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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 4189

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 janvier 2012.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT, relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle,

PAR M. Hervé Gaymard,

Député.

——

Voir le numéro :

Sénat : 54 rect., 151 et T.A. 23 (2011-2012).

Assemblée nationale : 4065.

INTRODUCTION 5

I.- L’ÉMERGENCE DES BIBLIOTHÈQUES NUMÉRIQUES POSE LE PROBLÈME DES œUVRES INDISPONIBLES 9

A. L’ESSOR DES BIBLIOTHÈQUES NUMÉRIQUES, « UN TRAIT CARACTÉRISTIQUE DU NOUVEAU MILLÉNAIRE »  9

1. Gallica 9

2. Google Books 10

3. Europeana 11

B. LE PROBLÈME DES œUVRES INDISPONIBLES 11

C. L’INSÉCURITÉ JURIDIQUE 13

II.- L’UNION EUROPÉENNE ET LA FRANCE SOUHAITENT APPORTER DES RÉPONSES COMPLÉMENTAIRES 19

A. LA POSITION DE L’UNION EUROPÉENNE 19

1. Le rapport du comité des sages, des recommandations surtout financières 19

2. La proposition de directive sur les œuvres orphelines 20

3. La recommandation de la Commission européenne sur la numérisation et la conservation numérique d’octobre 2011 21

B. LA POSITION DE LA FRANCE 21

III.- LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI : UN MÉCANISME NOUVEAU 25

A. LE TRANSFERT DES DROITS, UNE GESTION MUTUALISÉE 25

1. La création d’une nouvelle société de perception et de répartition des droits (SPRD) 25

2. La possibilité d’opposition donnée aux auteurs ou aux éditeurs 25

B. LES APPORTS DU SÉNAT 26

C. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION 28

TRAVAUX DE LA COMMISSION 31

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 31

II.- EXAMEN DES ARTICLES 41

Article 1er : Définition et modalités d’exploitation des livres indisponibles 41

Article 1er bis : Définition de l’œuvre orpheline 60

Article 2 : Utilisation d’une partie de la rémunération pour copie privée pour le financement d’actions en faveur de la promotion de la lecture publique ; utilisation des sommes non répartissables de la gestion collective des livres indisponibles 62

Article 2 bis (nouveau) : Organisation d’une concertation sur les questions relatives à l’impression des livres à la demande 63

Article 3 : Application de la loi 63

Article 4 : Gage financier 64

TABLEAU COMPARATIF 65

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 74

INTRODUCTION

« Je lègue tous mes manuscrits, et tout ce qui sera trouvé, écrit ou dessiné par moi, à la Bibliothèque Nationale de Paris qui sera un jour la Bibliothèque des États-Unis d’Europe », écrit Victor Hugo, en 1883, dans le codicille de son testament.

C’est à l’aube du XXIe siècle, où la révolution numérique bouleverse les notions de conservation et de démocratisation culturelle, que les États européens peuvent concrétiser le rêve visionnaire de Victor Hugo et réaliser le projet humaniste de création d’une bibliothèque, sinon universelle, du moins européenne.

L’Union européenne manifeste en effet un intérêt particulier pour la numérisation de son patrimoine culturel, enjeu de conservation et d’accès à la connaissance. Le portail Europeana, bibliothèque numérique européenne lancée en 2008, offre ainsi un accès gratuit à plus de 19 millions de documents.

L’action de la France, qui mène un programme ambitieux de numérisation de son patrimoine écrit grâce aux crédits du « grand emprunt », se situe en avance sur ses voisins européens grâce, en particulier, à Gallica, projet français de bibliothèque numérique développé par la Bibliothèque nationale de France (BnF) et inauguré en 1997.

Cependant, à l’heure actuelle, tout projet de numérisation à grande échelle se heurte à la question des droits d’auteur. Une institution ne peut, en effet, sauf exceptions particulières, numériser et mettre à la disposition des internautes des œuvres protégées sans avoir obtenu auparavant l'assentiment des titulaires des droits d'exploitation numérique de ces œuvres.

Le problème se pose avec encore plus d’acuité pour les œuvres dites indisponibles, c’est-à-dire les ouvrages du XXe siècle encore sous droits mais indisponibles dans le commerce, hors marché de l’occasion. La titularité des droits d’exploitation liés à ces œuvres étant incertaine, le XXe siècle représentera un « trou noir » dans le fonds numérisé tant qu’aucune solution juridique autorisant la numérisation à grande échelle de ces œuvres n’aura été mis en place.

Étant donné que le fonds d’œuvres indisponibles du XXe siècle est estimé à environ 500 000 ouvrages encore sous droits, rechercher les ayants droit de chacune de ces œuvres se révèle matériellement impossible. Cette entreprise, coûteuse en temps et en moyens, est bien entendu inenvisageable pour les éditeurs, pour qui rééditer la plupart de ces œuvres ne présente aucune rentabilité économique. Les bibliothèques, quant à elles, n’ont pas la possibilité de négocier l’exploitation des droits avec des tiers

L’enjeu est double : rendre ces œuvres, actuellement consultables en bibliothèque uniquement et donc réservées à un très petit nombre de spécialistes, accessibles au grand public, d’une part ; et opérer la jonction entre les livres tombés dans le domaine public, numérisés dans Gallica, et les livres contemporains, encore disponibles, dont la numérisation et l'exploitation relèvent strictement des ayants droit, notamment des éditeurs, d’autre part.

Or, les initiatives d’opérateurs marchands, notamment Google dont la politique a consisté à numériser indifféremment les œuvres sous droits et libres de droits, rendent urgente la nécessité de légiférer. Le risque de voir un privé s’emparer d’un patrimoine public légitime l’intervention publique. Lorsque Google lance Google Book Search en novembre 2005, l’ambition affichée était de numériser 15 millions d’ouvrages en dix ans. Aujourd’hui, cet objectif est déjà presque atteint puisque, début 2010, Google Livres annonce que la plate-forme permet d’effectuer des recherches sur l’intégralité de plus de 10 millions de livres, dont plus de la moitié ont été numérisés sans l’accord des ayants droit.

Le ministère de la culture et de la communication s’est emparé de cette question et a signé, le 1er février 2011, un accord avec la Bibliothèque nationale de France, le Syndicat national de l’édition, la Société des gens de lettres et le commissariat général à l’investissement, prévoyant la numérisation sur cinq ans de 500 000 ouvrages épuisés, grâce à une subvention accordée dans le cadre du « grand emprunt » ainsi qu’à la mobilisation de fonds privés.

Un intense travail associant les éditeurs, les auteurs, l’administration et le Parlement a ensuite été conduit pendant le premier semestre 2011 pour construire une solution qui garantisse les droits des auteurs et éditeurs. La solution retenue est celle d’une gestion collective paritaire par une société de perception et de répartition des droits (SPRD), qui fait l’objet de la présente proposition de loi.

Celle-ci a été déposée dans les mêmes termes à l’Assemblée nationale par le rapporteur et au Sénat par M. le sénateur Jacques Legendre. Adoptée par la Haute assemblée le 9 décembre 2011, cette proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle propose d’élargir l’accès à ces livres grâce à un mécanisme de gestion collective des droits, qui se substituerait aux dispositions contractuelles pour la représentation et l’exploitation numériques. Les titulaires de droits auraient la possibilité de s’opposer à ce qu’ils soient délégués à une SPRD ; une liste des œuvres indisponibles serait établie par la BnF et ferait l’objet d’une publicité indispensable à l’information des auteurs.

Au cours de cette législature, l’activité législative dans le domaine du livre et de l’édition a été importante : loi n°2010-97 relative aux délais de paiement des fournisseurs dans le secteur du livre, loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, qui procédaient d’initiatives du rapporteur de la présente proposition de loi, amendement du même auteur à la loi de finances pour 2011 visant à étendre le taux réduit de TVA applicable au livre imprimé au prix du fichier numérique.

Avec ce texte, notre pays fera une fois encore figure de pionnier au niveau européen et administre ainsi la démonstration qu’il est possible de concilier la démocratisation de l’accès aux œuvres et le respect de la propriété intellectuelle dans la révolution numérique.

I.- L’ÉMERGENCE DES BIBLIOTHÈQUES NUMÉRIQUES POSE LE PROBLÈME DES œUVRES INDISPONIBLES

A. L’ESSOR DES BIBLIOTHÈQUES NUMÉRIQUES, « UN TRAIT CARACTÉRISTIQUE DU NOUVEAU MILLÉNAIRE » (1)

Si le premier projet de bibliothèque numérique remonte à 1971, avec l’initiative avant-gardiste de Michael Hart, étudiant de l’Université de l’Illinois aux États-Unis qui développe le « projet Gutenberg », site qui annonce aujourd’hui plus de 100 000 livres accessibles via un réseau de partenaires et 30 000 ouvrages consultables gratuitement, l’essor à grande échelle des bibliothèques numériques est beaucoup plus récent et s’est accéléré dans les années 2000.

Les bibliothèques numériques, tentative de définition

Une bibliothèque numérique, également appelée bibliothèque électronique ou bibliothèque virtuelle, est une collection organisée de documents électroniques en accès libre et généralement gratuit sur internet, associée à une interface permettant la recherche et la consultation de ces documents. Les bibliothèques numériques sont très variables en volume et en types de documents. Les ressources peuvent être des documents initialement produits dans un format numérique ou ayant suivi un processus de numérisation : il s’agit alors de copies numériques de documents physiques. Grâce aux bibliothèques numériques, les bibliothèques traditionnelles peuvent rendre compatibles la conservation des documents et la communication de ceux-ci au grand public.

1. Gallica

La Bibliothèque nationale de France (BnF) lance la première version de Gallica en 1997. Conçue à l’origine comme une bibliothèque numérique sélective à vocation encyclopédique proposant des corpus de documents, elle a profondément changé à compter de 2005, en contrepoint des projets de numérisation de Google. La BnF a alors développé à son tour une politique de numérisation de masse. Selon M.  Bruno Racine, Président de la BnF, 24 millions de pages de textes, imprimés, livres ou périodiques ont été numérisées entre 2007 et 2009. Cependant, seule une infime partie des collections de journaux est concernée. Le coût total de ces opérations, stockage compris, s’élève à 6 ou 7 millions d’euros par an. Il est pris en charge par le Centre national du livre (CNL). Un tel niveau de financement par les pouvoirs publics d’une politique de numérisation est unique en Europe.

L’ouverture de négociations avec le Syndicat national de l’édition fin 2007 a permis de franchir une étape importante en ce qui concerne l’accès à des contenus numériques sous droits via Gallica. Près de 20 000 livres contemporains numérisés sont consultables, sous conditions, sur le site de distributeurs numériques.

2. Google Books

En octobre 2004, la société Google annonce son projet de mise en ligne, sur internet, de plusieurs millions d’ouvrages numérisés. Initialement appelé Google Print, le programme Google Book Search comprend deux volets :

– tout d’abord, Google lance la numérisation d’ouvrages d’éditeurs commerciaux avec lesquels des accords ont été signés. Il propose de mettre en ligne des extraits d’ouvrages de façon à en assurer la promotion en vue de leur vente via des services de librairies en ligne ;

– puis, en décembre 2004, l’entreprise prévoit de numériser à grande échelle les collections de cinq bibliothèques publiques anglo-saxonnes partenaires de l’opération (la bibliothèque publique de New York et celles des Universités de Harvard, Stanford, du Michigan aux États-Unis et d’Oxford en Grande-Bretagne). Chaque bibliothèque dispose d’une version numérique des ouvrages, et Google en donne également l’accès de son côté. Il s’agit d’un projet de bibliothèque numérique de 15 millions de livres numérisés sur une durée totale de dix ans.

Dans son article « Bibliothèques numériques et Google Book Search » (2), Jean-Michel Salaün, décrit ainsi la philosophie nord-américaine de la propriété intellectuelle qui sous-tend la démarche de Google : « L’idée primitive était de renverser l’ordre traditionnel. Un livre était considéré comme autorisé à être mis en ligne, sous forme d’extraits, sauf avis contraire des ayants droits. Normalement une autorisation préalable est nécessaire, mais Google, comme il l’a toujours fait, joue le fait accompli. Le pari ici était que les ayants droits verraient dans l’opération une opportunité de promotion lucrative, puisqu’ils étaient intéressés aux ventes des ouvrages. En cas de refus, la firme s’appuyait sur la notion de « fair use » pour une consultation d’extraits ».

Après une suspension de Google Print, en août 2005, pour cause de conflit avec les éditeurs de livres soumis au droit d’auteur, le programme reprend en novembre 2005 sous le nom de Google Book Search. La numérisation des fonds de grandes bibliothèques se poursuit, axée cette fois sur les livres libres de droit, tout comme le développement de partenariats avec les éditeurs qui le souhaitent. Les ouvrages libres de droit sont consultables à l’écran en texte intégral, téléchargeables sous forme de fichiers PDF, et imprimables. En 2007, d’autres bibliothèques universitaires ont rejoint le programme dont la Bibliothèque cantonale et universitaire (BCU) de Lausanne (Suisse), pour la numérisation de 100 000 titres en français, allemand et italien, publiés entre le XVIIe et le XIXe siècle, qui seront consultables dans leur intégralité.

3. Europeana

En novembre 2008, la Commission européenne a lancé un projet de portail de consultation donnant accès à environ 13 millions d’œuvres du patrimoine conservées dans différentes bibliothèques, fonds audiovisuels et centres d’archives. Contrairement à Gallica, Europeana n’est pas une bibliothèque numérique mais un portail d’accès aux ressources numériques des différents pays européens et un moteur de recherche. La majeure partie des documents accessibles a été numérisée par la France, du fait de la politique active de numérisation menée par le gouvernement. Selon les chiffres de la Commission européenne (3), Europeana donne aujourd’hui directement accès à plus de 19 millions d’objets numérisés. L’objectif est de numériser 30 millions d’objets d’ici 2015, et l’ensemble du patrimoine culturel européen en 2025.

Cependant, le portail Europeana n’est pas aujourd’hui à la hauteur des espérances que le projet a suscitées. D’une part, la vision très large du contenu à numériser dans Europeana ne permet pas de définir un périmètre d’action très précis. Loin de se limiter au domaine du livre qui reste minoritaire, Europeana vise l’ensemble du patrimoine culturel et comporte d’ailleurs principalement des images. D’autre part, Europeana ne bénéficie pas des moyens financiers nécessaires à la réalisation d’un projet de cette ampleur. Le portail souffre d’une faible fréquentation, d’un défaut d’organisation des données et d’un manque d’investissement de la part des États, chargés de financer la numérisation.

B. LE PROBLÈME DES œUVRES INDISPONIBLES

L’accès au livre sur support dématérialisé se développe : il constitue à la fois un nouvel usage du livre, un nouveau mode de lecture, plus interactif et délinéarisé, et un nouveau moyen de conservation du patrimoine littéraire.

Il faut souligner que la numérisation d’une œuvre pose le problème des droits d’auteur dans la mesure où elle peut être assimilée à une forme de reproduction. En effet, dans son jugement rendu le 18 décembre 2009, à l’occasion du procès intenté à Google, le tribunal de grande instance de Paris a défini la numérisation comme « une technique consistant en l’espèce à scanner l’intégralité des ouvrages dans un format informatique donné » et a précisé que cette reproduction de l’œuvre « requiert en tant que telle, lorsque [l’œuvre] est protégée, l’autorisation préalable de l’auteur ou de ses ayants droit ».

Pour les nouveautés, les titres sont aujourd’hui édités dans des formats électroniques natifs, permettant une commercialisation numérique.

Pourtant, entre l’offre de véritables livres numériques (e-books), postérieurs pour l’essentiel aux années 2000 et les ressources des bibliothèques numériques, limitées aux titres du domaine public, la production éditoriale du XXsiècle, toujours protégée par le droit d’auteur, reste difficilement accessible au public.

En effet, pour des raisons de faible rentabilité économique, une grande partie des titres publiés au XXe siècle n’a pas été rééditée : les titres sont épuisés sous forme imprimée, indisponibles dans le commerce et ne sont plus accessibles que dans les bibliothèques. Dans ce contexte, la numérisation est le seul horizon envisageable pour faire renaître cet important corpus.

Malheureusement, elle se heurte à d’importants obstacles juridiques : en effet, les éditeurs n’ont fait figurer des dispositions relatives à l’exploitation numérique dans les contrats qu’à partir de la fin du XXe siècle.

La titularité des droits numériques attachés à ces œuvres relativement anciennes est incertaine et sont revendiqués tant par les auteurs que par les éditeurs. Une campagne systématique d’adaptation de centaines de milliers de contrats anciens à la réalité digitale constituerait, pour eux, un travail disproportionné.

En outre, cette adaptation serait peu rationnelle du point de vue économique. La plupart des modèles d’affaires sous-jacents à la réexploitation numérique des œuvres sont ceux de la « longue traîne », peu compatibles avec les coûts de transaction qu’entraînerait la mise à jour des contrats.

À défaut de sécurisation du cadre juridique, l’exploitation numérique des œuvres indisponibles est donc compromise.

Précisons, s’agissant des bibliothèques, qu’elles ne sont pas davantage titulaires des droits numériques sur ces œuvres indisponibles : en dépit des efforts qu’elles ont déployés pour conserver les livres, en l’état du droit, la reproduction numérique d’œuvres protégées par les bibliothèques, sans qu’elles y soient autorisées, constitue une contrefaçon.

Les exceptions au droit d’auteur en faveur des bibliothèques et des services d’archives

En ce qui concerne les bibliothèques et établissements similaires, deux problèmes fondamentaux se posent aujourd’hui: la production de copies numériques de matériels conservés dans les collections des bibliothèques et la fourniture de ces copies numériques aux utilisateurs. La numérisation des livres, du matériel audiovisuel et d’autres contenus peut répondre à deux objectifs: la préservation du contenu pour les générations futures et sa mise à la disposition d’utilisateurs en ligne.

Le cadre législatif actuel ne prévoit pas d’exception générale au droit de reproduction en faveur des bibliothèques ou des archives. La reproduction n’est autorisée que dans des cas précis limitativement énumérés.

Le 8° de l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle n’autorise ainsi que la reproduction et la représentation d’une œuvre effectuées à des fins de conservation ou destinées à préserver les conditions de sa consultation à des fins de recherche ou d’études privées par des particuliers, dans les locaux de l’établissement et sur des terminaux dédiés par les bibliothèques, les musées ou les services d’archives.

Toute numérisation de grande ampleur destinée à mettre les œuvres à disposition d’un large lectorat excède à l’évidence les limites fixées par le code de la propriété intellectuelle et doit être considérée comme une contrefaçon.

La situation, incompréhensible pour le lecteur, a facilité les attaques contre le droit d’auteur, perçu comme une entrave au développement de la société de l’information.

C. L’INSÉCURITÉ JURIDIQUE

L’annonce par Google, le 14 décembre 2004, d’un projet de numérisation de 15 millions de livres en six ans a suscité la crainte de la mainmise d’un opérateur privé sur le patrimoine écrit et a révélé la fragilité juridique du régime des œuvres indisponibles. S’appuyant sur la notion de fair use, la société Google a numérisé, sans autorisation des ayants droit, les œuvres indisponibles conservées dans les bibliothèques américaines, notamment plusieurs centaines de milliers de livres publiés initialement en France.

La notion de fair use en droit américain

Aux États-Unis, le fair use (que l’on peut traduire par « usage loyal », « usage raisonnable » ou « usage acceptable ») est un ensemble de règles de droit, d’origine législative et jurisprudentielle, qui apportent des limitations et des exceptions aux droits exclusifs de l’auteur sur son œuvre (droit d’auteur). Il essaie de prendre en compte à la fois les intérêts des bénéficiaires des droits d’auteur et l’intérêt public, pour la distribution de travaux créatifs, en autorisant certains usages qui seraient, autrement, considérés comme illégaux.

Détaillées dans l’article 107 du Copyright Act, les exceptions au droit d’auteur autorisées dans le cadre de l’usage loyal prennent en compte quatre critères :

– l’objet et la nature de l’usage et en particulier s’il poursuit un but commercial ou s’il s’agit d’un objectif éducatif non lucratif ;

– la nature de l’œuvre copiée : plus le travail de création est important et plus l’œuvre est originale, plus elle doit être protégée ;

– la proportion de l’œuvre copiée par rapport à l’ensemble ;

– l’effet sur la valeur de l’œuvre, c’est-à-dire l’impact de la copie de travaux protégés sur les bénéfices que l’auteur de ces travaux peut espérer tirer de son œuvre.

