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N° 3557

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 juin 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI ORGANIQUE (N° 3538), ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie,

PAR M. Dominique BUSSEREAU,

Député.

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Voir les numéros :

Sénat : 554, 586, 587 et T.A. 142 (2010-2011).

INTRODUCTION 5

I. LE DÉTOURNEMENT D’UNE PROCÉDURE PRÉVUE POUR ASSURER LA COLLÉGIALITÉ DU GOUVERNEMENT A CONDUIT AU BLOCAGE DES INSTITUTIONS DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE 7

1. La gouvernance collégiale, principe fondateur de l’équilibre des institutions de Nouvelle-Calédonie 7

a) Les institutions collégiales définies par l’accord de Nouméa 7

b) La mise en place du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à l’issue des élections de 2009 9

2. Le choix des signes identitaires et la question du drapeau ont abouti à une crise politique 11

a) Le choix des signes identitaires et du drapeau, pierre d’achoppement de la gouvernance néo-calédonienne 11

b) De l’absence de consensus à la crise politique 13

3. L’utilisation détournée de l’article 121 de la loi organique de 1999 13

a) L’impossibilité de mettre en place un nouveau gouvernement collégial 13

b) La mise à mal de la collégialité et la pluralité politiques définies par l’accord de Nouméa 15

c) Le détournement d’une disposition visant à protéger le principe de collégialité 16

II. MAINTENIR L’ESPRIT DE COLLÉGIALITÉ DE L’ACCORD DE NOUMÉA TOUT EN EMPÊCHANT LE BLOCAGE DES INSTITUTIONS PAR UNE MINORITÉ 18

1. Le projet de loi organique fait le choix de la stabilité tout en garantissant à tous de pouvoir participer au gouvernement 18

a) Concilier la collégialité avec la stabilité 18

b) La possibilité laissée au groupe démissionnaire de rétablir sa participation au gouvernement 18

c) Le respect des différentes hypothèses de démission du gouvernement existantes 19

d) Les précisions apportées par le Sénat à un mécanisme manquant de lisibilité 19

2. Le maintien d’un mécanisme d’alerte sur les conditions d’application du principe de collégialité 20

a) Le choix d’une réforme a minima 20

b) Les risques pesant sur la collégialité dans une Nouvelle-Calédonie prochainement consultée sur son avenir 21

DISCUSSION GÉNÉRALE 23

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE 27

Article 1er (art. 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie) : Conditions de mise en œuvre de la démission de plein droit du gouvernement en cas de démission collective des membres d’une liste 27

Article 2 : Dispositions transitoires 36

Après l’article 2 36

TABLEAU COMPARATIF 37

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 41

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 43

MESDAMES, MESSIEURS,

Par les accords de Matignon signés en 1988, puis par l’accord de Nouméa de 1998, la Nouvelle-Calédonie a pris en main son destin afin de se définir un avenir partagé entre les différentes communautés qui composent cette société particulière au sein de la République.

La mise en œuvre de cette évolution a justifié la mise en place d’institutions spécifiques, et d’un droit constitutionnel particulier – d’essence quasiment fédérale – par l’intégration des principes de l’accord de Nouméa au sein de la Constitution française.

Parmi ces principes figurent ceux de collégialité et de proportionnalité du gouvernement, élu à la représentation proportionnelle par le congrès, qui se doit de représenter toutes les communautés et tous les partis pour diriger cette collectivité sui generis.

Un différent sur une question qui pourrait apparaître secondaire, mais qui contient une charge symbolique très forte, le choix d’un drapeau pour la Nouvelle-Calédonie, a conduit à une crise politique, rendue possible par le détournement du mécanisme prévu par l’article 121 du statut organique de la Nouvelle-Calédonie, prévu au départ pour préserver la collégialité du gouvernement.

Si à ce jour, la Nouvelle-Calédonie a enfin un gouvernement, elle a passé quatre mois dans une crise politique qui ne pouvait être réglée que par le dialogue et l’appel au Parlement pour trouver une solution pratique au sein de la loi organique qui constitue le statut de la Nouvelle-Calédonie depuis 1999.

Adopté par le Sénat le 15 juin dernier, le présent projet de loi organique, répond ainsi à la demande des élus du congrès de la Nouvelle-Calédonie, qui, le 1er avril 2011, alors que pour la troisième fois en six semaines la démission de l’ensemble des membres d’une liste avait provoqué la démission de plein droit du gouvernement calédonien, ont demandé au Gouvernement de la République de proposer au Parlement dans les meilleurs délais possibles, « une modification de l’article 121 de la loi organique susvisée du 19 mars 1999 visant à encadrer et à limiter la possibilité de provoquer la démission du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie par démission de l’un ou plusieurs de ses membres ». À la suite de l’avis rendu par le congrès le 6 mai 2011, le projet de loi organique déposé au Sénat a pris en compte leurs observations : le présent texte n’est donc pas seulement celui du Gouvernement, c’est celui qu’appellent de leurs vœux les représentants élus de la Nouvelle-Calédonie.

C’est pourquoi votre rapporteur approuve le dispositif envisagé par le présent projet de loi organique pour garantir la stabilité du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui ne remet pas en cause les principes et les institutions élaborées en 1999, mais se contente d’éviter le détournement de leur esprit par une utilisation abusive de leur lettre.

Ce n’est donc pas à une réforme d’ensemble, mais à un simple ajustement que votre commission vous propose de procéder, sans attendre que la crise institutionnelle débouche sur une véritable crise politique.

Le projet de loi organique concilie en effet l’encadrement du mécanisme permettant à un groupe minoritaire au congrès de provoquer la chute du gouvernement et la garantie d’une représentation de la minorité au sein du gouvernement calédonien.

Il maintient la possibilité pour un groupe politique, d’obtenir la démission d’office du gouvernement par la démission de l’un ou de plusieurs de ses membres, mais limite l’utilisation répétée de cette faculté dans le temps, afin d’éviter son détournement.

Ainsi, un groupe, dont les représentants démissionneraient tous ensemble du gouvernement, pourrait ne plus y être présent et porterait seul la responsabilité politique de son exclusion des institutions néo-calédoniennes. Cependant, il lui resterait loisible d’y rétablir sa présence à tout moment, en présentant une liste de candidats.

La collégialité est un principe fondateur de l’équilibre défini par l’accord de Nouméa. D’ici trois à sept ans, les citoyens calédoniens seront amenés à s’exprimer, par les urnes, pour choisir leur destin : un destin partagé au sein de la République ou le choix de l’indépendance. Mais dans l’intervalle, les néo-calédoniens devront être fidèle à la devise qu’ils se sont choisis en 2008 : « Terre de parole, terre de partage ». Seul le respect de l’esprit et de la lettre des accords signés en 1988 et 1998 permettra de préparer sereinement ce rendez-vous dans la concertation et le dialogue.

I. LE DÉTOURNEMENT D’UNE PROCÉDURE PRÉVUE POUR ASSURER LA COLLÉGIALITÉ DU GOUVERNEMENT A CONDUIT AU BLOCAGE DES INSTITUTIONS DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

1. La gouvernance collégiale, principe fondateur de l’équilibre des institutions de Nouvelle-Calédonie

a) Les institutions collégiales définies par l’accord de Nouméa

Territoire de 18 575 km² regroupant 245 580 (1) habitants, la Nouvelle-Calédonie est au sein de la République une collectivité territoriale sui generis dont les particularités institutionnelles et la large autonomie sont les conséquences de des troubles politiques et des accords pour les résoudre qui se sont succédés depuis trente ans.

En effet, rattachée à la France le 24 septembre 1853 et ayant accédé au statut de territoire d’outre-mer en 1946, la Nouvelle-Calédonie a connu à partir des années 1980 d’importantes tensions politiques, du fait de l’émergence d’une revendication indépendantiste kanake. Ces populations d’origine mélanésienne (2), restent en effet très attachées aux liens et règles coutumières régissant les rapports sociaux, à un mode de vie traditionnel et une détention en commun des richesses et propriétés foncières, principes qui ont été déstabilisés pendant la période coloniale.

Après plusieurs années d’instabilité statutaire et de violences, et plusieurs tentatives infructueuses pour trouver une solution politique entre les représentants des formations politiques loyaliste et indépendantiste, un accord global réussit à rapprocher les points de vue, en apparence inconciliables, des deux grandes formations politiques loyaliste et indépendantiste, le Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR) d’une part, et le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) d’autre part.

Sous l’égide du Premier ministre Michel Rocard, les accords dits de Matignon, furent conclus les 26 juin et 20 août 1988, par les représentants du RPCR, M. Jacques Lafleur, et du FLNKS, M. Jean-Marie Tjibaou, prévoyant la mise en place d’institutions provisoires dans l’attente d’un référendum d’autodétermination prévu dix ans plus tard.

Cette dernière échéance étant apparue comme prématurée en 1998, un nouvel accord fut conclu entre les mêmes formations le 5 mai 1998 à Nouméa (3), afin de favoriser un rééquilibrage économique et un renforcement progressif de l’autonomie locale pendant une période d’une vingtaine d’années – au terme de laquelle la question d’une éventuelle accession à la pleine souveraineté devrait être posée. Cet accord, approuvé à 72 % par la population néo-calédonienne lors de la consultation du 8 novembre 1998, a jeté les bases d’un compromis historique.

L’actuel statut de la Nouvelle-Calédonie reste donc aujourd’hui aussi bien fixé par les principes inscrits dans l’accord de Nouméa, qui a acquis une valeur constitutionnelle par les références désormais inscrites aux articles 77 et 78 de la Constitution (4), que par les dispositions de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 qui ont transposé ces principes dans le droit positif en dotant la Nouvelle-Calédonie d’institutions d’une grande originalité pour le droit français. Ces institutions, qui instaurent entre l’État et la Nouvelle-Calédonie des relations qui empruntent beaucoup au fédéralisme, reposent sur une énumération de compétences limitativement attribuées à l’État et à la Nouvelle-Calédonie. Au terme de cette évolution institutionnelle, l’État ne conservera plus, en Nouvelle-Calédonie, que la maîtrise des compétences de caractère régalien, telles que la diplomatie, la défense ou la justice.

La loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 a ainsi mis en place les institutions suivantes :

—  une assemblée délibérante dénommée « congrès de la Nouvelle-Calédonie », chargé notamment de voter les « lois du pays » ayant force de loi dans une douzaine de matières (telles que la fiscalité, le droit social, certains aspects du droit civil, le droit domanial et de propriété, ainsi que l’exploitation des ressources minérales), ainsi que d’élire, contrôler et le cas échéant renverser l’exécutif néo-calédonien. Il compte ainsi cinquante-quatre membres exerçant un mandat de cinq ans dont trente-deux des quarante membres de l’assemblée de la province Sud, quinze des vingt-deux membres de l’assemblée de la province Nord et sept des quatorze membres de l’assemblée de la province des îles Loyauté. Le congrès siège chaque année lors de deux réunions ordinaires, dont la durée ne peut excéder deux mois, et de sessions extraordinaires ;

—  un exécutif collégial composé de cinq à onze membres, élu au scrutin proportionnel par le congrès et dénommé « gouvernement de la Nouvelle-Calédonie », qui met en œuvre les délibérations du congrès, prend les décisions nécessaires à la gestion de la collectivité et dirige son administration ;

—  trois provinces (Nord, Sud et îles Loyauté), collectivités territoriales administrées par des assemblées dont les membres sont élus au scrutin proportionnel pour cinq ans et sont, pour la plupart d’entre eux, aussi appelés à siéger au sein du congrès de la Nouvelle-Calédonie. Ces provinces disposent de larges attributions car elles exercent toutes les compétences que le statut néo-calédonien n’attribue ni à l’État, ni à la Nouvelle-Calédonie, ni aux communes néo-calédoniennes, notamment en matière d’agriculture, de développement économique, de santé et d’urbanisme. Elles disposent en outre de prérogatives importantes pour la valorisation des ressources en nickel au bénéfice du développement économique de leur territoire ;

—  un sénat coutumier et de huit conseils coutumiers, dont les membres sont désignés selon des règles coutumières et exercent des compétences spécialisées en matière coutumière, foncière et de signes identitaires ;

—  un conseil économique et social, dont les trente-neuf membres sont désignés par le gouvernement néo-calédonien, le sénat coutumier et surtout les provinces, qui exerce des compétences consultatives en matière économique, sociale et culturelle ;

—  des communes néo-calédoniennes, collectivités territoriales de proximité dont les assemblées délibérantes sont élues au suffrage universel direct et s’administrent librement.

b) La mise en place du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à l’issue des élections de 2009

Lors des élections provinciales du 10 mai et du 6 décembre 2009 (5), aucune liste n’a obtenu la majorité absolue des sièges au sein du congrès :

RÉPARTITION DES REPRÉSENTANTS AU CONGRÈS LE 10 MAI 2009

Groupe

Nombre de membres

31 membres loyalistes, dont :

 

Rassemblement-UMP

13

Calédonie ensemble

10

Avenir ensemble-LMD

6

RPC

2

23 membres indépendantistes, dont :

 

UNI

8

Union calédonienne

8

FLNKS

3

Parti travailliste

3

Dynamique autonome

1

Total

54

Source : ministère chargé de l’outre-mer.

Les trois principaux partis loyalistes (Rassemblement-UMP, Avenir ensemble-LMD, Calédonie ensemble) ont alors formé des listes uniques en vue de la désignation des principaux responsables de la Nouvelle-Calédonie.

Ainsi, M. Pierre Frogier (Rassemblement-UMP et ancien président du congrès) a été élu président de l’assemblée de la province Sud, M. Paul Néaoutyine (UNI) a été réélu président de l’assemblée de la province Nord et M. Néko Hnepeune (FLNKS) président de l’assemblée de la province des Îles Loyauté.

M. Harold Martin (Avenir ensemble, ancien président du gouvernement) a été élu président du congrès.

Par une délibération du 28 mai, le congrès a fixé à onze le nombre de membres du gouvernement, en application de l’article 109 de la loi organique.

Le 5 juin 2009, le congrès de la Nouvelle Calédonie a procédé à l’élection des membres du gouvernement.

RÉSULTATS DE L’ELECTION DES MEMBRES DU GOUVERNEMENT DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE DU 5 JUIN 2009

Liste

Nombre de voix

Nombre de sièges au gouvernement

Rassemblement-UMP - Calédonie ensemble - Avenir ensemble-LMD

29

7

FLNKS

13

3

UNI

8

1

Total

50

11

Bulletins blancs

3

 

Bulletins nuls

1

 

Les partis loyalistes ont donc obtenu sept sièges sur les onze sièges à pourvoir au sein du gouvernement. M. Philippe Gomès, issu du groupe Calédonie Ensemble, a ensuite été élu à l’unanimité président du gouvernement.

2. Le choix des signes identitaires et la question du drapeau ont abouti à une crise politique

a) Le choix des signes identitaires et du drapeau, pierre d’achoppement de la gouvernance néo-calédonienne

La question des signes identitaires distinctifs de la Nouvelle-Calédonie a fait l’objet du point 1.5. de l’accord de Nouméa : celui-ci prévoit que « des signes identitaires du pays, nom, drapeau, hymne, devise, graphismes des billets de banque, devront être recherchés en commun, pour exprimer l’identité kanak et le futur partagé entre tous ».

Les modalités de leur sélection et de leur rôle sont précisées par l’article 5 de la loi organique de 1999. Celui prévoit que « la Nouvelle-Calédonie détermine librement les signes identitaires permettant de marquer sa personnalité aux côtés de l’emblème national et des signes de la République. Elle peut décider de modifier son nom. »

Afin d’élaborer ces symboles, a été mis en place en 2007 un comité de pilotage composé de représentants des partis politiques, de syndicalistes, de coutumiers, de représentants des églises, d’associations et des communautés culturelles de Nouvelle-Calédonie, soit une vingtaine de personnes qui ont choisi, pour la devise, l’hymne et le graphisme des billets, de passer par un concours populaire.

En avril 2008, un jury composé des membres du comité de pilotage a tenu deux réunions successives pour désigner les lauréats et le 26 juin 2008, date du vingtième anniversaire des accords de Matignon, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a proposé de retenir les propositions suivantes :

—  « Terre de parole, terre de partage » comme devise de la Nouvelle-Calédonie ;

—  « Soyons unis, devenons frères » comme hymne ;

—  plusieurs modèles de graphisme de billets de banque, le choix définitif devant être affiné en fonction de considérations techniques par l’Institut d’émission d’outre-mer.

En juillet 2008, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a préparé un projet de loi du pays définissant trois des cinq signes identitaires. Le Conseil d’État, dans son avis du 21 octobre 2008, considère que les trois signes identitaires proposés pour marquer l’identité de la Nouvelle-Calédonie ne méconnaissent « aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle ». Le 18 août 2010, le congrès a voté à une large majorité la loi du pays instituant la devise, l’hymne et les propositions relatives au graphisme des billets de banque.

S’agissant du drapeau que pourrait adopter la Nouvelle-Calédonie, notre collègue M. Pierre Frogier, président de l’assemblée de la province Sud et président du Rassemblement UMP, a proposé au début du mois de février 2010 d’associer le drapeau tricolore au drapeau du FLNKS.

Celui-ci est présenté par ses membres comme le drapeau de la Kanaky, c’est-à-dire de l’État indépendant qu’ils souhaitent voir mettre en place. Il comprend trois bandes horizontales bleue, rouge et verte, surmontées d’un cercle jaune légèrement décalé sur la gauche et comportant en son centre, en ombre chinoise, une flèche faîtière de case traditionnelle kanake percée d’une toutoute.

Reprenant cette idée, le comité des signataires de l’accord de Nouméa, lors de sa réunion du 24 juin 2010, a recommandé que le drapeau tricolore et celui du FLNKS flottent côte à côte en Nouvelle-Calédonie, « dans la perspective des prochains Jeux du Pacifique et dans l’esprit de la poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou ».

Le 13 juillet 2010, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a émis le vœu « que soient arborés, ensemble, en Nouvelle-Calédonie, le drapeau dont la description est annexée et le drapeau national », à l’unanimité moins les membres représentant Calédonie Ensemble. Le Premier ministre, M. François Fillon, en visite en Nouvelle-Calédonie, a ainsi procédé à la levée des deux drapeaux dans l’enceinte du haut-commissariat de la République le 17 juillet 2010.

Ce simple vœu n’ayant pas de force juridique contraignante, chaque collectivité territoriale de la Nouvelle-Calédonie est laissée libre de l’appliquer ou non. Une circulaire émanant du premier ministre devrait préciser quels établissements les deux emblèmes doivent être présents conjointement. Cependant, M. François Fillon a indiqué à la presse locale qu’il s’agira de « donner des instructions concernant les édifices qui représentent l’État. S’agissant des collectivités locales, c’est à elles d’assumer leurs responsabilités. L’État n’imposera rien » (6).

Depuis, les deux drapeaux flottent côte à côte sur les bâtiments publics du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, des trois provinces et des communes, à l’exception de celles de La Foa, Moindou et Bourail.

Cependant, ce choix de deux drapeaux ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique calédonienne, certains élus considérant que cette solution ne répond pas à l’objectif d’un drapeau commun.

La question du nom du territoire – Nouvelle-Calédonie ou Kanaky – fait encore l’objet de controverses ; aucune initiative officielle n’a pourtant été prise à ce jour pour en demander le changement.

b) De l’absence de consensus à la crise politique

En janvier 2011, des élus de l’Union calédonienne ont reproché au président du gouvernement de ne pas être d’accord avec le choix des deux drapeaux, tricolore et Kanaky, comme emblème de la Nouvelle-Calédonie. Ils considéraient qu’il portait une responsabilité dans l’absence du drapeau Kanaky au côté du drapeau tricolore au-dessus des édifices publics des trois communes précitées, administrées par des membres de Calédonie Ensemble.

