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N
° 3550

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 juin 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE sur les recommandations de la Commission européenne relatives aux programmes de stabilité et de réforme de la France (n° 3528).

PAR M. Gilles Carrez,

Rapporteur général,

Député.

——

Pour la première année de mise en oeuvre du « semestre européen », la commission des Finances et la commission des Affaires européennes ont décidé de présenter, sur la base des articles 151-2 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, une proposition de résolution relative à l’avis de la Commission européenne sur le programme de stabilité de la France pour les années 2011 à 2014.

Le « semestre européen » est une nouvelle procédure d’examen, par les institutions communautaires, des programmes de stabilité et des programmes nationaux de réforme. Il se déroule, l’année précédant la première année de la programmation, en deux phases :

– après que la Commission européenne a publié, au mois de janvier, une étude sur les perspectives de croissance économique dans l’Union, le Conseil européen se réunit au mois de mars pour suggérer aux États membres les grandes lignes de leurs programmes de stabilité et de réforme ;

– après leur transmission à la fin du mois d’avril, ceux-ci sont examinés par la Commission au début du mois de juin – son avis faisant l’objet de la présente proposition de résolution – puis le Conseil européen adresse des recommandations à chaque État membre – sa réunion se tenant, cette année, le 24 juin.

L’examen de la programmation pluriannuelle est réalisé avant le dépôt du projet de loi de finances de l’année et l’instance politique la plus puissante de l’Union, le Conseil européen, joue un rôle clé dans la procédure. Pour ces deux raisons, le « semestre européen » renforce le contrôle des institutions communautaires sur les finances publiques des États.

Pour la première année de mise en oeuvre de cette nouvelle procédure, le Parlement y est impliqué à deux moments. Sur la base de l’article 50-1 de la Constitution et conformément à l’article 14 de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le Gouvernement s’est engagé par une déclaration suivie d’un vote sur les programmes de stabilité et de réforme, avant leur transmission aux institutions communautaires. La présente proposition de résolution constitue un second moment d’intervention du Parlement, qui a lieu à quelques jours de la clôture de la procédure.

Les modalités d’implication du Parlement dans le semestre européen sont encore très imparfaites car la représentation nationale n’intervient que ponctuellement et sans possibilité d’amender la programmation pluriannuelle ou les normes d’évolution la sous-tendant. C’est pourquoi son association à la nouvelle procédure ne pourra être pleinement réalisée qu’à la condition qu’un projet de loi de programmation des finances publiques soit déposé au moment de la transmission des deux programmes à Bruxelles, puis examiné en parallèle de la procédure suivie au niveau communautaire.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa deuxième séance du mercredi 22 juin 2012, la Commission examine la proposition de résolution européenne sur les recommandations de la Commission européenne relatives aux programmes de stabilité et de réforme de la France (n° 3528).

M. le président Jérôme Cahuzac. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution européenne relative à l’avis émis par la Commission européenne sur le programme de stabilité et de croissance de la France. Nous sommes saisis de neuf amendements.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. L’Assemblée nationale a débattu de ce programme de stabilité le 2 mai dernier avant sa transmission à la Commission européenne, qui a émis des recommandations. Sur cette base, le Conseil européen se prononcera à la fin de la semaine sur les programmes des différents États membres.

Nous devons aujourd’hui nous prononcer sur les recommandations de la Commission européenne, qui portent d’une part sur les aspects financiers et budgétaires, prééminents dans le contexte actuel, et sur des éléments plus structurels de l’économie française d’autre part. La Commission européenne nous demande ainsi de poursuivre nos efforts pour assouplir la législation relative au marché de l’emploi, trop protecteur, ce qui contribue au maintien du taux de chômage à un niveau supérieur à celui des pays comparables. Elle considère également que le déficit de notre commerce extérieur s’avère de plus en plus préoccupant, et qu’il révèle un problème de compétitivité de nos entreprises. Quant à nos prélèvements obligatoires, ils sont jugés trop élevés et assis excessivement sur le travail et pas assez sur la consommation. Enfin, nos exonérations fiscales et sociales sont également jugées excessives.

Les recommandations de la Commission européenne sont donc les suivantes : poursuivre l’effort budgétaire prévu jusqu’en 2013 ; engager une réforme du marché du travail, dans le respect des prérogatives des partenaires sociaux ; développer la formation professionnelle afin de lutter contre le chômage, particulièrement celui des jeunes ; réorienter la fiscalité qui pèse actuellement trop sur le travail, vers d’autres bases ; accentuer la réduction des niches fiscales et sociales.

En outre, dans la continuité des recommandations du rapport Attali pour la libération de la croissance française, nous sommes invités à alléger la réglementation relative à certaines professions, par exemple dans le secteur du commerce de détail.

MM. Michel Herbillon et Christophe Caresche ont établi une proposition de résolution européenne comportant des recommandations intéressantes et très complètes. Toutefois, la perspective adoptée est très macroéconomique, et trop peu axée sur les enjeux financiers et budgétaires à court terme.

