contrôle technique, sur le modèle de celui qui existe pour les voitures, mais en se limitant, au moins dans un premier temps, aux situations de revente. Les motocyclettes de collection en seraient exemptées. Par ailleurs, une réflexion devrait être engagée sur le contrôle technique dans son ensemble, notamment sur la formation des mécaniciens qui en sont chargés.

Axe 5 : promouvoir un usage raisonné du téléphone mobile et des assistants d’aide à la conduite

Proposition n° 22 : Aller vers une modification de l’usage du téléphone au volant

–  Porter de deux à trois points le retrait de points du permis de conduire encouru pour conduite avec un téléphone mobile tenu en main ;

–  Mettre fin au système existant des kits mains libres lorsqu’ils reposent sur des manipulations techniques (composition du numéro, réglage du micro, etc.) et sur l’usage d’oreillettes. Demeureraient tolérés les équipements totalement intégrés au véhicule et fonctionnant à commande vocale (de type bluetooth) ;

–  Inciter les constructeurs et les opérateurs à développer des systèmes limitant la durée des conversations à quelques minutes, hors numéros d’urgence.

Si l’usage du téléphone mobile au volant s’est largement diffusé au cours des dernières années, en particulier dans les villes, tant pour des raisons personnelles que professionnelles, il ne fait pas de doute que son utilisation n’est pas toujours compatible avec une conduite sûre, mobilisant toute la vigilance du conducteur.

Il est donc proposé de décliner un programme en plusieurs mesures tendant à une modification progressive de la pratique de la téléphonie au volant :

–  dans un premier temps, l’usage du téléphone mobile tenu en main – a fortiori pour envoyer des SMS ou exploiter les fonctionnalités d’un smartphone – doit être banni, ce qui passe par un renforcement des sanctions encourues, du reste déjà prévu par le CISR du 11 mai 2011 ;

–  parallèlement, le kit mains-libres, tel qu’il existe actuellement, c’est-à-dire nécessitant la manipulation du téléphone ou le port d’oreillettes, ne serait plus autorisé. Les constructeurs et équipementiers automobiles doivent être incités à proposer les systèmes de téléphonie nécessitant le moins de manipulations possible, notamment à commande vocale, de manière à ce que l’obligation de garder les deux mains sur le volant et une vision permanente de la route soit strictement respectée ;

–  simultanément, des campagnes de communication particulièrement offensives sur le thème du « téléphoner ou conduire, il faut choisir » doivent être lancées, en vue notamment de sensibiliser les conducteurs aux dangers du kit mains libres sous sa forme actuelle (c’est-à-dire non intégré au véhicule et supposant des opérations manuelles, telles que la composition du numéro, le positionnement du micro, etc.) ;

–  enfin, les constructeurs et les opérateurs doivent être incités à développer des systèmes limitant la durée des conversations hors numéros d’urgence.

Proposition n° 23 : Promouvoir les assistants d’aide à la conduite

Autoriser les avertisseurs de « zones de danger », dans l’esprit du protocole d’accord du 28 juillet 2011.

Aux termes du protocole d’accord conclu entre l’Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologues d’aide à la conduite (AFFTAC) et le ministère de l’intérieur le 28 juillet 2011, les dispositifs anciennement dédiés à la détection des radars de type « Coyote » restent autorisés s’ils s’orientent vers une signalisation des zones de danger, que des contrôles de vitesse fixes ou mobiles y soient ou non organisés.

Cette mesure vise à renforcer la lisibilité de la route et à encourager une forme d’entraide entre conducteurs, en faisant de ces outils de véritables auxiliaires de conduite plutôt que des instruments de contournement de la loi.

Un pas supplémentaire doit être franchi en mobilisant ces technologies embarquées dans la lutte contre l’hypovigilance au volant, dont il est désormais établi qu’elle constitue un facteur d’accident non négligeable. Au stade actuel de leur développement technique, il semble que ces instruments soient en mesure d’envoyer des messages d’alerte aux conducteurs conduisant depuis trop longtemps ou manifestant des signes d’endormissement (écarts de trajectoires, clignement des paupières, etc.).

Cependant, s’il apparaissait que ces appareils sont détournés de leur nouvelle finalité, un retour à l’interdiction serait sans doute nécessaire.

Axe 6 : Mettre l’accent sur la prévention et récompenser les conduites vertueuses

Proposition n° 24 : Prévoir un bonus de points hors la période probatoire

–  Porter, hors période probatoire, de 12 à 15 points au maximum le capital de points de permis détenu par les personnes ne commettant aucune infraction pouvant occasionner un retrait de point pendant 6 ans, à raison d’un bonus d’un point tous les deux ans ;

–  En liaison avec les compagnies d’assurance, consentir une baisse de cotisation d’assurance supplémentaire aux personnes détentrices de 15 points de permis.

En principe, le fait de respecter le code de la route ne justifie aucune récompense particulière, le respect de la loi s’imposant à tous. Dans un souci d’équilibre entre répression et sanction et de meilleure acceptation de la politique de sécurité routière, il semble cependant intéressant d’instaurer un bonus de points de permis de conduire pour les personnes ne commettant aucune infraction grave sur de longues périodes, après la période probatoire et en dehors de celles qui ne conduisent pas.

Une telle disposition permettrait de combattre l’idée répandue selon laquelle la politique de sécurité routière s’est dévoyée dans le « tout répressif » et dans la volonté de piéger l’ensemble des conducteurs, y compris les plus respectueux de la norme. Elle est d’ailleurs en vigueur dans plusieurs pays européens, tels que l’Italie ou l’Espagne.

Le fait d’être détenteur d’un capital de 15 points pourrait donner lieu à l’application d’un « super bonus » entraînant une baisse de la cotisation d’assurance.

Proposition n° 25 : Promouvoir les formations post-permis

Durant la période probatoire, accorder un bonus d’assurance aux conducteurs novices suivant un stage de perfectionnement à la conduite

Dans le même esprit d’incitation aux bonnes pratiques, il est proposé de faire bénéficier d’un bonus d’assurance les conducteurs novices – souvent jeunes – qui font la démarche de suivre un stage de formation à la conduite post-permis. Cette mesure pourrait en outre donner lieu à une participation financière des compagnies d’assurance pour l’organisation de ces formations. À terme, cette disposition pourrait figurer dans les clauses obligatoires des contrats d’assurance et la formation post-permis être rendue obligatoire.

Le coût de l’insécurité routière est évalué à environ 23 milliards d’euros par ans, dont 16,3 sont pris en charge par les assureurs. Lors de certaines expérimentations des assureurs, une formation revenait à 200 euros par élève pour deux jours de formation. Si l’on souhaite que le million de conducteurs qui obtient son permis chaque année puisse bénéficier d’une telle formation, le budget à prévoir serait d’environ 200 millions d’euros. En conséquence, l’action de formation serait utile si ces formations faisaient diminuer la sinistralité de 1 %.

Proposition n° 26 : Parvenir à créer un continuum éducatif

Généraliser l’éducation routière au lycée

Ainsi que le note le rapport de l’IFSTTAR, il existe un paradoxe dans le fait de délaisser l’éducation routière au lycée alors qu’il s’agit de la période où se déroulent les prises de risque les plus importantes en même temps que l’apprentissage de la conduite (conduite accompagnée ou cyclomoteur). Pourtant, si l’éducation routière connaît de bons résultats en primaire et au collège, elle est beaucoup moins présente au lycée. C’est pourquoi les CISR récents ont souhaité lancer des expérimentations visant à la renforcer. Il s’agit d’aller plus loin en généralisant ces expériences, sur le fondement des bonnes pratiques ainsi récoltées. La création de pistes de sécurité routière, destinées à permettre aux jeunes d’expérimenter des situations de conduite dans le cadre d’opérations de prévention routière, doit être encouragée. Par ailleurs, l’épreuve théorique du code, qui se résume souvent à un bachotage, devrait être repensée dans un sens favorisant la compréhension des situations de la part du candidat plutôt que la mémorisation de réponses standard à des listes de questions.

Proposition n° 27 : Favoriser l’accès au permis de conduire

Inscrire dans le contrat d’apprentissage la possibilité de passer l’épreuve théorique du permis de conduire (le « code »)

Il ressort des statistiques communiquées par le ministère de l’Intérieur qu’environ 450 000 personnes conduiraient sans permis, les trois quarts ne l’ayant jamais passé. Il faut donc encourager l’apprentissage de la conduite, y compris dans un cadre professionnel et à un jeune âge. Or, il apparaît que l’épreuve théorique du code de la route est parfois la plus difficile pour des jeunes, qui par ailleurs, savent conduire un véhicule. Il serait donc souhaitable d’inclure la possibilité de passer l’épreuve théorique du permis de conduire dans les contrats d’apprentissage.

