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N° 2219

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 janvier 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI relative à l’extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de lagriculture,

PAR M. Germinal PEIRO,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 357

INTRODUCTION 7

I.- LA SITUATION DES CONJOINTS ET DES AIDES FAMILIAUX DE L’AGRICULTURE EN MATIÈRE DE RETRAITE EST ENCORE INSUFFISAMMENT PRISE EN COMPTE 9

A. LES CONJOINTS ET LES AIDES FAMILIAUX SE SONT PROGRESSIVEMENT VUS RECONNAÎTRE UN STATUT PLUS PROTECTEUR, NOTAMMENT EN MATIÈRE DE RETRAITES 9

1. Quelques avancées significatives ont déjà été réalisées dans la reconnaissance du travail des conjoints et des aides familiaux 9

a) Le conjoint a acquis un statut désormais plus protecteur 9

b) Les aides familiaux bénéficient désormais d’un statut minimal 10

2. Les conjoints et les aides familiaux bénéficient déjà de la retraite de base des non-salariés agricoles et d’un régime complémentaire facultatif d’assurance 10

a) Ils peuvent être assujettis au régime de base de la retraite des non-salariés agricoles 11

b) Les conjoints et les aides familiaux peuvent se constituer une retraite complémentaire facultative 13

B. LES CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX DEMEURENT NÉANMOINS EXCLUS DU CHAMP DE LA LOI DU 4 MARS 2002 QUI A POURTANT CONSTITUÉ UNE AVANCÉE SOCIALE FONDAMENTALE 14

1. La mise en place d’une assurance vieillesse complémentaire obligatoire s’est révélée positive pour la situation des retraites des chefs d’exploitation et d’entreprise agricole 14

a) Un régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles a été mis en place par la loi du 4 mars 2002 14

b) La retraite complémentaire obligatoire a permis un complément de retraite bienvenue pour les chefs d’exploitation et d’entreprise agricole 16

2. Les conjoints et aides familiaux ont été largement tenus à l’écart du dispositif 16

a) Les conjoints et les aides familiaux ne peuvent pas se constituer de retraite complémentaire obligatoire 16

b) Les conjoints survivants peuvent, sous conditions, bénéficier d’une retraite complémentaire obligatoire de réversion 17

II.- LA JUSTICE SOCIALE RÉCLAME AUJOURD’HUI UNE EXTENSION DU RÉGIME OBLIGATOIRE DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE AGRICOLE AUX CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX 18

A. LA NÉCESSITÉ D’ÉTENDRE LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI AUX CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX EST DIFFICILEMENT CONTESTABLE 18

1. L’extension du régime obligatoire de retraite complémentaire agricole s’inscrit dans la droite ligne des engagements du Président de la République 18

2. La demande récurrente des associations de retraités d’une extension du régime est d’autant plus légitime que les avancées récentes ont été relativement faibles 19

a) Les associations de retraités réclament l’extension du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux 19

b) Les avancées récentes en faveur des retraites des conjoints est des aides familiaux ont été assez modestes 19

3. Les travaux parlementaires au moment du vote de la loi du 4 mars 2002 ont montré la volonté d’étendre à terme le dispositif de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux 21

4. L’extension du régime complémentaire agricole permettrait utilement de donner enfin un véritable statut aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux. 21

5. Le droit européen encourage le renforcement des droits des conjoints aidants. 22

B. LE DISPOSITIF JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE LOI, SIMPLE ET ÉQUILIBRÉ, FAIT PROGRESSER LES DROITS SOCIAUX DES AGRICULTEURS 22

1. La retraite complémentaire obligatoire est étendue aux conjoints et aides familiaux 23

2. De nouvelles modalités de financement sont prévues 23

3. La gestion est confiée aux caisses de mutualité sociale agricole 23

4. Des modalités d’adaptation à la situation particulière des départements d’outre mer sont mises en place 23

TRAVAUX DE LA COMMISSION 25

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 25

II.- EXAMEN DES ARTICLES 33

Article 1er Assujettissement des conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et des aides familiaux au régime obligatoire de retraite complémentaire agricole (article L. 732-56 du code rural) 33

Article 2 Régime juridique des conjoints et aides familiaux dont la retraite prend effet postérieurement à l’entrée en vigueur de l’extension de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire (article L. 732-56 du code rural) 35

Article 3 Création d’une nouvelle cotisation due lors de la liquidation du salaire différé de certains aides familiaux destinée à financer le régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire (article L. 732-58 du code rural) 37

Article 4 Caractéristiques de la cotisation due lors de la liquidation du salaire différé de certains aides familiaux (article L. 732-59 du code rural) 40

Article 5 Attribution de points gratuits (article L. 732-60 du code rural) 41

Article 6 : Gestion du régime d’assurance complémentaire obligatoire des conjoints et des aides familiaux par les caisses de mutualité sociale agricole (article L. 732-61 du code rural) 42

Article 7 Adaptation aux départements d’Outre-mer (article L. 762-35, L. 762-36 et L. 762-37 du code rural) 42

Article 8 : Gage 44

TABLEAU COMPARATIF 45

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 51

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 53

INTRODUCTION

« Je veux témoigner de la solidarité de la Nation française pour le travail des paysans français, de leurs conjoints et de leurs familles »

M. Nicolas Sarkozy, Président de la République

Le 27 octobre 2009, à Poligny

Que serait devenue la France et son économie sans nos agriculteurs et sans, en particulier, l’apport irremplaçable de ces actifs non-salariés agricoles, conjoints de chefs d’exploitation ou aides familiaux, qui ont voué une partie de leur vie au travail de la terre dans des conditions souvent difficiles ? C’est sur eux qu’a aussi reposé la capacité de notre agriculture à se développer durant la seconde moitié du vingtième siècle pour faire de notre pays la première puissance agricole de l’Union européenne et le second exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires.

En ces temps où l’on insiste sur l’importance du rôle des agriculteurs, non seulement dans le domaine économique, mais aussi en matière d’aménagement du territoire et de préservation des équilibres écologiques, n’est-il pas choquant de constater que ces conjoints et aides familiaux, qui ont pourtant participé avec énergie à l’essor agricole de notre pays, ne touchent bien souvent que des montants de retraite extrêmement faibles au regard des sacrifices qu’ils ont consentis ? En 2007, le montant annuel moyen des prestations de retraite du régime de base s’élevait ainsi, d’après les statistiques fournies par la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole, à seulement 3 859 € pour les conjoints et à 656 € pour les autres membres de la famille.

Ces conjoints des chefs d’exploitation et d’entreprise agricole, bien souvent des épouses, ont pourtant participé autant aux tâches quotidiennes que le chef d’exploitation. D’un autre côté, le titre même des aides familiaux, que l’article L. 722-10 du code rural défini comme « les ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré du chef d'exploitation ou d'entreprise ou de son conjoint, âgés de plus de seize ans, vivant sur l'exploitation ou l'entreprise et participant à sa mise en valeur comme non-salariés », ne porte-t-il pas de façon regrettable « la négation même de leur travail : ils ne travaillent pas, ils aident » comme l’a justement fait remarquer Herveline Gilbert (1) ?

Or, malgré quelques avancées qui les ont fait notamment bénéficier d’un statut désormais plus protecteur, notamment en matière d’affiliation au régime de base de retraite des non-salariés agricoles, ces conjoints et aides familiaux demeurent encore exclus du champ d’application de la loi du 4 mars 2002 qui, créant un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, a constitué une avancée sociale importante permettant aux chefs d’exploitation et d’entreprise agricole de percevoir un complément de retraite bienvenue de l’ordre de 1 000 euros par an.

Il est donc temps désormais que le législateur reconnaisse le travail fourni par ces centaines de milliers de nos concitoyens de métropole et d’outre-mer et leur offre enfin la possibilité de vivre décemment.

Ce serait la marque de l’intérêt que la France porte à ces acteurs essentiels de son destin. La Nation le leur doit. C’est une question de justice sociale et de dignité.

I.- LA SITUATION DES CONJOINTS ET DES AIDES FAMILIAUX DE L’AGRICULTURE EN MATIÈRE DE RETRAITE EST ENCORE INSUFFISAMMENT PRISE EN COMPTE

A. LES CONJOINTS ET LES AIDES FAMILIAUX SE SONT PROGRESSIVEMENT VUS RECONNAÎTRE UN STATUT PLUS PROTECTEUR, NOTAMMENT EN MATIÈRE DE RETRAITES

1. Quelques avancées significatives ont déjà été réalisées dans la reconnaissance du travail des conjoints et des aides familiaux

a) Le conjoint a acquis un statut désormais plus protecteur

L’activité professionnelle du conjoint participant à la mise en valeur des exploitations n’a été reconnue juridiquement que tardivement et de façon progressive.

En effet, celle-ci n’a été reconnue que par la loi d’orientation agricole du 4 juillet 1980 avec la création d’un statut par défaut, celui de « conjoint participant aux travaux ». L’article L. 732-34 du code rural dispose ainsi que les conjoints vivant sur l’exploitation, dès lors qu’ils ne justifient pas de leur affiliation à un régime légal ou réglementaire de retraite à raison de l’exercice d’une activité professionnelle personnelle et qu’ils ne sont pas atteints d’une incapacité absolue de travail, sont présumés, sauf preuve contraire, participer à la mise en valeur de celle-ci.

La loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999 et son décret d’application du 7 avril 2000 ont créé le statut plus avantageux de « conjoint collaborateur » et prévu que la qualité de « conjoint participant aux travaux » ne pouvait désormais plus être acquise à compter du 1er mai 2000, mais les personnes qui en bénéficiaient déjà pouvaient néanmoins la conserver.

Cette mise en place d’un statut de « conjoint collaborateur » a permis aux femmes d’exploitants – très majoritairement visées – d’acquérir une place véritable au-delà du statut domestique d’épouse. Il confère des droits en assurance vieillesse plus conséquents, des droits à une pension en cas d’invalidité, ainsi qu’un droit à salaire différé dans certains cas. Le conjoint collaborateur peut également prétendre à des prestations en cas d’accident du travail.

La loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006 a rendu obligatoire, à compter du 1er janvier 2006, l’option pour un statut, dès lors que le conjoint exerce une activité professionnelle régulière sur l’exploitation ou l’entreprise agricoles. Le choix doit se faire entre l’un des statuts professionnels suivant :

– collaborateur du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole (« conjoint collaborateur ») ;

– salarié de l’exploitation ou de l’entreprise agricole ;

– chef d’exploitation ou d’entreprise agricole.

Toutefois, les « conjoints participant aux travaux » dérogeaient encore à cette obligation de choisir un statut et pouvaient donc conserver leur ancienne qualité.

C’est l’article 77 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 qui a définitivement supprimé la qualité de « conjoint participant aux travaux » à compter du 1er janvier 2009.

b) Les aides familiaux bénéficient désormais d’un statut minimal

Longtemps sans véritable protection sociale, les aides familiaux des exploitants agricoles disposent désormais d’une couverture minimale.

Ils bénéficient ainsi d’une assurance accidents du travail-maladies professionnelles (article L. 722-19 du code rural), d’une couverture maladie, invalidité et de prestations familiales (articles L. 722-9 et L. 722-10 du code rural).

Ils leur a également été ouvert la possibilité de se constituer des droits à la retraite, au moyen de leur assujettissement au régime de base de la retraite des non-salariés agricoles.

Par ailleurs, la loi du 4 juillet 1980 d’orientation agricole a institué à leur profit un « salaire différé », défini comme l’indemnité qu’un descendant d’exploitant agricole peut exiger lors du règlement de la succession de ses parents s’il a travaillé sur l’exploitation familiale sans être payé.

2. Les conjoints et les aides familiaux bénéficient déjà de la retraite de base des non-salariés agricoles et d’un régime complémentaire facultatif d’assurance

Les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole ainsi que les aides familiaux peuvent déjà, sous certaines conditions, être assujettis au régime de base de la retraite des non-salariés agricoles.

Parmi les 561 480 assujettis (cotisants) au régime des retraites de base du régime des non-salariés agricoles en 2008, 6 565 (1,2 %) sont ainsi des assujettis en tant qu’aides familiaux et 49 463 (8,8 %) en tant que conjoints collaborateurs ou participant aux travaux. La même année, parmi les 1 787 171 retraités relevant du régime de retraite de base du régime des non-salariés agricole en métropole, 218 694 (12,2 %) sont des conjoints et 309 856 (17,3 %) d’anciens aides familiaux.