Le 17 février 2011, les trois membres du gouvernement élus sur la liste présentée par le groupe UC-FLNKS, ainsi que l’ensemble des suivants de cette liste, ont présenté leur démission, provoquant la chute du gouvernement, conformément aux dispositions de l’article 121 de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

En effet, selon les termes de la rédaction actuelle de l’article 121, « lorsqu’un membre du gouvernement cesse d’exercer ses fonctions, le candidat suivant sur la liste sur laquelle celui-ci avait élu le remplace […]. Lorsqu’il ne peut plus être fait application de l’alinéa précédent, le gouvernement est démissionnaire de plein droit […] ».

Il devait, dès lors, être procédé à l’élection d’un nouveau gouvernement dans un délai de quinze jours, les membres du gouvernement démissionnaire de plein droit devant expédier les affaires courantes au cours de cette période.

3. L’utilisation détournée de l’article 121 de la loi organique de 1999

a) L’impossibilité de mettre en place un nouveau gouvernement collégial

Depuis février 2010, le congrès a élu quatre gouvernements successifs : les trois premiers n’ont jamais pu être mis en place, car dès l’élection des membres du gouvernement réalisée, les représentants du groupe Calédonie Ensemble ont démissionné pour le faire chuter. Selon l’étude d’impact du projet de loi organique, « l’objectif étant de bloquer les institutions afin d’obtenir un décret de dissolution du congrès pour susciter de nouvelles élections ».

La procédure de mise en place d’un nouveau gouvernement de la Nouvelle-Calédonie comporte trois étapes prévues par la loi organique n° 99-209 relative à la Nouvelle-Calédonie :

—  la détermination du nombre des membres du gouvernement par délibération du congrès (article 109) ;

—  l’élection du gouvernement par le congrès au scrutin proportionnel (article 110) ;

—  l’élection du président et du vice-président par le gouvernement (article 115).

Trois gouvernements successifs ont été successivement élus entre février et avril 2011, mais se sont retrouvés immédiatement démissionnaires de plein droit, avant d’avoir pu être mis en état de fonctionner.

Ainsi, par une délibération du 25 février 2011, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a fixé à onze le nombre des membres du gouvernement. Un nouveau gouvernement a été élu le 3 mars 2011. Aussitôt après, l’ensemble des membres de la liste présentée par le groupe politique Calédonie Ensemble, à l’exception de M. Philippe Gomès, ont notifié au président du congrès de la Nouvelle-Calédonie, puis au haut-commissaire de la République, leur démission des fonctions de membre du gouvernement. Bien que Calédonie ensemble, s’appuyant sur un avis du président du tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie en date du 24 février 2011, a estimé qu’un gouvernement ainsi incomplet ne puisse valablement procéder à l’élection de son président, le gouvernement a élu le même jour M. Harold Martin, président et M. Gilbert Tyuienon, vice-président. Cependant, l’impossibilité de remplacer les membres démissionnaires de la liste Calédonie Ensemble a entraîné la démission de plein droit du gouvernement et une nouvelle procédure de constitution du gouvernement.

Après avoir fixé à onze l’effectif du gouvernement, les membres du congrès ont élu le 17 mars 2011 un nouveau gouvernement. MM. Harold Martin et Gilbert Tyuienon ont été réélus président et vice-président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. M. Philippe Gomès et les autres membres de la liste du groupe Calédonie Ensemble ont alors présenté leur démission, provoquant à nouveau, en application de l’article 121 de la loi organique, la démission de plein droit du gouvernement.

Le 1er avril 2011, pour la troisième fois en six semaines, les cinquante-quatre élus du congrès se sont réunis pour élire un gouvernement. MM. Harold Martin et Gilbert Tyuienon ont été renouvelés dans leurs fonctions de président et de vice-président. Comme pour les deux gouvernements précédents, la démission des membres de la liste Calédonie Ensemble a entraîné la démission de plein droit du gouvernement.

Un nouveau gouvernement devait en principe être élu dans un délai de quinze jours, soit au plus tard le 16 avril 2011.

Cependant, le 1er avril, le congrès de la Nouvelle-Calédonie, réuni en séance publique extraordinaire, a adopté une résolution demandant à l’État de modifier l’article 121 de la loi organique pour empêcher les démissions à répétition ainsi qu’un vœu demandant au président du congrès de ne plus convoquer cette assemblée pour élire le gouvernement, tant que la loi organique n’a pas été adoptée.

Quinze jours après le dépôt du présent projet de loi organique sur le bureau du Sénat le 25 mai 2001, le congrès s’est réuni et a fixé, par délibération du 12 mai, le nombre de membres du nouveau gouvernement à former à onze. La date de l’élection a été fixée au 10 juin. Après avoir été élu à cette date, M. Harold Martin a été réélu à la présidence et M. Gilbert Tyuienon à la vice-présidence. La répartition des « secteurs d’animation et de contrôle », domaines de compétence des différents membres du gouvernement, a eu lieu le 16 juin, avec un vote négatif des trois membres de Calédonie ensemble.

Depuis cette date, la question de la pérennité du gouvernement actuel reste posée.

b) La mise à mal de la collégialité et la pluralité politiques définies par l’accord de Nouméa

Les principes de consensus et de pluralité politique fondent l’équilibre institutionnel défini par l’accord de Nouméa, qui préserve ainsi les droits des minorités et assure la participation des loyalistes et des indépendantistes au gouvernement.

Le point 2.3. du document d’orientation de l’accord de Nouméa prévoit en effet que « L’Exécutif de la Nouvelle-Calédonie deviendra un gouvernement collégial, élu par le Congrès, responsable devant lui.

« L’Exécutif sera désigné à la proportionnelle par le Congrès, sur proposition par les groupes politiques de listes de candidats, membres ou non du Congrès. L’appartenance au Gouvernement sera incompatible avec la qualité de membre du Congrès ou des assemblées de province. Le membre du Congrès ou de l’assemblée de province élu membre du Gouvernement est remplacé à l’assemblée par le suivant de liste. En cas de cessation de fonctions, il retrouvera son siège.

« La composition de l’Exécutif sera fixée par le Congrès. »

Ainsi toutes les sensibilités et les groupes politiques représentés au sein du congrès sont amenés à présenter une liste de candidats pour l’élection des membres du gouvernement et à être présents au sein du gouvernement : lors de l’élection du 10 juin 2011, les quatre listes déposées se sont partagées l’intégralité des voix des cinquante-quatre membres du congrès.

Ainsi, la démission de plein droit du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, telle que la prévoit l’article 121 de la loi organique, permet à un groupe minoritaire au sein du congrès de mettre en cause le fonctionnement de l’exécutif lorsqu’il ne lui semble pas conforme aux principes de consensus et de collégialité.

c) Le détournement d’une disposition visant à protéger le principe de collégialité

L’article 121 de la loi organique a été prévu pour faire face à l’épuisement « naturel » d’une des listes de candidats au gouvernement. En effet, l’équilibre politique de celui-ci serait mis à mal si sa représentativité proportionnelle ne pourrait plus être assurée. Cependant, il a principalement été utilisé comme un moyen de rétablir un équilibre politique à la suite d’une mise en cause de la collégialité du gouvernement.

L’article 121 n’a pas été conçu comme un moyen de renverser le gouvernement. À l’occasion de l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi ayant abouti à la loi organique du 19 mars 1999, notre collègue René Dosière indiquait ainsi dans son rapport que « cet article est le corollaire du principe de désignation par le congrès des membres du gouvernement sur des listes proposées par les groupes. Un membre du gouvernement dont les fonctions prennent fin par constatation de son inéligibilité, incapacité, incompatibilité, démission, révocation ou décès est remplacé par son suivant de liste. À défaut de suivant de liste, le présent article ne prévoit pas d’élection partielle, mais la démission d’office du gouvernement et son renouvellement global. » (7)

Lors de son adoption, le dispositif de l’article 121 n’avait donc été conçu comme une alternative permettant à un groupe minoritaire de faire tomber le gouvernement s’il estime que le fonctionnement de celui-ci ne respecte pas le principe de collégialité.

Cependant, l’étude d’impact rappelle que ce mécanisme a été mis en oeuvre à plusieurs reprises avant février 2011 :

—  le gouvernement de M. Pierre Frogier est tombé en 2002 après la démission des élus du parti Union Calédonienne, pour protester contre le « non-fonctionnement de la collégialité » ;

—  le premier gouvernement de Mme Marie-Noëlle Thémereau est tombé quelques heures après son élection en juin 2004 à l’initiative du Rassemblement, le résultat du vote ayant fait apparaître une erreur de vote d’un représentant ;

—  dans des conditions similaires, le gouvernement de M. Harold Martin a été démissionnaire de plein droit en août 2007 juste après son élection du fait de la démission collective des élus de la liste unique indépendantiste, dont un des bulletins avait été déclaré nul lors du scrutin d’élection du gouvernement.

Toutefois, ce n’est qu’en février 2011 que le mécanisme de la démission de plein droit a été utilisé de façon répétée par un groupe politique, dans le but d’empêcher le fonctionnement normal des institutions calédoniennes et de créer ainsi les conditions d’une dissolution du congrès.

Ce détournement manifeste de la procédure définie à l’article 121 de la loi organique rend nécessaire une modification de ces dispositions, afin que le mécanisme qui vise à assurer une représentation équilibrée des forces politiques du congrès demeure compatible avec une plus grande stabilité gouvernementale.

II. MAINTENIR L’ESPRIT DE COLLÉGIALITÉ DE L’ACCORD DE NOUMÉA TOUT EN EMPÊCHANT LE BLOCAGE DES INSTITUTIONS PAR UNE MINORITÉ

1. Le projet de loi organique fait le choix de la stabilité tout en garantissant à tous de pouvoir participer au gouvernement

a) Concilier la collégialité avec la stabilité

Le projet de loi organique réécrit l’article 121 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, afin de maintenir la possibilité pour un groupe politique de démissionner du gouvernement, mais d’empêcher toutefois que des démissions collectives répétées ne fassent obstacle à l’exercice par l’exécutif de ses prérogatives.

