Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N
° 2139

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 décembre 2009

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, portant réforme du crédit à la consommation (n° 1769),

PAR M. François Goulard

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat : 94, 114, 173, 255, 325, 364, 447, 448 et T.A. 98 (2008-2009)

Assemblée nationale : 1769, 2129 et 2131.

INTRODUCTION 5

I.– UNE ENTRÉE EN VIGUEUR QUI SE FAIT ATTENDRE 5

II.– L’ENGAGEMENT DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR D’UN CRÉDIT PLUS RESPONSABLE 6

III.– L’APPORT SUBSTANTIEL DU SÉNAT AU PROJET DE LOI 7

A.– UNE RÉFORME BÉNÉFIQUE DU TAUX DE L’USURE 7

B.– DES PALLIATIFS D’UNE RATIFICATION TRONQUÉE DES ORDONNANCES AUTORISÉES PAR LA LOI DE MODERNISATION DE L’ÉCONOMIE 8

C.– L’UNITÉ DU PRÉSENT PROJET DE LOI MISE À MAL 8

IV.– LA SAISINE DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE 9

A.– DES DISPOSITIONS DE NATURE FISCALE ET FINANCIÈRE 9

B.– DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME 10

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

I.– DISCUSSION GÉNÉRALE 13

II.– EXAMEN DES ARTICLES 17

Article 1erA : Refonte des catégories de prêts à la consommation pour la détermination des seuils de l’usure 17

Article 19 : Habilitation à légiférer par voie d’ordonnance 25

Article 19 bis A : Publicité en matière d’investissement dans le logement locatif aidé 29

Article 19 bis B : Définition des groupes soumis à l’obligation d’échanger des informations nécessaires à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme 33

Article 19 bis C : Périmètre des organismes mutualistes soumis aux obligations relatives à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme 35

Article 19 bis D : Définition des groupes soumis à l’obligation d’information sur l’existence et le contenu des déclarations de soupçon 39

Article 19 bis G : Remise des titres d’OPCVM issus de la scission du véhicule de placement 41

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 45

ANNEXE I : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR 51

INTRODUCTION

L’Union européenne a adopté le 23 avril 2008 une directive concernant les contrats de crédit aux consommateurs. Pour s’y conformer, le Gouvernement a déposé au Sénat le 9 avril 2009 un projet de loi portant réforme du crédit à la consommation. La France, comme les autres États membres, doit avoir transposé en droit national la directive européenne pour le 11 juin 2010 (1).

I.– UNE ENTRÉE EN VIGUEUR QUI SE FAIT ATTENDRE

Le temps est donc compté. Certes, aucune procédure en manquement ne sera engagée à l’encontre de la France dès le 11 juin 2010, ni a fortiori aucune condamnation prononcée. Mais les professionnels du crédit auront besoin de longs mois pour adapter leur offre à la nouvelle législation transposant le droit communautaire. Le présent projet de loi a entre autres fins celle de garantir un cadre juridique sûr aux opérations de crédit à la consommation. S’il est adopté tardivement, il pourrait ouvrir une période d’incertitude où les professionnels du crédit ne pourront en pratique mettre leur offre en conformité avec la législation nouvelle, bien que celle-ci soit déjà entrée en vigueur et bien que les tribunaux français tendent à reconnaître de plus en plus souvent un effet direct aux directives communautaires (2).

Il semble cependant difficile d’envisager une entrée en vigueur différée de l’ensemble des dispositions de la loi, car ce serait expressément contraire aux engagements pris par la France. Une entrée en vigueur différée des seuls articles qui ne sont pas directement liés à la transposition n’est quant à elle pas facile à mettre en œuvre. Beaucoup de dispositions du présent projet de loi vont au-delà de la directive européenne. Mais la plupart d’entre elles sont indissociables des mesures de pure transposition. Échelonner, ou fractionner, l’entrée en vigueur compliquerait encore la tâche de professionnels qui devraient à chaque étape rédiger de nouveaux contrats, concevoir de nouveaux logiciels, y former de nouveau leurs équipes, mettre au point de nouvelles brochures publicitaires… Car le crédit est une opération longue et complexe qui s’inscrit par définition dans la durée. Sa mise en œuvre ne peut se faire du jour au lendemain.

Le Sénat a heureusement adopté un texte plutôt équilibré qui n’appelle pas, au sens du Rapporteur pour avis, de modifications trop nombreuses. Il semble donc possible d’adopter conformes un grand nombre d’articles. Pour ce faire, il faudra veiller à ne multiplier ni les dispositions étrangères à la transposition de la directive, ni les articles additionnels.

II.– L’ENGAGEMENT DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR D’UN CRÉDIT PLUS RESPONSABLE

En déposant au Sénat le 22 avril 2009 le présent projet de loi, le Gouvernement a entendu favoriser le développement d’un crédit plus responsable. Devant la persistance de situations de surendettement, il semble en effet utile de rappeler emprunteurs et prêteurs à leurs obligations mutuelles. C’est la base du droit des contrats.

Cette approche trouve une réelle résonance dans les comportements des emprunteurs français, comme le prouve depuis un an l’évolution de la demande de crédits à la consommation. Alors que notre pays est marqué par une longue tradition de méfiance envers le crédit, la souscription de prêts à la consommation s’est encore réduite, au cours de l’année écoulée, de 15 % à 20 %. Au vu de la dégradation de la situation économique, une hausse aurait paru tout aussi plausible. Mais, devant les difficultés, les Français semblent refuser au contraire la fuite en avant, adopter un comportement réfléchi et attendre des jours meilleurs pour consommer, fût-ce à crédit. De toute évidence, le Gouvernement a raison de parier sur la lucidité et l’esprit de responsabilité des emprunteurs et des prêteurs.

L’offre de crédits est actuellement corsetée par une réglementation rigide qui en entrave le développement. C’est pourquoi le Gouvernement attend également, de la mise en place de nouvelles règles, un élargissement de l’accès au crédit. Quant à savoir si cet accès plus facile au crédit produira un effet significatif sur la croissance à long terme, c’est une question qu’il faut, semble-t-il, trancher par la négative. Lorsque la masse des crédits en cours augmente, le volume supplémentaire alimente certes la demande des consommateurs. Mais cet effet n’est que momentané. Car tout crédit appelle remboursement – comme chaque contrat devra à l’avenir le préciser. À long terme, l’effet sur la consommation est donc négligeable.

Par elle-même, une réglementation plus souple est cependant bénéfique à la croissance. Même motivée par des raisons d’ordre public, toute immixtion dans les mécanismes de marché est en effet contre-productive sur le plan économique. Au cours de la précédente législature, le Rapporteur pour avis avait déjà eu l’occasion, comme rapporteur de la loi de sécurité financière de 2003, de mettre en garde contre la tentation de prétendre tout régler par la loi (3). Cette analyse s’applique a fortiori à un projet de loi qu’il importe de ne pas surcharger de dispositions nouvelles.

Le présent projet de loi est fondé à juste titre sur l’hypothèse que les Français, prêteurs comme emprunteurs, sont des individus responsables. Dès lors, une législation plus souple par certains aspects n’est plus seulement nécessaire, elle devient également possible. Les propositions du Sénat en matière d’usure présentent de ce point de vue un intérêt certain.

III.– L’APPORT SUBSTANTIEL DU SÉNAT AU PROJET DE LOI

Le Sénat a institué une commission spéciale pour examiner le présent projet de loi, déposé devant lui en première lecture. La commission spéciale a réalisé un travail de fond considérable, qui a conduit nos collègues sénateurs à adopter de nombreux remaniements et ajouts au projet de loi initial. L’article relatif à la réforme de l’usure constitue sans aucun doute le principal d’entre eux. Mais d’autres articles entretiennent un lien plus ténu avec l’objet du présent projet de loi.

A.– UNE RÉFORME BÉNÉFIQUE DU TAUX DE L’USURE

La réforme du taux de l’usure proposée par le Sénat constitue une intervention du législateur tout à fait appropriée. Loin de prévoir par le menu le plafonnement des taux des crédits accordés aux particuliers, l’article premier A se borne en effet à donner une indication claire et précise au pouvoir réglementaire sur la manière de dépasser les blocages que la commission spéciale a constatés. Sous cette forme, son insertion dans le projet de loi réformant le crédit à la consommation se justifie donc pleinement.

La réforme des taux de l’usure aurait dû, à vrai dire, avoir lieu depuis longtemps. Car il importe d’en finir avec un compartimentage rigide qui ne favorise pas le dynamisme de l’offre de crédit, ni son intelligibilité pour les emprunteurs potentiels. Au demeurant, il paraît tout à fait judicieux d’avoir prévu la mise en œuvre de la réforme au terme d’une période d’observation pouvant aller jusqu’à deux ans.

Le Rapporteur pour avis approuve cette solution mesurée. En matière de crédit à la consommation, il convient en effet de se prémunir contre la tentation de la surenchère. L’Assemblée nationale a su y résister encore récemment, en rejetant le 20 octobre 2009 une proposition de loi conduisant à fixer le taux d’usure selon une formule qui l’aurait fait osciller à la date du vote entre … 2,5 % et 4,9 % par an (4). En ce domaine, il revient au législateur de fixer un cadre, non d’arrêter des mesures particulières peu susceptibles d’évoluer au gré des fluctuations économiques.

B.– DES PALLIATIFS D’UNE RATIFICATION TRONQUÉE DES ORDONNANCES AUTORISÉES PAR LA LOI DE MODERNISATION DE L’ÉCONOMIE

D’autres articles additionnels introduits par le Sénat semblent se rattacher de manière moins directe au projet de loi.

Le Gouvernement a déposé au Sénat le 9 avril 2009 un projet de ratification de diverses ordonnances en matières financière et comptable. Il demande la ratification de dix des ordonnances prises sur la base de l'habilitation prévue par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, qui ont été publiées en janvier 2009 et contient également des articles modificatifs qui complètent le droit édicté par le pouvoir réglementaire.

Des lois successives ont cependant vidé ce projet de loi de son contenu. Ainsi, la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 issue d’une proposition de loi de notre collègue Jean-Luc Warsmann a ratifié non moins de treize ordonnances prises sur le fondement de la loi de modernisation de l’économie, six d’entre elles étant inscrites dans le projet de loi du 9 avril 2009. Deux autres ordonnances inscrites dans le projet de loi ont été ratifiées par la loi n° 2009-1255 du 19 octobre 2009 tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et moyennes entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers, issue d’une proposition de loi de notre collègue Chantal Brunel. Cette dernière loi a également ratifié l’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers, dont la ratification était prévue par un projet de loi déposé le 14 janvier 2009 (5).