Les conjoints et les aides familiaux ont également la possibilité de se constituer une retraite complémentaire facultative.

a) Ils peuvent être assujettis au régime de base de la retraite des non-salariés agricoles

 Les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole

Le conjoint du chef d’exploitation ne pouvait bénéficier, jusqu’en 1999, que du seul statut de « conjoint participant aux travaux ». Avec un tel statut, le conjoint vivant sur l’exploitation était assujetti à l’assurance vieillesse des non-salariés agricoles, dès lors qu’il n’était pas affilié à un autre régime légal ou réglementaire de retraite en raison de l’exercice d’une activité professionnelle personnelle et n’était pas atteint d’une incapacité absolue de travail.

Depuis 1999, le conjoint du chef d’exploitation peut opter pour le statut de « conjoint collaborateur », plus avantageux sur le plan social (cf.infra). La loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006, a même étendu la possibilité d’opter pour ce statut de « conjoint collaborateur » aux personnes qui sont liées par un pacte civil de solidarité (PACS) ou qui vivent en concubinage avec le chef d’exploitation ou d’entreprise agricole. Pour y prétendre, le conjoint doit participer effectivement et habituellement, à temps plein ou dans certaines conditions à temps partiel, à l’activité non salariée agricole de son époux, sans être rémunéré. L’option pour la qualité de « conjoint collaborateur » doit être exercée par lettre recommandée avec avis de réception auprès de la caisse de la mutualité sociale agricole dont relève le chef d’exploitation.

Dès lors qu’il peut y prétendre, la pension de retraite personnelle servie au conjoint d’agriculteur par le régime de base de la retraite des non-salariés agricoles se compose de deux éléments :

– une retraite forfaitaire, qui est la contrepartie d’une cotisation d’assurance vieillesse individuelle (AVI). Cette cotisation est due pour le conjoint vivant sur l’exploitation et participant à sa mise en valeur, quel que soit son statut (conjoint participant et conjoint collaborateur).

– une retraite proportionnelle, qui est la contrepartie d’une cotisation d’assurance vieillesse agricole plafonnée (AVA plafonnée), qui se compose de deux éléments : une cotisation technique et une cotisation complémentaire. À la différence du statut de conjoint participant, le statut de conjoint collaborateur ouvre le droit à cette retraite proportionnelle. Toutefois, le conjoint participant aux travaux avant 1999, bien que n’ayant pas été assujetti à l’assurance vieillesse agricole, peut bénéficier, en plus de sa retraite forfaitaire issue des cotisations d’assurance vieillesse individuelle, d’une retraite proportionnelle dans trois cas :

– de 1992 à 2000, les couples d’exploitants ont pu, sous certaines conditions, opter pour un partage par moitié des points de retraite proportionnelle en principe attribués intégralement au chef d’exploitation ;

– le conjoint a la faculté, sous certaines conditions, de racheter des cotisations d’assurance vieillesse agricole ouvrant droit à la retraite proportionnelle pour la période antérieure à 1999 ;

– les conjoints peuvent bénéficier, sous certaines conditions, d’une attribution gratuite de points de retraite proportionnelle au titre des revalorisations des plus faibles retraites.

Statut (non-salarié agricole)

Cotisations versées

Droit à retraite

Conjoint participant aux travaux

assurance vieillesse individuelle

Retraite forfaitaire

Conjoint collaborateur

assurance vieillesse individuelle + assurance vieillesse agricole

Retraite forfaitaire + retraite proportionnelle

 Les aides familiaux

Les membres de la famille du chef d’exploitation autres que le conjoint, c'est-à-dire les ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré du chef d’exploitation ou de son conjoint qui vivent sur l’exploitation, sont présumés participer à sa mise en valeur dès lors qu’ils ne sont pas affiliés à un autre régime légal ou réglementaire de retraite en raison de l’exercice d’une activité professionnelle personnelle et qu’ils ne sont pas atteints d’une incapacité absolue de travail.

Ils sont dès lors assujettis à l’assurance vieillesse des non-salariés agricoles en qualité d’aides familiaux, à condition d’être âgés d’au moins 16 ans (2).

Comme pour les conjoints d’agriculteurs, la pension de retraite de base des aides familiaux se compose aujourd’hui de deux éléments :

– une retraite forfaitaire, qui est la contrepartie d’une cotisation d’assurance vieillesse individuelle. Cette cotisation est due pour chaque aide familial âgé d’au moins 16 ans vivant sur l’exploitation et participant à sa mise en valeur. Pendant longtemps, les aides familiaux ont dû se contenter uniquement de cette retraite forfaitaire ;

– les aides familiaux majeurs ont également pu prétendre, à partir du 1er janvier 1994, à une retraite proportionnelle, qui est la contrepartie d’une cotisation d’assurance vieillesse agricole plafonnée, que les chefs d’exploitation doivent acquitter pour leurs aides familiaux âgés d’au moins 16 ans. Cette cotisation se compose elle-même de deux éléments : une cotisation technique et une cotisation complémentaire.

Statut (non-salarié agricole)

Cotisations versées

Droit à retraite

Aide familial

• Avant 1994

Assurance vieillesse individuelle

• Après 1994

Assurance vieillesse individuelle

et assurance vieillesse agricole

Retraite forfaitaire

Retraite forfaitaire + retraite proportionnelle

b) Les conjoints et les aides familiaux peuvent se constituer une retraite complémentaire facultative

La loi du 30 décembre 1988 a instauré un régime complémentaire d’assurance vieillesse facultatif fonctionnant par capitalisation. Les non-salariés agricoles bénéficient ainsi depuis 1990 d’un régime de retraite complémentaire facultatif, dont les cotisations sont déductibles du revenu imposable dans certaines limites. Les contrats de ce régime, appelé à l’origine « COREVA », étaient gérés initialement exclusivement par la Mutualité sociale agricole (MSA). Depuis 1997, ils peuvent être établis par tout assureur.

Le conjoint ayant droit à la retraite forfaitaire dans le régime de base peut ainsi se constituer une retraite complémentaire facultative en souscrivant un contrat d’assurance de groupe auprès d’une compagnie d’assurances ou d’une mutuelle de son choix.

Il en est de même pour les membres de la famille du chef d’exploitation et de son conjoint (ascendants, descendants, frères, sœurs, alliés au même degré vivant sur l’exploitation et présumés participer à ses travaux).

L’objectif assigné à ces contrats était de permettre à une population, qui se caractérise par des revenus modestes et une moyenne d’âge plus élevée que les autres catégories socioprofessionnelles, de compléter les prestations minimales servies par le régime de base.

Toutefois, la technique proposée, qui exige une longue période d’assurance afin que soit capitalisée une réserve suffisante, correspond mal au profil socio-économique de cette population. Par ailleurs, les dispositions fiscales n’encouragent pas les chefs d’exploitation à souscrire des contrats au profit des actifs non-salariés qui participent aux travaux de l’exploitation. Ces compléments de retraite volontaire agricole en capitalisation se sont donc traduits par un relatif échec.

B. LES CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX DEMEURENT NÉANMOINS EXCLUS DU CHAMP DE LA LOI DU 4 MARS 2002 QUI A POURTANT CONSTITUÉ UNE AVANCÉE SOCIALE FONDAMENTALE

1. La mise en place d’une assurance vieillesse complémentaire obligatoire s’est révélée positive pour la situation des retraites des chefs d’exploitation et d’entreprise agricole

Parmi les régimes de non salariés, celui des agriculteurs était le dernier à ne pas s’être doté d’un régime complémentaire, les professions libérales l’ayant fait en 1949, les commerçants et les industriels en 1977 et les artisans en 1979.

Issue d’une initiative parlementaire du groupe socialiste, la loi créant un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles a fait l’objet d’un vote unanime tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat et s’inscrivait dans la dynamique en faveur d’une plus grande justice sociale agricole que le gouvernement a fortement accélérée après les élections législatives de 1997.

a) Un régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles a été mis en place par la loi du 4 mars 2002

La loi du 4 mars 2002 a créé le régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, avec pour objectif de garantir, après une carrière complète en qualité de chef d’exploitation, une retraite totale (régime de base et régime complémentaire obligatoire) au moins égale à 75 % du salaire minimum de croissance net (Smic).

Il est en effet apparu, au regard du rapport démographique du régime des retraites agricoles, que l’objectif d’un revenu minimum équivalant à 75 % du Smic net réclamé par la profession ne pourrait pas être obtenu sans la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire.

Géré par les caisses de la MSA, ce régime, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, est un régime par répartition (un régime par capitalisation aurait exclu par hypothèse les personnes déjà retraitées qui n’auraient pas cotisé et n’auraient bénéficié par conséquent d’aucun avantage) et en points (le montant annuel de la pension est égal au produit du nombre de points porté sur le compte du bénéficiaire par la valeur de ce point, fixé chaque année par décret). La pension complémentaire ne peut être liquidée que si l’assuré a droit à la retraite de base.

De façon assez inhabituelle pour un régime de retraite complémentaire obligatoire, une participation financière de l’État a été prévue pour contribuer à l’équilibre du régime.

L’article L. 732-56 du code rural dispose que sont assujetties au régime de retraite complémentaire obligatoire :

– les personnes exerçant leur activité comme chef d’exploitation au 1er janvier 2003 ou postérieurement à cette date ;

– les personnes titulaires de l’allocation de préretraite agricole pendant la période de perception de cette allocation ;

– les personnes qui, au 1er janvier 2003 ou postérieurement, relèvent du régime d’assurance volontaire vieillesse en qualité de chef d’exploitation ;

– les chefs d’exploitation non retraités titulaires d’une pension d’invalidité ou d’une rente d’accident du travail.

Les conjoints et aides familiaux sont donc clairement exclus du dispositif.

Pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole retraités à la mise en œuvre du régime, la pension de retraite complémentaire est uniquement constituée de droits gratuits attribués, sous conditions de durée d’assurance, pour les périodes d’activité antérieures à la création du régime. Pour les chefs d’exploitation dont la retraite est liquidée après le 1er janvier 2003, cette pension est constituée de droits gratuits, sous certaines conditions, et/ou de droits acquis par cotisations calculées sur leurs revenus professionnels.

La cotisation de retraite complémentaire des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole en activité est calculée sur l’ensemble des revenus professionnels du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole, sans que l’assiette des cotisations ne puisse être inférieure à 1820 fois le Smic horaire.

Toute personne dont le revenu professionnel est inférieur à 1820 fois le Smic horaire en vigueur au 1er janvier voit sa cotisation calculée sur cette base (assiette minimum).

Les cotisations des préretraités, des invalides et des assurés volontaires sont assises sur cette assiette minimum, quel que soit le niveau de leur revenu.

L’assiette de cotisation n’est pas plafonnée et le nombre de points portés au compte de l’assuré (P) est strictement proportionnel à la cotisation versée. Le nombre minimum de points de régime complémentaire obligatoire est égal à 100 par an.

P = (100 x RP (3)) / 1820 Smic

Depuis la création de ce régime, le taux de cotisation est égal à 2,97 % des revenus professionnels du chef d’exploitation, de l’assiette forfaitaire ou de l’assiette minimum. Ainsi, en 2008, la cotisation minimale est égale à 456 € pour 100 points portés au compte de l’assuré, soit un rendement théorique du régime de 6,84 % (valeur du point = 0,3119 €).

b) La retraite complémentaire obligatoire a permis un complément de retraite bienvenue pour les chefs d’exploitation et d’entreprise agricole

Entrée en vigueur le 1er janvier 2003, cette mesure a apporté un complément de revenu de près de 1 000 € par an en moyenne, à plus de 450 000 non-salariés retraités du régime agricole, dont la majorité n’avait pas cotisé au régime.

Au 31 décembre 2008, 461 963 anciens chefs d’exploitation bénéficiaient, en métropole, d’une retraite auprès du régime de retraite complémentaire des non-salariés agricoles. Le montant moyen de la prestation annuelle s’élevait à 958 €.

Les hommes en sont le plus souvent bénéficiaires. En effet, les femmes qui reprennent l’exploitation au départ en retraite de leur mari ont souvent des carrières trop courtes pour en bénéficier.

2. Les conjoints et aides familiaux ont été largement tenus à l’écart du dispositif

a) Les conjoints et les aides familiaux ne peuvent pas se constituer de retraite complémentaire obligatoire

Bien que l’intitulé général de la loi du 4 mars 2002 vise les non-salariés agricoles dans leur ensemble, l’article 1er, désormais codifié à l’article L. 732-56 du code rural, précise que ce régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire est institué au bénéfice des seuls chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et en réduit donc considérablement le champ d’application. Ce dernier est donc beaucoup plus restreint que celui couvert par le régime de base.

