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N
° 253

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2013
(n° 235),

TOME III

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET AMÉNAGEMENT DURABLES

PÊCHE

PAR Mme Annick LE LOCH,

Députée.

——

Voir le numéro : 251 (annexe 14)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.— DES CRÉDITS STABILISÉS EN RAISON DE LA FIN DU PLAN POUR UNE PÊCHE DURABLE ET RESPONSABLE (PPDR) 7

A.— LA FIN DES MESURES LIÉES AU PPDR 7

B.— UN BUDGET RECENTRÉ AUTOUR DE SES PRIORITÉS 8

C.— DU FEP AU FEAMP, QUELLE AMBITION ? 10

1. Les critiques de la Cour des comptes européenne 11

2. La position française sur la réforme 12

D.— LES CONTRATS BLEUS, BILAN ET AVENIR 13

1. Un dispositif innovant 13

2. Les difficultés du F2DP 14

II.— FRANCE FILIÈRE PÊCHE, UNE OPPORTUNITÉ DE MODERNISATION 17

A.— UN ENGAGEMENT VOLONTAIRE 18

B.— UNE MISE EN PLACE RAPIDE ET EFFICACE 19

1. Organisation 20

2. Réalisations pour l’année 2012 21

a) Le lancement de la marque commerciale nationale « Pavillon France » 21

b) Le soutien en faveur d’une pêche sélective et économe en énergie 23

c) La participation à l’amélioration des connaissances sur les stocks halieutiques 23

C.— UNE DYNAMIQUE À ENTRETENIR 24

TRAVAUX DE LA COMMISSION 27

I.— AUDITION DE M. FRÉDÉRIC CUVILLIER, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DE LA MINISTRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ÉNERGIE, CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA MER ET DE LA PÊCHE. 27

II.— EXAMEN DES CRÉDITS 43

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 45

Mesdames, Messieurs,

Deux grandes novations ont affecté l’administration du secteur de la pêche au sein de la nouvelle architecture gouvernementale : d’une part l’ensemble des questions relatives à la mer est désormais regroupé au sein d’un même portefeuille ministériel confié à M. Frédéric Cuvillier, qui se trouve, d’autre part, délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Changement majeur dans l’organisation administrative, la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) a donc quitté le giron du ministère de l’agriculture pour celui de l’écologie.

Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit, pour les crédits de l’action n° 6 consacrée à la gestion durable des pêches et de l’aquaculture au sein du programme 205 (sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture) de la mission « écologie, développement et aménagement durables », une baisse de 7 % pour les autorisations d’engagement et de 10 % pour les crédits de paiement en regard des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2012. Cette évolution s’explique par le retour à un budget désormais stabilisé après l’extinction des crédits alloués temporairement au titre du plan pour une pêche durable et responsable (PPDR).

Bien entendu l’importance du secteur économique de la pêche et de l’aquaculture ne se résume pas à son enveloppe budgétaire de 52 M€, mais découle bien davantage de l’activité de toute une filière du pêcheur au distributeur et au commerçant en passant par les armateurs, le mareyage, les criées et les transformateurs. Il serait d’ailleurs utile de disposer d’une vision consolidée des efforts publics en faveur de la pêche et de l’aquaculture, recensant les crédits des différentes missions, les aides fiscales ainsi que les crédits européens dont bénéficie le secteur.

Les réformes de la politique commune de la pêche (PCP) et de l’organisation commune de pêche (OCM) constituent la toile de fond de ces crédits en faveur de la pêche. Au-delà de cet exercice budgétaire, c’est maintenant l’organisation de la pêche pour les dix prochaines années qui se décide. Votre rapporteure tient à souligner les évolutions positives entre la rédaction du livre vert et les projets en l’état qui sont largement dues à la position ferme et unitaire des responsables français dans ce dossier. L’abandon de l’idée de quotas individuels transférables par navire en est la meilleure illustration.

Le présent rapport pour avis porte tout d’abord sur l’examen des crédits de l’action concernée et propose, ensuite, une étude sur les réalisations de France filière pêche, association de type interprofessionnel qui constitue une initiative originale et ambitieuse au service de l’ensemble des intervenants de la filière.

I.— DES CRÉDITS STABILISÉS EN RAISON DE LA FIN DU PLAN POUR UNE PÊCHE DURABLE ET RESPONSABLE (PPDR)

A.— LA FIN DES MESURES LIÉES AU PPDR

Les difficultés structurelles du secteur de la pêche, renforcées par la crise conjoncturelle née en 2007 de la montée rapide des prix du gazole, ont conduit les pouvoirs publics à mettre en place en 2008 le plan pour une pêche durable et responsable (PPDR), qui a mobilisé environ 310 M€ sur trois ans, dont 55 environ proviennent du fonds européen pour la pêche (FEP).

Ce plan avait des objectifs à la fois environnementaux, économiques et sociaux et était basé sur une série de 15 mesures articulées autour de 4 priorités :

- optimiser la ressource halieutique ;

- renforcer l’attractivité du secteur de la pêche ;

- favoriser un développement économique durable de la pêche française ;

- renforcer la sécurité des pêcheurs.

Prévu sur trois ans, le PPDR est arrivé à son terme en 2011, mais plusieurs mesures comme les contrats bleus ont été poursuivies et soutenues par les crédits prévus dans le budget de la Mission « agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales « (MAPAFAR) pour 2012 et la mission « écologie, développement et aménagement durables » pour 2013.

Incontestablement, le PPDR a apporté un soutien permettant à la filière pêche de faire face à la crise, mais celle-ci n’est pas durablement sauvée pour autant. La vulnérabilité persistante aux variations de prix du gazole reste un facteur de faiblesse majeur et l’investissement dans des bateaux à la fois plus performants, plus économes et plus sélectifs de même que plus sûrs pour les équipages constitue un défi que le secteur de la pêche doit encore relever.

Depuis 2000, le secteur des pêches maritimes a bénéficié d’un accompagnement financier de l’Union européenne, d’abord à travers l’instrument financier d’orientation pour la pêche (IFOP) ensuite avec le Fonds européen pour la pêche (FEP), depuis 2007 comme le rappelle le tableau ci-dessous :

FINANCEMENTS EUROPÉENS POUR LA GESTION DURABLE DE LA PÊCHE

(en millions d’euros)

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Investissement et modernisation

10,5

16,1

22,5

18,0

20,5

20,8

16,2

2,1

1,5

3

3

Aide spécifique DOM

5,6

10,8

8,7

10,5

8,6

9,3

11

4,8

4,8

4,8

4,8

Organisation et régulation des marchés

4,5

3,9

5,3

3,8

3,3

4,0

4,0

4,0

1,5

1,5

1,5

Valorisation des produits de la mer (*)

7,9

8,3

9,6

9,1

6,0

6,7

12,9

1,5

1,1

5,3

5,3

Adaptation de l’effort de pêche (sorties de flotte)

2,2

15,5

5,7

1,7

10,9

9,5

4,0

13

2

2,4

2,4

Actions structurelles de la pêche (suivi et contrôle)

2,4

1,2

13,1

3,1

2,9

7,4

3,0

2,6

2,5

2,5

2,5

Autres

0,2

0,2

0,6

1,5

2,5

1,9

1,5

0

0

0

0

Total

33,2

56,0

65,50

47,7

54,7

59,6

52,6

28

13,4

19,5

19,5

• dont FEOGA – G, FEAGA à partir de 2008

7,6

9,6

13,4

11,6

9

15,7

9

11,4

8,8

8,8

8,8

• dont IFOP, FEP à partir de 2008

25,6

46,4

52,1

36,0

45,7

43,9

43,6

16,6

4,6

10,7

10,7

Les chiffres indiqués pour 2011 et 2012 sont les montants prévisionnels transmis à la Commission européenne

Source : MAAPRAT – SAFSL - Les concours publics aux pêches maritimes et aux cultures marines ; MAAPRAT – DPMA pour les prévisions.

B.— UN BUDGET RECENTRÉ AUTOUR DE SES PRIORITÉS

L’année 2013 sera consacrée à la mise en œuvre de la politique du défi maritime français portée par le nouveau gouvernement. D’un point de vue budgétaire, cela se traduit par une modification de la maquette du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes », qui voit l’intégration dans sa nomenclature de l’ancienne action 16 « Gestion durable des pêches et de l’aquaculture » du programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires ». Ce changement budgétaire reflète l’intégration de la direction des pêches maritimes et aquaculture (DPMA) au ministère chargé de l’écologie (elle dépendait auparavant du ministère chargé de l’agriculture).

Le tableau ci-dessous permet une meilleure appréciation des crédits afférents à la pêche et à l’aquaculture, en intégrant les dépenses de pilotage (DPMA) et les produits de fonds de concours et produits divers.

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

En euros

Ouvertes en LFI pour 2012

Demandées pour 2013

Ouverts en LFI pour 2012

Demandés pour 2013

Action n° 6. Gestion durable des pêches et de l’aquaculture

55 872 500

52 000 000

57 997 500

52 000 000

FDC et ADP

7 000 000

7 420 000

7 000 000

7 420 000

Crédits de pilotage, de soutien

49 556 095

20 156 015

49 556 095

20 156 015

Total

112 428 595

79 576 015

114 553 595

79 576 015

Source : Documents budgétaires

Le budget du secteur de la pêche se répartit entre, d’une part, les interventions économiques qui représentent l’essentiel de la dotation affectée au secteur (93,9 % soit 48,83 M€ en AE et en CP), et, d’autre part, les dépenses de fonctionnement pour le secteur (6,10 % soit 3,17 M€ en AE et en CP). La mise en œuvre de cette action est en partie assurée par FranceAgrimer pour soutenir l’organisation économique des marchés et améliorer la valorisation des produits de la pêche et de l’aquaculture.

Les crédits alloués au secteur de la pêche et de l’aquaculture répondent aux objectifs de la PCP, soit que les crédits de l’État viennent en contrepartie de l’Union européenne (Fonds Européen pour la Pêche), soit que l’Union participe aux dépenses engagées par l’État pour la mise en œuvre de certains règlements (contrôle des pêches), soit au cas par cas par le biais de la validation des aides d’État notifiées à la Commission européenne.

Comme chaque année, on constate que trois dispositifs concentrent près de la moitié des crédits nationaux en faveur de la pêche : les plans de sortie de flotte (PSF), pour 7 M€ en CP (13 % des crédits de la mission), les contrats bleus pour 10 M€ (19 %) et la participation de l’État aux caisses de chômage pour intempéries et avaries gérées par le comité national des pêches maritimes et élevages marins (CNPMEM), pour un montant équivalent à celui des marins-pêcheurs cotisants, soit 6,84 M€, comme en 2012 et 2011 (13 %) ;

Parmi les autres postes budgétaires importants pour la filière, il importe de souligner l’effort en matière de suivi statistique et scientifique ainsi que le soutien aux organismes scientifiques spécialisés.

