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N
° 2581

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 juin 2010

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de l’agriculture et de la pêche (n° 2559),

PAR M. Christian PATRIA,

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat (1ère lecture) : 200, 436, 437 et T.A. 112 (2009-2010)

Assemblée nationale : 2559.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I.— LA NÉCESSAIRE PRÉSERVATION DES TERRES ARABLES 7

A.— UNE SITUATION ÉDIFIANTE 7

B.— LE DISPOSITIF À TROIS ÉTAGES PRÉVU PAR LA LOI 8

C.— UNE NOUVELLE TAXE AUX FONDEMENTS PEU CONVAINCANTS 10

II.— LA FORÊT FRANÇAISE, UNE RICHESSE INEXPLOITÉE 13

A.— UN SOMMEIL EXPLIQUÉ PAR LE MORCELLEMENT 13

B.— ACCÉLÉRER LES REMEMBREMENTS FORESTIERS 14

C.— PRÉVENIR DES SINISTRES TOUJOURS PLUS FRÉQUENTS 15

TRAVAUX DE LA COMMISSION 17

I.— AUDITION DE M. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE 17

II.— DISCUSSION GÉNÉRALE 59

III.— EXAMEN DES ARTICLES 63

TITRE III : INSCRIRE L’AGRICULTURE ET LA FORÊT DANS UN DÉVELOPPEMENT DURABLE DES TERRITOIRES 63

Article 13 (article 1605 nonies du code général des impôts) : Taxation des plus-values de cession de terrain agricole à fin d’un usage non agricole 63

Article 12 (articles L. 111-2-1 [nouveau], L. 112-1, L. 112-1-14 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, articles L. 111-1-2, L. 123-9, L. 124-2 et L. 123-1 du code de l’urbanisme) : Après l’article 12 82

Article 12 bis (article L. 311-3 du code rural et de la pêche maritime) : Insertion du nom de l’exploitation dans le fonds agricole 85

Article 13 bis (article L. 411-3 du code rural et de la pêche maritime) : Application du statut de fermage à de petites parcelles 85

Article 13 ter (article 793 du code général des impôts) : Exonération des droits de mutation à titre gratuit pour les parts de groupements fonciers agricoles qui ont été détenues par une société civile de placement immobilier 85

Article 13 quater : Rapport sur l’état des biens de section 86

Article additionnel après l’article 13 quater (article 6 du code des marchés publics) : Possibilité de demander une provenance ou une origine spécifique dans les marchés de restauration collective 86

Après l’article 13 quater 87

Article 14 : Intégration du développement durable et de la biodiversité dans les missions de plusieurs organismes agricoles, extension à la méthanisation de la qualification d’activité agricole, extension du bail environnemental et intégration d’objectifs environnementaux au sein des filières sous signe de qualité 87

Article additionnel après l’article 14 88

Article 14 bis (article L. 411-11 du code rural) : Mode de calcul de l’indice des fermages 89

Article 15 (articles L. 6, L. 2, L. 4-1 [nouveau], L. 12, L. 221-9, L. 224-6 et L. 124-4-1 [nouveau] du code forestier) : Plan pluriannuel régional de développement forestier 89

Après l’article 15 91

Article additionnel après l’article 15 : Communication des documents de gestion des forêts 92

Article 15 bis A 92

Article 15 bis (articles L. 221-9, L. 222-1, L. 222-6 et L. 223-2 du code forestier) : Ratification de l’ordonnance relative au regroupement du Centre national professionnel de la propriété forestière et des centres régionaux 93

Article 16 (article 199 decies H du code général des impôts) : Réduction d’impôt pour le recours à des gestionnaires forestiers professionnels 93

Article 16 bis (articles L. 261-1 à L. 261-7 [nouveaux] du code forestier, articles 125 A, 157, 199 decies H et 1649-0 A du code général des impôts, article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et L. 221-34 du code monétaire et financier) : Création d’un compte épargne d’assurance pour la forêt 94

Article 17 : Habilitation à prendre par voie d’ordonnance diverses dispositions 94

Article 17 bis (article L. 510-1 du code rural et de la pêche maritime) : Possibilité de créer par fusion des chambres d’agriculture interdépartementales et interrégionales 95

Article 17 ter (article L. 511-13 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Application du régime juridique des chambres d’agriculture départementales aux chambres interdépartementales 95

Article 17 quater (articles L. 512-3 et L. 512-4 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) : Application du régime juridique des chambres d’agriculture régionales aux chambres interrégionales et définition des chambres d’agriculture de région 95

Article 17 quinquies (article L. 513-3 du code rural et de la pêche maritime) : Composition de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture 96

Article 17 sexies (article L. 514-2 du code rural et de la pêche maritime) : Capacité des chambres d’agriculture de créer des services communs 96

Article 17 septies (article L. 514-2 du code rural et de la pêche maritime) : Transfert du personnel des chambres d’agriculture en cas de fusion ou de transfert d’activités 96

Article 17 octies (articles L. 666-2 et L. 666-3 du code rural et de la pêche maritime) : Simplification de la procédure de FranceAgriMer pour avaliser les négociants en grains 96

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 99

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 113

MESDAMES, MESSIEURS,

L’agriculture française traverse une crise d’une rare intensité. La baisse des cours mondiaux de produits agricoles frappe durement les comptes d’exploitation, ne permettant plus une rémunération correcte des agriculteurs. Si les chiffres moyens dissimulent une grande disparité entre les différents types de culture et des structures d’exploitation disparates, ils laissent une impression saisissante des difficultés que traverse la profession.

Ainsi, après une première chute de leur revenu net de 23 % en 2008, les chefs d'exploitation agricole ont à nouveau perdu le tiers de leur pouvoir d’achat en 2009, toutes productions confondues.

Cette situation appelle une réponse rapide et déterminée des pouvoirs publics, sans quoi le siècle sera celui de l’extinction de la tradition agricole française. Dans un contexte européen, il reviendra aux autorités de Bruxelles de définir un canevas juste et réaliste pour l’avenir de la politique agricole commune à compter de 2013. Les représentants français devront alors faire preuve d’une détermination sans faille pour convaincre nos partenaires de maintenir leur soutien à la profession agricole, qui représente aujourd’hui un enjeu majeur pour l’Union européenne en termes de développement durable comme dans une perspective économique.

Le cadre communautaire laisse une marge de manœuvre restreinte aux initiatives purement nationales. Le Gouvernement a déposé ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche sur le bureau de la haute assemblée le 13 janvier 2010. Les sénateurs se sont prononcés en première lecture le 29 mai dernier. L’Assemblée nationale dispose par conséquent d’un délai limité pour examiner le texte, qui s’est enrichi de nombreux ajouts par rapport au projet initial.

La commission du développement durable a fait le choix de se saisir du titre III du projet de loi, voué à inscrire l’agriculture et la forêt dans un développement durable des territoires. En effet, alors que les dispositions relatives à la contractualisation des relations commerciales et à la surveillance de la formation des marges intéressent au premier chef la commission des affaires économiques saisie au fond, les préoccupations de long terme liées à l’avenir des activités agricoles et sylvicoles ne sauraient être détachées d’une approche environnementale globale. Le dépassement de la crise économique suppose de bonnes conditions d’exploitation futures, qui devront être préservées pour l’agriculture et développées pour la sylviculture.

Les auditions préparatoires ont montré que la plupart des dispositions contenues dans le titre III recueillent un consensus des professionnels du secteur, qu’il s’agisse par exemple de la création d’un indice national de fermage en lieu et place des actuels indices départementaux, ou encore de la réforme de l’organisation territoriale des chambres d’agriculture.

Votre rapporteur pour avis a concentré ses travaux sur deux points qui lui sont apparus fondamentaux. Il s’agit d’une part de la limitation de la consommation des terres agricoles au bénéfice de l’urbanisation, et d’autre part de la lutte contre un morcellement forestier excessif et préjudiciable à la mise en valeur de la ressource nationale.

Des amendements seront présentés devant la commission du développement durable pour remédier aux quelques imperfections du projet de loi et pour faciliter l’émergence d’une filière du bois puissante, importante pour la bonne santé de l’économie nationale et nécessaire pour la concrétisation des objectifs ambitieux fixés par le Grenelle de l’environnement en termes de développement des énergies propres et des puits de carbone.

Au-delà de ces propositions, votre rapporteur pour avis apparaît pleinement convaincu de la justesse des mesures contenues dans le titre III de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Il invite par conséquent la commission du développement durable à émettre un avis favorable à son adoption.

I.— LA NÉCESSAIRE PRÉSERVATION DES TERRES ARABLES

Le projet de loi déposé par le Gouvernement et modifié par le Sénat s’attache à contenir dans le champ de la raison la consommation des espaces agricoles français, dont le rythme récent apparaît largement insoutenable à long terme ou, du moins, incompatible avec la persistance d’une agriculture nationale (A). Il recourt pour cela à un dispositif normatif triple, fondé sur un observatoire de surveillance, des commissions départementales de contrôle et un instrument fiscal de dissuasion (B). Ce dernier point suscite des interrogations de la part de votre rapporteur pour avis, qui considère que les prélèvements obligatoires ne constituent pas la réponse idéale à la problématique abordée (C).

A.— UNE SITUATION ÉDIFIANTE

L’agriculture française est encore la première d’Europe, mais son influence sur l’économie nationale ne cesse de décroître. Elle compte aujourd’hui pour moins de 2% du produit intérieur brut pour moins d’un million de personnes employées. Ces deux chiffres ont été divisés par deux depuis trente ans. La modernisation, la mécanisation, les avancées de la technique ont généré des gains de productivité qui ont empêché une contraction dans des proportions similaires du volume de production et des surfaces mises en culture.

Ce dernier élément apparaît désormais comme le plus préoccupant pour le développement durable des activités agricoles dans notre pays, voire pour leur persistance à long terme. En effet, le changement des modes de vie, la tertiarisation de l’économie et le mitage urbain du territoire provoquent une disparition des terres vouées à l’agriculture à un rythme particulièrement inquiétant.

La superficie des terres agricoles françaises est passée de 31,7 millions d'hectares à 29,3 millions durant les trente dernières années, devant une urbanisation grandissante et la nécessité d’édifier des équipements collectifs en conséquence. La part des terres agricoles non cultivées a même légèrement diminué, passant de 2,76 à 2,55 millions d'hectares.

Tous les dix ans, une surface équivalente à un département français passe du statut de terre agricole à celui de terrain urbanisé. Ce sont 75 000 hectares qui sont chaque année perdus pour l’agriculture alors que, dans les années 50, la conversion annuelle des terres agricoles s'élevait seulement à quelque 35 000 hectares.

Le dernier demi-siècle a ainsi détruit autant de terres arables que les trois cents années antérieures. Les pouvoirs publics sont tenus d’adopter des mesures vigoureuses car l’inaction signifierait l’extinction progressive de l’agriculture dans des départements entiers, les zones fortement urbanisées s’avérant de toute évidence les plus menacées. Cette tendance handicape à double titre les agriculteurs. En premier lieu, elle les prive de surfaces qui sont parfois parmi les plus fertiles et les mieux disposées à l’accueil d’une exploitation. En second lieu, elle participe indirectement à l’élévation du coût du foncier, qui amoindrit la compétitivité et empêche trop fréquemment l’installation de jeunes exploitants.

Une politique publique de préservation des terres agricoles, si elle suscite un enthousiasme immédiat et général, n’est pourtant pas des plus simples à mettre en œuvre. En effet, au-delà du principe généralement admis, des intérêts particuliers et tout à fait légitimes affleurent qui font, finalement, que tous sont tentés de laisser s’amenuiser la surface cultivable.

Si un simple champ vient à intéresser un promoteur immobilier ou un aménageur, sa valeur de marché est immédiatement multipliée. Son prix est même décuplé dans la plupart des cas. Alors que l’agriculture traverse une crise majeure et que le travail de l’agriculteur peine à nourrir sa famille, la tentation est grande d’aliéner une partie du terrain cultivé contre une somme d’argent qui garantira l’avenir. Quant à la collectivité territoriale sur le territoire de laquelle se trouve le terrain, des travaux de construction dans une zone foncière auparavant non bâtie portent la promesse de recettes fiscales supplémentaires, d’un surcroît d’activité et peut-être de créations d’emplois. Les parties directement concernées sont donc gagnantes ; il n’y a que la collectivité nationale qui se trouve pénalisée par une transaction qui provoque l’affaiblissement de son secteur agricole.

Il revient donc à la loi d’agir avec intelligence. Une interdiction pure et simple de conversion d’une terre agricole en zone constructible n’aurait aucun sens. La France reste un Etat de droit qui s’attache à respecter les libertés de tous : liberté pour le propriétaire rural de disposer de son bien et de s’en séparer le cas échéant comme il l’entend ; liberté aussi pour une équipe municipale régulièrement élue de présider aux destinées d’une commune en décidant en conscience des aménagements fonciers dans l’intérêt de sa population.

Il ne s’agit alors ni de prescrire ni de proscrire. Le projet de loi procède par une voie incitative que soutient pleinement votre rapporteur pour avis.

B.— LE DISPOSITIF À TROIS ÉTAGES PRÉVU PAR LA LOI

Les zones agricoles protégées instituées par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, établies par le préfet et contrôlées par la chambre d'agriculture et la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA), sont en trop faible nombre sur le territoire national pour constituer un frein efficace à la consommation des terres – il en existe tout juste une quinzaine d’après l’étude d’impact annexée au projet de loi.

Quant aux périmètres d'intervention visant la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains (PAEN) créés par la loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005, ils n’instaurent jamais qu’un droit de préemption au bénéfice des départements ; la situation financière actuelle des conseils généraux rend l’exercice pratique de cette prérogative tout à fait improbable.

La politique de zonage accuse ses imperfections. Il importe par conséquent de définir de nouveaux moyens d’action. Le Gouvernement a opté pour un dispositif couvrant l’intégralité du territoire et générateur d’incitation plutôt que de règlementation. Le Sénat a approuvé ce choix. Votre rapporteur pour avis le soutient également.

Les articles 12 et 13 du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche posent les bases d’un mécanisme en trois temps permettant d’encourager le maintien des terres arables à la disposition de l’activité agricole. Il se donne pour objectifs de connaître, contrôler et désinciter.

L'article 12 prévoit la création d'un observatoire de la consommation des espaces agricoles, chargé de mesurer le rythme des changements de destination des espaces agricoles. Cette nouvelle structure aurait pour mission d’élaborer des instruments de mesure et de présenter une vue d’ensemble du phénomène d’artificialisation des terres. Votre rapporteur pour avis salue l’initiative du Gouvernement, tant il est vrai qu’une action politique cohérente nécessite au premier chef de connaître toutes les données du problème rencontré. En revanche, votre rapporteur pour avis s’oppose à la suggestion de doter l’observatoire de prérogatives normatives qui nuiraient forcément à la neutralité de ses investigations et à l’autorité de ses résultats.

L’article 12 institue également une commission départementale de la consommation des espaces agricoles. Cette commission se voit nantie d’une fonction consultative. Elle émet un avis sur toute question relative à la régression des espaces agricoles et sur les moyens de contribuer à la limitation du rythme de leur conversion. Elle est notamment consultée, en opportunité, dans le processus de décision d'urbanisme. Les diverses dispositions dans leur rédaction issue du Sénat exigent ainsi qu’elle se prononce dans les communes dépourvues de plan local d'urbanisme (PLU) ou de carte communale opposable aux tiers, dans les communes dotées d'un PLU mais non comprises dans le périmètre d'un schéma de cohérence territoriale (SCOT), et dans les communes dotées d'une carte communale. Suivant les hypothèses, la commission départementale serait consultée sur le projet de construction lui-même ou sur le document d’urbanisme fournissant le cadre d’intervention.

Votre rapporteur pour avis apporte son soutien à ce nouveau mécanisme, bien qu’il estime difficilement justifiable que les communes dotées d’un PLU et incluses dans un SCOT échappent finalement à sa compétence. La bonne compréhension du dispositif se trouvera renforcée s’il vient à s’appliquer à l’ensemble du territoire national, sans exception. Des amendements seront proposés en ce sens, de même que pour aménager la composition de l’instance telle qu’elle résulte de la rédaction sénatoriale.

Ces deux premiers aspects ne produisent aucun effet normatif ou financier. L’observatoire est voué à observer, la commission départementale rend un avis obligatoire mais seulement consultatif. Il est bon, du reste, qu’on n’ait pas succombé à la tentation de lui confier un avis conforme qui, s’il aurait plus efficacement contribué à la préservation des espaces agricoles, aurait surtout attenté de façon insupportable à la libre administration des collectivités territoriales.

Par ailleurs, le projet de loi s’attache aussi à répondre à l’inquiétude ressentie dans le monde agricole devant la multiplication des projets de parcs solaires au sol, qui évincent durablement de terres souvent fertiles les activités de culture. Ainsi, dans les communes qui ne sont pas dotées d'un document d'urbanisme opposable aux tiers, les équipements collectifs – dont les centrales photovoltaïques – ne seront pas autorisés hors des parties urbanisées de la commune si elles sont incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole (modification de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme). Quant aux zones naturelles, agricoles et forestières des communes dotées d'un PLU et aux zones non constructibles des communes dotées d'une carte communale, les parcs solaires seront pareillement écartés s’ils sont incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière ou s’ils portent atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages.

Ce n’est là, toutefois, qu’un cas particulier. Pour donner sa pleine force au dispositif de préservation des espaces agricoles, le projet de loi institue une nouvelle taxe sur les transactions foncières. Ce dernier point laisse votre rapporteur pour avis circonspect.

C.— UNE NOUVELLE TAXE AUX FONDEMENTS PEU CONVAINCANTS

L’article 13 porte création d’une imposition sur la cession à titre onéreux des terrains nus ou des droits relatifs à des terrains nus rendus constructibles par un document d'urbanisme ou sur une commune non couverte par un document d'urbanisme.

Cette taxe d’un taux de 5% ne se déclenche que lorsque le rapport entre le prix de cession et la valeur d'acquisition du terrain est supérieur à dix. Elle atteint un taux de 10% dès lors que ledit rapport excède trente. En outre, elle cesse de s’appliquer lorsque le terrain a été classé en zone constructible plus de 18 années avant la vente, moyennant une dégressivité à compter de la huitième année. Ces spécificités ont permis au ministre d’affirmer lors de son audition par la commission du développement durable qu’il s’agissait d’un instrument destiné à la lutte contre la spéculation foncière uniquement, car limité dans son application aux plus-values très élevées. En outre, les sénateurs ont exigé que le produit levé, initialement versé au budget de l’Etat, soit attribué à l’Agence de services et de paiement pour des mesures en faveur des agriculteurs.

Quoiqu’il soutienne sans réserve les objectifs poursuivis, votre rapporteur pour avis n’est pas convaincu de la pertinence de cette mesure ni de son opportunité en l’état.

Il existe en effet déjà deux mécanismes fiscaux destinés à décourager la spéculation foncière et l’artificialisation des terres :

– en premier lieu, l'impôt sur les plus-values immobilières, mentionné aux articles 150 U et suivants du code général des impôts, vise les cessions d'immeubles à titre onéreux. L'assiette de l'impôt est la plus-value brute, mesurée par la différence entre le prix de vente effectif et le prix d'achat, diminuée d'un abattement de 10 % par année de détention au-delà de la cinquième. Le taux de 16 % se double de prélèvements sociaux de 12,1 % ;

– en second lieu, les communes ont la possibilité d’instituer sur leur territoire une taxe forfaitaire sur la cession de terrains nus rendus constructibles, prévue à l’article 1529 du code général des impôts. Elle s’applique aux terrains rendus constructibles dans les dix-huit années qui suivent le classement. Elle est égale à 10 % d'un montant égal aux deux tiers du prix de cession du terrain, à condition toutefois d’atteindre un seuil de déclenchement fixé à un rapport triple entre prix d’achat et prix de vente.

Votre rapporteur pour avis considère que ces dispositifs existants sont tout à fait adaptés à la lutte contre la consommation excessive de terres agricoles. Dans les communes qui ont choisi d’instaurer la taxe facultative, la taxation de la plus-value atteint ainsi 38 %. Porter ce taux à 43 % génèrera-t-il un quelconque effet dissuasif sur un vendeur qui décuple sa mise de départ ? L’amener à 48 % sera-t-il un obstacle dès lors que le bénéfice réalisé est trente fois supérieur à la somme engagée, et que donc plus de quinze fois même après impôt ? Le doute est permis. Quand les revenus agricoles chutent et que l’urbanisation avance, l’expropriation peut devenir la culture la plus rentable.

Or il est fondamental de ne pas accroître la pression fiscale qui pèse sur les citoyens, alors même que la crise économique affaiblit le pouvoir d’achat et que le relèvement des prélèvements obligatoires mettrait en péril les perspectives de reprise. Le Président de la République s’est à plusieurs reprises engagé en ce sens, à éviter que ne soient atteints des seuils confiscatoires. Il revient à sa majorité d’honorer ces engagements.

Néanmoins, si cette taxe devait être instituée malgré ses objections, votre rapporteur pour avis estime qu’elle remplirait plus clairement son office de préservation des terres agricoles si son produit était affecté au financement de mesures spécifiques et déterminées d’accompagnement à l’installation des jeunes agriculteurs. Un versement à l’Agence de services et de paiement, tel qu’il est prévu dans la rédaction actuelle, pourrait servir de prétexte pour diminuer d’autant les dotations dont bénéficie le ministère de l’Agriculture. Ce qui est levé par l’impôt à l’intention des agriculteurs ne devrait pas pouvoir leur être retiré en loi de finances sur une ligne de crédit globale.

A cette condition seulement, votre rapporteur pour avis considèrera que la taxe instituée à l’article 13 concourt réellement à limiter l’artificialisation des terres agricoles.

II.— LA FORÊT FRANÇAISE, UNE RICHESSE INEXPLOITÉE

Les débats qui ont accompagné le Grenelle de l’environnement ont fortement sensibilisé la commission du développement durable aux objectifs assignés en termes de substitution des énergies de source renouvelable aux traditionnels hydrocarbures et fossiles. Le bois jouera un rôle fondamental dans la mobilisation nationale à cette fin. Mais pour que la France dispose d’une biomasse végétale suffisante, elle doit parvenir à mieux mettre en valeur sa richesse forestière.

Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche prévoit une série de mesures en ce sens, permettant un meilleur suivi des massifs et une meilleure intégration de la forêt française à l’industrie nationale, pour l’heure contrainte d’importer à l’étranger les matériaux qu’elle ne peut obtenir sur le territoire. Les plans pluriannuels régionaux de développement forestier et les stratégies locales de développement forestier vont dans ce sens. Elles suscitent le consensus, il n’y a donc pas lieu de s’appesantir sur leur fonctionnement.

A la suite de ses investigations, votre rapporteur pour avis souhaite souligner que la faible mise en valeur de la forêt française s’explique en grande partie par son morcellement excessif (A). Il s’est donc attaché à imaginer un dispositif pouvant favoriser les remembrements forestiers (B). Enfin, le Sénat a enrichi le titre III d’un dispositif d’assurance spécialement destiné à l’activité sylvicole et à la prévention des catastrophes naturelles : initiative positive, mais qui ne doit pas aboutir à un désengagement de l’Etat (C).

A.— UN SOMMEIL EXPLIQUÉ PAR LE MORCELLEMENT

Le Président de la République a qualifié la forêt française de « gigantesque source de croissance durable » pour signifier son potentiel et l’intérêt de sa mise en valeur pour la collectivité. Mais cette source demeure à l’état de simple potentiel non réalisé, tant l’exploitation globale des massifs se heurte à une fragmentation de la propriété, qui a conduit le rapporteur du projet de loi au Sénat à parler de « belle endormie ».

La forêt en France métropolitaine couvre 155 000 km² du territoire, soit un taux de boisement de 28,2 %, sans compter le massif amazonien de Guyane. Conséquence de la contraction des terres agricoles précédemment évoquée, ces chiffres marquent une progression au cours des dernières décennies – 11 millions d’hectares seulement en 1950.

Les trois quarts de la forêt française relèvent de la propriété privée. Un dixième constitue la forêt domaniale, propriété de l'État. Le reste est la propriété des collectivités locales. La propriété forestière publique est exercée par l’Office national des forêts, responsable de l’entretien et de la mise en valeur de la ressource.

La forêt privée couvre ainsi un peu plus de 10 millions d’hectares, soit les trois quarts de la surface forestière et les deux tiers du volume sur pied. Mais elle est très fractionnée : 3,5 millions de propriétaires possèdent en moyenne 2,6 hectares. Pis : parmi eux, 2,6 millions de personnes possèdent moins d’un hectare.

Ce morcellement tire son origine de la pratique successorale. Alors que détenir quelques arpents de forêt garantissait autrefois le chauffage pour l’hiver, l’urbanisation et les nouvelles sources d’énergie ont rendu inutile cette propriété. Les héritages successifs ont divisé les parcelles quand elles n’ont pas provoqué des indivisions, faisant chuter la valeur des terrains détenus. De la sorte, le produit d’une vente ne couvrirait peut-être même pas les frais de transaction exigés par l’officier public, sans parler d’acquitter les sommes que demande un géomètre pour borner la propriété. Enfin, la valeur foncière s’établissant à un niveau particulièrement faible, l’administration fiscale renonce à recouvrer les montants qui lui sont dus. Il en résulte une détention qui se résume à un titre de propriété mais qui n’en exerce aucun des attributs traditionnels d’usage, de fructification et d’aliénation. Le plus souvent, le propriétaire ignore où se trouve exactement son bien, quand il se souvient encore de son existence.

Ce morcellement de la forêt française empêche sa mise en valeur adéquate par des propriétaires soucieux de l’exploitation économique de leur bien. Votre rapporteur pour avis est pourtant convaincu de l’enjeu forestier dans une politique de développement durable, et par conséquent de l’importance de remembrements d’envergure pour réduire le nombre de propriétaires forestiers. Cette ambition est néanmoins apparue complexe. De nombreux instruments juridiques en ce sens existent déjà au sein du code forestier, mais aucun n’est à même de susciter la volonté de se défaire d’un bien qui, s’il ne rapporte aucun bénéfice, ne suscite non plus aucun désagrément. Un levier fiscal ne peut être envisagé : si incitatif, il grèverait les finances publiques dans un contexte de crise économique qui appelle chacun à l’économie ; si punitif, il frapperait le pouvoir d’achat des citoyens alors que le pouvoir d’achat préoccupe toutes les familles.

Il a donc fallu explorer d’autres options.

B.— ACCÉLÉRER LES REMEMBREMENTS FORESTIERS

Le Sénat a introduit dans le texte en discussion un article 15 bis A instaurant une obligation d’information au bénéfice des propriétaires des parcelles voisines. Lorsque la vente d’un petit espace est envisagée, le vendeur est tenu d’alerter les détenteurs des terrains riverains pour leur permettre d’enchérir et, éventuellement, de réunir la parcelle vendue à la leur.

Votre rapporteur pour avis estime que l’initiative sénatoriale est un bon début, mais qu’il est nécessaire d’aller plus loin. En effet, l’information des voisins ne préjuge nullement qu’ils pourront se porter acquéreur et que le cédant leur octroiera une quelconque priorité.

Il est plus pertinent d’imaginer un droit de préférence au bénéfice des mêmes voisins, de sorte qu’ils jouissent de la possibilité d’acheter la parcelle vendue au prix convenu – donc sans aucune perte pour le vendeur – avant qu’un autre acheteur intéressé ne puisse valablement se porter acquéreur. On pourrait ainsi lutter contre l’émiettement en favorisant l’émergence de propriétés de taille critique, assujetties à des obligations de gestion durable et de mise en valeur, propres à soutenir la filière industrielle du bois.

Ce droit devra être encadré et ne pas pouvoir faire obstacle aux mécanismes classiques de préemption et d’expropriation. En outre, s’il grève les droits du propriétaire en lui imposant de choisir un acheteur voisin plutôt qu’un quidam, il est exclu qu’il mette en péril la plénitude d’une succession. La famille du vendeur jouit d’une priorité absolue, supérieure à celle du simple riverain. Votre rapporteur pour avis ne créera pas cette nouvelle procédure sans l’encadrer pour éviter tout effet non désiré. Pour cette raison, il serait souhaitable que le droit de préférence expire à l’issue d’une période raisonnable, afin de laisser le vendeur libre de ses mouvements.

Enfin, attaché à cet objectif de remembrement, et alors que le projet de loi est l’occasion pour le Gouvernement de solliciter du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnance pour procéder à la refonte du code forestier, votre rapporteur pour avis suggèrera que soient prises dans le nouveau code toute mesure de nature à diminuer la fragmentation de la propriété forestière.

Le désintérêt des propriétaires de toutes petites parcelles pénalise en effet non seule l’économie nationale, mais aussi la sécurité des citoyens. Des épisodes climatiques récents – et de plus en plus fréquents – ont montré la vulnérabilité de la forêt française et les coûts engendrés par sa remise en état.

C.— PRÉVENIR DES SINISTRES TOUJOURS PLUS FRÉQUENTS

Le Sénat a résolu d’agir sur le point de l’assurance forestière en créant un produit d’épargne spécifique destiné aux particuliers pour répondre aux sinistres frappant la forêt. En effet, alors que trois tempêtes majeures ont frappé les massifs au cours des dix dernières années, 5 % seulement de la forêt privée française est couverte par une assurance contre l'incendie et la tempête.