Cette exclusion des conjoints et aides familiaux a été assez largement critiquée lors des débats parlementaires de 2001 et 2002.

Ce choix a été largement guidé par des considérations financières, l’extension du régime à d’autres catégories aurait eu en effet vraisemblablement des répercussions assez fortes sur le niveau des cotisations des actifs.

Répondant lors de la séance de l’Assemblée nationale du mardi 11 décembre 2001 à ces critiques relatives à la limitation du nouveau dispositif aux seuls exploitants, votre rapporteur soulignait que « la raison essentielle en est que le régime complémentaire fera appel aux cotisations des actifs, et que la recherche d'un point d'équilibre a déjà fait l'objet d'une négociation très délicate avec les organisations professionnelles. Une surenchère tardive aurait pour objet d'alourdir les cotisations dans des proportions qui ne recueilleraient certainement pas leur accord, et c'est pourquoi j'invite l'Assemblée à considérer le chemin déjà parcouru depuis le début de la législature et à s'en tenir, pour l'heure, à l'édification du socle, quitte à enrichir celui-ci de nouveaux éléments dans les années à venir ».

b) Les conjoints survivants peuvent, sous conditions, bénéficier d’une retraite complémentaire obligatoire de réversion

Les conjoints sont néanmoins indirectement pris en compte par la loi du 4 mars 2002 au travers des règles de réversion.

En effet, la loi a prévu une possibilité de réversion en faveur du conjoint survivant, mais uniquement si le chef d’exploitation décédé avait procédé à la liquidation de sa retraite complémentaire obligatoire avant son décès. Dans ce cas, la pension de réversion est d’un montant égal à 54 % de la pension de retraite complémentaire dont bénéficiait l’assuré décédé et le calcul s’effectue sur l'ensemble des points acquis au titre du régime complémentaire obligatoire (droits gratuits et droits cotisés).

La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a par la suite mis en place une réversion en faveur du conjoint survivant de chef d’exploitation décédé avant la liquidation de sa retraite complémentaire. Celle-ci est alors d’un montant de 54 % des droits cotisés dont aurait bénéficié l’assuré décédé, mais elle n’a pas prévu de réversion sur les droits gratuits.

Dans ces deux cas, le conjoint survivant doit justifier d’une durée de mariage d’au moins deux ans (aucune durée de mariage n’est toutefois exigée si un enfant est issu du mariage) et d’être âgé d’au moins 55 ans. Il peut néanmoins bénéficier d’une réversion quel que soit son âge, s’il est invalide au moment du décès ou ultérieurement ou s’il a au moins deux enfants à charge au moment du décès du chef d’exploitation ou d’entreprise.

Plus récemment, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a réalisé une extension du droit des personnes veuves à une pension de réversion de la retraite complémentaire obligatoire. Cette mesure concerne les conjoints survivants d'exploitants agricoles qui ont pris leur retraite avant le 1er janvier 2003 et qui sont décédés après cette date, après avoir bénéficié de la pension à titre gratuit. Il existe donc désormais une réversion sur les droits gratuits.

Au 31 décembre 2008, 2 538 personnes bénéficiaient ainsi en métropole d’une retraite auprès du régime de retraite complémentaire des non-salariés agricoles au titre du droit de réversion, soit seulement 0,5 % des bénéficiaires du régime complémentaire obligatoire.

II.- LA JUSTICE SOCIALE RÉCLAME AUJOURD’HUI UNE EXTENSION DU RÉGIME OBLIGATOIRE DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE AGRICOLE AUX CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX

Les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, ainsi que les aides familiaux, demeurent insuffisamment reconnus. Il apparaît donc aujourd’hui nécessaire d’étendre à leur profit le bénéfice du régime obligatoire de retraite complémentaire agricole.

A. LA NÉCESSITÉ D’ÉTENDRE LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI AUX CONJOINTS ET AIDES FAMILIAUX EST DIFFICILEMENT CONTESTABLE

L’équité entre tous les actifs agricoles non-salariés exige d’étendre le bénéfice du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux.

1. L’extension du régime obligatoire de retraite complémentaire agricole s’inscrit dans la droite ligne des engagements du Président de la République

Le 23 février 2008, dans un discours devant le congrès de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, s’est engagé sur la question de la revalorisation des petites pensions et du maintien du pouvoir d’achat des retraités agricoles, en mettant particulièrement l’accent sur la situation des conjoints et des veuves d’agriculteurs.

Il a déclaré à cette occasion : « nombreux sont les retraités et les veuves qui survivent avec une pension de misère et qui se disent « on ne casse rien, on ne met pas le feu à des voitures et on meurt dans le désintérêt le plus total » ».

Pour traduire cet engagement, M. Michel Barnier, ministre de l'Agriculture et de la pêche, a mis en place, le 15 février 2008, un groupe de travail réunissant les organisations professionnelles, dont la MSA, et les principales associations de retraités agricoles pour identifier, dans le cadre de la préparation du rendez-vous sur les retraites, les mesures susceptibles de remédier aux situations les plus difficiles tout en tenant compte de la nécessité de garantir la pérennité financière du régime. Des travaux de ce groupe, il est ressorti que la revalorisation des petites retraites agricoles devait porter en priorité sur l'amélioration de la situation des conjointes et des veuves d'agriculteurs.

Encore récemment, le Président de la République déclarait le 27 octobre 2009 à Poligny : « Je veux dire aux agriculteurs de France que la France ne les laissera pas tomber ».

2. La demande récurrente des associations de retraités d’une extension du régime est d’autant plus légitime que les avancées récentes ont été relativement faibles

a) Les associations de retraités réclament l’extension du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux

Les contacts pris avec les associations de retraités agricoles montrent qu’il existe chez eux une forte demande de donner à la profession d’agriculteur un cadre juridique et social plus avantageux et plus sécurisant.

En particulier, l’Association nationale des retraités agricoles de France (ANRAF), qui œuvre pour que les anciens agriculteurs puissent obtenir à l’âge de leur retraite une pension décente leur permettant de vivre convenablement, milite de longue date pour étendre le régime obligatoire de retraite complémentaire agricole aux conjoints et aides familiaux.

Ces associations de retraités font valoir que l’objectif d’un rapprochement progressif entre le niveau des retraites des conjoints et des aides familiaux et le Smic net passe indéniablement par l’extension, à leur bénéfice, de la retraite complémentaire obligatoire. C’est en effet la méthode qui avait déjà été utilisée en 2002 pour viser, pour les chefs d’exploitation, un montant minimum de retraite égal à 75 % du Smic net.

b) Les avancées récentes en faveur des retraites des conjoints est des aides familiaux ont été assez modestes

Après les années 1997-2002, qui ont été marquées par une forte revalorisation des petites retraites, de l’ordre de 79 % pour les conjoints et les aides familiaux, les progrès en faveur des retraites de ces derniers ont été plutôt limités, même si plusieurs lois ont eu quelques incidences sur l’assurance vieillesse des conjoints et aides familiaux de l’agriculture.

 La loi portant réforme des retraites du 21 août 2003

Elle dispose en premier lieu que les pensions servies par le régime de base des exploitants agricoles seront désormais payées chaque mois et non plus chaque trimestre, comme l’étaient déjà, depuis avril 2003, les pensions du régime complémentaire. Cette mesure était d’autant plus attendue que l’ensemble des autres régimes de retraite de base versait déjà les pensions mensuellement. Elle a concerné 1,9 million de non-salariés agricoles. Il convient toutefois de souligner que cette mesure n’a pas apporté un euro de plus aux retraités.

S’agissant des aides familiaux, l’article 98 a permis leur affiliation, à compter du 1er janvier 2004, au régime d’assurance vieillesse des non-salariés des professions agricoles dès l’âge de 16 ans, au lieu de 18 ans auparavant. Par ailleurs, l’article 100 a permis le rachat, au titre de l’assurance vieillesse des personnes non-salariées des professions agricoles, de certaines périodes d’activité accomplies en tant qu’aide familial. Les anciens aides familiaux peuvent ainsi désormais racheter les périodes accomplies en cette qualité pour parfaire leurs droits à la retraite ou prendre leur retraite par anticipation.

S’agissant des conjoints, l’article 106 a procédé à un élargissement de l’accès à la pension de réversion du régime complémentaire obligatoire en instituant une pension de réversion au bénéfice des conjoints en activité des chefs d’exploitation décédés.

 La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007

Cette loi a procédé à une revalorisation des plus petites retraites agricoles, notamment en abaissant de 32,5 à 22,5 années de la durée minimale d’activité agricole nécessaire pour accéder aux revalorisations et en réduisant le coefficient de minoration pour les années manquantes.

300 000 non-salariés agricoles, qui n’avaient pas jusque-là bénéficié des mesures de revalorisation successives et dont les pensions étaient très faibles, essentiellement des conjoints d’exploitants ou des aides familiaux, ont ainsi été concernés par une amélioration de leur retraite.

 La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009

La mesure de majoration des retraites de base, prévue par l'article 77 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, a modifié et simplifié le dispositif de revalorisation mis en œuvre depuis 1984. Elle supprime notamment les coefficients de minoration des revalorisations et abaisse le seuil de durée de carrière agricole pour ouvrir le droit à la revalorisation pour les personnes dont la retraite a pris effet avant le 1er janvier 2002.

Elle garantit un montant minimum de retraite égal, au 1er avril 2009, pour une carrière complète, à 639,33 euros par mois pour les chefs d'exploitation et pour les veuves et à 508,03 euros par mois pour les conjoints, et s'adresse à tous ceux dont les pensions, tous régimes confondus, ne dépassent pas 757,50 euros par mois.

Cette mesure sera néanmoins mise en œuvre en deux temps. Depuis le 1er janvier 2009, elle s'applique aux retraités ayant au moins 22,5 ans de carrière dans l'agriculture. Il faudra attendre le 1er janvier 2011 pour que la condition de carrière agricole soit abaissée à 17,5 années.

S'agissant des personnes veuves, elles ont bénéficié, comme on l’a vu, d’une extension de leur droit à une pension de réversion de la retraite complémentaire obligatoire. Cette mesure a pris effet le 1er janvier 2010 et concerne 88 683 personnes, pour un coût de 54,6 millions d’euros.

Le montant moyen des revalorisations résultant de ces mesures, ayant pour objectif de venir en aide aux retraités de l'agriculture dont les situations sont les plus difficiles, est d'environ 30 euros mensuels.

Quoi qu’il en soit, ces mesures laissent insatisfaite la revendication d’extension du champ d’application de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux.

3. Les travaux parlementaires au moment du vote de la loi du 4 mars 2002 ont montré la volonté d’étendre à terme le dispositif de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale avait ainsi initialement adopté un amendement étendant le dispositif aux conjoints et aux aides familiaux.

Lors des explications de vote en première lecture à l’Assemblée nationale, le 11 décembre 2001, l’approbation unanime du texte s’est par ailleurs accompagnée de nombreuses réserves concernant l’exclusion des conjoints et des aides familiaux, tant de la part du groupe RPR, par la voix de M. Alain Marleix, du groupe UDF, par la voix de M. Charles de Courson, qui a fait état de « graves insuffisances, dont l’exclusion des veuves, des conjoints et des aides familiaux » et a déclaré qu’il aurait été préférable de « les inclure tout de suite dans le régime, quitte à réduire les prestations », du groupe Démocratie libérale et du groupe Radical Citoyen Vert.

Votre rapporteur, qui l’était déjà en 2001, a indiqué lors des débats qu’« il est incontestable que, dans l’avenir, il conviendra de réfléchir à une extension du régime » tandis que le ministre de l’Agriculture indiquait lui-même, à propos de ce nouveau régime complémentaire obligatoire : « sans doute l’étendra-t-on au cours des années qui viennent ».

Il convient de souligner que la loi du 4 mars 2002 envisage d’ailleurs expressément une extension à venir du dispositif, puisque son article 5 dispose que « le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles est chargé de suivre la mise en place du régime institué par la présente loi. Il établit, au cours du premier semestre de chaque année, un bilan de fonctionnement du régime et fait des propositions sur son extension aux conjoints et aux aides familiaux », même s’il ne semble pas, d’après les informations recueillies, que le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles ait pour l’instant formulé de telles propositions.

