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N
° 503

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 décembre 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi pour le pouvoir d’achat (n° 498),

PAR M. Jérôme CHARTIER,

Député.

——

Voir les numéros n° 498 et 504.

SOMMAIRE

INTRODUCTION 9

RÉSUMÉ 11

I.– LE POUVOIR D’ACHAT EST DEVENU LA PREMIÈRE PRÉOCCUPATION DES FRANÇAIS 15

A.– LE POUVOIR D’ACHAT : VALEUR OBJECTIVE ET SUBJECTIVE 15

1.– Le pouvoir d’achat est un problème pour une part croissante des français 15

2.– La raison profonde de cette préoccupation tient à des éléments que ne saisit pas l’indice des prix à la consommation 19

B.– LE POUVOIR D’ACHAT DES FRANÇAIS DIMINUE-T-IL VRAIMENT ? 20

1.– Le passage à l’euro a conduit à un renchérissement du coût de la vie 21

2.– Le prix des biens de consommation courante a augmenté 21

3.– Les besoins de consommation des ménages ont changé, rendant caduque la pertinence des indices de mesure du pouvoir d’achat 24

4.– Un prix bas est-il toujours un prix « juste » ? 26

5.– Le développement des pratiques « hard discount » a accentué la défiance du consommateur envers les prix 27

C.– QUELLE A ÉTÉ L’ÉVOLUTION DES REVENUS DES FRANÇAIS ? 28

1.– L’évolution des salaires 28

2.– L’évolution des traitements des fonctionnaires 31

3.– L’évolution des pensions de retraites 35

D.– LE LOGEMENT PÈSE-T-IL PLUS SUR LE POUVOIR D’ACHAT DES MÉNAGES ? 37

1.– La crise du logement en France conduit à une hausse importante du prix des logements et des loyers 38

2.– Les dépenses de logement constituent une part croissante du budget des ménages 39

3.– L’insuffisance de logements conduit à faire peser des contraintes plus fortes sur les locataires 41

E.–QUELLE EST L’ÉVOLUTION RÉELLE DU COÛT DE L’ÉNERGIE ? 42

1.– Pourquoi les prix de l’essence et du gazole augmentent-ils ? 42

a) Le prix du baril et le cours de l’euro 42

b) Les marges de raffinage 43

c) Les marges de transport et de distribution 44

d) Les prix hors taxes 44

e) La TIPP et la TVA 44

2.– Les prix français de l’essence et du gazole sont-ils supérieurs à ceux de nos voisins européens ? 45

3.– Quelles sont les raisons économiques de la flambée récente des cours du pétrole ? 47

F.– LE CRÉDIT À LA CONSOMMATION EST-IL UN PIÈGE OU UNE AVANCÉE POUR LE POUVOIR D’ACHAT ? 48

1.– Le recours excessif à l’endettement entraîne de nombreux ménages vers la pauvreté 49

2.– Prévenir le surendettement en encadrant davantage l’octroi du crédit à la consommation 50

G.– QU’EST-CE QUI PÈSE SUR LE POUVOIR D’ACHAT ? 51

1.– Des charges sur le travail trop élevées 52

2.– Une croissance émolliente aux variations erratiques 54

3.– Une mauvaise place dans la concurrence fiscale 55

4.– Un déficit commercial en dégradation constante 56

5.– Des taux de marge faibles et en stagnation 57

6.– Des délocalisations qui s’accélèrent 58

H.– QUE NOUS ENSEIGNENT LES THÉORIES ÉCONOMIQUES SUR LE POUVOIR D’ACHAT ? 59

1.– Un débat ancien : Ricardo, Marx et Schumpeter 60

2.– Les apports de Keynes et de Friedman 61

3.– Libérer le travail de ses contraintes 62

II.– LE GOUVERNEMENT ET LA MAJORITÉ PARLEMENTAIRE SE SONT LANCÉS RÉSOLUMENT DANS LA « BATAILLE DU POUVOIR D’ACHAT » 63

A.– Un premier ensemble de mesures a été adopté à compter de l’été 2007 pour revaloriser le travail 63

1.– La loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a concrétisé plusieurs engagements présidentiels 63

a) Les exonérations fiscales et sociales des heures supplémentaires 64

b) L’allégement des droits de succession et de donation 64

c) L’exonération des rémunérations versées aux étudiants qui travaillent pour financer leurs études 65

d) Le revenu de solidarité active 65

e) La revalorisation de la prime pour l’emploi 67

2.– Le développement de la concurrence au service des consommateurs 67

3.– Une politique volontariste en faveur des propriétaires et des locataires 68

a) L’allègement du coût de l’accession à la propriété 68

b) Les aides permettant aux locataires de faire face à leurs dépenses de logement 69

c) Le développement du parc de logement 70

4.– Des mesures pour répondre à la hausse des prix du carburant 70

B.– LE PROJET DE LOI POUR LE POUVOIR D’ACHAT PROLONGE ET COMPLÈTE CES MESURES 71

1.– Le rachat des journées de réduction du temps de travail par l’employeur 71

2.– Le déblocage anticipé de la participation aux résultats de l’entreprise 71

3.– La prime exceptionnelle pour les salariés des entreprises de moins de 50 salariés 72

4.– L’indexation de l’indice de référence des loyers sur l’évolution des prix à la consommation 72

5.– La réduction du montant maximum du dépôt de garantie à un mois de loyer 72

C.– L’ACTION DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR DU POUVOIR D’ACHAT SE POURSUIVRA AU-DELÀ DE CE PROJET DE LOI 72

D.– LA CONTRIBUTION DE LA MAJORITÉ PARLEMENTAIRE À L’ACTION MENÉE EN FAVEUR DU POUVOIR D’ACHAT 73

1.– La réversibilité totale pour la consommation d’électricité des ménages 74

2.– La taxe exceptionnelle sur les sociétés pétrolières 74

3.– La réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise 75

4.– Le lissage du dépôt de garantie 75

5.– L’instauration d’une prime annuelle de résultats pour tous 76

EXAMEN EN COMMISSION 79

I.– AUDITION DES MINISTRES 79

II. – EXAMEN DES ARTICLES 99

Article premier : Modalités de conversion en argent d'un certain nombre de droits à congé 101

Article 2 : Déblocage anticipé des sommes attribuées au titre de la participation aux résultats de l'entreprise 108

Article 3 : Versement d'une prime exceptionnelle aux salariés s'agissant des entreprises qui ne sont pas assujettis au régime de la participation 111

Article 4 : Nouveau dispositif d'indexation des loyers 114

Article 5 : Réduction du montant maximum du dépôt de garantie qui peut ëtre exigé par le bailleur 120

Article additionnel après l’article 5 : Échelonnement du paiement du dépôt de garantie 124

Article additionnel après l’article 5 : Attestation du paiement des loyers 125

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 129

Remerciements :

Ce rapport, réalisé dans des délais particulièrement courts, reprend les travaux préparatoires d'un ouvrage que j'avais envisagé d'écrire sur le pouvoir d'achat avec l'ambition de faciliter la compréhension de mécanismes et de théories économiques parfois complexes, quitte à les simplifier grandement. Je tiens à remercier, pour leur précieux concours, leur efficacité et leur disponibilité mes collaborateurs les plus proches, les administrateurs de la commission des Finances de l'Assemblée nationale et, tout particulièrement, Christian Saint-Étienne, Professeur d'économie politique, membre du Conseil d'analyse économique, pour sa relecture de la première partie de ce rapport d'un œil ô combien averti.

Jérôme Chartier

INTRODUCTION

La question du pouvoir d’achat n’est pas nouvelle. En revanche, ce qui est nouveau, c’est que cette préoccupation majeure des Français est devenue l’axe principal de l’action gouvernementale : une politique dans le droit fil de la campagne présidentielle pendant laquelle Nicolas Sarkozy, alors candidat, s’était engagé à être le « président du pouvoir d’achat ».

La « revendication de revenus revalorisés face à des prix perçus à la hausse », l’inquiétude légitime liée au coût de la vie connaissent de nombreux précédents historiques et ont été l’objet d’une accumulation de politiques publiques et de plans de relance aux effets contrastés et le plus souvent mitigés.

Lors de plusieurs périodes politiques, les réponses apportées à l’attente en terme de pouvoir d’achat ont privilégié l’efficacité à court terme plutôt que les stratégies imposant des efforts structurels plus ambitieux. De la hausse arbitraire des salaires, déconnectée de la croissance, à la réduction imposée du temps de travail, les politiques initiées jusqu’à présent ont handicapé les structures de l’économie française, ralentissant sa production et la création d’emplois. Les 35 heures et les obstacles entravant la volonté des salariés souhaitant travailler plus pour accroître leurs revenus sont à cet égard l’un des échecs les plus manifestes.

Une politique responsable de revalorisation du pouvoir d’achat ne peut passer que par la réhabilitation du travail, réhabilitation au cœur du projet présidentiel. Le travail, moteur de la croissance économique, ne doit plus être considéré comme une valeur rare et limitée qu’il faudrait partager afin de répartir une richesse nationale donnée. Les exemples historiques ainsi que la théorie économique montrent, depuis des siècles, que lever les entraves au marché du travail crée de la valeur, accroît les revenus et multiplie les emplois par la création d’entreprises et l’innovation.

L’immobilisme condamnerait la France au déclin dans un environnement économique international concurrentiel et en mutation rapide. La France doit pouvoir s’imposer dans une économie globalisée sans complexes, ni résignation, ni mise au rebut des valeurs qui structurent notre société. L’ouverture à la mondialisation ne doit pas être interprétée comme une menace mais une opportunité à saisir pour renforcer l’influence de la France sur la scène internationale, améliorer notre économie et le bien-être des Français. Les avantages de notre pays sont en effet nombreux, de la formation de sa main-d’œuvre à la qualité de ses infrastructures en passant par la qualité de ses grandes entreprises : autant d’atouts qui permettent d’enclencher sereinement la bataille du pouvoir d’achat en faveur des Français.

RÉSUMÉ

Le pouvoir d’achat est devenu aujourd’hui la première préoccupation des Français. Selon un sondage TNS-SOFRES publié en octobre dernier, 48 % des personnes interrogées étaient préoccupées par leur pouvoir d’achat, contre 28 % en avril 2004 et estimaient que celui-ci se détériorait globalement. Ce sentiment de dégradation du pouvoir d’achat revêt une part d'objectivité et de subjectivité.

Ainsi, la fabrication de l'indice des prix à la consommation a progressé d’un demi-point en novembre, portant l’inflation à 2,4 % sur un an, soit le niveau le plus élevé depuis trois ans. Mais cet indice rend compte d'une réalité qui ne touche pas l'ensemble des ménages français, dont la nature de la consommation, justement, a évolué fortement compte tenu de l'augmentation de l'offre globale de consommation du fait de l'innovation, du fait de l’accès à Internet, comme du fait de la facilitation de l'accès au crédit à la consommation.

Ces évolutions ont considérablement individualisé le comportement du consommateur qui apprécie son pouvoir d'achat en fonction de ses besoins individuels et non dans l'absolu. Et à cet égard, son insatisfaction contrainte par un revenu du travail fixe ou faiblement évolutif – notamment en raison de la réduction du temps de travail – face à une offre toujours grandissante influera l’appréciation de son pouvoir d'achat, qu'il considérera logiquement « à la baisse ».

Dressons donc un panorama de la situation économique, qui détermine le pouvoir d'achat des Français.

Certains postes de dépenses pèsent davantage sur le budget des ménages. Alors que dans les années soixante-dix, le logement représentait 15 % des dépenses de consommation des ménages, les Français lui consacrent aujourd’hui en moyenne un quart de leur budget, en raison d’une forte hausse du montant des loyers et du prix des logements. De même le prix des carburants a augmenté d’environ 15 % depuis le début de l’année

En outre, certaines caractéristiques de l’économie française pèsent sur le pouvoir d’achat. Peuvent être cités :

– un coût du travail élevé : le coût horaire de la main-d’œuvre atteint 29,29 euros par heure en France contre 24,41 euros par heure en moyenne dans la zone euro en 2005 ;

– des prélèvements obligatoires importants : ils représentent 44 % du PIB, contre 39,2 % en moyenne pour la zone euro ;

– une dégradation constante du déficit commercial depuis 2001 : sur les douze derniers mois, le déficit se monte à plus de 30 milliards d’euros ;

– des taux de marges des entreprises insuffisantes : celles-ci sont inférieures de 13 % à celles des entreprises de la zone euro et le taux moyen a subi une légère contraction passant de 34,6 % en 2001 à 34,1 % en 2005. Cette dégradation a encouragé les délocalisations. L’INSEE a calculé qu’environ 95 000 emplois ont été supprimés et délocalisés à l’étranger au cours de la période 1995-2001 dans le seul secteur de l’industrie.

Ces facteurs pèsent sur la croissance française qui s’est maintenue en dessous de 2 % depuis 2002, limitant ainsi les « fruits de la croissance » susceptibles d’être redistribués aux Français.

Afin de satisfaire leur envie de consommation, les Français, notamment les plus modestes, ont eu recours aux crédits à la consommation. Ainsi, le nombre de ménages surendettés a progressé ces dernières années. D’après le baromètre du surendettement de décembre 2006, plus de 850 000 dossiers ont été déposés à la Banque de France entre janvier 2002 et décembre 2006. Le nombre de dossiers déposés dans les commissions départementales de surendettement poursuit une croissance annuelle de 6,5 %.

Afin de faire face à l'attente des Français qui souhaitent disposer de plus de revenus du travail afin de consommer ou d'investir davantage et qui veulent s'endetter avec mesure, le Gouvernement et la majorité parlementaire ont fait de la hausse du pouvoir d’achat la priorité de leur action, conformément aux engagements présidentiels. Cette action repose sur deux axes d’intervention :

– « donner du pouvoir d'achat aux Français » par une politique de revalorisation du travail, qui s’est concrétisée notamment, dans le cadre de la loi du 23 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, par l’adoption de l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, de l’allègement des droits de succession et de donation, de l’exonération des rémunérations versées aux étudiants qui travaillent pour financer leurs études, de la mise en place du revenu de solidarité active et de la revalorisation de la prime pour l’emploi ;

– « rendre du pouvoir d'achat aux Français » par une politique consistant à comprimer les charges pesant sur les ménages. Cette action vise à lutter contre la hausse des prix, en faisant jouer la concurrence au service du consommateur : tel est l’objet du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, en cours d’examen parlementaire. Elle se traduit aussi par une politique active du logement en faveur des accédants à la propriété (déduction des intérêts d’emprunt) et des locataires (revalorisation des aides au logement, mise en place d’une garantie universelle contre les risques locatifs). Enfin, plusieurs mesures ont été adoptées pour répondre à la hausse des prix du carburant : doublement de l’aide à la cuve, renforcement de la mise en concurrence entre les distributeurs, mise en place d’une « écopastille » pour inciter les Français à choisir des véhicules « propres ».

Le présent projet de loi prolonge et complète cet ensemble de mesures en proposant :

– de permettre aux salariés de convertir en rémunération un certain nombre de droits à congés acquis avant le 31 décembre 2007 (article 1er) ;

– d’offrir la faculté aux salariés qui le souhaitent de débloquer de manière anticipée, entre le 1er janvier et le 30 juin 2008, les sommes qui leur ont été attribuées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise (article 2) ;

– de permettre aux entreprises de moins de 50 salariés de verser une prime exceptionnelle de 1000 euros, exonérée de cotisations sociales (article 3) ;

– d’indexer l’indice de référence des loyers sur l’évolution des prix à la consommation (article 4) ;

– de réduire pour les locataires le délai de garantie à un mois de loyer (article 5).

L’action menée en faveur du pouvoir d’achat ne s’arrêtera évidemment pas avec l’adoption du présent projet de loi.

Le Président de la République et le Gouvernement ont ainsi annoncé une nouvelle série de mesures :

– les entreprises pourront ainsi déroger aux accords de branche sur les 35 heures, à condition d’octroyer des augmentations de salaire et sous réserve d’accord majoritaire,

– le travail le dimanche sera développé, sur la base du volontariat et à condition que la rémunération des salariés soit doublée,

– un indice du pouvoir d’achat correspondant à la vie quotidienne des Français sera créé,

– le projet de loi relatif à la réforme du service public de l’emploi devrait permettre de renforcer la qualité du service rendu aux demandeurs d’emploi et aux entreprises,

– un projet de loi de modernisation de l’économie sera déposé et examiné au printemps 2008,

– et un projet de loi sur le logement devrait proposer la suppression de la caution et la mise en place d’un dispositif unique d’investissement locatif pour développer le parc locatif intermédiaire.

Par ailleurs, nous pilotons, avec Frédéric Lefebvre, un groupe de travail sur le pouvoir d’achat. Celui-ci a pour objectif d’identifier et de promouvoir des dispositions permettant de renforcer le pouvoir d’achat des Français soit en leur donnant du pouvoir d’achat supplémentaire, soit en le leur rendant par une action volontariste sur les charges fixes ou incontournables qui pèsent sur le revenu des ménages. Cette démarche s’est ainsi traduite notamment :

– par l’adoption d’un amendement à la proposition de loi relative aux tarifs réglementés d’électricité et de gaz naturel instaurant une réversibilité totale pour la consommation d’électricité des ménages ;

– par l’adoption d’un amendement soumettant les sociétés pétrolières à une taxe exceptionnelle sur leur provision pour hausse des prix, afin d’abonder un fonds social pour le chauffage des ménages ;

– et par le lancement d'un débat autour d'une prime de résultats, obligatoire, performantielle et annuelle, assise sur les bénéfices dans le secteur privé et sur la performance individuelle dans le secteur public, à l'image de la démarche mise en place dès 2003 pour les fonctionnaires du Ministère de l'Intérieur par le Ministre de l'époque.

Notons aussi la proposition de loi déposée par Gilles Carrez et Pierre Méhaignerie sur l’organisation du temps de travail dans l’entreprise et le pouvoir d’achat.

Les travaux du groupe de travail se sont également concrétisés par deux amendements au présent projet de loi pour le pouvoir d’achat, visant à étendre le remboursement du dépôt de garantie par le locataire – au propriétaire ou à un organisme – sur la durée du bail et à étendre la période de référence durant laquelle les droits à congé pourraient être monétisés.

L’ensemble de ces mesures, prises ou à prendre, sont majeures pour rendre et donner du pouvoir d’achat aux Français. Mais, plus encore, la hausse du pouvoir d’achat sera renforcée lorsque la politique actuellement engagée permettra d’augmenter le taux de croissance de l’économie, véritable gage d’une augmentation durable du pouvoir d’achat. C’est l’objectif principal de la majorité présidentielle en matière économique.

I.– LE POUVOIR D’ACHAT EST DEVENU LA PREMIÈRE PRÉOCCUPATION DES FRANÇAIS

Le pouvoir d’achat est devenu aujourd’hui la première préoccupation des Français. Cette réalité n’est cependant que partiellement prise en compte par les statistiques macro-économiques.

Cette situation résulte de plusieurs facteurs : hausse du prix de certains biens de consommation courante, évolution modérée des salaires de 2000 à 2005, augmentation de certains postes de dépense des ménages, comme le logement et l’essence. Certaines caractéristiques de l’économie française pèsent aussi sur le pouvoir d’achat : coût du travail élevé, prélèvements obligatoires importants, dégradation constante du déficit commercial, insuffisance des taux de marge des entreprises … Ces facteurs limitent la croissance française et restreignent, par conséquent, les « fruits de la croissance » susceptibles d’être redistribués.

A.– LE POUVOIR D’ACHAT : VALEUR OBJECTIVE ET SUBJECTIVE

L’appréciation du pouvoir d’achat est à la fois subjective et objective : subjective à la lecture des enquêtes d’opinion réalisées, objective à travers les études statistiques effectuées.

Ainsi, les différents sondages réalisés récemment montrent que le pouvoir d'achat est devenu une réelle préoccupation de nos concitoyens. « Lutter contre la hausse des prix » et « Augmenter le pouvoir d'achat »sont devenues des priorités et les ménages français ont le sentiment que les pouvoirs publics ne peuvent rien faire pour juguler la dégradation de ce dernier.

En réalité, l’approche purement statistique montre une augmentation du pouvoir d'achat en valeur réelle. Cependant, cette approche ne reflète qu’une réalité partielle, compte tenu des modifications importantes des modes de consommation des Français. Cette évolution rapide a d’ailleurs conduit la commission des Finances à s’interroger sur la pertinence des indicateurs macro-économiques, et plus particulièrement de celle de l’indice des prix à la consommation. En tout état de cause, l’analyse des comportements de consommation en permanente évolution ne peut être réduite à une série d’affirmations tranchées et définitives. Cette première partie apportera des données brutes et une analyse sur le sentiment des Français face à leur pouvoir d’achat ainsi qu’une approche statistique, fondée sur des données qui constituent à ce jour les seules références.

1.– Le pouvoir d’achat est un problème pour une part croissante des Français

Depuis avril 2004, le nombre de personnes préoccupées par le pouvoir d’achat a progressé de plus de 70 % : en octobre dernier, 48 % des personnes interrogées étaient préoccupées par leur pouvoir d’achat, contre 28 % en avril 2004. Avec l’environnement, il s’agit de la plus forte progression parmi les préoccupations des Français.

LES PRÉOCCUPATIONS DES FRANÇAIS EN OCTOBRE 2007


Source : étude TNS-Sofres/L’hémicycle réalisée les 24 et 25 octobre 2007

Un sondage TNS-Sofres, publié en octobre dernier, montre que 18 % des Français considèrent que la lutte contre la hausse des prix doit être, à l’heure actuelle, la priorité du Gouvernement et 16 % jugent que celle-ci doit être le maintien du pouvoir d’achat.

LES PRIORITÉS DES FRANÇAIS

 

Rappel Octobre 2007

Novembre 2007

Lutter contre la hausse des prix

24

28

Lutter contre le chômage

36

34

Lutter contre la violence et la criminalité

15

13

Maintenir le pouvoir d’achat

16

16

Maintenir la paix sociale

8

8

Sans opinion

1

1

 

100 %

100 %

Source : étude TNS-Sofres le Figaro-Magazine réalisée les 24 et 25 octobre 2007

Brice Teinturier, directeur du département Stratégies d’opinion de la SOFRES constate (1) : « Le grand fléau de la société française de ces trente dernières années fut la montée inexorable d’un chômage de masse durablement installé. À l’exception d’une très courte période (décembre 2000-mai 2002) durant laquelle la sécurité supplanta l’emploi – ce qui pesa d’ailleurs lourdement dans la défaite de Lionel Jospin –, l’emploi n’a donc cessé d’être la première préoccupation des Français. Or nous vivons une véritable révolution d’opinion puisque l’angoisse du pouvoir d’achat est en passe de supplanter celle du chômage. Début 2004, « l’évolution du pouvoir d’achat » est ainsi une préoccupation citée par 28 % des Français, ce qui la met 43 points derrière l’emploi (71 % de citations) et loin derrière la santé, les retraites, le financement de l’assurance maladie, les inégalités sociales, l’école et l’enseignement, et au même niveau que l’environnement. Quelque quarante mois plus tard, « l’évolution du pouvoir d’achat » talonne l’emploi : en progression de 20 points, elle est citée par 48 % des Français, soit un écart avec l’emploi de seulement 17 points. Si l’on prend en compte un autre indicateur, qui cumule les notions de « maintien du pouvoir d’achat » et de « lutte contre la hausse des prix », ces deux préoccupations atteignent même un niveau égal à l’enjeu de la lutte contre le chômage. II faut d’ailleurs remonter à 1981 pour retrouver une inquiétude aussi forte à l’égard de la hausse des prix […].»

Cette évolution apparaît clairement dans le graphique suivant :


Cette préoccupation nouvelle provient d’un sentiment largement partagé d’une baisse du pouvoir d’achat au cours des douze derniers mois, comme en témoigne le tableau suivant :

LA PERCEPTION DES FRANÇAIS À L’ÉGARD
DE L’ÉVOLUTION DU POUVOIR D’ACHAT

 

Ensemble des Français 2007 (%)

beaucoup augmenté

10

un peu augmenté

7

Total augmenté

17

est resté stable

18

un peu diminué

34

beaucoup diminué

31

Total diminué

65

Total

100

Source : étude IFOP Dimanche Ouest France « les Français et l’évolution de leur pouvoir d’achat » réalisée en novembre 2007

Selon une étude de l’IFOP (2) réalisée en novembre 2007, « les Français affirment observer une baisse de leur pouvoir d’achat depuis un an. Près de deux tiers des Français dénotent une baisse de leur pouvoir d’achat au cours des douze derniers mois (65 %), soit une hausse de 6 points depuis janvier 2007. Moins d’un Français sur cinq (18 %) estime que le pouvoir d’achat est resté stable, contre un quart de la population (2 %) en janvier.

La dégradation du pouvoir d’achat est ainsi ressentie par une proportion croissante de la population. Pourtant, 17 % des Français, soit un nombre équivalent à celui enregistré au début de l’année, observent toujours une augmentation de leur pouvoir d’achat.

Les personnes âgées de 50 à 64 ans (75 %) témoignent d’une forte diminution de leur pouvoir d’achat à l’inverse des moins de 35 ans (55 %).

A contrario, les femmes (21 % contre 14 % des hommes), les habitants de l’agglomération parisienne (21 % contre 16 % pour les ruraux) et surtout les ouvriers (28 %) observent davantage une progression de leur pouvoir d’achat […] »

2.– La raison profonde de cette préoccupation tient à des éléments que ne saisit pas l’indice des prix à la consommation

L’indicateur de pouvoir d’achat des salaires de l’INSEE ne fait pas apparaître de changement dans la tendance depuis le début des années 1980. En revanche, une rupture entre l’évolution du SMIC et celle du salaire moyen apparaît à partir de 1999-2000.

ÉVOLUTION COMPARÉE DU POUVOIR D’ACHAT DES SALAIRES MOYEN ET MINIMUM

Base 100 = 1999

Source : INSEE.

Ce graphique montre que la moyenne du pouvoir d’achat a continué à progresser de la même façon qu’avant, mais que ce pouvoir d’achat a été « capté » par les salariés au SMIC, du fait des fortes évolutions du salaire minimum – l’existence d’exonérations ayant permis de modérer l’effet de ces hausses sur l’emploi des salariés au SMIC, qui se sont de fait reportées sur le pouvoir d’achat des salariés rémunérés au-delà du SMIC.

Par ailleurs, la « perception du pouvoir d’achat » par les Français diffère de celle mesurée par la statistique, ce qui s’explique par plusieurs éléments :

– dans l’indice des prix à la consommation (IPC), l’innovation (par exemple, le remplacement des écrans cathodiques des téléviseurs par des écrans plats) exerce une tendance à la baisse dans la mesure où les innovations technologiques sont considérées comme de la croissance économique ; elles ne sont donc pas prises en compte dans l’augmentation des prix. Au contraire, pour le consommateur qui souhaite acheter un écran plat pour consommer « autant que les autres » ou conformément à la norme sociale, cela peut se traduire par une dépense supplémentaire. Il en va de même pour les équipements automobiles ; ainsi, la fourniture systématique d’airbags pour quelques euros de plus se traduit par une baisse du coût des équipements toutes choses égales par ailleurs, mais par une hausse du prix total de la voiture ;

– de plus en plus de services (téléphonie, internet, les chaînes télévisées payantes) sont payés par abonnements, souvent prélevés à la source, ce qui réduit la part du budget des ménages disponible pour des achats « spontanés » ou pour l’épargne. L’INSEE ne prend pas en compte ce phénomène ;

– la hausse des prix de l’immobilier n’est pas prise en compte, car l’acquisition de logement est considérée comme un investissement et non comme une consommation. Elle enrichit les propriétaires, mais pèse fortement sur le pouvoir d’achat des primo-accédants ;

– il est possible que la montée des craintes sur les retraites se soit accompagnée d’une hausse de l’épargne « forcée » et donc d’une réduction du revenu disponible pour autre chose.

Enfin, il est possible qu’interviennent des effets plus subjectifs (par exemple le fait que les hausses soient plus remarquées que les baisses). Quoi qu’il en soit, l’indice des prix à la consommation est une donnée globale qui peut être éloignée des situations individuelles, par définition très variables.

B.– LE POUVOIR D’ACHAT DES FRANÇAIS DIMINUE-T-IL VRAIMENT ?

L’augmentation des prix n’est pas forcément préjudiciable au pouvoir d’achat. En effet, ce qu’on appelle « stabilité des prix » décrit en réalité une situation où la hausse des prix est durablement très faible. Seule l’inflation, c’est-à-dire la « hausse généralisée et durable du niveau général des prix » porte atteinte au pouvoir d’achat des ménages, lorsque l’augmentation des revenus (notamment des salaires) connaît une progression plus faible que celle des prix.

Par ailleurs, il convient de prendre en compte l’évolution d’un « panier » –– le fameux panier de la ménagère – pondéré de biens représentatifs de l’ensemble des biens consommés. À titre d’exemple, une augmentation de 30 % du prix du pain ne conduit pas nécessairement à une perte de pouvoir d’achat, si par exemple, dans le même temps, le prix du lait et celui du shampoing baissent.

Cependant la hausse du prix des biens de consommation courante et les modifications des pratiques de consommation des Français conduisent à un sentiment largement partagé de hausse du coût de la vie.

1.– Le passage à l’euro a conduit à un renchérissement du coût de la vie

Le lien entre passage à l’euro et la cherté du coût de la vie n’est pas qu’un constat de « café du commerce ». Une augmentation générale des prix a bien eu lieu à travers les prix symboliques. 5, 10 et 50 Francs ont ainsi été substitués par 1, 2 et 10 euros, ce qui correspond à une augmentation du prix symbolique de 20 à 30 %. À titre d’exemple, le prix du « petit noir » prix au comptoir est passé en 2002 de 5,50 francs à 1 euro, soit 18 % d’augmentation nette. Cependant, les arrondis du passage à l’euro n’ont pas toujours joué en défaveur du pouvoir d’achat : les produits qui valaient 100 francs et qui ont vu leurs prix arrondis à 15 euros au lieu de 15,24 euros et ont fait bénéficier le consommateur d’une parité légèrement avantageuse. Le phénomène a aussi pu jouer inversement, notamment pour les produits de consommation courante dont le prix était inférieur à 6,55 francs.

Lors du passage à l’euro, compte tenu de craintes sur la reprise de l’inflation, il a été décidé de bloquer les prix pour une durée de six mois. Les industriels ont alors, dès fin 2001, anticipé ce blocage des prix en les augmentant, puis au terme de cette période transitoire de blocage, ont répercuté la hausse pour en quelque sorte rattraper le manque à gagner. Entre 2001 et 2003, il y a donc eu indéniablement une forte augmentation des prix, imputable au passage à l’euro. En revanche, comme le montre le graphique ci-dessous, l’accélération de la mondialisation et des conditions de la concurrence ont amorti cette augmentation. À partir de 2006, cet « effet euro » sur le niveau des prix s’est atténué pour devenir quasiment nul.

Cependant en 2006, cet « effet euro » sur le niveau des prix s’est atténué pour devenir quasiment nul.

2.– Le prix des biens de consommation courante a augmenté

Il n’en reste pas moins que, depuis 2003, le prix des denrées de consommation courante, en particulier alimentaires, a augmenté plus vite que le coût moyen de la vie.

Ce phénomène est notamment dû à l’augmentation du coût de certaines matières premières agricoles : celle-ci est variable en fonction des périodes et des secteurs. Elle a concerné en particulier les fruits et légumes en 2005 et 2006 et le blé (3) en 2006 et 2007.

Le Nouvel Observateur, dans une enquête parue le 13 décembre dernier (4), constate une hausse moyenne des prix de 11,5 % entre janvier 2004 et novembre 2007 sur ce qu’il qualifie de « super chariot » composé de produits de grandes marques :

EXEMPLE DE LA HAUSSE DU PRIX DE CERTAINS PRODUITS DE CONSOMMATION ENTRE JANVIER 2004 ET NOVEMBRE 2007

Produit

Augmentation du prix

Pâtes alphabet Panzani

+ 32,8 %

Cracottes au froment Lu

+ 35 %

Thon au naturel Saupiquet

+ 23,9 %

Eau minérale Salvetat

+ 23,2 %

Source : Le Nouvel Observateur

De même, de novembre 2006 à novembre 2007, les produits laitiers ont connu une hausse de 2,1 %, tandis que les produits d’entretien ont augmenté de 3,5 % (5). Néanmoins, une observation juste de l’évolution des prix mérite un rapprochement entre les plus fortes hausses et les plus fortes baisses des prix, ce qui est l’objet du tableau figurant ci-après.