Selon le rapport sur la révision générale de la Copyright Law de 1961, la jurisprudence a consacré comme usages loyaux, les utilisations suivantes d’une œuvre protégée :

– les citations et les extraits dans une revue à titre d’illustration ou de commentaire ;

– la citation de courts passages dans un ouvrage scolaire ou technique ;

– dans une parodie, l’usage d’une partie du contenu de l’œuvre parodiée ;

– le résumé d’un article, avec de brèves citations, dans un reportage ;

– la reproduction par une bibliothèque d’une partie d’une œuvre pour remplacer une copie endommagée ;

– la reproduction par un professeur ou un étudiant d’une petite portion d’une œuvre pour illustrer un exposé ;

– la reproduction d’une œuvre dans le cadre des procédures législatives ou judiciaires ou à l’occasion de rapports ;

– la reproduction accidentelle, dans un reportage visuel ou audiovisuel d’une œuvre située à l’endroit où a lieu l’événement qui fait l’objet du reportage.

Google a pu numériser les livres et en diffuser de courts extraits via son service Google Books, toutes les fois qu’il était en mesure de prouver que les titres n’étaient plus exploités par les éditeurs.

Cette exploitation a suscité dès 2005 un contentieux aux États-Unis.

L’action de groupe dirigée contre Google Books

« Les œuvres sous droits numérisées à partir des collections des bibliothèques universitaires américaines sont entièrement indexées par le moteur ; la recherche "plein texte" conduit à l'affichage de courts extraits présentés sous la forme de bandelettes de papier déchirées (les "snippets"). Dès 2005, les associations américaines d'ayants droit (American Publishers Association et Author's Guild) ont intenté contre la société Google une "action de groupe" dans laquelle elles se sont portées parties au nom des "classes" entières qu'elles représentaient (c'est-à-dire tous les éditeurs et tous les auteurs).

« Il s'agissait d'un procès en contrefaçon de droits d'auteurs : la société Google se voyait reprocher de violer le "Copyright" par la reproduction et la représentation de ces livres sans autorisation préalable. Elle opposait à ces accusations l'argument de l'exception dite de "fair use" (utilisation loyale), exception très générale appliquée dans le droit américain. Elle soulignait également qu'elle était disposée à retirer les ouvrages à la demande de leurs ayants droit qui en feraient la demande ("opt out", pratique très contestée parce que contraire aux principes de la propriété intellectuelle ; la lenteur avec laquelle Google semble donner suite aux demandes de retrait a également été mise en avant).

« Le juge n'a pas eu à se prononcer sur le fond : en octobre 2008, après trois ans d'une procédure très coûteuse, les parties ont rendu public un projet d'accord transactionnel de classe (Class action settlement agreement) visant […] à éteindre le contentieux. Par une spécificité du droit américain, cet accord aurait le pouvoir de lier tous les membres des "classes" représentées, sauf ceux qui s'en seraient explicitement retirés.

« Une vaste campagne de publicité a alors été entreprise dans le monde entier pour signifier aux auteurs et aux éditeurs qu'un document de plus de 300 pages, rédigé en anglais juridique, était sur le point de modifier leurs droits sur leurs propres livres.

« Ce premier projet comportait deux grands volets. D'une part, il avait pour effet d'éteindre, par un système de dédommagement, toutes les poursuites passées et à venir contre la société Google pour les faits initialement reprochés. D'autre part, il mettait en place des modalités pour l'exploitation commerciale par Google de tous les livres numérisés. Si les livres n'étaient pas disponibles dans les grands canaux de vente américains, Google les exploitait par défaut, sauf objection expresse, formulée titre par titre par les éditeurs. Cette exploitation devait se limiter au territoire américain, sur la foi de l'adresse IP des consommateurs. Dans le cas des livres « revendiqués » par leurs ayants droit, si ces derniers autorisaient l'exploitation par Google, ils se voyaient reverser 33 % du chiffre d'affaires généré. 33% du chiffre d'affaires généré par les livres "non revendiqués" était reversé à un "Registre des droits sur les livres" (Books Rights Registry) qui aurait pour mission d'inciter les ayants droit du monde entier à s'enregistrer.

« Des critiques nombreuses et très vives ont été portées à ce premier projet. Il méconnaissait les principes de la propriété intellectuelle en obligeant les ayants droit à l'opt out s'ils ne voulaient pas voir leurs livres exploités par Google. Il mettait cette même société dans une situation de monopole, sur le territoire américain, pour l'exploitation des ouvrages "non revendiqués" : l'accord transactionnel lui attribuait en effet, et à elle seule, une licence d'exploitation exorbitante au droit commun. La société Google présente cet aspect du projet d'accord comme la seule façon qui s'offrait à elle de résoudre la question des œuvres "orphelines", œuvres dont les ayants droit n’ont pas été identifiés et qui, en l’absence d’accord possible de leur part, ne peuvent pas, en principe, être exploitées.

« Le juge chargé de l'éventuelle validation du projet d'accord transactionnel a reçu un nombre considérable d'objections et de remarques. Les gouvernements français et allemand, puis le gouvernement américain, lui ont adressé des courriers exprimant les plus grandes réserves sur les termes et les effets de la transaction. Les parties ont donc décidé d'amender le projet et un nouveau document a été rendu public le 13 novembre 2009. La modification la plus significative est que l'accord ne porterait plus, dorénavant, que sur les livres initialement publiés aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Canada et en Australie, ainsi que sur les livres inscrits - par les éditeurs du monde entier - au Bureau du copyright des États-Unis (soit, pour un certain nombre d’éditeurs français, une part importante de leur catalogue). Quelques aménagements visent par ailleurs à modérer le caractère monopolistique du système. L'économie générale du projet n'est cependant pas remise en cause. »

Extrait du rapport sur la numérisation du patrimoine écrit, remis par M. Marc Teissier au ministre de la culture et de la communication en janvier 2010

En mars 2011, le juge fédéral Denny Chin a rejeté l’accord transactionnel, qui aurait éteint l’action des demandeurs, auteurs et éditeurs, en contrepartie de 125 millions de dollars. Reconnaissant que « la création d’une bibliothèque numérique universelle comporterait beaucoup d’avantages », il a toutefois jugé que cet accord n’était « ni juste, ni adéquat ni raisonnable », à la fois compte tenu de la gravité de l’atteinte au droit d’auteur qu’il occasionnerait, et de la situation de monopole qu’il conférerait à Google. Il a néanmoins laissé ouverte la possibilité d’un nouvel accord entre les parties, pourvu que celui-ci satisfasse un certain nombre d’exigences et qu’il repose notamment, non sur un système d’opt out, mais sur un système d’opt in, l’exploitation ne pouvant avoir lieu qu’après manifestation expresse de l’accord des titulaires de droits.

À la suite de cette décision, Google a entrepris de contester, en décembre 2011, la qualité pour agir de l’Author’s Guild, en soulignant que celle-ci n’est en réalité pas titulaire des droits d’auteur qu’elle reproche à Google d’avoir violé. Si cette requête devait aboutir, Google se retrouverait seule avec les éditeurs pour l’élaboration d’une nouvelle proposition d’accord.

Ce contentieux américain s’est doublé d’une action devant les juridictions françaises.

Le site Google Books a ainsi fait l’objet d’un recours sur le fondement de la conception française du droit d’auteur. Par un jugement du 18 décembre 2009, le tribunal de grande instance de Paris (4) a considéré qu’en reproduisant intégralement et en rendant accessibles sur le site Google Books des extraits d’ouvrages sur lesquels les sociétés Éditions du Seuil, Delachaux & Niestle et Harry N. Abrams sont titulaires de droits d’auteur, sans leur autorisation, Google a commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur. Le tribunal a écarté l’argument majeur de Google visant à démontrer qu’en l’espèce la loi française était inapplicable, les actes de numérisation ayant eu lieu aux États-Unis.

En résultent pour Google l’obligation de déréférencer les ouvrages litigieux et la condamnation au paiement de 300 000 euros de dommages-intérêts.

Enfin, à l’été 2009, l’annonce de discussions entre Google et la BnF pour la numérisation et la mise en ligne du fonds de cette dernière a provoqué une intense polémique. On apprenait également que la bibliothèque municipale de Lyon, suivie depuis par d’autres bibliothèques publiques européennes, avait conclu un accord avec Google lui concédant vingt-cinq ans d’exclusivité sur l’exploitation numérique de ses fichiers.

Dans un avis, rendu public le 14 décembre 2010, sur le fonctionnement de la concurrence dans le secteur de la publicité en ligne, l’Autorité française de la concurrence a considéré que la clause d’exclusivité de vingt-cinq ans, avec interdiction de faire numériser le fonds par une autre entreprise durant toute cette période inscrite dans l’accord passé entre la Bibliothèque de Lyon et le moteur de recherche Google était « exagérée au regard du rythme de changement du secteur » et qu’« il ne peut être admis de priver un moteur de recherche de la possibilité de répliquer à Google en investissant par ses propres moyens dans la numérisation ». Dans une lettre adressée à l’Autorité de la concurrence au cours de l’instruction, Google a précisé que ces clauses, qui n’ont pas été introduites à sa demande, ne seront pas mises en œuvre.

II.- L’UNION EUROPÉENNE ET LA FRANCE SOUHAITENT APPORTER DES RÉPONSES COMPLÉMENTAIRES

A. LA POSITION DE L’UNION EUROPÉENNE

En réaction au projet Google Book Search, la Commission européenne a rendu publique, le 30 septembre 2005, une communication sur les bibliothèques numériques en vue du lancement d’un programme visant à rendre plus accessible le patrimoine culturel. Cette communication a été suivie d’une recommandation incitant les États membres à accélérer la numérisation et l’accessibilité en ligne des œuvres culturelles (livres, films, photographies, manuscrits, etc.). L’objectif est de mettre en ligne le patrimoine culturel européen via la bibliothèque numérique européenne.

Par la suite, la réflexion menée au niveau communautaire s’est concentrée sur la seule question des œuvres orphelines (5) : ainsi en décembre 2006, la Commission européenne a demandé à un groupe d’experts de haut niveau de travailler sur la question des œuvres orphelines. Le groupe a rendu un rapport (6) qui insiste sur la nécessité de l’élaboration, à l’échelon national, d’un cadre législatif permettant l’utilisation à des fins commerciales et non commerciales des œuvres orphelines et des œuvres épuisées. Il propose que les politiques futures utilisent le système européen Arrow (Accessible Registries of Rights information and Orphan Works) comme base de données. Arrow est un partenariat public/privé qui regroupe seize acteurs de la chaîne du livre, représentant 10 pays européens, dans le but de permettre à tout utilisateur, via une interface développée au niveau européen, de vérifier si une œuvre est disponible, épuisée ou orpheline, et d’obtenir des informations sur les détenteurs de droits.

Les dernières actions de la Commission européenne en faveur de la numérisation du patrimoine culturel et de la mise en place d’instruments juridiques permettant l’exploitation des œuvres épuisées et orphelines se sont traduites par trois principales démarches.

1. Le rapport du comité des sages, des recommandations surtout financières

En novembre 2009, les ministres de la culture de l’Union européenne se sont entendus sur l’idée émise par la France de créer un « comité des sages », chargé de définir les modalités de futures collaborations entre le secteur public et le secteur privé pour financer la numérisation du patrimoine culturel.

En avril 2010, ce comité a remis un rapport se concluant par d’importantes recommandations mais insistant surtout sur la question essentielle du financement. Indiquant que près de 100 milliards d’euros seront nécessaires pour rendre la totalité du patrimoine européen disponible en ligne, le rapport préconise le recours à des partenariats public-privé sous certaines conditions.

Les accords passés devront être transparents, non exclusifs et équitables pour tous les partenaires et permettre à tous un accès transfrontalier au matériel numérique. Le droit à une utilisation préférentielle des œuvres numérisées octroyé, le cas échéant, à un partenaire privé, ne pourra excéder une durée de sept ans.

Le rapport réaffirme le rôle central du portail Europeana qui devrait devenir la référence pour le patrimoine culturel européen en ligne. Les États membres devront garantir que toutes les œuvres numérisées grâce à des fonds publics seront accessibles sur son site. Tous les chefs-d’œuvre du domaine public devraient être en ligne sur Europeana d’ici à 2016.

En outre, les œuvres épuisées protégées par le droit d’auteur doivent être mises en ligne par leurs ayants droit et à défaut, par les institutions culturelles, les ayants droit étant rémunérés en conséquence.

S’agissant des œuvres orphelines, le rapport préconise l’adoption au plus vite d’un instrument juridique européen. Afin d’éviter à l’avenir que les ayants droit ne soient pas identifiables, le rapport préconise que l’enregistrement de l’auteur d’une œuvre devienne une condition nécessaire pour que ce dernier puisse faire valoir ses droits. Une modification de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886 sur ce point doit être discutée afin de l’adapter aux exigences de l’ère numérique.

Les recommandations du rapport du Comité des sages seront prises en compte par la Commission européenne dans le cadre de sa « stratégie numérique pour l’Europe » dont le but est d’accompagner les institutions culturelles dans leur transition numérique.

2. La proposition de directive sur les œuvres orphelines

La Commission européenne a adopté le 24 mai 2011 une proposition de directive sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines en vue de l’instauration de règles communes sur la numérisation et l’affichage en ligne de ces œuvres dites orphelines. Le principal objectif de cette proposition est de remédier à l’absence de cadre juridique permettant d’accéder en ligne de manière licite, par-delà les frontières, aux œuvres orphelines figurant dans les bibliothèques et les archives, ce qui nuit au développement des bibliothèques numériques.

3. La recommandation de la Commission européenne sur la numérisation et la conservation numérique d’octobre 2011

La Commission européenne a publié le 27 octobre 2011, une recommandation sur la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique, qui développe les axes de la stratégie numérique de l’Europe dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Le douzième considérant dispose notamment que : « Concernant la numérisation à grande échelle des œuvres épuisées, il se peut qu’il faille donner, dans les États membres, une assise législative aux solutions en matière d’octroi de licences élaborées volontairement par les parties intéressées, compte tenu de la nécessité de garantir un effet transnational. Dans ce contexte, l’approche adoptée à l’occasion du dialogue des parties intéressées, parrainé par la Commission, sur les livres et revues spécialisées épuisés, qui a abouti à un protocole d’accord signé à Bruxelles le 20 septembre 2011, devrait servir de modèle à d’autres dialogues afin de faciliter des accords visant à la numérisation du plus grand nombre possible d’œuvres épuisées. L’interconnexion au niveau européen des bases de données sur les droits peut faire baisser le coût des transactions d’autorisation. Il conviendrait donc de promouvoir de tels mécanismes en étroite coopération avec toutes les parties intéressées. »

B. LA POSITION DE LA FRANCE

L’annonce du projet de numérisation des collections des bibliothèques par Google en 2004 a suscité de vives réactions d’opposition. M. Jean-Noël Jeanneney, alors président de la BnF, avait dénoncé avec vigueur le danger d’une américanisation de la culture et d’une dépossession des pays européens de leur propre patrimoine par le géant américain, dans son livre Quand Google défie l’Europe, plaidoyer pour un sursaut.  

Devant l’émotion soulevée par ce projet et afin de répondre aux enjeux de la numérisation du patrimoine écrit, le ministère de la culture et de la communication a mis en place en juillet 2005 un « comité de pilotage en vue de la création d’une bibliothèque numérique européenne ».

Dans le contexte de la réflexion sur la valorisation du patrimoine culturel par le biais des bibliothèques numériques engagée par la Commission européenne, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a décidé, en juin 2007, de constituer une commission spécialisée sur la numérisation des œuvres orphelines et des éditions épuisées. La commission a rendu un rapport, publié le 19 mars 2008 (7), suivi d’un avis, le 10 avril 2008. 

Par la suite, la réflexion est élargie à l’ensemble des problématiques soulevées par la numérisation du patrimoine écrit, auquel est consacré le rapport remis par M. Marc Teissier au ministre de la culture et de la communication en janvier 2010. La réflexion sur les œuvres orphelines n’a en effet pas vocation à épuiser le sujet plus général de la numérisation des œuvres sous droit du XXsiècle.

Après avoir procédé à un état des lieux, le rapport évalue les accords conclus entre Google et les bibliothèques en soulignant leurs défauts, et explore les différentes solutions envisageables. Il préconise la création d’une entité regroupant les éditeurs, les bibliothèques et les ayants droit, destinée à rassembler l’ensemble du corpus littéraire numérisé.

Extrait de la synthèse des conclusions du rapport sur la numérisation du patrimoine écrit

« L’essentiel pour la mission est la mise en place d’une entité coopérative réunissant les bibliothèques publiques patrimoniales et les éditeurs, dans une logique de partenariat public-privé. Elle devra aussi faire place aux ayants droit et aux autres acteurs de la chaîne du livre.

« Cette entité aurait la responsabilité de concevoir, mettre en place et exploiter une plate-forme commune où l’ensemble des ouvrages pourrait être accessible aux recherches des internautes et, si souhaité, pourrait être feuilleté. Cette entité coopérative aurait la responsabilité d’organiser l’accès aux ouvrages et de concevoir les interfaces avec d’autres plates-formes, telles que les sites communautaires, les moteurs de recherche, les sites de commercialisation… Enfin, par son positionnement à la frontière du champ patrimonial et du secteur sous droits, elle serait appelée à jouer un rôle de plate-forme de diffusion et de valorisation des oeuvres orphelines lorsque le code de la propriété intellectuelle permettra les utilisations numériques de ces documents.

« À cet effet, la mission est d’avis de mettre en chantier une réforme profonde, prolongeant le travail de qualité qui a permis à la BnF, via Gallica de prendre position sur le réseau internet, mais en changeant radicalement les perspectives actuelles. L’ambition doit être de constituer une base d’ouvrages numérisés de langue française de qualité comparable à celle de Google Book pour la langue anglaise. C’est à cette condition que la France pourra éviter un face-à-face trop déséquilibré avec les entreprises de dimension mondiale et jouer d’un effet d’exemplarité en Europe.

« La mission n’avait pas vocation à définir dans le détail le statut juridique d’une telle entité coopérative et son positionnement vis-à-vis de la BnF. Elle souligne toutefois que plusieurs conditions doivent être réunies : collégialité du processus de décision et transparence des modalités de commercialisation qui doivent être autorisées par chaque partenaire concerné. »

Le 1er février 2011, le ministère de la culture a conclu un accord-cadre pour la mise en œuvre d’un projet de numérisation et de diffusion des livres français indisponibles du XXe siècle avec le Syndicat national de l’édition, la BnF, la Société des gens de lettres et le Commissariat général à l’investissement.

Cet accord comporte deux dimensions : l’une économique, l’autre juridique.

Il prévoit tout d’abord la mobilisation des crédits du volet numérique des investissements d'avenir pour permettre la numérisation des œuvres. Certes, le recours aux investissements d'avenir pour la numérisation n'est pas exclusif d'autres modes de financement. Ainsi, certains éditeurs ont déjà procédé à la numérisation d'une partie de leur fond pas leurs propres moyens. D'autres noueront des partenariats avec des agrégateurs de contenus ou des acteurs de l’internet pour y procéder ; néanmoins, là où les éditeurs n'ont pas d'autre solution, notamment pour les moins puissants et les moins organisés, le grand emprunt pourra être un moyen de valoriser les catalogues.

L’accord prévoit la réalisation d’une étude de faisabilité pour la mise en place d'une société de projet, dans laquelle la participation des éditeurs serait majoritaire, et qui pourrait être responsable de la numérisation et de la commercialisation des œuvres. L’État pourrait y prendre une participation minoritaire. La BnF, qui souhaite procéder à la création d'une filiale commerciale pour ses activités marchandes, notamment les contrats de partenariat qu'elle entend nouer avec des acteurs privés pour la numérisation et l'exploitation de certains fonds spécialisés, pourrait également intervenir, via cette filiale, au capital de la société.

Cette société pourrait développer une offre visant deux types de marchés :

– le marché de l’achat à l'unité, qui concerne le lectorat grand public ;

– le marché de l’achat par bouquets, l’offre s’adressant aux institutions, notamment les bibliothèques françaises et étrangères.

L’accord accorde un rôle central à la BnF : elle interviendra, tout d'abord, pour la mise à disposition des titres à numériser. Elle seule, grâce au dépôt légal, conserve des collections proches de la réalité éditoriale du XXe siècle, là où les maisons d’édition, quand elles existent encore, n’ont qu’une idée très imparfaite de leur activité passée.

Elle mettra également à disposition son expertise pour la constitution du corpus des œuvres indisponibles, du fait, notamment, qu’elle est membre du consortium européen Arrow, outil indispensable pour apparier les nombreuses bases de données nationales permettant d’identifier précisément les droits attachés à une œuvre.

La BnF jouera un rôle pivot pour l’orientation du lecteur puisque les œuvres indisponibles bénéficieront d’une indexation enrichie dans Gallica, qui renverra vers les plateformes de commercialisation.