4. L’extension du régime complémentaire agricole permettrait utilement de donner enfin un véritable statut aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux.

L’ouverture du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire serait l’occasion de donner un véritable contenu au statut de « conjoint collaborateur », qui, s’il a présenté une réelle avancée lors de sa création par la loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999 et s’est enrichi par la suite, reste encore à parfaire.

De la même façon, l’extension proposée du régime complémentaire obligatoire pourrait être un premier pas vers la mise en place d’un statut des aides familiaux des exploitants agricoles que le Médiateur de la République appelle de ses vœux. Ce dernier a ainsi fait savoir à votre rapporteur qu’il avait envoyé le 10 février 2009 une proposition de réforme en ce sens aux principaux ministres intéressés.

5. Le droit européen encourage le renforcement des droits des conjoints aidants.

Ainsi, la directive 86/613/CEE du 11 décembre 1986 sur l'application du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante, y compris une activité agricole, enregistre l’engagement des États membres d’examiner les initiatives favorisant la reconnaissance du travail fourni par les conjoints.

Par ailleurs, la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'application du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante et abrogeant la directive 86/613/CEE (document COM (2008) 636 final/E 4020), reçue à la présidence de l’Assemblée nationale le 15 octobre 2008, prévoit notamment un renforcement des droits des conjoints aidants, en rendant obligatoire les mesures nécessaires pour qu’ils puissent bénéficier d’un niveau de protection au moins égal à celui des travailleurs indépendants, sur une base volontaire.

B. LE DISPOSITIF JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE LOI, SIMPLE ET ÉQUILIBRÉ, FAIT PROGRESSER LES DROITS SOCIAUX DES AGRICULTEURS

La proposition de loi apparaît comme une mesure de justice qui constitue une avancée significative dans la voie de l’équité sociale et de la reconnaissance nationale envers ces apporteurs de travail familial agricole.

Il s’agit d’un dispositif raisonnable, qui n’entend pas répondre à l’ensemble des problématiques des retraites des non-salariés agricoles.

Bien que ces sujets méritent une attention certaine, la proposition de loi n’aborde pas en particulier les questions de l’inclusion de la bonification pour enfant de la pension de retraite de base dans le plafond de ressources, du respect des objectifs de montant minimum des pensions (75 % voire 85 % du Smic net), de la revendication du bénéfice d’une retraite proportionnelle à titre gratuit pour les invalides, de l’assouplissement des conditions de seuil pour l’accès aux droits gratuits du régime de retraite complémentaire des exploitants agricoles ni celle de la réforme du financement du régime vieillesse des non-salariés agricoles pour faire face au déséquilibre structurel des comptes du régime.

La proposition de loi se concentre ainsi sur l’extension du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, mesure d’équité attendue par la profession.

1. La retraite complémentaire obligatoire est étendue aux conjoints et aides familiaux

Prenant acte de leur apport à l’économie agricole et de la nécessité de leur assurer une retraite plus conséquente, l’article 1er de la proposition de loi étend le champ d’application de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées des professions agricoles à deux nouvelles catégories de personnes non salariées occupées dans les exploitations et entreprises agricoles : les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et les aides familiaux.

2. De nouvelles modalités de financement sont prévues

D’après le document de travail « les problématiques des régimes des non-salariés agricoles » du Conseil d’orientation des retraites en date du 8 avril 2009, l’extension du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire aux conjoints des chefs d’exploitation agricole ou d’entreprise agricole et aux aides familiaux concernerait potentiellement 709 000 personnes pour 2008, pour un coût évalué à 560 millions d’euros.

Comme la réforme proposée est une initiative parlementaire, le financement additionnel repose sur les seules cotisations des actifs. L’article 3 introduit ainsi une nouvelle source de financement du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, en prévoyant la mise en place d’une cotisation due par les aides familiaux, calculée forfaitairement sur la base du montant liquidé de leur salaire différé.

3. La gestion est confiée aux caisses de mutualité sociale agricole

L’article 6 confie logiquement à la Mutualité sociale agricole, qui gère déjà les retraites de base et dispose d’une expérience en matière de retraite complémentaire, la gestion du nouveau régime.

Cette centralisation des opérations sera source de simplification pour les assurés qui bénéficieront ainsi d’un guichet unique en matière de vieillesse.

4. Des modalités d’adaptation à la situation particulière des départements d’outre mer sont mises en place

Comme lors de la réforme de 2002, les spécificités des départements d’outre mer sont explicitement prises en compte à l’article 7, votre rapporteur ayant également déposé un amendement destiné à ce que le bénéfice de l’extension réalisée s’applique dans les DOM au même moment qu’en métropole.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine la présente proposition de loi au cours de sa séance du mercredi 13 janvier 2010.

M. le président Pierre Méhaignerie. Cette proposition de M. Germinal Peiro pose d’évidents problèmes de recevabilité financière. J’en ai d’ailleurs parlé au président de la commission des finances, qui partage mon analyse. En effet, si les régimes complémentaires de sécurité sociale, même obligatoires, n’entrent, en principe, pas dans le champ de l’article 40, il n’en va pas de même quand un tel régime bénéficie d’un fort soutien financier public. Or, c’est le cas du régime de retraite complémentaire obligatoire des exploitants agricoles, pour lequel ce soutien financier représente plus du tiers des recettes. Dès lors, une proposition de loi qui élargit les bénéficiaires d’un tel régime accroît directement les charges de celui-ci et est donc irrecevable. Pour autant, j’ai l’intention de laisser la discussion se dérouler normalement au sein de notre commission, car je crois qu’elle peut être utile compte tenu des débats à venir sur les retraites et sur la loi de modernisation agricole.

À la fin de la discussion générale, je demanderai à la commission de rejeter cette proposition de loi, comme c’est mon devoir en tant que président de la commission. À l’issue de nos travaux, en application de l’alinéa 4 de l’article 89 du Règlement, je saisirai le président de la commission des finances du texte de la proposition de loi pour qu’il statue sur sa recevabilité financière.

Un débat suit l’exposé du rapporteur.

M. Denis Jacquat. Je remercie le rapporteur pour sa constance et son sérieux dans la défense des retraités agricoles. Comme il l’a fort justement rappelé, nous avons toujours joué le jeu, puisqu’il y a eu unanimité ici même sur la proposition de 2002. Aujourd’hui, nous regardons la présente proposition de loi avec les yeux de Chimène, car la précédente était en effet insuffisante.

Le seul bémol porte sur la date de discussion de ce texte, à quelques mois du débat sur les retraites au cours duquel, selon les termes du Président de la République, « il faudra que tout soit mis sur la table ».

En conclusion donc, oui à cette proposition de loi, mais pas aujourd’hui car la question des retraites doit être étudiée de façon globale et, ajouterai-je, toutes les demandes du monde agricole devront être examinées à l’occasion de ce rendez-vous, ce qui implique d’aller au-delà de la présente proposition pour aborder en particulier le problème des veuves.

M. Élie Aboud. Bravo, monsieur le rapporteur, pour l’habileté politique mais aussi pour votre attachement au monde agricole. Cependant, comme on le dit chez moi, quand on parle vrai sur une base fausse, tout devient faux.

Beaucoup de députés UMP seront avec vous dans ce combat, mais il y a le problème des droits non contributifs, l’article 40 et le grand débat lancé par le Président de la République. Ne considérons donc pas cette question isolément.

Notre position sera bien sûr celle exprimée par le président de la commission.

M. Jean Mallot. Nous saluons la qualité du travail du rapporteur dont nous connaissons la grande compétence sur le sujet.

Si Denis Jacquat a raison de rappeler le débat sur les retraites, nous verrons à nouveau dans les mois prochains que, au-delà des considérations arithmétiques sur l’âge de départ, la durée et les taux de cotisation, deux sujets importent vraiment : d’une part, la non-prise en compte de la pénibilité, qui retentit sur l’espérance de vie ; d’autre part, le montant très faible des retraites versées à beaucoup de nos concitoyens, qui ne leur assure pas les moyens de vivre.

Cela dit, nous ne sommes pas réunis ce matin pour discuter de l’ensemble des retraites, mais seulement des retraites agricoles : il faut bien commencer par un bout ! Nous en avons débattu lors de l’examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 et 2010, mais nos propositions ont malheureusement été systématiquement rejetées par le groupe majoritaire.

En instituant le régime complémentaire obligatoire, la loi de 2002 a représenté une avancée considérable en permettant d’augmenter de 29 % la pension de 900 000 retraités. Depuis, la revalorisation des retraites agricoles fait du sur-place. Qu’est-il sorti, en effet, des annonces tonitruantes du Président de la République, mises en œuvre partiellement depuis trois ans, notamment par M. Michel Barnier ? La volonté d’atteindre 639 euros par mois pour les anciens exploitants et 506 euros par mois pour les conjoints s’est soldée par un échec car, en raison de la complexité du système et des critères mis en œuvre, 10 % seulement des retraités agricoles en ont bénéficié, pour des revalorisations de l’ordre de 30 euros par mois, soit 1 euro par jour.

Une petite avancée sera sans doute possible en 2010, car un certain nombre de mesures ont été prises, mais elles sont largement en deçà des besoins puisque 600 000 retraités agricoles supplémentaires bénéficieront d’environ 20 euros de revalorisation mensuelle, soit moins d’un euro par jour. Ainsi, les objectifs ambitieux annoncés ne seront pas atteints.

Pour toutes les organisations de retraités agricoles, les revendications portent sur le minimum de 85 % du SMIC pour une carrière complète, mais aussi sur les critères sur lesquels se fonde le dispositif. Il s’agit du relèvement du plafond de ressources du ménage de 750 à 880 euros, soit les 85 % du SMIC ; de la suppression de la prise en compte de la bonification pour enfant dans le calcul du plafond, de la neutralisation des années rachetées de conjoint participant et de l’exigence d’une carrière complète pour les conjoints ; enfin, de l’abaissement de la durée maximale d’assurance dans le régime non salarié agricole à dix-sept ans et demi, au lieu de vingt-deux ans et demi, dès 2010 au lieu d’attendre 2011.

Cette proposition de loi est une vraie mesure, qui aura un effet sensible sur le montant des pensions versées aux conjoints et aux aides familiaux.

Je considère que l’article 40 ne devrait pas s’appliquer, puisqu’il n’y a pas de charge directe pour l’État.

Enfin, le coût pour la collectivité de l’extension du régime aux conjoints et aux aides familiaux serait d’environ 500 millions d’euros pour à peu près 700 000 bénéficiaires, soit un ordre de grandeur compatible avec l’état des finances publiques. Lors du débat sur le dernier projet de loi de financement, nous avons d’ailleurs proposé des mesures susceptibles de procurer des recettes se comptant en milliards quand, vous, vous décidiez de recettes se comptant seulement en dizaines ou en centaines de millions. Il n’est donc pas absurde de considérer ce montant de 500 millions comme à notre portée : c’est, à quelques dizaines de millions près, le coût du bouclier fiscal.

Il faut faire des choix et, je viens de le démontrer, cette proposition de loi peut être financée. Mettons-la en œuvre ensemble !

M. Bernard Perrut. La situation de l’agriculture est une préoccupation pour beaucoup d’entre nous : tous ceux qui font vivre notre grand jardin français méritent toute notre attention, d’un point de vue économique comme du point de vue social.

Du point de vue économique, je rappelle que nos agriculteurs vivent des moments difficiles, puisque leur revenu net, après avoir chuté de 20 % en 2008, a reculé de 32 % l’année dernière, retombant au niveau d’il y a vingt ans. Nous évoquerons prochainement le sujet lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche car, si nos agriculteurs sont de véritables entrepreneurs, ils ont aujourd’hui du mal à investir et à vivre de leurs revenus. Nous devons donc être à leurs côtés.

Du point de vue social, nous devons également être à leurs côtés, c’est-à-dire les accompagner.

Cette proposition de loi est tout à fait louable – nous partageons évidemment le souci de reconnaître la contribution des conjoints et des aides familiaux –, mais elle ne peut être dissociée de la réflexion globale sur les retraites, chantier qui doit s’ouvrir rapidement car nous ne pouvons pas sans cesse reculer la remise à plat de nos dispositifs de retraite.

Des évolutions ont eu lieu en France : tous les ministres successifs, de droite comme de gauche, y ont participé depuis une vingtaine d’années. Néanmoins, si la création de ce régime complémentaire a constitué une très belle évolution, le dispositif a nécessité des financements de la part de l’État.