Les communes forestières bénéficient d'un dispositif spécial, le compte d'épargne forestière imaginé par la loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001, qui permet aux collectivités territoriales de placer des ressources issues de la forêt, notamment le produit des ventes de bois. Après une phase d'épargne de six ans, le capital constitué et les intérêts capitalisés peuvent être utilisés pour financer un investissement forestier. Il est également possible de retirer des sommes pendant la phase d'épargne pour faire face à un sinistre. Enfin, la collectivité peut contracter un emprunt dans des conditions privilégiées. Les communes bénéficiaires n’ont cependant pas jugé le dispositif attractif, et peu ont souhaité y recourir.

Sur ce modèle, la commission de l’Economie du Sénat a introduit dans le projet de loi le principe du compte épargne d'assurance pour la forêt. Accueillant un versement égal à 2 000 € par hectare de forêt, dans la limite d’un plafond global de 50 000 €, et ouvert au jour de la souscription d’une assurance couvrant notamment le risque tempête, ce nouvel instrument bénéficiant d’une fiscalité avantageuse devrait faciliter la constitution d’une épargne de précaution et conduire les propriétaires à souscrire des assurances déchargeant l’Etat d’une partie de sa mission de remise en état en cas de catastrophe naturelle.

Votre rapporteur pour avis approuve l’initiative sénatoriale. Il s’interroge toutefois sur le sens à donner aux dispositions prévoyant que l’Etat conduira la remise en état suivant un sinistre avec une intensité moindre sur les parcelles non assurées, voire qu’il n’interviendra en 2017 que sur les terrains assurés au détriment des autres. La volonté d’inciter les propriétaires à souscrire une assurance privée est naturellement louable. Cependant, elle ne peut s’exercer au détriment des parcelles non assurées par des détenteurs indélicats, impécunieux ou absents, au risque de laisser se développer des risques majeurs pour le reste du massif, pour la faune, pour les promeneurs, pour la sécurité publique. L’Etat possède une mission au regard de la forêt dont il ne peut s’exonérer ainsi. D’autres mécanismes de sanction peuvent être envisagés. Votre rapporteur pour avis déposera des amendements en ce sens.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— AUDITION DE M. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE

La commission a entendu M. Bruno Le Maire, ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, sur le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de l’agriculture et de la pêche (n° 2559) (M. Christian Patria, rapporteur pour avis) au cours de sa réunion, commune avec la commission des affaires économiques, du 2 juin 2010.

M. le président Patrick Ollier. Nous sommes heureux d’accueillir M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, pour cette audition, commune avec la Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche adopté par le Sénat.

Monsieur le ministre, nous vous entendrons sur les principaux éléments de ce projet de loi, ainsi que sur les avancées réalisées au Sénat, afin que nous puissions faire le point sur ce qu’il nous reste à faire pour améliorer le texte.

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est saisie pour avis sur le titre III, et M. Christian Patria en est le rapporteur. Au sein de la Commission des affaires économiques, saisie au fond, M. Michel Raison est rapporteur pour l’agriculture et M. Louis Guédon pour la pêche.

Monsieur le ministre, garantir la compétitivité de nos exploitations agricoles et la pérennité de notre modèle agricole – objectif que nous poursuivons tous – et œuvrer à l’adaptation de l’agriculture, tant dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) que face aux problèmes mondiaux, sont autant de défis que vous avez décidé de relever. De son côté, notre Assemblée a bien travaillé, notamment sur le commerce lié à l’agriculture.

M. le président Christian Jacob. Monsieur le ministre, je suis également très heureux de vous accueillir.

La Commission du développement durable a souhaité se saisir pour avis du titre III du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche – et, plus précisément, des articles 12 à 17, traitant des questions foncières, des forêts et, plus généralement, des aspects liés à l’aménagement du territoire.

Les rapporteurs des deux Commissions ont déjà travaillé ensemble et rapproché leurs positions sur de nombreux points. Comme vient de le rappeler le président Ollier, nous sommes confrontés à des défis majeurs à l’échelle internationale, avec les fluctuations des marchés et la nécessité de préparer dans les meilleures conditions la réforme de la PAC. Pour affronter tous ces défis, notre pays devra posséder une vision claire des problèmes et une agriculture en ordre de marche. Tel est précisément l’objet du projet de loi que vous nous proposez. Nous allons nous efforcer de l’enrichir en poursuivant avec vous cet excellent travail.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Je suis heureux de présenter ce soir le projet de loi portant modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui a été adopté par le Sénat samedi soir et est désormais entre vos mains pour être amélioré dans le sens que les débats voudront bien indiquer.

Je formulerai tout d’abord quelques remarques préalables afin d’expliquer le sens et les objectifs de ce texte.

Nous devons tous être conscients que le monde agricole connaît un changement qui est, pour nombre d’agriculteurs dans le monde, une véritable révolution. L’un des objectifs du projet de loi est justement de permettre aux agriculteurs de répondre à ce changement et de disposer à cet effet des outils nécessaires afin que l’agriculture française reste la première en Europe et l’une des premières dans le monde.

Le changement de monde agricole se traduit d’abord par de nouvelles pratiques agricoles, absolument indispensables. L’agriculture durable est un objectif que nul ne peut contester, ne serait-ce que pour des raisons économiques : les agriculteurs doivent pouvoir être moins dépendants des intrants et des énergies fossiles afin que les coûts de revient soient acceptables – sans parler de l’acceptabilité de l’agriculture par les citoyens d’Europe.

Il se traduit aussi par l’apparition de nouveaux acteurs, qui sont offensifs et compétitifs et nous prennent, mois après mois, des parts de marché de plus en plus importantes. Voilà encore quelques années, l’agriculture dans le monde se résumait à un face-à-face entre les États-Unis et l’Union européenne. Aujourd’hui apparaissent dans ce paysage le Brésil, la Chine, l’Inde et la Russie qui, dans toutes les filières où nous sommes présents, deviennent plus compétitifs et plus innovants que nous. Le Brésil a entamé un partenariat avec 46 pays africains pour fournir à ceux-ci tracteurs, motorisation et OGM. La Russie est capable, avec les autres pays de la mer Noire, d’être présente sur des marchés où nous étions monopolistiques voilà encore quelques années, en particulier dans les pays d'Afrique du Nord. Le Brésil, la Chine et l'Inde ont conclu des ententes sur la gestion de leurs stocks afin de mieux maîtriser les prix. Face à cette situation, l'Union européenne n'est pas suffisamment organisée et les agricultures européennes ne sont pas assez en ordre de marche.

Ces nouveaux acteurs sont aussi, au sein de l'Union européenne, des États qui, jusqu'alors peu présent dans le domaine agricole, nous prennent désormais des parts de marché. Ainsi, l'Allemagne produit aujourd’hui 2,5 fois plus de fraises que la France, alors qu'elle en produisait très peu voilà seulement quelques années, et nos importations de lait frais en provenance de ce pays ont augmenté de 70 % depuis le mois de janvier 2010.

La réalité agricole est que nous sommes confrontés à des compétiteurs qui ont parfaitement compris que l'agriculture ne relevait pas du folklore, mais qu'elle était un enjeu économique et stratégique majeur. Je ne suis malheureusement pas certain que tous nos partenaires européens l’aient compris.

Une troisième caractéristique du changement du monde agricole tient à la volatilité des prix. Voilà dix ans, les prix variaient de 5 % à 10 % voire 15 % d'une année sur l'autre. Aujourd'hui, cette variation peut-être de 30 % à 50 %, de telle sorte que les producteurs de lait, par exemple, qui avaient l'habitude de négocier les prix de gré à gré et au mois le mois, se trouvent dans des situations intenables lorsque le prix de la tonne de lait passe d'un mois sur l'autre de 400 euros à 230 ou 220 euros.

Par ailleurs, les risques sanitaires et environnementaux ont quintuplé en quinze ans. Les crises sanitaires, alors rarissimes, sont aujourd'hui omniprésentes, à raison d’une par an. Il faut donc permettre à nos agriculteurs d'y faire face dans les meilleures conditions. Les choix sont clairs : il faut s'adapter ou mourir. Soit nous sommes capables de donner à notre agriculture les moyens d'affronter cette nouvelle donne agricole, soit nous la laisserons dépérir, lentement mais sûrement, en la réduisant à un aspect sympathique, mais résiduel, de l'activité économique française. Ce choix n'est évidemment pas le nôtre.

Le Gouvernement entend défendre la place stratégique majeure de l'agriculture dans l'économie française : elle représente des centaines de milliers d'emplois, participe à l'activité sur tout le territoire, permet d'aménager nos paysages, constitue une partie essentielle de notre identité. Il n'y a, sur la place qu’elle doit occuper, aucune négociation possible.

L'objectif du Gouvernement est également de défendre un modèle agricole français très particulier – et, il faut l'avouer, très isolé en Europe, ce qui complique nos débats –, fondé sur la diversité des produits, sur leur valorisation et sur la présence d'une activité agricole sur tout le territoire. Cet objectif aussi est indispensable.

Enfin, la loi n'est pas l'alpha et l'oméga de nos efforts en faveur de l'agriculture. Elle ne suffira pas, à elle seule, à résoudre tous les problèmes de celle-ci, et ce n'est d'ailleurs pas sa fonction. Elle doit donner aux agriculteurs et aux pêcheurs de notre pays les instruments économiques qui leur permettent de se battre à armes égales avec des pays européens qui ont déjà fait les adaptations et pris les mesures nécessaires. Elle devra s'articuler autour de deux autres mesures indispensables : les plans de développement des filières, qui nous permettront de prendre, filière par filière, les mesures nécessaires pour améliorer la compétitivité de chacune de productions agricoles, et une réforme ambitieuse de la politique agricole commune, qui laisse toute sa place à l'agriculture française.

J'en viens maintenant au texte même qui vous est soumis.

Le titre Ier fait de l'alimentation le premier objectif politique de l'agriculture. C'est là un vrai changement, que nous assumons pleinement : si nous voulons que l'agriculture garde toute sa légitimité en France, il nous semble indispensable de la relier à une politique publique de l'alimentation et de faire en sorte que cette politique soit fondée sur des règles nutritionnelles plus efficaces et mieux contrôlées et s'accompagne du développement de circuits courts qui correspondent à une attente sociale forte et nous paraissent plus raisonnables en matière de développement économique. Cette politique devra également reposer sur un étiquetage beaucoup plus précis, afin de mieux renseigner le consommateur et de mieux valoriser nos produits régionaux.

En deuxième lieu, le texte fait de la contractualisation le point de départ de relations commerciales rénovées entre le producteur et les industriels. J'ai bien entendu toutes les remarques et toutes les critiques formulées à propos des contrats. Il me semble que, sur la base des observations exprimées par les parlementaires, par les organisations syndicales représentatives et par les professionnels, nous avons considérablement amélioré le texte du projet de loi. Le contrat me paraît être un instrument indispensable pour permettre aux agriculteurs de faire face à la volatilité des prix. Il serait certes plus facile pour moi de prétendre que celle-ci va disparaître, mais je n'y crois pas un instant. Il me paraît bien plus raisonnable de dire que le contrat donnera aux agriculteurs une visibilité de plusieurs années quant à leur niveau de revenu.

À elle seule, la contractualisation ne suffira pas. Elle doit donc s'accompagner d'un pouvoir de négociation renforcé des producteurs. En matière de production laitière, par exemple, les règles de la concurrence européenne interdisent, pour négocier avec un industriel, une alliance de plus de 400 producteurs, ce qui est fort peu. Nous souhaitons porter ce chiffre à plus de 4 000 en modifiant le droit de la concurrence européen, afin de permettre aux producteurs de négocier d'égal à égal avec les industriels.

Faire évoluer les règles de concurrence est un combat que nous allons poursuivre d’autant que nous aurons gain de cause sur le renforcement des organisations de producteurs – Dacian Cioloş, le commissaire européen à l’agriculture, me l’a promis hier lors d’une réunion formelle des ministres de l’agriculture en Espagne.

La France sera la première en Europe à mettre en œuvre de tels contrats, qui prochainement – au plus tard en 2013 – seront à leur tour proposés par la Commission européenne comme nouveau mode de relation entre les producteurs et les industriels.

S’agissant des règles et de la forme des contrats, nous avons voulu tenir compte de la réalité du terrain et éviter que l'État ne les impose. Le texte propose donc que leur mise en place relève des interprofessions, à charge pour l'État de prendre le relais si ces dernières n'y parviennent pas. Les filières prioritaires sont le lait et les fruits et légumes. Si les contrats types ne sont pas proposés par les interprofessions d'ici à la fin de l'année 2010, nous les imposerons par décret.

Par ailleurs, ces contrats sont très protecteurs, car ils prévoient à la fois une durée – d’un à cinq ans –, un volume et un prix. Il est indispensable que les interprofessions aient la faculté de définir des indicateurs de tendance de marché susceptibles de servir de référence pour définir le prix fixé par contrat entre le producteur et l'industriel.

J'entends bien les critiques qui peuvent être formulées à ce propos. Au fil des consultations menées depuis un an sur ce texte, qui représentent des centaines d'auditions et d'entretiens, aucun instrument susceptible d’être une alternative au contrat n’a été proposé. Si nous en restons à la pratique existante – le gré à gré, qui laisse le producteur seul face à un industriel qui fait tel prix pour un mois et ne s'engage à rien pour le mois suivant –, les producteurs disparaîtront par centaines. Si, au contraire, nous nous dotons d’instruments modernes tels que les contrats, avec toutes les garanties dont nous les avons entourés, nous pouvons garantir un revenu stable à nos producteurs.

En troisième lieu, le projet de loi tend à permettre des relations commerciales plus équilibrées. Il faut rétablir un partage de valeur plus favorable au sein de la filière alimentaire, notamment dans le secteur des fruits et légumes, en rééquilibrant le rapport de force au profit des producteurs, qui ont été trop longtemps la variable d'ajustement de la filière alimentaire. Nous proposons de supprimer totalement la pratique des remises, rabais et ristournes, qui n'a pas produit d'effets positifs. Il en va de même du prix après-vente, qui tend à se développer de manière outrancière. Ainsi, dans le secteur des fruits et légumes, les producteurs ne savent pas combien ils seront payés au moment où ils livrent leurs produits et le négociant fixe arbitrairement les prix, a posteriori, en fonction de celui auquel il les aura lui-même vendus. C'est là pour le producteur une situation d’infériorité. Enfin, la grande distribution a accepté d'appliquer une baisse automatique de ses marges en période de crise. Si cet accord n'est pas respecté, le projet de loi propose d'appliquer aux distributeurs une taxe sur les surfaces commerciales.

Plus globalement, le pouvoir de négociation des producteurs doit être renforcé, notamment en faisant évoluer, là encore, le droit à la concurrence et en renforçant le rôle des interprofessions.

Pour revenir sur une question que m’a posée aujourd'hui M. Rochebloine lors de la séance des questions au Gouvernement, je précise que j'assume parfaitement le respect des règles européennes – ce qui n'est pas été le cas de tous les ministres de l'agriculture. Il me semble en effet préférable d'aller le plus loin possible dans le cadre des règles existantes, puis de les faire évoluer, notamment en matière de droit de la concurrence, plutôt que d'inscrire dans la loi française des dispositions qui seraient certes populaires, mais en contradiction avec le droit européen, ce qui rendrait plus difficile la négociation de la PAC.

En quatrième lieu, le texte prévoit le renforcement des pouvoirs d'enquête de l'Observatoire des prix et des marges, obligation étant faite aux industriels ou aux distributeurs de transmettre à l'INSEE les données relatives aux prix et aux marges des produits agricoles et alimentaires, avec pour sanction la publication de la liste des établissements refusant de s’y soumettre.

Pour la première fois, l'Observatoire, qui se résume aujourd’hui à la transmission de données par Internet, aura une forme physique. Il sera doté d'un président capable de servir d'interprète aux orientations fixées. De la même façon, il étudiera tous les produits agricoles, et non pas seulement cinq comme aujourd'hui. Il rendra un rapport au Parlement et son président sera chargé de présenter l'analyse de ces données. Enfin, il s'intéressera aussi aux coûts de production des producteurs, afin de comparer les marges.

En cinquième lieu, le projet de loi tend – aspect essentiel à mes yeux – au renforcement de la couverture contre les aléas. Compte tenu du fait, en effet, que les aléas sanitaires, environnementaux et économiques iront croissants dans les prochaines années, il faut doter les producteurs de nouveaux instruments leur permettant d'y faire face, en complément de ceux que l'État met déjà à leur disposition.

Pour les aléas sanitaires et environnementaux, la loi crée le Fonds national de gestion des risques en agriculture. Des fonds de mutualisation professionnelle seront également créés, soutenus par le Fonds national à hauteur de 65 % des dépenses engagées. Le développement des assurances et des fonds de mutualisation n'expriment pas un désengagement de l'État, car celui-ci reste présent pour cofinancer ou subventionner ces différents mécanismes.

Pour les aléas climatiques, le Fonds de garantie des calamités agricoles est maintenu pour les secteurs qui ne sont pas couverts ou qui le sont insuffisamment. Surtout, l'assurance récolte contre les aléas climatiques est encouragée et développée. Le soutien public à cet effet passera de 32 millions d'euros à 133 millions d'euros par an et la subvention sera portée à 65 % de la prime d'assurance, ce qui sera une incitation forte à développer l'assurance dans ces secteurs.

Enfin, pour la première fois de l'histoire agricole, une réassurance publique sera mise en place qui permettra de développer des produits assurantiels dans des secteurs qui n'en disposent pas. Un exemple caractéristique est celui de l'élevage et des fourrages, pour lesquels il n'existe pas un tel dispositif, car les assureurs privés craignent que celui-ci leur coûte trop cher. Je rappelle à ce propos qu’en Allemagne, l'élevage est assuré à hauteur de 25 %, alors qu'il ne l'est pas du tout en France.

La déduction pour aléas a été élargie aux aléas économiques grâce à votre Assemblée, dans le cadre de la loi de finances. J'ajoute qu'en matière d'assurance, la forêt n'a pas été oubliée : le texte prévoit la création d'un compte d'épargne défiscalisé destiné à développer l'assurance forêt.

Si donc vous adoptez le projet de loi, ce ne seront plus, comme aujourd'hui, 15 % des agriculteurs qui posséderont une assurance, mais nous aurons mis en place un système dans lequel toutes les filières agricoles, y compris la forêt et l'élevage, disposeront de dispositifs assurantiels subventionnés à 65 % par l'État. C'est là un changement majeur dans la vie agricole française.

Un dernier élément que prévoit le texte est la préservation de l'outil de production : le foncier agricole. De fait, la France perd tous les dix ans l'équivalent d'un département en surface agricole utile (SAU), soit 200 hectares par jour. Pour ralentir cette perte, nous proposons un système calqué sur le dispositif adopté voilà plusieurs années par l'Allemagne, où il a permis de réduire considérablement la perte de terres agricoles. Il repose sur un dispositif à trois étages : un Observatoire de la consommation des terres agricoles, une commission départementale de la consommation des espaces agricoles, qui rendra un avis sur les modifications des documents d'urbanisme, et une taxe sur la mutation – qui ne portera que sur la spéculation, car elle ne s'appliquera que lorsque le prix de la terre sera multiplié par 10. À l'initiative des sénateurs, il a été proposé d'affecter cette taxe à l'installation des jeunes agriculteurs, ce qui permettra de compléter les dispositifs existants et est particulièrement bien perçu par les intéressés.

Pour conclure, je rappelle que le projet de loi est une partie de l'ensemble que représente une politique agricole plus globale, dans laquelle la politique agricole commune a une place essentielle. Par ailleurs, nous n'avons que trop tardé à mettre en place ces changements et ces outils économiques pour permettre à notre agriculture d'être aussi compétitive que celles de nos grands voisins et partenaires européens et mondiaux.

M. le président Patrick Ollier. Merci, monsieur le ministre, pour cette présentation très claire. Nous sommes très sensibles aux évolutions que le Sénat a imprimées à ce projet de loi et nous nous efforcerons de continuer à l’améliorer. Il ne nous a pas échappé, cependant, que le texte est passé de 24 à 65 articles.

M. Michel Raison, rapporteur de la Commission des affaires économiques, pour les titres Ier, II, III et V. Monsieur le ministre, vous nous avez démontré dans votre introduction que le projet de loi de modernisation agricole était un levier français parmi l'ensemble de ceux dont on dispose au niveau tant de l'OMC que de la PAC et à l’égard des agriculteurs eux-mêmes. Nous avons la chance que vous soyez un brillant défenseur de la France au niveau de l'Union européenne comme au niveau international. Sans cette volonté du Gouvernement français, la loi de modernisation agricole elle-même ne servirait à rien.

L'examen de ce projet de loi au Sénat, vous l'avez dit, a permis d'enrichir le texte sur de nombreux points et d'apporter plusieurs précisions auxquelles nous ne pouvons que souscrire – je pense en particulier à la primauté des accords interprofessionnels pour la fixation des contrats types, à l'obligation pour le Gouvernement de présenter les modalités d'une réassurance publique tant attendue en réponse aux événements exceptionnels susceptibles de frapper l'agriculture, ou encore à l'affectation de la taxe sur la SAU sortant du domaine agricole, d’abord supprimée en commission par le Sénat, puis réintroduite et affectée à l’installation des jeunes agriculteurs.

Pour ce qui est de la politique publique de l'alimentation, qui constitue l’orientation essentielle pour l'agriculture, le Sénat a également très bien travaillé sur le texte. J'estime néanmoins que le lien entre le programme national de l'alimentation (PNA) et le programme national nutrition-santé (PNNS) devrait être mieux explicité dans le texte : nous pouvons donc encore l'améliorer sur ce point, ainsi que, plus généralement, sur la possibilité de développer des partenariats pour la mise en œuvre du PNA.

D’autres dossiers, comme celui de la formation obligatoire, pourraient encore être abordés, sans pour autant alourdir le système français, qui a coutume de fixer un peu plus de règles que la moyenne européenne. Nous avons pris note de votre intention de respecter la règle européenne et nous vous surprendrons peut-être avec des propositions permettant, certes, de la respecter, mais sans plus.

Vous avez été très clair quant aux modalités de la contractualisation et aux objectifs que vous poursuivez au moyen de cet instrument. Les auditions que nous avons menées à son sujet nous ont permis d’observer des réactions très contrastées des interprofessions et des différentes filières, et il faudra vraisemblablement en faire la promotion. Par ailleurs, la totalité des acteurs souligne la nécessité d'inscrire les contrats dans une démarche plus globale de régulation et de gestion des marchés au niveau communautaire. Le texte précise d'ailleurs dans son introduction que la loi ne peut fonctionner que si le gouvernement et la Présidence de la République font leur travail dans le cadre des « bras de fer » qu'ils ont à livrer au niveau international. Des négociations sont en cours et le  groupe d'experts à haut niveau de l'Union européenne sur le lait doit rendre ses conclusions au mois de juin. Pouvez-vous déjà nous dire s'il sera concrètement possible d'avancer sur ce sujet au niveau communautaire ?

Je souhaiterais également que vous nous fournissiez des explications sur la suppression que vous annoncez du prix après vente, laquelle ne me semble pas ressortir clairement du texte adopté par le Sénat.

L'Observatoire des prix et des marges est un instrument très demandé, au niveau des producteurs comme à celui des consommateurs, et même à celui des distributeurs, mais il faut le mettre en œuvre avec prudence. Pour être véritablement au service de la transparence, il doit être un outil reconnu, et donc irréprochable. Se posera donc inévitablement la question des moyens qui lui seront consacrés et il conviendra d'être vigilant en loi de finances sur les dotations allouées à l’établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) et aux services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, d'ailleurs très sollicités, d'une manière générale, dans le cadre de l'application des dispositions de la future loi comme ils le sont pour la loi sur la modernisation de l’économie. Enfin, l'Observatoire doit éviter les amalgames et ne pas sombrer dans des querelles internes. Je suggérerais donc que l'étude de la formation des prix soit bien différenciée de celle des coûts de production. Il conviendrait également de veiller à ce que l’évaluation des marges tienne compte de tous les paramètres en jeu.

Enfin, l'objectif de modernisation poursuivi dans le projet de loi doit donner aux agriculteurs les moyens nécessaires pour être plus compétitifs collectivement et pour mieux faire face aux aléas, notamment économiques, de plus en plus fréquents avec les fluctuations actuelles des cours. À cet égard, l'incitation à la création d'une épargne de précaution doit être un objectif majeur pour notre agriculture. Dans cette perspective, la dotation pour aléas (DPA) a connu récemment plusieurs modifications importantes, dont la dernière, apportée en loi de finances rectificative pour 2009, a permis d'étendre son champ aux aléas économiques. Sans vouloir faire évoluer encore le régime de la DPA, je pense vous proposer certains aménagements fiscaux, visant aussi la déduction pour investissement (DPI), qui encourage l’investissement. Compte tenu de la situation actuelle des exploitations agricoles, il conviendrait aussi d’encourager davantage l’épargne et de disposer de provisions pour d’autres utilisations.

Enfin, des outils et des règles applicables à l'agriculture sont aujourd'hui archaïques et inadaptés au monde dans lequel les agriculteurs évoluent. La simplification, évoquée depuis des décennies, doit donc être considérée comme une priorité. Nous disposons en la matière de marges de manœuvre pour simplifier les mécanismes et appliquer certaines directives d’une manière plus productive. Ce n’est pas ici le lieu de rouvrir le débat sur le contrôle des structures, mais nous disposons aussi de marges de manœuvre pour simplifier la vie des agriculteurs et leur proposer des outils simples et opérationnels pour une meilleure gestion de leurs exploitations. Ainsi, il ne serait pas absurde de permettre la constitution d’un groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) entre mari et femme, ce qui est actuellement impossible – cette impossibilité a donné lieu à des situations aberrantes, certains couples d’agriculteurs ayant séparé leurs exploitations, voire divorcé pour des raisons administratives.

Un dernier mot sur le volet du texte consacré à la forêt : j'approuve pleinement l'initiative du Sénat visant à créer un compte épargne forestière et à inciter au développement de l'assurance forestière. Les tempêtes que nous avons connues ont néanmoins démontré que l'assurance ne peut pas tout et je déplore que le Gouvernement ait souhaité traduire aussi fermement dans le texte sa volonté de désengagement, à l'avenir, des dépenses de nettoyage et de reconstitution. Il me semble qu’il faudra réexaminer très sérieusement ces dispositions.

M. le ministre. Je tiens à préciser, avant que M. le rapporteur pour la pêche n’intervienne à son tour, que l’examen du texte au Sénat a séparé l’agriculture et la pêche. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas évoqué ici le volet consacré à la pêche. Je répondrai néanmoins aux questions de M. Guédon sur ce point.

M. Louis Guédon, rapporteur de la Commission des affaires économiques, pour le titre IV. Merci de cette précision, monsieur le ministre. Mais ceux d’entre nous qui ont une culture maritime savent que les marins se passent de dialectique – entre la mer et l’homme, c’est la mer qui gagne ou c’est l’homme. Ne pas évoquer les problèmes de la pêche dans la crise actuelle – nous avons, depuis trente ans, perdu la moitié de nos bateaux, de nos équipages et du tonnage de nos ports –, ne peut donc que les décevoir. D’autant que l’on ne saurait parler de « loi de modernisation de la pêche », les sept articles la concernant ne procédant, après les espoirs déçus de la loi de 1997, qu’à un replâtrage. Je ne suis donc pas content.

Le littoral français, qui est le plus grand d'Europe avec ses 5 000 kilomètres de côtes et qui représente une puissance économique considérable, doit être mieux traité au sein de l’Assemblée nationale. Le monde de la mer mérite plus de considération que d'être oublié dans les déclarations du ministre.

M. le ministre. Je précise à nouveau que le débat qui s'est tenu au Sénat a séparé l'agriculture et la pêche. Pardonnez-moi d'avoir adopté ici la même démarche.

M. Louis Guédon, rapporteur. La préparation du projet de loi a donné lieu à de nombreuses auditions dans l'ensemble du monde de la pêche, dans tous les bassins – Manche, Atlantique et Méditerranée. Les marins considèrent que le texte est positif car, s'il n'est pas un texte de modernisation, il permet au moins de pallier les principales inquiétudes.

Le comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes et de l’aquaculture dont la création est prévue répond à ma demande, que je formule depuis dix-sept ans, de rapprochement entre scientifiques et marins. Cependant, si les marins possèdent les indispensables expérimentations dont les scientifiques ont besoin, le comité scientifique devra aborder des domaines économiques, environnementaux et sociaux. Il n’est donc pas normal que les élus du littoral, chargés d'équiper les ports et les bassins et de prendre en charge les aspects sociaux, en soient rejetés au profit des seuls mouvements écologiques qui tendent à prendre toute la place de la société civile.

La conférence régionale qui doit être instituée est une bonne chose, mais il est prévu qu'elle ne se réunisse que tous les cinq ans pour faire des bilans, alors que les quotas qui régissent la pêche sont fixés à Bruxelles tous les ans. Les réunions devraient se tenir chaque année pour faire le point sur un secteur en crise.

