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N° 2129

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 décembre 2009.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, portant réforme du crédit à la consommation,

PAR Mme Valérie ROSSO-DEBORD,

Députée.

——

Voir les numéros :

Sénat : 94, 114, 173, 255, 325, 364, 447, 448 et T.A. 98 (2008-2009).

Assemblée nationale : 1769, 2131, 2139.

INTRODUCTION 7

I.- LE SURENDETTEMENT, UNE RÉALITÉ SOCIALE DE PLUS EN PLUS PRÉGNANTE 9

A. UN RECOURS CROISSANT AU CRÉDIT 9

1. Un taux d’endettement croissant pour les ménages français 9

2. Une diffusion du crédit qui atteint un niveau élevé en 2007-2008 10

3. En Europe, une position moyenne de la France dans la diffusion du crédit à la consommation 10

B. UN DÉVELOPPEMENT DU CRÉDIT POURTANT FREINÉ PAR LE CADRE LÉGAL ET RÉGLEMENTAIRE ? 12

C. DES DIFFICULTÉS CROISSANTES POUR FAIRE FACE AUX ÉCHÉANCES 14

II.- LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI PORTANT RÉFORME DU CRÉDIT À LA CONSOMMATION 17

A. ÉTENDRE LE CHAMP DES CONTRATS PROTÉGÉS PAR LA LOI 17

B. MIEUX INFORMER LES EMPRUNTEURS 18

1. Un encadrement strict de la publicité du crédit 18

2. Une distinction plus nette entre crédit et actes de commerce ou d’assurance 18

3. Des obligations d’information renforcées dans le contrat et en cours d’exécution de celui-ci 19

C. MIEUX CONSEILLER LES EMPRUNTEURS ET RESPONSABILISER LES ORGANISMES PRÊTEURS 20

D. OFFRIR À TOUS DES FORMES DE CRÉDIT DIVERSIFIÉES 20

1. Une réforme des taux de l’usure 20

2. Des mesures pour généraliser les crédits amortissables 21

3. La pérennisation et la redéfinition du fonds de garantie du micro-crédit 21

III.- LES DISPOSITIONS DONT LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES S’EST SAISIE POUR AVIS 23

A. RENDRE LES PROCÉDURES DE SURENDETTEMENT PLUS RAPIDES ET PLUS EFFICACES 23

1. Le dispositif actuel de traitement du surendettement 23

a) La composition de la commission de surendettement 24

b) Le début de la procédure : recevabilité et orientation des dossiers 24

c) La poursuite de la procédure administrative aux mains de la commission de surendettement 25

d) Le recours au juge : le rétablissement personnel 27

e) Éléments sur l’activité des commissions de surendettement. 28

2. Les mesures du projet de loi 29

a) Un calcul du « reste à vivre » plus transparent et plus adapté aux charges réelles des ménages 29

b) Un délai plus court pour l’examen de recevabilité et l’orientation des dossiers 30

c) La suspension automatique des procédures d’exécution autres que d’expulsion 30

d) La suppression de l’obligation d’homologation pour certaines des décisions de la commission de surendettement 31

e) La création explicite d’une procédure allégée de rétablissement personnel sans liquidation 32

f) Les autres mesures relatives au traitement du surendettement 33

B. REPENSER LES DISPOSITIFS DE CENTRALISATION DES INFORMATIONS SUR LES EMRUNTEURS 35

1. Pour un fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) qui n’exclue pas 35

a) Les règles en vigueur 35

b) Les mesures proposées 36

2. L’ouverture du débat sur le « fichier positif » 38

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 41

II.- EXAMEN DES ARTICLES 53

TITRE IV : PROCÉDURE DE TRAITEMENT DU SURENDETTEMENT DES PARTICULIERS ET ADAPTATION DU FICHIER NATIONAL DES INCIDENTS DE REMBOURSEMENT DES CRÉDITS AUX PARTICULIERS 53

Chapitre Ier : Composition et compétences de la commission de surendettement 53

Article 20 : Composition de la commission départementale de surendettement 53

Article 21 : Procédure devant la commission de surendettement 53

Après l’article 21 57

Article 22 : Effacement des dettes – Déchéance et champ d’application personnel des procédures de surendettement 57

Article 23 : Prérogatives de la commission de surendettement – Ouverture d’une procédure de rétablissement personnel 58

Article 24 : Pouvoirs du juge de l’exécution à l’égard des mesures recommandées par la commission de surendettement 59

Chapitre III : Procédure de rétablissement personnel 59

Article 25 : Orientation du débiteur vers la procédure de rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire 59

Article 26 : Déroulement de la procédure de rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire 59

Article 26 bis : Rapport annuel d’activité des commissions de surendettement 59

Article 26 ter : Remise des dettes fiscales dans le cadre d’une procédure de rétablissement personnel 60

Article 27 : Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers 60

Article 27 bis : Principe de la création d’une centrale des crédits aux particuliers 60

Chapitre IV : Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers 61

Article 27 ter : Preuve de la consultation du FICP par les établissements de crédit 61

Article 27 quater : Durée d’inscription au FICP en cas de faillite civile 61

TITRE V : DISPOSITIONS RELATIVE À L’OUTRE-MER 61

Chapitre II : Dispositions relatives au traitement des situations de surendettement 61

Article 29 : Application des dispositions relatives au traitement des situations de surendettement dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie 61

Article 30 : Dispositions d’adaptation relatives à Mayotte, à Saint-Barthélémy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon 62

Article 31 : Dispositions d’adaptation relatives à la Nouvelle-Calédonie 62

Article 32 : Fonctionnement du FICP en Polynésie française 62

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 63

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 69

INTRODUCTION

Depuis la création de la procédure de surendettement en 1990, près de deux millions et demi de dossiers de demande ont été déposés. Les cinq dernières années, le nombre de demandes annuelles s’était stabilisé aux alentours de 180 000, mais la grave crise économique que nous traversons se traduit par une nouvelle hausse de ce chiffre ; plus de 200 000 dossiers ont été déposés depuis un an. Plus de 700 000 ménages sont actuellement, selon la Banque de France, en cours de désendettement, c’est-à-dire couverts par une mesure d’apurement en vigueur.

Pour autant, doit-on considérer que nos concitoyens abusent des facilités du crédit ? Le taux d’endettement des ménages français a certes presque triplé en trente ans et le nombre de ménages ayant un crédit en cours a atteint en 2008 un niveau historiquement élevé. Il faut cependant être conscient que l’augmentation du taux d’endettement des ménages est essentiellement due à l’évolution des prix de l’immobilier, premier motif d’endettement, plutôt qu’à un abus des prêts à la consommation. Par ailleurs, plusieurs lois ont déjà encadré ceux-ci depuis 1978 avec des mesures, notamment de réglementation de la publicité, visant à garantir le consentement « éclairé » des souscripteurs de crédits. Au demeurant, les comparaisons internationales montrent que la France est généralement assez proche de la moyenne européenne pour différents indicateurs de recours au crédit ; les Français restent à cet égard beaucoup plus prudents que les Britanniques ou les Néerlandais. Il ne s’agit donc pas de décourager la diffusion du crédit à la consommation, qui est un outil puissant de soutien de la croissance et peut bénéficier tout particulièrement, sous certaines conditions, aux plus modestes de nos concitoyens ; il s’agit de promouvoir un crédit responsable.

Le présent projet de loi, d’abord justifié par la nécessité de transposer en droit national une directive communautaire du 23 avril 2008, en offre l’opportunité. Les emprunteurs seront encore mieux mis en garde, informés et conseillés par les organismes prêteurs. Il sera mis fin au « crédit malgré soi » résultant de la distribution de cartes de fidélité auxquelles est attachée une ligne de crédit qui est activée, obligatoirement ou à défaut du choix explicite d’un paiement au comptant, lors de tout achat. Plusieurs dispositions visent également à généraliser les crédits amortissables : pour financer un achat, les consommateurs devront toujours avoir le choix entre une ligne de crédit renouvelable et un crédit amortissable et toute échéance de crédit renouvelable devra inclure une part de remboursement du capital. Quant aux procédures de surendettement, les mesures proposées n’en changent pas l’architecture générale, mais visent à les rendre plus rapides et plus efficaces, tout en améliorant la protection des personnes concernées en matière de détermination de leur « reste à vivre » et de suspension des poursuites engagées par les créanciers.

Le projet de loi veut aussi rendre plus réactif l’actuel fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP). Certains, pourtant, estiment que cela ne sera pas suffisant et prônent un « fichier positif » (par opposition aux « fichiers négatifs » où l’on répertorie les incidents et les défaillances) où seraient recensés tous les engagements souscrits par des particuliers en France, afin de faciliter l’appréciation de la solvabilité des demandeurs de crédit. Il est vraisemblable qu’un fichier positif serait un instrument efficace de plus grande concurrence et de plus grande diffusion du crédit, notamment vers les catégories sociales modestes. Cependant, au regard des expériences étrangères, l’effet de prévention du surendettement est plus incertain et controversé. Or, l’atteinte à la vie privée que peut représenter un tel instrument est évidente. Le Sénat a donc proposé que le fichier positif fasse l’objet d’une étude sérieuse, option que votre rapporteure pour avis juge raisonnable. Votre commission des affaires sociales estime que cette question importante et dont les tenants et aboutissants commencent à être bien connus devrait être tranchée dans un délai raisonnable ; elle souhaite donc que le délai prévu pour cette étude soit ramené de trois ans à dix-huit mois.

Si la question du fichier positif paraît devoir encore être approfondie, plusieurs mesures plus modestes mais d’effet immédiat seraient de nature à mieux protéger et accompagner les personnes en situation de surendettement. Votre commission des affaires sociales propose ainsi des amendements :

– excluant que des dossiers de surendettement soient déclarés irrecevables au seul motif que le demandeur est propriétaire de son logement (et a donc un bien réalisable). Il semble en effet que certaines commissions refusent assez systématiquement ces dossiers, alors qu’il est important de préserver autant que possible le logement des ménages concernés et qu’une procédure de surendettement bien conduite n’aboutit pas forcément à la vente de celui-ci ;

– mentionnant les programmes d’éducation budgétaire parmi les mesures d’accompagnement social qui peuvent être proposées ;

– interdisant les intérêts dits « intercalaires », qui peuvent courir entre la date où la commission de surendettement (ou le juge) a arrêté l’état du passif du débiteur et la date de mise en œuvre effective d’un plan d’apurement. Il s’agit d’éviter qu’au terme de celui-ci, la personne, dont la dette a été normalement entièrement purgée, se trouve encore débitrice de ces intérêts ;

– ramenant de dix ans à sept ans la durée maximale des plans conventionnels d’apurement, car les personnes surendettées ont le droit de pouvoir « rebondir » au terme d’une période d’une durée supportable ;

– améliorant et clarifiant les règles de protection des surendettés contre les voies d’exécution. La suspension de celles-ci doit avoir pour effet non seulement d’arrêter celles en cours, mais aussi d’interdire que de nouvelles procédure ne soient lancées. Il convient également de sécuriser la situation des personnes qui, au cours de l’exécution d’un plan d’apurement qui n’apparaît pas tenable, demandent à basculer dans la procédure de rétablissement personnel. Il est enfin proposé que la suspension des voies d’exécution entraînée par la recevabilité d’un dossier de surendettement concerne aussi les mesures d’expulsion du logement.

I.- LE SURENDETTEMENT, UNE RÉALITÉ SOCIALE DE PLUS EN PLUS PRÉGNANTE

A. UN RECOURS CROISSANT AU CRÉDIT

Le recours global des ménages au crédit peut être mesuré à travers plusieurs indicateurs.

1. Un taux d’endettement croissant pour les ménages français

L’un de ces indicateurs est le taux d’endettement, qui rapporte les encours de crédits au revenu disponible. Comme on le constate sur le graphique ci-dessous, ce taux a presque constamment augmenté au cours des trente dernières années, passant de moins de 30 % à près de 75 %. Cette augmentation a été particulièrement vive durant les dernières années : le taux est passé de 65,6 % au premier trimestre 2006 à 74,6 % fin 2008 selon l’INSEE. Selon des données légèrement différentes publiées par la Banque de France, ce taux, qui se serait stabilisé au cours des derniers mois, serait de 74,5 % mi-2009. La forte augmentation du taux d’endettement dans la période récente semble principalement imputable aux encours de crédits immobiliers, qui ont accompagné la flambée des prix immobiliers.

Évolution du taux d’endettement des ménages français

(endettement rapporté au revenu disponible brut)

(en %)

Source : INSEE.

2. Une diffusion du crédit qui atteint un niveau élevé en 2007-2008

Le taux de recours au crédit, c’est-à-dire le pourcentage de ménages ayant des crédits en cours, constitue un autre indicateur pertinent. Comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous, issu du dernier rapport de l’Observatoire des crédits aux ménages, le taux de détention de crédits par les ménages s’est établi à 52,6 % en 2008, ce qui représente l’un des niveaux les plus élevés constatés par l’observatoire depuis 1989 (même si l’on observe d’importantes fluctuations sur le moyen terme, à la différence de l’indicateur du taux d’endettement, en presque constante hausse). Près de 14 millions de ménages ont des crédits en cours en 2008 ; 31,3 % (8,35 millions), un crédit immobilier ; 33,8 % (9,05 millions), un crédit à la consommation.

Taux de diffusion des crédits (de toutes natures) aux ménages français

Source : 21e rapport de l’Observatoire des crédits aux ménages, mars 2009.

3. En Europe, une position moyenne de la France dans la diffusion du crédit à la consommation

Une analyse comparative présentée il y a quelques années par la Banque de France montrait que les ménages français restaient, par rapport à ceux des pays voisins, assez peu endettés, puisqu’il en ressortait, en 2003, un taux d’endettement de 60 % en France contre plus de 100 % dans des pays tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni, voire 200 % aux Pays-Bas.

Taux d’endettement des ménages dans différents pays européens en 2003

(endettement rapporté au revenu disponible brut)

(en %)

Source : Bulletin de la Banque de France, n° 144, decembre2005.

Cette étude indiquait aussi qu’en Europe, le crédit à l’habitat restait prédominant (du moins en termes d’encours), représentant, en 2004, 61,1 % de l’endettement des ménages, contre 14,4 % pour le crédit à la consommation.

L’étude précitée relevait, selon des données portant sur le début des années 2000 (variables selon les pays), que près de la moitié des ménages britanniques (49,3 %) et seulement un peu plus du quart (27,7 %) des ménages français avaient recours au crédit à la consommation, tandis que le taux d’accès à un tel crédit était encore plus faible en Allemagne (15,8 %) et en Italie (10,1 %). Ces différences étaient particulièrement marquées pour les tranches d’âge les plus jeunes, avec pour les moins de 25 ans un taux de recours au crédit de 72,1 % au Royaume-Uni contre 25,9 % en France.

Par ailleurs, mais cela peut apparaître comme une contrepartie de la plus grande diffusion du crédit à la consommation, les montants moyens d’encours de cette nature apparaissaient plus faibles au Royaume-Uni (où les encours de moins de 2 500 euros concernaient 46,5 % des ménages ayant contracté un crédit à la consommation) et dans une moindre mesure en France (ce taux y étant de 37,1 %) qu’en Allemagne et en Italie (où le même taux était inférieur à 30 %). Enfin, dans les différents pays, on constatait que le crédit à la consommation concernait souvent des ménages assez aisés (le taux de recours atteint son maximum pour des revenus mensuels de 3 000 à 4 000 euros), même si c’était naturellement moins le cas que pour les crédits immobiliers, très fortement concentrés sur les populations les plus aisées.

L’analyse menée plus récemment sur le crédit renouvelable (« revolving ») par le cabinet Athling pour le Comité consultatif du secteur financier, à la demande du Gouvernement, tend à montrer que cette forme particulière et minoritaire de crédit à la consommation connaît en France un développement proche de la moyenne de la dizaine de pays européens étudiés : fin 2007, le crédit renouvelable représentait 20,3 % des encours de crédits à la consommation en France, contre 18,3 % dans la moyenne des pays étudiés ; l’encours moyen était de 1 105 euros dans notre pays contre 1 079 en moyenne dans l’échantillon de pays. Le graphique ci-dessous permet de constater la dispersion des situations en Europe et la position moyenne de la France.

Encours moyen de crédit renouvelable par ménage fin 2007

(en euros)

Source : rapport « Pour un développement responsable du crédit renouvelable en France », par Athling Management, décembre 2008.