Il nous faudra donc encore évoluer. Nous souhaitons que les engagements pris, en particulier par le Président de la République, soient tenus dans les mois et les années à venir. Sinon, nous ne serions pas crédibles vis-à-vis de nos agriculteurs et de nos viticulteurs retraités.

M. Georges Colombier. Je voudrais à mon tour remercier Germinal Peiro, avec qui j’ai l’habitude de travailler.

Je noterai que cette proposition de loi a été déposée il y a deux ans, ce qui relativise un peu les choses, sans rien changer sur le fond. Je ne renie pas les positions que j’ai prises sous le gouvernement de Lionel Jospin : elles étaient sincères, et je reste favorable à une amélioration du sort des conjoints et des aides familiaux. D’ailleurs, et cela dépasse les limites du monde agricole, je ne suis pas très fier non plus de la façon dont on a globalement traité les veuves de ce pays en matière de réversion.

Le débat sur les retraites se tiendra prochainement mais, lors de l’examen prochain de la loi de modernisation de l’agriculture aussi, il nous faudra insister sur ces sujets car, en dépit de toutes les améliorations apportées au fil des années, les retraites des travailleurs du monde agricole restent insuffisantes. On peut d’ailleurs regretter à ce propos que les intéressés aient refusé d’entrer dans le régime général lorsque cela leur avait été proposé, car cela nous aurait peut-être permis de progresser davantage.

Vous pouvez compter sur moi, monsieur le rapporteur : lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture comme lors du débat sur les retraites, je ferai partie des collègues qui soutiendront la revendication que vous avez défendue, car cette crise économique touche tout particulièrement le monde agricole et je ne sais pas si beaucoup de professions accepteraient longtemps ce que les agriculteurs acceptent actuellement.

En attendant, ce débat n’aura pas été inutile : il nous rappelle à notre devoir d’attention à l’égard des retraités du régime agricole.

Mme Gisèle Biémouret. À mon tour, je remercie Germinal Peiro.

Cette proposition concerne essentiellement les conjointes d’exploitants dont je voudrais être ici la porte-parole, parce que j’ai été l’une d’elles.

Voter ce texte de loi à l’unanimité serait un signe fort de reconnaissance à l’égard de ces femmes, qui ont toujours été à la pointe du mouvement en agriculture, malgré une vie difficile et un travail très dur. En effet, bien souvent, ce sont elles qui ont pris en charge les projets de tourisme à la ferme, de circuits courts, de vente de produits fermiers.

Dissocier l’objet de cette proposition de la discussion globale sur les retraites, afin de faire un geste en faveur de toutes ces femmes, serait aussi faire la preuve que ce Gouvernement se soucie également des petites gens de ce pays.

M. Dominique Dord. Élu d’une région de montagne qui compte beaucoup de petites exploitations, je partage totalement l’objectif de fond visé par cette proposition, et je tiens à remercier Germinal Peiro pour son travail, tout particulièrement pour son rapport. Alors que les propositions de loi de l’opposition sont bien souvent, notamment dans leur exposé des motifs, des tracts politiques contre le Gouvernement, ce document-ci nous grandit car il échappe à toute polémique.

Monsieur le rapporteur, vous dites qu’on va ouvrir aux nouveaux bénéficiaires du régime complémentaire les mêmes droits qu’aux anciens, mais avec un mode de financement différent puisqu’il va reposer uniquement sur les cotisations. Or, l’adoption de l’article 3 nécessiterait une vraie concertation avec ceux qui auront à payer. Jean Mallot a évoqué un coût de 500 millions, mais combien cela va-t-il représenter pour chaque aide familial ? Ceux-ci accepteront-ils votre idée ? Ce point me semble essentiel.

Nous sommes totalement favorables à l’objectif de cette proposition et ne pas la voter reviendrait à envoyer un signal terriblement négatif aux personnes concernées. Cependant, en raison de cette incertitude sur la question du financement en une période financièrement critique et à l’approche du grand débat sur les retraites, cette avancée ne pourrait-elle avantageusement être versée au « pot commun » de la révision des régimes de retraite, afin qu’on y trouve, à côté d’un lot inévitable de mauvaises nouvelles à annoncer au pays, deux ou trois éléments positifs, deux ou trois lueurs ?

Monsieur le président, j’ignore comment vous allez nous proposer d’orienter notre vote. Le vote négatif ne me semblant pas possible, et à défaut d’un vote positif, l’abstention pourrait être tentante, en attendant de vérifier que les aides familiaux pourront supporter le coût de la mesure et d’examiner ce sujet dans un projet plus large. Je ne voudrais en tout cas pas que nous donnions le sentiment de reporter indéfiniment une décision nécessaire.

M. le président Pierre Méhaignerie. Monsieur Dord, la lueur dont vous parlez est la progression continue de l’espérance de vie : trois années de plus en bonne santé, sur les dix dernières années.

M. Rémi Delatte. À mon tour, je salue le travail et l’objectivité du rapporteur. Nous sommes convaincus du bien-fondé de cette proposition de loi : c’est un texte intéressant, une généreuse idée, une forme de justice pour une catégorie professionnelle soumise à un travail pénible dans une conjoncture qui accroît ses difficultés. Cela étant dit, s’il est nécessaire de prendre en compte la situation des conjoints et des aides familiaux, il ne faut pas perdre de vue la situation des agriculteurs en général, comme certains de nos collègues l’ont rappelé.

Nous aurions donc presque envie de voter cette proposition, mais je rejoins l’avis du président Méhaignerie : cette mesure ne peut être dissociée de la discussion d’ensemble sur les régimes de retraite et de la discussion de la loi de modernisation agricole, et nous devons nous montrer prudents en évitant de créer un dispositif particulier qui nous éloignerait de l’objectif recherché, à savoir assurer un niveau de retraite acceptable pour tout le monde paysan. En tout cas, c’est là un dossier où une vigilance toute spéciale est de mise.

M. Vincent Descoeur. Sur le principe, cette extension du régime complémentaire obligatoire ne serait que justice, et il est judicieux qu’on veuille en faire bénéficier au premier chef les conjoints, dont le rôle est aujourd’hui très mal reconnu. J’approuve donc l’esprit comme le fond de ce texte et, si j’avais été député en 2002, j’aurais certainement mêlé ma voix à ceux qui demandaient alors davantage. Cela étant, j’ai bien entendu les observations faites sur le financement de cette mesure, et sur le fait qu’il devrait reposer intégralement sur ses futurs bénéficiaires.

En tout état de cause, si la commission fait siennes les réserves du président Méhaignerie, il me semble qu’elle doit dans le même temps clairement marquer qu’il ne saurait être question de refermer aujourd’hui ce dossier : la question des retraites agricoles doit être au cœur du débat sur les retraites qui va s’ouvrir et, disant cela, j’y comprends la question de la revalorisation des pensions car, même si le dispositif est récent et même si le niveau de cotisation ne facilite pas les choses, le montant de celles qui sont servies actuellement aux agriculteurs ne peut être qualifié autrement que d’indigne !

Mme Dominique Orliac. À mon tour, je veux saluer la compétence de notre rapporteur et le féliciter pour la clarté de son exposé. Comme on vient de le dire, le sort fait aux conjointes d’agriculteurs – dans leur très grande majorité, il s’agit en effet de femmes – est indigne. Déclarer cette proposition irrecevable et, alors qu’il y a unanimité sur le principe, reporter la décision jusqu’au débat général sur les retraites, ne peut que décevoir celles qui attendent cette mesure avec impatience car, pour elles, chaque journée est difficile. Faire dans le pathos n’est pas mon genre, mais comment entendre sans émotion certaines, qui ont travaillé durement toute leur vie, vous expliquer qu’elles doivent passer devant une pâtisserie sans entrer acheter le gâteau qui leur fait envie ? Et je ne suis pas si persuadée que cela que l’espérance de vie des agriculteurs augmente…

On va donc retarder encore cette mesure nécessaire, et c’est bien regrettable : est-on en effet assuré de retrouver une quasi-unanimité lors du débat général sur les régimes de retraite, où beaucoup de questions seront agitées, dans un climat forcément houleux ?

M. Philippe Morenvillier. La proposition de Germinal Peiro est généreuse et elle remet, en quelque sorte, l’église au milieu du village ! Il s’impose, en effet, de rendre justice à ces conjoints et à ces aides familiaux, qui ont souvent fourni un travail ingrat pour faire vivre l’exploitation. Cela étant, il me paraît à moi aussi que cette mesure aurait toute sa place dans la loi de modernisation de l’agriculture.

M. le rapporteur. Je vous sais gré d’avoir salué ce travail, mais je tiens à souligner qu’il est celui de beaucoup, au cours des dernières années, et qu’il répond à un souci largement partagé. Toutefois, il est indéniable que c’est sous un gouvernement de gauche que ce dossier a le plus avancé. Par ailleurs, ne voyez pas malice de ma part si je défends cette proposition aujourd’hui : je l’ai déposée il y a deux ans et cette préoccupation ne m’a jamais quitté.

La mesure, à mon sens, ne peut être reportée : il y aurait danger à traiter du cas particulier du régime agricole dans une discussion générale sur les régimes de retraite car, inévitablement, des voix s’élèveront dans l’hémicycle pour juger ce régime avantageux, au motif que le régime complémentaire obligatoire des exploitants est cofinancé par l’État, alors que celui des artisans et commerçants ne l’est pas.

S’agissant du financement, je serai honnête : si je n’ai pas écrit dans la proposition qu’une participation de l’État était inévitable, c’est que je savais que c’était exposer le texte à tomber sous le couperet de l’article 40. D’où, dans l’article 3, la création d’une cotisation qui, de toute façon, s’impose mais qui devrait être au même taux que celle des chefs d’exploitation, soit 2,97 %. Ce serait mentir que de prétendre qu’une contribution de l’État ne sera pas nécessaire. La situation était identique en 2002 : il s’agissait là aussi d’une proposition de loi, mais le gouvernement Jospin avait accepté qu’elle vienne en discussion et avait déposé des amendements prévoyant un cofinancement de l’État. Rien n’empêche le gouvernement Fillon de faire de même : ce n’est qu’une question de volonté politique de sa part. Personne ne comprendrait qu’il use d’un artifice pour repousser la décision !

Grâce à la Mutualité sociale agricole, nous disposons de chiffres précis. Il ne s’agit pas de 700 000 bénéficiaires, mais de 363 000 seulement : 133 000 chefs d’exploitation, une partie de ceux-ci ne réunissant pas les deux conditions exigées pour bénéficier du régime complémentaire – 32 ans et demi comme non salarié agricole et dix-sept ans et demi comme chef d’exploitation –, 112 000 conjoints, 9 600 aides familiaux et 100 000 veuves, ce pour un total de 400 millions d’euros. Je ne prétends pas que ce soit une paille mais je relève que, sur les 116 millions d’euros qu’il était prévu d’affecter en 2009 au relèvement des retraites agricoles, 73 seulement ont été effectivement dépensés, selon la Caisse centrale de la MSA. Si l’on se limite dans un premier temps aux conjoints et aux aides familiaux, la mesure ne concernera que 120 000 personnes. Peut-être pourrait-on songer à l’étendre à certains chefs d’exploitation mais, j’y insiste, des solutions techniques existent : ce qu’a fait le gouvernement Jospin, il n’y a pas de raison qu’un autre gouvernement ne puisse pas le faire ! J’ajoute qu’il meurt chaque année 90 000 retraités agricoles tandis qu’il n’en entre que 40 000 dans le régime : entre 1998, date où M. Lionel Jospin m’avait confié un rapport sur cette question, et aujourd’hui, leur effectif a donc diminué de 500 000, tombant de 2,3 à 1,8 million de personnes. On ne peut contraindre cette population à une attente interminable. Vous avez le pouvoir pour au moins deux ans et demi encore, il vous appartient de demander au gouvernement que vous soutenez de tenir l’engagement pris par le Président de la République. Ne laissez pas cette promesse devenir lettre morte, au risque de décourager nos concitoyens. Je ne mets pas en doute votre volonté : vous pouvez donc agir !

M. Dominique Dord. Je regrette ce propos, monsieur le rapporteur. Il efface presque ce que ce débat pouvait avoir jusqu’ici de consensuel ! Et si vous voulez vraiment amorcer une polémique, il nous sera aisé de vous répondre que ce que le gouvernement Jospin avait décidé, c’est le gouvernement suivant qui l’a financé. Il est donc triste que vous terminiez ainsi cette discussion ! Surtout, vous nous annoncez en substance que cette proposition est insincère, puisque vous avouez vous-même que, pour ne pas tomber sous le coup de l’article 40, vous avez dissimulé la nécessité d’une contribution de l’État. L’esprit de cette proposition n’est donc pas celui que nous croyions. J’en viendrais presque à retirer ce que j’ai dit tout à l’heure !