Par certains de ses articles, le présent projet constitue donc la troisième étape du processus de ratification des ordonnances issues de la loi de modernisation de l’économie. Beaucoup d’ordonnances ayant été ratifiées par voie d’amendement, il était difficile d’assortir par surcroît cette ratification de modifications substantielles. Le présent projet de loi est donc apparu comme un véhicule commode pour certains compléments qui n’avaient pu être adoptés. Le Sénat a introduit par exemple un article 19 bis G – dont la commission des Finances est saisie – qui reprend le libellé exact d’un article modificatif contenu dans le projet de loi du 9 avril 2009. Son objet aurait été cependant discuté de manière plus pertinente au cours d’un débat d’ensemble sur la ratification des ordonnances prises sur le fondement de la loi de modernisation de l’économie.

C.– L’UNITÉ DU PRÉSENT PROJET DE LOI MISE À MAL

La loi réformant le crédit à la consommation ne peut au demeurant servir de texte fourre-tout, selon une jurisprudence du Conseil constitutionnel continuellement confirmée, et même entendue de manière de plus en plus stricte au fil du temps. L’unité du présent projet de loi se trouve dans une certaine mesure affectée par l’adjonction de certains articles. Pour chacun de ceux dont la commission des Finances s’est saisie, le Rapporteur pour avis s’est donc attaché à examiner comment et dans quelle mesure ses dispositions se rattachent au projet de loi initialement déposé.

IV.– LA SAISINE DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

La commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est saisie pour avis des articles premier A, 19, 19 bis A, 19 bis B, 19 bis C, 19 bis D et 19 bis G du présent projet de loi adopté par le Sénat.

L’article 19 du présent projet de loi autorise de nouveau le Gouvernement à prendre des ordonnances en matière financière, en l’occurrence en matière d’obligations des professionnels du crédit à l’égard de leur clientèle. Comme pour les ordonnances de la loi de modernisation de l’économie, il est bon que la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire prenne ici position.

Parmi les dispositions nouvelles introduites au Sénat, certaines intéressent cependant elles aussi la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, parce qu’elles modifient les articles du code monétaire et financier issus de ces ordonnances, mais aussi par leur objet même, qu’il s’agisse de la réforme des taux d’usure citée plus haut ou de la mise en œuvre des dispositifs fiscaux de soutien à l’investissement locatif.

A.– DES DISPOSITIONS DE NATURE FISCALE ET FINANCIÈRE

À l’exception de l’article 19, tous les articles dont la commission est saisie sont issus d’amendements déposés par nos collègues sénateurs. Cinq d’entre eux n’ont pas pu être examinés par la commission spécialement désignée par le Sénat. Ils sont en effet issus d’amendements qui n’ont été déposés par nos collègues sénateurs (6) qu’au stade de la séance publique.

L’introduction de ces articles fait sortir le présent projet de loi du cadre initial pour le faire toucher désormais à la matière financière, mais aussi à la matière fiscale, et même au domaine de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme : l’article 19 bis G porte sur les modalités de gestion des OPCVM qui ont fait l’objet d’une scission sur la base de l’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers ; l’article 19 bis A s’attache à la mise en œuvre des dispositifs fiscaux Robien et Scellier en matière d’investissement locatif ; les articles 19 bis B, 19 bis C, 19 bis D visent à compléter le droit en vigueur en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux.

En examinant ces différents points, la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire assure du moins le suivi de dispositions dont elle avait eu à connaître en 2008. Elle s’est naturellement prononcée sur le dispositif Scellier, qui est l’une des mesures phares de la loi de finances pour 2009. Mais elle a également examiné partiellement la loi de modernisation de l’économie, puisqu’elle avait bénéficié, de la part de la commission des Affaires économiques, d’une sorte de délégation au fond (7) pour examiner l’article du projet de loi de modernisation de l’économie autorisant le Gouvernement à adopter les ordonnances nécessaires tant à la réforme de la gestion d’actifs qu’à la lutte contre le financement du terrorisme (8). Il a pu ainsi introduire par ordonnance dans le code monétaire et financier les articles nouveaux qui seraient modifiés par le présent projet de loi.

B.– DES DISPOSITIONS RELATIVES À LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME

Un sujet aussi important que la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme ne peut pas devenir en pratique le domaine exclusif du Parlement européen et des gouvernements nationaux, comme c’est le cas en France lorsque le Gouvernement demande de transposer la directive 2005/60 (9) par voie d’ordonnance.

Certes, l’examen du projet de loi d’habilitation pourrait du moins fournir l’occasion d’un débat de fond au Parlement. Mais, en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, l’habilitation législative de 2008 trouve précisément son origine dans un amendement qui n’avait pas pu être examiné en commission (10). L’Assemblée nationale l’avait adopté, non sans que le président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, ait déploré cette « habilitation supplémentaire, par le biais d’un amendement qui n’a pas pu être examiné en commission ». « L’utilisation de cette procédure, avait-il ajouté à cette occasion, est trop fréquente » (11).

La procédure de ratification est le symétrique de la procédure d’habilitation. Un projet de loi de ratification, tel qu’il en avait été déposé un au Sénat(12), aurait permis au Parlement de délibérer spécialement sur le droit ainsi édicté par le Gouvernement, voire d’y apporter des modifications substantielles. Mais ce débat n’a pas eu lieu sur l’amendement qui a été déposé en séance publique au Sénat le 25 mars 2009, sans avoir été examiné par la commission saisie au fond, à la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures. De cet amendement est issu le I de l’article 140 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 qui a ratifié l’ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

Au cours de la seconde et dernière lecture de la proposition de loi à l’Assemblée nationale, notre collègue Lionel Tardy a du reste estimé qu’ « il est dommage d’aller trop vite pour ratifier cette ordonnance, dans le cadre d’un texte justement destiné à réparer des erreurs et des oublis. » (13)

Les articles 19 bis B, 19 bis C et 19 bis D du présent projet de loi ne constituent que des compléments ponctuels au droit de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Ces fragments n’ouvrent certes pas la possibilité d’un débat global sur ce pan du droit financier. Ils offrent du moins l’occasion de faire le point sur le processus de formation des normes qui ont rénové en profondeur ce domaine du droit au cours des deux années écoulées.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.– DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine pour avis, sur le rapport de M. François Goulard, les articles 1er A, 19, 19 bis A, 19 bis B, 19 bis C, 19 bis D et 19 bis G du projet de loi adopté par le Sénat, portant réforme du crédit à la consommation (n° 1769).

M. le président Didier Migaud. Nous avons limité le champ de la saisine de la commission des Finances à sept articles, qui font l’objet de neuf amendements.

M. François Goulard, rapporteur pour avis. Le présent projet de loi trouve son origine dans une directive européenne de 2008, qui doit être transposée pour le 11 juin 2010. Il y a donc urgence à procéder à l’examen du texte. Tant s’en faut cependant qu’il ne se réduise à une simple transposition. Tandis que la plupart des États membres de l’Union européenne ont repris telles quelles dans leur droit les dispositions de la directive, le Gouvernement a en effet voulu mettre à profit l’examen du projet de loi pour favoriser un comportement plus responsable en matière de crédits, tant de la part des emprunteurs que des prêteurs. Il me semble qu’il a su trouver l’équilibre entre la nécessité de protéger les consommateurs et l’apparition d’un carcan législatif qui eût été particulièrement pénalisant pour le crédit à la consommation, dans une conjoncture déprimée où il peut pourtant jouer un rôle positif. Dans cette perspective, il a été guidé par l’idée qu’exclure du crédit une partie de la population n’est pas souhaitable et relèverait de l’arbitraire.

Le présent projet de loi améliorerait l’information du consommateur et obligerait les établissements de crédit à mieux former leur personnel, mieux informer leurs clients et évaluer de manière plus fine leur solvabilité. Alors que les prêts renouvelables sont ceux qui affichent aujourd’hui les taux les plus élevés et conduisent parfois à des situations de surendettement, une partie des mensualités serait désormais obligatoirement consacrée à amortir la dette contractée. Le fonctionnement des commissions de surendettement serait enfin simplifié, puisque la procédure de rétablissement personnel pourrait aboutir sans l’intervention d’un juge. C’est une avancée très positive : plus tôt est engagé le remboursement, mieux sont préservés les intérêts de toutes les parties.

Le volume des prêts à la consommation ouverts à ce jour représente un encours de 140 milliards d’euros. La consommation des ménages français est ainsi financée pour 13 % à crédit. Il s’agit d’une part plutôt faible de la consommation totale, si l’on considère que la consommation des ménages nord-américains est financée pour 40 % à crédit, les autres États membres de l’Union européenne connaissant eux aussi un recours au crédit sensiblement supérieur au nôtre.

La production de prêts, c’est-à-dire la souscription de nouveaux contrats, a néanmoins encore beaucoup baissé en France au cours de l’année écoulée, à hauteur de 15 % à 20 %. Cela donne tort à ceux qui jugeraient le consommateur français incapable d’intégrer dans sa gestion personnelle les considérations économiques liées à la crise. Il a au contraire anticipé la détérioration de la conjoncture, ne laissant pas le crédit à la consommation devenir un substitut à une potentielle baisse de revenus.

Sous-jacent aux problèmes abordés par le présent projet de loi, un débat s’est engagé sur la nécessité de constituer pour les particuliers utilisateurs de crédit un fichier positif, comme il en existe déjà un pour les petites et moyennes entreprises. Beaucoup de pays disposent ainsi d’une centrale des crédits aux particuliers. Sur l’intérêt qu’il y aurait à en créer une en France, les positions sont très partagées. Au terme de ses débats, le Sénat a adopté un article qui prévoit d’engager sur ce sujet une concertation d’une durée de trois ans. Un fichier positif permettrait de mieux apprécier les situations individuelles et dissuaderait les prêteurs d’ouvrir un crédit aux clients déjà titulaires de quatre crédits au moins, car ils courent de grands risques d’être entraînés dans la spirale du surendettement. Mais la protection des libertés publiques invite naturellement à envisager avec prudence la constitution d’un fichier qui répertorierait peut-être plusieurs dizaines de millions de personnes… Notre collègue François Loos, rapporteur de la commission des Affaires économiques, saisie au fond, propose de raccourcir à dix-huit mois le délai envisagé par le Sénat. Je suis favorable à cette sage proposition, qui me semble à même de dissiper tout soupçon de procédé dilatoire comme de conserver la possibilité d’une authentique réflexion de fond.