Je vous propose donc un amendement appuyant les recommandations de la Commission européenne visant à la consolidation de l’objectif de réduction du déficit à 4,6 % du PIB en 2012. Pour y arriver, nous devons demander au Gouvernement un effort supplémentaire de cinq milliards d’euros dans les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012. Cet effort est tout à fait possible, à condition d’agir sur les dépenses (avec une diminution de l’ordre de deux milliards d’euros) et sur les recettes, à travers une diminution supplémentaire des dépenses fiscales de l’ordre de trois milliards d’euros. Les mesures votées et les projets du Gouvernement pour 2012 aboutissent à une réduction des niches fiscales et sociales de trois milliards d’euros en 2012. Nous devons arriver à six milliards.

Le deuxième amendement concerne la procédure, et reprend la position qu’avait adoptée la Commission des finances lors du débat sur le projet de réforme constitutionnelle, s’agissant de la place des lois de programmation pluriannuelle et des lois-cadres de finances publiques. Le programme de stabilité, portant sur quatre ans, doit être transmis à la Commission européenne chaque année début mai. Cette dernière se prononce dans un délai d’un mois. Le Conseil prend en compte ces recommandations fin juin. Le Parlement français doit impérativement accompagner ce calendrier européen. Si nous débattons de notre loi de programmation pluriannuelle fin septembre, parallèlement au projet de loi de finances, il sera trop tard. Il faut décaler en amont cet exercice, pour lui garder sa pertinence, en prévoyant un examen de la programmation pluriannuelle au printemps.

M. le président Jérôme Cahuzac. À titre personnel, je comprends le problème posé par le calendrier infra-annuel que vous évoquez et je souscris à la solution que vous proposez. Je l’ai moi-même présenté précédemment par voie d’amendement. Cependant, il y a également un problème de calendrier pluriannuel et je souhaiterais que soit reprise ma proposition de loi-cadre glissante. En effet, je ne vois pas comment nous pourrions examiner chaque année le programme transmis par les autorités françaises à Bruxelles qui est en glissement, alors que la loi pluriannuelle examinée par le Parlement serait valable pour quatre ans, sans glissement. Il faut donc que la règle du glissement s’applique à ces deux outils si l’on souhaite qu’ils demeurent cohérents.

M. le rapporteur général. La programmation peut être glissante tout en conservant des points durs non modifiables, car une loi pluriannuelle révisée chaque année n’est plus une loi-cadre. Je m’accorde toutefois avec le Président sur le fait que, le programme de stabilité étant décalé d’un exercice chaque année, il faudra rétablir la cohérence avec la loi-cadre qui constitue la transposition de ce programme.

La Commission est saisie des amendements CF 1 du rapporteur général et CF-9 de M. Giscard d’Estaing.

M. le rapporteur général. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. Louis Giscard d’Estaing. Pouvez-vous nous confirmer qu’il s’agit de la première résolution proposée sur un programme de stabilité ? Est-ce qu’il ne serait pas opportun d’avoir, parmi les co-rapporteurs de la Commission des affaires européennes, un membre de la Commission des finances pour permettre une plus grande cohérence entre les deux commissions ? Enfin, l’amendement rédactionnel proposé par le rapporteur ne semble pas tout à fait neutre.

M. le rapporteur général. Il s’agit simplement de remplacer le futur employé dans la résolution par le présent qui est le temps employé dans les lois de la République. Le rôle des différentes commissions est le suivant : la Commission des affaires européennes établit un projet de résolution, puis celui-ci est transmis à la commission compétente au fond qui est en charge de la compléter si besoin. Il s’agit donc d’un travail séquentiel et non pas d’un travail commun en amont des deux commissions. Par ailleurs, nous sommes saisis chaque année d’un projet de résolution établi par la Commission des affaires européennes sur l’avant-projet de budget communautaire. Mais, c’est en effet la première fois qu’une résolution porte sur le programme de stabilité.

M. Henri Emmanuelli. Si la Commission européenne refuse le programme qui lui est présenté, que ce passe-t-il ?

M. le rapporteur général. Si la Commission européenne demande une modification substantielle du programme de stabilité, il faut, à mon avis, que le Parlement soit saisi.

M. le président Jérôme Cahuzac. Le Parlement reste souverain en la matière.

M. Henri Emmanuelli. Tout à fait. Autrement, nous serions dans un processus fédéral.

M. Louis Giscard d’Estaing. Que signifie pour le rapporteur général l’expression « débats démocratiques approfondis » employée dans la résolution ?

M. le président Jérôme Cahuzac. Il serait plus précis et plus juste de prévoir que le Parlement est saisi.

M. le rapporteur général. Je souligne que ces dispositions portent sur l’implication du Parlement européen dans la définition du tableau de bord destiné à mesurer les déséquilibres macroéconomiques.

M. Henri Emmanuelli. Je rappelle que la Cour de Karlsruhe a précisé que le gouvernement allemand ne pouvait pas consentir de délégation de pouvoir sans un vote parlementaire et il est difficile d’imaginer que la Commission européenne puisse modifier de manière directe ou indirecte le programme de stabilité sans que le Parlement soit saisi.

M. Hervé Mariton. Cette résolution est un peu hybride puisqu’elle traite à la fois de problèmes nationaux et porte une appréciation sur les procédures communautaires.