M. le président Pierre Méhaignerie. Je transmettrai au Gouvernement la tonalité des échanges au sein de notre commisison. Je reconnais l’importance d’une globalisation, mais je rappelle qu’il n’y avait pas de cotisations pour une retraite de base des exploitants avant que ne le décide un gouvernement que nous soutenions. Reconnaissons à tout le moins que tous les gouvernements ont apporté leur contribution !

Ayant quatre frères et sœurs agriculteurs, je mesure parfaitement l’importance du problème mais je me dois, en tant que président de la commission, de porter une appréciation juridique sur le texte qui nous est soumis : dès lors que le régime complémentaire entre dans le champ de l’article 40, le seul fait que cette proposition en augmente les dépenses la rend irrecevable. En effet, l’article 40 interdit la compensation entre charges et recettes. J’observe en outre que le financement proposé n’est que partiel, puisque les conjoints ne seraient pas conduits à cotiser. C’est pourquoi je vous demande de rejeter cette proposition, étant entendu que notre opposition à elle n’est pas de fond, et que je saisirai mon collègue de la commission des finances.

Cela étant posé, nous pouvons en venir à la discussion des amendements.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Assujettissement des conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et des aides familiaux au régime obligatoire de retraite complémentaire agricole
(article L. 732-56 du code rural)

L’article 1er de la proposition de loi complète par un nouveau paragraphe IV l’article L. 732-56 du code rural relatif à l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées des professions agricoles, issu de la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002, afin, d’une part, de prévoir deux nouvelles catégories de bénéficiaires du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées des professions agricoles et, d’autre part, de fixer la date d’entrée en vigueur du nouveau dispositif.

Nombre d’exploitations agricoles françaises continuent de présenter un caractère familial marqué, c'est-à-dire qu’elles sont mises en valeur non seulement par l’exploitant mais également avec l’assistance du conjoint, généralement la femme, et le soutien, le cas échéant, d’un ou plusieurs aides familiaux. L’article L. 722-10 du code rural définit ces derniers comme « les ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré du chef d’exploitation ou d’entreprise ou de son conjoint, âgés de plus de seize ans, vivant sur l’exploitation ou l’entreprise et participant à sa mise en valeur comme non-salariés » et dispose que si le choix en faveur du statut d’aide familial a été émis auprès de la caisse de MSA à compter du 18 mai 2005, la durée dans ce statut ne peut pas excéder cinq ans.

Si ces conjoints et aides familiaux ont progressivement bénéficié de certains avantages en terme de retraite, ils demeurent jusqu’à aujourd’hui exclus du champ d’application de la loi du 4 mars 2002 relative à la création d’un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés, qui malgré un intitulé large, a été réservé aux seuls chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole.

Prenant acte de leur apport à l’économie agricole et de la nécessité de leur assurer une retraite plus conséquente, l’article 1er étend donc le champ d’application de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées des professions agricoles aux conjoints et aides familiaux.

1. Les deux nouveaux bénéficiaires du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire

a) Les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole

Il s’agit en premier lieu des « conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole mentionnés aux I et II » de l’article L. 732-56 du code rural.

La référence à la seule qualité de conjoints, sans préciser « conjoints participant aux travaux » ou « conjoints collaborateurs » ne pose pas de problème juridique, dans la mesure où la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006 a rendu obligatoire à compter du 1er janvier 2006 l’option pour un statut dès lors que le conjoint exerce une activité professionnelle régulière sur l’exploitation ou l’entreprise agricole et que la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2009 a définitivement supprimé la qualité de « conjoint participant aux travaux » à compter du 1er janvier 2009.

Concrètement, l’article 1er vise donc bien l’ensemble des conjoints qui exercent une activité professionnelle régulière sur l’exploitation agricole, sachant en outre que, depuis la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006, le statut de « conjoint collaborateur » est même désormais ouvert aux personnes qui sont liées par un pacte civil de solidarité (PACS) ou qui vivent en concubinage avec le chef d’exploitation ou d’entreprise agricole.

La référence aux seuls conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole « mentionnés aux I et II » de l’article L. 732-56 du code rural est source d’ambiguïtés juridiques. Elle semble en effet n’étendre le bénéfice du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire qu’aux seuls conjoints des personnes occupées au 1er janvier 2003 ou postérieurement à cette date en qualité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole (visés au I) et aux conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole dont la retraite a pris effet soit avant le 1er janvier 1997, soit entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 2003 (visés au II).

Dans une optique de clarification juridique du dispositif, votre rapporteur propose un amendement visant à faire explicitement référence aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole en activité ou dont la retraite a pris effet avant le 1er juillet 2010, date d’entrée en vigueur de l’extension du bénéfice du régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux (cf. infra).

b) Les aides familiaux

La deuxième catégorie visée concerne les aides familiaux qui sont explicitement définis par l’article L. 722-10 du code rural comme « les ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré du chef d’exploitation ou d’entreprise ou de son conjoint, âgés de plus de seize ans, vivant sur l’exploitation ou l’entreprise et participant à sa mise en valeur comme non-salariés ».

2. La date d’entrée en vigueur du dispositif

L’article 1er dispose que les conjoints et les aides familiaux pourront bénéficier du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées des professions agricoles « à compter du 1er janvier 2008 ».

Il n’est évidemment pas dans l’intention des auteurs de cette proposition de loi de prévoir une application rétroactive du nouveau dispositif qui poserait d’ailleurs de multiples problèmes techniques. Cette date s’explique simplement par le fait que la présente proposition de loi a été enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 novembre 2007.

Votre rapporteur propose en conséquence l’adoption d’un amendement fixant cette date au 1er juillet 2010, de manière à laisser le temps nécessaire à l’adoption définitive de la proposition de loi et à éviter toute application rétroactive.

*

La commission est d’abord saisie de l’amendement AS 1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Lorsque j’ai déposé cette proposition en 2007, j’avais prévu qu’elle entre en vigueur le 1er janvier 2008. Il faut évidemment repousser cette date et je propose de la fixer au 1er juillet 2010.

La commission rejette cet amendement, puis l’amendement AS 2 de clarification du rapporteur.

Elle rejette ensuite l’article 1er.

Article 2

Régime juridique des conjoints et aides familiaux dont la retraite prend effet postérieurement à l’entrée en vigueur de l’extension de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire
(article L. 732-56 du code rural)

L’article 2 complète le III de l’article L. 732-56 du code rural de façon à définir le régime juridique des conjoints et aides familiaux dont la retraite prendra effet postérieurement à l’entrée en vigueur de l’extension de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire réalisée par la présente proposition de loi, c'est-à-dire après le 1er juillet 2010 (cf. article 1er).

Le III de l’article L. 732-56 du code rural, dans sa rédaction actuelle, dispose que les personnes qui cesseront leur activité professionnelle après le 31 décembre 2002, c'est-à-dire après la date d’entrée en vigueur du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire réservé aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, fixée au 1er janvier 2003, pourront, sous conditions, bénéficier du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire pour leurs périodes accomplies comme chef d’exploitation ou d’entreprise agricole à titre exclusif ou principal avant le 1er janvier 2003.

Les conditions susmentionnées sont définies par renvoi au 2° du II de l’article L. 732-56 et sont les suivantes :

– justifier, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime de base d’assurance vieillesse des professions non salariées agricoles ;

– justifier de périodes minimum d’assurance effectuées en qualité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole à titre exclusif ou principal.

Il est prévu par ailleurs au 2° du II de l’article L. 732-56 qu’un décret détermine les modalités de fixation des minima prévus dans les conditions nécessaires pour bénéficier du régime complémentaire obligatoire des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole.

L’objectif était alors de s’assurer que les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole qui prendront leur retraite après la mise en place du régime complémentaire obligatoire (c'est-à-dire après le 1er janvier 2003), pourront bénéficier de celui-ci, non seulement pour les périodes effectuées comme chef d’exploitation après le 1er janvier 2003, où ils seront normalement soumis à des cotisations leur ouvrant des droits cotisés, mais également, sous conditions définies au 2° du II (cf. supra) pour les périodes accomplies comme chef d’exploitation avant le 1er janvier 2003.

L’extension du dispositif aux conjoints et aides familiaux pose le même type de problématique.

L’article 2 de la proposition de loi y répond donc en calquant le régime juridique des conjoints et aides familiaux dont la retraite prendra effet postérieurement à l’entrée en vigueur de l’extension de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, c'est-à-dire après le 1er juillet 2010, sur le dispositif prévu au III de l’article L. 732-56 pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole.

L’objectif est de compléter l’article L. 732-56 afin que les conjoints et aides familiaux qui cesseront leur activité professionnelle après le 1er juillet 2010, date d’entrée en vigueur de l’extension du champ du régime complémentaire obligatoire, bénéficient du régime complémentaire pour leurs périodes accomplies comme conjoint ou aide familial avant le 1er juillet 2010, à condition de justifier dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime de base d’assurance vieillesse des professions non salariées agricoles d’une part, et de périodes minimum d’assurance effectuées en qualité de conjoint ou aide familial à titre exclusif ou principal d’autre part.

Afin de lever toute ambiguïté juridique dans la rédaction de l’article 2, dans la mesure où celle-ci peut donner à penser que cet article vise à prendre en compte les périodes accomplies comme conjoint ou aide familial lors de la liquidation de la retraite complémentaire d’une personne qui serait ultérieurement devenu chef d’exploitation ou d’entreprise agricole et qui cesse son activité professionnelle après le 31 décembre 2002, votre rapporteur présente un amendement de clarification répondant à l’objectif susmentionné.

*

La commission est saisie de l’amendement AS 3 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’ouvrir le nouveau droit, en priorité, aux conjoints et exploitants familiaux, mais non aux chefs d’exploitation qui bénéficient déjà en partie du régime complémentaire obligatoire.

La commission rejette cet amendement, ainsi que l’article 2.

Article 3

Création d’une nouvelle cotisation due lors de la liquidation du salaire différé de certains aides familiaux destinée à financer le régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire
(article L. 732-58 du code rural)

L’article 3 de la proposition de loi complète l’article L. 732-8 du code rural relatif au financement du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire afin d’introduire une nouvelle modalité de financement de ce régime. Il s’agit de tirer les conséquences de l’ouverture de celui-ci aux deux nouvelles catégories de bénéficiaires que représentent les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et les aides familiaux.

1. Le financement actuel du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire

Dans sa rédaction actuelle issue de la loi du 4 mars 2002, l’article L. 732-8 du code rural prévoit deux modalités distinctes de financement de ce régime.

a) Les cotisations dues par les chefs d’exploitation ou d’entreprise

Les articles L. 732-58, L. 732-59 et D. 732-165 du code rural définissent les modalités de calcul de ces cotisations (cf supra).

Le nombre de cotisants s’élève à 507 334 en 2008, dont 368 561 cotisants à l’assiette minimum de 1820 Smic.

D’après les statistiques de l’Observatoire économique et social de la MSA, le montant des cotisations s’est établi en 2008 à 303 millions d’euros en 2008, soit 64 % du total des produits du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles.

Les cotisations ne représentent ainsi que deux tiers des ressources du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles et sont donc complétées par une participation de l’État.

b) La participation financière de l’État

L’article L. 732-58 du code rural prévoit également une participation financière de l’État, dont les modalités sont fixées chaque année en loi de finances.

Cette participation de l’État au financement d’un régime de retraite complémentaire est sans précédent : le budget de l’État ne contribue jusqu’ici qu’à certains régimes de base, sous forme de subventions ou de taxes affectées mais tous les autres régimes complémentaires en vigueur s’autofinancent grâce à leurs cotisations.

L’État contribue ainsi au financement des droits gratuits. Toutefois, cette participation financière ne suffit pas à équilibrer le régime qui est déficitaire.

De 2005 à 2008, la participation de l’État a été fixée à hauteur de 145 millions d’euros et provenait d’une contribution d’équilibre du Fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA) à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), couvrant le besoin financier engendré par l’attribution de droits gratuits par le régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles.