L’article premier A vise à corriger les effets pervers d’une réglementation qui aboutit à fixer le taux des crédits renouvelables à un niveau plus élevé que le taux des crédits amortissables, en raison d’une détermination endogène des taux de l’usure, en fonction de la catégorie de crédit. Le législateur se contenterait du reste de donner l’impulsion à une réforme réglementaire, qui enclencherait une baisse des taux les plus élevés aujourd’hui. L’article 19 tend à autoriser le Gouvernement à prendre des ordonnances qui s’inscrivent dans le prolongement de la loi de modernisation de l’économie, en tirant toutes les conséquences, quant à leur champ d’activité, de la fusion des autorités de surveillance des assurances et des banques. L’article 19 bis A constitue à l’évidence un cavalier législatif. Persuadé que notre loi ne doit pas s’encombrer de dispositions réglementaires, j’en propose la suppression. Le Gouvernement avait enfin omis certains cas dans la transposition de la directive européenne relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux. Les derniers articles que nous examinons visent à y porter remède.

M. Marc Goua. Le projet de loi comporte plusieurs dispositions importantes. En ce qui concerne le taux d’usure, il est proposé de modifier les taux applicables aux prêts, en répartissant désormais ces derniers dans des catégories définies à raison du seul montant de la somme empruntée. Je ne suis pas sûr que cela soit une bonne chose, car cela risque d’augmenter beaucoup le coût des prêts personnels, tout en faisant assez peu baisser le coût des crédits renouvelables.

Certes, il faut prendre en compte le fait que le coût de traitement d’un dossier est le même quel que soit le montant du prêt. Toutefois, il serait plus clair de distinguer les frais de dossier, et d’appliquer ensuite à tous les prêts les mêmes taux d’usure, quelle que soit la somme empruntée.

S’agissant des crédits renouvelables proposés sur les lieux de vente, le groupe socialiste veut opérer une distinction nette entre la vente du bien et la vente du crédit. Le Gouvernement nous a répondu que la formation des vendeurs allait résoudre le problème. Permettez-moi d’en douter, car les vendeurs ont tout intérêt à faire également adopter par l’acheteur le financement qui lui permet d’acquérir le bien.

Concernant la mise en place d’un fichier positif de surendettement, l’expérience de la Belgique produit des effets spectaculaires. Nous devrions nous en inspirer directement.

En matière de crédits immobiliers, les établissements bancaires n’auront plus le droit d’imposer à l’emprunteur leur propre assurance. C’est une bonne chose, mais je ne suis pas certain que cela ait un effet significatif sur le taux effectif global.

Enfin, le projet de loi prévoit d’allonger de sept à quatorze jours le délai de rétractation en matière de prêts à la consommation. C’est louable, mais il propose que ce délai soit par exception réduit à seulement trois jours si la livraison du bien est immédiate.

M. Charles de Courson. J’approuve la position du Rapporteur pour avis consistant à raccourcir à dix-huit mois le délai de réflexion sur la mise en place d’une centrale des crédits aux particuliers. Au demeurant, je constate que les associations de consommateurs ont évolué sur ce sujet et reconnaissent désormais que le fichier positif peut constituer une solution efficace pour prévenir les situations de surendettement.

La Commission passe ensuite à l’examen des articles du projet de loi dont elle est saisie pour avis.

*

* *

II.– EXAMEN DES ARTICLES

Article 1erA

Refonte des catégories de prêts à la consommation pour la détermination des seuils de l’usure

Le présent article vise à définir les catégories de prêts à la consommation sur la seule base de leur montant, afin d’ouvrir la voie à une réforme réglementaire du dispositif de l’usure.

Issu d’un amendement de nos collègues sénateurs, le présent article ne figurait pas dans le projet de loi initial car il n’est pas indispensable à la transposition de la directive du 23 avril 2008. La notion d’usure aurait en effet été difficile à harmoniser au niveau européen, puisque la plupart des États membres de l’Union européenne ne fixent pas de taux plafond au crédit à la consommation. Dans d’autres États membres, comme l’Allemagne, ce sont les tribunaux qui se chargent d’évaluer au cas par cas si un crédit a pu être accordé à un taux excessif. La directive européenne conserve du moins aux États membres la possibilité de plafonner les taux des crédits consentis aux particuliers (14).

Le dispositif français d’encadrement de l’usure a quant à lui beaucoup vieilli. De l’aveu des associations de consommateurs comme des professionnels du crédit ou des organismes publics concernés, il est nécessaire de le réformer. N’ayant pas été modifié depuis 1990, il aboutit, selon l’expression de la ministre de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi, à des « dysfonctionnements paradoxaux » (15). L’examen d’un projet de loi réformant le crédit à la consommation paraît offrir une bonne occasion de créer les conditions législatives à une refonte de ce dispositif de nature réglementaire.

I.– LES « DYSFONCTIONNEMENTS PARADOXAUX » DU DISPOSITIF ACTUEL DE L’USURE

L’article L. 313-3 du code de la consommation dispose que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l’autorité administrative après avis du Comité consultatif du secteur financier. »

Sur cette base législative, un arrêté du ministre des Finances, de l’économie et de l’industrie définit trois catégories de prêts à la consommation destinés aux particuliers (16) :

– les prêts d'un montant inférieur ou égal à 1 524 euros ;

– les découverts en compte, prêts permanents et financements d'achats ou de ventes à tempérament d'un montant supérieur à 1 524 euros et prêts viagers hypothécaires ;

– les prêts personnels et autres prêts d'un montant supérieur à 1 524 euros.

Ces prêts sont donc définis non seulement à raison de leur montant, mais aussi à raison de leur forme ou encore de la destination de la somme empruntée. Le seuil de 1 524 euros n’est pas totalement arbitraire, puisqu’il résulte de la conversion en euros de la somme de 10 000 francs. Il a cependant valeur de vestige, renvoyant à une unité de compte qui n’est plus en usage depuis plusieurs années.

Si le cadre reste figé, l’offre de crédit a néanmoins continué de se développer pour s’adapter à l’évolution de l’économie. Seuls les taux d’un prêt permanent ou renouvelable pouvant permettre de rémunérer un risque important, les prêteurs ont eu tendance à orienter les ménages aux plus bas revenus vers ce type de crédits puisque, au-delà de 1 524 euros, ils peuvent choisir entre deux types de crédits à proposer à leur clientèle. Par contrecoup, l’autre catégorie de crédits supérieurs à 1 524 euros, les prêts amortissables, ont eu tendance à devenir le domaine réservé des ménages à la solvabilité très sûre.

Avec les années, les catégories réglementaires ont donné naissance à un compartimentage rigide qui enferme les ménages aux plus bas revenus dans une forme de crédit particulièrement coûteuse à court et à long terme, puisque les taux sont élevés et la dette jamais amortie pour eux. En d’autres termes, le Gouvernement constate que les défauts du dispositif de l’usure « d’une part, peuvent conduire à exclure des catégories d’emprunteurs de certains types de crédits et d’autre part pourraient contribuer à la persistance de taux d’intérêt très élevés sur certains segments de marchés » (17). Une législation conçue pour protéger les emprunteurs finit par se retourner ainsi contre les plus faibles d’entre eux.

Il faudrait prendre également en considération les ménages qui n’ont, du fait de la spécialisation des risques, même plus accès à l’offre de crédit, y compris pour de très faibles sommes. L’expression de « dysfonctionnements paradoxaux » apparaît bel et bien comme un euphémisme pour décrire les effets d’un droit injuste et inefficace.

II.– LE COUP D’ENVOI LÉGISLATIF À UNE RÉFORME RÉGLEMENTAIRE

A.– UNE HEUREUSE INSERTION DANS LE PRÉSENT PROJET DE LOI

Même s’il est en règle générale peu souhaitable que le présent projet de loi s’alourdisse de dispositions qui aillent au-delà de la stricte transposition de la directive européenne du 23 avril 2008, il faut reconnaître qu’il constitue un vecteur idéal pour amener une réforme des taux d’usure qui n’a que trop tardé.

Le droit de l’usure ne concerne pas que le crédit à la consommation, mais s’y rattache actuellement au premier chef. « La problématique de l’usure se concentre aujourd’hui sur les questions liées au crédit à la consommation, et beaucoup moins sur les questions liées au crédit immobilier », explique ainsi un récent rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales (18). Il était donc logique de rattacher cet article additionnel au présent projet de loi.

Au demeurant, le présent article respecte de manière scrupuleuse le partage entre la loi et le règlement. En prévoyant dans son troisième alinéa que les catégories de prêts soient seulement définies à raison de leur montant, il se contente de donner une indication au pouvoir réglementaire et de tracer les contours de la réforme que ce dernier devra mettre en œuvre.

Pour le reste, le cinquième alinéa du présent article prévoit seulement une période de transition de deux ans avant la mise en œuvre complète d’un nouveau dispositif. Ces dispositions vertueuses doivent préserver la profession du crédit de changements brutaux dans l’environnement juridique.

B.– LA RÉFORME RÉGLEMENTAIRE EN FILIGRANE

Une réflexion de fond est engagée depuis le début de l’année 2009 sur la réforme du dispositif réglementaire de l’usure. Publié en février 2009, le rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales constitue la base de travail nécessaire à la concertation qui s’est ouverte avec les professionnels du crédit et les associations de consommateurs. En juin 2009, la commission spéciale du Sénat a pu ainsi recommander des solutions pratiques adaptées aux besoins constatés (19) et qui ne devraient pas être très éloignées de la réforme finalement retenue par le pouvoir réglementaire.

Selon toute vraisemblance, le seuil suranné de 1 524 euros serait relevé à 3 000 euros. Un second seuil serait introduit aux alentours de 6 000 euros. Trois tranches feraient ainsi leur apparition, contre deux auparavant. Elles correspondraient peu ou prou aux trois grands types de besoins des consommateurs : un défaut momentané de trésorerie ou les dépenses afférentes à une installation, comme l’achat d’une machine à laver, d’un réfrigérateur etc. seraient couverts par un prêt allant jusqu’à 3 000 euros ; un prêt compris entre 3 000 et 6 000 euros devrait permettre de financer l’achat d’un véhicule d’occasion ; les dépenses plus importantes, tels l’achat d’une voiture neuve ou les gros travaux d’aménagement, relèveraient de la dernière tranche.