En matière de suivi statistique et scientifique, les crédits (3,4 M€ au total) sont consacrés à la recherche sur la surmortalité des naissains d’huîtres creuses (0,6 M€), aux programmes d’observations scientifiques en mer concernant par exemple les pêcheries profondes et la protection des coraux ou l’évaluation des espèces à vie courte dans les zones de production importantes (anchois du golfe de Gascogne) à hauteur de 2 M€, ou encore à la campagne d’évaluation de la légine dans les terres australes et antarctiques françaises (0,2 M€).

Quant au soutien aux organismes scientifiques spécialisés, il concerne en premier chef les crédits versés à l’IFREMER dans le cadre d’une convention qui recouvre la collecte, la saisie et le traitement des données relatives à l’activité des navires ainsi que la réalisation des travaux d’expertise sur la gestion des ressources halieutiques (1,85 M€). Le muséum national d’histoire naturelle bénéficie quant à lui d’une dotation de 350 000 euros dans le cadre de la gestion des pêcheries des zones économiques exclusives des TAAF (Kerguelen, Crozet, St Paul et Amsterdam), la préservation des intérêts des pêcheurs dans les zones Natura 2000 en mer et les aires marines protégées (AMP), et nouveauté pour 2013, l’identification et l’échantillonnage des élasmobranches (raies, requins et chimères) capturés au cours des opérations de pêche.

Le dernier poste important concerne le contrôle des pêches maritimes, il recouvre des crédits de fonctionnement à hauteur de 2,27 M€ et des dépenses d’intervention en faveur du développement et de la mise en œuvre d’applications informatiques et de l’équipement des navires en journaux de bord électronique et caméras (3,83 M€).

C.— DU FEP AU FEAMP, QUELLE AMBITION ?

Adopté le 27 juillet 2006 par le Conseil des ministres de l’UE, le Fonds Européen pour la pêche (FEP), institué par le règlement (CE) 1198/2006 du Conseil permet d’octroyer une aide financière au secteur européen de la pêche au cours de la période 2007-2013. Les objectifs du fonds, décrits à l’article 4 du règlement sont les suivants :

•  Soutenir les grands objectifs de la politique commune de la pêche (PCP), en particulier ceux qui ont été fixés dans le cadre de la réforme de 2002. Il s’agit notamment d’assurer l’exploitation durable des ressources de pêche et d’instaurer un équilibre stable entre ces ressources et la capacité de la flotte de pêche de l’UE ;

•  Renforcer la compétitivité et la viabilité économique des opérateurs du secteur ;

•  Promouvoir des méthodes de pêche et de production respectueuses de l’environnement ;

•  Apporter un soutien adéquat aux personnes employées dans le secteur ;

•  Faciliter la diversification des activités économiques dans les zones dépendantes de la pêche.

L’action du FEP porte sur les cinq domaines prioritaires listés ci-après :

– Adaptation de la flotte de pêche communautaire aux ressources disponibles ; 

– Aquaculture, pêche dans les eaux intérieures, transformation et commercialisation des produits de la pêche et de l’aquaculture ;

– Mesures d’intérêt collectif ;

– Développement durable des zones tributaires de la pêche ; 

– Assistance technique destinée à faciliter la mise en œuvre de l’aide du FEP.

Le FEP a permis d’intervenir massivement puisqu’une enveloppe de 216 M€ a été accordée à la France pour la période 2007-2013.

1. Les critiques de la Cour des comptes européenne

Dans un rapport spécial (1) publié au mois de décembre 2011, la Cour des comptes européenne à chercher à évaluer si les mesures prises par l’UE ont contribué efficacement à l’adaptation de la capacité des flottes aux possibilités de pêche existantes. La Cour s’est penchée sur les deux questions principales suivantes : «Le cadre établi pour réduire la capacité de pêche est-il clair ?» et «Les mesures spécifiques sont-elles correctement définies et mises en œuvre ?».

L’audit a été effectué auprès de la Commission et de sept États membres (le Danemark, l’Espagne, la France, l’Italie, la Pologne, le Portugal et le Royaume-Uni) sélectionnés en fonction de la taille de leur flotte de pêche et des ressources disponibles pour adapter celle-ci dans le cadre du FEP. Il a conclu que la surcapacité de la flotte de pêche continue d’être l’une des principales causes de l’échec de la PCP en ce qui concerne la viabilité des activités de pêche. Selon la Cour, « bien que l’adaptation de la capacité de pêche aux possibilités de pêche soit l’une des pierres angulaires de la PCP et du FEP, la surcapacité de pêche n’a été ni définie ni quantifiée ».

2. La position française sur la réforme

La nouvelle mouture du cadre financier pluriannuel européen pour la période 2014-2020, le fonds pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), est dotée de 6,7 Md€. Mais outre que les missions de ce fonds sont élargies aux affaires maritimes et aux accords internationaux de partenariat pour la pêche, plusieurs Etats se sont déclarés défavorables au maintien d’aides à l’ajustement des capacités de la flotte et à la modernisation des navires.

Il convient de souligner que la position française sur ce sujet est très claire pour critiquer le constat sur la surcapacité de la flotte, l’introduction de concessions de pêche transférables, l’absence de volet social ambitieux permettant de créer des emplois de qualité et la suppression programmée de l’aide au stockage. Dans son rapport sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au FEAMP (2), le député européen Alain Cadec plaide également pour le maintien d’investissements pour la modernisation des navires sous certaines conditions précises, pour améliorer les conditions de travail, la sécurité, limiter la consommation en énergie, limiter la pollution et promouvoir des engins plus sélectifs.

C’est dans ce contexte que le ministre délégué auprès de la ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche a fédéré sept États autour de la France pour l’envoi d’une lettre adressée à la commissaire européenne chargée des affaires maritimes, Mme Maria Damanaki.

Cette lettre a été signée par la France, l’Espagne, la Pologne, Malte, l’Irlande, le Portugal, la Slovénie et la Lituanie. Ces pays demandent le maintien des subventions pour la modernisation et le retrait des navires, ce que la Commission propose de supprimer.

Les signataires avancent que le nouveau Fonds de la pêche doit « intégrer pleinement la nécessité de soutenir la modernisation des navires de pêche, sans augmentation des capacités ». Ils considèrent que « la réduction de l’impact environnemental des activités de pêche passe par une amélioration de l’efficacité énergétique qui peut se traduire par le remplacement ou la modernisation des systèmes de propulsion et le choix d’engins plus sélectifs ». Ils prônent également l’amélioration des conditions de vie et de sécurité des pêcheurs à bord des navires et le renforcement de la dimension sociale de la PCP.

D.— LES CONTRATS BLEUS, BILAN ET AVENIR

1. Un dispositif innovant

Les contrats bleus ont été mis en place dans le cadre du PPDR. Portés par des structures collectives, cinq au total (3), ces contrats se traduisent par des engagements des adhérents sur des pratiques de pêche plus contraignantes que la réglementation européenne. Ce dispositif a rencontré un grand succès dans un contexte marqué par le renchérissement du coût du gasoil et la censure par la commission européenne des aides au titre du fonds de prévention des aléas de la pêche (FPAP), heureusement tempérée par une application rétroactive du principe dit de minimis qui permet d’exonérer du remboursement la grande majorité des entreprises ayant reçu ces aides.

Le dispositif des contrats bleus mobilise de nombreux armements et navires :

• lors de la première phase de mise en œuvre du dispositif (second semestre 2008) 636 navires se sont engagés, principalement en Bretagne et Atlantique ;

• en 2009, 874 navires se sont engagés en Mer du Nord, Manche et Atlantique et Méditerranée ;

• en 2010, 883 navires se sont engagés sur toutes les façades métropolitaines ;

• en 2011, 633 navires se sont engagés dans le dispositif.

En contrepartie des services environnementaux rendus (ramassages de déchets en mer, embarquement de scientifiques pour des observations), l’État verse une aide. Ainsi 37,5 M€ [30 M€ de crédits de l’État et 7,5 M€ de crédits du Fonds européen pour la pêche (FEP)] ont été programmés pour l’ensemble des deux années 2008 et 2009, une enveloppe de 18,75 M€ a été ouverte en 2010 (15 M€ de crédits de l’État et de 3,75 M€ de crédits du FEP), et 12,5 M€ ont été prévus en 2011 et 2012 (10 M€ de crédits de l’État et 2,5 M€ de crédits du FEP). Les crédits d’intervention de l’action n° 6 prévoient encore un montant de 10 M€ pour l’exercice 2013.

Les contrats bleus visent à encourager des pratiques de pêche particulièrement respectueuses de la ressource et des actions permettant de contribuer à la protection et à une meilleure connaissance de l’environnement marin. Tout en étant mis en œuvre par les armateurs et leurs équipages, les contrats bleus sont portés par des structures collectives (organisations de producteurs, coopératives, structures ad hoc…), qui sont chargées du montage des projets, du pilotage et du contrôle des mesures.

La négociation de la nouvelle PCP et du cadre réglementaire du Fonds Européen pour les Affaires Maritimes et la Pêche (FEAMP), applicable à compter du 1er janvier 2014, et les contraintes d’un budget national limité vont sans doute rendre nécessaire la rénovation et l’adaptation du dispositif des contrats bleus. La nouvelle maquette pourrait, conformément aux orientations du FEAMP, relever d’une démarche de projets validés dans le cadre de partenariats scientifiques et répondre aux objectifs d’innovation, d’économie d’énergie et de gestion durable de la ressource. Elle pourrait prévoir des modalités d’aide revues et simplifiées.

2. Les difficultés du F2DP

Le Fonds pour le développement durable de la pêche (F2DP) est un syndicat professionnel créé à l’initiative des organes de la Coopération Maritime (Coopération Maritime, FEDOPA, CGPA et CECOMER) dont les missions sont :

§ le portage des contrats bleus ;

§ l’aide à l’investissement (projet de remplacement des SOFIPECHES) ;

§ l’accompagnement des jeunes investisseurs ;

§ le projet sur les droits à rejets de CO2.

Après avoir considérablement œuvré à la mise en œuvre du dispositif des contrats bleus, FD2P connaît malheureusement d’importants problèmes à l’heure actuelle. En effet, certaines mesures inscrites dans les premiers contrats bleus, sur lesquelles s’étaient engagés les navires atlantiques, ont été invalidées a posteriori par la Commission européenne en raison d’une efficacité jugée insuffisante, entraînant une demande de reversement des aides trop perçues correspondantes de l’ASP au F2DP. Or, plusieurs entreprises de la côte atlantique concernées par les demandes de remboursement ont été dissoutes dans le cadre de plans de sortie de flotte et d’autres ont tout bonnement démissionné du F2DP en refusant de rembourser les montants réclamés.

En outre, en l’absence de remboursement du F2DP à l’ASP, le dispositif d’indemnisation reste bloqué pour les contrats bleus méditerranéens qui sont exclusivement portés par cette dernière structure. Ainsi depuis les premières indemnisations versées au titre de l’année 2009 sous la forme d’avances accordées par l’Agence de services et de paiement (ASP), les opérations d’indemnisation ont été suspendues.

L’historique du dossier est le suivant :

En 2008, une avance a été versée par l’Agence de services et de paiement (ASP), organisme payeur des crédits de l’État et du FEP, à F2DP, sur la base des mesures que les navires s’étaient engagés à mettre en œuvre. F2DP a reversé cette avance aux navires, comme le prévoyait l’organisation du dispositif contrats bleus.