En matière d’agriculture marine, la France, qui était à la pointe de la recherche mondiale, est désormais distancée par de nombreux pays tels que la Grèce, l’Espagne et la Norvège, et elle doit retrouver sa position.

Pour ce qui est des moyens des organisations de producteurs, le texte prévoit à juste titre la répartition des totaux admissibles de captures (TAC) et des quotas, c’est-à-dire des droits de pêche. Cette excellente disposition est très bien accueillie par le monde de la mer. Les organisations de pêche doivent pouvoir déterminer les droits de pêche et sanctionner ceux qui commettent des erreurs.

En ce qui concerne la réorganisation des comités, le maintien des comités locaux, envisagé au Sénat, n’est pas possible. Ces structures avaient droit de cité lorsque les ports disposaient d’un potentiel financier qui leur permettait d’être autonomes, ce qui n’est plus le cas. La pêche souffre de la guerre fratricide qui fait rage pour la survie. Il est donc indispensable de privilégier la place des comités régionaux dans le texte et de prévoir l’installation dans les ports d’antennes chargées d’accueillir les marins qui ont passé plusieurs semaines en mer et ne peuvent se rendre, par exemple, à Nantes ou à Rennes pour déposer un dossier. Des structures départementales sont possibles dans certains départements, comme le Finistère, qui comptent de nombreux ports, mais elles s’imposent moins dans d’autres. Il importe donc de conserver une structure régionale et des antennes locales, en laissant facultative l’installation d’une structure départementale.

La conchyliculture est un secteur important et en grande souffrance. Avec une mortalité de 50 % des naissains et compte tenu du fait qu’une huître n’est commercialisable qu’au bout de trois ans, on sait déjà que l’ostréiculture sera sinistrée l’an prochain et qu’il n’y aura aucun point de vente.

Quant à la consultation du public sur les aménagements, la société civile ne saurait, je le répète, se limiter aux seuls mouvements environnementaux. Les élus de la République doivent avoir leur place dans toutes les représentations nationales.

Monsieur le ministre, nous vous soutiendrons, mais les marins sont des citoyens au même titre que les agriculteurs et doivent être entendus comme eux.

M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour le titre III. Monsieur le ministre, je vous remercie pour la clarté de votre exposé. Quelques interrogations demeurent cependant.

Comme l’a précisé le président Christian Jacob, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ne s’est saisie que du titre III, consacré au foncier et à la forêt. Ce titre, qui comptait six articles lors du dépôt du projet de loi, en regroupe désormais vingt et un après l'examen du texte par le Sénat.

Les délais d'examen sont courts, car notre Commission se réunira mardi prochain pour formuler son avis sur le texte. Aussi les questions que je vous poserai se concentreront-elles sur les modifications apportées par le Sénat.

Tout d’abord, la taxe sur les changements d'usage du foncier agricole mérite quelques explications. De fait, l’exposé des motifs de votre texte observe qu’il faut limiter le rythme de consommation des terres agricoles. En 1960, 30 000 hectares quittaient l’agriculture pour un changement de destination. Ce chiffre est aujourd’hui de 75 000 et on ne peut laisser cette hémorragie se poursuivre alors que de nombreuses zones sont en friche. La création d’un Observatoire est une excellente chose et une commission départementale de la consommation des espaces agricoles est également nécessaire pour alerter en cas de besoin. Quant à la taxe sur la mutation, que la Commission des affaires économiques du Sénat avait décidé de supprimer, elle a été rétablie par un amendement du Gouvernement et il est désormais proposé de l’affecter à l'installation des jeunes agriculteurs. Quel produit en attend-on ? Est-il positif d'instaurer un nouvel impôt ? Cette taxe sera-t-elle réellement dissuasive ? Je suis quelque peu perplexe à ce sujet.

En deuxième lieu, quel regard jetez-vous sur les articles 17 bis et suivants, qui modifient l'organisation des chambres d'agriculture ?

En troisième lieu, pouvez-vous préciser quel serait le fonctionnement du compte épargne d'assurance pour la forêt (CEAF) ?

Comment, enfin, exploiter au mieux la richesse forestière française ? Permettez-moi de citer un chiffre très parlant : la France compte 3,5 millions de propriétaires de forêt, donc 2,5 millions possèdent moins d’un hectare. Il s’ensuit que la forêt n’est pas très bien exploitée. Comment lutter contre son morcellement ? L'article 15 bis A, qui institue une obligation d'information des propriétaires voisins pour la vente de parcelles de moins de quatre hectares, permettra peut-être de diminuer le nombre de propriétaires. Comment favoriser un remembrement forestier que les acteurs de la filière appellent de leurs vœux ? L'outil fiscal, qui inciterait les petits propriétaires forestiers à se séparer de leurs parcelles en cas de succession, ne serait-il pas alors le mieux adapté ?

Pour finir, je soutiens pleinement, à titre personnel, l’excellente initiative qui permettrait la constitution de GAEC entre époux.

M. Germinal Peiro. Je commencerai par situer le contexte dans lequel se déroule l'examen de ce texte.

Sur le plan international, nous sommes dans la phase de la libéralisation des échanges que défend et organise l’OMC. Nous contestons cette forme de libéralisation et sommes persuadés que, plutôt que de livrer le monde aux marchands, nous devrions tous défendre l'intérêt général, qui est la possibilité pour chacun des peuples d'assurer sa souveraineté alimentaire. Nous prônons, en outre, la relocalisation des productions agricoles dans le monde, car les échanges inutiles de matières premières devraient être dès aujourd'hui limités si nous voulons laisser à ceux qui nous succéderont une planète en meilleur état qu'aujourd'hui.

Sur le plan européen, nous traversons également une phase de libéralisation et assistons, année après année, au démantèlement de tous les outils de régulation que l'Union européenne avait mis en place – je pense notamment aux outils de maîtrise de la production, tels les quotas, le gel des terres ou la législation sur les plantations de vigne, ou encore les stockages publics, peu à peu abandonnés. On assiste aussi, année après année, à l'abandon de la préférence communautaire, qui était l'un des fondements de la politique agricole commune. L'OMC imposant la libéralisation des échanges, il est désormais impossible d'assurer cette préférence communautaire, que promettait Nicolas Sarkozy dans sa campagne électorale.

À la veille de la renégociation de la PAC, on voit bien que celle-ci se prépare sous de mauvais auspices, car ce sont essentiellement les contingences financières qui président à cette renégociation, et l'Union européenne n'a pas la capacité de définir des objectifs clairs pour une politique de l'alimentation et l'agriculture. Là encore, nous prônons l'harmonisation sociale et fiscale en Europe et regrettons que vos amis politiques soient muets depuis des années sur ce sujet. On voit bien cependant que le manque d'harmonisation sociale et fiscale crée des distorsions de concurrence qui se retournent directement contre nos agriculteurs. Nous perdons des parts de marché importantes. La Dordogne, dont je suis élu, comptait 1 250 producteurs de fraises. Il en reste 200 aujourd'hui, à cause notamment des distorsions de concurrence en matière de main-d'œuvre, qui font que la fraise française n'est plus concurrentielle par rapport à la fraise allemande.

Nous devons tous prôner l'harmonisation sociale et fiscale, que les libéraux que vous êtes ne cessent de combattre – nous le regrettons.

Sur le plan national, vous avez déclaré vous-même, monsieur le ministre – il faut vous reconnaître ce courage –, que l'agriculture vivait la crise la plus dure qu'elle ait connue depuis plus de trente années. Ce sont en effet des milliers d'exploitations agricoles qui disparaissent chaque mois. Le journal Les Échos publiait voici quelques semaines une enquête indiquant que 13 % des exploitants agricoles arrêteraient leur activité dans les douze mois à venir – soit, au bas mot, 40 000 à 50 000 exploitations. Deux cent mille à trois cent mille emplois sont en jeu dans les deux ans à venir dans ce secteur de l'économie.

Dans ce contexte très difficile, vous ne soutenez aucune position ou proposition politique susceptible d'inverser cette tendance sur le fond et nous proposez quelques emplâtres dans une loi qui, comme vous le reconnaissez vous-même et comme nous le confirment tous les représentants syndicaux et les professionnels que nous avons auditionnés depuis plusieurs semaines, ne changera malheureusement rien à la catastrophe annoncée.

L'un des piliers du texte est la contractualisation. Celle-ci existe déjà depuis des décennies et ne remplacera pas les outils de régulation. Jusqu'où la contractualisation sera-t-elle eurocompatible ? Nous avons le douloureux souvenir de la décision de la DGCCRF qui a été l'un des facteurs déclenchants de la crise du lait.

Quant à l'assurance récolte, n'êtes-vous pas en train de désengager les pouvoirs publics du soutien aux agriculteurs face aux aléas climatiques, pour les livrer aux assurances privées ?

En termes de démocratie, de nombreux agriculteurs réclament depuis des années la reconnaissance de la pluralité syndicale. Il paraît aujourd'hui inconcevable qu'un seul syndicat reconnu puisse siéger dans les interprofessions. Quelle est votre position ?

Par ailleurs, le texte n'évoque pas l'installation des jeunes. J'ai indiqué ce matin aux jeunes agriculteurs, que nous recevions en commission, que le groupe socialiste soutiendrait un amendement supprimant la surface minimale d'installation, qui nous semble être aujourd'hui un frein à l'installation. Qu'en pensez-vous ?

Enfin, vous avez déclaré voici une dizaine de jours sur la chaîne LCI, qu'au terme de la réforme des retraites, aucun agriculteur ne percevrait une retraite inférieure au minimum vieillesse. Personne n'a compris, dans les milieux concernés et à la Mutualité sociale agricole, à qui vous vous adressiez. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?

Mme Annick Le Loch. Comme M. Guédon, je regrette que M. le ministre n’ait pas évoqué la pêche, car le texte que nous examinons porte sur ces deux activités. Comme l'agriculture et les agriculteurs, la pêche et les pêcheurs sont en difficulté. Le prix du poisson est en baisse, les charges sont élevées, les navires sont anciens et la ressource diminue, de telle sorte que l'avenir n'est pas très serein. En outre, les plans de sortie de flotte ont considérablement affaibli certains territoires littoraux. La visibilité n'est donc pas bonne pour cette activité économique importante et ce ne sont pas les questions qui demeurent sur la future politique commune des pêches qui rassureront les pêcheurs. Bien qu’encore imprécis, les propos de la commissaire européenne sur les droits de pêche transmissibles ou la régionalisation, entendus hier à Bruxelles, où je me trouvais avec quelques élus, n'ont rien non plus pour nous rassurer.

J'ai lu que les pêcheurs se sentaient abandonnés, ce qui est particulièrement désolant au vu de tout ce qui a été réalisé ces derniers mois, comme les Grenelle de l’environnement et de la mer, ou les Assises de la pêche. Comme dans bien des domaines, la confiance a disparu.

Le projet de loi permettra-t-il d'améliorer la situation ? Il comporte certes des points positifs, comme la création du comité de liaison scientifique, qui était très attendue par les différentes parties, les schémas régionaux de développement de l'aquaculture, ou la conférence régionale de l'utilisation de la mer et du littoral. Un point de tension demeure cependant pour ce qui est de la clarification des rôles entre les comités des pêches et les organisations de producteurs. Le texte prévoit en effet la disparition des comités locaux, ce qui suppose sans doute un affaiblissement de la représentation des syndicats et des matelots, d’autant plus inquiétant que le secteur connaît des difficultés économiques et sociales.

Plus globalement, les organisations de producteurs se trouvent renforcées. Maîtrisant les outils de gestion pour les espèces sous quota, notamment la mise en marché, ces organisations ont un réel savoir-faire, sont très dynamiques et bien reconnues par Bruxelles. Qu’en est-il cependant de ceux qui ne sont pas adhérents à une telle organisation – qui représente en Bretagne 30 % des pêcheurs ? Une adhésion obligatoire ne permettrait-elle pas une meilleure gestion de la ressource et, le cas échéant, des sanctions en cas de dépassement des quotas ?

Enfin, la place de la pêche côtière, importante sur notre littoral, est un peu floue dans le texte.

M. Louis Cosyns. Monsieur le ministre, je tiens à saluer votre engagement et votre pugnacité en faveur du monde agricole. La crise de l'agriculture française appelait des solutions rapides et le Gouvernement a fait preuve de réactivité.

Le plan de soutien à l'agriculture annoncée à Poligny le 27 octobre a été rendu possible aussi vite que vous le pouviez. Il prévoit, je le rappelle, un milliard d’euros de prêts bancaires et 650 millions d’euros d’aide budgétaire. Même insuffisants, ces chiffres attestent de votre détermination.

La loi de modernisation de l’agriculture est une boîte à outils. Elle compte un article phare : celui qui instaure la contractualisation. Parmi les organisations agricoles, que nous avons entendues aujourd’hui, certaines se posent des questions, tandis que d’autres sont plus favorables au texte. Pouvez-vous nous éclairer à cet égard ?

Par ailleurs, vous replacez l’alimentation au cœur de la problématique. En effet, comment valoriser le monde agricole sans faire la promotion des productions de qualité ? Comment valoriser l’excellence de nos territoires si nous laissons se développer les modes de consommation qui remette en cause nos traditions alimentaires ? Il semble que, d'un point de vue sanitaire, le projet de loi apporte des éléments importants.

Le texte est certainement perfectible et je fais confiance aux rapporteurs et à mes collègues pour l'enrichir. Je vous poserai quant à moi quelques questions.

Il me semble tout d'abord nécessaire d'éclaircir certains points relatifs aux modalités de la contractualisation. Quelles sont les clauses obligatoires qui devront figurer dans ce contrat écrit – le texte évoque les volumes, les modalités de livraison et la détermination des prix ? Le projet de loi prévoit qu’un décret en Conseil d’État dressera de la liste des produits concernés par l'obligation de contrat, ainsi que celle des clauses obligatoires. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur ce point ?

Par ailleurs, pouvez-vous préciser le mécanisme de la contribution additionnelle aux primes ou cotisations d'assurance ? L'assurance fonctionnera-t-elle à deux niveaux, avec un premier que constituerait la contribution additionnelle et, à un deuxième niveau, une assurance facultative ?

Enfin, le texte du Sénat ne mentionne pas le statut d’agriculteur-entrepreneur. Que comptez-vous faire à ce propos ?

M. Daniel Fasquelle. Député d’une circonscription très concernée par les questions d'agriculture et de pêche, je témoigne de l'engagement du ministre dans ces deux domaines. J’aurai d'ailleurs bientôt le plaisir d'accueillir M. Le Maire à Étaples-sur-Mer et à Boulogne-sur-Mer, où nous pourrons évoquer ces questions sur le terrain.

La pêche est importante pour la France, et tout particulièrement pour le littoral de notre pays. Elle est, comme l'agriculture, un enjeu stratégique. Le monde de la pêche, cela a été dit, est aujourd'hui en crise et souffre. Il a besoin qu'on s'intéresse lui. Face notamment à la politique des quotas, à l'envolée du prix du gazole et à la question du prix et de la valorisation des produits, le projet de loi apporte des réponses concrètes. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP soutiendra le texte – même s'il compte sur Louis Guédon pour le faire évoluer au cours de la discussion – qui permet, en particulier, un constat partagé de l'évolution et de l'état réel des stocks. Depuis trop longtemps, en effet, le divorce est patent entre scientifiques et marins-pêcheurs sur l'estimation de ces stocks. Or, toute la politique commune des pêches repose sur des estimations scientifiques, lesquelles sont contestées. Tant qu'il n'y aura pas de constat partagé, nous ne pourrons pas avancer.

Le projet de loi va encore dans la bonne direction en ce qu’il associe les marins-pêcheurs, notamment les organisations de producteurs, à la gestion de la ressource, en responsabilisant davantage les organisations de producteurs. Cependant, les propos entendus hier à Bruxelles par trois parlementaires français, dont j’étais, nous ont quelque peu inquiétés. En effet, si la réforme de la politique commune des pêches, en cours de préparation, applique les droits individuels transférables de pêche, comme l’envisage la commissaire européenne, le dispositif mis en place par le projet de loi que nous examinons se trouvera en contradiction avec le droit européen que voudrait mettre en place la commissaire européenne. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce point ?

Le texte donne aussi à l’organisation professionnelle des pêches maritimes une plus grande cohérence et une plus grande représentativité, y compris à l’égard de Bruxelles. Les professionnels posent toutefois la question du financement, car le projet de loi propose de mettre fin au paritarisme. Le statut de l’élu professionnel pose lui aussi problème, car les marins-pêcheurs sont très pris par leur activité et un statut est nécessaire pour leur permettre de s’impliquer davantage. Tel est d’ailleurs le sens du projet de loi.

Une dernière question importante est celle de la valorisation des produits, de l’encadrement de la première commercialisation et de l’organisation de la filière. De fait, si le projet de loi fait beaucoup pour l’agriculture, il fait assez peu pour la pêche, qui présente pourtant parfois des problématiques comparables. Pouvez-vous nous indiquer en quoi le texte – ou d’autres mesures en préparation – pourrait permettre une meilleure commercialisation et une meilleure valorisation des produits ?

J’appelle également votre attention sur l'impérieuse nécessité d'encourager aujourd'hui le monde de la pêche à trouver de nouveaux moyens et de nouvelles énergies pour mouvoir les bateaux et les filets, ainsi que de nouvelles techniques de pêche, afin d’économiser le carburant. De fait, il existe aujourd’hui divers projets de moteurs hybrides, dont l’un que nous devons absolument soutenir.

Il faut, enfin, défendre le modèle français de pêche artisanale, qui est original. On peut pêcher la même quantité de poisson avec beaucoup d’hommes et beaucoup de bateaux, ou très peu de bateaux et très peu d’hommes. Je préfère, pour ma part, le modèle de la pêche artisanale, qui a besoin d'être encouragé notamment par le présent projet de loi.

M. André Chassaigne. Vous avez terminé votre intervention, monsieur le ministre, en insistant sur les questions de compétitivité et de performance de l'agriculture dans le contexte international. Cette approche, bien qu’elle ne soit pas exclusive, apportera-t-elle des réponses aux questions les plus importantes que sont celles du revenu des agriculteurs dans un contexte toujours aussi dramatique – je ne reviendrai pas sur les prix, comme celui du lait, qui a baissé de près de 10 % en un an, ou d’autres productions – et de l’équilibre de nos territoires, avec la disparition de nombreuses exploitations agricoles ?

Le texte souffre de l'absence d'orientations agricoles fortes, en particulier en matière de gestion des marchés et pour ce qui concerne les problématiques agricoles planétaires. On pourrait citer à cet égard la réduction de la dépendance aux importations pour l'alimentation animale ou la disparition complète de certaines filières de production comme les légumes, questions très importantes qui ne trouvent pas de réponse dans le projet de loi.

Quant à la contractualisation, qui est sans doute la mesure la plus emblématique du texte, elle ne doit pas être symbolique. Il existe, même dans ce cadre, des risques très importants de dérives majeures. Ainsi, bien que le texte précise que « les produits acceptés par l'acheteur lors de la livraison ne peuvent faire l'objet d'aucun retour au producteur », on sait bien que les affirmations comparables figurant dans la loi de modernisation de l’économie ont été contournées. Il arrive ainsi que le producteur se voie demander de livrer sur une plate-forme logistique et que le produit ne soit pris en compte que lorsqu’il quitte la plate-forme. Quelles seront les mesures contraignantes qui permettront de mettre en œuvre une contractualisation équilibrée et quel sera le pouvoir réel des producteurs dans le cadre de cette contractualisation ?

Le projet n’évoque pas non plus d’orientations pour des filières de qualité – je pense en particulier aux productions de montagne. C’est là pourtant un enjeu très important. Le manque d’objectifs précis en faveur de la consommation de produits sous signe officiel de qualité se justifie d’autant moins que le Grenelle de l’environnement prévoit, quant à lui, des objectifs ambitieux et justes pour le bio.

De même, aucune précision n'est donnée sur le contenu des futurs plans régionaux d'agriculture durable. Bien qu'ils apparaissent en tant que tels dans le Grenelle environnement, il revient au ministre de l'agriculture d'apporter des éléments permettant de les définir.

Enfin, peut-on envisager de fixer, malgré les difficultés que cela supposerait vis-à-vis de l’Europe, des prix incitatifs qui pourraient émaner du champ de l'Observatoire des prix et des marges, afin que celui-ci puisse donner des orientations ? On disposerait ainsi d’une base réelle de négociation qui donnerait aux producteurs un pouvoir réel.

Pour conclure, le risque est réel que le projet qui nous est proposé ne donne lieu qu’à une loi symbolique, superficielle et peut-être pas même palliative.

M. Jean Dionis du Séjour. Merci, monsieur le ministre, pour la clarté et l’expertise de votre exposé. Plus que pour d’autres textes, chacun de nous aborde le projet de loi sur la base de son pays et de son parcours personnel.

Venant de la Haute-Garonne, j’ai surtout en tête la violence de la crise des fruits et légumes. Deux chiffres : à Agen, on paie au producteur 0,20 euro le kilo de pommes « vrac-verger » tandis qu’au supermarché le prix de ces pommes est de 2 euros le kilo pour le consommateur. Le système, je pèse mes mots, est à bout de souffle. Il est même pourri.

Le texte proposé comporte des dispositions que j'approuve : le programme national pour l'alimentation, la promotion de la contractualisation, les incitations en direction des interprofessions, la gestion du risque climatique. Nous sommes cependant déçus par sa modestie. C'est un bateau pour beau temps alors que vous devez affronter dans certaines filières des tempêtes violentes.

La grande distribution s'en sort bien. Pour les fruits et légumes, là où le face-à-face avec le producteur est direct, sa marge nette se situe entre 30 et 40 %. Dans tous les autres rayons, les marges sont au contraire très faibles.

Pour ce qui est des coûts de production, les Allemands ont passé un accord fondé sur des contrats de service avec la Pologne, les Pays-Bas et l'Italie. Ils en sont à 7 euros de l’heure, tandis que chez nous le coût du travail reste à 9,30 euros de l’heure.

Je ne vous cache pas mon scepticisme au sujet des accords de modération des marges signés à l’Élysée. En 2005, avec le président Ollier, nous avons cru au coefficient multiplicateur mis en place dans la filière. On connaît la suite ! Existe-t-il des raisons d'espérer qu'il en soit différemment ?

Le groupe Nouveau Centre souhaite que l’aval, c'est-à-dire la grande distribution, mette la main à la poche pour les grands chantiers agricoles à mener en amont. Au nom de quoi ne participerait-elle pas, par exemple, à l'assurance contre les aléas climatiques ? Pourquoi ne pas la mettre à contribution pour accéder à la revendication d'exonération des cotisations patronales sur le travail permanent ? L'exonération sur le travail saisonnier a été un geste politique que je salue. Pourquoi ne pas aller plus loin alors qu’il existe encore une différence de 2,50 euros avec nos concurrents européens ?

Ne craignez-vous pas que l’assurance climatique reste marginale ? On sait que les régions du nord de la Loire sont moins exposées aux aléas que celles du sud. En outre, si l’on exclut tous les agriculteurs qui sont le dos au mur et qui ne pourront payer les 11 %, qui restera-t-il ?

Alors que vous avez choisi de laisser au Grenelle les dispositions relatives aux produits phytosanitaires, je souhaite attirer votre attention sur la question de l’eau. Le passage d’une gestion en débit à une gestion en volume prélevé, imposé par l’administration du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, provoque la colère des paysans. Est-il possible de revenir sur ce changement ? L’eau est un facteur de productivité majeur chez nous.

M. le ministre. Permettez-moi de vous réitérer mes excuses, monsieur Guédon. Je consacre autant d’attention à la pêche qu’à l’agriculture et je ne voudrais pas que cet oubli soit mal interprété.

Je tiens à ce que la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche soit une loi responsable. Elle établit des dispositifs très nouveaux qui feront prendre à l’agriculture française un tournant important. Comme je l’ai déjà indiqué au Sénat, je ne souhaite pas qu’elle soit assortie de déclarations de principe plus généreuses les unes que les autres mais sans aucun effet sur le terrain. Dans la mesure où elle met en place des instruments économiques indispensables, elle pourra paraître un peu sèche. Mais déclarer, par exemple, que tous les prix doivent couvrir le coût de revient et le coût de production, c'est, d'une certaine manière, tromper les agriculteurs. Sans doute ai-je commis des erreurs depuis un an, mais je ne crois pas avoir trompé une seule fois les agriculteurs ni sur mes intentions ni sur mes actes.

Nous accueillons de façon très ouverte les propositions du rapporteur Michel Raison, pour ce qui est du renforcement des liens entre l'agriculture et le PNNS, par exemple

Pour ce qui est de l'inclusion des contrats dans une régulation plus globale, je répète que la contractualisation va de pair avec une régulation des marchés européens de façon à stabiliser les prix, donc les revenus des agriculteurs. Si nous n’avons pas mis en place ces contrats à la fin de 2010, lorsque la Commission européenne autorisera les producteurs à négocier le prix du lait avec les industriels à 2 000, 3 000 ou 4 000, la possibilité offerte nous échappera alors que nos partenaires européens en bénéficieront. J'insiste sur la nécessité de nous préparer aux évolutions que la Commission proposera en matière de politique agricole commune.

Je souscris à l’idée de mieux distinguer l’étude de la formation des prix et l'étude des coûts de production.

La simplification fait partie des propositions que nous soutiendrons avec l'Allemagne dans le cadre de la réforme de la PAC.

Les propositions du rapporteur concernant les GAEC sont utiles et méritent examen.

En ce qui concerne la forêt, nous créons un fonds d'assurance qui sera le premier dispositif assurantiel dans ce domaine en France. Je trouve plus lisible et plus clair que ce dispositif soit pleinement consacré à l'assurance, et non à l’investissement ou au nettoyage.

Monsieur Guédon, j'attache une grande importance au maintien et au développement de la pêche artisanale. Greenpeace affiche mon visage dans les rues de Paris et dans toute la Haute-Normandie en m'accusant de tuer trop de poissons. Si, maintenant, j’ai le défenseur des pêcheurs contre moi, cela fait beaucoup pour un seul homme !

Je crois que le texte répond aux attentes des comités de pêche et du comité national, qui ont d’ailleurs voté à une large majorité en faveur des mesures proposées.

Pour ce qui est des modalités du rapprochement entre les scientifiques et les marins, les choses sont également ouvertes.

Bien entendu, le développement de l’aquaculture est prioritaire. Nous ne pouvons continuer à importer 80 % de notre consommation de poisson et à laisser entrer sur notre marché sans réagir des produits d’aquaculture asiatique ne répondant à aucune des normes d’hygiène ou sanitaires que nous exigeons en France.

Le débat au Sénat a déjà fait apparaître un affrontement entre ceux qui souhaitent maintenir les comités locaux et ceux qui ne le souhaitent pas. Même si je préfère maintenir au moins des antennes locales, je suis ouvert aux solutions que nous pourrons trouver au cours de la discussion.

Je comprends, monsieur Patria, que la taxe sur le changement d'usage puisse soulever quelques réticences. Mais un tigre qui n'a pas de dents ne fait peur à personne ! Disposer d'un Observatoire, recueillir l'avis d'un comité départemental, tout en ne pouvant dissuader financièrement la spéculation sur les terres agricoles, cela pose un problème. Nos voisins allemands, qui perdaient des terres agricoles à un rythme plus élevé que le nôtre, ont réussi à freiner le mouvement grâce à une taxe dont le montant maximal est de 20 %. Le projet de loi qui vous est soumis reste bien en deçà.

En outre, la mesure ne s'appliquera qu'aux terres dont le prix est multiplié par 10 par rapport à la valeur de référence. Elle concernera donc principalement les terres situées à proximité des grandes agglomérations, ce qui est, je crois, une bonne chose.

Enfin la taxe est progressive. Les jeunes agriculteurs tiennent beaucoup à ce nouveau produit, dont le montant est estimé entre 40 et 50 millions d'euros par an, soit affecté à leur installation.

Les dispositions relatives aux chambres d'agriculture visent à rendre celles-ci plus efficaces au niveau régional, notamment en matière de conseil aux agriculteurs.

S'agissant du compte épargne d'assurance forêt, la défiscalisation n'a été obtenue qu'après une difficile bataille en interministériel. Nous partons du principe que la forêt est de plus en plus exposée aux risques climatiques. Après la « tempête du siècle » de 1999, il a été affirmé qu'un tel phénomène ne pouvait se reproduire avant longtemps et qu'il était inutile de mettre en place une assurance forêt. Or, dix ans plus tard, la tempête Klaus a eu des effets encore plus ravageurs, notamment sur la forêt des Landes. Il est temps de tirer les leçons de l'expérience.

Le Gouvernement souhaite que le dispositif ne concerne que l'assurance : il s'agit, moyennant une facilité fiscale, d'encourager les forestiers à mettre de l'argent de côté, jusqu'à hauteur de 50 000 euros, pour faire face au risque climatique. Le Sénat souhaitait que le compte bénéficiant de cet avantage fiscal puisse également servir à financer des travaux d'investissement. Je sais que les positions sont partagées. Pour ma part, je ne trouve pas cela raisonnable. Je crains que l'on ne crée un effet d'aubaine et que l'on ne détourne le dispositif de son objectif premier.

Monsieur Peiro, j'ai retrouvé dans votre intervention le sens de la mesure dont vous aviez déjà fait preuve lors de ma précédente audition !