Aussi l’article premier du projet de loi organique prévoit-il que si les membres d’une liste démissionnent collectivement et provoquent ainsi la démission de plein droit du gouvernement, ce dispositif ne peut plus être mis en oeuvre pendant un délai de dix-huit mois. Pendant ce délai, toute nouvelle démission qui ne pourrait être comblée par l’arrivée au gouvernement des suivants de liste des membres démissionnaires n’entraînerait donc pas la démission d’office du gouvernement.

Si les membres démissionnaires d’une liste de candidats ne peuvent être remplacés, le gouvernement pourra continuer de fonctionner en leur absence, en effectif inférieur à celui prévu par le congrès et sans représentants du groupe ayant provoqué la démission, en étant réputé être au complet.

L’article 2 comporte des dispositions transitoires afin d’assurer que pendant les dix-huit mois suivant l’entrée en vigueur de la loi organique, une démission de plein droit du gouvernement qui aurait été provoquée par les dispositions actuelles de l’article 121 puisse être prise en compte dans l’application de ses nouvelles dispositions, dès leur entrée en vigueur.

b) La possibilité laissée au groupe démissionnaire de rétablir sa participation au gouvernement

Afin de préserver la participation des différentes forces politiques calédoniennes au gouvernement, l’article premier du projet de loi organique permet aux groupes démissionnaires qui auraient perdu leur représentation au sein de l’exécutif de la rétablir, malgré l’absence d’élection d’un nouveau gouvernement pendant dix-huit mois.

À cette fin, le groupe qui ne serait plus représenté au gouvernement pourrait déposer à tout moment une nouvelle liste de candidats et rétablir sa participation. Après validation de cette liste, les membres de celle-ci pourraient ainsi retrouver le nombre de sièges que la liste avait obtenu lors de l’élection du gouvernement.

Le groupe démissionnaire assumera seul les conséquences de son choix de sortir du gouvernement et ainsi de renoncer à la collégialité ; cependant, il pourra à tout moment reprendre sa place au sein du gouvernement, en application des « principes à valeur constitutionnelle de collégialité et de proportionnalité du gouvernement issus de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998 » tels que les décrits l’exposé des motifs.

c) Le respect des différentes hypothèses de démission du gouvernement existantes

La modification proposée respecte ainsi le principe de stabilité de l’exécutif, inscrit au deuxième alinéa de l’article 108 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, qui prévoit que « le président et les membres du gouvernement restent en fonction jusqu'à l’expiration du mandat du congrès qui les a élus, sous réserve des dispositions des articles 95, 120, du deuxième alinéa de l'article 121 et du troisième alinéa de l'article 130 » ; le gouvernement est donc élu pour la durée de la mandature du congrès, sauf mise en jeu des mécanismes suivants :

—  l’adoption d’une motion de censure à la majorité du congrès (article 95) ;

—  la démission du gouvernement, décidée à la majorité de ses membres et présentée par son président (article 120) ;

—  l’éviction d’un membre du gouvernement, décidée par le gouvernement avec l’accord du groupe d'élus qui a présenté la liste sur laquelle il a été élu (article 130) ;

—  et désormais, l’impossibilité de remplacer un membre du gouvernement cessant ces fonctions, notamment en cas de démission collective, sauf si une telle situation s’est déjà produite dans les dix-huit mois précédents (article 120, sections III et IV).

Faute de modification de cet article 108 par une coordination insérée au sein du présent projet de loi organique, il conviendra d’interpréter l’exception du second alinéa de l’article 121 (qui est désormais le II de cet article) comme incluant les dispositions des III et IV de la nouvelle rédaction de l’article 121, auxquels le II fait explicitement référence.

d) Les précisions apportées par le Sénat à un mécanisme manquant de lisibilité

Tout en approuvant le mécanisme proposé, la commission des Lois du Sénat a souhaité préciser, par l’adoption de deux amendements, que la liste présentée par le groupe qui ne participe plus au gouvernement est réputée approuvée quarante-huit heures après son enregistrement par le président du congrès, sauf si le tribunal administratif est saisi afin de vérifier l’éligibilité d’un candidat, et que la démission de plein droit du gouvernement ne peut être provoquée par la démission collective des membres d’une liste qu’en cas « d’atteinte au principe de collégialité ».

En séance publique, le Gouvernement a déposé des amendements afin de rétablir une rédaction n’ouvrant pas la porte à des interprétations diverses de la volonté des démissionnaires, en ajoutant à l’hypothèse d’épuisement de la liste, quelle qu’en soit la raison – constatation de son inéligibilité, incapacité, incompatibilité, démission, révocation ou décès – celle du cas où tous « les membres d’une liste présentent simultanément une démission motivée », ce qui ne fait jamais que correspondre à l’un des cas particuliers dans lequel le remplacement par un suivant de liste ne peut intervenir.

Le Sénat a ainsi marqué son souhait de maintien de la possibilité de démission collective comme signal d’alarme d’un dysfonctionnement de la collégialité ; pourtant, le principe de collégialité, de portée constitutionnelle en Nouvelle-Calédonie, justifierait la création d’un mécanisme permettant de le rappeler solennellement sans faire chuter le gouvernement.

2. Le maintien d’un mécanisme d’alerte sur les conditions d’application du principe de collégialité

a) Le choix d’une réforme a minima

Comme il a été indiqué précédemment, le présent projet de loi organique maintient la possibilité pour un groupe politique minoritaire de provoquer la chute du gouvernement en organisant une démission collective. Ce n’est que si une telle situation se répétait dans un délai de dix-huit mois que le départ des membres d’une liste aboutirait au maintien d’un gouvernement qui ne serait plus collégial.

L’étude d’impact détaille les autres solutions envisagées pour concilier le maintien du caractère pluraliste du gouvernement avec la nécessité s’assurer la continuité de l’exercice des pouvoirs publics. Fixer un quorum pour l’élection du président du gouvernement, permettre au haut-commissaire de la République de refuser une démission, prévoir un remplacement des démissionnaires par des élections partielles, ne permettraient pas d’assurer à la fois le respect d’une représentation proportionnelle des forces politiques au sein du gouvernement et la continuité des pouvoirs publics en Nouvelle-Calédonie.

Le choix fait permet de maintenir la faculté laissée à un groupe minoritaire de faire démissionner le gouvernement pour faire face à deux cas de figure :

—  remédier à un incident lors du scrutin de l’élection du gouvernement, ayant abouti à des résultats non conformes au respect du caractère proportionnel de la composition du gouvernement, comme en 2004 et 2007 ;

—  permettre à un groupe de protester contre le manque de collégialité d’une décision du gouvernement.

Cependant, le caractère constitutionnel du principe de collégialité du gouvernement néo-calédonien justifierait l’acclimatation d’un mécanisme spécifique, tel qu’il existe en Belgique.

b) Les risques pesant sur la collégialité dans une Nouvelle-Calédonie prochainement consultée sur son avenir

À l’issue du mandat en cours des membres des assemblées provinciales et du congrès, après les prochaines élections provinciales prévues en mai 2014, commencera la dernière phase prévue par l’accord de Nouméa.

Au cours de son prochain mandat de cinq ans, une consultation électorale, dont la date devra être déterminée par le congrès à la majorité des trois cinquièmes, décidera de l’accession à la souveraineté de la Nouvelle-Calédonie. Si le résultat de cette consultation est négatif, il sera loisible d’organiser deux autres consultations successives.

La dramatisation des enjeux risque ainsi de mettre à mal la culture de la collégialité qui a été mise en place depuis plus de vingt ans. Il est donc utile de mettre d’ores et déjà en place des outils qui permettront de maintenir ce principe en application.

Dans ce cadre, il serait utile qu’un mécanisme spécifique permette à un groupe d’exprimer solennellement son désaccord avec une décision risquant de nuire fortement aux relations entre les communautés. Une telle procédure existe au sein de la constitution de la Belgique, permettant à une communauté linguistique de demander le retrait momentané d’un projet qui porterait atteinte gravement à l’une des communautés (8).

Il semble concevable d’imaginer qu’un groupe minoritaire au sein du congrès de la Nouvelle-Calédonie puisse ainsi demander le réexamen d’un projet, s’il estime que celui-ci est de nature à mettre en péril la collégialité du gouvernement et l’équilibre entre les communautés.

Cependant même durant sa dernière phase, votre rapporteur espère que l’esprit et les principes de l’accord de Nouméa, qui aura organisé vingt ans de développement pacifique et d’évolution institutionnelle, puissent être considéré par tous les partis et toutes les composantes de la société néo-calédonienne comme un socle constitutionnel pour le dialogue qui sera amené à définir les termes de la question qui sera posée aux citoyens calédoniens pour déterminer leur avenir commun.

*

* *

DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine, au cours de sa réunion du mercredi 22 juin 2011, le projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

Après l’exposé du rapporteur, une discussion générale s’engage.

M. Gaël Yanno. Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie présente la particularité d’être élu à la proportionnelle et collégial. Autre particularité, il peut être renversé par un seul parti politique. Cette organisation particulière a été approuvée par l’ensemble des partis politiques, dans un esprit de sagesse et de responsabilité, l’échec du statut Lemoine, puis du statut Pons les ayant convaincus de l’incapacité d’un exécutif démocratique classique à résoudre la crise politique.

Nous n’avions cependant pas prévu qu’un parti politique – Calédonie ensemble, en l’espèce – abuse de ces principes de collégialité et de proportionnalité et de cette possibilité pour une minorité de renverser le Gouvernement, au point qu’on peut parler, comme l’a fait le rapporteur, de détournement de procédure. On en est aujourd’hui à un quatrième gouvernement Martin, à la suite de trois démissions en deux mois.

L’adoption d’un article 121 révisé est indispensable pour remédier à ces dérives. Alors que nous avions, avec Pierre Frogier, envisagé de procéder par voie d’amendements, le Gouvernement a préféré passer par un projet de loi organique. Si la rédaction de celui-ci ne nous satisfait pas totalement, elle nous semble à même d’assurer le plus important, à savoir la stabilité des institutions. Celle-ci est en effet une des conditions la préservation de la paix civile en Nouvelle-Calédonie, les Néo-Calédoniens ayant la hantise de connaître la même instabilité gouvernementale qu’en Polynésie.

Sur votre proposition, monsieur le président, je ne défendrai donc pas les cinq amendements que nous voulions originellement présenter, tout en regrettant que le Gouvernement ne les ait pas examinés de façon plus attentive. Je voudrais cependant présenter rapidement ces propositions, qui nous semblaient susceptibles d’assurer un meilleur fonctionnement des institutions locales. Il s’agissait d’octroyer au président du gouvernement des pouvoirs de police administrative ; de permettre aux établissements publics d’enseignement de Nouvelle-Calédonie de disposer d’un régime budgétaire et comptable dérogatoire ; d’autoriser les présidents de province à conclure, par délégation de leur assemblée, des contrats de travaux, de fournitures et de service d’un faible montant ; de permettre aux assemblées de province d’adopter une délibération autorisant l’exécutif local à signer un marché avant l’engagement de la procédure de passation de marché ; enfin de permettre aux membres du sénat coutumier de siéger au conseil économique et social, possibilité prévue par l’accord de Nouméa.

Je déplore qu’on ne puisse pas voter ces dispositions consensuelles dans le cadre de ce projet de loi organique.

M. René Dosière. Les institutions de Nouvelle-Calédonie sont tout à fait particulières. On doit ainsi rappeler l’existence d’une citoyenneté calédonienne dont sont exclus certains citoyens français installés depuis trop peu de temps en Nouvelle-Calédonie pour avoir le droit de voter aux élections provinciales.

M. Gaël Yanno. Les citoyens français installés en Nouvelle-Calédonie depuis le 6 novembre 1999 n’ont toujours pas le droit de voter aux élections provinciales !

M. René Dosière. Nous n’allons pas recommencer le débat de 1999. Cette disposition était prévue dans l’accord de Nouméa.

M. Gaël Yanno. C’est faux ! Les Néo-Calédoniens s’étaient prononcés en faveur du principe d’un corps électoral « glissant ».

M. René Dosière. Le Conseil constitutionnel a tranché.

M. Gaël Yanno. En notre faveur, et c’est précisément ce qui a rendu la révision constitutionnelle nécessaire, le Conseil ayant clairement dit que l’accord de Nouméa prévoyait un corps électoral glissant.

M. René Dosière. Au mépris du vote du Parlement, la loi organique prévoyant un corps électoral « gelé ».

M. Gaël Yanno. C’est faux encore une fois, s’agissant du moins des élections provinciales. C’est un véritable déni de démocratie que de priver ainsi des citoyens français du droit de vote pendant des durées aussi longues.

M. René Dosière. L’accord de Nouméa disposait par ailleurs que les transferts de compétences à la Nouvelle-Calédonie étaient irréversibles et que le congrès de la Nouvelle-Calédonie était doté d’un pouvoir législatif. Enfin, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie devait être constitué à la représentation proportionnelle, dont je ne vois pas en quoi elle serait moins démocratique que la représentation majoritaire.

Ce particularisme institutionnel s’explique par le fait que la Nouvelle-Calédonie est en voie de décolonisation pacifique, ce qui est une nouveauté dans l’histoire coloniale de la France. Les deux peuples engagés dans ce processus de décolonisation revendiquent avec la même légitimité ce territoire comme leur pays. Au terme de ce processus, et au plus tard en 2018, la population néo-calédonienne devra s’exprimer pour ou contre l’accession à la souveraineté pleine et entière.

Le groupe socialiste est tout à fait favorable au projet de modification de l’article 121, relatif à la composition du gouvernement, qui nous est aujourd’hui soumis.

Mais pourquoi cette modification s’imposait-elle ? En raison d’une dérive dont je proposerai une analyse sans doute moins polémique que celle de M. Yanno, dans la mesure où je suis plus éloigné des jeux politiques locaux. Alors qu’à l’époque de la loi organique ne s’opposaient que deux composantes, les indépendantistes du FLNKS et le RPCR, ce dernier a éclaté en plusieurs groupes cependant que l’autre camp s’est désuni. Or, comme toujours, on s’en prend plus à ses anciens amis qu’à ses adversaires… Je ne veux pas m’immiscer dans la vie politique locale, mais nous ne pouvons laisser mettre en cause l’accord de Nouméa sans intervenir.

D’autre part, jusqu’ici, le processus de décolonisation de la Nouvelle-Calédonie a été soutenu par la gauche comme par la droite de métropole mais, avec le temps, une partie de ces forces méconnaît parfois la situation dans la collectivité, comme en témoignent certaines réactions à des dispositions sur le droit de vote, pourtant au cœur de l’accord de Nouméa. Il conviendrait que la métropole et l’Assemblée soient tenues précisément informées de l’évolution en Nouvelle-Calédonie, et je renouvelle donc mon souhait que notre Commission crée une mission d’information qui pourrait faire des propositions pour l’après-Nouméa, car nous devons préparer l’avenir sans entrer dans querelles politiques locales.

*

* *

La Commission en vient à l’examen des articles.

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE

Article 1er

(art. 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie)


Conditions de mise en
œuvre de la démission de plein droit du gouvernement en cas de démission collective des membres d’une liste

Le présent article modifie l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, relatif au remplacement des membres du gouvernement, afin que la démission de l’ensemble des candidats d’une liste ne provoque plus automatiquement la démission d’office du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie si ce mécanisme a déjà été mis en œuvre dans les dix-huit mois précédents, tout en permettant aux groupes de représentants au congrès ayant présenté la liste démissionnaire de désigner de nouveaux candidats pour rétablir leur participation du gouvernement.

1. Le mécanisme prévu par la rédaction actuelle de l’article 121

a) La composition et la formation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie

L’article 121 est relatif aux conséquences de la cessation de ses fonctions par un membre du gouvernement. Cet article fait partie de la section 1 du chapitre III du titre III de la loi organique n° 99-209, relative à la composition et à la formation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. Comme prévu par le point 2.3. de l’accord de Nouméa (9), ce gouvernement est collégial et désigné à la proportionnelle par le congrès.

Après avoir déterminé l’effectif du gouvernement, qui doit être compris entre cinq et onze membres en application de l’article 109, le congrès en élit les membres au scrutin de liste à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, tel que le prévoit l’article 110.

Ces listes de candidats, qui peuvent ou non être membres du congrès, sont présentées par les groupes d’élus constitués au sein du congrès en application de l’article 79 ; elles doivent comporter un nombre de candidats égal au nombre de sièges déterminé préalablement, augmenté de trois.

Si les candidats ne doivent pas nécessairement être membres du congrès, ils doivent être électeurs et éligibles aux assemblées de province (10; leur éligibilité peut être constatée devant le tribunal administratif avant l’organisation du scrutin (11), les listes devant être remises au président du congrès au plus tard cinq jours avant le scrutin.

Afin de clore le processus de mise en place de l’exécutif néo-calédonien, à l’issue de leur désignation, les membres du gouvernement élisent le président et le vice-président, en application de l’article 115.

b) Les conséquences de la cessation des fonctions d’un membre du gouvernement en application de l’article 121

Le premier alinéa de l’article 121 organise le remplacement d’un membre du gouvernement ; il prévoit que si un membre du gouvernement cesse d’exercer ses fonctions, qu’elle qu’en soit la raison – constatation de son inéligibilité, incapacité, incompatibilité, démission, révocation ou décès – il est immédiatement remplacé au sein du gouvernement par le suivant de la liste sur laquelle il a été élu.

Le second alinéa organise les conséquences de cette cessation de fonctions lorsque ce remplacement ne peut plus être mis en œuvre, notamment lorsque les démissions successives ont épuisé l’effectif d’une liste, ou lorsque tous les membres d’une même liste démissionnent en même temps.

Le second alinéa de l’article 121 dispose que dans ces circonstances, le gouvernement est démissionnaire de plein droit. Un nouveau gouvernement doit être élu dans un délai de quinze jours ; dans l’intervalle, le gouvernement considéré comme démissionnaire a en charge l’expédition des affaires courantes.

Ainsi, la démission collective de l’ensemble des membres d’une seule liste peut conduire à la chute de l’ensemble du gouvernement. La mise en œuvre de ce mécanisme peut être considérée comme un détournement de la procédure prévue à l’origine par l’article 121 dans l’objectif de garantir le caractère pluraliste du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

2. Un mécanisme dont l’utilisation a détourné l’esprit de l’accord de Nouméa

Depuis l’entrée en vigueur de la loi organique du 19 mars 1999, la mise en œuvre de ce mécanisme a toujours été la conséquence d’une démission collective de l’ensemble des membres d’une liste, et non de remplacements au fil de l’eau de départs successifs de membres du gouvernement, conduisant à épuiser la liste initiale de candidats.

Par le passé, cette utilisation visait à permettre de provoquer une nouvelle élection et de renouveler le gouvernement ; depuis février dernier, il s’agit d’empêcher le fonctionnement normal des institutions calédoniennes et de créer ainsi les conditions d’une éventuelle dissolution.

a) La démission collective pour provoquer l’élection d’un nouveau gouvernement

Comme le reconnaît l’étude d’impact, « ni la lettre du texte, ni la jurisprudence administrative ne permettent d’exclure ces démissions collectives. » Ce mécanisme a été utilisé une première fois par un groupe pour protester contre les difficultés de la collégialité, aboutissant à renverser le gouvernement en novembre 2002. Par la suite, en juin 2004 puis en 2007, ces dispositions ont permis de provoquer une nouvelle élection du gouvernement à la suite d’une erreur matérielle ou de défaut de discipline partisane.