Proposition n° 28 : Prévenir le risque routier professionnel

–  Inciter les entreprises à inclure le risque routier dans le document unique d’évaluation des risques ;

–  Inciter les entreprises à inscrire dans leur règlement intérieur l’interdiction de l’usage du téléphone au volant dans le cadre des déplacements professionnels de leurs salariés.

Les accidents mortels de la circulation sont la première cause de risque professionnel. Pourtant, cette problématique n’a émergé que récemment dans le débat public portant sur la sécurité routière. Afin de responsabiliser les entreprises, il est essentiel de les inciter à inclure le risque routier professionnel dans le document unique d’évaluation des risques afin d’en faire, à terme, un élément obligatoire de ce document. L’incitation à interdire l’usage du téléphone portable s’inscrit dans la même logique.

Axe 7 : Alerter les usagers sur leur aptitude à la conduite

L’aptitude à la conduite est un facteur peu connu des accidents de la circulation. En effet, l’idée selon laquelle une aptitude physique réduite à la conduite entraînerait automatiquement une augmentation de l’accidentalité se révèle erronée : les usagers qui ont conscience que leurs capacités sont diminuées modèrent leur allure et ont tendance, de manière générale, à prendre moins de risques.

Orientation générale : ne pas instaurer de contrôle médical obligatoire

L’idée d’instaurer un contrôle médical obligatoire pour mesurer l’aptitude à la conduite, notamment des personnes âgées, peut sembler séduisante. Divers pays européens se sont d’ailleurs engagés dans cette voie avant, parfois, d’y renoncer. Cependant, cette mesure semble totalement inopportune dans la mesure où les personnes âgées surcompensent leur perte d’aptitude physique à la conduite et où leur mobilité est souvent essentielle à une bonne insertion dans la vie sociale. Plutôt que d’instaurer un couperet, il faudrait chercher à trouver des solutions opérationnelles pour renforcer leur mobilité, voire restaurer leur aptitude à la conduite.

Proposition n° 29 : Conforter le rôle du médecin traitant dans l’information du patient sur une éventuelle diminution de sa capacité à conduire

Le médecin traitant veillera, si nécessaire et dans le cadre de sa pratique, à attirer l’attention de ses patients sur la diminution temporaire ou durable de leur aptitude à la conduite et à les informer sur les moyens de restaurer leur aptitude à la conduite

Le médecin traitant, voire le spécialiste (ophtalmologiste…), veillera, sur le fondement de sa connaissance de l’état de santé général de son patient, de l’alerter sur les risques éventuels que représenterait pour lui l’activité de conduite et sur les précautions à prendre pour qu’il puisse maintenir voire retrouver sa mobilité sans causer de risque potentiel pour la sécurité routière. Il n’est pas question, en conséquence, de modifier la liste des pathologies qui interdisent la conduite.

Proposition n° 30 : Renforcer l’information sur les incompatibilités entre la prise de certains médicaments et la conduite

Le médecin prescripteur, qui alerte déjà son patient sur les effets possibles des médicaments prescrits sur l’aptitude à conduire, devra le faire par écrit et faire figurer ces indications sur l’ordonnance.

Il existe d’ores et déjà un système de pictogrammes qui alertent les conducteurs sur les effets potentiels des médicaments qu’ils absorbent. Cependant, ces derniers sont peu connus et même si les médecins et les pharmaciens prennent généralement le temps de les expliciter oralement auprès de leurs patients, ces derniers n’y sont pas toujours très attentifs. Il serait donc souhaitable que la mention d’une éventuelle dangerosité pour la conduite figure par écrit sur l’ordonnance du médecin qui prescrit les médicaments, la liste des médicaments contre-indiqués étant diffusée par le ministère chargé de la santé. De même, il serait hautement souhaitable que les médecins, lors de la prescription, puissent avertir leurs patients de manière précise, lorsqu’ils préconisent des médicaments dont la prise combinée avec l’alcool serait susceptible d’engendrer un risque pour la conduite.

S’agissant des médicaments délivrés sans ordonnance, il convient de rappeler aux pharmaciens l’intérêt de signaler, au moins oralement, les éventuelles contre-indications à la conduite.

Axe 8 : Véhicules et infrastructures, vers « une route qui pardonne »

Proposition n° 31 : Aider les conducteurs à respecter les vitesses limites autorisées

Généraliser progressivement l’installation en première monte du système LAVIA, avec l’objectif que tous les véhicules soient équipés à compter du 1er janvier 2018.

Le limiteur s’adaptant à la vitesse autorisée constitue un outil d’aide à la conduite simple et désormais techniquement fiable. Il consiste à afficher en temps réel au tableau de bord du véhicule la vitesse limite autorisée par une lecture intelligente de la signalisation, via une cartographie régulièrement mise à jour. Le LAVIA informatif permet au conducteur de connaître en permanence la vitesse à laquelle il doit circuler pour se conformer à la réglementation ; le LAVIA adaptatif empêche mécaniquement le conducteur – hors situation d’urgence – de dépasser la vitesse limite par un mécanisme de bridage automatisé. La généralisation de cet équipement en première monte, dont l’utilisation resterait facultative, permettrait à terme d’en abaisser le coût. Il faut cependant remarquer que ce dernier serait toujours supérieur à un bridage des véhicules.

Proposition n° 32 : Renforcer la lisibilité de la route

Demander aux services de l’État compétents de réaliser, en liaison avec les collectivités territoriales, un audit sur les infrastructures de manière à rendre la signalisation plus cohérente et lisible. Dans le cadre de cet audit, revoir la pertinence de l’ensemble du programme autoroutier national à dix ans, en vue de mener à bien tous les programmes susceptibles d’améliorer la sécurité routière de manière significative.

Au cours de ses auditions, la mission d’information a été sensibilisée par de multiples intervenants de tous horizons sur le manque de lisibilité de la route : il est parfois difficile de savoir quelle est la vitesse autorisée et certains changements de seuils sont peu compréhensibles (passage brutal de 90 km/h à 70 km/h sans justification flagrante, limitation de certaines rocades à 90 km/h alors que l’allure « intuitive » serait plutôt de 110 km/h, etc.). Au niveau local, la commission départementale sera chargée de ce travail.

En complément de la généralisation des systèmes LAVIA, il semble opportun que soit mené un audit global sur la cohérence et la lisibilité de la signalisation, de manière à supprimer les anomalies et à rendre plus directement accessibles les règles de circulation. À plus long terme, le concept de route intelligente et interactive défendu à l’échelle de l’Union européenne doit permettre de progresser encore dans l’échange d’informations entre les conducteurs et les gestionnaires d’infrastructures.

À la suite de la démarche du Grenelle de l’environnement, un certain nombre de projets de nouvelles liaisons autoroutières ont été abandonnées dans l’avant projet de schéma national des infrastructures de transport (SNIT). Dans le cadre de l’audit précité, il semble opportun de revoir la pertinence d’ensemble du programme d’équipement autoroutier national à dix ans, afin d’étudier la possibilité de mener à bien tous les programmes susceptibles d’améliorer la sécurité routière de manière significative.

Proposition n° 33 : Supprimer les passages à niveau

En liaison avec Réseau ferré de France (RFF), accélérer la réalisation d’un plan de suppression des passages à niveau, en commençant par les plus dangereux.

La suppression de tous les passages à niveau coûte cher mais certains accidents récents ont démontré leur dangerosité persistante, peu acceptable en ce début de 21ème siècle (ils causent environ 30 morts par an). Si l’expérimentation de radars dédiés constitue une première avancée, il semble nécessaire d’accélérer la réalisation d’un plan de suppression progressive mais totale de tous les passages à niveau à horizon 2020, en commençant bien entendu par les plus dangereux.

Dans l’intervalle, il serait nécessaire d’équiper les plus dangereux de feux tricolores.

Proposition n° 34 : Lutter contre l’hypovigilance sur autoroute

Généraliser l’installation de bandes de rive sonores sur les autoroutes

L’hypovigilance est la cause d’un tiers des accidents mortels sur autoroute. Il est indispensable de généraliser le dispositif des bandes de rive sonores – ainsi que le préconise le CISR du 11 mai 2011–, lesquelles sont un moyen efficace de prévenir les variations de trajectoire.