En 2009, le dispositif contrats bleus s’est poursuivi, et une nouvelle avance a été versée aux navires. Cette même année, la Commission européenne a invalidé deux mesures mises en place en 2008. Compte tenu du contexte de crise, les navires ont été dans l’impossibilité de rembourser immédiatement les sommes correspondantes. Dans ce cadre, un système de remboursement par compensation sur les années suivantes a été mis en place.

Trois cas d’entreprises se sont alors présentés :

– des entreprises ont poursuivi les contrats bleus avec F2DP, et ont accepté de rembourser les sommes qu’elles devaient par compensation sur les années de mise en œuvre suivantes ;

– certaines entreprises ont disparu sans avoir remboursé les sommes dues ;

– enfin, certaines entreprises ont arrêté les contrats bleus et donc quitté F2DP sans rembourser les sommes qu’elles devaient ; ces entreprises sont nombreuses, et F2DP se trouve aujourd’hui dans l’impossibilité de rembourser à l’ASP les sommes correspondantes.

Compte tenu de ces difficultés et des délais de remboursement, l’agent comptable de l’ASP souhaite émettre un ordre de reversement au titre de 2008 et bloque le paiement des dossiers à partir de 2009, dans l’attente d’une régularisation. Il est souhaitable que cette situation trouve un aboutissement rapide.

II.— FRANCE FILIÈRE PÊCHE, UNE OPPORTUNITÉ DE MODERNISATION

Dans un contexte caractérisé par les contraintes de la PCP, telles que la réduction des taux admissibles de captures (TAC) et quotas sur de nombreuses espèces, la limitation de l’effort de pêche ou l’objectif de rendement maximum durable (RMD), sans compter les affirmations alarmistes sur l’état des ressources halieutiques distillées par certaines associations environnementales, l’absence de structuration de la filière de la pêche constitue un incontestable handicap à une meilleure prise en considération des enjeux économiques de ses différentes composantes.

Dans l’objectif de moderniser durablement la filière, la réforme de l’organisation professionnelle de la pêche a été engagée dès 2008 avec notamment pour objectif la constitution d’une interprofession de la pêche, élément majeur pour structurer la filière française et répondre de manière coordonnée et efficace aux évolutions économiques du secteur.

Compte tenu de l’absence de tradition en matière de dialogue et d’actions concertées entre les différentes familles professionnelles et de la complexité du dispositif interprofessionnel, il a paru nécessaire à la Direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) et ses différents partenaires de s’engager dans un projet commun ayant vocation à déboucher rapidement. La mise en œuvre d’une marque collective permettant de mieux identifier et valoriser les produits de la pêche française dans un contexte de très forte concurrence exercée par les produits importés s’est ainsi imposée comme un projet porteur.

Une association dédiée, France Filière Pêche (FFP), regroupant tous les maillons de la filière mais pas le comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), a ainsi été constituée, en mars 2010, avec pour objet la gestion et la promotion de la marque collective. Dans ce cadre, un cahier des charges de la marque collective a été élaboré par un groupe de travail et validé par les différentes familles.

Dans le même temps, le Gouvernement a fait adopter dans le cadre de la loi de finances rectificatives pour 2007 (4) une contribution pour une pêche durable, plus connue sous l’appellation de « taxe poisson », codifiée à l’article 302 bis KF du code général des impôts. Il s’agissait d’une taxe portant sur les ventes au détail de poissons, crustacés et mollusques marins ainsi que sur les produits alimentaires comportant plus de 30 % de tels produits de la mer. Le taux de la taxe était de 2 % et son assiette correspondait au montant hors taxe des ventes des produits indiqués précédemment. Le produit de la contribution pour une pêche durable s’élevait à 70 M€ par an et était affecté au budget général de l’État et non aux crédits de la pêche en raison de la réglementation européenne des aides d’État. L’article 81 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 a ensuite introduit une modulation du taux de la taxe sur les ventes de poissons, crustacés et mollusques marins en fonction du chiffre d’affaires de l’entreprise redevable, dans le but de réduire les effets de seuil et de tenir compte de la capacité contributive des entreprises. Ainsi les entreprises dont le chiffre d’affaires était inférieur à 763 000 euros n’étaient pas soumises à la taxe, les entreprises dont le chiffre d’affaires se situait entre 763 000 euros et 2 M€ bénéficiaient d’une mesure de plafonnement progressif (l’application d’un coefficient permettant à ces entreprises de bénéficier d’un plafonnement de la taxe compris entre 0 et 2 % de leur valeur ajoutée totale). Enfin, les entreprises dont le chiffre d’affaires était supérieur à 2 M€ étaient, quant à elles, soumises de manière normale à une taxe plafonnée à 2 % de leur valeur ajoutée totale. Ce dispositif permettait donc aux petites poissonneries de sortir du champ des redevables et à celles d’envergure moyenne de se voir appliquer un taux inférieur à 2 %.

En raison de la contestation de ce modèle d’organisation, le schéma initial de France Filière Pêche a toutefois rapidement évolué vers un engagement volontaire de l’ensemble des acteurs amont et aval en faveur d’une pêche à la fois compétitive et durable. La mise en place de cette nouvelle mouture, de nature entièrement privée, s’est effectuée dans un temps très bref et a déjà permis le déploiement de la marque « pavillon France ». L’engouement autour de cette association à caractère interprofessionnel doit maintenant être entretenu par ses différentes composantes autour de projets mobilisateurs.

Il a paru important à votre rapporteure de mettre en exergue cette initiative originale qui, tout en ne comportant pas de financement public, n’en suscite pas moins des espoirs pour réaliser dans de bonnes conditions la modernisation de la filière pêche, particulièrement côté amont. Sa singularité lui permet, en outre, de ne pas encourir les foudres de la Commission européenne en matière d’aides d’État qui ont régulièrement sabordé les initiatives françaises par le passé. Dans un contexte économique morose et alors que la filière pêche connaît certaines difficultés structurelles, il est assez encourageant de voir s’engager une telle démarche structurante et décidée.

A.— UN ENGAGEMENT VOLONTAIRE

Dans un contexte de prix du gazole structurellement élevé et d’incertitudes sur les prix de première vente, un groupe de travail national, regroupant les différentes familles professionnelles du secteur de la production, a été mis en place le 2 février 2011, pour soumettre des propositions sur le maintien de la compétitivité des entreprises de pêche.

La DPMA a piloté ce groupe de travail national sur le maintien de la compétitivité des entreprises de pêche. Dans ce cadre, les représentants de la filière ont proposé la création d’un fonds privé interprofessionnel permettant d’appuyer les armements dans des projets ciblés améliorant leur compétitivité :

– économies d’énergie : soutiens individuels afin d’inciter la diffusion de solutions apportant des économies d’énergie, soutien à des projets innovants visant à développer de nouveaux équipements et tester au réel de nouveaux engins.

– réduction des impacts sur le milieu marin (engins sélectifs, diagnostics énergétique et environnemental) : les moyens sont proches de ceux mis en œuvre pour aborder la problématique énergétique mais l’approche environnementale est privilégiée, notamment la baisse des émissions de CO2 ou la protection des habitats aquatiques.

– amélioration de la valeur des produits débarqués (marque collective française) et actions interprofessionnelles : la mise en avant des produits de la pêche française devrait être un moyen pour les entreprises françaises de se démarquer des produits d’importation et de valoriser des espèces mal connues.

Sur la base du rapport remis le 18 avril 2011 et dans la perspective de la suppression de la « taxe poisson » dont la conformité aux règles européennes était contestée par la fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), un réel partenariat de filière avec les grandes enseignes de la distribution permettant de conforter la compétitivité des produits de la pêche française a été mis en place. Cette démarche s’accompagnait de la création d’un fonds interprofessionnel privé soutenant les objectifs précités.

C’est ainsi qu’en mai 2011 les principales enseignes de la grande distribution ont signé un engagement à verser à FFP, dès 2012 et pour cinq années, un montant de l’ordre de 30 M€ par an. Il s’agit là de la principale source de financement du fonds même si les adhérents professionnels doivent également y cotiser. En parallèle, et conformément aux engagements du Gouvernement, la « taxe poisson » a été abrogée, à compter du 1er janvier 2012, par l’article 46 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

Votre rapporteure tient à souligner que si l’engagement initial des enseignes de la grande distribution repose sans aucun doute beaucoup sur celui du gouvernement de supprimer la « taxe poisson », elle a pu constater au cours des auditions que cet engagement va désormais bien au-delà et repose sur l’idée d’un partenariat « gagnant-gagnant » des différentes parties.

B.— UNE MISE EN PLACE RAPIDE ET EFFICACE

FFP a validé ses nouveaux statuts et la refonte de sa gouvernance pour assurer ses nouvelles missions en termes d’économie d’énergie et de pêche durable au mois de septembre 2011. Son conseil d’administration est désormais composé de trois collèges : production, commerce et transformation, distribution, disposant chacun d’une voix. Le champ d’intervention actuel de FFP est celui de la pêche maritime professionnelle, il ne comprend donc pas, à ce jour, les cultures marines. L’outre-mer n’entre pas non plus dans le périmètre d’action de l’association compte tenu de la source des financements privés dont bénéficie FFP.

Des évolutions pourront intervenir, à terme, en accord avec toutes les familles professionnelles de la filière avec des configurations qui pourront être différentes selon qu’il s’agit des actions amont ou bien de la marque collective Pavillon France. Compte tenu de sa composition et de sa gouvernance (prise de décisions à l’unanimité des collèges), FFP présente un caractère interprofessionnel mais elle n’a pas aujourd’hui le rôle d’une interprofession au sens réglementaire du terme.

1. Organisation

Début septembre 2011, une assemblée générale extraordinaire a permis d’entériner les évolutions statutaires et d’élire les nouvelles instances dirigeantes. La structure associative comporte désormais six salariés y compris la déléguée générale, Mme Emmanuelle Sauvion. Le choix du président d’une telle structure revêt un caractère particulier car il doit être suffisamment indépendant par rapport aux différentes parties prenantes pour ne pas prêter le flanc à la suspicion et avoir néanmoins une bonne connaissance de la filière et de son économie. A ces égards, la personnalité et le parcours de M. Gérard Higuinen, vice-président du conseil de surveillance du groupe Pomona, sont de nature à rallier un large consensus.

En assemblée, comme en conseil d’administration, les décisions sont prises à l’unanimité des trois collèges. Le vote au sein des collèges est obtenu à la majorité des voix en sachant qu’il existe au conseil d’administration, une répartition particulière des voix des membres permettant d’équilibrer le poids respectif des différentes familles professionnelles qui composent le collège.

L’association compte deux comités (production et commercialisation) pour guider ses travaux et réalisations. Ces comités interviennent statutairement sur délégation du conseil d’administration. Chaque famille professionnelle est représentée dans les deux comités. Le comité commercialisation est chargé de la mise en place et du déploiement de la marque commerciale (évolution du référentiel technique de la marque et du plan contrôle notamment, pilotage des actions de communication pour la marque et mise en œuvre des actions labellisées).