Ces démissions permettent ainsi à un groupe ne disposant pas de la majorité absolue de provoquer la démission du gouvernement, alors que les dispositions de l’article 95 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 prévoient que le gouvernement ne peut être normalement renversé par le congrès que par l’adoption d’une motion de censure à la majorité absolue de ses membres.

Lors de son adoption, le dispositif de l’article 121 n’avait été conçu comme une alternative permettant à un groupe minoritaire de faire tomber le gouvernement s’il estime que le fonctionnement de celui-ci ne respecte pas le principe de collégialité.

À l’occasion de l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi ayant abouti à la loi organique du 19 mars 1999, notre collègue René Dosière indiquait ainsi dans son rapport que « cet article est le corollaire du principe de désignation par le congrès des membres du gouvernement sur des listes proposées par les groupes. Un membre du gouvernement dont les fonctions prennent fin par constatation de son inéligibilité, incapacité, incompatibilité, démission, révocation ou décès est remplacé par son suivant de liste. À défaut de suivant de liste, le présent article ne prévoit pas d’élection partielle, mais la démission d’office du gouvernement et son renouvellement global. » (12)

b) La démission collective pour empêcher le fonctionnement normal des institutions calédoniennes

Si la démission collective a été utilisée comme substitut à la motion de censure pour renverser le gouvernement de façon ponctuelle par le passé, elle est pratiquée de façon systématique depuis février 2011 :

—  à l’initiative de la liste présentée par le groupe UC-FLNKS le 17 février 2011 :

—  puis à l’initiative de la liste présentée par le groupe Calédonie Ensemble les 3 mars, 17 mars et 1er avril 2011.

Les juridictions administratives saisies n’ont pu que confirmer la validité des conditions dans lesquelles se sont déroulées ces démissions collectives et la chute subséquente des gouvernements concernés.

Dans son avis n° 03/11 du 24 février 2011, le tribunal administratif de Nouméa considère que « dès lors que la loi prévoit que le congrès fixe le nombre des membres du gouvernement, il n’est pas possible juridiquement que le gouvernement ait un nombre de membre inférieur à celui ainsi fixé ; que, d’autre part, en l’absence de la possibilité de procéder à l’élection du président et du vice président, le nouveau gouvernement ne peut être regardé comme étant complètement constitué et ne peut donc entrer en fonction. Il s’en suit et sans qu’il soit besoin de qualifier de gouvernement de « démissionnaire de plein droit », qu’une nouvelle élection de l’ensemble des membres du gouvernement doit être organisée par le congrès dans les conditions prévues aux articles 109, 110 et 121 de la loi organique. »

Saisi de la régularité de l’élection du 3 mars 2011, le Conseil d’État a reconnu dans sa décision du 8 avril 2011 que ces démissions collectives et systématiques, quoique régulières, présentaient « le caractère d’une manœuvre électorale », mais « qui doit demeurer sans incidence sur la régularité du scrutin ».

Depuis quatre mois, la répétition des démissions collectives empêche ainsi le gouvernement d’exercer la plénitude de ses prérogatives et peut à terme produire des effets très dommageables pour la Nouvelle-Calédonie.

L’article 108 de la loi organique de 1999 prévoit qu’en pareil cas, « le gouvernement assure l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’entrée en fonction du nouveau gouvernement ». Cependant, en application de la jurisprudence du Conseil d’État du 4 avril 1952, Syndicat régional des quotidiens d’Algérie, ces dispositions ne lui permettent que de prendre des décisions urgentes, des mesures indispensables pour assurer la continuité du service public et ou relevant d’un faible pouvoir d’appréciation du gouvernement.

Cette gestion courante empêche le gouvernement de mettre en œuvre des projets importants pour le développement de la Nouvelle-Calédonie et va donc à l’encontre du caractère consensuel prévu par l’accord de Nouméa.

Il s’agit donc bien d’empêcher le fonctionnement normal des institutions calédoniennes et de créer ainsi les conditions d’une éventuelle dissolution du congrès. En application de l’article 97 de la loi organique, celle-ci peut être provoquée par un décret en conseil des ministres, lorsque le fonctionnement du congrès « se révèle impossible ». De nouvelles élections doivent alors être organisées dans les deux mois.

3. Le projet de loi organique limite les cas de démission de droit du gouvernement en cas de démission collective des membres d’une liste

Face à cette situation de blocage des institutions de la Nouvelle-Calédonie par un groupe minoritaire, le présent projet de loi organique propose de conserver le mode de désignation, qui découle directement de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998. Plutôt que de remettre en cause le caractère pluraliste du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, le projet limite les effets d’une démission collective sur le maintien en place du gouvernement.

a) L’avant-projet soumis au congrès de la Nouvelle-Calédonie

L’avant-projet de loi organique soumis pour avis au congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Cet avant-projet maintenait le mécanisme de la démission d’office du gouvernement, tout en limitant ses effets en cas de répétition. Il proposait ainsi d’instaurer, après toute démission en bloc, un délai de dix-huit mois pendant lequel une nouvelle démission collective ne remettrait pas en cause le gouvernement en place. La démission collective ne pourrait donc être utilisée par un groupe politique pour renverser le gouvernement qu’une fois tous les dix-huit mois.

Afin de permettre, dans cette hypothèse, au groupe dont est issue la liste démissionnaire de rétablir sa représentation au sein du gouvernement, l’avant-projet prévoyait qu’une élection partielle serait organisée. Si le groupe qui n’était plus représenté au gouvernement ne déposait pas de nouvelle liste de candidats pour une élection partielle, le gouvernement aurait été réputé complet.

Dans son avis du 6 mai 2011, le congrès de la Nouvelle-Calédonie s’est déclaré favorable à l’adoption de ce projet « dans sa majorité », en soulignant qu’il avait demandé, dans une résolution n° 132 du 1er avril 2011, une telle modification organique.

Cet avis proposait toutefois la suppression du mécanisme visant à permettre, par une élection partielle, à un groupe qui ne serait plus représenté au gouvernement après une démission collective présentée pendant le délai de carence de rétablir sa participation au sein de l’exécutif. Le congrès proposait, à la majorité, de prévoir simplement qu’en cas de nouvelle démission collective dans le délai de dix-huit mois, « le gouvernement est réputé complet ».

Les groupes UNI (Union nationale pour l’indépendance) et Calédonie Ensemble ont souhaité joindre à l’avis du congrès une opinion.

Le groupe UNI a émis un avis favorable au projet soumis au congrès, sous réserve de deux modifications :

—  que le délai de carence soit ramené de dix-huit à douze mois, « afin de préserver la possibilité pour un groupe du congrès représenté minoritairement au sein du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de se prévaloir du deuxième alinéa de l’article 121 pour s’assurer d’un fonctionnement collégial du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie » ;

—  qu’une élection partielle, par un vote à la majorité simple des suffrages exprimés, permette au groupe dépourvu de représentation au gouvernement de la rétablir en présentant une nouvelle liste de candidats.

Le groupe Calédonie Ensemble a estimé que le projet soumis au congrès était contraire à l’accord de Nouméa, car elle substituait une logique majoritaire à la logique collégiale, portant ainsi « atteinte aux droits de la minorité ».

b) Le projet de loi organique soumis au Sénat

Le projet de loi organique, dans sa rédaction déposée sur le bureau du Sénat le 25 mai dernier intègre le délai de carence de dix-huit mois, pendant lequel le gouvernement ne peut être renversé par la mise en jeu du dispositif permettant à la minorité de faire « chuter » le gouvernement. Toutefois, le gouvernement serait démissionnaire de plein droit si, dans le délai de dix-huit mois suivant la précédente mise en œuvre de l’article 121, les membres issus de la majorité démissionnaient.

Le mécanisme de la démission d’office, et notamment son utilisation pour protester solennellement contre une atteinte à la collégialité, serait donc préservé, mais encadré, afin d’éviter un usage répété à des fins de déstabilisation des institutions.

Le projet de loi organique maintient, dans l’hypothèse où le gouvernement est déclaré démissionnaire, les modalités définies en 1999, selon lesquelles il est procédé à l’élection d’un nouveau gouvernement dans un délai de quinze jours. Le gouvernement démissionnaire devrait assurer l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection du nouveau gouvernement.

Le IV de la rédaction proposée permet à tout groupe politique qui ne serait plus présent au sein du gouvernement et dont la liste de candidats est épuisée de rétablir sa participation à l’exécutif. Il s’agit d’assurer le respect d’une représentation proportionnelle des groupes composant le congrès et de la collégialité.

Ce mécanisme pourrait être mis en œuvre si le nombre de membres du gouvernement à remplacer est inférieur à la moitié de son effectif et si, au cours des dix-huit mois précédents, le gouvernement a fait l’objet d’une démission de plein droit en application du III.

Le groupe politique dont la liste ne permettrait plus d’assurer le remplacement des membres ayant cessé leurs fonctions pourrait notifier à tout moment au haut-commissaire et au président du congrès une nouvelle liste de représentants en nombre égal au nombre de sièges à pourvoir, augmenté de trois. L’éligibilité de ces candidats devrait être vérifiée dans les conditions prévues à l’article 110 de la loi organique.

L’enregistrement de la nouvelle liste de représentants vaudrait élection de ces représentants. Il ne serait donc pas nécessaire de procéder à une élection comme le prévoyait l’avant-projet que le gouvernement avait soumis au congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Si le groupe qui n’est plus représenté au gouvernement ne faisait pas usage de cette faculté, le gouvernement serait réputé complet.

c) Le texte adopté par le Sénat

L’article premier du projet de loi organique réécrit l’article 121, dont il reprend cependant la rédaction actuelle du I sans modification. En cas de cessation des fonctions d’un membre du gouvernement, à la suite notamment de la survenance d’une inéligibilité, incapacité, incompatibilité, démission, révocation ou du décès de cet élu, il est remplacé par le candidat suivant sur la liste sur laquelle il a été élu.

