Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N
° 564

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 janvier 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière,

PAR M. Jean-Marc ROUBAUD,

Député

——

Voir les numéros  :

Sénat  : 115, 126 et T.A. 41 (2007-2008)

Assemblée nationale : 522

INTRODUCTION 5

I – UNE COOPÉRATION FRANCO-SURINAMAISE À DÉVELOPPER 7

A – DES RELATIONS BILATÉRALES LONGTEMPS LIMITÉES 7

1) Le Suriname, un voisin turbulent 7

2) L’intensification des relations entre les deux Etats 8

B – UNE COOPÉRATION DANS DE NOMBREUX DOMAINES QUI N’A PAS ENCORE PERMIS DE RÉSOUDRE TOUTES LES DIFFICULTÉS FRONTALIÈRES 8

1) De nombreux domaines de coopération 9

2) La persistance de problèmes frontaliers 10

II – LA COOPÉRATION POLICIÈRE ORGANISÉE PAR L’ACCORD 13

A – UN CHAMP DE COOPÉRATION PRÉCIS 13

B – DES FORMES DE COOPÉRATION MULTIPLES 13

C – LE STRICT RESPECT DES SOUVERAINETÉS NATIONALES 15

CONCLUSION 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

CARTES 21

Mesdames, Messieurs,

Le 19 décembre dernier, le Sénat a adopté le projet de loi autorisant l’approbation d’un accord entre la France et le Suriname relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, signé à Saint-Laurent-du-Maroni, le 29 juin 2006.

L’entrée en vigueur de cet accord devrait permettre de renforcer l’efficacité de la lutte contre la criminalité et la délinquance transfrontalières, particulièrement développées le long du fleuve Maroni, zone à laquelle l’application de l’accord est strictement limitée.

Votre Rapporteur rappellera quelles sont les actions de coopération bilatérale menées par la France au Suriname, avant d’insister sur la persistance de problèmes transfrontaliers et de présenter les avancées permises dans ce domaine par l’accord.

I – UNE COOPÉRATION FRANCO-SURINAMAISE À DÉVELOPPER

Ancienne colonie des Pays-Bas, le Suriname a gardé des liens denses avec ce pays, mais n’a longtemps pas eu des relations nourries avec la France, qui est pourtant son voisin à l’est. Ce sont surtout les problèmes du franchissement illégal de la frontière entre le Suriname et le département de la Guyane française, et les troubles qu’ils induisent, qui ont conduit la France à apporter son aide à ce petit pays.

A – Des relations bilatérales longtemps limitées

1) Le Suriname, un voisin turbulent

Situé tout au nord du Brésil, le Suriname, qui est indépendant depuis 1975, est limité à l’ouest par le Guyana, à l’est par la Guyane française et au nord par l’océan Atlantique. Avec 163 000 km² de superficie – soit près de quatre fois les Pays-Bas –, c’est le plus petit État d’Amérique du Sud. Il partage une frontière terrestre avec la Guyane de 520 km de long, le long du fleuve Maroni.

Il compte moins de 500 000 habitants, mais ceux-ci sont d’origines ethniques et de religions très variées : 37 % de la population sont originaires d’Inde, 31 % sont métis, 15 % d’origine javanaise ; un peu plus du quart de la population est hindou, un quart est protestant, un autre quart catholique et environ un cinquième est musulman.

Le pays occupe la 86ème place, sur 177, en termes d’indice de développement humain.

En 1986, une guerre civile dans l’est du Suriname a provoqué l’afflux en Guyane de 30 000 réfugiés surinamais. Pour favoriser leur retour, la France a signé en 1988 avec le Suriname et le Haut-commissariat pour les réfugiés un accord instaurant une commission tripartite chargée de mettre en place un plan de rapatriement volontaire de ces réfugiés. La normalisation de la situation à l’est du pays a permis la mise en œuvre de ce plan, dit « plan Maroni », en 1992 : 6 000 réfugiés sont rentrés chez eux.

Même si le Surimane est engagé dans un processus démocratique depuis 1991, la différence de situation économique et sociale entre ce pays et la France explique que la population surinamaise soit très tentée par l’immigration clandestine en Guyane.

2) L’intensification des relations entre les deux Etats

La frontière franco-surinamaise a été réouverte dès 1991, permettant la reprise des courants d’échanges traditionnels, mais les relations diplomatiques entre les deux pays sont restées limitées jusqu’en 1998.