Nous contestons comme vous la libéralisation totale des échanges, qui met en concurrence frontale deux modèles agricoles.

Le premier modèle tend à tirer les prix vers le niveau le plus bas possible. Nos adversaires le défendent en faisant valoir un argument dont la pertinence ne saurait être sous-estimée : si les prix agricoles doivent être les plus bas possibles, disent-ils, c'est pour que les gens puissent se nourrir au prix le moins cher possible. Je n'en suis pas moins totalement opposé à ce modèle, qui mettra fin à la diversité des produits agricoles – on n’élèvera plus qu'une seule race de cochon, la plus rentable, une seule race de vache laitière, la Holstein, etc. – et qui se traduira également par une concentration de la production agricole dans certains points du territoire.

Le deuxième modèle, dont j'ai déjà parlé, se fonde sur des normes sociales, sanitaires et environnementales, sur la diversité des produits et sur une présence agricole dans tout le territoire. Pour qu’il l’emporte sur le premier, il faut que nous montrions aussi que nous sommes prêts à l'adapter et à prendre les mesures de modernisation nécessaires.

Vous dénoncez un démantèlement des outils de régulation de l'Union européenne. Or, s'il y a bien un ministre qui a inversé cette tendance, c'est celui que vous avez en face de vous ! Nous nous dirigions en effet vers une dérégulation totale et la suppression de tous les instruments d'intervention. J'aurais pu, pour me faire bien voir de la population agricole, défendre les outils anciens. Il me serait arrivé la même chose qu'à un ministre socialiste de l’agriculture en 1999 : après avoir vaillamment défendu les quotas, il avait été sèchement battu par les autres pays européens. La réalité européenne existe, on ne peut la nier. J'assume le fait de présenter des propositions modernes et nouvelles au lieu de soutenir d'anciennes solutions, de toute façon catégoriquement refusées par nos partenaires.

Ensuite, je confirme que je suis totalement opposé à la libéralisation des droits de plantation, qui aboutirait à la production de champagne dans le sud-ouest de la France !

Je rappelle aussi que, sur proposition de la France, la Commission européenne prévoit le maintien des outils d'intervention, dont le stockage. Vous ne pouvez nous faire le procès de faire disparaître des instruments que nous avons au contraire réussi à rétablir !

Je suis également favorable à la préférence communautaire.

Vous déplorez qu'aucune proposition politique n'inverse les choses. Je tiens à dire que, précisément, le Gouvernement a totalement inversé le cours de la politique européenne en matière agricole. En octobre dernier, la Commission proposait de ramener le budget de la PAC de 55 à 30 milliards d'euros. Un ministre a alors fait le tour des vingt-six autres États européens, a lancé un « appel de Paris », et aujourd'hui plus personne ne parle de la division par deux du budget de la PAC. Votre analyse est fausse, elle ne résiste pas à l'épreuve des faits.

Vous ne pouvez reprocher au texte d'aller trop loin d’un côté et pas assez loin de l'autre. Actuellement, seulement 20 % des agriculteurs français bénéficient de contrats. Le texte permettra d'augmenter cette proportion. De même, certaines filières ne disposent pas d'assurance ; dans d'autres, le taux d'assurance est très faible. Notre dispositif permettra de développer les assurances dans l'agriculture. Le renforcement de l'Observatoire des prix et des marges, le développement des circuits courts, la modification des règles d'appel d'offres, celle des relations commerciales dans les filières : on peut ne pas être d’accord avec ces mesures, mais on ne peut pas dire qu'elles ne changent pas la donne.

Pour ce qui est de l'eurocompatibilité, il n'est jamais trop tard pour faire amende honorable. Je rattrape certaines erreurs de mes prédécesseurs, de gauche comme de droite. En déversant des aides d’État à ne savoir qu'en faire, ceux-ci nous ont attiré des condamnations systématiques de la Commission et m’ont placé dans l'obligation de récupérer des sommes non négligeables auprès des producteurs et des pêcheurs. Bref, s'il est un point sur lequel nous ne sommes pas critiquables, c'est bien le caractère rigoureusement eurocompatible de notre action. Du reste, à la veille de la renégociation de la PAC, il ne serait guère habile d'enfreindre les règles européennes alors que nous demandons le maintien des crédits européens pour les agriculteurs français !

S'agissant des assurances et d'un hypothétique désengagement de l'État, je souligne que, pour la première fois, nous portons le taux de la subvention de l'État à 65 % du montant de la prime. Est-ce un désengagement ? De plus, tous les gouvernements précédents qui ont voulu mettre en place une réassurance publique se sont vus opposer un veto de Bercy. La décision personnelle du Président de la République permettra aux assureurs privés de s'engager en matière d'assurance agricole.

Pour éviter le risque d'effet d'aubaine, que vous relevez à juste titre, nous proposons un dispositif à trois étages. Premièrement l'assurance privée, à laquelle il revient de mettre sur pied les contrats nécessaires, sachant que la subvention de l'État permettra que le coût ne pèse pas trop sur les épaules des agriculteurs. Deuxièmement la réassurance privée, dont nous estimons la capacité à 700 millions d'euros. Troisièmement la réassurance publique, uniquement au cas où le coût d'une catastrophe dépasserait cette capacité – je pense par exemple à la sécheresse de 1976, lorsque les fourrages ont séché sur pied sur l’ensemble du territoire.

J'en viens aux interprofessions. J'ai toujours dit que le temps était venu que les organisations syndicales se montrent plus ouvertes. Cela étant, les interprofessions restent des organismes de droit privé. C'est à elles de décider de leur mode de fonctionnement. Pour ma part, je travaille avec toutes les organisations syndicales représentatives et je considère que le sens de l'histoire veut qu'elles travaillent davantage ensemble. Si elles en décident autrement, cela relève de leur responsabilité.

Enfin, si beaucoup d'agriculteurs ne bénéficient pas du minimum vieillesse – c'est-à-dire un peu plus de 700 euros – et touchent seulement 505 ou 510 euros, c'est par crainte du risque de reprise sur propriété au moment de l'héritage. Avec Éric Woerth, nous espérons trouver une solution.

M. Germinal Peiro. Par le biais de l’aide sociale et non par des droits nouveaux en matière de retraite ?

M. le ministre. Cela reste à discuter.

M. Germinal Peiro. Les agriculteurs hésitent à solliciter le fonds social vieillesse, qui fournit le complément permettant d'atteindre le minimum vieillesse, par peur d'un retour au moment de la succession.

M. le ministre. En effet.

Madame Le Loch, je suis ouvert au débat en ce qui concerne les comités locaux. Le sujet est très sensible : il faut trouver le bon équilibre entre la réorganisation, gage d'efficacité, que souhaitent les professionnels de la pêche, et le respect des attentes de certains petits ports de pêche qui veulent maintenir une présence locale.

L'obligation d'adhésion à une organisation de producteurs n'est pas compatible avec le droit communautaire et elle ne correspond pas à un souhait des producteurs.

Les comités régionaux ont des structures paritaires. Les matelots peuvent donc s'y exprimer.

Le contrat, monsieur Cosyns, précisera la durée, le volume et le prix. Bien entendu, la durée sera variable d'un secteur à l'autre. Dans la filière des fruits et légumes, un contrat d'un an est plus avantageux pour le producteur. Dans la filière du lait, en revanche, la durée de production est plus longue et l'on peut prévoir des contrats de 3, 4 ou 5 ans.

Si le texte renvoie à un décret en Conseil d'État, c'est que, après de nombreux débats, les professionnels ont préféré garder la main en première instance. Les interprofessions veulent négocier les contrats entre elles. Dont acte, sous réserve que le processus aboutisse avant la fin de 2010. Si tel n'est pas le cas, l'État reprendra la main et procédera par décret, tout en restant en liaison avec les interprofessions.

Quant à l'assurance, je vous confirme qu'elle reste facultative et que le dispositif ne comporte qu'un seul socle.

Monsieur Fasquelle, vous m'interrogez sur le lien entre la réforme proposée dans ce texte est la réforme de la politique commune de pêche (PCP). Nous sommes opposés aux quotas individuels transférables obligatoires que proposait initialement la Commission. Après que nous en avons discuté, la commissaire européenne aux affaires maritimes et à la pêche, Mme Damanaki, a annoncé que le choix des quotas individuels transférables serait en définitive facultatif pour les États membres. C'est une décision sage car ces quotas se traduisent systématiquement par une concentration de la pêche dans deux ou trois grands ports.

Je le répète, la philosophie politique qui sous-tend ce texte est le maintien de l'activité agricole et de la pêche sur tout le territoire.

Par ailleurs, il est à mes yeux indispensable de réduire la part du coût de l'énergie dans le prix du poisson. Aujourd’hui, le gazole représente la moitié de ce prix. Je suis favorable à ce qu'une partie du grand emprunt soit affectée à la recherche sur les moteurs électriques et les moteurs hybrides. Mais, de l’avis même des pêcheurs, l'utilisation de tels moteurs sur des chalutiers n'est pas pour demain. En attendant, il faut permettre le financement d'alternateurs permettant de débrayer le moteur lorsque le chalut est à la mer. Le coût de ces dispositifs est de 40 000 à 50 000 euros pour chaque unité de pêche.

J’en viens à la question de la compétitivité, monsieur Chassaigne.

Pendant des années, le discours tenu aux agriculteurs était : produisez, nous vous apportons des subventions, et vous êtes totalement en dehors du marché. Le monde ayant changé, on leur dit maintenant : vous êtes désormais dans le marché et vous devez offrir des produits qui correspondent à la demande. Si je me bats pour la régulation, c'est parce que l'on ne peut pas jeter sans accompagnement les agriculteurs dans le grand bain du marché. Ce serait une folie de laisser la détermination des prix agricoles à la seule loi de l'offre et la demande : il faut réguler, mais en même temps il faut de la compétitivité, sans quoi nous risquons d'être perdants par rapport à nos voisins européens dans le cadre du marché unique.

Pour ce qui est d’une orientation agricole forte, je partage ce que vous avez dit sur la réduction de la dépendance aux importations, sur la préférence communautaire, sur les négociations à l’OMC – j’ai été le premier à lutter contre la reprise des négociations entre l’Union européenne et le MERCOSUR –, mais ce n'est pas l'objet de la loi. Je ne crois pas que ce soit un bon signal à donner aux agriculteurs que de faire croire qu'une loi française va changer la donne des négociations commerciales européennes ou mondiales.

Certains agriculteurs craignent que la contractualisation ne dérive vers une intégration. Je pense que le texte contient tous les garde-fous pour éviter cela. Premièrement, nous avons créé une autorité publique, le médiateur du contrat, conformément à ce que demandaient toutes les organisations professionnelles agricoles. Le Sénat a bien précisé qu'il s'agit d'un représentant des pouvoirs publics. Deuxièmement, c’est l’interprofession qui négocie les contrats à titre premier, avant l'État. Troisièmement, nous avons prévu un renforcement des pouvoirs des producteurs en lien avec la modification du droit européen de la concurrence.

Nous avons donc mis tous les atouts de notre côté pour que les contrats se fassent au bénéfice des producteurs et nous poursuivrons notre action au niveau européen. Par exemple, j'ai bon espoir qu'une des conclusions concrètes du groupe de haut niveau sur le lait soit de permettre aux producteurs de s'organiser différemment. Je l'ai répété au commissaire européen à l'agriculture, Dacian Ciolos, il y a quelques jours, et je l'ai également dit à M. Barroso : ce n'est pas à 400 que les producteurs de lait pourront s'organiser, il faut changer la donne en matière de droits de la concurrence.

Je suis bien entendu favorable aux filières de qualité, dont beaucoup d'aspects, notamment en ce qui concerne le « bio », relèvent du Grenelle.

Pour ce qui est des prix, il y a un grand débat à l'échelle européenne. Je souhaite que les interprofessions puissent fixer des indicateurs de tendance de marché, car c'est la condition pour que le contrat soit équitable. Je ne cache pas que la réponse de la Commission est pour l'instant négative. J'ai néanmoins bon espoir de parvenir à l'infléchir sur ce sujet. Il faut sortir de cette situation où le ministre de l'agriculture réunit chaque trimestre tous les acteurs dans son bureau pour obtenir un accord sur le prix. C'est totalement contraire au droit européen et ce n'est pas raisonnable.

Monsieur Dionis du Séjour, le problème que vous soulevez au sujet des fruits et légumes est un problème de compétitivité. Il faut vivre avec la réalité : il y a un marché unique, vingt-sept pays producteurs de fruits et légumes, un concurrent allemand qui produisait très peu il y a quinze ou vingt ans et qui, aujourd'hui, nous taille des croupières dans toutes les filières.

Nous devons améliorer les choses sur trois points.

Premièrement, les organisations de producteurs. Certains points du territoire sont mieux organisés que d'autres et la production est bénéficiaire, y compris dans le secteur des fruits et légumes. Certaines régions doivent donc faire des efforts pour mieux s'organiser. Lorsque, sur le même territoire, seize organisations de producteurs font la même chose, se marchent sur les pieds et mettent mal en marché leurs produits, il y a forcément des difficultés. En matière de fruits et légumes, les Bretons se sont montrés offensifs et organisés ; ils en tirent aujourd'hui le profit.

Deuxièmement, l'énergie et la cogénération. Des améliorations dans ce domaine peuvent constituer une source de revenus pour les producteurs. Nous y travaillons.

Troisièmement, le coût du travail. Le travail occasionnel représente 40 % de l'ensemble du coût du travail dans la vie agricole française. Je ne crois pas que l'on puisse aller plus loin en la matière : l'exonération de charges patronales sur le travail occasionnel dans l'agriculture représente un coût annuel de 450 millions d'euros. La mesure ramène le coût horaire à un peu plus de 9 euros et nous permet d'être relativement compétitifs par rapport à nos voisins. Pour ce qui est du travail permanent, je ne vois que des avantages à ce que vous fassiez des propositions dans le cadre de ce texte.

Il est cependant un sujet sur lequel je rejoins Germinal Peiro. Les contrats de service que l'Allemagne passe avec la Pologne permettent de s'exonérer de toutes les obligations du droit du travail et de payer les Polonais 6 euros de l’heure. On pourrait imaginer la même chose en France et faire venir de la main-d'œuvre marocaine dans les mêmes conditions. J’y suis totalement opposé : ce serait une erreur politique majeure.

Mettons les choses sur la table. Soit on réalise une harmonisation sociale et fiscale en Europe...

M. Jean Dionis du Séjour. Il ne faut pas rêver !

M. le ministre. Je suis convaincu qu'il faudra un jour réduire les écarts de compétitivité entre les pays européens si nous voulons conserver une Union qui tienne la route. Malheureusement, ce n'est pas pour demain et nous devons trouver des solutions alternatives. Je suis très ouvert aux travaux que vous voudrez bien mener sur ces sujets.

M. le président Patrick Ollier. Merci pour la précision et la pédagogie dont vous avez fait preuve dans ces réponses.

M. Serge Poignant. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous soucier de l'applicabilité de cette loi, qui nous permettra de défendre nos positions et notre vision de l'agriculture au niveau européen.

En matière de coût du travail, nous devons aller plus loin que les seules mesures en faveur du travail saisonnier.

La compétitivité et l'innovation passent par la recherche-développement, via l’INRA, les centres techniques, etc. Comment comptez-vous affirmer votre soutien aux activités de recherche et développement ?

Parallèlement au régime assurantiel, nous ne pourrions-nous soutenir aussi le développement de l'épargne, qui permet en cas de sinistre une intervention rapide, sans qu'il y ait multiplication des expertises ? Le code général des impôts permet déjà à l'exploitant de constituer une dotation pour aléas, mais il serait souhaitable de disposer d’un système complet, proposant l'épargne d'un côté, l'assurance de l'autre.

Mme Catherine Quéré. Les agriculteurs français ne gagnent plus leur vie de façon décente. Leur rémunération moyenne est inférieure de moitié à la rémunération moyenne européenne.

Pensez-vous que les quelques pistes que vous proposez éviteront les difficultés au moment de la suppression des quotas, en 2013, et au moment de la libéralisation des droits de plantation, en 2015 ? Sans doute ne produira-t-on pas de champagne dans le midi de la France, mais les zones délimitées laissent encore de larges marges pour la plantation.

Le commissaire européen à l'agriculture, que nous avons rencontré à Strasbourg avec le président Jacob, a indiqué qu'il se battrait pour que le budget de la PAC ne baisse pas : cela étant, il sera partagé entre un plus grand nombre de pays et cela se traduira forcément par une baisse à l'arrivée.

En matière de contractualisation, la viticulture charentaise a une longue expérience, notamment depuis la crise de 1975. Nous connaissons les avantages des contrats, mais aussi leurs inconvénients : souvent, ils n'engagent les producteurs que sur des volumes, et ils n'engagent jamais les acheteurs sur des prix. L'interprofession du cognac, qui a plusieurs dizaines d'années d'existence, refuse absolument de fixer des prix. Elle ne peut, à la rigueur, que proposer des tendances.

Il est important de savoir qui siège dans les interprofessions et de mettre en place des dispositifs de renouvellement. En 1999, le gouvernement de gauche avait obtenu l'organisation d'élections qui n'avaient pas eu lieu depuis 25 ans. Mais il n'y a pas eu d'autres élections après cette date, si bien que ce sont toujours les mêmes personnes qui siègent et que l'on peut parfois nourrir quelques doutes en ce qui concerne d'éventuelles ententes entre négociants et producteurs. En outre, l'absence de pluralité est très dommageable.

Après la grave tempête qui a touché la Charente-Maritime et la Vendée, vous avez déployé de nombreux efforts pour soutenir les conchyliculteurs mais quid de l'agriculture ? L'État, contrairement aux départements et aux régions, n'a pas versé un euro. Des exploitations vont disparaître. Certains agriculteurs sont désespérés : ils ne peuvent plus cultiver, il n'y a plus de fourrage, les animaux meurent... Ne les oubliez pas.

M. Philippe Armand Martin. La filière viticole est toujours en crise, en raison notamment de la concurrence déloyale des pays tiers et des nouveaux pays exportateurs. L'organisation commune de marché (OCM) s'est révélée une catastrophe. On s'achemine vers la libéralisation totale des droits de plantation. Or, pour les produits de qualité, la régulation est un outil essentiel.

Il convient également d'encadrer l'utilisation des appellations d'origine contrôlée. La pratique consistant à incorporer un ingrédient AOC dans un produit se développe sans aucun contrôle. Alors que la réglementation française ne comporte aucune restriction sur la mention d'un produit AOC dans l'étiquetage – on a vu dernièrement apparaître un shampooing au champagne, un spray au champagne, des bonbons au champagne... –, certains pays comme l'Italie et l'Espagne ont mis en place des dispositifs dont il faut nous inspirer.

Pour être autorisé à inscrire le nom « champagne » sur l'étiquette de la bouteille, le producteur est tenu de respecter un cahier des charges très rigoureux. Le phénomène insidieux de dilution et de banalisation que j'ai évoqué porte atteinte au caractère attractif de l'appellation. Un décret est nécessaire pour mettre fin à ces pratiques, mais je crois qu'il faut aussi lui donner une base législative.

M. Jean Gaubert. Nous constatons les efforts que vous avez déployés, monsieur le ministre. Cela étant, vous ne pouvez pas toujours vous défausser ! Si M. Gaymard pouvait affirmer, lorsqu’il occupait vos fonctions, qu'il n'assumait pas l'héritage du ministre précédent, il est plus difficile pour vous de ne pas assumer l'héritage du gouvernement Fillon I.

On aurait aimé que le projet comporte quelque chose de plus musclé en faveur de la recherche appliquée et de l'innovation qui sont des conditions essentielles au développement de l'agriculture. Il y a là un véritable manque.

Par principe, nous voterons contre l’article 2, qui prévoit d'autoriser le gouvernement à légiférer par ordonnances. Nous souhaitons toutefois, monsieur le ministre, que vous nous disiez – à l’occasion de la discussion générale, par exemple – ce que vous comptez mettre dans ces ordonnances. N'oublions pas que c'est une trop grande simplification et le transfert de certains contrôles au privé qui ont conduit à la crise de la vache folle en Grande-Bretagne. On ne peut demander à certaines personnes d'être juge et partie. Lorsque l'on parle de déléguer des contrôles à des tiers, il convient de savoir qui sont ces tiers et quels sont leurs liens avec la production. Votre intention n'est certainement pas de démanteler les services vétérinaires comme l'ont fait les Britanniques, mais il vaut mieux bien préciser les choses.

M. Francis Saint-Léger. Je salue la clarté de vos propos et la vigueur de votre action pour convaincre les pays européens de la nécessité de la régulation.

Pour faciliter l’installation des jeunes agriculteurs, de nombreuses organisations professionnelles préconisent depuis longtemps la suppression de la demi-part de surface minimale d'installation pour l'association en GAEC, demi-part nécessaire à l’obtention des aides. Cette mesure est-elle à l'ordre du jour ? Se heurte-t-elle vraiment, comme vos prédécesseurs l'ont toujours fait valoir, à une contrainte européenne ?

Les représentants des organisations professionnelles nous ont également fait part de leur inquiétude quant à l’instauration de la taxe sur les mutations foncières. N'est-ce pas un coup pour rien ? Est-il bien nécessaire de créer une nouvelle taxe dont le seul effet de court terme serait de se substituer aux lignes budgétaires actuelles ?

M. Jean-Paul Chanteguet. L'exposé des motifs du projet de loi rappelle qu'il y avait 1,6 million d'exploitations agricoles en 1970 et qu'aujourd'hui il n'y en a plus que 326 000, soit une division par 5 en quarante ans. À ce rythme, il ne restera plus que 60 000 exploitations en 2050, soit, en moyenne, 600 par département. Il s’ensuivra une désertification et un enfrichement, et il ne pourra plus être question d'exploitations à taille humaine et familiale.

De ce point de vue, je regrette que le texte, en dépit de la taxe sur la mutation qui rapportera 40 à 50 millions, ne traite pas le problème de l'installation des jeunes agriculteurs.

Par ailleurs, pourquoi n'avez-vous pas fait mention des plans régionaux d'agriculture durable ?

M. Jacques Le Nay. En dix ans, le recul des surfaces agricoles au profit de l’urbanisme et des infrastructures publiques correspond à la disparition d’un département français. Ce constat conduit à une prise de conscience générale : il faut économiser l'espace agricole.

Cela dit, les plans d'occupation des sols permettaient jusqu'à présent aux jeunes agriculteurs de faire construire à proximité de l'exploitation. Ce principe sera-t-il remis en cause ? La décision dépendra-t-elle des plans régionaux d'agriculture durable ? Si rien n'est inscrit dans la loi, il y a un risque de contentieux.

On sait aussi que la forêt, qui couvre 14 millions d'hectares, grignote l'espace agricole. Est-ce, selon vous, une bonne chose ?

Enfin, ce texte n’offre-t-il pas l'occasion de moderniser l'Office national des forêts, qui gère de façon quelque peu « colbertiste » 4,5 millions d'hectares de forêt ?

Mme Corinne Erhel. Le texte prévoit un accord de modération des marges en cas de crise dans le secteur des fruits et légumes. On peut cependant s'interroger – comme l’ont fait ce matin les organisations syndicales – quant à l'impact réel de cette mesure sur les revenus des producteurs.

Vous avez vanté l'organisation des producteurs légumiers bretons. Êtes-vous favorable, dans le secteur des légumes frais, à une contractualisation gérée à un niveau collectif par une association d'organisations professionnelles ?

M. Alfred Trassy-Paillogues. Monsieur le ministre vous avez la pêche ! Nous sommes heureux que vous vous refusiez à toute phraséologie et à toute pétition de principe et que vous privilégiez l'action et le pragmatisme en matière législative.

En matière foncière, comment appréciez-vous le rôle des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) et des autres commissions et structures évoquées par Michel Raison ?

S’agissant de la réforme de la PAC, considérez-vous que la France forme, avec l'Allemagne, la Pologne et quelques autres pays, un bloc suffisamment solide et homogène pour défendre la régulation ?

Dans les nouvelles commissions départementales de consommation des espaces agricoles siégeront le préfet, les représentants des collectivités territoriales et de l'État, les sempiternelles associations de protection de l'environnement, mais je ne vois nulle part les élus de la République. Ces mêmes élus seront-ils mentionnés par le décret qui fixera la composition de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires ?

M. Christophe Bouillon. Vous donnez souvent l’impression de rester au milieu du gué, monsieur le ministre.

Le développement des circuits courts privilégiant les produits locaux est une exigence du Grenelle 1. Cependant, les collectivités qui souhaitent y recourir pour approvisionner leurs cantines ou leurs maisons de retraite se heurtent au code des marchés publics, qui interdit toute mention de l'origine géographique des produits. Vous auriez pu vous intéresser à cette question dans le projet de loi.

Deuxième exemple, l'Observatoire des prix et des marges, dont la mention revêt un peu un caractère de rattrapage après la loi de modernisation de l'économie. Alors que la LME visait à une relance de la consommation par une baisse généralisée des prix, on n’a constaté aucun effet sur les prix ; en revanche, la grande distribution a pu imposer aux exploitants des prix de moins en moins rémunérateurs. Il faut donc, pour analyser les coûts de production, de transformation et de distribution, un outil performant et efficace, mobilisant des moyens tant humains que financier et dont les recommandations puissent revêtir un caractère contraignant.

Ce texte, dites-vous, est essentiellement économique. Il lui manque en effet un volet social. Dans le département de la Seine-Maritime, le nombre d'exploitants relevant du RSA a doublé en deux ans.

Vous avez comparé votre projet à la pointe d'une flèche qui devait transpercer les retards de l'agriculture française. J'ai le sentiment que la corde n'est pas assez tendue et que le bras est faible et tremblant. Bref, j'ai bien peur que vous ne ratiez votre cible !

M. Philippe Boënnec. En matière de pêche et d'aquaculture, la France possède un savoir-faire historique qu'il est indispensable de maintenir. Je considère moi aussi que l’avenir des terriens est en mer. Notre grand pays maritime ne doit pas l'oublier.

Je puis témoigner, monsieur le ministre, de votre implication personnelle en faveur de la pêche et des métiers de la mer. J'ai assisté à presque toutes les réunions des Assises de la pêche, où l'on a accompli un excellent travail et où tous les acteurs, ONG environnementalistes comprises, ont manifesté un grand esprit de concertation pour préparer les propositions françaises en matière de politique commune de la pêche.

S'agissant de la gouvernance, le Grenelle 2 prévoit la création de conseils de façade dans le cadre du Conseil national de la mer et des littoraux. J’aimerais avoir des précisions à ce sujet.

Qu'en est-il du renouvellement de la flotte française ?

Enfin, le produit des taxes sur les éoliennes offshore sera-t-il dirigé vers les seules collectivités ou servira-t-il aussi à aider les professions de la mer ?

M. Pascal Deguilhem. Dans mon département, un agriculteur sur cinq est au RSA. C'est dire quelle est la réalité du revenu agricole aujourd'hui ! De nombreuses exploitations disparaissent dans tous les secteurs.

Face à cette réalité, vous évoquez le contexte mondial. Vous citez le Brésil, qui passe des contrats avec l'Afrique pour inonder ce continent de céréales génétiquement modifiées. Par rapport à un tel système, nous pensons qu'il faut privilégier la diversité des pratiques et des cultures et maintenir les emplois agricoles. Il n'est pas certain que l'on n'y parvienne par la contractualisation, qui risque de provoquer une tendance à la baisse des prix et de favoriser la spécialisation des territoires.

Comme le souligne M. Patria, il faut absolument trouver le moyen de simplifier les procédures de réorganisation foncière. Dans la filière bois, c'est une priorité.

M. Jean Auclair. En prévision de la discussion de ce projet de loi, j'ai réuni les agriculteurs de ma circonscription. Ceux-ci m'ont demandé de porter à votre connaissance une série de problèmes que le texte ne traite pas :

Le montant de l’aide de minimis devrait être assujetti au chiffre d'affaires de l'exploitation, et non être réglementé comme il est aujourd'hui ;

Il faut supprimer la condition de reprise à l'identique pour bénéficier de la totalité de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA). Ces droits à produire doivent aller aux futurs exploitants en fonction de la surface reprise et du cheptel ;

Si la PMTVA n'est pas activée pendant trois ans, il conviendrait de prévoir une possibilité de transfert temporaire avant une éventuelle suppression ;

Il faut supprimer la possibilité d'avoir 40 % de génisses dans le périmètre de la PMTVA, en passant à 20 % en année n, à 10 % en année n+1 et à 0 en année n+2 ;

Il faut également supprimer la limite d’âge de 60 ans pour bénéficier des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) et de la prime herbagère agroenvironnementale (PHAE). Si l’on recule l’âge de la retraite, il faut laisser à ceux qui choisissent de continuer à travailler la possibilité de bénéficier de ces aides ;

Il faut changer le règlement qui régit le transport de chevaux lourds, car il engendre de grandes difficultés pour exporter des poulains en Italie et en Espagne ;

Alors que les éleveurs sont en difficulté, ils sont obligés de payer une redevance élevage dans le bassin allaitant, ce qui est insupportable ;

La suppression de la demi-part de surface minimale d'installation pour bénéficier des aides est indispensable ;

Le comportement de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) est insupportable. Ses responsables se comportent comme des shérifs et empêchent toute restructuration d’exploitation ;

Les contrôles conditionnalité nous font perdre des parts de marché ;

On a déjà parlé des SAFER, mais les agriculteurs en ont aussi assez des commissions départementales d’orientation agricole (CDOA) et des comités départementaux de protection de la nature et de l’environnement (CDPNE).