Le II de l’article 121, tel que modifié par le projet de loi organique, prévoit que lorsqu’il ne peut plus être procédé au remplacement d’un membre du gouvernement ayant cessé d’exercer ses fonctions en faisant appel au suivant de liste, s’applique le mécanisme définie aux sections III et IV suivantes.

La commission des Lois du Sénat a adopté un amendement ajoutant à cette première hypothèse une seconde : « lorsque les membres d’une liste présentent simultanément leur démission en cas d’atteinte au principe de collégialité ». Cette adjonction n’était pas sans ouvrir la porte à de multiples questions d’interprétation : comment caractériser une démission simultanée ? Comment définir l’atteinte au principe de collégialité ?

Cette seconde hypothèse ajoutant plus de confusion que de solution à la situation de crise que connaît la Nouvelle-Calédonie, en séance publique, le Sénat a substitué à ce cas celui de la « démission motivée » des membres d’une liste.

Aussi, la rédaction du II de l’article 121 adoptée par le Sénat prévoit que les dispositions du III ou du IV seraient applicables lorsqu’un membre du gouvernement qui cesserait ses fonctions ne peut plus être remplacé par le candidat suivant de liste – c’est-à-dire lorsque cette liste est épuisée – ou si tous « les membres d’une liste présentent simultanément une démission motivée », ce qui ne fait jamais que correspondre à l’un des cas particuliers dans lequel le remplacement par un suivant de liste ne peut intervenir.

En cas de survenue de cette situation, les III et IV prévoient une alternative, suivant les cas où l’une ou l’autre des circonstances suivantes est remplie :

—  si le nombre de membres du gouvernement cessant leurs fonctions ou démissionnaires et ne pouvant être remplacés correspond à la majorité de l’effectif du gouvernement ou si le gouvernement n’a pas été déclaré démissionnaire de plein droit au cours des dix-huit mois précédents en application des mêmes dispositions, le III prévoit que le gouvernement est alors considéré démissionnaire de plein droit, comme le prévoit la rédaction actuelle de l’article 121. Il est alors chargé de l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection de son successeur, dans un délai de quinze jours ;

—  si aucune des deux conditions précédentes, prévues au III, est remplie (13), le mécanisme prévu au IV du texte de l’article 121 adopté par le Sénat s’appliquerait : ses dispositions constituent le point essentiel du dispositif proposé par le Gouvernement.

Dans ce cas, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne sera plus considéré comme démissionnaire, mais sera au contraire réputé comme étant au complet, même en l’absence de membres représentant une liste ayant obtenu un ou plusieurs sièges lors de l’élection du gouvernement.

Cependant, en application des principes de pluralité politique et de collégialité, le groupe politique à l’origine de la démission collective pourrait, selon ces dispositions, à tout moment rétablir sa présence au sein du gouvernement, sans qu’il y ait à procéder à une nouvelle élection. Il devrait alors présenter au haut-commissaire et au président du congrès une nouvelle liste de candidats, en nombre égal et remplissant les mêmes conditions nécessaires à l’élection des membres du gouvernement prévues par le premier alinéa de l’article 110.

Si l’éligibilité des candidats n’est pas contestée ou à l’issue de sa vérification par le tribunal administratif – procédure qui ne peut prendre plus de quatre-vingt-seize heures en application du quatrième alinéa de l’article 110 – l’enregistrement de cette liste « vaut adoption de la liste de candidats à l’élection des membres du gouvernement » : les premiers candidats y figurant, en nombre correspondant au nombre de sièges obtenu par la liste démissionnaire, seraient alors présumés élus et prendraient immédiatement leurs fonctions au sein du gouvernement, dans le respect des résultats de l’élection précédente et sans qu’un nouveau scrutin ne soit organisé.

La commission des Lois du Sénat avait souhaité insérer, au sein de cette section, le mécanisme de vérification des conditions d’éligibilité des membres de cette liste et avait prévu que leur entrée en fonction au sein du gouvernement ne pourrait avoir lieu qu’après enregistrement de la liste et éventuel contrôle juridictionnel de l’éligibilité des candidats. À la suite de l’adoption d’un amendement déposé par le Gouvernement en séance publique, le dispositif du projet de loi organique initial a été rétabli, avec quelques précisions rédactionnelles bienvenues proposées par le rapporteur de la commission des Lois du Sénat.

Ainsi, le dispositif proposé ne supprime-t-il pas la possibilité, laissée à un groupe politique minoritaire, de contraindre le gouvernement à être démissionnaire de plein droit, en organisant la démission de l’ensemble de ces membres susceptibles de le représenter au sein du gouvernement ; cependant, en limitant l’utilisation de cette faculté dans le temps, il évite le détournement de cette procédure à des fins de blocage des institutions de la Nouvelle-Calédonie.

d) L’actualisation des différentes hypothèses de démission du gouvernement

La modification proposée respecte ainsi le principe inscrit au deuxième alinéa de l’article 108 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, qui prévoit que « le président et les membres du gouvernement restent en fonction jusqu'à l’expiration du mandat du congrès qui les a élus, sous réserve des dispositions des articles 95, 120, du deuxième alinéa de l'article 121 et du troisième alinéa de l'article 130 » ; le gouvernement est donc élu pour la durée de la mandature du congrès, sauf mise en jeu des mécanismes suivants :

—  l’adoption d’une motion de censure à la majorité du congrès (article 95) ;

—  la démission du gouvernement, décidée à la majorité de ses membres et présentée par son président (article 120) ;

—  l’éviction d’un membre du gouvernement, décidée par le gouvernement avec l’accord du groupe d'élus qui a présenté la liste sur laquelle il a été élu (article 130) ;

—  et désormais, l’impossibilité de remplacer un membre du gouvernement cessant ces fonctions, notamment en cas de démission collective, sauf si une telle situation s’est déjà produite dans les dix-huit mois précédents (article 120, sections III et IV).

Faute de modification de cet article 108 par une coordination insérée au sein du présent projet de loi organique, il conviendra d’interpréter l’exception du second alinéa de l’article 121 (qui est désormais le II de cet article) comme incluant les dispositions des III et IV de la nouvelle rédaction de l’article 121, auxquels le II fait explicitement référence.

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 2

Dispositions transitoires

Adopté sans modification par le Sénat, cet article précise les modalités d’application du dispositif prévu par l’article 1er, dans les dix-huit mois suivant l’entrée en vigueur du présent texte. Il prévoit, en quelque sorte, l’application rétroactive de la condition de répétition de cas de démission collective dans une durée de dix-huit mois.

Il prévoit ainsi que, dans les dix-huit mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi organique, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne pourra pas être démissionnaire de plein droit dès lors qu’une démission de droit sera intervenue dans les dix-huit mois précédents et ce, quel que soit le fondement juridique de cette première démission :

—  le droit actuellement en vigueur, c’est-à-dire la mise en œuvre des dispositions du second alinéa de l’article 121 dans sa rédaction actuelle ;

—  la nouvelle rédaction du III de l’article 121, telle qu’elle résulte de l’article premier du présent projet de loi organique.

La Commission adopte l’article sans modification.

Après l’article 2

M. le président Jean-Luc Warsmann. Monsieur Yanno, pouvons-nous considérer que vos cinq amendements sont retirés, dans l’attente d’un support plus adéquat ?

M. Gaël Yanno. Oui, monsieur le président. Mais le Gouvernement de la République aurait tout intérêt à régler ces questions.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Nous vous appuierons, monsieur le rapporteur et moi.

Les amendements CL 5, CL 2, CL 1, CL 4 et CL 6 sont retirés.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi organique sans modification.

*

* *

En conséquence, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi organique modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie (n° 3538), dans le texte figurant dans le document joint au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte adopté par le Sénat

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Texte adopté par la Commission

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Projet de loi organique modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie

Projet de loi organique modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie

 

Article 1er

Article 1er

Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie

L’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie est ainsi rédigé :

(Sans modification)

Art. 121. – Lorsqu’un membre du gouvernement cesse d’exercer ses fonctions, le candidat suivant de la liste sur laquelle celui-ci avait été élu le remplace. Ce remplacement est notifié sans délai au président du congrès et au haut-commissaire, ainsi que, le cas échéant, au président de l’assemblée de province intéressée.

« Art. 121. – I. – Lorsqu’un membre du gouvernement cesse d’exercer ses fonctions, le candidat suivant de la liste sur laquelle celui-ci avait été élu le remplace. Ce remplacement est notifié sans délai au président du congrès et au haut-commissaire, ainsi que, le cas échéant, au président de l’assemblée de province intéressée.

 

Lorsqu’il ne peut plus être fait application de l’alinéa précédent, le gouvernement est démissionnaire de plein droit et il est procédé à l’élection d’un nouveau gouvernement dans un délai de quinze jours. Le haut-commissaire en est informé sans délai. Le gouvernement démissionnaire assure l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection d’un nouveau gouvernement.

« II. – Lorsqu’il ne peut plus être fait application du I ou lorsque les membres d’une liste présentent simultanément une démission motivée, il est procédé comme il est dit aux III et IV.

 

Art. 109. – Cf. annexe.

« III. – Si le nombre de membres du gouvernement à remplacer est égal ou supérieur à la moitié de l’effectif déterminé conformément à l’article 109, ou s’il n’a pas été fait application du présent III dans les dix-huit mois précédents, le gouvernement est démissionnaire de plein droit et il est procédé à l’élection d’un nouveau gouvernement dans un délai de quinze jours. Le haut-commissaire en est informé sans délai. Le gouvernement démissionnaire assure l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection d’un nouveau gouvernement.

 

Art. 109. – Cf. annexe.

Art. 110. – Cf. annexe.