Axe 9 : Adapter certains aspects du permis à points

Proposition n° 35 : Évaluer les « radars feux rouges »

Suspendre le déploiement des radars aux feux rouges dans l’attente d’une évaluation du dispositif et en équipant ceux qui sont déjà en service d’un décompte de temps.

Franchir un feu rouge constitue une infraction d’une extrême gravité qui peut avoir des conséquences dramatiques, notamment pour les usagers de la route les plus vulnérables que sont les piétons, les enfants et les personnes âgées. La sanction du retrait de quatre points est donc parfaitement justifiée.

Il existe cependant des circonstances dans lesquelles le franchissement du feu rouge ou le non-respect de la règle de l’arrêt au feu orange sont justifiés, qu’il s’agisse de laisser passer un véhicule prioritaire, d’éviter un obstacle inopiné ou de prévenir une collision par l’arrière, lorsque le conducteur qui suit ne respecte pas les distances de sécurité. Un système de contrôle sanction automatisé – de type « radar ou caméra feu rouge » -, n’est pas forcément en mesure de prendre en considération ces éléments de contexte. Par ailleurs, le franchissement de feux rouge est à la source de relativement peu d’accidents de la circulation.

Dans ces conditions, le retrait de quatre points, qui correspond au fait de rouler à plus de 90 km/h en agglomération, est mal vécu par nos concitoyens. Une évaluation de l’efficacité et de la pertinence du dispositif est donc nécessaire. Pendant cette évaluation, le déploiement des radars devra être suspendu.

Parallèlement, il faut équiper les feux munis d’un radar d’un décompte qui permette d’informer le conducteur du temps restant avant que le feu ne passe au rouge. À défaut, les radars placés aux feux génèrent une angoisse importante pour les conducteurs.

Proposition n° 36 : Réguler un contentieux de masse

Prévoir un recours préalable obligatoire en amont du recours administratif visant à faire annuler l’invalidation du permis de conduire

Le contentieux du permis de conduire est devenu un contentieux de masse. Près de 10 millions de points sont retirés et rendus chaque année et environ 85 000 permis ont été invalidés en 2010. Afin d’éviter d’engorger les tribunaux administratifs, il serait souhaitable d’instaurer un recours préalable obligatoire en matière de contestation de l’invalidation du permis de construire. Ce recours serait analysé par une commission qui y répondrait favorablement dans les cas où l’illégalité de la décision est flagrante.

Axe 10 : Mieux prendre en compte les usagers vulnérables et les victimes

Proposition n° 37 : Protéger les passages piétons

–  Faire du stationnement devant un passage piéton un cas de stationnement dangereux

–  Installer des afficheurs numériques de décompte de temps aux passages piétons

Les piétons représentent plus de 12 % des victimes de la route. Beaucoup d’entre eux sont des personnes âgées, qui sont heurtées lors d’une traversée de rue. Il est donc essentiel, ainsi que l’a rappelé l’association des Droits du piéton, que les passages piétons soient sûrs pour ces dernières.

Or, l’un des éléments de cette sûreté est la visibilité que l’on peut avoir de part et d’autre. Afin de l’assurer, il est proposé que les véhicules garés ou arrêtés à proximité immédiate d’un passage piéton, en dehors d’un emplacement où le stationnement est autorisé, soient considérés comme en état de stationnement dangereux. Cette catégorie de stationnement permet la mise en fourrière, la délivrance d’une amende de 150 € au maximum et le retrait de trois points.

Par ailleurs, afin de sécuriser la traversée des piétons – notamment les enfants, les personnes à mobilité réduite et les personnes âgées -, il est souhaitable d’installer des afficheurs numériques de décompte de temps aux passages piétons protégés par un feu tricolore.

Enfin une réflexion pourrait être engagée quant à la sonorisation des véhicules électriques. En effet, ces derniers étant silencieux, le risque de collision avec un piéton est accru, dans la mesure où ce dernier ne les entend pas forcément venir.

Proposition n° 38 : Assurer la sécurité des cyclistes

Évaluer le dispositif des double-sens cyclables

Les double-sens cyclables visent à favoriser le trafic cyclable dans les grandes villes. Ils ont été généralisés dans certaines agglomérations, comme à Strasbourg. Ils peuvent être situés dans les rues qui sont limitées à moins de 50 km/h. Les études réalisées semblent indiquer que ces voies réduisent le nombre d’accidents pour les deux-roues, dans la mesure où ces derniers sont davantage visibles par les autres usagers.

Cependant, ces nouveaux aménagements demandent une véritable acculturation de tous les usagers de la route, et notamment des enfants et des personnes âgées, mais aussi des automobilistes, qui ne s’attendent pas à voir arriver un usager à contresens. Le dispositif doit donc être évalué.

Proposition n° 39 : Renforcer la place des victimes dans la procédure judiciaire

Prévoir une convocation et une audition des parties civiles lors des procès correctionnels en appel, y compris lorsque aucun appel civil n’a été interjeté.

La mission a recueilli le témoignage de familles de victimes qui ont décrit comment elles avaient vécu les procédures judiciaires dans lesquelles elles ont été partie civile. Il en ressort qu’est très mal ressenti le fait de ne pas être averti de la date du procès en appel dans les cas où aucun appel civil n’a eu lieu.

Cependant, sans aller jusqu’à préconiser un bouleversement de notre procédure pénale en recommandant d’accorder aux victimes un droit d’appel pénal, dans le cadre d’une mission d’information sur les accidents de la circulation, il serait souhaitable que ces dernières soient pour le moins informées de la date du procès en appel et y soient entendues si elles le désirent.

ANNEXE 2 : ÉTUDE RÉALISÉE PAR L’IFSTTAR À LA DEMANDE DE LA MISSION D’INFORMATION

ANNEXE 3 : DOSSIER DE PRESSE DU CISR DU 11 MAI 2011

ANNEXE 4 : COMPARAISONS INTERNATIONALES

Souhaitant disposer d’éléments de contexte permettant à la mission d’information de s’inspirer de l’expérience des pays les plus avancés en matière de sécurité routière, le Président et le Rapporteur ont saisi M. le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères et européennes d’un questionnaire en ce sens.

Les ambassades de France des cinq pays européens interrogés– Suisse, Pays-Bas, Royaume-Uni, Allemagne et Suède – et des deux pays d’Amérique du Nord également pressentis – Canada et États-Unis – ont transmis leurs réponses qui ont permis à la mission d’information de dresser les tableaux suivants.

SUISSE

 

2009

2010

2011

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

97,5

--

--

Nombre de personnes tuées sur la route

349

327

--

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

22 %

21 %

--

– dont proportion de piétons (%)

17 %

23 %

--

Nombre de personnes blessées

25 130

24 237

--

– dont nombre de blessés graves

--

--

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

120

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

80

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

50 (voire 60)

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui

–si oui, année d’installation

Variable selon les cantons, en place depuis plusieurs années

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Non

Existence du permis probatoire

Oui

Age minimum d’obtention du permis de conduire

18

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Avec kit uniquement

– position sur le kit « mains libres »

Autorisé

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,5 g/l

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Oui sur poids lourds

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Non

Actions de prévention routière propre au pays

Opération « Slow down, take it easy – Ange Franky » avec déplacement de 200 motards fribourgeois sur le circuit de la Bresse (F) avec la police cantonale de Fribourg.

*

* *

PAYS-BAS

 

2009

2010

2011

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

Données non fournies, néanmoins le réseau est constitué de 135 470 kilomètres de route

Nombre de personnes tuées sur la route

(Seuls les cyclistes sont considérés par les statistiques – des données anciennes montrent une moyenne de 30 décès par an de conducteurs de 2 roues motorisés)

720

640

--

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

185 soit 25,9 %

162 soit 25,3 %

--

– dont proportion de piétons (%)

9,58 %

11,25 %

--

Nombre de personnes blessées

17 607

17 000

(dont 14800 ayant dû subir une hospitalisation)

--

– dont nombre de blessés graves

--

--

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

120

120

120/130

(avec l’ouverture de tronçons limités à 130 depuis mars 2011)

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

80

80

80

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

50 (parties à 30)

50 (parties à 30)

50 (parties à 30)

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui, complété par un système « catch scan » (équivalent à un système LAPI, c’est-à-dire un système de Lecture Automatisée des Plaques d’Immatriculation) et par des zones de contrôles par radars intermédiaires. Radars fixes installés en 2000, zones de contrôle en 2003 et « catch scan » en 2007

–si oui, année d’installation

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui, principalement dans les agglomérations

Existence du permis à points

Non

Existence du permis probatoire

Oui « jeunes permis » de moins de 5 ans concernés

Age minimum d’obtention du permis de conduire

18

18

18

(introduction en 2012 de la conduite accompagnée à partir de 16 ans)

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui, tous les ans à partir de 4 ans pour les véhicules diesel et GPL et tous les 2 ans à partir de 4 ans pour les véhicules essence

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Non, mais l’utilisation d’un « kit mains libres » n’est pas réprimée

– position sur le kit « mains libres »

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,5 g/l (0,2 g/l pour les conducteurs de moins de 5 ans de permis)

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Oui sur cyclomoteurs

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Non

Oui

Oui

Actions de prévention routière propre au pays

Compte tenu des résultats probants obtenus depuis plusieurs années (baisses consécutives du nombre de tués depuis plusieurs années), le programme d’actions de prévention 2005-2020 est maintenu.