Le comité production est chargé quant à lui de préparer la stratégie intéressant l’amont de la filière, à savoir la participation à l’amélioration de la connaissance des stocks halieutiques et le soutien en faveur d’une pêche sélective et économe en énergie.

Le budget annuel de FFP est de l’ordre de 30 M€ avec un financement principalement issu de la grande distribution sur la base d’un engagement volontaire signé pour 5 ans en mai 2011. Le budget est ventilé comme suit : 2/3 pour les actions dites amont et 1/3 pour les actions dites aval. Cette ventilation fait l’objet d’une clause de révision à l’issue de trois ans.

ORGANIGRAMME DE FRANCE FILIÈRE PÊCHE

Organisés autour de trois collèges, les membres de FFP sont :

Pour le collège production : AMOP, ANOP, FEDOPA, UAPF, Coopération maritime et CNPMEM.

Pour le collège commerce et transformation : UMF, CGI et FIAC.

Pour le collège distribution : UNPF, CPF, FCD, Intermarché et Leclerc.

Les membres du Bureau de FFP sont :

M. Gérard HIGUINEN, CGI, président

M. Marc DURET, FCD, vice-président et président du comité commercialisation

M. Philippe MERABET, coopération maritime, vice-président et président du comité production

M. Jacques PERSON, UMF trésorier

M. Pierre LABBE, UNPF, secrétaire

Mme Catherine SERAFIM, CFP, secrétaire-adjointe.

2. Réalisations pour l’année 2012

a) Le lancement de la marque commerciale nationale « Pavillon France »

Cette marque vise à identifier sur les étals (poissonneries et rayons marée des GMS) les produits pêchés par les navires de pêche battant pavillon Français. Le budget qui lui est consacré s’élève à 5 M€.

A noter que le lancement de la marque commerciale s’adosse à une campagne de communication très puissante :

– création d’un portail internet de référence : www.pavillonfrance.fr ;

– mobilisation des réseaux sociaux, relations presse, publicité sur Internet avec achat d’espace et utilisation d’éléments graphiques ou visuels ;

– mise à disposition de kits de balisage des étals ;

– diffusion d’un spot TV de 20 secondes (2 vagues de 3 semaines) sur les principales chaînes à des heures de grande audience.

Le choix initial consiste à concentrer les efforts de lancement de la marque sur les produits de la pêche fraîche. Toutefois, le référentiel étant évolutif, l’ambition de FFP est d’intégrer à terme les produits transformés et les produits surgelés. A noter qu’aujourd’hui les seules mentions obligatoires telles ANO pour Atlantique nord-ouest ou OI pour océan Indien qui ont pour fonction de préciser l’océan où le poisson a été pêché n’évoquent rien pour le consommateur.

PAVILLON FRANCE a pour mission de promouvoir les produits de la pêche française, d’accroître la visibilité de ces produits sur les étals et de garantir une origine et une fraîcheur. Il s’agit d’une marque commerciale nationale conçue comme une « marque ombrelle » au-dessous de laquelle peuvent s’inscrire des labels ou indications régionaux.

escription : Pavillon France - Poissons et Crustacés, Cuisine, Pêche

L’adhésion à la marque est une démarche volontaire des opérateurs et la qualification des produits intervient au niveau des premiers acheteurs qui sont souvent les mareyeurs. Aujourd’hui, la pêche fraîche sur les étals fait très peu appel aux techniques de marketing. Les allégations de la marque ne portent pas sur l’état de la ressource mais sur la saisonnalité et la diversité des produits. A terme, le référentiel technique a pour objectifs d’intégrer des exigences portant sur les bonnes pratiques de pêche. La qualité de la marque fait l’objet de contrôles par la société SGS spécialisée dans l’industrie de l’inspection, de la vérification, du test et de la certification.

Sont éligibles au bénéfice de la marque PAVILLON FRANCE, tous les produits entrant dans le périmètre d’application du décret n° 2012-64 du 19 janvier 2012 relatif aux modalités des premières ventes de produits de la pêche maritime débarqués en France par des navires français et ce selon les spécificités suivantes :

- Produits de la pêche maritime au sens de l’article L. 932-5 du code rural et de la pêche maritime ;

- Pêchés en mer par un navire battant pavillon français ;

- Produits vivants, frais ou réfrigérés (stabilisé entre 0 et + 2 °C dans un système de froid positif prévu à cet effet) destinés à l’alimentation humaine ;

- Produits de fraîcheur Extra (E) ou A entiers et transformés frais (les coquillages et crustacés peuvent être cuits, décortiqués, décoquillés) ;

- Produits appartenant aux catégories de la liste ouverte présentée en annexe 2 de ce règlement d’usage : Poissons de mer, crustacés, céphalopodes, coquillages de pêche et autres invertébrés (oursins…) ;

- Première vente enregistrée auprès d’un premier acheteur engagé pour cette activité auprès de l’Association France Filière Pêche et déclarée dans un dispositif national de traçabilité des captures et des premières transactions en :

o Vente de gré à gré, directement auprès des navires producteurs ;

o Vente en halles à marée.

Les consommateurs peuvent découvrir dans leurs grandes surfaces ou chez leurs détaillants des étiquettes Pavillon France sur les produits de la pêche. Cette sorte de label « made in France », garant de fraîcheur et de qualité, porte majoritairement les produits capturés dans la Manche et dans l’Atlantique par des bateaux battant pavillon français. Comme l’a indiqué M. Marc Duret, de la FCD (Fédération du commerce et de la distribution) : « Il s’agit d’espèces sur lesquelles il n’y a pas de problème de ressources et notamment des poissons capturés sur nos côtes et qui sont un peu oubliés tels le tacot, l’aiglefin, le merlu ».

b) Le soutien en faveur d’une pêche sélective et économe en énergie

Ce soutien prend plusieurs formes :

– la diffusion d’un appel à projets courant mars pour encourager les expérimentations en faveur de l’amélioration de la sélectivité des engins de pêche et la réduction de la consommation énergétique des flottilles, pour un budget de 5 M€.

Une vingtaine de projets ont été déposés, parmi lesquels 17 ont été considérés éligibles. A l’issue d’une évaluation par trois experts indépendants et anonymes, 9 de ces projets ont reçu un avis favorable pour un soutien financier de FFP, 5 sont en attente d’expertise complémentaire et 3 ont été rejetés.

– l’accompagnement financier à la réalisation d’investissements sélectifs et/ou économes pour les navires de pêche, pour un budget de 15 M€.

A la date de fin juillet 2012, 1 406 navires étaient inscrits parmi les 4 672 que compte le fichier flotte métropolitain (soit environ 30 % des navires du fichier et notamment 93 % des arts traînants du segment des 20/24 mètres). L’enveloppe prévisionnelle de cette opération est de 6,6 M€ au regard du volume des inscriptions recensées mi-juillet, un acompte de 50 % des barèmes initiaux ayant déjà été versé aux entreprises de pêche. La décision de rouvrir les inscriptions pour des navires retardataires a été prise afin de faire bénéficier de cet accompagnement financier un maximum de navires.

c) La participation à l’amélioration des connaissances sur les stocks halieutiques

Il s’agit notamment pour FFP d’encourager la participation des professionnels à des programmes scientifiques, d’allouer des bourses pour la réalisation de thèses et de post-doctorats jugés prioritaires par la filière. Plusieurs conventions de partenariat avec des instituts scientifiques tels qu’IFREMER ou Agrocampus sont envisagées. Le budget consacré à ces initiatives s’élève à 1 M€.

C.— UNE DYNAMIQUE À ENTRETENIR

France Filière Pêche n’a pas vocation à se substituer à des crédits publics nationaux et/ou communautaires, ni à honorer à la place de l’État des engagements pris, par exemple, envers les producteurs. Il convient de souligner qu’aucune autorité publique ne participe aux réunions de FFP et que sa gouvernance est exclusivement privée. Elle s’apparente en cela à une sorte de fondation à l’image de structures similaires existant en Belgique et aux Pays-Bas.

FFP n’intervient pas en matière de réglementation de l’activité de pêche maritime professionnelle (par exemple lobbying, adoption de réglementations professionnelles). C’est le rôle par excellence des organisations de producteurs (OP) et du comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM). FFP n’a pas non plus pris formellement position sur la réforme de la politique commune des pêches. Toutefois, sur des points particuliers, il a pu être décidé, en conseil d’administration, que France Filière Pêche relaie les difficultés rencontrées par la filière afin de faire écho aux actions et messages des différentes familles professionnelles concernées.

En ce qui concerne les actions en 2013, il s’agira pour FFP d’asseoir la notoriété de la marque vis-à-vis du consommateur et vis-à-vis des opérateurs de la filière. Les actions amont seront reconduites mais pas nécessairement sur les mêmes thématiques.

Pour votre rapporteure, le premier point positif à porter au crédit de FFP est d’avoir créé un lieu d’échange et de concertation pour l’ensemble des intervenants de la filière, même si l’on peut regretter que les criées n’y soient pas représentées en tant que telles et que les poissonniers indépendants soient trop éparpillés.

Les attentes des différents maillons sont fortes et bien identifiées, elles portent sur la formation des équipages sur la qualité des produits, l’amélioration de la connaissance de la ressource et la capacité à apporter une réponse experte aux allégations des organisations environnementales, la valorisation des produits de la pêche et de leur diversité, l’harmonisation et la normalisation des criées, la diminution des coûts de transport, la fidélisation d’une marque, le renouvellement de la clientèle pour aller vers un public plus jeune, la valorisation, à terme, de l’étiquetage des conserves en lien avec la visibilité nouvelle de la pêche française et la réalisation d’actions de nature interprofessionnelles ambitieuses pour une pêche durable et plus sélective.

Des points réguliers avec les pouvoirs publics sont organisés permettant de fluidifier la circulation des informations. La cohérence des interventions publiques et privées en faveur du secteur pourrait être recherchée par la mise en place d’un véritable plan stratégique ambitieux et concerté pour la pêche. Cette nouvelle architecture n’en est qu’à ses premiers pas et il est nécessaire d’observer dans le temps les effets sur la structuration et la compétitivité de la filière. Il est clair que l’originalité de l’association à caractère interprofessionnelle qu’est FFP et la liberté qui l’accompagne en matière d’indication de l’origine des produits peut susciter quelque intérêt au sein d’autres filières qui sont à l’heure actuelle fortement contraintes par la réglementation européenne. Pour son ambition et son originalité, l’initiative France Filière Pêche mérite incontestablement d’être saluée.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— AUDITION DE M. FRÉDÉRIC CUVILLIER, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DE LA MINISTRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ÉNERGIE, CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA MER ET DE LA PÊCHE.

Lors de sa réunion du 30 octobre 2012, la Commission a auditionné M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. le président François Brottes. Mes chers collègues, nous recevons aujourd'hui M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les crédits du programme 205 consacrés à la pêche et à l’aquaculture de la Mission « Écologie, développement et aménagements durables ».

Je laisse tout d’abord la parole à Mme Annick Le Loch, rapporteure pour avis sur les crédits de la pêche et de l’aquaculture du programme 205 : « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture ».