« IV. – Si le nombre de membres du gouvernement à remplacer est inférieur à la moitié de l’effectif déterminé conformément à l’article 109 et s’il a été fait application du III dans les dix-huit mois précédents, tout groupe politique dont la liste ne peut plus servir aux remplacements conformément au I a la faculté de notifier à tout moment au haut-commissaire et au président du congrès une nouvelle liste de candidats, en nombre égal à celui prévu au premier alinéa de l’article 110, dont l’éligibilité est vérifiée dans les conditions prévues au quatrième alinéa du même article. Pour l’application des dispositions de la présente section faisant référence à l’élection des membres du gouvernement, l’enregistrement de la nouvelle liste de candidats dans les conditions fixées au présent IV vaut adoption de la liste de candidats à l’élection des membres du gouvernement conformément à l’article 110.

 
 

« Le gouvernement est réputé complet si la faculté prévue au précédent alinéa n’est pas exercée par le groupe intéressé. »

 
 

Article 2

Article 2

 

Pour l’application de l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 précitée pendant les dix-huit mois suivant la publication de la présente loi :

(Sans modification)

 

1° Au III, les mots : « ou s’il n’a pas été fait application du présent III dans les dix-huit mois précédents » sont remplacés par les mots : « ou s’il n’a été fait application, dans les dix-huit mois précédents, ni du présent III, ni du second alinéa du présent article dans sa rédaction antérieure à la loi organique n°        du        modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie » ; 

 
 

2° Au IV, les mots : « et s’il a été fait application du III dans les dix-huit mois précédents » sont remplacés par les mots : « et s’il a été fait application, au cours des dix-huit mois précédents, des dispositions du III ou de celles du second alinéa du présent article dans leur rédaction antérieure à la loi organique n°        du        modifiant l’article 121 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ».

 

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie

Art. 109. – Le nombre des membres du gouvernement, compris entre cinq et onze, est fixé préalablement à son élection par délibération du congrès.

L’élection des membres du gouvernement a lieu dans les vingt et un jours qui suivent l’ouverture de la première séance du congrès réuni conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l’article 65.

Le congrès ne peut valablement procéder à cette élection que si les trois cinquièmes de ses membres sont présents. Si cette condition n’est pas remplie, la réunion se tient de plein droit trois jours plus tard, dimanche et jours fériés non compris, sans condition de quorum.

Art. 110. – Les membres du gouvernement sont élus au scrutin de liste à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l’ordre de présentation. Les listes de candidats, membres ou non du congrès, sont présentées par les groupes d’élus définis à l’article 79. Elles comprennent un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir augmenté de trois.

Chaque membre du congrès ne peut participer à la présentation que d’une seule liste de candidats.

Les listes sont remises au président du congrès au plus tard cinq jours avant le scrutin. Lecture en est donnée avant l’ouverture du scrutin.

Les candidats doivent satisfaire aux conditions requises pour être électeurs et éligibles aux assemblées des provinces. En cas de doute sur l’éligibilité d’un candidat, le haut-commissaire de la République peut saisir, dans les quarante-huit heures du dépôt des listes, le tribunal administratif qui se prononce dans les quarante-huit heures. Si le tribunal administratif constate qu’un candidat est inéligible, la liste dispose de vingt-quatre heures pour se compléter.

Le président du congrès proclame les résultats de l’élection des membres du gouvernement et les transmet immédiatement au haut-commissaire.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CL1 présenté par MM. Gaël Yanno et Pierre Frogier :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Après l’article 158 de la loi organique n° 99-209 19 mars 1999 précitée, il est inséré un article 158-1 ainsi rédigé :

« Art. 158-1. – Le président de l’assemblée de province, par délégation de l’assemblée, peut être chargé, pour la durée de son mandat, de prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l’exécution et le règlement des contrats de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être réglementairement passés de gré à gré lorsque les crédits sont inscrits au budget.

« Le président de l’assemblée de province rend compte à la plus proche réunion utile de l’assemblée de province de l’exercice de cette compétence. 

« Les dispositions de l’article 158-1 ne s’appliquent aux contrats visés par le présent article que lorsque le président de province n’a pas reçu la délégation prévue à l’article 138-4. »

Amendement CL2 présenté par MM. Gaël Yanno et Pierre Frogier :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Le 1° de l’article 138-1 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 précitée est ainsi rédigé :

« 1° Avec la qualité de membre du gouvernement ou d’une assemblée de province ; ».

Amendement CL4 présenté par MM. Gaël Yanno et Pierre Frogier :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Après l’article 158 de la loi organique n° 99-209 19 mars 1999 précitée, il est inséré un article 158-2 ainsi rédigé :

« Art. 158-2. – La délibération de l’assemblée de province chargeant son président de souscrire un marché déterminé peut être prise avant l’engagement de la procédure de passation de ce marché. Elle comporte alors obligatoirement la définition de l’étendue du besoin à satisfaire et le montant prévisionnel du marché.

« L’assemblée de province peut, à tout moment, décider que la signature du marché ne pourra intervenir qu’après une nouvelle délibération, une fois connus l’identité de l’attributaire et le montant du marché. »

Amendement CL5 présenté par MM. Gaël Yanno et Pierre Frogier :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Après le deuxième alinéa de l’article 134 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il exerce le pouvoir de police administrative pour la protection des personnes, des biens et de l’environnement dans les domaines de compétence relevant de la Nouvelle-Calédonie pour lesquels une telle police est instaurée. »

Amendement CL6 présenté par MM. Gaël Yanno et Pierre Frogier :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« L’article 209-25 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État fixe pour les établissements publics d’enseignement de la Nouvelle-Calédonie les règles d’organisation financières et comptables adaptées à la nature de leur activité correspondant à celles existant au 1er janvier 2011. »

© Assemblée nationale

1 () Population légale selon le recensement effectué en 2009 par l’Institut de la Statistique et des Études Économiques de la Nouvelle-Calédonie (ISEE).

2 () Les recensements enregistrant les données faisant apparaître « l'origine ethnique » des personnes étant admise par dérogation en Nouvelle-Calédonie, à l’occasion du recensement effectué en 2009 sous le contrôle de la CNIL,, 40,3 % des habitants ont déclaré appartenir à la communauté kanake, 29,2 % à la communauté européenne, 11,6 % être originaires des autres îles du Pacifique (et notamment de Wallis-et-Futuna), 3,3 % être originaire d'Asie, 8,3 % appartenir à plusieurs communautés (métis) ; 6 % ont coché la case « autres » et 1,2 % ont refusé de se définir par rapport à une communauté d'appartenance.

3 () Accord sur la Nouvelle-Calédonie signé à Nouméa le 5 mai 1998 et publié au Journal Officiel du 27 mai 1998.

4 () par la loi constitutionnelle n° 98-610 du 20 juillet 1998 relative à la Nouvelle-Calédonie.

5 () Dans une décision n° 328626 du 16 octobre 2009, le Conseil d'État a annulé les élections dans la province des îles Loyauté à l'assemblée de province et au congrès de la Nouvelle-Calédonie, en raison de l'accumulation d'irrégularités, d'une ampleur particulièrement significative. L'article 187 de la loi organique statutaire dispose qu’« en cas de dissolution ou d'annulation globale des opérations électorales dans une circonscription, les élections doivent avoir lieu dans les deux mois. » Aussi le décret n° 2009-1351 du 2 novembre 2009 a-t-il convoqué les électeurs de la province des îles Loyauté le 6 décembre 2009 pour procéder à l'élection au congrès de Nouvelle-Calédonie et à l'assemblée de la province.

6 () Les Nouvelles Calédoniennes, mardi 20 juillet 2010, Où le drapeau FLNKS flottera-t-il vraiment ?

7 () Rapport n° 1295 sur le projet de loi organique (n° 1229) relatif à la Nouvelle-Calédonie et le projet de loi (n° 1228) relatif à la Nouvelle-Calédonie, déposé le 16 décembre 1998 par M. René Dosière.

8 () L’article 54 de la Constitution de la Belgique définit une procédure dite de « sonnette d’alarme », permettant à un groupe linguistique d’interrompre la procédure parlementaire pour provoquer une phase de négociations gouvernementale lorsque ce groupe estime ses droits légitimes gravement lésés. Si lors de la discussion d’une proposition ou d’un projet de loi ou d’ordonnance, une motion motivée signée par les trois quarts au moins des membres d’un des groupes linguistiques déclare que les dispositions d’un projet ou d’une proposition de loi qu’elle désigne sont de nature à porter atteinte aux relations entre les communautés, la procédure parlementaire normale est suspendue et la question est déférée au Conseil des ministres fédéral, qui émet un avis motivé dans les trente jours et invite le parlement à se prononcer soit sur cet avis, soit sur le projet ou la proposition éventuellement amendée.

9 () Accord sur la Nouvelle-Calédonie signé à Nouméa le 5 mai 1998 et publié au Journal Officiel du 27 mai 1998.

10 () en application de l’article 188 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, dont les conditions d’application ont été précisées par la loi constitutionnelle n° 2007-237 du 23 février 2007 modifiant l'article 77 de la Constitution, il s’agit essentiellement de toute personne de nationalité française qui était majeure et résidente de manière principale en Nouvelle-Calédonie avant le 8 novembre 1998, où qui a ayant atteint sa majorité après cette date, est descendante d’une personne satisfaisant ces conditions ou y a résidé dix années avant le 8 novembre 1998, selon la théorie dite du « corps électoral figé ».

11 () L’article 110 prévoit à cet effet qu’« en cas de doute sur l'éligibilité d'un candidat, le haut-commissaire de la République peut saisir, dans les quarante-huit heures du dépôt des listes, le tribunal administratif qui se prononce dans les quarante-huit heures. Si le tribunal administratif constate qu'un candidat est inéligible, la liste dispose de vingt-quatre heures pour se compléter. »

12 () Rapport n° 1295 sur le projet de loi organique (n° 1229) relatif à la Nouvelle-Calédonie et le projet de loi (n° 1228) relatif à la Nouvelle-Calédonie, déposé le 16 décembre 1998 par M. René Dosière.

13 () C’est-à-dire si les membres du gouvernement ayant démissionné et ne pouvant être remplacés représentent la majorité de son effectif ou si un gouvernement a été démissionnaire de plein droit en application de l’article 121 dans les dix-huit mois précédents.