*

* *

ROYAUME-UNI

 

2009

2010

2011

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

504,45

496,19

--

Nombre de personnes tuées sur la route

2 222

1 857

--

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

21,2 %

21,7 %

--

– dont proportion de piétons (%)

22,5 %

21,8 %

--

Nombre de personnes blessées

222 146

208 648

--

– dont nombre de blessés graves

--

--

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

112

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

96

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

48

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui

–si oui, année d’installation

1988

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Oui

Existence du permis probatoire

Non

Age minimum d’obtention du permis de conduire

17

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Non

– position sur le kit « mains libres »

Autorisé

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,8 g/l

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Oui sur cyclomoteurs et bus

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Non

Actions de prévention routière propre au pays

--

*

* *

ALLEMAGNE

 

2009

2010

2011

(janvier à mai)

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

699

705

--

Nombre de personnes tuées sur la route

4 152

3 648

1 462

(+ 11 % par rapport à la même période en 2010)

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

18 %

19,4 %

--

– dont proportion de piétons (%)

14,2 %

13 %

--

Nombre de personnes blessées

397 671

371 170

106 800

(+ 13 % par rapport à la même période en 2010)

– dont nombre de blessés graves

--

--

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

Pas de limite

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

100 km/h

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

50 km/h

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui

–si oui, année d’installation

--

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Oui

Existence du permis probatoire

Oui

Age minimum d’obtention du permis de conduire

18 ans

(conduite accompagnée à partir de 17 ans)

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Non

– position sur le kit « mains libres »

Oui

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,5 g/litre de sang en général

0,0 g/litre pour les professionnels de la route et les conducteurs de moins de 21 ans

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Non

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Oui

(en fonction des Länder, cannabis et cocaïne)

Actions de prévention routière propre au pays

Le permis vélo que les enfants passent à l’école en CM1 ;

Le comportement des deux-roues motorisés qui est identiques à celui des véhicules légers (pas de remontée de file dans les embouteillages par exemple).

*

* *

SUEDE

 

2009

2010

2011

(premier semestre)

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

76,99

(dont 0,8 à moto, 35,7 en voiture, 0,9 en bus (et le reste en camion))

ND

ND

Nombre de personnes tuées sur la route

358

(semestre 1 : 150)

266

(semestre 1 : 115)

148

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

16,2 %

16,9 %

17,6 %

– dont proportion de piétons (%)

12,3 %

11,7 %

15,5 %

Nombre de personnes blessées

25 281

23 305

--

– dont nombre de blessés graves

2 411

(semestre 1 : 1587)

2 891

(semestre 1 : 1332)

1 421

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

120 (130 avant 1971)

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

110 (70 en l’absence de panneaux)

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

50

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui

–si oui, année d’installation

1996 (la technologie actuelle date de 2006)

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Non

Existence du permis probatoire

Oui (sanctions renforcées les 2 premières années après l’obtention du permis)

Age minimum d’obtention du permis de conduire

18

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui (après 3 et 5 ans, puis tous les ans)

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Oui (fait l’objet d’un débat)

– position sur le kit « mains libres »

Oui (fait l’objet d’un débat)

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,2

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Oui : bridage à 80-90 pour certains véhicules légers (selon le tonnage), 90 pour les bus dans certaines communes

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Oui

(anti-démarreur pour l’alcool sur les bus scolaires de certaines communes et en cas d’ivresse constatée auparavant ; tous les policiers disposent d’un éthylomètre)

Actions de prévention routière propre au pays

– l’apprentissage de la conduite inclut des séances de perte de contrôle du véhicule ;

– il existe un permis de conduire limité aux voitures munies de boîte automatique

– le permis de conduire voiture (B) ne permet pas de conduire une moto.

*

* *

CANADA

 

2009

2010

2011

(données disponibles)

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

7,1

--

--

Nombre de personnes tuées sur la route

2 209

487

--

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

8,82 %

8,21 %

--

– dont proportion de piétons (%)

13,8 %

12,1 %

--

Nombre de personnes blessées

172 883

43 853

--

– dont nombre de blessés graves

--

--

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

100

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

70

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

50

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Non

–si oui, année d’installation

--

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Oui

Existence du permis probatoire

--

Age minimum d’obtention du permis de conduire

16 ans

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Non

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Non

– position sur le kit « mains libres »

Oui

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

0,08 g/l

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Non

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Oui

*

* *

Actions de prévention routière propre au Canada

Ä Attribution du permis de conduire aux jeunes conducteurs au Québec (Ce dispositif a été étendu récemment à la province de l’Ontario).

Désormais, pour obtenir un permis de classe 5 (voiture de tourisme), il faut être âgé d’au moins 16 ans et avoir le consentement écrit du titulaire de l’autorité parentale, si l’enfant a moins de 18 ans. L’obtention définitive du permis s’effectue selon 5 étapes à franchir obligatoirement :

1. Inscription au cours de conduite : La première étape consiste à s’inscrire au cours de conduite dans une école de conduite reconnue par l’Association québécoise du transport et des routes (AQTR). Le cours de conduite pour véhicule de tourisme est obligatoire. Il comporte une partie théorique et une partie pratique.

2. Obtention du permis d’apprenti conducteur de classe 5 : La deuxième étape est l’obtention du permis d’apprenti conducteur - véhicule de tourisme (classe 5). Pour obtenir ce permis, il faut avoir suivi avec succès la phase 1 du cours de conduite, qui comporte cinq modules théoriques, dans une école de conduite reconnue. L’obtention du permis d’apprenti conducteur permet d’accéder au réseau routier sous certaines conditions.

3. Réussite de l’examen théorique : La troisième étape consiste à réussir l’examen théorique. Pour se présenter à cet examen, il faut être titulaire d’un permis d’apprenti conducteur depuis au moins 10 mois En cas d’échec, un minimum de 28 jours est imposé avant la reprise de l’examen théorique.

4. Réussite de l’examen pratique : Pour se présenter à cet examen, dont la réussite est préalable à l’obtention du permis probatoire, il faut :

- avoir suivi avec succès un cours de conduite théorique et pratique dans une école reconnue par l’Association québécoise du transport et des routes (AQTR).

- être titulaire du permis d’apprenti conducteur de la classe 5 depuis au moins 12 mois; avoir réussi l’examen théorique. En cas d’échec, un minimum de 28 jours est imposé avant de reprendre l’examen pratique.

5. Permis probatoire : Le permis probatoire peut être obtenu après la réussite de l’examen pratique. Il s’agit de la dernière étape avant l’obtention du permis de conduire. Le permis probatoire est d’une durée de 24 mois. Une fois la période de 24 mois écoulée, le permis de conduire de la classe 5 peut être obtenu.

Ä 2011, Année de la sécurité routière au Canada

L’Année de la sécurité routière au Canada 2011 vise à sensibiliser la population canadienne à la sécurité routière, car les collisions sont une cause importante de décès chez les personnes âgées de 5 à 34 ans, et les blessures que subissent les Canadiens lors de collisions constituent un lourd fardeau pour le système de santé, notamment

en matière de traitements d’urgence, de soins chroniques et de réadaptation.

L’Année de la sécurité routière a été planifiée par le Comité Canadien pour la Sécurité Routière Mondiale (CCSRM), une coalition de multiples parties prenantes du domaine de la sécurité routière, en partenariat avec le Conseil Canadien des Administrateurs en Transport Motorisé (CCATM), les gouvernements, tant au niveau fédéral que provinciaux et territoriaux, l’Agence de la santé publique du Canada, ainsi que d’autres partenaires.

