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N° 1125

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 septembre 2008.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI DE PROGRAMME relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement,

PAR M. ÉRIC DIARD,

Député.

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Voir le numéro :

Assemblée nationale : 955.

INTRODUCTION 5

DISCUSSION GÉNÉRALE 8

EXAMEN DES ARTICLES 11

TITRE IV : ÉTAT EXEMPLAIRE 11

Article 42 : Objectifs assignés à l’État 11

TITRE V : GOUVERNANCE, INFORMATION ET FORMATION 18

Article 44 : Rôle des collectivités territoriales en matière de développement durable 18

Article 45 : Information et participation des citoyens aux décisions publiques 23

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 33

MESDAMES, MESSIEURS,

Le projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement définit les objectifs assignés à l’État ainsi qu’à l’ensemble des acteurs publics ou privés pour assurer un développement durable. Il fixe un cadre d’action global, cohérent et transversal pour concilier le développement économique et social avec la protection de l’environnement, la préservation de la biodiversité et la maîtrise des risques sanitaires.

Les objectifs énoncés reprennent et détaillent les 273 engagements du Grenelle de l’environnement, adoptés à l’issue d’un processus de réflexion qui a mobilisé l’État, les collectivités territoriales, les entreprises, les organisations syndicales et les associations et organisations non gouvernementales (ONG). Ces différents acteurs, organisés en groupes de travail thématiques, ont fait émerger des orientations consensuelles en matière de développement durable, qui impliquent un effort partagé entre les responsables publics et privés.

Les principes consacrés par le projet de loi de programme devront ensuite être mis en œuvre par d’autres textes législatifs ou réglementaires. La préparation des mesures concrètes qui seront proposées lors de cette seconde phase mobilise d’ores et déjà les participants au Grenelle de l’environnement. Ainsi, des chantiers opérationnels placés sous la responsabilité d’un parlementaire ou d’une personnalité qualifiée travaillent à détailler les propositions des groupes de travail.

Parmi les 50 articles de ce projet de loi, certains concernent plus spécifiquement la réforme des modalités d’action et de fonctionnement de l’État et des collectivités territoriales. Les questions de droit administratif et d’administration générale de l’État et des collectivités territoriales relevant de la commission des Lois, celle-ci a jugé opportun de se saisir pour avis des articles suivants :

––  l’article 42, qui prévoit une meilleure prise en compte des objectifs de développement durable dans l’action de l’État et une réduction de l’empreinte écologique de celui-ci ;

––  l’article 44, qui appelle à renforcer la coordination entre les actions des collectivités territoriales et les politiques menées par l’État en matière de développement durable ;

––  l’article 45, qui prévoit d’améliorer l’information disponible en matière environnementale, de renforcer les expertises et de mieux associer les citoyens à l’élaboration des décisions ayant un impact sur l’environnement.

Les orientations énoncées par ces articles résultent tout particulièrement des travaux du Grenelle de l’environnement en matière de « démocratie écologique ». Le groupe de travail n° 5, intitulé « Construire une démocratie écologique : institutions et gouvernance » a formulé diverses propositions destinées à placer les préoccupations de développement durable au cœur du projet pour notre pays, en définissant de nouveaux cadres d’actions et d’élaboration pour les politiques publiques. Ces propositions ont ensuite été détaillées par les chantiers opérationnels consacrés à l’« État exemplaire » (chantier n° 4) et aux « collectivités exemplaires » (chantier n° 28).

L’article 42 tend à assurer l’exemplarité de l’État en matière environnementale, aussi bien dans la conduite des politiques publiques que dans le fonctionnement de l’administration.

D’une part, l’État doit prendre en compte les questions de développement durable de manière plus transversale. La politique environnementale reste trop souvent limitée aux mesures de protection de l’environnement stricto sensu, au lieu de devenir un principe directeur de l’ensemble des politiques publiques. L’article 42 prévoit que l’État devra prendre en compte les effets environnementaux des normes qu’il définit, au même titre que les effets économiques et sociaux. L’arbitrage entre ces différents intérêts publics serait notamment facilité par la réalisation d’études d’impact des projets de loi. L’impact écologique des aides publiques devra également être évalué.

D’autre part, dans son activité de gestion, l’État se doit d’être exemplaire en termes d’éco-responsabilité, d’autant plus que son fonctionnement a un impact écologique très significatif. À cette fin, les administrations devront réduire leurs consommations d’énergie et leurs émissions de gaz à effet de serre. Les achats publics devront s’orienter prioritairement sur les produits éco-responsables, notamment les achats de papier, de bois, de véhicules automobiles et de denrées alimentaires.

Afin de favoriser l’éco-responsabilité de l’État, la formation et l’information des fonctionnaires sur les questions de développement durable seront renforcées.

La réalité des efforts consentis par les administrations fera l’objet d’un contrôle parlementaire, au moyen d’un rapport annuel comprenant des indicateurs du développement durable.

L’article 44, relatif aux collectivités territoriales, prévoit une meilleure articulation des politiques publiques menées au niveau territorial, notamment avec les politiques définies par l’État. Les collectivités territoriales, tout comme l’État, sont des acteurs majeurs en termes de développement durable. Elles sont directement responsables de 15 % des émissions de gaz à effet de serre par leur fonctionnement et l’exercice de leurs compétences, notamment en matière de transports ou de gestion des déchets. Leur responsabilité atteint 25 % des émissions si l’on prend en compte les effets indirects de leurs politiques en matière d’urbanisme, d’habitat, d’aménagement et de réseaux de transport. Il est donc indispensable d’intégrer les problématiques de développement durable aux mécanismes de prise de décision au niveau territorial.

Afin de mieux articuler les politiques nationales et territoriales en matière de développement durable, l’article 44 prévoit :

––  d’associer les représentants des collectivités territoriales à l’élaboration de la stratégie nationale de développement durable de l’État ;

––  de généraliser les « bilans carbone » et des plans climat énergie territoriaux ;

––  d’utiliser les « Agendas 21 » locaux comme outil de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales ;

––  d’étendre l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme ;

––  de mieux articuler les politiques de transports et les projets d’urbanisme ;

––  d’augmenter les concours de l’État aux collectivités qui contribuent significativement à la protection de l’environnement.

L’article 45 reprend les propositions du Grenelle de l’environnement tendant à instaurer une gouvernance écologique.

Une nouvelle gouvernance apparaît nécessaire pour prendre en compte les préoccupations environnementales et de long terme dans le processus de prise de décision. Le mode d’élaboration actuel des normes juridiques, fondé sur l’exercice d’un pouvoir unilatéral et sur un appareil administratif hiérarchique, se révèle peu adapté pour arbitrer entre des intérêts contradictoires, notamment entre intérêts à court terme ou à long terme, entre intérêts économiques et risques environnementaux. La gouvernance, à l’inverse, implique la recherche d’un équilibre entre les divers acteurs sociaux, publics, privés et civiques. L’élaboration des normes en partenariat avec ces acteurs permet de concilier au mieux les intérêts antagonistes.

L’un des principaux objectifs du Grenelle de l’environnement consistait ainsi à élaborer les décisions publiques de manière plus transparente, en les fondant sur la concertation et la participation du public.

Afin de permettre une participation effective des acteurs de la société civile aux décisions publiques, l’article 45 prévoit, en premier lieu, d’améliorer l’information disponible en matière environnementale, ainsi que l’accès à cette information. L’accès à l’information, ainsi qu’aux travaux d’expertise, est indispensable pour la formation d’opinions éclairées et pertinentes sur les choix de société. Dans la même logique, l’expertise environnementale devra être réorganisée pour assurer sa fiabilité, son caractère pluraliste et son indépendance vis-à-vis des groupes de pression économiques.