Ils dénoncent enfin le racket organisé par les gardes de l’ONF sur les petites communes rurales.

M. Louis-Joseph Manscour. Je souhaite que vous entendiez parler au moins une fois de l'outre-mer ce soir, monsieur le ministre.

Cette énième loi sur l'agriculture et la pêche ne peut, dites-vous, tout régler : son objectif premier est de donner des instruments économiques aux agriculteurs et aux pêcheurs. Mais, quel que soit le texte, on se contente d'une vague allusion aux outre-mer en dernière page.

Qui plus est, vous proposez de traiter les problématiques relatives aux outre-mer par voie d'ordonnances.

L'agriculture antillaise mérite mieux. Elle a prospéré jadis mais souffre maintenant de nombreux handicaps : sécheresses répétées, cyclones fréquents, pollution au chlordécone... Nos agriculteurs sont interdits de plantations, 400 d'entre eux se trouvent aujourd'hui ruinés.

Le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche répond-il aux préoccupations des agriculteurs et des marins pêcheurs ? Permet-il l'émergence d'une agriculture durable ? Je ne le pense pas. Un de vos prédécesseurs, M. Dominique Bussereau, s'était engagé à élaborer une loi d'orientation spécifique à l'outre-mer. Quelle est votre position à ce sujet ? Lors des états généraux qui ont suivi les événements de février 2009, le Président de la République s'était engagé à ce que l'agriculture antillaise retrouve toute sa place.

M. Antoine Herth. Vous avez appelé l’attention sur la nécessité – soulignée en son temps par Franz Fischler, commissaire européen chargé de l'agriculture – de « coller » au marché, car l’industrie agroalimentaire française paye très cher en termes de pertes de marché les insuffisances en la matière. Comment comptez-vous mener cette action que d’autres pays européens ont déjà intégrée dans leur politique ?

Concernant l’Observatoire des prix et des marges, ne serait-il pas pertinent qu’au-delà de l’étude des coûts de production au stade de la production agricole, il élargisse son intervention à l’ensemble de la filière ?

Quant à la politique forestière, si le texte répond à cet égard à une vraie attente, envisagez-vous de donner, dans le cadre des établissements d’enseignement agricole, une impulsion à la formation aux métiers du bois, voire de donner la possibilité aux agriculteurs de développer à titre accessoire, dans le cadre de la diversification des revenus, une activité touchant à la récolte du bois ?

Enfin, peut-on savoir si Bercy vous laisse quelques marges de manœuvre pour accepter des amendements impliquant des dépenses de l’État ?

Mme Pascale Got. Vous avez confirmé devant notre Commission au mois de septembre dernier la nécessité d’un dispositif assurantiel pour la forêt sachant que les deux tempêtes de 1999 et de 2009 avaient permis de s’apercevoir que seulement 5 % de la forêt était assurée. Aussi ai-je été surprise de ne trouver aucune trace d’un tel dispositif dans le texte initial. Certes, le sénat a rattrapé cette lacune en mettant en place un compte d’épargne d’assurance qui, s’il se révèle discutable sur plusieurs points, a au moins le mérite d’exister Or, vous avez fait adopter par amendement des restrictions qui rendront ce système assurantiel inopérant. Non seulement l’interdiction d’utiliser une partie du compte pour l’investissement est une erreur, car les deux précédentes tempêtes nécessitent des investissements nouveaux et ambitieux pour l’avenir même de la forêt, mais le refus de toute aide de l’État après 2017 pour les propriétaires non assurés n’est pas réaliste. Aujourd'hui, c’est l’ensemble de la profession qui rejette à juste titre ce texte.

Allez-vous continuer à cautionner cette approche réductrice – due non pas à votre volonté, mais à celle de Bercy –, au détriment d’un soutien à l’investissement dans un secteur d’activité qui représente 400 000 emplois ?

M. Jean-Claude Bouchet. Le texte présente le mérite d’organiser la profession à la fois sur le moyen et le long terme, mais reste le problème angoissant de la compétitivité de notre agriculture du fait de la différence de coût de main-d’œuvre entre la France et les autres pays européens, notamment dans le secteur des fruits et légumes. Pourquoi le texte ne prend-il pas en compte la réflexion menée en la matière ?

M. Jean-Michel Clément. S’agissant de la contractualisation – pierre angulaire du texte –, l’article L. 631-4 du code rural dispose que l'accord interprofessionnel à long terme, qui prévoit pour son exécution une convention de campagne et un contrat type, « a pour but, simultanément : 1° de développer les débouchés intérieurs et extérieurs [...] ; 2° d'améliorer la qualité des produits ; 3° de régulariser les prix ; 4° de fixer les conditions générales de l'équilibre du marché et du déroulement des transactions ». Qu’apporte de nouveau le dispositif proposé aujourd'hui ?

Par ailleurs, selon la rédaction proposée pour l’article L. 631-24 du même code, les contrats de vente écrits entre producteurs et acheteurs « comportent des clauses relatives [...] aux critères et modalités de détermination du prix ». Qu’est-ce qui empêchera demain qu’un contrat prévoie que les prix suivront les cours mondiaux – critère de détermination parmi d’autres ?

M. Bertrand Pancher. La question de la pluralité syndicale est un sujet qui nous préoccupe sur tous les bancs. Aligner les critères de la représentativité agricole sur ceux appliqués pour les syndicats salariés ne permettrait-il pas de créer les conditions d’un débat serein et de décisions partagées ?

Concernant la pêche, la question de la reconversion d’une profession confrontée à une diminution de ressources drastiques n’est pas évoquée dans le texte. Pouvez-vous, au-delà du problème des aides et des restructurations, nous donner des éclaircissements sur ce point, sachant que l’on a besoin de moins de pêcheurs et de plus de réserves ?

Quant aux forêts, si l’on doit se féliciter des systèmes d’assurance mis en place, rien n’est prévu concernant la mobilisation de la ressource. Sachant que 40 % de la forêt n’est pas utilisée faute de procédures de regroupement de parcelles efficaces, vos services traitent-ils par ailleurs du problème des indivisions et des remembrements ?

Enfin, favorable à ce que le budget de la PAC soit maintenu, je ne peux que me réjouir de lire dans la presse de ce matin que la Commission européenne travaille enfin sur une vraie fiscalité européenne.

Mme Marie-Lou Marcel. Non seulement le texte manque d’une approche régionalisée et territorialisée – qu’y a-t-il de commun entre un céréalier de la Beauce et un producteur laitier de l’Aveyron ? –, mais il est trop marqué par des logiques productivistes. Plutôt qu’une vision quantitative, c’est une logique plus qualitative qui aurait dû prévaloir, privilégiant l’animation de l’espace rural dans les zones où la productivité est faible.

La problématique de la pluralité syndicale ayant déjà été abordée, je reviendrai sur celle de la formation. En effet, alors que tous soulignent que l’enseignement agricole est de grande qualité, je ne trouve rien sur les moyens qui lui sont alloués.

M. François Brottes. Ayant été dans le passé rapporteur de la loi de 2001 d'orientation sur la forêt, je ne vois pas bien ce qu’apporte ce nouveau texte sinon, ce qui m’inquiète, un recul par rapport au rôle de l’ONF et au régime forestier – sans parler du recours à une ordonnance pour traiter du débroussaillement alors que devant les risques d’incendie de forêt de plus en plus importants dans nos régions, c’est le Parlement qui devrait être saisi de la question. Il en va de même pour le remembrement : tout existe dans les textes pour régler le problème des 4 millions de petites parcelles ; seule manque la volonté locale. En tout cas, ce n’est certainement pas en supprimant des postes, notamment au Centre national de la propriété forestière que l’on y arrivera !

L’agriculture de montagne, pour sa part, va connaître un effet de ciseaux entre, d’une part, la contractualisation – qui va aboutir à la détermination d’un prix moyen par les gros producteurs alors que les coûts de production du lait par exemple sont plus élevés dans les petites exploitations de montagne – et, d’autre part, les interprofessions dans lesquelles les petits agriculteurs seront marginalisés. Le texte permettra-t-il à l’agriculture de montagne de continuer à vivre et à fournir des produits de qualité ?

M. le ministre. La qualité des questions permettra sans nul doute d’améliorer la qualité du texte.

Monsieur Poignant, le coût du travail est vrai sujet qui dépasse de très loin la seule question agricole et qui engage le rapport de notre modèle social aux autres modèles européens. Je réitère sur ce point mon accord avec M. Germinal Peiro : je reste convaincu que sans harmonisation fiscale et sociale dans un marché unique, notamment la zone euro, de graves difficultés, dues à des écarts de compétitivité, ne peuvent qu’apparaître à échéance plus ou moins lointaine.

En matière de recherche et développement, on peut toujours intervenir de manière législative, mais ce qui compte c’est prendre la décision. Tel a été le cas avec l’essai de vigne OGM en plein champ pour lutter contre la maladie du court-noué qui avait reçu l’accord aussi bien des scientifiques que du Haut conseil des biotechnologies et pour lequel j’ai rendu un avis positif avec le soutien de Jean-Louis Borloo. Certes, la presse a été unanimement négative, mais je n’en assume pas moins totalement cette décision. Elle était raisonnable, sauf à laisser la maladie du court-noué se répandre un peu partout.

Les représentants des groupes d’opposition doivent le comprendre : les chercheurs de l’INRA, ceux qui travaillent sur les biotechnologies et le végétal, qui sont un atout majeur de l’agriculture française car nous sommes en avance sur ces sujets, auraient été désespérés – je pèse mes mots – que le ministre de l’agriculture ne donne pas son accord après un avis positif du Haut conseil, comme ils ont été désespérés qu’à la suite de la destruction, par un groupe radical, de cet essai autorisé par les autorités publiques, il y ait eu aussi peu de réactions pour défendre leur position et pour dénoncer ce type de comportement.

Quant au développement de l’assurance, celui de la DPA votée dans le cadre de la dernière loi de finances, élargie aux aléas économiques, permet déjà de réaliser des économies substantielles grâce à un effort important de l’État.

Madame Quéré, la bataille que j’ai livrée l’a été pour maintenir le budget de la PAC. J’estime aujourd'hui qu’elle est gagnée – alors qu’elle était perdue au mois d’octobre dernier. Pour autant, tous les agriculteurs de France savent que le niveau des aides directes du premier pilier baissera, car les pays d’Europe de l’Est, notamment la Pologne, n’ont pas les mêmes références historiques que nous. C’est d’ailleurs pourquoi je me bats autant sur la régulation des marchés : faire en sorte que de l’argent soit alloué à celle-ci profitera plus à tout le marché agricole européen qu’une répartition des aides directes en défaveur de la France et au profit d’autres pays.

Le prix dans les contrats est une bataille essentielle, et il faut que les interprofessions soient libres de fixer des indicateurs de tendance de marché. Alors que le droit européen est déjà restrictif, la DGCCRF l’applique de manière très rigoureuse. Nous avons eu, le Président de la République et moi-même, un échange très vif avec Dacian Cioloş pour donner aux interprofessions la possibilité de fixer de tels indicateurs de tendance de marché. Il serait irresponsable que les agriculteurs que l’on a fait vivre pendant des décennies à côté du marché soient, du jour au lendemain, contraints de vivre dans le marché en devant se débrouiller seuls.

Quant à la Vendée et à la Charente-Maritime, dont la situation me sensibilise particulièrement – je m’y rendrai d’ailleurs vendredi pour rencontrer les agriculteurs –, nous nous battons auprès de la Commission pour obtenir le droit de verser à ces derniers les aides qui leur sont dues. Si je viens sur place – à mes risques et périls, oserais-je dire –, c’est pour marquer ma volonté absolue de verser maintenant les aides aux exploitations.

Monsieur Martin, un décret sera envoyé à Bruxelles sur la question de l’incorporation d’un ingrédient AOC car, qu’il s’agisse du champagne ou d’autres appellations, il est inacceptable que les indications en la matière ne soient pas plus précises. Une telle précision est envisageable dans la loi si vous le souhaitez, mais je m’engage à le faire par la voie réglementaire.

Monsieur Gaubert, j’assume l’héritage du gouvernement précédent de M. Fillon, encore que je n’ai pas pris le risque de divulguer – parce que cela n’aurait pas été bon pour l’image de notre pays – certains documents sur les aides d’État qui ont été données par mes prédécesseurs en violation totale des règles européennes. Mais, pour parler clair, que l’on ne vienne pas me chercher sur le sujet des aides ! Je veux bien faire le sale boulot qui est de récupérer ces dernières, mais je ne veux pas en plus que l’on me reproche de ne pas assumer l’héritage.

Concernant les ordonnances relatives à la gestion sanitaire, je suis d’accord pour vous fournir les conclusions des États généraux du sanitaire, notamment le point d’accord auquel nous sommes parvenus avec les vétérinaires, les exploitants agricoles et les scientifiques. C’est un sujet majeur et j’ai d’ailleurs eu l’occasion d’expliquer à la nouvelle ministre britannique – qui souhaitait remettre à plat la PAC, supprimer les aides directes et simplifier les dispositifs – que c’est en simplifiant les règles administratives dans le domaine sanitaire que nous avons eu la crise de la vache folle, sachant que pour la France, corriger les erreurs de la Grande-Bretagne a coûté 1 milliard d’euros par an.

Monsieur Saint-Léger, la suppression de la référence à la demi-SMI – pour installation en GAEC du moins – est un sujet que je suis prêt à étudier, la question étant toutefois de savoir si l’on ne fait pas courir un risque aux jeunes agriculteurs en les laissant s’installer dans des exploitations qui seraient de trop petite taille.

Monsieur Chanteguet, justement, nous dépensons 330 millions d’euros pour l’installation des jeunes agriculteurs. J’étudierai, notamment avec Christian Jacob qui connaît bien le sujet, si des mesures spécifiques – rendues possibles par l’affectation des 40 à 50 millions d’euros supplémentaires que la taxe sur la mutation peut rapporter – peuvent d’ores et déjà être envisagées en la matière. Je comprends la crainte qui a été exprimée de voir Bercy récupérer la mise si la somme affectée aux agriculteurs n’est pas fléchée sur un dispositif précis. Je tiens cependant à signaler l’attitude particulièrement constructive de Mme Lagarde qui n’a pas bloqué des dispositions novatrices qui engagent les finances publiques.

Monsieur Le Nay, la réforme de l’ONF est en cours, mais, plus généralement, je reviendrai sur la forêt en répondant aux questions très précises posées à ce sujet par M. Brottes.

Madame Erhel, il est envisageable que les organisations de producteurs gèrent des contrats, en particulier dans le secteur des légumes frais. Encore faut-il qu’elles sortent impérativement de logiques trop locales pour avoir une approche plus nationale, car le marché – c’est bien d’ailleurs tout le problème de notre compétitivité – est européen. Il faut penser les choses de manière un peu plus globale si l’on veut vraiment être performant. Quand on constate que de plus en plus de porcs bretons sont abattus en Allemagne parce cela coûte moins cher que de les faire abattre à vingt kilomètres de leur lieu d’élevage, c’est bien qu’il y a une difficulté à résoudre.

Monsieur Trassy-Paillogues, s’il n’est pas écrit noir sur blanc que les élus locaux sont présents au sein de la commission départementale, il faudra l’écrire. De même, concernant l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, la proposition d’y inclure des parlementaires est intéressante, même si le rôle de cet organisme sera considérablement renforcé par rapport à la situation actuelle. On passerait en effet d’un système que personne ne comprend et où seules quelques indications de prix et de marge figurent sur Internet, à un dispositif dans lequel un président aura à remettre un rapport et des conclusions, avec un droit de suite du Parlement.

Quant à savoir si la PAC est soutenue de façon homogène, je dirai clairement que la position britannique, notamment, est devenue de plus en plus raide sur le sujet. Faire basculer définitivement les Allemands de notre côté est d’ailleurs tout l’objet de la position commune sur laquelle je travaille depuis six mois et que j’espère pouvoir présenter en septembre prochain avec mon homologue Mme Aigner. Le Président de la République en a récemment parlé avec Mme Merckel, et les choses vont donc dans la bonne direction. À cet égard, tous les parlementaires qui pourraient appuyer la position française en matière de régulation au cours de leurs déplacements en Europe, notamment au Bundestag, sont les bienvenus.

Monsieur Bouillon, le projet de loi propose, s’agissant des circuits courts, une modification des règles d’appels d’offre de façon que les organisations de producteurs y participent, ce qui est un vrai changement. J’aurais même souhaité que l’on aille plus loin en instaurant une notion de distance, mais si les Américains ont, en matière de restauration collective, notamment scolaire, l’obligation de se fournir en produits agricoles cultivés à moins de cinquante kilomètres du lieu de consommation, un tel dispositif serait contraire aux règles communautaires. Le système du marché unique veut en effet que l’on s’approvisionne en produits espagnols, italiens ou encore allemands sur la base de règles de concurrence identiques – le défaut de la cuirasse étant que l’on ne s’approvisionne pas forcément en produits allemands, italiens ou autres, mais en produits d’Amérique du sud ! Cependant, la modification des règles d’appels d’offre change déjà la donne, et s’il existe d’autres possibilités pour aller plus loin en conformité avec le droit communautaire, j’y serai favorable, étant un farouche partisan des circuits courts.

Monsieur Boënnec, le renouvellement de la ressource naturelle est un vrai sujet. Cela fait partie des investissements absolument nécessaires à réaliser.

Quant au reversement en partie de la taxe éolienne off shore aux professionnels, j’y suis favorable, mais ce n’est malheureusement pas uniquement moi qui décide en la matière, d’autant que d’autres ministres ne sont pas de cet avis. En tout cas, donner de l’argent aux pêcheurs dans ce cadre ne me poserait aucune difficulté.

Monsieur Deguilhem, je ne souhaite pas, s’agissant de la réorganisation du territoire, que l’on rouvre le dossier des SAFER dans le cadre du projet de loi, car cela nous entraînerait trop loin.

Monsieur Auclair, je constate que vous êtes toujours aussi généreux avec les agriculteurs ! Vous avez en tout cas été entendu concernant les organisations de producteurs commerciales, notamment pour la filière de l’élevage. Nous n’allons pas en effet trancher tout de suite entre les différentes options possibles – dont celle, volontariste, retenue par certains pays européens qui oblige les producteurs à entrer dans de telles organisations –, mais nous donner un peu de temps.

Quant à vos autres propositions, qui ne sont pas du domaine législatif, elles ont un unique défaut, mais qui n’est pas négligeable, celui d’être extraordinairement coûteuses. Ainsi, la suppression de la limite d’âge à soixante ans pour l’attribution de la PHAE et de l’ICHN risquerait de nous entraîner très loin, le coût pour la prime herbagère, par exemple, se chiffrant en centaines de millions d’euros. Je suis cependant prêt à examiner les différents points que vous avez soulevés.

Monsieur Manscour, l’outre-mer est un sujet essentiel et là aussi notre volonté est d’agir. Nous avons mis sur la table 40 millions d’euros, et si je défends un projet de diversification de l’agriculture en outre-mer, c’est parce que c’est la seule façon d’éviter qu’elle soit en difficulté, car la monoculture ne sera plus rentable d’ici quelques années.

Concernant le chlordécone, je ne vous cache pas que l’on n’a pas la solution. Le plan chlordécone devrait être présenté au début de l’année 2011 et je souhaite que l’on avance en la matière pour avoir des réponses plus rapides, mais c’est un sujet difficile notamment parce que la santé publique est en jeu.

Monsieur Herth, je vous remercie d’avoir souligné la nécessité de prendre en considération les exigences du marché. Mais l’équilibre est difficile à trouver entre l’accompagnement des agriculteurs vers le marché et l’impossibilité dans le même temps de se dispenser des règles de ce dernier.

Quant à la formation, je suis très favorable à faire davantage pour l’enseignement agricole dans le domaine du bois, et tout amendement sur ce sujet sera considéré.

Madame Got, reconnaissons, s’agissant du dispositif assurantiel, que si, avant la loi, il n’y avait pas d’assurance pour la forêt, il y en aura une après. Qu’on le veuille ou non c’est un changement, lequel est d’ailleurs coûteux pour les finances publiques puisque le fonds d’assurance forêt bénéficie d’une défiscalisation.

Par ailleurs, s’il faut soutenir l’investissement en forêt, je ne crois pas que la bonne réponse soit d’intégrer le dispositif en la matière dans celui sur l’assurance forêt.

Monsieur Bouchet, je suis prêt à accepter des amendements qui relanceraient des études sur le coût de la main-d’œuvre permanente, notamment dans le secteur des fruits et légumes.

Monsieur Clément, les contrats types que vous citez – qui datent de 1964 et qui sont peu appliqués – ne comportent pas autant de dispositions que ceux qui figurent dans le texte. Le vrai changement provient surtout du caractère obligatoire de ces derniers, les clauses types y figurant étant laissées dans un premier temps à l’appréciation de l’interprofession, l’État intervenant ensuite si la négociation n’aboutit pas.

Monsieur Pancher, j’ai eu l’occasion de m’expliquer avec tous les représentants syndicaux concernant les interprofessions. Il est, me semble-t-il, de l’intérêt des organisations syndicales de travailler davantage ensemble et d’être pluralistes. Simplement, ces interprofessions étant de droit privé, c’est à elles de juger de leur évolution. Je crains qu’en précipitant les choses par la voie législative, le remède soit pire que le mal, d’autant que les interprofessions elles-mêmes évoluent. Ainsi, dans la filière lait, le responsable de la Fédération nationale des producteurs de lait, Henri Brichart, a ouvert la discussion aux autres organisations syndicales représentatives. Les choses bougent lentement, et tous mes prédécesseurs – gauche et droite confondues – m’ont dit combien le sujet était hautement sensible et que le mieux était d’accompagner les choses plutôt que de les forcer.

Madame Marcel, il faut en effet défendre la diversité des types d’agriculture. Quant à la régionalisation, elle sera prise en compte dans les plans de développement des filières. Les bassins de production à l’échelle d’une région deviendront la référence agricole en France d’ici quelques mois parce que c’est la taille critique si l’on veut une bonne organisation des filières et garantir la présence de l’agriculture sur tout le territoire.

Je n’entrerai pas dans le détail parce qu’il est tard, mais concernant notamment les quotas laitiers, leur gestion à l’échelon départemental n’est plus une bonne solution.

Monsieur Brottes, vous êtes un vrai spécialiste de la forêt et je n’ai donc pas grand-chose à ajouter à toutes vos remarques, sinon pour faire remarquer que l’assurance forêt constitue tout de même un point nouveau. Quant au rôle de l’ONF, je suis très à l’aise : alors que je souhaitais un renforcement de ses capacités d’intervention, je me suis heurté à une opposition unanime des sénateurs à tel point que j’ai dû retirer l’amendement du Gouvernement en la matière. Si jamais vous voulez un tel renforcement, nous pourrons toujours en rediscuter en séance publique.

Enfin s’agissant de l’agriculture de montagne, deux éléments permettront de la soutenir.

Le premier a trait au maintien des aides européennes et de celles de l’État. Nous avons eu gain de cause auprès de la Commission : il n’y aura pas de remise en cause des aides, notamment du deuxième pilier, pour les territoires en difficulté.

Le second élément est relatif à la valorisation. Dans les territoires de montagne qui produisent du Beaufort, de la Tome de Savoie ou du Reblochon, le lait est à 400 ou 420 euros la tonne contre 300 euros en moyenne – ce qui me permet d’ailleurs de rappeler que si le prix du lait est remonté sur les marchés européens de 230 euros à environ 300 euros la tonne, c’est grâce à notre intervention. D’une manière générale, la valorisation des produits est la ligne à suivre : ainsi avec le lait, si on fait plus de fromage valorisé et moins de beurre poudre, on se portera beaucoup mieux qu’aujourd'hui.

M. le président Christian Jacob. La qualité et la diversité des questions n’ont eu d’égal, monsieur le ministre, que la qualité de vos réponses.

II.— DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission a examiné le titre III (articles 13 à 17 octies) au cours de sa séance du mardi 8 juin 2010.

*

M. le président Christian Jacob. La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est saisie du titre III du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Après son audition de la semaine dernière, organisée en commun avec la Commission des affaires économiques, je tiens à remercier M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche d’être présent à nouveau ce soir.

Sept amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution : les amendements CD 7 et CD 12 de M. Serge Letchimy, les amendements CD 22, CD 26, CD 27 et CD 42 de M. André Chassaigne et l’amendement CD 94 de M. Franck Marlin. A en outre été jugé contraire à la Constitution l’amendement CD 72 de Mme Henriette Martinez et plusieurs de ses collègues, tendant à subordonner le recours aux ordonnances à l’initiative de l’Assemblée.

Le ministre devant participer ce soir, à Perpignan, au colloque des jeunes agriculteurs, il devra nous quitter avant la fin de cette réunion. Je propose donc que, pour profiter de sa présence, nous examinions le texte dont nous nous sommes saisis en commençant par l’article 13. Les articles 12 et 12 bis sont réservés.

M. Christian Patria, rapporteur pour avis. Comme l’a indiqué le président Christian Jacob, notre commission s’est saisie pour avis du seul titre III du projet de loi et n’examinera donc que les amendements déposés dans ce cadre.

M. le président Christian Jacob. Bien entendu, ceux qui ont été déposés sur d’autres parties du texte pourront être présentés en Commission des affaires économiques.

M. le rapporteur pour avis. Le titre III n’est certes qu’une petite partie du projet de loi, mais le fait qu’il comporte, après son examen par le Sénat, 21 articles contre 6 initialement montre combien il a retenu l’attention de nos collègues. En outre, malgré des délais très courts, une centaine d’amendements ont été déposés. La commission examinera donc ce texte avec acuité et en profondeur.

L’exposé brillant qu’a livré la semaine dernière M. le ministre me dispense de revenir sur l’ensemble du texte et je me limiterai donc aux éléments que mes travaux ont mis en relief. Je précise à ce propos que j’ai participé à la quasi-totalité des auditions organisées par M. Michel Raison, rapporteur de la Commission des affaires économiques pour l’agriculture, et que j’ai en outre procédé à une demi-journée d’entretiens pour les sujets qui m’intéressaient particulièrement.

Il me semble souhaitable de conserver en l’état les dispositions qui font consensus, comme le plan régional de l’agriculture durable prévu par l’article 12, la commission communale d’aménagement foncier prévu par l’article 14, le passage d’indices départementaux à un indice national pour les fermages – qui a fait l’unanimité chez les professionnels consultés – et la réforme de l’organisation des chambres d’agriculture.

D’autres dispositions soulèvent des questions. C’est d’ailleurs sur celles-ci que se concentrent vos amendements.

Les deux principaux sujets abordés dans le titre III sont la gestion de la forêt et la préservation du foncier agricole.

La forêt française est la première d’Europe, aussi convient-il de mettre fin à un désintérêt qui nuit au développement de la filière bois et à la construction de matériaux durables et respectueux de l’environnement. Il n’est pas normal que nous importions du bois de coupe alors que nous le laissons pourrir sur pied sur notre territoire.

On compte dans notre pays 3,5 millions de propriétaires forestiers privés, dont 2,3 millions possèdent moins d’un hectare. Certains ignorent même la localisation exacte de leur parcelle, car le prix de l’intervention du géomètre serait supérieur à celui du terrain. Ce morcellement de la propriété empêche une bonne gestion de la forêt.

Le projet de loi comporte des dispositions intéressantes : il s’agit, en fonction de la taille des massifs, du plan pluriannuel régional de développement, du plan simple de gestion et de la stratégie locale de développement forestier.

Le texte prévoit en outre un nouveau mode d’assurance forestière, avec le compte épargne d’assurance pour la forêt. C’est une idée qu’il faut saluer, mais il ne faut pas pour autant que ce dispositif conduise l’État à se désengager en cas de sinistre majeur. Je proposerai d’ailleurs un amendement pour éviter cela.

Le Sénat a prévu l’information des propriétaires voisins en cas de vente de petites parcelles. Cette mesure ne suffit pas et je propose l’instauration d’un droit de préférence, qui permettra un meilleur remembrement de la forêt.

Pour ce qui est de la préservation du foncier agricole face à l’artificialisation croissante des terres, il importe de limiter le rythme de consommation des terres agricoles. En 1960, 30 000 hectares disparaissaient chaque année ; l’année dernière, c’étaient 75 000 hectares. Qui plus est, il n’est pas acceptable de laisser créer de nouvelles zones d’activité alors que d’autres déjà créées restent à l’état de friche.

Le dispositif imaginé par le Gouvernement comporte trois volets, que l’on pourrait résumer ainsi : connaître, prévenir et « désinciter ».

Pour ce qui est de connaître, le projet de loi prévoit la création d’un Observatoire, dont le principe n’a soulevé aucune critique lors des auditions. Cependant, il ne devra en aucun cas être doté d’un pouvoir normatif.