L’accord définit les grands principes qui doivent guider la mise en œuvre d’un cadre juridique pour la numérisation des livres indisponibles, tout en rappelant que cette mise en œuvre doit se faire par la voie législative. La plupart de ces éléments sont repris dans la présente proposition de loi.

III.- LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI :
UN MÉCANISME NOUVEAU

Le vide juridique concernant l’exploitation numérique des œuvres indisponibles a été mis en évidence par la tentative de Google de constituer une bibliothèque numérique universelle. Il est temps, aujourd’hui, que l’impulsion donnée par l’Union européenne soit relayée activement par les États membres et se traduise par la mise en place d’un cadre juridique solide, indispensable au développement de véritables bibliothèques numériques européennes, capables de contrebalancer l’hégémonie de Google.

A. LE TRANSFERT DES DROITS, UNE GESTION MUTUALISÉE

La proposition de loi adoptée par le Sénat envisage une gestion collective, par une société de perception et de répartition des droits, des droits d’exploitation numérique attachés aux livres indisponibles.

1. La création d’une nouvelle société de perception et de répartition des droits (SPRD)

La solution envisagée repose sur le transfert des droits à une société de gestion collective, gérée à parité par des représentants des auteurs et des éditeurs. Cette société disposerait du droit d’autoriser la reproduction et la représentation d’une œuvre dans un format numérique.

Après avoir proposé une définition des livres indisponibles, fondée sur cinq critères cumulatifs (publication, lieu de publication, date de publication, diffusion dans le commerce par un éditeur, forme imprimée ou numérique), l’article 1er prévoit qu’une liste des œuvres présumées indisponibles sera établie. C’est sur cette base que l’exploitation collective des livres indisponibles sera possible. À compter de l’inscription sur cette liste et à défaut d’opposition par les titulaires de droit, le droit de reproduction et de représentation numérique de ce livre serait exercé par une société de perception et de répartition des droits (SPRD). Celle-ci pourrait autoriser l’exploitation numérique moyennant une rémunération, soit à l’éditeur titulaire du droit de reproduction de l’œuvre, pour dix ans et à titre exclusif, ou à défaut à des tiers, à titre non exclusif et pour une durée de cinq ans.

2. La possibilité d’opposition donnée aux auteurs ou aux éditeurs

Les auteurs ou les éditeurs titulaires des droits de reproduction disposeraient d’un délai allant jusqu’à six mois après l’inscription de l’œuvre sur la liste des livres indisponibles pour s’opposer au mécanisme de gestion collective. Le système repose sur le principe d’opt out, ou de retrait. Si l’auteur ou l’éditeur ne se manifeste pas dans le délai imparti, les droits de l’œuvre seront automatiquement gérés par la SPRD. Dans le cas contraire, si l’opt out a été exercé par l’éditeur, celui –ci disposerait d’un délai de deux ans pour exploiter l’œuvre, sinon celle-ci retombe dans le système de gestion collective.

À défaut d’opposition de l’auteur ou de l’éditeur au plus tard six mois après l’inscription de l’œuvre sur la liste des livres indisponibles, la SPRD proposera une autorisation de reproduction et de représentation de l’œuvre sous forme numérique à l’éditeur qui dispose du droit de reproduction de ce livre sous une forme imprimée. Ce dernier sera tenu d’exploiter l’ouvrage sous forme imprimée ou numérique dans les trois ans qui suivent la notification de son acceptation.

Contrairement aux tiers qui pourront exploiter l’œuvre pour cinq ans et à titre non exclusif, l’éditeur historique, dans le cadre de son droit de préférence, pourra l’exploiter à titre exclusif, pour une durée de dix ans tacitement renouvelable. Ce monopole a pour objet de faciliter la numérisation et la publicité des œuvres.

Après expiration du délai de six mois, l’éditeur disposant du droit de reproduction sous forme imprimée, avec accord de l’auteur, ou l’auteur s’il peut apporter la preuve qu’il est le seul titulaire des droits d’exploitation numérique, pourront retirer à la SPRD le droit d’autoriser l’exploitation numérique de l’œuvre. Dans le cas où ce droit de retrait aurait été exercé, celui-ci devrait toutefois s’engager à exploiter l’œuvre dans les dix mois suivant l’exercice de ce droit.

B. LES APPORTS DU SÉNAT

Le Sénat a réalisé un important travail d’amélioration du texte, notamment à l’initiative de sa rapporteure, Mme Bariza Khiari.

Les principales modifications concernent l’article 1er.

Le Sénat a d’abord veillé à améliorer la publicité donnée à la liste des livres indisponibles : il a précisé que cette liste serait mise à disposition du public via un site internet.

Il a ensuite renforcé le droit moral des auteurs :

– Les titulaires de droit pourront exercer leur droit d’opposition de manière préventive avant même l’inscription d’une œuvre sur la liste des œuvres indisponibles ;

– Après l’expiration du délai de six mois à compter de l’inscription d’une œuvre sur la liste des livres indisponibles (délai jusqu’à l’expiration duquel l’auteur ou l’éditeur titulaire du droit de reproduction peut s’opposer à l’entrée dans la gestion collective), l’auteur pourra s’opposer à l’exercice du droit d’exploitation de l’œuvre s’il juge que cette exploitation est susceptible de nuire à son honneur ou à sa réputation.

– Contrairement au droit commun du droit de retrait ou de repentir, ce droit s’exerce sans indemnisation.

Il a souhaité aborder la question de la représentation des auteurs des œuvres visuelles : parmi les critères d’agrément des SPRD, la proposition de loi initiale proposait une représentation paritaire des auteurs et des éditeurs. Le Sénat a précisé que cette exigence ne concernait que les sociétés représentant les intérêts des parties au contrat d’édition, dans le but de ne pas l’imposer à des sociétés qui représenterait les intérêts de tiers comme les auteurs d’œuvres visuelles.

Le Sénat a souhaité préciser une règle de répartition des sommes perçues par la SPRD : la proposition de loi dispose que le montant des sommes perçues par l’auteur ne pourra être inférieur à celui des sommes perçues par l’éditeur.

S’agissant de la recherche des titulaires de droits inconnus ou introuvables et du contrôle de l’effectivité de ces recherches, la proposition de loi initiale fixait comme critère d’agrément de la SPRD celui des moyens que la société se propose de mettre en œuvre pour identifier et retrouver les titulaires de droits.

Le Sénat a ajouté que des recherches avérées et sérieuses devaient pouvoir être menées. Il a également prévu qu’un commissaire du Gouvernement participerait aux assemblées délibérantes des SPRD agréées notamment dans le but de veiller au caractère effectif des recherches.

Enfin, le Sénat a prévu d’introduire un nouvel article L. 134-8 dans le code de la propriété intellectuelle, qui autoriser l’exploitation à titre gratuit et non exclusif de certaines œuvres : la SPRD autoriserait l’exploitation à titre gratuit et non exclusif des livres dont aucun ayant droit autre que l’éditeur n’a pu être retrouvé dans les dix ans qui suivent la première autorisation d’exploitation délivrée par la SPRD.

Le Sénat a par ailleurs inséré un nouvel article 1er bis, proposant une définition de l’œuvre orpheline, et a consacré de nouvelles règles de répartition des sommes « irrépartissables » et du quart de la rémunération pour copie privée consacrés par les SPRD à des actions culturelles, en intégrant les sommes irrépartissables qui pourraient être perçues par les nouvelles SPRD agréées pour la gestion des droits d’exploitation numérique attachés aux livres indisponibles, et en étendant le champ des actions susceptibles d’être financées à celles en faveur de la promotion de la lecture publique.

C. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION

À l’article 1er, la Commission, à l’initiative de M. Lionel Tardy, des commissaires du groupe Socialiste, radical et citoyens ainsi que du groupe de la Gauche démocratique et républicaine, a souhaité affirmer le principe d’un accès libre et gratuit à la base de données des livres indisponibles.

Un amendement des mêmes auteurs, adopté par la Commission, a prévu la possibilité pour toute personne de demander l’inscription d’un livre indisponible dans la base de données.

La Commission, à l’initiative du rapporteur, a par ailleurs rétabli l’exigence de représentation paritaire des auteurs et des éditeurs au sein des SPRD agréées. Elle a toutefois précisé que les SPRD seraient agréées en considération du caractère équitable des sommes versées aux ayants droit, qu’ils soient ou non parties au contrat d’édition, afin d’assurer une juste rémunération aux titulaires de droits attachés aux œuvres visuelles figurant dans les livres indisponibles. En outre, la Commission a ajouté un critère d’agrément supplémentaire des SPRD : celui-ci devra être accordé en considération des moyens que la société propose de mettre en œuvre pour veiller à la défense des intérêts des ayants droit non parties au contrat d’édition.

Elle a supprimé la clé de répartition des rémunérations introduites par le Sénat, jugeant qu’il appartiendrait à la SPRD elle-même de fixer une telle clé.

S’agissant de la recherche des titulaires de droits inconnus ou introuvables, la Commission a supprimé la référence aux « recherches avérées et sérieuses », afin de ne pas entretenir de confusion entre les notions d’œuvre orpheline et d’œuvre indisponible. À la présence d’un commissaire du Gouvernement au sein des assemblées délibérantes des SPRD, elle a préféré une solution reposant sur la commission permanente de contrôle des SPRD, investie de pouvoirs renforcés et qui tiendra le Parlement et le Gouvernement informé des recommandations qu’elle pourrait adresser aux sociétés et des suites qui leur auront été données.

La Commission a précisé les modalités de retrait de la gestion des droits d’exploitation numérique à la SPRD, des commissaires du groupe Socialiste, radical et citoyens.

La commission a également supprimé l’article L. 134-8 introduit par le Sénat, jugeant qu’il n’était pas opportun de consacrer une nouvelle exception au droit d’auteur.

Elle a par ailleurs souhaité « flécher » les sommes irrépartissables perçues par les SPRD agréées pour la gestion des droits d’exploitation numérique attachés aux livres indisponibles vers des actions d’aide à la création, de formation des auteurs de l’écrit et à des actions en faveur de l’accès aux œuvres et de promotion de la création mises en œuvres par les bibliothèques.

Enfin, à l’initiative du rapporteur, la Commission a souhaité soulever la question de l’impression à la demande, en demandant aux organismes représentatifs des auteurs, des éditeurs, des libraires et des imprimeurs d’engager une concertation sur les questions économiques et juridiques relatives à l’impression des livres à la demande.

L’impression à la demande est une technologie numérique qui permet l’impression, à qualité comparable, d’un exemplaire unique d’un livre numérisé, dans les heures qui suivent la réception de la commande du client. Offrant une qualité comparable à celle d’un livre « classique », ce livre coûte en moyenne 25 à 30 % de plus.

L’impression à la demande intéresse à la fois les écrivains qui n’ont pas trouvé d’éditeurs, et plus généralement tous les lecteurs qui disposent d’un livre sous forme numérique mais souhaitent en obtenir une copie imprimée. Elle répond pour ces derniers à un souci de confort ou à des habitudes de lecture. Elle permet aux éditeurs de continuer à exploiter des livres épuisés sous forme imprimée et pourrait constituer une nouvelle opportunité de développement pour les librairies, qui pourraient proposer ce nouveau service.

Cette pratique est appelée à se développer, comme en témoigne l’accord conclu en mars dernier par la BnF et Hachette Livre, qui va permettre l’impression à la demande d’ouvrages présents sur Gallica. Cet accord concerne une première sélection de près de 15 000 ouvrages libres de droits, qui seront imprimés et commercialisés par Hachette Livre. Les exemplaires ainsi fabriqués seront livrés aux libraires dans les mêmes délais qu’un exemplaire prélevé sur stock. L’objectif est de vendre ces livres à des prix compris entre 12 et 15 euros pour un volume de taille moyenne.

Or, l’impression à la demande soulève de nombreuses questions, en particulier celles relatives à la nature des droits en jeu. Certains prétendent que l’impression à la demande constitue un simple accessoire du droit de reproduction sous forme imprimée. Pour autant, une telle analyse devrait en toute rigueur conduire à considérer qu’une oeuvre faisant l’objet d’une impression à la demande ne peut être considérée comme une œuvre épuisée, ce qui semble difficile à concevoir. En outre, l’impression à la demande d’œuvres orphelines non libres de droit, sans versement d’aucune rémunération ni de la part de l’imprimeur ni de celle du lecteur parait problématique. Enfin, l’intégrité de l’œuvre et, partant, le droit moral de l’auteur peuvent être mis à mal par d’éventuelles modifications apportées à l’œuvre originale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine la présente proposition de loi, adoptée par le Sénat, au cours de sa séance du 18 janvier 2012.

M. Hervé Gaymard, rapporteur. Cette proposition a été déposée dans les mêmes termes en septembre 2011 à l'Assemblée nationale par moi-même et au Sénat par le sénateur Jacques Legendre. Je remercie les nombreux collègues qui l’ont cosignée.

Le 1er février 2011, un accord cadre portant sur la mise à disposition des œuvres indisponibles du XXe siècle a été conclu entre le ministère de la culture, le Syndicat national de l’édition (SNE), la Société des gens de lettres (SGDL), la Bibliothèque nationale de France (BnF) et le Commissariat général à l'investissement. Cet accord comprend deux volets, l’un financier – participation conjointe des fonds du volet numérique des investissements d’avenir et des éditeurs afin de numériser les œuvres – et l’autre juridique. La proposition de loi constitue la traduction législative de l’accord cadre, puisqu’il convenait de modifier le code de la propriété intellectuelle pour que ces œuvres soient mises à disposition.

Ce travail a été accompli dans un esprit consensuel qui était d’ailleurs la condition, comme j’ai eu l’occasion de le dire à l’ensemble des parties, pour que les parlementaires se prononcent – il n’était en effet pas question de favoriser l’un ou l’autre des acteurs de ce dossier.

Pour des raisons d’ordre du jour, cette proposition a d’abord été examinée par le Sénat, qui l’a amendée de manière très utile. Je vous proposerai de maintenir certaines des modifications apportées et d’en supprimer d’autres, qui me semblent relever d’autres textes législatifs à venir, tel que celui concernant la transposition de la future directive européenne sur les œuvres orphelines. Je souhaite que nous parvenions à un consensus.

En cette matière, il faut distinguer les œuvres qui font partie du domaine public et celles qui sont sous droits, c’est-à-dire soumises au droit d’auteur pendant les 70 ans qui suivent le décès de ce dernier. Pour les premières, qui ne sont pas visées par ce texte, l’essentiel est de disposer de fonds publics suffisants pour les numériser – c’est ce à quoi nous nous employons depuis une dizaine d’années par l’entremise du Centre national du livre (CNL) et la base de données Gallica.

S’agissant des secondes, vous vous souvenez de la polémique qui a eu lieu voilà deux ans concernant l’éventuel abus de position dominante de certains prestataires à la suite des accords passés entre Google et, notamment, la bibliothèque municipale de Lyon. Se posent donc des problèmes d’argent – afin de procéder aux numérisations – et de titularité des droits, même si les œuvres ne sont plus soumises au droit d’auteur. Vous avez d’ailleurs organisé une table ronde à ce propos, Madame la présidente, au cours de laquelle MM. Jean-Noël Jeanneney et Bruno Racine ont eu l’occasion de manifester leurs accords et désaccords, ce qui a permis d’éclairer la Commission et le Parlement sur l’ensemble de ces questions.

Cette proposition concerne donc les œuvres du XXe siècle et du tout début du XXIsiècle qui sont sous droit d’auteur mais indisponibles. En effet, celles qui ont été publiées depuis le 1er janvier 2001 sont numériquement disponibles puisque, depuis lors, les éditeurs et les auteurs, hors le contrat relatif à la publication du livre en format papier, signent aussi des contrats d’édition numérique – il est donc désormais possible d’acheter ces ouvrages sur les plateformes légales de téléchargement. L’immense majorité des œuvres antérieures à cette date sont numériquement indisponibles – puisque la question du titulaire du droit d’auteur numérique ne se posait pas lorsqu’elles ont été publiées – quoique certaines puissent être achetées en format papier si elles sont disponibles chez l’éditeur ou sur le marché des livres d’occasion. Or, pour le seul domaine français, ce ne sont pas moins de 500 000 ouvrages qui sont concernés.

Cette situation a deux explications : d’une part, il existe des incertitudes quant à la titularité des droits puisque la version numérique n’a pas fait l’objet d’un contrat séparé – éditeurs et auteurs devraient donc signer de nouveaux contrats pour chacune des 500 000 œuvres. D’autre part, les éditeurs ne peuvent matériellement pas numériser des œuvres à la rentabilité économique incertaine « sur la longue traîne », selon l’expression en usage dans ce métier. L’accord cadre du 1er février 2011 et cette proposition de loi visent à sortir d’une telle impasse.

Plus précisément, le texte tend à instituer une gestion collective des droits numériques. À cette fin, elle propose la création d’une société de perception et de répartition des droits (SPRD), gérée paritairement par les représentants des auteurs et des éditeurs, qui disposerait du droit d’autoriser la reproduction et la représentation d’une œuvre au format numérique. Après avoir proposé une définition des livres indisponibles fondée sur cinq critères cumulatifs – la publication, le lieu de publication, la date de publication, la diffusion dans le commerce par un éditeur, la forme imprimée ou numérique –, l’article premier prévoit qu’une liste des œuvres présumées indisponibles soit établie par la BnF. C’est sur cette base que l’exploitation collective de ces ouvrages sera possible. À compter de leur inscription dans la base de données publique et à défaut d’opposition par les titulaires des droits, le droit de reproduction et de représentation numérique serait exercé par cette société, laquelle pourrait autoriser l’exploitation numérique moyennant une rémunération, soit à l’éditeur titulaire du droit de reproduction de l’œuvre sous forme imprimée pour dix ans et à titre exclusif soit, à défaut, à des tiers et à titre non exclusif pour une durée de cinq ans.

L’enjeu, également, est de permettre aux titulaires de droits, qu’ils soient auteurs ou éditeurs, de s’opposer à ce système de gestion collective par le mécanisme dit, en bon français, de l’opt out. Nous proposons donc de favoriser la numérisation massive des œuvres du XXe siècle tout en ouvrant un délai légal d’opposition pour les éditeurs et les auteurs qui ne souhaiteraient pas entrer dans le dispositif. On notera que le délai fixé peut être dépassé, même si le retrait de l’œuvre de la liste des œuvres indisponibles peut être dans ce cas-là plus coûteuse.

Nous essayons ainsi de bâtir un système conciliant la possibilité de numériser les œuvres et de les mettre à disposition facilement tout en respectant le droit d’opposition et le droit d’auteur, puisque les auteurs seront évidemment rémunérés sur la vente de ces fichiers numériques.

Parmi les œuvres indisponibles du XXe siècle, deux cas de figure se présentent. Dans le premier, qui vaut pour 75 % à 80 % d’entre elles, les auteurs ou leurs ayants droit sont connus, ainsi que les éditeurs dont certains disposent ou non des droits selon qu’ils exploitent ou non l’œuvre. Dans le second, « zone grise » ou œuvres orphelines, les ouvrages relèvent encore du droit d’auteur sans que l’on puisse identifier les ayants droit. Comme il doit tout de même être possible d’exploiter cette catégorie d’œuvres, les sommes impossibles à répartir seront affectées par la SPRD à une ligne budgétaire spécifiquement destinée au développement de la lecture publique.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour le travail que vous accomplissez au service du livre et des lecteurs. La parole est pour commencer aux représentants des groupes.

Mme Marie-Hélène Thoraval. Le problème de l’indisponibilité des livres n’est pas nouveau mais une solution a pu être trouvée grâce au développement des outils de numérisation. En effet, les livres édités avant 1900 ont pu être numérisés sans difficulté juridique, ces œuvres n’étant plus couvertes par le droit d’auteur. Tel n’est pas le cas de la plupart des œuvres du XXe siècle, ce qui rend leur numérisation juridiquement impossible.

Les œuvres indisponibles relèvent de deux catégories : celles dont on connaît les ayants droits mais dont les contrats d’édition ne mentionnent aucune disposition relative au droit de reproduction numérique, et les œuvres dites orphelines dont on ne connaît ni les auteurs, ni les ayants droits. Au total, cela représente plus de la moitié des livres publiés au XXe siècle.

Cette proposition de loi, déposée en des termes identiques par notre rapporteur et par le sénateur Legendre, vise à confier à une SPRD la responsabilité de gérer et d’exploiter les droits numériques des livres devenus indisponibles tout en protégeant éditeurs, auteurs et ayants droits. Le groupe UMP estime qu’en l’adoptant, le Parlement fera preuve d’une grande modernité car il mettra de nouveaux moyens technologiques au service de l’accès du plus grand nombre à la culture, tout en respectant le droit d’auteur.

