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N
° 1108

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 septembre 2008

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail (n° 1096),

PAR M. PATRICK OLLIER,

Député.

——

Voir les numéros 1096, 1106 et 1107

INTRODUCTION 5

I.- UN PROJET DE SOCIÉTÉ QUI CONSERVE UNE GRANDE MODERNITÉ 7

II.- LA CONSTRUCTION PATIENTE D'UN ÉDIFICE COMPLEXE STRUCTURÉ AUTOUR DE TROIS PILIERS 11

III.- DES AVANTAGES SUBSTANTIELS DONT LE BÉNÉFICE EST ENCORE TROP LIMITÉ 15

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 19

II.- EXAMEN DES ARTICLES 25

Article additionnel avant l’article 1er 25

Article 1er (Art. L. 244 quater T, 199 ter R, 220 Y [nouveaux] et 223 O du code général des impôts) : Crédit d'impôt en faveur de l'intéressement. 26

Article additionnel après l’article 1er (Art. L. 3312-3 et L. 3332-2 du code du travail) : Extension du bénéfice de l’’intéressement et des PEE aux chefs d’entreprises de moins de 250 salariés 28

Article 2 (Art. L. 3324-10 et L. 3325-2 du code du travail, Art. 158 et 163 bis AA du code général des impôts) : Possibilité de disposition immédiate des sommes versées au titre de la participation. 29

Après l’article 2 30

Article additionnel après l’article 2 : (Art. 3321-1 et 3323-10 du code du travail) : Rétablissement des dispositions concernant certaines entreprises privées et les entreprises publiques supprimées par erreur lors de la recodification du code du travail 30

Article additionnel après l’article 2 : (Art. L. 3323-6, L. 3324-2, L. 3324-5, L. 3324-7, L. 3324-8, L. 3324-10 à L. 3324-12 et L. 3325-2 du code du travail) : Extension du bénéfice de la participation aux chefs de certaines entreprises 32

Article additionnel après l’article 2 : (Art. L. 3333-7 du code du travail) : Simplification des PEI « de réseaux » 33

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 35

Mesdames, Messieurs,

Le Gouvernement entend, par le projet de loi en faveur des revenus du travail, « mettre en place un cadre plus favorable à la dynamisation des revenus du travail ». À cette fin, il vise notamment à favoriser le développement de l’intéressement et à instaurer le libre choix du salarié quant à l’usage des sommes perçues au titre de la participation, par les articles 1er et 2 dont notre commission s’est saisie pour avis.

Ces deux mécanismes constituent en effet des leviers intéressants procédant d’une logique « gagnant-gagnant », puisqu’ils permettent d’augmenter le revenu des salariés sans grever les coûts fixes des entreprises.

En outre, recourir à l’intéressement et à la participation afin de dynamiser le pouvoir d’achat des salariés satisfait entièrement l’objectif du Président de la République et de sa majorité, qui consiste à revaloriser le travail.

En effet, ces deux mécanismes procèdent d’une philosophie d’ensemble, d’un projet de société, l’association capital-travail proposée par le Général de Gaulle : prolongement dans le domaine économique du projet de concorde nationale que formait le général de Gaulle pour la France, cette association capital-travail vise à transcender les antagonismes de classe, non pour acheter la paix sociale par une association en trompe l'œil, mais pour favoriser la réussite des projets économiques en reconnaissant à sa juste valeur la contribution de chacun, et notamment la contribution des salariés.

Cette association capital-travail, c’est la Participation, Participation qui se décline à travers l’actionnariat salarié, la participation et l’intéressement.

De Gaulle en exposa longuement sa vision lors d'un entretien télévisé en 1968 : « Dès lors que des gens se mettent ensemble pour réaliser une œuvre économique commune, en apportant, qui les capitaux nécessaires, qui le travail, ils forment une société dans laquelle chacun doit être intéressé tant au fonctionnement qu'à la rentabilité, donc au profit. Cela implique que soit attribuée, de par la loi, la juste part à chacun. »

Le Président de la République ne disait pas autre chose lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008 : «  la politique de civilisation s'exprimera dans notre capacité à mieux partager les rentes et les profits, partager plus équitablement les efforts de tous […] ; je veux que le niveau même de la participation et de l'intéressement aux résultats soit fortement augmenté […] ; nous allons créer les conditions réglementaires et fiscales pour que la participation et l'intéressement puissent s'étendre à toutes les entreprises, même à celles de moins de cinquante salariés ».

C’est ce que ce projet de loi entend faire, d’une part, en favorisant la diffusion des mécanismes participatifs, et notamment de l’intéressement, et, d’autre part, en reconnaissant aux salariés le droit de choisir, s’agissant de la participation, entre une logique de revenu immédiat et une logique de revenu différé. En effet, sans revenir sur le principe du blocage de la participation, le salarié bénéficiera d’un délai à compter de la notification de ses droits, à chaque exercice, pour demander la disponibilité immédiate des sommes versées. Il ne s’agit donc pas d’une mesure de déblocage de la participation, qui serait en effet contraire à la philosophie de ce dispositif, mais d’une mesure de liberté et de respect du choix des salariés.

Votre rapporteur vous proposera des amendements s'inscrivant dans cette logique, et se félicite de ces mesures destinées à favoriser la diffusion de la Participation, diffusion à ce jour insuffisante, notamment dans les petites et moyennes entreprises. Il prend acte du choix du Gouvernement de recourir à un mécanisme incitatif, mais prend également bonne note du fait qu’un bilan de ces dispositions sera réalisé dès 2010, bilan à l’issue duquel celui-ci « pourra alors proposer d’instituer une obligation spécifique dans les entreprises de moins de cinquante salariés ».

Les oppositions furent vives lorsqu’en 1967 le Général de Gaulle rendit la participation obligatoire dans toutes les entreprises de plus de cent salariés. C’est à cette attitude courageuse que des millions de salariés doivent aujourd’hui la reconnaissance de leur contribution à la marche de l’entreprise et la participation à sa gouvernance.

Faire en sorte que l’on substitut des rapports de confiance aux rapports de contrainte, est un des objets de cette réforme.

Gageons que cet exemple saura inspirer notre majorité si nécessaire, le moment venu, afin que cette réforme devienne le fer de lance économique et social de notre action.

I.- UN PROJET DE SOCIÉTÉ QUI CONSERVE UNE GRANDE MODERNITÉ

L'idée de Participation se présente comme une profonde modification des rapports entre capital et travail au sein de l'entreprise, tendant à transformer le statut du salarié et à privilégier, dans l'intérêt de chacun, une démarche partenariale plutôt qu'une démarche conflictuelle. Il convient de faire en sorte que les hommes ne soient plus des adversaires, mais deviennent des partenaires.

Contrairement à ce que certains prétendent, la Participation n’a jamais été conçue à la hâte par un chef d’État pris de cours et soucieux de calmer l’agitation liée aux événements de mai 1968.

Les fondements de la Participation sont jetés dès 1942 au sein du Conseil National de la Résistance. Les Instructions pour la Libération du territoire du 15 mars 1944 évoquent déjà les « droits d’accès, dans le cadre de l’entreprise, aux fonctions de direction et d’administration, pour les ouvriers possédant les qualités nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de l’économie ».

Dès lors, le Général de Gaulle manifestera un intérêt constant pour la recherche d’une voie d’association du capital et du travail, en dépit des oppositions, voire des sarcasmes que cet objectif a pu susciter.

En vérité, c'est parce que la Participation bouleversait des grilles de lecture traditionnelles et des habitudes de pensée confortables qu'elle a si vivement été contestée.

Cette conception heurtait de plein fouet une grille de lecture des rapports socio-économiques exclusivement fondés sur la lutte des classes.