En matière de prévention, le texte prévoit la mise en place de commissions départementales de la consommation des espaces agricoles, chargées de conseiller les maires dans les zones non couvertes par des schémas de cohérence territoriale – ou SCOT. Je propose pour ma part que ces commissions soient également compétentes pour les zones pourvues de SCOT, car c’est souvent là que les implantations sont les plus nombreuses. Je précise que, si l’avis formulé par ces commissions peut informer les maires et les collectivités, ceux-ci ne doivent pas se voir privés des pouvoirs en matière d’urbanisme qu’ils tiennent de leur élection.

Le troisième volet du dispositif de préservation du foncier agricole est une taxe destinée à dissuader l’achat de terres agricoles pour un autre usage. Le Sénat a posé comme condition impérative que le produit de cette taxe soit affecté à l’installation des jeunes agriculteurs. Pour ma part, je ne suis pas favorable à la création d’un impôt de plus sur la propriété foncière. Du reste, il existe déjà une taxe sur les plus-values foncières. En outre, je ne suis pas persuadé qu’une telle taxe suffirait à réduire le changement de destination des terres agricoles. Enfin, nous connaissons tous suffisamment Bercy pour savoir que l’apparition des nouvelles recettes que constituera le produit de cette taxe servira de prétexte à un désengagement de l’État.

Je proposerai donc dans un amendement la suppression de cette taxe – à laquelle d’ailleurs, à l’inverse des jeunes agriculteurs, les principaux syndicats agricoles sont plutôt opposés.

M. le président Christian Jacob. Nous allons maintenant procéder à l’examen des articles du titre III – en commençant, je le rappelle, par l’article 13.

M. Jean-Marc Lefranc. Monsieur le président, les amendements que j’ai déposés à la Commission des affaires économiques ne figurent pas dans la liasse qui nous a été distribuée.

M. le président Christian Jacob. Ils le seront assurément – y compris, bien entendu, ceux qui concernent le titre III – dans la liasse des amendements qui seront examinés par la Commission des affaires économiques, saisie au fond.

*

III.— EXAMEN DES ARTICLES

TITRE III
INSCRIRE L’AGRICULTURE ET LA FORÊT
DANS UN DÉVELOPPEMENT DURABLE
DES TERRITOIRES

Article 13 

(article 1605 nonies du code général des impôts)

Taxation des plus-values de cession de terrain agricole
à fin d’un usage non agricole

*

La Commission examine d’abord l’amendement CD 79 du rapporteur pour avis, tendant à la suppression de l’article.

M. le rapporteur pour avis. La présentation que je viens de faire du dispositif proposé par le Gouvernement vaut défense de cet amendement.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche. La question des terres agricoles est une question majeure en France, en Europe et dans le reste du monde. Ce matin même, à Budapest, j’ai eu une discussion à ce propos avec mon homologue hongrois et son collègue chargé de l’économie. Tout le monde en Europe comprend désormais l’importance de la question.

La situation n’est pas partout aussi préoccupante qu’en Afrique, où les terres agricoles sont rachetées massivement par la Chine et par certains pays du Golfe – cette question fera d’ailleurs l’objet d’échanges dans le cadre du G20. Cependant, certaines menaces existent. Dans les pays d’Europe centrale et orientale, comme on me l’a exposé ce matin, la menace vient du rachat des terres agricoles par des fonds d’investissement privés qui spéculent sur les produits agricoles – au point que la Hongrie a dû élaborer une loi, actuellement en cours d’adoption au Parlement, pour interdire ces achats par des fonds d’investissement étrangers.

En France et en Allemagne, les terres agricoles sont trop chères pour que ces fonds les achètent à des fins spéculatives, mais nous les dilapidons depuis des décennies à un rythme croissant. Comme l’a rappelé le rapporteur pour avis, nous perdons chaque année entre 70 000 et 75 000 hectares de terres agricoles, soit 200 hectares par jour. Cette situation ne peut plus durer et il nous faut prendre des dispositions fortes pour y mettre fin.

En Allemagne, pays que je connais bien et où je me rends pratiquement toutes les trois semaines, j’ai évoqué cette question avec mon homologue allemande et avec son collègue Wolfgang Schäuble, ministre des finances. L’Allemagne, qui perdait chaque jour l’équivalent de 120 hectares, s’est fixé pour objectif, par une loi adoptée voilà déjà trois ans, de limiter cette perte à 30 hectares d’ici à 2020. Bien que le territoire allemand soit plus petit et plus urbanisé que celui de la France, cet objectif est très ambitieux. Le dispositif établi à cet effet repose sur les offices d’aménagement rural mis en place au niveau des Länder, offices qui peuvent rendre un avis contraignant, ce qui leur permet de s’opposer à la mutation de terres agricoles, et peuvent appliquer à cette mutation une taxe pouvant atteindre 20 % du prix initial de la terre.

Le dispositif que nous mettons en place avec le projet de loi qui vous est soumis est calqué sur ce modèle allemand, en tenant compte des spécificités françaises et du rôle légitime des collectivités locales.

Il se compose donc, comme l’a exposé le rapporteur pour avis, de trois étages. Le premier est celui de l’observation. Dès mon arrivée au ministère de l’agriculture, j’ai demandé un état des lieux des terres agricoles françaises – leur valeur et leur rendement, région par région –, mais il a été impossible de l’obtenir. Toutes les décisions sont prises au niveau communal, départemental ou régional, sans aucune réflexion à long terme sur le capital agricole français. Je propose donc de créer cette fonction d’observation qui n’existe pas aujourd’hui.

Il semble également important que soient rendus à l’échelle départementale des avis associant toutes les personnes concernées par la mutation – y compris d’ailleurs des associations qui n’ont pas encore voix au chapitre. Après réflexion approfondie et de longues discussions avec l’Association des maires de France, il nous a semblé préférable que l’avis de la commission départementale soit simplement consultatif, afin d’éviter de déposséder les collectivités locales de leurs droits dans ce domaine.

La taxation des mutations est également indispensable, car un « tigre sans dents » n’est guère menaçant. Cette taxe serait un signal concret de notre volonté de nous opposer au rythme actuel de la perte de terres agricoles.

Je tiens à préciser que cette taxe, que la discussion parlementaire a fait évoluer, ne s’applique que lorsque le prix de la terre est multiplié au moins par 10, chiffre qui correspond plus à de la spéculation qu’à la transmission d’un patrimoine. Par ailleurs, le taux est fixé de telle sorte que la taxation maximale sur les terres ne puisse pas excéder 48 %. Enfin, il a été décidé d’affecter cette taxe à l’installation des jeunes agriculteurs. C’est une demande forte de ces derniers et c’est pour eux un signal politique fort. Nous vous proposerons donc de modifier le texte de loi pour indiquer plus clairement cette affectation. Je suis, pour ma part, ouvert à toute proposition qui irait encore plus loin dans ce sens, afin que l’affectation ne procède pas d’un décret du Gouvernement.

Ces éléments me semblent répondre aux préoccupations de Christian Patria. Je le rejoins tout à fait, en revanche, sur la crainte que le ministère du Budget reprenne d’une main ce qu’il a donné très difficilement de l’autre. Le fait de préciser dans la loi l’affectation de la taxe est une manière de verrouiller cette mesure et d’éviter que son produit ne soit repris.

Voilà les quelques précisions que je souhaitais apporter. Bien entendu, le débat reste ouvert sur ce sujet important. En tout état de cause, il faut stopper l’hémorragie de terres agricoles en France.

Deux remarques pour finir. Tout d’abord, la loi n’a de sens que si nous préservons notre capital agricole à l’échelle nationale. De fait, certaines mesures ont trop tardé et doivent maintenant être prises pour donner un signal d’arrêt. Par ailleurs, une régulation européenne des marchés est le complément indispensable des dispositions qui seront adoptées à l’Assemblée nationale.

M. Jean-Paul Chanteguet. Il faut en effet limiter l’artificialisation des sols. Des textes figurent d’ailleurs en ce sens dans les lois Grenelle I et Grenelle II. La perte annuelle de 70 000 à 75 000 hectares de terres agricoles artificialisées est beaucoup trop importante – elle correspond à la disparition d’un département tous les dix ans. À ce rythme, nous risquons de porter atteinte au potentiel productif agricole de notre pays.

La mesure que vous proposez, monsieur le ministre, nous paraît intéressante. L’Observatoire permettrait de savoir quelle est la situation sur les territoires de notre pays. Je partage également l’idée que les avis rendus par les commissions départementales doivent être des avis simples. Quant à la taxe, elle vise à lutter contre la spéculation. De fait, certains propriétaires bénéficient du classement de leurs terres en terrains constructibles et réalisent des bénéfices élevés. Je regrette que la taxe ne s’applique qu’à partir du moment où le prix de vente est dix fois supérieur au prix d’acquisition. Il me semble qu’il serait préférable qu’elle s’applique dès que le prix de cession représente le quintuple du prix d’acquisition.

Nous ne pouvons évidemment pas suivre la proposition formulée par le rapporteur pour avis de supprimer cette disposition.

M. Jacques Le Nay. Il faut évidemment protéger les terres agricoles. Néanmoins, les communes ont la possibilité de taxer les terrains agricoles qui deviennent urbanisables. Un effet de concurrence ne jouera-t-il pas entre les deux taxes ?

Par ailleurs, les montant pris en compte pour constater la multiplication par 10 du prix des terres intègrent-ils la viabilité, qui est souvent l’élément le plus coûteux de la transformation ?

M. André Chassaigne. La question de la consommation de l’espace agricole a été déjà évoquée à l’occasion de nombreux textes, comme la loi sur le développement des territoires ruraux, la loi sur l’eau, la loi sur l’orientation agricole ou les lois de mise en œuvre du Grenelle de l’environnement : à chaque fois, nos échanges n’ont pas eu de grands résultats.

La consommation de l’espace agricole pose certes des problèmes à une époque où l’on a besoin de terres agricoles pour l’alimentation, a fortiori si l’on veut une agriculture moins intensive. Les terres sont notamment nécessaires à proximité des villes, pour limiter le transport des produits agricoles. Cependant, l’artificialisation des sols a aussi des conséquences sur l’eau et, plus généralement, sur l’environnement. Tout en me réjouissant du contenu du projet de loi en la matière, je considère pour ma part qu’il faudrait en durcir les dispositions.

Monsieur le rapporteur pour avis, alors que les insuffisances que vous constatez dans le texte vous conduisent à proposer la suppression de l’article, elles me conduisent, quant à moi, à chercher à y remédier. Pour ce faire, il faut éviter la spéculation. À cet égard, le seuil de 15 000 euros fixé pour la valeur des terrains cédés est sans doute encore trop élevé et le dispositif proposé par le projet de loi encouragera la spéculation en poussant au morcellement des propriétés et à l’atomisation des terrains. Je proposerai donc un amendement visant à supprimer ce seuil de 15 000 euros.

J’ai également déposé deux autres amendements. Sans doute jugerez-vous excessif le premier, qui tend à appliquer une taxe dissuasive au taux uniforme de 50 %. L’autre – l’amendement CD 32 – tend à abaisser de 10 à 5 le rapport entre le prix d’achat et le prix de cession constituant le seuil d’application de la taxe et propose à cet effet un taux qui devrait pouvoir être accepté. Monsieur le ministre, je vous encourage donc à tenir très fermement vos propositions et à les durcir encore. Nous serons tous d’accord pour privilégier l’intérêt général.

M Martial Saddier. La préoccupation du rapporteur pour avis quant au fléchage du produit de la taxe me semble justifiée.

Cependant, dans certaines zones de notre pays, la pression foncière est désormais inqualifiable, en particulier dans les zones touristiques et dans celles qui produisent des produits sous signe de qualité. Ainsi, pour la production laitière, les modifications du cahier des charges imposeront désormais que 70 % de l’alimentation en fourrage et en aliments concentrés aient pour origine la zone de l’appellation, ce qui a des incidences considérables. Plus nous multiplierons les outils limitant la consommation de l’espace, plus nous aurons de chances de lutter contre ce phénomène qui, s’il est largement reconnu depuis une trentaine d’années, semble difficile à enrayer.

Je soutiens donc la mise en place de l’Observatoire proposé, qui fournira des éléments chiffrés permettant d’appuyer des raisonnements face aux critiques. Quant à la taxe, si elle n’est pas la panacée, tout au moins sera-t-elle un outil de plus, qui permettra d’alimenter un fonds dédié.

En d’autres termes, je soutiens le rapporteur pour avis dans son souci de fléchage et le ministre dans sa volonté de maintenir ces outils.

M. Philippe Tourtelier. La proposition du projet de loi est excellente et il faudrait plutôt la durcir. Alors que le rapporteur pour avis affirme, dans l’exposé sommaire de son amendement CD 79, que les Français « ne comprendraient pas » cette « atteinte supplémentaire à la libre jouissance du droit de propriété », il me semble plutôt qu’ils ne comprennent pas, aujourd’hui, les injustices qui résultent de l’énorme spéculation due à la pression foncière. De fait, un trait de crayon sur la carte vous fait changer de catégorie, et je connais des agriculteurs dont les fils commencent à travailler en tant qu’agriculteurs eux aussi mais finissent promoteurs immobiliers, tandis que ceux dont les terres sont situées du mauvais côté du trait continuent à être confrontés aux difficultés. Telle est la réalité dans les zones périurbaines.

Quant au rôle de Bercy, je rappelle que les aides viennent aussi des impôts. Dans le cas présent, c’est la profession qui contribue à son propre maintien. Sans outils efficaces, les vœux pieux exprimés dans le cadre du Grenelle pour préserver les terres agricoles ne se réaliseront pas. Les agriculteurs affirment collectivement qu’il faut défendre la profession et permettre aux jeunes de s’installer, mais individuellement, ils souhaitent que le prix de leurs terrains soit multiplié par 10 ou 15. C’est donc un service à leur rendre que de leur donner cette porte de sortie que constitue la taxe permettant l’installation des jeunes agriculteurs – et même de durcir un peu la mesure.

Mme Geneviève Gaillard. Comme mes collègues, je trouve judicieuses les mesures proposées. La taxe ne me paraît cependant pas assez dissuasive. Il me semble du reste que, quel que soit le montant de la taxe, ceux qui veulent vraiment vendre le feront, notamment dans les zones périurbaines. À cette réserve près, je souscris à cette mesure, qui pourrait toutefois être durcie. Peut-être un travail de fond devrait-il être mené entre les collectivités et la profession pour parvenir, notamment à l’aide des SCOT, à maintenir des surfaces agricoles et des agriculteurs sur ces terres.

M. Jean-Marie Sermier. Je suis très favorable à la création de cette taxe qui permettra d’enrayer certaines spéculations. Je souhaiterais cependant m’assurer qu’elle ne s’applique pas, notamment, à des terres qui seraient classées en zones urbaines après le 13 janvier et subiraient un changement de destination du fonds – avec, par exemple, la plantation de vignes ou d’un verger, qui pourraient se traduire par une forte augmentation du prix, alors que les terres resteraient consacrées à des productions agricoles.

M. Serge Letchimy. Le sujet est très important et je serais favorable au durcissement du dispositif. Du reste, si le terrain est rendu constructible, c’est bien que quelqu’un en prend la décision – à savoir, le maire.

Par ailleurs, la spéculation reste la spéculation : le vendeur peut intégrer la taxe dans son calcul et faire néanmoins une bonne affaire.

En outre, il me semblerait préférable de flécher, par un amendement, l’affectation du produit de la taxe. Pour maîtriser le foncier, le maire peut décider de ne pas spéculer sur la spéculation et déclasser les terrains. Par ailleurs, il serait possible de donner la plus grande efficacité possible aux règlements d’urbanisme, par exemple en multipliant les zones agricoles protégées – même s’il est vrai que ces zones n’ont jusqu’ici pas eu beaucoup de résultats.

Il faut donner aux SAFER les moyens financiers de procéder à des acquisitions, afin de leur permettre de lutter contre la spéculation sur le foncier devenu constructible. J’espère que l’amendement que j’ai déposé en ce sens n’a pas été jugé irrecevable au titre de l’article 40.

Nous nous acheminons vers des catastrophes différenciées selon les zones. Outre les spéculations évoquées tout à l’heure, on assiste aux Antilles à une spéculation liée aux fermes photovoltaïques, qui fait perdre environ 1 000 hectares de terres agricoles par an. Ces terres, qui représentaient 60 000 hectares voilà une vingtaine d’années, n’en couvrent plus que 27 000. Dans peu de temps, elles auront totalement disparu.

Je regrette profondément que les départements d’outre-mer fassent, une fois encore, l’objet d’un traitement par ordonnances. Monsieur le rapporteur pour avis, j’espère qu’en dehors des quelques points traités de la sorte, le reste du texte s’applique à la Martinique, à la Guadeloupe, à la Guyane et à la Réunion. La politique agricole de l’outre-mer est un problème de fond, qui ne saurait être réduit à quatre points traités par ordonnances.

M. Jean-Marc Lefranc. Élu d’une circonscription littorale du Calvados, je suis très favorable à l’instauration de cette taxe. En effet, la rareté faisant la cherté, les jeunes agriculteurs considèrent toujours que les terrains agricoles sont trop chers. La carrière d’un agriculteur comporte trois étapes : l’installation, où l’on veut payer les terrains le moins cher possible, l’agrandissement, puis la cessation d’activité, où l’on veut vendre le plus cher possible et où l’on est très heureux si les terrains sont constructibles.

Je souhaiterais que le produit de la taxe soit aussi fléché pour venir en aide aux agriculteurs touchés par les périmètres de captage et de protection. La taxe est en tout cas indispensable. Au demeurant, rien n’oblige jamais un cultivateur à vendre ses terrains.

M. Jérôme Bignon. Présidant un établissement public foncier – le Conservatoire du littoral –, je puis affirmer que la gestion du foncier est très difficile, car elle touche à la terre, qui est chose rare et à quoi nos compatriotes sont toujours très attachés. Sur cet élément d’intérêt général, au sens noble du terme, qu’est la mise à disposition de terres destinées à produire de l’alimentation, nous devons être particulièrement attentifs. Au cours des travaux préparatoires à la LMA menés par M. Bernard Chevassus-au-Louis, il était clair que le sujet était fondamental, à l’essence même d’une certaine forme d’agriculture. Sans foncier, il sera difficile de lutter contre une agriculture productiviste et de demander aux agriculteurs des efforts pour limiter l’intensité des intrants employés.

Le dispositif proposé est un premier pas dans une bonne direction, mais il sera sans doute insuffisant. L’Observatoire est essentiel. Quant à la commission départementale, je regrette qu’elle ne rende pas d’avis contraignant, et cela d’autant plus que sa saisine n’est que facultative. Une saisine systématique aurait permis de nourrir l’Observatoire d’une réflexion de fond sur la situation foncière du département, afin de favoriser une prise de conscience des conséquences de la diminution du foncier.

S’il est vraisemblable que, comme cela a été dit, la taxe ne modifie pas l’intention de vendre, elle est au moins un signal envoyé aux spéculateurs. Ce signal doit être assez fort pour être crédible, sans reporter le poids de la taxe sur le consommateur final.

L’Observatoire et la commission devraient nourrir notre réflexion afin que, dans deux ou trois ans, nous puissions faire un point sur la question. Les trois éléments sont essentiels au dispositif, et le retrait de l’un des trois ruinerait l’efficacité de l’ensemble.

M. le président Christian Jacob. Je partage la remarque de Serge Letchimy. Les maires sont les premiers responsables : c’est aux élus municipaux de faire preuve de courage lors de l’établissement des PLU.

Mieux qu’une taxe nouvelle, le meilleur outil contre l’artificialisation et en faveur de l’agriculture est un travail solide, lors de l’élaboration des PLU, pour préserver la vocation des sols.

Les jeunes agriculteurs ont aussi besoin de propriétaires fonciers bailleurs. Nous devons y veiller. Financer à la fois une reprise d’installation et l’achat du foncier est très coûteux. Or, aujourd’hui, louer des terrains agricoles peut relever du sacerdoce. Très nombreux sont les bailleurs à qui leurs biens ne rapportent rien. Pourquoi ces propriétaires ne pourraient-ils pas rêver ? Le classement en terrain à bâtir d’une partie du sol peut remédier partiellement à cette très faible rentabilité.

Monsieur le rapporteur pour avis, même si je suis sensible à votre argumentation, ne pourriez-vous pas retirer votre amendement en échange d’une mesure concrète en faveur des jeunes agriculteurs ? Beaucoup l’ont souligné, la proposition du texte de favoriser l’installation des jeunes agriculteurs n’a pas de portée juridique. Une mesure clairement identifiée, d’un montant à peu près équivalent à la recette prévue pour la taxe, est nécessaire.

La loi doit aussi inclure une mesure en faveur des bailleurs. J’ai vécu cette expérience, beaucoup d’agriculteurs deviennent propriétaires malgré eux, pour conserver leur outil d’exploitation, parce que, par exemple, lors d’une succession, le foncier est vendu pour faire face aux charges. Le coût de l’installation peut en être accru de façon déraisonnable.

M. Jean Lassalle. Je suis tout à fait d’accord avec le ministre sur la taxation.

Autour du patrimoine et de la terre, ne faudrait-il pas réinstaurer une forme de dialogue perdue ? Le législateur légifère, les avocats plaident, les spéculateurs spéculent, et, comme l’a dit notre collègue, les âges de la vie font le reste. Si nous voulons que notre société change en profondeur, nous devons retrouver la clé du langage et dégager les moyens humains d’une intelligence de la réflexion et de la discussion. Aucune loi n’empêchera les spéculateurs forcenés ou l’homme désespéré de vendre au soir de sa vie.

Faut-il que des dispositifs soient mis en place par l’État ou le département, en liaison avec la chambre d’agriculture ? En tout cas, une action doit rendre leur conscience aux pauvres êtres que nous sommes devenus.

Je souhaite aussi attirer l’attention sur l’action des parcs nationaux. Détenant nombre de territoires, y compris dans la circonscription dont je suis l’élu, ils empêchent avec une efficacité aussi terrible que des spéculateurs fonciers des agriculteurs de continuer leur activité. Monsieur le président, vous qui êtes un rural passionné, nous devons traiter de ce point.

M. le ministre. Merci pour ces observations.

Monsieur Sermier, bien sûr, en cas de transfert vers une autre activité agricole, la taxe ne s’appliquera pas. La valorisation dépend en effet de la pratique agricole.

Monsieur Le Nay, la taxe s’applique au premier transfert avant équipement du terrain, donc au terrain nu.

Plus généralement – vous l’avez dit – un peu vaut toujours mieux que rien. Le dispositif actuel de protection de la vocation agricole des terres est indigent. Le nouveau, à trois étages, très bien décrit par le rapporteur, instaure un dispositif d’observation, l’émission d’un avis et l’établissement d’une barrière financière. La spéculation n’est pas acceptable.

Vous avez raison, monsieur Tourtelier, entre l’intérêt des agriculteurs pour la protection des terres agricoles et l’arrière-pensée, jamais très lointaine, d’une possible culbute financière à l’occasion d’une vente, la profession est schizophrène. Cette attitude rend compte de l’essentiel des divergences entre les propos que j’entends parfois dans mon bureau et l’appel très fort de la profession à une préservation des terres agricoles.

La pression foncière, chacun l’a dit, est de plus en plus forte, notamment à proximité des grandes villes, ou, comme Martial Saddier et Jean-Marc Lefranc l’ont signalé, dans les régions touristiques. Dans le Calvados ou en Haute-Normandie, à proximité du Havre ou encore dans les zones plus touristiques de l’Eure, elle devient insupportable pour les agriculteurs. La fermeté est donc indispensable. Pouvons-nous aller aussi loin que le propose André Chassaigne ? Si je suis ouvert aux propositions, je pense cependant que le dispositif est équilibré. Le temps nous dira s’il est suffisamment efficace. L’Observatoire nous permettra de repérer exactement le rythme de disparition des terres agricoles non pas à l’échelon national – comme aujourd’hui – mais départemental ou régional. Nous pourrons ainsi savoir si les objectifs fixés dans l’exposé des motifs sont ou non tenus.

Cela dit, quel que soit le caractère crucial sur le plan économique de cette disparition, la question est avant tout celle du modèle que nous voulons défendre.

Je suis tout à fait opposé à un modèle fondé sur le regroupement de très grandes exploitations, à la production massive, sur certains points du territoire ; seraient ainsi institués des sortes de ghettos ruraux. Je défends mordicus, au contraire, le modèle français d’exploitations agricoles réparties partout sur le territoire. La défense de ce modèle suppose cependant la valorisation des circuits courts – c’est l’un des objets du projet de loi – ou encore le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs, qui est l’objet de la taxe.

Je le rappellerai lors du débat en séance publique, la pression en faveur de l’uniformisation du territoire agricole et du regroupement des exploitations est extraordinairement forte. Le président Christian Jacob le sait mieux que quiconque, pour l’Île-de-France notamment. C’est aussi le choix de certains de nos concurrents en Europe. Il nous faut défendre notre modèle agricole.

En réponse aux observations du président et du rapporteur pour avis, je concède que nous devons améliorer le texte. Je vois dans l’amendement de Christian Patria un appel en ce sens. Le Gouvernement est prêt à flécher l’affectation des fonds de manière plus précise, comme l’ont demandé à la fois M. Serge Letchimy, le président Christian Jacob et le rapporteur pour avis. Je vous propose donc de travailler à un amendement affectant de façon beaucoup plus explicite et précise le produit de la taxe aux jeunes agriculteurs.

Nous sommes également favorables à la proposition du président Christian Jacob d’une mesure en faveur des bailleurs.

M. le rapporteur pour avis. Il y a quinze ans, lors que j’étais président de la chambre d’agriculture du département dont je suis l’élu, une ville nouvelle devait être créée. En tant que syndicaliste agricole, je m’y suis vigoureusement opposé lors d’une réunion. Trois cent personnes qui y assistaient m’ont soutenu et ont voté en ce sens. Pour autant, à la sortie de la réunion, chacun venait me voir pour demander à quel prix les terrains pourraient être vendus…

J’accepte les propositions du président et du ministre. Je retire mon amendement, espérant que nous pourrons trouver dans les semaines qui viennent les éléments d’un consensus.

M. Serge Letchimy. Monsieur le ministre, merci de ne pas oublier les SAFER.

L’amendement CD 79 est retiré.

M. le président Christian Jacob. Je vous remercie, Monsieur le Ministre, d’être venu devant notre Commission pour le début de ses travaux.

(Le ministre quitte la commission)

La Commission examine ensuite l'amendement CD 90 de M. Franck Marlin.

M. Franck Marlin. Nous souhaitons, à travers la constitution d’un fonds, remédier au handicap périurbain – prix du foncier, morcellement des terrains, tracés contraignants, difficultés de circulation –, auquel les agriculteurs d’Île-de-France sont particulièrement soumis.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable, malgré mon accord sur le fond. À chaque zone, ses difficultés spécifiques. Pour réelles qu’elles soient, les contraintes périurbaines ne sont pas plus délicates à surmonter que celles des zones très rurales. Nous ne devons pas entrer dans des logiques de spécificité.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CD 30 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Dans certaines régions, le prix du terrain, même s’il n’est pas exorbitant, peut permettre une forme de spéculation. Nous souhaitons éviter des effets d’aubaine que pourrait créer le morcellement de terrains afin de ne pas dépasser le plafond de 15 000 euros.

M. le rapporteur pour avis. Le risque de morcellement est assez peu crédible. Un nouvel usage est nécessaire. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine alors l’amendement CD 31 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Nous souhaitons instituer pour la taxe un taux de 50 %, uniforme et véritablement dissuasif.

M. le rapporteur pour avis. Ce taux est manifestement excessif. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement CD 32 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. M’étant douté que le taux de mon amendement précédent serait considéré comme excessif, je propose raisonnablement de remplacer pour le rapport entre le prix de cession et le prix d’acquisition la proportion de 10 par celle de 5, et de fixer le taux à 30 %.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes motifs.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l’amendement CD 91 de M. Franck Marlin.

M. Franck Marlin. C’est sur les plus-values – considérables – réalisées par les aménageurs que la taxe doit être assise.

M. le rapporteur pour avis. Si je partage en partie le point de vue de notre collègue, je rappelle que nous venons de trouver un accord avec le ministre. À l’occasion de l’examen prévu en application de l’article 88, nous devrions améliorer le texte par le dépôt d’un amendement sur la taxe. La démarche d’aide aux jeunes agriculteurs doit être beaucoup plus explicite et ciblée, et je propose que la taxe soit partagée entre le vendeur et l’aménageur. Je vous suggère donc, mon cher collègue, de retirer votre amendement.

M. Philippe Tourtelier. Au moment de la vente, l’aménageur n’est pas forcément connu.

M. le président Christian Jacob. En effet. La question mérite d’être travaillée de nouveau.

M. Philippe Tourtelier. La procédure de l’article 88 doit permettre un examen sérieux. Il ne faut pas reproduire la discussion des amendements au projet de loi « Grenelle ».

M. le président Christian Jacob. C’est devant la Commission des affaires économiques qu’aura lieu la discussion des amendements en application de l’article 88.

M. le rapporteur pour avis. Les propositions du ministre et du président de la Commission font l’objet d’un large consensus. Conservons-le pour établir des dispositions crédibles pour tous.

M. Jean-Paul Chanteguet. Nous n’avons pas tous compris la nature dudit consensus.

M. le président Christian Jacob. En contrepartie du maintien de la taxe, le ministre s’engage en faveur d’une mesure au profit des jeunes agriculteurs, et à une réflexion sur une autre au profit des bailleurs ruraux qui donnent à bail à des agriculteurs.