Mme Annick Le Loch, rapporteure pour avis sur les crédits de la pêche et de l’aquaculture du programme 205 : « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à saluer le regroupement de l'ensemble des questions relatives à la mer au sein d'un même portefeuille ministériel. Ce regroupement me semble être un gage de cohérence de l'action publique en ce domaine, et la conduite de ces questions par un « homme de la mer », la traduction d'une ambition réelle du Gouvernement en faveur de l'économie maritime.

Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit malgré tout, pour les crédits de l'action 6 consacrée à la gestion durable des pêches et de l'aquaculture au sein du programme 205 de la mission « écologie, développement et aménagement durables », une baisse de 7 % pour les autorisations d'engagement et de 10 % pour les crédits de paiement en regard des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2012. Cette évolution s'explique par le retour à un budget désormais stabilisé après l'extinction des crédits alloués temporairement au titre du plan pour une pêche durable et responsable – PPDR –, dit plan Barnier. L'importance du secteur économique de la pêche et de l'aquaculture ne se résume évidemment pas à son enveloppe budgétaire de 52 millions d'euros – c’est très peu par rapport à l’enveloppe de l’agriculture, par exemple –, mais découle bien davantage de l'activité de toute une filière, du pêcheur au distributeur et au commerçant en passant par les armateurs, le mareyage, les criées et les transformateurs. Il serait d'ailleurs utile de disposer d'une vision consolidée des efforts publics en faveur de la pêche et de l'aquaculture, recensant les crédits des différentes missions, les aides fiscales ainsi que les crédits européens dont bénéficie le secteur.

Les réformes de la politique commune de la pêche – PCP – et de l'organisation commune de pêche – OCM – constituent la toile de fond de ces crédits en faveur de la pêche. Au-delà de cet exercice budgétaire, c'est l'organisation même de la pêche pour les dix prochaines années qui se décide actuellement au niveau européen. Je tiens d'ailleurs à souligner les évolutions positives qui sont intervenues entre la rédaction du Livre vert et les projets actuels. Ces évolutions sont largement dues à la position ferme et unitaire des responsables français dans ce dossier. L'abandon de l'idée de quotas individuels transférables par navire en est la meilleure illustration. Les crédits alloués au secteur de la pêche et de l'aquaculture répondent aux objectifs de la PCP, soit que les crédits de l'État viennent en contrepartie de l'Union européenne – Fonds européen pour la pêche –, soit que l'Union européenne participe aux dépenses engagées par l'État pour la mise en œuvre de certains règlements – contrôle des pêches –, soit au cas par cas par le biais de la validation des aides d'État notifiées à la Commission européenne.

Comme chaque année, on constate que trois dispositifs concentrent près de la moitié des crédits nationaux en faveur de la pêche : les plans de sortie de flotte – PSF – pour 7 millions d'euros ; les contrats bleus pour 10 millions ; la participation de l’État aux caisses de chômage pour intempéries et avaries gérées par le Comité national des pêches maritimes et élevages marins – CNPMEM –, pour un montant équivalent à celui des marins pêcheurs cotisants, soit 6,84 millions d'euros, comme en 2012 et en 2011.

Parmi les autres postes budgétaires importants pour la filière, il importe de souligner l'effort consenti en matière de suivi statistique et scientifique ainsi que le soutien aux organismes scientifiques spécialisés. J’appelle toutefois votre attention, monsieur le ministre, sur le risque de pénurie d’ingénieurs halieutes. Leurs travaux ne sont sans doute pas suffisamment valorisés, notamment au sein d’IFREMER, alors que la filière pêche a besoin d'une expertise pointue et réactive pour répondre à certaines assertions des organisations environnementales comme d’ailleurs à celles de la Commission européenne elle-même, hier sur le thon rouge, aujourd'hui sur la pêche en eau profonde.

Je souhaite vous interroger plus précisément sur quatre points.

Le Fonds européen pour la pêche – FEP –, qui a permis au secteur des pêches maritimes de bénéficier d'un important accompagnement financier de l'Union européenne, sera remplacé en 2014 par un nouveau fonds doté de 6,5 milliards d'euros, le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche – FEAMP. Outre que les missions de ce fonds sont élargies aux affaires maritimes et aux accords internationaux de partenariat pour la pêche, plusieurs États se sont déclarés défavorables au maintien des aides à l'ajustement des capacités de la flotte et à la modernisation des navires. Pouvez-vous nous indiquer les initiatives de la France en la matière ?

L'effort financier de l'État en direction des contrats bleus – 10 millions d'euros annuels –, illustre la volonté politique de les pérenniser, tant ces contrats bleus symbolisent l'engagement des adhérents des structures collectives porteuses à pratiquer une pêche responsable et de qualité. La coopérative bretonne Ar Mor Glaz, après l'opposition initiale de la Commission européenne, semble être désormais reconnue pour les prestations halio-environnementales qu'elle assure. En revanche, vous connaissez les difficultés du Fonds pour le développement durable de la pêche – F2DP – à la suite des demandes de remboursements d'aides formulées par l'Europe dans le cadre des contrats bleus. Selon vous, quelles sont les perspectives de parvenir, dans ce dossier, à une issue favorable ?

L'Inspection générale des finances devait rendre le mois dernier un rapport sur l'évolution de la répartition des quotas de pêche. Quels enseignements tirer de ce rapport ? Est-il disponible ?

L'aquaculture marine n'a pas encore l'importance qu'elle pourrait avoir dans notre pays, notamment en raison de nombreux conflits d'usage. Quel est l'état d'avancement des schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine créés par l'article 85 de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche – LMAP – ?

Je terminerai mon intervention en revenant brièvement sur l'association France Filière Pêche, à laquelle je consacrerai un développement plus important dans le rapport. Dans une période économique difficile, je salue la création et l'action de cette association de nature interprofessionnelle qui a vocation à promouvoir les initiatives en faveur d'une pêche durable. Elle regroupe en effet quasiment tous les acteurs de la filière pêche, les producteurs, les acteurs du commerce et de la transformation, ainsi que les distributeurs. Elle bénéficie d'un financement important puisque les enseignes de la grande distribution ont accepté de contribuer à hauteur d'environ 30 millions d'euros par an sur une période de cinq ans, soit annuellement quasiment la moitié du montant de l'ancienne « taxe poisson », dont les pêcheurs ont d'ailleurs regretté de ne pouvoir déceler de retour profitable pour la filière. Lors des récentes auditions que j'ai conduites, j'ai pu mesurer l'espoir des parties prenantes à France Filière Pêche, tout comme le succès rencontré par le lancement récent de la première marque nationale des produits issus de la pêche fraîche française : « Pavillon France ». Grâce à une campagne publicitaire réussie et à un étiquetage spécifique sur les étals de la grande distribution et des poissonniers, c'est à la fois un métier, marin pêcheur, et un produit de qualité, le poisson frais, qui sont valorisés auprès des consommateurs et des restaurateurs.

Les aides aux navires qui s’engagent dans des démarches de réduction de la consommation de gazole ou de plus grande sélectivité des engins de pêche ont également rencontré un franc succès puisque plus de 1 500 bateaux sont concernés, sur les quelque 4 700 que compte la France métropolitaine. D’autres initiatives ont été prises pour soutenir la recherche scientifique dans les domaines des économies d'énergie, de la sélectivité et de l'évaluation des ressources halieutiques. Les interventions du ministère de la mer et de la pêche et celles de France Filière Pêche doivent être complémentaires pour permettre aux marins et aux autres acteurs de la filière de connaître des perspectives d'avenir satisfaisantes.

Pour toutes les raisons évoquées et en raison de la dynamique désormais engagée, je donne un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 205 consacrés à la pêche et à l'aquaculture.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie d’être venus si nombreux, témoignant ainsi de votre intérêt pour la pêche française, même si vous n’êtes pas tous des élus littoraux. Votre présence est un message de soutien adressé au Président de la République dans sa volonté d’engager la France sur la voie d’une politique maritime intégrée. La mer, ce n’est pas, pris isolément, la pêche ou la biodiversité ou le transport maritime ou les énergies marines renouvelables : la mer, c’est un tout. Une vision maritime intégrée nous permettra de définir des orientations, de donner un cap et de prévenir les conflits d’usages tout en nous intéressant aux modes de gouvernances, notamment à la structuration des services de l’État pour les rendre plus efficaces et plus lisibles. Un tel ministère de la mer et de la pêche est également précurseur au plan européen : la réunion informelle des ministres européens chargés des questions maritimes, au début du mois d’octobre à Limassol, a permis d’amplifier la démarche lancée par le président Barroso en 2007 autour de la logique de politique maritime intégrée – PMI –, dans laquelle est entrée au plan européen la Direction générale des affaires maritimes et de la pêche. Il est donc important pour la France d’être pionnière en la matière. La constitution d’un ministère des transports, de la mer et de la pêche au sein du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie donne toute sa dimension à la vision maritime intégrée. Je suis heureux que la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture – DPMA – ait rejoint le ministère de la mer et de la pêche : l’enjeu de l’économie maritime s’en trouve conforté.

La pêche a généré en 2010 plus d'1 milliard d'euros de chiffre d’affaires et plus de 90 000 emplois directs et induits. L'aquaculture, qui regroupe la conchyliculture, la pisciculture et l'algoculture, ne doit pas être laissée de côté : son chiffre d'affaire de 680 millions d'euros parle de lui-même. Ce secteur est à valoriser et la France doit en devenir un acteur majeur, alors même que 80 % des produits de la mer que nous consommons sont importés, ce qui est un paradoxe pour un pays, le nôtre, qui possède le deuxième domaine maritime mondial.

Le contexte actuel du secteur de la pêche est difficile, car il est marqué notamment par la variation continue et structurelle des prix du carburant. Cela n’en rend que plus important les crédits alloués à la question énergétique et à l’aide à la motorisation, en vue de diminuer la consommation de carburant. Sur ce point, nous devons éviter les erreurs du passé, notamment la mise en place d'aides pour le gazole qui se sont révélées illégales, que nos pêcheurs sont aujourd'hui dans l’obligation de rembourser.

Le contexte actuel est celui de la négociation sur la réforme de la politique commune de la pêche, dans toutes ses composantes. Les propositions de la Commission européenne étaient, à mon entrée en fonction, très en retrait par rapport à nos objectifs. J’ai dû mener, notamment le 12 juin dernier, un vrai combat pour éviter des décisions préjudiciables à la pêche française, dont les caractéristiques ne sont pas les mêmes que celles de ses partenaires. Elle repose en effet sur différentes catégories de navires et de pratiques, ce qui n’est pas le cas d’autres pays européens, qui pratiquent une pêche artisanale plus homogène ou, au contraire, se livrent à une pêche industrielle, voire minotière, dont les captures massives sont transformées en farine : cette pêche n’est respectueuse ni de l’environnement ni de la biodiversité. J’aurai l’occasion d’y revenir lors des prochaines négociations sur les totaux acceptables de captures – TAC – et les quotas.