Le Général de Gaulle en était d’ailleurs conscient, et se revendiquait de cette rupture avec une logique qu’il jugeait stérile : « [face au communisme et au capitalisme], il y a une troisième solution : c'est la participation, qui, elle, change la condition de l'homme au milieu de la civilisation moderne.[…] Si une révolution, ce sont des exhibitions et des tumultes bruyants, scandaleux et, pour finir, sanglants, alors non la Participation, ce n’est pas une révolution. Mais si une révolution consiste à changer profondément ce qui est, notamment en ce qui concerne la dignité et la condition ouvrières, alors, certainement, c’en est une. Et moi, je ne suis pas gêné dans ce sens-là d’être un révolutionnaire comme je l’ai été si souvent. »

Il reste sans doute quelque chose de ce conservatisme dans le scepticisme amusé que certains manifestent aujourd'hui en ne voyant dans la Participation qu'une vieille lune, un projet obsolète et inadapté à l'économie contemporaine.

Et pourtant ! Comment ne pas voir qu’en tant que projet d’association du capital et du travail, « de brèche ouverte dans le mur qui sépare les classes », selon le mot du Général de Gaulle, ce projet conserve toute sa pertinence ? Il en va de même pour ce qui concerne des aspects plus strictement économiques en particulier dans le contexte de la mondialisation.

La Participation permet de renforcer l’assise domestique du capital des entreprises françaises, et ce faisant, de faire émerger une nouvelle gouvernance d’entreprise, tout en constituant un noyau d’actionnaires stables sur lequel l’entreprise peut s’appuyer en cas d’offre d’achat inamicale.

Elle permet ensuite d’associer plus largement les salariés aux résultats de l’entreprise, sans alourdir les coûts fixes supportés par cette dernière.

Supplément de rémunération, elle n’a certainement pas vocation à se substituer au salaire.

Le salaire correspond à la productivité du travailleur, c'est un élément fixe, prévisible, dont l'évolution est encadrée par des règles strictes.

La Participation dans ses différentes déclinaisons correspond à un surplus, défini soit en terme de résultats, soit en terme de performance, un instrument de rétribution par définition aléatoire qui récompense collectivement les salariés pour leur contribution à la bonne marche de l'entreprise.

C’est d’ailleurs tout l’intérêt de la notion de « dividende du travail », créée par votre rapporteur dans le cadre de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, que de permettre de bien distinguer ce qui relève du salaire d’une part et de la Participation d’autre part.

Afin d’éviter toute dérive, en particulier s’agissant de l’intéressement dont les sommes sont immédiatement disponibles, une règle de non-substitution a donc été fixée par l’article L. 3312-4 du code du travail.

En tout état de cause, le risque d’une substitution entre salaire et participation paraît limité. Comme le déclarait M. Laurent Fabius, alors ministre de l’économie, lors de l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi sur l’épargne salariale : « [Il existe une] troisième inquiétude de certains : l'épargne salariale ne pourrait prospérer qu'au détriment des salaires. L'absence de cotisations inciterait les chefs d'entreprise à proposer, et les salariés à accepter, des arbitrages épargne contre salaire qui conduiraient non seulement à une réduction de l'assiette des cotisations par rapport à l'évolution qui aurait été la sienne en l’absence de plan partenarial, mais aussi à un appauvrissement relatif des salariés. Je ne crois pas que cette crainte soit fondée. Ce serait, en effet, négliger les salariés eux-mêmes, qui précisément, comme vous le savez, géreront les fonds, et la force de ceux qui y souscriront. En outre, le taux d'épargne des ménages est, en France, déjà élevé puisqu'il représente en moyenne 15 % du revenu de nos concitoyens ; compte tenu de ce niveau élevé, un nouveau produit pourra éventuellement être à l'origine de déplacements entre les différentes formes d'épargne, mais il ne devrait pas avoir pour conséquence de se substituer au salaire. »

Au surplus, le présent projet de loi comporte des dispositions de nature à dissiper toute confusion et à décourager toute tentation de faire de la Participation un substitut au salaire. Il prévoit tout d'abord que le non respect de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires pourra entraîner une réduction de 10 % des allègements de cotisations sociales patronales. Il prévoit ensuite un dispositif de conditionnalité de ces exonérations en fonction du premier niveau de la grille salariale des branches, afin d'inciter celles-ci à réajuster régulièrement leur grille et à les porter à un niveau au moins égal au SMIC.

Cette distinction entre salaire et Participation réaffirmée, il faut toutefois souligner que celle-ci peut néanmoins constituer une variable dans une politique de rémunération d’ensemble, et donc de pouvoir d’achat.

Comme le notaient en 2000 MM. Jean-Pierre Balligand et Jean-Baptiste de Foucauld dans leur rapport au Premier ministre d'alors, M. Lionel Jospin, « L'objectif [de la participation] n'est pas qu'elle se substitue au salaire, dans une conception de flexibilité défensive - ce qui n'est d'ailleurs pas autorisé par la réglementation - mais qu'elle ajoute sans risque pour l'entreprise, c'est-à-dire chaque fois que la situation de celle-ci le permet, un complément temporaire de rétribution à un salaire qui doit, pour sa part, continuer à croître modérément et régulièrement. Il s'agit ici d'une flexibilité vers le haut et non vers le bas, d'une épargne salariale offensive, qui modifie temporairement le partage de la valeur ajoutée, au profit des salariés, sans risque pour l'entreprise ni pour l'emploi ».

II.- LA CONSTRUCTION PATIENTE D'UN ÉDIFICE COMPLEXE STRUCTURÉ AUTOUR DE TROIS PILIERS

La Participation telle que nous la connaissons aujourd'hui est l'aboutissement d'un long processus, et résulte d'une construction par strates et améliorations successives de dispositifs dont les fondements ont été posés sous la présidence du Général de Gaulle.

On peut citer notamment, et de manière non exhaustive :

- l'ordonnance du 7 janvier 1959, qui crée l'intéressement ;

- les ordonnances du 17 août 1967, qui créent « la participation des salariés aux fruits de l'expansion de l'entreprise », obligatoire dans toutes les entreprises de plus de cent personnes, et le plan d'épargne d'entreprise ;

- les ordonnances du 21 octobre 1986, simplifiant les systèmes précédemment mis en place et facilitant l'accession des représentants de salariés aux conseils d'administration des entreprises ;

- la loi du 27 décembre 1973, qui développe l'actionnariat dans le secteur privé ;

- la loi du 25 juillet 1994, dite loi Giraud, qui doit beaucoup à M. Édouard Balladur, alors Premier ministre, et qui fut votée dans le prolongement du rapport établi par notre collègue Jacques Godfrain ; outre le volet financier de la participation, ce texte abordait également le volet « participation aux décisions » ;

- la loi du 19 février 2001, qui crée notamment le plan d'épargne interentreprise et le plan partenarial d'épargne salariale volontaire, encourage l'investissement dans des fonds communs de placements solidaires, et rend plus fréquente la négociation sur le développement de l'actionnariat.

Depuis lors, la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a créé le Plan d'épargne pour la retraite collectif ; la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a profondément modifié les modalités de conclusions des accords collectifs, et comporte en outre un certain nombre de dispositions, introduites par amendement, relatives à la participation ; la loi du 31 mars 2005 a également renforcé les liens existants entre l'organisation du temps de travail et l'épargne salariale en favorisant l'affectation des droits détenus sur ces comptes au Perco ; la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie, qui étend le bénéfice de l’intéressement au chef d’entreprise, précise les conditions de transferts des sommes issues de l’épargne salariale d’un plan à un autre et renforce les obligations des entreprises non cotées s’agissant de l’évaluation de leurs titres.

Il convient également de saluer l'initiative d'Édouard Balladur qui a permis, à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2005, l'attribution d'actions gratuites aux salariés et mandataires sociaux de l'entreprise.

Enfin, la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié comportait des mesures permettant le versement d'un supplément de participation et d'intéressement, créant un intéressement de projet et prévoyant une négociation obligatoire au niveau de la branche sur la participation ; elle prévoyait également une représentation des actionnaires salariés dans les conseils d'administration des sociétés cotées, ou bien encore la disponibilité immédiate des produits des actifs détenus par ces actionnaires salariés, cette dernière mesure résultant d'une initiative de votre rapporteur.

L'ensemble de ces textes a construit un édifice juridique qui s'articule autour de trois piliers porteurs :

– la participation aux résultats, qui concrétise le lien qui existe entre les performances de l’entreprise et la contribution des salariés, contribution au sens large qui va au-delà des critères de productivité habituellement pris en compte dans la détermination du salaire. Il s’agit de reconnaître ce que l’on qualifierait aujourd’hui de capital humain, cet apport immatériel mais pourtant décisif du salarié ;

– la participation au capital, qui consacre la participation accrue des salariés à l’entreprise et leur permet ainsi d’accéder à la propriété de leur outil de travail ;

– la participation aux décisions, qui permet d’associer à la gestion quotidienne de l’entreprise ceux qui en ont la connaissance la plus immédiate, et qui appliqueront d’autant plus volontiers une stratégie qu’ils auront été associés à son élaboration. En faisant du salarié un partenaire, et non un simple exécutant, on renforce l’efficacité de l’entreprise.

Ces principes se déclinent en 5 dispositifs : l’intéressement, la participation et les plans d’épargne salariale, c’est-à-dire le plan d’épargne d’entreprise (PEE), le Plan d’épargne inter-entreprise (PEI) et le plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) :

RAPPEL DES DÉFINITIONS

La participation financière des salariés recouvre l'ensemble des dispositifs ci-dessous.

La participation des salariés aux résultats de l'entreprise, obligatoire dans les entreprises employant au moins 50 salariés, permet de faire participer chaque salarié aux résultats de son entreprise, en redistribuant une partie des bénéfices réalisés selon des modalités prévues par accord collectif. Cependant, les sommes versées ne sont pas immédiatement disponibles : elles sont bloquées pendant 5 ans en vue de financer des investissements productifs. En contrepartie, l'entreprise et les salariés bénéficient d'avantages fiscaux et sociaux.

L'intéressement des salariés à l'entreprise permet à toute entreprise qui le souhaite, dès lors qu'elle satisfait à ses obligations en matière de représentation du personnel, d'instituer un intéressement collectif des salariés présentant un caractère aléatoire et résultant d'une formule de calcul liée aux résultats ou aux performances de l'entreprise.

Le plan d'épargne d'entreprise (PEE) est un système d'épargne collectif ouvrant aux salariés de l'entreprise la faculté de se constituer avec l'aide de celle-ci un portefeuille de valeurs mobilières.

Le Plan d'Épargne Interentreprises (PEI), créé par la loi du 19 février 2001, permet à plusieurs entreprises, quelles qu'elles soient, de créer un dispositif d'épargne commun à l'ensemble de leurs salariés. Cela permet notamment aux petites entreprises de s'ouvrir à la participation financière, car la mise en place de ce système n'est plus faite entreprise par entreprise ; en outre, le coût pour une entreprise de mettre en place le PEI est bien inférieur au coût nécessaire à la mise en place du PEE.

Le Plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO), créé par la loi du 21 août 2003, est un système d'épargne retraite en entreprise ; la sortie se fait en rente viagère et éventuellement en capital. Il bénéficie d'avantages sociaux et fiscaux supplémentaires par rapport au PEE : ainsi le plafond d'abondement est doublé (4 600 € par an et par salarié contre 2 300 € pour le PEE). Il peut également être mis en place entre plusieurs entreprises, sur le modèle du PEI : on parlera alors de PERCO-I.

Source : Conseil supérieur de la participation.

III.- DES AVANTAGES SUBSTANTIELS DONT LE BÉNÉFICE EST ENCORE TROP LIMITÉ

Conséquence de ces efforts constants et opiniâtres en faveur de la Participation, notre pays s'illustre parmi ses partenaires européens en la matière, ce dont il convient de se réjouir.

Ainsi que le relève le rapport de M. François Guillaume, au nom de la Délégation pour l’Union européenne  (1): « les différents régimes de participation financière au sens large, participation et intéressement, sont plus développés en France et au Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, aux Pays-Bas, que dans les autres pays de l’Union européenne ».

PARTICIPATION FINANCIÈRE EN EUROPE

Entreprises disposant de régimes de participation financière,

en 2000 (en % du total des entreprises interrogées)

graphique

Source : Délégation pour l’Union européenne.

Ainsi, selon les derniers chiffres du Conseil supérieur de la participation dans son rapport pour 2005-2006, fin 2004, 54,1 % de salariés du secteur marchand non agricole bénéficiaient d'au moins un dispositif de participation financière, contre 53,2 % en 2003 et 52 % en 2002.

Au total, ce sont 8,3 millions de salariés qui ont accès à un plan d'épargne d'entreprise ou sont couverts par un accord d'intéressement ou de participation.

En outre, les versements atteignent des montants substantiels en progression constante : en 2005, 12,7 milliards d'euros ont été distribués à 6,4 millions de salariés, soit 9,2 % d'augmentation, dont 6 milliards d'euros au titre de la participation, 5,3 milliards au titre de l'intéressement et 1,3 milliard d'abondement.

En 2005, les bénéficiaires ont reçu en moyenne 1 990 euros contre 1 830 euros en 2004, soit une augmentation de 160 euros. Cette prime représente un surcroît de rémunération de 7 % pour ceux qui en bénéficient.

LES DISPOSITIFS D’ÉPARGNE SALARIALE

Exercice comptable

2000

2001

2002

2003

2004

Participation

         

Montant total brut distribué (millions d'euros)

4 927

5 058

4 927

5 313

6 018

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

4 254

4 299

4 243

4 401

4 670

Montant moyen de la participation

1 158

1 177

1 161

1 207

1 289

Pourcentage de la masse salariale

4,7

4,6

4,6

4,6

4,8

Intéressement

         

Montant total brut distribué (millions d'euros)

3 799

4 445

4 637

4 991

5 342

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

3 283

3 720

3 753

3 871

3 880

Montant moyen de l'intéressement

1 157

1 195

1 236

1 289

1 377

Pourcentage de la masse salariale

4,3

4,3

4,5

4,5

4,6

Abondement du plan d'épargne entreprise

         

Montant total brut distribué (millions d'euros)

974

1 101

1 098

1 284

1 299

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

2 024

2 079

2 389

2 604

2 570

Montant moyen de l'abondement

481

530

460

493

506

Pourcentage de la masse salariale

1,7

1,8

1,6

1,6

1,6

Participation, intéressement et abondement du PEE

         
   

10

10

11

 

Montant total brut distribué (millions d'euros)

9 700

604

662

588

12 659

Nombre de bénéficiaires (en milliers)

5 780

5 941

6 065

6 317

6 361

Montant moyen

1 678

1 785

1 758

1 834

1 990

Pourcentage de la masse salariale

6,5

6,7

6,5

6,5

7,0

Nombre de salariés couverts par un des 3 dispositifs (en milliers)

163

7 768

7 997

8 194

8 315

Plan d'épargne entreprise

         

Versements totaux nets (1) sur PEE (millions d'euros)

5 939

6 808

6 444

7 460

7 652

Nombre de salariés épargnants (en milliers)

2 981

2 968

3 404

3 652

3 733

Pour information

         
 

337

361

365

373

 

Masse salariale totale (millions d'euros)

682

036

055

889

378 847

 

15

15

15

15

 

Nombre total salariés au 31 décembre 2004 (en milliers)

037

286

428

393

15 371

Champ : secteur marchand non-agricole, hors intérim et secteur domestique.

Lecture : l'exercice 2004 a permis de distribuer, au titre de la participation, 6 045 millions d'euros à 4,67 millions de salariés, soit une prime moyenne de 1 289 euros représentant 4,8 % de la masse salariale de ces salariés.

(1) Les versements totaux comprennent l'ensemble des versements effectués par les salariés, ainsi que

l'abondement de l'entreprise. Ils sont nets de prélèvements sociaux (CSG et CRDS).

Note : les sommes versées au titre de l'exercice de l'année N le sont généralement l'année N+1 pour la participation et l'intéressement, au cours de l'année N pour l'abondement du PEE.

Source : Dares, enquête Acemo-PIPA 2005

Pour autant, la Participation dans ses diverses déclinaisons reste limitée aux grandes entreprises.

11 % des salariés des entreprises de moins de cinquante salariés sont couverts par au moins un dispositif d'épargne salariale, contre trois salariés sur quatre dans les entreprises de cinquante à 499 salariés, et plus de neuf sur dix dans les entreprises de plus de 500 salariés.

Au total, 91,4 % des salariés ayant accès à un dispositif d’épargne salariale sont employés dans des entreprises d’au moins 50 salariés, alors que les salariés de ces entreprises ne représentent que 58,2 % de l’ensemble des salariés. À l’inverse, les entreprises de moins de 50 salariés emploient seulement 8,6 % des salariés couverts par un accord de participation, alors que ce sont 41,8 % de l’ensemble des salariés qui y travaillent.

IMPORTANCE DES DISPOSITIFS D’ÉPARGNE SALARIALE EN 2004, SELON LA TAILLE DE L’ENTREPRISE ET LE SALAIRE MOYEN

Taille de l'entreprise

Salaire annuel moyen

Part de salariés

Prime moyenne (en euros)

ayant accès

à un dispositif

ayant reçu

une prime

1 à 49 salariés

 

10,9 %

7,4 %

2 063

dont :

inférieur au premier quartile

4,4 %

2,4 %

957

 

supérieur au troisième quartile

17,0 %

12,0 %

2 541

50 à 499 salariés

 

75,9 %

56,3 %

1 642

dont :

inférieur au premier quartile

40,4 %

28,6 %

584

 

supérieur au troisième quartile

83,0 %

62,0 %

2 204

500 salariés ou plus

 

92,9 %

73,6 %

2 183

dont :

inférieur au premier quartile

89,0 %

67,4 %

768

 

supérieur au troisième quartile

93,8 %

79,6 %

2 596

Total

 

54,1 %

41,4 %

1 990

dont :

inférieur au premier quartile

23,5 %

16,8 %

741

 

supérieur au troisième quartile

69,6 %

56,3 %

2 485


Source
 : Dares, enquête Acemo-PIPA 2005

Les PME et les TPE sont encore très largement exclues des dispositifs participatifs, en particulier parce que la participation aux bénéfices n’est obligatoire que dans les entreprises de plus de cinquante salariés.

La loi sur le développement de la participation et de l’actionnariat salarié a tenté d’y remédier, en prévoyant des négociations de branche obligatoires dans les trois ans suivant sa publication, afin de conclure des accords de participation qui offriraient ainsi aux PME et TPE des formules « clés en main » simples à mettre en œuvre et adaptées à leur réalité économique.

Pour autant, et comme le souligne le rapport de notre collègue sénateur M. Alain Gournac, dans son rapport sur la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés (2), une fois la négociation lancée, elle peut se dérouler sur une période allant de 6 à 12 mois, voire 18 mois. Ainsi dans la pire des hypothèses, une négociation lancée le 30 décembre 2009 pourrait n’aboutir qu’au 30 juin 2011 !

En outre, si la loi prévoit une obligation de négocier, une obligation de moyens, elle ne prévoit en aucun cas une obligation de résultats.

Or comme le note le rapport précité, il existe un précédent en matière d’accord de branche, conclu avant la loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié. En janvier 2003, les partenaires sociaux du bâtiment et des travaux publics ont signé un accord de branche portant sur le Plan d’épargne inter-entreprise (PEI) et le plan d’épargne collective pour la retraite (PERCO), complétant un accord de 1969 sur la participation.

L’accord de 2003 prévoit une possibilité de mise en place simplifiée et facultative de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés.

Le démarrage a été rapide pour les PEI et les PERCO dans ces entreprises, mais le résultat n’est absolument pas concluant en matière de participation. Plus de 5 400 entreprises ont adhéré au PEI et PERCO, dont près de 4 900 emploient moins de 50 salariés. Mais 21 entreprises de moins de 50 salariés seulement ont adhéré à l’accord de participation !

Dès lors, sans aller jusqu'à étendre le champ de l'obligation de mettre en œuvre la participation, il convient de renforcer les incitations à la mise en œuvre des mécanismes les plus adaptés aux petites entreprises, c'est-à-dire l'intéressement, et ce que ce projet de loi se propose d'entreprendre.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission a procédé à l’examen pour avis, sur le rapport de M. Patrick Ollier, des articles 1 et 2 du projet de loi en faveur des revenus du travail (n° 1096).

M. Patrick Ollier, rapporteur, a appelé l’attention de la Commission sur la nécessité d’une juste répartition de la valeur ajoutée. Pour ce faire, l’association du capital et du travail est nécessaire. C’est là le fondement du projet de « société de participation » avancé par le Général de Gaulle.

Présentant des dispositions dont la Commission est saisie pour avis, le rapporteur a indiqué que l’article 1er vise à favoriser la diffusion des mécanismes participatifs en privilégiant l’incitation fiscale plutôt que l’obligation, et s’appuie sur l’intéressement plutôt que sur la participation. L’objectif affiché est de doubler les montants distribués entre 2008 et 2012.

A cette fin, le projet de loi instaure un crédit d’impôt pour les entreprises mettant en place un accord d’intéressement, égal ou bien à 20 % des primes versées - lorsqu’il s’agit d’un premier accord -, ou bien à 20 % de la différence entre la moyenne des primes versées au titre de l’accord précédent et les primes versées au titre du nouvel accord.

Deux mesures ponctuelles destinées à renforcer cette incitation fiscale sont également prévues par le projet de loi : d’une part, la signature d’un avenant à un accord en cours à la date de publication de la loi donne droit au même crédit d’impôt ; d’autre part, une entreprise qui conclut un accord ou un avenant à un accord entre la date de la publication de la loi et le 1er juin 2009 pourra verser une prime collective de 1 500 euros ouvrant droit au même avantage fiscal.

Le dispositif prévu est de durée limitée : il s’appliquera pendant six ans, soit pour deux vagues d’accords - les accords d’intéressement présentant une durée de validité triennale. Un rapport d’évaluation du dispositif sera présenté au Parlement en 2014, et un premier bilan d’étape sera réalisé en 2010. Le coût de ces mesures devrait être compris entre 0,8 et 1,2 milliard d’euros par an.

En outre, afin de mieux prendre en considération la liberté du salarié, l’article 2, tout en maintenant le principe du blocage de la participation pendant 5 ans, permet au salarié qui le souhaite de choisir entre une logique de pouvoir d’achat immédiat et une logique de pouvoir d’achat différé. A l’occasion de la notification de ses droits au salarié, qui interviendra à la clôture de chaque exercice, celui-ci pourra en demander la disponibilité immédiate. Les sommes perçues seront alors soumises au même régime fiscal que les primes d’intéressement non affectées à un plan d’épargne d’entreprise.

Le terme de « déblocage », qui a pu être employé pour qualifier ce dispositif, est impropre. En effet, il ne s’agit pas de débloquer des sommes déjà perçues et actuellement indisponibles – donc d’agir sur le stock, mais de permettre au salarié, pour les sommes qu’il percevra à l’avenir, de décider de les bloquer ou non – donc d’agir sur le flux.

Cette libre disposition par chaque salarié des futures sommes versées au titre de la participation vise en outre à mettre fin aux mesures de déblocage ponctuelles et globales, qui se sont multipliées au cours des dernières années, ce qui apparaît regrettable.

Le rapporteur a ensuite présenté dans leurs grandes lignes ses principaux amendements. Il a fait part de sa conviction qu’il faut continuer d’aller vers plus de confiance réciproque dans le monde du travail, même si le chemin vers la société de participation s’avère long. Les amendements déposés vont dans ce sens.

Un premier a pour objet de fixer l’idée de « dividende du travail » en la codifiant. Ce concept a été introduit dans la loi de 2006 en faveur du développement de la participation et de l’actionnariat salarié. Il pourrait être inséré dans l’intitulé de la partie du code du travail qui rassemble toutes les mesures participatives. Cette mesure accroîtrait la lisibilité des nombreuses mesures techniques qui existent à l’heure actuelle et faciliterait leur appropriation par les acteurs.

Un second amendement a pour fonction d’étendre le mécanisme de la participation aux entreprises publiques. Il s’agit avant tout d’un amendement technique qui vise à rétablir des dispositions supprimées par erreur lors de la recodification du code du travail. Mais cela n’entame en rien l’importance politique d’une telle mesure : le rapporteur a ainsi exprimé son incompréhension face au refus répété des syndicats majoritaires à la SNCF de signer un accord d’intéressement, par crainte que celui-ci ne se substitue peu à peu au salaire. Or le droit du travail garantit que les négociations salariales ne se confondront pas avec les négociations sur l’intéressement.

Un dernier amendement présenté par le rapporteur étend les possibilités pour le chef d’entreprise de bénéficier de l’intéressement et de la participation, et simplifie le fonctionnement des outils participatifs privilégiés par les petites entreprises, particulièrement nombreuses en France.

Le rapporteur a donc proposé, sous la réserve de l’adoption de ces amendements, de donner un avis favorable à l’adoption de ce projet de loi.

Le président Serge Poignant s’est félicité que la Commission des affaires économiques se saisisse pour avis de plusieurs articles de ce texte important. Chacun connaît l’intérêt passionné du rapporteur pour ces sujets et sa force de conviction lorsqu’il s’agit de leur assigner l’ambition qu’ils méritent.

M. Olivier Dussopt a fait part des interrogations de son groupe quant à l’efficacité du dispositif proposé. En quoi son effet favorable pour le pouvoir d’achat des Français est-il garanti, alors que quatre textes ont déjà été pris sur le même sujet en moins d’un an ?

Personne n’a oublié que lorsque les fonds de la participation ont été débloqués sous l’impulsion de M. Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’économie et des finances, l’effet sur la relance du pouvoir d’achat a été quasi nul, les sommes en jeu s’orientant plutôt vers des modes de placement plus rémunérateurs.

Ensuite, la mesure semble coûteuse à terme, le doublement de 6,5 milliards à 13 milliards de l’intéressement occasionnant une dépense de l’ordre de 1,7 milliard sur quatre ans, ce qui est lourd pour les finances publiques et peu cohérent avec les mesures d’assujettissement de l’intéressement et de la participation à un « forfait social » prévues dans le prochain PLFSS.

Une autre critique à adresser au dispositif tient au fait que l’immense majorité des salariés s’en trouvera exclue et que les fonctionnaires n’en bénéficieront pas, en dépit de l’élargissement aux entreprises publiques. En outre, le mécanisme du crédit d’impôt n’est certainement pas le plus incitatif dans le contexte économique actuel.

Le déblocage des fonds inscrits au titre de la participation risque de mettre à mal l’épargne de précaution des salariés n’appartenant pas aux classes les plus favorisées, contraints d’arbitrer entre leurs besoins immédiats de consommation et une hausse à moyen terme de leur pouvoir d’achat.

Il faut aussi considérer que les sommes inscrites au titre de la participation apparaissent comme des fonds propres dans le bilan des entreprises. N’y a-t-il pas là un risque de minorer les fonds propres « réels » des entreprises et, par conséquent, de les fragiliser ?

Enfin, il ne faut pas que l’élargissement des dispositifs d’intéressement tende à se substituer aux augmentations de salaire normalement discutées dans le cadre des négociations sociales. A cet égard, le dix-huitième alinéa de l’article premier est de nature à susciter l’inquiétude. Il ne faudrait pas entrer dans la logique selon laquelle l’intéressement peut se substituer aux augmentations découlant de la négociation salariale.

M. Olivier Dussopt alors indiqué que le groupe socialiste donnerait un avis défavorable à l’adoption de ce texte.

M. Michel Piron a salué le caractère éminemment courageux de ce texte, compte tenu du contexte économique contraint. La participation répond à l’exigence d’une plus juste répartition des fruits du travail et permet de reconnaître que les entreprises tirent l’essentiel de leur valeur du travail de leurs salariés.

Comme l’a rappelé le rapporteur, participation et intéressement s’inscrivent dans une perspective de moyen terme et les modalités de bon sens qui sont proposées pour consacrer l’association des salariés aux résultats de leur entreprise sont pleinement satisfaisantes.

Qualifiant de généreux le fondement de la pensée socialiste, le rapporteur a déploré qu’un texte tendant à une meilleure association entre le capital et le travail ne recueille pas l’unanimité. Faut-il croire que les vieilles lunes selon lesquelles le capital reste l’ennemi à combattre sont, pour certains, toujours d’actualité ?

S’agissant de l’efficacité du dispositif, le doute n’est recevable que dans la mesure où nul ne sait jamais par avance si ce qu’il propose sera efficace ou non. Par contre, ce qui ne saurait être mis en cause, c’est la volonté du Gouvernement et de sa majorité de trouver des pistes de réforme pour améliorer le pouvoir d’achat des salariés. La participation constitue bien sûr un principe social, une manière d’envisager les relations sociales dans les entreprises, mais c’est aussi un élément de pouvoir d’achat. Au reste, nul n’envisage que son extension se substitue aux augmentations de salaire. A preuve, le texte consacre l’obligation d’ouvrir des discussions salariales régulières et prévoit de sanctionner les entreprises qui ne s’y conformeraient pas en jouant sur les allégements de charges dont elles bénéficient.

Pour ce qui concerne le déblocage des fonds, il ne faut pas faire de confusion entre les mesures législatives de déblocages ponctuels, qui jouent de manière globale sur le stock, et la décision individuelle du salarié, qui porte sur l’affectation des sommes qui lui sont versées chaque année et concernent donc les flux à venir. Le rapporteur a d’ailleurs fait part de ses réserves sur les mesures de déblocage global.

Selon les derniers chiffres disponibles, l’effet sur le pouvoir d’achat est indiscutable : en 2005, les divers mécanismes participatifs ont procuré à chaque salarié concerné un surcroît moyen de rémunération de 1 190 euros, ce qui est loin d’être négligeable, et ont représenté un versement de 12,7 milliards au niveau agrégé.

Enfin, libre à chacun de considérer que le coût du dispositif – évalué dans une fourchette comprise entre 0,8 milliard et 1,2 milliard – est trop lourd. Rien n’est insurmontable lorsqu’il s’agit d’améliorer la condition des salariés de notre pays ; les sommes en jeu sont donc parfaitement justifiées.

Par ailleurs, on ne peut qu’être favorable à l’extension de la participation aux agents des trois fonctions publiques : le rapporteur a ainsi indiqué avoir interpellé le Gouvernement à ce sujet lors de la réunion de la Commission des affaires culturelles de la veille. A Rueil-Malmaison, les 2 400 agents municipaux bénéficient d’une prime d’objectifs et de progrès et ce type d’outil devrait être généralisé.

Le rapporteur a alors remercié M. Michel Piron d’avoir relevé le caractère courageux de ce texte. Le contexte économique difficile que notre pays affronte aujourd’hui ne doit pas conduire à tout mélanger : MM. Sarkozy et Fillon ne sont pas responsables de la crise des subprimes et c’est, au contraire, tout à l’honneur du Gouvernement d’avoir su prendre les mesures qui tiennent le pays à l’abri des principales retombées !

Pour l’heure, il convient de saisir l’occasion que donne ce texte d’aller plus loin dans la juste répartition des fruits du travail.

Le président Serge Poignant a remercié l’ensemble des intervenants et, en particulier, le rapporteur pour son engagement constant en faveur des salariés.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article additionnel avant l’article 1er

Codification du dividende du travail.

Comme le note le rapport de MM. Godfrain et Cornut-Gentille, La participation, une ambition pour tous, la connaissance de l’épargne salariale demeure très faible parmi les salariés. D’après une étude du groupe BNP Paribas et de la société ALTEDIA, menée dans les entreprises de plus de cinquante salariés, donc soumises à l’obligation de mettre en place un dispositif de participation, près d’un tiers des salariés ne se prononcent pas lorsqu’on les interroge sur ce qu’évoque pour eux l’épargne salariale. On imagine que si l’enquête avait été menée dans l’ensemble de la population salariée française, ce chiffre aurait été plus important encore.

Source : La participation, une ambition pour tous, rapport au Premier ministre de MM. Jacques Godfrain et François Cornut-Gentille.

Un effet important de pédagogie doit donc être accompli.

C’est ce qui avait conduit votre rapporteur à introduire la notion de dividende du travail dans la loi du 30 décembre 2006, et le conduit aujourd’hui à vous proposer de la codifier dans l’intitulé du livre troisième de la troisième partie du code du travail consacré à l’intéressement, à la participation et à l’épargne salariale.

La codification de cette notion a ainsi pour objet de réaffirmer que les diverses mesures techniques inscrites dans le code du travail sont sous-tendues par un projet de société, le projet participatif, l’association capital-travail.

*

* *

La Commission a examiné un amendement du rapporteur visant à introduire dans le code du travail la notion de « dividende du travail » en l’insérant dans l’intitulé du livre III de la troisième partie dudit code. M. François Brottes a indiqué que le groupe socialiste ne voterait pas en faveur de cet amendement, qui semble exclure le salaire du dividende du travail : l’amendement traduit en effet une dérive conduisant à la disparition progressive du salaire, revenu pérenne et fiable, au profit de dividendes aléatoires. Il constitue également une atteinte au système français de protection sociale des salariés dans la mesure où ce dividende est exonéré de cotisations sociales. Enfin, le livre du code du travail dans lequel la modification est introduite ne traite pas des stocks options : celles-ci ne sont-elles pas aussi des dividendes du travail ?

Le rapporteur a indiqué que le dividende du travail symbolisait l’association du capital et du travail et le partage de la richesse créée par cette association. Ce n’est pas une idée nouvelle, comme en témoigne le rapport remis en 2000 au Premier ministre de l’époque, M. Lionel Jospin, par MM. Balligand et de Foucauld qui rappelle que « l’objectif de la participation n’est pas qu’elle se substitue au salaire dans une conception de flexibilité défensive, qui n’est d’ailleurs pas autorisée par la réglementation, mais qu’elle ajoute, sans risque pour l’entreprise, un complément temporaire de rétribution au salaire qui, pour sa part, doit continuer à croître modérément et régulièrement ». Le dividende du travail ne se substitue donc pas au salaire, il désigne la part de la richesse créée par l’association du capital et du travail, et répartie équitablement entre eux, qui est destinée aux salariés. A la suite de ces précisions du rapporteur, la Commission a adopté l’amendement.

Article 1er

(Art. L. 244 quater T, 199 ter R, 220 Y [nouveaux] et 223 O du code général des impôts)

Crédit d'impôt en faveur de l'intéressement.

L’article 1er vise à favoriser la diffusion des mécanismes participatifs en privilégiant l’incitation fiscale plutôt que l’obligation, et s’appuie sur l’intéressement plutôt que sur la participation. L’objectif affiché est de doubler les montants distribués entre 2008 et 2012.

Il instaure un crédit d’impôt pour les entreprises mettant en place un accord d’intéressement, égal à :

- 20 % des primes versées lorsqu’il s’agit d’un premier accord ;

- et de 20 % de la différence entre la moyenne des primes versées au titre de l’accord précédent et les primes versées au titre du nouvel accord.

Deux mesures ponctuelles destinées à renforcer cette incitation fiscale sont également prévues par le projet de loi :

- la signature d’un avenant à un accord en cours à la date de publication de la loi donne droit au même crédit d’impôt ;

- une entreprise qui conclue un accord ou un avenant à un accord entre la date de la publication de la loi et le 1er juin 2009 pourra verser une prime collective de 1 500 euros ouvrant droit au même avantage fiscal.

Le dispositif prévu au présent article est de durée limitée : il s’appliquera pendant six ans, soit pour deux vagues d’accords (les accords d’intéressement présentant une durée de validité triennale). Un rapport d’évaluation du dispositif sera présenté au Parlement en 2014, et un premier bilan d’étape sera réalisé en 2010. Le coût de ces mesures serait compris entre 0,8 et 1,2 milliard d’euros par an.

*

* *

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Decool visant à modérer le principe de non-substitution de la prime exceptionnelle d’intéressement à des éléments de rémunération en prévoyant que les redressements de cotisations appliqués en cas de substitution ne le soient que pour les seules fractions substituées. Le rapporteur s’est déclaré défavorable à cette proposition à double titre : d’une part, sur le fond, le principe selon lequel l’intéressement ne se substitue pas au salaire doit être fermement respecté ; d’autre part, d’un point de vue technique, il convient de rappeler que la prime exceptionnelle sera versée soit après un nouvel accord soit après conclusion d’un avenant qui, l’un comme l’autre, doivent être déposés pour examen à la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, celle-ci disposant d’un délai de 4 mois pour l’examiner et demander des modifications : or, au-delà de ce délai, aucune contestation ne peut plus avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales accordées. M. Jean-Pierre Decool ayant argué du fait qu’une telle dérogation au principe de non-substitution avait été admise pour les titres restaurant dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie, le rapporteur a indiqué que ces titres et la prime invoquée n’étaient pas de même nature et a maintenu son avis défavorable. M. Olivier Dussopt s’est également élevé contre l’amendement, ainsi que contre deux autres amendements ultérieurs du même auteur relevant d’une logique identique, considérant que les primes d’intéressement ne pouvaient en aucun cas se substituer au salaire. A la suite de ce débat, M. Jean-Pierre Decool a retiré son amendement. La Commission a ensuite donné un avis favorable à l’adoption de l’article 1er sans modification.

Article additionnel après l’article 1er

(Art. L. 3312-3 et L. 3332-2 du code du travail)

Extension du bénéfice de l’intéressement et des PEE aux chefs d’entreprises de moins de 250 salariés

La loi relative à la confiance et à la modernisation de l’économie du 26 juillet 2005 permet aux chefs d’entreprises de moins de 100 salariés, ainsi qu’à leurs conjoints si ceux-ci ont le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé, de bénéficier de l’intéressement.

Il s’agit d’une mesure incitative destinée à encourager les chefs des petites entreprises à mettre en place l’intéressement.

Cette disposition s’inspirait d’un texte voté en 2001 par la majorité de l’époque, qui prévoyait le même genre d’incitation en matière de Plan d’épargne d’entreprise.

Comme le notait le rapport du conseil supérieur de la participation pour 2004-2005, on constate une progression de la participation au sens large, en particulier dans les petites entreprises.

Ainsi si, entre 2004 et 2005, le pourcentage de salariés du secteur marchand ayant accès à un dispositif de participation a augmenté de 1,2 %, ce pourcentage s’élève à 18 % dans les entreprises de moins de 10 salariés : « ceci résulte sans aucun doute des dispositions prises depuis plusieurs années pour permettre à ces petites et très petites entreprises d’entrer dans des politiques de participation financière, notamment les solutions inter-entreprises et les incitations telles que la possibilité pour le chef d’entreprises (moins de 100 salariés) d’en bénéficier lui aussi ».

Il s’agit donc de renforcer cette incitation en permettant aux dirigeants d’entreprises et à leur conjoint si celui-ci a le statut de conjoint collaborateur ou associé, de bénéficier de l’intéressement et des plans d’épargne d’entreprises dans les entreprises de moins de 250 salariés, seuil qui correspond à la définition communautaire de la petite et moyenne entreprise.

Il convient de préciser que les limites actuelles applicables aux rémunérations des chefs d’entreprises susceptibles de servir de base pour la répartition de l’intéressement demeurent, c’est-à-dire que celles-ci sont plafonnées au montant du salaire le plus élevé versé dans l’entreprise, afin de ne pas creuser les écarts de rémunération.

*

* *

La Commission a examiné en discussion commune un amendement du rapporteur et deux amendements de M. Jean-Pierre Decool visant à étendre le bénéfice des mécanismes d’intéressement et des plans d’épargne entreprise (PEE) aux chefs des entreprises de moins de 250 salariés, ainsi qu’à leurs conjoints, lorsque ceux-ci ont le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé, alors que les dispositions actuelles ne visent que les entreprises de 1 à 100 salariés. Le rapporteur ayant indiqué que les amendements de M. Jean-Pierre Decool étaient irrecevables car non gagés, leur auteur les a retirés, se ralliant à l’amendement présenté par le rapporteur. M. Olivier Dussopt s’est interrogé sur la non prise en compte des stocks options dans l’amendement. Le rapporteur a fait observer qu’il en était rarement question dans les entreprises de moins de 250 salariés puis la Commission a adopté l’amendement.

Article 2

(Art. L. 3324-10 et L. 3325-2 du code du travail, Art. 158 et 163 bis AA du code général des impôts)

Possibilité de disposition immédiate des sommes versées au titre de la participation.

Afin de mieux prendre en considération les choix du salarié, cet article, tout en maintenant le principe du blocage de la participation pendant cinq ans, permet au salarié qui le souhaite d’opter entre une logique de pouvoir d’achat immédiat ou une logique de pouvoir d’achat différé.

Lors de la notification de ses droits au salarié, qui intervient à la clôture de chaque exercice, celui-ci disposera d’un court délai pour en demander la disponibilité immédiate. Les sommes perçues seront alors soumises au même régime fiscal que les primes d’intéressement non affectées à un PEE.

Il convient de souligner que le terme de « déblocage », que l’on a pu employer pour qualifier ce dispositif, est impropre, puisque celui-ci n’a pas pour effet de libérer des sommes actuellement indisponibles, mais de permettre, pour l’avenir, au salarié de manifester son souhait de disposer immédiatement des sommes versées.

*

* *

La Commission a donné un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Après l’article 2

La Commission a examiné un amendement présenté par Mme Laure de la Raudière visant à étendre l’application des dispositions de la loi du 8 février 2008 permettant un déblocage anticipé des droits acquis au titre de la participation aux sommes perçues au titre de l’année 2007 et affectées après le 1er janvier 2008. Le rapporteur a rappelé que le projet de loi permettrait à l’avenir à chaque salarié de décider de bloquer ou non les sommes perçues au titre de la participation. Il relève donc d’une logique différente de celle de la loi pour le pouvoir d’achat et n’a pas pour vocation de permettre un nouveau déblocage ponctuel du stock de participation, même sur une période limitée. Prenant en compte l’avis défavorable du rapporteur, Mme Laure de la Raudière a retiré son amendement. M. Jean-Pierre Decool a également retiré un amendement visant à atténuer les conséquences du principe de non-substitution des sommes attribuées au titre de l’intéressement à des éléments de salaire en cas de redressement de cotisations. Elle a ensuite examiné un amendement du même auteur visant à simplifier les formalités administratives afférentes au renouvellement des accords d’intéressement en prévoyant la possibilité d’une tacite reconduction au bout de trois ans. Le rapporteur a souligné que la mesure envisagée implique que la situation de l’entreprise et les critères à prendre en compte dans les contrats d’intéressement soient identiques : elle semble donc incompatible avec un éventuel changement de chef d’entreprise, une évolution des résultats de l’entreprise ou avec la volonté des syndicats de renégocier. M. Jean-Pierre Decool a indiqué qu’il était fréquent que les chefs d’entreprise oublient de renouveler les contrats de participation, la tacite reconduction permettant alors de pallier ce risque. M. Lionel Tardy a confirmé avoir également eu connaissance de cas d’oubli, notamment dans les petites entreprises, et considéré que les salariés en étaient les premières victimes. Le rapporteur a objecté qu’il était néanmoins nécessaire de laisser la possibilité aux parties prenantes de renégocier les accords, estimant préférable, par exemple, de prévoir dans ces derniers une clause permettant la reconduction si, trois mois avant l’échéance, toutes les parties en conviennent. M. Jean-Pierre Decool s’est rallié à cette suggestion et a retiré son amendement afin d’en déposer une nouvelle version en vue de l’examen du texte en séance publique.

Article additionnel après l’article 2

(Art. 3321-1 et 3323-10 du code du travail)

Rétablissement des dispositions concernant certaines entreprises privées et les entreprises publiques supprimées par erreur lors de la recodification du code du travail

L’article L. 3321-1 pose le principe en vertu duquel la participation est applicable aux entreprises publiques et aux établissements publics de l’État à caractère industriel et commercial dont une liste est déterminée par décret en Conseil d’État.

Cet article reprend les dispositions de l’article L. 442-9, mais c’est une rédaction différente qui a été retenue par erreur à l’issue des travaux de recodification du code du travail.

Cette rédaction a notamment eu pour effet involontaire d’exclure du champ de la participation certaines entreprises de « second rang », dont plus de la moitié du capital est détenu par l’État et/ou par ses établissements publics, pratiquant des tarifs réglementés, se trouvant en situation de monopole ou bénéficiant de subventions d’exploitation, qui bénéficiaient pourtant du régime de la participation dans la précédente codification.

Il convient donc de rétablir cette disposition, avec un effet rétroactif au 1er mai 2008, date d’entrée en vigueur du nouveau code du travail, et de repréciser le principe en vertu duquel lorsqu’elles ne pratiquent pas de tarifs réglementés, ne sont pas en situation de monopole ni ne perçoivent de subvention d’exploitation, ces entreprises de second rang sont de plein droit soumises à la participation obligatoire.

L’adoption de telles dispositions doit également constituer l’occasion de débattre de la liste des entreprises, définie par décret en Conseil d’État, soumises à la participation. Il semble notamment légitime d’envisager l’extension de ce dispositif à la SNCF.

*

* *

La Commission a adopté un amendement de son rapporteur visant à remédier à une erreur commise lors de la recodification du code du travail et rétablissant avec effet rétroactif l’obligation pour les entreprises privées pratiquant des tarifs réglementés, se trouvant en situation de monopole ou bénéficiant de subventions d’exploitation, de faire bénéficier leurs salariés de la participation. Il rétablit par ailleurs le régime particulier qui prévalait pour les établissements publics nationaux et les entreprises publiques de premier rang.

Après l’article 2

M. Jean-Pierre Decool a retiré un amendement prévoyant d’étendre l’obligation de mettre en œuvre la participation aux organismes et associations sans but lucratif de plus de 50 salariés. Le rapporteur a en effet fait remarqué que la formule légale de la participation est fondée sur le bénéfice, notion qui ne s’applique pas aux organismes sans buts lucratifs. Ceux-ci peuvent en revanche mettre en place des dispositifs d’intéressement.

La Commission a ensuite examiné un amendement dont l’auteur, M. Jean-Pierre Decool, a indiqué qu’il visait à étendre le bénéfice de la participation aux chefs d’entreprises, conformément aux préconisations du rapport de M. Alain Gournac sur la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Le rapporteur a indiqué que cette proposition visait à transposer à la participation la mesure étendant le bénéfice de l’intéressement aux chefs d’entreprises de moins de cent salariés, incitation qui a produit des effets incontestablement positifs sur le développement de ce mécanisme dans les PME. Il faut toutefois noter que l’intéressement est un dispositif facultatif pour lequel les mesures incitatives font sens, ce qui n’est pas le cas de la participation, en tout cas pas dans les entreprises de plus de cinquante salariés, où elle est obligatoire. Or l’amendement présente à cet égard une portée trop générale. M. Jean-Pierre Decool a donc retiré son amendement pour se rallier, comme le rapporteur le lui avait proposé, à un amendement ciblant l’incitation sur les entreprises où la participation est facultative et sur les petites entreprises mettant en place des accords dérogatoires plus favorables aux salariés.

Article additionnel après l’article 2

(Art. L. 3323-6, L. 3324-2, L. 3324-5, L. 3324-7, L. 3324-8, L. 3324-10 à L. 3324-12 et L. 3325-2 du code du travail) 

Extension du bénéfice de la participation aux chefs de certaines entreprises

L’extension du bénéfice de l’intéressement aux chefs d’entreprises de moins de 100 salariés, par la loi de 2005 sur la confiance et la modernisation de l’économie, a exercé un effet très positif sur la diffusion des mécanismes participatifs dans les PME et les TPE.

Il convient donc de transposer ce dispositif à la participation, en tenant compte de son caractère obligatoire dans les entreprises de plus de cinquante salariés.

L’incitation doit donc en premier lieu concerner les petites entreprises de moins de cinquante salariés.

En outre, rappelons que dans toutes les entreprises, qu’elles soient soumises ou non à l’obligation de mettre en place la participation, un accord de participation dit « dérogatoire », plus favorable aux salariés que la participation de droit commun, peut être mis en œuvre. Il repose notamment sur une formule différente de la formule de calcul définie par la loi.