Il est malaisé de conjecturer à quel niveau les taux s’établiront dans les nouveaux compartiments du marché du crédit à la consommation. Il est aujourd’hui peu risqué de prêter 1 524 euros à un ménage français, puisque le défaut de paiement est rare sur une faible somme. Il n’en ira pas de même sur un montant deux fois plus important. Sur ce segment précis de marché, une hausse des taux paraît difficile à exclure. En rémunérant mieux les prêteurs, elle leur permettrait du moins de proposer plus de crédit amortissable sur cette tranche.

Il faut, semble-t-il, attendre principalement deux effets positifs de la réforme. Elle devrait permettre d’ouvrir le marché de l’offre amortissable aux ménages qui sont enfermés aujourd’hui dans le crédit renouvelable. En décloisonnant le marché, elle ouvrirait également le chemin à une meilleure mutualisation des risques, puisque la segmentation du marché ne serait plus possible pour des prêts de montant équivalent. Abaissant le coût du crédit, elle conduirait à un plus large accès à celui-ci.

Pour que la réforme produise tous ses effets bénéfiques, les établissements prêteurs doivent cependant être en mesure d’approcher la clientèle qui était jusqu’à présent exclue d’un certain type de crédits, voire de l’ensemble d’entre eux, au motif que sa solvabilité est trop difficile à apprécier de manière sûre. Dans cette perspective, il ne serait pas inutile, voire tout à fait indiqué, d’autoriser la constitution d’une centrale universelle des crédits, telle que beaucoup de Français croient qu’il en existe déjà une. (Voir encadré)

C.– L’AMÉNAGEMENT D’UNE PÉRIODE TRANSITOIRE

Ce n’est pas le moindre mérite du présent article que de prévoir une période de transition de deux ans pour la mise en œuvre de la réforme. N’étant pas dans le champ de la directive, la régulation de l’usure peut aller à son rythme. Le législateur a ici les coudées plus franches que sur la plupart des autres dispositions.

Une concertation sera de toute façon bienvenue entre les associations de consommateurs, les professionnels du crédit et les pouvoirs publics pour calibrer au mieux les taux d’usure dans les nouveaux compartiments de crédit. Aussi sera-t-il nécessaire de suivre et d’analyser le niveau et l’évolution des taux d’intérêt des crédits aux particuliers. Faut-il néanmoins pour cela un comité spécial dont la loi fixe les modalités de fonctionnement et les pouvoirs d’investigation ? C’est ce que prévoit le huitième alinéa du présent article.

VERS UNE CENTRALE DES CRÉDITS AUX PARTICULIERS ?

« L’octroi d’un crédit est subordonné à la capacité qu’a le banquier d’évaluer la solvabilité de l’emprunteur. Dans un monde d’information imparfaite, les renseignements sur la capacité d’un emprunteur à rembourser ses dettes et sur sa discipline financière constituent des éléments essentiels pour l’analyse du risque et la prise de décision du banquier. » Le Rapporteur pour avis pourrait reprendre à son compte chacun des termes de cette analyse, publiée dans le Bulletin de la Banque de France d’août 2006(20).

Elle concerne cependant le recensement des concours accordés par les banques aux … entreprises. Car s’il existe une centrale des crédits pour les petites et moyennes entreprises, il n’en existe pas en France pour les particuliers. Notre pays fait figure d’exception à cet égard parmi les pays économiquement développés.

Une centrale des crédits aux particuliers serait cependant un outil de lutte efficace contre le surendettement. Les établissements de crédit savent qu’un emprunteur ayant déjà contracté quatre prêts a de fortes chances d’affronter des difficultés de paiement. Mais ils ne peuvent aujourd’hui vérifier de manière simple et sûre l’information. Cela permettrait pourtant de traiter à la racine un problème social lancinant.

Certains établissements dont le Rapporteur pour avis a entendu les responsables ont réalisé auprès de leur clientèle des enquêtes d’opinion dont il ressort que les Français sont du reste persuadés qu’il existe déjà un fichier centralisé. Un pas décisif vers le surendettement est franchi lorsqu’un emprunteur apprend qu’il n’en est rien en réalité.

L’existence d’un fichier des mauvais payeurs, ou fichier des incidents de remboursement de crédits aux particuliers (FICP), ne peut pallier de la même manière les carences du marché du crédit. Comme liste noire, il n’en constitue en effet que l’angle mort. Du point de vue d’un meilleur fonctionnement du marché, il ne faut donc pas attendre grand-chose de sa rénovation prévue au chapitre III du titre IV du présent projet de loi. Seul un fichier positif peut rétablir plus de transparence et de fluidité de l’information sur les crédits aux particuliers.

Une nouvelle centrale des risques favoriserait la formation d’un juste prix du crédit. Par le jeu de la concurrence libre et loyale, elle en abaisserait les coûts d’octroi et amènerait ainsi une détente sur les taux offerts aux consommateurs. Cela permettrait en définitive d’élargir l’accès au marché du crédit, en pariant sur la lucidité des acteurs, prêteurs et emprunteurs confondus.

Encore faut-il s’entendre sur la nature de cette centrale des crédits aux particuliers. Dans l’esprit du Rapporteur pour avis, il ne pourrait s’agir que d’un dispositif limité, établi dans le strict respect des libertés publiques et géré aux frais de la profession. Les renseignements recensés porteraient seulement sur le nombre de crédits en cours et sur leur montant. Ils ne pourraient servir à la prospection commerciale. Les associations professionnelles supporteraient la charge du premier contrôle, tandis que la Banque de France exercerait une supervision sur l’ensemble.

Il faut donc regretter que l’article 27 bis du présent projet de loi vise à renvoyer la création d’une centrale des crédits aux particuliers aux débats d’une commission ad hoc, qui aurait trois ans pour conduire ses travaux et rendre ses conclusions.

S’il naît d’une nécessité, un tel comité ne devrait pas lui survivre. Son extinction au terme de la période transitoire n’est pourtant pas prévue. En outre, il n’appartient pas au législateur de définir les modalités de fonctionnement d’une telle instance. Le huitième alinéa du présent article va néanmoins jusqu’à fixer le rythme de ses réunions. Le principal problème réside pourtant dans la nature des investigations que ce comité conduirait. Non content d’analyser l’évolution des taux du crédit aux particuliers, il mettrait en effet sous surveillance les marges des établissements de crédit. Cette volonté inquisitoriale semble tout aussi éloignée des objectifs initialement affichés que des principes de la libre entreprise. Il revient plutôt aux médias d’enquêter sur le marché du crédit – certains le font très bien, et sans frais pour le contribuable.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement n° 4 de M. Marc Goua.

M. Marc Goua. Il s’agit de revoir les règles de calcul du taux d’usure dont les variations suivraient celles du taux de refinancement des banques, en réduisant l’écart entre les taux observés selon la catégorie ou le montant des crédits.

Les premières analyses indiquent que les modifications proposées par le présent projet de loi conduiraient à une augmentation du taux des prêts personnels de 6,5 points, alors que les taux des crédits renouvelables diminuent de 6 points. Or les premiers représentent la majorité des crédits accordés. Les banques font donc une bonne affaire.

M. le rapporteur pour avis. Je ne suis pas d’accord avec votre analyse. D’après la Banque de France, dont l’impartialité ne saurait être mise en doute, le dispositif proposé conduirait à une diminution du taux d’usure pour les emprunts de moins de 3 000 euros. L’adoption de votre amendement conduirait à exclure de l’accès au crédit une partie de la population. À tel ou tel moment de la vie, il est pourtant nécessaire d’y recourir.

La Commission rejette l’amendement n° 4.

La Commission est saisie de l’amendement n° 2 de M. Marc Goua.

M. Marc Goua. Les dispositions en préparation ont fait l’objet d’une concertation assez longue pour que six trimestres suffisent à leur mise en œuvre.

M. le rapporteur pour avis. Cette période de transition serait de nouveau ouverte après chaque modification du régime de l’usure, non pas seulement après celle qui est actuellement prévue. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement n° 2.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement n° 8 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il est proposé de créer un nouveau comité, alors que de nombreuses instances existantes peuvent suivre et analyser l’évolution des taux de l’usure, à commencer par notre Commission. L’institution de nouveaux comités n’est vraiment pas la panacée. Je propose donc de supprimer l’alinéa 8 du présent article.

La Commission adopte l’amendement n° 8.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er A ainsi modifié.

*

* *

Après l’article 1er A

La Commission est saisie de l’amendement n° 3 de M. Marc Goua.

M. Marc Goua. Mon amendement vise à instituer un garde-fou pour limiter les écarts entre taux fixe et taux variable.

M. le rapporteur pour avis. Au cours des années 1990, les taux courts ont été pendant plusieurs années plus élevés que les taux longs. De telles dispositions auraient alors induit une interdiction pure et simple des prêts à taux variable. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement n° 3.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement n° 5 de M. Jean-Pierre Gorges.

M. Jean-Pierre Gorges. Cet amendement vise à soutenir les Français qui souhaitent investir dans le micro-crédit en leur offrant la possibilité d’ouvrir, sur le modèle du livret A, un livret d’épargne destiné à financer des projets de développement local. Il est le fruit d’une réflexion que j’ai engagée avec notre collègue Jérôme Bignon, car nous pensons que le micro-financement peut produire des effets aussi positifs qu’un grand emprunt.

M. le rapporteur pour avis. Le micro-crédit permet de développer les très petites entreprises. Il me semble utile, notamment pour mieux le faire connaître, de l’adosser à un livret d’épargne spécial.

La Commission adopte l’amendement n° 5.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement n° 7 de M. Jean-Pierre Gorges.

M. Jean-Pierre Gorges. En faisant obligation aux banques de présenter chaque année un rapport sur l’évolution du micro-crédit, la loi permettrait de mieux en assurer le suivi. Il serait du reste peut-être judicieux de créer une mission d’information qui s’en charge.

M. le rapporteur pour avis. Ce serait un rapport de plus. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement n° 7.

Elle adopte ensuite l’amendement n° 6, qui vise à permettre aux personnes physiques de financer directement les organismes de microfinance.

*

* *

Article 19

Habilitation à légiférer par voie d’ordonnance

Le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre, par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires au renforcement et à la généralisation des contrôles et des sanctions en matière de respect des obligations à l'égard de la clientèle dans les domaines des produits et services financiers et d'assurance, des opérations de crédit, de la mise à disposition de moyens de paiements et de la fourniture d'autres services bancaires. Ces mesures porteraient en tant que de besoin sur les champs de compétences des autorités et services qui interviennent dans le contrôle de ces activités.