Elle comprend le lancement de la Stratégie de sécurité routière 2015 et de la Décennie d’action des Nations Unies, de la Conférence canadienne multidisciplinaire sur la sécurité routière, de la quatrième Journée nationale annuelle du souvenir des victimes en novembre, et de programmes fédéraux/provinciaux/territoriaux.

Ä Stratégie de la sécurité routière pour 2015

La Stratégie de sécurité routière 2015 est la troisième d’une série de programmes nationaux de sécurité routière, la première étant la Vision sécurité routière 2001, et la deuxième, la Vision sécurité routière 2010. Ces deux programmes étaient liés à la réduction du nombre de décès et de blessures graves causés par des collisions au Canada.

La vision de la Stratégie de sécurité routière essaie de doter le Canada des routes les plus sûres au monde. En 2009, le Canada venait au 4e rang en ce qui concerne les décès par milliard de kilomètres parcourus comparativement à d’autres pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

La Stratégie de sécurité routière 2015 a comme objectifs de sensibiliser le public, d’améliorer la mise en application du code de la route, d’accroître les communications, la coopération et la collaboration entre les partenaires, ainsi que d’enrichir l’information à l’appui de la recherche et de l’évaluation.

Les principaux éléments de la Stratégie de sécurité routière 2015 :

– la réduction du taux de mortalité et de blessures graves de 2011 à 2015;

– les compétences provinciales/territoriales adopteront une approche holistique à l’égard des véhicules, de l’infrastructure routière et des usagers de la route en fonction des groupes à risque et des principaux facteurs contributifs indiqués ci-dessous;

– un cadre des meilleures pratiques fondé sur les preuves sera adopté lors du choix des interventions;

– une approche fluide et flexible permettra aux compétences provinciales/ territoriales d’adopter des pratiques exemplaires qui conviennent à la situation; les compétences provinciales/ territoriales posséderont leurs plans de sécurité routière.

Les principaux groupes cibles/à risque sont les jeunes conducteurs (16 à 24 ans), les conducteurs à risque pour des raisons médicales (par exemple ceux qui souffrent d’une maladie du cœur ou de troubles cognitifs comme la maladie d’Alzheimer), les usagers de la route vulnérables (c’est-à-dire les piétons, les motocyclistes et les cyclistes), les transporteurs routiers (par exemple les gestionnaires d’opérations routières, les chauffeurs de camion et d’autobus), les conducteurs à haut risque (par exemple ceux qui ne portent pas la ceinture de sécurité ou qui font des excès de vitesse, ceux qui conduisent avec des facultés affaiblies ou ceux qui conduisent sans détenir un permis valide) et la population générale.

Les principaux facteurs générateurs d’accidents sont la conduite avec facultés affaiblies (alcool, drogues, distraction et fatigue), les excès de vitesse et la conduite agressive. Un impératif est la protection des occupants. Les facteurs environnementaux comprennent l’infrastructure routière et les conditions météorologiques. Les stratégies de sécurité routière orienteront les meilleures pratiques sur une matrice des principaux groupes cibles et facteurs d’accidents et incluront la communication et la sensibilisation, l’éducation/la formation, les politiques/les lois, l’application de la loi, la technologie, l’infrastructure routière, l’information/les données pour la recherche et l’évaluation, ainsi que les liens entre ces différents programmes d’action. Idéalement, on utilisera, pour un groupe cible ou un facteur particulier d’accident, une combinaison de toutes les stratégies recensées.

La Stratégie de sécurité routière 2015 a comme slogan « Sécurité routière, pensez-y! », slogan qui veut être un appel à l’action, à l’intention de toutes les parties prenantes du domaine de la sécurité routière.

Pour surveiller les progrès réalisés dans le cadre de la Stratégie de sécurité routière 2015, un certain nombre d’indicateurs seront utilisés sur une période de cinq ans (par exemple le taux de mortalité et de blessures graves par distance parcourue, et le nombre de conducteurs mortellement blessés qui avaient consommé de l’alcool).

Ä Comité canadien de la jeunesse pour la sécurité routière

En avril 2007, huit jeunes canadiens et canadiennes représentaient le Canada à Genève (Suisse) lors de l’Assemblée mondiale de la jeunesse pour la sécurité routière et durant la Semaine mondiale de la sécurité routière des Nations Unies. Produit de l’enthousiasme et de la dynamique créés par l’Assemblée mondiale de la jeunesse pour la sécurité routière et par la Conférence canadienne de la jeunesse pour la sécurité routière, a été créé le nouveau Comité canadien de la jeunesse pour la sécurité routière. Le Comité dispose de représentants dans les provinces et les territoires qui accroissent la sensibilisation sur la sécurité routière, ciblant les jeunes au niveau national et local. Le Comité fait également la promotion de la Déclaration des jeunes en matière de sécurité routière, adoptée lors de l’Assemblée mondiale des jeunes, et défend l’amélioration de la politique sur la sécurité routière auprès des diverses instances gouvernementales. Le Comité canadien de la jeunesse pour la sécurité routière, qui reconnaît la nécessité de poursuivre une réflexion liée aux questions de sécurité routière touchant les jeunes au Canada, cherche à créer un réseau national de jeunes spécialistes de la sécurité routière, afin de représenter les jeunes et d’appuyer les activités de sécurité routière centrées sur les jeunes dans tout le Canada.

Ä Appareil pour la lecture de plaque :

Ce dispositif permet de vérifier que chaque plaque d’immatriculation correspond bien à un numéro de permis de conduire (la société d’assurance des automobilistes du Québec étant la seule autorité à pouvoir délivrer le permis de conduire, la mise en place de radars à lecture instantanée des plaques d’immatriculation, par exemple dans la ville de Montréal, permet de s’assurer, après contrôle auprès de cette instance, que les conducteurs déclarés sont bien titulaires d’un permis de conduire valide).

Ä Lien entre les services d’assurance et les fichiers de police :

Afin de s’assurer que les mauvais conducteurs sont bien pénalisés, les services d’assurance ont un lien direct avec le fichier des infractions au code de la route des services de police. Ainsi chaque année, au moment de renouveler les contrats d’assurance, les assureurs disposent d’une vision précise des infractions commises ou des avertissements reçus par les conducteurs (y compris les amendes de stationnement non payées). Sur cette base, les assurances sont en mesure d’augmenter de 30 à 50% les polices d’assurance des mauvais conducteurs et de diminuer, dans les mêmes proportions, les assurances des bons conducteurs. A titre d’exemple, le non paiement de 4 amendes pour mauvais stationnement au Québec a pour effet le retrait de la plaque d’immatriculation et donc l’interdiction de conduire.

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ÉTATS-UNIS

Nombre de kilomètres parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau (en milliards)

3 milliards de miles parcourus annuellement sur l’ensemble du réseau routier américain

Nombre de personnes tuées sur la route

Nombre de tués aux USA en 2009 : 33 808* ** (37 423 en 2008, soit -9,7 %)

[*La différence de 739 étant due à une information catégorielle non renseignée comme les passagers des bus

**Le nombre de morts pour 100 millions de miles (VMT) parcourus était de 1,13 en 2009, en baisse de 10 % par rapport à 2008 (1,26 VMT). Les chiffres prévisionnels pour 2010 montrent une nouvelle baisse de 3 % à 1,06 VMT.]

Automobilistes : en 2009 : 23 382 [25 462 en 2008, soit – 8,2 %]

Routiers : en 2009 : 503 [682 en 2008, soit – 26 %]

Cyclistes : en 2009 : 630 [718 en 2008, soit – 12 %]

- dont proportion d’utilisateurs de deux-roues motorisés (%)

Deux-roues : en 2009 : 4 462 [5 312 en 2008, soit – 16 %]

– dont proportion de piétons (%)

Piétons : en 2009 : 4 092 [4 414 en 2008, soit – 7,3 %]

Nombre de personnes blessées

En 2009, le nombre de blessés était de 2 220 000 personnes

(2 350 000 en 2008)*

[* Le nombre de blessés pour 100 millions de miles parcourus (VMT) était de 74, soit une baisse de 6,3 % par rapport à 2008 (79)]

– dont nombre de blessés graves

--

Vitesse maximale autorisée sur autoroute (km/h)

Les vitesses maximales autorisées sur autoroutes varient suivant les États entre 65 miles/heure (105 km/h) et 75 miles/heure (120 km/h) allant pour le Texas jusqu’à 85 miles/heure (137 km/h) sur certains tronçons.