B. UN DÉVELOPPEMENT DU CRÉDIT POURTANT FREINÉ PAR LE CADRE LÉGAL ET RÉGLEMENTAIRE ?

Les données présentées supra laissent apparaître une diffusion du crédit qui reste dans notre pays plus modérée qu’au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas, mais ne le place pas « à la traîne » de l’Europe. Cependant, selon les analyses de certains établissements de crédit, dans le cadre réglementaire et légal actuel, seuls 60 % des ménages français peuvent effectivement accéder au crédit, les autres s’en trouvant de fait écartés quand ils le sollicitent. En outre, 15 % des ménages (compris dans les 60 % susmentionnés) ne pourraient de fait accéder qu’aux formes de crédit renouvelable, non-amortissable. Cette situation serait imputable à plusieurs éléments de la réglementation actuelle :

● Le poids du coût de gestion unitaire, inévitablement lourd pour les crédits de faible montant, conduit nécessairement à des taux d’intérêt élevés sur ces crédits. Ce coût de gestion unitaire des dossiers est selon certains gonflé par l’absence de « fichier positif », c’est-à-dire de dispositif collectant l’ensemble des engagements de crédits pris par les particuliers (un tel dispositif permettant une information fiable et peu coûteuse des prêteurs sur la solvabilité des demandeurs de crédit).

● En l’absence de « fichier positif », non seulement le coût de gestion des petits crédits serait beaucoup plus lourd, mais l’impossibilité de s’assurer de manière certaine de la solvabilité des demandeurs conduirait à leur appliquer des scores de risque (se traduisant par une prime de risque plus ou moins grande dans le taux d’intérêt proposé) en fonction de catégorisations simplistes (de niveau de revenu, de statut d’emploi – emploi à duré indéterminée ou non –…) qui excluent de fait toute une partie de la population.

● Le système actuel de détermination des taux de l’usure, qui fixe, pour onze catégories différentes de prêts, ces derniers au taux moyen pratiqué le trimestre précédent pour chacune de ces catégories majoré d’un tiers, semble créer une ségrégation entre « bons » et « mauvais » crédits et repousser les emprunteurs à faibles revenus vers les « mauvais » crédits, en pratique notamment les crédits renouvelables et les découverts. En effet, à partir du moment où la concentration des « mauvais » risques sur un type de crédit y entraîne des taux moyens plus élevés, le taux maximal autorisé pour ces crédits est également plus élevé et les demandes de prêt qui, compte tenu de leur montant ou des caractéristiques des emprunteurs, impliquent un taux assez élevé ne peuvent légalement être satisfaites qu’en recourant à ce type de crédit. Ce système conduit ainsi aujourd’hui :

– à des taux moyens inférieurs à 5 % et donc des taux de l’usure inférieurs à 7 % pour les différentes formes de prêts immobiliers ;

– à un taux moyen de 6,9 % et un taux de l’usure de 9,2 % pour les prêts personnels (non immobiliers) de plus de 1 524 euros ;

– à des taux moyens supérieurs à 15 % et des taux de l’usure supérieurs à 20 % pour les prêts inférieurs à ce seuil, mais aussi pour les découverts, crédits renouvelables et crédits de financement d’achat même d’un montant supérieur.

C. DES DIFFICULTÉS CROISSANTES POUR FAIRE FACE AUX ÉCHÉANCES

La notion de surendettement peut être approchée de différentes manières.

● Une première approche consiste naturellement à examiner les données statistiques relatives à la procédure de surendettement (qui sera décrite infra). De la création de cette procédure en 1990 à fin 2008, près de 2,4 millions de dossiers de surendettement ont été déposés. Sur les cinq dernières années, de mi-2004 à mi-2009, on dénombre 937 000 dépôts (1), soit en moyenne 187 000 par an. Cependant, sur les douze derniers mois connus (juillet 2008-juin 2009), ce nombre a dépassé 205 000 ; par rapport aux douze mois précédents (juillet 2007-juin 2008), cela représente une augmentation de 13 %.

Au total, le nombre de ménages en cours de « désendettement », c’est-à-dire ayant bénéficié ou étant sur le point de bénéficier d’une mesure destinée à remédier à leur état de surendettement, est évalué par la Banque de France à environ 738 000 à la fin du mois de juin 2009.

L’endettement moyen par dossier déposé est, à fin juin 2009, de l’ordre de 40 000 euros. Il est à noter que ce montant est élevé par rapport à celui constaté dans d’autres pays ayant des procédures du même type : aux Pays-Bas il est de 22 000 euros et en Belgique de 15 000 euros. Cela semble constituer un indice d’une relative difficulté de notre pays à prévenir les situations de surendettement.

Les crédits immobiliers sont présents dans seulement 9 % des dossiers déposés en commission de surendettement, alors que les crédits sans échéance (crédits non affectés, renouvelables ou permanents, réserves de crédits...) le sont dans 86 %. Par ailleurs, le surendettement « passif » consécutif notamment aux accidents de la vie apparaîtrait désormais dans près des trois quarts des dossiers.

● Une autre approche, économique, s’efforce de quantifier les ménages en situation virtuelle de surendettement, même s’ils continuent à honorer leurs échéances et ne saisissent pas la commission de surendettement. Dans une enquête (2) déjà un peu ancienne (2003), les services statistiques du ministère des affaires sociales avaient relevé que 1,54 million de ménages étaient confrontés à un taux d’effort (rapport de leurs échéances à leur revenu) supérieur à 30 %, soit 16 % des ménages endettés à titre privé et 6,5 % de l’ensemble des ménages français. Ce seuil de 30 % est évidemment arbitraire. En retenant un seuil de taux d’effort de 40 %, on avait alors 550 000 ménages virtuellement surendettés, ce qui représentait 6 % des ménages endettés et 2,3 % de l’ensemble des ménages.

Une analyse plus précise des caractéristiques du 1,54 million de ménages présentant un taux d’effort supérieur à 30 % montrait sans surprise une surreprésentation – relative – parmi eux des foyers à revenus modestes. Cette analyse montrait surtout le poids de l’endettement immobilier dans les difficultés potentielles des ménages : 44 % de ces ménages avaient un endettement exclusivement immobilier et 46 % un endettement mixte, 10 % seulement ayant une endettement exclusivement non immobilier. En corrélation avec cette situation, on constatait donc parmi les ménages à taux d’effort élevé une surreprésentation de ceux d’âge moyen (30-50 ans : c’est la période où l’on s’endette pour acheter son logement), des propriétaires et même des ménages à patrimoine net plutôt élevé. Enfin, l’incidence des accidents de la vie (décès, séparation, perte d’emploi…) sur la probabilité d’avoir un taux d’effort élevé apparaissait faible.

Ces constats montrent donc une assez grande différence de caractéristiques entre les ménages objectivement très endettés, qui le sont surtout du fait d’emprunts immobiliers, et ceux qui ne peuvent faire face à leurs échéances et recourent à la procédure de surendettement, plus caractérisés par les accidents de la vie et/ou le crédit renouvelable.

● Une dernière approche met en avant la perception par les ménages eux-mêmes de leurs difficultés. L’Observatoire des crédits aux ménages a constaté que 2008 a été l’une des années où les charges de remboursement ont été perçues comme les plus lourdes : 50,9 % des ménages les ont considérées comme supportables ou très supportables (contre 52,9 % en 2006) ; 33,7 % comme élevées mais supportables (33,3 % en 2006) ; 10,5 % comme trop élevées (9,3 % en 2006) ; 4,9 % comme beaucoup trop élevées (4,5 % en 2006). Le graphique ci-dessous montre les difficultés croissantes rencontrées par les ménages dans le contexte économique actuel et la corrélation entre charges de remboursement élevées et sentiment de dégradation de la situation financière.

Appréciation des ménages sur le poids des charges de remboursement

Source : 21e rapport de l’Observatoire des crédits aux ménages, mars 2009.

II.- LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI PORTANT RÉFORME DU CRÉDIT À LA CONSOMMATION

Les mesures du présent projet de loi répondent, selon son exposé des motifs, à deux grands objectifs : « prévoir des garde-fous à l’entrée dans le crédit » ; « mieux accompagner les personnes qui connaissent des difficultés d’endettement ». La partie du texte dont s’est saisie pour avis votre commission des affaires sociales correspond pour l’essentiel au second de ces objectifs ; les mesures à cette fin, qui concernent la procédure de surendettement et le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), seront plus longuement développées dans le III du présent avis.

Cependant, les principales dispositions du texte qui concernent la réglementation du crédit à la consommation (par opposition au crédit immobilier, qui n’est que marginalement concerné) lui-même méritent d’être présentées. Ces dispositions s’inscrivent dans quelques grands axes : des emprunteurs mieux informés et mieux conseillés ; des organismes prêteurs plus responsables ; des formes de crédits plus diversifiées accessibles à tous.

Au préalable, il convient de signaler que ces dispositions ont aussi pour objet de transposer en droit national la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008 « concernant les contrats de crédits aux consommateurs », qui constitue un nouveau cadre juridique communautaire, cadre exigeant puisqu’il vise à une harmonisation « maximale » et non plus « minimale » dans cette matière. Applicable aux crédits de 200 à 75 000 euros autres, notamment, qu’immobiliers, hypothécaires ou gagés par le dépôt d’un bien (« Mont-de-piété »), cette directive comprend des prescriptions très précises en matière de règlementation de la publicité, d’information précontractuelle et contractuelle, d’obligation pour les prêteurs d’évaluer la solvabilité des emprunteurs potentiels, de délai de rétractation, etc.

A. ÉTENDRE LE CHAMP DES CONTRATS PROTÉGÉS PAR LA LOI

Le projet de loi comporte d’abord des mesures qui clarifient et étendent le champ couvert par des réglementations protectrices.

Conformément à la directive précitée, l’article 1er applique ainsi les règles de protection des emprunteurs prévues pour le crédit à la consommation (qui sont inscrites dans le code du même nom et modifiées par le présent projet de loi) aux prêts à la consommation d’un montant de 200 à 75 000 euros, contre 21 500 euros aujourd’hui.

L’article 18 vise, dans le même esprit, à définir des règles applicables aux opérations de regroupement de crédits antérieurs, notamment quand elles incluent à la fois des crédits à la consommation et des crédits immobiliers. La question se pose alors de savoir quelles règles légales doivent s’appliquer : celles afférentes au crédit à la consommation ou celles afférentes au crédit immobilier ? Le projet de loi prévoit la définition par décret en Conseil d’État d’un seuil de présence des crédits immobiliers dans l’opération, seuil qui déterminera la règle de droit applicable et donc les protections dont bénéficieront les emprunteurs.

B. MIEUX INFORMER LES EMPRUNTEURS

Le projet de loi comprend un ensemble très complet de prescriptions détaillées visant à garantir, à tous les stades, une information claire, précise, visible, exhaustive et non trompeuse des emprunteurs sur les crédits à la consommation qui leur sont proposés et qu’ils contractent le cas échéant.

1. Un encadrement strict de la publicité du crédit

L’article 2 du projet, tel que voté au Sénat, renforce l’encadrement (déjà important) des publicités pour le crédit à la consommation :

– en imposant que ces publicités comportent une mise en garde standardisée ;

– en y interdisant les mentions qui suggèrent qu’un crédit améliore la situation financière de celui qui le souscrit ou peut constituer un substitut d’épargne ;

– en y intégrant obligatoirement un exemple chiffré ;

– en précisant les informations qu’il est interdit de faire figurer en « petits caractères », afin notamment de mieux mettre en valeur le taux annuel effectif global par rapport à l’éventuel taux promotionnel qui s’applique dans un premier temps.

Afin d’être mieux identifiable, le « crédit renouvelable » sera obligatoirement désigné par cette formule dans tous les documents commerciaux et publicitaires (article 5).

2. Une distinction plus nette entre crédit et actes de commerce ou d’assurance

L’article 5 a notamment pour objet de mettre fin aux situations de « crédit malgré soi ». Ces situations peuvent résulter de la pratique actuelle de distribution de cartes ouvrant droit à des avantages commerciaux (cartes de fidélité) qui sont associées à une ligne de crédit renouvelable : certaines de ces cartes ne peuvent être utilisées qu’à crédit ; d’autres imputent systématiquement les achats effectués sur la ligne de crédit à défaut d’un choix explicite de paiement au comptant par le client.

Désormais, le bénéfice des avantages liés aux cartes de fidélité ne pourra être subordonné à un usage à crédit de ces cartes et celles-ci devront comporter une fonction de paiement au comptant. Leur utilisation à crédit sera subordonnée à l’accord exprès du titulaire lors de chaque achat ou à réception des relevés mensuels d’opérations ; c’est donc le paiement au comptant qui sera la règle par défaut. La commission spéciale du Sénat a précisé que cette règle vaudrait également pour les cartes bancaires auxquelles est associée une réserve de crédit renouvelable. En outre, toute publicité portant sur des avantages commerciaux promotionnels ouverts par une carte de fidélité devra indiquer si un crédit est attaché à celle-ci.

Dans le même esprit, le projet tend à mieux scinder le crédit lui-même de l’assurance qui peut l’accompagner. A ce titre, le texte fait une petite incursion dans la réglementation du crédit immobilier. Il établit, à son article 17, une liberté de choix des emprunteurs immobiliers en interdisant aux prêteurs d’imposer leur contrat d’assurance de groupe. Les emprunteurs seront en droit d’y substituer tout autre contrat présentant un niveau de garantie équivalent.

3. Des obligations d’information renforcées dans le contrat et en cours d’exécution de celui-ci

Les obligations d’information des emprunteurs sont également renforcées dans le cadre de la signature du contrat de crédit à la consommation et de son exécution :

– L’article 3 rend obligatoire la remise à l’emprunteur d’une fiche d’information précontractuelle qui sera standardisée.

– L’article 6 prévoit l’insertion d’un encadré récapitulatif des caractéristiques essentielles du crédit à la première page du contrat.

– L’article 7, tel que rédigé par le Sénat, impose que toute modification du taux d’un crédit à la consommation fasse l’objet d’une information préalable. De même, le montant de capital restant à rembourser devra faire l’objet d’une information annuelle, qui figurera, en caractères lisibles, sur la première page du relevé annuel. S’agissant des crédits renouvelables, les relevés mensuels devront, en outre, présenter une estimation du nombre de mensualités encore dues ; les informations les plus importantes, dont cette dernière, devront figurer en caractères lisibles en première page de ces relevés.

– L’article 12 renforce, quant à lui, la réglementation applicable aux découverts bancaires en instaurant : une obligation de relevé périodique de compte pour les découverts de plus de trois mois et d’information préalable sur les augmentations du taux appliqué ; des règles simplifiées d’information et de protection des titulaires de comptes, pour les découverts de un à trois mois, jusqu’à présent régis par la seule convention de compte ; l’obligation de mentionner sur tout relevé de compte, dès lors qu’un montant de découvert autorisé y est indiqué, le coût des agios.

Par ailleurs, l’allongement, par l’article 5, du délai de rétractation des emprunteurs de sept à quatorze jours accroîtra le temps laissé à ceux-ci pour « digérer » les informations qu’ils ont reçues dans les phases précontractuelle et contractuelle en pouvant éventuellement renoncer au crédit souscrit.

C. MIEUX CONSEILLER LES EMPRUNTEURS ET RESPONSABILISER LES ORGANISMES PRÊTEURS

Plusieurs mesures visent à responsabiliser les organismes prêteurs. Selon l’article 4 tel que voté au Sénat, le prêteur aura l’obligation de « vérifier » la solvabilité de l’emprunteur et de lui fournir « les explications lui permettant de déterminer si le crédit est adapté à ses besoins et à sa situation financière ». Il sera désormais tenu de consulter le FICP avant d’accorder un crédit.

Il est précisé, à l’initiative de la commission spéciale du Sénat, que lorsque le crédit sera proposé sur le lieu de vente, les explications sur le crédit seront données « dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges » ; cette prescription obligera dans les faits les enseignes commerciales à prévoir un espace dédié. De même, pour les crédits proposés sur les lieux de vente ou bien au moyen d’une technique de communication à distance (téléphone, Internet…), il est prévu obligatoirement une fiche de dialogue qui répertoriera les éléments relatifs aux ressources, aux charges et à l’endettement préexistant de l’emprunteur ; cette fiche sera signée ou authentifiée par l’emprunteur ; seules les informations y figurant « corroborées par des justificatifs » pourront éventuellement lui être opposées.

La commission spéciale du Sénat a également prévu que l’organisme prêteur sera responsable de la formation à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement des personnes agissant pour son compte ; ces personnes devront en outre être inscrites sur un registre.

D. OFFRIR À TOUS DES FORMES DE CRÉDIT DIVERSIFIÉES

Même s’il est actuellement en recul, le crédit renouvelable reste trop souvent, pour diverses raisons, la formule unique proposée pour certains types de crédits ou à certains groupes sociaux. Le projet de loi cherche à diversifier les formes de crédit offertes tout en améliorant le crédit renouvelable lui-même, qui devra comprendre un amortissement du capital.