LES PLUS FORTES HAUSSES ET BAISSES DE PRIX

Plus fortes hausses de prix

Combustibles liquides (dont fioul domestique)

+ 9,7 %

Carburants et lubrifiants

+ 8,2 %

Fruits

+6,3 %

Eau chaude

+5,4 %

Légumes

+4,8 %

Plus fortes baisses de prix

Équipement photo et cinéma

– 171 %

Micro-ordinateurs

– 13,9 %

Gros appareils d’électro-ménagers

– 2,4 %

Jeux et jouets

– 1,5 %

Médicaments et produits pharmaceutiques

– 1,3 %

On observe ainsi qu’il ne s’agit pas d’une hausse générale des prix, mais bien d’un phénomène portant sur les matières premières du fait du développement des pays émergents dont la consommation augmente régulièrement et significativement depuis 3 ans. Comme le montre le graphique suivant, fin novembre 2007, l’inflation française est au plus haut depuis trois ans, suivant en cela la tendance observée dans la plupart des pays occidentaux à développement comparable. L’indice des prix à la consommation INSEE a donc progressé d’un demi-point en novembre, soutenu par le pétrole et l’alimentation.

Source :INSEE

Qu’est ce que l’inflation ?

Selon la définition donnée par l’INSEE, l’inflation est la perte du pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix. La perte de valeur des unités de monnaie est un phénomène qui frappe l’économie nationale dans son ensemble, sans discrimination entre les catégories d’agents.

Comme mesure-t-on l’inflation ?

La plupart du temps, pour évaluer le taux d’inflation, on utilise l’indice des prix à la consommation. Cette mesure n’est pas toujours exacte car les variations de l’indice des prix ne sont pas toutes d’origine inflationniste.

L’inflation est-elle de retour ?

L’indice des prix à la consommation a progressé d’un demi-point en novembre, portant l’inflation à 2,4 % sur un an. Pendant la même période, à titre de comparaison, elle a atteint 3 % en Allemagne, niveau jamais atteint depuis treize mois. La Banque centrale européenne a relevé ses prévisions annuelles d’inflation dans la zone euro à 2,1 % en 2007 et 2,5 % en 2008. On assiste donc à une accélération du phénomène d’inflation.

Quelles sont les raisons de cette reprise de l’inflation?

Quatre causes peuvent être identifiées :

– la hausse des prix : après le deuxième choc pétrolier, les pays industrialisés ont connu deux décennies au cours desquelles la hausse des prix a été modérée. Certains économistes ont même pu parler de « déflation ». Ce n’est plus le cas depuis quelques mois ;

– le moindre impact de la globalisation : l’évolution des données économiques (productivité, taux de change...) a pour conséquence d’atténuer les effets déflationnistes provoqués mécaniquement par la globalisation ;

– le rôle des pays émergents : la forte demande des pays émergents, et en particulier de la Chine, contribue directement à la hausse des matières premières ;

– les causes spécifiques de l’inflation : chaque pays a ses propres sources d’inflation. En France, dans le secteur des services, l’insuffisante ouverture à la concurrence et le maintien des professions réglementées contribuent à la hausse des prix.

Source : Le Monde

ÉVOLUTION DU POUVOIR D’ACHAT DES MÉNAGES DEPUIS 1960

3.– Les besoins de consommation des ménages ont changé, rendant caduque la pertinence des indices de mesure du pouvoir d’achat

Le mode de vie des Français a changé : c’est aussi le cas par conséquent, de l’allocation de leurs dépenses. En 1960, l’alimentation représentait 26 % du budget d’un ménage, les transports, le logement et l’habillement de 11 à 12 % chacun. En 2005, l’alimentation ne représente plus que 14 % et l’habillement 5 % du budget. En revanche, les transports en représentent 15 % et le logement 25 % (6).

Les chiffres plaident pour un pouvoir d’achat quasiment identique, pourtant le sentiment persistant du renchérissement de la vie devrait conduire à reconsidérer la définition des besoins de consommation des ménages.

Les besoins dits « incontournables », ou dépenses contraintes, ont récemment vu leur nombre se multiplier: téléphone portable, connexions Internet, télévision par satellite, baladeurs, lecteurs de DVD, etc.

Il faut ainsi prendre en compte dans le budget d’un ménage français : un portable et le plus souvent plusieurs par famille (un forfait mensuel représente autour de 40 euros), une connexion Internet (un abonnement s’élève à 30 euros par mois) et un abonnement de télévision par satellite (qui représente environ 35 euros par mois). Il faut aussi compter l’investissement initial, qui doit être renouvelé régulièrement : ordinateur (de 600 à 1 000 euros), téléphone portable (de 0 à 200 euros), MP3 (300 euros), téléviseur (de 300 à 1 000 euros), etc.

DIFFUSION DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DANS LA POPULATION FRANÇAISE :
TAUX D’ÉQUIPEMENT

(en %)

Source : CRÉDOC (micro-ordinateur, téléphone mobile, Internet), GfK (platine DVD, appareil photo numérique, caméscope numérique).

Le budget destiné à satisfaire les besoins « de base » traditionnels, tels que la nourriture ou encore le logement, est donc plus limité.

C’est pour cette raison que la crispation n’a jamais été aussi grande sur les biens de consommation courante, et que toute augmentation de ces produits est fortement ressentie. Les Français se sentent d’autant plus lésés que l’indice de l’INSEE des prix à la consommation reflète mal leur quotidien.

LE POIDS DES PRODUITS DANS LE CALCUL DE L’INFLATION

Produit

Poids du produit dans le calcul de l’inflation

Produits alimentaires et boissons non alcoolisées

15

Boissons alcoolisées et tabacs

3,3

Habillement et chaussures

5,2

Logement, eau, gaz, électricité et autres combustibles

13,7

Ameublement, équipement ménager et entretien courant de la maison

6

Santé

10

Communications

16,5

Loisirs et cultures

3

Éducation

9,1

Hôtellerie, cafés et restauration

6,6

Autres biens et services

11,4

Source : INSEE

4.– Un prix bas est-il toujours un prix « juste » ?

Des débats récurrents concernent les marges réalisées par les grandes chaînes de distribution, dont sont victimes les fournisseurs, la plupart étant trop peu rémunérés sauf s’ils bénéficient d’une position de marque « leader » (coca-cola,…), tandis que le consommateur paie trop cher les articles proposés en rayon. De plus, le passage inflationniste à l’euro a fini d’installer un véritable doute autour du prix et de son rapport avec le bien vendu.

Cependant le « juste prix » (« fair value » en anglais) est une notion théorique et virtuelle, plus proche de la valeur - c’est-à-dire d’une estimation, qui introduit donc une part de subjectivité - que du prix – qui est fixé par le marché et reflet de l’équilibre entre l’offre et la demande. Or dans une économie de marché, cette estimation du coût, de l’utilité, de la rareté d’un produit afin de fixer un juste prix n’est pas de la compétence de l’État. Son rôle est de garantir les conditions d’une concurrence pure et parfaite, moteur de l’activité économique. Sans entrave, cette concurrence devrait permettre d’atteindre un prix « juste ».

Depuis 1986, est posé le principe de la liberté des prix, « déterminés par le jeu de la concurrence » (articles L. 113-1 et L. 410-2 alinéa 1 du code de la consommation). L’État ne peut donc intervenir qu’en cas d’absence ou d’insuffisance de la concurrence, caractérisée par une situation de monopole, par des difficultés durables d’approvisionnement, soit encore dans le cas de dispositions particulières fixées par la loi ou par décret (professions réglementées comme les taxis ou les pharmacies, industrie du livre).

Chaque professionnel fixe donc lui-même le niveau des prix qu’il pratique. D’ailleurs, juridiquement, l’exagération du prix n’est pas en elle-même constitutive d’une tromperie ou d’un délit de fraude (7). Dans un marché concurrentiel, l’exagération du prix sera sanctionnée par le marché.

Quant aux « prix bas », à l’inverse des prix élevés, ils peuvent être considérés comme « abusivement bas », précisément parce qu’ils peuvent entraîner des effets négatifs sur la concurrence. Là où des prix excessivement élevés dissuadent le consommateur de s’approvisionner auprès d’un fournisseur qui sera forcé de les réviser à la baisse pour ne pas faire fuir ses clients, un prix anormalement bas peut, paradoxalement, s’avérer potentiellement préjudiciable au public.

Les « prix cassés » peuvent avoir pour effet, voire pour objet, d’éliminer les concurrents du marché, et une fois ceux-ci éliminés de pratiquer des tarifs très élevés. Ils peuvent également déstructurer le marché, en obligeant les producteurs nationaux à délocaliser leurs activités ou à disparaître au profit de producteurs étrangers qui versent de bas salaires.

5.– Le développement des pratiques « hard discount » a accentué la défiance du consommateur envers les prix

La perte de repères sur la vérité des prix a été largement induite par les nouvelles pratiques commerciales. Low cost, offres à très bas prix des magasins discount, promotions de surconsommations voire gratuité de certains produits financés par la publicité, ont brouillé les pistes du « prix juste ».

Depuis 1992, les enseignes « hard discount » du secteur de l’alimentaire (Lidl, Leader Price, Ed, Aldi, Netto, Le Mutant) n’ont cessé de gagner du terrain sur les enseignes traditionnelles, pour atteindre près de 14 % de parts de marché aujourd’hui. 70 % des Français ont déjà fait leurs courses dans une enseigne discount.

PARTS DE MARCHÉ DES FORMES DE DISTRIBUTION (1)

(1) Produits grande consommation et produits frais

Le caractère le plus déstabilisant du discount est d’avoir plébiscité la culture de « l’achat malin » qui brouille les référentiels des consommateurs. C’est l’appréhension du prix comme reflet des coûts qui se trouve malmenée.

Le consommateur cherche des prix bas pour ses biens de consommation courante, non seulement parce qu’il cherche le prix le plus compétitif pour les produits de consommation courante afin de s’autoriser des achats à prix élevés pour des biens de consommation non courante et ses loisirs, mais surtout parce qu’il y a une dilution de la notion de rapport qualité/prix.

Les écarts de prix entre les grandes marques, les marques des distributeurs ou les marques discount ne sont plus perçus comme reflétant une différence de qualité. Ce sont les prix les plus bas qui deviennent la référence et font office de « prix juste ». Le prix moyen (au sens de « normal ») devient alors comparativement élevé. Paradoxalement, le développement des prix bas alimente l’idée de la cherté de la vie, sans qu’un prix estimé juste par les consommateurs ne puisse être trouvé.

C.– QUELLE A ÉTÉ L’ÉVOLUTION DES REVENUS DES FRANÇAIS ?

1.– L’évolution des salaires

Selon le rapport de l’INSEE sur les salaires en France en 2007 (8), les salaires du secteur privé ont augmenté en moyenne de 0,5 % par an en euros constants pour les postes à temps complet sur la période 2000-2005.

Plusieurs facteurs ont pesé sur les salaires pendant cette période. L’INSEE constate : « durant ces cinq années, la croissance annuelle moyenne du PIB s’est élevée à 1,6 % avec un creux en 2002-2003 et une croissance un peu plus marquée à partir de 2004 (…). En tout début de période, l’impact de la croissance sur les salaires a été atténué par la modération salariale qui a accompagné, dans le privé, la mise en œuvre des 35 heures. Puis la reprise du chômage amorcée en 2001 a pesé sur les salaires : un taux de chômage élevé et orienté à la hausse est défavorable aux salariés lors des négociations de revalorisations salariales. Ce n’est qu’en 2005, avec l’amorçage en fin du premier semestre de la baisse du chômage, que l’amélioration du marché du travail a engendré pour les salariés une évolution positive de leurs salaires en euros constants. »

En revanche, le SMIC a augmenté sur toute la période, et plus vite que le salaire moyen : on constate un écart de 1,8 point par an en moyenne. L’écart est particulièrement marqué de 2003 à 2005 du fait du système de revalorisation des salaires minimaux prévu par la loi « Fillon » (9). Du 1er juillet 2002 au 1er juillet 2005, le SMIC horaire a ainsi été revalorisé, en moyenne annuelle, de 5,4 %. De ce fait, la proportion de salariés rémunérés au SMIC dans le secteur marchand est passée de 13,6 % en 2000 à 16,1 % en 2005. En 2006, avec la fin de ce dispositif et une hausse plus modeste du SMIC (+ 3,05 %), cette proportion a reculé à 15,1 %.

POUVOIR D'ACHAT DU SALAIRE MOYEN ET DU SALAIRE MINIMUM ANNUELS NETS (1)

(indices (Base 100 en 1951) en euros constants)

 

Salaire minimum net

Salaire moyen net

1994

293

329

1995

296

336

1996

296

334

1997

302

337

1998

311

340

1999

314

346

2000

315

347

2001

322

349

2002

326

352

2003

331

351

2004

342

352

(1) Champ : salariés du secteur privé et semi-public (y compris les apprentis et stagiaires).

Source : INSEE

Le graphique suivant montre le caractère modéré de la progression du pouvoir d’achat du salaire moyen et du salaire minimum annuels nets de 1998 à 2004 :

Pour prendre en compte les phénomènes de travail à temps partiel, l’INSEE retient, comme indice de progression des salaires, le « revenu salarial » effectivement perçu par un individu donné : il s’agit du total des salaires qu’il a perçu dans l’année chez un ou plusieurs employeurs. Ainsi défini, le revenu salarial moyen peut se décomposer comme le produit de trois facteurs : le salaire horaire moyen, la durée hebdomadaire et le nombre moyen de semaines travaillées chaque année. En 2005, il s’élève à 16 800 euros pour l’ensemble des salariés et à 16 100 euros pour les seuls salariés du privé, soit 29 % de moins que le salaire annuel moyen d’un poste à temps complet du secteur privé.

De 2000 à 2005, le revenu salarial est resté relativement stable. Il a baissé de 0,5 % en euros constants sur l’ensemble de la période pour l’ensemble du salariat et de 0,2 % pour le seul secteur privé. Cela résulte, dans le secteur privé, d’une augmentation sensible du taux de salaire horaire et d’une baisse concomitante de l’horaire hebdomadaire, du fait de la mise en œuvre de la réduction du temps de travail.

L’INSEE note, en revanche, une reprise de la hausse du salaire moyen en 2006 : celui-ci progresse en euros courants au même rythme que l’année précédente (+ 2,8 %) dans les entreprises du secteur privé de plus de 10 salariés. En termes réels, la hausse du salaire mensuel de base est de 1,2 % en euros constants en 2006 alors qu’elle a été de 0,9 % en 2005. Comme en 2005, cette hausse est plus marquée en 2006 pour les ouvriers (respectivement + 1,4 % en euros constants) et pour les employés (+ 1,3 % en euros constants) que pour les professions intermédiaires et les cadres (respectivement + 1,0 % et + 0,9 %), du fait notamment des hausses du SMIC survenues ces deux années.

Ces résultats ne prennent pas en compte l’évolution de la structure de l’emploi (hausse des qualifications, modification de la part des personnes travaillant à temps partiel, effet des « entrées-sorties ») et des compléments de rémunération (primes, heures supplémentaires, épargne salariale). En tenant compte de ces éléments, le salaire moyen par tête du secteur concurrentiel non agricole a progressé en euros constants de 1,8 % en moyenne sur 2006. En 2005, sa progression a été de 1 % en euros constants.

Ce rebond salarial résulte de plusieurs facteurs. L’embellie du marché du travail a créé un climat plus favorable aux salariés lors des négociations salariales. De plus, la croissance économique plus robuste sur l’année 2006 a pu tirer les salaires à la hausse. C’est particulièrement le cas dans le secteur des activités financières. À cela s’ajoute l’impact de la hausse du SMIC qui, bien que plus faible que celle survenue en 2005 (+ 3,0 % contre + 5,5 %), a bénéficié malgré tout d’un léger « coup de pouce ».

En conclusion, votre Rapporteur constate que si les salaires du secteur privé ont connu une augmentation plus forte en 2006, leur progression a été très limitée de 2000 à 2005, en raison notamment de la politique de la réduction du temps de travail. Cette faible hausse des salaires ces dernières années explique le sentiment, très largement partagé, de baisse de pouvoir d’achat.

Source INSEE/Le monde

Selon l’INSEE (Les salaires en France, 2007), au cours de la période 2000-2005, les salaires du secteur privé ont augmenté en moyenne de 0,5 % par an en euros constants pour les postes à temps complet.

2.– L’évolution des traitements des fonctionnaires

Les dépenses de personnel dans le budget de l’État représentent 118,6 milliards d’euros en 2007. Les rémunérations d’activité s’élèvent à 74,2 milliards d’euros (63 %), les cotisations et contributions sociales représentent 43,1 milliards d’euros (36 %) et les prestations sociales et allocations diverses s’élèvent à 1,3 milliard d’euros (1 %).

La proportion des dépenses de personnel au sein du budget de l’État a crû ces dernières années : ainsi, entre 1991 et 2006, leur part est passée de 45 % à 51 % du budget de l’État.

ÉLÉMENTS DE DEFINITION DE LA REMUNERATION DU FONCTIONNAIRE

Au terme de l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983, la rémunération brute du fonctionnaire comprend :

1) Le traitement indiciaire brut qui est le résultat d’une multiplication entre l’indice majoré afférent à l’échelon, le grade, et le corps ou emploi du fonctionnaire, exprimé en nombre de points, et la valeur du point fonction publique ;

2) Les éléments de rémunération annexes au traitement indiciaire brut incluant l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les primes et les indemnités.

Le salaire net s’obtient en retranchant de la rémunération brute les cotisations « salariées » : les retenues pour pension, la contribution de solidarité, la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), la retraite additionnelle.

LE POINT FONCTION PUBLIQUE

La valeur du point fonction publique est égale au 1/100e de la valeur de l’indice 100 qui est publiée par décret lors de chaque revalorisation. Elle permet de déterminer la valeur du traitement indiciaire brut des fonctionnaires (traitement indiciaire brut annuel = valeur du point x indice majoré). Depuis le 1er février 2007, la valeur du point est fixée à 54,4113 €.

Parmi les facteurs de progression des rémunérations des fonctionnaires, se trouvent les mesures portant sur la valeur du point qui concernent tout ou partie des agents.

ex : revalorisation du point fonction publique (0,8 % en février 2007) ou attribution de points d’indice majorés sur tout ou partie de la grille indiciaire (attribution uniforme d’un point d’indice majoré au 1er novembre 2006).

Une hausse de 1 % de la valeur du point fonction publique représente une dépense de :

– 850 millions d’euros pour l'État en 2006 (dont 820 millions d’euros au titre des rémunérations et environ 30 millions d’euros au titre de certaines dépenses indexées telles que les pensions des anciens combattants)

– 450 millions d’euros pour la fonction publique territoriale

– 360 millions d’euros pour la fonction publique hospitalière

Soit au total environ 1,66 milliard d’euros pour les trois fonctions publiques.

Source : Ministère du budget des comptes publics et de la fonction publique

TRAITEMENTS INDICIAIRES DES TROIS FONCTIONS PUBLIQUES AU 01/09/2007

Niveau de traitement

Indice majoré

Traitement
mensuel brut

Traitement
mensuel net (1)

Minimum

283

1 283 €

1 083 €

Sommet de grille

820

3 723 €

3 107 €

Début hors échelle

HE A1

3 995 €

3 334 €

Sommet hors échelle

HE G

6 806 €

5 681 €

Source DGAFP

(1) cotisations déduites : retenue pour pension (7,85 %), CSG (7,5 %), CRDS (0,5 %) et contribution de solidarité pour IM>313

BILAN DES MESURES PORTANT SUR LA VALEUR DU POINT DE 1997 À 2007

Année

Date

Ampleur

Valeur du point d’indice (€)

Points uniformes

Observations

1997

1er mars

0,5%

49,4011

   

1er octobre

0,5%

49,6481

   

1998

1er avril

0,8%

50,0460

 

Années couvertes par l'accord salarial du 10 février 1998

1er juillet

 

 

1 à 2

Attribution de 2 points jusqu'à l'IM 316 et de 1 point jusqu'à l'IM 412 (1)

1er novembre

0,5%

50,2929

   

1999

1er avril

0,5%

50,5445

1

Attribution d'1 point uniforme

1er juillet

 

 

1 à 2

Attribution de 2 points jusqu'à l'IM 294 et 1 point jusqu'à l'IM 374 (1)

1er décembre

0,8 %

50,9469

1

Attribution d'1 point uniforme

2000

1er décembre

0,5 %

51,2015

   

2001

1er mai

0,5%

51,4576

1 à 5

Attribution de 5 points jusqu'à l'IM 254, 4 points jusqu'à l'IM 263, 3 points jusqu'à l'IM 275, 2 points jusqu'à l'IM 321, 1 point jusqu'à l'IM 350.

1er juillet

 

 

1 à 3

Attribution de 3 points jusqu'à l'IM 259, 2 points jusqu'à l'IM 261, 1 point jusqu'à l'IM 263.

1er novembre

0,7%

51,8174

   

2002

1er mars

0,6%

52,1284

   

1er décembre

0,7%

52,4933

   

2004

1er janvier

0,5%

52,7558

1 à 2

Attribution de points d’indice : 2 points à l’IM 261 et 1 point à l’IM 262

2005

1er février

1er juillet

1er novembre

0,5%

0,5%

0,8%

53,0196

53,2847

53,7110

1 à 12

Attribution de points d’indice : 12 points à l’IM 263, 11 points à l’IM 264, 10 points à l’IM 265, 9 points à l’IM 266, 8 points à l’IM 267, 7 points à l’IM 268, 6 points à l’IM 269,5 points à l’IM 270,4 points à l’IM 271, 3 points à l’IM 272, 2 points à l’IM 273 et 1 point à l’IM 274.

2006

1er juillet

1er novembre

0,5%

53,9795

1 à 4

1

Attribution de points d’indice : 4 points à l’IM 275, 3 points à l’IM 276, 2 points à l’IM 277, 1 point à l’IM 278

Attribution d'1 point uniforme

2007

1er février

1er juillet

0,8 %

54,4113

1 à 3

Attribution de points d’indice : 3 points à l’indice 280, 2 points à l’indice 281, 1 point à l’indice 282

Source : DGAFP. Extrait du rapport annuel sur l’état de la fonction publique 2006/2007

(1) Valeur des indices majorés à la signature de l’accord.

COÛT DES MESURES PORTANT SUR LA VALEUR DU POINT DEPUIS 1999

 
 

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Dépenses indexées sur le point (Hors pensions) (Mds €)

76

77

79

82

83

83

85

86

Variation annuelle du point

1,06 %

0,90 %

0,91 %

1,31 %

0,74 %

0,50 %

0,84 %

1,21 %

Coût de la variation du point (1) (M€)

1 090

944

984

1 484

852

416

715

1 040

(1) les seules variations du point sont prises en compte (hors attribution de points uniformes)

(2) les pensions ne sont plus indexées sur le point à partir de 2004

Source : Direction du budget

 

DÉPENSES DE PERSONNEL AU SEIN DU BUDGET DE L’ÉTAT

(en %)

 

1991

1996

2001

2006

Dépenses de personnel

36

37

38

38

Pensions

9

10

13

14

Reste du budget général hors charge de la dette

55

53

49

48

Entre 1998 et 2006, la valeur du point d’indice a augmenté en glissement de 6,43 %, soit 0,89 % en moyenne annuelle. Cependant, la progression du point d’indice ne reflète que partiellement l’évolution du traitement des fonctionnaires.

Au cours des années passées, le ministère de la fonction publique a mis en avant la « rémunération moyenne des personnes en place » (RMPP). Celle-ci calcule l’évolution de la feuille de paie des agents présents deux années consécutives. L’indicateur annihile donc l’effet structurel induit par les personnels entrants et sortants (10) . L’évolution de la RMPP brute entre 1990 et 2005 a été de 29,6 %, soit une augmentation de 3,77 % en moyenne annuelle sur la période. En comparaison, l’inflation (hors tabac) a été de 11,2 %, soit 1,53 % en moyenne annuelle. En 2005, la RMPP brute a augmenté de 2,9 % et la RMPP nette de 2,3 %.

ÉVOLUTION DES SALAIRES NETS ANNUELS MOYENS PAR SEXE DANS LA FONCTION PUBLIQUE D’ÉTAT

 

1982

1990

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Femmes

11 021

16 749

21 865

22 301

22 866

23 245

23 687

23 922

Hommes

13 545

19 997

25 383

25 899

26 678

27 078

27 488

27 744

Ensemble

12 175

18 189

23 375

23 838

24 486

24 866

25 290

25 525

Rapport des salaires Femmes /Hommes
(en %)

81,4

83,8

86,1

86,1

85,7

85,8

86,2

86,2

Salaires offerts* en euros courants

* Les salaires « offerts » sont évalués en année-travail et en équivalent temps plein.

Champ : agents titulaires et non titulaires des ministères civils de l’Etat, en poste en métropole. Y compris l’enseignement privé sous contrat.

Non compris les établissements publics ainsi que la Poste et France Télécom.

Source : INSEE, fichiers de paie des agents de l’État, définitifs de 1982 à 2004, semi définitif pour 2005

3.– L’évolution des pensions de retraites

En application de l’article 27 de la loi du 21 août 2003, qui a modifié l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale, les pensions servies par le régime général et les régimes alignés sont revalorisées chaque année par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale selon l’indice des prix à la consommation hors tabac prévu en loi de finances de l’année, corrigé le cas échéant de l’écart entre l’évolution des prix observée et l’indice prévu pour l’année passée.

Le législateur peut déroger à ce mécanisme comptable de revalorisation en corrigeant le taux de revalorisation dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale suivant, sur proposition d’une conférence nationale présidée par le ministre. Le dernier « coup de pouce » est intervenu pour les pensions en 2002 (+ 0,3 %).

TAUX DE REVALORISATION DES PENSIONS DE RETRAITE DU RÉGIME GÉNÉRAL

Évolution (en %)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Prix hors tabac pour l’année N estimé en PLFI pour l’année N

0,9

1,2

1,5

1,5

1,5

1,8

1,8

1,8

1,6

Prix hors tabac pour l’année N–1 estimé en PLFI de l’année N

0,5

1,4

1,6

1,7

1,7

1,7

1,8

1,8

1,3

Revalorisation appliquée au 1er janvier de l’année N (1)

0,5

2,2

2,2

1,5

1,7

2,0

1,8

1,8

1,1

décomposée
en :

Prévision hausse des prix pour l’année N

0,9

1,2

1,5

1,5

1,5

1,8

1,8

1,8

1,6

Correction d’écart entre prévision et
réalisation pour l’année N–1

0,2

0,5

0,4

0,2

0,2

0,2

0

0

– 0,5

Coup de pouce (2)

0,3

0,5

0,3

– 0,2

0

0

0

0

 

(1) par la LFSS de l’année N puis par arrêté

(2) Exceptionnellement la revalorisation intervenue au 1er janvier 2003 n’a pas pris en compte le rattrapage de 0,2 % au titre de la correction d’écart constaté sur 2002.

On constate une amélioration du pouvoir d’achat des pensions de base du régime général sur la période 1990–2006 puisque les prix à la consommation (hors tabac) ont augmenté de 1,66 % en moyenne annuelle tandis que les pensions ont progressé de 1,78 % en moyenne annuelle.

Cependant, comme le montre le tableau suivant, si les pensions progressent plus vite que l’indice des prix, elles connaissent un « décrochage » par rapport à l’évolution des salaires, et notamment du SMIC.

COMPARAISON DES ÉVOLUTIONS DES PRIX, DU SALAIRE MOYEN BRUT
(SECTEUR MARCHAND NON AGRICOLE),
DU SMIC ET DES PENSIONS DE VIEILLESSE DU RÉGIME GÉNÉRAL

(en moyenne annuelle et en euros courants)

Années

Prix hors tabac

Salaire moyen brut EB-EP (1)

SMIC brut

Pension moyenne du régime général (2)

Revalorisation des pensions de vieillesse du régime général

1990

100,0

100

100

100

100

1991

103,2

105,0

104,9

103,3

102,9

1992

105,6

108,0

109,1

106,3

105,2

1993

107,5

110,2

111,9

109,3

107,7

1994

109,0

111,6

114,4

111,8

109,8

1995

110,9

114,2

117,9

113,9

111,4

1996

112,9

116,4

122,2

116,9

113,9

1997

114,1

119,2

125,7

118,6

115,3

1998

114,8

120,9

129,5

120,3

116,6

1999

115,4

123,6

131,6

122,2

118,0

2000

117,2

126,7

134,5

124,5

118,6

2001

119,1

131,0

139,3

127,3

121,1

2002

121,2

134,1

143,8

130,5

123,7

2003

123,4

136,5

151,4

125,6

2004

125,5

139,9

160,2

127,7

2005

127,6

143,8

169,0

130,3

2006

129,8

148,7

174,1

132,6

2007 (p)

131,5

153,6

177,7

135,0

2008

     

136,5

(p) Prévisions établies en fonction des hypothèses économiques du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi

(1) Ensemble du secteur privé à l’exception de l’agriculture (source : ministère de l’économie, des finances et de l’emploi).

(2) Montant moyen des droits contributifs y compris allocation supplémentaire versée par le régime général.

Source : ministère du travail, des relations sociales et des solidarités

D.– LE LOGEMENT PÈSE-T-IL PLUS SUR LE POUVOIR D’ACHAT DES MÉNAGES ?

Les dépenses de logement constituent une part croissante du budget des ménages : dans les années soixante-dix, le logement représentait 15 % des dépenses de consommation des ménages. Aujourd’hui, les Français lui consacrent en moyenne un quart de leur budget.

Or, les données statistiques ne rendent comptent que partiellement de cette réalité. Par exemple, les loyers ne représentent qu’un peu plus de 6 % des dépenses dans le calcul de l’indice des prix par l’INSEE, compte tenu du fait que les locataires ne représentent que 40 % de la population. Par ailleurs, l’INSEE ne prend pas en compte les mensualités des emprunts contractés pour l’acquisition d’un logement, car il considère que l’achat d’un logement constitue un investissement et non un bien de consommation courante.

1.– La crise du logement en France conduit à une hausse importante du prix des logements et des loyers

La France connaît aujourd’hui une crise profonde du logement qui résulte de l’insuffisance de la construction de logements depuis plusieurs dizaines d’années.

Les différentes prévisions statistiques ont, en effet, sous-estimé la croissance de la demande de logement dans les années 1990 et 2000. Les résultats du recensement général de la population réalisé par l’INSEE début 2004 révèlent que le nombre de ménages était de 25,431 millions en 2004 en France métropolitaine, soit 1,1 million de plus qu’escompté en 1986 et encore 330 000 de plus que les prévisions réalisées en 2000 sur les bases du recensement de 1999.

La baisse tendancielle de la taille des ménages a été ainsi beaucoup plus importante que prévue, notamment du fait de l’évolution du nombre de familles monoparentales. Les prévisions pour la décennie tablaient sur une taille moyenne de 2,4 personnes. Le recensement de 2004 montre que celle-ci est en fait de 2,3. Cette différence d’un dixième de point ramené à un stock de 24 millions de résidences principales, signifie une insuffisance globale de l’ordre du million de logements.

Le déficit en logement est, ainsi, estimé à près de 900 000 unités en 2005 (11).

Ce déséquilibre entre l’offre et la demande de logement affecte aujourd’hui durement les ménages les plus modestes. Le taux de mobilité au sein du parc de logement a considérablement baissé, notamment au sein du parc locatif social. Les ménages qui trouvent un logement ne le quittent plus et ceux qui cherchent un logement sont conduits à accepter la surenchère des prix, quand ils sont accédants à la propriété, et des loyers, quand ils sont locataires.

Ainsi, selon le rapport sur l’évolution des loyers de la direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction (12) , la hausse des loyers dans le secteur locatif privé a été 2,3 % en 2001, de 3 % en 2002, de 2,4 % en 2003, de 3,8 % en 2004 et 2005 et 3,1 % en 2006. En 2006, cette progression est supérieure de 1,9 point à l’inflation.

Par ailleurs, venant s’ajouter au déséquilibre entre l’offre et la demande de logement, la baisse des taux d’intérêt a conduit à une très forte hausse des prix.

En effet, les taux d’intérêt ont connu une baisse quasi continue de 1995 à 2005. Conjuguée à une progression régulière des revenus des ménages de 2,7 % par an de 1996 à 2004, cette baisse a favorisé une reprise de l’accession à la propriété. L’augmentation de la demande qui en a résulté s’est traduite assez rapidement par une hausse des prix qui s’est accélérée à partir de 1999 pour dépasser 10 % par an en 2003 et les années suivantes. Pour compenser cette hausse, les établissements prêteurs ont augmenté la durée des prêts, ce qui a augmenté la capacité d’emprunt et soutenu la demande.