L’amendement CD 91 est retiré.

Puis la Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 13 sans modification.

*

M. le président Christian Jacob. Mes chers collègues, nous allons examiner maintenant les autres articles du titre III. Nous en revenons à l’article 12 dont l’examen avait été précédemment réservé.

Article 12

(articles L. 111-2-1 [nouveau], L. 112-1, L. 112-1-14 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, articles L. 111-1-2, L. 123-9, L. 124-2 et L. 123-1
du code de l’urbanisme)

Plan régional de l’agriculture durable et préservation
des terres agricoles

*

La Commission est saisie de l'amendement CD 75 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le plan régional de l’agriculture durable a pour vocation la fixation des grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle de l’État dans chaque région en tenant compte des spécificités économiques, sociales, environnementales et territoriales.

Il ne me semble pas utile de fixer dans un texte législatif une liste limitative de ce dont ce plan doit traiter. Le niveau de détail de la deuxième phrase de l’alinéa 3 me semble devoir plutôt porter tort à l’agriculture. Je propose de la supprimer.

M. André Chassaigne. Mon désaccord avec le rapporteur est total.

Tenant compte notamment des débats sur le Grenelle de l’environnement, la phrase apporte des précisions utiles sur les orientations de l’agriculture française. Préciser celles-ci dans un texte de loi est indispensable.

La suppression de la phrase sera aussi interprétée comme un retour en arrière et une prise de position en faveur d’une agriculture non évolutive. L’effet sera très négatif.

M. Jean-Paul Chanteguet. J’en suis d’accord, supprimer cette seconde phrase serait vider de son contenu le plan régional de l’agriculture durable.

Rappeler dans la loi les orientations fixées par les Grenelle I et II est indispensable. La loi pourrait aussi – tel n’est pas le cas – évoquer les exploitations à haute valeur environnementale ; le Grenelle II évoque des possibilités de labellisation.

M. Serge Letchimy. Je suis d’accord avec André Chassaigne et Jean-Paul Chanteguet. Dans le cadre d’une agriculture durable, ce texte présente l’intérêt d’établir un lien entre politiques de développement agricole et de l’environnement. Enlever cette deuxième phrase viderait l’article de son sens.

M. André Chassaigne. Ce serait même une erreur politique grave.

Mme Catherine Quéré. Ce serait un très mauvais signe adressé aux agriculteurs et reviendrait à leur donner l’impression d’une absence d’intérêt pour toute orientation. Nous savons depuis longtemps qu’ils savent s’adapter.

M. le président Christian Jacob. Il faut laisser aux agriculteurs une capacité d’adaptation. Dans mon propre parcours agricole, j’ai changé d’orientation à de multiples reprises. Soyons attentifs à ne pas tracer un cadre trop figé. Prendre en compte l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux suffit à dessiner le cadre général. Un paysan a vocation à s’adapter aux réalités du terrain, pas à reproduire un schéma préétabli.

Si je comprends la philosophie en quelque sorte « planificatrice » de notre collègue André Chassaigne, je pense cependant qu’il faut laisser à l’agriculteur un espace de liberté dans un cadre général.

M. le rapporteur pour avis. Nous ne pourrons pas avancer en créant un tel carcan.

M. Jean-Paul Chanteguet. Le projet de loi n’est pas directif en matière de systèmes de cultures !

Mme Catherine Quéré et M. André Chassaigne. Adopter cet amendement revient à adresser un très mauvais signal.

La Commission adopte l'amendement.

En conséquence, les amendements CD 17 et CD 18 de M. André Chassaigne tombent.

La Commission examine alors l’amendement CD 96 de M. Franck Marlin.

M. Franck Marlin. Cet amendement vise à associer les chambres d’agriculture départementales concernées à l’élaboration du plan régional de l’agriculture durable.

M. le rapporteur pour avis. Certes, s’agissant de plans régionaux, la démarche la plus cohérente est l’association des chambres régionales d’agriculture. Toutefois, par expérience, je pense que les chambres d’agriculture les plus au fait des dossiers sont les chambres départementales. Avis favorable.

La Commission adopte l'amendement, le groupe SRC s’abstenant.

Elle examine ensuite l’amendement CD 61 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer la problématique des trames verte et bleue. La concurrence s’exacerbe entre le monde environnemental et le monde agricole pour l’usage des sols. Je souhaite que l’ensemble des interlocuteurs, et donc les associations agréées au titre de l’article L. 141-1 du code de l’environnement, soient associés le plus en amont possible à l’élaboration des plans. Les arbitrages pourront en être effectués d’autant plus finement.

M. le rapporteur pour avis. Malgré mon accord sur le fond, mon avis est plutôt défavorable. Il me parait préférable de laisser toute sa place à la réflexion que prépare aujourd’hui notre collègue Bertrand Pancher sur la « grenellisation » des instances de gouvernance.

M. Serge Letchimy. Je suis très surpris de cette analyse du rapporteur. La démarche est la même que celle qui a conduit à la suppression d’une partie de l’article. C’est au contraire la « dégrenellisation » !

L’amendement me paraît excellent. J’en ai moi-même déposé deux allant dans le même sens. Faire sortir du tour de table ceux qui participent à une dynamique de participation, de proposition, de contradiction serait ôter tout sens à la philosophie du Grenelle. Laminer, comme vous le faites, la présence de ces acteurs chaque fois que possible pose une question de conscience.

M. le rapporteur pour avis. Je veux bien retenir l’amendement. Cependant, alors que Bertrand Pancher mène une réflexion globale, nous risquons d’oublier certaines instances en légiférant ainsi.

M. Martial Saddier. Là où la pression foncière est extrêmement forte – comme dans le département dont je suis l’élu – le monde agricole sera bien content de trouver des alliés. Les associations environnementales en feront partie ; nous ne sommes pas là dans le domaine des oppositions entre les mondes environnemental et agricole en matière de produits phytosanitaires !

Là où la pression foncière n’existe pas, non seulement la présence des associations environnementales n’est pas nécessaire pour l’élaboration des plans, mais ceux-ci ne sont même pas utiles. En revanche, là où la pression est insoutenable, créer une union sacrée, autour de la table, entre les élus qui souhaitent la maîtriser, les représentants de l’État, le monde agricole et le monde environnemental sera bienvenue.

Par ailleurs, retrouverons-nous à l’avenir une nouvelle « fenêtre de tir » législative ?

M. le président Christian Jacob. L’article traite non pas de la gestion du foncier mais des orientations de la politique agricole.

M. Philippe Tourtelier. Je retiens de mon expérience de l’élaboration du SCOT de Rennes que, avec le monde agricole, nous n’avons réussi à établir des « coupures vertes » entre les communes qu’après avoir compris la nécessité de nous doter d’alliés économiques objectifs. Pour contrer les promoteurs en zone périurbaine, il faut une agriculture forte. L’argument est très solide.

Mme Cartherine Quéré. Adopter l’amendement, c’est aider la profession.

M. le rapporteur pour avis. Avis favorable à l’amendement.

La Commission adopte l'amendement à l’unanimité.

Elle examine ensuite l’amendement CD 20 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Il s’agit d’appliquer les principes du Grenelle de l’environnement au plan régional de l’agriculture durable.

Après avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 5 de M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Cet amendement est de cohérence. Il paraîtrait raisonnable que, dans les régions monodépartementales d’outre-mer, ce soit le conseil régional qui conduise les plans régionaux de l’agriculture durable et non le préfet.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. La responsabilité du plan doit être assumée par l’État.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD 21 de M. André Chassaigne

M. André Chassaigne. Cet amendement vise à compléter les missions de l’Observatoire en précisant qu’il remet chaque année au Parlement un rapport faisant état des propositions pour parvenir à limiter de moitié la consommation annuelle des espaces agricoles d’ici à 2015.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable : l’Observatoire a vocation à présenter au public la synthèse de ses observations.

M. André Chassaigne. Et non pas à élaborer des propositions ?

M. le rapporteur pour avis. Non. L’Observatoire a pour vocation d’observer. Donner un avis est non de son ressort, mais de celui de la commission départementale. L’esprit de la loi suppose le respect des trois échelons.

La Commission rejette l'amendement.

L’amendement CD 97 de M. Franck Marlin est retiré par son auteur.

La Commission examine l'amendement CD 76 rectifié du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le rôle de la commission départementale de consommation des espaces agricoles sera crucial. Je souhaite qu’elle donne un avis y compris en cas d’existence d’un SCOT – je défendrai un amendement en ce sens. Présidée par le représentant de l’État dans le département, elle doit associer des représentants des collectivités territoriales, de l’État, de la profession agricole, des propriétaires fonciers et des associations agréées de protection de l’environnement. Nous souhaitons y ajouter les notaires. En revanche, il n’est pas utile de citer spécifiquement les fermiers et métayers, concernés ipso facto en tant que membres de la profession agricole.

Le Sénat a ajouté des représentants de la transformation et de la distribution. Or ils n’ont rien à faire au sein de cette commission, non plus que les consommateurs. C’est à ceux qui connaissent le terrain de donner un avis. Pour que son travail soit positif, la composition de la commission ne doit pas être excessivement élargie.

M. Jean Lassalle. Votre proposition me sied d’autant plus, monsieur le rapporteur pour avis, qu’elle va dans le sens d’une de mes propositions précédentes. Il faudrait peut-être que la commission soit coprésidée par le président du conseil général ou de la chambre d’agriculture.

M. le rapporteur pour avis. Ces instances sont déjà représentées.

M. Jean Lassalle. Il faudrait par ailleurs renforcer la représentation du monde rural.

M. Serge Letchimy. Il faudrait en effet qu’un représentant des collectivités locales copréside cette commission, étant donné leurs compétences en matière d’aménagement du territoire et de développement économique.

Le nom de « commission de la consommation des espaces agricoles » me semble par ailleurs inopportun en ce qu’il paraît prôner cette consommation, alors qu’il s’agit au contraire de lutter contre elle.

Enfin pourquoi les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER, ne sont-elles pas représentées dans cette commission, alors que ce sont elles qui sont chargées de préempter les terres agricoles en faveur des jeunes agricultures ?

M. le rapporteur pour avis. Les compétences de la SAFER n’ont rien à voir avec cette commission : la SAFER est un instrument de préemption des terres, alors que la mission de la commission est d’informer.

M. le président Christian Jacob. La SAFER est un outil d’intervention, qui a la charge de préempter les terres, soit pour en réviser le prix, soit en faveur de l’installation des jeunes agriculteurs ou de la réinstallation d’agriculteurs expropriés.

M. Philippe Tourtelier. La SAFER est la seule à disposer d’informations en temps réel sur le « stock » des terres à disposition ou sur l’évolution de leur prix. Comment la commission pourrait-elle assurer l’objectif de préservation des terres agricoles sans disposer de ces informations ?

M. le rapporteur pour avis. Dans le système que nous mettons en place aujourd’hui, c’est à l’Observatoire qu’il reviendra de donner les informations chiffrées. La commission départementale n’a pas de compétences en matière d’aménagement foncier ou d’installation d’agriculteurs : sa mission est d’informer les collectivités. Quant à l’information sur le marché foncier, c’est précisément pour cette raison que la présence des notaires est utile.

M. Jean-Paul Chanteguet. Je suis très surpris de voir que les propriétaires fonciers et les notaires sont représentés au sein d’une commission chargée de se prononcer sur le changement d’affectation de terres agricoles, les uns et les autres étant juge et partie en la matière. Un propriétaire peut trouver un bénéfice dans le classement de son terrain en zone constructible. Quant aux notaires, ils ont tout intérêt à favoriser le changement d’affectation de terres dont la vente leur vaudra des honoraires.

M. Jérôme Bignon. Il est vrai qu’il y a là un risque de conflit d’intérêts. Par ailleurs, je m’interroge d’autant plus sur la suppression de la représentation des consommateurs, alors que ce sont eux qui sont affectés, à long terme, par le changement d’affectation des terres agricoles.

M. André Chassaigne. Par ce qu’il ajoute autant que par ce qu’il supprime, cet amendement est révélateur en ce qu’il confirme la « dégrenellisation » de la majorité. En effet, la présence des consommateurs encouragerait la mise en place d’une autre agriculture à proximité des villes. La filière agricole ne se réduit pas aux propriétaires fonciers et aux notaires.

M. le rapporteur pour avis. Je maintiens une proposition qui est le fruit d’un long travail et de nombreuses auditions. Il a bien fallu trancher : tout le monde ne peut pas être représenté.

La Commission adopte l’amendement CD 76 rectifié. En conséquence, les amendements CD 98 de M. Franck Marlin et CD 19 de M. André Chassaigne n’ont plus d’objet.

L’amendement CD 85 de M. Franck Marlin est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD 6 de M. Serge Letchimy.

M. le rapporteur pour avis. Les dispositions relatives à l’outre-mer figurant à l’article 24, qui est hors du champ de saisine de notre commission, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. Serge Letchimy. Je n’accepte pas ce type de réponse. L’adaptation aux spécificités de l’outre-mer prévue par l’article 24 ne concerne que quelques points très précis, explicitement cités, et non l’ensemble du texte. Il faudrait proposer une autre rédaction pour cet article, qui prévoirait que toutes les dispositions du texte feront l’objet d’une ordonnance. En outre, cette adaptation ne concerne pas la Nouvelle-Calédonie.

M. le président Christian Jacob. C’est la raison pour laquelle votre amendement doit être présenté au titre V, qui traite des « dispositions particulières aux outre-mer ».

M. Serge Letchimy. Le cinquième et le neuvième alinéa de l’article 24 renvoient à l’article 12, et c’est pourquoi je propose de modifier directement cet article, comme je proposerai des amendements aux articles 19 à 21, auxquels le texte de l’article 24 renvoie également. Hormis les dispositions de ces articles et celles relatives à la composition et aux missions des chambres d’agriculture, aucune disposition spécifique n’est prévue pour l’outre-mer, qui ne fera donc l’objet d’aucun débat.

M. le rapporteur pour avis. Je ne suis rapporteur pour avis que pour les dispositions relevant du titre III. Le titre V prévoit bien d’adapter la composition et les compétences de la commission départementale dans les départements d’outre-mer et à Mayotte.

M. Serge Letchimy. Ce n’est pas à vous, monsieur le rapporteur pour avis, que cette observation s’adresse : c’est au ministre que je reproche le vide de cette loi concernant l’outre-mer. On ne peut pas laisser un million de Français sans politique agricole claire : les problèmes agricoles de l’outre-mer ne se réduisent pas à la composition de la chambre d’agriculture. Je suis prêt à travailler avec vous pour remédier à ce qui risque d’apparaître comme du mépris.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD 62 de M. Martial Saddier.

M. le rapporteur pour avis. La composition des SAFER est une boîte de Pandore que nous ne comptons pas rouvrir. Donc avis défavorable.

L’amendement CD 62 est retiré.

Elle examine ensuite quatre amendements, CD 1 de Mme Fabienne Labrette-Ménager, CD 63 et CD 64 de M. Martial Saddier et CD 78 du rapporteur pour avis, pouvant être soumis à une discussion commune.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Le schéma de cohérence territoriale, SCOT, engageant l’avenir des terres agricoles, doit être soumis à l’avis de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles. Il convient par ailleurs d’encadrer cet avis dans un délai déterminé – de trois mois en l’espèce.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement est satisfait par mon amendement CD 78.

M. Martial Saddier. L’amendement de Mme Labrette-Ménager a l’avantage d’être plus précis que les deux autres, notamment en ce qu’il enferme la saisine dans un délai et prévoit que l’absence de réponse vaut acceptation, deux points de procédures qui me paraissent essentiels.

M. le rapporteur pour avis. Je vous propose de compléter mon amendement par la phrase suivante : « Cette commission rend son avis au plus tard un mois à compter de sa saisine. À défaut, cet avis est réputé favorable. » Il me paraît nécessaire de réduire le délai car il ne faudrait pas transformer cette commission en machine à bloquer les permis de construire.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Se réunira-t-elle dans l’urgence ?

M. le rapporteur pour avis. En tout cas, elle ne pourra pas se réunir pour chaque dossier.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Ce délai de un mois me paraît un peu juste.

M. Philippe Tourtelier. Un SCOT ne s’élabore pas en un mois, mais parfois en une année.

M. Martial Saddier. Je retire mes amendement CD 63 et CD 64 pour me rallier à celui du rapporteur pour avis, tel qu’il vient de le rectifier.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Je retire l’amendement CD 1 pour me rallier à l’amendement du rapporteur pour avis, que je souhaite cosigner.

Les amendements CD 1, CD 63 et CD 64 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CD 78 rectifié.

L’amendement CD 87 de M. Franck Marlin est alors retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CD 59 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Puisque la commission départementale de la consommation des espaces agricoles peut être appelée à se prononcer sur tout ce qui pourrait contribuer à réduire les surfaces agricoles, elle doit aussi se prononcer sur le Plan local d’urbanisme.

M. le rapporteur pour avis. Votre amendement est satisfait par l’amendement précédent.

M. Martial Saddier. Le SCOT étant opposable au PLU, en se prononçant sur le SCOT, la commission se prononce de fait sur le PLU.

M. Jean-Marie Sermier. Et pour les communes qui ne sont pas soumises à un SCOT ?

M. le président Christian Jacob. La loi prévoit ce cas dans son article 12.

L’amendement CD 59 est retiré.

L’amendement CD 86 de M. Franck Marlin est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CD 88 de M. Franck Marlin.

M. Franck Marlin. Cet amendement vise à permettre aux maires de « faire la chasse » aux faux agriculteurs.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable, une précision excessive en ce domaine risquant de se retourner in fine contre les agriculteurs.

Mme Catherine Quére et M. le président Christian Jacob : C’est tout à fait vrai !

L’amendement CD 88 est retiré.

L’amendement CD 89 de M. Franck Marlin est également retiré.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 ainsi modifié.

Après l’article 12

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 12. Elle examine d’abord l’amendement CD 16 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je présenterai en même temps les amendements CD 25, CD 23, CD 24 et CD 28.

L’amendement CD 16 propose de préciser que la SAFER informe à titre gratuit les maires de toutes les déclarations d’intention d’aliéner portant sur des biens situés sur le territoire de leur commune.

Pour éviter de reproduire les problèmes que nous avons rencontrés avec les éoliennes, l’amendement CD 25 prévoit la création de zones de développement du photovoltaïque au sol.

L’amendement CD 23 tend à réduire la consommation annuelle des espaces agricoles. L’amendement CD 24 vise à éviter que la surface agricole utile ne soit menacée par l’installation de centrales photovoltaïques.

Enfin, l’amendement CD 28 tend à ce que le projet de loi prenne en compte la question des retraites agricoles. On a déjà déposé des cavaliers moins acceptables que celui-ci.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. L’amendement CD 16, qui me semble inutile, entraînerait une charge supplémentaire pour les maires.

M. André Chassaigne. Il permettrait à la SAFER de prendre une part plus grande dans la politique volontariste que nous souhaitons mener contre l’émiettement foncier.

M. le rapporteur pour avis. Si elle le souhaite, elle peut déjà y prendre part.

M. Philippe Tourtelier. L’amendement lui imposerait de le faire, alors qu’elle n’y est pas tenue aujourd’hui. La collectivité territoriale doit être informée des mutations, quand il faut procéder à des échanges de terrains agricoles.

La Commission rejette l’amendement CD 16.

La Commission est saisie de l’amendement CD 25 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Il convient d’éviter toute position extrême. J’étais a priori favorable à l’interdiction du photovoltaïque au sol, mais je me suis laissé convaincre qu’il ne fallait pas « fermer la porte ». Des installations de ce type sont prévues à la Réunion, et le ministère nous assure qu’elles sont justifiées. D’autres peuvent être mises en place lorsqu’on reconvertit certains terrains dont on ne fait rien actuellement, par exemple dans les zones classées Seveso.

M. Serge Letchimy. Je crains qu’on n’entretienne ainsi une spéculation qui s’exercera au détriment des terres agricoles. Il faut organiser une politique de développement des énergies renouvelables, qu’il s’agisse de géothermie, d’éolien ou d’énergie thermique des mers. Pour le photovoltaïque, déterminons des lieux où l’on installera des panneaux. Mieux vaut le faire sur des terres incultes que sur les terres agricoles, qui, surtout quand elles sont rares, méritent d’être protégées.

Si nous n’agissons pas, certains exerceront du lobbying pour profiter des mesures de défiscalisation et, demain, le Parlement annulera notre décision en nous accusant d’avoir créé une niche fiscale. Puisque 30 % du réseau d’EDF peut accueillir de l’énergie alternative, pour un total de 60 mégawatts, à quoi bon prévoir des projets susceptibles de produire 200 mégawatts, qui annexeront 700 hectares ? Je ne suis pas hostile à toute installation photovoltaïque, mais il faut définir une stratégie précise. À cette fin, je propose que M. Chassaigne et moi-même réfléchissions à une nouvelle rédaction de l’amendement.

M. le président Christian Jacob. Le terme de « paysage » pose également problème, car il est trop vague. Je vous suggère, monsieur Chassaigne, de retirer l’amendement en attendant une rédaction plus précise.

M. André Chassaigne. Je retire l’amendement et accepte la proposition de M. Letchimy. Je remarque au passage que les arguments du rapporteur pour avis justifient mes propositions. Si nous ne voulons pas rencontrer avec le photovoltaïque les mêmes difficultés qu’avec l’énergie éolienne, il faut délimiter des zones dédiées en tenant compte de toutes les données. Nous présenterons une nouvelle rédaction de l’amendement lors de la réunion qui se tiendra au titre de l’article 88.

M. Jean-Paul Chanteguet. Je fais remarquer que l’alinéa 20 de l’article 12 conditionne l’implantation d’installations photovoltaïques au maintien, sur le terrain où elles sont implantées, d’activités agricoles, pastorales et forestières.

M. Jérôme Bignon. Certes, mais l’amendement pose un problème plus large.

L’amendement CD 25 est retiré.

La Commission examine l’amendement CD 23 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Il est satisfait par l’article 12.

M. André Chassaigne. Dans ces conditions, je le retire.

L’amendement CD 23 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD 24 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je le retire également.

L’amendement CD 24 est retiré.

Puis, la Commission est saisie de l’amendement CD 28 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. La question des retraites du secteur agricole n’est pas à l’ordre du jour.

La Commission rejette l’amendement.

Article 12 bis

(article L. 311-3 du code rural et de la pêche maritime)

Insertion du nom de l’exploitation dans le fonds agricole

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 bis sans modification.

M. le président Christian Jacob. Je rappelle que l’article 13 a déjà été examiné. Nous continuons donc l’examen du texte par l’article 13 bis.

Article 13 bis

(article L. 411-3 du code rural et de la pêche maritime)

Application du statut de fermage à de petites parcelles

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 bis sans modification.

Article 13 ter

(article 793 du code général des impôts)

Exonération des droits de mutation à titre gratuit pour les parts de groupements fonciers agricoles qui ont été détenues par une société civile
de placement immobilier

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 ter sans modification.

Article 13 quater

Rapport sur l’état des biens de section

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 quater sans modification.

Article additionnel après l’article 13 quater

(article 6 du code des marchés publics)

Possibilité de demander une provenance ou une origine spécifique
dans les marchés de restauration collective

*

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 13 quater. 

Elle examine d’abord deux amendements considérés comme identiques, l’amendement CD 80 du rapporteur pour avis et l’amendement CD 95 de M. Franck Marlin.

M. le rapporteur pour avis. Je propose à M. Marlin de cosigner mon amendement, qui reprend sa proposition. Celui-ci repose sur un constat de bon sens : il faut donner aux collectivités la possibilité de faire manger aux élèves des produits locaux. Reste que l’amendement sera probablement rejeté, au motif qu’il contrevient au droit communautaire.

M. Franck Marlin. Je retire l’amendement CD 95 et accepte de cosigner l’amendement CD 80.

M. le président Christian Jacob. La rédaction me paraît bonne : la mention d’une provenance ou d’une origine déterminée n’implique pas que le choix se fasse sur ce seul critère.

M. Martial Saddier. En cas de rejet, je proposerai un amendement de repli, en mettant l’accent sur la défense d’une agriculture de qualité, à l’instar de l’agriculture biologique, qui est reconnue au niveau européen.

M. Serge Letchimy. Je suis d’autant plus favorable à l’amendement que certaines régions outre-mer importent 85 % de leurs produits alimentaires.

L’amendement CD 95 est alors retiré.

La Commission adopte l’amendement CD 80.

Après l’article 13 quater

*

La Commission examine en présentation commune les amendements CD 92 et CD 93 de M. Franck Marlin.

M. Franck Marlin. L’amendement CD 92 vise à prendre en compte le handicap des exploitations agricoles situées en zones périurbaines, et l’amendement CD 93 les difficultés spécifiques rencontrées par le candidat à l’installation en zone périurbaine.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. La loi est générale et ne peut prendre en compte des spécificités régionales.

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Article 14

Intégration du développement durable et de la biodiversité
dans les missions de plusieurs organismes agricoles,
extension à la méthanisation de la qualification d’activité agricole,
extension du bail environnemental et intégration d’objectifs environnementaux au sein des filières sous signe de qualité

*

La Commission est saisie de l’amendement CD 33 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Le Sénat a introduit dans le texte la notion de stockage de l’eau, qui remet en cause bien des avancées de la loi d’orientation sur l’eau et du Grenelle de l'environnement. Le stockage de l’eau peut aller à l’encontre de la protection des zones humides.

M. le président Christian Jacob. Mieux vaut récupérer de l’eau que d’effectuer des pompages n’importe où.

M. le rapporteur pour avis. Avis très défavorable. La préservation de la ressource en eau passe souvent par son stockage en vue d’une utilisation future. Parfois, il faut retenir l’eau pour préserver le milieu naturel.

Mme Catherine Quéré. Dans ma région, il est important de stocker l’eau, car certains producteurs comme les conchyliculteurs ont besoin d’eau douce pendant l’été.

M. André Chassaigne. Veut-on privilégier la production intensive de maïs ou diversifier la production ? Tout le problème est là.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission en vient à l’amendement CD 65 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. L’amendement, qui propose d’ajouter dans l’alinéa 8 de l’article 14 le terme de « préservation », n’est pas de pure forme. Il souligne l’importance de prendre les problèmes en amont, la prévention étant plus efficace et moins onéreuse que le curatif.

M. le rapporteur pour avis. J’étais défavorable à l’amendement, mais je veux bien me laisser convaincre.

La Commission adopte l’amendement.

Puis, elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 14 

*

La Commission est saisie de plusieurs amendements de M. Serge Letchimy portant articles additionnels après l’article 14. Il s’agit des amendements CD 14, CD 10, CD 11, CD 9 et CD 15, qui font l’objet d’une présentation commune.

M. Serge Letchimy. Ces amendements visent à donner aux SAFER les moyens de s’acquitter de leur mission et à préciser qu’elles peuvent concourir à la préservation de l’environnement.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable aux amendements CD 14, CD 10, CD 11 et CD 9. Nous avons pris pour règle de ne modifier ni le rôle ni la composition des SAFER. En revanche, je serais très favorable à l’amendement CD 15, pour peu que l’on substitue au terme « ou » le terme « et ».

M. Serge Letchimy. J’accepte cette rectification.

La Commission rejette successivement les amendements CD 14, CD 10, CD 11 et CD 9. Puis elle adopte l’amendement CD 15 rectifié.

Article 14 bis

(article L. 411-11 du code rural)

Mode de calcul de l’indice des fermages

*

La Commission est saisie de l’amendement CD 34 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Cet amendement vise à supprimer l’article 14 bis. En effet, nous sommes défavorables à la modification du mode de calcul des fermages.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Fermiers, propriétaires et métayers défendent unanimement le passage d’indices départementaux à un indice national, qui permet de lutter contre les inégalités.

M. André Chassaigne. Je le retire.

L’amendement CD 34 est retiré.

La Commission émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 14 bis sans modification.

Article 15

(articles L. 6, L. 2, L. 4-1 [nouveau], L. 12, L. 221-9, L. 224-6
et L. 124-4-1 [nouveau] du code forestier)

Plan pluriannuel régional de développement forestier

*

La Commission est saisie de l’amendement CD 35 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je présenterai en même temps les amendements CD 36, CD 37 et CD 38. Le texte insiste sur la valorisation économique de la forêt : ces quatre amendements sont relatifs à la gestion durable des forêts.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable à l’amendement CD 35. L’impératif de gestion durable de la forêt apparaît dès l’article L. 1 du code forestier.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la Commission rejette alors successivement les amendements CD 36 et CD 37 de M. André Chassaigne.

La Commission en vient à l’amendement CD 38 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Les directeurs de parc régional ont déjà un accès privilégié au préfet de région.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD 66 de M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Sur le modèle du dispositif que nous avons adopté pour les terres agricoles, l’amendement vise à faire participer les associations environnementales à la préparation du plan pluriannuel régional de développement forestier.

M. le rapporteur pour avis. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la Commission rejette successivement les amendements CD 39 et CD 45 de M. André Chassaigne.

La Commission est saisie de l’amendement CD 67 de M. Martial Saddier.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable.