Mme Monique Boulestin. Après avoir débattu du prix du livre numérique, nous examinons aujourd'hui une proposition de loi qui tend à combler un vide juridique, en prévoyant les modalités d'exploitation numérique commerciale des livres du XXe siècle qui ne sont plus disponibles en format papier mais qui sont encore protégés par le code de la propriété intellectuelle. Un tel vide est d'autant plus regrettable que non seulement ces ouvrages sont donc souvent épuisés mais que leur réédition n'est plus envisagée compte tenu de son coût. Selon M. le rapporteur, 500 000 œuvres sont concernées. La grande majorité des 654 romans publiés à la rentrée 2011 l'a été sous forme numérique.

De plus, seules sont aujourd’hui disponibles en format numérique les œuvres littéraires récemment publiées faisant l'objet d'un double contrat d'édition – papier et numérique – ainsi que celles qui ne sont plus protégées par le droit d'auteur car publiées entre le XVe et le début du XXe siècle.

Enfin, il est notable que, sous l’égide de la BnF, les bibliothèques de notre pays se soient résolument engagées dans la numérisation avec Gallica – à partir des collections déposées au titre du dépôt légal – et le programme Europeana.

La proposition tend donc à créer une base de données publique en ligne répertoriant les livres indisponibles. La BnF reste responsable de la gestion et de l'actualisation de la liste. Le texte prévoit que l'exploitation numérique de ces œuvres sera assurée par le biais d'une gestion collective confiée à une SPRD agréée à cet effet par le ministère de la culture, ce qui permettrait la rémunération équitable des auteurs et des ayants droit – en s'assurant qu'ils sont effectivement recherchés – ainsi que des éditeurs.

Nous devons toutefois nous assurer que ce texte est conforme à l'acquis communautaire. La numérisation se heurte à la question des droits ; la proposition, technique et juridiquement complexe, doterait certes la France d'un outil unique, mais il faut veiller à ce que le respect du droit d'auteur ne soit pas destructeur de notre patrimoine culturel.

S’agissant des œuvres orphelines, dont nous avons longuement discuté il y a quelques mois, les ayants droit ne peuvent être reconnus « introuvables » qu'au terme d'une recherche dite « diligente », selon un amendement introduit par le Sénat, dont la rapporteure, Mme Khiari, a de surcroît proposé que l’exploitation des œuvres sous forme numérique à titre gratuit soit possible après un délai de dix ans. Nous y reviendrons.

Face à l'emprise des acteurs privés – je songe, notamment, aux tentatives de Google –, les pouvoirs publics devaient réagir en permettant l'accès de tous aux œuvres littéraires. C'est tout le sens de l'accord cadre signé le 1er février 2011. Pour autant, des interrogations demeurent, qui expliquent les amendements que nous avons déposés. Le groupe SRC veut défendre la lecture publique et soutenir l'action des bibliothèques tout en restant vigilant quant au sort qui sera réservé aux auteurs, aux ayants droit et aux éditeurs.

Mme Marie-Hélène Amiable. De 500 000 à 700 000 œuvres du XXe siècle ne font pas partie du domaine public. Elles restent donc protégées par le droit d’auteur et ne peuvent pas être portées à la connaissance du public le plus large alors que le livre numérique favorise une diffusion renouvelée des savoirs ainsi qu’un accès universel à la culture : en l’état du droit, la reproduction numérique d’œuvres protégées par les bibliothèques, sans qu’elles y soient autorisées, est condamnable.

Au-delà de la proposition de directive que la Commission européenne a adoptée le 24 mai 2011 à propos des seules œuvres orphelines, cette proposition vise donc à résoudre la question plus vaste de la numérisation des œuvres dites indisponibles après qu’a été signé le 1er février dernier un accord cadre sous l’égide du ministère de la culture. La solution retenue entend réconcilier les objectifs de la société de l’information et le droit d’auteur, en instaurant la gestion collective des droits numériques sur les œuvres indisponibles par une SPRD. Sauf à ce que la majorité de l’Assemblée revoie fondamentalement le dispositif au détriment des auteurs ou des possibilités d’accès des lecteurs aux œuvres, les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche soutiendront ce texte qu’ils jugent équilibré et qui crée des possibilités nouvelles pour l’exploitation d’œuvres actuellement indisponibles.

Si l’adoption de la proposition nous paraît souhaitable, des précisions doivent être cependant encore apportées, en particulier afin d’éviter de nier le droit exclusif des auteurs d’interdire l’usage et l’exploitation de leurs œuvres.

Par ailleurs, qu’en sera-t-il des livres du début du XXIe siècle qui n’ont jamais été proposés sous format numérique natif ? Ne faut-il pas permettre à tout auteur qui le souhaite de s’inscrire dans le dispositif que nous allons adopter, pour éviter de créer une distorsion ou une rupture d’égalité quant aux possibilités de publicité et de mises sur le marché numérique entre les auteurs dont les œuvres auront été publiées avant le 1er janvier 2001 et les autres ?

Le Gouvernement, par la voix de M. Patrick Ollier, a affirmé au Sénat que « la France a joué un rôle de précurseur en Europe pour l’élaboration de politiques publiques de numérisations fondées sur une intervention volontariste des États ». « Elle a alloué des fonds importants », a-t-il poursuivi, « à des programmes de numérisation des imprimés du domaine public et des collections les plus contemporaines. » Alors que l’on pouvait espérer que le ministère de la culture lui-même, par le biais de la BnF, se porterait candidat pour la numérisation d’œuvres indisponibles et, notamment, orphelines, l’approche malheureusement retenue pour numériser et diffuser ce corpus serait un partenariat public-privé. Vous vous en doutez, nous n’approuvons pas une telle option, car nous sommes plutôt favorables à une grande politique publique de la culture adossée à un service public de qualité véritablement accessible à tous.

M. Marcel Rogemont. Cette proposition va dans le bon sens et s’inscrit dans la lignée de l’accord cadre signé le 1er février 2011. À ce sujet, avez-vous eu une connaissance précise, complète et officielle de ce texte, monsieur le rapporteur, et pouvez-vous nous le transmettre ?

La justice américaine a condamné le règlement de Google Books concernant l’opt-out, c’est-à-dire la faculté donnée à un ayant droit de s’opposer à la numérisation d’office de ses œuvres, lui substituant le mécanisme de l’opt-in, qui implique l’accord explicite des titulaires de droits à la numérisation. Cela n’est pas sans rapport avec l’examen du texte dont nous débattons, lequel est plutôt axé sur le droit d’opposition. En outre, je comprends mal l’amendement de M. le rapporteur concernant les bibliothèques alors que le Sénat a, me semble-t-il, utilement complété la proposition à ce sujet.

Enfin, si une œuvre ne peut plus être qualifiée d’orpheline dès que l’un de ses auteurs a été identifié, qu’en est-il lorsqu’un photographe auteur d’un cliché illustrant un ouvrage écrit a été retrouvé ? Il me semblerait dommageable que l’œuvre ne soit plus, pour cette raison, considérée comme orpheline. Je serais plutôt favorable à ce qu’une œuvre perde cette qualification lorsque tous ses créateurs ont été retrouvés, étant entendu que chaque intervenant serait rémunéré par la SPRD.

M. René Couanau. J’approuve les orientations du texte mais je souhaite quelques éclaircissements. En premier lieu, est-il apparu nécessaire, au cours des discussions avec les éditeurs, de préciser la notion d’indisponibilité ? Une chose est que des ouvrages soient indisponibles à la commercialisation, mais cela ne dit rien des stocks éventuels. Imaginons par ailleurs qu’à l’occasion de la sortie d’un film, un éditeur juge opportune la réédition d’un ouvrage jusqu’alors indisponible : la version imprimée sera-t-elle toujours considérée comme indisponible, ou considérera-t-on qu’il s’agit d’un nouvel ouvrage ? On connaît enfin des rééditions d’œuvres modifiées – Les Poneys sauvages de Michel Déon par exemple ; considèrera-t-on qu’il s’agit d’une œuvre nouvelle ou d’une œuvre toujours indisponible ?

M. Frédéric Reiss. L’article premier du texte prévoit la création d’une base de données publique que la Bibliothèque nationale de France est chargée d’actualiser. Cette mise à jour sera-t-elle permanente ou périodique ? Par ailleurs, quels sont les livres concernés ? Uniquement ceux qui sont écrits en français, ou aussi ceux qui ont été rédigés dans des langues régionales ou étrangères ?

M. Christian Kert. La composition de la société de perception et de répartition des droits sera-t-elle paritaire ? Combien de membres comptera-t-elle et qui la présidera ? Quelle sera sa responsabilité en cas de contestation de la numérisation d’un ouvrage ou du choix des sociétés qui procéderont à la numérisation ? Quel délai peut être estimé réaliste pour la numérisation d’un nombre d’œuvres aussi considérable ? Si cette durée devait s’allonger exagérément, ne sera-t-on pas amené à revoir le fonctionnement de la SPRD ?

M. Michel Herbillon. À notre rapporteur, que je remercie pour un travail de grande qualité, je demanderai de préciser la définition des œuvres orphelines – à propos desquelles un projet de directive est en cours d’élaboration dans les institutions européennes - et de dire leur interaction avec les œuvres indisponibles, notamment pour celles dont la publication est postérieure au 1er janvier 2001.

M. le rapporteur. Pour répondre à M. Rogemont, je reviendrai d’abord sur le procès en contrefaçon de droits d’auteur intenté aux Etats-Unis, notamment par l’Author’s Guild – la guilde des auteurs – à la société Google, un procès très éclairant dont nous avons suivi les rebondissements avec une grande attention. Après que, fin 2004, Google eut annoncé son projet de numériser le plus grand nombre d’œuvres possible, qu’elles soient sous droit ou qu’elles ne le soient pas, l’Author’s Guild, s’élevant contre cette numérisation « sauvage », a engagé une action de groupe contre Google. La France et la Commission européenne se sont associées au procès par la procédure dite « des amis de la Cour » - amici curiae – et ces interventions ont eu pour résultat que les œuvres françaises, entre autres, ont été exclues du programme de numérisation de Google. Pendant ce temps, une procédure était engagée pour la même raison devant le tribunal de grande instance de Paris par le groupe La Martinière, auquel se sont associés le Syndicat national des éditeurs et la Société des gens de lettres, au terme de laquelle la société Google a été condamnée à indemniser l’éditeur.

En juillet 2010, l’Author’s Guild acceptait un accord transactionnel formulé en ces termes : en contrepartie de son renoncement à poursuivre son action de groupe, elle acceptait de Google le versement de 125 millions de dollars censés régler les droits d’auteurs correspondant aux œuvres numérisées ou devant l’être. Si l’Author’s Guild a accepté ce montant dérisoire, c’est qu’elle n’avait plus les moyens de payer les frais d’avocats qu’aurait entraîné la poursuite du procès.

Cependant, le procureur général de Californie, appuyant ses réquisitions sur le respect du droit d’auteur et de la diversité culturelle, s’est, à notre heureuse surprise, opposé à l’accord, que le juge Denny Chin a ensuite rejeté. Changeant de pied, Google, qui avait pourtant longuement traité avec l’Author’s Guild, a fait savoir fin 2011 qu’elle ne jugeait pas la guilde représentative des auteurs – elle prétend désormais traiter avec chaque auteur individuellement.

Rechercher tous les auteurs pour traiter avec chacun d’eux serait une entreprise longue et compliquée. L’accord cadre signé le 1er février 2011 a lui-même demandé de très longues discussions. Quelques mois auparavant encore, les auteurs ne manifestaient pas d’enthousiasme excessif à l’idée d’une gestion collective des droits ; outre que le droit d’auteur est un droit individuel, il restait à trancher la question de l’opt-in et de l’opt-out. Finalement, le consensus s’est fait et les auteurs se sont satisfaits de la solution retenue, qui leur permet de s’opposer à l’autorisation de la reproduction de leurs œuvres sous forme numérique. On dispose de la sorte de la masse critique nécessaire à la numérisation, tout en respectant le droit d’auteur.

Je remercie Mme Boulestin de son intervention. Le sujet, compliqué, de la lecture publique devra être traité par la prochaine législature car notre droit ne prévoit pas d’exception générale au droit de reproduction numérique en faveur des bibliothèques ; de ce fait, elle demeure illégale.

Comme Mme Amiable l’a souligné à juste titre, les livres du début du XXIe siècle ne sont pas visés par la proposition. Auteurs et éditeurs de livres indisponibles pourront adhérer au mécanisme s’ils le souhaitent. Mme Amiable a dit son opposition de principe aux partenariats public-privé ; j’en prends acte mais je considère pour ma part que pour une numérisation d’une telle ampleur, de tels montages sont vertueux. Une partie des 750 millions du « grand emprunt » affectés à la numérisation du patrimoine culturel sera affectée à la numérisation des ouvrages et ces fonds publics lèveront des apports privés des éditeurs. Il est bon qu’il en soit ainsi.

Oui, monsieur Rogemont, j’ai lu l’accord cadre et si Mme la présidente en est d’accord, j’en communiquerai le texte à tous les commissaires puisque la Commission d’accès aux documents administratifs en a donné l’autorisation.

Nous reparlerons de la lecture publique lors de l’examen des amendements ; vous constaterez alors que ma position n’est pas celle que vous pensez - l’un de mes amendements, que le groupe SRC a d’ailleurs sous-amendé, devrait vous donner satisfaction.

La diffusion des œuvres orphelines a suscité plusieurs questions de M. Rogemont et de M. Herbillon. Avant la fin de la législature, M. Michel Lefait et moi-même remettrons à la Commission des affaires européennes un rapport d’information sur les enjeux européens de la numérisation de l’écrit qui fait le point sur la question. La Commission européenne a bien adopté une proposition de directive relative à ce sujet mais l’élaboration du texte est loin d’être achevée et l’on ne sait pas grand-chose de ce qu’il sera. Quoi qu’il en soit, il est très important de définir une approche européenne des œuvres orphelines, et je pense que le consensus prévaudra.

Il faut effectivement procéder à la recherche « diligente et active » des auteurs ou de leurs ayants droit. J’observe qu’à ce sujet l’on parle toujours des auteurs et jamais des éditeurs. Or, d’excellentes maisons d’édition ont disparu, telles Nagel, dont le fonds, constitué d’œuvres d’auteurs très importants, n’a pas été repris. Dans de tels cas, les titulaires des droits sont les auteurs ou leurs ayants droit. Le problème est alors celui de la commercialisation des œuvres : on peine à imaginer l’héritière âgée de 85 ans des droits d’un auteur disparu se faisant éditrice pour diffuser l’œuvre du grand homme après que son éditeur a fait faillite.

L’auteur d’une photographie illustrant un texte dispose d’un droit accessoire ; la rémunération versée au photographe vaut, dans ce cas, pour solde de tout compte.

La notion d’indisponibilité diffère, monsieur Couanau, selon que l’on parle d’édition sur papier et d’édition numérique. Quand il s’agit d’édition sur papier – qui ne fait pas l’objet de ce texte – « l’indisponibilité » est définie par l’absence d’exploitation régulière, définie au fil des ans par la jurisprudence : est considéré comme épuisé un livre neuf que plusieurs libraires ne parviennent pas, pendant plusieurs semaines, à fournir, et cela justifie qu’un auteur, considérant que l’éditeur exploite mal son œuvre et ayant fait constater la chose par huissier, puisse demander à reprendre ses droits.

Il faut par ailleurs distinguer réimpression et réédition. Une réimpression à l’identique n’est pas considérée comme une œuvre nouvelle ; il est d’ailleurs de pratique courante dans l’édition d’imprimer quelques milliers d’exemplaires et de réimprimer si la demande est forte. En revanche, une réédition, même si le texte n’est pas modifié, est considérée comme un livre nouveau et entraîne l’attribution d’un code ISBN distinct. A fortiori, la version des Poneys sauvages modifiée par son auteur, ou celles de Risibles amours et de La Plaisanterie par Milan Kundera, ont des codes ISBN différents de ceux des versions initialement publiées.

Mais à partir du moment où une œuvre est numérisée, les critères de « l’indisponibilité » n’existent plus ; c’est pourquoi les auteurs veulent que les contrats d’édition numérique prévoient une durée limitée pour la cession des droits d’exploitation de l’œuvre numérique. La proposition vise précisément à ce que les œuvres du XXe sous droit, actuellement indisponibles en édition numérique, deviennent accessibles.

Monsieur Reiss, comme la base de données publique sera gérée par la BnF et alimentée par le dépôt légal, l’actualisation éventuellement nécessaire sera marginale. Les œuvres concernées sont toutes celles qui sont publiées en France, qu’elles le soient en français, en langues régionales ou en langues étrangères.

Monsieur Kert, la société de perception et de répartition des droits est uniquement une société de commercialisation des fichiers : ce n’est pas elle qui se chargera de la numérisation. Auteurs et éditeurs seront représentés à parité parmi ses associés et au sein de ses organes dirigeants. Je ne sais qui la présidera ; peut-être les associés s’accorderont-ils sur le principe d’une présidence tournante, alternativement dévolue à un éditeur et à un auteur. Des auditions que j’ai menées, il est ressorti qu’une SPRD nouvelle ne serait pas créée : deux sociétés de ce type existent déjà dans le secteur du livre, dont l’une fonctionne de manière paritaire. L’une des deux remplira cette nouvelle fonction.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Définition et modalités d’exploitation des livres indisponibles

Le présent article tend à insérer un nouveau chapitre dans le titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle, afin de définir un régime juridique spécifique à l’exploitation des livres indisponibles du XXème siècle.

Les alinéas 2 et 3 insèrent ainsi un chapitre IV, comportant les dispositions particulières relatives à l’exploitation numérique des livres indisponibles. La proposition de loi initiale mentionnait les œuvres indisponibles, mais un amendement de la rapporteure de la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, Mme Bariza Khiari, a précisé qu’il était plus spécifiquement question des livres, comme le précise d’ailleurs le titre de la proposition de loi.

Ce chapitre IV comporte les articles L. 134-1 à L. 134-8.

Article L. 134-1 : définition du livre indisponible

Le nouvel article L. 134-1 introduit dans le code de la propriété intellectuelle par l’alinéa 4 du présent article définit la notion de livre indisponible, qui comporte plusieurs critères cumulatifs :

– le livre doit avoir été publié ;

– en France ;

– avant le 1er janvier 2001 ;

– ne plus faire l’objet d’une diffusion commerciale par un éditeur ;

– que ce soit sous forme imprimée ou numérique.

Ce ne sont pas moins de 500 000 titres qui pourraient répondre à la définition des livres indisponibles.

Rappelons tout d’abord qu’il n’existe pas de définition législative du livre, mais une définition fiscale, issue d’une instruction fiscale du 12 mai 2005 au terme de laquelle « pour être considéré comme un livre, un ouvrage doit remplir les conditions cumulatives suivantes :

– l’ouvrage doit être constitué d’éléments imprimés. Les éléments audiovisuels ou numériques (cassette audio, compact disc musical, DVD, diapositives, etc.) demeurent passibles du taux qui leur est propre ;

– l’ouvrage doit reproduire une œuvre de l’esprit ; en pratique, l’ouvrage doit comporter une partie rédactionnelle suffisante permettant de conférer à l’ensemble le caractère d’une œuvre intellectuelle ;

– en outre, l’ouvrage ne doit pas présenter un caractère commercial ou publicitaire marqué, c’est-à-dire être principalement destiné à informer un public de l’existence et des qualités d’un produit ou d’un service, avec ou sans indication de prix, dans le but d’en augmenter les ventes ou de promouvoir l’image d’un annonceur ;

– enfin, l’ouvrage ne doit pas contenir un espace important destiné à être rempli par le lecteur ».

En revanche, il existe une définition législative du livre numérique : la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique a ainsi défini ce dernier comme une « œuvre de l’esprit créée par un ou plusieurs auteurs et qui est à la fois commercialisé sous sa forme numérique et publié sous forme imprimée ou qui est, par son contenu et sa composition, susceptible d’être imprimé, à l’exception des éléments accessoires propres à l’édition numérique ». Il s’agit là d’une définition dite homothétique, le livre numérique pouvant être assimilé à une sorte de fac-similé du livre imprimé.

Le livre indisponible au sens de la présente proposition de loi est tout d’abord un livre publié, ce qui exclut la « littérature grise » non publiée comme par exemple des mémoires ou de la correspondance.

Il s’agit d’un livre publié en France : ne sont concernées que les œuvres faisant l’objet d’un dépôt légal au sens de l’article L. 131-1 du code du patrimoine. Une telle définition soulève la question des œuvres traduites publiées.