La semaine dernière, j’ai participé aux négociations relatives au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche – FEAMP –, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2014. Ces négociations sont très importantes car elles conditionneront l’ensemble des dispositifs d’aides jusqu’en 2020. Je me suis également rapproché, dans une démarche assez nouvelle, des parlementaires européens. Il s’agit en effet d’un cas de codécision du Parlement européen et du Conseil de l’Union et nous devons les sensibiliser à la démarche de la France. J’espère que le Parlement européen, dont je suivrai de près les travaux, améliorera encore le texte.

Le résultat de la dernière négociation est positif et équilibré. Nous sommes parvenus à un bon compromis qui maintient, contrairement à la proposition initiale de la Commission, les aides à la flotte et à la pêche, notamment à la motorisation des navires. En revanche, les aides au renouvellement de la flotte ont été refusées par la Commission et le Conseil des ministres. Ces aides à la modernisation sont capitales pour, à capacité de pêche constante, garantir une meilleure hygiène, assurer la sécurité et adapter les moteurs.

La commissaire européenne chargée de la pêche, Mme Maria Damanaki, a par ailleurs repris la demande française de mise en place d’aides à l’installation des jeunes pêcheurs. C’est un dispositif innovant. De plus, nous avons obtenu le maintien des aides aux arrêts temporaires qui permettent aux pêcheurs de passer des périodes difficiles d’interdictions de pêche pour urgence sanitaire ou reconstitution des stocks – je pense notamment au cabillaud, à l’anchois ou au requin taupe. Ces aides étaient limitées à la Méditerranée. J’ai obtenu, au terme d’un combat difficile, leur généralisation à toutes les façades maritimes.

Le soutien à l’aquaculture durable est une autre avancée significative. J’ai relancé l’ensemble des préfets littoraux pour que soient élaborés avant la fin de l’année les schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine. Il s’agit de promouvoir une aquaculture non pas intensive mais durable pour laquelle nous devons développer des capacités nouvelles et qui entre dans une logique de complémentarité avec les autres activités. Le dossier, pour lequel les services de l’État n’avaient pas, jusque-là, fait preuve d’un grand enthousiasme, accusait un retard certain lorsque je l’ai repris.

La reconnaissance des outre-mer est également très importante. Le 12 juin dernier nous étions parvenus à arracher la création d'un conseil consultatif des régions ultrapériphériques – RUP –, qui sera subdivisé en trois sous-conseils, pour tenir compte des différences entre les bassins maritimes ultrapériphériques, ce qui nous a permis d’obtenir l’extension du régime de compensation des surcoûts – POSEI ou Programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité Pêche – à toutes les RUP françaises. Les Espagnols et les Portugais en bénéficiaient contrairement aux Français. Cette extension est importante, notamment pour Mayotte. M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, est très heureux de cette avancée, qui permet d’obtenir un traitement particulier des capacités de pêche des outre-mer, qui représentent quelque 35 % des navires français, ce qui nous fait échapper à une accusation de surcapacité.

Nous espérons que la France sera mieux servie par le FEAMP que par le FEP, dans le cadre duquel elle ne recevait, comme la Roumanie, que 216 millions d’euros, soit 4 % de l’enveloppe. Nous demandons un rééquilibrage afin d’accompagner de futurs cofinancements publics.

La flotte doit s'adapter à l’évolution de la ressource et à la hausse du coût du carburant afin de maintenir sa compétitivité. Cela passe par la mobilisation des crédits du FEP, puis du FEAMP, les aides à l'investissement et le soutien de projets innovants. Dans une démarche plus prospective et de long terme, un projet de « navire de pêche du futur », intégré dans le cadre des Investissements d'avenir, devrait favoriser la diffusion de concepts innovants en matière d'économies d'énergie, de sécurité des hommes, ainsi que de sélectivité et de qualité des produits. Parfois, la sortie de flotte est malheureusement nécessaire sur certains segments en surcapacité. Les façades maritimes ne sont pas toutes concernées de manière identique. La Bretagne a déjà connu beaucoup de sorties de flotte. Il faut également poursuivre l'amélioration de la structuration de la filière.

Nous devons maintenir les actions collectives, comme les contrats bleus, qui encouragent les pratiques de pêche respectueuses de la ressource et qui permettent de compenser les manques à gagner. Les contrats bleus seront maintenus à la hauteur de 2012, soit 12,5 millions d’euros – 10 millions d’euros de crédits complétés par 2,5 millions en provenance du FEP. Le FEAMP prévoit des dispositifs équivalents à partir de 2014.

Vous avez eu raison, madame la rapporteure pour avis, de souligner l’intérêt de France Filière Pêche : 30 millions par an pendant cinq ans ne représentent assurément qu’une partie de la taxe poisson, mais comme celle-ci était illégale, il est nécessaire d’adopter une stratégie de complémentarité des aides publiques et privées. France Filière Pêche, de par sa structuration même, ne pourra pas tomber sous le coup de la réglementation européenne : elle ne saurait, en effet, être accusée de dissimuler des aides d’État illégales.

Le budget de la pêche est également mobilisé pour le financement des actions de collectes de données et de contrôle des pêches, dans un contexte d'accroissement de la charge des obligations communautaires dans ces domaines. J’ai demandé au Président-directeur général de l'IFREMER, M. Jean-Yves Perrot, de mobiliser les moyens nécessaires au secteur de la pêche, y compris en termes de matière grise. Si nous ne pouvons pas présenter des analyses scientifiques satisfaisantes, notamment de l’état des stocks, nous permettant d’engager les négociations dans des conditions favorables, la Commission européenne ou le Conseil des ministres adopteront une démarche prudentielle. C’est un enjeu d’économie maritime auquel d’autres pays sont mieux préparés que nous.

Comme vous l’avez rappelé, le budget est mécaniquement diminué des moyens exceptionnels déployés dans le cadre du plan pour une pêche durable et responsable, ainsi que des crédits nécessaires à l’équipement des navires en journaux de bord électroniques, compte tenu des réalisations de 2011 et de 2012. Ces journaux permettent de relever l’activité des marins.

Comme vous l’avez également rappelé, 6 millions vont au suivi statistique et scientifique, 6,1 millions au contrôle des pêches, 7 millions à l’adaptation de la flotte de pêche, en complément des aides européennes, sans oublier 21,5 millions d’actions économiques cofinancées par le FEP et 6,8 millions au titre des caisses de chômage intempéries et avaries.

Nous venons de recevoir le rapport sur les quotas de pêche, un document de quelque 500 pages en cours d’analyse par les différentes directions du ministère, qui ne manqueront pas de vous en faire parvenir une synthèse. Vous devez d’ores et déjà savoir que les négociations, à la fin de l’année, sur les quotas seront très dures, compte tenu des propositions de la Commission concernant notamment le golfe de Gascogne. Nous bataillerons.

S’agissant du F2DP, je tiens à vous rappeler que j’ai trouvé une situation déplorable. Les négociations ont été très dures pour obtenir le déblocage des contrats bleus postérieurs à 2009. Cet après-midi des rencontres étaient encore prévues à ce sujet.

M. Daniel Fasquelle. Je tiens à saluer votre action, monsieur le ministre, car elle s’inscrit dans un contexte difficile. Je ne doute ni de votre détermination à défendre les intérêts des marins pêcheurs ni de votre force de persuasion.

Mes inquiétudes portent notamment sur l’emploi le long des littoraux, qui pourrait souffrir du résultat des négociations qui s’ouvriront bientôt sur les quotas – je pense surtout au cabillaud et au maquereau – et sur les mesures techniques. J’ai une pensée pour les marins pêcheurs boulonnais de la coopérative maritime étaploise. Je tiens également à évoquer les négociations sur la future politique commune de la pêche, le rendement maximum durable – celui-ci concernera-t-il toutes les espèces ? –, la question des rejets, qui préoccupe les marins pêcheurs car elle touche à l’équilibre de leur activité économique, ou encore les concessions de pêche transférables. Ne pourrait-on pas profiter de ces négociations sur la PCP pour régler certains conflits avec nos voisins, notamment hollandais, qui viennent, avec la méthode de la senne danoise, vider les mers où les marins français ont l’habitude de pêcher ? Quelques navires suffiront demain à remplacer la pêche artisanale qui mobilise aujourd'hui un grand nombre de bateaux et de marins. C’est un véritable enjeu.

Je sais, monsieur le ministre, que vous vous êtes déjà battu sur la question des aides à la construction de navires neufs : il faut y revenir. Vous aurez notre soutien. On ne peut pas continuer de retaper les vieux bateaux. J’ai rendu un rapport sur le sujet à la demande du Premier ministre François Fillon, ce qui m’a permis de visiter presque tous les ports de pêche de France. Notre flotte vieillit : elle a entre vingt et vingt-cinq ans d’âge. Moderniser les navires ne suffit plus. Si on n’en construit pas de nouveaux, on court à la catastrophe. La Commission européenne se trompe en refusant le renouvellement de la flotte de pêche sous le prétexte que des bateaux neufs augmenteraient la capacité de pêche. C’est le contraire qui se produit : comme les vieux navires dépensent beaucoup de carburants, les patrons doivent intensifier la pêche pour équilibrer leurs comptes. C’est en empêchant la construction de nouveaux navires qu’on favorise la surpêche, sans oublier les conséquences en termes de sécurité et de conditions de vie à bord.

Je suis assurément très heureux du lancement récent du label « Pavillon France ». Quelles autres actions est-il possible de mener afin de favoriser la valorisation des produits, qui participe également de l’équilibre économique des entreprises ? Des navires neufs, des produits valorisés et des quotas légèrement desserrés permettraient de redonner un véritable avenir à la pêche française et européenne. Il faut défendre la pêche artisanale pour éviter le regroupement des capitaux entre quelques mains. Sinon, la pêche ne sera plus pratiquée que par quelques gros navires employant du personnel non européen. Telles seront les dérives auxquelles nous assisterons demain si la PCP n’affirme pas avec force la nécessité de conserver un grand nombre de navires et de marins pêcheurs : la vie de nos littoraux est en jeu.

Une dernière remarque : le ministère de la mer est désormais détaché du ministère de l’agriculture. Cette évolution, vous nous l’avez assuré, est voulue par l’Union européenne. Personnellement, je n’y suis pas opposé. Toutefois, il faut prendre garde à ne pas rompre la synergie avec l’agriculture, s’agissant notamment de l’alimentation. En revanche, profitez de la proximité de votre ministère avec celui de l’écologie pour éviter la multiplication des éoliennes en mer, surtout lorsque leur implantation, affectant des zones de pêche, altère l’activité des marins pêcheurs. Ils comptent sur votre soutien lorsqu’ils s’opposent à certains projets d’implantation devant les côtes françaises.

M. Frédéric Roig. Monsieur le ministre, promouvoir la sécurité maritime, la sûreté, la protection de l’environnement et la pêche est un enjeu essentiel pour le deuxième domaine maritime mondial qu’est la France. Nous nous réjouissons de ce que le projet de loi de finances pour 2013 consacre 194,3 millions d’euros à la politique maritime.

Le champ que couvrent ces crédits ayant été élargi, le changement budgétaire donne une réelle dynamique à l’activité maritime française et souligne la forte préoccupation du Gouvernement en direction d’une pêche et d’une aquaculture responsables. Il faut effectivement favoriser une exploitation durable des ressources aquatiques afin d’accompagner efficacement l’ensemble de la filière. Avec une zone économique exclusive de 10 millions de kilomètres carrés, la France doit jouer un rôle important dans ce domaine.