Comme le constate l’Agence nationale pour l’information sur le logement dans une étude sur le prix de l’accession à la propriété(13: « sous le triple effet de la progression des revenus, de la baisse des taux et de l’allongement des durées d’emprunt, la capacité d’endettement des ménages a augmenté considérablement (…) : avec un taux d’effort identique de 30 %, un ménage pouvait en 2006 emprunter près de deux fois plus qu’en 1996. C’est ce qui explique la vigueur de la demande, mais aussi, bien entendu, l’augmentation vertigineuse des prix. »

Ainsi, entre le quatrième trimestre 2000 et le quatrième trimestre 2006, les prix de l’ancien en France (hors Île de France) ont augmenté de 110 % pour les appartements et de 86,1 % pour les maisons. En ce qui concerne plus spécifiquement l’Île-de-France, la hausse des prix des logements anciens s’est établie à 93,9 % à Paris sur la même période, à 102,8 % en petite couronne et à 103,7 % en grande couronne. Le prix des appartements neufs a, quant à lui, augmenté de 40,7 % et celui des maisons neuves de 41,5 % entre 2000 et 2005, selon une étude de l’INSEE. Par conséquent, depuis le début de la décennie, les prix des logements en France ont plus ou moins doublé.

2.– Les dépenses de logement constituent une part croissante du budget des ménages

La hausse des prix de l’immobilier, supérieure à celle des revenus, a rendu le coût de l’accession à la propriété plus important pour un ménage et a conduit pat conséquent à une baisse de leur « pouvoir d’achat immobilier ».

Ainsi, l’Observatoire du financement du logement constate une augmentation de plus de 5 % du taux d’effort des ménages entre 2001 et 2005.

L’ANIL évalue « que le coût de l’accession équivalait en 1996 à environ 3,5 années de revenu d’un ménage au 7ème décile » et qu’il « en représente approximativement 6,5 années en 2006 ». Elle conclut qu’ « il faut donc accepter de payer plus de plus en plus cher et de plus en plus longtemps pour accéder à la propriété. Ce phénomène tend, à lui seul, à exclure de l’accession une part croissante de ménages modestes, ceux qui n’ont pas la capacité d’accroître l’intensité de leur effort. Il est accentué par le fait que les conditions financières de l’accession se sont dégradées plus fortement pour les ménages bénéficiant d’aides – précisément les plus modestes parmi les candidats à l’accession – que pour les autres. »

Par ailleurs, la hausse importante des loyers a accru le taux d’effort des locataires, c’est-à-dire la part de leurs revenus consacrés à leur loyer.

Selon l’observatoire des loyers de la banque de données Clameur (14), qui a collecté quelque 125 000 références de baux conclus au premier semestre 2007, les loyers ont augmenté, sur les six premiers mois de l’année, de 2,7 %. Il constate qu’en dix ans, les locataires ont perdu entre 5 et 6 % de leur pouvoir d’achat dans la mesure où les loyers ont augmenté en moyenne de 3,9 % par an, et leurs revenus de 3,4 % par an.

Or, les aides personnelles au logement, qui doivent aider les ménages à faire face à leurs dépenses de logement, ont connu une progression plus limitée que la hausse des loyers.

La Cour des comptes, dans son rapport public pour 2007, note que l’élargissement du champ des bénéficiaires des aides au logement dans les années quatre-vingt dix a conduit, pour des raisons de contraintes budgétaires, à une revalorisation très modérée de ces aides au fil des années. Il en résulte une hausse de l’effort net des ménages, c’est-à-dire de la part du revenu du ménage consacré au loyer, après versement des aides personnelles au logement. Ainsi, une étude de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale constate pour l’ensemble des ménages une hausse globale de 3,5 points du taux d’effort net entre 1988 et 2002.

Le projet annuel de performances de la mission Ville et logement pose comme objectif d’Aider les ménages les plus modestes à faire face à leurs dépenses de logement. L’indicateur proposé est le taux d’effort net moyen des ménages en locatif pour trois catégories de ménages : les bénéficiaires de minima sociaux, les salariés et les étudiants boursiers et non boursiers.

Comme le montre le tableau ci-dessous, on peut constater une hausse du taux d’effort net de ces différentes catégories de ménages depuis 2004 : il est en effet passé de 2003 à 2007 de 15,7 % à 21,1 %, soit une hausse de 5,4 points pour les bénéficiaires de minima sociaux, de 25 % à 27,4 %, soit une augmentation de 2,4 points pour les salariés, de 22,5 % à 24,6 % soit une progression de 2,1 % pour les étudiants boursiers et de 24,8 % à 26,6 % pour les étudiants non boursiers, soit une hausse de 1,8 point.

TAUX D’EFFORT NET DES MÉNAGES EN LOCATIF

 

2003

2004

2005

2006

2007 (1)

2008 (1)

Bénéficiaires minima sociaux

15,7

17,7

19,5

21

21,1

21,1

Salariés

25

25,7

27,4

27,6

27,4

27,4

Étudiants boursiers

22,5

23,8

24,7

24,6

24,6

Étudiants non boursiers

24,8

25,8

26,5

26,6

26,6

(1) Prévisions

Source : projet annuel de performance pour 2008, mission Ville et logement.

3.– L’insuffisance de logements conduit à faire peser des contraintes plus fortes sur les locataires

L’insuffisance de l’offre de logements par rapport à la demande et la hausse des loyers ont accru les exigences des bailleurs pour sélectionner les locataires.

Ainsi, une étude de l’ANIL sur les conditions d’accès au parc locatif privé (15) montre que les bailleurs multiplient les précautions pour se couvrir contre les risques d’impayés de loyers en utilisant les différents moyens à leur disposition : vérification de l’identité, vérification des ressources et du taux d’effort, demande de caution.

Les bailleurs qui ne demandent aucun justificatif à leur locataire ne sont plus que 20 % en 2003, contre 27 % en 1999.

EXIGENCES DES BAILLEURS

 

1994

1999

2003

Dépôt de garantie

85 %

92 %

97 %

Justificatifs de revenus

54 %

66 %

73 %

Justificatifs d’identité

29 %

53 %

56 %

Caution

25 %

36 %

47 %

Source : Agence nationale pour l’information sur le logement

Les exigences des bailleurs varient en fonction de la taille, de la ville et du montant du loyer : elles sont donc plus importantes dans les grandes agglomérations – dans la région parisienne notamment – et pour des loyers élevés. Ainsi, le montant du dépôt de garantie était, en 2003, de deux mois dans 93 % des cas étudiés par l’ANIL à Paris.

De même, ces exigences sont plus grandes pour les jeunes et les locataires à revenus modestes, qui font très souvent l’objet d’une demande de caution. Ainsi, en 2003, 68 % des jeunes de moins de 25 ans ont la caution d’un tiers, voire deux cautions pour 20 % d’entre eux.

C’est donc dans les zones où les loyers sont les plus élevés et pour les publics aux revenus les plus modestes, que les bailleurs sont les plus exigeants : l’avance d’un dépôt de garantie de deux mois de loyer est d’autant plus un poids financier pour les ménages qu’il est davantage exigé dans les zones où le loyer est élevé.

E.–QUELLE EST L’ÉVOLUTION RÉELLE DU COÛT DE L’ÉNERGIE ?

1.– Pourquoi les prix de l’essence et du gazole augmentent-ils ?

a) Le prix du baril et le cours de l’euro

Le prix du baril de brent daté exprimé en dollars a été multiplié par 2,4 entre 2003 et 2007 (16).

Les causes de cette augmentation n’ont rien de mystérieuses :

– restriction volontaire – bien que démentie - de l’offre de la part des pays de l’OPEP, pour maximiser leurs réserves et leurs recettes pétrolières ;

– difficulté des compagnies pétrolières à accroître leur production, leur activité s’effectuant dans des conditions techniques de plus en plus difficiles pour les nouveaux gisements (offshore profond, zones aux climats extrêmes) ;

– demande de pétrole en forte croissance en provenance des pays émergents ;

– interruption de production due à des incidents techniques (avaries de plates-formes, d’oléoducs, etc.) ainsi qu’à l’instabilité de la situation politique de certains pays producteurs (Nigeria, Angola) ;

– aléas climatiques réduisant la production par endroits et augmentant la demande de consommation.

Enfin, la spéculation – qui n’est pas toujours déconnectée des pays producteurs - renforce le phénomène tendanciel de hausse des prix, la présence des hedge funds spéculant sur les marchés de l’énergie et des matières premières accentuant la perturbation des marchés.

Les États membres de l’Union européenne, dont la France au premier chef compte tenu de sa dépendance pétrolière et gazière quasi complète, ont vu, toutefois le poids de la hausse du prix du pétrole relativisé par la hausse du cours de l’euro par rapport au dollar, monnaie de facturation des livraisons de pétrole.

Le cours de l’euro s’est en effet apprécié de près de 20 % entre 2003 et la fin 2007. La hausse de l’euro par rapport au dollar a donc permis d’atténuer les effets de l’augmentation du prix du brut.

Comme le montre le tableau suivant, l’effet de la revalorisation de l’euro par rapport au dollar est maximal en 2007 par rapport à 2006, avec une augmentation du prix du baril en euros qui n’est que de 0,9 %.

PRIX DU PÉTROLE ET COURS DU DOLLAR

 

2003

2004

2005

2006

Moyenne 2007 calculée en nov-07

Prix du brent daté en dollars par baril

28,89

38,24

54,41

65,14

70,77

Cours de l’euro en dollar

1,13088

1,24333

1,24478

1,25567

1,35223

Prix du brent daté en euros par baril

25,55

30,76

43,71

51,88

52,34

Variation par rapport à l’année précédente

 

20,4 %

42,1 %

18,7 %

0,9 %

Source : DGEMP

Le cours de l’euro s’est en effet apprécié de près de 20 % entre 2003 et la fin 2007. La hausse de l’euro par rapport au dollar a donc permis d’atténuer l’augmentation du prix du brut. C’est sans doute là l’un des seuls avantages à la parité actuelle euro-dollar pour le consommateur final…

À noter que la vigilance du gouvernement sur le prix de l’énergie a conduit les entreprises du secteur pétrolier à s’engager, à l’automne 2007, à lisser sur trois mois les augmentations du prix du brut et à répercuter immédiatement les baisses des prix.

b) Les marges de raffinage

L’augmentation du prix du brent a coïncidé avec la fin d’une période de hausse importante des marges de raffinage. Ces marges sont passées de 11,9 euros par tonne de brut en 1999 à 21 euros en 2003 et à 29 euros en 2004 et varient depuis 2005 entre 30 et 35 euros par tonne.

L’augmentation des marges de raffinage était devenue nécessaire afin de financer le réinvestissement pour la modernisation de l’appareil de production. Les raffineries françaises, vieillissantes en début de période, ont dû faire l’objet de travaux de maintenance et de renouvellement importants.

Par ailleurs, les normes réglementaires de qualité des carburants se sont durcies (diminution des teneurs en soufre admissibles notamment), ce qui a obligé à adapter les processus de fabrication. Les normes antipollution et les quotas d’émission de CO2 ont obligé également à la modernisation des raffineries. Pour répondre aux demandes des constructeurs, la qualité intrinsèque des carburants a, enfin, dû être améliorée (anti-récession de soupape).

c) Les marges de transport et de distribution

Les marges de transport et de distribution sont d’environ 5 à 7 centimes d’euros par litre de super SP 95 ou de gazole. Ces marges sont parmi les plus basses de l’Union européenne.

Au total, les marges tant de raffinage que de transport distribution sont en France parmi les plus faibles de l’Union européenne.

d) Les prix hors taxes

En conséquence, les prix hors taxes du Super SP95 et du gazole sont parmi les plus compétitifs de l’Union européenne.

Ceci est dû à la compétitivité de l’appareil de raffinage français, à la concurrence réelle entre les compagnies pétrolières et à la pression sur les prix hors taxes exercées par la grande distribution qui commercialise plus de la moitié des volumes de carburants en France.

Les grandes et moyennes surfaces, qui utilisent les carburants comme produits d’appel dominent la distribution des carburants avec 57 % des parts de marché.

e) La TIPP et la TVA

La taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers (TIPP) est assise sur les volumes. Ses variations résultent donc uniquement des tarifs fixés par la loi de finances. La taxe à la valeur ajoutée sur les carburants est, pour sa part, assise sur le prix hors taxes auquel s’ajoute la TIPP. Le poids de la TVA sur les carburants varie donc selon le prix du baril.

Le tableau suivant indique l’évolution des parts respectives de la TIPP et de la TVA dans le prix toutes taxes comprises du Super SP 95 :

ÉVOLUTION DE LA PART DES TAXES DANS LE PRIX TTC DU SUPER SP 95

centimes euros/litre

2003

2004

2005

2006

nov-07

TIPP

58,92

58,92

58,92

58,92

60,23

TVA

16,66

17,38

19,11

20,27

21,55

prix gazole

101,63

106,03

116,59

123,68

131,53

Part de la TIPP en % du prix TTC

58,0 %

55,6 %

50,5 %

47,6 %

45,8 %

Part de la TVA en % du prix TTC

16,4 %

16,4 %

16,4 %

16,4 %

16,4 %

Part des taxes en %

74,4 %

72,0 %

66,9 %

64,0 %

62,2 %

Source : DGEMP

On voit que la part de la TIPP dans le prix de vente TTC du Super SP 95 a baissé du fait du mode de calcul de la TIPP fondé sur le volume et non sur le prix. La part de la TVA dans le prix « toutes taxes comprises » (TTC) est restée stable, en raison du maintien du taux de TVA à son niveau de 19,6 %. Quant à la part des taxes, elle est passée de 74,4 % en 2003 à 62,2 % en 2007.

Le tableau suivant indique l’évolution des parts respectives de la TIPP et de la TVA dans le prix toutes taxes comprises du gazole.

ÉVOLUTION DE LA PART DES TAXES DANS LE PRIX TTC DU GAZOLE

centimes euros/litre

2003

2004

2005

2006

nov-07

TIPP

39,19

41,69

41,69

41,69

42,58

TVA

13,00

14,52

16,83

17,66

19,11

Prix TTC Super SP 95

79,35

88,58

102,68

107,75

116,61

Part de la TIPP en % du prix TTC

49,4 %

47,1 %

40,6 %

38,7 %

36,5 %

Part de la TVA en % du prix TTC

16,4 %

16,4 %

16,4 %

16,4 %

16,4 %

Part des taxes dans le prix TTC

65,8 %

63,5 %

57,0 %

55,1 %

52,9 %

Source : DGEMP

La part de la TIPP dans le prix TTC est passée de 49,4 % en 2003 à 36,5 % en 2007. Le gazole demeure moins taxé que le Super SP 95. D’ailleurs 50 % du parc automobile est diesel et 75 % des véhicules automobiles neufs sont diesel.

Contrairement à une idée reçue, le poids de la fiscalité du gazole et de l’essence baisse (– 12% entre 2003 et 2007) et c’est la hausse du brut (+141% sur la période considérée) qui explique la flambée des prix.

DÉCOMPOSITION DU PRIX DE L’ESSENCE ET DU GAZOLE

 

Décomposition du prix de l’essence

Décomposition du prix de gazole

 

2003 

Novembre 2007 

2003 

Novembre 2007 

TIPP + TVA

52,19

66%

61,69

53%

75,58

74%

81,78

62%

Coûts de TD

6,41

8 %

6,59

6 %

6,25

6 %

8,32

6 %

Coûts de raffinage

4,61

6 %

9,52

8 %

3,67

4 %

2,61

2 %

Brut

16,13

20 %

38,81

33 %

16,13

16 %

38,81

30 %

Total

79,34

100 %

116,61

100 %

101,63

100 %

131,52

100 %

Source : DGEMP

2.– Les prix français de l’essence et du gazole sont-ils supérieurs à ceux de nos voisins européens ?

La France se situe au 5e rang du classement des États membres de l’Union Européenne pour les prix les plus bas en fonction du prix du gazole hors taxes et au 18e rang du classement des États membres de l’Union Européenne en fonction du prix toutes taxes comprises du gazole au 2 novembre 2007. En considérant le niveau de développement des pays européens, la France se situe en 3e place sur 15 pour les prix hors taxes, et en 8e place sur 15 pour les prix toutes taxes.

Les prix toutes taxes comprises des carburants super SP95 et gazole sont, en France, supérieurs à la moyenne communautaire mais à un niveau équivalent à celui observé dans les grands États membres de l’Union européenne.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION DU PRIX DU GAZOLE HORS TAXES AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix hors taxes

1.

Royaume-Uni

52,56

2.

Slovénie

52,63

3.

Irlande

54,35

4.

Lituanie

54,68

5.

France

54,92

6.

Slovaquie

54,94

7.

Lettonie

55,11

8.

Estonie

55,19

9.

Finlande

55,55

10.

République tchèque

56,42

11.

Autriche

56,55

12.

Hongrie

56,68

13.

Pologne

56,71

14.

Allemagne

56,81

15.

Portugal

57,11

16.

Espagne

57,68

17.

Belgique

57,95

18.

Luxembourg

58,54

19.

Suède

58,67

20.

Grèce

60,12

21.

Italie

60,15

22.

Chypre

60,58

23.

Malte

60,93

24.

Danemark

61,25

25.

Pays-Bas

65,99

 

U.E. 15

57,17

 

U.E. 25

57,09

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

La France se situe au 18e rang du classement des États membres de l’Union européenne en fonction du prix toutes taxes comprises du gazole au 2 novembre 2007.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION DU PRIX TOUTES TAXES COMPRISES DU GAZOLE
AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix TTC

1.

Lituanie

93,54

2.

Estonie

94,08

3.

Lettonie

94,92

4.

Chypre

97,81

5.

Slovénie

99,4

6.

Luxembourg

100,7

7.

Malte

100,86

8.

Espagne

103,03

9.

Grèce

104,3

10.

Finlande

106,78

11.

Pologne

109,07

12.

Hongrie

109,77

13.

Irlande

110,3

14.

Belgique

110,47

15.

République tchèque

111,03

16.

Portugal

113,19

17.

Autriche

114,1

18.

France

116,61

19.

Slovaquie

117,21

20.

Danemark

122,35

21.

Italie

122,94

22.

Suède

123,57

23.

Allemagne

123,58

24.

Pays-Bas

123,8

25.

Royaume-Uni

146,74

 

U.E. 15

118,88

 

U.E. 25

117,9

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

3.– Quelles sont les raisons économiques de la flambée récente des cours du pétrole ?

Trois raisons principales expliquent la flambée du prix du pétrole : c’est à la fois la conséquence d’un choc d’offre, d’un choc de demande et de la modification des anticipations de marché.

Qu’est-ce qu’un choc d’offre ?

L’offre, c’est ce qui est produit par les pays producteurs de pétrole dits pays de l’OPEP. Au-delà d’un million de barils par jour, ces pays ne peuvent ajuster du jour au lendemain leur capacité de production pour faire face à un changement inattendu dans la consommation mondiale.

Comment expliquer la faiblesse des capacités de production ?

Les pays de l’OPEP ont fait le choix d’investir les pétrodollars, soit à l’extérieur, soit à l’intérieur, pour soutenir des projets sociaux, plutôt que dans les capacités de production. Par ailleurs, les incertitudes concernant certains pays producteurs, par exemple l’Irak, ne contribuent pas au développement des capacités de production.

Qu’est-ce qu’un choc de demande ?

Il y a « choc de demande » lorsque la consommation d’énergie croît plus vite que le revenu, ce qui est le cas notamment en Chine et en Inde. Entre 2002 et 2004, la Chine est à l’origine de 35 % de la hausse de la demande mondiale de pétrole ! Cette nouvelle donne de la consommation va persister dans les années à venir.

Les anticipations de marché : de quoi s’agit-il ?

Les tensions géopolitiques depuis l’an 2000 créent une « prime de risque » supplémentaire.

La spéculation financière a-t-elle augmenté le prix du pétrole ?

Selon Exane BNP Paribas, la plupart des études économiques n’ont pas montré que la spéculation jouait un rôle dans la détermination des prix sur le marché à terme du pétrole. La spéculation peut avoir un impact de très court terme sur la formation des prix mais en aucun cas sur la longue durée.

Quelle que soit la cause de la flambée du prix du pétrole, la tendance restera à la hausse, avec une forte instabilité qui, autour d’une valeur par exemple de 100 dollars, peut faire monter le prix à 120, ou le faire redescendre à 85. Le facteur climatique peut jouer un rôle modérateur : si l’hiver est rude, on aura des poussées de prix plus haut. Au contraire, si en début d’année le climat est doux, on pourra avoir une détente du prix.

F.– LE CRÉDIT À LA CONSOMMATION EST-IL UN PIÈGE OU UNE AVANCÉE POUR LE POUVOIR D’ACHAT ?

Utilisé de façon raisonnable, le crédit à la consommation est vecteur de croissance et permet l’accès immédiat aux biens courants dont les ménages ont besoin, par l’étalement de la dépense. Depuis plusieurs années, il offre une solution de réduction virtuelle des inégalités face à l’accès aux biens de consommations jusqu’à présent réservés aux pouvoirs d’achat les plus élevés. Ainsi, un jeune couple aux revenus modestes peut-il désormais s’offrir une soirée inoubliable parée de tous les signes extérieurs de luxe, qu’il remboursera en 24 mensualités minimum… De ce fait, le crédit à la consommation a pour effet réel de renforcer les inégalités puisqu’il accroît le coût d’acquisition des biens pour ceux qui y ont recours et fait pèse de tout son poids pour réduire le disponible net des ménages. De surcroît, les taux d’intérêt sont d’autant plus élevés que la somme empruntée est faible et l’emprunteur considéré comme présentant un risque important.

En repoussant les limites de la consommation des ménages les plus modestes, le crédit à la consommation modifie donc les perceptions du pouvoir d’achat et la notion d’accessibilité des produits, et peut entraîner certains ménages dans la spirale du surendettement d’autant plus fortement qu’il génère de la frustration face aux biens de consommation auxquels la raison ferait qu’ils ne pourraient y accéder. Mais consommation ne rimant pas forcément avec raison, si les pouvoirs publics et les acteurs du crédit à la consommation ont déjà identifié les maux et tenté d’apporter des remèdes par des procédures de traitement adaptées, il serait utile que l’on s’attaque davantage au problème en amont, en renforçant notamment l’encadrement des conditions d’octroi de crédits.

1.– Le recours excessif à l’endettement entraîne de nombreux ménages vers la pauvreté

Paradoxalement, alors que les ménages français sont moins endettés que ceux des autres pays de la zone euro, ils sont davantage touchés par le surendettement. Fin 2006, un ménage français (17) sur deux était endetté (51 %), proportion relativement faible comparée aux autres pays. Selon l’observatoire de l’endettement de février 2007, 30,2 % des ménages ont contracté un emprunt immobilier, 32,6 % un crédit à la consommation et 24,4 % sont en découvert – 5 % des ménages cumulant ces trois formes d’emprunts.

Certes, la plupart des crédits sont recouvrés sans incident (90 % selon l’association française des sociétés financières), mais le nombre de ménages surendettés est très important. D’après le baromètre du surendettement de décembre 2006, plus de 850 000 dossiers de surendettement ont été déposés à la Banque de France entre janvier 2002 et décembre 2006, dont 730 000 jugés recevables, avec une dette moyenne de 32 500 euros. Le nombre de dossiers déposés dans les commissions départementales de surendettement poursuit une croissance annuelle de 6,5 %, ce qui est particulièrement élevé.

Le surendettement participe au processus d’exclusion sociale. Surendettement et pauvreté ne sont pas nécessairement liés, mais l’un entraîne souvent l’autre. Le surendettement touche aussi les classes moyennes et parfois les ménages aisés. Ainsi, l’entrée dans la spirale du surendettement est souvent provoquée par une rupture dans la vie professionnelle (chômage) ou familiale (divorce, veuvage).

Parmi les différents types de crédits, les crédits permanents ou crédits revolving jouent un rôle particulier dans le surendettement. Ces crédits offrent une réserve permanente d’argent à des taux souvent très élevés (entre 10 et 19 %), permettant au souscripteur d’emprunter pour une utilisation de son choix. Le renouvellement du crédit s’opère au fur et à mesure des remboursements dans la limite du montant autorisé. Cette formule de crédit est généralement offerte dans le cadre d’une carte de fidélité utilisable dans une grande enseigne ou un réseau de magasins. À la fois très souple d’utilisation et très cher, ce mode de crédit est particulièrement incitatif à la consommation. D’après le rapport du Conseil économique et social sur le surendettement des particuliers, publié en octobre 2007, les crédits renouvelables représentaient 23 % des crédits à la consommation fin 2004. Au moins un crédit de ce type figure dans près de 80 % des dossiers de surendettement (18).

Devant l’augmentation exponentielle des situations de surendettement dans lesquelles les plans de redressement ne suffisent plus à apurer les dettes, la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, dite loi Borloo, a instauré la procédure de rétablissement personnel, procédure proche de la faillite civile qui existe en Alsace–Moselle : lorsque le débiteur est de bonne foi et que sa situation est estimée « irrémédiablement compromise », le juge peut, sous certaines conditions, prononcer l’effacement de ses dettes et lui offrir ainsi une « deuxième chance ».

Toutefois, si cette procédure permet de trouver des solutions pour des ménages dont la situation est telle qu’ils ne peuvent plus s’en sortir seuls, elle n’est pas de nature à faire disparaître le surendettement. Par ailleurs, le surendettement est un tel traumatisme social qu’il faut avant tout éviter sa survenue. Afin que les ménages n’entrent pas dans cette spirale, les efforts doivent désormais se concentrer sur sa prévention en amont.

2.– Prévenir le surendettement en encadrant davantage l’octroi du crédit à la consommation

L’actuel volet préventif du surendettement consiste essentiellement en la bonne information de l’emprunteur avant et pendant la conclusion des contrats de crédits, ainsi que dans l’encadrement de la publicité faite autour des offres de crédits. Force est de constater que ces mesures préventives sont insuffisantes.

Les banques et établissements qui dispensent des crédits à la consommation ont un devoir de conseil vis-à-vis des emprunteurs. Les bonnes pratiques de certains établissements peuvent servir d’exemple et devraient être diffusées. La Cour de cassation met en avant un devoir de mise en garde de l’établissement prêteur. Dans deux arrêts du 29 juin 2007, elle a estimé que l’établissement bancaire n’avait pas respecté « le devoir de mise en garde » auquel il était tenu lors de la conclusion du contrat. Dans une de ces affaires, treize prêts avaient été accordés en deux ans alors que trois autres portant sur des emprunts à long terme étaient en cours. Le plaignant reprochait donc à sa banque un soutien « abusif et ruineux ».

Ce devoir de conseil et de mise en garde pourrait faire l’objet de dispositions législatives qui responsabilisent davantage les deux parties au contrat. Ainsi, une des idées que l’on retrouve fréquemment dans les débats ad hoc consisterait à ce que le prêteur soit obligé de se renseigner auprès de l’emprunteur sur sa situation financière (charges et ressources). À défaut, en cas d’incident de paiement, il ne pourrait pas engager de procédure de recouvrement. Cette phase d’étude préalable pourrait avoir lieu au cours d’un entretien approfondi, le prêteur étant exonéré de responsabilité dans le cas où l’emprunteur aurait été de mauvaise foi.

Serait-il nécessaire de créer pour autant un fichier national d’endettement des ménages ? Marquons une certaine réserve face à ce dispositif aux effets pervers nombreux. Certes, en permettant une meilleure appréhension de la situation financière de l’emprunteur par le prêteur, une telle base de données offre la possibilité séduisante d’éviter « le crédit de trop » qui fait entrer dans le surendettement. Cependant, un tel fichier pose problème en termes de protection de la vie privée, porte le risque d’une utilisation à des fins autant commerciales que contentieuses.

Une autre idée consisterait, dans le but de protéger les conjoints des personnes qui prendraient des engagements financiers déraisonnables, à ce que l’accord du conjoint soit obligatoire pour l’octroi de crédits permanents ou revolving. En effet, nombreux sont les cas dans lesquels certaines personnes se retrouvent actuellement financièrement solidaires d’engagements auxquels ils n’ont pas souscrit. Les époux sont protégés des crédits d’un montant important par l’article 1415 du code civil qui dispose que « chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n’aient été contractés avec le consentement exprès de l’autre conjoint qui, dans ce cas, n’engage pas ses biens propres. » Cependant, ils ne sont pas protégés contre l’accumulation de petits crédits que constitue le crédit revolving.

Enfin, il paraît indispensable de réfléchir activement à l’interdiction de la proposition à domicile de crédits revolving. En position de faiblesse alors qu’il se voit proposer une offre qui paraît simple et sans contrainte, le client potentiel risque de céder à un produit dont il n’a pas exprimé le besoin.

G.– QU’EST-CE QUI PÈSE SUR LE POUVOIR D’ACHAT ?

Aucune réflexion approfondie sur le pouvoir d’achat ne peut éluder le contexte économique national. Celui-ci se caractérise par un niveau trop élevé de prélèvements obligatoires, qui pèse tout particulièrement sur le travail, par une croissance trop faible, par une mauvaise place dans la compétition fiscale internationale qui n’a jamais été un objectif prioritaire jusqu’à présent, par des taux de marges faibles et en stagnation du fait des contraintes compétitives et du faible investissement récurrent en recherche et développement, par un impact des délocalisations qui de facto s’accélèrent.

Depuis l’éclatement de la bulle internet en 2001, la croissance française se maintient en dessous de 2 % (à l’exception de 2004, cf. graphique suivant). Les États-unis ont chaque année au moins un point de croissance de plus que la France. C’était aussi en 2006 le cas de l’Allemagne et ce le sera probablement en 2007 si les prévisions de croissance se confirment. L’Allemagne a réussi à sortir son économie de la morosité grâce aux réformes structurelles ambitieuses qu’elle a su mener dès les années 2000.

1.– Des charges sur le travail trop élevées

La France fait partie des pays où les charges sur le travail sont les plus élevées, y compris en Europe, avec un coût unitaire du travail19 à 0,74 contre 0,70 en moyenne pour les pays de la zone euro en 2005 20. Cette mauvaise position n’est pas due à une faible productivité (elle est de 39,4 euros/heure en France contre 33,7 euros/heure en moyenne dans la zone euro en 2005 21), mais aux charges pesant sur le salaire : le coût horaire de la main-d’œuvre atteint 29,29 euros/heure en France contre 24,41 euros/heure en moyenne dans la zone euro en 200522.

Le tableau suivant donne le classement des coûts horaires de la main-d’œuvre en Europe. La France se classe en 6e position parmi les pays les plus chers.

 

2005

 

Coût horaire de la main-d’œuvre
(€/heure)

Classement

UE (27 pays)

19,91

 

UE (25 pays)

21,20

 

UE (15 pays)

23,96

 

Zone euro (13 pays)

24,41

 

Luxembourg

31,10

1

Islande

30,82

2

Belgique

30,73

3

Danemark

30,70

4

Suède

30,43

5

France

29,29

6

Pays-Bas

27,41

7

Allemagne

26,43

8

Finlande

26,39

9

Autriche

25,30

10

Royaume-Uni

24,47

11

Italie

21,39

12

Espagne

15,22

13

Grèce

13,37

14

Chypre

11,10

15

Slovénie

10,76

16

Portugal

10,60

17

Malte

8,35

18

République tchèque

6,63

19

Hongrie

6,14

20

Pologne

5,55

21

Slovaquie

4,80

22

Estonie

4,67

23

Lituanie

3,56

24

Lettonie

2,77

25

Roumanie

2,33

26

Bulgarie

1,55

27

Note : Les données en italique correspondent aux valeurs pour les années 2004 ou 2003 lorsque le chiffre pour 2005 était indisponible

Source : Eurostat

Le tableau suivant donne la part du coût total de la main-d’œuvre qui est versée à la Sécurité sociale par l’employeur. La 4e place de la France dans le classement montre l’importance du poids de cette contribution dans le coût total du travail dans notre pays.

 

2005

 

Part du coût total de la main-d’œuvre versée à la Sécurité sociale par l’employeur

Classement

UE (27 pays)23

21,9 %

 

Zone euro (13 pays)24

22,6 %

 

Belgique

30,3 %

1

Suède

29,6 %

2

Italie

29,5 %

3

France

28,7 %

4

Lituanie

28,1 %

5

Hongrie

27,3 %

6

République tchèque

26,2 %

7

Estonie

25,3 %

8

Roumanie

25,0 %

9

Espagne

24,9 %

10

Bulgarie

24,0 %

11

Autriche

23,9 %

12

Slovaquie

23,7 %

13

Grèce

21,7 %

14

Allemagne

21,4 %

15

Portugal

21,2 %

16

Pays-Bas

21,0 %

17

Lettonie

20,7 %

18

Finlande

20,6 %

19

Royaume-Uni

18,4 %

20

Pologne

16,6 %

21

Islande

15,8 %

22

Chypre

15,5 %

23

Luxembourg

14,2 %

24

Slovénie

13,2 %

25

Danemark

10,2 %

26

Malte

8,0 %

27

Note : Les données en italique correspondent aux valeurs pour les années 2004, 2003 ou 2002 lorsque le chiffre pour 2005 était indisponible. Pour l’Autriche, il a fallu remonter jusqu’à l’année 2000 pour trouver la dernière valeur disponible de ce chiffre.