M. le rapporteur général. Exactement. Cette résolution traite en effet à la fois de la gouvernance européenne et du programme de stabilité. Nous pourrions néanmoins préciser le texte en remplaçant, comme le propose M. Giscard d’Estaing, « débats démocratiques approfondis » par « débats parlementaires ».

La Commission adopte l’amendement CF 9 de M. Giscard d’Estaing portant cette précision, puis l’amendement CF 1 du rapporteur général.

La Commission est saisie d’un amendement CF 2 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Il s’agit d’éviter une répétition.

La Commission adopte l’amendement. Elle examine ensuite l’amendement CF 3 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. J’ai déjà évoqué cette question relative au calendrier d’examen des projets de loi de programmation des finances publiques.

La Commission adopte l’amendement. Elle examine ensuite l’amendement CF 5 du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Cet amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CF 4 du rapporteur général.

M. Henri Emmanuelli. Il serait plus démocratique de sous-amender cet amendement en prévoyant que la période visée est 2011-2012. Il n’appartient pas à une majorité de contraindre la suivante !

M. le rapporteur général. Mais c’est la période correspondant au programme de stabilité.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte également l’amendement rédactionnel CF 6 du rapporteur général.

Puis elle examine l’amendement CF 7 du même auteur.

M. le rapporteur général. Cet amendement consiste à demander que, pour garantir l’objectif de déficit public de 4,6 % du PIB en 2012, il y ait un effort supplémentaire de réduction des dépenses fiscales et d’économie sur les dépenses budgétaires.

M. Henri Emmanuelli. Autant proposer de rétablir l’ISF actuel. On diminue les recettes, et dans le même temps on s’engage à les augmenter.

M. Charles de Courson. Pour trouver 3 milliards d’euros de réduction supplémentaire des dépenses fiscales, on pourrait par exemple inclure les œuvres d’art dans l’assiette de l’ISF.

M. le président Jérôme Cahuzac. Il serait en effet satisfaisant de veiller à ce que la réforme de la fiscalité du patrimoine soit financée intégralement, et ne contribue pas à accroître le déficit budgétaire.

M. le rapporteur général. Nous verrons cela lors de la commission mixte paritaire.

La Commission adopte l’amendement, ainsi que l’amendement rédactionnel CF 8 du rapporteur général.

Elle adopte ensuite l’article unique de la proposition de résolution et l’ensemble de celle-ci ainsi modifiés.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° CF-1 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 16, substituer au mot : « devra », le mot : « doit ».

Amendement n° CF-2 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 17, substituer au mot : « indispensables », le mot : « nécessaires ».

Amendement n° CF-3 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

I.– Après l’alinéa 19, insérer les deux alinéas suivants :

« 8 bis. Constate néanmoins que l’implication du Parlement dans le « semestre européen » est ponctuelle, qu’aucune possibilité d’amendement au programme de stabilité ne lui est ouverte et qu’en conséquence les modalités d’association de la représentation nationale à cette nouvelle procédure doivent évoluer ;

« 8 ter. Demande au Gouvernement que, à l’avenir, un projet de loi de programmation des finances publiques soit déposé au moment où le programme de stabilité est transmis aux institutions communautaires et que son examen se déroule en parallèle de la procédure suivie au niveau communautaire ; »

II.– En conséquence, à l’alinéa 20, supprimer les mots : « , à cet égard, ».

Amendement n° CF-4 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 20, substituer aux mots : « pour 2011-2013 », les mots : « pour les années 2011 à 2014 ».

Amendement n° CF-5 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 20, substituer aux mots : « sa détermination totale d’atteindre à brève échéance l’équilibre des finances publiques », les mots : « son entière détermination à ce que les finances publiques atteignent leur équilibre à brève échéance ».

Amendement n° CF-6 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 22, substituer au mot : « devront », le mot : « doivent ».

Amendement n° CF-7 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

Après l’alinéa 24, insérer les trois alinéas suivants :

« 13 bis. Constate néanmoins, comme le fait la Commission européenne, que les mesures nouvelles annoncées jusqu’à présent par le Gouvernement sont insuffisantes pour atteindre l’objectif de déficit public de 4,6 % de PIB en 2012 ;

« 13 ter. Estime que cet objectif nécessite de réaliser, par rapport à la programmation du Gouvernement, une réduction supplémentaire des dépenses fiscales de 3 milliards d’euros et une économie supplémentaire de 2 milliards d’euros sur les dépenses budgétaires ;

« 13 quater. Demande, en conséquence, au Gouvernement de préciser, dès le débat d’orientation des finances publiques, l’effort, en dépenses et en recettes, qu’il vise pour l’exercice 2012, ainsi que le détail des mesures nouvelles qui en découlent ; ».

Amendement n° CF-8 présenté par M. Gilles Carrez

Article unique

À l’alinéa 26, substituer aux mots : « politiques économiques », les mots : « politique économique ».

Amendement n° CF-9 présenté par M. Louis Giscard d’Estaing

Article unique

À l’alinéa 16, substituer aux mots : « démocratiques approfondis », le mot : « parlementaires ».

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