L’article L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que les auteurs de traductions des œuvres de l’esprit jouissent de la protection instituée par le code de la propriété intellectuelle sans préjudice des droits de l’auteur de l’œuvre originale. Le livre original, s’il n’a pas été publié en France ne répondra pas à l’une des conditions cumulatives de la définition de livre indisponible. Le livre traduit, s’il a été publié en France et que les autres conditions de l’article L. 134-1 sont remplies, pourra être qualifié de livre indisponible sans préjudice des droits de l’auteur sur l’œuvre originale. En pratique et d’après les informations recueillies par le rapporteur, il est prévu de ne pas inscrire dans un premier temps de traductions dans la base de données des livres indisponibles prévue par la présente proposition de loi et d’attendre la mise en place de systèmes de gestion similaires dans les pays d’origine des œuvres traduites.

Les livres concernés devront avoir été publiés avant le 1er janvier 2001. La proposition de loi initiale retenait la date du 31 décembre 2000, mais la rapporteure du Sénat a estimé qu’il pouvait paraître « étrange de distinguer le dernier jour de l’année 2000 parmi les autres jours de l’année » et a fait modifier cette date par un amendement adopté en séance publique.

Cette date correspond en fait à la période à partir de laquelle on peut considérer que les contrats d’édition ont commencé à prévoir les modalités d’exploitation numérique des livres. L’objet de la proposition de loi est en effet de remédier à la difficulté consistant à reproduire et représenter des livres sous forme numérique, alors que le titulaire de ce droit d’exploitation est incertain. Cette incertitude fait peser un risque de requalification en contrefaçon sur toute exploitation numérique, aléa qui compromet l’équilibre économique de cette exploitation, et la levée de cette incertitude se heurte à des obstacles pratiques et financiers quasiment insurmontables, puisque cela supposerait pour des milliers de références la recherche des ayant-droits et, si cette recherche s’avère fructueuse, ce qui ne serait pas forcément le cas, la renégociation des termes du contrat d’édition.

Avant 2001, et pour surmonter ce dilemme entre risque juridique et économique d’une part, et impossibilité pratique de le contenir pour permettre l’exploitation des œuvres, d’autre part, les livres indisponibles pourront donc faire l’objet du mécanisme de gestion collective de droits se substituant à la gestion contractuelle, tel que prévu par la présente proposition de loi.

La proposition de loi initiale précisait que la date de publication de l’œuvre devait être déterminée par mention de l’année de publication figurant sur la notice du catalogue général de la Bibliothèque nationale de France (BnF). Cet alinéa a été supprimé par le Sénat à l’initiative de sa rapporteure, qui a jugé qu’une telle précision relevait du domaine réglementaire.

Précisons également que deux situations particulières pourront se rencontrer de part et d’autre de la date du 1er janvier 2001 (pour autant que les autres critères de définition de l’œuvre indisponible soient réunis) :

– pour les œuvres publiées postérieurement au 1er janvier 2001, dont les contrats ne comporteraient pas de stipulations relatives à l’exploitation numérique des œuvres (catégorie qui devrait être résiduelle) : la publication récente devrait permettre de résoudre les difficultés transactionnelles liées à la rediscussion des contrats. En tout état de cause la gestion collective est toujours possible sur une base volontaire ;

– pour les œuvres publiées avant, mais dont la titularité des droits est clairement précisée dans le contrat d’édition : des dispositions spécifiques de la proposition de loi permettent, dans les cas où la titularité des droits est sans ambiguïté, de ne pas entrer dans la gestion collective ou bien d’en sortir aisément.

Un livre indisponible est en outre un ouvrage qui ne fait plus l’objet d’une diffusion commerciale par un éditeur. La proposition de loi initiale faisait référence aux œuvres non disponibles commercialement de façon licite. La rapporteure du Sénat a estimé qu’une commercialisation illicite ne devait évidemment pas avoir pour conséquence d’écarter la qualification d’indisponibilité consacrée par le présent texte, sauf à élaborer un régime juridique de l’œuvre illicite, et que cette dernière mention était superfétatoire. Elle a donc été supprimée.

En outre, un amendement de la rapporteure a substitué la notion de diffusion commerciale par un éditeur à la rédaction initiale du projet de loi, afin de permettre que des livres puissent être qualifiés d’indisponibles, même s’ils sont diffusés commercialement sur le marché de l’occasion, chez un bouquiniste ou un sur un site internet spécialisé par exemple. Ce n’est que si l’on ne peut trouver l’ouvrage neuf en librairie ou en ligne que celui-ci pourra être qualifié d’indisponible.

C’est pour ces ouvrages que le principe d’une gestion collective des droits d’exploitation numérique est particulièrement intéressante : elle leur assure en effet une véritable renaissance.

Enfin, un livre pourra être qualifié d’indisponible s’il ne fait plus l’objet d’une diffusion sous une forme imprimée ou numérique, critère qui a connu une légère modification rédactionnelle par rapport à la proposition de loi initiale, à l’initiative de la rapporteure du Sénat. Cette référence implique que des ouvrages qui ne seraient pas diffusés sous une forme imprimée, mais uniquement sous forme numérique, ne seraient pas considérés comme des livres indisponibles.

On notera que le Sénat a supprimé la mention selon laquelle les livres indisponibles étaient ceux figurant sur la liste prévue à l’article L. 134-2, c’est-à-dire la liste des livres indisponibles, considérant à juste titre cette précision comme tautologique.

Précisons qu’au bénéfice de cette définition, entrent dans le champ du mécanisme de gestion collective des droits d’exploitation numérique, sous réserve de respecter les critères précédemment évoqués, des œuvres orphelines. Cette problématique des œuvres orphelines avait été identifiée comme l’une des difficultés entravant la mise en place de bibliothèques numériques, notamment dans le rapport sur La numérisation du patrimoine écrit, remis par M. Marc Tessier au ministre de la culture et de la communication en janvier 2010. Reprenant une définition proposée par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, dans son rapport de mars 2008, l’œuvre orpheline était y définie comme celle pour laquelle au moins un des titulaires de droit n’a pu être identifié ou retrouvé en dépit de recherches avérées et sérieuses : « la question des œuvres orphelines se pose avec une acuité particulière avec les grands projets de numérisation des institutions culturelles : une institution ne peut en effet, sauf exceptions particulières, numériser et mettre à la disposition des internautes des œuvres protégées sans avoir obtenu auparavant l’assentiment des titulaires des droits d’exploitation numérique des œuvres. Or la recherche de ces ayant-droits peut être extrêmement coûteuse et parfois infructueuse. Tout projet de numérisation de masse est confronté à cet obstacle juridique ».

Les œuvres orphelines publiées avant le 1er janvier 2001 pourront dont être qualifiées d’œuvres indisponibles et leur exploitation numérique sera ainsi rendue possible, grâce au système de gestion collective des droits numériques prévu par la présente proposition de loi.

La question des œuvres orphelines dont la publication est postérieure au 1er janvier 2001 a vocation à faire l’objet d’une réflexion distincte, dans le cadre du processus d’élaboration et de transposition du projet de directive européenne, en cours de négociation, sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines en vue de l’instauration de règles communes sur la numérisation et l’affichage en ligne de ces œuvres dites orphelines.

Article L. 134-2 : élaboration d’une liste des œuvres indisponibles

Les alinéas 5 et 6 de l’article 1er de la proposition de loi introduisent un article L. 134-2 dans le code de la propriété intellectuelle, qui pose le principe d’un recensement des œuvres indisponibles dans une base de données publique. C’est cette inscription des livres dans la base qui rendra possible l’exploitation collective des droits numériques qui y sont attachés, sauf opposition des ayant-droits.

La rédaction initiale de la proposition de loi disposait que la mise en œuvre de cette base de données publique incomberait à un organisme désigné par décret. Le Sénat a explicité qu’il s’agira de la Bibliothèque nationale de France, qui dispose en effet d’une expertise incontestable pour la constitution du corpus des œuvres indisponibles du fait, notamment, qu’elle est membre du consortium européen Arrow (Accessible registries of rights information and orphan works). Ce partenariat public-privé regroupe seize acteurs de la chaîne du livre, représentant dix pays européens, dans le but de permettre à tout utilisateur, via une interface développée au niveau européen, de vérifier si une oeuvre est disponible, épuisée ou orpheline, et d’obtenir des informations sur les détenteurs de droits.

La BnF veillera à l’actualisation de la base et à l’inscription des mentions prévues par les articles L. 134-4 (opposition des ayant-droits à l’exercice par une société de perception et de répartition – SPRD –  de la gestion des droits d’exploitation numérique d’un livre jusqu’à six mois après son inscription dans la base de données), L. 134-5 (acceptation par l’éditeur détenant le droit de reproduction sous forme imprimée du droit de préférence proposé par la SPRD pour l’exploitation numérique du livre) et L. 134-6 (sortie de la gestion collective par l’auteur et l’éditeur ou l’auteur seul s’il est l’unique titulaire du droit de reproduction et de représentation numériques).

La rapporteure du Sénat a, à juste titre, souligné l’importance qui s’attache à ce qu’une publicité suffisante soit donnée à la liste des œuvres indisponibles, afin que le système d’opt out prévu par le présent texte à l’article L. 134-6 en faveur des ayant-droits soit effectif. C’est la raison pour laquelle le Sénat a précisé que la base de données est mise à disposition du public par un service de communication public en ligne : en d’autres termes, via un site internet.

L’inscription dans la base de données se fera au rythme de l’avancée du projet industriel financé dans le cadre des « investissements d’avenir ». Les modalités de constitution de la base sont actuellement expertisées par un groupe de travail interprofessionnel sur la base d’une étude financée et pilotée par le ministère de la culture.

Le second alinéa de l’article L. 134-2 précise que l’inscription d’une œuvre dans la base de données ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 et L. 132-17 du code de la propriété intellectuelle.

L’article L. 132-12 dispose que « l’éditeur est tenu d’assurer à l’œuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession ». À défaut, le contrat d’édition peut être résilié et l’auteur peut récupérer ses droits. Le principe retenu par la proposition de loi est celui d’une totale neutralité entre les deux régimes juridiques : l’auteur d’une œuvre indisponible pourra demander la résiliation de son contrat s’il estime que l’éditeur ne s’est pas acquitté de ses obligations au titre de l’article précité, mais un juge ne pourra déduire l’absence d’exploitation permanente et suivie du fait de l’inscription dans la liste des livres indisponibles. À l’inverse, l’éditeur ne pourra se prévaloir de la nouvelle disponibilité numérique pour s’opposer à la résiliation d’un contrat.

L’article L. 132-17 envisage différentes hypothèses de fin de contrat d’édition : il dispose notamment que « la résiliation a lieu de plein droit lorsque, sur mise en demeure de l’auteur lui impartissant un délai convenable, l’éditeur n’a pas procédé à la publication de l’œuvre ou, en cas d’épuisement, à sa réédition. L’édition est considérée comme épuisée si deux demandes de livraisons d’exemplaires adressées à l’éditeur ne sont pas satisfaites dans les trois mois. »

Les références aux articles L. 132-12 et L. 132-17 ont donc pour objet de préciser que le régime d’une œuvre épuisée et celui d’une œuvre indisponible ne se confondent pas.

Article L. 134-3 : gestion collective des droits d’exploitation numérique par des sociétés de perception et de répartition des droits.

Les alinéas 7 à 18 de l’article 1er de la proposition de loi introduisent un article L. 134-3 dans le code de la propriété intellectuelle, qui pose le principe d’une gestion des droits d’exploitation numérique des livres indisponibles par des sociétés de perception et de répartition des droits agréées à cet effet.

Le I de l’article codifié indique ainsi que lorsqu’un livre est inscrit dans la base de donnée prévue à l’article L. 134-2 depuis plus de six mois, le droit de reproduction et de représentation numérique de ce livre est exercé par une société de perception et de répartition des droits (SPRD).

Le système proposé repose sur un mécanisme d’opt out : les droits de reproduction et de représentation numérique attachés aux livres indisponibles sont automatiquement transférés à une SPRD agréée, sauf si les titulaires du droit de reproduction et de représentation sous forme imprimée du livre en question font valoir leur opposition à ce transfert en application de l’article L. 134-4, au plus tard six mois après l’inscription de l’ouvrage sur la liste prévue à l’article L. 134-2.

La définition du délai dans lequel cette option de sortie est susceptible de s’exercer doit s’efforcer de respecter un équilibre entre les droits de l’auteur et la sécurité juridique, donc la viabilité économique, de l’exploitation numérique de l’œuvre.

Le délai de six mois parait à cet égard de nature à concilier ces deux exigences, pour autant qu’une publicité suffisante soit donnée à la liste en question. À cet égard, on ne peut que se féliciter de la précision apportée par le Sénat à l’article L. 134-2, en vertu de laquelle la base de données sera diffusée via un site internet. Précisons en outre que l’article L. 134-6 permet à tout moment aux ayant-droits de retirer à la SPRD le droit de gérer l’exploitation numérique de l’œuvre. On peut également saluer l’initiative des sénateurs qui ont consacré un droit de repentir de l’auteur à l’article L. 134-4, destiné à conforter son droit moral sur l’œuvre y compris à l’expiration du délai de six mois précité.

S’agissant des SPRD, rappelons que le code de la propriété intellectuelle, au titre II du livre III de sa première partie, permet une gestion collective des droits d’auteur : leurs titulaires autorisent ces sociétés à gérer ces droits, c’est-à-dire à surveiller l’utilisation de leurs œuvres, à négocier avec les utilisateurs éventuels, à leur accorder des autorisations moyennant une redevance appropriée, à percevoir et à répartir ces dernières.

Le code précise la composition et le fonctionnement des SPRD, impose une transmission de leurs statuts au ministre de la culture, les oblige à désigner un commissaire aux comptes, soumet leurs comptes et leur gestion au contrôle d’une commission permanente…

Les SPRD assurant la gestion collective des droits d’exploitation numérique des livres indisponibles seront soumises à l’ensemble de ces dispositions de droits commun, et seront également soumise à une procédure d’agrément. Les modalités de délivrance et de retrait de cet agrément seront précisées par décret, comme le prévoit l’article L. 134-7. Cette procédure de contrôle renforcé se justifie pleinement dans la mesure où la proposition de loi met en place un mécanisme de transfert des droits sauf opposition, et où ces sociétés seront amenées à exploiter des droits attachés à des œuvres orphelines.

Notons à cet égard que la proposition de loi s’en tient à un transfert de l’exercice du droit de reproduction et de représentation numériques, et ne prévoit pas une cession de ce droit, qui aurait été excessivement dérogatoire au droit de la propriété littéraire et artistique.  

D’après les informations recueillies par le rapporteur, le Centre français du droit de copie ou la Société française des intérêts des auteurs de l’écrit, l’un et l’autre actuellement constitués en SPRD, pourrait s’organiser afin d’obtenir l’agrément.

Le deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3 a été introduit au Sénat par un amendement de sa rapporteure : il s’agit d’une clarification rédactionnelle qui consiste à édicter, dans l’article de principe du code qui consacre le système de gestion collective des droits numériques des œuvres indisponibles, la règle en vertu de laquelle la SPRD peut autoriser l’exploitation numérique moyennant une rémunération, à titre non exclusif et pour une durée de cinq ans.

Le II de l’article L. 134-3 précise que les SPRD appelées à assurer la gestion collective des droits d’exploitation numérique attachés aux œuvres indisponibles  pourront ester en justice pour la défense des droits dont elles ont la charge.

Le III de l’article codifié détaille les critères en considération desquels l’agrément ministériel sera délivré :

– la diversité des associés : il s’agira donc que les associés soient des auteurs et des éditeurs représentatifs des différents types d’ouvrage et de maisons d’édition présents dans le secteur du livre ;

– la représentation paritaire des auteurs et éditeurs parmi les associés et les organes dirigeants. Cette disposition a fait l’objet d’un complément apporté par le Sénat à l’initiative de sa rapporteure : cette représentation paritaire des auteurs et des éditeurs n’a vocation à concerner que les sociétés représentant les intérêts des auteurs et des éditeurs parties au contrat d’édition. En séance publique, Mme Bariza Khiari a précisé qu’il s’agissait de « traiter le cas spécifique des sociétés de gestion représentant les droits des auteurs des œuvres visuelles présentes dans les livres – les photos, les esquisses, les dessins –, lesquelles ne doivent pas être assujetties à l’obligation de représentation paritaire » ;

– la qualification professionnelle des dirigeants et les moyens que la société propose de mettre en œuvre pour assurer le recouvrement des droits et leur répartition. Ces critères sont proches de ceux déjà évoqués dans l’article L. 321-3 du code de la propriété intellectuelle, qui a vocation à s’appliquer aux SPRD visées par la présente proposition de loi : le tribunal de grande instance, saisi par le ministre après transmission obligatoire par une SPRD de ses projets de statuts, apprécie la qualification professionnelle de ses fondateurs et les moyens qu’ils se proposent de mettre en œuvre pour assurer le recouvrement des droits et l’exploitation de leur répertoire ;

– le caractère équitable de la répartition des sommes perçues ; ce caractère équitable devra être apprécié en fonction des différents cas de figure susceptibles de se présenter. En particulier, la répartition ne pourra être identique selon que l’exploitation est réalisée par l’éditeur « historique » dans le cadre du droit de préférence prévu par l’article L. 134-5 ou par des tiers. Notons que cette disposition a été complétée par un amendement de Mme Dominique Gillot, adopté par le Sénat avec l’avis favorable de sa rapporteure, mais contre l’avis du Gouvernement : il prévoit que le montant des sommes perçues par un auteur ne pourra être inférieur au montant des sommes perçues par l’éditeur. La Commission du Sénat a en effet estimé, par la voix de sa rapporteure, que la disposition « permettrait de protéger les auteurs et d’éviter qu’un rapport de force qui leur serait ponctuellement défavorable au sein de la société de gestion ne nuise à leur intérêt. » Le Gouvernement a pour sa part estimé que le quantum des rémunérations ne devait pas être fixé par la loi. Il a également ajouté que le rapport de force ne saurait être défavorable aux auteurs, puisque la société de gestion est nécessairement paritaire ;

– les moyens que la société se propose de mettre en œuvre afin d’identifier et retrouver les titulaires de droits ; ce critère vise à garantir le sérieux des recherches effectuées par les SPRD en vue de retrouver les titulaires des droits attachés aux œuvres orphelines indisponibles. Cette disposition a été complétée par le Sénat, qui a précisé que les recherches menées doivent être avérées et sérieuses ;

– les moyens que la société se propose de mettre en œuvre pour développer des relations contractuelles permettant d’assurer la plus grande disponibilité possible des œuvres.

Enfin, le IV de l’article codifié, qui résulte d’un amendement de la rapporteure du Sénat, précise qu’un commissaire du Gouvernement participe aux assemblées délibérantes des sociétés agréées. Son rôle sera en particulier de veiller à ce que ces sociétés s’acquittent de leur tâche de recherches des titulaires de droits attachés aux œuvres orphelines.

Article L. 134-4 : droit d’opposition des titulaires de droits

Les alinéas 19 à 23 de l’article 1er de la proposition de loi introduisent dans le code de la propriété intellectuelle un article L. 134-4, qui précise les modalités d’exercice par les titulaires de droits de leur droit d’opposition au mécanisme de gestion collective des œuvres indisponibles.

Dans la rédaction de la proposition de loi initiale, le I de l’article codifié ouvrait ce droit d’opposition à l’auteur d’une œuvre indisponible ou à l’éditeur de cette œuvre sous forme de livre, dans le cadre d’un contrat d’édition.

Un amendement de la rapporteure du Sénat a modifié cette rédaction, et il est désormais fait référence à l’auteur ou à l’éditeur disposant du droit de reproduction sous forme imprimée du livre indisponible. Cette rédaction appelle plusieurs commentaires.

Notons tout d’abord qu’elle est plus précise, puisqu’elle restreint l’exercice du droit d’opposition au seul auteur ou éditeur titulaire du droit de reproduction sous forme imprimée. C’est une précision utile, puisqu’il aurait été curieux de permettre à un auteur ou un éditeur ne disposant pas ou plus du droit de reproduction de l’ouvrage sous forme imprimée de s’opposer à l’exploitation numérique dans le cadre du mécanisme de gestion collective créé par le présent texte.

Ensuite, c’est bien l’auteur ou l’éditeur titulaire du droit de reproduction de l’ouvrage sous forme imprimée qui peut s’opposer au transfert à une société de perception et de répartition. L’auteur pourra s’opposer dans tous les cas à l’entrée en gestion collective du fait de sa qualité d’auteur. L’éditeur pourra s’y opposer, pour autant qu’il détienne le droit de reproduction, c’est-à-dire pour autant que le contrat n’ait pas été dénoncé ou ne soit pas arrivé à son terme. Pour les ouvrages de collaboration, un seul des auteurs pourra s’y opposer.