Il convient de souligner qu’en 2009, une partie des droits de consommation sur les tabacs, qui était auparavant affectée au FFIPSA (4) et redistribuée au régime complémentaire, a été transférée à la CCMSA (1,52 % pour la branche vieillesse du régime des non-salariés agricoles), ce qui porte pour 2009, d’après les statistiques de la direction de la sécurité sociale, à 149,6 millions d’euros le montant des droits de consommation des tabacs affecté au financement du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles.

2. La nouvelle source de financement

L’article 3 introduit une nouvelle source de financement du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles en prévoyant la mise en place d’une cotisation due par les aides familiaux calculée forfaitairement sur la base du montant liquidé de leur salaire différé.

Les aides familiaux faisant partie d’une des nouvelles catégories de bénéficiaires potentiels du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles, il n’est pas illégitime de les faire participer à son financement.

À cet effet, l’article 3 insère un nouvel alinéa à l’article L. 732-58 du code rural destiné à mettre en place une cotisation due, non par le chef d’exploitation ou d’entreprise, mais par l’aide familial lui-même lors de la liquidation du salaire différé défini à l’article L. 321-13 du code rural.

a) La créance de salaire différé

Pour rétablir un certain équilibre entre les enfants issus d’une famille d’agriculteurs, dont certains quittent l’exploitation ou l’entreprise agricole pendant que l’un deux continue à travailler avec ses parents sans percevoir de véritable salaire, la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d’orientation agricole a institué une créance de salaire différé.

L’article L. 321-13 du code rural dispose ainsi que « les descendants d’un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l’exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d’un contrat de travail à salaire différé ».

Dès lors qu’ils remplissent ces trois conditions (être âgé de plus de 18 ans, avoir participé directement et effectivement aux travaux de l’exploitation et ne pas avoir été rémunéré), qui peuvent être prouvées par tous moyens (écrits, témoignages), les descendants peuvent bénéficier de ce salaire différé. Celui-ci peut être réglé soit au jour du partage consécutif au décès de l’exploitant, soit au jour du règlement de la créance s’il intervient du vivant de l’exploitant.

L’article L. 321-13 du code rural dispose en outre que « le taux annuel du salaire sera égal, pour chacune des années de participation, à la valeur des deux tiers de la somme correspondant à 2 080 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur » le jour du règlement.

b) La nouvelle cotisation due lors de la liquidation du salaire différé

Si l’article L. 321-13 du code rural prévoit explicitement que les sommes attribués à l’héritier de l’exploitant au titre du contrat de travail à salaire différé sont exemptes de l’impôt sur le revenu, l’article 3 de la proposition de loi propose en revanche de soumettre les sommes réglées lors de la liquidation du salaire différé versé à un aide familial à une cotisation destinée à financer l’extension du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire aux deux nouvelles catégories de bénéficiaires.

L’effort de cotisation demandé est ainsi fourni au moment de la liquidation de la créance de salaire différé.

Il convient de souligner que si l’article 3 fait référence aux cotisations dues « par les aides familiaux » lors de la liquidation du salaire différé « défini à l’article L. 321-13 », ces nouvelles cotisations ne concerneront en fait, parmi les aides familiaux, que les seuls descendants du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole. En effet, les autres catégories d’aides familiaux potentiels définies à l’article L. 722-10 du code rural (ascendants, frères, sœurs et alliés au même degré du chef d’exploitation ou de son conjoint) ne sont pas bénéficiaires de la créance de salaire différé défini à l’article L. 321-13 du code rural qui ne s’applique donc qu’aux seuls descendants.

Par ailleurs, si la loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999 a ouvert le droit au bénéfice d’un « droit de créance (5) », proche de la notion de salaire différé, au conjoint survivant d’une exploitation individuelle, l’article 3 de la proposition de loi ne prévoit aucune cotisation due au titre du financement du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire au moment de la liquidation de ce « droit de créance ».

*

La commission rejette l’article 3.

Article 4

Caractéristiques de la cotisation due lors de la liquidation du salaire différé de certains aides familiaux
(article L. 732-59 du code rural)

L’article 4 insère un nouvel alinéa à l’article L. 732-59 du code rural qui dispose, afin de simplifier le calcul et les modalités de recouvrement de la cotisation due lors de la liquidation du salaire différé de certains aides familiaux, que cette cotisation sera calculée forfaitairement sur la base du montant du salaire différé.

Concrètement, le calcul de cette cotisation s’effectuera selon un barème fixant, selon les tranches du montant du salaire différé liquidé, une cotisation forfaitaire.

La cotisation est due par les aides familiaux lors de la liquidation de leur salaire différé défini à l’article L. 321-13 (cf. supra à l’article 3).

Conformément aux dispositions actuelles de l’article L. 732-59 du code rural, un prélèvement sur le montant de ces nouvelles cotisations sera réalisé, dans une limite fixée par décret, pour couvrir les frais de gestion du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire.

*

La commission rejette l’article 4.

Article 5

Attribution de points gratuits
(article L. 732-60 du code rural)

L’article 5 dispose qu’un décret déterminera le nombre annuel de points portés, à la date d’entrée en vigueur de l’extension de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire, au compte des personnes visées au IV de l’article L. 732-56, c'est-à-dire au compte des conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et des aides familiaux en activité ou dont la retraite a pris effet avant le 1er juillet 2010 (cf. article 1er). Ce décret déterminera également le nombre maximum d’années susceptibles de leur ouvrir droit à attribution de points.

Comme dans les autres régimes complémentaires de retraite, les prestations de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire sont en effet exprimées en points, ceux-ci étant normalement acquis par les cotisations et proportionnellement à elles.

L’article L. 732-60 du code rural dispose ainsi que les personnes affiliées au régime de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire bénéficient, à compter de la date d’effet de leur retraite, d’une retraite exprimée en points de retraite complémentaire et que le nombre annuel de points est déterminé selon des modalités fixées par décret en fonction de l’assiette retenue pour le calcul des contributions. La valeur de service du point de retraite est également fixée annuellement par décret.

Néanmoins, afin de ne pas désavantager les nouveaux bénéficiaires du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire déjà retraités à la date de son entrée en vigueur (le 1er janvier 2003), la loi du 4 mars 2002 avait prévu que des points gratuits, sans contrepartie de cotisations, leur seraient attribués, sous certaines conditions de durée activité.

L’article L. 732-60 du code rural dispose ainsi que le décret qui fixe les modalités d’attribution du nombre annuel de points acquis par cotisations détermine également le nombre annuel de points portés à la date d’entrée en vigueur du nouveau régime au compte des personnes déjà retraitées, ainsi que le nombre de points qui sera porté à la date d’effet de leur retraite au compte des personnes qui prendront leur retraite après l’entrée en vigueur du nouveau régime tout en ayant exercé une activité leur ouvrant droit au bénéfice de ce régime avant son entrée en vigueur. Ce décret fixe également le nombre maximum d’années susceptibles de donner lieu à attribution de points.

Dans la même logique, l’article 5 met en place un dispositif similaire pour les deux nouvelles catégories de bénéficiaires du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire. Il appartiendra donc au pouvoir réglementaire de fixer par décret le nombre maximum d’années susceptibles de donner lieu à attribution de points et le nombre de points gratuits qui sera porté le 1er juillet 2010 au compte des conjoints et aides familiaux déjà retraités à la date d’entrée en vigueur de l’extension du champ du régime de retraite complémentaire obligatoire et à la date d’effet de leur retraite pour ceux qui prendront leur retraite après le 1er juillet 2010.

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La commission rejette l’amendement AS 4, de cohérence, présenté par le rapporteur, puis elle rejette l’article 5.

Article 6

Gestion du régime d’assurance complémentaire obligatoire des conjoints et des aides familiaux par les caisses de mutualité sociale agricole
(article L. 732-61 du code rural)

L’article 6 complète l’article L. 732-61 du code rural afin de poser la compétence exclusive des caisses de Mutualité sociale agricole pour le recouvrement et le contrôle des cotisations pour les conjoints et aides familiaux.

L’article L. 732-61 du code rural dispose que les cotisations visées à l’article L. 732-59, c'est-à-dire non seulement les cotisations dues par les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, mais aussi, d’après les modifications prévues par la présente proposition de loi à l’article 3 (cf. supra), les cotisations dues par les aides familiaux au titre de ce régime, sont recouvrées et contrôlées par les caisses de Mutualité sociale agricole selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues au titre des régimes de sécurité sociale des personnes non salariées des professions agricoles.

Cet article étend également aux conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole et aux aides familiaux l’application des dispositions de l’article L. 725-10 du code rural qui disposent qu’est entachée de nullité d’ordre public toute clause ou convention conclue par toute personne tenue de cotiser à un régime d’assurance obligatoire et garantissant les risques couverts à titre obligatoire par lesdits régimes, lorsque cette personne n’est pas à jour des cotisations dues à ce titre au moment de la conclusion ou du renouvellement du contrat.

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La commission rejette l’article 6.

Article 7

Adaptation aux départements d’Outre-mer
(articles L. 762-35, L. 762-36 et L. 762-37 du code rural)

L’article 7 procède à quelques modifications de la section 6 (« Assurance vieillesse complémentaire obligatoire ») du chapitre II (« Protection sociale des non-salariés des professions agricoles dans les départements d’outre-mer ») du titre VI (« Dispositions spéciales ») du livre VII (« Dispositions sociales ») du code rural, afin d’adapter aux départements d’outre-mer l’extension du régime de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux.

Le I modifie l’article L. 762-35 du code rural afin, en premier lieu, d’harmoniser les termes employés dans le code rural en substituant à l’expression « chefs d’exploitation agricole » la dénomination « chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole » par cohérence avec les termes retenus par ailleurs pour tout ce qui touche au régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire. En second lieu, il tire les conséquences, dans les départements d’outre-mer, de l’ouverture de ce régime aux deux nouvelles catégories de bénéficiaires en précisant que les dispositions relatives à l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées leur seront applicables dans les mêmes conditions que celles qui s’appliquent aujourd’hui déjà dans les départements d’outre-mer aux chefs d’exploitation. Ces dernières prévoient aujourd’hui deux dérogations par rapport au régime légal de la métropole : des modalités d’assiette spécifiques pour les cotisations, avec une assiette forfaitaire fixée par décret, et des modalités particulières de gestion du régime, excluant notamment la compétence des caisses de Mutualité sociale agricole.

Le II modifie le deuxième alinéa du même article L. 762-35 relatif à la date d’entrée en vigueur de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire dans les départements d’outre-mer. Pour les chefs d’exploitations ou d’entreprise agricole, l’entrée en vigueur, c'est-à-dire la date à compter de laquelle les prestations étaient dues, avait été fixée, comme pour la métropole, au 1er avril 2003. Le II fixe la date d’entrée en vigueur de l’extension au conjoint et aides familiaux au 1er janvier 2009, alors que l’article 1er de la proposition de loi (cf. supra) fixait l’ouverture du régime aux nouveaux bénéficiaires au 1er janvier 2008 pour la métropole. Pour les raisons qui ont été développées précédemment à l’article 1er, votre rapporteur propose, d’une part, de modifier la date d’entrée en vigueur dans les départements d’outre-mer pour éviter une application rétroactive de la loi et, d’autre part, de la fixer, comme pour la métropole, au 1er juillet 2010.

Le III complète l’article L. 762-36 du code rural afin de spécifier que les cotisations dues par les aides familiaux dans les départements d’outre-mer seront assises sur une assiette forfaitaire fixée par décret, comme le sont déjà les cotisations dues au titre de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire dues par les chefs d’exploitation, le II procédant également à la même harmonisation rédactionnelle que le I en substituant à l’expression « chefs d’exploitation agricole » la dénomination « chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole » par cohérence avec les termes retenus par le code rural pour tout ce qui touche au régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire.

Le IV tire également les conséquences de l’extension du régime aux conjoints et aides familiaux en modifiant à cet effet l’article L. 762-37 du code rural qui dispose que les modalités de gestion du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire dans les départements d’outre-mer sont fixées par décret.

*

La commission est saisie de l’amendement AS 5 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit à nouveau d’une question de date : l’entrée en vigueur devrait se faire concomitamment en métropole et dans les départements d’outre-mer.

La commission rejette l’amendement AS 5, ainsi que l’article 7.

Article 8

Gage

L’article 8 prévoit un gage pour compenser les pertes éventuelles de recettes pour l’État résultant de la création de deux nouvelles catégories de bénéficiaires du régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire.