Source : Eurostat

2.– Une croissance émolliente aux variations erratiques

Depuis 2001, la croissance varie sensiblement d’une année sur l’autre, en restant toutefois à un niveau globalement peu élevé.

TAUX DE CROISSANCE DU PIB

Année

PIB

2001

1,8

2002

1,1

2003

1,1

2004

2,0

2005

1,2

2006

2,1

Source :OCDE

3.– Une mauvaise place dans la concurrence fiscale

La France est un des pays où les prélèvements obligatoires sont les plus importants au monde : avec un total 44 % du PIB prélevé contre 39,2 % en moyenne pour la zone euro, la France, malgré ses efforts particuliers à l’occasion de la loi de finances pour 2007, se place en 4e position des pays où la pression fiscale est la plus élevée parmi les pays du groupe Union européenne, États-Unis et Japon 25.

De plus, le système fiscal se caractérise par une concentration excessive des prélèvements sur les facteurs de production les plus dynamiques et mobiles. Par exemple, le taux implicite d’imposition des sociétés se place en 2ème position du classement des taux les plus élevés parmi les pays de l’Union européenne avec 29,1 % contre 21,4 % 26 (cf. tableau suivant). Le même constat vaut pour l’imposition des hauts salaires pour lesquels la France est placée en 3e position dans le classement des pays qui les taxent le plus au sein de la zone euro, devant le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada et le Japon 27.

TAUX IMPLICITE D’IMPOSITION DES SOCIÉTÉS

en  %

 

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Rang

Moyenne
1995-2005

Différence
1955 - 2005

BE

19,5

22,5

23,5

27,4

26,8

23,6

23,6

23,1

22,0

22 ,2

23,7

5

23,4

4 ,3

BG

-

-

-

-

-

11,5

15,4

-

-

-

-

na

13,5

-

CZ

47,2

31,4

41,4

28,0

30,1

26,2

28,3

30,3

31,8

32,7

26,0

4

32,1

- 21,2

DK

20,4

22,4

22,3

29,3

21,4

24,6

22,1

21,2

23,5

28,2

27,9

3

23,9

7,6

DE

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

EE

29,1

14,4

16,4

18,4

17,9

4,1

3,0

4,7

7,3

7,8

6,2

14

11,7

- 22,8

IE

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

EL

15,1

13,1

18,5

21,9

26,1

31,4

23,3

25,1

19,4

18,8

-

na

21,3

-

ES

-

-

-

-

-

30,7

28,5

31,4

31,3

35,5

41,2

1

33,1

-

FR

21,0

25,5

25,9

24,6

29,4

30,0

33,7

29,8

24,1

26,8

29,1

2

27,3

8,1

IT

14,1

16,2

18,7

14,0

22,7

20,6

24,2

20,9

24,2

21,0

20,7

9

19,7

6,5

CY

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

LV

-

-

-

-

12,6

8,6

8,8

7,9

6,2

7,4

-

na

8,6

-

LT

11,2

10,1

8,9

8,7

6,3

3,7

2,4

2,6

5,5

7,2

7,8

13

6,8

- 3,4

LU

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

HU

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-

na

-

-

MT

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

NL

19,8

23,5

22,3

22,7

21,8

18,1

17,2

18,0

14,4

14,3

13,2

12

18,7

- 6,6

AT

22,6

25,7

26,7

26,8

25,2

24,7

33,5

26,1

23,2

23,5

21,4

8

25,4

- 1,2

PL

46,8

51,6

46,2

42,7

42,7

37,7

37,9

39,3

21,5

20,7

22,4

7

37,2

- 24,4

PT

14,8

17,1

18,3

17,4

19,2

25,6

22,5

22,0

20,1

-

-

na

19,7

-

RO

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

SI

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

na

-

-

SK

-

-

44,4

48,9

41,0

34,4

27,2

30,5

29,9

23,0

23,3

6

28,7

-

FI

19,5

22,5

24,0

25,9

25,4

30,6

18,5

21,1

18,7

18,7

18,3

11

22,1

- 1,2

SE

14,5

16,1

17,6

18,4

22,7

32,3

24,0

29,6

-

-

-

na

21,9

-

UK

19,2

20,0

23,5

22,3

23,9

23,1

24,0

17,7

15,1

15,4

18,6

10

20,2

- 0,6

NO

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

 

-

-

                             

EU-27

                           

Weighted average

19,5

21,9

23,5

22,3

25,5

25,7

26,5

24,1

21,8

22,5

24,4

 

23,4

4,9

Arithmetic average

22,3

22,1

24,9

24,8

24,4

23,2

22,0

22,3

19,9

20,2

21,4

 

22,3

- 0,9

EU-13

                           

Weighted average

18,5

21,5

22,7

21,2

25,6

25,8

27,3

25,5

23,8

24,6

26,4

 

23,9

7,9

Arithmetic average

18,3

20,8

22,2

22,6

24,6

26,1

25,0

24,2

21,9

22,6

23,9

 

22,9

5,6

EU-25

                           

Weighted average

19,5

21,9

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22,3

25,5

25,7

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21,8

22,5

24,4

 

23,4

4,9

Arithmetic average

22,3

22,1

24,9

24,8

24,4

23,9

22,4

22,3

19,9

20,2

21,4

 

22,6

- 0,9

                             

Ratio st. Dev. And mean in %

55,8

45,2

46,3

44,5

34,5

38,9

36,0

40,0

37,1

37,6

36,4

   

- 19,4

Difference max. and min.

35,9

41,4

46,2

40,2

36,4

34,0

35,4

36,7

26,3

28,3

34,9

   

- 1,0

                             

Source : Taxation trends in the European Union, Eurostat, European Commission, 2007.

4.– Un déficit commercial en dégradation constante

La dégradation du déficit commercial français est une constante depuis 2001, dernière année de solde commercial positif. Sur les 12 derniers mois, le déficit se monte à plus de 30 milliards d’euros 28 (cf. graphique et tableau suivants). À titre de comparaison, le solde commercial allemand est en constante progression depuis 2001. Il était de 185 milliards d’euros sur la période juillet 2006 – juin 2007.

Source : Direction des Douanes, juillet 2007.

La dégradation du solde commercial français traduit une diminution des parts de marché dans le commerce mondial : la France est passée de 4ème à 5e exportateur mondial entre 1985 et 200529 (cf. tableau suivant). Notre pays souffre donc d’une perte de compétitivité en partie liée au coût du travail.

APERÇU DU COMMERCE EXTÉRIEUR DE LA FRANCE
(DONNÉES DE RÉFÉRENCE : JUILLET 2007)

PLACE DE LA FRANCE DANS LE COMMERCE MONDIAL

Pays

Allemagne

États-Unis

Chine

Japon

France

Roy-Uni

Italie

Canada

Belgique

Pays-Bas

Rang export

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

Rang import

2

1

3

4

6

5

7

9

8

12

Source : Direction des Douanes, juillet 2007

Données 2005, source : ONU - COMTRADE

5.– Des taux de marge faibles et en stagnation

Depuis plus de 10 ans, les taux de marge (30) des entreprises françaises restent à un niveau en moyenne inférieurs de 13 % à celui des entreprises de la zone euro31. Le taux moyen a subi une légère contraction en France, passant de 34,6 % à 34,1 % entre 2001 et 2005, alors que, sur la même période, ce taux de marge moyen passait de 36,5 % à 39,6 % en Allemagne et de 39,3 % à 39,9 % dans la zone euro (cf. graphique suivant). Le creusement de l’écart de rentabilité entre les entreprises européennes et les entreprises françaises encourage ces dernières à rechercher les moyens de relever leur niveau de rentabilité.

6.– Des délocalisations qui s’accélèrent

L’INSEE a calculé qu’environ 95 000 emplois auraient été supprimés en France dans le seul secteur de l’industrie et délocalisés à l’étranger au cours de la période 1995-2001 32. La majorité de ces emplois (53 %) l’auraient été vers les pays développés (parmi ceux-ci, l’Allemagne était la troisième destination) et 47 % vers les pays à bas salaires (principalement la Chine).

PRINCIPAUX PAYS DE DESTINATION DES DÉLOCALISATIONS

Pays à bas salaires

Pays développés

Emplois délocalisés par an :

6 370

Emplois délocalisés par an :

7 175

Dont :

En  % 

Dont :

En  % 

Chine

30

Espagne

16

Brésil

8

Italie

15

Maroc

8

Allemagne

14

Tunisie

8

États-Unis

13

République tchèque

6

Belgique

10

Inde

5

Royaume-Uni

8

Pologne

5

Pays-Bas

7

Vietnam

4

Suisse

4

Roumanie

4

Portugal

2

Bulgarie

3

Irlande

2

Indonésie

2

Suède

2

Turquie

2

Finlande

1

Vénézuela

2

Japon

1

Malaisie

1

   

Madagascar

1

   

Guinée

1

   

Lituanie

1

   

Hongrie

1

   

Russie

1

   

Lecture : sur la période 1995-2001, 6 370 emplois seraient supprimés en moyenne chaque année dans le cadre d’une délocalisation vers un pays à bas salaires. Parmi ces suppressions, 30 % se feraient par délocalisation vers la Chine, 8 % par délocalisation vers le Brésil, etc…

Champ : Industrie hors énergie.

Source : Délocalisations et réductions d’effectifs dans l’industrie française, L’économie française, INSEE, 2005-2006.

Le Conseil d’analyse économique estime pour sa part que, s’agissant de la France, l’effet des délocalisations sur la désindustrialisation est de plus en plus important33.

Les délocalisations soulèvent le problème de l’impact des échanges commerciaux à l’échelle mondiale, sur l’emploi et la désindustrialisation des pays comme la France. L’effet négatif serait concentré sur les employés les moins qualifiés.

H.– QUE NOUS ENSEIGNENT LES THÉORIES ÉCONOMIQUES SUR LE POUVOIR D’ACHAT ?

Il n’est pas inutile, avant de commenter les propositions figurant dans ce projet de loi et visant à donner comme à rendre du pouvoir d’achat aux Français, de s’intéresser aux travaux des théoriciens de l’économie qui, depuis des siècles, débattent de ces thèmes.

La « revendication de revenus revalorisés face à des prix perçus à la hausse » n’est pas une nouveauté dans la théorie économique, pas plus que ne l’est son apparition dans des débats politiques, car le pouvoir d’achat trouve toute sa place précisément au cœur de la sphère politique.

Dès le XIXème siècle, le penseur politique britannique John Stuart Mill théorisait la distinction entre le domaine de l’économie qui relèverait de la science et celui de l’homme politique qui relève de la décision collective. Il en concluait que la croissance répondait à la logique de l’économie tandis que le pouvoir d’achat était une question éminemment politique (34). Il nous appartient cependant de dépasser une telle opposition et de réconcilier la responsabilité politique et l’exigence économique.

Une politique responsable de revalorisation du pouvoir d’achat ne peut passer que par la réhabilitation du travail et l’augmentation de la valeur ajoutée, au cœur du projet présidentiel. Le travail, moteur de la croissance économique, ne doit plus être considéré comme une valeur rare et limitée qu’il faudrait partager afin de répartir une richesse nationale donnée. Les exemples historiques ainsi que la théorie économique montrent depuis des siècles que lever les entraves au marché du travail crée de la valeur, accroît les revenus et multiplie les emplois par la création d’entreprises et l’innovation.

L’immobilisme condamnerait la France à l’échec dans un environnement économique international concurrentiel et en mutation rapide. La France doit pouvoir s’imposer sereinement dans une économie globalisée, sans complexe ni résignation. L’ouverture à la mondialisation ne doit pas être interprétée comme une menace mais une opportunité à saisir pour projeter l’influence de la France sur la scène internationale et améliorer notre économie. Les avantages de notre pays sont en effet nombreux, de la formation de sa main-d’œuvre à la qualité de ses infrastructures en passant par la qualité de ses grandes entreprises.

Il n’est pas inutile, avant de proposer des mesures concrètes visant à défendre le pouvoir d’achat des Français, de s’intéresser aux travaux des théoriciens de l’économie qui, depuis des siècles, débattent de ces thèmes. Le travail, la croissance, les revenus et donc le pouvoir d’achat sont des exigences anciennes et il serait audacieux d’imaginer que les penseurs des générations qui nous précédent ne peuvent nous enrichir dans notre désir de répondre à ces défis.

Se tourner vers les travaux théoriques ne saurait évidemment servir de substitut à l’action. Il ne s’agit pas de s’enfermer dans un dogme ou une idéologie ni de se faire le chantre d’une chapelle. Au contraire, le monde des idées offre un cadre stimulant et ouvert pour la réflexion et des repères guidant l’action.

1.– Un débat ancien : Ricardo, Marx et Schumpeter

Comme mentionné précédemment, les débats autour du pouvoir d’achat ne sont pas récents et ont occupé les travaux des plus grands théoriciens de la pensée économique. Les polémiques n’ont d’ailleurs pas manqué au sujet de la réalité de cette perte de pouvoir d’achat. Dès 1817 aux débuts de la révolution industrielle, dans le chapitre V des « Principes de l’Économie et de l’Impôt », le grand économiste anglais David Ricardo (1872-1823), l’un des pères de l’économie politique, déclarait : « il y a bien des choses qui constituent aujourd’hui le bien être ordinaire du paysan anglais et qu’on aurait regardées comme des objets de luxe à des époques reculées de notre histoire » (35). Il contestait ainsi une mystique de l’âge d’or.

Karl Marx (1818-1883) prophétisait, quant à lui, la paupérisation absolue des travailleurs qui résulterait inexorablement de la plus-value retirée par le propriétaire capitaliste des moyens de production. Cette paupérisation créerait, selon l’auteur du Manifeste du Parti Communiste, un décalage croissant et intenable entre propriétaires et prolétaires, assurant l’échec à long terme du système capitaliste.

Alors que les plus grands bénéficiaires de la révolution industrielle et de la croissance économique avaient été les plus démunis, Joseph Schumpeter (1883-1950) regrettait, dans « Capitalisme, Socialisme et Démocratie », le succès que rencontraient les discours stigmatisant l’appauvrissement des classes populaires, y voyant, avec d’autres facteurs comme l’essoufflement de la dynamique de l’innovation, un signe annonciateur de l’échec du système capitaliste. La perception d’un accroissement de la pauvreté qui serait plutôt due à l’apparition de nouveaux besoins faisait naître selon Schumpeter une contestation menaçant la viabilité du système.

L’effondrement des régimes planificateurs et les drames humains nés de leur échec à surmonter leurs contradictions inhérentes ont mis fin aux tentatives sérieuses de mise en place de systèmes alternatifs à l’économie de marché. Celle-ci s’est imposée logiquement, malgré ses limites et défauts, comme le système le plus apte à créer des richesses et assurer la liberté et l’esprit d’initiative, comme l’avait compris Adam Smith dès le XVIIIème siècle.

2.– Les apports de Keynes et de Friedman

Cependant la question du revenu et de la consommation n’en a pas moins nourri des débats économiques considérables au XXème siècle. Les travaux de l’économiste britannique John Maynard Keynes (1883-1946), furent à cet égard parmi les plus influents. À l’origine d’un système économique préconisant une politique de la demande et des relances contra-cycliques, il considérait ainsi qu’il était nécessaire, pour promouvoir la croissance, de revaloriser les revenus les plus modestes, ceux-ci consacrant la part la plus importante de leur revenu à la consommation (il s’agit de la théorie de la propension à consommer). Les entreprises anticipant la demande pour ajuster leur niveau de production, accueillent ainsi favorablement une intervention de l’État en faveur de la demande, relançant la croissance économique. Cette approche, privilégiant considérablement le court terme aux réformes structurelles fut, pendant des décennies, l’apanage des politiques publiques.

Milton Friedman (1912-2006), prix Nobel d’économie en 1976 et inspirateur des politiques économiques britanniques et américaines depuis la fin des années 1970, s’impose comme l’un des critiques les plus ambitieux des politiques de la demande, remettant au goût du jour la fameuse loi de Jean Baptiste Say: « l’offre crée sa propre demande ». Sa théorie du revenu permanent vient répondre à l’échec des politiques de relance de la consommation de type keynésien. Friedman explique que la consommation dépend essentiellement du revenu permanent, qui est le revenu perpétuel que chaque individu anticipe. C’est le revenu de toute une vie ; l’individu l’anticipe en tenant compte de ses actifs (patrimoine et capital humain). La composante transitoire du revenu comme le résultat d’événement chanceux ou accidentels ne modifient pas sa consommation. Le consommateur n’intègre dans sa consommation les modifications de revenus qu’à partir du moment où elles semblent durables et donc permanentes. « Les composantes transitoires du revenu se manifestent d’abord dans les changements des actifs et des dettes du consommateur », c’est-à-dire dans son épargne.

La théorie du revenu permanent présente l’intérêt d’expliquer pourquoi la propension à consommer des ménages sur longue période (par exemple du XIXème siècle à nos jours) ne diminue pas alors que les revenus augmentent globalement. Selon Milton Friedman, il est ainsi vain de chercher à relancer la croissance par des politiques de court terme visant à relancer la demande. Une politique touchant directement le niveau des revenus n’aura d’effet que si les conditions durables de la croissance sont réunies. Il est ainsi indispensable de relancer l’activité économique dont le moteur est le travail.

3.– Libérer le travail de ses contraintes

Une politique favorisant le pouvoir d’achat passe donc par la création de richesses que permettra la libération du travail de ces contraintes structurelles : des limites imposées au temps à la réduction des charges pesant sur les salaires, dissuadant l’embauche et creusant l’écart entre salaires nets et bruts. Les principales théories économiques mettent ainsi en garde contre les contraintes pesant sur le marché du travail, au-delà même de la question de la réduction du temps de travail. De façon plus importante encore, les études sur le marché du travail démontrent que les travailleurs non qualifiés et les chômeurs sont les premières victimes de telles politiques.

Le chômage s’explique, selon la théorie classique, par l’existence de contraintes institutionnelles sur le marché du travail qui renchérissent le coût du travail et empêchent l’ajustement du salaire à un niveau d’équilibre qui assure l’égalité entre l’offre et la demande de travail.

Le salaire doit correspondre, selon les analyses néoclassiques à la productivité marginale du travailleur, une entreprise ne peut pas payer quelqu’un au-delà de ce que lui rapporte son travail. Le salaire est un prix qui mesure l’efficacité du travail. Le coût du travail étant supérieur au salaire d’équilibre du marché du travail, l’ajustement se fait par les quantités et donc par du chômage, qui touche en premier les moins qualifiés.

Ainsi, un coût élevé du travail non qualifié conduit, d’une part, à des mécanismes de substitution du capital au travail car ces deux facteurs sont relativement substituables alors que le travail qualifié est davantage complémentaire avec le capital, et d’autre part, à une substitution du travail qualifié au travail non qualifié car il réduit l’écart relatif des salaires des deux facteurs.

Selon l’économiste américain Paul Krugman, la France et plus généralement l’Europe ont fait le choix du maintien des coûts salariaux élevés et donc du chômage pour sa population non-qualifiée, contrairement aux États-unis, privilégiant les insiders au détriment des outsiders.

Il serait pour autant réducteur et même dangereux d’en déduire qu’il faudrait remettre en cause le niveau des salaires, voire le salaire minimum. Les travaux de Keynes sont en effet ici intéressants. Selon lui, l’effet de substitution travail-capital permis par une baisse des salaires est plus que compensé par un effet-revenu négatif : la baisse du pouvoir d’achat des salariés renforce l’insuffisance de la demande et entraîne donc la baisse de la demande de travail.

Une lecture équilibrée des théories économiques nous incite ainsi à favoriser une position alliant la revalorisation du travail par la remise en cause des rigidités du marché du travail et la réduction des coûts salariaux par la diminution des charges sans remise en cause des niveaux de salaires.

II.– LE GOUVERNEMENT ET LA MAJORITÉ PARLEMENTAIRE SE SONT LANCÉS RÉSOLUMENT DANS LA « BATAILLE DU POUVOIR D’ACHAT »

Le Gouvernement et la majorité parlementaire ont fait de la hausse du pouvoir d’achat l’une des priorités de leur action, conformément aux engagements présidentiels. Cette action repose sur deux axes d’intervention :

– une politique de revalorisation du travail, qui s’est concrétisée notamment par l’adoption de la loi du 23 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dont les mesures phares sont l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires et l’expérimentation du revenu de solidarité active (RSA). Le présent projet de loi s’inscrit dans la continuité de ces mesures ;

– une politique consistant à comprimer les charges pesant sur les ménages français. Cette action vise à lutter contre la hausse des prix, en faisant jouer la concurrence au service du consommateur : tel est l’objet du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, en cours d’examen parlementaire. Elle se traduit aussi par une politique active du logement, celui-ci constituant le premier poste de dépense (25 %) du budget des ménages.

A.– UN PREMIER ENSEMBLE DE MESURES A ÉTÉ ADOPTÉ À COMPTER DE L’ÉTÉ 2007 POUR REVALORISER LE TRAVAIL

Comme le Président de la République l’a à nouveau souligné, le 29 novembre dernier : « pour redonner du pouvoir d’achat, il faut réhabiliter le travail ». Une première série de mesures a été adoptée en ce sens dès cet été, quelques semaines à peine après l’élection présidentielle, dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (dite TEPA) du 23 août 2007. Ces mesures ont été récemment complétées par le projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale et le Sénat. Face à la crise du logement, le Gouvernement mène également une politique volontariste en faveur des propriétaires et des locataires. Il répond aussi à la flambée des prix des carburants par des mesures ciblées.

1.– La loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a concrétisé plusieurs engagements présidentiels

La loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat du 23 août 2007 comporte des mesures relatives notamment aux heures supplémentaires, à l’allègement des droits de successions et de donation et aux rémunérations versées aux étudiants qui travaillent pour financer leurs études. Elle prévoit également la déductibilité des intérêts d’emprunts (cf. infra).

a) Les exonérations fiscales et sociales des heures supplémentaires

Depuis le 1er octobre 2007, les heures supplémentaires des salariés, du secteur privé comme du secteur public, sont exonérées d’impôt sur le revenu. Elles bénéficient également d’une réduction forfaitaire de cotisations patronales et d’un allégement de cotisations salariales. La mesure s’applique à tous les salariés, cadres ou non-cadres « autonomes », y compris ceux employés et rémunérés selon un régime de forfait, en heures ou en jours, qu’ils soient en CDI ou en CDD, en intérim ou en emploi saisonnier, à temps partiel ou à temps complet. Ces exonérations fiscales et sociales s’appliquent également aux agents publics (fonctionnaires et agents contractuels) des trois fonctions publiques (d’État, hospitalière et territoriale) (36).

À la fin du mois d’octobre, plus d’un tiers des entreprises a déclaré des heures supplémentaires en appliquant le nouveau dispositif. 5,53 milliards d’euros seront ainsi investis dans le pouvoir d’achat des Français en 2008 ; 6,63 milliards d’euros le seront en régime de croisière.

Exemple : Un salarié payé 1 500 euros par mois dans une petite entreprise verra ainsi ses revenus annuels augmentés de 2 500 euros, en réalisant 4 heures supplémentaires par semaine.

b) L’allégement des droits de succession et de donation

Les droits de succession et de donation ont été allégés, afin d’augmenter le pouvoir d’achat des Français et la croissance, conformément à la promesse de Nicolas Sarkozy durant la campagne présidentielle :

– les droits de successions entre époux, entre partenaires liés par un PACS et pour les frères et sœurs résidant sous le même toit ont été supprimés ;

– les droits de mutation à titre gratuit ont été allégés pour les ascendants, les enfants ou les personnes handicapées (qui bénéficient désormais d’un abattement de 150 000 euros au lieu de 50 000 euros), pour les neveux et nièces (dont l’abattement est porté à 7 500 euros) et pour les frères et sœurs qui ne remplissent pas les conditions pour être exonérés (l’abattement passant de 5 000 à 15 000 euros). Ils seront également allégés grâce à l’introduction d’une actualisation annuelle, suivant les mêmes modalités que l’impôt sur le revenu, des tarifs et abattements applicables ;

– les dons d’une somme d’argent d’un maximum de 30 000 euros au profit d’un enfant, d’un petit-enfant, d’un arrière-petit-enfant ou, à défaut d’une telle descendance, d’un neveu ou d’une nièce sont exonérés de droits de mutations à titre gratuit ;

– les partenaires liés par un PACS bénéficient désormais des mêmes tarifs, droits et abattements que ceux applicables pour les donations effectuées entre personnes mariées.

Au total, l’État investit 1,933 milliard d’euros en 2008 dans le pouvoir d’achat à ce titre. En régime de croisière, cette somme s’élèvera à 2,272 milliards d’euros.

Exemple : Un père veuf avec deux enfants décède. Après son décès, chacun de ses enfants reçoit 150 000 euros, exonérés d’impôt. Avant l’adoption de la loi TEPA, chacun de ses héritiers aurait dû payer 13 300 euros de droits, soit une économie d’impôt de 26 600 euros pour la famille.

c) L’exonération des rémunérations versées aux étudiants qui travaillent pour financer leurs études

Depuis la loi de finances pour 2005, les rémunérations perçues par les jeunes d’au plus 21 ans dans le cadre d’emplois exercés pendant leurs congés scolaires ou universitaires (« jobs d’été ») sont exonérées d’impôt sur le revenu, dans la limite annuelle de deux fois le montant mensuel du SMIC. Cette exonération a été étendue à tous les salaires – et non plus ceux perçus uniquement pendant les congés – perçus par les élèves ou étudiants âgés de 25 ans au plus. Le plafond annuel d’exonération a également été relevé, passant de deux à trois fois le SMIC mensuel.

Exemple : un étudiant de 18 ans célibataire, rattaché au foyer fiscal de ses parents, travaille trois mois d’été au SMIC et perçoit un salaire de 3 090 euros. Ses parents auraient dû acquitter un impôt de 1 597 euros, compte tenu de leurs salaires. Avec l’exonération, leur impôt net à payer s’élève à 1 221 euros, soit un gain fiscal de 376 euros.

d) Le revenu de solidarité active

La loi TEPA a également mis en place, à titre expérimental, le revenu de solidarité active (RSA). Le RSA est un dispositif qui vise à rendre attractif le retour au travail ou l’augmentation de l’activité professionnelle pour les personnes éloignées de l’emploi qui bénéficient de la solidarité nationale, ainsi qu’à lutter contre la pauvreté.

Il est destiné à permettre à l’ensemble des personnes concernées d’augmenter leur revenu à chaque heure travaillée, dès lors qu’elles auront ou retrouveront un emploi, quelle qu’en soit la nature (contrat aidé ou de droit commun), l’employeur et la durée.

Cette mesure vient en soutien du revenu de personnes qui se situent en dessous du seuil de pauvreté (817 euros par mois pour une personne seule), généralement dans le premier décile de la population dont le revenu mensuel est inférieur à 780 euros. Sa mise en œuvre ne concerne qu’une partie des départements, sur la base de leur candidature, et, à l’intérieur de ces départements, qu’une partie de leur territoire (environ un quart), le choix de cette méthode expérimentale étant destiné à permettre une comparaison à l’intérieur d’un même département entre une zone « expérimentale » et une zone « témoin ».

On estime qu’au total l’expérimentation devrait concerner environ 10 % des bénéficiaires du RMI (soit environ 114 000 bénéficiaires) et la même proportion des bénéficiaires de l’API - puisque les dispositions de la loi TEPA du 21 août 2007 ont permis d’élargir aux bénéficiaires de l’API le dispositif expérimental initialement imaginé pour les seuls bénéficiaires du RMI.

Selon les informations transmises par le Haut commissaire à la solidarité active et à la lutte contre la pauvreté, M. Martin Hirsch, en moyenne pour l’ensemble des intéressés, la prestation RSA apportera un supplément de revenu de 1 600 euros par an, soit un peu plus de 130 euros par mois. Il s’agit bien sûr d’un chiffre théorique, le RSA étant une allocation différentielle familialisée, dont le montant unitaire, individuel, dépend de nombreuses variables, en particulier associées à la situation familiale et professionnelle de la personne concernée.

Dans le cadre de cette expérimentation, les personnes pourront également bénéficier d’un « coup de pouce » financier, mis en place dans pratiquement l’ensemble des départements ainsi que pour les bénéficiaires de l’API. Pour ces derniers, le coup de pouce pourra s’élever à un montant maximum de 1 000 euros pour l’ensemble de la durée de l’expérimentation et permettra de couvrir des dépenses associées à la reprise ou au maintien dans l’emploi (frais de garde, de mobilité, etc.)

L’État prend à sa charge sur le programme 304 « lutte contre la pauvreté, expérimentations » dont dispose le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, 50 % du coût de cette nouvelle prestation servie pour les bénéficiaires du RMI par les départements (via les caisses d’allocations familiales). Il assume également l’intégralité du coût pour les bénéficiaires de l’API.

L’ensemble du service de cette prestation représente un effort budgétaire évalué à 26,2 millions d’euros pour la première année d’expérimentation, auquel il faut ajouter quelque 1,3 million d’euros pour le « coup de pouce » API, soit un total de 27,5 millions d’euros, sur les 35 millions d’euros budgétés pour l’expérimentation du RSA. Pour mémoire, l’écart est mobilisé pour le financement de l’accompagnement professionnel des bénéficiaires de l’API, l’appui au dispositif d’animation et de pilotage mis en place par les départements, et l’évaluation nationale de l’expérimentation.

Il faut enfin rappeler que l’État permet aux départements qui le souhaitent de mettre en place un dispositif de « coup de pouce » analogue à celui ouvert aux bénéficiaires de l’API, qui viendra en soutien du revenu des personnes concernées, en mobilisant à cette fin les crédits qui auraient été servis aux intéressés au titre de la prime de retour à l’emploi.

e) La revalorisation de la prime pour l’emploi

Dans le prolongement de la loi TEPA, le projet de loi de finances pour 2008 revalorise la prime pour l’emploi, qui est un crédit d’impôt visant à inciter au retour à l’emploi ou au maintien de l’activité. Ses seuils et ses limites ont été rehaussés de 1,3 % – comme l’évolution de l’indice des prix hors tabac prévue pour 2007 – pour un coût de 260 millions d’euros en 2008.

2.– Le développement de la concurrence au service des consommateurs

Pour augmenter le pouvoir d’achat des Français, la politique de revalorisation du travail engagée avec l’adoption de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, doit être complétée par une action durable sur le niveau des prix. Tel est l’objet du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, présenté par M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de la consommation et du tourisme, le 31 octobre dernier.

Adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, le 27 novembre dernier, et le Sénat, le 14 décembre, ce texte prévoit notamment :

– la poursuite de la réforme de la loi Galland du 1er juillet 1996 sur l’interdiction de la revente à perte dans la grande distribution. La première étape de la réforme de cette loi, engagée par la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, dite loi Dutreil, a déjà permis de restituer près de 2,5 milliards d’euros aux consommateurs chaque année, tout en créant 20 000 emplois. Le projet de loi poursuit cette démarche : l’abaissement du seuil de revente à perte en y intégrant la totalité des « marges arrière » (c’est-à-dire les sommes versées par les fournisseurs en échange de la promotion de leurs produits) permettra des baisses significatives de prix dans les grandes surfaces et de faire ainsi bénéficier les consommateurs de ces avantages commerciaux obtenus par les distributeurs ;

– l’obligation pour les banques de présenter à leurs clients un relevé annuel récapitulatif des frais bancaires pour leur compte de dépôt, comme le demandaient depuis plusieurs années les associations de consommateurs ;

– la fin des numéros surtaxés pour les lignes d’assistance téléphonique (« hotlines ») et la généralisation de la gratuité du temps d’attente ;

– la facilitation des conditions de sortie de contrats dans le secteur des consommations électroniques, en plafonnant à dix jours la durée du préavis ainsi que les délais de restitution des avances et des dépôts de garantie. Le changement d’opérateur en cas de conclusion d’un contrat assorti d’une durée minimale d’engagement sera également facilité, à la suite d’un amendement adopté à l’Assemblée nationale : chaque offre d’engagement de 24 mois devra être accompagnée d’une offre de 12 mois comparable, et le consommateur devra pouvoir résilier un contrat de 24 mois au bout du 13e mois, moyennant un dédit correspondant au quart (dans la version adoptée par le Sénat) des montants restant à rembourser jusqu’à l’expiration du délai de 24 mois. Le projet de loi complète ainsi la réduction à dix jours du délai de portabilité du numéro en cas de changement d’opérateur, opérée par la loi en faveur des petites et moyennes entreprises et effectif depuis le 21 mai 2007.