[Il n’existe pas de vitesse maximale réduite en cas de perturbation météo mais celle-ci doit toujours être « raisonnable et prudente »]

Vitesse maximale autorisée sur route (km/h)

Les vitesses maximales autorisées sur route varient suivant les États entre 55 miles/heure (88 km/h) et 55 miles/heure (105 km/h).

Vitesse maximale autorisée en ville (km/h)

La vitesse maximale autorisée en ville se situe généralement entre 25 et 30 miles/h (40 à 52 km/h)

[Un tiers des voies urbaines ont toutefois une vitesse limitée à 25 miles/heure.]

Présence de systèmes fixes de contrôle de la vitesse par radars automatiques

Oui

–si oui, année d’installation

--

Présence de « radars pédagogiques » indicateurs de la vitesse de l’usager

Oui

Existence du permis à points

Oui pour 6 États.

[Seuls 6 Etats (la Californie, le Colorado, la Floride, l’état de New York, le Texas et le Massachusetts) plus le District de Columbia ont instauré un permis à points. Le décompte se fait de manière différente selon les États et suit une échelle inverse par rapport à la France. Néanmoins, l’accumulation d’un maximum de points sur une période donnée peut entraîner jusqu’à l’annulation du permis. Le décompte est tenu par chaque État. Il est transmis à la société d’assurance du conducteur qui ajustera le montant de la prime à payer par le conducteur au regard du nombre de points accumulés.]

Existence du permis probatoire

Oui

[La totalité des États connaisse un permis probatoire pour les jeunes conducteurs. La durée varie de 1 à 2 ans. Certains États imposent des restrictions à la circulation la nuit ou bien au transport de passagers.]

Age minimum d’obtention du permis de conduire

16 ans dans la plupart des États

[Là encore l’âge peut varier suivant les États. Si la très grande majorité d’entre eux ont fixé à 16 ans l’âge l’obtention du permis de conduire, le Dakota du Sud a fixé l’âge minimal à 14 ans et demi, le Montana, l’Idaho à 15 ans, la Caroline du Sud et le Nouveau Mexique à 15 ans et demi. Le New Jersey est le seul État à avoir reculé cet âge à 17 ans.

Signalons que la quasi-totalité du parc est composé de véhicules automatiques plus faciles à conduire et que d’une manière générale, il y a plus d’espace sur les routes et pour se stationner.]

Existence d’une obligation légale de contrôle technique des véhicules

Oui dans 21 États

[37 États ont instauré des contrôles anti-pollution. Seuls 21 ont intégré des contrôles des éléments de sécurité.]

Autorisation d’utiliser un téléphone mobile en conduisant

Téléphone portable : non dans la plupart des États

– position sur le kit « mains libres »

Kit mains libres : oui

[La plupart des États sanctionnent l’usage de téléphone portable sans kit mains libres mais quelques États le tolèrent toujours. De plus en plus d’États adoptent une législation répressive sous l’impulsion du Department of Transportation.]

Seuil d’alcoolémie utilisé (en g/litre de sang)

Il varie selon les États entre 0,4 et 0,8 g/litre de sang. Pour les jeunes de 16 à 21 ans, c’est le principe de la tolérance zéro avec un taux fixé à 0,02 g du fait de la production d’alcool endogène.

[En 2009, sur les 33 808 personnes décédées sur les routes américaines, 10 839 impliquaient un conducteur ou un pilote de moto avec un taux d’alcoolémie supérieure à 0,8 g/l ou plus (11 711 en 2008, soit – 7,4 %).]

Existence de systèmes de bridage des véhicules

Non

Existence d’un dispositif particulier de dépistage des stupéfiants au volant

Oui pour le cannabis

Non pour les autres drogues, c’est à l’appréciation de l’officier de police de faire conduire l’automobiliste pour des dépistages de drogue.

Actions de prévention routière propre au pays

 

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— Les règles de la circulation sont à la responsabilité des États fédérés. Il y a donc 50 réglementations potentiellement différentes. A titre d’exemple, il y a encore près d’une dizaine d’États (dont la Floride) où il est possible de conduire une motocyclette (quelle que soit sa cylindrée) sans casque mais avec des lunettes et un motard peut être verbalisé pour non port de lunette, alors qu’il ne porte pas de casque. Dans d’autres États, le port du casque est obligatoire pour tous, y compris les personnes à bicyclette.

— Les dernières statistiques publiées datent de 2010 pour l’année 2009.

— Les États-unis d’Amérique comptaient 308 745 538 habitants en 2010.

— Sources statistiques : National Highway Traffic Safety Administration – US Department of Transportation.

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EXAMEN ET ADOPTION DU RAPPORT

La mission d’information a examiné le présent rapport au cours de sa séance du 19 octobre 2011 et l’a adopté.

Elle a autorisé sa publication conformément à l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale.

1 () La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

2 () Le Monde du 26 mai 2011, p. 13.

3 () Ibid.

4 () Ibid.

5 () Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, Le Figaro, 25 mai 2011, p. 3.

6 () Les chiffres cités sont issus de la préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 13 et suivantes. Il faut noter qu’un changement méthodologique est intervenu en 2004 dans la comptabilisation des morts sur la route. À des fins d’harmonisation avec les données des autres pays de l’Union, ont été recensés non plus les tués à six jours mais les tués à trente jour. Ainsi, en 1972, 16 545 personnes avaient perdu la vie sur les routes à 6 jours, ce qui équivaut à environ 18 034 à trente jours).

7 () Audition du 29 juin 2011.

8 () Audition du 29 juin 2011.

9 () Auditions des 29 juin et 20 septembre 2011.

10 () Audition du 29 juin 2011.

11 () Audition du 21 juin 2011.

12 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° 2, p. 6.

13 () L’action publique qui a été menée durant ces années dans le domaine de la sécurité routière a notamment été décrite par M. Claude Got au cours de son audition du 20 septembre 2011.

14 () Loi n°2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière.

15 () Audition du 14 septembre 2011.

16 () Audition du 21 juin 2011.

17 () Les causes des accidents de la circulation sur les 4 premiers mois de l’année 2011, document transmis à la mission d’information et audition du 12 juillet 2011.

18 () Audition du 21 juin 2011.

19 () Audition de Mme Michèle Merli du 21 juin 2011.

20 () Audition du 12 juillet 2011.

21 () Article 76 de la loi, qui était l’article 28 bis du texte soumis à l’Assemblée nationale en deuxième lecture.

22 () Audition du 20 septembre 2011.

23 () Audition du 21 juin 2011.

24 () Table ronde du 1er septembre 2011.

25 () Audition des 21 juin et 20 septembre 2011.

26 () Audition de Mme Michèle Merli du 21 juin 2011.

27 () Article 1er du décret n° 75-360 du 15 mai 1975 relatif au comité interministériel de la sécurité routière.

28 () Pour la liste complète des mesures, cf. annexe n° III.

29 () Table ronde du 1er septembre 2011.

30 () Table ronde du 1er septembre 2011.

31 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 10.

32 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 10.

33 () Article 2 bis du décret n° 75-360 du 15 mai 1975 relatif au comité interministériel de la sécurité routière.

34 () Audition du 22 juin 2011.

35 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 279 et suivantes.

36 () Ibid.

37 () Audition du 22 juin 2011.

38 () Audition du 29 juin 2011.

39 () Ibid, Deuxième partie, II.

40 () Pour plus de précisions sur cette problématique, cf. infra, deuxième partie, II.

41 () Pour une description plus précise de ces organismes, cf. infra, Deuxième Partie.

42 () « Stupéfiants et accidents mortels de la circulation routière », Paris, 2006.

43 () Ibid. Pour une bibliographie de référence et à jour, voir celle qui est annexée à l’étude de l’IFSTTAR, annexe n° II.

44 () Audition du 22 juin 2011.

45 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 7-9.

46 () Audition du 21 juin 2011.

47 () Pour une présentation plus détaillée de ces causes, voir l’étude de l’IFSTTAR en annexe n° II ainsi que la bibliographie qui l’accompagne.

48 () Audition du 14 septembre 2011.

49 () Audition du 22 juin 2011.

50 () Exemples mentionnés par M. Louis Fernique lors de son audition du 22 juin 2011.

51 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 185.

52 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 14.

53 () Audition du 22 juin 2011.

54 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 173 et 214.

55 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 15.

56 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 14.

57 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 15.

58 () Expression de M. Jean Chapelon, utilisée au cours de son audition du 28 juin 2011.

59 () Sur ces facteurs, cf. infra, 4. de la présente partie.

60 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 173 et 185.

61 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 16.