Afin d’inciter au développement de ces accords dérogatoires, qui représentent environ 10 % des accords de participation, il parait souhaitable de d’en ouvrir également le bénéfice au chef d’entreprise, dans les entreprises entre un et cent salariés : c’est en effet dans les petites entreprises que l’on peut juger cette incitation équitable, dans la mesure où le chef d’entreprise y prête souvent quotidiennement la main aux efforts de ses salariés.

Pour des raisons d’équité, les chefs d’entreprise ne bénéficieront que de la partie de la réserve spéciale de participation qui excède le montant de ce qui aurait été versé en application des règles de droit commun.

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La Commission a ensuite adopté un amendement présenté par le rapporteur étendant le bénéfice de la participation aux chefs d’entreprises de moins de 50 salariés ainsi qu’aux chefs des entreprises de moins de 100 salariés ayant conclu un accord de participation dérogatoire, c’est-à-dire plus favorable aux salariés que les accords de droit commun.

Après l’article 2

La Commission a rejeté un amendement de M. Jean-Pierre Decool visant à ce que les redressements appliqués en cas de substitution entre abondement d’un plan d’épargne d’entreprise et salaire ne portent que sur la fraction substituée, sauf mauvaise foi ou agissements répétés du cotisant.

Article additionnel après l’article 2

(Art. L. 3333-7 du code du travail) :

Simplification des PEI « de réseaux »

Les plans d’épargne inter-entreprise (PEI) ont été créés par la loi du 19 février 2001 sur l’épargne salariale, dans le but de développer l’épargne salariale dans les PME.

Il se définit comme un plan d’épargne commun à plusieurs entreprises, et permet donc de mutualiser les coûts de mise en place et de fonctionnement.

Il en existe de deux sortes : des PEI institués par accord collectif, ou entre plusieurs employeurs pris individuellement. Ces derniers sont qualifiés de PEI de réseau, et peuvent regrouper plusieurs centaines d’entreprises.

Jusqu’à la loi du 30 décembre 2006 sur le développement de la participation et de l’actionnariat salarié, tout avenant à l’accord initial instituant le PEI devait être adopté à l’unanimité des entreprises membres, ce qui constituait une lourdeur importante peu compatible avec le développement extrêmement dynamique de cet outil.

Afin de simplifier les choses, la loi de 2006 a permis que dans certains cas, précisément énumérés par la loi, le règlement du PEI puisse prévoir que les modifications qui y sont apportées puissent être adoptées à la majorité des entreprises parties prenantes au PEI, et non à l’unanimité.

Cet amendement vise à étendre cette possibilité de modification du règlement d’un PEI à la majorité, aux modifications rendues nécessaires par des évolutions législatives et réglementaires.

Notons que cet amendement ne porte qu’une atteinte extrêmement limitée à la liberté contractuelle, puisque l’adoption à la majorité d’avenants à un règlement adopté à l’unanimité concerne un nombre limité d’hypothèses, mais aussi parce que l’introduction dans le règlement de cette règle de majorité aura elle-même fait l’objet d’un avenant adopté à l’unanimité.

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La Commission a ensuite adopté un amendement de son rapporteur étendant la possibilité d’adopter des avenants au règlement des plans d’épargne inter-entreprises à la majorité des entreprises parties prenantes au plan, et non à l’unanimité ; le rapporteur a indiqué que cette modalité d’adoption concernerait les avenants rendus nécessaires par des évolutions législatives ou réglementaires postérieures à l’institution du PEI.

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Conformément aux conclusions de son rapporteur, la Commission a donné un avis favorable à l’adoption du projet de loi en faveur des les revenus du travail (n° 1096), modifié par les amendements figurant ci-après.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article additionnel avant l’article 1er

Amendement présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis :

Au début de l’intitulé du livre III de la troisième partie du code du travail sont insérés les mots : « Dividende du travail : ».

Article additionnel après l’article 1er

Amendement présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis :

I.-  Dans le premier alinéa de l’article L. 3312-3 et dans le deuxième alinéa de l’article L. 3332-2 du code du travail, le mot : « cent » est remplacé par les mots : « deux cent cinquante ».

II.- La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III.- La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Articles additionnels après l’article 2

Amendements présentés par M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis :

•  I.- Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article L. 3321-1 est ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État détermine les établissements publics de l'État à caractère industriel et commercial et les sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue directement par l'État, qui sont soumis aux dispositions du présent titre. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables. »

2° Le troisième alinéa de l’article L. 3321-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les dispositions du présent titre sont également applicables aux sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'État et directement ou indirectement par ses établissements publics, s’ils ne bénéficient pas de subventions d'exploitation, ne sont pas en situation de monopole et ne sont pas soumis à des prix réglementés.

« Un décret en Conseil d’État peut déterminer les sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'État et directement ou indirectement par ses établissements publics, bénéficiant de subventions d'exploitation, étant en situation de monopole ou soumis à des prix réglementés, qui sont soumis aux dispositions du présent titre. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables. »

3° Dans l’article L. 3323-10, les mots : « l’entrée en vigueur du présent article » sont remplacés, par deux fois, par les mots : « le 1er janvier 2005 ».

II.- Les dispositions du présent article s’appliquent à compter du 1er mai 2008. Les entreprises et établissements publics qui entraient légalement dans le champ de la participation à cette date demeurent soumis au même régime.

III.- La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

IV.- La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

•  I.- L’article L. 3323-6 du code du travail est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les chefs de ces entreprises ou, s’il s’agit de personnes morales, leurs présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire, ainsi que le conjoint du chef d’entreprise s’il bénéficie du statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé mentionné à l’article L. 121-4 du code de commerce, peuvent bénéficier de ce régime. »

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Ces entreprises, leurs salariés et les bénéficiaires visés au deuxième alinéa se voient appliquer le régime social et fiscal prévu au chapitre V. »

II.- Après le deuxième alinéa de l’article L. 3324-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les entreprises dont l’effectif habituel est compris entre un et cent salariés, la part de la réserve spéciale de participation excédant le montant qui aurait résulté d’un calcul effectué en application des dispositions de l’article L. 3324-1 peut être répartie entre les salariés et les chefs de ces entreprises, les présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du directoire s’il s’agit de personnes morales, le conjoint du chef d’entreprise s’il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé mentionné à l’article L. 121-4 du code de commerce. »

III.- L’article L. 3324-5 du même code est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, le mot : « salariés » est remplacé par le mot : « bénéficiaires ».

2° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l’article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l’article L. 3324-2, la répartition est calculée proportionnellement à la rémunération annuelle ou au revenu professionnel imposé à l’impôt sur le revenu au titre de l’année précédente, plafonnés au niveau du salaire le plus élevé versé dans l’entreprise, et dans les limites de plafonds de répartition individuelle déterminés par le même décret. »

3° Dans le deuxième alinéa, le mot : « salariés » est remplacé par le mot : « bénéficiaires ».

IV.- Dans le premier alinéa de l’article L. 3324-7, dans l’article L. 3324-8, et dans le premier alinéa de l’article L. 3324-12 du même code, après le mot : « salariés », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l’article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l’article L. 3324-2, ».

V.- Dans le premier alinéa de l’article L. 3324-10 du même code, les mots : « au profit des salariés » sont supprimés. 

VI.- Dans l’article L. 3324-11, dans le premier et le troisième alinéa de l’article L. 3325-2 du même code, après les mots : « aux salariés », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, aux bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l’article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l’article L. 3324-2, ».

VII.- La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

VIII.- La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

•  Le second alinéa de l’article L. 3333-7 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce règlement peut également prévoir des modalités de conclusion identiques des avenants rendus nécessaires par des dispositions législatives ou réglementaires postérieures à l’institution du plan. »

© Assemblée nationale

1 () Rapport d’information n°3304 rectifié du 13 septembre 2006 déposé par la Délégation pour l’Union européenne, sur la participation des salariés dans l’Union européenne, présenté par M. François Guillaume.

2 () Rapport au Premier ministre sur la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés, avril 2007