En second lieu, l’article 45 prévoit de mieux associer le public aux grands projets publics ayant un impact en matière d’environnement et d’aménagement du territoire. Il est notamment prévu d’élargir les cas de projets donnant lieu à un débat public et de mieux prendre en compte les résultats de ce débat. De même, les enquêtes publiques devraient être simplifiées et faciliter la participation du public. Dans les deux cas, il convient de mettre en place une réelle concertation et une remontée d’observations, et non une simple information. La présentation de solutions alternatives dans les dossiers présentés au public pourrait notamment être généralisée.

*

* *

La Commission a examiné pour avis les articles 42, 44 et 45 du projet de loi au cours de sa séance du mercredi 24 septembre 2008. Après l’exposé du rapporteur pour avis, une discussion générale a eu lieu.

M. Philippe Vuilque, tout en se déclarant conscient de la nécessité d’engager des efforts collectifs, et notablement de l’État, en matière de préservation de l’environnement, a déploré que cette loi de programme ne ressemble qu’à un « catalogue de bonnes intentions », pointant des formulations telles que « l’État doit », « l’État veut », « l’État se donne pour objectifs » ou « l’État veillera ». Il a regretté l’absence de sanction du non-respect des objectifs fixés par le texte et son absence de précision – notamment s’agissant des instances qui seront créées –, l’ensemble conférant à ce texte « un flou absolu ».

M. Guy Geoffroy a regretté la teneur des propos de M. Philippe Vuilque, les jugeant étranges et injustes, surtout à l’égard de ceux qui ont participé au Grenelle de l’environnement. Il a souligné que le présent texte est une loi de programme qui reprend les engagements pris par le Grenelle, dont certains étaient à l’époque considérés comme audacieux, et fixe donc un cadre, tant s’agissant de la démarche générale retenue que de la mise en œuvre concrète des objectifs fixés.

M. Jérôme Lambert a souligné le fait que le texte découle en grande partie d’une réflexion européenne, alors qu’il est trop souvent présenté comme une idée purement nationale. Se félicitant de la convergence des réflexions des partenaires européens, il a indiqué que la directive dite Énergie-climat devrait être adoptée en décembre par le Parlement européen et que la France devrait donc prochainement se conformer aux impératifs qu’elle contient en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de promotion des énergies renouvelables. Il a jugé essentiel d’avoir une réflexion globale sur un sujet qui est crucial pour l’avenir de l’humanité, même si les préoccupations sur la situation économique et financière de notre pays dominent le débat politique aujourd’hui.

Mme Delphine Batho a jugé que le Grenelle de l’environnement avait été l’occasion d’un dialogue citoyen exemplaire et avait suscité des attentes importantes s’agissant des réalisations effectives qui pourraient en découler. Compte tenu du précédent fâcheux du texte sur les organismes génétiquement modifiés (OGM), elle a estimé qu’on pouvait douter qu’elles soient à la hauteur des attentes. Elle a en outre pointé deux difficultés soulevées par le texte gouvernemental : l’absence de normativité d’une grande partie des dispositions qu’il contient, et, pour celles d’entre elles qui emportent de réels effets, leur concentration sur les collectivités territoriales. Ainsi, à l’image de ce qui avait prévalu s’agissant de la mise aux normes des bâtiments publics pour permettre leur accessibilité aux handicapés, l’essentiel de la charge va reposer sur les collectivités locales, sans que l’État ait prévu une compensation financière à due concurrence.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur pour avis s’est étonné des critiques formulées par les membres de l’opposition, en rappelant que le texte examiné est une loi de programme. Après avoir indiqué que les différentes associations environnementales entendues sont conscientes que l’objet du texte consiste à définir de grandes orientations, il a rappelé que ces dernières recevront une traduction normative dans le cadre du « Grenelle 2 », lequel fait l’objet de concertations selon une méthode similaire à celle du « Grenelle 1 ». Ces concertations sont aujourd’hui en voie d’achèvement.

Tout en admettant que certaines dispositions du projet de loi retranscrivent des normes européennes, notamment s’agissant des plans climat énergie territoriaux, le rapporteur pour avis a indiqué que la France comptait aller plus loin que ces obligations en devenant pionnière en matière environnementale.

La Commission est ensuite passée à l’examen des articles dont elle s’est saisie pour avis.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IV

ÉTAT EXEMPLAIRE

Article 42

Objectifs assignés à l’État

Cet article définit une série de principes d’action et d’objectifs assignés à l’État, afin que les politiques menées et le fonctionnement de ce dernier soient plus respectueux de l’environnement.

1. La prise en compte des impacts des décisions publiques en matière de développement durable

En application de l’article 6 de la Charte de l’environnement, adoptée le 1er mars 2005 (1), « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social ».

L’État, en particulier, doit s’assurer que les différentes politiques qu’il met en œuvre sont compatibles avec la volonté de garantir un développement durable et la préservation de l’environnement. Au-delà de la politique environnementale stricto sensu, il importe donc de prendre en compte de manière transversale les questions de développement durable.

a) L’évaluation préalable des effets environnementaux

L’alinéa premier du présent article impose à l’État de tenir compte des conséquences sur l’environnement des décisions qu’il envisage de prendre. Ces décisions ne pourront porter atteinte à l’environnement que si cela apparaît nécessaire pour atteindre un autre objectif public. Elles devront alors être spécialement motivées et justifiées.

Cette évaluation des effets sur l’environnement pourrait notamment prendre la forme :

––  pour les grands projets publics, d’une concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. L’État devra assurer l’information et la participation des différentes personnes publiques concernées, ainsi que des entreprises, des organisations syndicales, des associations et des organisations non gouvernementales (ONG). Cette participation peut intervenir dans le cadre des procédures de débat public et d’enquête publique, dont l’article 45 du projet de loi prévoit la réforme (2). Elle favorisera ainsi l’efficacité environnementale des investissements publics en permettant de rechercher la meilleure conciliation entre les différents intérêts publics en cause, parmi lesquels la protection de l’environnement ;

––  pour les projets de loi, d’une étude d’impact faisant apparaître les incidences environnementales du texte, en complément des impacts économiques et sociaux. La réalisation d’une évaluation globale des impacts du texte facilite, en effet, les arbitrages entre les différents objectifs visés. L’étude d’impact devra être rendue publique afin d’éclairer l’ensemble des acteurs sur l’équilibre choisi entre les différentes finalités. Cette proposition issue des travaux du Grenelle de l’environnement devrait être traduite prochainement par une loi organique. En effet, lors de la révision de la Constitution du 23 juillet 2008 (3), un amendement de votre commission des Lois a donné un ancrage constitutionnel à la pratique des études d’impact. Celles-ci constitueront un élément obligatoire pour la régularité de la procédure d’adoption d’une loi. Cela garantira une réalisation plus systématique et plus sérieuse des études d’impact, qui ne sont prévues aujourd’hui que par une circulaire (4).

b) La redéfinition des aides publiques et de l’aide publique au développement

La prise en compte de l’impact environnemental des décisions publiques devra, en particulier, porter sur les différents concours financiers accordés par l’État.

Le Gouvernement devra ainsi évaluer l’impact environnemental des diverses aides publiques budgétaires ou fiscales, dans un rapport qui sera présenté au Parlement. Ce rapport servira de base à une refonte des aides publiques pour favoriser la protection de l’environnement. Certaines aides pourront à l’avenir être soumises à des conditions environnementales. Il peut en outre être nécessaire de redéfinir des aides lorsque le mode de calcul de celles-ci incite à adopter des comportements peu respectueux de l’environnement. Cette logique a inspiré, par exemple, la réforme de la politique agricole commune (PAC) décidée en 2003. Les aides agricoles ne sont plus liées à la production, ce qui favorisait l’agriculture intensive, mais proportionnelles à la surface de l’exploitation.