La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a habilité le Gouvernement à procéder dans les dix-huit mois au rapprochement de la Commission bancaire et de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM)(21). Elle a également habilité le Gouvernement à « ajuster les champs de compétence de ces autorités et d’autres entités susceptibles d’intervenir dans le contrôle de la commercialisation de produits financiers afin de rendre celui-ci plus homogène »(22). Le champ de cette habilitation est cependant trop étroit pour autoriser le Gouvernement à prendre également des mesures en matière de commercialisation des services bancaires. Dans le présent projet de loi, le Gouvernement demande ainsi une habilitation qui s’inscrit dans le prolongement de celle qui est contenue dans la loi de modernisation de l’économie.

I.– LA MODERNISATION EN COURS DU CONTRÔLE DU SECTEUR FINANCIER

Une nouvelle autorité doit bientôt voir le jour dans le domaine du contrôle de la banque et de l’assurance. Le 2 octobre 2009, la ministre de l’Économie a ouvert une consultation sur le projet d’ordonnance qui prévoit la fusion de la Commission bancaire et de l’ACAM.

Comme rapporteur du projet de loi de sécurité financière de 2003, le Rapporteur pour avis avait pris position en faveur de la création d’un gendarme du crédit. La loi de sécurité financière a en effet organisé la fusion de la Commission de Contrôle des Assurances (CCA) et de la Commission de Contrôle des Mutuelles et des Institutions de Prévoyance (CCMIP) pour créer la Commission de Contrôle des Assurances, des Mutuelles et des Institutions de Prévoyance (CCAMIP), devenue l’ACAM en vertu de la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005.

Dès 2003, la création d’un gendarme du crédit apparaissait comme une nécessité à moyen terme :

« Fallait-il aller plus loin et fusionner, au sein de la nouvelle autorité, les organismes de contrôle des banques et des assurances ? Sur un plan pratique, on peut faire observer qu’il n’aurait pas été judicieux de brûler les étapes, commentait ainsi le Rapporteur de la loi de sécurité financière. Il est probable cependant qu’il conviendra de mettre sur pied demain, à l’instar de ce que plusieurs pays européens ont déjà fait, une grande autorité financière unique. » (23)

La loi de modernisation de l’économie a autorisé le Gouvernement à édicter par ordonnance cette fusion des autorités d’agrément et de contrôle de la banque et de l’assurance. Le projet d’ordonnance ouvert à la consultation le 2 octobre 2009 dessine les contours de la nouvelle autorité. L’autorisation contenue dans la loi de modernisation de l’économie n’étant valable que dix-huit mois, le Gouvernement devrait édicter l’ordonnance avant le 5 février 2010.

Ce serait la nouvelle autorité créée par l’ordonnance qui serait chargée de la supervision prévue par le présent article.

II.– LA SUPERVISION DES OBLIGATIONS PROFESSIONNELLES À L’ÉGARD DE LA CLIENTÈLE

Le présent article vise à autoriser le Gouvernement à prendre des ordonnances dans un domaine limité, celui du respect des obligations professionnelles à l’égard de la clientèle dans le secteur financier.

Le Sénat a adopté le présent article sans modification le 17 juin 2009. En juillet 2009, une mission de conseil de l’Inspection générale des finances a rendu un rapport sur le sujet (24). Elle dresse un constat préoccupant :

« L’importance de l’asymétrie d’information potentielle entre acheteur et vendeur dans la sphère financière justifie des processus spécifiques de protection de l’utilisateur de produits et services financiers, estime-t-elle. (…) La mission a été frappée, au cours de ses nombreux contacts, par la perception générale d’une cassure dans le lien de confiance entre le secteur financier et ses clients, en France comme dans d’autres pays. Or le retour de la confiance est un préalable au rétablissement de circuits normaux de financement de notre économie et donc à la relance de la croissance. »

Selon la mission, il convient de travailler dans trois directions : passer d’une réglementation sectorielle à une approche transversale, développer la supervision de la conduite des affaires et mieux superviser les intermédiaires. La mission préfère en effet la notion de supervision à celle de surveillance. Certes, la nouvelle autorité issue de la fusion de l’ACAM et de la Commission bancaire serait responsable en dernier ressort du respect des obligations professionnelles à l’égard de la clientèle. Mais elle agréerait les associations professionnelles les plus représentatives pour exercer les premiers contrôles. Cela permettrait d’éviter des effectifs de contrôle pléthoriques, sans exclure toutefois une intervention directe de l’autorité de supervision (25).

Quant aux sanctions, elles ne peuvent être prévues que sur la base d’une norme de niveau législatif. Or l’habilitation contenue dans la loi de modernisation de l’économie ne prévoit pas la possibilité de renforcer le pouvoir de sanction de la nouvelle autorité par rapport aux entités qu’elle remplace. Le présent article vise principalement à combler cette lacune.

*

* *

M. le rapporteur pour avis. Le présent article tend à habiliter le Gouvernement à prendre des ordonnances sur le champ limité du respect des obligations professionnelles à l’égard de la clientèle.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 sans modification.

*

* *

Article 19 bis A

Publicité en matière d’investissement dans le logement locatif aidé

Le présent article consiste en un alinéa unique, qui prévoit que toute publicité relative à une opération d’acquisition de logement à la location et bénéficiant des dispositifs Scellier ou Robien doit comporter une mention indiquant que le non-respect des engagements de location entraîne la perte du bénéfice des incitations fiscales. Il est issu d’un amendement déposé en séance publique par nos collègues sénateurs.

I.– LE CRÉDIT IMMOBILIER N’EST PAS LE CRÉDIT À LA CONSOMMATION

Il paraît difficile de justifier l’insertion d’une disposition aussi détaillée
– la taille des caractères est même prévue – dans un texte de loi. Le Rapporteur pour avis a déjà eu l’occasion de déplorer, au cours de la précédente législature, les entorses au partage établi par la Constitution entre le domaine du législateur (article 34) et le domaine du pouvoir réglementaire (article 37). Il ne peut que rester sur sa position qu’ « encombrer la loi de dispositions évidemment réglementaires nuit à sa lisibilité et, à la longue, l’abaisse de façon préjudiciable, à un niveau qui n’est pas le sien »
(26).

Le présent article n’entretient au demeurant qu’un lien ténu avec l’objet du présent projet de loi. Comme son nom l’indique, ce dernier porte en effet principalement sur le crédit à la consommation. Certes, le chapitre premier de son titre II est intitulé « Contrats de crédit immobilier et assurance emprunteur ». Mais il se borne pour l’essentiel à tirer les conséquences, pour la définition du champ du crédit immobilier, de la nouvelle définition qui serait donnée au crédit à la consommation. Si la loi lui était déférée, le Conseil constitutionnel pourrait donc considérer une disposition spécifique au crédit immobilier comme « dépourvue de tout lien avec les dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé » (27).

À supposer même que des dispositions relatives au crédit immobilier entrent, au sens du Conseil constitutionnel, dans le champ du présent projet de loi, le présent article s’appliquerait au-delà des situations où un tel prêt est contracté. Il porte en effet sur une information relative à l’acquisition d’un logement, mais non à l’emprunt permettant éventuellement de financer celle-là. Cette différence n’est pas purement formelle. Car tous les dispositifs de soutien à l’investissement locatif n’induisent pas l’acquéreur à emprunter.

II.– UNE DISPOSITION PRÉVUE POUR UN DISPOSITIF EN VOIE D’EXTINCTION

Certes, l’avantage garanti par le dispositif Robien consiste en une diminution de l’impôt sur le revenu dérivant de l’imputation d’un déficit foncier sur le revenu imposable. Ce déficit foncier naît d’un amortissement légal exceptionnel du bien, qui est maximal seulement si les revenus fonciers tirés de l’opération sont contrebalancés, et pour ainsi dire neutralisés, par des frais et charges locatives telles que les dépenses d’entretien, les frais de gestion, les primes d’assurance contre les dégradations ou impayés, ou encore … les intérêts de l’emprunt contracté pour financer l’acquisition. L’architecture du dispositif encourage donc l’investisseur à financer son acquisition par l’emprunt, sous peine de perdre tout ou partie de l’avantage fiscal escompté.

Mais il n’en va pas de même du dispositif Scellier. Ce dernier garantit en effet à l’acquéreur d’un bien destiné à la location une réduction d’impôt sur le revenu égale à un pourcentage de son prix. Étalée sur neuf, douze ou quinze ans, cette réduction d’impôt est indépendante de l’imputation d’un déficit foncier sur le revenu imposable. Le contribuable n’est donc pas incité de la même manière à financer son acquisition par l’emprunt, d’autant que les revenus fonciers tirés de l’opération peuvent faire l’objet d’un abattement de 30 % si le bien est donné à bail à des locataires aux faibles revenus (28). L’acquisition peut donc avoir aussi un intérêt fiscal pour des investisseurs disposant de fonds à placer et ne souhaitant pas emprunter.

Les débats en séance publique au Sénat ont montré que les auteurs de l’amendement portant article additionnel ont entendu viser avant tout le dispositif Robien, plutôt que le dispositif Scellier : « Il me semble utile, a expliqué notre collègue sénateur M. Philippe Dallier, d’exiger que les acquéreurs de tels produits [produits d’investissement locatif] soient clairement informés des risques encourus. S’il est vrai que le dispositif Scellier a été recentré sur les zones où le marché du logement est le plus tendu, poursuivait-il, il reste les opérations relevant du dispositif Robien, qui peuvent encore poser problème. » Même s’il retient le dispositif Robien de préférence au dispositif Scellier pour des raisons tenant plus au zonage qu’aux modalités de financement, le défenseur de l’amendement annonce lui-même que le présent article est d’abord conçu pour le dispositif Robien.

Or le dispositif Robien s’éteindra au 31 décembre 2009. Selon toute probabilité, les brochures publicitaires en vantant les mérites sont déjà devenues très rares. Il faut donc rayer du présent article une référence qui sera périmée quand la loi entrera en vigueur. Cette référence une fois supprimée, le présent article aura cependant l’inconvénient d’être plus éloigné encore de l’objet du présent projet de loi que dans son libellé actuel, puisque le lien avec l’emprunt immobilier ne sera plus du tout établi. Au demeurant, selon les intentions mêmes de ses auteurs, l’article ne présentera plus qu’un intérêt limité s’il est cantonné au dispositif Scellier.