En tout état de cause, l’opposition est notifiée à la BnF, au plus tard six mois après l’inscription de l’œuvre sur la liste des livres indisponibles. Le texte de la proposition de loi initiale évoquait un délai de six mois à compter de cette inscription, mais la rédaction finalement retenue, après l’adoption d’un amendement de la rapporteure du Sénat, présente l’avantage de permettre l’exercice du droit d’opposition à titre préventif, avant même une éventuelle inscription dans la liste prévue à l’article L. 134-2.

Précisons que si le droit d’opposition a été exercé avant l’inscription sur la liste, le livre y sera inscrit tout de même avec mention de l’opposition : cette inscription est importante puisque lorsque l’opposition a été exercée par l’éditeur, elle constitue le point de départ du délai de deux ans qui lui est alors imparti pour assurer une exploitation effective de l’œuvre.

Le deuxième alinéa du I dispose qu’il sera fait mention de cette opposition dans la base de données des œuvres indisponibles.

Le troisième alinéa du I a été ajouté par un amendement de la rapporteure du Sénat : il dispose qu’après l’expiration du délai de six mois à compter de l’inscription de l’œuvre sur la liste des livres indisponibles, l’auteur peut s’opposer à l’exercice du droit de reproduction ou de représentation si ces dernières nuisent à sa réputation ou à son honneur. Cette disposition participe de la volonté affichée par la rapporteure du Sénat de renforcer les droits moraux de l’auteur et consacre un droit de retrait dont les modalités sont adaptées aux circonstances particulières d’exercice des droits d’exploitation numérique consacrées par la présente proposition de loi. En effet, alors que l’article L. 121-4 du code de la propriété intellectuelle garantit à l’auteur ayant contractuellement cédé son droit d’exploitation un droit de repentir ou de retrait sous réserve d’une indemnisation préalable du cessionnaire, la présente disposition pose le principe d’une absence d’indemnisation : ce principe se justifie par le fait que le consentement de l’auteur à l’exercice par une SPRD des droits d’exploitation numérique de son œuvre n’est que présumé, la proposition de loi organisant un système d’opt out, et non expressément manifesté dans le cadre d’une cession contractuelle.

Afin de ne pas « geler » l’œuvre dont l’exploitation dans les conditions prévues à l’article L. 134-3 aurait fait l’objet d’une opposition de l’éditeur, le II de l’article L. 134-4 oblige ce dernier à exploiter le livre concerné, que ce soit sous forme numérique ou imprimée. Il devra apporter la preuve par tout moyen du caractère effectif de cette exploitation à la SPRD agréée en vertu de l’article L. 134-3. La proposition de loi initiale prévoyait que cette preuve était recueillie par la BnF, mais il a paru à la rapporteure du Sénat que la SPRD était plus à même de recevoir et de traiter ce type d’information.

À défaut d’exploitation effective par l’éditeur dans un délai de deux ans, l’exploitation numérique de l’œuvre doit de nouveau faire l’objet d’une gestion collective. Le Sénat, à l’initiative de sa rapporteure, a substitué, pour préciser les conditions de ce retour vers une gestion collective, la référence au « deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3 », à celle à « l’article L. 134-3 ». Cette modification a pour effet d’interdire à l’éditeur qui a fait opposition à la gestion collective de l’œuvre dans les six mois suivants l’inscription sur la liste des livres indisponible, et n’aurait pas exploité cette dernière dans le délai de deux ans, de bénéficier du droit de préférence prévu à l’article L. 134-5 : cet article prévoit en effet que la SPRD propose en priorité à l’éditeur historique de l’ouvrage son droit d’exploitation numérique. La carence de ce dernier, dans le délai de deux ans susmentionné, justifie pleinement que le droit de préférence puisse être écarté. L’œuvre est alors susceptible d’être exploitée à titre non exclusif et pendant une durée de cinq ans.

Le second alinéa du II, qui résulte d’un amendement de Mme Dominique Gillot adopté par le Sénat, reprend une formule qui apparaît déjà à l’article L. 134-2, et précise que la notion d’exploitation effective prévue dans le présent article codifié ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 (obligation de l’éditeur d’assurer une exploitation effective et permanente de l’œuvre) et de l’article L. 132-17 (résiliation du contrat d’édition si l’éditeur n’a pas procédé à la publication de l’œuvre ou, en cas d’épuisement, à sa réédition) du code de la propriété intellectuelle.

Article L. 134-5 : droit de préférence de l’éditeur historique

Les alinéas 24 à 31 de l’article 1er de la proposition de loi introduisent un article L. 134-5 dans le code de la propriété intellectuelle, qui organise au bénéfice de l’éditeur historique du livre indisponible un droit de préférence pour l’exploitation numérique, lequel se justifie au regard de l’engagement de ce dernier et du travail accompli en faveur de l’œuvre.

Ce droit de préférence s’exerce, comme le prévoit le premier alinéa de l’article codifié, à défaut d’opposition de l’auteur ou de l’éditeur au plus tard six mois après l’inscription de l’œuvre sur la liste des livres indisponibles, dans les conditions prévues à l’article L. 134-4. La SPRD propose alors une autorisation de reproduction et de représentation de l’œuvre sous forme numérique à l’éditeur qui dispose du droit de reproduction de ce livre sous une forme imprimée, c’est-à-dire de l’éditeur historique, cette dernière définition de l’éditeur susceptible de bénéficier de ce droit ayant été préférée à la rédaction de la proposition de loi initiale qui était moins précise, l’éditeur ayant publié l’œuvre n’étant plus nécessairement titulaire du droit de reproduction sous forme imprimée (par exemple si le contrat d’édition a été résilié par l’auteur ou que celui-ci a exercé son droit de retrait).

Le deuxième alinéa de l’article codifié prévoit que cette proposition est adressée par écrit à l’éditeur, dont le refus est présumé s’il n’a pas notifié son acceptation dans les deux mois à la SPRD. Cette acceptation est mentionnée dans la base de donnée gérée par la BnF, comme le prévoit le quatrième alinéa de l’article codifié.

Le troisième alinéa dispose que ce droit de préférence confère à l’éditeur un droit d’exploitation de l’œuvre sous forme numérique dans des conditions dérogatoires par rapport à celles prévues au deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3 : alors que les tiers pourront exploiter l’œuvre pour cinq ans et à titre non exclusif, l’éditeur historique, dans le cadre de son droit de préférence, pourra l’exploiter à titre exclusif, pour une durée de dix ans tacitement renouvelable. Ce monopole a pour objet de faciliter la numérisation et la publicité des œuvres.

Le cinquième alinéa prévoit que l’auteur de l’ouvrage peut s’opposer à l’exercice de ce droit de préférence s’il peut apporter la preuve que l’éditeur historique du livre ne dispose plus du droit de reproduction sous forme imprimée. La proposition de loi initiale disposait que ce droit d’opposition ne pouvait être exercé que dans un délai de deux mois à compter de la publication, dans la base de données gérée par la BnF, de la mention évoquant l’acceptation par l’éditeur de son droit de préférence.

Le rapport du Sénat soulignait « qu’il est étrange de laisser le droit à un auteur d’exercer pendant deux mois un droit dont il dispose à tout moment en vertu de l’article L. 134-6 ». Cet article prévoit en effet que l’auteur dispose à tout moment du droit de retirer la gestion des droits numériques à la SPRD s’il est le seul titulaire des droits de reproduction et de représentation.

Ce délai de deux mois a donc été supprimé. Précisons que contrairement au cas prévu à l’article L. 134-6, l’exercice par l’auteur de son droit d’opposition n’entraîne pas une sortie du système de gestion collective. Il a seulement pour conséquence que les conditions d’exploitation de droit commun, dans le cadre de la gestion collective, s’appliquent.

À défaut d’opposition par l’auteur à l’exercice de ce droit de préférence, l’éditeur qui en a accepté le principe est tenu d’exploiter l’ouvrage sous forme imprimée ou numérique dans les trois ans qui suivent la notification de son acceptation. Il doit apporter la preuve du caractère effectif de cette exploitation par tout moyen à la SPRD.

À défaut d’acceptation par l’éditeur titulaire du droit de reproduction de l’ouvrage sous forme imprimée de son droit de préférence, le sixième alinéa de l’article L. 134-5 dispose que l’exploitation numérique du livre peut être confiée à un tiers par la SPRD, cette exploitation se déroulant alors dans les conditions de droit commun prévues par le deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3, soit pour cinq ans au plus et à titre non exclusif.

Ce tiers sera alors considéré, aux termes du septième alinéa, comme un éditeur de livre numérique, au sens de l’article 2 de la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique.

Le dernier alinéa de l’article L. 134-5 précise que la notion d’exploitation effective prévue dans le présent article codifié ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 (obligation de l’éditeur d’assurer une exploitation effective et permanente de l’œuvre) et de l’article L. 132-17 (résiliation du contrat d’édition si l’éditeur n’a pas procédé à la publication de l’œuvre ou, en cas d’épuisement, à sa réédition) du code de la propriété intellectuelle.

Article L. 134-6 : retrait du droit reconnu à la SPRD d’autoriser l’exploitation numérique d’une œuvre indisponible

Les alinéas 32 à 36 de l’article 1er de la proposition de loi organisent la possibilité pour les titulaires des droits de reproduction et de représentation sous forme imprimée des livres indisponibles d’obtenir une sortie du système de gestion collective à tout moment, en vertu d’un nouvel article L. 134-6 du code de la propriété intellectuelle.

Les deux premiers alinéas de cet article précisent qui peut prétendre à ce droit. Ils reprennent les dispositions du premier alinéa de l’article codifié dans sa rédaction issue de la proposition de loi initiale, que le Sénat a scindées afin d’en faciliter la compréhension.

Peuvent notifier à la SPRD leur décision de lui retirer le droit d’autoriser l’exploitation numérique de l’œuvre :

– l’auteur et l’éditeur disposant du droit de reproduction du livre sous forme imprimée, sous forme d’une notification conjointe ; l’éditeur qui dispose seul du droit de reproduction ne peut faire retirer l’œuvre du système de gestion collective qu’avec l’accord de l’auteur. La proposition de loi initiale prévoyait que dans ce cas, auteur et éditeur notifiaient leur décision d’exploiter l’ouvrage à titre exclusif dans le cadre d’un contrat d’édition. Cette mention a été supprimée car il va de soi qu’en cas de retrait du système de gestion collective, et compte tenu de l’obligation prévue infra pour l’éditeur, dans ce cas de figure, d’exploiter l’ouvrage, cette exploitation ne peut reposer que sur un contrat d’édition. Par ailleurs, prévoir une exploitation exclusive dans le cadre d’un contrat d’édition alors que le présent article dispose que le retrait du système de gestion collective ne peut avoir pour conséquence d’interrompre la poursuite de l’exploitation engagée précédemment à la notification de la sortie du système s’avérait contradictoire ;

– l’auteur du livre indisponible, à condition d’être le seul titulaire du droit d’exploitation numérique de l’œuvre.

Le troisième alinéa prévoit que ces notifications sont mentionnées dans la base de données gérée par la BnF.

Notons que le Sénat a supprimé la mention en vertu de laquelle à compter de la notification du refus du maintien de l’œuvre dans le système de gestion collective, l’œuvre cesse d’être indisponible, puisque la liste des œuvres indisponibles auraient alors comporté une mention indiquant qu’une partie n’est plus indisponible.

Le quatrième alinéa de l’article L. 134-6 dispose que même en cas de sortie du mécanisme de gestion collective des droits d’exploitation numérique des œuvres indisponibles, si cette sortie a eu lieu à l’initiative de l’éditeur, celui-ci doit tout de même assurer une exploitation effective de l’œuvre dans les dix-huit mois qui suivent la notification de son retrait du système, à charge pour la SPRD de s’assurer du caractère effectif de cette exploitation.

Le dernier alinéa précise qu’en cas de sortie de l’œuvre du mécanisme de gestion collective et de récupération par l’éditeur ou l’auteur de leurs droits, la SPRD en informe les utilisateurs auxquels elle a accordé une autorisation d’exploitation numérique du livre. Toutefois, les ayant-droits ne peuvent s’opposer à la poursuite de cette exploitation pendant la durée restant à courir de l’autorisation accordée au titre de l’article L. 134-3. Notons que le texte ne précise pas si un auteur ayant exercé son droit de retrait, comme il y est autorisé s’il peut prouver qu’il est titulaire des droits d’exploitation numérique, pourrait s’opposer à la poursuite de l’exploitation lorsque cette dernière a été confiée, pour dix ans et à titre exclusif, à l’éditeur historique titulaire des droits d’exploitation sous forme imprimée.

Article L. 134-7 : décret en Conseil d’État

L’alinéa 37 de l’article 1er de la proposition de loi introduit un article L. 134-7 dans le code de la propriété intellectuelle qui renvoie à un décret en Conseil d’État pour l’application des dispositions du nouveau chapitre du code créé par l’article 1er.

Ce décret apportera notamment des précisions relatives aux modalités d’accès à la base de données gérée par la BnF et fixant la liste des œuvres indisponibles, la nature et le format des données collectées, les mesures de publicité destinées à assurer l’information des ayant-droits, les conditions de retrait et de délivrance de l’agrément des SPRD chargées d’assurer la gestion collective des droits d’exploitation numérique des livres indisponibles.

Article L. 134-8 : exploitation à titre gratuit et non exclusif de certaines œuvres indisponibles

Les alinéas 38 à 40 de l’article 1er de la proposition de loi ont été introduits par un amendement de la rapporteure du Sénat, contre l’avis du Gouvernement.

Ils créent dans le code de la propriété intellectuelle un article L. 134-8 qui consacre un droit d’exploitation à titre gratuit et non exclusif pour certaines œuvres indisponibles.

En séance publique, la rapporteure du Sénat a présenté les objectifs poursuivis par son amendement : « Cet amendement ouvre […] la possibilité aux bibliothèques de mettre à la disposition du public de nombreuses œuvres indisponibles qu’elles auraient numérisées. […] Pour résumer, il s’agit d’autoriser, après dix ans, une exploitation à titre gratuit non exclusif, ce qui inciterait les éditeurs et la SPRD à effectuer des recherches avérées et indispensables. Le couperet tombant au terme de ce délai, on peut penser que les SPRD seront enclines à mener ces recherches. »

Le premier alinéa de l’article codifié dispose en effet que la représentation et la reproduction de certains ouvrages numériques sont autorisées par la SPRD à titre gratuit et non exclusif. En droit, l’indicatif vaut impératif : l’usage de l’expression « sont autorisées » indique que la SPRD a compétence liée pour accorder des autorisations d’exploitation numérique, et qu’elle n’aura pas la faculté de refuser une telle autorisation dès lors qu’un certain nombre de conditions sont réunies :

– elle ne peut concerner que des ouvrages qui ont fait l’objet d’une première autorisation d’exploitation sous forme numérique accordée depuis au moins dix ans ;

– aucun titulaire du droit de reproduction autre que l’éditeur ne doit avoir été trouvé ; il est donc possible de traiter le cas des œuvres orphelines, mais pas seulement : les œuvres pourront faire l’objet d’une exploitation numérique à titre gratuit et non exclusif même si l’un des titulaires du droit de reproduction, en l’espèce l’éditeur, est connu et identifié. En outre, l’emploi du verbe « trouver » semble indiquer que pour exclure une œuvre du champ de cette exploitation gratuite et non exclusive, il ne s’agit pas seulement qu’un titulaire de droit ait été identifié : une fois identifié, il faut encore l’avoir retrouvé, voire contacté.

Le deuxième alinéa de l’article L. 134-8 rappelle que l’exploitation du livre est gratuite.

Le troisième alinéa précise que l’auteur ou l’éditeur titulaire du droit de reproduction de ce livre sous forme imprimée peut recouvrer le droit de reproduction et de représentation sous forme numérique, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6.

Observons d’abord que l’article L. 134-6 ne prévoit cette possibilité du retrait du droit d’exploitation numérique à la SPRD qu’au bénéfice de l’auteur, lorsqu’il est le seul titulaire du droit de reproduction, et à celui de l’éditeur et de l’auteur, conjointement. L’éditeur seul ne peut exercer ce droit. À l’inverse, dans le cas prévu au présent article, l’éditeur peut recouvrer le droit exclusif de reproduction et de représentation numérique du livre concerné.

L’article L. 134-6 précise également que les ayant-droits ne peuvent s’opposer à la poursuite de l’exploitation engagée avant la notification de leur volonté de récupérer l’intégralité de leurs droits pendant la durée restant à courir de l’autorisation accordée par la SPRD. Notons que le présent article L. 134-8 ne prévoit pas quelle serait la durée de l’autorisation accordée à titre gratuit et non exclusif.

En séance publique au Sénat, M. Patrick Ollier, ministre chargé des relations avec le Parlement, a avancé les arguments justifiant l’avis défavorable donné par le Gouvernement à l’amendement : « Tout d’abord, ces livres, s’ils n’ont pas d’auteur répertorié, ont en revanche un éditeur. Or l’interdiction de percevoir, à terme, une rémunération n’est pas de nature à susciter l’exploitation commerciale. La proposition de loi manquerait alors son objectif. Ensuite, ces livres sous droits d’auteur seraient diffusés, paradoxalement, sous un régime plus strict que les livres du domaine public, qui peuvent, quant à eux, faire l’objet d’exploitation marchande et apporter des ressources propres aux bibliothèques, objectif que nous cherchons à atteindre. Enfin, le numérique permet de concevoir des modèles de diffusion du livre qui dépassent la commercialisation titre à titre, en particulier sous forme de bouquets thématiques ou de corpus éditorialisés. En imposant la gratuité de certains livres, ne risque-t-on pas de freiner le développement de ces produits éditoriaux enrichis ? Ne condamne-t-on pas ces livres à l’isolement ? Je n’ai pas, dans l’immédiat, de réponse à ces questions. En outre, l’objectif de gratuité peut s’avérer en partie illusoire, car des acteurs très puissants de l’internet – sur lequel nous n’avons aucun moyen d’intervention –, fondant leur modèle économique sur la rémunération publicitaire issue du trafic sur leur site, pourraient être les principaux bénéficiaires d’une telle mesure, ce qui serait contraire aux objectifs de la proposition de loi et aux souhaits de Mme le rapporteur. Cette disposition généreuse risque ainsi d’avoir des effets collatéraux très importants. Elle pourrait favoriser des pratiques qui enrichiraient des diffuseurs profitant de l’avantage donné à des fins purement commerciales. »

*

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette les amendements identiques n° 24 AC de Mme Monique Boulestin et 1 AC de M. Lionel Tardy.

Puis, elle adopte, suivant l’avis favorable du rapporteur, l’amendement n° 23 AC de Mme Monique Boulestin, ainsi que les amendements identiques n° 2 AC de M. Lionel Tardy, 15 AC de Mme Marie-Hélène Amiable, 25 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle adopte l’amendement n° 34 AC du rapporteur.

Puis elle adopte, suivant l’avis favorable du rapporteur, les amendements identiques n° 3 AC de M. Lionel Tardy, n° 16 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et n° 26 AC de Mme Monique Boulestin.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette les amendements n° 17 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et n° 62 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle adopte ensuite l’amendement n° 35 AC du rapporteur.

Puis la Commission rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques n° 4 AC de M. Lionel Tardy et n° 27 AC de Mme Monique Boulestin, ainsi que l’amendement n° 28 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle adopte l’amendement n° 36 AC du rapporteur.

Elle rejette l’amendement n° 7 AC de M. Lionel Tardy suivant l’avis défavorable du rapporteur.

Elle adopte l’amendement n° 37 AC du rapporteur.

Elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques n° 5 AC de M. Lionel Tardy et n° 29 AC de Mme Monique Boulestin, ainsi que l’amendement n° 6 AC de M. Lionel Tardy.

Elle adopte les amendements n° 38 AC et 39 AC du rapporteur.

Elle examine, en discussion commune, l’amendement n° 18 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et l’amendement n° 46 AC du rapporteur, ce dernier faisant l’objet du sous-amendement n° 64 AC de Mme Monique Boulestin.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette le sous-amendement n° 64 AC, puis adopte l’amendement n° 46 AC, l’amendement n° 18 AC devenant sans objet.

La Commission adopte l’amendement n° 47 AC du rapporteur.

Après avoir rejeté, suivant l’avis défavorable du rapporteur, le sous-amendement n° 65 AC de Mme Monique Boulestin, elle adopte l’amendement n° 48 AC du rapporteur.

Après avoir rejeté, suivant l’avis défavorable du rapporteur, le sous-amendement n° 66 AC de Mme Monique Boulestin, elle adopte l’amendement n° 49 AC du rapporteur.

La Commission adopte, suivant l’avis favorable du rapporteur, les amendements identiques n° 8 AC de M. Lionel Tardy, 19 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et 30 AC de Mme Monique Boulestin.