Le présent article prévoit également que les programmes d’aide publique au développement devront être respectueux de l’environnement et de la biodiversité des pays destinataires. La conditionnalité environnementale des aides devra donc être développée. Une partie de l’aide devra, par ailleurs, être destinée aux politiques de protection de l’environnement, de préservation de la biodiversité et d’adaptation au changement climatique. Un pourcentage minimum de l’aide totale pourrait, par exemple, être réservé à ces actions environnementales.

c) La formation des agents publics aux enjeux environnementaux

Pour mieux prendre en compte la dimension environnementale dans les politiques publiques, une formation particulière des agents publics apparaît indispensable. Cette exigence découle de l’article 8 de la Charte de l’environnement, qui dispose que « l’éducation et la formation à l’environnement doivent contribuer à l’exercice des droits et devoirs définis par la (…) Charte ».

Le présent article prévoit que les formations professionnelles des agents publics devront comporter, à partir de 2012, des enseignements consacrés au développement durable et à la prévention des risques sanitaires et sociaux. Ces dispositions sont complétées par celles de l’article 48 du présent projet de loi, qui prévoit la création d’un institut dispensant des formations continues de très haut niveau en matière de développement durable aux décideurs publics et privés. Les travaux du Grenelle de l’environnement comprennent également la proposition de former les fonctionnaires nommés en conseil des ministres préalablement à leur entrée en fonction.

Ces formations concerneront en priorité les cadres dont l’action a des conséquences significatives en matière environnementale, comme les ingénieurs et les hauts fonctionnaires. Ces agents disposeront ainsi de méthodes pour mieux prendre en compte le développement durable dans leurs décisions.

Des formations spécifiques sont également utiles pour l’exercice de certains types de fonctions. On peut citer, par exemple, la formation à l’achat public durable pour les fonctionnaires chargés des marchés publics ou encore la formation à l’éco-conduite pour les agents qui conduisent un véhicule administratif (5).

Enfin, de manière plus générale, les actions de sensibilisation aux questions de développement durable peuvent inciter les agents à modifier leur comportement au quotidien pour économiser les ressources naturelles.

2. La réduction de l’impact du fonctionnement de l’État sur l’environnement

Au-delà des politiques publiques, l’État peut également agir sur l’environnement en revoyant son mode de fonctionnement

a) La promotion d’un achat public « éco-responsable »

La commande publique représente environ 10 % du produit intérieur brut français. Elle constitue donc un levier important pour favoriser les filières respectueuses de l’environnement et réduire la consommation de matériaux polluants.

La prise en compte de critères de développement durable dans la commande publique permet également de réaliser des économies dans l’usage des biens par les administrations. Contrairement à une opinion répandue, l’achat éco-responsable ne revient pas plus cher que les autres achats. Si le prix d’achat peut être plus élevé, le coût d’utilisation est en revanche souvent moindre, par exemple parce qu’ils consomment moins d’eau ou d’énergie. En termes de coût global, l’achat éco-responsable est donc souvent plus économique.

Plusieurs dispositifs existants tendent à favoriser l’achat éco-responsable.

Ainsi, en mars 2007, a été adopté un Plan national d’action pour des achats publics durables. Ce plan, d’une durée de trois ans (2007-2009), engage l’État et ses établissements publics à mettre en œuvre le développement durable au sein de la commande publique. Il fixe notamment des objectifs quantifiés et prévoit l’élaboration d’outils d’aide aux acheteurs publics.

Plus concrètement, le code des marchés publics adopté en 2006 (6) permet déjà à une personne publique de prendre en compte des exigences environnementales lors de l’achat, à plusieurs étapes :

––  en amont, la personne publique doit prendre en compte des préoccupations de développement durable dans la définition de ses besoins ;

––  la personne publique peut fixer des exigences en matière environnementale parmi les spécifications techniques, par exemple en se référant à des écolabels ;

––  si elle ne définit pas de telles exigences, la personne publique peut autoriser les variantes environnementales. Elle indique ainsi aux candidats qu’elle est prête à accueillir des variantes plus écologiques que les spécifications techniques indiquées ;

––  lors de l’examen des candidatures, la personne publique peut examiner le savoir-faire des candidats en matière de protection de l’environnement, en appréciant leurs capacités techniques ;

––  la personne publique peut fixer un critère environnemental parmi les critères de sélection des candidats ;

––  l’avis d’appel public à la concurrence ou le règlement de la consultation peut fixer des conditions d’exécution environnementales.

Le code des marchés publics pourrait être réformé afin de rendre plus systématiques les clauses environnementales. Il serait possible, par exemple, de prévoir que des spécifications techniques seront fixées par arrêté pour certaines catégories de biens et de services pour définir un niveau minimum d’exigences environnementales. Seraient ainsi rendues obligatoires les clauses de reprise des produits en fin de vie, le respect de certains écolabels…

Selon les travaux du comité opérationnel sur l’État exemplaire, l’achat public éco-responsable pourrait en particulier concerner les fournitures bureautiques, le matériel informatique, le papier, les vêtements, les denrées alimentaires, le mobilier, les produits de nettoyage, les engrais utilisés pour les espaces verts et les véhicules. Pour quatre de ces produits, le présent article définit des objectifs chiffrés :

––  l’achat de véhicules automobiles devra se concentrer sur les véhicules éligibles au « bonus écologique ». Dans l’état du droit, l’immatriculation des véhicules repose sur un critère de puissance fiscale (7). Ce critère pourrait être remplacé dès 2009 par une réglementation imposant une limite d’émission de CO² calquée sur le seuil retenu pour le bonus écologique, soit 130 g CO²/km. Des dérogations pourraient cependant être prévues dans certains ministères pour les besoins du service, par exemple pour les véhicules d’intervention ;

––  à partir de 2010, les achats de bois devront se porter exclusivement sur du bois certifié ou issu de forêts gérées de manière durable (8). Cette politique permettra de lutter contre l’exploitation illégale des forêts et ainsi de réduire les conséquences environnementales de la déforestation ;

––  à compter de 2012, le papier acheté devra être du papier recyclé ou, à défaut, du papier certifié « issu de forêts gérées durablement » ;

––  les achats destinés à la restauration collective publique devront être progressivement orientés vers l’agriculture biologique et les produits saisonniers ou à faible impact environnemental. Le label « agriculture biologique » garantit que le mode de production est respectueux de l’environnement, notamment en termes de préservation de la qualité des sols, de la biodiversité et des ressources en eau. Le choix de produits saisonniers et de produits locaux, qui ne nécessitent pas d’être cultivés en serre, conditionnés et acheminés sur longue distance, permet également de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

b) Réduire la consommation des administrations publiques

Le présent article définit également des objectifs de réduction de la consommation et des émissions de gaz à effet de serre des administrations publiques.

Ainsi, la consommation de papier des administrations de l’État devra être divisée par deux d’ici 2012. Il convient de rappeler que les administrations et le secteur tertiaire utilisent chaque année près de 11 millions de tonnes de papier chaque année, ce qui représente 30 ramettes par personne. Les administrations publiques se sont d’ores et déjà engagées dans une réduction de leur consommation grâce notamment à la dématérialisation de certains documents. Ce processus devra être poursuivi et généralisé, en favorisant l’émergence d’une culture du travail dématérialisé sans recours systématique à l’impression.

En outre, l’alinéa 8 du présent article prescrit l’adoption d’un plan d’amélioration de l’efficacité énergétique de chaque administration. Les administrations devront, en premier lieu, établir un bilan des émissions de gaz à effet de serre (bilan carbone) et un diagnostic de performance énergétique avant la fin de l’année 2009. Le plan définira des objectifs de réduction des émissions et de la consommation d’énergie. Il devra notamment se conformer aux objectifs de performance énergétique des bâtiments publics définis par l’article 5 du projet de loi. Celui-ci impose aux administrations « de réduire d’au moins 40 % les consommations d’énergie et d’au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments dans un délai de dix ans ». Il pourra également comprendre :

––  diverses de mesures de réduction de la consommation d’énergie, telles que l’acquisition d’équipements énergétiquement plus performants, la limitation des déplacements des agents publics, la modification de l’éclairage artificiel ou encore des campagnes d’information à destination des utilisateurs ;

––  une augmentation du recours aux énergies renouvelables ;

––  la réduction de la quantité de déchets produits et la généralisation de la collecte sélective en vue du recyclage.

4. Contrôler par la création d’indicateurs

Pour assurer un contrôle des actions entreprises en matière de développement durable, il importe de définir des indicateurs pertinents.

L’alinéa 12 du présent article prévoit, en particulier, l’élaboration d’ici 2010 d’indicateurs du développement durable à l’échelle nationale, qui figureront dans la stratégie nationale de développement durable (9). Ces indicateurs devront être choisis au terme d’une concertation entre les cinq parties prenantes au Grenelle de l’environnement, c’est-à-dire l’État, les collectivités territoriales, les entreprises, les organisations syndicales et les associations. Ils permettront de transmettre chaque année au Parlement les résultats obtenus, notamment en matière de réduction des pollutions ou de protection de la biodiversité. Cette information pourrait prendre la forme d’une annexe au projet de loi de finances présentant l’action l’État en matière de développement durable.

Afin de responsabiliser les administrations, le fonctionnement de chaque ministère et chaque établissement public pourrait être soumis à des objectifs de développement durable, qui feraient l’objet d’indicateurs dans le cadre défini par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Les nouveaux indicateurs devraient notamment permettre :

––  d’aider à la préparation des décisions en clarifiant les arbitrages entre les objectifs environnementaux, sociaux et économiques ;

––  d’inciter les administrations à se montrer vertueuses, notamment en prévision de l’examen régulier par le Parlement ;

––  d’insérer des objectifs et indicateurs de développement durable dans la gestion ordinaire de l’administration, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de la LOLF.

Pour l’élaboration de ces indicateurs, le ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire a sollicité, le 6 novembre 2007, l’expertise du Comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics.

Le présent article prévoit également la création d’indicateurs permettant de valoriser les biens publics environnementaux dans la comptabilité nationale à compter de 2010. Ce projet reprend l’une des propositions formulées lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement de Rio, en 1992. La mise en place d’une comptabilité environnementale permet, en effet, de prendre en compte les coûts environnementaux liés aux activités de production et de consommation, en déterminant la valeur monétaire des ressources naturelles. Il est ainsi possible d’évaluer le caractère « durable » de la croissance au regard de l’environnement.

La Commission a été saisie d’un amendement du rapporteur tendant à affirmer le principe selon lequel les achats publics doivent être réorientés vers les produits respectueux de l’environnement, le rapporteur estimant insuffisante l’affirmation d’une simple volonté de l’État. Mme Delphine Batho et M. Philippe Vuilque ont alors estimé que cet amendement confortait leurs critiques sur l’absence de normativité du texte. Tout en déclarant partager l’objectif poursuivi par le rapporteur, M. Guy Geoffroy a proposé une modification rédactionnelle et la Commission a adopté l’amendement ainsi rectifié.

M. François Vannson a estimé que l’Assemblée nationale et la commission des Lois notamment devraient donner l’exemple en matière de protection de l’environnement et qu’il pourrait être plus astucieux d’utiliser, pour permettre l’examen des amendements, de recourir aux nouvelles technologies de la communication plutôt qu’à l’usage des photocopieuses.

La Commission a ensuite été saisie d’un amendement de précision du rapporteur tendant à supprimer les termes « en règle générale » s’agissant de l’obligation faite aux administrations civiles de l’État d’acquérir des véhicules écologiques, et à les remplacer par une restriction tenant aux « nécessités de service ». Son auteur a indiqué que ces nécessités pouvaient notamment recouvrir l’usage de véhicules d’intervention.

M. Charles de la Verpillière a interrogé le rapporteur sur les véhicules de fonctions des hauts fonctionnaires, souhaitant savoir s’ils pouvaient relever de ce cadre. M. Jérôme Lambert a quant à lui proposé d’interdire l’achat de véhicules présentant un malus, ce qui permettrait d’acquérir des véhicules neutres. Mme Delphine Batho a estimé souhaitable que les technologies avancent plus vite dans un avenir proche que les lois et que les constructeurs français soient au plus vite à même de proposer des véhicules hybrides. Répondant à M. Charles de la Verpillière, le rapporteur a estimé que les véhicules évoqués pourraient relever des exceptions liées aux nécessités de service. Il a en outre jugé souhaitable de ne pas revenir sur l’étendue des véhicules à promouvoir, qui doit bien se limiter à ceux éligibles à un bonus écologique. La Commission a alors adopté l’amendement, puis émis un avis favorable à l’adoption de l’article 42 ainsi modifié.

TITRE V

GOUVERNANCE, INFORMATION ET FORMATION

Article 44

Rôle des collectivités territoriales en matière de développement durable

Le présent article souligne le rôle majeur des collectivités territoriales comme acteurs du développement durable et prévoit l’articulation de leurs actions avec les objectifs de l’État en la matière.

1. Un rôle complémentaire de celui de l’État

a) Des compétences diverses en matière de développement durable

Cet article rappelle, en premier lieu, que les collectivités territoriales et leurs groupements, en particuliers les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les pays, sont des acteurs essentiels de l’environnement et du développement durable.

Les différents niveaux de collectivités territoriales interviennent en matière environnementale. On observe un enchevêtrement complexe de compétences dans ce domaine :

––  les régions élaborent le plan régional pour la qualité de l’air et le plan régional d’élimination des déchets industriels, classent les réserves naturelles régionales et gèrent les parcs naturels régionaux ;

––  les départements sont responsables de la gestion de l’eau, de la protection, de la gestion et de l’ouverture au public des espaces naturels sensibles et de l’élaboration du plan départemental d’élimination des déchets ménagers ;

––  les communes sont compétentes en matière d’assainissement individuel et collectif, de distribution d’eau portable et de collecte et traitement des ordures ménagères.

En outre, les collectivités territoriales exercent des compétences en matière de voirie, de transports, de grands équipements, de logement, d’urbanisme ou d’aménagement du territoire, qui sont étroitement liées aux questions de développement durable. Plusieurs dispositifs existent déjà pour intégrer le développement durable au niveau territorial, tels que les conseils locaux de développement, les projets d’aménagement et de développement durable (PADD), les directives territoriales d’aménagement (DTA), les schémas d’aménagement régionaux (SAR), les plans de déplacements urbains (PDU) et les schémas de cohérence territoriale (SCOT).

La participation des collectivités territoriales à la mise en œuvre des politiques environnementales impose donc une coordination de leurs actions, notamment avec l’État.

À cette fin, le deuxième alinéa du présent article prévoit d’associer davantage les collectivités territoriales à l’élaboration de la Stratégie nationale du développement durable.

b) La participation à l’élaboration de la stratégie nationale de développement durable

L’élaboration d’une stratégie nationale de développement durable fait partie des engagements pris par la France à l’issue de la Conférence de Rio de 1992, notamment dans le cadre du texte « Agenda 21 ». Une première stratégie nationale de développement durable a ainsi été adoptée le 3 juin 2003 par le Comité interministériel pour le développement durable. Elle définit un cadre d’intervention dans le domaine du développement durable, pour une période de cinq ans, qui englobe les différentes politiques menées par l’État.

Le but de cette stratégie nationale est d’assurer la cohérence de toutes les politiques vis à vis du développement durable. Compte tenu du rôle des collectivités territoriales en matière environnementale, il est indispensable qu’elles soient davantage associées à l’élaboration de cette stratégie, ainsi qu’à sa mise en œuvre.

Aujourd’hui, la stratégie nationale de développement durable est préparée dans un cadre interministériel avec consultation du Conseil national du développement durable (CNDD). Ce conseil est composé de quatre collèges représentant respectivement les collectivités territoriales, les entreprises, les associations et organisations non gouvernementales et des personnalités qualifiées. Les collectivités territoriales ne font donc pas l’objet d’une consultation spécifique. La stratégie nationale ne fait pas référence aux engagements pris par ces collectivités.

Afin de mieux associer les collectivités territoriales, le présent projet de loi prévoit la mise en place d’une Conférence des élus, instance distincte du CNDD, qui permettrait de consulter les élus des différents niveaux de collectivités territoriales. La Conférence nationale des exécutifs instituée en octobre 2007 pourrait, par exemple, jouer ce rôle. Elle regroupe en effet des représentants de l’État ainsi que des représentants des associations d’élus locaux, le président du Comité des finances locales et le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Cette instance pourrait éventuellement être déclinée au niveau régional pour assurer une concertation la plus large possible.

c) L’utilisation des « Agendas 21 » locaux

Afin de pallier les inconvénients liés à l’enchevêtrement des compétences en matière environnementale, le présent projet de loi prévoit également d’utiliser les « Agendas 21 » locaux comme outil de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales.

Les agendas 21 locaux sont la déclinaison de l’Agenda 21 pour le développement durable adopté en 1992 lors de la Conférence sur l’environnement de Rio. Il s’agit de plans de développement durable, élaborés à l’issue d’une concertation avec les citoyens. On en recense plus de 200 en France, élaborés à l’échelle régionale, départementale, communale ou intercommunale. Dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable, la mise en place de ces dispositifs est encouragée par l’État, notamment sur les territoires qui bénéficient d’une aide publique. Ils permettent, en effet, une approche cohérente et globale du développement durable à l’échelle d’un territoire. Ils constituent un outil utile pour définir un cadre d’intervention des différents acteurs.

2. Des mesures incitatives

L’alinéa 3 du présent article prévoit que l’État favorisera la généralisation des bilans en émissions de gaz à effet de serre et des plans climat énergie territoriaux. Les collectivités territoriales doivent contribuer au respect de l’engagement pris par la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050, qui est rappelé par l’article 2 du présent projet de loi.

Les bilans en émissions de gaz à effet de serre permettront aux collectivités de repérer les sources d’émissions les plus importantes – notamment dans les bâtiments et les transports – et de connaître leurs marges de manœuvre pour les réduire.

Les plans climat énergie territoriaux (PCET) sont des cadres regroupant l’ensemble des politiques qui visent à lutter contre les émissions de gaz à effet de serre sur un territoire. L’élaboration d’un PCET permet d’évaluer les sources d’émissions de gaz à effet de serre, de se fixer des objectifs de réduction, de formuler des propositions pour réduire ces émissions et de définir les modalités de mise en œuvre avec les différents acteurs du territoire.

L’article 7 du présent projet de loi prévoit que l’État devra inciter les régions, les départements et les communes de plus de 50 000 habitants à établir des PCET avant 2012. Au-delà de cet objectif, l’État devra inciter la plupart des collectivités à se doter de tels plans sur une base volontaire, notamment grâce à un appui méthodologique et technique.

Par ailleurs, l’alinéa 4 confie à l’État le soin de diffuser les expérimentations locales. Les expérimentations sont, en effet, plus faciles lorsqu’elles sont décidées à l’échelle locale. L’État est le mieux à même d’assurer le retour d’expérience et d’informer les autres collectivités des expérimentations réussies, voire de généraliser un dispositif.

L’État devra également encourager l’articulation entre les politiques de transport et des projets d’urbanisme. Assurer la cohérence entre ces deux volets de l’action locale peut permettre de limiter les trajets en automobile et de lutter contre l’étalement urbain. Cet objectif est conforme à l’engagement n° 50 du Grenelle de l’environnement, aux termes duquel, pour lutter contre l’étalement urbain, sera rendue obligatoire une « étude d’impact pouvant amener à l’interdiction d’ouvrir de nouvelles zones importantes à l’urbanisation sans programmation de transports en commun adaptés ni évaluation de la perte induite en espaces agricoles et naturels ».

L’alinéa 5 de cet article prévoit d’éventuels nouveaux concours aux collectivités territoriales qui contribuent significativement à la réalisation d’objectifs de nature environnementale. Les travaux du Grenelle de l’environnement ont notamment suggéré :

––  d’instaurer des mesures de lutte contre l’étalement urbain comprenant des incitations financières et le soutien à la gestion des territoires non urbanisés ;

––  de fixer des critères de conditionnalité au regard du développement durable pour les aides accordées aux collectivités par l’État ou pour les fonds structurels communautaires.

3. L’évaluation environnementale des documents d’urbanisme

En matière d’urbanisme, les évaluations préalables revêtent une grande importance car les actions entreprises sont difficilement réversibles. C’est pourquoi les documents d’urbanisme doivent prendre en compte les conséquences environnementales.

En application d’une directive du 27 juin 2001 (10), les principaux documents d’urbanisme doivent faire l’objet, avant leur adoption, d’une évaluation environnementale. Cette évaluation implique de rédiger un rapport sur les conséquences potentielles ou avérées sur l’environnement, ainsi que d’informer le public et de procéder à la consultation d’autorités compétentes.

L’article R. 121-14 du code de l’urbanisme impose de réaliser une évaluation environnementale pour l’élaboration des directives territoriales d’aménagement, du schéma directeur de la région d’Île-de-France, des schémas d’aménagement régionaux des régions d’outre-mer, du plan d’aménagement et de développement durable de Corse et des schémas de cohérence territoriale (SCOT).

Les plans locaux d’urbanisme (PLU) ne sont pas concernés par cette obligation, sauf exceptions (11), car la directive permet d’exempter les « petites zones au niveau local ». En outre, comme la directive n’impose pas d’évaluation environnementale en cas de « modification mineure » d’un document d’urbanisme, ne donnent pas lieu à évaluation les modifications et révisions qui ne portent pas atteinte à l’économie générale du document ou les mises en cohérence des PLU avec les SCOT.

L’alinéa 4 du présent article prévoit une extension progressive de l’évaluation environnementale. Celle-ci devra notamment mettre l’accent sur les questions de préservation de la biodiversité, de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de lutte contre l’étalement urbain et la contraction des espaces naturels et agricoles. L’évaluation environnementale devrait également être renforcée par la diffusion d’une méthode précise, incluant des indicateurs et des critères d’évaluation comme le bilan carbone ou l’artificialisation des sols.

Après avoir adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur de référence, la Commission a adopté un amendement du même auteur tendant à supprimer le terme « progressivement » à l’alinéa 4 de l’article, le rapporteur estimant que la notion de progressivité est contenue dans le futur employé dans la phrase. Puis la Commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 44 ainsi modifié.

Article 45

Information et participation des citoyens aux décisions publiques

Cet article reprend les engagements du Grenelle de l’environnement en matière de gouvernance écologique. Il prévoit l’amélioration de l’information des citoyens et de l’accès à l’expertise, ainsi qu’une meilleure participation du public à la prise de décision dans le cadre des procédures de débat public et d’enquête publique.

1. L’amélioration de l’information du public et de l’expertise en matière environnementale

a) La collecte et l’accessibilité des informations sur l’environnement

Le droit à l’information en matière environnementale est garanti au niveau constitutionnel. L’article 7 de la Charte de l’environnement dispose ainsi que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ». Sans informations pertinentes sur l’état de l’environnement et sur les atteintes qu’il subit, il est impossible aux citoyens de participer de manière éclairée au débat public. L’information doit donc exister et être accessible aux citoyens.

Malgré la consécration de ce droit d’accès à l’information, son effectivité n’est pas garantie, notamment si l’on compare avec la situation française avec celle du Royaume-Uni ou des États-Unis :

––  d’une part, on constate un manque de données générales de nature environnementale. Les données disponibles sont souvent disséminées entre de nombreux organismes, sans vision d’ensemble des effets du changement climatique ou des évolutions de la biodiversité. L’observation de l’environnement et la cartographie des risques apparaissent lacunaires ;

––  d’autre part, les informations existantes ne sont pas aisément accessibles, pour différentes raisons. La dispersion des organismes, publics ou privés, détenant des données environnementales et l’absence de mise en commun de ces données complique les recherches. Les informations disponibles sont souvent trop complexes pour être exploitées par des personnes qui ne sont pas des experts. L’administration française reste par ailleurs marquée par une culture du secret qui freine la communication de nombreux documents administratifs, notamment quand il s’agit de documents préparatoires à une décision. En outre, les documents librement communicables sont rarement mis à la disposition du public par des moyens modernes de communication, mais seulement transmis aux personnes qui en font la demande.

Le présent article prévoit le développement de la production et de la collecte d’informations sur l’environnement. La création d’indicateurs de développement durable, prévue par l’article 42 du projet de loi, contribuera à cette démarche. Il pourrait également être envisagé de confier à une instance unique la centralisation des données disponibles, sur le modèle des agences de l’environnement qui existent dans d’autres pays, comme le Royaume-Uni. Cette mission reviendrait logiquement à l’Institut français de l’environnement, qui est déjà chargé « de recueillir, d’élaborer et de diffuser l’information sur l’environnement » (12).

L’organisation de la collecte d’information devra favoriser l’accès des citoyens aux données. Cela implique, par exemple :

––  de restreindre le champ des exceptions au principe de libre communication des documents administratifs, par exemple en rendant publics les avis des commissions consultatives et les expertises réalisées par des agences publiques ;

––  de mettre en ligne gratuitement les données environnementales, de préférence sur un portail national unique ;

––  de rendre l’information lisible et aisément compréhensible ;

––  d’informer plus largement les citoyens des actions entreprises par les collectivités publiques en renforçant la législation sur l’amélioration des relations entre l’administration et les usagers. Les actes réglementaires, en particulier, pourraient être systématiquement motivés.

b) L’amélioration de l’expertise en matière environnementale

En matière environnementale, l’expertise consiste à « évaluer les risques sanitaires et environnementaux résultant de l’utilisation des différentes technologies tant en amont qu’en aval de leur mise sur le marché » (13). Elle peut être réalisée par des organismes divers, tels que les services de recherche des universités ou les différents organismes ad hoc de recherche et d’expertise publics.

•  Les lacunes de l’expertise environnementale

Le groupe de travail sur la « gouvernance écologique » du Grenelle de l’environnement a préconisé de renforcer l’expertise publique environnementale et d’ouvrir plus largement celle-ci à la société civile.

Il a, en effet, fait le constat du manque de capacité d’expertise, ainsi que de moyens financiers, dans certains domaines, comme la toxicologie. Les sujets de recherche sont généralement les sujets qui intéressent le secteur privé. Il manque, en revanche, des observatoires environnementaux ou des outils prédictifs des évolutions environnementales. Dans certains domaines, les recherches sont monopolisées par les entreprises, ce qui rend difficile de recruter des experts indépendants pour siéger dans des commissions administratives. Or les besoins en expertises sont croissants face à des choix technologiques délicats, notamment en matière d’énergie, d’organismes génétiquement modifiés ou encore de nanotechnologies.

On observe, en outre, une défiance croissante du public envers les expertises, liée à de multiples facteurs :

––  le souvenir de graves défaillances passées, certains organismes ayant sous-estimé des risques qui se sont avérés graves, comme l’emploi de l’amiante ;

––  le sentiment d’une confusion entre le décideur et la personne qui réalise l’expertise, quand un organisme public réalise une expertise sur un projet de l’État ;

––  le manque de transparence et d’indépendance des expertises, dans lesquelles interviennent parfois des experts qui sont liés à des intérêts économiques privés.

Par ailleurs, l’asymétrie qui existe en matière d’expertise entre la personne publique et le public nuit à la participation effective de celui-ci à l’élaboration des décisions. Les acteurs de la société civile ne peuvent pas saisir une commission d’experts et n’ont généralement pas les moyens financiers de réaliser une contre-expertise. Il leur est donc difficile d’étayer leurs remarques ou de formuler des contre-propositions.

•  Le développement et la démocratisation de l’expertise

L’alinéa 4 du présent article prévoit une réorganisation de l’expertise publique en matière d’environnement dans un cadre national multidisciplinaire et pluraliste.

Cela implique, en premier lieu, de développer les capacités d’expertise publique dans les domaines sensibles au regard de l’environnement, en formant de nouveaux experts.

En deuxième lieu, le caractère pluridisciplinaire, pluraliste et contradictoire des expertises devra être réaffirmé. En pratique, les instances d’orientation des organismes d’expertise seront ouvertes à des représentants de la société civile, notamment les entreprises, les organisations syndicales et les associations. Les commissions consultatives devront être composées de manière pluraliste et respecter une procédure contradictoire, en permettant notamment aux parties opposées de défendre leur thèse. La transparence pourrait être renforcée grâce à la publicité des débats, ce qui contribuerait à renforcer la confiance des citoyens dans les expertises publiques.

Enfin, l’accès aux capacités d’expertise sera facilité, notamment en permettant aux associations agréées, ainsi qu’à d’autres organismes représentant la société civile, de saisir les agences d’expertise. Cette possibilité existe déjà pour certaines agences. Par exemple, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement peut être saisie d’une demande d’avis par les associations agréées de protection de l’environnement (14).

•  Garantir la déontologie des expertises.

Pour restaurer la confiance portée aux expertises, il importe de garantir la qualité de ces travaux et, en particulier, l’indépendance des experts. Le présent article prévoit la mise en place de moyens pour garantir la déontologie des expertises, à l’issue d’une phase d’études et de propositions.

Il a notamment été envisagé d’élaborer un code de déontologie des experts, qui définirait des obligations de compétence, d’indépendance et de responsabilité. La pratique des déclarations d’intérêt pour les experts siégeant dans des commissions consultatives pourrait également être généralisée, afin d’éviter qu’un des experts ait des relations financières avec l’une des parties intéressées au résultat de l’expertise.

Le présent article envisage la création d’instances ad hoc pour assurer la déontologie des expertises. Une haute autorité de l’expertise pourrait ainsi se voir confier la rédaction du code de déontologie, ainsi qu’un rôle de médiation en cas de conflits et de contrôle de la rigueur des procédures. Elle serait le garant que le caractère pluraliste, contradictoire et indépendant de l’expertise est respecté. Sa composition pourrait elle-même être pluraliste, ouverte sur la société civile. Elle pourrait être saisie par les différents organismes d’expertises, les parties concernées ou les associations agréées.

•  La réorganisation de l’alerte environnementale.

La mise en œuvre du principe de précaution, consacré à l’article 5 de la Charte de l’environnement (15), suppose de disposer de procédures d’alerte lorsqu’une expertise met en évidence un danger potentiel en matière environnementale ou sanitaire. Ces procédures doivent être organisées avec méthode pour éviter les deux écueils opposés consistant soit à sous-évaluer les risques et négliger les générations futures, soit à refuser toute avancée technologique en raison de craintes infondées. L’articulation entre expertise et décision doit donc reposer sur un processus rigoureux, qui ne se limite pas à l’intervention des experts. Il serait possible, par exemple, de permettre aux chercheurs de saisir la future haute autorité de l’expertise pour lancer une alerte. Une protection du lanceur d’alerte contre les éventuelles mesures de rétorsion devra également être définie.

2. Un renforcement de la participation des citoyens

L’amélioration de l’information des citoyens et de leur accès à l’expertise doit leur permettre de participer de manière plus effective à la prise de décisions, en particulier dans le cadre des procédures de débat public et d’enquête publique.

a) La rénovation de la procédure du débat public

La procédure de débat public définie par l’article L. 121-1 du code de l’environnement a été instituée par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement. Elle permet au public de « participer au processus d’élaboration des projets d’aménagement ou d’équipement d’intérêt national […] qui présentent de forts enjeux socio-économiques ou ont des impacts significatifs sur l’environnement ou l’aménagement du territoire ».

La Commission nationale du débat public (CNDP) est chargée de veiller au respect des obligations d’information et de participation du public. Elle est saisie de droit des projets de création d’autoroutes ou de routes express, de lignes ferroviaires, de voies navigables, d’aérodromes, d’infrastructures portuaires, de lignes électriques, de gazoducs, d’oléoducs, d’installations nucléaires civiles, de barrages et d’équipements culturels, sportifs, scientifiques, touristiques ou industriels, lorsque le montant ou les dimensions de ces équipements dépassent des seuils fixés par voie réglementaire (16). Elle peut également être saisie à titre facultatif d’un projet par une personne publique. Il lui appartient de décider si le projet doit donner lieu à un débat public. En raison de ces conditions de saisine restrictives, les associations ont le sentiment qu’il leur est très difficile d’être à l’initiative d’un débat public.

Le déroulement du débat public et la prise en compte de celui-ci dans la décision finale font également l’objet de critiques. Le débat public laisse fréquemment un sentiment de frustration chez les citoyens, qui ont l’impression d’avoir été convoqué à une « concertation alibi » sur un projet déjà bouclé, sans débat de fond. Les administrations sont souvent réticentes à remettre en question leur projet ou à examiner des contre-propositions. Leur projet fait suite, en effet, à de longues réflexions poussées et à un travail technique très poussé de plusieurs ingénieurs, tandis que les associations ne disposent généralement pas des mêmes moyens humains et techniques pour analyser le projet. En particulier, il est très difficile aux associations de financer une contre-expertise. Face à cette fermeture, le débat peut se cristalliser en conflit sur l’opportunité du projet lui-même et générer des blocages.

Par ailleurs, la portée du débat public sur l’avenir du projet reste limitée. Un compte-rendu et bilan du débat public sont publiés. Dans un délai de trois mois, la personne publique doit établir un rapport de suivi. Il n’est reconnu aucune portée décisionnelle au débat. La CNDP peut émettre des recommandations motivées à l’issue du débat public, mais celles-ci ne doivent en aucun cas prendre partie sur le fond du projet.

Afin d’assurer une portée effective du débat public, l’engagement n° 189 du Grenelle de l’environnement consiste à « en élargir le champ et les possibilités de saisine ; rénover la procédure en incluant les questions de la gouvernance de l’après-débat et la présentation des alternatives ». Cet engagement est traduit par l’alinéa 3 du présent article.

En pratique, les possibilités d’organiser un débat public pourraient être élargies, notamment en ouvrant la faculté de saisine de la CNDP à des organismes représentant la société civile, comme les associations. La portée du débat pourrait être renforcée grâce à l’inclusion obligatoire de solutions alternatives dans les dossiers de débat. La prise en compte des résultats du débat public pour la suite du projet devra également être précisée au niveau législatif ou réglementaire.

b) La réforme des enquêtes publiques

L’alinéa 2 de l’article 45 prévoit une réforme des procédures d’enquête publique afin, d’une part, de simplifier le dispositif et, d’autre part, de permettre une meilleure participation du public.

•  Une nécessaire simplification des enquêtes publiques

Un grand nombre d’aménagements, ouvrages ou travaux de personnes publiques ou privées sont soumis à l’obligation d’effectuer une enquête publique. Cette enquête intervient généralement avant la déclaration d’utilité publique, c’est-à-dire en aval de l’éventuel débat public. La plupart de ces enquêtes publiques sont conduites par un commissaire-enquêteur indépendant. Pendant la durée de l’enquête, tout citoyen peut prendre connaissance en mairie du dossier des travaux envisagés et formuler des observations ou des propositions dans un registre d’enquête. Les personnes qui le souhaitent peuvent être entendues par le commissaire-enquêteur. Le commissaire-enquêteur remet ensuite un rapport d’enquête comprenant des conclusions motivées et un avis favorable ou défavorable au projet, qui servira de base à la décision (17).

La complexité liée à la juxtaposition de plusieurs procédures d’enquête publique a été mise en évidence à plusieurs reprises. Dans son rapport public pour 2003, le Conseil d’État a ainsi appelé l’attention sur les conséquences de l’hétérogénéité croissante des procédures d’enquête publique sur la qualité et la sécurité juridique des procédures (18). Il existe en effet diverses catégories d’enquêtes publiques :

––  les enquêtes publiques dites « de droit commun », préalables à une déclaration d’utilité publique et à une expropriation. Historiquement les plus anciennes, elles évaluent si l’utilité publique justifie de porter atteinte aux intérêts privés des personnes concernées par l’expropriation. La même logique s’applique à une série d’enquêtes publiques particulières, telles que l’enquête préalable à l’établissement du plan de servitudes aéronautiques de dégagement, l’enquête pour servitudes de passages des piétons sur le littoral, l’enquête pour servitudes radioélectriques ou l’enquête pour création de réserves naturelles ;

––  les enquêtes publiques régies par le code de l’environnement. Ces enquêtes, créées par la loi dite Bouchardeau du 12 juillet 1983 (19), permettent de prendre en compte les préoccupations environnementales des citoyens. Elles mettent donc en balance différents intérêts publics, notamment au moyen d’une étude d’impact. Ce sont les principales concernées par les réformes prévues par le Grenelle de l’environnement. Certaines enquêtes spécifiques sont soumises au même régime que celui de la loi du 12 juillet 1983 précitée, comme les enquêtes préalables à la réalisation d’un plan d’exposition au bruit au voisinage des aérodromes ou aux changements substantiels de zones du domaine public maritime ;

––  les enquêtes qui empruntent aux deux régimes, comme les enquêtes de classement dans la catégorie des autoroutes ou les enquêtes prévues par la législation sur l’eau ;

––  les enquêtes soumises à une réglementation spécifique, par exemple l’enquête pour classement et déclassement des routes départementales et des voies communales ou l’enquête pour l’octroi des concessions de plage ;

––  les enquêtes de commodo et incommodo, qui ne sont régies par aucun texte mais subsistent en matière de détermination des limites de la mer.

Il convient également de mentionner les enquêtes publiques prévues par la circulaire dite « Bianco » du 15 décembre 1992 relative à la conduite des grands projets d’infrastructures. Elles permettent d’organiser une procédure de concertation sur l’opportunité des grands projets d’infrastructure dès le stade de la conception (20), c’est-à-dire en amont des enquêtes publiques classiques.

Cette variété de procédures est source de complexité pour les maîtres d’ouvrage et de confusion chez le public. Pour un même projet, il est fréquemment nécessaire de combiner plusieurs de ces enquêtes, voire d’organiser dix ou douze enquêtes. Il est alors difficile aux citoyens de comprendre dans quel cadre ils sont consultés et quel est l’objet de la consultation. En particulier, ils ne savent pas nécessairement si la concertation porte sur l’opportunité du projet ou sur ses modalités.

Plusieurs mesures de simplification avaient été envisagées dans le cadre de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit. L’article 60 de cette loi avait habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions nécessaires pour :

––  regrouper les différentes procédures d’enquête publique ;

––  harmoniser les différents régimes d’enquête publique ;

––  autoriser le recours à une procédure d’enquête unique ou conjointe lorsqu’un projet comprend l’intervention de plusieurs maîtres d’ouvrage ou des opérations soumises à une réglementation distincte en matière d’enquête publique. Il convient, en effet, que chaque projet ne donne lieu qu’à un nombre limité d’enquêtes.

––  mieux coordonner les procédures d’enquêtes publiques avec le débat public qui les précède.

L’ordonnance prévue n’ayant pas été publiée, un renouvellement de cette habilitation apparaît opportun.

•  Une meilleure participation du public

La qualité de la concertation opérée lors des enquêtes publiques fait l’objet de critiques récurrentes.

L’information délivrée aux citoyens n’est pas exempte de critiques. La mise à disposition en mairie du dossier technique du maître d’ouvrage ne permet pas nécessairement aux citoyens d’en prendre connaissance facilement, en l’absence d’un effort de vulgarisation. Les efforts de transparence des administrations apparaissent par ailleurs insuffisants, de nombreux documents préparatoires ou expertises n’étant pas rendus publics. Certains acteurs choisissent alors de demander des expertises complémentaires ou des contre-expertises.

Il est surtout reproché aux maîtres d’ouvrage de considérer l’enquête publique comme une formalité indispensable plutôt que comme un moyen de participation des citoyens à l’élaboration du projet. Ainsi, la « concertation » se limite généralement à une simple information des citoyens, voire à une opération de communication sur les avantages du projet, alors même que l’objet de l’enquête publique est de permettre une remontée d’observations.

Enfin, on observe souvent un malentendu sur l’objet même de la consultation. Le caractère tardif de l’enquête publique dans le processus d’élaboration du projet limite, en effet, la possibilité d’apporter des modifications notables. Le principe même de la réalisation du projet est déjà acté et l’enquête doit porter sur ses modalités de mise en œuvre. Les remises en cause de l’opportunité du projet peuvent alors mener au dialogue de sourds entre le maître d’ouvrage et une partie de la population.

Cette absence de concertation réelle conduit soit à l’indifférence du public, soit au blocage du projet en cas de forte opposition.

Selon les travaux du Grenelle de l’environnement, en particulier du groupe de travail n° 5 sur la démocratie écologique, l’amélioration de la participation du public pourrait être favorisée par :

––  des consultations du public dès l’élaboration des plans, schémas et programmes d’aménagement, pour permettre un débat sur l’opportunité des projets ;

––  l’amélioration de l’information fournie aux citoyens, notamment grâce à l’utilisation des nouvelles technologies et à la publication des documents préparatoires ;

––  la modernisation des moyens de recueil des observations, en employant des méthodes plus interactives que le registre sur support papier ;

––  la présentation de variantes dans les dossiers d’enquête publique ;

––  des garanties d’impartialité des enquêtes, par exemple en les plaçant sous l’égide de la Commission nationale du débat public ;

––  un recours plus fréquent au référendum d’initiative locale.

La Commission a été saisie d’un amendement du rapporteur tendant à compléter l’alinéa 2 de l’article pour mieux préciser les mesures susceptibles d’être adoptées en matière de simplification des enquêtes publiques. Son auteur a indiqué que la réforme de ces procédures a déjà fait l’objet de nombreuses réflexions, notamment d’un rapport du Conseil général des Ponts et Chaussées et de l’Inspection générale de l’environnement. Il a précisé que cet amendement reprend les deux principales orientations proposées par ce rapport : le regroupement des procédures pour harmoniser les règles et le recours à une enquête unique ou conjointe en cas de pluralité de maîtres d’ouvrage. Le Président Jean-Luc Warsmann ayant indiqué que le Gouvernement n’avait pas, compte tenu des délais de publication de ce rapport, pu utiliser l’habilitation à légiférer par ordonnance accordée par la loi du 9 décembre 2004 pour simplifier les enquêtes publiques, la Commission a adopté cet amendement, puis émis un avis favorable à l’adoption de l’article 45 ainsi modifié.

La Commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des articles du projet de loi dont elle s’est saisie pour avis, modifiés par les amendements qu’elle a adoptés.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 42

Amendements nos 1 et 2 présentés par M. Éric Diard, rapporteur pour avis :

•  Rédiger ainsi le début de l’alinéa 2 de cet article : « L’État garantira le respect de l’environnement dans l’achat public par un recours … (le reste sans changement) »

•  Rédiger ainsi l’alinéa 4 de cet article :

« a) Dès 2009, de n’acquérir, s’agissant de véhicules particuliers neufs à l’usage des administrations civiles de l’État, que des véhicules éligibles au « bonus écologique », sauf nécessités de service ; ».

Article 44

Amendements nos 3 et 4 présentés par M. Éric Diard, rapporteur pour avis :

•  À la première phrase de l’alinéa 3 de cet article, substituer aux mots : « article 8 », les mots : « article 7 ».

•  À l’alinéa 4 de cet article, supprimer le mot : « progressivement ».

Article 45

Amendement no 5 présenté par M. Éric Diard, rapporteur pour avis :

Compléter l’alinéa 2 de cet article par les deux phrases suivantes :

« Les différentes procédures seront regroupées pour en harmoniser les règles. Le recours à une enquête unique ou conjointe sera favorisé en cas de pluralité de maîtres de l’ouvrage ou de réglementations distinctes. »

© Assemblée nationale

1 () Loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 relative à la Charte de l’environnement.

2 () Voir le commentaire de cet article.

3 () Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.

4 () Circulaire du 30 septembre 2003 relative à la qualité de la réglementation.

5 () Cette formation, recommandée par le Comité opérationnel n° 4 « État exemplaire », vise à inciter les agents à adopter une conduite économe en énergie, qui peut permettre un gain de carburant de 10 %.

6 () Décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics.

7 () Décret n° 91-1054 du 14 octobre 1991 relatif aux parcs automobiles des administrations civiles et des établissements publics de l’État.

8 () La gestion durable d’une forêt peut être attestée par des certifications comme le Forest stewardship council (FSC) ou le Programm for the endorsement of forest certification schemes (PEFC).

9 () Voir le commentaire de l’article 44.

10 () Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement.

11 () Par exemple, les PLU portant sur des territoires de plus de 5 000 hectares et de plus de 10 000 habitants ou ceux qui sont susceptibles d’avoir des incidences sur un site Natura 2000 nécessitent une évaluation environnementale.

12 () Article 2 du décret n° 2004-936 du 30 août 2004 créant un service à compétence nationale au ministère de l’écologie et du développement durable et portant dissolution de l’établissement public national dénommé Institut français de l’environnement.

13 () Rapport de la mission confiée à Mme Corinne Lepage sur la gouvernance écologique, février 2008.

14 () Article L. 1336-1 du code de la santé publique.

15 () Cet article dispose que « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

16 () Les seuils et critères sont fixés par l’article R. 121-2 du code de l’environnement.

17 () Si l’avis du commissaire-enquêteur est défavorable, la déclaration d’utilité publique des travaux ne pourra être faite que par décret en Conseil d’État.

18 () Conseil d’État, Rapport public 2003, Paris, La documentation française, Études et documents du Conseil d’État n° 54, 2003.

19 () Loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l’environnement.

20 () Dans le cadre de ces enquêtes, la concertation est organisé par une commission indépendante désignée par le préfet, et non par un commissaire-enquêteur.