*

* *

M. le rapporteur pour avis. Cet article est de toute évidence un cavalier législatif. Il prévoit en outre de mettre en garde les investisseurs du dispositif Robien, qui est en voie d’extinction. Le dispositif Scellier repose quant à lui sur un mécanisme dont le fonctionnement n’est pas amélioré par la souscription d’un crédit. Je vous accorde qu’il s’agit peut-être de ma part d’une manifestation de purisme législatif, mais j’estime que la taille des caractères qui mentionnent les modalités de l’engagement fiscal relève tout au plus d’un décret.

La Commission est saisie de l’amendement n° 1 de M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Je ne partage pas cette analyse. S’il s’agit d’un cavalier, ce ne serait pas le premier. Au demeurant, le Sénat n’a pas inséré par hasard cette disposition dans le projet de loi. Beaucoup de particuliers se sont trouvés acculés à la ruine après avoir acheté un bien dans l’espérance de bénéfices fiscaux auxquels ils n’ont finalement pu prétendre, car les travaux n’ont parfois même pas été achevés, ou le bien n’a pas été livré, ou il n’a pas trouvé de locataire. Il est donc nécessaire de rappeler à tous les investisseurs qu’il ne s’agit pas d’une pure opération fiscale, mais d’abord d’une acquisition immobilière. Je propose donc plutôt d’étendre la mise en garde prévue par cet article à tous les dispositifs similaires, comme le dispositif Demessine pour l’outre-mer, ou encore le dispositif Malraux.

M. le rapporteur pour avis. Sur le fond, vous avez tout à fait raison. J’y suis tout compte fait favorable et je retire mon amendement de suppression.

La Commission adopte l’amendement n° 1 de M. Henri Nayrou, l’amendement n° 9 du rapporteur pour avis étant retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 bis A ainsi modifié.

*

* *

Article 19 bis B

Définition des groupes soumis à l’obligation d’échanger des informations nécessaires à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

Le présent article vise à étendre les échanges d’information entre entreprises d’un même groupe, en autorisant aussi entre les entreprises d’un même groupe d’assurance, d’une même union mutualiste ou d’une même union d’institutions de prévoyance la communication de renseignements nécessaires à l’organisation de la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme. Il est issu d’un amendement déposé en séance publique par nos collègues sénateurs.

I.– L’ÉCHANGE DE RENSEIGNEMENTS ENTRE ENTREPRISES POUR LUTTER CONTRE LE BLANCHIMENT DE CAPITAUX

Les entreprises du secteur bancaire et financier sont tenues au secret professionnel, mais les exigences de la lutte contre le blanchiment des capitaux justifient une dérogation légale à cette obligation. Comme rapporteur du projet de loi de sécurité financière, le Rapporteur pour avis s’est déjà penché en 2003 sur ce sujet(29). Le présent article modifie précisément une disposition issue de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière. Depuis 2003, l’article L. 511-34 du code monétaire et financier prévoit ainsi que les entreprises faisant partie d’un groupe financier doivent transmettre aux entreprises du même groupe non seulement les renseignements relatifs à leur situation financière, mais aussi les informations nécessaires à l’organisation de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Certains groupes ne sont pas compris dans le champ de la dérogation. Le présent article vise à combler cette lacune. Il tend à inclure dans l’article L. 511-34 des groupes qui unissent des sociétés d’assurance, des mutuelles ou des institutions de prévoyance. Il fait donc référence aux trois codes qui régissent ces différentes personnes morales : le code des assurances, le code de la mutualité et le code de la sécurité sociale. Les groupes visés par le présent article seraient ainsi : les sociétés de groupe d’assurance et sociétés de groupe mixtes d’assurance (article L. 322-1-2 du code des assurances) ; les unions mutualistes (article L. 111-4-2 du code de la mutualité) ; les unions d’institutions de prévoyance (article L. 933-2 du code de la sécurité sociale).

L’article 19 bis D du présent projet de loi procéderait, par voie de conséquence, à une insertion identique à l’article L. 561-20 du même code, où sont précisées les obligations de déclaration des établissements concernés.

II.– UNE ADJONCTION INSATISFAISANTE AU PROJET DE LOI

Le lien du présent article avec l’objet du présent projet de loi n’est pas plus clairement établi que pour les deux autres dispositions du projet de loi relatives à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme, à savoir les articles 19 bis C et 19 bis D du présent projet de loi.

Le Rapporteur général de la commission des Finances du Sénat, M. Philippe Marini, s’est efforcé de prévenir cette critique lorsqu’il a défendu en séance publique les amendements dont sont issus ces trois articles additionnels, qui n’ont pas été examinés par la commission spéciale du Sénat. Il a souligné que « ces différents amendements tendent à renforcer le contrôle des activités et des produits financiers. C’est pourquoi, a-t-il déclaré, je les ai rattachés au titre III de ce projet de loi, qui concerne le contrôle de la commercialisation des produits d’assurance et des opérations de crédit. Les mesures que je propose s’inscrivent donc exactement dans les limites prévues par le titre III. » (30)

Il faut souhaiter que le Conseil constitutionnel se range à cette analyse, si la loi lui est déférée. Il pourrait considérer au contraire qu’une disposition spécifique à la lutte anti-terroriste est « dépourvue de tout lien avec les dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé »(31). La lutte contre le financement du terrorisme n’entre certes pas dans le champ des obligations à l’égard de la clientèle, même si c’est à l’occasion des relations avec cette dernière que les établissements peuvent rassembler les renseignements qu’ils devront transmettre.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 bis B sans modification.

*

* *

Article 19 bis C

Périmètre des organismes mutualistes soumis aux obligations relatives à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

Le présent article vise à préciser le périmètre des organismes du code de la mutualité soumis aux obligations de lutte contre le blanchiment.

I.– LA TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE EUROPÉENNE RELATIVE AU BLANCHIMENT DES CAPITAUX

Née des efforts pour lutter contre le terrorisme, redoublée après les attaques du 11 septembre 2001, la directive n° 2005/60 du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme a été adoptée le 26 octobre 2005. Son article 45 en fixe le délai de transposition par les États membres au 15 décembre 2007.

Les dispositions législatives nécessaires n’ayant pas encore été adoptées au printemps 2008, le Gouvernement a demandé au Parlement de l’autoriser à transposer par voie d’ordonnance les dispositions de la directive auxquelles la France doit se conformer par une adaptation législative. Pour ce faire, il a déposé à l’Assemblée nationale un amendement à l’article d’habilitation inclus dans le projet de loi de modernisation de l’économie. L’Assemblée nationale l’a adopté, non sans que le président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, ait déploré cette « habilitation supplémentaire, par le biais d’un amendement qui n’a pas pu être examiné en commission ». « L’utilisation de cette procédure, a-t-il ajouté à cette occasion, est trop fréquente » (32).

Sur la base de l’article 152 de la loi de modernisation de l’économie ainsi complété (33), le Gouvernement a édicté l'ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Il s’est notamment heurté à cette difficulté que la notion d’ « établissement financier » définie dans la directive (34) ne recouvre pas une catégorie d’établissements préétablie en droit français. L’ordonnance recense donc sous la forme d’une liste les personnes assujetties aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Elle crée à cette fin l’article L. 561-2 du code monétaire et financier, où figurent notamment les établissements du secteur bancaire, les entreprises d’assurance, les institutions de prévoyance, mais aussi les « mutuelles et unions régies par le livre II du code de la mutualité » (4° de l’article L.561-2).

Par cette dernière formule, le cercle des mutuelles assujetties aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux n’est cependant pas défini de manière optimale au regard de la directive 2005/60. Le livre II du code de la mutualité régit en effet seulement les « mutuelles et unions pratiquant des opérations d'assurance, de réassurance et de capitalisation ». Mais le livre III du même code régit les mutuelles sanitaires et sociales qui, dans certaines circonstances, peuvent procéder à la gestion de règlements mutualistes et de contrats pour le compte des mutuelles du livre II. Elles se trouvent alors elles aussi être le point de passage de flux financiers. Il convient donc de les soumettre aux règles anti-blanchiment.

À l’inverse, toutes les mutuelles n’entrent pas dans le champ de la directive. Il faut éviter de soumettre inutilement certaines d’entre elles à de lourdes obligations de déclaration, mais aussi d’archivage de leurs données. Selon les informations recueillies par le Rapporteur pour avis, une insertion dans le livre I aurait été trop large à cet égard, car il porte sur les règles générales de constitution des mutuelles, fédérations et unions de mutuelles. Une référence générale au livre I aurait donc soumis l’ensemble des mutuelles aux obligations nées de la lutte contre le blanchiment de capitaux.

Le présent article propose en définitive une solution médiane qui paraît équilibrée. Seraient assujetties aux obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux les « mutuelles et unions visées au 1° du I de l’article L. 111-1 du code de la mutualité et les mutuelles et unions qui procèdent à la gestion des règlements mutualistes et des contrats pour le compte des premières ».

II.– UN COMPLÉMENT À LA RATIFICATION DE L’ORDONNANCE N° 2009-104

D’après la cellule anti-blanchiment destinataire l’an dernier des 11 511 déclarations de soupçon, l’écrasante majorité d’entre elles sont cependant le fait des établissements bancaires et des entreprises d’assurance. En 2008, seules 10 déclarations émanaient de mutuelles (35). Il semble peu probable que ce nombre sera subitement beaucoup plus élevé une fois modifié l’article L. 561-2 du code monétaire et financier. Mais la faible importance numérique observable aujourd’hui est peut-être due en partie à la définition actuelle.

Le présent article constitue un complément à la ratification de l’ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. L’ordonnance a été ratifiée par le I de l’article 140 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 bis C sans modification.

*

* *

Article 19 bis D

Définition des groupes soumis à l’obligation d’information sur l’existence et le contenu des déclarations de soupçon

Le présent article vise à renforcer la lutte contre le blanchiment en étendant les échanges d’information intragroupes à tous les groupes, qu’ils soient bancaires, d’assurance ou de prévoyance.

Le présent article forme avec l’article 19 bis B un diptyque, dont le premier volet délierait du secret professionnel, sous certaines conditions, de nouvelles personnes morales, tandis que le second volet fixerait les obligations des mêmes personnes morales en matière de déclaration et d’échange d’informations.