3.– Une politique volontariste en faveur des propriétaires et des locataires

Face à la crise du logement, le Gouvernement mène une politique globale visant à agir sur l’ensemble de la chaîne du logement.

a) L’allègement du coût de l’accession à la propriété

En premier lieu, pour favoriser l’accession à la propriété, la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a mis en place un crédit d’impôt sur le revenu portant sur les intérêts de l’emprunt contracté pour l’acquisition ou la construction d’une résidence principale, pendant les cinq premières années.

Ce crédit d’impôt devrait concerner environ 700 000 ménages en année pleine. En régime de croisière – atteint en 2014, à législation inchangée – le nombre de bénéficiaires devrait être de l’ordre de 3,5 millions.

Exemple

Selon les simulations du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi :

– la mesure permet à un célibataire qui souscrit, le 1er octobre 2007, un emprunt de 100 000 euros sur quinze ans à un taux de 4 %, de réaliser, sur cinq ans, un gain de 3 466 euros, soit une réduction de plus de 10 % du coût total de son crédit, qui s’élèvera, hors assurance, à 33 000 euros ;

– elle permet à une famille avec deux enfants, qui souscrit, le 1er septembre 2007, un emprunt de 200 000 euros sur 20 ans au taux de 4 %, de réaliser, sur cinq ans, un gain de 7 314 euros, soit une réduction de plus de 8 % du coût total de son crédit, qui s’élèvera, hors assurance, à environ 90 000 euros.

Afin de renforcer ce dispositif et de soutenir le pouvoir d’achat des ménages lors de la première année d’acquisition d’un logement, le projet de loi de finances pour 2008 propose de porter de 20 % à 40 % le taux du crédit d’impôt sur le revenu pour les intérêts de la première annuité de remboursement.

Ce nouveau dispositif constitue une mesure forte en faveur du pouvoir d’achat des ménages accédant à la propriété.

De même l’élargissement du prêt à taux zéro aux logements anciens et l’amélioration de ses barèmes a permis d’augmenter le nombre de primo-accédants aidés et de le porter à 270 000 par an.

Un premier bilan de la réforme du prêt à taux zéro montre que celui-ci a bénéficié aux primo-acccédants modestes. En effet, en 2006, les employés, qui représentent 31,9 % des effectifs, restent la catégorie la plus nombreuse des bénéficiaires. Ils sont suivis des ouvriers (26,1 %) puis des professions intermédiaires (23,2 %). De plus, près de 61 % des bénéficiaires de prêt à taux zéro ont un revenu net de l’année en cours inférieur à 2,5 SMIC, contre 62 % en 2005 et 53 % en 2004.

b) Les aides permettant aux locataires de faire face à leurs dépenses de logement

L’article 26 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale a prévu l’indexation des barèmes des aides au logement sur l’évolution de l’indice de référence des loyers. Les paramètres concernés sont : les plafonds de loyers, les plafonds de charge de remboursement de contrats de prêts dont la signature est postérieure à la date de révision du barème et les équivalents de loyers et de charges locatives. Cette révision annuelle automatique des barèmes permettra de stabiliser, toutes choses égales par ailleurs, la part de revenu consacrée par les ménages modestes à leur dépense de logement. La mesure sera appliquée dès le 1er janvier 2008.

Par ailleurs, l’État et le 1 % logement ont mis en place, dans le cadre d’une convention signée le 20 décembre 2006, la garantie universelle des risques locatifs (GRL), qui est un dispositif de garantie contre les impayés de loyer.

Il permet aux compagnies d’assurance de proposer aux bailleurs des contrats contre les risques d’impayés beaucoup moins sélectifs que les contrats classiques. Ils ne tiennent pas compte, par exemple, de la nature du contrat de travail du locataire (CDD ou CDI), du possible dépassement de son taux d’effort (dans la limite de 50 %) et ne sont pas soumis à l’existence d’une caution. Le surcroît de risque généré par l’élargissement du public des locataires couverts par rapport à la norme actuelle (CDI avec 33 % de taux d’effort) est intégralement financé par le 1 % logement pour les ménages salariés ou par l’État pour les autres bénéficiaires.

Ce financement permet d’abaisser de manière significative, par rapport aux pratiques actuelles, les seuils d’accessibilité financière des candidats locataires et de les dispenser d’apporter des cautions (37). En outre, les sinistres pourront si nécessaire donner lieu, à l’initiative du 1 % logement, à un accompagnement social et à des modalités de recouvrement adaptées.

La diffusion de ce dispositif doit être encouragée.

En effet, l’existence de la GRL est conditionnée au fait que le propriétaire souscrive une assurance impayés de loyers, dont le montant n’est pas négligeable, puisqu’il représente 2,5 % du montant total des loyers et des charges locatives. Par conséquent, peu de bailleurs souscrivent à une telle assurance. L’étude de l’ANIL sur les conditions d’accès au parc locatif privé (38) montre qu’en 2003, moins de 10 % des bailleurs interrogés lors de son enquête l’ont souscrite. Ce mode de garantie reste donc marginal, alors que la prime d’assurance impayés de loyer est déductible du revenu foncier.

c) Le développement du parc de logement

Plus fondamentalement, la crise du logement ne peut se résoudre sans une action structurelle visant à augmenter fortement le parc de logement, qu’il soit public ou privé. Le Gouvernement a ainsi entrepris une politique volontariste pour développer le parc locatif social et privé.

S’agissant du parc locatif public, la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a donné une nouvelle impulsion à la construction de logements sociaux en prévoyant le financement de 500 000 logements sur la période 2005-2009. Ces objectifs de financement ont été portés à 591 000 par la loi instituant le droit au logement opposable du 5 mars 2007. La loi portant engagement national pour le logement du 13 juillet 2006 a prévu plusieurs mesures pour améliorer l’équilibre financier des opérations locatives sociales, favoriser la mobilisation de la ressource foncière et accompagner les maires bâtisseurs.

Concernant le parc locatif privé, le dispositif « Robien » a permis une relance vigoureuse de la construction de logements locatifs. Il a été réformé par la loi du 13 juillet 2006, qui a créé un dispositif « Borloo » permettant de développer un parc locatif intermédiaire. Parallèlement, la loi de programmation pour la cohésion sociale a renforcé les moyens financiers de l’agence nationale de l’habitat (ANAH) pour lui permettre de subventionner les travaux des propriétaires-bailleurs, de lutter contre la vacance des logements et de subventionner les travaux des propriétaires-occupants modestes.

Les premiers résultats sont aujourd’hui tangibles puisqu’en 2006, ont été comptabilisées 421 0000 mises en chantier, ce qui constitue un niveau historiquement élevé.

4.– Des mesures pour répondre à la hausse des prix du carburant

Plusieurs mesures ont été adoptées pour répondre à la hausse des prix du carburant, de l’ordre de 15 % en France depuis le début de l’année (à la suite d’une hausse des cours du brut de 80 % durant la même période). L’aide à la cuve a ainsi été doublée : elle est passée de 75 euros à 150 euros pour alléger la facture des ménages non imposables qui se chauffent au fioul. Ils étaient 475 000 en 2006.

La mise en concurrence entre les distributeurs a été renforcée par la mise en place d’un site internet (prix-carburants.gouv.fr) permettant de comparer le tarif des carburants sur un itinéraire donné. La concertation menée avec les distributeurs permet également aux Français de bénéficier de prix à la pompe inférieurs à la moyenne européenne. Cette politique de modération des prix repose sur un lissage des augmentations en cas de hausse brutale des cours et sur une répercussion rapide des baisses de cours.

Dans le prolongement du Grenelle de l’environnement, la mise en place d’une « prime à la casse », financée par l’écopastille, incitera les Français à choisir des véhicules propres et à abandonner leurs véhicules plus consommateurs de carburant (grosses cylindrées, 4x4, voitures les plus polluantes).

B.– LE PROJET DE LOI POUR LE POUVOIR D’ACHAT PROLONGE ET COMPLÈTE CES MESURES

Le présent projet de loi prolonge et complète cet ensemble de mesures. Il comporte cinq mesures en faveur du pouvoir d’achat. Annoncées par le Président de la République le 29 novembre dernier, ces mesures seront applicables dès le 1er janvier 2008.

1.– Le rachat des journées de réduction du temps de travail par l’employeur

L’article 1er du projet de loi permet aux salariés de convertir en rémunération un certain nombre de droits à congé acquis avant le 31 décembre 2007 : JRTT, jours de repos acquis dans le cadre d’un système de forfait jours, droits à congé stockés sur un compte épargne-temps. Ces journées ou demi-journées de repos seront rachetées sur demande du salarié et en accord avec l’employeur. Elles feront l’objet d’une rémunération majorée, comme les huit premières heures supplémentaires (soit plus 25 % en l’absence d’accord collectif, et au minimum 10 % en cas d’accord), et seront totalement exonérées de cotisations sociales (hors CSG et CRDS), dans la limite de dix jours par salarié.

2.– Le déblocage anticipé de la participation aux résultats de l’entreprise

La deuxième mesure proposée consiste à offrir la faculté aux salariés qui le souhaitent de débloquer de manière anticipée, entre le 1er janvier et le 30 juin 2008, les sommes qui leur ont été attribuées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise. Ce déblocage ne pourra dépasser un plafond de 10 000 euros. Il ne pourra porter sur les sommes investies dans un plan d’épargne retraite collective (PERCO). Le régime fiscal et social applicable sera très attractif : les sommes seront exonérées d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales (hors CSG et CRDS). Le Gouvernement évalue à 12 milliards d’euros (sur 100 milliards d’euros d’encours) les sommes qui seront débloquées.

3.– La prime exceptionnelle pour les salariés des entreprises de moins de 50 salariés

L’article 3 du projet de loi vise à prendre en compte la situation des salariés travaillant dans des entreprises de moins de 50 salariés, non assujetties à l’obligation de versement de la participation. Ces entreprises pourront ainsi verser une prime exceptionnelle, d’un montant maximum de 1 000 euros, à leurs salariés. Cette prime sera assujettie à l’impôt sur le revenu, à la CSG et à la RDS mais exonérée de cotisation.

4.– L’indexation de l’indice de référence des loyers sur l’évolution des prix à la consommation

L’article 4 prévoit que la révision annuelle du loyer en cours de bail dans le parc privé est indexée sur l’indice des prix à la consommation. L’objectif est d’augmenter le pouvoir d’achat des locataires, tout en offrant aux propriétaires une indexation simple et lisible. En effet, le nouvel indice de référence des loyers mis en place par la loi du 26 juillet 2005 relatif au développement des services à la personne n’a permis de limiter que modérément la progression des loyers, qui est restée supérieure à l’inflation.

Compte tenu de ce nouvel indice, les loyers progresseraient de 1,8 %, en 2008, contre 2,8 % avec l’indice actuel.

5.– La réduction du montant maximum du dépôt de garantie à un mois de loyer

L’article 5 prévoit de limiter le dépôt de garantie, lors de la location d’un logement, à un mois de loyer au lieu de deux. En considérant que le loyer moyen en France est de 600 euros et que le nombre de changements de locataires peut être estimé à 1 million par an, on peut évaluer que la diminution du dépôt de garantie à un mois va permettre de réinjecter 600 millions d’euros de pouvoir d’achat aux ménages.

C.– L’ACTION DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR DU POUVOIR D’ACHAT SE POURSUIVRA AU-DELÀ DE CE PROJET DE LOI

L’action menée en faveur du pouvoir d’achat ne s’arrêtera évidemment pas avec l’adoption du présent projet de loi. Le Président de la République et le Gouvernement ont ainsi annoncé une nouvelle série de mesures, qui passeront pour certaines d’entre elles par des accords de branche, et non par la loi :

– les entreprises pourront ainsi déroger aux accords de branche sur les 35 heures, à condition d’octroyer des augmentations de salaire et sous réserve d’accord majoritaire. Dans les branches où il n’y aurait pas de négociations salariales, les allégements de charges seraient remis en cause. Ce sujet sera abordé dans le cadre de la conférence avec les partenaires sociaux visant à discuter de l’agenda social 2008 ;

– le travail le dimanche sera développé, sur la base du volontariat et à condition que la rémunération des salariés soit doublée ;

– un indice du pouvoir d’achat correspondant à la vie quotidienne des Français sera créé ;

– le projet de loi relatif à la réforme du service public de l’emploi, présenté en conseil des ministres le 6 décembre 2007, devrait être adopté au début de l’année 2008. Il opère la fusion de l’ANPE et de l’Unédic, afin de renforcer la qualité du service rendu aux demandeurs d’emploi et aux entreprises, sur le modèle de l’opérateur unique mis en place au Royaume-Uni (Jobcenter Plus) ;

– un projet de loi de modernisation de l’économie sera déposé et examiné au printemps 2008 ;

– Enfin, le Président de la République a annoncé, lors d’un discours du 11 décembre dernier, sa volonté que soit mis en place un régime unique d’aide à l’investissement locatif, qui soit suffisamment avantageux pour permettre la location à des personnes à faibles revenus. Le parc privé devra donc être en mesure de développer une offre très sociale. Il a, par ailleurs, annoncé la généralisation d’un système d’assurance contre les impayés de loyers, afin de mutualiser le risque et de diminuer le coût d’une telle assurance. Ce mécanisme devrait permettre de faire disparaître totalement la barrière de la caution.

D.– LA CONTRIBUTION DE LA MAJORITÉ PARLEMENTAIRE À L’ACTION MENÉE EN FAVEUR DU POUVOIR D’ACHAT

Nous pilotons, avec notre collègue Frédéric Lefebvre, un groupe de travail sur le pouvoir d’achat, créé sur l’initiative de Jean-François Copé, président du groupe UMP à l’Assemblée nationale. Ce groupe de travail a pour objectif d’identifier et de promouvoir des dispositions permettant de renforcer le pouvoir d’achat des Français soit en leur donnant du pouvoir d’achat supplémentaire, soit en le leur rendant par une action volontariste sur les charges fixes ou incontournables qui pèsent sur le revenu des ménages. Plusieurs actions sont privilégiées :

– enrichissement des textes débattus au Parlement par des amendements tendant à une augmentation des salaires ou à une baisse des prix ;

– dépôt de propositions de loi dans le même sens.

Cette démarche a déjà porté ses fruits. Elle s’est ainsi traduite :

– par l’adoption d’un amendement à la proposition de loi relative aux tarifs réglementés d’électricité et de gaz naturel instaurant une réversibilité totale pour la consommation d’électricité des ménages ;

– par l’adoption d’un amendement soumettant les sociétés pétrolières à une taxe exceptionnelle sur leur provision pour hausse des prix, afin d’abonder un fonds social pour le chauffage des ménages ;

Notons par ailleurs le dépôt d’une proposition de loi sur l’organisation du temps de travail dans l’entreprise et le pouvoir d’achat.

Elle s’est concrétisée également par trois amendements au présent projet de loi pour le pouvoir d’achat, visant à :

– permettre au locataire d’échelonner le paiement du dépôt de garantie ;

– à étendre la période de référence durant laquelle les droits à congé pourraient être monétisés ;

– à étendre la durée durant laquelle la prime exceptionnelle d’un montant maximum de 1 000 euros pourra être versée par les entreprises de moins de 50 salariés.

D’autres propositions interviendront dans le débat à plus ou moins brève échéance. L’objectif est de maintenir au niveau le plus élevé la manifestation de l’intérêt de la représentation nationale pour le sujet de préoccupation privilégié par les Français, en y apportant idées nouvelles et réponses concrètes.

1.– La réversibilité totale pour la consommation d’électricité des ménages

Grâce à un amendement initialement déposé par notre collègue Frédéric Lefebvre à la proposition de loi sur les tarifs réglementés d’électricité et de gaz, les consommateurs domestiques bénéficieront d’une réversibilité totale en matière de tarifs d’électricité. Ces consommateurs seront ainsi assurés de pouvoir revenir à un tarif réglementé à l’expiration d’un délai de six mois, et avant 2010. Cela leur permettra de tester le marché et d’effectuer d’éventuels aller-retour entre le secteur concurrentiel et le secteur réglementé. Cette réforme contribuera à renforcer la fluidité et à développer le marché de l’électricité par l’exercice d’une réelle concurrence, et ainsi à diminuer les prix de l’électricité.

2.– La taxe exceptionnelle sur les sociétés pétrolières

Grâce à un amendement au projet de loi de finance rectificative pour 2007 adopté à l’Assemblée nationale, un fonds social pour le chauffage des ménages sera mis en place. Il sera financé par une taxe exceptionnelle sur la provision pour hausse des prix des sociétés pétrolières. Cette taxe devrait rapporter entre 130 et 150 millions d’euros.

Ce fonds permettra de financer le doublement de l’« aide à la cuve » c’est-à-dire l’aide exceptionnelle versée aux ménages les plus modestes pour le remplissage de la cuve de fioul, qui sera portée à 150 euros. Environ 680 000 foyers non imposables devraient en bénéficier, pour un coût supérieur à 100 millions d’euros.

3.– La réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise

Avec le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, M. Pierre Méhaignerie, le Rapporteur général, M. Gilles Carrez, Frédéric Lefebvre, co-président du groupe de travail « pouvoir d’achat » au sein du groupe UMP, ainsi que plusieurs de nos collègues, nous avons déposé une proposition de loi visant à réformer l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, en faveur du pouvoir d’achat (39).

Cette proposition vise à répondre à la situation de nombreux salariés et entreprises, désireux de recourir aux heures supplémentaires, mais bloqués en pratique par le niveau du contingent d’heures supplémentaires applicable dans l’entreprise. Celui-ci est en effet souvent fixé à un niveau inférieur au niveau du contingent établi par décret. La loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail a apporté une première réponse à cette difficulté en instituant un régime d’« heures choisies » pouvant être effectuées au-delà du contingent d’heures supplémentaires, sur l’initiative du salarié et en accord avec l’employeur. La mise en œuvre des heures choisies reste cependant subordonnée à la conclusion d’accords de branche ou d’entreprise, qui restent trop rares.

La proposition de loi vise à permettre d’expérimenter un régime semblable à celui des heures choisies, à l’initiative du salarié et en accord avec l’employeur, dans l’attente d’un accord collectif sur les heures choisies, sous réserve que les représentants du personnel ne s’y opposent pas. De nombreuses garanties encadrent la procédure : rémunération au moins également à celle des heures supplémentaires, conditions fixées par écrit, etc.

4.– Le lissage du dépôt de garantie

Votre commission a adopté, sur notre proposition conjointe avec Frédéric Lefebvre, un amendement au présent projet de loi ayant pour objet de donner la possibilité au locataire d’échelonner le paiement du dépôt de garantie. Les négociations menées entre le ministère du Logement et de la ville et les partenaires sociaux ont abouti et devraient permettre d’élargir le champ du loca-pass et d’aider tous les locataires modestes à lisser dans le temps le paiement du dépôt de garantie.

Par ailleurs, afin de donner des contreparties aux propriétaires, votre commission a aussi adopté un amendement permettant au locataire de demander au bailleur une attestation de paiement de loyer qui ne pourra lui être refusée. Celle-ci pourra être présentée au nouveau propriétaire et sera de nature à le rassurer sur le risque d’impayés de loyers.

5.– L’instauration d’une prime annuelle de résultats pour tous

Le dispositif de prime exceptionnelle proposé par le présent projet de loi relance le débat du partage de la valeur créée dans les entreprises. Les tableaux ci-après montrent que trop nombreux sont les salariés qui sont exclus de tout dispositif leur permettant de bénéficier directement des bénéfices de l’entreprise dégagés au cours d’un exercice donné : d’où la volonté que l’ensemble des salariés de toute entreprise, quel que soit son effectif, puisse être associé aux bénéfices réalisés par celle-ci. Cette proposition vient prendre sa place, pour les entreprises non cotées, dans le débat lancé, à propos des entreprises cotées, autour du thème « stock-options pour tous ».


L

L’objectif est d’adapter le dispositif de l’intéressement en instaurant une « une prime annuelle de résultat pour tous » au sein de l’ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille.

Il procure deux avantages :

– à la différence de la participation et comme l’intéressement, il peut être perçu directement par le salarié sans nécessité de blocage, en restant inférieur à 20 % du total de la rémunération annuelle nette perçue par le salarié ;

– il est souple, puisque sa formule de calcul, laissée à l’initiative du dirigeant d’entreprise, permet de prendre en considération les spécificités de chaque situation et d’intégrer un élément de performance individuelle dans le calcul de la prime.

Cette proposition tendrait à rendre obligatoire la prime annuelle de résultat en inscrivant dans la loi un pourcentage minimal des bénéfices de l’entreprise distribués à ce titre. S’agissant des charges fiscales et sociales, la prime annuelle serait traitée à l’identique d’un dividende.

Enfin, la prime annuelle de résultat collerait davantage à la réalité économique, subordonnant son versement et son montant à la situation financière de l’entreprise. Elle laisserait de côté tout accord pluriannuel, qui présente structurellement un risque du fait de la variation erratique des conditions économiques que connaît l’entreprise.

Un mécanisme similaire devrait être mis en place dans la fonction publique afin de tenir compte de la performance de chaque agent, sur le modèle de ce qui a été mis en place par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, au sein de la police nationale.

EXAMEN EN COMMISSION

I.—AUDITION DES MINISTRES

Au cours de sa séance du 12 décembre 2007, votre Commission a procédé à l’audition, commune avec la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, de M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, et de Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, sur le projet de loi pour le pouvoir d’achat (n° 498).

M. Pierre Méhaignerie, Président de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, a d’abord souligné le caractère exceptionnel de cette réunion, espérant qu’à l’avenir un peu plus de temps sera laissé au Parlement pour lui permettre de travailler efficacement, même si la question du pouvoir d’achat a déjà été abordée depuis plusieurs semaines, voire depuis plusieurs mois.

Le Président Didier Migaud, souhaitant entrer le plus vite possible dans le vif du sujet, a simplement indiqué que si un premier texte sur le pouvoir d’achat a été présenté en juillet à l’initiative de Mme Christine Lagarde, ministre de l’Économie, des finances et de l’emploi, le problème reste entier, même si le ministre concerné a changé.

Mme Martine Billard a jugé scandaleuse la façon dont le débat se déroule. Outre le fait que le projet de loi n’a été examiné en conseil des ministres que le matin même, les amendements auraient logiquement dû être déposés avant 17 heures mardi soir, en l’absence pourtant de texte sur lequel s’appuyer. Le secrétariat du ministre chargé des relations avec le Parlement, interrogé sur la disponibilité d’un texte, a renvoyé le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) au site du journal Les Échos. Puis, elle a déclaré que, devant une telle mascarade, elle ne pouvait que quitter la salle de commission.

Bien que M. Pierre Méhaignerie, Président de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, ait fait remarquer que les deux coprésidents seraient souples dans l’appréciation du délai de dépôt des amendements, Mme Martine Billard, regrettant qu’on se moque du Parlement, a maintenu sa position, alors même que M. Pierre Morange l’a appelé à profiter de la présence de deux ministres pour examiner plus à fond les cinq articles de loi proposés, d’autant qu’une importante réunion de la commission des Affaires culturelles se tiendra la semaine suivante en application de l’article 88 du Règlement de l’Assemblée nationale, qui permettra à tous de déposer des amendements.

M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a d’abord indiqué que, si la question du pouvoir d’achat peut être considérée comme restant entière, le Gouvernement a, depuis six mois, commencé à apporter des réponses concrètes, en particulier avec la loi du 21 août 2007 dite « loi TEPA », entrée en application le 1er octobre.

Il faut cependant aller plus loin et c’est pourquoi le Gouvernement a souhaité présenter, après les annonces faites par le Président de la République voilà moins de quinze jours, un texte court et clair, composé de cinq articles : trois relèvent du ministère en charge du travail et concernent l’un le paiement des jours attribués au titre de la réduction du temps de travail, les fameux JRTT, l’autre le déblocage de la participation, et le troisième la possibilité de versement d’une prime de 1 000 euros dans les entreprises où n’existe pas de participation ; les deux autres articles relèvent du ministère du logement.

Ce texte n’est pas le premier qu’un ministre vient défendre, immédiatement après l’avoir présenté en conseil des ministres, devant des parlementaires qui le découvrent. C’est pourquoi le ministre du Travail et la ministre du Logement ont bien volontiers accepté de se libérer pour apporter toutes les explications utiles.

Avec ce texte, le Gouvernement veut permettre et non pas imposer. Les mesures en question sont d’ailleurs attendues depuis bien longtemps dans les entreprises, qu’il s’agisse des employeurs ou des salariés.

Pour ce qui est d’abord des jours attribués au titre de la réduction du temps de travail (JRTT), les salariés ne peuvent ou ne veulent pas toujours, du fait des 35 heures et de l’organisation du travail dans l’entreprise, prendre tous leurs JRTT. Aussi la faculté sera-t-elle ouverte, jusqu’au 30 juin 2008, d’échanger les jours de RTT contre de l’argent, sachant que si les exonérations valent pour dix jours, il sera possible d’aller au-delà dans la mise en œuvre du dispositif. Ces JRTT seront payés comme les heures supplémentaires, à 125 %, à moins qu’un accord collectif applicable dans l’entreprise ait prévu un autre taux. Ainsi, un salarié au SMIC échangeant cinq JRTT touchera une rémunération complémentaire de 375 euros compte tenu d’une majoration de 25 %, tandis qu’un salarié gagnant 2 500 euros bruts percevra 720 euros.

La logique suivie en la matière, d’une part, laisse au salarié la décision de prendre ou non ses jours de RTT et, d’autre part, prend en compte le fait que de l’argent est disponible, nombre d’entreprises ayant provisionné les jours de RTT au même titre que les comptes épargne-temps, même si les obligations ne sont pas les mêmes. En outre, le fait de pouvoir payer les RTT simplifiera la vie des entreprises qui n’auront quasiment plus à demander aux salariés, lorsque le stock de RTT est important, de se mettre en congés, même si cela doit conduire à recruter des intérimaires. L’apurement des stocks sera d’autant plus facile que la limite à l’exonération de dix jours de RTT est assez élevée, puisque l’on compte en moyenne treize jours de RTT par salarié. Enfin, les JRTT payés étant exonérés des cotisations sociales et patronales, hors bien sûr la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), le coût pour les entreprises sera réduit.

S’agissant, ensuite, du déblocage de la participation, celui-ci sera possible à la demande du salarié avant le 30 juin 2008, pour le montant de son choix, dans la limite de 10 000 euros, somme qui sera à la fois exonérée de cotisations sociales, hors CSG et CRDS, et d’impôt sur le revenu.

Aujourd’hui, 38 % des salariés dans notre pays relèvent du régime des JRTT, tandis que plus de la moitié sont couverts par un accord de participation. Pour l’autre moitié, le projet de loi permet aux petites entreprises de moins de cinquante salariés de verser, avant le 30 juin 2008, et après accord collectif préalable ou référendum d’entreprise, une prime exceptionnelle pouvant s’élever à 1 000 euros maximum, laquelle sera soumise au régime fiscal de l’intéressement, c’est-à-dire un assujettissement à l’impôt sur le revenu, mais une exonération de cotisations sociales.

Pour autant, le déblocage de la prime ne doit pas se faire au détriment des négociations salariales, qu’il s’agisse de celles déjà annoncées en matière de salaires ou de primes de fin d’année, ou de celles à venir. Toutefois, du fait de l’obligation d’un accord collectif ou d’un référendum, il n’est pas imaginable que des salariés acceptent le versement de la prime au prix d’un gel des salaires dans les futures négociations salariales.

Il faut, en tout état de cause, une synchronisation des mesures, prévues sur tout le premier semestre 2008. Celles-ci auront un effet rétroactif au 1er janvier 2008, compte tenu du fait que le texte ne sera examiné que le 18 décembre prochain à l’Assemblée nationale et début janvier au Sénat. À cet égard, l’accord de tous devrait être obtenu puisqu’il s’agit d’améliorer le pouvoir d’achat des Français.

Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, a présenté les articles 4 et 5 du projet de loi qui tendent à augmenter le pouvoir d’achat grâce à des mesures en matière de logement, même si d’autres actions seront menées dans l’année à venir.

L’article 4 tend à indexer l’évolution maximale des loyers sur l’évolution des prix, car la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne a décidé d’une indexation des loyers assez complexe, assise pour 60 % sur l’évolution des prix à la consommation, pour 20 % sur celle du coût de la construction et pour les 20 % restant sur celle du coût des travaux d’entretien. Cet indice de référence des loyers (IRL) étant difficilement compréhensible à la fois pour les propriétaires et pour les locataires, il est donc proposé qu’il soit désormais fondé sur une référence plus simple, l’évolution des prix à la consommation, et applicable tant aux nouveaux contrats qu’à ceux en cours.

L’article 5 réduit, avec toutes les conséquences que la mesure induit en matière de pouvoir d’achat, le montant maximum du dépôt de garantie à un seul mois pour le seul secteur privé, ce qui est déjà le cas pour les HLM. La disposition sera applicable aux nouveaux contrats, sans possibilité de restitution pour les contrats en cours.

M. Pierre Morange, Rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, après avoir demandé des précisions complémentaires sur les compensations à la sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales, a souhaité également mieux comprendre l’articulation entre les dispositions de la loi dite TEPA du 21 août 2007 relative, en particulier, à la défiscalisation des heures supplémentaires, et celles inscrites dans le projet de loi.

S’agissant par ailleurs de la participation, les sommes qu’il est proposé de débloquer, d’un niveau pouvant atteindre 10 000 euros par salarié, vont-elles pouvoir être liquidées, sachant que certaines peuvent très bien être mobilisées sur des investissements de moyen et long terme ?

Quant à l’indice retenu comme plafond d’indexation des loyers, qui permettra de faire passer l’augmentation annuelle – laquelle avait été précédemment de 5 à 6 % avec l’indice adossé sur le coût de la construction, puis de 2,6 % avec l’indice mixte applicable depuis le 1er janvier 2006 – aux alentours de 1,3 % par an, ne risque-t-il d’avoir un retentissement sur les programmes immobiliers des investisseurs, donc sur les bassins d’emplois correspondants ?

M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, a d’abord fait observer que si la présentation du projet de loi est intervenue rapidement c’est parce que ses mesures sont attendues par les Français. Il est donc normal que le Parlement s’en saisisse tout aussi rapidement.

Selon le projet de loi, le paiement des journées de RTT est soumis à l’accord de l’employeur. Cela signifie-t-il que celui-ci peut refuser de payer tout ou partie des JRTT ?

Par ailleurs, si le salarié souhaite monétiser non pas dix jours de RTT, mais quinze jours, l’employeur pourra-t-il accepter de ne payer que dix jours pour bénéficier de l’exonération prévue dans ce cas ?

Quant à l’indice de référence des loyers, un nouvel indice est-il en préparation ou l’indice actuel sera-t-il modifié ? Qu’en sera-t-il de la prise en compte du coût de la construction ?

En réponse aux questions du rapporteur, M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a apporté les précisions suivantes :

– Sur la question de la compensation, le déblocage aura plutôt des conséquences positives pour la trésorerie de la sécurité sociale puisqu’il entraînera des recettes en termes de CSG et de CRDS, recettes nouvelles qui n’étaient pas prévues.

– Outre le fait que le déblocage de la prime de 1 000 euros ne peut se substituer à un autre élément de rémunération ni même à une augmentation salariale, son caractère exceptionnel, qui justifie qu’il n’entraîne pas le versement de cotisations sociales, ne peut constituer, puisqu’il n’était pas attendu, une perte pour la sécurité sociale alors qu’il lui fera bénéficier, au contraire, de la CSG et de la CRDS. De même, s’agissant des jours de RTT payés, l’exonération de cotisation sociale se limitera à dix JRTT. La perte de cotisations sociales pour la sécurité sociale est totalement fictive puisque l’utilisation de journées de RTT sous forme de congé n’aurait entraîné en sa faveur aucune recette.

Cela étant, le point sera fait dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, sachant que, selon l’article L.131-7 du code de la sécurité sociale, la compensation des exonérations de cotisations de sécurité sociale par le budget de l’État est de droit lorsque l’on ne se situe pas dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il reste qu’aucune spoliation de la sécurité sociale ne devrait apparaître, bien au contraire.

– Pour ce qui est de l’articulation avec les différentes exonérations prévues par la loi TEPA, il faut savoir, pour prendre l’exemple d’un cadre bénéficiant d’un plafond conventionnel de 212 jours, qu’en l’état actuel du projet de loi s’appliqueraient : de 212 à 218 jours, les exonérations prévues par le présent texte ; de 218 à 222 jours, les exonérations prévues par le présent texte ainsi que les exonérations dites « TEPA » ; au-delà de 222 jours, les exonérations « TEPA ». À tout le moins, on peut passer à deux régimes au lieu de trois, voire faire encore plus simple si les parlementaires ont la solution.