1. Une réforme des taux de l’usure

L’article 1erA, consécutif à un amendement de la commission spéciale du Sénat, propose (après une période transitoire de deux ans où des mesures temporaires pourront être appliquées) une rénovation du calcul du taux de l’usure pour ce qui concerne les crédits non immobiliers aux particuliers : pour tous ces crédits, le taux de l’usure serait désormais déterminé seulement en fonction de leur montant, sans tenir compte de leur type. On constate aujourd’hui, en effet, un taux moyen de 6,9 % – et donc un taux de l’usure de 9,2 % – pour les prêts « personnels » de plus de 1 524 euros, mais un taux moyen de 15,15 % – et donc un taux de l’usure de 20,2 % – pour les prêts d’un même montant mais prenant la forme de découverts, de prêts permanents (revolving) ou visant à financer des achats ou des ventes à tempérament. La fusion de tous les types de crédit à la consommation, qu’ils soient amortissables ou renouvelables, dans un même ensemble pour lequel seront déterminés des taux de l’usure seulement par tranches de montant de crédit devrait accroître la concurrence, y compris à l’intérieur de chaque famille de prêts, et réduire le phénomène de renvoi systématique des « mauvais » risques sur le crédit renouvelable.

2. Des mesures pour généraliser les crédits amortissables

La commission spéciale du Sénat a inséré, à l’article 4, une disposition imposant, dans le cas où un crédit renouvelable est proposé sur les lieux de vente pour financer des achats, que soit également proposée une offre alternative de crédit amortissable (dès lors que le montant des acquisitions dépasse un seuil fixé par décret).

Afin de réduire les effets pervers du crédit renouvelable dans les cas où il sera toujours recouru à cette formule, il est par ailleurs prévu que chaque échéance d’un crédit de ce type devra désormais comprendre un remboursement minimum du capital, dans des conditions renvoyées à un décret (article 5).

3. La pérennisation et la redéfinition du fonds de garantie du micro-crédit

Le micro-crédit social constitue une autre alternative possible au crédit traditionnel. La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a institué un fonds public, dit fonds de cohésion sociale, destiné à garantir des prêts opérés à fins sociales, dont la gestion a été confiée à la Caisse des dépôts et consignations. Dans ce cadre se sont développées des expérimentations de micro-crédit social reposant sur des conventionnements avec les réseaux bancaires et les acteurs sociaux traditionnels tels que les centres communaux et intercommunaux d’action sociale.

Les premiers retours d’expérience collectés par l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS) portent sur un échantillon encore limité d’un millier de dossiers. Ils n’en sont pas moins intéressants :

– On constate que les demandeurs de micro-crédit sont en général des personnes a priori exclues du crédit traditionnel : ce sont plutôt des personnes vivant seules ; 57 % sont chômeurs ou bénéficiaires d’un minimum social et 24 % en contrat précaire ; leur revenu moyen est très faible (947 euros par mois). La mobilité (achat d’un véhicule, passage d’un permis de conduire…) est le premier motif des demandes (51 %), devant le logement (20 %), mais on relève aussi 9 % de demandes motivées par la volonté de racheter des dettes, alors que cet objet ne peut actuellement bénéficier de la garantie du fonds de cohésion sociale.

– Les micro-crédits qui ont effectivement été accordés sont d’un montant de 300 à 5 000 euros, avec une moyenne de 2 062 euros ; dans 95 % des cas, le taux d’intérêt demandé est inférieur ou égal à 4 %. Le taux de sinistralité (pourcentage de dossiers ayant fait l’objet d’impayés non régularisés) est pour le moment très faible : 1,86 %. Parmi les motifs de refus de prêt à un certain nombre de demandeurs, le fichage au FICP pour incident de paiement ou surendettement est fréquemment invoqué.

L’article 18 bis inséré par la commission spéciale du Sénat pérennise le fonds de cohésion sociale, qui devra être financé annuellement sur le budget de l’État. Il précise les prêts susceptibles de bénéficier de sa garantie : ceux « destinés à participer au financement des projets d’insertion accordés à des personnes physiques confrontées à des difficultés de financement, dont les capacités de remboursement de ces prêts sont jugées suffisantes par les prêteurs et qui bénéficient d’un accompagnement social (…) » ; ceux « alloués aux entreprises durant les cinq premières années suivant leur création ou leur reprise et n’employant pas plus de trois salariés ». Cette rédaction autorise enfin le fonds à prendre en charge non seulement les dépenses d’accompagnement des bénéficiaires des prêts, ce qui était déjà le cas, mais aussi les frais d’évaluation des opérations.

Dans l’optique de lutte contre le surendettement, on pourrait aussi s’interroger sur l’opportunité d’autoriser le fonds à garantir des prêts destinés à financer la restructuration de dettes préexistantes, ainsi que des prêts à des personnes inscrites au FICP, qui sont actuellement exclues de fait non seulement du crédit « normal », mais aussi du micro-crédit social (les établissements conventionnés refusant de même leurs dossiers). Par ailleurs, l’existence d’une garantie publique rend inutile les autres formes de garantie apportées par une caution ou la souscription d’une assurance : ne devrait-on pas prohiber les demandes complémentaires de cautionnement ou d’assurance dans le cas du micro-crédit garanti par le fonds de cohésion sociale ?

III.- LES DISPOSITIONS DONT LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES S’EST SAISIE POUR AVIS

La commission des affaires sociales s’est saisie du titre IV du présent projet (articles 20 à 27 quater), ainsi que de ses articles 29 à 32. Il s’agit des mesures réformant les procédures administratives et judiciaires de traitement du surendettement des particuliers ainsi que le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

A. RENDRE LES PROCÉDURES DE SURENDETTEMENT PLUS RAPIDES ET PLUS EFFICACES

1. Le dispositif actuel de traitement du surendettement

Le dispositif spécifique de traitement du surendettement a été créé par la loi n°89-1010 du 31 décembre 1989 relative à la prévention et au règlement des difficultés liées au surendettement des particuliers et des familles (dite « loi Neiertz »).

Cette loi ne remettait pas en cause les principes de la distribution du crédit, en particulier la liberté des ménages de recourir à l’emprunt et celle des établissements bancaires d’accorder ou non les concours sollicités, mais visait à traiter a posteriori les situations d’endettement disproportionné par rapport aux moyens des personnes concernées, en mettant en place une procédure administrative originale, confiée aux « commissions de surendettement des particuliers », sous le contrôle du juge, seul habilité dans l’ordre juridique classique à traiter des dettes privées et de leur remboursement. Cette procédure a été réservée aux particuliers, à l’exclusion donc des entreprises, y compris des entreprises individuelles ; la présence de dettes d’origine professionnelle empêche donc sa mise en œuvre.

Le dispositif a été progressivement renforcé :

– En 1995, les commissions de surendettement ont été chargées, en cas d’échec de la procédure amiable, de formuler des recommandations à l’intention des juges chargés de leur donner force exécutoire.

– En 1998, la faculté leur a été donnée de recommander, pour les débiteurs qui se trouvent dans une situation rendant vaine toute tentative d’élaboration d’un plan de redressement, des moratoires pouvant être suivis d’effacements partiels ou totaux des dettes.

– En 2003 a été instituée une procédure nouvelle, le « rétablissement personnel », destinée au traitement des situations les plus gravement compromises. Par ailleurs, les dettes fiscales, jusqu’alors exclues de la procédure de traitement du surendettement (et donc de tout aménagement), y ont été intégrées. En revanche, il a été interdit désormais aux commissions de formuler des recommandations d’effacement total des dettes.

– En 2005, il a été décidé de donner dans la procédure une priorité aux créances des bailleurs sur celles des établissements de crédit et celles afférentes à des crédits à la consommation.

– En 2007, le rétablissement personnel a fait l’objet d’aménagements législatifs visant à clarifier la position respective des différentes procédures et à faciliter le maintien des personnes dans leur logement.

– En 2008, la procédure de surendettement a été ouverte aux débiteurs dont le surendettement résulte de leur engagement de cautionnement ou d’acquittement solidaire des dettes d’une entreprise.

a) La composition de la commission de surendettement

La commission de surendettement constituée dans chaque département (au moins) est aujourd’hui composée :

– du préfet (président) ;

– du trésorier-payeur général (vice-président) ;

– du directeur départemental des services fiscaux ;

– du représentant local de la Banque de France ;

– d’un représentant des organisations de consommateurs (nommé par le préfet sur propositions des associations familiales ou de consommateurs agréées) ;

– d’un représentant des établissements de crédit et entreprises d’investissement (nommé par le préfet sur proposition de l’Association française des établissements de crédits et des entreprises d’investissement).

Depuis 2003, un juriste et un conseiller en économie sociale et familiale participent également à l’instruction des dossiers et assistent aux réunions de la commission avec voix consultative.

Le secrétariat est assuré par la Banque de France.

b) Le début de la procédure : recevabilité et orientation des dossiers

Au cours de la phase d’examen de la recevabilité des dossiers, la commission de surendettement vérifie que le demandeur en cause :

– se trouve bien dans l’impossibilité manifeste de faire face à ses dettes, selon la définition du surendettement donnée par le code de la consommation ;

– n’est pas endetté pour des raisons professionnelles (toutefois, lorsqu’un débiteur s’est porté caution d’un particulier ou d’une entreprise individuelle sans en avoir été le dirigeant, les dettes nées de son engagement peuvent être prises en compte dans la procédure) ;

– est de bonne foi.

Après avoir statué sur la recevabilité, la commission informe de sa décision le débiteur et l’ensemble de ses créanciers. Lorsque cela est nécessaire, la commission peut demander au juge de l’exécution de procéder à une suspension des voies d’exécution. En cas d’urgence, le juge peut être saisi directement par le préfet ou son délégué, le représentant de la Banque de France ou le débiteur lui-même.

Depuis 2003, une seconde étape consiste pour la commission, lorsqu’elle a admis la recevabilité du dossier, à décider vers quel type de procédure il doit être orienté. Cette orientation varie en fonction de la gravité de la situation de surendettement :

– lorsque le débiteur se trouve dans « l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir », le dossier est orienté vers la conclusion d’un plan conventionnel de redressement et, en cas d’impossibilité de trouver un accord, vers l’élaboration de mesures recommandées par la commission ;

– lorsque le débiteur se trouve dans une « situation irrémédiablement compromise », la commission peut, avec l’accord écrit du débiteur, transférer le dossier au juge de l’exécution en vue de l’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel.

c) La poursuite de la procédure administrative aux mains de la commission de surendettement

Dans le premier des deux cas de figure susmentionnés, la procédure reste conduite par la commission de surendettement.

Des dispositions procédurales permettent aux créanciers de faire valoir leurs droits. Ils sont informés de la décision sur la recevabilité et sont interrogés sur l’étendue et les caractéristiques de leurs créances de façon à établir avec précision l’état d’endettement du débiteur. Un appel aux créanciers peut être publié. La commission, d’elle-même ou à la demande du débiteur, peut saisir le juge de l’exécution afin qu’il procède à une vérification des créances. La commission peut également demander au juge de suspendre les procédures d’exécution.

Le secrétariat de la commission calcule la capacité de remboursement du débiteur en lui garantissant un reste à vivre, qui est déterminé par référence au barème des quotités saisissables sur salaires (fixé dans le code du travail) ; en outre, les sommes laissées au débiteur pour subvenir à ses besoins courants ne peuvent, en aucun cas, être inférieures au montant du revenu de solidarité active (RSA) dit « socle » (ex-RMI) et intègrent, dans la limite d’un plafond fixé par décret, le montant des dépenses de logement, d’électricité, de gaz, de chauffage, d’eau, de nourriture et de scolarité.

La commission élabore alors un plan de redressement qui est soumis à l’accord des parties. En cas de refus (d’un seul des créanciers), le débiteur peut demander que l’on engage une deuxième phase consistant, pour la commission, à « recommander » l’adoption de mesures de réaménagement du passif auxquelles le juge de l’exécution sera chargé de conférer force exécutoire après avoir contrôlé leur légalité ainsi que la régularité de la procédure.

Les mesures d’aménagement que peut recommander la commission sont les suivantes :

– le rééchelonnement des remboursements (dans la limite de dix ans de report et de la moitié de la durée initialement prévue de remboursement) ;

– l’imputation prioritaire des remboursements sur le capital ;

– la réduction des intérêts dus (à un taux inférieur ou égal au taux d’intérêt légal), par proposition « spéciale et motivée » ;

– la réduction voire la remise de la dette immobilière résiduelle après vente du logement, par proposition spéciale et motivée.

Les dettes alimentaires, les amendes et les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale ne peuvent faire l’objet d’aucun réaménagement.

La durée des recommandations ne peut excéder dix ans (sauf s’agissant d’emprunts relatifs à la résidence principale si la cession de celle-ci peut ainsi être évitée).

Au-delà des mesures d’aménagement susmentionnées, dans le seul cas où est constatée « l’insolvabilité du débiteur caractérisée par l’absence de ressources ou de biens saisissables de nature à permettre d’apurer tout ou partie de ses dettes » et rendant inapplicables ces mesures, la commission de surendettement peut recommander un moratoire de deux ans au plus, au terme duquel la situation sera réexaminée, ou bien directement, par une proposition spéciale et motivée, l’effacement partiel des dettes (jusqu’en 2007, cet effacement ne pouvait être prononcé qu’au terme du moratoire).

d) Le recours au juge : le rétablissement personnel

La procédure de rétablissement personnel, destinée aux situations « irrémédiablement compromises », peut être ouverte à l’initiative :

– de la commission de surendettement, avec l’accord du débiteur ;

– du juge de l’exécution, avec l’accord du débiteur, à l’occasion des recours exercés contre les décisions de la commission ;

– du débiteur lui-même, si la commission de surendettement n’a pas fait connaître au bout de neuf mois l’orientation qu’elle envisage de donner à son dossier.

Depuis 2007, la saisine du juge emporte suspension de toutes les procédures d’exécution, y compris celles d’expulsion du logement du débiteur, jusqu’au jugement d’ouverture.

Après sa saisine, le juge de l’exécution dispose d’un mois pour convoquer une audience d’ouverture de la procédure de rétablissement personnel. Le jugement d’ouverture entraîne, jusqu’au jugement de clôture, la suspension des procédures d’exécution diligentées par les créanciers, à l’exception de celles concernant les dettes alimentaires.

Un mandataire peut être désigné par le juge pour dresser un bilan de la situation économique et sociale du débiteur, après avoir vérifié les créances et évalué les éléments d’actif et de passif : les créanciers disposent de deux mois pour produire leurs créances et le mandataire d’un délai consécutif de quatre mois pour effectuer le bilan susmentionné.

Le juge prononce ensuite la liquidation judiciaire de l’intéressé et nomme un liquidateur chargé de vendre ses biens dans un délai de douze mois. Sont exclus de cette liquidation un certain nombre de biens : ceux qui sont insaisissables en vertu de la loi du 9 juillet 1991 (notamment les sommes et prestations à caractère alimentaire, les biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail du saisi et de sa famille sauf dans certains cas, les objets indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades…), les biens dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale et les biens non professionnels indispensables à l’exercice de l’activité professionnelle de l’intéressé. De fait, il n’y a donc pas de liquidation si le débiteur ne possède que ce type de biens. Le cas échéant, la procédure peut être close dès l’audience d’ouverture s’il apparaît manifestement que le débiteur se trouve dans cette situation.

Enfin, le juge prononce la clôture de la procédure, que les actifs réalisés aient ou non permis de désintéresser les créanciers. Dans ce deuxième cas, la clôture est prononcée pour insuffisance d’actif ; elle entraîne un effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, y compris les dettes fiscales, mais à l’exclusion des dettes alimentaires, des amendes et des réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale, ainsi que des dettes qui ont été réglées par un tiers caution ou le co-obligé (dans l’autre sens, il a été précisé en 2008 que le rétablissement personnel emportait l’effacement des dettes du bénéficiaire en tant qu’il s’est porté caution d’une entreprise).

e) Éléments sur l’activité des commissions de surendettement.

De juillet 2004 à juin 2009, d’après les données de la Banque de France, 793 000 dossiers ont été déclarés recevables, soit 85 % des 937 000 qui ont été déposés. Sur la même période, 453 000 plans conventionnels de règlement ont pu être conclus entre les débiteurs et leurs créanciers (ce qui correspond à 57 % des dossiers recevables), tandis que, dans les cas où aucune solution amiable n’a pu être trouvée, 158 000 recommandations ont été homologuées par les autorités judiciaires (20 % des dossiers recevables). 136 000 dossiers ont été orientés vers la procédure de rétablissement personnel avec l’accord des débiteurs concernés (17 % des dossiers recevables, ce taux montant à 22 % si l’on prend en compte seulement les douze derniers mois de la période). Le graphique ci-dessous rend compte de l’évolution de l’activité des commissions depuis leur création. Le nombre de dossiers déposés annuellement a augmenté assez régulièrement avant de se stabiliser autour de 180 000 depuis cinq ans.