62 () Audition de M. Charles Mercier-Guyon, secrétaire de la commission médicale de la Prévention routière, du 1er septembre 2011.

63 () Ibid, p. 17 et audition de M. Bernard Laumon, directeur de recherche à l’IFSTTAR, du 1er septembre 2011.

64 () Audition du 1er septembre 2011.

65 () Taux voisin de celui qui est constaté lors des contrôles d’alcoolémie préventif (qui est de 2,8 %), mais supérieur à celui qui est retenu par l’ONISR ; cf. préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 212-213.

66 () Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 205.

67 () Ibid, p. 16.

68 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 17.

69 () On évalue à environ 550 000 le nombre de consommateurs quotidiens de cannabis aujourd’hui en France, selon Mme Hélène Martineau, directrice adjointe de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, audition du 1er septembre 2011.

70 () Si le chiffre de 4 % devait être maintenu, le nombre de morts annuellement imputables au cannabis serait d’environ 100.

71 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 214-215.

72 () Audition de M. Bernard Laumon, 1er septembre 2011.

73 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 17.

74 () Audition du 2 septembre 2011.

75 () Audition du 2 septembre 2011.

76 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 18.

77 () M. Bernard Delorme a évoqué les accidents mortels au cours de son audition, alors que l’étude de l’IFSTTAR n’évoque que les accidents corporels.

78 () Audition du 2 septembre 2011.

79 () Distinctions proposées par Mme Catherine Gabaude au cours de son audition et par l’IFSTTAR dans son étude, p. 18-20.

80 () Audition de Mme Catherine Gabaude du 2 septembre 2011.

81 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 217.

82 () Cité par ibid., p. 217.

83 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 18.

84 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 18.

85 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 221.

86 () Audition du 2 septembre 2011.

87 () Chiffres cités par M. Jean-Louis Martin, chargé de recherche à l’IFSTTAR, lors de l’audition du 2 septembre 2011 et dans IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 18.

88 () Chiffre indiqué par Mme Anne Guillaume, lors de l’audition du 2 septembre 2011. Le même ordre de grandeur a été évoqué par M. Jean-Luc Nevache, le 13 septembre 2011.

89 () Audition du 2 septembre 2011.

90 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 19.

91 () Cité par la préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 34.

92 () Audition du 2 septembre 2011.

93 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 20.

94 () Cf. infra, III sur les risques pour cette typologie.

95 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 27.

96 () Audition du 21 juin 2011.

97 () Audition du 21 juin 2011.

98 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 28.

99 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 27.

100 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 193 et suivantes.

101 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 198.

102 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 28.

103 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 28.

104 () Audition du 22 juin 2011.

105 () Déplacement du 28 juillet 2011.

106 () Voir par exemple l’audition de M. Claude Azam, chef du bureau d’enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT), le 22 juin 2011 : « s’agissant des infrastructures, les points noirs ont été supprimés » ou celle de M. Jean-Jacques Debacq, préfet, directeur de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) : « pour ce qui est de la route, tous les points noirs ont été traités et les points gris sont en passe de l’être », le 7 septembre 2011.

107 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 25.

108 () Audition du 29 juin 2011. Sur ce point, voir le rapport de l’IFSTTAR, p. 26.

109 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 25.

110 () Audition du 6 septembre 2011.

111 () Chiffre donné par M. Sylvain Lassarre, directeur de recherches à l’IFSTTAR lors de l’audition du 6 septembre 2011.

112 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 19.

113 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 20.

114 () Audition de M. Bernard Laumon, directeur de recherche à l’IFSTTAR, du 2 septembre 2011.

115 () Audition du 29 juin 2011.

116 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 21.

117 () Audition de M. Jean-Pascal Assailly, du 6 septembre 2011.

118 () Pour ce qui est des accidents corporels, le préfet Régis Guyot a cité le chiffre de 59 % de responsabilité, qui atteint 70 % si l’on s’intéresse aux accidents mortels, au cours de l’audition du 29 juin 2011.

119 () Audition de M. Bernard Laumon du 2 septembre 2011.

120 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 18.

121 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 23.

122 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 121 et suivantes.

123 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 25.

124 () Source : préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 127 et suivantes.

125 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 24.

126 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 131.

127 () Cf. supra, graphique du nombre d’accidents corporels par mois depuis 1999.

128 () Données fournies par M. Louis Fernique, secrétaire général de l’ONISR au cours de son audition le 22 juin 2011.

129 () Audition du 21 juin 2011.

130 () Rapport sur la sécurité routière au niveau européen pour la période 2011-2020 (2010/2235(INI)), considérant n° E, septembre 2011.

131 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 7-8.

132 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 8-9.

133 () Audition du 2 septembre 2011. La nature et la fréquence des blessures enregistrées par le registre du Rhône sont décrites en détail dans le rapport annuel de l’ONISR : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 161-172.

134 () Audition du 2 septembre 2011.

135 () Audition du 2 septembre 2011.

136 () Audition du 2 septembre 2011.

137 () Audition de Mme Martine Hours, du 2 septembre 2011.

138 () Chiffre donné par Mme Barbara Berrebi, chargée d’études au Groupement des entreprises mutuelles d’assurances (GEMA), lors de l’audition du 1er septembre 2011.

139 () Audition du 1er septembre 2011.

140 () « Base de données communautaire sur les accidents de la route en Europe » ou base CARE. Cf. annexe n° IV.

141 () Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 83.

142 () Pour les données exhaustives, cf. Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 75-91.

143 () Audition de M. Louis Fernique du 22 juin 2011.

144 () Cf. supra, Première partie, I.

145 () Audition du 21 juin 2011.

146 () Ibid.

147 () Audition du 29 juin 2011.

148 () Audition du 14 septembre 2011.

149 () Audition du 22 juin 2011.

150 () Audition du 28 juin 2011.

151 () Audition du 1er septembre 2011.

152 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 32.

153 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 32.

154 () Audition du 28 juin 2011.

155 () Audition du 28 juin 2011.

156 () Cf. supra, Première partie.

157 () Audition du 22 juin 2011.

158 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 31-32.

159 () Audition du 29 juin 2011.

160 () Audition de M. Robert Delorme, professeur émérite à l’université de Versailles, ancien président du conseil scientifique de l’Institut national de sécurité routière et de recherches (INSERR), le 29 juin 2011.

161 () Audition du 13 juillet 2011.

162 () Audition du 1er septembre 2011.

163 () Audition du 1er septembre 2011.

164 () Audition du 29 juin 2011.

165 () Audition du 1er septembre 2011.

166 () Audition du 1er septembre 2011.

167 () Audition du 28 juin 2011.

168 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 47.

169 () Audition du 13 juillet 2013.

170 () Cf. supra, Première partie, II.

171 () Audition du 1er septembre 2011.

172 () Sur cette croyance, cf. infra, la sous-partie relative à l’objectif de transparence.

173 () Audition du 20 septembre 2011.

174 () Jean Chapelon, La politique de sécurité routière. Derrière des chiffres, des vies, Paris, Lavoisier, 2008, p. 92.

175 () Ibid.

176 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 32.

177 () Audition du 29 juin 2011.

178 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 32.

179 () Audition du 1er septembre 2011.

180 () IFSTTAR, L’insécurité routière, facteurs et mesures. Des enseignements pour la France, cf. annexe n° II, p. 32.

181 () Téléphone et sécurité routière. Expertise collective, Paris, 2011.

182 () Pour les sources d’information en matière de sécurité routière, cf. supra, Première partie.

183 () Audition du 22 juin 2011.

184 () Décret n°2001-784 du 28 août 2001 portant création du Conseil national de la sécurité routière et modifiant le décret n° 75-360 du 15 mai 1975 relatif au Comité interministériel de la sécurité routière.

185 () Audition du 22 juin 2011.

186 () Audition du 28 juin 2011.

187 () Audition du 28 juin 2011.

188 () Mesure n° 16.

189 () Décret n°86-426 du 13 mars 1986 portant création de la commission départementale de la sécurité routière.

190 () Article R. 411-11 du code de la route.

191 () Article R. 411-12 du code de la route.

192 () À ce sujet, cf. infra, Quatrième partie.

193 () Audition du 21 juin 2011.

194 () Audition du 1er septembre 2011.

195 () Chiffres provenant de l’audition de M. Jean-Jacques Debacq, préfet, directeur de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, du 7 septembre 2011.

196 () Ibid.

197 () Audition du 5 juillet 2011.

198 () Qui correspond au chiffre de 186,6 milliards de francs avancé à la page 125 du rapport de l’ONISR pour 2000.