– Concernant le déblocage de la participation, il y a largement de quoi faire face aux demandes des cinq millions de salariés couverts par un accord de participation, puisque le déblocage de 7 milliards d’euros en 2004 n’a pas empêché les encours d’épargne salariale de passer de 57 milliards d’euros alors à près de 100 milliards aujourd’hui.

– L’architecture des relations dans l’entreprise n’est aucunement remise en cause par le texte. Le pouvoir de direction, donc d’organisation du travail, appartient au chef d’entreprise. Personne ne pourra, dans ces conditions, empêcher ce dernier de refuser de payer les journées de RTT, d’autant qu’obliger à motiver le refus risquerait de créer une usine à gaz en ouvrant une possibilité d’action en justice. Il convient plutôt de penser que les choses se dérouleront correctement, surtout qu’il s’agit d’un dispositif ponctuel, qui ne pourrait devenir structurel que par une négociation. Il est d’ailleurs possible que cela soit l’un des thèmes de la conférence sociale du 19 décembre prochain avec le Président de la République et l’ensemble des partenaires sociaux, qui sera appelée à déterminer l’agenda social de 2008.

– Quant à la question de la monétisation non pas de dix journées de RTT, mais de quinze, si seuls les dix premiers jours bénéficieront des exonérations, il est entendu qu’un chef d’entreprise pourra aussi bien donner son accord pour cinq journées que pour dix ou pour quinze. Le plafond de dix jours n’est pas infranchissable, mais les exonérations en dépendent.

Le Président Didier Migaud s’est étonné que le ministre ait indiqué que les 1 000 euros de prime exceptionnelle auront un effet neutre pour la sécurité sociale et pour le budget de l’État, alors que des documents émanant du Gouvernement ont fait précédemment état de recettes moindres, à hauteur de 35 millions pour la première et de 130 millions pour le second au titre de l’impôt sur les sociétés.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a confirmé qu’une étude d’impact contenait bien de tels chiffres.

M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a répondu que s’il n’a pas voulu faire de prévisions macro-économiques en matière de déblocage tant de la participation que des journées de RTT, c’est parce que, outre le fait que la décision appartient en l’occurrence au salarié et, bien sûr, à l’employeur, il est préférable d’attendre de voir ce que la mesure va exactement donner, d’autant que cela ne renvoie pas aux calendes grecques puisque tout doit se décider entre le 1er janvier et le 30 juin 2008. Un point sera en tout état de cause fait lors de la discussion du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, qu’il s’agisse de l’impact au titre de l’impôt sur les sociétés ou des recettes complémentaires pour la sécurité sociale. Quant aux 1 000 euros eux-mêmes, ils ne viendront pas se substituer à du salaire.

M. Bruno Lemaire a alors indiqué que la mesure n’est pas exactement la même que celle proposée sous le gouvernement Villepin car, pour rendre le dispositif plus incitatif pour les entreprises, un système d’exonération de l’impôt sur les sociétés avait alors été prévu en fonction du montant de la prime qui avait été distribué, ce qui explique qu’il ne puisse y avoir le même impact.

Le Président Didier Migaud, ayant conclu de cette remarque que la nouvelle mesure est moins incitative, M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a fait remarquer que, si la précédente mesure a davantage été un succès dans les grandes entreprises, la nouvelle mesure cible spécifiquement les petites entreprises, celles qui ne sont pas couvertes par un accord de participation.

Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, a, pour sa part, indiqué que l’indice retenu n’aurait pas d’impact sur les programmes immobiliers des investisseurs, pour deux raisons : d’une part, les investisseurs ont toujours établi leurs prévisions sur la base du prix à la consommation sur quinze ans, en raison de l’incertitude que font régner aussi bien l’indice de révision des loyers que les précédents indices ; d’autre part, ils savent bien qu’existent à la fois une volonté forte et une nécessité absolue de construire. La perspective de 500 000 logements nouveaux leur permet donc de surmonter leurs éventuelles inquiétudes. Quant à la question de savoir si un nouvel indice est en préparation, la réponse est claire : l’indice de révision des loyers sera désormais indexé sur les prix à la consommation.

M. Jean-Pierre Balligand a souhaité savoir, dans la mesure où le ministre du Travail a indiqué que la participation concerne la moitié des salariés français, combien d’entre eux travaillent aujourd’hui dans des entreprises de moins de 50 salariés et combien dans des entreprises de plus grande taille.

Par ailleurs, ceux qui ont travaillé sur le sujet de l’épargne salariale ont vu que, s’il n’y a pas de problème pour les grandes entreprises où le mode de calcul favorise nettement l’accroissement des volumes de la participation, en revanche pour celles qui comptent entre 50 et 250 salariés, cet argent est le plus souvent investi en quasi fonds propres. Il n’est donc pas véritablement liquide, c’est d’ailleurs pourquoi il avait précédemment été décidé de ne pas toucher à la participation. On peut donc se demander si l’on n’est pas en train de jouer avec le feu pour les petites et moyennes entreprises (PME) et il conviendrait de disposer d’une étude d’impact pour s’assurer du contraire.

M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a répondu qu’il fournira les dernières statistiques du ministère du travail. Il est toutefois d’ores et déjà possible d’indiquer que huit millions de Français travaillent dans les entreprises de moins de 50 salariés du secteur marchand privé non agricole et un peu plus de 10 millions dans les entreprises de plus de 50 salariés.

Il s’agit bien évidemment de ne pas faire n’importe quoi avec le déblocage de la participation. Quand l’investissement a été effectué dans une entreprise, il est prévu que le déblocage ne pourra intervenir qu’après la conclusion d’un accord collectif, de façon à préserver les intérêts de l’entreprise et l’avenir des salariés. En général les choses se passent bien, car chacun a conscience qu’il s’agit non seulement de son argent mais aussi de l’entreprise, donc de ses salariés. C’est pourquoi en 2004 le déblocage a permis de libérer 7 milliards d’euros seulement.

Il convient d’être particulièrement attentif à la question de l’actionnariat salarié, qui est au demeurant passionnante. On parle aujourd’hui de déblocage, mais il serait temps d’engager une nouvelle politique de la participation et de se poser la question de la rémunération du capital et de celle des salariés. Il n’y a là rien de dogmatique. Jérôme Chartier s’est exprimé récemment à ce propos et il est sans doute possible de débattre de façon sereine.

M. Frédéric Lefebvre a souhaité savoir si, après que le Président de la République a évoqué la question du livret A, des garanties peuvent être apportées quant aux sommes mises à la disposition du logement social.

Le groupe « pouvoir d’achat » de l’UMP a présenté un certain nombre de propositions relatives aux locataires, dont l’une est très proche de la disposition prévue dans ce projet, conformément à la volonté du Président de la République de diviser par deux le dépôt de garantie, qui ne serait plus de deux mois mais d’un seul. Dans la mesure où l’on compte chaque année environ un million de changements de locataires, cette mesure équivaudrait à un gain de 600 millions d’euros de pouvoir d’achat. Le groupe UMP proposera en outre un dispositif permettant de lisser la partie restante du dépôt de garantie sur toute la durée du bail, ce qui représentera également un gain de 600 millions d’euros de pouvoir d’achat.

M. Jérôme Chartier réfléchit à la manière de rassurer les propriétaires. Les associations de locataires se sont déjà déclarées extrêmement satisfaites, la ministre peut-elle confirmer que les représentants des propriétaires sont prêts à se mettre autour d’une table, ce qui serait très encourageant ?

Par ailleurs, beaucoup de chefs d’entreprise comme de salariés croient à la réussite de la monétisation des RTT. Il paraît toutefois difficile pour les entreprises de s’adapter aux délais assez contraints que propose le Gouvernement. Un certain nombre de directeurs des ressources humaines qui sont prêts à s’engager dans ce dispositif craignent que la date du 31 décembre 2007 ne soit un peu prématurée. Le groupe UMP proposera donc d’aligner les dispositifs sur la date du 30 juin 2008.

M. Maxime Gremetz a rappelé qu’un grand nombre des mesures proposées dans ce texte sont soumises, en dernier recours, à l’accord du chef d’entreprise. Comment, dans ces conditions, parler d’équité et de liberté de choix ? S’il est dit à plusieurs reprises que le salarié adresse une demande au chef d’entreprise, l’obligation de réponse n’est en revanche jamais prévue. Être obligé de quémander, ce n’est pas vraiment exercer un droit citoyen.

S’agissant des heures supplémentaires, il est prévu que la majoration salariale sera au moins égale au taux de majoration des huit premières heures supplémentaires applicables à l’entreprise. Il faudrait cependant être plus précis : on sait que les quatre premières heures dépassant la durée légale de travail sont payées 25 % de plus et que le taux passe ensuite à 50 %. Il est dit ici que les huit heures sont payées au même niveau, mais on ignore lequel.

Il est par ailleurs précisé que les heures correspondantes aux journées ou demi-journées travaillées ne s’imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d’heures supplémentaires. Or, aujourd’hui, le contingent existe, mais il n’est pas utilisé par les entreprises faute de moyens. À quoi sert dès lors d’étendre ce contingent ?

Le Rapporteur général s’est réjoui des mesures proposées, en particulier de celles relatives aux RTT, à la participation et aux primes, qui joueront effectivement en faveur du pouvoir d’achat.

L’article 1er renvoie à la question du paiement des RTT, qui est très lié au dispositif des heures supplémentaires mis en place dans le cadre de la loi TEPA, lequel monte actuellement en régime. Or, lors de l’examen de ce texte en juillet dernier, l’Assemblée a été confrontée aux problèmes de l’annualisation du temps de travail et de la récupération et l’on a vu qu’il y avait là un véritable verrou. Il est heureux que l’on s’applique désormais à le faire sauter, mais il en existe d’autres. Il faudra ainsi absolument débloquer le contingent conventionnel des heures supplémentaires. Une proposition de loi a d’ailleurs été déposée dans ce sens avec M. Pierre Méhaignerie.

S’agissant des exonérations, le dispositif des heures supplémentaires de la loi TEPA et celui des RTT sont complètement différents. Dans le premier cas, il est prévu, du point de vue du salarié, une exonération totale des cotisations salariales, de la CSG et de la CRDS. En revanche pour l’employeur, il n’y a pas d’exonération sociale patronale totale, mais une ristourne de 0,5 ou de 1,5 euro selon les cas. Ici, le salarié bénéficiera uniquement d’une exonération de cotisation salariale, soit environ de la moitié de l’ensemble des cotisations. Il n’y aura pas d’exonération d’impôt sur le revenu. En revanche, il est prévu une exonération totale de la cotisation patronale. Pour les heures supplémentaires, il existe un dispositif de compensation, ce qui n’est pas le cas pour les RTT. Le ministre pourrait-il indiquer pourquoi les régimes sont tellement différents, en particulier en ce qui concerne les exonérations ?

Si l’on ne dispose pas d’étude d’impact sur la mesure relative à la participation qui figure à l’article 2, on peut toutefois s’inspirer des résultats issus de la mesure votée en 2004. À l’époque, les deux tiers des 7 milliards qui ont été débloqués sont retournés vers l’épargne, sous la forme soit de l’assurance-vie soit du livret A, ou le désendettement tandis que 2 milliards ont été destinés à la consommation. Fait-on aujourd’hui les mêmes hypothèses dans le cadre de l’étude d’impact que les parlementaires attendent avec impatience ?

S’agissant enfin de l’article 3, il faut rappeler que dans les petites et moyennes entreprises (PME) les primes arrivent souvent en fin d’année. Ce texte couvrira-t-il la fin de l’année 2007 ?

M. Jérôme Cahuzac a souligné qu’il s’agit non pas d’échanger des RTT contre de l’argent, mais de proposer à ceux qui bénéficient de journées de RTT de les abandonner contre des journées travaillées. Mieux vaudrait donc parler d’un échange entre des RTT, de l’argent et du travail. Que les choses soient claires : un salarié qui a une journée de RTT pourra-t-il rester chez lui tout en touchant plus d’argent, c’est-à-dire 10 ou 25 % de plus que les 100 % qu’il a déjà touchés, ou devra-t-il retourner travailler, cette journée n’étant pas payée comme une journée normale mais 110 ou 125 % ?

Dans son intervention liminaire, le ministre n’a évoqué que le chiffre de 25 %. La presse faisait plutôt état de 10 % et, dans l’interview que le ministre a donnée au Monde, avant même que les députés ne disposent du projet de loi, il distingue les deux cas de figure, selon qu’il y a ou non accord collectif. À quelle version faut-il se fier ?

On peut par ailleurs s’étonner que le ministre vienne d’évoquer la date butoir du 30 juin 2008 alors que le deuxième alinéa de l’article 1er fait référence aux périodes antérieures au 1er janvier 2008.

Par ailleurs, il n’a été fait référence à aucun moment aux fonctions publiques. Sont-elles écartées du bénéfice de ce texte ? D’autres dispositions seront-elles proposées ultérieurement, par exemple lors de l’examen du texte en séance publique ?

S’agissant de la prime, M. Gilles Carrez a posé les bonnes questions.

Pour la mesure relative à la participation, on dispose de quelques références puisqu’une disposition très comparable avait été adoptée en 2004. Le Rapporteur général a justement souligné que les trois quarts de l’épargne débloquée – dont on ne peut d’ailleurs dire qu’il s’agissait d’une augmentation de pouvoir d’achat puisqu’elle appartenait déjà aux salariés – avaient été dirigés vers l’épargne et un quart vers la consommation. On a en outre constaté à ce moment un pic des achats importés et une dégradation du commerce extérieur. Des mesures ont-elles été prévues cette fois pour éviter ce mouvement, sans doute satisfaisant pour le consommateur, mais préjudiciable au pays ?

Mme Marisol Touraine a observé que, dans son interview au Monde, le ministre a indiqué qu’il souhaite revoir le rapport entre la rémunération du capital et celle des salariés. Sans sous-estimer l’importance des primes, de la participation et de tout ce qui est annexe dans la rémunération des salariés, on conviendra que l’essentiel de cette dernière est constitué du salaire. Il a été dit que les dispositions proposées, qui arrivent au mois de décembre, ne doivent pas empêcher les augmentations de salaire ou l’octroi de primes décidés antérieurement. Pour autant, ce texte s’inscrit dans la logique de la loi TEPA du mois de juillet dernier : de même que le Gouvernement avait considéré alors que l’augmentation du pouvoir d’achat passait par les heures supplémentaires et non par une meilleure rémunération des salariés, il propose aujourd’hui qu’elle passe par des primes ou par le rachat de journées chômées et non par l’augmentation des salaires. D’ailleurs, depuis juin dernier et la présentation du premier texte, les entreprises ont anticipé le fait que l’augmentation du pouvoir d’achat de leurs salariés passe par des rémunérations annexes et non par le salaire de base et l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a constaté un fort ralentissement des augmentations de salaires.

Le ministre peut-il par conséquent préciser pourquoi il a choisi de se concentrer sur les rémunérations annexes, dont on voit bien qu’elles profiteront seulement à certains salariés puisque tout dépendra de la bonne volonté des chefs d’entreprise, plutôt que d’engager des négociations sur les salaires ? Il serait également utile qu’il indique si les salariés à temps partiel et ceux qui travaillent en intérim bénéficieront des dispositions prévues. Pourquoi ne profite-t-il pas également de ce texte pour revaloriser les petites retraites, dont il a convenu à plusieurs reprises qu’elles sont insuffisantes ?

Pour sa part, la ministre du Logement peut-elle préciser l’impact qu’elle attend de la mesure consistant à ramener la caution exigée des locataires de deux mois à un mois ? L’idée paraît aller dans le bon sens, même si l’on peut douter de son impact sur le pouvoir d’achat, mais on sait qu’un certain nombre de propriétaires exigent, de façon non officielle, que les locataires acquittent la taxe foncière ainsi que d’autres charges indues. Il conviendrait donc de renforcer les contrôles sur ce qui est réellement exigé par les propriétaires afin de s’assurer qu’ils ne demanderont pas de dessous-de-table correspondant en fait au deuxième mois de caution, voire à davantage, ainsi que de l’effectivité des dispositions de l’article 5 du projet de loi.

M. Lionel Tardy a jugé difficile de demander des augmentations de salaires au moment où la hausse des prix des matières premières se traduit par une perte de résultats pour les entreprises.

Les quatre premiers articles du texte comportent des mesures simples et concrètes et l’article 5, qui limite le dépôt de garantie à un mois, va dans le bon sens pour les locataires, mais ce n’est pas ainsi que les 2 millions de logements vacants seront mis sur le marché. Or c’est bien par le renforcement de la concurrence que l’on parviendrait à faire baisser les loyers. Il faudrait donc s’intéresser à ce sujet, c’est-à-dire aux risques d’impayés, à la surprotection des locataires et aux difficultés que rencontrent les propriétaires pour récupérer leur bien afin de le céder.

Pourquoi, par ailleurs, ne pas aller vers un système de service public de la caution – ce qui donnerait deux fois plus de pouvoir d’achat – qui s’adosserait aux différentes aides de l’État, rassurerait les propriétaires quant à la solvabilité du locataire et réglerait ainsi définitivement le problème de la caution ?

M. Louis Giscard d’Estaing a rappelé que, dans les entreprises de moins de 50 salariés visées par l’article 3 du projet, il est aujourd’hui possible de mettre en place des plans d’épargne entreprise (PEE), avec un abondement versé par l’employeur qui en fixe librement le pourcentage. Le Gouvernement a récemment augmenté le plafond des sommes pouvant être versées sur ce plan. Le ministre peut-il préciser dans quelle mesure ces entreprises pourront intégrer le nouveau dispositif et comment celui-ci s’articulera avec le PEE ?

M. Jean-Luc Préel, après avoir souscrit à la nécessité d’améliorer le pouvoir d’achat, a souhaité savoir si le compte épargne-temps s’appliquera aux établissements hospitaliers. Une telle mesure serait probablement prise par décret mais, compte tenu de son coût et de la faiblesse des réserves financières des hôpitaux, le ministre peut-il préciser si elle s’accompagnera d’un relèvement de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) ?

Le ministre a par ailleurs fait une réponse habile sur la compensation des exonérations de cotisations, mais il serait effectivement conforme à la loi que l’État les compense.

Dans la mesure où les exonérations ne se présenteront pas de la même façon dans ce texte et dans la loi TEPA, ne pourrait-on saisir cette occasion pour simplifier la feuille de paye ? À défaut, on risque de rester très loin du document à trois lignes que les experts-comptables appellent de leurs vœux…

M. Lionel Tardy a souligné à juste titre qu’un grand nombre de logements libres ne sont pas loués. Or, si les loyers sont indexés sur les prix, sans prendre en compte le coût des travaux d’entretien, cette mesure sympathique risque de ne guère inciter les propriétaires à réaliser les travaux nécessaires dans les logements vacants.

Après avoir souligné que la question de M. Jean-Luc Préel sur les hôpitaux peut être étendue à l’ensemble des fonctions publiques, M. Philippe Vigier s’est par ailleurs interrogé sur le dispositif de l’article 4 : s’appliquera-t-il non seulement aux nouveaux contrats qui seront signés en 2008, mais aussi aux contrats en cours, ce qui semble en contradiction avec la règle de l’intangibilité des contrats ?

Enfin, pour faire face au manque de logements étudiants, pourquoi ne pas prévoir un fonds de garantie de l’État, ce qui apporterait une véritable aide au pouvoir d’achat des familles ?

Mme Sandrine Mazetier a observé que, si le Gouvernement a beaucoup insisté sur la réhabilitation de la valeur travail, on peut s’étonner que cette valeur varie selon que le salarié est en horaire normal, en heures supplémentaires ou en JRTT « rendus ».

Par ailleurs, alors que le Président de la République a promis, il y a peu, une véritable égalité salariale entre les hommes et les femmes, comment ne pas voir que les femmes qui utilisent leurs RTT pour garder leurs enfants ne pourront pas profiter du dispositif de rachat qui est aujourd’hui proposé, en l’absence de moyens pour trouver un autre mode de garde ? Cette mesure va donc aggraver une inégalité chronique. Qui plus est, le Gouvernement ne s’intéresse nullement au temps partiel subi, en particulier par les femmes qui travaillent dans la grande distribution. Que compte-t-il faire pour leur permettre de passer à temps complet avant d’espérer pouvoir faire des heures supplémentaires ?

Quelles sont par ailleurs les intentions du Gouvernement en ce qui concerne le pouvoir d’achat des fonctionnaires, en particulier dans la fonction publique hospitalière où l’on sait que les personnels prennent fort peu leurs jours de RTT ?

Enfin, si M. Lionel Tardy souhaite que davantage de logements vides soient remis sur le marché, que ne propose-t-il que l’on augmente la taxe sur les logements vacants, que les propriétaires jugent aujourd’hui dérisoire ?

Après avoir souligné que ce projet va dans le bon sens, M. Philippe Boënnec a insisté sur la nécessité de simplifier la feuille de paye, se demandant en particulier si les nouvelles mesures vont obliger les petites entreprises à changer de logiciel. On peut par ailleurs s’interroger sur l’application du dispositif à la fonction publique hospitalière, pour laquelle il serait fort utile de remédier aux déséquilibres actuels, mais aussi à la fonction publique territoriale : comment les collectivités locales qui ont déjà voté leur budget pourraient-elles l’envisager ?

M. Pierre Méhaignerie, Président de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales a rappelé que, alors que l’on cherche à gagner un demi-point de croissance, il y a quand même en France 450 000 offres d’emploi non satisfaites. Peut-être les mesures proposées permettront-elles à l’industrie et au bâtiment de grignoter quelques dizaines de milliers d’emplois, mais ce n’est qu’une étape.

Aujourd’hui, avec le régime des 35 heures, un certain nombre de branches, même lorsqu’elles ne sont pas soumises à un régime de modulation du temps de travail, se voient appliquer des limitations à 40 ou 80 heures supplémentaires chaque année. Peut-on espérer que, dans les six mois qui viennent, des négociations permettront d’aboutir à un peu plus de liberté et que l’on franchira de la sorte une étape supplémentaire ? Si la moitié ou les deux tiers des salariés souhaitent rester aux 35 heures, au moins un tiers d’entre eux veulent travailler plus. Peut-on espérer que cette liberté s’ouvrira à la suite des négociations sur tout ce qui n’est pas dans ce projet de loi ?

En réponse aux intervenants, Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, a apporté les précisions suivantes :

– Le principe commun à toutes les actions de la politique du logement, tel que défini par le Président de la République, est la volonté de mettre en œuvre des mesures gagnant-gagnant pour les locataires et les propriétaires. La situation dans le secteur du logement est très grave et il ne s’agit pas d’opposer les uns aux autres.

– Une interrogation étant apparue à la suite des propos tenus par le Président de la République sur le livret A, pourtant très clairs, il faut rappeler qu’il n’est pas du tout question de remettre en cause le recours déposé par la France devant la Cour de justice des communautés européennes. On peut certes s’interroger sur ses chances de succès, mais il suit son cours et les propos du Président de la République n’y changent rien.

– En ce qui concerne la possibilité de lisser sur la durée du bail le paiement du dépôt de garantie d’un mois, il faut la situer dans la perspective du principe gagnant-gagnant. Des inquiétudes étant apparues chez les propriétaires à la suite de l’annonce de la réduction du montant du dépôt de garantie, il faut éviter de les affoler avec d’autres mesures et étudier de près la question du « comment faire ? ». Des réunions de concertation ont déjà eu lieu et elles devront se poursuivre. Par ailleurs, le projet de loi qui devrait être présenté en début d’année prochaine sur la garantie des risques locatifs permettra de répondre aux inquiétudes exprimées par les propriétaires.

– Concernant l’impact attendu de la limitation du dépôt de garantie à un mois de loyer, en tout état de cause il y aura libération d’une somme équivalant à un mois de loyer qui aurait auparavant été immobilisée. Cela fera donc de l’argent disponible. Cependant une étude d’impact précise est difficile à mener, car les dépôts de garantie varient fortement en fonction des loyers. Par ailleurs, il ne faut pas entrer dans la logique des propriétaires indélicats, par exemple ceux qui font payer la taxe foncière aux locataires. Ceux qui ne respectent pas la loi devront en assumer les conséquences.

– Le fait que de nombreux logements vides ne soient pas mis sur le marché est une des préoccupations majeures du ministère du logement. Une négociation a été engagée avec les propriétaires à la suite de la décentralisation du ministère à Lyon qui a abouti à la signature, dans cette ville, d’une convention prévoyant la mise sur le marché de logements vacants, avec l’obligation pour les bailleurs de souscrire à la garantie des risques locatifs.

Or, quand les risques d’impayés diminueront grâce au développement de cette garantie, le nombre élevé de logements vacants ira en décroissant. En effet, cela devrait assurer les propriétaires de ne plus être victimes d’impayés et de retrouver leurs logements dans l’état où ils les avaient mis en location. Les propriétaires ne courant plus le risque ni d’avoir des impayés ni de subir des dégradations dans ces logements, ils n’auront plus de justification pour les laisser vacants. Cet argument avait été avancé par le président de l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), M. Jean Perrin. Derrière cette proposition apparaît une conséquence intéressante pour les locataires. En effet une fois que cette garantie sera mise en place, il n’y aura plus d’expulsions. Cette formule est plus judicieuse que la coercition prônée par Mme Mazetier avec l’aggravation de la taxe sur les logements vacants. Elle a ses limites et il faut lui préférer un système qui assure aux propriétaires qu’ils seront payés et aux locataires qu’ils ne seront pas expulsés.

– Il n’y aura rien de changé dans le cas où des propriétaires feraient des travaux d’amélioration dans leurs logements et augmenteraient les loyers. Il existe en effet des règles spécifiques et cela n’aura aucune influence sur l’indice des prix à la construction.

– Le Gouvernement cherche des logements pour les étudiants, car il en manque beaucoup. Il faudrait que les municipalités en construisent davantage, d’autant qu’ils sont pris en compte par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). En la matière subsiste cependant une difficulté relative à la garantie des risques locatifs. En effet, elle est calculée en fonction d’un seuil de revenu. Or, le plus souvent, les étudiants n’ont pas de revenus : soit ils n’ont pas de salaires, soit ils n’ont pas de bourses. Il n’est pas possible en outre de prendre le revenu des parents, sinon on risquerait de construire une usine à gaz. Il faut donc trouver un système adapté à cette situation.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, a observé, concernant le positionnement de la garantie des risques locatifs, qu’elle constitue une caution de deuxième rang, venant compléter le système assurantiel. À ce titre, le Gouvernement a provisionné, pour 2008, 10 millions d’euros pour cette garantie. En outre, l’article 32 du projet de loi de finances rectificative pour 2007 prévoit d’instituer une garantie de l’État accordée au titre des garanties de loyers et de charges versées aux bailleurs sociaux qui ne souscrivent pas de contrats d’assurance contre les risques de loyers impayés. Compte tenu de ces évolutions, il serait intéressant de faire une étude sur le taux de sinistralité des personnes relevant de la garantie des risques locatifs. Avant d’aller plus loin il faudrait vérifier que rien, dans le dispositif, ne serait incompatible avec les règles communautaires si l’on considère qu’il s’agit d’une caution de deuxième rang. S’il s’agissait d’une caution de premier rang cette formule encourrait encore davantage ce risque d’incompatibilité.

Mme Valérie Rosso-Debord a indiqué que l’on aiderait mieux le développement de la construction de logements pour les étudiants si les établissements publics de coopération intercommunale pouvaient recourir davantage aux aides à la pierre.

Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, a répondu que cela était d’ores et déjà possible : il n’y a aucun problème pour aider ceux qui construisent des logements pour les étudiants. Pour 2008, le Gouvernement a prévu un crédit de 10 millions d’euros pour financer la garantie des risques locatifs. Or, d’une part, il n’y a pas 10 millions d’impayés chaque année actuellement et, d’autre part, il est prévu que cette somme monte en puissance en fonction des besoins. La question qui se pose maintenant est la suivante : cette garantie doit-elle être volontaire ou obligatoire ? Plus le nombre de participants au système sera élevé, moins le montant de la participation de chacun sera élevé. Quant à la question de la compatibilité avec les règles communautaires, elle doit être étudiée par le ministère.

Puis, M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a apporté les précisions suivantes :

– Il faudra effectivement trouver une bonne articulation entre les mesures proposées et les négociations sociales qui vont s’ouvrir au début de 2008. À cet égard, il convient certes de prendre des dispositions conjoncturelles mais il faut également envisager de mettre en œuvre des mesures structurelles, car il n’est plus possible de tolérer le statu quo. Tel est notamment le cas en ce qui concerne la durée du travail et son rapport avec les salaires.

– En ce qui concerne les 35 heures, il faut faire en sorte qu’elles ne soient pas considérées comme un plafond. La situation sera examinée avec les partenaires sociaux en tenant compte de la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social. S’ils ne parvenaient pas à un accord, il appartiendrait au Gouvernement et au Parlement de prendre leurs responsabilités. Il faut permettre à ceux qui veulent rester aux 35 heures de le faire, mais il est également impératif de permettre à ceux qui veulent travailler davantage de le faire aussi.

– Ce n’est pas par le jeu des RTT que l’on réglera les problèmes des mères qui travaillent. Ainsi la réglementation relative aux 35 heures a fait disparaître la possibilité de travailler à 80 % qui permettait aux femmes de s’organiser et de ne pas travailler, par exemple, le mercredi ou le mercredi après-midi. Il ne faut pas reproduire de telles erreurs qui aboutissent à tout bloquer parce qu’une décision a été imposée d’en haut.

– Il n’est pas question que les mesures proposées aient un impact sur la feuille de paye. Chaque fois que l’on dit que l’on va la simplifier les professionnels s’inquiètent car, généralement, les nouvelles dispositions ont un effet inverse.

– Il faut montrer à ceux qui travaillent qu’ils sont pris en considération. Il convient de faire une différence entre ceux qui font le choix de travailler et ceux qui préfèrent s’en tenir aux allocations. Ce débat a été tranché par les Français aux mois de mai et juin derniers.

M. Maxime Gremetz a estimé que ces propos sont insultants et invité M. le ministre à lire le rapport sur les bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (RMI).

M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, lui a répondu qu’il ne faut pas caricaturer. Avec M. Martin Hirsch, Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, il sera fait en sorte que personne ne soit perdant en reprenant un emploi. Il ne peut y avoir solidarité que s’il y a des richesses pour la financer. Or les richesses ne peuvent être produites que par le travail.

M. Maxime Gremetz a souligné que ce sont les salariés qui créent les richesses.

M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a ajouté que cette politique permet de davantage valoriser le travail, puis il a poursuivi ses réponses :

– En ce qui concerne l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, un changement de registre radical est intervenu : finis les grands discours, que l’on a entendus à gauche comme à droite ; bientôt sera présenté un texte prévoyant des sanctions contre les chefs d’entreprise qui ne feront pas le nécessaire. Il y a d’ailleurs eu une proposition de loi intéressante sur laquelle s’étaient notamment mobilisées Mme Marie-Jo Zimmermann et Mme Catherine Génisson. Pour les JRTT, il y aura le choix entre les prendre ou les faire payer.

– Pour ce qui est du régime de la fonction publique hospitalière, cela relève directement des compétences de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, de la jeunesse et des sports. Le Président de la République et le Premier ministre se sont exprimés ; M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, et Mme Bachelot ont engagé la concertation avec les partenaires sociaux. Quant aux établissements de santé privés, ils bénéficieront de l’ensemble du dispositif proposé par le présent projet de loi.

– En ce qui concerne la fonction publique, un décret de novembre 2007 a permis la rémunération de 4 jours de RTT à hauteur de 65 euros pour les agents de catégorie C, 80 euros pour ceux de catégorie B et 125 euros pour ceux de catégorie A. Le Président de la République a souhaité que d’autres mesures soient prises en 2008. Il est d’ailleurs logique que soient envisagées des dispositions plus structurantes.

– Il n’y aura pas d’interférence entre les nouvelles mesures et le plan d’épargne d’entreprise (PEE) puisqu’il s’agit de dispositions à caractère temporaire et exceptionnel.

– Rien n’a été oublié des engagements de campagne : les petites retraites et les pensions seront revalorisées durant le quinquennat ; cela commencera dès 2008 avec le rendez-vous sur les retraites.

– Les mesures proposées seront également applicables aux travailleurs à temps partiel. Ceux-ci ont déjà pu bénéficier, s’agissant des heures complémentaires, du dispositif mis en place par la loi TEPA.