Activité annuelle des commissions de surendettement

Source : Banque de France.

2. Les mesures du projet de loi

Le titre IV du présent projet de loi (à l’exception de son chapitre IV relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers) et une partie de son titre V, s’agissant de l’outre-mer, concernent les procédures de surendettement. Les mesures proposées s’inscrivent dans trois axes :

– améliorer la situation des personnes en procédure, avec de nouvelles modalités de détermination de leur « reste à vivre », plus d’accompagnement social et plus d’automaticité dans la suspension des procédures d’exécution à leur encontre ;

– accélérer et simplifier les procédures, notamment en réduisant certains délais et en limitant l’intervention systématique du juge quand c’est possible (et sans réduire les possibilités de recours devant lui contre les décisions administratives) ;

– améliorer la transparence du dispositif. Les commissions de surendettement auront un règlement intérieur public et rendront compte annuellement de leur activité.

a) Un calcul du « reste à vivre » plus transparent et plus adapté aux charges réelles des ménages

L’article 21 du présent projet de loi a plusieurs objets. Il modifie d’abord les règles de calcul du « reste à vivre » qui doit être laissé aux personnes dans le cadre d’un plan (conventionnel ou non) d’apurement. Actuellement, les pratiques des commission de surendettement apparaissent très diverses en matière de fixation de ce montant.

Le texte adopté par le Sénat ajoute, dans les dépenses qui doivent être prises en compte pour la détermination du reste à vivre, les « frais de santé » ainsi que les frais de garde (d’enfants) et ceux afférents aux déplacements professionnels ; le reste à vivre prendra donc mieux en compte ces dépenses obligatoires et parfois lourdes des ménages.

Par ailleurs, ce texte supprime le renvoi à un décret plafonnant les frais pouvant être intégrés au reste à vivre ; il est prévu que les conditions de prise en compte et d’appréciation de ces dépenses soient présentées dans le règlement intérieur de chaque commission, qui sera public, dans un cadre qui aura été fixé par voie réglementaire. La publicité qui sera donnée aux modalités de calcul du reste à vivre devrait permettre plus de transparence et d’équité, ainsi qu’une comparaison des pratiques des commissions, laquelle est le préalable nécessaire à une éventuelle harmonisation.

Enfin, il n’est plus prévu formellement d’« avis » du conseiller en économie sociale et familiale membre de la commission sur la fixation du reste à vivre, mais il est à noter que ce conseiller a par ailleurs obtenu voix délibérative dans les décisions de la commission. Il n’est plus non plus obligatoire de mentionner le montant du reste à vivre dans le plan conventionnel de redressement ou les recommandations de la commission, le Gouvernement ayant souhaité supprimer une obligation qui pouvait être source de contentieux.

b) Un délai plus court pour l’examen de recevabilité et l’orientation des dossiers

L’article 21 réduit également de six à trois mois la durée maximale de la première phase de la procédure de surendettement, durant laquelle la commission doit statuer sur la recevabilité du dossier et décider de son orientation entre une poursuite de la procédure administrative et un basculement sur la procédure judiciaire de rétablissement personnel. La conséquence du non-respect de ce délai reste la même que dans le droit en vigueur : durant les trois mois suivant son expiration, le taux de l’intérêt légal sera appliqué automatiquement aux emprunts en cours.

Dans la pratique, la durée moyenne de la phase de recevabilité-orientation est actuellement de six à huit semaines, la Banque de France s’étant engagée dans son contrat de service public pour 2007-2009 avec l’État à veiller à ce que ce délai moyen ne dépasse pas six semaines (ce qui n’exclut pas, pour les dossiers les plus complexes, des délais beaucoup plus longs).

La rédaction du projet de loi fait également mieux apparaître les deux moments successifs de cette première phase de procédure : décision sur la recevabilité du dossier, puis instruction, puis décision sur son orientation.

Le Sénat, à l’initiative de sa commission spéciale, a enrichi le texte sur plusieurs points. Il a notamment prévu :

– une information obligatoire des cautions éventuelles du demandeur sur l’ouverture de la procédure ;

– qu’à tout moment de la procédure, la commission puisse inviter le débiteur à solliciter une mesure d’aide, notamment une mesure d’accompagnement social personnalisé (MASP). Cette mesure vise à un meilleur traitement social du surendettement, même s’il n’existe toujours pas de dispositif spécifique d’accompagnement social des personnes en surendettement ;

– que la décision de recevabilité entraîne le rétablissement de l’aide personnalisée au logement, si elle a été suspendue, mais au seul profit du bailleur.

c) La suspension automatique des procédures d’exécution autres que d’expulsion

Dans le droit en vigueur, la suspension des procédures d’exécution n’est pas de droit en cas d’ouverture d’une procédure de surendettement : elle est prononcée, le cas échéant, par le juge de l’exécution sur requête de la commission de surendettement (ou en urgence du président de la commission, de son délégué, du représentant de la Banque de France ou du débiteur). Cette suspension dure jusqu’à l’approbation d’un plan de redressement conventionnel ou l’homologation des recommandations de la commission après échec de la procédure conventionnelle, sans pouvoir excéder un an.

L’article 21 rend automatique la suspension des procédures d’exécution portant sur les dettes autres qu’alimentaires au moment de la décision de recevabilité du dossier par la commission de surendettement.

Cette nouvelle règle ne concerne toutefois pas les mesures d’expulsion du logement. Dans le droit en vigueur, au demeurant, celles-ci ne peuvent être suspendues dans le cadre de la procédure de surendettement « simple » ; les mesures d’expulsion ne sont suspendues, de droit, qu’en cas de saisine du juge pour une procédure de rétablissement personnel. Le projet de loi dispose que désormais, la suspension des mesures d’expulsion pourra être demandée par la commission de surendettement au juge lorsque la situation du débiteur est « irrémédiablement compromise », c’est-à-dire également dans le seul cas où le dossier sera orienté vers un rétablissement personnel.

Par ailleurs, le Sénat a introduit une faculté pour la commission de surendettement, notamment à la demande du débiteur, de saisir le juge de l’exécution aux fins de suspension des procédures d’exécution avant même la décision de recevabilité.

d) La suppression de l’obligation d’homologation pour certaines des décisions de la commission de surendettement

Actuellement, lorsque sa mission de conciliation échoue (le plan conventionnel d’apurement élaboré ayant été refusé par l’une des parties), la commission de surendettement est chargée de « recommander » divers types de mesures d’apurement qui sont soumises à l’homologation du juge de l’exécution. Les articles 23 et 24 suppriment cette homologation dans un certain nombre de cas, ce qui peut être vu comme un renforcement substantiel des prérogatives de la commission, mais aussi et surtout comme une mesure de simplification et d’accélération des procédures : le juge n’interviendra plus systématiquement, mais les parties pourront toujours contester devant lui les décisions de la commission (qu’elles aient été « imposées » ou « recommandées » selon le texte issu du Sénat). Il convient d’observer qu’actuellement les refus d’homologation sont peu nombreux (environ 5 % des dossiers) et que les contestations sont également minoritaires (environ 15 %).

Le projet charge donc la commission de surendettement d’« imposer », et non plus seulement de « recommander » : les mesures de rééchelonnement de dettes ; celles d’imputation prioritaire des remboursements sur le capital ; celles de réduction des intérêts au taux de l’intérêt légal, voire à un taux plus faible ; enfin celles de moratoire (toujours pour deux ans au plus). Ces mesures n’auront plus à être homologuées.

En revanche, resteraient des mesures « recommandées » soumises à homologation du juge : les prescriptions au débiteur destinées à faciliter ou garantir le paiement de sa dette ; la réduction de la dette immobilière résiduelle après vente du logement ; l’effacement partiel des dettes. Dans la continuité du droit existant, les diligences du juge dans le cadre de l’homologation devront se limiter à un contrôle de « régularité », sauf s’agissant des mesures d’effacement de dettes, dont le juge continuera à vérifier également le « bien-fondé ». De même, les parties continueront à disposer de quinze jours pour contester devant le juge les recommandations et désormais les décisions de la commission de surendettement.

Cette réforme importante de la phase de la procédure concernant les plans d’apurement imposés s’accompagne d’autres aménagements des règles en vigueur :

– Le projet impose que désormais l’effacement partiel des dettes soit combiné avec les autres types de mesure (rééchelonnement, réduction de taux…), en réaction avec la pratique de certaines commissions de surendettement qui accorderaient des effacements quasiment intégraux de dette, alors même que l’effacement intégral, dans la logique du dispositif, ne peut résulter que d’une procédure judiciaire de rétablissement personnel.

– Les dettes honorées en lieu et place du débiteur par une caution ou un co-obligé sont actuellement écartées de l’effacement. Cette règle ne s’appliquera plus, selon le projet de loi, que s’il s’agit d’une personne physique, afin de mettre fin à un contournement de la loi qu’utilisaient des organismes de crédits : des filiales cautionnaient des crédits afin de pouvoir ensuite se retourner contre les débiteurs même en cas de procédure de surendettement.

– Enfin, on relève que la condition d’« insolvabilité du débiteur caractérisée par l’absence de ressources ou de biens saisissables de nature à permettre » l’apurement, qui était exigée avant un moratoire de deux ans ou un effacement partiel de dettes, est supprimée.

e) La création explicite d’une procédure allégée de rétablissement personnel sans liquidation

Ainsi qu’on l’a indiqué supra, la procédure de rétablissement personnel (PRP) est destinée aux situations « irrémédiablement compromises », cette procédure judiciaire pouvant seule conduire à l’effacement intégral des dettes. Le dispositif existant prévoit une liquidation des biens au cours de la procédure, dont sont cependant exclus les biens de base nécessaires à la vie quotidienne (biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail sauf s’ils sont de valeur, biens non professionnels indispensables à l’exercice de l’activité professionnelle de l’intéressé) et les biens sans valeur ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de cette valeur. De fait, les personnes concernées par la PRP ne possèdent souvent que ce type de biens. Afin d’accélérer cette procédure, le juge peut depuis 2007, dans ce cas de figure, la clore dès le jugement d’ouverture.

Les articles 25, 26 et 26 ter du projet de loi vont au bout de cette logique en distinguant explicitement une procédure avec liquidation (dans la continuité du droit en vigueur) et une procédure sans liquidation judiciaire destinée aux débiteurs qui ne possèdent que des biens meublants nécessaires à la vie courante, des biens non professionnels indispensables à leur activité professionnelle, des biens sans valeur marchande ou dont les frais de vente seraient disproportionnés.

L’entrée dans la procédure de rétablissement personnel relève, selon le projet, de la commission de surendettement ou du juge ; la faculté actuelle pour le débiteur de demander l’ouverture de la procédure si son dossier déposé en commission de surendettement n’a fait l’objet d’aucune décision d’orientation en neuf mois est supprimée.

Les conditions de mise en œuvre de la procédure sans liquidation judiciaire sont fortement simplifiées par rapport à la procédure actuelle : elle n’implique plus une procédure judiciaire classique, mais prendra la forme d’une « recommandation » de la commission de surendettement soumise à l’homologation du juge, qui lui donnera force exécutoire après en avoir vérifié la régularité, mais aussi le bien-fondé.

Dans la continuité du droit en vigueur resteraient écartées de l’effacement consécutif à un rétablissement personnel (avec ou sans liquidation) : les dettes professionnelles (les dettes nées du cautionnement par le débiteur d’une entreprise étant en revanche effaçables) ; les dettes alimentaires ; les dettes qui ont été payées en lieu et place du débiteur par une caution ou un co-obligé, le projet de loi y ajoutant l’obligation que ce dernier soit une personne physique (afin d’éviter des détournements de procédure par certains organismes de crédit ainsi qu’on l’a dit supra).

Il est également précisé que la clôture de la procédure vaut régularisation des incidents liés à l’absence de provision sur un compte bancaire (chèques sans provision).

Enfin, les règles existantes d’effacement des dettes fiscales s’appliqueront aussi bien à la procédure de rétablissement personnel avec liquidation qu’à celle sans liquidation (article 26 ter).

f) Les autres mesures relatives au traitement du surendettement

Les chapitres Ier à III du titre IV du projet de loi (articles 20 à 26 ter) comportent d’autres aménagements du dispositif de traitement du surendettement.

L’article 20 modifie la composition de la commission de surendettement en conséquence de la fusion au niveau départemental des direction des services fiscaux et de la comptabilité publique : le trésorier-payeur général et le directeur des services fiscaux, actuellement membres de droit de la commission, se voient substituer le responsable départemental de la direction générale des finances publiques chargé de la gestion publique. Il est en outre précisé que chaque commission devra adopter un règlement intérieur qui sera rendu public. Par ailleurs, il a été décidé, à l’initiative de la commission spéciale du Sénat, que les membres juriste et conseiller en économie sociale et familiale auront désormais voix délibérative.

L’article 26 bis, inséré par la commission spéciale du Sénat, dispose que chaque commission de surendettement doit produire un rapport d’activité annuel.

L’article 22 crée une nouvelle catégorie de dettes non susceptibles d’être effacées au cours de la procédure de surendettement, au même titre que les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires dues suite à une condamnation pénale et les amendes pénales : il s’agit des dettes contractées auprès des caisses de crédit municipal (qui en ont le monopole) en contrepartie du dépôt d’un objet en gage. Cette option, qui revient sur une jurisprudence récente de la cour d’appel de Paris, vise à préserver la spécificité du prêt sur gage, lequel exclut toute analyse de solvabilité de l’emprunteur, l’objet remis en gage constituant la garantie nécessaire et suffisante du prêt.

Le même article précise les conditions dans lesquelles la déchéance de la procédure de surendettement peut être prononcée. Cette déchéance est prévue dans le droit en vigueur pour fausses déclarations, production délibérée de documents inexacts, dissimulation de biens, souscription non autorisée de nouveaux emprunts durant la procédure et actes non autorisés de disposition du patrimoine durant celle-ci. Le texte précise que la déchéance est prononcée par la commission de surendettement ou par le juge de l’exécution et que, conformément à la jurisprudence, la décision de la commission est susceptible de recours juridictionnel.

Par ailleurs, les articles 29 à 32 du présent projet comprennent des dispositions relatives au traitement du surendettement outre-mer. Compte tenu du principe de spécialité législative applicable dans certaines collectivités, il est en effet nécessaire d’y prévoir explicitement l’application des mesures de la présente loi, ce qui est aussi l’occasion de mesures de coordination avec des lois antérieures, tout en tenant compte des délégations de compétence en matière législative au bénéfice de ces différentes collectivités.

Ces articles visent donc à :

– établir que la commission de surendettement de Guadeloupe restera compétente pour les résidents de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, bien que ces îles aient été érigées par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 en collectivités territoriales régies par l’article 74 de la Constitution. Par exception, les dispositions prévoyant un traitement des dettes fiscales aligné sur celui des autres dettes ne s’appliqueront pas dans ces îles ;

– donner une base légale à l’existence d’une commission de surendettement à Saint-Pierre-et-Miquelon ;

– actualiser (compte tenu des dispositions du présent projet mais aussi de diverses lois qui n’avaient pas été transposées) le traitement du surendettement à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. La Polynésie française étant compétente en matière de droit civil, seules lui seront étendues les dispositions relatives au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

B. REPENSER LES DISPOSITIFS DE CENTRALISATION DES INFORMATIONS SUR LES EMRUNTEURS

L’article 27 du présent projet de loi (complété au Sénat par les articles 27 ter et quater consacrés à des mesures connexes) modifie les modalités de fonctionnement du FICP. Par ailleurs, le Sénat a inséré un article 27 bis qui vise à ouvrir le débat sur ce qu’il est convenu d’appeler le « fichier positif », par opposition au « fichier négatif » qu’est le FICP.

1. Pour un fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) qui n’exclue pas

a) Les règles en vigueur

Le « fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels » (FICP) a été institué par la loi « Neiertz » du 31 décembre 1989 précitée, en même temps que la procédure de surendettement. Il s’agit d’un « fichier négatif », car il vise à informer sur les seules défaillances des emprunteurs. Géré par la Banque de France, il recense deux types de données :

– les « incidents de paiement caractérisés » sur le remboursement de crédits accordés à des fins non professionnelles à des particuliers (un règlement du Comité de la réglementation bancaire et financière définissant précisément quand les incidents de paiement peuvent être considérés comme « caractérisés ») ;

– les informations relatives aux personnes qui sollicitent la procédure de surendettement. Le dépôt d’un dossier de surendettement, puis les grandes étapes des procédures ultérieures, sont mentionnés au FICP.