M. Martial Saddier. Je retire cet amendement.

L’amendement CD 67 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CD 41 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable : les dispositions proposées par cet amendement sont trop précises pour être inscrites dans la loi.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la Commission rejette successivement les amendements CD 43, CD 44, CD 47 et CD 46 de M. André Chassaigne.

Puis elle examine l’amendement CD 48 de M. André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable : un parc naturel régional est un groupement de collectivités territoriales.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine l’amendement CD 69 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. L’amendement vise à permettre la construction de locaux servant à stocker des plaquettes de bois dans l’objectif de leur utilisation énergétique. Le permis de construire ces locaux peut actuellement être refusé, du fait que la production ne bénéficie pas de la dérogation agricole. C’est d’autant plus choquant que des dérogations existent pour les activités marines ou celles liées à l’entraînement des équidés domestiques. Il s’agit donc de définir clairement le caractère agricole de l’activité de production de plaquettes forestières.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable : non seulement les activités liées à la forêt, qui constituent un métier à part, ne relèvent pas de l’agriculture, mais la transformation du bois n’a pas de lien avec la filière sylvicole. Par comparaison, je rappelle que les bouchers ne sont pas des agriculteurs et qu’ils n’appartiennent pas à la filière bovine.

M. Jean-Marie Sermier. Si l’on veut développer les filières de la bioénergie, il faut des lieux de stockage de la biomasse. Dans l’esprit du Grenelle, mieux vaudrait les installer, non près des chaufferies, ce qui obligerait à transporter aussi beaucoup d’eau, mais près des zones de lisières, voire de forêts, en prévoyant pour ces installations les mêmes dérogations que pour les bâtiments agricoles.

M. le président Christian Jacob. On ne peut accorder des permis de construire à une filière industrielle aussi facilement qu’à une exploitation agricole.

M. Martial Saddier. Le bois énergie est en lien direct avec le territoire et la forêt. Stocker des plaquettes concourt à la protection de l’environnement, puisque c’est une condition de la mise en place de la filière biomasse.

M. Jean-Paul Chanteguet. J’indique que l’alinéa 15 de l’article 14 précise que les revenus tirés de la commercialisation de chaleur par la méthanisation sont considérés comme des revenus agricoles, ce qui plaide pour l’adoption de l’amendement CD 69.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 ainsi modifié.

Après l’article 15

*

La Commission est saisie de deux amendements portant articles additionnels après l’article 15.

Article additionnel après l’article 15

Communication des documents de gestion des forêts

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte d’abord l’amendement CD 60 de M. Martial Saddier, prévoyant que les documents de gestion des forêts sont communicables à toute personne sur sa demande et à ses frais.

Puis elle rejette l’amendement CD 49 de M. André Chassaigne, après que le rapporteur eut émis un avis défavorable.

Article 15 bis

*

La Commission est saisie de l’amendement CD 81 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Pour lutter contre le morcellement, le Sénat a prévu que le propriétaire qui souhaite vendre une parcelle de moins de quatre hectares devra prévenir ses voisins. Je propose d’ajouter en leur faveur un droit de préférence qui sera fixé à un prix et à des conditions fixées par le propriétaire initial.

Enfin, le droit de préférence ne s’appliquera pas en cas de succession, de vente au sein d’une même famille ou entre indivisaires, ou encore lorsque l’acquisition est déjà opérée par le propriétaire d’une parcelle voisine.

M. André Chassaigne. L’amendement présente un avantage indéniable en vue du regroupement. Cependant, certaines communes ont inscrit dans leur zonage forestier des zones à reconquérir. Il faut leur laisser la possibilité d’intégrer à l’espace de culture ces zones boisées de petite surface qui se trouvent au milieu de terres agricoles.

M. le rapporteur pour avis. Nous n’avions pas pensé à ce cas particulier.

M. André Chassaigne. Je pourrais fournir des informations sur cette question que je connais bien et qui mérité réflexion. Beaucoup de communes souhaitent limiter ces zones qu’on surnomme des « timbres poste ».

M. Jérôme Bignon. Il faudrait pouvoir combiner les deux systèmes.

M. le rapporteur pour avis. Dans un souci de respect du droit de propriété, le droit de préférence ne s’appliquera pas aux successions ou aux ventes au sein d’une même famille. Mais le problème est réel. Étant agriculteur dans une commune où se trouve une forêt, j’en possède certaines parcelles que je serais incapable de situer précisément. Tout doit être fait pour permettre le regroupement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 bis A ainsi modifié.

Article 15 bis

(articles L. 221-9, L. 222-1, L. 222-6 et L. 223-2 du code forestier)

Ratification de l’ordonnance relative au regroupement du Centre national professionnel de la propriété forestière et des centres régionaux

*

La Commission est saisie de l’amendement CD 50 d’André Chassaigne.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable : la majorité soutient les dispositions de l’ordonnance que cet amendement vise à supprimer.

La Commission rejette l’amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 15 bis sans modification.

Article 16

(article 199 decies H du code général des impôts)

Réduction d’impôt pour le recours à des gestionnaires forestiers professionnels

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 sans modification.

Article 16 bis

(articles L. 261-1 à L. 261-7 [nouveaux] du code forestier, articles 125 A, 157, 199 decies H et 1649-0 A du code général des impôts, article L. 136-7 du code
de la sécurité sociale et L. 221-34 du code monétaire et financier)

Création d’un compte épargne d’assurance pour la forêt

*

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la Commission rejette l’amendement CD 51 de M. André Chassaigne, tendant à supprimer l’article.

La Commission examine ensuite l’amendement CD 82 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Si le compte épargne d’assurance pour la forêt est une excellente chose, la rédaction adoptée par le Sénat risque de conduire au désengagement de l’État. Pour éviter cet écueil, je propose la suppression des alinéas 13 et 14 de l’article 16 bis.

M. le président Christian Jacob. En outre, les forestiers nous ont alertés sur le risque que le fonds d’assurance ne soit jamais utilisé si l’État se désengage.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD 83 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Le dispositif du compte épargne d’assurance pour la forêt est voué à monter en puissance pendant une période de six années. Il serait opportun de commander au Gouvernement la rédaction d’un rapport non seulement dans les trois années suivant la promulgation de la loi, mais à nouveau au terme d’une période de six ans.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 bis ainsi modifié.

Article 17 

Habilitation à prendre par voie d’ordonnance diverses dispositions

*

La Commission examine l’amendement CD 84 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Dans la logique de notre politique sur la forêt, l’amendement tend à favoriser le remembrement de la propriété forestière.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 ainsi modifié.

Article 17 bis

(article L. 510-1 du code rural et de la pêche maritime)

Possibilité de créer par fusion des chambres d’agriculture interdépartementales et interrégionales

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 bis sans modification.

Article 17 ter

(article L. 511-13 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime)

Application du régime juridique des chambres d’agriculture départementales aux chambres interdépartementales

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 ter sans modification.

Article 17 quater

(articles L. 512-3 et L. 512-4 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime)

Application du régime juridique des chambres d’agriculture régionales aux chambres interrégionales et définition des chambres d’agriculture de région

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 quater sans modification.

Article 17 quinquies

(article L. 513-3 du code rural et de la pêche maritime)

Composition de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 quinquies sans modification.

Article 17 sexies

(article L. 514-2 du code rural et de la pêche maritime)

Capacité des chambres d’agriculture de créer des services communs

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 sexies sans modification.

Article 17 septies

(article L. 514-2 du code rural et de la pêche maritime)

Transfert du personnel des chambres d’agriculture en cas de fusion
ou de transfert d’activités

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 septies sans modification.

Article 17 octies

(articles L. 666-2 et L. 666-3 du code rural et de la pêche maritime)

Simplification de la procédure de FranceAgriMer
pour avaliser les négociants en grains

*

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 octies sans modification.

*

* *

Enfin, la Commission émet un avis favorable à l’adoption du titre III ainsi modifié.

fpfp

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CD 1 présenté par Mme Fabienne Labrette-Ménager :

Article 12

Après l’alinéa 18, insérer les quatre alinéas suivants :

1° AA Après la première phrase du I de l'article L. 122-3, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Toute élaboration d'un schéma de cohérence territoriale ayant pour conséquence une réduction des surfaces des zones agricoles est soumise à l'avis de la commission prévue à l'article L. 112-1-14 du code rural. Cette commission rend son avis au plus tard trois mois après sa saisine. À défaut, cet avis est réputé favorable. »

1° AB Après le premier alinéa de l'article L. 122-13, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Toute révision d'un schéma de cohérence territoriale ayant pour conséquence une réduction des surfaces des zones agricoles est soumise à l'avis de la commission prévue à l'article L. 112-1-14 du code rural. Cette commission rend son avis au plus tard trois mois après sa saisine. À défaut, cet avis est réputé favorable. »

Amendement CD 5 présenté par M. Serge Letchimy :

Article 12

Après l’alinéa 8, insérer l’alinéa suivant :

« Dans les régions et département d’outre-mer, ces schémas sont conduits, par le conseil régional. Il associe à la préparation de ce plan les autres collectivités territoriales, le préfet de région et la chambre d’agriculture. »

Amendement CD 6 présenté par M. Serge Letchimy :

Article 12

Après l’alinéa 14, insérer les trois alinéas suivants :

« Dans les régions et départements d’outre-mer, au plus tard dans les 12 mois suivant la publication de la loi n° , chaque commune devra avoir mis en œuvre des zones agricoles protégées.

« Les terres qualifiées dans ces zones agricoles protégées ne pourront être déclassées pendant une durée de 20 ans.

« Après l’adoption de zones agricoles protégées, le plan local d’urbanisme doit être rendu compatible avec ce programme dans un délais d’un an. »

Amendement CD 9 présenté par M. Serge Letchimy :

Article additionnel après l’article 14

« Au premier alinéa de l’article L. 142-6 du code rural, après les mots :

« effectuée par des agriculteurs »,

sont insérés les mots :

« groupements d’agriculteurs, coopératives agricoles ou toutes organisations de producteurs viables ».

Amendement CD 10 présenté par M. Serge Letchimy :

Article additionnel après l’article 14

« Au premier alinéa de l’article L. 141-6 du code rural, après les mots : « dans la décision d’agrément », sont insérés les mots : « après avis du ministre chargé de l’environnement ».

Amendement CD 11 présenté par M. Serge Letchimy :

Article additionnel après l’article 14

« Au second alinéa de l’article L. 141-6 du code rural, après les mots : « de leur zone d’action », sont insérés les mots : « et au moins deux membres représentants des associations de protections de l’environnement ».

Amendement CD 14 présenté par M. Serge Letchimy :

Article additionnel après l’article 14

Après l’article 1589-1 du code civil est inséré un article 1589-1 ainsi rédigé :

« Art. 1589-1 Le dispositif défini à l’article 1589-1 du présent code ne s’applique pas aux promesses unilatérales d’achat souscrites dans les conditions de l’article R 142-1 du code rural, par les candidats à l’attribution d’un bien immobilier par la SAFER ».

Amendement CD 15 rect. présenté par M. Serge Letchimy :

Article additionnel après l’article 14

« À l’alinéa 1 de l’article L.143-10 du code rural, après les mots : « adresse au vendeur », sont insérés les mots : « et à son notaire ».

Amendement CD 16 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel après l’article 12

L’article L. 143-7-2 du code rural est ainsi rédigé :

« La société d'aménagement foncier et d'établissement rural informe à titre gratuit les maires de toutes les déclarations d'intention d'aliéner portant sur des biens situés sur le territoire de leur commune.

Elle peut également informer à titre gratuit dans un délai de quinze jours de toutes les déclarations d’intention d’aliéner portant sur leur territoire les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes de gestion des parcs naturels régionaux ayant engagé des actions en faveur de l’installation agricole et de l’intervention foncière et qui en ont fait la demande, dans les conditions fixées par voie réglementaire. »

Amendement CD 17 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 12

A la fin de la seconde phrase de l’alinéa 3, supprimer les mots : « des projets de stockage de l’eau »

Amendement CD 18 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 12

Compléter l’alinéa 3 par les mots : « et les actions à conduire pour favoriser l’installation et la transmission des exploitations agricoles. »

Amendement CD 19 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 12

A la deuxième phrase de l’alinéa 14, supprimer les mots : « des propriétaires fonciers, »

Amendement CD 20 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article12

Compléter l’alinéa 6 par la phrase suivante :

« Il s’assure, dans cette préparation, de sa compatibilité avec les dispositions des schémas mentionnés aux articles L. 371-3, L. 212-3, et L. 212-1 du code de l’environnement et des schémas régionaux de cohérence écologique. »

Amendement CD 21 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article12

Compléter l’alinéa 11 par les deux phrases suivantes :

« Il remet chaque année au Parlement un rapport d’évaluation des actions engagées par l’État et les collectivités territoriales pour limiter la consommation des espaces agricoles. Ce rapport fait état de propositions pour parvenir à limiter de moitié la consommation annuelle des espaces agricoles d’ici 2015. »

Amendement CD 23 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel après l’article 12

« L’État se fixe comme objectif de réduire de 50 % d’ici 2015 la consommation annuelle des espaces agricoles. L’observatoire de la consommation des espaces agricoles défini à l’article L. 112-1 du code rural et de la pêche maritime remet chaque année un rapport au Parlement évaluant les efforts entrepris pour atteindre cet objectif. »

Amendement CD 24 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel après l’article 12

« Les installations de centrales photovoltaïques au sol sur les espaces naturels, les espaces affectés aux activités agricoles et forestières ou qui peuvent l’être et sur les zones classées « agricoles » ou « naturelles et forestières » par un document d’urbanisme sont interdites. »

Amendement CD 25 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel après l’article 12

« Afin de préserver les terres agricoles, les forêts, les paysages, les sites remarquables et protégés, des zones de développement du photovoltaïque au sol, précisant la puissance installée minimale et maximale sont définies pour chaque département. Ces zones s’intègrent aux schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie.

Seules les centrales solaires au sol intégrées dans le périmètre d’une zone de développement du photovoltaïque peuvent bénéficier du dispositif de l’article 10 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité.

Un décret en Conseil d’État précise les règles d’établissement des zones de développement du photovoltaïque. »

Amendement CD 28 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel Après l’article 12

« Le Gouvernement remet au Parlement avant l’examen du projet de loi relatif à la réforme des retraites un rapport établissant un bilan de la situation des retraités du secteur agricole. Il précise notamment les possibilités offertes par l’instauration d’une cotisation nouvelle assise sur les revenus financiers des entreprises et institutions financières du secteur agricole et agroalimentaire . »

Amendement CD 30 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 13

À l’alinéa 8, après le mot : « expropriation », supprimer la fin de la phrase.

Amendement CD 31 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 13

I. Supprimer l’alinéa 9.

II. Rédiger ainsi l’alinéa 10 :

« IV. Le taux de la taxe est de 30 % ».

Amendement CD 32 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 13

I. À la fin de l’alinéa 9, substituer au chiffre : « 10 », le chiffre : « 5 ».

II. Rédiger ainsi l’alinéa 10 :

« IV. – Le taux de la taxe est de 15 % lorsque le prix de cession du terrain et le prix d’acquisition ou la valeur vénale définis au II est supérieur à 5 et inférieur à 10. Au-delà de cette limite, la part de la plus-value restant à taxer est soumise à un taux de 30 %. »

Amendement CD 33 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 14

À l’alinéa 3, supprimer les mots : « , notamment par une politique de stockage de l’eau ».

Amendement CD 34 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 14 bis

Supprimer cet article.

Amendement CD 35 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

Après le mot : « nationale », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 3 :

« et garantit une gestion durable des forêts. Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent passer des contrats avec l'Etat, notamment dans le cadre des chartes forestières de territoire, en vue de concourir à la mise en oeuvre de cette politique. »

Amendement CD 36 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

Rédiger ainsi l’alinéa 5 :

« Afin d’améliorer la gestion durable des forêts et la production du bois en tenant compte des enjeux écologiques, il est établi dans chaque région un plan pluriannuel régional de développement forestier. Ce plan identifie les massifs forestiers qui justifient, en raison de l’insuffisance de leur exploitation des actions prioritaires pour en assurer une gestion durable. Il répertorie également leurs particularités, notamment les contraintes en terme d’accès. »

Amendement CD 37 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

I. Compléter la deuxième phrase de l’alinéa 5 par les mots : « en tenant compte des enjeux écologiques ».

II. Dans la dernière phrase du même alinéa, après les mots : « du bois », insérer les mots : « en tenant compte des enjeux écologiques identifiés et de la préservation de la biodiversité ».

Amendement CD 38 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

À la seconde phrase de l’alinéa 7, après les mots : « communes forestières », insérer les mots : « , des représentants des Parcs naturels régionaux, ».

Amendement CD 39 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

À la première phrase de l’alinéa 10, après le mot : « forêts », insérer les mots : « des associations de protection de la nature et de l’environnement agréées au titre de l’article L.141-1 du code de l’environnement ».

Amendement CD 41 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

Compléter l’alinéa 20 par la phrase suivante :

« ; classer au moins 4 % de la surface en production de chaque forêt domaniale en îlots de sénescence ; viser un objectif d’au moins 10m3 par hectare de bois morts au sol, dans une gamme d’essences variées afin de créer un maillage cohérent d’îlots de biodiversité reliés par des corridors efficaces ; ».

Amendement CD 43 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

Supprimer l’alinéa 23.

Amendement CD 44 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

I. À l’alinéa 25, après les mots : « usagers de la forêt », substituer au mot : « ou », le mot : « et ».

II. Procéder à la même substitution à l’alinéa 27.

Amendement CD 45 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

À la première phrase de l’alinéa 19, après le mot : « territoriales », insérer les mots : « , d’un Parc naturel régional, ».

Amendement CD 46 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

Compléter l’alinéa 25 par la phrase suivante :

« La stratégie locale de développement forestier est mise à disposition du public pendant un délai d'un mois. Un décret précise les modalités de cette mise à disposition. »

Amendement CD 47 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

À l’alinéa 25, après le mot : « territoriales », insérer les mots : « , des représentants des Parcs naturels régionaux, ».

Amendement CD 48 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15

À la fin de la première phrase de l’alinéa 27, après le mot : « territoriales »,insérer les mots : « , des Parcs naturels régionaux, ».

Amendement CD 49 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article additionnel après l’article 15

Le code forestier est ainsi modifié :

L’article L. 6 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« III. Le ou les propriétaires peuvent faire le choix d’une gestion laissant tout ou partie de leurs parcelles forestières en libre évolution. »

Amendement CD 50 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 15 bis

Supprimer cet article.

Amendement CD 51 présenté par MM. André Chassaigne, Daniel Paul, Marc Dolez, et Pierre Gosnat :

Article 16 bis

Supprimer cet article.

Amendement CD 60 présenté par M. Martial Saddier :

Article additionnel après l’article 15

Le dernier alinéa de l’article L. 4 du code forestier est complété par la phrase suivante :

« Ils sont communicables à toute personne sur sa demande et à ses frais.»

Amendement CD 61 présenté par M. Martial Saddier :

Article 12

À l’alinéa 6, après le mot : « concernées », insérer les mots : « , les associations de protection de la nature et de l’environnement agréées au titre de l’article L.141-1 du code de l’environnement ».

Amendement CD 62 présenté par M. Martial Saddier :

Article 12

Après l’alinéa 15, insérer l’alinéa suivant :

« 4° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 141-6, après les mots : « et municipaux », ajouter les mots : « d’associations de protection de l’environnement agréées au titre de l’article L. 141-1 du code de l’environnement. » »

Amendement CD 63 présenté par M. Martial Saddier :

Article 12

Après l’alinéa 18, insérer les deux alinéas suivants :

«1°A- L’article L. 122-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les commissions mentionnées à l’article L. 112-1-14 du code rural sont consultées par l'établissement public, à leur demande, au cours de l'élaboration du schéma. » »

Amendement CD 64 présenté par M. Martial Saddier :

Article 12

I- À l’alinéa 20 :

1° après le mot : « incompatibles », insérer les mots : « avec les dispositions du schéma régional de cohérence écologique mentionné à l’article L. 371-3 du code de l’environnement et » ;

2° après le mot : « agricole », rédiger ainsi la fin de l’alinéa : «, pastorale ou forestière du terrain sur lesquelles elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels, des espèces sauvages et des paysages ».

II- À l’alinéa 26 et à l’alinéa 33, après le mot : « incompatibles », insérer les mots : « avec les dispositions du schéma régional de cohérence écologique mentionné à l’article L. 371-3 du code de l’environnement et », et après les mots : « espaces naturels », insérer les mots : «, des espèces sauvages».

Amendement CD 65 présenté par M. Martial Saddier :

Article 14

À l’alinéa 8, après le mot : « état», insérer les mots : « et la préservation ».

Amendement CD 66 présenté par M. Martial Saddier :

Article 15

À la seconde phrase de l’alinéa 7, après le mot : « forêts », insérer les mots : « des associations de protection de la nature et de l’environnement agréées au titre de l’article L.141-1 du code de l’environnement ».

Amendement CD 67 présenté par M. Martial Saddier :

Article 15

À la seconde phrase de l’alinéa 19, après le mot : « lieux », insérer les mots : « et sur une évaluation environnementale ».

Amendement CD 69 présenté par M. Jean-Marie Sermier :

Article 15

Compléter cet article par les deux alinéas suivants :

« 3° Après l’alinéa 1 de l'article L331-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

«  Sont également réputés agricoles les activités de valorisation économique, la transformation du bois et de ses différents usages dans l’objectif de son utilisation énergétique » ».

Amendement CD 75 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 12

Supprimer la seconde phrase de l’alinéa 3.

Amendement CD 76 rect. présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 12

Rédiger ainsi la deuxième phrase de l’alinéa 14 :

«Cette commission, présidée par le représentant de l’État dans le département, associe des représentants des collectivités territoriales, de l’État, de la profession agricole, des propriétaires fonciers, des notaires et des associations agrées de protection de l’environnement. »

Amendement CD 78 rect. présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 12

Compléter l’alinéa 24 par la phrase suivante :

« La commission départementale de la consommation des espaces agricoles prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime est consultée à cette fin au cours de la procédure d’élaboration. Elle rend son avis au plus tard un mois après sa saisine. À défaut, son avis est réputé favorable. »

Amendement CD 79 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 13

Supprimer cet article.

Amendement CD 80 rect. présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, et MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article additionnel après l’article 13 quater

Le treizième alinéa de l’article 6 du code des marchés publics est complété par la phrase :

« En matière de restauration collective, les spécifications techniques peuvent faire mention d'une provenance ou origine déterminée. »

Amendement CD 81 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 15 bis A

Substituer aux alinéas 3 à 11 les quatorze alinéas suivants :

« Droit de préférence

« Art. L. 514-1. – Les propriétaires de parcelles boisées contiguës à un terrain boisé, classé au cadastre en nature de bois et d’une superficie totale inférieure ou égale à quatre hectares, bénéficient d’un droit de préférence en cas de cession onéreuse de ce terrain, de droits indivis ou de droits réels de jouissance relatifs à ce terrain.

« A peine de nullité, le vendeur notifie aux propriétaires des parcelles le prix et les conditions de la cession projetée.

« Lorsqu’une parcelle contiguë appartient à plusieurs propriétaires, la notification à un seul d’entre eux suffit.

« Tout propriétaire d’une parcelle boisée contiguë peut, dans le délai d'un mois qui suit cette notification, faire connaître au vendeur qu'il exerce son droit de préférence aux prix et conditions qui lui ont été notifiés.

« L’exercice du droit de préférence ouvre un délai de deux mois à compter de sa communication au vendeur pour la réalisation de l'acte de vente. Le droit de préférence est forclos à l’issue de ce délai.

« Lorsque plusieurs propriétaires de parcelles contiguës exercent leur droit de préférence, le propriétaire de la parcelle ayant la plus longue limite séparative commune avec le terrain vendu bénéficie d’une priorité.

« Art. L. 514-2. – Le droit de préférence ne s’applique pas lorsque la vente doit intervenir :

« 1° Au profit du propriétaire d’une parcelle contiguë ;

« 2° En application des dispositions du titre II du livre Ier du code rural et de la pêche maritime ;

« 3° Au profit de parents ou alliés jusqu’au quatrième degré inclus, du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité du vendeur ;

« 4° Pour la mise en œuvre d’un projet déclaré d’utilité publique ;

« 5° Au profit d’un co-indivisaire ;

« 6° Au profit du nu-propriétaire du bien vendu en usufruit ou de l'usufruitier du bien vendu en nue-propriété. ».

Amendement CD 82 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 16 bis

Supprimer les alinéas 13 et 14.

Amendement CD 83 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 16 bis

À la première phrase de l’alinéa 54, après le mot : « ans », insérer les mots : « puis à nouveau dans un délai de six ans ».

Amendement CD 84 présenté par M. Christian Patria, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire :

Article 17

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« 2° bis. En édictant des mesures de nature à favoriser un remembrement des propriétés forestières afin de lutter contre leur morcellement ; ».

Amendement CD 85 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

À la dernière phrase de l'alinéa 14, après le mot : « avis », insérer le mot :« conforme ».

Amendement CD 86 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

À l'alinéa 29, supprimer les mots : « située en dehors du périmètre d’un schéma de cohérence territoriale approuvé et ».

Amendement CD 87 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

Après l'alinéa 24, insérer l’alinéa suivant :

ter (nouveau) À l’alinéa 9 de l'article L. 122-1, après les mots : « services publics » sont insérés les mots : « ainsi que le plan régional de l’agriculture durable ».

Amendement CD 88 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

Après l’alinéa 31, ajouter les deux alinéas suivants :

À l’article L. 123-1 du Code de l’Urbanisme, après l’alinéa 3, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ils peuvent définir les caractéristiques des exploitations agricoles autorisées à construire ou à aménager des équipements nécessaires à leur activité »

Amendement CD 89 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

Après l'alinéa 31, insérer les deux alinéas suivants :

Après l'article L. 425-12, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Lorsque le projet porte sur une construction à usage agricole en zone agricole du plan local d'urbanisme, le pétitionnaire doit préciser les caractéristiques de son activité professionnelle agricole et justifier de l'utilité de cette construction pour son exploitation. »

Amendement CD 90 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon et Yanick Paternotte :

Article 13

À l’alinéa 4, substituer aux mots : « au financement des mesures en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs, », les mots : « à l'alimentation d'un fonds agricole périurbain départemental destiné à compenser le handicap, individuel et collectif, des exploitations agricoles et de l'agriculture en zone périurbaine ».

Amendement CD 91 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon et Yanick Paternotte :

Article 13

Rédiger ainsi la seconde phrase de l’alinéa 11 :

« Elle est due par le ou les aménageurs. »

Amendement CD 92 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article additionnel après l’article 13 quater

Après l’alinéa 2 de l'article L. 111-2 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Prendre en compte le handicap des exploitations agricoles situées en zones périurbaines ».

Amendement CD 93 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article additionnel après l’article 13 quater

Après le 4e alinéa de l'article L. 330-1 du code rural, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« La politique d'installation prend en compte les difficultés spécifiques rencontrées par le candidat à l'installation en zone périurbaine, dont le surcoût des investissements et la pression foncière. »

Amendement CD 95 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article additionnel après l’article 13 quater

Le treizième alinéa de l’article 6 du code des marchés publics est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En matière de restauration collective, les spécifications techniques peuvent faire mention d'une provenance ou origine déterminée. »

Amendement CD 96 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « la chambre d’agriculture régionale », les mots : « les chambres d’agriculture concernées ».

Amendement CD 97 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

Après l'alinéa 11, insérer l’alinéa suivant :

« Lorsque l’observatoire constatera que les objectifs de consommation d’espace sont atteints, aucun nouvelle ouverture à l'urbanisation ne pourra être autorisée sur les espaces agricoles et naturels de la commune. »

Amendement CD 98 présenté par MM. Franck Marlin, Philippe Houillon, Yanick Paternotte et Yves Vandewalle :

Article 12

À la deuxième phrase de l'alinéa 14, après le mot : « agricole, », insérer les mots : « la chambre d'agriculture départementale, ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Votre rapporteur pour avis a assisté à la majorité des auditions conduites par le rapporteur de la commission des affaires économiques. Il a en outre procédé, à titre particulier, aux auditions suivantes :

ONF :

M. Pierre-Olivier Drège, directeur général

M. Frédéric Delport, directeur de cabinet

Forestiers privés de France :

M. Henri Plauche-Gillon, président

SNFM - Section nationale des fermiers et métayers de la FNSEA :

M. Bertrand Saget, président

Madame Sylvie Le Brun, secrétaire Générale de la SNFM,

Melle Lucie Belin, juriste

Direction de la législation fiscale :

M. Philippe-Emmanuel De Beer, Sous-directeur sous-direction C (fiscalité des personnes),

Mme Florence Lerat, chef du bureau de la fiscalité du patrimoine (C2),

M. Matias de Sainte Lorette, adjoint au chef du bureau de synhèse

M. Arnaud Billoué, adjoint au chef de la section de la fiscalité immobilière du bureau C2

Section nationale des propriétaires ruraux de la FNSEA :

M. Michel de Beaumesnil, président

Mme Josiane Beliard, secrétaire générale

Mme Sabine Agofroy, chargée de mission

Fédération Nationale de la Propriété Privée Rurale (FNPPR) :

M. Bruno de La Roche Saint André, président

M. Bruno Ronssin, directeur

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