– Lorsque quelqu’un reprend un emploi, il perçoit un salaire et cela est plus important que d’être bénéficiaire d’allocations. On parle souvent d’augmenter les salaires, mais jamais – à l’exception des rémunérations dans la fonction publique – un gouvernement, de droite ou de gauche, ne l’a fait : les salaires sont fixés par les entreprises.

– Le Gouvernement va engager des chantiers qui n’ont jamais été ouverts, en particulier celui de la conditionnalité des aides.

– Le Gouvernement est très attaché à l’intéressement et à la participation. En la matière il faut définir les responsabilités de chacun et ne pas rester sans rien faire.

– En ce qui concerne les JRTT, il s’agit bien d’un changement d’orientation. Lorsqu’il prend une journée de RTT, un salarié ne travaille pas. S’il choisit de travailler ce jour-là, il effectue, d’une certaine façon, des heures supplémentaires. C’est pourquoi cette journée doit être payée comme des heures supplémentaires avec une bonification qui sera de 10 à 25 % compte tenu des accords collectifs.

– Les salariés auront la possibilité de choisir jusqu’au 30 juin 2008, afin que soit laissé le temps de la négociation au sein des entreprises, mais la mesure sera rétroactive au 1er janvier. L’année 2008 n’est pas prise en compte car l’agenda social prévoit des discussions sur la durée du travail et sur la négociation collective.

M. Jérôme Cahuzac ayant demandé si l’indication, dans le texte, de la date du 31 décembre 2007, signifie que seront pris en compte les droits cumulés jusqu’à cette date, M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, a répondu par l’affirmative en indiquant que ce choix a été fait pour laisser aux intéressés le temps de discuter des modalités de mise en œuvre. Il a ajouté, pour ce qui est des conséquences du déblocage de la participation, qu’il ne se présentait pas en « champion du monde des hypothèses ». Mais, selon les experts, la répartition entre la consommation et l’épargne des sommes débloquées devrait être semblable à ce qui s’était passé à l’occasion de la mise en œuvre de la mesure de 2004. En revanche, en ce qui concerne le commerce extérieur, il n’est pas interdit d’avoir le sentiment que, à la suite des déplacements à l’étranger du Président de la République, des mesures qui sont prises en faveur du financement des petites et moyennes entreprises (PME) et de l’action menée en matière d’exportation par Mme Christine Lagarde, ministre de l’Économie, des finances et de l’emploi, et M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur, le bilan sera l’an prochain bien différent de celui de cette année.

– Le texte ne prévoit pas de dispositions sur la question du contingent d’heures supplémentaires. Cette question est renvoyée à la négociation sociale. Si les partenaires sociaux ne parvenaient pas à un accord sur ce sujet, il appartiendrait, là encore, au Gouvernement et au Parlement de prendre leurs responsabilités.

– Les dispositions prises en 2004 ont favorisé le désendettement, mais elles ont également permis d’accroître l’épargne, donc de rendre du pouvoir d’achat disponible pour la consommation.

– S’agissant de la différence entre les mesures proposées pour favoriser le pouvoir d’achat et le dispositif de la loi TEPA, il est évident qu’il faudra essayer, à l’avenir, de simplifier au maximum en regroupant les systèmes d’exonération. Ainsi coexisteraient trois systèmes : celui de la loi TEPA, celui prévu par le texte sur le pouvoir d’achat et la combinaison des deux. D’ici à la semaine prochaine, le Gouvernement fera en sorte de revenir à deux, voire à un seul si cela est possible.

– Il est préférable de rester mesuré sur le sujet de la destination des sommes libérées et ne pas se livrer trop vite à des hypothèses, comme celle qui prévoit qu’un tiers ira à l’épargne, un tiers à la consommation et un tiers au désendettement.

– S’agissant du taux de majoration applicable aux journées ou demi-journées monétisées, le droit commun de la majoration des heures supplémentaires s’appliquera, c’est-à-dire une majoration minimale de 25 %, à laquelle des accords collectifs peuvent déroger, dans la limite du taux de 10 %.

M. Maxime Gremetz ayant estimé qu’il faut comprendre que cela jouera comme pour les heures effectuées au-delà de la durée légale de 35 heures, c’est-à-dire avec un taux de 25 % pour les quatre premières, puis de 50 %, M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, lui a rappelé que le taux est, depuis de nombreuses années, avant même qu’il ne soit ministre, de 25 % pour les huit premières heures. Au-delà des mesures conjoncturelles, il conviendra sans doute de revenir sur la question de l’organisation du travail dans l’entreprise afin que la liberté de choix puisse s’exercer dans les meilleures conditions. S’agissant de la rétroactivité au 1er janvier 2008, il conviendra de prendre des mesures relatives au paiement et notamment à la question de la provision effectuée à cet effet. Chacun devra jouer le jeu.

II. EXAMEN DES ARTICLES

À l’issue de l’audition de M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, et de Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville, votre Commission a procédé à l’examen, pour avis, de l’ensemble du projet de loi pour le pouvoir d’achat (n° 498).

Le Président Didier Migaud a déploré que les contraintes d’emploi du temps ne permettent pas de débattre au fond de chacun des amendements déposés en Commission, non plus que d’entendre le rapporteur sur l’étude d’impact du projet de loi.

M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, tout en regrettant ces contraintes horaires, a rappelé que la discussion générale sur le projet de loi venait d’avoir lieu au cours de l’audition, conjointe avec la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, de M. Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité et de Mme Christine Boutin, ministre du Logement et de la ville et a estimé que le débat au fond sur l’ensemble des amendements pourrait avoir lieu en séance publique.

M. Michel Vergnier, tout en reconnaissant que nombre des amendements déposés en Commission par le groupe socialiste avaient déjà été discutés dans le cadre d’une récente proposition de loi, a exprimé sa déception quant au manque de temps disponible pour débattre des amendements spécifiques à ce texte.

M. Frédéric Lefebvre a fait valoir que certains amendements de la majorité venaient d’être évoqués au cours de l’audition des ministres et que la séance publique permettrait à chacun de s’exprimer au fond sur tous les sujets abordés par le projet de loi.

Avant l’article premier :

Votre Commission a rejeté, suivant l’avis défavorable de votre Rapporteur pour avis, deux amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– généraliser les chèques-transports ;

– revaloriser la prime pour l’emploi.

Puis votre Commission a rejeté trois amendements de M. Henri Emmanuelli tendant respectivement à :

– diminuer le taux normal de TVA, en métropole et dans les DOM, ainsi que le taux réduit ;

– diminuer le taux réduit de TVA ;

– appliquer à la commercialisation de fruits et légumes un taux super-réduit de TVA ;

Votre Commission a également rejeté trois amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– étendre les dégrèvements de redevance audiovisuelle ;

– supprimer la pratique de coopération commerciale visée à l’article L 441-7 du code de commerce ;

– encadrer le crédit à la consommation ;

Votre Commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Launay supprimant l’exonération de TIPP applicable aux carburéacteurs ;

Votre Commission a enfin rejeté quatre amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– prévoir que les entreprises qui s’engagent à augmenter les salaires bénéficient d’un allègement de cotisations sociales ;

– instituer une modulation de la cotisation patronale d’assurance chômage en fonction du nombre d’emplois précaires et de la durée des contrats de travail dans l’entreprise ;

– majorer les cotisations sociales dues par l’employeur en fonction du recours par celui-ci au temps partiel ;

– instituer un blocage pour un an des loyers des logements privés et sociaux.

*

* *

Article 1er

Modalités de conversion en argent d’un certain nombre de droits à congés

Le présent article vise à permettre aux salariés de convertir un certain nombre de leurs droits à congés, contreparties du travail, en rémunération afin d’augmenter leur pouvoir d’achat. Cette possibilité sera offerte jusqu’au 30 juin 2008 :

– aux salariés bénéficiant de journées ou de demi-journées de réduction du temps de travail (RTT) au titre de périodes antérieures au 1er janvier 2008 ;

– aux salariés en forfait jours sur l’année bénéficiant de journées ou demi-journées de repos au titre de périodes antérieures au 1er janvier 2008 ;

– aux salariés disposant, au 31 décembre 2007, de droits à congé affectés sur un compte épargne-temps (CET), même en l’absence d’un accord de branche ou d’entreprise.

Environ la moitié des salariés sera concernée et pourra bénéficier de ce dispositif. Ce rachat exceptionnel sera exonéré, dans la limite de dix jours par salarié, de toute cotisation et contribution d’origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l’exception de la CSG et de la CRDS.

I.– LA CONVERSION DES JOURNÉES DE RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

Le paragraphe I du présent article autorise le rachat par l’employeur, à la demande du salarié et en accord avec le chef d’entreprise, d’une partie des journées ou demi-journées de repos accordées au titre de la réduction du temps de travail, en application de l’article L. 212-9 du code du travail. Seules les JRTT accordées avant le 1er janvier 2008 sont concernées.

Selon l’enquête emploi 2005 en continu de l’INSEE, 38 % des salariés, tous secteurs confondus, ont déclaré bénéficier de JRTT, soit environ 8 millions de personnes. En moyenne, les salariés bénéficient de 13 jours et demi de RTT par an. Chacun de ces salariés aura désormais le choix, en fonction de sa situation personnelle, de prendre ses JRTT ou de les convertir en pouvoir d’achat supplémentaire.

A.– UNE RÉMUNÉRATION MAJORÉE DE 10 À 25 %

Ces demi-journées ou journées de RTT rachetées donneront lieu à une majoration de salaire au moins égale au taux de majoration des huit premières heures supplémentaires applicable à l’entreprise, soit un taux compris entre 10 et 25 %. La majoration de salaire applicable aux heures supplémentaires est en effet fixée :

– par voie de convention ou d’accord de branche étendu, ou par convention ou accord d’entreprise ou d’établissement, à un taux qui ne peut être inférieur à 10 % ;

– en l’absence d’accord, à un taux de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires.

Le ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, M. Xavier Bertrand, estime que le nombre de jours rachetés devrait s’établir en moyenne à 5, soit une rémunération supplémentaire de 720 euros pour une personne payée 2 500 euros bruts et de 370 euros pour un salarié payé au SMIC.

B.– UNE EXONÉRATION DE COTISATIONS SOCIALES DANS LA LIMITE DE 10 JOURS PAR SALARIÉ

En application du paragraphe IV du présent article, ce rachat exceptionnel sera exonéré, dans la limite de dix jours par salarié, de toute cotisation et contribution d’origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l’exception de la CSG et de la CRDS. Le présent projet de loi ne précise pas si ces exonérations seront compensées par l’État ou non : la compensation est de droit en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, et il ne peut y être éventuellement dérogé que par la prochaine loi de financement de la sécurité sociale. Il convient de souligner qu’en tout état de cause, le dispositif ne saurait entraîner de pertes de recettes pour la Sécurité sociale : à défaut de la mesure proposée, les JRTT seraient en effet soit perdues, soit prises comme congés. Il aura au contraire un impact positif, grâce aux recettes issues de la CSG et de la CRDS.

Les journées ou demi-journées de repos ainsi converties en rémunération supplémentaire ne s’imputent pas sur le contingent réglementaire (fixé à 220 heures par an et par salarié, sauf exception) ou conventionnel d’heures supplémentaires prévu à l’article L. 212-6 du code du travail. À défaut, le présent dispositif risquerait d’entraver la mise en œuvre des dispositions de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat visant à développer le recours aux heures supplémentaires.

Votre Rapporteur pour avis estime que, au-delà de cette disposition, l’articulation entre l’article 1er du présent projet de loi et la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 devra être clarifiée au cours des travaux parlementaires.

II.– LA CONVERSION DES CONGÉS DES SALARIÉS RELEVANT D’UN RÉGIME DE FORFAIT EN JOURS

Près d’un dixième des salariés (9,7 % des salariés travaillant à temps complet fin juin 2007, soit 8,2 % de l’ensemble des salariés) sont soumis à un régime reposant sur un forfait annuel en jours : leur temps de travail est décompté en journées (et non en heures) travaillées par an, dans le cadre d’un forfait, selon les modalités fixées par l’article L. 212-15-3 du code du travail.

A.– LE DROIT EXISTANT SUBORDONNE LA CONVERSION EN ARGENT À UN ACCORD COLLECTIF

L’organisation du travail de ces salariés est régie par une convention individuelle de forfait en jours, conclue entre l’employeur et le cadre. Cette modalité d’organisation du temps de travail était réservée aux seuls cadres autonomes jusqu’à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, qui l’a étendue aux salariés non cadres disposant d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Actuellement, une convention ou un accord collectif de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement peut ouvrir la faculté au salarié qui le souhaite, en accord avec le chef d’entreprise, de renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire, déterminée par ladite convention ou ledit accord. Les exonérations prévues par la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat s’appliquent dans cette hypothèse uniquement aux jours de travail supplémentaires effectuées au-delà de 218 jours.

En l’absence d’un accord collectif le prévoyant, la conversion des jours de repos en rémunération est en revanche impossible.

B.– UNE CONVERSION FACILITÉE ET MAJORÉE D’AU MINIMUM 10 %

Le paragraphe II du présent article permet au salarié soumis au régime du forfait en jours de renoncer à une partie de ses jours de repos acquis au titre de périodes antérieures au 1er janvier 2008 en contrepartie d’une majoration de salaire, même en l’absence d’un accord collectif le prévoyant. Il lui suffira d’adresser une demande individuelle en ce sens à son employeur et d’obtenir son accord.

Le décompte des journées et demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos interviendra dans les conditions prévues pour les salariés en forfait en jours sur l’année en application de l’article L. 212-15-3 du code du travail.

La majoration de rémunération, qui ne peut être inférieure à 10 %, sera négociée entre le salarié et le chef d’entreprise.

En application du paragraphe IV du présent article, ce rachat exceptionnel sera exonéré, dans la limite de dix jours par salarié, de toute cotisation et contribution d’origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l’exception de la CSG et de la CRDS.

Votre Rapporteur pour avis estime qu’ici encore, l’articulation entre le dispositif proposé et la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 devra être clarifiée, comme l’a souligné le ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, M. Xavier Bertrand, lors de son audition devant votre Commission.

III.– LA CONVERSION DES DROITS À CONGÉS AFFECTÉS À UN COMPTE ÉPARGNE TEMPS

Le paragraphe III du présent article permet aux salariés disposant d’un compte épargne-temps de demander la conversion de leurs droits stockés en argent à leur employeur. Environ 20 % des salariés ont la possibilité de recourir au compte épargne-temps (CET), soit 4,6 millions de salariés. 720 000 salariés ont déjà stocké l’équivalent de 15 jours de droit à congés.

A.– UNE CONVERSION ACTUELLEMENT SUBORDONNÉE À UN ACCORD COLLECTIF

Le CET est un dispositif qui permet au salarié d’accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d’une rémunération en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises, selon les modalités fixées par l’article L. 227-1 du code du travail. La rémunération peut être immédiate ou différée. La mise en place du CET nécessite la conclusion d’une convention ou d’un accord collectif de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement.

1.– Modalités d’alimentation du compte épargne temps

En fonction des conditions et limites définies par la convention ou l’accord collectif, le CET peut être alimenté en temps ou en argent.

En temps, le CET peut être alimenté, sur l’initiative du salarié et selon les conditions posées par la convention ou l’accord collectif, par :

– tout ou partie du congé annuel excédant la durée de 24 jours ouvrables ;

– les heures de repos acquises au titre du repos compensateur de remplacement et du repos compensateur obligatoire ;

– les jours de repos et de congés accordés au titre de la réduction du temps de travail (RTT) ou au bénéfice des cadres soumis au forfait annuel en jours ;

– les heures effectuées par les cadres au-delà de la durée prévue par la convention individuelle de forfait.

Sur l’initiative de l’employeur, le CET peut également être alimenté, si l’accord collectif le prévoit, par les heures effectuées au-delà de la durée collective du travail, lorsque les caractéristiques des variations de l’activité le justifient.

L’alimentation en argent du CET peut prendre la forme, si la convention ou l’accord collectif le prévoit et sur l’initiative du salarié, d’une affectation au CET de :

– toute augmentation ou tout complément de son salaire de base ;

– tout ou partie des primes d’intéressement qui lui sont attribuées dans le cadre d’un accord d’intéressement ;

– tout ou partie des sommes issues de la répartition de la réserve de participation et des sommes versées dans un plan d’épargne d’entreprise (PEE) par le salarié, à l’issue de la période d’indisponibilité ;

– tout ou partie des sommes versées par l’employeur dans un PEE ou dans un plan d’épargne pour la retraite (PERCO).

2.– Une possibilité de conversion en argent actuellement limitée

Aujourd’hui, la conversion en argent des droits affectés au CET est possible uniquement si la convention ou l’accord collectif le prévoit. Selon les conditions définies par la convention ou l’accord collectif, les droits affectés au CET peuvent ainsi être utilisés, sur l’initiative du salarié, pour :

– compléter la rémunération du CET dans la limite des droits acquis dans l’année (sauf disposition contraire prévue par la convention ou l’accord collectif) ;

– alimenter un PEE, un PERCO ou un plan d’épargne interentreprises (PEI) ;

– contribuer au financement de prestations de retraite lorsqu’elles revêtent un caractère collectif et obligatoire ;

– procéder au versement des cotisations d’assurance vieillesse liées au rachat d’annuités manquantes (notamment pour les années d’études) ;

– indemniser en tout ou partie un congé (notamment un congé parental d’éducation, un congé pour création ou reprise d’entreprise, un congé sabbatique ou un congé de solidarité internationale).

La conversion des droits versés sur le CET au titre des congés payés annuels n’est cependant autorisée que pour les droits accordés au-delà des 5 semaines obligatoires.

B.– UNE CONVERSION EN ARGENT FACILITÉE

Le paragraphe III du présent article vise à permettre aux salariés, en l’absence d’accord collectif en ce sens, de convertir les droits affectés sur leur compte épargne-temps au 31 décembre 2007 pour compléter leur rémunération. Il leur suffira pour ce faire d’adresser une demande individuelle à leur employeur avant le 30 juin 2008 et d’obtenir son accord.

La seule limite prévue concerne les droits acquis au titre du congé payé annuel prévu à l’article L. 223-1 du code du travail, qui ne pourront être convertis.

En application du paragraphe IV du présent article, ce rachat exceptionnel sera exonéré, dans la limite de dix jours par salarié, de toute cotisation et contribution d’origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l’exception de la CSG et de la CRDS.

Le dispositif proposé doit être approuvé, car il permettra aux salariés d’augmenter leur pouvoir d’achat grâce à la conversion de certains de leurs droits à congés. Il s’interroge cependant sur la limite, fixée au 31 décembre 2007, de la période de référence durant laquelle les droits à congés doivent être acquis. Les salariés n’ont en effet pas pu anticiper, au cours de l’année 2007, la mesure qui a été annoncée par le Président de la République le 29 novembre dernier. Pour que le dispositif proposé puisse produire tous ses effets, il serait utile d’étendre cette période de référence au 30 avril, voire au 30 juin 2008 (date limite à laquelle, dans le projet de loi, les salariés doivent avoir déposé leur demande), afin de permettre aux salariés de reconstituer leur stock de JRTT en vue d’une « monétisation ».

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* *

Votre Commission a rejeté un amendement de M. Jérôme Cahuzac supprimant cet article.

Votre Commission a ensuite examiné un amendement de M. Frédéric Lefebvre étendant la période de référence permettant de recourir à la monétisation des jours de réduction du temps de travail au 30 juin 2008.

Conformément à la recommandation de votre Rapporteur pour avis, votre Commission a adopté cet amendement, puis elle a adopté l’article 1er ainsi modifié.

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* *

Après l’article premier :

Votre Commission a rejeté, suivant l’avis défavorable de votre Rapporteur pour avis, huit amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– supprimer le principe du bouclier fiscal ;

– exclure du bénéfice du bouclier fiscal l’impôt sur les gains issus de la cession de stock options ;

– encadrer la possibilité de recours aux stock options ;

– créer une contribution sociale sur les plus-values de cessions de stock options et d’actions gratuites ;

– maintenir certains dégrèvements de redevance audiovisuelle ;

– prévoir une délibération annuelle sur l’encadrement des écarts de rémunération en entreprise ;

– supprimer le seuil de 50 salariés pour la mise en place obligatoire de la participation dans l’entreprise ;

– mettre en place un indicateur de comparaison entre l’évolution de la masse salariale de l’entreprise et celle de l’ensemble des versements perçus par ses salariés.

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Article 2

Déblocage anticipé des sommes attribuées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise

Le présent article offre aux salariés la possibilité de bénéficier entre le 1er janvier 2008 et le 30 juin 2008 d’un déblocage anticipé des sommes qui leur ont été attribuées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise. Ces sommes sont en principe bloquées pendant 5 ans, sauf dans certaines hypothèses limitativement énumérées (notamment mariage, décès du salarié ou de son conjoint, acquisition ou agrandissement de la résidence principale (40)).

En 2005, 8,4 millions de salariés étaient couverts par un accord de participation, soit 35,3 % de l’ensemble des salariés (41). La plupart des salariés concernés (91,4 %) travaillent dans une entreprise de 50 salariés et plus, celles-ci ayant l’obligation de conclure un accord de participation. Dans les entreprises de moins de 50 salariés, seuls 7,3 % des salariés étaient couverts, d’où la mise en place d’un dispositif spécifique, prévu par l’article 3 du présent projet de loi (cf. infra).

I.– LES DÉBLOCAGES ANTICIPÉS OPÉRÉS EN 2004 ET EN 2005

Un déblocage anticipé de la participation a déjà été opéré à deux reprises, dans des conditions similaires, afin de relancer le pouvoir d’achat :

– en 2004, la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 pour le soutien de la consommation et à l’investissement, adoptée sur l’initiative de M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d’État, ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie, avait procédé au déblocage temporaire, jusqu’au 31 décembre 2004, des droits acquis avant le 16 juin 2004, dans le cadre de la participation, des plans d’épargne d’entreprise, des plans d’épargne interentreprises et des plans partenariaux d’épargne salariale volontaire, dans la limite d’un plafond fixé à 10 000 euros par bénéficiaire. 12,3 % des encours des fonds de participation, soit 7 milliards d’euros sur les 57 milliards d’euros d’encours, avaient alors été débloqués par les salariés ;

– en 2005, la loi n° 2005–842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie a autorisé le déblocage anticipé des droits à participation aux résultats versés au titre du dernier exercice clos, à partir du 28 juillet 2005 et jusqu’au 31 décembre 2005, sauf si les sommes ont été versées dans un plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO).

II.– LES MODALITÉS DU DÉBLOCAGE ANTICIPÉ DE LA PARTICIPATION PROPOSÉ

Le dispositif proposé par le présent article est relativement similaire à ceux adoptés en 2004 et en 2005. Son régime fiscal et social est plus favorable qu’en 2005.

Le paragraphe I précise les modalités du déblocage. Il pourra être opéré sur simple demande du bénéficiaire, entre le 1er janvier et le 30 juin 2008, avant l’expiration du délai de 5 ans prévu par la loi, pour la valeur des droits concernés au jour du déblocage.

A.– DES GARANTIES ÉVITANT DE FRAGILISER LES ENTREPRISES CONCERNÉES

Afin de ne pas fragiliser les entreprises concernées, le déblocage sera subordonné à la conclusion d’un accord dans deux hypothèses :

– dans les entreprises ayant conclu un accord de participation dérogatoire, visé à l’article L. 442-6 du code du travail. Cette disposition autorise les accords de participation à retenir une formule de calcul de la réserve de participation différente de la formule légale, si elle procure aux salariés des avantages au moins équivalents. Le projet de loi prévoit, dans ce cas, que le salarié ne pourra débloquer la part de réserve de participation qui excède ce qui résulterait de l’application de la formule légale que si un accord est conclu en ce sens, dans les mêmes conditions qu’un accord de participation, au niveau de l’entreprise ou du groupe. Le déblocage n’est ainsi de droit que pour la part correspondant au minimum légal ;

– dans les entreprises où l’accord de participation prévoit un investissement des sommes dans l’entreprise. Cette condition vise à éviter que le déblocage puisse avoir un effet déstabilisant sur l’entreprise concernée. Sont visés les cas dans lesquels l’accord de participation prévoit l’attribution d’actions de l’entreprise et ceux où il prévoit l’affectation des sommes à un fonds que l’entreprise consacre à des investissements ou à l’acquisition de parts d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Dans ce cas, l’accord conclu peut prévoir que le déblocage anticipé ne portera que sur une partie des sommes attribuées aux salariés.

Le paragraphe II du présent article précise que le déblocage peut porter sur tout ou partie des sommes attribuées aux salariés. Il doit être opéré en une seule fois.

De plus, le paragraphe III indique que le déblocage ne pourra dépasser la limite de 10 000 euros.

B.– UN RÉGIME FISCAL ET SOCIAL ATTRACTIF

Le paragraphe IV précise le régime fiscal et social des sommes débloquées. Celles-ci bénéficieront du régime de faveur attachée à la participation : elles seront exonérées d’impôt sur le revenu ainsi que de cotisations sociales, à l’exception de la CSG et de la CRDS. Cela n’avait pas été le cas en 2005.

Le déblocage ne sera pas possible lorsque les sommes ont été investies dans un plan d’épargne pour la retraite collective (PERCO), celui-ci étant un outil d’épargne longue.

Les entreprises disposeront d’un délai de deux mois après la publication de la loi pour informer leurs salariés des droits dérogatoires créés par le présent article.

Le Gouvernement estime qu’environ 12 milliards d’euros, sur les 100 milliards d’encours des fonds de participation, devraient faire l’objet d’un déblocage anticipé en application de ce dispositif. Chacun des salariés concernés devrait toucher en moyenne, selon les estimations transmises à votre Rapporteur pour avis, plus de 2 200 euros nets.

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* *

Suivant la préconisation de votre Rapporteur pour avis, la Commission a rejeté un amendement de M. Jérôme Cahuzac supprimant cet article, puis elle a adopté l’article 2 sans modification.

Article 3

Versement d’une prime exceptionnelle aux salariés s’agissant des entreprises qui ne sont pas assujetties au régime de la participation

Le présent article prévoit le versement, au plus tard le 30 juin 2008, d’une prime exceptionnelle d’un montant maximum de 1 000 euros par salarié dans les entreprises de moins de 50 salariés, qui ne sont pas soumises à l’obligation de versement de la participation.

Cette prime peut être rapprochée du bonus exceptionnel d’un montant maximum de 1 000 euros attribué en 2006, en application de l’article 17 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale pour 2006.

I.– LES MODALITÉS DE VERSEMENT DE LA PRIME

Le versement de cette prime devra être prévu dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, par référendum dans l’entreprise (ratification à la majorité des deux tiers du personnel), selon les modalités prévues à l’article L. 442-10 du code du travail. Cet accord pourra prévoir la modulation du montant de la prime selon les salariés, en fonction du salaire, de la qualification, du niveau de classification, de la durée du travail, de l’ancienneté ou de la durée de présence du salarié dans l’entreprise.

En 2006, 1 million de salariés travaillant dans 28 000 entreprises ont bénéficié du bonus exceptionnel mis en place. 640 millions d’euros ont été versés. 45 % des entreprises ont choisi une allocation d’un montant uniforme, dont le montant moyen s’est élevé à 650 euros. Dans les entreprises ayant modulé le montant de la prime, le montant moyen a atteint 500 euros, le critère de l’ancienneté ayant été le plus souvent retenu dans la détermination du montant.

Afin d’éviter tout effet de substitution qui aboutirait à inclure dans ce bonus des primes déjà versées ou prévues, le présent article précise que cette prime ne pourra se substituer à des augmentations de rémunérations prévues par la convention ou l’accord professionnel de branche, un accord salarial antérieur ou le contrat de travail. Elle ne pourra se substituer non plus à aucun des éléments de rémunération prévus par l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou qui deviennent obligatoires en vertu des règles légales, conventionnelles ou contractuelles.

II. – LE RÉGIME FISCAL ET SOCIAL DE LA PRIME

Le régime fiscal et social de cette prime est similaire à celui de l’intéressement. Elle sera ainsi exonérée de cotisations sociales, à l’exception de la CSG et de la CRDS, mais restera soumise à l’impôt sur le revenu.

L’exposé des motifs du projet de loi précise qu’elle aura, « au regard des finances publiques et de la compensation », le même statut que le bonus mis en place par l’article 17 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. En d’autres termes, l’exonération de cotisations ne sera pas compensée par l’État à la sécurité sociale, par dérogation à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, en raison de son caractère exceptionnel. Cette dérogation figurera dans le projet de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 (car elle ne peut être inscrite dans une loi ordinaire). L’impact sur les recettes de la sécurité sociale devrait cependant être positif : la prime, dans la mesure où elle ne se substitue pas à des primes déjà prévues ou à des éléments de rémunération, n’entraîne pas de pertes de recettes par rapport au droit existant, mais aura pour conséquence d’augmenter les recettes de CSG et de CRDS. En 2006, le montant des exonérations relatives au bonus s’est élevé à 38 millions d’euros (42). La mesure avait par ailleurs entraîné une dépense fiscale de 130 millions d’euros au titre de l’impôt sur les sociétés, en raison de la déductibilité du bonus – qui s’appliquait à toutes les entreprises, et non aux seules entreprises de moins de 50 salariés – versé par les entreprises à leurs salariés (43).

L’employeur devra notifier à l’organisme de recouvrement dont il relève le montant des sommes versées au salarié en application du présent article.

Comme cela a été indiqué, le versement devra intervenir au plus tard le 30 juin 2008 pour bénéficier des avantages fiscaux et sociaux prévus. Cette « date butoir » pourrait poser des difficultés aux entreprises dont l’exercice social ne coïncide pas avec l’année civile : une entreprise dont la clôture des comptes est réalisée le 31 août 2008 par exemple, ne connaîtra pas son résultat au 30 juin. Or les entreprises concernées doivent connaître leur situation financière à l’issue de l’exercice social considéré pour décider du versement ou non de la prime, ainsi que pour déterminer son montant. C’est pourquoi votre Rapporteur pour avis a déposé un amendement visant à permettre à toutes les entreprises concernées de connaître leur résultat avant de procéder au versement de la prime.

*

* *

Votre Commission a adopté un amendement de votre Rapporteur pour avis visant à étendre jusqu’à 6 mois après la clôture de l’exercice ouvert à compter du 1er janvier 2007 le délai pendant lequel les entreprises concernées pourront verser une prime exceptionnelle à leurs salariés.

Votre Commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jérôme Cahuzac proposant de lier le versement de la prime exceptionnelle à la mise en place ou à l’ajustement d’un accord de participation.

Puis votre Commission a adopté l’article 3 ainsi modifié.

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* *

Après l’article 3 :

Votre Commission a rejeté, suivant l’avis défavorable de votre Rapporteur pour avis, deux amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– encadrer le recours aux prêts immobiliers à taux variable ;

– étendre la possibilité, pour un consommateur final domestique d’électricité ou de gaz naturel, de bénéficier des tarifs réglementés.

Article 4

(Article 17 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986)

Nouveau dispositif d’indexation des loyers

Le présent article propose de modifier l’indice de référence des loyers et d’indexer les loyers sur l’évolution des prix à la consommation.

I.– LE NOUVEL INDICE DE RÉFÉRENCE DES LOYERS N’A PERMIS DE FREINER QUE MODÉREMENT LA HAUSSE DES LOYERS

A.– L’INDEXATION DES LOYERS EST ENCADRÉE PAR LA LOI

1.– L’encadrement de l’indexation des loyers dans le parc locatif privé

La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 s’applique aux locations de locaux à usage d’habitation principale. Son article 17 définit les modalités de fixation et d’évolution des loyers en distinguant trois cas :

– lors de la première mise en location d’un logement (44), le loyer initial est fixé librement (article 17 a) ;

– toutefois, l’article 17 de la loi de 1989 marque une opposition entre le régime de la fixation du loyer initial, soumis à un principe de liberté, et celui de la fixation du loyer des contrats renouvelés, qui est encadré. À cet égard, en vertu du c de l’article 17, le loyer ne peut être augmenté lors du renouvellement du bail que s’il est manifestement sous-évalué par rapport aux loyers du voisinage. Dans ce cas, le bailleur adresse aux locataires, six mois avant le terme du contrat, une proposition de renouvellement assortie d’un nouveau loyer fixé par référence aux loyers du voisinage. Cette proposition ne peut en aucun cas être assortie d’un congé. En cas de désaccord, la commission départementale de conciliation et, le cas échéant, le juge, peuvent être saisis selon une procédure définie au c de l’article 17 de la loi précitée ;

– en vertu du d de l’article 17, la révision annuelle du loyer, si elle est prévue au contrat, s’applique à la date convenue entre les parties ou à défaut de mention de contrat sur ce point, au terme de chaque année du contrat. Elle ne peut excéder la variation de l’indice national publié par l’INSEE. Le trimestre de référence à prendre en compte pour cette révision est, soit celui mentionné au contrat, soit celui du dernier trimestre connu au moment de la conclusion de ce contrat.