La réglementation actuelle dispose que les données relatives à des incidents de paiement caractérisés restent inscrites au FICP jusqu’au remboursement intégral des sommes dues et durant 5 ans au plus, le prononcé d’un rétablissement personnel durant 8 ans, l’effacement partiel des dettes par la commission de surendettement durant 10 ans, les plans de redressement, conventionnels ou non, pour leur durée d’exécution sans excéder 10 ans. 4,13 millions d’incidents de paiement et de situations de surendettement étaient inscrits au FICP fin août 2009.

Le FICP est accessible aux seules personnes qui l’alimentent, essentiellement les établissements de crédit, et pas aux personnes qui y sont inscrites elles-mêmes. Sa consultation n’est pas obligatoire pour les établissements avant l’ouverture d’un crédit, mais apparaît assez systématique. On estime qu’il y a 1,3 milliard de consultations annuelles et le fait d’être inscrit au FICP est considéré comme interdisant pratiquement tout accès au crédit. Cette situation est d’autant plus dommageable que le fichier semble comporter de nombreuses erreurs.

b) Les mesures proposées

Le projet de loi, tel qu’amendé au Sénat, réécrit les dispositions législatives relatives au FICP, afin de répondre aux principales critiques à son encontre.

● Tout d’abord, il est proposé de définir – ou plutôt d’expliciter dans la loi, car l’objet du FICP n’a jamais été douteux – les finalités de ce fichier, afin de se conformer à l’article 6 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, selon lequel des données à caractère personnel ne peuvent être collectées que pour des « finalités déterminées, explicites et légitimes ». Il serait ainsi précisé, conformément à la pratique actuelle, que le FICP a pour finalité de fournir « un élément d’appréciation de la solvabilité des personnes qui sollicitent un crédit » aux établissements de crédits (et aux associations et fondations accordant sous certaines conditions des prêts pour la création et le développement d’entreprises ou la réalisation de projets d’insertion) ; le fichier pourrait également être un outil d’appréciation pour l’« attribution des moyens de paiement » (cartes, chèques), ce qui constitue une mission nouvelle, et plus généralement pour la « gestion des risques » liés aux crédits souscrits (dans le cadre des règles prudentielles qui imposent notamment aux banques des ratios de fonds propres différents selon le degré de risque de leurs crédits).

En vue de conforter la formule selon laquelle le FICP n’apporte que des éléments d’« appréciation » sur la solvabilité des personnes et de combattre la tendance à exclure par principe du crédit celles qui y sont inscrites, la commission spéciale du Sénat a souhaité disposer explicitement que « l’inscription d’une personne physique au sein du fichier n’emporte pas interdiction de délivrer un crédit ».

● Un deuxième élément essentiel de la réforme réside dans la réduction des durées d’inscription au FICP :

– de huit à cinq ans pour les procédures de rétablissement personnel et pour la « faillite civile » propre aux départements d’Alsace-Moselle (article 27 quater) ;

– de dix à cinq ans pour les plans conventionnels et les mesures imposées ou recommandées et homologuées, selon les cas de figure, par les commissions de surendettement, lorsque ces plans et mesures sont exécutés « sans incident ».

En outre, afin de plafonner effectivement les durées d’inscription à dix ans dans le cadre d’une même procédure, le projet de loi précise qu’en cas de succession d’un plan conventionnel (qui échoue) et de mesures décidées par la commission de surendettement, l’inscription sera « maintenue pendant la durée globale d’exécution du plan et des mesures sans pouvoir excéder dix ans ».

● Le projet apporte également des réponses aux critiques portant sur l’accès des personnes aux données les concernant, la correction des erreurs du fichier et les retards dans sa mise à jour.

Le texte issu du Sénat impose ainsi à la Banque de France l’inscription ou la radiation, selon les cas, des données dès réception des déclarations afférentes, ainsi qu’une mise à disposition des informations aux établissements ayant accès au fichier dans les mêmes conditions.

La protection des données du fichier contre toute diffusion de copie par la Banque de France ou les établissements qui y ont accès est maintenue avec la sanction pénale afférente (jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et/ou 300 000 euros d’amende). Cependant, il est proposé de supprimer le principe – contradictoire (3) – selon lequel cette règle s’appliquait même à l’encontre des personnes qui étaient l’objet de ces données lorsqu’elles exerçaient leur droit d’accès ; cette règle n’autorisait donc que la diffusion d’informations par oral ; les personnes devaient se déplacer à un guichet de la Banque de France. Désormais les personnes pourront recevoir un document écrit rendant compte de leur inscription au fichier ; le droit d’accès posé par l’article 39 de la loi « informatique et libertés » de 1978 précitée (et préalable au droit de rectification éventuelle) est donc consacré.

Par ailleurs, il est proposé que les conditions dans lesquelles la Banque de France et les établissements prêteurs informent les personnes de leur inscription au fichier et de leur radiation soient précisées par arrêté (cet arrêté pourrait prévoir des « courriers types »).

● Enfin, l’article 27 ter, inséré par la commission spéciale du Sénat, tend à établir, dans des modalités renvoyées à un texte réglementaire, une « traçabilité » des consultations du FICP par les établissements préteurs. Il s’agit d’une mesure de coordination avec l’obligation pour le prêteur, instituée par l’article 4 du présent projet, de consulter le FICP avant toute opération de crédit : il conviendra dès lors que les établissements puissent justifier du respect de cette prescription.

2. L’ouverture du débat sur le « fichier positif »

L’article 27 bis a été inséré à l’initiative de la commission spéciale du Sénat. Il prescrit, dans un délai de trois ans, le dépôt d’un rapport sur le « principe de la création d’une centrale des crédits aux particuliers » placée sous la responsabilité de la Banque de France. Ce rapport serait élaboré par la commission temporaire créée plus généralement pour l’évaluation de la loi issue du présent projet par l’article 33A, commission qui devra également rendre compte de la réforme du FICP (développée supra).

Il s’agit là du débat sur le « fichier positif », c’est-à-dire sur l’opportunité d’un outil recensant les emprunts contractés par l’ensemble des particuliers indépendamment des éventuels incidents de remboursement qui sont l’objet du FICP. Ce débat n’est pas nouveau et les clivages sur ce point dépassent les oppositions traditionnelles : les organismes prêteurs et leurs représentants aussi bien que les associations de consommateurs apparaissent divisés sur la question. Les associations d’aide aux personnes en difficulté se sont en revanche en majorité ralliées à l’idée d’un fichier positif.

● Les partisans du fichier positif font valoir plusieurs arguments (déjà évoqués supra), qui convergent sur un élargissement de l’accès au crédit, notamment des plus modestes, associé à une meilleure prévention du surendettement :

– Tout d’abord, une meilleure appréciation de la solvabilité des demandeurs de crédit déboucherait sur une diminution des incidents de crédit et des situations de surendettement.

– En offrant une information peu coûteuse sur le niveau d’endettement des demandeurs de crédit, qui est le principal déterminant d’éventuels problèmes de remboursement, un tel fichier réduirait massivement les frais fixes de constitution des dossiers. Ces frais fixes pèsent particulièrement sur les crédits de faible montant, dont ils expliqueraient les taux d’intérêt actuellement prohibitifs. Or, les crédits de faible montant concernent plutôt, a priori, les ménages aux revenus les plus modestes.

– L’information fournie par un tel instrument est également fiable. Actuellement, les personnes à faibles revenus ou à statut professionnel instable se voient appliquer systématiquement des « primes de risque » élevées dans les taux d’intérêt qui leur sont demandés. Un fichier positif permettrait de mieux évaluer individuellement la solvabilité des demandeurs, étant admis que le risque de défaillance est certes plus élevé pour certains niveaux de revenu, mais que l’immense majorité des crédits sont de toute façon remboursés quel que soit ce niveau. Les taux d’intérêt demandés à la plupart des foyers modestes baisseraient donc.

– Les prêteurs seraient plus responsabilisés, mais aussi les emprunteurs, qui pourraient être mis en garde sur leur situation réelle. A contrario, le fonctionnement actuel du FICP peut pousser des personnes menacées d’y être inscrites à souscrire de nouveaux crédits pour rembourser sans incident les précédents, entretenant ainsi une spirale d’endettement…

– La concurrence serait plus importante sur le marché du crédit – les réseaux en place perdant l’avantage concurrentiel que représentent les fichiers internes dont ils disposent sur leur clientèle –, avec en principe des conséquences favorables aux consommateurs.

● Les opposants au fichier positif mettent également en avant des arguments qui méritent d’être pris en compte :

– Tout d’abord, l’atteinte à la vie privée que représenterait ce fichier peut être considérée comme disproportionnée par rapport à son intérêt. Faut-il ficher 15 millions de ménages ayant actuellement un crédit pour éviter quelques milliers ou dizaines de milliers de cas annuels de surendettement ? Au regard des problèmes d’homonymie que rencontre déjà la mise en œuvre du FICP, un fichier aussi énorme qu’un fichier positif imposerait sans doute d’établir un numéro national d’identification des personnes « tous usages » (ou plutôt d’accepter que le numéro de sécurité sociale soit utilisé à toutes fins), option jusqu’à présent repoussée.

– En effet, la majorité des situations de surendettement est liée aux « accidents de la vie », qu’un fichier positif ne pourrait évidemment prévenir.

– Quelles que soient les précautions prises, il y aurait évidemment des risques en matière de protection des données personnelles.

– De même, quelles que soient les précautions juridiques, pourrait-on éviter que l’existence d’un tel outil à la disposition des organismes de crédit n’entraîne une multiplication des sollicitations commerciales visant à « saturer », en montant de crédits par rapport à leur capacité d’endettement, la grande majorité des ménages qui ne sont que faiblement ou modérément endettés ? Le fichier positif peut être un outil efficace de diffusion du crédit à la consommation, mais est-ce nécessairement une bonne chose ?

– Les mesures du projet de loi, d’une part pour mieux encadrer le crédit, d’autre part pour dynamiser le FICP (obligation de consultation, mise à jour en temps réel), permettraient déjà de substantiels progrès dans la prévention du surendettement.

– Un tel instrument serait naturellement coûteux (ce coût étant répercuté sur celui du crédit).

– On peut même s’interroger sur sa faisabilité. Ne devrait-il pas comprendre, pour permettre une véritable évaluation de la capacité d’endettement, des données sur les revenus des ménages, au-delà de leurs crédits, ce qui le rendrait encore plus gigantesque et attentatoire à la vie privée ? Par ailleurs, comment prendre en compte en temps réel le niveau d’endettement des titulaires de crédits renouvelables ou d’autorisations de découvert, qui varie constamment ? S’il fallait prendre en compte pour ces personnes leur seul plafond autorisé, ce qui peut aussi être justifié intellectuellement, cela conduirait à ficher plusieurs millions de ménages supplémentaires, soit tous ceux qui disposent d’autorisations de découvert ou de lignes de crédit (associées à une carte) qu’ils n’utilisent pas. La question de l’inscription des dettes autres que consécutives à un crédit se poserait également : dettes alimentaires, dettes privées (dans le cadre familial), cautionnements donnés, voire impayés de loyer, de factures d’eau, d’électricité ou de téléphone…

● Les expériences étrangères doivent être prises en compte. Des fichiers positifs existent dans la majorité des pays européens (notamment l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni), tenus d’ailleurs le plus souvent par des organismes privés.

L’exemple de la centrale des crédits mise en place en Belgique en 2003 est souvent cité, car il s’agit d’un fichier institué par la loi et confié à un organisme public (la banque centrale), ce qui serait aussi le cas en France si un tel fichier y était créé ; les organismes prêteurs doivent le consulter avant tout octroi de crédit et il ne peut être utilisé à des fins commerciales. Depuis la création de cet outil, on constate, d’après les données de la Banque nationale de Belgique, une diffusion significative du crédit, la part de la population majeure ayant au moins un crédit en cours étant passé de 52 % à 56 % de 2003 à 2007, ainsi que (du moins avant la crise financière) une diminution du nombre de contrats de crédit connaissant une défaillance, la proportion de contrats enregistrés comme « défaillants » étant passé de 7,6 % à 6,3 % de 2004 à 2008. Si l’on rentre plus dans le détail, on constate que cette diminution des défaillances est principalement concentrée sur les ventes à tempérament, c’est-à-dire les crédits affectés au financement d’un bien, et dans une moindre mesure sur les crédits immobiliers ; il y a en revanche peu d’évolution sur les ouvertures de lignes de crédit : ce constat semble justifier des analyses complémentaires. Par ailleurs, d’autres données sont nettement moins satisfaisantes : ainsi le nombre de personnes enregistrées (leurs dossiers ayant été déclarés admissibles et non radiés) comme en cours de « procédure en règlement collectif de dettes » (l’équivalent de la procédure de surendettement) a-t-il été multiplié par 2,2 de fin 2003 à fin 2008. Le bilan à tirer de l’expérience belge est donc controversé.

En fin de compte, il apparaît qu’un fichier positif serait un instrument efficace de plus grande diffusion du crédit, notamment vers les catégories sociales modestes. En revanche, l’effet de prévention du surendettement est plus incertain et les enjeux de libertés publiques sont réels. Au-delà de l’exemple belge généralement invoqué, l’analyse des multiples expériences étrangères mérite manifestement d’être poursuivie et approfondie. L’option retenue par le Sénat apparaît donc raisonnable, sous réserve d’une réduction du délai, très large, laissé pour la réalisation de l’étude prévue.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires sociales examine pour avis, sur le rapport de Mme Valérie Rosso-Debord, le projet de loi, adopté par le Sénat, portant réforme du crédit à la consommation (articles 20 à 27 quater et 29 à 32) au cours de sa séance du mercredi 2 décembre 2009.

Un débat suit l’exposé de la rapporteure pour avis.

M. Christophe Sirugue. Ce projet de loi améliore la situation du consommateur sous différents aspects : d’abord, il augmente la qualité de l’information contractuelle et précontractuelle ; ensuite, l’information sera plus transparente s’agissant des taux fixes et variables ; il faudra d’ailleurs porter une attention particulière à la notion de comparabilité des taux.

Sur tous ces points, les choses vont donc dans le bon sens.

Néanmoins, la problématique du crédit ne doit pas masquer la réelle difficulté à laquelle sont aujourd’hui confrontés nos concitoyens, qui est celle de l’insuffisance des revenus. Car si nos concitoyens sont obligés de recourir au crédit pour accéder à certains biens de consommation, c’est bien que leurs revenus sont insuffisants. Par ailleurs, s’agissant du surendettement, il faut bien distinguer les personnes qui se retrouvent dans cette situation à cause d’un accident de la vie, par exemple un divorce ou la perte d’un emploi, et celles qui abusent des dispositifs de crédits ou plutôt qui se font abuser par des perspectives d’argent facile.

Ceci étant, il manque des éléments importants dans ce texte. D’abord concernant la question du « reste à vivre ». Certes, le texte contient des évolutions bienvenues, mais il me semble indispensable de prendre en compte le lieu de vie pour évaluer ce « reste à vivre » : celui-ci ne peut être le même selon que l’on vit en région parisienne ou, par exemple, à Château-Thierry. Par ailleurs, il n’est pas acceptable qu’existent encore des taux d’usure de près de 20  %. Un tel niveau empêche nécessairement le remboursement et aboutit forcément à un surendettement. Des taux de 8 à 10  % doivent suffire, pour les sociétés financières, à couvrir leurs risques. Enfin, il est essentiel de pouvoir rembourser une part importante du capital dès le début de la phase de remboursement.

Trois questions subsistent et devront être débattues. Concernant le crédit revolving, celui-ci n’est aujourd’hui pas intégré dans le fichier national des incidents de remboursements des crédits aux particuliers, en raison de sa mécanique même. Cette dernière est intrinsèquement négative et il est nécessaire d’abroger ce dispositif. Par ailleurs, le crédit revolving pourrait utilement être remplacé par le crédit social, qui est aujourd’hui mis en place par de nombreuses collectivités locales, de droite comme de gauche. Il est vraiment dommage que le texte ne consacre pas cette notion de crédit social. Enfin, s’agissant de la problématique du fichier positif, tout dépend de ce que l’on met derrière ces mots : si ce fichier couvre vingt millions de personnes et est accessible à l’ensemble des sociétés financières, cela constituerait une grave atteinte à la vie privée et serait inacceptable. Si en revanche, le fichier est géré par la Banque de France et que la procédure de consultation est suffisamment encadrée, par exemple sur le modèle de la délivrance d’une attestation de casier judiciaire, un tel fichier pourrait être utile. Il importe donc de clarifier, autant que possible, les termes du débat.

M. Yves Bur. Il faut souligner les avancées apportées par le projet de loi sur le sujet de la réforme du crédit à la consommation dont on parle depuis longtemps. Il s’agit de mieux protéger, par une meilleure information et une plus grande transparence, les Français victimes des crédits à la consommation parce qu’ils en abusent. Le texte clarifie utilement la question des taux fixes et des taux variables, que même les élus locaux ont, semble-t-il, parfois du mal à comprendre, comme en témoigne les « emprunts toxiques » souscrits par certaines collectivités locales.

Si le crédit à la consommation est certes indispensable à la croissance, on doit néanmoins se poser la question de savoir si on ne fait pas une part trop belle aux établissements de crédit. Il est par ailleurs urgent, au regard du faible taux d’endettement des ménages français par rapport à ceux des pays voisins, de rattraper les niveaux d’endettement européens.

Il faut regretter que la question du taux d’usure ne soit pas réglée et que les organismes de crédit vont en définitive continuer à financer leurs sinistres à travers des taux élevés. Or, des taux de 21 % sont véritablement inacceptables et on aurait pu être plus offensif sur ce point.

S’agissant du crédit revolving, qui peut certes être utile s’il est utilisé sur une période limitée, il sera bien entendu au cœur des débats. C’est, en effet, le cœur de cible de tout vendeur de crédit. Sur ce sujet, je regrette que les propositions de certaines associations d’interdire la vente simultanée d’un produit de consommation et d’un crédit revolving n’aient pas été suivies. Les débats lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale ont pourtant mis en lumière que les modes de rémunération versées aux vendeurs par les organismes de crédit les encouragent à faire du chiffre au détriment des consommateurs. C’est pourquoi je reste réservé sur les options retenues par le texte en matière de crédit revolving.

La question de la création d’un fichier positif, où seraient recensés tous les engagements souscrits par des particuliers en France, doit être abordée sous un angle éthique, notamment pour ce qui concerne les garanties de confidentialité. Je note qu’on avance aussi trop souvent l’argument de difficultés techniques pour s’opposer à sa création, alors que les systèmes de contrôle mis en place pour les chèques, qui prennent à peine deux minutes, démontrent s’il en était besoin que cet argument n’est pas recevable. S’il est essentiel de mieux protéger les victimes de conditions de crédit mal maîtrisées, j’aurais personnellement souhaité que le projet de loi aille plus loin dans cette voie.

M. Jean-Pierre Door. Je tiens à remercier la rapporteure pour son travail très intéressant et bien documenté. J’ai observé avec intérêt que les dossiers liés à l’immobilier ne représentaient seulement que 9 % des dossiers de surendettement et je dois dire que j’ignorais que la France se plaçait en si bonne position en matière d’endettement par habitant. Le projet de loi, qui nous est présenté, est un texte utile dans la mesure où le surendettement n’arrive pas qu’aux autres. Mais, on peut se poser la question de savoir s’il va suffisamment loin. Sur la question des crédits revolving, véritables châteaux de cartes qui finissent un jour par s’effondrer et dont chacun a de multiples exemples autour de soi, le projet de loi demeure encore trop timide. Je regrette, par ailleurs, que la question des prêts relais qui, sauf erreur n’est pas évoquée dans le texte, ne soit pas mieux traitée dans la mesure où ceux-ci exposent souvent l’emprunteur à des taux élevés, lorsqu’il ne réalise pas rapidement son bien. S’agissant de la création d’un fichier positif, je partage la position de la rapporteure et du Sénat sur l’utilité de faire établir, par le Gouvernement, un rapport sur le principe de la création d’une centrale des crédits aux particuliers. Face à la situation de personnes socialement fragiles qui se laissent embarquer dans la logique des crédits revolving, il est enfin important de réviser les taux d’usure afin de les fixer à un niveau supportable.

M. Maxime Gremetz. Je rappellerai tout d’abord que ce projet de loi de réforme du crédit à la consommation résulte de la nécessité de transposer rapidement en droit national une directive communautaire. C’est donc l’Europe qui nous impose ce texte ; il n’y a là aucune bonne volonté de la part du Gouvernement ! Toutes les expériences prouvent clairement que les personnes qui ont recours au crédit revolving demeurent endettées pour toute leur vie. Il faut rappeler que, si les gens aisés ne recourent pas à ce type de crédit, il y a 7,5 millions de pauvres dans notre pays. Il y a fort à parier que de nombreuses mères de famille, notamment dans les familles monoparentales, auront recours à Noël au crédit revolving pour acheter des jouets à leurs enfants et ne pourront plus rembourser le capital par la suite. Ce qui conduit au surendettement, c’est le fait d’utiliser des gens sans ressource pour leur faire souscrire des crédits, même s’ils en ont déjà cinq ou six. Force est de constater que rien ne figure dans le projet de loi pour mettre fin à cette situation. J’avais personnellement déposé une proposition de loi relative à la question des taux variables. L’absence d’explications suffisantes des emprunteurs en la matière les oblige souvent à vendre leur maison par la suite.

Mme Marisol Touraine. J’ai bien entendu que la Commission des affaires sociales ne s’était saisie pour avis que de certains articles du projet de loi, mais il n’est pas possible de se désintéresser de la question du crédit revolving et il faut regretter que le texte n’aille pas plus loin dans son encadrement. Il a été répondu à Christophe Sirugue que le projet de loi prévoyait la possibilité de rembourser, dès le début du crédit, non seulement les intérêts mais également une partie du capital. Or, le texte renvoie en fait cette possibilité à un simple décret et j’estime que ce point aurait dû être précisé au niveau législatif.

S’agissant du taux d’usure, et même si j’ai bien noté que cet aspect du projet de loi ne relevait pas directement de notre commission, il est essentiel de mieux informer les emprunteurs et d’harmoniser les taux qui restent aujourd’hui variables suivant les types de crédits et les établissements concernés.

Je regrette, par ailleurs, l’absence dans le projet de loi de toute référence à la mise en place d’un crédit social. Je ne parle pas uniquement des micro-crédits qui peuvent être pratiqués avec des mensualités certes faibles mais avec des taux se situant entre 15 et 20 %. Il est essentiel de réfléchir à la création d’un crédit social avec un taux faible qui serait réservé à une population d’emprunteurs rencontrant de grandes difficultés. L’absence de toute référence à ce type de crédit social dans le projet de loi manque cruellement.

Il faut enfin permettre au consommateur d’être mieux informé et de se défendre. Or, l’absence de tout mécanisme de recours collectif est une réelle lacune, dans la mesure où ce sont bien souvent les plus fragiles qui ont le moins les capacités de recourir à la justice. Il faut regretter à ce sujet que la majorité actuelle refuse toujours d’inscrire dans notre droit la notion de « class action » ou action de groupe.

M. Bernard Perrut. Il s’agit d’un texte important, qui vise à répondre aux difficultés réelles de nos concitoyens et constitue une nouvelle étape dans la prévention du surendettement. Mais ce texte va-t-il assez loin ? Pour ma part, j’attendais des réponses peut-être plus fortes.

Selon la Banque de France, les flux nets des emprunts bancaires des ménages s’élèvent, en 2008, à 65,3 milliards d’euros. Quant au rapport entre la dette des Français et leur revenu disponible, il est encore en augmentation pour atteindre 74,4 % fin 2008. Au total, le surendettement touche avant tout les plus modestes : 53 % des personnes concernées sont des employés ou des ouvriers, 36 % des demandeurs d’emploi, et 92 % de ces personnes ne disposent d’aucun patrimoine immobilier. Par ailleurs, si pour 25 % des victimes de surendettement, celui-ci trouve son origine dans des situations de crédit excessif, de mauvaise gestion ou d’excès de charges, restent aussi l’ensemble des autres situations. Chaque année, ce sont bien 50 000 ménages pour lesquels il pourrait être possible de trouver des solutions.

Naturellement, ce projet de loi a bien des vertus, qu’il s’agisse de l’encadrement des conditions de publicité du crédit à la consommation, des mesures incitant les ménages à la réflexion avant de s’engager dans un crédit ou encore de la responsabilisation des établissements de crédit.

De fait, il y a une véritable difficulté des ménages pour appréhender les différents mécanismes de crédit. Il n’existe aujourd’hui aucune information standardisée en cette matière : il serait opportun de clarifier le langage utilisé – on évoque indifféremment les réserves d’argent, les comptes disponibles, le crédit renouvelable,… En outre, on fait croire aux consommateurs que les opérations consistant à regrouper différents crédits conduiront à une amélioration de leur situation. Autre sujet : la multiplicité des cartes de différentes natures – cartes de crédit, de fidélité ou encore de paiement – , qui accroît d’autant cette insuffisance de lisibilité.

Les sénateurs ont tenté de défendre une vision plus ambitieuse de ce projet de loi en avançant un certain nombre de propositions complémentaires, mais ils n’ont pas toujours été entendus. En réponse, la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi a défendu devant le Sénat la thèse selon laquelle il faut préserver un équilibre entre le maintien et l’assainissement des dispositifs de crédit à la consommation et la protection du consommateur.

Pour ce qui concerne le fichier positif, celui-ci est indispensable, dans la mesure où il est susceptible d’apporter des garanties importantes, au profit d’une meilleure protection des consommateurs. La Fédération bancaire française se dit opposée à ce fichier. Qu’en pense notre rapporteure pour avis ? Un tel fichier serait-il vraiment inefficace ?

S’agissant de la question spécifique du taux d’usure, il faut à l’évidence aller plus loin également, pour interdire les pratiques conduisant à des taux atteignant 20 %.

Au final, sur l’ensemble de ces sujets essentiels, le présent projet de loi constitue une avancée indéniable, qui reste cependant insuffisante. Parce qu’il s’agit d’un enjeu de société, il est indispensable de tout mettre en œuvre pour protéger nos concitoyens : à tout moment, chacun d’entre nous peut, en effet, être concerné par le surendettement.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Ce projet de loi constitue une avancée que l’on peut qualifier d’insuffisante. L’endettement des ménages est la conséquence désastreuse de la diffusion massive des crédits renouvelables, aux effets qui peuvent être dramatiques. Il concerne avant tout les consommateurs les plus fragiles. Ces crédits assurent le financement d’achats courants, ou encore d’achats effectués par des personnes rencontrant des difficultés financières passagères : du malendettement, on passe rapidement au surendettement. De manière générale, ces crédits visent à pallier des difficultés de trésorerie et doivent être mis en relation avec l’insuffisance du pouvoir d’achat des personnes concernées.

Une enquête menée récemment dans mon département, la Nièvre, a montré, s’agissant de produits d’équipement domestiques d’une valeur de 1 200 à 2 500 euros, pour lesquels des taux de crédit de l’ordre de 9 % seraient appropriés, que : 75 % des distributeurs ont orienté les acheteurs vers un crédit revolving ; 25 % des établissements n’ont délivré aucune information sur les modalités du prêt (coût total, taux à long terme) ; 50 % d’entre eux n’ont procédé à aucune vérification de la solvabilité de l’employeur. Cette même enquête a, de manière générale, révélé une difficulté concernant les modalités de publicité de la délivrance des crédits.

Pour l’ensemble de ces raisons, il est indispensable d’aller plus loin, tant il est vrai que les modalités de communication sur les crédits sont trompeuses, voire agressives, s’apparentant à de véritables pratiques de harcèlement. Les taux présentés sont alléchants. Mais au final, les ménages, en particulier lorsqu’ils sont soumis à des aléas de la vie, sont les premiers pénalisés. La publicité réalisée doit être dénuée de toute ambiguïté. Un crédit renouvelable, ce n’est pas anodin, ce n’est pas un complément de revenu, ce n’est pas aisément remboursable. Encore une fois, il est vraiment important de poursuivre les efforts sur cette question d’une meilleure information des consommateurs. De ce point de vue, le présent projet de loi aurait dû aller plus loin et ne constitue donc qu’une étape.

M. Dominique Dord. Je tiens avant tout à souligner la qualité du travail de notre rapporteure. Pour autant, il est difficile de comprendre que pour une seule raison tenant au champ de la saisine de notre commission, nous ne puissions traiter la question du taux d’usure. Car il s’agit là, peut-être, de l’arme principale : comment accepter des taux de l’ordre de 20 %, alors que les taux à court terme régulièrement pratiqués sur les marchés sont bien inférieurs ? Si l’on ne traite pas cette question, on passe à côté de l’objectif principal du projet de loi, qui constituera au demeurant de toute façon une avancée.

M. Paul Jeanneteau. S’agissant de la mise en œuvre du fichier positif, je comprends bien les arguments mis en avant par les opposants à ce fichier, rappelés par notre rapporteure. Je pense notamment au risque d’atteinte à la vie privée. Cependant, sur une telle question, il est possible pour la Commission nationale de l’informatique et des libertés de faire un certain nombre de recommandations. Les associations de consommateurs insistent sur le fait qu’il faut travailler le sujet. On ne peut attendre l’accord des organismes prêteurs !

Le Sénat a posé une option raisonnable, visant à ce que puisse être étudié l’impact de la création du fichier positif. Je fais confiance à notre rapporteure pour qu’elle veille à ce que cette option ne reste pas lettre morte. Il est très important de mettre fin aux pratiques selon lesquelles, un samedi après-midi, un crédit renouvelable est attribué à un taux démesuré sans aucune procédure de contrôle, alors que, dans le même temps, deux pièces d’identité sont demandées à une personne procédant au règlement d’un achat par chèque dans le même établissement !

Cette question doit être liée à celle des taux d’usure. Notre rapporteure évoque le taux moyen de 15,15 % et rappelle que le taux d’usure atteint 20,2 % pour les prêts prenant la forme de découverts ou de prêts permanents. Ces taux excèdent très largement les taux pratiqués sur les marchés financiers. En outre, ces pratiques touchent le plus souvent des personnes dont les ressources sont très faibles.

Même si les organismes prêteurs n’ont pas, dans ces conditions, nécessairement intérêt à la mise en place d’un fichier positif, il faut aujourd’hui s’atteler à cette question du taux d’usure et procéder au plafonnement des taux des prêts accordés, sans quoi l’on passe à côté d’une réforme législative importante.

(M. Pierre Morange succède à M. Pierre Méhaignerie à la présidence de la séance)

M. Jacques Domergue. On peut comprendre l’importance du sujet que nous abordons ce matin au regard de l’impératif plus général d’une relance de notre économie : comment trouver le moyen de ne pas entraver la consommation et, partant, la croissance ? Mais la difficulté est liée au fait que les populations concernées sont le plus souvent non solvables, que les comportements de consommation en cause peuvent être qualifiés de compulsifs, et que les produits ainsi achetés ne sont souvent pas indispensables. Dès lors, le consommateur devient un véritable otage d’organismes de crédit pratiquant des taux usuraires et recourant à des méthodes inefficaces, voire dangereuses.

Je rappelle que, malheureusement, le Président de la République vantait il n’y a pas longtemps les mérites du crédit revolving. On peut comprendre l’utilisation du crédit revolving pour l’achat de biens susceptibles de connaître une valorisation, à l’instar des biens immobiliers. Il en va autrement des produits de consommation courante. C’est pourquoi, par-delà la question du taux d’usure – intolérable il est vrai aujourd’hui –, il serait important de parvenir à distinguer, parmi les produits susceptibles d’achat à crédit, les produits de première nécessité indispensables à la vie du foyer d’une part, des produits électroménagers – je pense en particulier à la profusion des écrans plats – ou des produits de communication d’autre part, parfois achetés par des familles vulnérables qui, par ailleurs, ne peuvent s’offrir de la viande !

Mme Catherine Génisson. Même si cette question n’entre pas directement dans le champ de l’avis de notre commission, il est important d’évoquer le taux d’usure.

Concernant le crédit renouvelable, on ne peut que regretter que le projet n’aille pas plus loin. Trop souvent aujourd’hui, la publicité confine au harcèlement, s’agissant tant de l’accès à ce crédit que des conditions pour en sortir.

Il est vrai que, dans nos collectivités, il existe des dispositifs de crédit social. Ceux-ci ne résultent pas seulement d’initiatives publiques locales mais sont parfois distribués par des établissements bancaires, même s’ils sont consentis à des taux voisins des taux ordinaires. Mais certains font de véritables efforts. Je pense, en particulier, à la politique exemplaire suivie en cette matière par le Crédit Mutuel Nord Europe. Néanmoins, là aussi, il faut aller plus loin.