En 2011, elle se situait au quatrième rang communautaire en termes de volume de captures de poissons, crustacés, mollusques et algues. Le total des ventes de la pêche maritime représente autour d’1 milliard d’euros. Aussi, ce programme 205, rebaptisé « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture », sera-t-il consacré à une mise en œuvre dynamique du défi maritime français porté par le Gouvernement.

Les principaux efforts s’articuleront autour de la sécurité et des affaires maritimes dont les crédits s’élèvent à 142,3 millions d’euros – ils n’entrent pas dans le champ de notre présent examen pour avis.

Concernant la pêche et l’aquaculture dont les crédits atteignent 52 millions d’euros, l’objectif est d’améliorer la compétitivité des entreprises de ces filières, dans le respect de l’environnement. Le Fonds européen pour la pêche soutiendra la plupart des opérations, telles que la modernisation des ports de pêche, la restructuration de la flotte, la valorisation et la promotion des produits. Les financements européens s’élèveront à 19,5 millions d’euros en 2013.

Il est également important d’évoquer les « contrats bleus », démarche innovante permettant de soutenir financièrement les pêcheurs qui mettent en œuvre des pratiques responsables comme le respect de l’environnement marin et de la ressource halieutique, s’engagent dans le ramassage des déchets ou participent à la collecte de données en mer au profit d’organismes scientifiques. Mobiliser et sensibiliser les acteurs de la pêche et de l’aquaculture aux problématiques environnementales permettra de préserver durablement notre puissance maritime : 10 millions d’euros sont prévus en 2013 pour ces actions. Élu dans une circonscription où la conchyliculture et la pêche, notamment du thon rouge, sont des enjeux économiques importants, il est à mes yeux nécessaire de rappeler le rôle important en termes d’équilibre joué par l’ensemble des métiers de la pêche et par les prud’homies sur les lagunes littorales.

En dépit des avancées réalisées, il est nécessaire d’aborder la situation de la politique commune de la pêche. Le rapport d’information sur le projet de budget pour 2013 de l’Union européenne présenté par Mme Estelle Grelier et par M. Marc Laffineur fait état d’une baisse des crédits destinés à la politique commune de la pêche – ils s’élèveront désormais à 257 millions d’euros –, baisse qui soulève de légitimes interrogations. Toutefois, il est important de rappeler, comme vous l’avez signalé, que cette baisse est susceptible d’être actualisée à l’automne dans le cadre de la lettre rectificative du projet de budget pour 2013.

La pêche et l’aquaculture contribuent de façon déterminante à l’économie de notre pays. Le poisson et les produits de la pêche font partie des denrées alimentaires de base les plus échangées dans le monde. Ce secteur joue un rôle essentiel dans la sécurité alimentaire.

En Méditerranée, quelque 1 500 navires de pêche sont actifs, représentant plus de 3 000 emplois. L’aquaculture, qui connaît dans l’Hérault un fort dynamisme, exerce un attrait considérable.

Promouvoir la pêche et l’aquaculture durables encouragera une gestion plus avisée de notre écosystème. C’est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe socialiste, républicain et citoyen émet un avis favorable au programme 205, dont les efforts, fixés par le Président de la République et le Gouvernement, favoriseront une bonne gouvernance au service de la pêche et de l’aquaculture.

Mme Brigitte Allain. Monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur la lutte contre la surpêche, afin de permettre le renouvellement des stocks prévu à l’horizon 2020. L’État doit privilégier des objectifs à long terme plutôt que chercher des gains économiques à court terme. La protection environnementale doit être la condition préalable, puisque c’est elle qui rendra la politique de la pêche durable.

Des quantités innombrables de poissons sont rejetées à la mer : quelles mesures envisagez-vous de prendre pour mettre un terme à ce gaspillage ? Il conviendrait d’édicter des règles de contrôle claires et précises rendant la surpêche illégale.

Par ailleurs, les deniers publics doivent aider à la reconversion des flottes de pêche. Il faudrait également favoriser des engins de pêche sélective permettant de rompre avec les pratiques de pêche destructives.

Il est en outre nécessaire de donner un accès prioritaire aux bateaux qui ont un moindre impact environnemental et qui sont créateurs d’emplois. Il faudrait à cette fin ne plus fixer les quotas de pêche en fonction de ceux des années précédentes, car cette pratique contribue à la surpêche.

Il convient également d’édicter de nouvelles règles au profit de la conchyliculture et de l’ostréiculture, qui subissent une crise sanitaire et qui doivent être aidées. IFREMER devrait consacrer des crédits à enquêter en amont sur la qualité des eaux qui se déversent dans la mer.

Il faut enfin favoriser une formation qualitative aux métiers de la pêche.

Pêcher de manière responsable est une nécessité tant européenne que mondiale. Les mêmes règles favorisant une pêche durable devraient s’appliquer sur toutes les mers, chacun se devant de les respecter, même s’il se trouve loin de ses côtes.

M. Philippe Le Ray. Monsieur le ministre, s’agissant de la pêche et des cultures marines, nous sommes dans une logique d’union sacrée.

Le nombre des bateaux de pêche côtière diminue, notamment dans le sud de la Bretagne, tandis que leur âge moyen augmente : comment comptez-vous enrayer ce phénomène ?

Peut-on imaginer un plan de sauvetage de l’ostréiculture, notamment dans le Morbihan ?

Pourriez-vous enfin nous rassurer sur la pêche à la civelle ?

Mme Pascale Got. La conchyliculture connaît, notamment sur le bassin d’Arcachon et l’estuaire de la Gironde, une grosse mortalité des naissains, qui menace les bassins d’emplois vivant de cette activité. Les rives charentaises, voire la Bretagne sont touchées par le même phénomène. C’est pourquoi les acteurs du Médoc ont lancé avec les scientifiques des protocoles expérimentaux, visant notamment à capturer des naissains dans l’estuaire de la Gironde pour relancer la production d’huîtres dans l’estuaire, qui avait été arrêtée en raison de la pollution au cadmium des eaux. Ces acteurs ont toutefois besoin de l’appui du ministère de la mer et de la pêche et d’Agrimer pour mener à bien ces protocoles, qui visent à sauver une filière en grande difficulté et à redonner des débouchés à l’estuaire médocain qui vivait auparavant de cette activité. Financer la recherche pour sauver l’ostréiculture girondine est une nécessité. Les professionnels du secteur sont d’ailleurs heureux que la pêche et l’aquaculture soient désormais traitées au sein d’un même ministère.

M. Hervé Pellois. La création de France Filière Pêche est évidemment une bonne nouvelle, d’autant que nous importons deux tiers de notre consommation de poisson frais. Il est toutefois regrettable que le comité national des pêches maritimes et des élevages marins ne participe pas à cette filière. De plus, est-il heureux que celle-ci dépende désormais de la grande distribution ?

Enfin, les ostréiculteurs s’inquiètent de l’augmentation de la mortalité touchant les huîtres âgées de dix-huit à vingt-quatre mois.

M. Patrick Lebreton. Nos collègues sénateurs ultramarins vous ont fait part, en juillet dernier, de leur souhait de voir la politique commune de la pêche s’adapter aux réalités ultramarines. Je vous remercie de cette avancée, qui doit être vécue comme une première étape. Si la France s’enorgueillit à juste titre d’être le deuxième domaine public maritime mondial, elle ne doit pas oublier qu’elle le doit aux zones maritimes entourant ses territoires ultramarins.

Sur le plan économique, la problématique de la pêche outre-mer, notamment dans l’Océan indien, est à l’inverse de celle de la pêche dans les eaux européennes. En effet, les ressources ultramarines sont abondantes mais les capacités de pêche modestes. Le potentiel est encore trop peu exploité : il est nécessaire de développer l’économie de la pêche notamment à La Réunion et à Mayotte.

Le développement de la pêche ne saurait non plus être négligé sur le plan social, alors même que les niches de croissance sont rares. En tant que maire de la commune la plus australe de l’Union européenne, je regrette de n’avoir pu faire aboutir le projet de construction d’un port.

Mme Marie-Lou Marcel. Monsieur le ministre, M. Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'alimentation, a mis en garde contre la ruée sur l’or bleu. Il préconise une division par deux de la capacité de la flotte mondiale. Elle serait en effet deux fois plus importante que nécessaire pour une exploitation durable des océans. Il faudrait selon lui encourager les efforts de réduction des flottes et diminuer les subventions qui favorisent la surcapacité, via les aides aux carburants ou à la construction de nouveaux navires. Plus les stocks se réduisent, plus on pêche en eau profonde, ce qui ne fait qu’aggraver le problème.

À ses yeux, le développement de l’aquaculture permettrait de limiter la surpêche tout en répondant à la demande de poissons. Il préconise l’élevage par les pays occidentaux du hareng et de la sardine, au détriment du saumon et du thon.

Monsieur le ministre, partagez-vous ce diagnostic ? Si oui, quelles solutions préconisez-vous ?

Monsieur le président François Brottes. Monsieur le ministre, la Cour des comptes serait-elle devenue un service intégré de la Commission européenne ? On serait tenté de le croire en lisant les critiques relatives au contrôle des points de débarquement dont elle a pensé relever les insuffisances dans un rapport.

Par ailleurs, la production d’énergie maritime ou éolienne en mer recèle des potentiels considérables : comment faire cohabiter de manière équilibrée ces activités à vocation durable avec la pêche ?

M. le ministre. Monsieur Fasquelle, le renouvellement de la flotte est un combat commun – je l’ai évoqué au cours du Conseil des ministres de la pêche. Il faut toutefois être lucide : le rapport de forces au sein du Conseil européen ne nous est pas favorable. Peu de pays soutiennent le renouvellement des flottes de pêche, si bien que nous ne réussissons pas à enclencher une politique en ce sens. Au cours de plusieurs conversations bilatérales, j’ai tenté de convaincre Mme Marina Damanaki que notre objectif n’était pas, avec le renouvellement des flottes, d’augmenter nos capacités de pêche, fixées par quotas, mais au contraire de diminuer l’impact écologique de la pêche, notamment en matière de consommation de carburants. C’est pourquoi la motorisation a été incluse dans les aides à la modernisation, mais le Conseil a refusé d’aller plus loin, notamment en acceptant des aides à la modernisation des coques. « Moins pêcher pour mieux pêcher », tel a été mon slogan tout au long des négociations. Je n’ai malheureusement pas été suivi. L’âge moyen des bateaux français, notamment bretons, est préoccupant, je vous l’accorde bien volontiers, monsieur Fasquelle, d’autant que la mobilisation bancaire en direction du secteur de la pêche se révèle toujours difficile.

Monsieur Roig, je vous remercie du soutien apporté par le groupe socialiste, républicain et citoyen au programme 205.

S’agissant du thon rouge, la redistribution des quotas a permis à la petite pêche de recouvrer des droits supplémentaires, grâce à une meilleure répartition des autorisations de pêche. Il faut cependant que les grandes flottes évitent tout contournement des quotas en pratiquant une pêche vertueuse, sans quoi nous nous retrouverions dans une position inconfortable vis-à-vis de la Commission européenne. Chacun doit mesurer ses responsabilités.