La loi du 6 juillet 1989 prévoyait que l’indice national publié par l’INSEE était l’indice du coût de la construction (ICC) (45). Cet indice trimestriel dont la base 100 a été fixée au quatrième trimestre de 1953, date à laquelle cet indice a été mis en place, est calculé par l’INSEE à partir de l’observation des marchés de la construction des bâtiments neufs conclus entre les maîtres d’ouvrage et les entreprises assurant les travaux de réalisation des bâtiments.

2.– L’encadrement de la hausse des loyers dans l’agglomération parisienne

Ces dispositions sont complétées par l’article 18 de la loi du 6 juillet 1989 qui permet de fixer, par décret en Conseil d’État, le montant maximum d’évolution de certains loyers, dans les zones géographiques où le niveau et l’évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l’ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif. La loi prévoit que la durée du décret ne peut excéder une année.

Ce dispositif concerne l’agglomération parisienne : il a été reconduit, pour cette année, par le décret du 29 août 2007 relatif à l’évolution de certains loyers dans l’agglomération de Paris (46).

En cas de renouvellement du contrat, l’augmentation du loyer ne peut être supérieure à celle résultant de la révision annuelle aux dates et conditions prévues au contrat. Cependant, lorsque le loyer est manifestement sous-évalué, sa réévaluation sera possible lors du renouvellement du contrat et la hausse est limitée :

– soit à 50 % de l’écart constaté entre le loyer « sous-évalué » et les loyers pratiqués dans le voisinage ;

– soit à 15 % du montant du coût réel des travaux réalisés depuis le dernier renouvellement de bail lorsque le bailleur a effectué des travaux importants dans le logement.

Cette hausse est étalée sur trois ans, ou sur six ans si elle est supérieure à 10 %.

En revanche, lors d’une relocation – c’est-à-dire en cas de changement de locataire –, la fixation du loyer est libre en région parisienne comme en province.

B.– L’INDICE DU CÔUT DE LA CONSTRUCTION A ÉTÉ REMPLACÉ PAR L’INDICE DE RÉFÉRENCE DES LOYERS

Compte tenu de la hausse importante des loyers ces dernières années, l’indexation des loyers selon le coût de la construction a montré ses limites :

– en effet, celui-ci est principalement un indicateur des coûts de la construction des logements neufs ; il ne prend donc pas du tout en compte les éléments permettant d’apprécier la valeur locative des logements anciens ;

– de plus, malgré le calcul d’une moyenne associée sur quatre trimestres, qui permet de lisser les évolutions de l’indice sur une année, on a pu constater au cours de la dernière décennie une très grande amplitude des variations de l’indice du coût de la construction, préjudiciables tant aux locataires qu’aux propriétaires ;

– enfin, un des critères essentiels devant être retenu dans l’évaluation du niveau des loyers est le pouvoir d’achat des ménages ; or, il apparaît que la distorsion peut parfois être importante entre l’évolution du pouvoir d’achat et celle des loyers.

C’est pourquoi, l’article 35 de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, a prévu de substituer, à compter du 1er juillet 2006, à l’indice du coût de la construction, un nouvel indice de référence des loyers. L’article 163 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 a avancé au 1er janvier 2006 sa date d’entrée en vigueur.

Le décret n° 2005-1615 du 22 décembre 2005 a précisé les modalités de calcul de cet indice composite, calculé trimestriellement et constitué :

– pour 60 % de l’indice des prix à la consommation (IPC) ;

– 20 % de l’indice du coût de la construction (ICC) ;

– et 20 % de l’indice des prix des travaux d’entretien et d’amélioration des logements (IPEA).

Il s’applique à tous les contrats de location régis par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ainsi qu’aux loyers plafonds des locations conventionnées et, depuis la loi du 5 mars 2007 instituant le droit opposable au logement, aux locations meublées.

Comme le montre le tableau suivant, ce nouvel indice a permis de modérer l’indexation des loyers par rapport à l’indice du coût de la construction. Ainsi, au second semestre de cette année, l’indice du coût de la construction a, en effet, augmenté de 5,05 % par rapport au second semestre 2006, alors que l’indice de référence des loyers a connu une hausse de 2,76 % sur la même période.

ÉVOLUTION DE L’INDICE DU COÛT DE LA CONSTRUCTION ET DE L’INDICE DE RÉFÉRENCE DES LOYERS

Période

Indice du coût de la construction

Glissement annuel

Indice de référence des loyers

Variation annuelle
en %

2e trimestre 2007

1 435

+ 5,05

108,36

+2,76

1er trimestre 2007

1385

+ 1,69

107,66

+2,92

4e trimestre 2006

1 406

+ 5,56

107,13

+3,23

3e trimestre 2006

1 381

+ 8,06

106,36

+3,19

2ème trimestre 2006

1 366

+ 7,05

105,45

+2,78

1er trimestre 2006

1 362

+ 7,24

104,61

+2,46

4ème trimestre 2005

1 332

+ 4,96

103,78

+2,30

3ème trimestre 2005

1 278

+ 0,47

103,07

+2,30

2ème trimestre 2005

1 276

+ 0,71

102,60

+2,60

1er trimestre 2005

1 270

+ 3,67

102,10

+2,79

4ème trimestre 2004

1 269

+ 4,53

101,45

+2,69

3ème trimestre 2004

1 272

+ 5,74

100,75

+2,59

2ème trimestre 2004

1 267

+ 5,41

100,00

+2,36

1er trimestre 2004

1 225

+ 3,55

99,33

+2,30

4ème trimestre 2003

1 214

+ 3,58

98,79

+2,32

3ème trimestre 2003

1 203

+2,82

98,21

+2,30

2ème trimestre 2003

1 202

+ 33,5

97,69

+2,27

1er trimestre 2003

1 183

+ 2,07

97,10

+2,19

Source : INSEE

Cependant, l’indice de référence des loyers n’a permis de freiner que modérément la hausse des loyers. Selon le rapport sur l’évolution des loyers (47) de la direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction, l’indice général des loyers, qui est un indice national regroupant les loyers des logements locatifs du secteur privé et du secteur social, a progressé de 3,1 % en 2006, soit 1,5 point de plus que l’inflation.

Comme le montrent le tableau et le graphique suivants, l’évolution des loyers est donc restée nettement supérieure à l’inflation, y compris en 2006 :

ÉVOLUTION ANNUELLE DE L’INDICE DES PRIX À LA CONSOMMATION, DE L’INDICE GÉNÉRAL DES LOYERS ET DE L’INDICE D’INDEXATION DES LOYERS

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Indice général des loyers (en %)

1,6

2,3

1,6

1,2

2,2

3

2,6

3,5

3,7

3,1

Indice des prix à la consommation (en %)

0,5

0,2

1,6

1,2

2,2

2

2

1,6

2

1,2

Différence entre l’indice général des loyers et l’inflation

1,1

2,1

0

0

0

1

0,6

1,9

1,7

1,9

Indexation des loyers (en %)

1,4

2,3

0,3

1,1

2,5

3,6

2,4

3,2

4,5

2,7

Différence entre l’indexation des loyers et l’inflation

0,9

2,1

–1,3

–0,1

0,3

1,6

0,4

1,6

2,5

1,5

Source : rapport sur l’évolution des loyers, direction générale de l’urbanisme et de l’habitat.

(1) Il s’agit de l’indice du coût de la construction, puis de l’indice de référence des loyers à compter du 1er janvier 2006.

Source : rapport sur l’évolution des loyers

II.– UN NOUVEL INDICE DE RÉFÉRENCE DES LOYERS

Le présent article propose que l’indice de référence des loyers corresponde désormais à l’inflation.

Les deux premiers alinéas du présent article modifient donc les deux premières phrases du deuxième alinéa du d de l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 et prévoient que l’augmentation du loyer ne peut dépasser le nouvel indice de référence de loyer :

– qui est publié par l’INSEE chaque trimestre ;

– et qui correspond à la moyenne sur les douze derniers mois de l’évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers.

Comme le précise le troisième alinéa du présent article, ce nouvel indice serait applicable tant aux nouveaux contrats qu’aux contrats en cours. Dans ce dernier cas, le nouvel indice de référence remplace l’ancien à la date de référence des contrats.

Ainsi, en 2008, les loyers progresseront de 1,8 % contre 2,8 % avec l’indice actuel.

Selon, les estimations du ministère des finances, de l’économie et de l’emploi, le nouvel indice d’indexation des loyers devrait permettre à un ménage payant un loyer de 600 euros – soit le montant moyen d’un loyer en France – de gagner 101 euros sur une année.

La ministre du Logement et de la ville, Mme Christine Boutin, a indiqué, lors de son audition par la commission des Finances et par la commission des Affaires culturelles, que ce nouvel indice n’aurait pas d’impact sur les programmes immobiliers des investisseurs. En effet, les investisseurs ont toujours établi leurs prévisions sur la base du prix à la consommation sur quinze ans, en raison de l’incertitude que font régner aussi bien l’indice de révision des loyers que les précédents indices. De plus, ils savent qu’existent à la fois une volonté forte et une nécessité absolue de construire. La perspective de 500 000 logements nouveaux leur permet donc de surmonter leurs éventuelles inquiétudes.

*

* *

Suivant la recommandation de votre Rapporteur pour avis, votre Commission a successivement rejeté un amendement de rédaction globale de cet article, présenté par M. Jérôme Cahuzac, tendant à bloquer les loyers des logements privés et sociaux en zone tendue, puis elle a adopté l’article 4 sans modification.

Article 5

(Article 22 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986)

Réduction du montant maximum du dépôt de garantie
qui peut être exigé par le bailleur

Le présent article propose de réduire à un mois le montant maximum du dépôt de garantie qui peut être exigé par le bailleur.

I.– LE MONTANT DU DÉPÔT DE GARANTIE EST PLAFONNÉ PAR LA LOI

Le dépôt de garantie correspond à une somme d’argent, versée au bailleur lors de l’entrée dans les lieux, qui garantit les obligations locatives. Ce dépôt de garantie sert, au terme du contrat, à couvrir les sommes restant dues au bailleur et celles dont celui-ci pourrait être tenu aux lieu et place du locataire ainsi que les éventuelles dégradations dont il pourrait être tenu responsable.

Lorsqu’il s’agit d’une location nue, l’article 22 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 précitée prévoit que son montant est limité à deux mois de loyer hors charges (48).

Le dépôt de garantie ne peut être ni indexé ni révisé en cours de bail ou au moment du renouvellement.

Celui-ci est restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la restitution des clés par le locataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées. À défaut de restitution dans le délai prévu, le solde du dépôt de garantie restant dû au locataire, après arrêté des comptes, produit intérêt au taux légal au profit du locataire.

Selon une étude de l’ANIL, le dépôt de garantie était exigé par le bailleur dans 97 % des contrats de location en 2003 (92 % en 1999 et 85 % en 1994), quels que soient le mode de gestion du bien, les revenus du locataire, le lieu de situation de l’immeuble ou la qualité du bailleur. Les quelques rares cas dans lesquels le dépôt de garantie n’est pas exigé recouvrent les situations dans lesquelles le locataire est soit un membre de la famille, soit une connaissance du bailleur.

Deux dispositifs permettent à des locataires modestes de disposer des fonds nécessaires pour verser un dépôt de garantie :

– dans le cadre du dispositif loca-pass, le 1 % accorde une avance sans intérêt, remboursable en trois ans maximum. Cette avance est versée le plus souvent à l’entrée dans le logement directement au propriétaire ;

– le fonds de solidarité logement permet aux locataires qui rencontrent des difficultés ou qui disposent de ressources faibles de bénéficier d’une subvention ou d’un prêt sans intérêt.

Ainsi, alors que le dépôt de garantie était supporté par le locataire lui-même dans 90 % des cas en 1999, en 2003, il est avancé dans 73 % des cas par les locataires eux-mêmes, dans 17 % par le « loca-pass » et dans 5 % des cas par le Fonds de solidarité logement. Les jeunes de moins de 25 ans sont les premiers bénéficiaires du « loca-pass » pour constituer leur dépôt de garantie : 25 % d’entre eux et 48 % des moins de trente ans l’ont obtenu (49).

Le montant effectif du dépôt de garantie est d’un mois dans 17 % des cas et de deux mois dans près de 80 % des locations. Si le dépôt de garantie atteint très fréquemment le maximum légal de deux mois de loyer, certains bailleurs privés gérant eux-mêmes un logement situé plutôt dans une petite ville se contentent d’un mois de loyer.

LES AIDES LOCA-PASS DU 1 % LOGEMENT

Prévues par une convention entre l’État et l’UESL du 3 août 1998 les aides « Locapass » du 1 % logement peuvent être accordées dans le parc privé et le parc social, aux personnes suivantes :

– les salariés d’une entreprise de plus ou moins de 10 salariés du secteur privé non agricole (y compris le travailleur saisonnier) quelle que soit leur ancienneté dans l’entreprise ou la nature du contrat de travail (CDI - CDD - Contrat de qualification…) ;

– les jeunes de moins de trente ans en recherche ou en situation de premier emploi (jusqu’au premier CDI inclus, quel que soit l’employeur, y compris le secteur agricole mais à l’exception des fonctionnaires) sans contrainte de plafonds de ressources. Cette catégorie inclut :

– les jeunes en formation au sein d’une entreprise ;

– les jeunes en CDD ;

– les étudiants de moins de trente ans justifiant d’un CDD d’une durée minimale de trois mois, en cours au moment de la demande d’aide ou justifiant au cours des six mois précédant la demande d’aide, d’un ou plusieurs CDD pour une durée cumulée minimale de trois mois ou justifiant d’une convention de stage d’au moins trois mois en cours au moment de la demande d’aide ;

– les boursiers d’État.

1.– L’aide à la constitution du dépôt de garantie : l’avance loca-pass

Elle prend la forme :

– soit d’une avance accordée au locataire sous forme de prêt remboursable sans intérêt avec :

– un différé de paiement de trois mois ;

– une durée maximale de remboursement de trente-six mois au-delà de la période du différé, modulable, à l’intérieur de ce délai, au choix du bénéficiaire ;

– une mensualité minimale de 15 euros, exception faite de la dernière ;

– une obligation de remboursement anticipé en cas de départ du logement avant la dernière échéance prévue, dans un délai maximal de trois mois à compter du départ ;

– la faculté pour le CIL/CCI, en accord avec le locataire, de verser les fonds au bailleur ;

–  soit d’une avance remboursable en une seule fois au départ du logement pour les travailleurs saisonniers ou pour les salariés mutés pour une durée déterminée et bénéficiaires d’un contrat de location dont la durée certaine ou prévisible n’excède pas six mois, qui en font la demande ;

– soit d’un engagement, d’une durée maximale de trois ans envers le bailleur, de verser le dépôt de garantie à première demande justifiée. Cette forme de versement de l’avance concerne les logements foyers et autres structures collectives. En cas de mise en jeu, les fonds versés prennent la forme d’une avance sans intérêt remboursable par le locataire bénéficiaire de l’aide dans un délai maximal de trois mois après le départ du logement.

2.– La garantie de paiement du loyer : la « garantie loca-pass »

Elle est valable pour une période de location d’une durée de trois ans. Elle s’applique quelle que soit la cause de l’impayé. Il est fait référence à la garantie du loyer et des charges dans le bail. Elle est matérialisée par un acte de cautionnement annexé au contrat de location. La garantie de paiement du loyer et des charges couvre un montant maximal de 18 mois de loyers et de charges. Le montant du loyer et des charges à prendre en compte est celui figurant dans le contrat de location et appelé par le bailleur. Pour les salariés et pour les jeunes, le montant de la garantie peut être porté à 36 mois en contrepartie d’une réservation locative dans le parc locatif conventionné. La mise en jeu de la garantie se fait sur demande du bailleur et, après mise en demeure restée infructueuse. Les fonds sont versés au bailleur par le CIL/CCI ; ils prennent la forme pour le locataire d’une avance gratuite remboursable sur une durée maximale de trois ans, selon les modalités fixées d’un commun accord entre le CIL/CCI et le locataire, le CIL/CCI étant subrogé dans les droits du bailleur du fait du paiement qu’il a effectué en tant que caution.

II.– LA RÉDUCTION DU MONTANT DU DÉPÔT DE GARANTIE À UN MOIS DE LOYER

Le premier alinéa du présent article modifie le premier alinéa de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 et réduit le montant maximum du dépôt de garantie à un mois de loyer, comme c’est déjà le cas pour les locataires des logements HLM.

L’objectif est d’éviter au locataire « d’immobiliser » une somme trop importante au début du bail, moment où il doit souvent faire face à de nombreuses dépenses.

Comme votre Rapporteur pour avis l’a déjà précisé, compte tenu d’un loyer moyen estimé à 600 euros, cette diminution du dépôt de garantie va permettre de réinjecter 600 millions d’euros de pouvoir d’achat aux ménages.

Le second alinéa prévoit que cette disposition est applicable aux nouveaux contrats conclus à compter de la publication de la présente loi. Cette précision implique qu’il n’y aurait pas de possibilité de restitution pour les contrats en cours.

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* *

Votre Commission a adopté l’article 5 sans modification.

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Articles additionnels après l’article 5

(Article 22 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986)

Échelonnement du paiement du dépôt de garantie

Votre Commission des finances a examiné un amendement présenté par M. Frédéric Lefebvre, tendant à échelonner le paiement du dépôt de garantie sur la durée du bail.

Compte tenu du montant moyen d’un loyer estimé à 600 euros, le lissage du dépôt de garantie permet au locataire de ne pas avancer en début de bail deux mois de loyer et de répartir le paiement du dépôt de garantie, sur une période de 36 mois par exemple. Dans ce cas, cela représenterait alors un montant par mois de 17 euros.

Parallèlement, cette mesure pourrait être complétée par un dispositif négocié avec les partenaires sociaux, qui permettrait au propriétaire de toucher, dès le début du bail, l’intégralité du dépôt de garantie, le locataire remboursant, sans intérêt et sur la durée du bail, l’organisme qui aurait fait l’avance du dépôt de garantie.

Ce dispositif pourrait prendre la forme d’une généralisation du « loca-pass » à de nouveaux publics, le montant du dépôt de garantie étant alors avancé par le 1 % logement ou par l’État.

Suivant l’avis favorable de votre Rapporteur pour avis, votre Commission a adopté cet amendement.

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Votre Commission a ensuite examiné deux amendements de M. Jérôme Cahuzac tendant respectivement à :

– raccourcir le délai maximum dans lequel le propriétaire doit restituer le dépôt de garantie au locataire ;

– préciser que le bailleur doit fournir des factures pour justifier les retenues sur le dépôt de garantie consécutives à des réparations.

Votre Rapporteur pour avis, tout en reconnaissant l’intérêt de ces deux amendements, qui justifie qu’ils soient débattus de manière approfondie en séance publique, en a demandé le rejet.

Votre Commission a alors rejeté ces deux amendements.

Attestation de paiement des loyers

I.– LES JUSTIFICATIFS EXIGÉS PAR LE BAILLEUR

Depuis la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, le bailleur ne peut, en vertu de l’article 22-2 de la loi du 6 juillet 1989, demander au candidat à la location, préalablement à l’établissement du contrat de location : une photographie d’identité, sa carte d’assuré social, la copie de relevé de son compte bancaire ou postal ainsi que l’attestation de bonne tenue de compte bancaire ou postal.

Afin de lutter contre les pratiques discriminatoires, l’article 35 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 a modifié l’article 22-2  et a ajouté un certain nombre de documents à cette liste : autorisation de prélèvement automatique, jugement de divorce, contrat de mariage, certificat de concubinage, extrait de casier judiciaire, attestation d’absence de crédit en cours, attestation de l’employeur dès lors qu’il peut être fourni le contrat de travail et les derniers bulletins de salaire, chèque de réservation de logement, dossier médical personnel, sauf en cas de demande de logement adapté ou spécifique …

En pratique, l’étude de l’ANIL sur les conditions d’accès au parc locatif privé (50) montre que les propriétaires demandent de plus en plus de justificatifs d’identité et de ressources, pour vérifier la capacité du candidat à la location à payer son loyer.

En 1999, 53 % d’entre eux demandaient au moins un document justifiant l’identité du locataire, ils sont 56 % en 2003. De même, un justificatif au moins des revenus est exigé dans près de trois quarts des cas (deux tiers de cas en 1999). Plus de la moitié des bailleurs (52 %) exigent ainsi à la fois un justificatif d’identité et un justificatif de ressources.

VÉRIFICATION DE L’IDENTITÉ ET DES RESSOURCES DES LOCATAIRES

 

1999

2003

Aucun justificatif

27 %

20 %

Identité seule

7 %

6 %

Ressources seules

20 %

22 %

Identité et ressources

46 %

52 %

Source : Agence nationale pour l’information sur le logement

Le bulletin de salaire reste le justificatif le plus courant, suivi de l’avis d’imposition. Il est aussi de plus en plus fréquent de devoir fournir plusieurs pièces justifiant de ses ressources. L’attestation de l’employeur et le contrat de travail sont notamment demandés lorsque le candidat vient de prendre un emploi et n’est donc pas encore en mesure de produire un bulletin de paie ou un avis d’imposition.

JUSTIFICATIFS DE RESSOURCES EXIGÉS

 

1999

2003

Bulletin (s) de salaire

51 %

59 %

Avis d’imposition

37 %

48 %

Attestation de l’employeur

13 %

28 %

Contrat de travail

13 %

22 %

Déclaration de revenus

17 %

Relevé de compte bancaire

5 %

Source : Agence nationale pour l’information sur le logement

Si les bailleurs qui vérifient à la fois les ressources et l’identité de leur futur locataire sont en augmentation, un cinquième (contre 27 % en 1999) continue de louer en toute confiance, sans demander aucun justificatif ni de revenus, ni d’identité, sans doute en raison de la connaissance qu’ils ont du locataire. En effet près d’un quart des locataires et des bailleurs sont entrés en contact par relation.

II.– RENFORCER LA RELATION DE CONFIANCE ENTRE LE PROPRIÉTAIRE ET LE LOCATAIRE EN INSTITUANT UNE ATTESTATION DE PAIEMENT DES LOYERS

Le neuvième aliéna de l’article 22-2 de la loi du 5 juillet 1989 prévoit que ne peut être demandée une « attestation du précédent bailleur indiquant que le locataire est à jour de ses loyers et charges, dès lors que le locataire peut présenter d’autres justificatifs ».

Il apparaît cependant qu’un tel justificatif serait de nature à rassurer le propriétaire et à favoriser les locataires payant régulièrement leurs loyers.

Il serait donc opportun de supprimer cette attestation de la liste de documents que le bailleur ne peut demander à un candidat à la location et de mettre en place une « attestation de paiement de loyers » qui peut être demandée par le locataire au bailleur, à l’issue du bail, et qui indique que le locataire est à jour du paiement de ses loyers et charges. Celle-ci pourra être présentée au nouveau propriétaire et sera de nature à le rassurer sur le risque d’impayés de loyers.

*

* *

Votre Commission a examiné un amendement de votre Rapporteur pour avis visant à permettre que soit demandée une attestation de paiement de loyers, afin d’améliorer les relations entre bailleur et locataire.

Votre Commission a adopté cet amendement.

Votre Commission a ensuite rejeté, comme le lui demandait votre Rapporteur pour avis, un amendement de M. Jérôme Cahuzac visant à majorer le montant des indemnités dues aux locataires en cas de restitution tardive du dépôt de garantie, ainsi qu’un amendement de M. Henri Emmanuelli mettant en place une taxation exceptionnelle des entreprises pétrolières.

Puis votre Commission a adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

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AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 1er

Amendement n° 1 présenté par M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, et M. Frédéric Lefebvre

I.– Modifier ainsi cet article :

1° Au 1° du I, le mot : « janvier »  est remplacé par le mot : « juillet » ;

2° Au 2° du I, le mot : « janvier »  est remplacé par le mot : « juillet » ;

3° Au II, la date : « 31 décembre 2007 » est remplacée par la date : « 30 juin 2008 » ;

4° Au IV, la date : « 30 juin » est remplacée par la date : « 31 juillet ».

II.– Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par l’institution d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 3

Amendement n° 2 présenté par M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, et M. Frédéric Lefebvre

I.– Après les mots : « le versement des sommes ainsi déterminées doit intervenir », la fin de l’alinéa 3 est ainsi rédigé : « au plus tard six mois après la clôture de l’exercice ouvert à compter du 1er janvier 2007. »

II.– Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III.– La perte de recettes pour l’État est compensée par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

Article additionnel après l’article 5 

Amendement n° 3 présenté par M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis, et M. Frédéric Lefebvre

Après l’article 5, insérer l’article suivant :

I.– Le deuxième alinéa de l’article 22 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par les mots : « dont le locataire peut s’acquitter en échelonnant le paiement sur la durée du bail ».

II.– Les dispositions du présent article sont applicables aux contrats de location conclus à compter de la publication de la présente loi.

Article additionnel après l’article 5 

Amendement n° 4 présenté par M. Jérôme Chartier, Rapporteur pour avis

Après l’article 5, insérer l’article suivant :

I.– Supprimer le neuvième alinéa de l’article 22-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

II.– Après le premier alinéa de l’article 21 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, insérer l’alinéa suivant :

« Le bailleur peut remettre gratuitement, à la demande du locataire, une attestation indiquant que depuis le début du contrat de location, le locataire est à jour du paiement des sommes dues au titre du loyer et des charges. »

© Assemblée nationale

1 ()  Source : « L’angoisse du pouvoir d’achat », Le nouvel Observateur, 15 novembre 2007

2 () « Les Français et l’évolution de leur pouvoir d’achat », étude réalisée par l’IFOP pour Dimanche Ouest France en novembre 2007

3 ()  Cela a conduit par conséquent à une hausse du prix du pain, des céréales, des pâtes, etc.

4 ()  « La vérité sur la flambée des prix », Le Nouvel Observateur, 13 décembre 2007.

5 ()  Les Échos du 14 et 15 décembre 2007, source INSEE

6 () Que ce soit les locataires ou les propriétaires remboursant un emprunt.

7 () Cass. crim., 25 octobre 1990, bull. n° 358.

8 ()  « Les salaires en France », édition 2007, Institut national de la statistique et des études économiques.

9 ()  Ce dispositif, entré en vigueur en juillet 2003, a remplacé celui mis en place lors du passage aux 35 heures, qui avait créé les garanties mensuelles de rémunération (GMR). Ces dernières s’appliquaient aux salariés rémunérés au niveau du SMIC lors de leur passage aux 35 heures. De ce fait, coexistaient cinq niveaux de GMR échelonnés selon la date de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail ainsi qu’un SMIC horaire concernant les entreprises restées à 39 heures et les salariés embauchés après la mise en place de la réduction du temps de travail. Le dispositif a visé à faire converger progressivement les salaires horaires assurés par le SMIC et les GMR au 1er juillet 2005.

10 () L’indice des fonctionnaires entrants, en début de carrière, est plus faible que les personnels sortants, en fin de carrière.

11 () « La crise du logement en France, pourquoi et pour qui ? » Michel Mouillart, Regard sur l’actualité, n° 320, avril 2006.

12 () « Rapport sur l’évolution des loyers, locaux à usage d’habitation dans le parc locatif privé », juin 2007, direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction.

13 () « L’accession, à quel prix ? La baisse des taux alourdit l’effort global des ménages », Jean Bosvieux et Bernard Vorms, Agence nationale pour l’information sur le logement (avril 2007).

14 ()  Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux

15 ()  « Les conditions d’accès au parc locatif privé », Agence nationale pour l’information sur le logement, janvier 2004.

16 ()  Valeurs moyennes.

17 () En comptabilité nationale, les « ménages » sont les particuliers et les entrepreneurs individuels. Les données collectées par la Banque de France, via les commissions de surendettement, concernent des dettes privées des ménages. Les commerçants, les artisans et les agriculteurs sont justiciables de procédures collectives spécifiques pour leurs dettes professionnelles.

18 () Pour un panorama complet du problème du surendettement en France, votre Rapporteur pour avis vous invite à vous reporter au rapport du Conseil économique et social sur « le surendettement des particuliers » présenté par Mme Pierrette Crosemarie en octobre 2007.

19 (1) Le coût unitaire du travail est l’indicateur essentiel du coût du travail. Il exprime ce que doit payer pour sa main d’œuvre une entreprise pour pouvoir produire un euro de valeur ajoutée. Cet indicateur est défini par le ratio entre les coûts totaux de la main d’œuvre et la production.

20 () Indice OCDE.

21 () Données OCDE. Les valeurs en dollars ont été converties en euro sur la base du taux de change moyen en 2006 : 1 euro pour 1,2448 dollars (Source : Banque de France).

22 () Données Eurostat.

23 () Hors Irlande (donnée indisponible).

24 () Hors Irlande (donnée indisponible).

25 () Taxation trends in the European Union, Eurostat, 2007.

26 () Taxation trends in the European Union, Eurostat, 2007.

27 () Source : OCDE, Annual tax database, à partir des taux marginaux d’imposition en 2006, incluant notamment pour la France l’IRPP, la CSG, la CRDS et les cotisations.

28 () Exactement 30 346 millions d’euros sur la période août 2006-juillet 2007. Source : Direction générale des douanes, juillet 2007.

29 () Données ONU-COMTRADE.

30 () Le taux de marge est une mesure de la rentabilité des entreprises. Il correspond au rapport de l’excédent brut d’exploitation sur la valeur ajoutée.

31 () Données Eurostat, à partir de l’excédent brut d’exploitation et du revenu mixte en % du PIB, 1995-2006.

32 () Délocalisations et réductions d’effectifs dans l’industrie française, L’économie française, INSEE, 2005-2006.

33 () Désindustrialisation, délocalisations, Conseil d’analyse économique, Fontagné, Lorenzi, 2005.

34 () « Revenu et Pouvoir d’Achat », Jean Marc Daniel, Sociétal, 2ème trimestre 2007.

35 ()  Jean Marc Daniel, « Revenu et pouvoir d’achat », Sociétal, 2ème Trimestre 2007.

36 () Décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 portant application aux agents publics de l’article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007.

37 () Sauf exception expressément prévue au cahier des charges sociales.

38 ()  « Les conditions d’accès au parc locatif privé », Agence nationale pour l’information sur le logement, janvier 2004.

39 () Proposition de loi n° 480 sur l’organisation du temps de travail dans l’entreprise et en faveur du pouvoir d’achat, 5 décembre 2007.

40 () Les motifs autorisant un déblocage sont les suivantes (art. R.442-19 du code du travail) : mariage ou conclusion d’un PACS, naissance ou arrivée au foyer en vue d’adoption d’un 3e enfant puis de chaque enfant suivant, divorce en cas de garde d’au moins un enfant mineur, invalidité correspondant à un classement en 2e ou 3e catégorie du salarié ou de son conjoint, décès du salarié ou de son conjoint, cessation du contrat de travail, création ou reprise d’entreprise par le salarié ou son conjoint, acquisition ou agrandissement de la résidence principale, installation en vue de l’exercice d’une profession libérale, surendettement.

41 () DARES, « L’épargne salariale en 2005 », Première synthèses n° 44.1, novembre 2007.

42 () Annexe 5 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, p.126.

43 () PLF 2007, Évaluation des voies et moyens, Les évaluations de recettes, tome 1, p.32.

44 ()  Il s’agit des logements neufs, des logements vacants ayant fait l'objet de travaux de mise ou de remise en conformité avec les caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, et des logements conformes aux normes définies par décret, faisant l'objet d'une première location ou, s'ils sont vacants, ayant fait l'objet depuis moins de six mois de travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes, d'un montant au moins égal à une année du loyer antérieur.

45 () La variation de la moyenne des indices du coût de la construction observés durant les quatre derniers trimestres servait de base de référence pour la révision du niveau des loyers en cours de bail dans le parc locatif privé et les augmentations annuelles maximales du loyer dans le parc locatif social.

46 ()  Décret n° 2007-1286 du 29 août 2007 relatif à l'évolution de certains loyers dans l'agglomération de Paris, pris en application de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

47 () « Rapport sur l’évolution des loyers, locaux à usage d’habitation dans le parc locatif privé », juin 2007, direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction.

48 ()  Il ne peut être réclamé de dépôt de garantie dans les cas de plus en plus rares où le loyer est payable d’avance pour une période de plus de deux mois.

49 () Par ailleurs, 37 % des locataires HLM interrogés ont bénéficié du « loca-pass » pour le paiement de leur dépôt de garantie.

50 ()  « Les conditions d’accès au parc locatif privé », Agence nationale pour l’information sur le logement, janvier 2004.