Par ailleurs, concernant le développement des actions de groupe, il est important de favoriser des actions tant individuelles que collectives des consommateurs. Lors de la discussion du projet de loi de modernisation de l’économie, le rapporteur, notre regretté Jean-Paul Charié, avait beaucoup insisté sur la nécessité de l’insertion dans la loi d’un dispositif sur l’action de groupe. Le Gouvernement s’était alors engagé dans ce sens, prenant date pour la discussion du prochain texte portant sur le crédit.

M. Claude Leteurtre. Je souhaite avant toute chose saluer le travail réalisé par notre rapporteure. Néanmoins, je voudrais aussi faire part d’une certaine insatisfaction, car ce texte reste à mi-chemin. Un crédit est une facilité, mais elle se traduit trop souvent par un désastre, en raison de l’insuffisance de l’information diffusée. Les gens n’ont pas conscience des dangers qu’ils courent. On le sait, certains, et ce sont les plus fragiles, ne savent pas dire non à leur enfant quand il réclame quelque chose.

Sur la question du taux d’usure, il n’est pas acceptable que la Commission des affaires sociales ne puisse s’exprimer. Notre rapporteure doit pouvoir prendre position sur ce sujet. Quant au crédit renouvelable, il y a là un grand piège. Il est indispensable de traiter la question : nous avons tous à l’esprit ces situations catastrophiques, dont les plus crédules, faute d’information, sont les premières victimes. Aussi est-il indispensable de créer un fichier positif, assorti des mesures d’encadrement nécessaires. Il n’y a pas là d’intrusion dans la vie privée des consommateurs.

De manière générale, c’est sur les banques que le risque doit peser, pas sur les clients. 60 % des ménages ont aujourd’hui contracté des crédits : cette proportion est relativement restreinte. Et pourtant, les situations sont souvent catastrophiques, en l’absence d’information suffisante et de recours au crédit social.

M. Georges Colombier. L’exemple de proches, ayant contracté, presque par surprise, des crédits renouvelables, montre que, pour ceux qui ne sont pas aidés, la descente aux enfers est rapide : c’est pourquoi je rejoins ceux qui estiment nécessaire d’aller plus loin sur ce sujet. De même, je suis plutôt favorable à la mise en place d’un fichier positif. À tout le moins, il faut travailler cette question.

Il faut saluer les objectifs du projet de loi, rappelés par la rapporteure pour avis, à savoir une meilleure information des emprunteurs, un meilleur conseil aux emprunteurs et une plus grande responsabilisation des organismes prêteurs, ou encore la mise en place de mesures destinées à généraliser les crédits amortissables. De multiples moyens peuvent être mobilisés. En Isère, je pense à la création, notamment par les chiffonniers d’Emmaüs, d’une association destinée à favoriser le recours au microcrédit. Même si ce n’est pas forcément la panacée, de telles solutions doivent être encouragées. De même, les conseillers en économie sociale et familiale du Conseil général de l’Isère réalisent un travail remarquable de suivi des personnes concernées par le surendettement ainsi que d’aide à la gestion de leur budget, en particulier au profit des plus modestes.

On peut également se féliciter d’un certain nombre de mesures du projet de loi, rappelées par notre rapporteure pour avis, qui vont dans le bon sens : un calcul du « reste à vivre » plus transparent et plus adapté aux charges réelles des ménages ; un délai plus court pour l’examen de recevabilité et l’orientation des dossiers ; la suspension automatique des procédures d’exécution autres que d’expulsion ; ou encore la suppression de l’obligation d’homologation pour certaines des décisions de la commission de surendettement. Il est difficile bien sûr pour un ménage de passer par la procédure mise en œuvre devant une commission de surendettement, mais c’est parfois la seule solution. C’est pourquoi il est important d’assurer un traitement aussi rapide que possible des dossiers.

M. Philippe Morenvillier. Je souhaite d’abord saluer le travail de grande qualité de notre rapporteure. Sur le fond, on ne peut que déplorer l’effet d’aubaine dont profitent les banques, devenues d’une certaine manière des prédateurs le samedi après-midi, à l’égard d’acheteurs au comportement souvent compulsif, sans véritable résistance par rapport à l’acte d’achat. Il est donc important d’encadrer les comportements de ces banques et d’éviter le recours à des taux démesurés.

Il faut pourtant aller plus loin encore. Je voudrais attirer l’attention sur les pratiques de rachat de crédit, qui tendent à déstabiliser les consommateurs. Elles entraînent un empilement de différents crédits successifs, motivé par une soi-disant diminution du niveau des remboursements mensuels, mais qui se traduit par un accroissement considérable des durées de remboursement, d’où une déstabilisation parfois à vie du consommateur. Comment également ne pas être choqué par le remboursement d’intérêts sur les intérêts ? Enfin, les taux d’usure sont, encore une fois, excessifs.

M. Jean-Claude Leroy. Je voudrais attirer l’attention sur un point particulier. Certaines sociétés de recouvrement utilisent des termes de nature à tromper les débiteurs, par exemple, en accolant le qualificatif « judiciaire » à leur nom, alors que le recouvrement judiciaire n’appartient qu’aux huissiers de justice. Il conviendrait d’aborder ce sujet qui génère des abus destinés à tromper et à harceler les emprunteurs.

Mme Gisèle Biémouret. Le harcèlement auquel se livrent les organismes de crédit leur permet finalement d’atteindre des taux élevés de remboursement, mais peut parfois conduire les emprunteurs au suicide. Le dispositif mis en place par le Conseil général du Gers, qui a créé un service de médiation bancaire prenant en charge les rapports des emprunteurs avec les banques et organismes de crédit, pourrait servir d’exemple. Le recours au crédit renouvelable ne s’explique pas nécessairement par un comportement compulsif de consommation, mais traduit le fait que les personnes concernées n’ont pas d’autre solution.

Mme Michèle Delaunay. L’écart entre le taux annoncé et le taux effectif global continue de poser problème. Dès lors, l’intervention de la commission consultative sur les taux de prêt d’argent, notamment habilitée à condamner les banques qui contreviennent à ces dispositions, pourrait se révéler utile, mais sa saisine semble extrêmement difficile pour les intéressés.

M. Jean Ueberschlag. La question des assurances n’est pas abordée, alors que l’obtention d’un prêt y est parfois conditionnée. Or, les primes sont souvent calculées sur la totalité du capital et non pas seulement sur la partie restant à amortir. Ajoutées au taux d’intérêt, elles entraînent un coût du crédit prohibitif.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis. Je regrette, avec le président Pierre Méhaignerie, que le texte n’ait pas été renvoyé à une commission spéciale, ce qui aurait notamment permis d’organiser une audition commune de la ministre et de regrouper ainsi les questions posées.

En tant qu’élus locaux, nous avons tous rencontré des personnes en très grandes difficultés, mais il faut rappeler que le taux d’incidents de paiement n’est que de 2 %. En outre, le montant des crédits revolving n’atteint que 20 % de celui des crédits classiques. Le crédit fonctionne donc globalement bien et permet à de nombreuses personnes d’accéder à la propriété immobilière ou d’acquérir un véhicule. Je pense qu’il ne faut pas noircir le tableau et jeter le bébé avec l’eau du bain.

Sur la question du fichier positif, les nombreuses auditions que j’ai effectuées montrent que la plupart des banques y sont opposées, car elles craignent la concurrence des organismes étrangers. Si certains organismes de crédit y sont favorables, c’est simplement parce qu’ils y voient la possibilité d’une extension de l’accès au crédit dans le cadre d’une sécurisation renforcée. Leur objectif n’est donc pas du tout le même que celui des députés qui soutiennent la création d’un tel fichier. Au demeurant, l’exemple de la Belgique montre que la mise en place d’un tel fichier a élargi l’accès au crédit et n’a nullement réduit le surendettement. Dans ces conditions, la proposition du Sénat consistant à demander une étude est sage : il faut en effet s’assurer qu’un fichier positif ne sera pas liberticide, peut-être le moment venu grâce à l’intervention de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, et qu’il bénéficiera réellement aux consommateurs. Cela étant, le délai de trois ans prévu pour la remise de cette étude paraît trop long et pourrait même être considéré comme dilatoire, puisqu’il va au-delà de la présente législature. Je propose donc que ce délai soit ramené à dix-huit mois et je souhaite que tous les commissaires se joignent à cet amendement. Bien entendu, lorsque cette étude sera disponible, notre commission devra alors à nouveau se saisir de la question.

Le problème du taux d’usure est abordé à l’article 1er A de la proposition de loi, qui dispose qu’il n’y aura désormais qu’un seul taux par type de bien. Les taux restent donc différents selon le montant des prêts, ce qui n’est pas illégitime compte tenu des frais fixes.

Le texte ne se contente pas de procéder à la transposition d’une directive communautaire, mais vise à tirer les conséquences de la crise économique en renforçant la sécurité du consommateur et la prévention du surendettement.

Les associations que j’ai auditionnées ne souhaitent pas que le crédit revolving soit supprimé, car il répond à une demande sociale. Il faut donc encadrer davantage ce type de crédits et mettre l’accent sur l’éducation financière.

Le FICP constitue un progrès significatif, mais peu nombreux sont les intéressés qui lisent les documents précontractuels ou contractuels, dans lesquels toutes les informations utiles figurent d’ores et déjà. L’allongement du délai de rétractation de sept à quatorze jours prévu par le projet de loi va donc dans la bonne direction. En France, l’endettement moyen demeure relativement faible, mais pour ce qui est des personnes surendettées, il s’élève à 40 000 euros, un cas d’endettement à hauteur de 500 000 euros avec 60 crédits ayant même été rapporté. Il faut, en outre, souligner que les classes moyennes, voire supérieures, sont de plus en plus touchées par le surendettement, ce qui plaide une fois de plus pour le renforcement de la prévention et de l’éducation dans ce domaine.

Même s’il n’y est pas qualifié de « social », le micro-crédit est bel et bien abordé à l’article 18 bis du projet de loi. Les conseils généraux et les associations ont mis en place des dispositifs réellement destinés aux personnes disposant de revenus modestes (934 euros par mois en moyenne), d’autant que 95 % des crédits sont accordés à un taux inférieur à 4 % et qu’ils peuvent atteindre 5 000 euros. En revanche, le projet de loi n’aborde pas la question de l’action de groupe, qui, allant bien au-delà du seul champ du crédit à la consommation, mérite de faire l’objet d’un texte spécifique.

S’agissant du reste à vivre après l’intervention des commissions de surendettement, la garde d’enfants est notamment prise en compte, mais les juges que j’ai auditionnés estiment qu’il n’est pas possible d’intégrer toutes les charges au réel. Il faut effectivement répondre aux inégalités géographiques dans le traitement des différences de situation en matière de logement, mais les commissions le font déjà largement.

Pour ce qui est des rachats de crédits, un article du projet de loi clarifie le droit applicable, afin de mieux opérer la distinction entre crédits immobiliers et crédits mobiliers. La question sur les abus de dénomination des sociétés de recouvrement est pertinente, mais relève de la commission saisie au fond. Enfin, pour les assurances, ce projet de loi laisse une liberté de choix aux emprunteurs, comme en matière de crédit immobilier.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IV

PROCÉDURE DE TRAITEMENT DU SURENDETTEMENT DES PARTICULIERS ET ADAPTATION DU FICHIER NATIONAL DES INCIDENTS DE REMBOURSEMENT DES CRÉDITS AUX PARTICULIERS

Chapitre Ier

Composition et compétences de la commission de surendettement

Article 20

Composition de la commission départementale de surendettement

La Commission est saisie de l’amendement AS 10 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Cet amendement propose de donner compétence au président du conseil général pour établir une liste de personnes au sein de laquelle le préfet pourra désigner les deux membres de la commission de surendettement nommés, pour l’un, au titre de son expérience dans le domaine de l’économie sociale et familiale et, pour l’autre, au titre d’un diplôme et d’une expérience dans le domaine juridique.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Avis défavorable, car si le conseil général a effectivement une compétence d’aide sociale, je ne vois pas pourquoi il participerait aussi à la nomination du juriste membre de la commission de surendettement. De même, le conseil général n’est pas la seule structure susceptible de fournir un travailleur social pour siéger dans cette commission : les centres communaux d’action sociale le peuvent également.

La Commission rejette l’amendement AS 10 et donne un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

(M. Pierre Méhaignerie succède à M. Pierre Morange à la présidence de la séance).

Article 21

Procédure devant la commission de surendettement

La Commission est saisie de l’amendement AS 6 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Le reste à vivre n’est pas fixé de façon assez homogène sur le territoire : il peut être évalué à 680 euros en Moselle et à 270 euros dans le Territoire de Belfort pour des situations comparables ! Sans aller jusqu’à imposer aux commissions de surendettement d’évaluer le montant « réel » des frais que doit couvrir le « reste à vivre », il est proposé qu’elles tiennent compte du montant « effectif » de ces frais.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. En dépit de cette nuance sémantique, la mesure proposée imposerait dans les faits aux commissions d’analyser le reste à vivre sur la base des frais réels supportés par les personnes. Dans le cadre des assises du surendettement, les commissions ont alerté les pouvoirs publics sur la charge administrative qu’une telle mesure ferait peser sur elles et sur les demandeurs : veut-on demander aux surendettés de produire leurs tickets de supermarché ? Mieux vaut en rester au texte du projet de loi, qui permet la prise en compte, selon les cas, des frais réels – c’est en général le cas pour le loyer – ou de forfaits, notamment pour les dépenses courantes.

La Commission rejette l’amendement AS 6.

Puis, elle est ensuite saisie de l’amendement AS 7 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Mon amendement tend à rendre systématique la vérification de la réalité des créances. Comment, en effet, établir un plan de remboursement de dettes si on ne vérifie pas au préalable la réalité des créances correspondantes ?

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Cet amendement est contradictoire avec la volonté que nous avons de réduire la durée de la phase de recevabilité, que le texte ramène de 6 à 3 mois. Si les commissions doivent contrôler systématiquement les créances, elles ne feront plus que cela et ne pourront pas respecter ce délai légal, ce qui ne serait pas dans l’intérêt des personnes surendettées. Lors des assises du surendettement, les acteurs de terrain, y compris les associations de consommateurs, se sont prononcés dans une large majorité contre cette mesure.

M. Christophe Sirugue. Je ne comprends pas ce raisonnement.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Ce contrôle doit naturellement être fait, mais après que le dossier a été jugé recevable.

La Commission rejette l’amendement AS 7.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 2 de Mme Cécile Gallez.

Mme Cécile Gallez. Dans la mise en œuvre d’un plan de surendettement, le débiteur rembourse ses dettes suivant un échéancier fixé par la commission de surendettement. Il ne serait donc pas normal que les créanciers puissent, parallèlement, saisir la caution. C’est pourquoi cet amendement propose d’interdire une telle saisine.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Cet amendement soulève un vrai problème et je crois que nous devons faire quelque chose pour mieux prendre en compte la situation des personnes qui se portent caution, souvent des parents ou des grands-parents, et qui peuvent se retrouver ensuite dans une situation très difficile. Toutefois, la portée de la rédaction proposée par Cécile Gallez me parait incertaine. Je lui propose donc de retravailler cet amendement d’ici le passage du texte en séance publique.

M. Georges Colombier. Je tiens à souligner l’importance du problème soulevé par notre collègue Cécile Gallez et je crois qu’une initiative législative est nécessaire.

Suivant l’avis de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS 2.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS 12 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Cet amendement vise à mentionner les programmes d’éducation budgétaire, développés par les centres communaux d’action sociale ou des associations spécialisées, dans les mesures d’accompagnement des personnes surendettées.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Le terme d’« éducation budgétaire » risque d’être perçu comme stigmatisant, alors que dans leurs actions d’accompagnement individuel, les conseillers en économie sociale et familiale accordent une grande attention à la dignité de la personne.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Mon amendement se situe dans le cadre de mesures sociales. Il n’y entre aucune stigmatisation.

La Commission adopte l’amendement AS 12.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 8 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Cet amendement propose d’avancer le point de départ de la suspension des voies d’exécution au moment où la personne surendettée dépose son dossier auprès de la commission, plutôt qu’au moment où la recevabilité de sa demande est reconnue. Il peut, en effet, s’écouler plusieurs semaines entre ces deux étapes.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Avis défavorable. En effet, le texte apporte déjà de gros progrès en matière de protection contre les mesures de saisie. Leur suspension n’aura plus à être demandée au juge : elle sera automatique dès que le dossier aura été déclaré recevable. Et avec la réduction de la durée de la phase de recevabilité, le délai entre le dépôt du dossier et la reconnaissance de sa recevabilité se réduit. En outre, en cas d’urgence, la suspension des poursuites pourra être demandée avant la décision de recevabilité.