*

La commission rejette l’article 8.

M. le rapporteur. Monsieur Dord, cette proposition n’avait pour objectifs que de susciter le débat et d’inciter à une avancée. Saisissez la ministre des affaires sociales et le Premier ministre, en sorte que, lorsque ce texte viendra en discussion, jeudi 21, le Gouvernement présente les amendements qui assureront le financement de l’État, comme l’avait fait le gouvernement Jospin en 2002. Il n’y a aucune malice dans mon attitude et, pour vous, je le répète, ce n’est qu’une question de volonté politique.

M. le président Pierre Méhaignerie. J’ai exposé les arguments sur l’irrecevabilité de cette proposition de loi. Je vais maintenant la mettre aux voix, en rappelant que je saisirai le président de la commission des finances.

*

En conséquence, la Commission des affaires sociales rejette l’ensemble de la proposition de loi. Aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

TABLEAU COMPARATIF

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Dispositions en vigueur

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Texte de la proposition de loi

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Texte adopté par la commission

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Code rural

Article 1er

 
 

L’article L. 732-56 du code rural est complété par un IV ainsi rédigé :

 

Art. L. 732-56. – I. Sont affiliées au régime de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire les personnes occupées au 1er janvier 2003, ou postérieurement à cette date, en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, aux activités ou dans les exploitations, entreprises ou établissements visés aux 1° à 5° de l'article L. 722-1.

Sont affiliés à compter du 1er janvier 2003 et durant toute la période de perception de l'allocation de préretraite les titulaires de cette allocation mentionnés au deuxième alinéa du II de l'article 9 de la loi n° 91-1407 du 31 décembre 1991 modifiant et complétant les dispositions du code rural et de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 relatives aux cotisations sociales agricoles et créant un régime de préretraite agricole.

Sont affiliées les personnes qui, au 1er janvier 2003 ou postérieurement, relèvent en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole du régime de l'assurance volontaire vieillesse mentionnée aux articles L. 722-17 et L. 722-18.

Sont affiliés à compter du 1er janvier 2003 les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole non retraités :

- titulaires de pensions d'invalidité, mentionnés au 6° de l'article L. 722-10 ;

- titulaires de rentes, mentionnés au 7° de l'article L. 722-10, et au deuxième alinéa de l'article L. 752-6.

II. – Bénéficient en outre du présent régime les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole dont la retraite servie à titre personnel a pris effet :

1° Avant le 1er janvier 1997 et qui justifient de périodes minimum d'activité non salariée agricole et d'assurance en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole accomplies à titre exclusif ou principal. Un décret précise les modalités suivant lesquelles les périodes d'assurance et les minima précédemment mentionnés sont déterminés ;

2° Entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 2003 et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d'une durée d'assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise par l'article L. 732-25 pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime d'assurance vieillesse des professions non salariées agricoles, et de périodes minimum d'assurance effectuées en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole à titre exclusif ou principal. Un décret détermine les modalités de fixation des minima précédemment mentionnés.

III. – Les personnes dont la retraite servie à titre personnel prend effet postérieurement au 31 décembre 2002 et qui remplissent les conditions précisées au 2° du II bénéficient du présent régime pour leurs périodes accomplies comme chef d'exploitation ou d'entreprise agricole à titre exclusif ou principal avant le 1er janvier 2003.

   
 

« IV. – Bénéficient du régime prévu par le présent article, à compter du 1er janvier 2008, les conjoints des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole mentionnés aux I et II, ainsi que les aides familiaux définis au 2° de l’article L. 722-10. »

 
 

Article 2

 

Art. L.732-56. –…………..…….

III. – Les personnes dont la retraite servie à titre personnel prend effet postérieurement au 31 décembre 2002 et qui remplissent les conditions précisées au 2° du II bénéficient du présent régime pour leurs périodes accomplies comme chef d'exploitation ou d'entreprise agricole à titre exclusif ou principal avant le 1er janvier 2003.

   
 

Le III du même article L. 732-56 est complété par les mots : « ainsi que pour leurs périodes accomplies comme conjoint, ou aide familial défini au 2° de l’article L. 722–10, à titre exclusif ou principal avant le 1er janvier 2008 ».

 
 

Article 3

 
 

Après le deuxième alinéa de l’article L. 732-58 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

 

Art. L. 732-58. – Le régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire est financé :

   

- par le produit des cotisations dues par les chefs d'exploitation ou d'entreprise au titre de ce régime ;

   
 

« – par le produit des cotisations dues par les aides familiaux au titre de ce régime lors de la liquidation du salaire différé défini à l’article L. 321-13 ; ».

 

- par une participation financière de l'État, dont les modalités sont fixées en loi de finances. Cette participation ne couvre pas les dépenses afférentes à l'article L. 732-62, qui sont financées par le produit des seules cotisations visées à l'alinéa précédent.

Les ressources du régime couvrent les charges de celui-ci telles qu'énumérées ci-après :

- les prestations prévues à l'article L. 732-60 ;

- les frais de gestion.

Le taux de la cotisation et la valeur de service du point de retraite, fixés par les décrets cités aux articles L. 732-59 et L. 732-60, sont déterminés dans le respect de l'équilibre entre les ressources et les charges du régime.

   
 

Article 4

 
 

Avant le dernier alinéa de l’article L. 732-59 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

 

Art. L. 732-59. – Les cotisations visées à l’article L. 732-58 sont calculées sur la totalité des revenus professionnels ou de l’assiette forfaitaire obligatoire des chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, tels que pris en compte aux articles L. 731-14 à L. 731-21, sans que l’assiette puisse être inférieure à un minimum fixé par décret.

Pour les personnes visées aux deuxième à sixième alinéas du I de l’article L. 732-56, l’assiette des cotisations est égale au minimum précité.

Les cotisations sont dues par les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole visés au I de l’article L. 732-56 à compter du 1er janvier 2003.

Les frais de gestion visés à l’article L. 732-58 sont couverts par un prélèvement sur le montant des cotisations, dans une limite fixée par décret.

   
 

« Pour les aides familiaux, la cotisation visée à l’article L. 732-58 est calculée forfaitairement sur la base du montant liquidé du salaire différé défini à l’article L. 321-13. »

 

Un décret fixe le taux de la cotisation.

   
 

Article 5

 
 

Après le deuxième alinéa de l’article L. 732-60 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

 

Art. L. 732-60. – Les personnes affiliées au présent régime bénéficient, à compter de la date d'effet de leur retraite mentionnée à l'article L. 732-24 et au plus tôt au 1er avril 2003, d'une retraite exprimée en points de retraite complémentaire. Les pensions dues au titre de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire par répartition sont payées mensuellement.

Le nombre annuel de points est déterminé selon des modalités fixées par décret, en fonction de l'assiette retenue pour le calcul des cotisations prévue à l'article L. 732-59. Le même décret détermine le nombre annuel de points portés à la date du 1er janvier 2003 au compte des personnes visées au II de l'article L. 732-56, à la date d'effet de la retraite au compte des personnes visées au III de l'article L. 732-56, ainsi que le nombre maximum d'années susceptibles de donner lieu à attribution de points pour les personnes mentionnées aux II et III de l'article L. 732-56.

   
 

« Pour les personnes visées au IV de l’article L. 732-56, le décret mentionné au précédent alinéa détermine le nombre annuel de points portés à la date du 1er janvier 2008 ainsi que le nombre maximum d’années susceptibles de donner lieu à attribution de points. »

 

Le montant annuel de la prestation du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire alloué au bénéficiaire est obtenu par le produit du nombre total de points de retraite porté au compte de l'intéressé par la valeur de service du point de retraite.

Un décret fixe annuellement la valeur de service du point de retraite.

   
 

Article 6

 

Art. L. 732-61. – Les cotisations visées à l'article L. 732-59 sont recouvrées et contrôlées par les caisses de mutualité sociale agricole, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues au titre des régimes de sécurité sociale des personnes non salariées des professions agricoles.

   

Les dispositions de l'article L. 725-10 sont applicables aux personnes mentionnées au I de l'article L. 732-56.

Dans le second alinéa de l’article L. 732-61 du code rural, après les mots : « mentionnées au I », sont insérés les mots : « et au IV ».

 
 

Article 7

 

Art. L. 762-35. – Les dispositions de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre II du titre III du présent livre relatives à l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées, à l'exclusion des modalités de l'assiette définies à l'article L. 732-59 et de celles de l'article L. 732-61, sont applicables aux chefs d'exploitation agricole des départements d'outre-mer dans les conditions et sous les réserves précisées à la présente section.

I. – Dans le premier alinéa de l’article L. 762-35 du code rural, les mots : « chefs d’exploitations agricole » sont remplacés par les mots : « chefs d’exploitation ou d’entreprise agricoles, ainsi qu’aux conjoints et aides familiaux définis à l’article L. 722-10, ».

 
     

Les prestations sont dues à compter du 1er avril 2003.

II. – Le deuxième alinéa du même article est complété par les mots : « pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, et à compter du 1er janvier 2009 pour les conjoints et aides familiaux définis à l’article L. 722-10. »

 
     

Art. L. 762-36. – Les cotisations dues au titre de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire par les chefs d'exploitation agricole visés à l'article L. 762-7 sont assises sur une assiette forfaitaire fixée par décret. Un décret fixe le taux des cotisations.

III. – Dans l’article L. 762-36, après les mots : « à l’article L. 762-7 », sont insérés les mots : « ainsi que celles dues par les chefs d’entreprise agricole et les aides familiaux définis à l’article L. 722-10 ».

 
     

Art. L. 762-37. – Les modalités de gestion du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des chefs d'exploitation agricole dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion sont fixées par décret.

IV. – Dans l’article L. 762-37, les mots : « des chefs d’exploitation agricole » sont remplacés par les mots : « des personnes visées à l’article L. 762-35 ».

 
 

Article 8

 
 

La charge supplémentaire qui pourrait résulter pour les régimes sociaux de l’application de la présente est compensée, à due concurrence, par le relèvement des droits sur les alcools prévus par les articles 402 bis et 403 du code général des impôts.

 

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par M.  Germinal Peiro, rapporteur

Article 1er

À l’alinéa 2, substituer à la date : « 1er janvier 2008 », la date : « 1er juillet 2010 ».

Amendement n° AS 2 présenté par M.  Germinal Peiro, rapporteur

Article 1er

I. – À l’alinéa 2, supprimer les mots : « mentionnés aux I et II ».

II. – En conséquence, après la référence : « de l’article L. 722-10 », insérer les mots : « , en activité ou dont la retraite a pris effet avant le 1er juillet 2010 ».

Amendement n° AS 3 présenté par M.  Germinal Peiro, rapporteur

Article 2

Rédiger ainsi cet article :

« L’article L. 732-56 du code rural est complété par un V ainsi rédigé :

« V. – les conjoints et aides familiaux dont la retraite prend effet postérieurement au 30 juin 2010 et qui, d’une part, justifient dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d’une durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes au moins égale à celle requise pour ouvrir droit à une pension à taux plein du régime de base d’assurance vieillesse des professions non salariées agricoles, et, d’autre part, de périodes minimum d’assurance effectuées en qualité de conjoint ou aide familial à titre exclusif ou principal, bénéficient du présent régime pour leurs périodes accomplies comme conjoint ou aide familial avant le 1er juillet 2010 ».

Amendement n° AS 4 présenté par M.  Germinal Peiro, rapporteur

Article 5

À l’alinéa 2, substituer à la date : « 1er janvier 2008 », les mots : « 1er juillet 2010 ou à la date d’effet de la retraite ».

Amendement n° AS 5 présenté par M.  Germinal Peiro, rapporteur

Article 7

À l’alinéa 2, substituer à la date : « 1er janvier 2009 », la date : « 1er juillet 2010 ».

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

Ø Mutualité sociale agricole (MSA) – M. Gérard Pelhate, président, M. Denis Nunez, directeur de la protection sociale, et M. Christophe Simon, chargé des relations avec le Parlement

© Assemblée nationale

1 () Herveline Gilbert, Le travail en agriculture, thèse droit, Nantes, dactyl., 2003, p. 173.

2 () 18 ans avant le 1er janvier 2004

3 () RP : Les revenus professionnels ou, le cas échéant, l’assiette forfaitaire

4 () La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a procédé à la suppression du FFIPSA.

5 () Égale à trois fois le SMIC annuel en vigueur le jour du décès et ce, dans la limite de 25 % de l’actif successoral.