Madame Allain, seuls des éléments objectifs permettent de prouver la surpêche. Or les analyses scientifiques sont encore incomplètes du fait que nous ne connaissions encore qu’une partie des stocks. Elles révèlent toutefois une véritable amélioration de la situation : 52 % des stocks étaient pêchés durablement en 2012, contre seulement 27 % en 2010. Les stocks se reconstituent donc, grâce notamment à la démarche du rendement maximal durable. Les pêcheurs n’ont pas pour objectif de décimer les stocks, la surpêche d’aujourd'hui les privant de la pêche de demain. Chacun a pris conscience qu’il fallait mieux pêcher, protéger les espèces menacées et réguler le marché. Mieux coordonner les sorties de pêche à la demande est également nécessaire.

Le contrôle de la pêche est évidemment une priorité. J’ai répondu aux critiques, injustifiées à mes yeux, de la Cour des comptes sur le sujet, et Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, a tenu à cosigner la lettre. Le ministère de l’écologie et le ministère de la mer et de la pêche partagent donc le même diagnostic sur la qualité et l’intensité des contrôles exercés et la mobilisation des agents qui les effectuent – la Cour des comptes produit des chiffres erronés. Il convient de tenir compte des modes de pêche, de la structuration des façades littorales et de la réalité du patrimoine maritime. Les lieux de débarquement du poisson sont souvent de petits ports de pêche. L’administration doit-elle diligenter des contrôles dans chaque petit port, sous peine d’entrer dans une logique d’économie administrée ? J’aimerais aussi connaître les pratiques des autres pays européens : appliquent-ils les mêmes précautions au pied de la lettre ? Je le répète, le rapport de la Cour des comptes est injustement sévère à l’encontre de la Direction des affaires maritimes.

J’ajouterai qu’il n’existe pas de définition de la « petite pêche » : chaque pays la définit de manière différente. Pour la Commission européenne, la petite pêche s’achève aux bateaux de douze mètres, ce qui ne correspond pas à la définition de la pêche artisanale française, qui prend en compte le nombre de pêcheurs embarqués et l’embarquement du patron sur son propre navire. Cette terminologie est donc contraire aux intérêts de nos littoraux, de nos ports et de la réalité sociale et économique maritime française.

Les rejets sont assurément choquants. Toutefois, je n’ai pas obtenu de la Commission européenne la possibilité d’évaluer les rejets découlant d’une réglementation inadaptée. Lorsque les quotas sont atteints ou que les prises accessoires dépassent un certain pourcentage, le navire est dans l’obligation de rejeter. Il conviendrait d’ailleurs de connaître la réalité des rejets. De plus, les bateaux ne sont pas adaptés à l’interdiction de rejeter, laquelle poserait une question de sécurité. Enfin, pourquoi interdire les rejets s’il n’existe en aval aucune filière économique pour les absorber ? Or la Commission ne souhaite pas valoriser ces produits. Quelle serait dès lors la finalité de conserver les rejets ?

Les ostréiculteurs ont reçu en 2011 et en 2012 des aides et des indemnités. Toutefois, l’évolution du phénomène ne laisse d’inquiéter, en ce que la mortalité, comme vous l’avez rappelé, concerne désormais les huîtres adultes. IFREMER se penche sur la question, dont MM. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, et Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire, traitent les aspects sanitaires. L’aggravation de la situation ne sera pas sans poser des problèmes de pérennité des indemnisations.

Monsieur Pellois, le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins participe à France Filière Pêche. Il est assurément regrettable que la filière dépende désormais en partie de fonds privés, mais ceux-ci sont nécessaires à son développement du fait qu’ils se substituent à la taxe poisson. France Filière Pêche, qui doit demeurer en relation avec l’État, a l’obligation morale d’accompagner les dispositifs auxquels l’Europe interdit à l’État de participer.

Monsieur Lebreton, le Président de la République a, dès son arrivée, voulu que les outre-mer soient présents au sein de tous les ministères. Comment le ministère de la mer et de la pêche aurait-il pu ne pas répondre à la volonté du Président de la République et ignorer la spécificité des outre-mer ?

Mme Marcel, il est nécessaire de doter de moyens supplémentaires la recherche scientifique pour améliorer les connaissances en matière de stocks dégradés. Nous aurons évidemment besoin des études du Conseil international pour l'exploration de la mer – CIEM – sur la question de la pêche en eau profonde. Nous ne souhaitons pas toutefois utiliser le mot « surpêche », qui accrédite l’idée d’une atteinte volontaire aux stocks et d’une dégradation par l’activité de pêche, alors même que de nombreux stocks sont encore méconnus ou inconnus. Du reste, les quotas et le rendement maximal durable sont des instruments permettant d’éviter toute surpêche – il est inutile de vous rappeler le rendez-vous de 2020 en la matière.

Monsieur le président, j’ai rencontré M. Alain Coudray, président du comité local des pêches de Saint-Brieuc, lorsque je suis allé à Perros-Guirec. Les pêcheurs se sont convertis aux éoliennes en mer pour des raisons vertueuses, évidemment – relativiser les conflits d’usages –, mais aussi dans la perspective d’une démarche plus collective dans le traitement des retombées financières pouvant découler des énergies marines renouvelables. Il est indispensable d’aider les marins et de le faire sur des bases identiques pour chaque commune et chaque groupement.

De plus, l’impact des éoliennes sur la présence des poissons et la pratique de la pêche sera moins lourd demain. Il faut également se poser la question du respect des paysages ou celle de la sécurité maritime en évitant les a priori. Les mesures d’accompagnement doivent soutenir l’activité de pêche.

M. Daniel Fasquelle. J’avais déposé un amendement, rédigé en collaboration avec M. Pierre-Georges Dachicourt, alors président du Comité national des pêches, visant à dédommager les marins pêcheurs qui subiraient les conséquences de l’installation d’éoliennes en mer. Il faut savoir que leur impact dépend de l’endroit où elles sont installées. Les zones de pêche du détroit du Pas-de-Calais étant situées juste devant les côtes, du fait que les poissons se reproduisent dans les estuaires proches, les marins pêcheurs du Pas-de-Calais vont moins loin en mer que les marins pêcheurs bretons. Aussi craignent-ils davantage l’installation d’éoliennes face aux côtes.

Mme la rapporteure pour avis. Qu’en est-il du projet de sanctuariser au nom de la biodiversité certains secteurs maritimes du sud de l’Irlande et du sud-ouest de l’Angleterre, où vont traditionnellement pêcher les marins bretons ? Ils m’ont fait part de leur inquiétude à ce sujet.

Par ailleurs, des jeunes qui ont obtenu le brevet de capitaine 500 ou de capitaine 3 000 ne trouvent aucun embarquement pour valider leur diplôme, faute de quoi ils le perdront d’ici quelques années. Que faire pour les aider, alors même qu’ils sont concurrencés par l’embarquement de marins étrangers dont les rémunérations sont inférieures ?

M. le ministre. S’agissant du maquereau, l’Europe a adopté une position très ferme vis-à-vis de l’Islande, qui s’est octroyé unilatéralement une augmentation de 140 % de ses quotas, et de la Norvège. C’est un sujet de tension : c’est pourquoi la ministre norvégienne chargée de la pêche a souhaité me rencontrer.

Les zones marines de conservation – ou Marine Conservation Zones –, qui sont l’expression du réalisme britannique, nous préoccupent car elles répondent à une stratégie de sanctuarisation, même si elles ne sont pas nécessairement interdites à la pêche. L’approche doit être homogène afin que les pêcheurs français ne soient pas les seuls à faire l’objet de mesures d’interdiction.

Nous sommes, par ailleurs, d’autant plus sensibilisés par l’avenir des jeunes marins diplômés que nous souhaitons garantir l’attractivité des métiers de la pêche et de la mer. Il faut que le Conseil national des pêches fasse connaître les problématiques en jeu.

Enfin, la pêche à la civelle est un sujet compliqué et l’anguille est une espèce menacée. La civelle subit en quelque sorte une double peine puisqu’elle est pêchée aussi bien en eau douce qu’en mer. Il s’agit à la fois d’une pêche professionnelle et d’une pêche de loisir, comme le prix du kilo atteint 450 euros, on peut parler d’un loisir lucratif. Il faut également mettre un terme aux pratiques de pêche peu vertueuses. C’est pourquoi la ministre de l’écologie, Mme Delphine Batho, est favorable à une démarche très stricte. Des contrôles réalisés en eau douce ont permis de réaliser des progrès. J’ajoute que nous sommes parvenus il y a deux heures à peine à un accord équilibré portant sur 34 tonnes, soit un quota équivalent au niveau de pêche constaté en 2012.

Monsieur le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur le ministre.

II.— EXAMEN DES CRÉDITS

À l’issue de l’audition de M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, la Commission des affaires économiques examine, pour avis, les crédits du programme 205 consacrés à la pêche et à l’aquaculture de la Mission « Écologie, développement et aménagements durables ».

Monsieur le président François Brottes. Je rappelle que Mme la rapporteure pour avis a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 205 relatifs à la pêche et à l’aquaculture de la Mission « Écologie, développement et aménagements durable ».

La Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 205 relatifs à la pêche et à l’aquaculture de la Mission « Écologie, développement et aménagements durables ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Association des entreprises de produits alimentaires élaborés (ADEPALE)

M. Pierre Commère, délégué général industrie du poisson

Association nationale des organisations de producteurs (ANOP)

M. Antoine Dhellemmes, président

M. Julien Lamothe, secrétaire général

Carrefour

M. Marc Duret, directeur achat et marketing marée

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM)

M. Hubert Carré, directeur général

Mme Émilie Gélard, juriste

Confédération nationale des poissonniers écaillers de France (CNPEF)

Mme Catherine Serafim, vice-présidente

Coopération maritime

M. Philippe Mérabet, président

M. Jean-Loup Velut, secrétaire général

Fédération des entreprises, du commerce et de la distribution (FCD)

M. Mathieu Pecqueur, directeur agriculture et qualité

Fédération des organisations de producteurs de pêche artisanale (FEDOPA)

M. José Jouneau, président

Mme Julie Rigaud, secrétaire générale

France filière pêche

M. Gérard Higuinen, président

Mme Emmanuelle Sauvion, Déléguée générale

© Assemblée nationale

1 () n° 12/2011 intitulé « Les mesures prises par l’UE ont-elles contribué à l’adaptation de la capacité des flottes de pêche aux possibilités de pêche existantes ?».

2 () Commission de la pêche, document de travail sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche [abrogeant le règlement (CE) n° 1198/2006 du Conseil, le règlement (CE) n° 861/2006 du Conseil et le règlement (CE) du Conseil sur la politique maritime intégrée], 7 mai 2012.

3 () La coopérative Ar Mor Glaz, le Fonds pour le développement durable de la pêche (F2DP), la coopérative maritime étaploise, le Comité régional des pêches maritimes de Bretagne et la coopérative maritime Cap Horizon.

4 () Cf. article 60 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007.