Par ailleurs, je propose par voie d’amendements d’autres avancées, notamment sur la nécessité non seulement de suspendre les procédures d’exécution en cours, mais aussi de prohiber l’engagement de toute nouvelle procédure de cette nature.

En revanche, prévoir une suspension automatique des poursuites dès le dépôt du dossier, alors que personne n’a pu vérifier, même sommairement, son bien-fondé, pourrait entraîner des détournements de la loi. Des débiteurs peu scrupuleux pourraient déposer des dossiers à la seule fin de bénéficier de deux mois de répit, le temps que leur dossier soit déclaré irrecevable.

M. Christophe Sirugue. Je regrette que les initiatives du groupe socialiste soient toutes rejetées.

M. Pierre Méhaignerie, président. Le problème est délicat, mais il faut veiller à ne pas trop déresponsabiliser les personnes qui souscrivent des crédits.

La Commission rejette l’amendement AS 8.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 13 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. A l’instar de ce qui est prévu par le droit des procédures collectives des entreprises, cet amendement vise à interdire l’engagement de procédures d’exécution après la déclaration de recevabilité d’un dossier de surendettement. Il améliore ainsi la protection des personnes surendettées.

La Commission adopte l’amendement AS 13.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 11 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Cet amendement vise à préciser qu’une fois un dossier de surendettement déclaré recevable, les mesures d’expulsion du logement du débiteur sont suspendues, au même titre que les autres mesures d’exécution. Le droit en vigueur le précise, mais le projet de loi ne reprend pas cette précision.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement AS 11.

Puis elle est adopte l’amendement AS 14 de coordination, présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 9 de M. Christophe Sirugue.

M. Christophe Sirugue. Cet amendement propose que chaque plan de surendettement fasse l’objet d’un réexamen tous les deux ans. Ainsi, en cas de retour à meilleure fortune, le débiteur pourra, par exemple, rembourser ses dettes par anticipation.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Certes, il faut pouvoir prendre en compte les changements de situation des personnes surendettées en cours d’exécution du plan validé par la commission, mais on comprend mal l’intérêt d’un réexamen systématique de ce plan tous les deux ans : en cas de retour à meilleure fortune, le débiteur a la faculté de rembourser à tout moment ses créanciers, et il a la possibilité de saisir la commission en cours d’exécution du plan. En outre, il ne faudrait pas que le débiteur puisse choisir de rembourser certains créanciers, mais pas d’autres. Enfin, un réexamen périodique systématique de tous les dossiers constituerait une charge de travail très importante pour les commissions.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS 9.

Elle émet, ensuite, un avis favorable à l’adoption de l’article 21 ainsi modifié.

Après l’article 21

La Commission est saisie de l’amendement AS 3 de Mme Cécile Gallez.

Mme Cécile Gallez. La durée maximale d’un plan de redressement est actuellement fixée à dix ans. Toutefois, une telle durée apparaît trop longue pour que les personnes surendettées puissent refaire surface. Il est donc proposé de la ramener à sept ans.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. J’émets un avis favorable à cet amendement, tout en soulignant qu’une telle mesure aura des conséquences lourdes : dans les faits, elle revient pour les créanciers à abandonner trois ans de créances. Mais, il faut reconnaître que dix ans est une durée très longue, qui rend la situation des intéressés difficile.

La Commission adopte l’amendement AS 3.

Article 22

Effacement des dettes – Déchéance et champ d’application
personnel des procédures de surendettement

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 sans modification.

Article 23

Prérogatives de la commission de surendettement – Ouverture d’une procédure de rétablissement personnel

La Commission est saisie de l’amendement AS 15 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer les intérêts dits « intercalaires » qui peuvent courir entre la date où la commission de surendettement, ou le juge, a arrêté l’état du passif du débiteur et la date de mise en œuvre effective du plan d’apurement conventionnel. Il s’agit d’éviter qu’au terme du plan d’apurement, la personne, dont la dette a été normalement entièrement purgée, se trouve encore débitrice de ces intérêts « intercalaires » liés au décalage initial dans la mise en œuvre du plan.

La Commission adopte l’amendement AS 15.

Puis, elle est saisie de l’amendement AS 5 de Mme Cécile Gallez.

Mme Cécile Gallez. Cet amendement propose de supprimer la condition de bonne foi du débiteur, qui est certes présumée lorsqu’il saisit la commission de surendettement, mais qui fait fréquemment l’objet de contestations par les créanciers. Cela entraîne un contentieux économiquement et socialement coûteux, qui retarde inutilement la mise en œuvre d’un plan de redressement et engorge les juridictions.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Certes, la condition de bonne foi suscite des contestations, mais son existence est un élément essentiel de l’équilibre entre les créanciers et les débiteurs, qui est recherché dans la procédure de surendettement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS 5.

Puis elle adopte les amendements de coordination AS 16 et AS 17, présentés par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 18 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Cet amendement vise à mieux garantir la protection des personnes de bonne foi qui, ne pouvant plus faire face aux engagements inscrits dans un plan d’apurement engagé précédemment, conventionnel ou imposé par la commission de surendettement sous le contrôle du juge, demandent à bénéficier d’une procédure de rétablissement personnel. Il convient de préciser que cette décision de réorientation emporte suspension et interdiction des poursuites en cours, dans les mêmes conditions que la décision initiale de recevabilité d’un dossier de surendettement. Cette mesure est très demandée par les associations de consommateurs.

La Commission adopte l’amendement AS 18 et émet un avis favorable à l’adoption de l’article 23 ainsi modifié.

Article 24

Pouvoirs du juge de l’exécution à l’égard des mesures recommandées
par la commission de surendettement

La Commission adopte l’amendement AS 19 de cohérence présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure, et émet un avis favorable à l’adoption de l’article 24 ainsi modifié.

Chapitre III

Procédure de rétablissement personnel

Article 25

Orientation du débiteur vers la procédure de rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire

La Commission adopte l’amendement AS 20 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure, tendant à ce que le seul fait, pour une personne surendettée, d’être propriétaire de sa résidence principale, ne la rende pas inéligible à la procédure de surendettement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 25 ainsi modifié.

Article 26

Déroulement de la procédure de rétablissement personnel
avec ou sans liquidation judiciaire

La Commission adopte l’amendement AS 21 de coordination présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure, et émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 ainsi modifié.

Article 26 bis

Rapport annuel d’activité des commissions de surendettement

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 bis sans modification.

Article 26 ter

Remise des dettes fiscales dans le cadre d’une procédure
de rétablissement personnel

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 ter sans modification.

Article 27

Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 27 sans modification.

Article 27 bis

Principe de la création d’une centrale des crédits aux particuliers

La Commission est saisie de l’amendement AS 1 de Mme Cécile Gallez.

Mme Cécile Gallez. J’avais déjà présenté un amendement tendant à créer un « fichier positif », recensant tous les encours de crédits tout en respectant les principes de la loi « informatique et libertés », lors de la discussion d’un texte relatif au surendettement présenté par M. Jean-Louis Borloo. La création d’un tel fichier me semble indispensable.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Nous avons déjà débattu de cette question. Je vous proposerai un amendement tendant à ramener de trois ans à dix-huit mois le délai dans lequel le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport évaluant l’intérêt qu’il y aurait à créer une centrale des crédits aux particuliers, placée sous la responsabilité de la Banque de France.

M. Georges Colombier. La création d’un « fichier positif » mériterait des travaux approfondis au sein de notre commission. Compte tenu des enjeux sociaux qui s’attachent à cette question, il serait utile que notre président veille à ce que les parlementaires qui siègeront à la commission temporaire d’évaluation de la mise en œuvre de la loi, prévue à l’article 33 A, ne soient pas tous issus de la commission des finances.

Mme Marie-Christine Dalloz. Avec la croissance récente du nombre de cas de surendettement, ce problème social prend une ampleur telle que la commission ne doit pas s’en désinvestir. Si l’amendement présenté par Cécile Gallez parait prématuré, je crois que nous devons poursuivre nos réflexions sur le surendettement. Le délai de 3 ans était excessif, mais le délai de dix-huit mois me semble l’être aussi.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je partage l’avis de Georges Colombier, s’agissant de la composition de la commission d’évaluation.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement AS 1.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 22 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure.

Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure. Le débat sur l’opportunité de créer ou non un « fichier positif » ne doit pas être centré sur la seule question de savoir s’il améliorerait l’information sur la solvabilité des emprunteurs mais aussi sur ce qu’il pourrait apporter en matière de prévention du surendettement.

La Commission adopte l’amendement AS 22, ainsi que l’amendement AS 23 de Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure, tendant à ramener de 3 ans à 18 mois le délai dans lequel le Gouvernement doit remettre au Parlement un rapport sur la création d’un éventuel « fichier positif ».

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 27 bis ainsi modifié.

Chapitre IV

Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers

Article 27 ter

Preuve de la consultation du FICP par les établissements de crédit

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 27 ter sans modification.

Article 27 quater

Durée d’inscription au FICP en cas de faillite civile

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 27 quater sans modification.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVE À L’OUTRE-MER

Chapitre II

Dispositions relatives au traitement des situations de surendettement

Article 29

Application des dispositions relatives au traitement des situations de surendettement dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 29 sans modification.

Article 30

Dispositions d’adaptation relatives à Mayotte, à Saint-Barthélémy,
à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 30 sans modification.

Article 31

Dispositions d’adaptation relatives à la Nouvelle-Calédonie

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 31 sans modification.

Article 32

Fonctionnement du FICP en Polynésie française

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 32 sans modification.

La Commission émet enfin un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des articles dont elle s’est saisie pour avis, ainsi modifiés.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par Mme Cécile Gallez

Article 27 bis

Rédiger ainsi cet article :

« Il est institué un répertoire national recensant les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels. Ce fichier est géré par la Banque de France et soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. »

Amendement n° AS 2 présenté par Mme Cécile Gallez

Article 21

Après l’alinéa 12, insérer l’alinéa suivant :

« La caution ne pourra pas être poursuivie quand le débiteur est en plan de surendettement. »

Amendement n° AS 3 présenté par Mme Cécile Gallez

Après l’article 21

Insérer l’article suivant :

À la deuxième phrase du quatrième alinéa de l’article L. 331-6 du code de la consommation, les mots : « 10 années » sont remplacés par les mots : « 7 ans ».

Amendement n° AS 5 présenté par Mme Cécile Gallez

Article 23

Compléter l’alinéa 7 par la phrase suivante :

« La condition de la bonne foi du débiteur prévue par l’article L. 330-1 du code de la consommation est supprimée. »

Amendement n° AS 6 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 21

À la première phrase de l’alinéa 4, après les mots : « le montant », insérer le mot : « effectif ».

Amendement n° AS 7 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 21

À la première phrase de l’alinéa 7, après le mot : « examiner », insérer les mots : « , après examen de la réalité des créances, ».

Amendement n° AS 8 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 21

Rédiger ainsi la première phrase de l’alinéa 20 :

« Le dépôt du dossier emporte suspension des procédures d’exécution… (le reste sans changement). »

Amendement n° AS 9 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 21

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« Après la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 331-6 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Le plan fait l’objet d’un réexamen tous les deux ans, par la commission. »

Amendement n° AS 10 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 20

Compléter l’alinéa 7 par les mots : « sur une liste proposée par le Président du Conseil général. »

Amendement n° AS 11 présenté par M. Christophe Sirugue, Mme Marisol Touraine et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Article 21

Compléter la première phrase de l’alinéa 20 par les mots : « y compris des mesures d’expulsion du logement du débiteur. »

Amendement n° AS 12 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 21

À l’alinéa 15, après les mots : « ou d’action sociale », insérer les mots : « qui peut comprendre un programme d’éducation budgétaire ».

Amendement n° AS 13 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 21

À l’alinéa 20 :

I. – À la première phrase, après le mot : « suspension », insérer les mots : « et interdiction » ;

II. – En conséquence, à la deuxième phrase, substituer aux mots : « La suspension est acquise », les mots : « Les procédures sont suspendues ou interdites » ;

III. – En conséquence, à la dernière phrase, substituer aux mots : « ne peut », les mots : « et cette interdiction ne peuvent ».

Amendement n° AS 14 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 21

À l’alinéa 21 :

I. – Substituer à la première occurrence du mot : « interdit », les mots : « et cette interdiction interdisent » ;

II. – En conséquence, substituer aux mots : « elle interdit », les mots : « elles interdisent ».

Amendement n° AS 15 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 23

Après l’alinéa 1, insérer les deux alinéas suivants :

1°A L’article L. 331-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les créances figurant dans l’état du passif définitivement arrêté par la commission ou le juge ne peuvent produire d’intérêts ou générer de pénalités de retard jusqu’à la mise en œuvre du plan. »

Amendement n° AS 16 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 23

Après l’alinéa 11, insérer l’alinéa suivant :

« Les créances figurant dans l’état du passif définitivement arrêté par la commission ou le juge ne peuvent produire d’intérêts ou générer de pénalités de retard jusqu’à la mise en œuvre des mesures prévues au présent article. »

Amendement n° AS 17 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 23

Après l’alinéa 18, insérer l’alinéa suivant :

« Les créances figurant dans l’état du passif définitivement arrêté par la commission ou le juge ne peuvent produire d’intérêts ou générer de pénalités de retard jusqu’à la mise en œuvre des mesures prévues au présent article. »

Amendement n° AS 18 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 23

Substituer à la dernière phrase de l’alinéa 21 les trois phrases suivantes :

« Cette recommandation ou cette saisine emportent suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur et portant sur les dettes autres qu’alimentaires. La suspension et l’interdiction sont acquises jusqu’à l’homologation par le juge de la recommandation en application de l’article L. 332-5 ou jusqu’au jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Cette suspension et cette interdiction ne peuvent excéder un an. »

Amendement n° AS 19 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 24

À l’alinéa 5, après les mots : « ou d’action sociale », insérer les mots : « qui peut comprendre un programme d’éducation budgétaire ».

Amendement n° AS 20 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 25

Après l’alinéa 1, insérer les deux alinéas suivants :

« 1°A Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le seul fait, pour une personne physique, d’être propriétaire de sa résidence principale ne peut être tenu comme empêchant que la situation de surendettement soit caractérisée. »

Amendement n° AS 21 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 26

À l’alinéa 17, après les mots : « ou d’action sociale », insérer les mots : « qui peut comprendre un programme d’éducation budgétaire ».

Amendement n° AS 22 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 27 bis

À l’alinéa 2, après le mot : « emprunteurs », insérer les mots : « et une meilleure prévention du surendettement ».

Amendement n° AS 23 présenté par Mme Valérie Rosso-Debord, rapporteure pour avis

Article 27 bis

À l’alinéa 1, substituer aux mots : « trois ans », les mots : « dix-huit mois ».

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Banque Accord – M. Pierre Antoine, directeur du risque du groupe, et Mme Eva Kastler, directrice financière

Ø Entreprises et cités – Mme Véronique Robeaux, chargée de mission

Ø Secours catholique – M. Alain Bernard, responsable du département « emploi et économie solidaire »

Ø LaSer-Cofinoga – M. Philippe Lemoine, président, M. Michel Philippin, directeur général, M. Jean-Yves Godard, directeur des relations extérieures, et M. Aristide Luneau, consultant

Ø Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) – Mme Maria Nowak, présidente

Ø Emmaüs France – M. Antoine Gaudenz, président de SOS Familles Emmaüs France, MM. Simon Weiner et Jean-Louis Giraud, membres du bureau de SOS Familles Emmaüs France, et Mme Anne Babic, déléguée générale adjointe chargée de l’action sociale France

Ø Fédération bancaire française – M. Pierre Bocquet, directeur du département « banque de détail et banque à distance », M. Patrick Stocker, conseiller au même département, et Mme Estelle Toullec-Marquot, chargée des relations politiques et parlementaires

Ø Banque de France M. Jean-Luc Vatin, directeur de la surveillance des relations entre les particuliers et la sphère financière, et Mme Véronique Bensaïd, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur

Ø Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS) M. Daniel Zielinski, délégué général, et Mme Maela Castel, conseillère technique

Ø Union nationale des associations familiales (UNAF) – Mme Corinne Griffond, administratrice, M. Nicolas Revenu, chargé de mission, et Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires

Ø Association CRESUS (Chambre régionale de surendettement social) – M. Jean-Louis Kiehl, président, et M. Aloyse Steinmetz, membre du conseil d’administration

© Assemblée nationale

1 () Source : Banque de France, Baromètre du surendettement à fin juin 2009.

2 () Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), Etudes et résultats n° 251, août 2003.

3 () Mais légitimé en 1989 par la crainte de voir se développer, de la part d’agents économiques non habilités à consulter le FICP, des demandes de production de « certificats » de non-inscription au FICP.