Puis elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements n° 31 AC de Mme Monique Boulestin, 20 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et 32 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle adopte ensuite les amendements n° 60 AC, 50 AC et 51 AC du rapporteur.

Elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques n° 9 AC de M. Lionel Tardy et 33 AC de Mme Monique Boulestin.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les amendements identiques n° 10 AC de M. Lionel Tardy, 21 AC de Mme Marie-Hélène Amiable et 40 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques n° 11 AC de M. Lionel Tardy et 41 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement n° 22 AC de Mme Marie-Hélène Amiable.

Elle adopte, suivant l’avis favorable du rapporteur, l’amendement n° 42 AC de Mme Monique Boulestin.

Elle adopte l’amendement n° 53 AC du rapporteur, puis l’amendement n° 54 AC du rapporteur, l’amendement n° 43 AC de Mme Monique Boulestin devenant sans objet.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte le sous-amendement n° 61 de Mme Monique Boulestin, puis l’amendement n° 55 AC du rapporteur ainsi modifié.

Elle rejette ensuite, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques n° 12 AC de M. Lionel Tardy et 63 AC de Mme Monique Boulestin.

La Commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis

Définition de l’
œuvre orpheline

Cet article a été introduit au Sénat dans le texte de la proposition de loi par un amendement de Mme Dominique Gillot, avec avis favorable de la rapporteure et avis défavorable du Gouvernement.

Il concerne la question des œuvres orphelines qui revêt une particulière acuité dans le contexte des projets de numérisation, puisque ces œuvres se caractérisent par le fait que leurs auteurs ou ayant-droits sont inconnus ou ne peuvent être retrouvés.

Cette question fait l’objet d’une réflexion tant au niveau communautaire qu’au niveau national.

Dès 2006, la Commission européenne a demandé à un groupe d’experts de haut niveau présidé par Mme Viviane Redding de travailler sur la problématique des œuvres orphelines, puis a lancé une consultation publique sur son Livre vert relatif au droit d’auteur dans l’économie de la connaissance. Elle a précisé, dans une communication du 19 octobre 2009, que l’étape suivante devait conduire à établir des normes communes quant au niveau de diligence dont il doit être fait preuve dans la recherche de leurs propriétaires, d’une part, et de résoudre le problème de l’infraction potentielle aux droits d’auteur que constitue leur utilisation, d’autre part. Une étude d’impact sur les moyens de résoudre ces difficultés a été réalisée et la Commission européenne a adopté le 24 mai 2011 une proposition de directive sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines en vue de l’instauration de règles communes sur la numérisation et l’affichage en ligne de ces œuvres.

En France, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a constitué un groupe de travail dont le rapport a été publié en mars 2008 : il proposait une définition de ces œuvres et des modalités de gestion différentes selon que les œuvres relevaient des secteurs de l’écrit et de l’image fixe ou de celui du cinéma, de l’audiovisuel et de la musique. Pour les premières, il suggérait le recours à un mécanisme de gestion collective par des sociétés de perception et de répartition des droits.

À la suite de ces travaux, le Sénat avait adopté le 28 octobre 2010 une proposition de loi de Mme Marie-Christine Blandin relative aux œuvres visuelles orphelines et modifiant le code de la propriété intellectuelle, qui avait pour objet de proposer une définition de ces dernières.

Le présent article complète le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle et introduit un article L. 113-10 dont l’objet est de poser une définition de l’œuvre orpheline.

La définition du premier alinéa de l’article codifié reprend celle proposée par le CSPLA, qui repose sur plusieurs critères :

– il s’agit d’une œuvre protégée et divulguée : elle ne peut donc, en vertu du droit de la propriété littéraire et artistique, être exploitée sans autorisation ;

– ses ayant-droits ne peuvent être identifiés ou sont introuvables : il est donc impossible d’obtenir de leur part ladite autorisation ;

– cet échec est constaté en dépit de recherches diligentes, avérées et sérieuses.

Le deuxième alinéa de l’article L. 113-10 précise que lorsqu’une œuvre a plus d’un titulaire de droits, elle n’est pas considérée comme orpheline si l’un de ces titulaires a été retrouvé. Cette précision est importante car une œuvre peut être collective ou composite. Dans ce cas, il peut être possible de ne localiser qu’une partie des auteurs, ce qui rend l’œuvre partiellement orpheline. Il serait alors plus correct d’évoquer des « droits orphelins », c’est-à-dire des droits dont les titulaires n’ont pu être identifiés ou retrouvés.

La question de la définition des œuvres orphelines n’est pas dépourvue d’intérêt, mais elle ne saurait être posée qu’en lien avec le mécanisme que l’on se propose de créer pour assurer leur exploitation. Le présent article s’en tient à un exercice de définition, ce qui ne permet pas d’apporter de réponse à l’ensemble des questions posées : par exemple, le présent article ne précise pas qui sera chargé d’effectuer la recherche des ayant-droits.

En outre, certaines questions demeurent en suspens, comme par exemple la durée de la protection qui s’attache à de telles œuvres. En théorie, au décès de l’auteur, le droit exclusif d’exploiter l’œuvre persiste au bénéfice des ayant-droits pendant l’année civile en cours et les soixante-dix ans qui suivent. Mais comment appliquer cette règle si l’auteur est inconnu ?

Par ailleurs, le critère reposant sur l’impossibilité d’identifier ou de retrouver les titulaires de droit pourrait entraîner une confusion entre le régime des œuvres orphelines et celui des œuvres anonymes. En vertu de l’article L. 123-3 du code de la propriété intellectuelle, les œuvres anonymes tombent dans le domaine public soixante-dix ans suivant l’année de leur publication et peuvent être alors exploitées sans soulever les difficultés posées par les œuvres orphelines. Si elles devaient entrer dans la catégorie des œuvres orphelines et que s’appliquait la durée de protection de droit commun, cela pourrait entraîner des implications financières pour les institutions culturelles exploitant ce type de fonds. Le CSPLA avait d’ailleurs relevé ce problème.

Enfin, il paraît curieux de légiférer sur ce sujet alors même que des discussions sont encore en cours au niveau communautaire pour aboutir à l’adoption d’une proposition de directive. Une fois adoptée, celle-ci devra être transposée, ce qui obligera de toutes façons le législateur à remettre l’ouvrage sur le métier.

*

La Commission adopte l’amendement n° 56 AC du rapporteur supprimant l’article 1er bis.

Les amendements n° 14 AC de M. Lionel Tardy et 44 AC de Mme Monique Boulestin deviennent sans objet.

L’article 1er bis est ainsi supprimé.

Article 2

Utilisation d’une partie de la rémunération pour copie privée pour le financement d’actions en faveur de la promotion de la lecture publique ; utilisation des sommes non répartissables de la gestion collective
des livres indisponibles

Cet article modifie l’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, qui prévoit que les SPRD utilisent certaines sommes au financement d’actions d’aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et de formation des artistes.

Il s’agit :

– de 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée, soit environ 45 millions d’euros en 2009 ;

– des sommes qui n’ont pu être réparties, soit en raison de conventions internationales auxquelles la France est partie, soit parce que leur bénéficiaire n’a pu être identifié ou retrouvé, lorsqu’elles devaient être versées par les SPRD au titre :

• de l’article L. 122-10 du code précité (gestion par une SPRD du droit de reproduction par reprographie) ;

• de l’article L. 132-20-1 (gestion par une SPRD du droit de retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans changement, sur le territoire national, d’une œuvre télédiffusée à partir d’un autre État membre de la Communauté européenne ) ;

• de l’article L. 214-1 (rémunération au profit des artistes interprètes et des producteurs de phonogrammes publiés utilisés à des fins de commerce) ;

• de l’article L. 217-2 (gestion par une SPRD du droit de retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans changement, sur le territoire national, de la prestation d’un artiste interprète, d’un phonogramme ou d’un vidéogramme télédiffusés à partir d’un autre État membre de la Communauté européenne ) ;

• de l’article L. 311-1 (rémunération pour copie privée).

Le 1° de cet article a été introduit au Sénat par un amendement de Mme Dominique Gillot, avec avis favorable de la rapporteure et avis défavorable du Gouvernement.

Il étend les actions susceptibles d’être financées par les sommes susmentionnées à celles en faveur de la promotion de la lecture publique, dans l’intention d’apporter des sources de financement nouvelles aux bibliothèques publiques.

Le 2° de cet article a pour objet de prévoir que les sommes irrépartissables qui seraient perçues par les SPRD chargées de la gestion collective des œuvres indisponibles seront affectées aux actions de soutien à la création, à la diffusion du spectacle vivant, à la formation des artistes et, si le 1° du présent article devait être maintenu, à la promotion de la lecture publique.

*

La Commission adopte l’amendement n° 57 AC du rapporteur supprimant l’article 2.

L’article 2 est ainsi supprimé.

Article 2 bis (nouveau)

Organisation d’une concertation sur les questions relatives
à l’impression des livres à la demande

La Commission adopte l’amendement n° 58 rect. AC du rapporteur portant article additionnel après l’article 2.

Article 3

Application de la loi

Le présent article prévoit que loi entrera en vigueur à compter de la mise en œuvre de la base de données publiques mentionnée à l’article L. 134-2 du code de la propriété intellectuelle, créé à l’article 1er de la proposition de loi, et au plus tard six mois après sa promulgation.

Notons la curiosité d’une disposition qui subordonne ainsi l’entrée en vigueur de cette loi à la mise en œuvre d’une de ses dispositions, mise en œuvre qui elle-même ne peut être envisagée qu’à compter… de l’entrée en vigueur de la loi !

*

La Commission adopte l’amendement n° 59 AC du rapporteur et l’article 3  ainsi modifié.

Article 4

Gage financier

L’article 40 de la Constitution du 4 octobre 1958 prohibe toute initiative parlementaire dont l’adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique. Si le gage de la diminution des ressources par un accroissement équivalent de recettes permet de contourner la difficulté, il n’en va pas de même pour la création ou l’aggravation de charges publiques, insusceptibles d’être gagées par principe.

En revanche, le dépôt d’une proposition de loi comportant des charges nouvelles est toujours admis, sous réserve qu’une disposition du texte prévoie un gage financier. C’est l’objet du présent article, l’usage voulant que ce gage soit « levé » par un amendement de suppression du Gouvernement, marquant ainsi son soutien à l’initiative parlementaire.

*

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Elle adopte ensuite, à l’unanimité, l’ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

*

* *

En conséquence, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document joint au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

___

Dispositions en vigueur

___

Texte adopté par le Sénat

___

Texte adopté par la Commission

___

 

Proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle.

Proposition de loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle.

 

Article 1er

Article 1er

Code de la propriété intellectuelle

Le titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

Alinéa sans modification

 

« CHAPITRE IV

« CHAPITRE IV


« Dispositions particulières relatives

à l’exploitation numérique

des livres indisponibles

« Dispositions particulières relatives

à l’exploitation numérique

des livres indisponibles


« Art. L. 134-1. – On entend par livre indisponible au sens du présent chapitre un livre publié en France avant le 1er janvier 2001 qui ne fait plus l’objet d’une diffusion commerciale par un éditeur sous une forme imprimée ou numérique.

« Art. L. 134-1. – On …

… éditeur et qui ne fait pas actuellement l’objet d’une publication sous …

… numérique.

Amendement AC 23

 

« Art. L. 134-2. – II est créé une base de données publique, mise à disposition par un service de communication au public en ligne, qui répertorie les livres indisponibles. La Bibliothèque nationale de France veille à son actualisation et à l’inscription des mentions prévues aux articles L. 134-4, L. 134-5 et L. 134-6.

« Art. L. 134-2. – II …

… disposition en accès libre et gratuit par …

…veille

à sa mise en œuvre, à son actualisation et à l’inscription des mentions prévues aux articles L. 134-4, L. 134-5 et L. 134-6.

Amendements AC 2, AC 15, AC 25 et AC 34

   

Toute personne constatant qu'un livre du XXe siècle est indisponible peut, en faisant état de ses démarches, demander son inscription dans la base de données à l'organisme chargé de son actualisation. Faute d'un refus motivé dans l'année qui suit, l'inscription est de plein droit.

Amendements AC 3, AC 16 et AC 26

 

« L’inscription d’un livre dans la base de données ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 et L. 132-17.

Alinéa sans modification

 

« Art. L. 134-3. – I. – Lorsqu’un livre est inscrit dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2 depuis plus de six mois, le droit d’autoriser sa reproduction et sa représentation sous une forme numérique est exercé par une société de perception et de répartition des droits régie par le titre II du livre III de la présente partie agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture.

Alinéa sans modification

 

« Sauf dans le cas prévu au troisième alinéa de l’article L. 134-5, la reproduction et la représentation du livre sous une forme numérique sont autorisées, moyennant une rémunération, à titre non exclusif et pour une durée limitée qui ne peut excéder cinq années.

Alinéa sans modification

     
 

« II. – La ou les sociétés agréées ont qualité pour ester en justice pour la défense des droits dont elles ont la charge.

« II. – Les sociétés …

… charge.

Amendement AC 35

     
 

« III. – L’agrément prévu au I du présent article est délivré en considération :

« III. – Alinéa sans modification

 

« 1° De la diversité des associés ;

« 1° De la diversité des associés de la société ;

Amendement AC 36

 

« 2° De la représentation paritaire des auteurs et des éditeurs parmi les associés et au sein des organes dirigeants, lorsque la société représente les intérêts des auteurs et des éditeurs parties au contrat d’édition ;

« 2° De …

… dirigeants ;

Amendement AC 37

 

« 3° De la qualification professionnelle des dirigeants ;

« 3° De …

… dirigeants de la société ; Amendement AC 38

 

« 4° Des moyens que la société propose de mettre en oeuvre pour assurer le recouvrement des droits et leur répartition ;

« 4° Des …

… assurer la perception des …

… répartition ;

Amendement AC 39

 

« 5° Du caractère équitable des règles de répartition des sommes perçues. Le montant des sommes perçues par un auteur au titre d’un livre ne peut être inférieur au montant des sommes perçues par l’éditeur ;

« 5° Du …

… perçues par les ayants droit, qu’ils soient ou non parties au contrat d’édition ;

Amendement AC 46

 

« 6° Des moyens que la société propose de mettre en oeuvre afin d’effectuer des recherches avérées et sérieuses permettant d’identifier et de retrouver les titulaires de droits ;

« 6° Des …

œuvre afin d’identifier et de retrouver les titulaires de droits aux fins de répartir les sommes perçues ;

Amendement AC 47

 

« 7° Des moyens que la société propose de mettre en oeuvre pour développer des relations contractuelles permettant d’assurer la plus grande disponibilité possible des oeuvres.

Alinéa sans modification

   

« 8° Des moyens que la société propose de mettre en œuvre pour veiller à la défense des intérêts légitimes des ayants droit non parties au contrat d’édition. »

Amendement AC 48

     


« IV (nouveau). – Un commissaire du Gouvernement participe aux assemblées délibérantes de la ou des sociétés agréées. Il s’assure notamment que les recherches avérées et sérieuses de titulaires de droits ont bien été menées.

« IV. – Les sociétés agréées remettent chaque année à la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits mentionnée à l'article L. 321-13, un rapport rendant compte des moyens mis en œuvre et des résultats obtenus dans la recherche des titulaires de droits, qu’ils soient ou non parties au contrat d’édition.

« La commission peut formuler toute observation ou recommandation d’amélioration des moyens mis en œuvre afin d’identifier et de retrouver les titulaires de droits.

« La commission est tenue informée, dans le délai qu'elle fixe, des suites données à ses observations et recommandations.

« La commission rend compte annuellement, au Parlement, au Gouvernement et à l’assemblée générale des sociétés agréées, selon des modalités qu’elle détermine, des observations et recommandations qu’elle a formulées et des suites qui leur ont été données. »

Amendement AC 49

 

« Art. L. 134-4. – I. – L’auteur ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée d’un livre indisponible peut s’opposer à l’exercice du droit d’autorisation mentionné au premier alinéa du I de l’article L. 134-3 par une société de perception et de répartition des droits agréée. Cette opposition est notifiée par écrit à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 134-2 au plus tard six mois après l’inscription du livre concerné dans la base de données mentionnée au même alinéa.

« Art. L. 134-4. – I. – L’auteur d’un livre indisponible ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée de ce livre peut …

… alinéa.

Amendements AC 8, AC 19 et AC 30


« Mention de cette opposition est faite dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2.

Alinéa sans modification

 

« Après l’expiration du délai mentionné au premier alinéa, l’auteur d’un livre indisponible peut s’opposer à l’exercice du droit de reproduction ou de représentation de ce livre si la reproduction ou la représentation de ce livre est susceptible de nuire à son honneur ou à sa réputation. Ce droit est exercé sans indemnisation.

« Après …

… livre s’il juge que la

reproduction …

… indemnisation.

Amendement AC 60


« II. – L’éditeur ayant notifié son opposition dans les conditions prévues au premier alinéa du I est tenu d’exploiter dans les deux ans suivant cette notification le livre indisponible concerné. Il doit apporter par tout moyen la preuve de l’exploitation effective du livre à la société agréée en vertu de l’article L. 134-3. À défaut d’exploitation du livre dans le délai imparti, la mention de l’opposition est supprimée dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2 et le droit d’autoriser sa reproduction et sa représentation sous une forme numérique est exercé dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3.

« II. – L’éditeur …

… en

application de l’article …

… L. 134-3.

Amendement AC 50

 

« L’exploitation de l’oeuvre dans les conditions prévues au présent article ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 et L. 132-17.

« La preuve de l’exploitation effective du livre apportée par l’éditeur dans les conditions prévues à l’alinéa précédent ne préjuge …

… L. 132-17.

Amendement AC 51

 

« Art. L. 134-5. – À défaut d’opposition notifiée par l’auteur ou l’éditeur à l’expiration du délai prévu au I de l’article L. 134-4, la société de perception et de répartition des droits propose une autorisation de reproduction et de représentation sous une forme numérique d’un livre indisponible à l’éditeur disposant du droit de reproduction de ce livre sous une forme imprimée.

Alinéa sans modification

 

« Cette proposition est formulée par écrit. Elle est réputée avoir été refusée si l’éditeur n’a pas notifié sa décision par écrit dans un délai de deux mois à la société de perception et de répartition des droits.

Alinéa sans modification

 

« L’autorisation d’exploitation mentionnée au premier alinéa est délivrée par la société de perception et de répartition des droits à titre exclusif pour une durée de dix ans tacitement renouvelable, sauf dans le cas mentionné à l’article L. 134-8.

« L’autorisation …

… renouvelable.

Amendement AC 52

 

« Mention de l’acceptation de l’éditeur est faite dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2.

Alinéa sans modification

 

« À défaut d’opposition de l’auteur apportant par tout moyen la preuve qu’il est le seul titulaire du droit de reproduction d’un livre sous une forme imprimée, l’éditeur ayant notifié sa décision d’acceptation est tenu d’exploiter, dans les trois ans suivant cette notification, le livre indisponible concerné. Il doit apporter à cette société, par tout moyen, la preuve de l’exploitation effective du livre.

« À …

… preuve que cet éditeur ne dispose pas du droit …

… livre.

Amendements AC 10, AC 21 et AC 40

 

À défaut d’acceptation de la proposition mentionnée au premier alinéa ou d’exploitation de l’oeuvre dans le délai prévu à l’alinéa précédent, la reproduction et la représentation du livre sous une forme numérique sont autorisées par la société de perception et de répartition des droits dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3.

Alinéa sans modification

 

« L’utilisateur auquel une société de perception et de répartition des droits a accordé une autorisation ’exploitation dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3 est considéré comme éditeur de livre numérique au sens de l’article 2 de la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique.

Alinéa sans modification

 

« L’exploitation de l’oeuvre dans les conditions prévues au présent article ne préjuge pas de l’application des articles L. 132-12 et L. 132-17.

Alinéa sans modification

 

« Art. L. 134-6. – L’auteur et l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée d’un livre indisponible notifient conjointement à tout moment à la société de perception et de répartition des droits mentionnée à l’article L. 134-3 leur décision de lui retirer le droit d’autoriser la reproduction et la représentation dudit livre sous forme numérique.

Alinéa sans modification

 

« L’auteur d’un livre indisponible peut décider à tout moment de retirer à la société de perception et de répartition des droits mentionnée à l’article L. 134-3 le droit d’autoriser la reproduction et la représentation du livre sous une forme numérique, s’il apporte la preuve qu’il est le seul titulaire des droits définis au même article. Il lui notifie cette décision.

Alinéa sans modification

 

« Mention des notifications prévues aux premier et deuxième alinéas est faite dans la base de données mentionnée à l’article L. 134-2.