La troisième directive européenne anti-blanchiment (36) a étendu les possibilités de divulgation entre établissements d’un même groupe ou réseau bancaire, et même entre établissements non membres d’un même groupe, pour peu qu’ils soient soumis à des « obligations équivalentes en matière de secret professionnel et de protection des données à caractère personnel » (37). En droit français, c’est l’article L. 561-20 du code monétaire et financier qui traite des obligations déclaratives au sein des groupes. Il est issu de l’ordonnance n° 2009-104 qui a transposé la directive européenne.

L’article L. 561-20 du code monétaire et financier ne transpose pourtant pas encore la logique de la directive aux groupes qui unissent des sociétés d’assurance, des mutuelles ou des institutions de prévoyance. Le présent article vise à combler cette lacune. Il fait donc référence aux trois codes qui régissent ces différentes personnes morales : le code des assurances, le code de la mutualité et le code de la sécurité sociale. Les groupes visés par le présent article seraient ainsi : les sociétés de groupe d’assurance et sociétés de groupe mixtes d’assurance (article L. 322-1-2 du code des assurances) ; les unions mutualistes (article L. 111-4-2 du code de la mutualité) ; les unions d’institutions de prévoyance (article L. 933-2 du code de la sécurité sociale).

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 bis D sans modification.

*

* *

Article 19 bis G

Remise des titres d’OPCVM issus de la scission du véhicule de placement

Le présent article vise à modifier le code des assurances pour permettre aux assurés d’un contrat d’assurance sur la vie, libellé en unités de compte, référencé en organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et ayant fait l’objet d’une scission, de se voir proposer, s’ils le désirent, par l’assureur, la remise du titre correspondant afin éventuellement de bénéficier ultérieurement d’un retour à meilleure fortune du titre. Il est issu d’un amendement déposé en séance publique par nos collègues sénateurs.

I.– UNE MEILLEURE PROTECTION DES ÉPARGNANTS EN ASSURANCE-VIE

Depuis que l’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers est entrée en vigueur, la scission d’OPCVM est possible (38). L’ordonnance permet en effet aux gestionnaires d’OPCVM d’isoler dans leur portefeuille de valeurs celles d’entre elles qui ne sont momentanément plus négociables. Pour ce faire, ils scindent le véhicule de placement. Les actifs qu’il n’est pas possible de réaliser sont placés, ou cantonnés, dans un fonds réplique (39) issu de la scission de l’OPCVM initial. Ces actifs sont liquidés peu à peu et dans la mesure du possible. Aucune autre gestion n’est possible que cette gestion extinctive (40).

En rendant beaucoup d’actifs illiquides dans le portefeuille des assureurs, la crise financière de l’automne 2008 a fait naître le besoin de légiférer de nouveau en ce domaine. D’après les informations recueillies par le Rapporteur pour avis, ils ont été nombreux à recourir à la scission d’OPCVM et au cantonnement des actifs illiquides dans un fonds réplique. Les règles prudentielles imposent cependant aux assureurs de provisionner dans leur bilan la perte de ces actifs devenus illiquides. L’assureur qui gère un OPCVM perd dès lors presque toute incitation à chercher à réaliser la valeur que ces actifs peuvent encore représenter, par exemple en recouvrant en justice certaines créances au cours de procès en liquidation. S’il est plus diligent que lui, le contractant ou le bénéficiaire du contrat d’assurance sur la vie doit pouvoir prendre en main la gestion de ces actifs, afin de pouvoir profiter d’un retour éventuel à meilleure fortune.

Le présent article tend donc à accroître la protection des droits de l’épargnant en assurance sur la vie. Ses droits seraient alignés sur ceux de l’épargnant classique en SICAV ou en OPCVM, tels qu’ils ressortent des 6 ° et 7 ° de l’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers, laquelle a modifié les articles L. 214-19 et L. 214-30 du code monétaire et financier auxquels le présent article fait référence. Le Rapporteur pour avis partage sur ce point les vues de la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, qui a déclaré devant nous au cours du débat sur la loi de modernisation de l’économie qu’ « un consommateur qui souscrit un produit d’épargne doit […] pouvoir disposer d’un niveau de protection comparable, quel que soit le guichet auquel il s’adresse, qu’il s’agisse d’une banque, d’un intermédiaire en assurance ou d’un assureur. » (41)

Le Rapporteur pour avis est donc favorable à l’adoption du présent article.

II.– UN COMPLÉMENT À LA RATIFICATION DE L’ORDONNANCE N° 2008-1081

Le présent article vise à étendre en pratique au domaine de l’assurance sur la vie la portée de l’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers. Il aurait donc été inclus de manière plus satisfaisante dans la loi du 19 octobre 2009 qui a ratifié cette dernière (42), sa formulation étant déjà aboutie au moment de l’examen de ce texte.

A.– UNE RATIFICATION RÉCENTE PAR VOIE D’AMENDEMENT

La ratification de l’ordonnance avait été initialement prévue dans un projet de loi spécifique (43). Son examen aurait offert au Parlement l’occasion de conduire un débat d’ensemble sur le droit financier édicté par le Gouvernement en vertu de l’autorisation donnée dans la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008. Mais les dispositions prévoyant la ratification ont été en définitive introduites, par la voie d’un amendement sénatorial (44), dans la proposition de loi tendant à favoriser l’accès au crédit des petites et moyennes entreprises, devenue loi du 19 octobre 2009.

Quelques mois plus tôt, la commission des Finances du Sénat avait pourtant expressément refusé d’envisager une ratification expresse par la loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures du 12 mai 2009. Au cours de son examen, elle avait même annoncé son intention de proposer dans un projet de loi spécifique, sans doute celui du Gouvernement, la ratification de quatre ordonnances prises sur le fondement de la loi de modernisation de l’économie, dont l’ordonnance n° 2008-1081 réformant le cadre de la gestion d’actifs pour le compte de tiers :

« En revanche, votre commission vous proposera, expliquait ainsi son Rapporteur pour avis sur la loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, de ratifier dans un projet de loi ultérieur quatre autres ordonnances, également prises sur le fondement de l’article 152 de la loi de modernisation de l’économie, mais qui pourraient faire l’objet de modifications substantielles. » (45)

Ces hésitations procédurales seraient de peu d’importance si elles ne privaient pas en définitive le Parlement d’une vue d’ensemble sur le droit financier ainsi édicté par voie d’ordonnance.

B.– UN FRAGMENT ANTÉRIEUR À LA RATIFICATION

En particulier, le Gouvernement avait déjà exprimé l’intention d’apporter le complément contenu dans le présent article, deux mois avant le dépôt de l’amendement proposant la ratification de l’ordonnance.

Dans un projet de loi ratifiant d’autres ordonnances prises sur le fondement de la loi de modernisation de l’économie, il demande en effet de compléter le second alinéa de l’article L. 131-1 du code des assurances par une phrase ainsi rédigée : « Dans le cas où un organisme de placement collectif en valeurs mobilières a été scindé en application des dispositions des articles L. 214-19 ou L. 214-30 du code monétaire et financier, l'assureur propose au contractant ou au bénéficiaire le règlement correspondant aux actions ou parts de l'organisme issu de la scission et qui a reçu les actifs dont la cession n'aurait pas été conforme à l'intérêt des actionnaires ou porteurs de parts, sous forme de remise des actions ou parts de cet organisme. » (46)

Ce texte est le libellé exact de l’amendement dont est issu le présent article. Il n’est donc pas étonnant que l’amendement déposé en séance publique par nos collègues sénateurs, de texte identique à un article de projet de loi déposé par le Gouvernement, ait été adopté avec l’avis favorable de ce dernier.

*

* *

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 bis G sans modification.

*

* *

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

N° CF 1 rect.

AMENDEMENT

présenté par

M. Henri Nayrou

----------

ARTICLE 19 bis A

Modifier ainsi la première phrase de cet article :

1° Supprimer les mots : « à titre de résidence principale » ;

2° Remplacer les références : « du h du 1° du I de l’article 31 ou des articles 199 sexvicies et 199 septvicies », par les références : « prévues aux articles 199 decies E à 199 decies G, au b du 2 de l’article 199 undecies A, ainsi qu’aux articles 199 tervicies, 199 sexvicies et 199 septvicies ».

N° CF 2

AMENDEMENT

présenté par

M. Marc Goua

----------

ARTICLE 1er A

Dans l’alinéa 5 de cet article, remplacer le chiffre :

« huit »

par le chiffre :

« six ».

N° CF 3

AMENDEMENT

présenté par

M. Marc Goua

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L’ARTICLE 1er A, insérer l’article suivant :

Après l'article L.313-6 du code de la consommation, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L.313-6-1.– Le taux variable d'un contrat de prêt ne peut excéder, à tout moment de son exécution, un plafond correspondant au niveau mensuel moyen des taux des contrats de prêt à taux fixes conclus par l'établissement de crédit pour une durée de vingt ans au cours du mois considéré. 

« Les perspectives excessives au regard de l'alinéa précédent sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance. »

N° CF 4

AMENDEMENT

présenté par

M. Marc Goua

----------

ARTICLE 1er A

Avant l’alinéa 2, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« 1° bis...– Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède au moment où il est consenti, le taux des prêts sur le marché interbancaire à douze mois multiplié par un coefficient déterminé par décret après avis du Conseil National et compris entre deux et sept. »

N° CF 5 rect.

AMENDEMENT

présenté par

M. Jean-Pierre GORGES

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L’ARTICLE 1er A, insérer l’article suivant :

I.– Il est créé une troisième sous-section, après l’article L. 221-34 du code monétaire et financier, ainsi rédigée :

« II.– Un livret d'épargne pour la microfinance peut être proposé par tout établissement de crédit et par tout établissement autorisé à recevoir des dépôts qui s'engage par convention avec l'État à respecter les règles fixées pour le fonctionnement de ce livret.

« Le livret d’épargne pour la microfinance est ouvert par les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France dans les établissements et organismes autorisés à recevoir des dépôts. Les sommes déposées sur ce livret sont employées conformément à un décret qui fixe les modalités d’application.

« Les versements effectués sur un livret d’épargne pour la microfinance ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d'un plafond fixé par voie réglementaire.

« Il ne peut être ouvert qu'un livret par contribuable ou un livret pour chacun des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité, soumis à une imposition commune.

« Les modalités d'ouverture et de fonctionnement du livret de développement durable, ainsi que la nature des travaux d'économies d'énergie auxquels sont affectées les sommes déposées sur ce livret, sont fixées par voie réglementaire. »

N° CF 6

AMENDEMENT

présenté par

M. Jean-Pierre GORGES

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L’ARTICLE 1er A, insérer l’article suivant :

À l’article L. 511-6 du code monétaire et financier, insérer un alinéa 7 ainsi rédigé : « aux personnes physiques s’engageant à abonder des fonds destinés à des activités de microfinance ».

N° CF 7

AMENDEMENT

présenté par

M. Jean-Pierre GORGES

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L’ARTICLE 1er A, insérer l’article suivant :

I.– Les établissements de crédit, au sens de l’article L. 511-1 du code monétaire et financier, publient chaque année un rapport précisant l’encours de prêt pour la micro finance aux particuliers, aux associations et aux entreprises.

II.– Les modalités d’application du I sont précisées par voie réglementaire.

N° CF 8

AMENDEMENT

présenté par

M. François Goulard,
Rapporteur pour avis

----------

ARTICLE 1er A

Supprimer l’alinéa 8 de cet article.

N° CF 9

AMENDEMENT

présenté par

M. François Goulard,
Rapporteur pour avis

----------

ARTICLE 19 bis A

Supprimer cet article.

ANNEXE I :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR

Banque de France

– M. Olivier Cousseran, directeur des statistiques monétaires et financières ;

– M. Édouard Fernandez-Bollo, secrétaire général adjoint de la Commission bancaire ;

– M. Jean-Luc Vatin, directeur des relations entre les particuliers et la sphère financière ;

– Mme Véronique Bensaid, conseillère parlementaire auprès du gouverneur de la Banque de France.

Association française des sociétés financières

– Mme François Palle-Guillabert, délégué général ;

– M. Éric Spielrein, secrétaire général ;

– M. François Langlois, directeur des relations institutionnelles.

Établissements de crédits spécialisés

Banque Accord (groupe Auchan) :

– M. Jérôme Guillemard, président-directeur général ;

– M. Pierre Antoine, directeur risque groupe ;

– Mme Véronique Robeaux, chargée de mission.

Société LaSer Cofinoga :

– M. Philippe Lemoine, président-directeur général ;

– M. Michel Philippin, directeur général délégué ;

– M. Jean-Yves Godard, directeur en charge des relations extérieures.

Banque S2 Pass (groupe Carrefour) :

– M. Frédéric Mazurier, directeur administratif et financier ;

– M. Jean-Claude Nasse, délégué général honoraire de l’Association française des sociétés financières.

© Assemblée nationale

1 () Deuxième alinéa du paragraphe 1 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil. Un rectificatif paru au Journal officiel de l’Union européenne du 11 août 2009 commande d’y lire « le 11 juin 2010 », au lieu de « le 10 mai 2010 ».

2 () Pour la juridiction administrative, le Conseil d’État a encore jugé par l’arrêt Perreux du 30 octobre 2009 que « tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’État n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ».

3 () Douzième législature, Rapport n° 807 de M. François Goulard, du 10 avril 2003, sur le projet de loi de sécurité financière, p. 17, http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r0807-2.pdf .

4 () Rapport n° 1959 de M. Jean Gaubert, du 7 octobre 2009, présenté au nom de la commission des Affaires économiques, sur la proposition de loi relative à la suppression du crédit revolving, à l’encadrement des crédits à la consommation et à la protection des consommateurs par l’action de groupe, p. 27.

5 () Le projet de loi n° 1381 a été renvoyé à la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire : http://www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/gestion_actifs.asp .

6 () L’un d’entre eux, l’article 19 bis G, est de texte identique à l’une des dispositions d’un projet de loi déposé par le Gouvernement le 9 avril 2009.

7 () Voir Avis n° 905 de M. Nicolas Forissier du 20 mai 2008, présenté au nom de la commission des Finances, de l’économie générale et du plan, sur le projet de loi de modernisation de l’économie, p. 6. http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r0905.pdf

8 () L’ordonnance n° 2008-1081 du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d’actifs et l'ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme ont été respectivement édictées sur la base du f du 1° et du d du 4° de l’article 152 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, issu de l’article 42 du projet de loi de modernisation de l’économie.

9 () Il s’agit de la directive n° 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme a été adoptée le 

10 () L’habilitation est établie au d du 4° de l’article 152 de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008.

11 () Compte rendu intégral de la première séance du mercredi 11 juin 2008, Journal officiel de la République française, 12  juin 2008, p. 3298, http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/cri/2007-2008/20080191.pdf .

12 () Projet de loi ratifiant diverses ordonnances en matières financière et comptable, déposé au Sénat le 9 avril 2009, impression n° 365 de la session ordinaire 2008-2009.

13 () Compte rendu intégral de la deuxième séance du mardi 28 avril 2009, Journal officiel de la République française, 29 avril 2009, p. 3719.

14 () C’était la première revendication formulée par l’Assemblée nationale dans sa résolution du 25 mai 2006 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'harmonisation des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit aux consommateurs.

15 () Lettre de mission du 2 janvier 2009 aux chefs de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales, publiée en annexe I du rapport sur les modalités de fixation du taux de l’usure établi conjointement par l’Inspection générale des Finances et l’Inspection générale des affaires sociales en février 2009.

16 () Article premier de l’arrêté du 24 août 2006 fixant les catégories de prêts servant de base à l'application de l'article L. 313-3 du code de la consommation et de l'article L. 313-5-1 du code monétaire et financier, relatifs à l'usure.

17 () Dans la lettre de mission citée plus haut.

18 () IGF et IGAS, Rapport sur les modalités de fixation du taux de l’usure de MM. Laloue et Lépine, février 2009, p. 4.

19 () Sénat, Rapport n° 447 de M. Philippe Dominati du 2 juin 2009, p. 162-165.

20 () Bulletin de la Banque de France n° 152, « Réforme de la centralisation des risques : un nouvel éclairage sur les concours accordés aux petites entreprises », Annie Sauvé, août 2006, p. 57-64.

21 () Au a du 2° de l’article 152 de la loi.

22 () Au c du 2° du même article.

23 () Douzième législature, Rapport n° 807 de M. François Goulard, du 18 avril 2003, sur le projet de loi de sécurité financière, p. 18, http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r0807-2.pdf .

24 () Inspection générale des Finances, Rapport de la mission de conseil sur le contrôle du respect des obligations professionnelles à l’égard de la clientèle dans le secteur financier, de MM. Bruno Deletré, Jack Azoulay et Mme Pascale Dugos, juillet 2009.

25 () Rapport cité, p. 44.

26 () Douzième législature, Rapport n° 807 de M. François Goulard, du 10 avril 2003, sur le projet de loi de sécurité financière, p. 18, http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r0807-2.pdf .

27 () Encore récemment, le Conseil constitutionnel a ainsi déclaré « adoptés selon une procédure contraire à la Constitution », et partant non conformes à elle, des articles additionnels de la loi de mobilisation pour le logement, l’un d’entre eux prévoyant par exemple l’installation de détecteurs de fumée dans les appartements. Voir la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-578 du 18 mars 2009, considérant 35. L’article 115 du texte déféré est déclaré non conforme.

28 () Cette disposition, prévue au V de l’article 199 septvicies du code général des impôts, reprend purement et simplement la disposition « Robien social » du l du 1° du I de l’article 31 à laquelle elle fait référence. Elle peut produire ici d’autres effets.

29 () Douzième législature, Rapport n° 807 de M. François Goulard, du 18 avril 2003, sur le projet de loi de sécurité financière, p. 290-292, http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rapports/r0807-3.pdf . L’article 52 du projet de loi est devenu l’article 72, 1 ° de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière.

30 () Compte rendu intégral de la séance du mercredi 17 juin 2009, Journal officiel de la République française, 18  juin 2009, p. 6130, http://www.senat.fr/seances/s200906/s20090617/s20090617.pdf .

31 () Encore récemment, le Conseil constitutionnel a ainsi déclaré « adoptés selon une procédure contraire à la Constitution », et partant non conformes à elle, des articles additionnels de la loi de mobilisation pour le logement, l’un d’entre eux prévoyant par exemple l’installation de détecteurs de fumée dans les appartements. Voir la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-578 du 18 mars 2009, considérant 35. L’article 115 du texte déféré est déclaré non conforme.

32 () Compte rendu intégral de la première séance du mercredi 11 juin 2008, Journal officiel de la République française, 12  juin 2008, p. 3298, http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/cri/2007-2008/20080191.pdf .

33 () Par un alinéa devenu le d du 4° de cet article.

34 () Au 2) de son article 3.

35 () TRACFin (Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins), Rapport d’activité 2008, p. 11. La valeur y est indiquée comme non significative.

36 () Directive n° 2005/60 du Parlement européen et du Conseil relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.

37 () Paragraphe 5 de l’article 28 de la directive.

38 () Notre collègue M. Nicolas Forissier s’était penché sur les règles de scission des OPCVM à l’occasion de l’examen du projet de loi autorisant le Gouvernement à légiférer en ce domaine par voie d’ordonnance. Voir l’Avis n° 905 du 20 mai 2008, présenté au nom de la commission des Finances, de l’économie générale et du plan, sur le projet de loi de modernisation de l’économie, p. 216-217. http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r0905.pdf

39 () Également appelé fonds side-pocket, parce que les actifs difficiles à négocier y sont « mis de côté ».

40 () Voir Revue de l’Autorité des marchés financiers (AMF), n° 54 de janvier 2009, « Questions-réponses relatives aux scissions d’OPCVM décidées en application du deuxième alinéa de l’article L. 214-19 ou du deuxième alinéa de l’article L. 214-30 du code monétaire et financier », p. 95-100. http://www.amf-france.org/documents/general/8938_1.pdf

41 () Compte rendu intégral de la première séance du mercredi 11 juin 2008, Journal officiel de la République française, 12  juin 2008, p. 3300, http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/cri/2007-2008/20080191.pdf .

42 () Il est procédé à la ratification au I de l’article 15 de la loi n° 2009-1255 du 19 octobre 2009 tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et moyennes entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers.

43 () Le projet de loi n° 1381 avait été renvoyé à la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire : http://www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/gestion_actifs.asp .

44 () Séance du Sénat du 9 juin 2009.

45 () Avis n° 245 du 4 mars 2009, présenté par M. Bernard Angels, au nom de la commission des Finances, sur la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, p. 61.

46 () Article 7 du projet de loi ratifiant diverses ordonnances en matières financière et comptable, déposé au Sénat le 9 avril 2009, impression n° 365 de la session ordinaire 2008-2009.