199 () Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 7.

200 () Audition du 1er septembre 2011.

201 () Audition du 12 juillet 2011.

202 () Audition du 14 septembre 2011.

203 () Audition du 20 septembre 2011.

204 () Audition du 7 septembre 2011.

205 () Audition du 22 juin 2011.

206 () Audition du 29 juin 2011.

207 () Surtout lorsque ces radars feux rouges sont installés aux abords directs des hôpitaux.

208 () Audition de M. Jean-Jacques Debacq, préfet, directeur de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions, le 7 septembre 2011.

209 () Cf. infra, parties III et IV.

210 () Source : Préédition du Bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 90-91.

211 () Audition de M. Marc Meunier, sous-directeur de l’éducation routière au ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, du 6 septembre 2011.

212 () Article R. 223-5 du code de la route.

213 () Son coût varierait entre 230 et 280 €.

214 () Article 76 de cette loi.

215 () Audition du 14 septembre 2011.

216 () Audition du 2 septembre 2011.

217 () Audition du 2 septembre 2011.

218 () Article créé par la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

219 () Audition du 2 septembre 2011.

220 () Audition du 2 septembre 2011.

221 () Roland Barthes in Mythologies, Paris, Seuil, 1966.

222 () Cf. supra – Deuxième partie, II.

223 () Cf. supra, Première partie.

224 () Audition du 7 septembre 2011.

225 () Audition du 28 juin 2011.

226 () Audition du 7 septembre 2011.

227 () Audition du 7 septembre 2011.

228 () Audition du 7 septembre 2011.

229 () Sur cette question, cf. infra, Quatrième partie.

230 () Cf. supra, Deuxième partie, II.

231 () Préédition du bilan de l’ONISR pour l’année 2010, p. 89.

232 () Pour une analyse détaillée de ces cas de figure, cf. supra, Deuxième partie, II.

233 () Audition du 13 septembre 2011.

234 () Audition de M. Jean-Jacques Debacq du 7 septembre 2011.

235 () Déplacement à Bruxelles du 28 septembre 2011.

236 () Cf. supra, Deuxième partie, II.

237 () Audition du 7 septembre 2011.

238 () « Par dérogation aux dispositions de l'article L. 121-1, le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l'amende encourue pour des contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées, sur le respect des distances de sécurité entre les véhicules, sur l'usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules, à moins qu'il n'établisse l'existence d'un vol ou de tout autre événement de force majeure ou qu'il n'apporte tous éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction.

La personne déclarée redevable en application des dispositions du présent article n'est pas responsable pénalement de l'infraction. Lorsque le tribunal de police ou la juridiction de proximité, y compris par ordonnance pénale, fait application des dispositions du présent article, sa décision ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être prise en compte pour la récidive et n'entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. Les règles sur la contrainte judiciaire ne sont pas applicables au paiement de l'amende.

Lorsque le certificat d'immatriculation du véhicule est établi au nom d'une personne morale, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article L. 121-2, au représentant légal de cette personne morale.

Lorsque le véhicule était loué à un tiers, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe au locataire, sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article L. 121-2. »

239 () Audition du 7 septembre 2011.

240 () Audition de M. Aurélien Wattez du 7 septembre 2011.

241 () C’est la loi n°70-597 du 9 juillet 1970 qui a institué un taux légal d’alcoolémie, fixé à 0,8 gramme d’alcool par litre de sang

242 () Pour un sujet d’âge et de corpulence moyens, il est estimé que chaque verre de vin d’une dizaine de centilitres augmente l’alcoolémie d’environ 0,20 g. Sur cette base, une personne présentant un taux d’alcoolémie de 1,2g/l de sang aurait donc déjà absorbé l’équivalent d’une bouteille de vin de 75 cl.

243 () Combattue dans la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » (HPST) du 21 juillet 2009, notamment par l’interdiction des open bars dans les soirées étudiantes, de la vente d’alcool dans les stations services de nuit et de la vente d’alcool réfrigéré « prêt à consommer » dans les stations services, la pratique de « l’hyperalcoolisation accélérée » continue de faire des ravages. Couplée à une éventuelle consommation de drogues, elle a naturellement des effets désastreux sur la sécurité routière des 16-24 ans.

244 () Aux dires des experts, le taux de 0,2 g/l est le plus réaliste pour remplir l’objectif de la « tolérance zéro » dans la mesure où il tient compte du taux d’alcool pouvant être présent dans l’organisme pour des causes extérieures à la prise d’une boisson alcoolisée. D’autres pays affichent un taux nul mais il est vraisemblable qu’ils appliquent alors un coefficient de correction prenant en compte cette donnée.

245 () Il s’agit de l’Allemagne, de l’Autriche, de Chypre, de l’Espagne, de la Grèce, de l’Irlande, de l’Italie, de la Lettonie, de la Lituanie, du Luxembourg et des Pays-Bas. S’agissant de ce dernier pays, il faut noter que le taux de 0,2 g/l s’applique à tous les conducteurs présentant moins de 5 ans de permis.

246 () Voir notamment le compte rendu de la table ronde du vendredi 2 septembre 2011.

247 () Contre l’idée d’une interdiction totale, voir notamment l’audition de Mme Guillaume, directrice du Lab., le 21 juin 2011.

248 () On ne peut cependant ignorer que nombre de pays, où l’âge de passage du permis de conduire semble précoce (Etats-Unis à 16 ans, Royaume Uni à 17 ans, …), enregistrent d’excellents résultats en matière de sécurité routière.

249 () Cf. supra.

250 () Audition du 2 septembre 2011.

251 () Il s’agit de la directive du Parlement européen et du Conseil 2006/126/CE du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire.

252 () M. Marc Giroud, Président de Samu-Urgences de France, lors de son audition du 22 juin 2011.

253 () Cf. le compte rendu de la table ronde sur l’aptitude à la conduite du vendredi 2 septembre 2011.

254 () Pour plus de précisions, se référer au « Carnet de route du LAVIA », établi sous la direction de Jacques Ehrlich, directeur du laboratoire sur les interactions véhicules, infrastructures, conducteurs (LIVIC), auditionné par la mission le 1er septembre 2011.

255 () Au cours des auditions, l’attention de la mission a été appelée à plusieurs reprises sur le danger pour les piétons et cyclistes que pouvait constituer l’absence de bruit de roulement des véhicules tout électriques. Pour y remédier, les constructeurs étudient des dispositifs de sonorisation à faible allure et des avertisseurs adaptés.

256 () Il est notable que plusieurs représentants des associations de motards auditionnées préfèrent au terme de « pilote» celui de « conducteur », qu’ils considèrent comme moins stigmatisant par rapport aux autres usagers, la route n’étant pas un circuit ni la circulation un parcours sportif.

257 () Par définition, la révolution de la ceinture de sécurité n’a pas concerné les motos, même si le port du casque a permis des progrès considérables, au moins en matière de létalité. On peut attendre de nouvelles avancées de la généralisation progressive des systèmes de freinage ABS et, dans une moindre mesure, du blouson à airbag intégré.

258 () Il semble que le clivage entre blouson à airbag filaire, relié à la machine, et blouson à airbag intégré ait quelque peu freiné la diffusion de cet équipement prometteur en termes d’évitement des plus graves lésions.

259 () Au cours de sa rencontre avec le Chef de l’unité « sécurité routière » de la Commission européenne, le 28 septembre 2011, la mission s’est vu confirmer que le sujet était traité au plan communautaire.

260 () Audition du 7 septembre 2011.

261 () Il semble que le coût de tels équipements – essentiellement des plots lumineux d’alerte dans les échangeurs identifiés comme présentant un risque particulier d’erreur de sens – reste très modéré.

262 () La plupart des sources disponibles évaluent le coût moyen de suppression d’un passage à niveau (PN) à 4 millions d’euros, des opérations lourdes – et longues – d’études et de travaux étant souvent nécessaires. Il est notable que le réseau ferré français ne comprend aucun PN sur le réseau des TGV, ce facteur étant précisément conçu pour diminuer les risques d’accidents.

263 () Il s’agit du rapport n°2134 du 2 décembre 2009, disponible en intégralité sur le site Internet de l’Assemblée nationale.

264 ()La directive 2010/40/UE du Parlement européen et du Conseil concernant le cadre pour le déploiement de systèmes de transport intelligents dans le domaine du transport routier et d’interfaces avec d’autres modes de transport – dite « directive STI » - a été adoptée le 7 juillet 2010.


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