Cette année-là, en marge de la session extraordinaire de l’assemblée générale des Nations unies sur les drogues, le Président Chirac et son homologue surinamais se sont entretenus des questions du contrôle de la frontière commune et de la coopération entre leurs deux pays. Le 10 mars 2000, le Président du Suriname a participé au sommet entre la France et les pays du Cariforum, le forum des Etats des Caraïbes.

Hormis d’anciennes conventions relatives à la délimitation des frontières, peu d’accords existent entre la France et le Suriname. Le 25 octobre 2000, a été signée à Paramaribo une convention bilatérale d’assistance administrative mutuelle pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières. Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2005.

Une convention sur la délimitation des frontières maritimes entre la Guyane et le Suriname a été négociée, mais sa signature a été différée par le gouvernement surinamais, notamment en raison de ses éventuelles conséquences sur le différend frontalier entre le Suriname et le Guyana. L’absence de fixation juridique définitive de notre frontière est pourtant préjudiciable à la lutte contre la pêche illégale et au développement de la prospection pétrolière.

Depuis la fin des années 1990, des responsables politiques surinamais et des représentants des autorités françaises nationales comme de la Guyane se sont régulièrement rendu visite. C’est à l’occasion de l’une d’elles que M. Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, a signé l’accord de coopération transfrontalière en matière de police qui est l’objet du présent projet de loi.

B – Une coopération dans de nombreux domaines qui n’a pas encore permis de résoudre toutes les difficultés frontalières

Le Suriname fait partie de la zone de solidarité prioritaire et bénéficie à ce titre des interventions de l’Agence française de développement (AFD) en faveur de la partie est du pays.

Des résultats ont été obtenus dans les secteurs de la santé, de la police et de la justice, en dépit des faiblesses institutionnelles surinamaises et du caractère limité des moyens que la France peut consacrer au Suriname – de moins d’un million d’euros par an –. Celui-ci est en revanche l’un des principaux bénéficiaires de l’aide européenne dans la région, grâce à l’influence toujours forte des Pays-Bas. Le pays a ainsi reçu 23 millions d’euros au titre du IXème Fonds européen de développement (FED) et plus de 19 millions d’euros au titre du Xème FED.

1) De nombreux domaines de coopération

La coopération bilatérale entre la France et le Suriname est composée de plusieurs volets.

En matière de coopération institutionnelle, le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) finance depuis 2003 un programme d’appui institutionnel à la sécurité intérieure du Suriname visant à contribuer à la modernisation de l’administration de la justice, des services chargés de la prévention et de la lutte contre la criminalité et les fraudes, dans le respect des libertés publiques et dans le cadre d’une coopération frontalière renforcée avec la France. La coopération militaire bilatérale (formations, exercices communs, soutien logistique) vise également à renforcer les capacités d’exercice de ses prérogatives de souveraineté par l’Etat surinamais. Elle a conduit à la conclusion, le 28 mars 2003, d’un accord relatif au statut des forces françaises participant à des activités sur le territoire de la République du Suriname.

L’Agence française de développement, basée à Cayenne, effectue des missions régulières à Paramaribo et a signé une convention d’établissement le 14 avril 2000. Deux conventions accordant des crédits destinés au financement d’études ont également été conclues, permettant le lancement d’études concernant d’une part un programme de revitalisation économique de la région d’Albina, voisine du département de la Guyane, d’autre part un projet d’interconnection entre les réseaux électriques du Suriname et de la Guyane. Une autre convention permet le co-financement avec la Banque interaméricaine de développement de la construction de diverses infrastructures communautaires.

Ce soutien au développement local est complété par des actions spécifiques en matière de santé, de culture et d’éducation, et d’environnement.

Un projet de coopération financé par le FSP dans le domaine de la lutte contre les maladies transmissibles, en particulier le paludisme, a visé, depuis mars 2003, à renforcer la surveillance épidémiologique dans la partie surinamaise du bassin du Maroni, à développer le laboratoire central du ministère de la santé surinamais en collaboration avec l’institut Pasteur de Cayenne, et à coopérer en matière de contrôle et de prévention des maladies transmissibles d’intérêt commun sur le Haut-Maroni. Depuis le 1er janvier 2006, ce projet a été transféré à l’AFD : l’objectif général reste le même mais la composante relative à l’intensification de la coopération bilatérale entre le Suriname et la France est plus importante qu’auparavant.

Des relations de coopération de proximité ont également été nouées entre le Centre hospitalier de l’ouest guyanais de Saint-Laurent-du-Maroni et le centre de santé d’Albina afin de mieux gérer les flux de patients de part et d’autre du Maroni. Cette collaboration permettra également la création prochaine d’un centre de dépistage anonyme et gratuit du VIH-SIDA. Une convention de partenariat a enfin été signée entre le Centre hospitalier André Rosemont de Cayenne et les deux principaux établissements hospitaliers de Paramaribo : l’Hôpital académique et le Diakonessenhuis.

Sur le plan culturel, l’ambassade soutient l’Alliance française et apporte son aide aux établissements d’enseignement qui souhaitent développer l’enseignement du français et leurs relations avec la Guyane, et plus généralement à l’ensemble des échanges entre le Suriname et la France. Des projets de coopération culturelle (concerts, spectacles de danse) et éducative (échanges scolaires, stages de formation) sont également mis en œuvre directement à partir de la Guyane sur la base des divers financements disponibles dans ce département français.

Enfin, dans le domaine de l’environnement, la France, par l’intermédiaire du Fonds français pour l’environnement mondial, participe, pour près d’un tiers, au financement d’un projet visant la gestion durable des ressources forestières sur le Plateau des Guyanes, mis en œuvre par le WWF Guianas, et qui intéresse les trois territoires du Plateau des Guyanes : Guyana, Suriname et Guyane. Les objectifs spécifiques de ce projet sont la gestion de la ressource forestière, la lutte contre la pollution générée par la prospection aurifère, l’amélioration de la gestion des zones protégées, et la constitution d’un réseau régional permettant de coordonner la gestion des questions environnementales entre les différents intervenants sur ce plateau.

2) La persistance de problèmes frontaliers

La sécurité, prise dans le sens large du terme, reste la pierre angulaire de la coopération bilatérale entre la France et le Suriname. Les autorités de cet Etat ont exprimé leur intention de coopérer avec la France et, plus particulièrement, avec le département de la Guyane, afin de mieux maîtriser les mouvements migratoires et les flux de marchandises diverses, licites ou non. Cette coopération comporte un volet institutionnel, déjà évoqué, et un volet opérationnel, que le présent accord vise à renforcer.

Alors que, de part et d’autre du Maroni vit une même population qui s’est toujours refusée à voir dans le fleuve autre chose qu’une voie de circulation, le Suriname est, de par sa position géographique, un pays de passage, en particulier pour des ressortissants brésiliens ou du Guyana. Il doit assumer une importante population immigrée, qui représente près du tiers de la population totale estimée. La faiblesse de l’Etat et de ses institutions ne lui permet pas d’en assurer le plein contrôle, tant au niveau des mouvements transfrontaliers que des activités économiques. Au cours des neuf premiers mois de 2007, 3 245 Surinamais ont ainsi été interpellés par les services de la police aux frontières en situation irrégulière sur le sol guyanais, après avoir été 2 718 pendant la même période en 2006.

La France et le Suriname ont signé un accord de réadmission le 30 novembre 2004 à Paris, que la France a ratifié en décembre 2005. Mais les autorités surinamaises conditionnent l’accomplissement des procédures de ratification à la non-application de cet accord pour certaines catégories de personnes (« réfugiés » de la guerre intérieure, personnes âgées, et mineurs). Le ministère des affaires étrangères a répondu en novembre 2006 que la France était disposée à étudier avec bienveillance les cas visés, conformément à la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, et qu’elle souhaitait que l’accord soit ratifié rapidement par la partie surinamaise. Aucune réponse des autorités surinamaises n’est parvenue à ce jour au ministère. Le Parti noir-marron, qui soutient la coalition au pouvoir, s’oppose en fait à cette ratification.

La non-application de cet accord n’empêche toutefois pas les reconduites à la frontière des ressortissants surinamais en situation irrégulière en Guyane. En effet, 3 599 éloignements de ressortissants surinamais ont été effectués à partir de la Guyane en 2006 et 2 457 de janvier à juin 2007.

Par ailleurs, il existe un différend frontalier ancien, appelé « conteste du Maroni », entre la France et le Suriname sur le tracé de la frontière au sud-ouest de la Guyane : la France considère que la frontière se situe au niveau de la rivière Alitani, le Suriname qu’elle passe au niveau de la rivière Malani. Si le règlement de ce différend faciliterait notre coopération transfrontalière en général, l’application de l’accord de coopération qui est l’objet du présent projet de loi n’en est pas tributaire, son domaine d’application étant explicitement défini par son article 1er (voir infra).

II – LA COOPÉRATION POLICIÈRE ORGANISÉE PAR L’ACCORD

La France est liée à plus de vingt Etats par des accords de coopération en matière d’affaires intérieures ou de sécurité intérieure. L’accord concerné par le présent projet de loi a un champ plus limité que ces accords, puisqu’il est strictement limité à la coopération policière et ne s’applique qu’à une partie du territoire des deux parties, mais il est plus directement opérationnel, puisqu’il permet notamment l’organisation de patrouilles conjointes dans la zone frontalière.

A – Un champ de coopération précis

En application de l’article 1er de l’accord, les stipulations de celui-ci concernent exclusivement les forces de police (et de gendarmerie, côté français) compétentes dans l’arrondissement de Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane française, et dans les districts de Marowijne et Sipaliwini, au Suriname ; il s’agit des circonscriptions administratives situées le long du fleuve (voir cartes en annexe). Elles ne sont en outre applicables que dans la zone frontalière, composée du fleuve Maroni lui-même et d’une bande de 2 kilomètres de largeur de part et d’autre des rives de celui-ci.

L’article 2 précise le but de cette coopération transfrontalière, qui vise à « prévenir les faits punissables et faciliter la lutte contre la criminalité et la délinquance transfrontalières ».

B – Des formes de coopération multiples

Trois formes de coopération sont distinguées : les patrouilles conjointes, le détachement d’agents et la coopération directe.

L’article 3 de l’accord prévoit l’organisation de patrouilles conjointes : pourront y participer les agents des services de police (et de gendarmerie) compétents dans les trois circonscriptions administratives précitées ; ces patrouilles ne pourront se dérouler que dans la zone frontalière telle qu’elle est définie à l’article 1er. Dans ce cadre, ne sont autorisés à procéder aux actes de police que les agents de l’Etat sur le territoire duquel la patrouille se déroule, tandis que les ceux de l’autre Etat remplissent exclusivement le rôle d’observateurs.

De même, les agents d’un Etat détachés pour une durée limitée auprès de l’autre Etat, en application de l’article 4, ne le sont qu’en qualité d’observateurs. Ils peuvent contribuer à la coordination de mesures conjointes de surveillance dans la zone frontalière et sur le fleuve d’une part, à la préparation et l’exécution des opérations de remise d’étrangers en situation irrégulière, d’autre part. En revanche, les agents détachés ne peuvent effectuer d’intervention à caractère opérationnel. Ils continuent à relever de leur hiérarchie d’origine, tout en étant soumis au règlement intérieur de leur unité de détachement.

L’article 6 stipule que les agents détachés sont soumis au régime de responsabilité civile et pénale de l’Etat de détachement, qui leur accorde la même protection et assistance qu’à ses propres agents, à moins que le droit national de l’agent détaché ne soit plus protecteur. Cette exception profitera, le cas échéant, aux agents français détachés au Suriname.

Qu’un agent participe à une patrouille conjointe ou soit détaché, il doit porter son uniforme national. Il a le droit d’être armé mais ne peut faire usage de son arme qu’en cas de légitime défense, telle que définie dans le droit du pays où il se trouve.

La coopération directe concerne les responsables des unités concernées par l’accord. Elle consiste en des réunions régulières, dont le principe est posé à l’article 5 de l’accord. Ces réunions seront l’occasion de dresser un bilan de la coopération des unités, d’élaborer des schémas d’intervention commune, ainsi que des plans de recherche de leurs unités, de prévoir les modalités d’exercice et la nature des patrouilles conjointes, de faire le point sur les besoins de coopération et d’échanger des données statistiques sur les différentes formes de criminalité. Des opérations conjointes en vue de lutter contre la criminalité transfrontalière pourront également être décidées à l’occasion de ces réunions : elles diffèrent des patrouilles conjointes dans la mesure où elles sont dirigées contre des personnes ou des faits particuliers, tandis que les patrouilles visent à une surveillance plus générale.

Votre Rapporteur souligne que ne figurent pas parmi ces formes de coopération les échanges d’informations nominatives qui constituent un point très important des accords habituels de coopération en matière de sécurité intérieure. Cette absence est la conséquence de l’absence de législation de protection des données personnelles au Suriname.

L’article 8 de l’accord prévoit enfin que les services concernés favorisent une formation linguistique appropriée pour les agents susceptibles de participer à des opérations transfrontalières. Ce point est essentiel. Le ministère des affaires étrangères considère en effet que la barrière majeure à toute coopération directe entre les services de police français et surinamais reste la langue. Il observe que des agents de la police militaire et de la police judiciaire du Suriname suivent des cours à l’Alliance française de Paramaribo et que la plupart d’entre eux est capable de travailler en anglais. Tel n’est que rarement le cas des agents français. Votre Rapporteur estime qu’il serait dans notre intérêt de renforcer les formations linguistiques à destination de nos fonctionnaires de police et des douanes en poste en Guyane.

C – Le strict respect des souverainetés nationales

Outre le principe selon lequel les agents d’un Etat participant à des patrouilles conjointes ou détachés dans l’autre Etat ne peuvent pas y procéder à des actes de police mais sont cantonnés à un rôle d’observateurs, la souveraineté nationale est préservée par les stipulations de deux articles :

– l’article 2, qui souligne que la coopération s’exerce sans préjudice des conventions internationales liant les Etats parties et de leur droit interne ;

– l’article 9, qui permet à un Etat de refuser sa coopération ou de la soumettre à certaines conditions lorsqu’il estime qu’elle pourrait nuire « à la souveraineté, à la sécurité, à l’ordre public, aux règles d’organisation ou de fonctionnement de l’autorité judiciaire ou à d’autres intérêts essentiels de l’Etat ou de restreindre son droit national ».

Ces clauses de sauvegarde sont habituelles dans les accords de coopération policière.

CONCLUSION

L’accord de coopération transfrontalière en matière policière permettra donc aux forces compétentes des deux Etats de renforcer leur collaboration dans la zone frontalière en effectuant des patrouilles, voire des opérations, conjointes, en échangeant des agents chargés de missions de coordination et en organisant des réunions régulières entre leurs responsables, le tout dans le respect de la souveraineté nationale de chacun des deux Etats.

Etant donné l’ampleur des mouvements migratoires illégaux entre la Guyane et le Suriname, le renforcement de la coopération policière et la mise en œuvre de l’accord de réadmission sont absolument nécessaires. La France a ratifié le second, elle pourra approuver l’accord de coopération transfrontalière dès que le présent projet de loi aura été adopté par votre Assemblée.

Mais la partie surinamaise ne semble pas prête à faire de même, pour des raisons de politique intérieure. Votre Rapporteur souhaite que la prochaine visite du Président de la République en Guyane soit l’occasion d’insister auprès des autorités du Suriname sur l’importance de ces deux accords et d’obtenir que ce blocage soit surmonté.

Votre Rapporteur est donc favorable à l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 8 janvier 2008.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a eu lieu.

M. Jean-Paul Lecoq a déclaré que l’accord examiné ne poserait pas de difficulté particulière s’il se limitait à encourager la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes. Or, ce texte ne mentionne que des généralités, à l’exception des dispositions relatives à la remise d’étrangers en situation irrégulière qui sont, elles, très détaillées. Ce déséquilibre revient à criminaliser l’immigration et confirme la politique actuelle fondée sur le refus de la différence et de l’autre. Dans ces conditions, le présent accord n’est pas acceptable en l’état.

Estimant qu’une telle interprétation de l’accord était de nature à introduire une confusion inutile sur son contenu, M. Jean-Marc Roubaud a précisé que ce texte ne visait qu’à renforcer la coopération entre les Etats sur les questions frontalières, ce qui incluait les questions d’immigration. A cet égard, ces questions ne sont pas éludées puisque son rapport indique clairement que 3 599 expulsions ou reconduites à la frontière ont été réalisées en 2006 et 2 457 entre janvier et juin 2007.

M. Hervé de Charette a souligné que l’accord examiné constituait un accord classique entre Etats relatif à l’ensemble des questions transfrontalières qui leur étaient posées conjointement. Dans ces conditions, il porte sur toutes les formes de trafics et de criminalités auxquelles ces Etats sont confrontés dans la gestion commune et la surveillance de leur frontière. A cet égard, il existe de sérieux problèmes en Guyane qui militent en faveur de cet accord dont la conclusion est sans doute attendue depuis longtemps par les populations concernées. Il convient donc de se réjouir de l’adoption de cet accord.

M. François Loncle a précisé qu’à la demande de ses collègues du groupe SRC, le présent accord fera l’objet d’un débat en séance publique le 17 janvier prochain, dans l’après-midi.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (no 522).

*

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 522).

CARTES

LE SURINAME

Source : http://vakantielanden.net/suriname_landkaart.htm

LA GUYANE FRANÇAISE

Source : http://www.lib.utexas.edu/maps/americas/french_guiana.gif

© Assemblée nationale