Alinéa sans modification

 

« L’éditeur ayant notifié sa décision dans les conditions prévues au premier alinéa est tenu d’exploiter le livre concerné dans les dix-huit mois suivant cette notification. Il doit apporter à la société de perception et de répartition des droits, par tout moyen, la preuve de l’exploitation effective du livre.

Alinéa sans modification

 

« La société informe tous les utilisateurs auxquels elle a accordé une autorisation d’exploitation du livre concerné des décisions mentionnées aux premier et deuxième alinéas. Les ayants droit ne peuvent s’opposer à la poursuite de l’exploitation dudit livre engagée avant la notification pendant la durée restant à courir de l’autorisation mentionnée au deuxième alinéa du I de l’article L. 134-3.

« La …

… L. 134-3 ou au troisième alinéa de l’article L. 134-5, à concurrence de cinq ans maximum et à titre non exclusif.

Amendement AC 42

 

« Art. L. 134-7. – Les modalités d’application du présent chapitre, notamment les modalités d’accès à la base de données prévue à l’article L. 134-2, la nature ainsi que le format des données collectées et les mesures de publicité appropriées à l’information des ayants droit, les conditions de délivrance et de retrait de l’agrément des sociétés de perception et de répartition des droits prévu à l’article L. 134-3, sont précisées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 134-7. – Les …

… publicité les plus appropriées pour garantir la meilleure information possible des ayants droit, les conditions …

… d’État.

Amendement AC 53

 

« Art. L. 134-8 (nouveau). – Si aucun titulaire du droit de reproduction d’un livre sous une forme imprimée autre que l’éditeur n’a été trouvé dans un délai de dix années après la délivrance de la première autorisation d’exploitation dudit livre indisponible sous une forme numérique, la reproduction et la représentation de ce livre sous une forme numérique sont autorisées par la société de perception et de répartition des droits mentionnée à l’article L. 134-3 à titre gratuit et non exclusif.

Alinéa supprimé

Amendement AC 54

 

« L’exploitation de ce livre sous une forme numérique est gratuite.

Alinéa supprimé

Amendement AC 54

 

« L’auteur ou l’éditeur titulaire du droit de reproduction de ce livre sous forme imprimée peut recouvrer à tout moment le droit exclusif de reproduction et de représentation de ce livre sous forme numérique, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6. »

Alinéa supprimé

Amendement AC 54

   

« Art. L.134-9 (nouveau).– Les sociétés agréées utilisent à des actions d'aide à la création, à des actions de formation des auteurs de l'écrit et à des actions de promotion en faveur de l’accès aux œuvres et de la promotion de la création mises en œuvre par les bibliothèques les sommes perçues au titre de l'exploitation des livres indisponibles et qui n'ont pu être réparties parce que leurs destinataires n'ont pas pu être identifiés ou retrouvés avant l'expiration du délai prévu au dernier alinéa de l'article L. 321-1.

   

« Le montant et l'utilisation de ces sommes font l'objet, chaque année, d'un rapport des sociétés de perception et de répartition des droits au ministre chargé de la culture. »

Amendements AC 55 et AC 61

 

Article 1er bis (nouveau)

Article 1er bis 

 

Le chapitre III du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un article L. 113-10 ainsi rédigé :

Supprimé

Amendement AC 56

 

« Art. L. 113-10. – L’oeuvre orpheline est une oeuvre protégée et divulguée, dont le titulaire des droits ne peut pas être identifié ou retrouvé, malgré des recherches diligentes, avérées et sérieuses.

 
 

« Lorsqu’une oeuvre a plus d’un titulaire de droits et que l’un de ces titulaires a été identifié et retrouvé, elle n’est pas considérée comme orpheline. »

 
 

Article 2

Article 2

Code de la propriété intellectuelle

L’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

Supprimé

Amendement AC 57

Art L. 321-9. – Ces sociétés utilisent à des actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation des artistes :

1° 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée ;

1° Au premier alinéa, après le mot : « création », sont insérés les mots : « , à la promotion de la lecture publique, » ;

 

2° La totalité des sommes perçues en application des articles L. 122-10, L. 132-20-1, L. 214-1, L. 217-2 et L. 311-1 et qui n'ont pu être réparties soit en application des conventions internationales auxquelles la France est partie, soit parce que leurs destinataires n'ont pas pu être identifiés ou retrouvés avant l'expiration du délai prévu au dernier alinéa de l'article L. 321-1.

Elles peuvent utiliser à ces actions tout ou partie des sommes visées au 2° à compter de la fin de la cinquième année suivant la date de leur mise en répartition, sans préjudice des demandes de paiement des droits non prescrits. La répartition des sommes correspondantes, qui ne peut bénéficier à un organisme unique, est soumise à un vote de l'assemblée générale de la société, qui se prononce à la majorité des deux tiers. A défaut d'une telle majorité, une nouvelle assemblée générale, convoquée spécialement à cet effet, statue à la majorité simple.

Le montant et l'utilisation de ces sommes font l'objet, chaque année, d'un rapport des sociétés de perception et de répartition des droits au ministre chargé de la culture et aux commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Le commissaire aux comptes vérifie la sincérité et la concordance avec les documents comptables de la société des informations contenues dans ce rapport. Il établit à cet effet un rapport spécial.

2° Au 2°, après la référence :

« L. 132-20-1, », est insérée la référence : « L. 134-3, ».

 
   

Article 2 bis (nouveau)

   

Les organismes représentatifs des auteurs, des éditeurs, des libraires et des imprimeurs engagent une concertation sur les questions économiques et juridiques relatives à l'impression des livres à la demande.

Amendement AC 58

 

Article 3 

Article 3 

 

La présente loi est applicable à compter de la mise en oeuvre de la base de données publique mentionnée à l’article L. 134-2 du code de la propriété intellectuelle et au maximum six mois après sa promulgation.

L’article 1er entre en vigueur à compter de la publication du décret pris pour l’application du chapitre IV du titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.

Amendement AC 59

 

Article 4

Article 4

 

Les conséquences financières résultant pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Sans modification

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AC 1 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 4, remplacer « diffusion commerciale par un éditeur » par « publication »

Amendement n° AC 2 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 5, après les mots : « mise à disposition », insérer les mots : « en accès libre et gratuit »

Amendement n° AC 3 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« Toute personne constatant qu'un livre du XXe siècle est indisponible peut, en faisant état de ses démarches, demander son inscription dans la base de données à l'organisme chargé de son actualisation. Faute d'un refus motivé dans l'année qui suit, l'inscription est de plein droit. »

Amendement n° AC 4 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Compléter l’alinéa 9 par les mots : « sur mandat exprès de l’auteur »

Amendement n° AC 5 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Après l’alinéa 12, insérer l’alinéa suivant :

« 2°-bis De la représentation diversifiée des différents types de livres et de modes de publication. »

Amendement n° AC 6 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Après l’alinéa 12, insérer l’alinéa suivant :

« 2°-bis De la représentation des usagers, notamment les bibliothèques et le public parmi les associés et au sein des organes dirigeants. »

Amendement n° AC 7 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 12 : « 2° De la représentation des auteurs concernés ; »

Amendement n° AC 8 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 19, remplacer

« L’auteur ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée d’un livre indisponible peut »

par

« L’auteur d’un livre indisponible ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée de ce livre peut »

Amendement n° AC 9 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 24, après les mots : « livre indisponible à l’éditeur disposant », insérer les mots : « contre rémunération de l’auteur »

Amendement n° AC 10 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 28, remplacer les mots : « qu’il est le seul titulaire » par les mots : « que cet éditeur ne dispose pas »

Amendement n° AC 11 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Dans l’alinéa 33, supprimer les mots : « apporte la preuve qu’il »

Amendement n° AC 12 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 134-8bis. - La reproduction et la représentation sous une forme numérique d'un livre indisponible est autorisée par la société de perception et de répartition des droits mentionnée à l’article L. 134-3 à titre gratuit et non exclusif dans les cas suivants :

« – le livre a été publié sans qu'il y ait diffusion commerciale ;

« – la publication n'a pas donné lieu à une rémunération de l'auteur ;

« – aucune autorisation d'exploitation n'a été délivrée au titre des articles L. 134-3 ou L. 134-5 dans un délai de 10 années après l'inscription du livre dans la base de données mentionnée à l'article L. 134-2.

« L’exploitation de ce livre sous une forme numérique est gratuite.

« L’auteur de ce livre peut recouvrer à tout moment le droit exclusif de reproduction et de représentation de ce livre sous forme numérique, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6. »

Amendement n° AC 13 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er

À l’alinéa 2, remplacer :

« Lorsqu’une œuvre a plus d’un titulaire de droits et que l’un de ces titulaires a été identifié et retrouvé, elle n’est pas considérée comme orpheline. »

par :

« Lorsqu’une œuvre a plus d’un titulaire de droits, et qu’au moins un de ses titulaires n’a pas été identifié et localisé, elle est considérée comme orpheline. Chaque titulaire des droits a, dans le cadre de ses droits, la possibilité de mettre fin au statut d’œuvre orpheline. »

Amendement n° AC 14 présenté par M. Lionel Tardy

Article 1er bis

Après l’alinéa 2, insérer l’alinéa suivant :

« Les sources appropriées pour les recherches concernant chaque type d’œuvre sont fixées par décret. »

Amendement n° AC 15 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l’alinéa 5, après les mots : « mise à disposition », insérer les mots : « en accès libre et gratuit »

Amendement n° AC 16 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« Toute personne constatant qu'un livre du XXe siècle est indisponible peut, en faisant état de ses démarches, demander son inscription dans la base de données à l'organisme chargé de son actualisation. Faute d'un refus motivé dans l'année qui suit, l'inscription est de plein droit. »

Amendement n° AC 17 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l'alinéa 7, remplacer les mots : « de six mois » par les mots : « d'un an »

Amendement n° AC 18 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

Rédiger ainsi la première phrase de l'alinéa 15 :

« 5° Du caractère juste et équitable des règles de répartition des sommes perçues, dans le respect de l'article L. 132-5. »

Amendement n° AC 19 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l'alinéa 19, remplacer les mots : « L’auteur ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée d’un livre indisponible peut », par les mots : « L’auteur d’un livre indisponible ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée de ce livre peut »

Amendement n° AC 20 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l'alinéa 19, remplacer les mots : « six mois » par les mots : « un an ».

Amendement n° AC 21 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l'alinéa 28, remplacer les mots : « qu’il est le seul titulaire » par les mots : « que cet éditeur ne dispose pas »

Amendement n° AC 22 présenté par Mme Marie-Hélène Amiable, Mme Huguette Bello, Mme Marie-George Buffet, M. Michel Vaxès

Article 1er

À l'alinéa 33, remplacer les mots : « qu’il est le seul titulaire » par les mots : « que cet éditeur ne dispose pas »

Amendement n° AC 23 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 4, après les mots : « diffusion commerciale par un éditeur » insérer les mots : « et qui ne fait pas actuellement l’objet d’une publication ».

Amendement n° AC 24 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 4, remplacer les mots : « diffusion commerciale par un éditeur » par le mot : « publication »

Amendement n° AC 25 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 5, après les mots : « mise à disposition », insérer les mots : « en accès libre et gratuit »

Amendement n° AC 26 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« Toute personne constatant qu'un livre du XXe siècle est indisponible peut, en faisant état de ses démarches, demander son inscription dans la base de données à l'organisme chargé de son actualisation. Faute d'un refus motivé dans l'année qui suit, l'inscription est de plein droit. »

Amendement n° AC 27 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Compléter l’alinéa 9 par les mots : « sur mandat exprès de l’auteur »

Amendement n° AC 28 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Compléter l’alinéa 9 par les mots : « en cas d’exploitation commerciale non autorisée du livre »

Amendement n° AC 29 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Après l’alinéa 12, insérer l’alinéa suivant :

« 2°bis - De la représentation diversifiée des différents types de livres et de modes de publication. »

Amendement n° AC 30 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 19, remplacer les mots :

« L’auteur ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée d’un livre indisponible peut »

par les mots :

« L’auteur d’un livre indisponible ou l’éditeur disposant du droit de reproduction sous une forme imprimée de ce livre peut »

Amendement n° AC 31 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 19, après le mot : « disposant », insérer les mots : « contre rémunération de l’auteur »

Amendement n° AC 32 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 21 :

« Après l’expiration du délai mentionné au premier alinéa, l’auteur d’un livre indisponible peut exercer son droit de repentir ou de retrait sans indemnisation. »

Amendement n° AC 33 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 24, après les mots : « livre indisponible à l’éditeur disposant », insérer les mots : « contre rémunération de l’auteur »

Amendement n° AC 34 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À la deuxième phrase de l’alinéa 5, après le mot : «  veille », insérer les mots : « à sa mise en œuvre, »

Amendement n° AC 35 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À l’alinéa 9, supprimer les mots : « La ou »

Amendement n° AC 36 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Compléter l’alinéa 11 par les mots : « de la société ; »

Amendement n° AC 37 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Après les mots : « organes dirigeants, » supprimer la fin de l’alinéa 12

Amendement n° AC 38 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Compléter l’alinéa 13 par les mots : « de la société ; »

Amendement n° AC 39 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À l’alinéa 14, substituer aux mots : « le recouvrement », le mot : « la perception »

Amendement n° AC 40 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 28, remplacer les mots : « qu’il est le seul titulaire » par les mots : « que cet éditeur ne dispose pas »

Amendement n° AC 41 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 33, supprimer les mots : « apporte la preuve qu’il »

Amendement n° AC 42 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Compléter l’alinéa 36 par les mots : « ou au troisième alinéa de l'article L. 134-5, à concurrence de 5 ans maximum et à titre non exclusif »

Amendement n° AC 43 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Compléter l’alinéa 38 de cet article par la phrase :

« Il en est de même si des titulaires du droit de reproduction sous une forme imprimée sont trouvés et que tous y consentent. »

Amendement n° AC 44 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er bis

Après l’alinéa 2, insérer l’alinéa suivant :

« Les sources appropriées pour les recherches concernant chaque type d’œuvre sont fixées par décret. »

Amendement n° AC 46 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Après la première occurrence des mots : « des sommes perçues », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 15 :

« entre les ayants droit, qu’ils soient ou non parties au contrat d’édition ; »

Amendement n° AC 47 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Après les mots : « œuvre afin », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 16 :

« d’identifier et de retrouver les titulaires de droits aux fins de répartir les sommes perçues ; »

Amendement n° AC 48 présenté par M. Gaymard, rapporteur

Article 1er

Après l’alinéa 17, insérer l’alinéa suivant :

« 8° Des moyens que la société propose de mettre en œuvre pour veiller à la défense des intérêts légitimes des ayants droit non parties au contrat d’édition. »

Amendement n° AC 49 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Substituer à l’alinéa 18 les quatre alinéas suivants :

« IV .– Les sociétés agréées remettent chaque année à la commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits mentionnée à l'article L. 321-13, un rapport rendant compte des moyens mis en œuvre et des résultats obtenus dans la recherche des titulaires de droits, qu’ils soient ou non parties au contrat d’édition.

« La commission peut formuler toute observation ou recommandation d’amélioration des moyens mis en œuvre afin d’identifier et de retrouver les titulaires de droits.

« La commission est tenue informée, dans le délai qu'elle fixe, des suites données à ses observations et recommandations.

« La commission rend compte annuellement, au Parlement, au Gouvernement et à l’assemblée générale des sociétés agréées, selon des modalités qu’elle détermine, des observations et recommandations qu’elle a formulées et des suites qui leur ont été données. »

Amendement n° AC 50 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À la deuxième phrase de l’alinéa 22,  substituer au mot : « vertu », le mot : « application »

Amendement n° AC 51 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Rédiger ainsi le début de l’alinéa 23 : « La preuve de l’exploitation effective du livre apportée par l’éditeur dans les conditions prévues à l’alinéa précédent ne préjuge pas …(le reste sans changement) »

Amendement n° AC 52 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À l’alinéa 26, supprimer les mots : « , sauf dans le cas mentionné à l’article L. 134-8 »

Amendement n° AC 53 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À l’alinéa 37, substituer aux mots : « appropriées à l’information des ayants droit », les mots : les plus appropriées pour garantir la meilleure information possible des ayants droit »

Amendement n° AC 54 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Supprimer les alinéas 38 à 40

Amendement n° AC 55 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L.134-9 (nouveau).–  Les sociétés agréées utilisent à des actions d'aide à la création, à des actions de formation des auteurs de l'écrit et à des actions de promotion de la lecture publique les sommes perçues au titre de l'exploitation des livres indisponibles et qui n'ont pu être réparties parce que leurs destinataires n'ont pas pu être identifiés ou retrouvés avant l'expiration du délai prévu au dernier alinéa de l'article L. 321-1.

« Le montant et l'utilisation de ces sommes font l'objet, chaque année, d'un rapport des sociétés de perception et de répartition des droits au ministre chargé de la culture. »

Amendement n° AC 56 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er bis

Supprimer cet article

Amendement n° AC 57 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 2

Supprimer cet article

Amendement n° AC 58 rect. présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article additionnel après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Les organismes représentatifs des auteurs, des éditeurs, des libraires et des imprimeurs engagent une concertation sur les questions économiques et juridiques relatives à l'impression des livres à la demande. »

Amendement n° AC 59 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 3

Rédiger ainsi cet article :

« L’article 1er entre en vigueur à compter de la publication du décret pris pour l’application du chapitre IV du titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi. »

Amendement n° AC 60 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

À la première phrase de l’alinéa 21, substituer au mot : « si », les mots : « s’il juge que »

Sous-amendement n° AC 61 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC à l’amendement n° 55 de M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Dans le deuxième alinéa de cet amendement, substituer aux mots : « à des actions de promotion de la lecture publique », les mots : « à des actions en faveur de l’accès aux œuvres et de la promotion de la création mises en œuvre par les bibliothèques ».

Amendement n° AC 62 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Dans l’alinéa 8, remplacer les mots : « de l’article L. 134-5 », par les mots : « des articles L. 134-5 et L. 134-8 bis »

Amendement n° AC 63 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC

Article 1er

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 134-8 bis. La reproduction et la représentation sous une forme numérique d'un livre indisponible est autorisée par la société de perception et de répartition des droits mentionnée à l’article L. 134-3 à titre gratuit et non exclusif dans les cas suivants :

« a) le livre a été publié sans qu'il y ait diffusion commerciale ;

« b) la publication n'a pas donné lieu à une rémunération de l'auteur ;

« c) aucune autorisation d'exploitation n'a été délivrée au titre des articles L. 134-3 ou L. 134-5 dans un délai de 10 années après l'inscription du livre dans la base de données mentionnée à l'article L. 134-2.

« L’exploitation de ce livre sous une forme numérique est gratuite.

« L’auteur de ce livre peut recouvrer à tout moment le droit exclusif de reproduction et de représentation de ce livre sous forme numérique, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6. »

Sous-amendement n° AC 64 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC à l’amendement n° 46 de M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

« Après les mots : « entre les ayants droit ; » rédiger ainsi la fin de l’amendement 46 : « de toutes les contributions au livre publié sous forme numérique. Le montant des sommes perçues par les auteurs au titre d’un livre ne peut être inférieur au montant des sommes perçues par l’éditeur ; »

Sous-amendement n° AC 66 présenté par Mme Monique Boulestin, M. Patrick Bloche, M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe SRC à l’amendement n° 49 de M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 1er

Dans le premier alinéa de l’amendement 49, substituer aux mots : « des titulaires de droits, qu'ils soient ou non parties au contrat d'édition ; », les mots : « des ayants droit de toutes les contributions au livre publié sous forme numérique. »

© Assemblée nationale

1 () Rapport du groupe d’experts de haut niveau sur les bibliothèques numériques à la Commission européenne, « Les bibliothèques numériques : recommandations et défis pour le futur », décembre 2009

2 () « Bibliothèques numériques et Google Book search », Jean-Michel Salaün, in Regards sur l’actualité n° 316, La Documentation française, 2005

3 () Source : recommandation de la Commission européenne sur la numérisation et l'accessibilité en ligne du matériel culturel et la conservation numérique du 27 octobre 2011.

4 () 3è chambre 2è section.

5 () Le groupe de travail constitué au sein du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique sur cette question et qui a rendu son rapport en mars 2008 définit les œuvres orphelines comme des œuvres protégées et divulguées, dont les titulaires de droits ne peuvent être identifiés ou retrouvés malgré des recherches avérées et sérieuses.

6 () Rapport du groupe d’experts de haut niveau sur les bibliothèques numériques, « Les bibliothèques numériques : recommandations et défis pour le futur », décembre 2009.

7 () Rapport de M. Jean Martin et Mme Sophie-Justine Lieber au nom de la commission sur les œuvres orphelines du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique.